17.412 Initiative parlementaire Égalité des chances dès la naissance Rapport de la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national du 13 février 2020

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification de la loi fédérale du 30 septembre 20111 sur l'encouragement des activités extrascolaires des enfants et des jeunes (loi sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse, LEEJ) ainsi qu'un projet d'arrêté fédéral concernant les aides financières pour des programmes cantonaux visant à développer la politique de la petite enfance, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter les projets d'acte ci-joints.

13 février 2020

Pour la commission: Le président, Mathias Reynard

1

RS 446.1

2020-0688

3497

Aperçu Le présent projet met en oeuvre l'initiative parlementaire 17.412 «Égalité des chances dès la naissance». La Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national propose un mécanisme de financement incitatif temporaire pour soutenir les cantons dans leurs efforts visant à développer une offre adaptée aux besoins de la population en matière de politique de la petite enfance et à encourager la coordination et la mise en réseau des acteurs publics et privés.

Depuis quelques années, la petite enfance fait l'objet d'un intérêt croissant de la part de différents acteurs. Nombre d'institutions publiques et privées se sont penchées sur la question de l'encouragement précoce, au point que la petite enfance commence à s'établir comme un champ politique à part entière. L'engagement de la Confédération en matière de politique de l'enfance et de la jeunesse se fonde sur la loi du 30 septembre 2011 sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse (LEEJ). Les aides financières prévues par cette loi sont principalement destinées à soutenir les enfants et les jeunes de l'âge d'entrée à l'école enfantine jusqu'à l'âge de 25 ans. Les mesures de la Confédération en faveur de la collaboration verticale et horizontale et le développement des compétences au sens des art. 18 à 21 LEEJ se réfèrent, quant à eux, à l'ensemble de la politique de l'enfance et de la jeunesse, y compris la petite enfance.

La commission souhaite donner des impulsions supplémentaires à la politique de la petite enfance. Elle propose donc de soutenir les cantons dans le développement et la mise en oeuvre de trains de mesures cohérents dans ce domaine. Le présent projet s'inspire du financement incitatif limité jusqu'à fin 2022 accordé aux cantons pour des programmes visant à constituer et à développer leur politique de l'enfance et de la jeunesse (art. 26 LEEJ). Il consiste en un financement incitatif limité à une durée de dix ans.

3498

FF 2020

Rapport 1

Historique

Le 13 mars 2017, le conseiller national Matthias Aebischer (PS, BE) a déposé l'initiative parlementaire 17.412 Égalité des chances dès la naissance». Le but de cette initiative est d'établir plus solidement la formation, l'accueil et l'éducation de la petite enfance (FAE-PE) dans la politique suisse en matière de formation et de contribuer ainsi à une égalité des chances effective au moment de l'entrée à l'école.

L'auteur du texte propose une modification de l'art. 4, let. a, de la loi du 30 septembre 2011 sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse2 (LEEJ) afin que le groupe cible de la loi ne comprenne plus uniquement les enfants et les jeunes à partir de l'entrée à l'école enfantine, mais tous les enfants et les jeunes dès la naissance.

En novembre 2017, la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national (CSEC-N) a entendu l'auteur de l'initiative parlementaire et a décidé, par 15 voix contre 10, de donner suite à cette dernière. Partageant l'avis de l'auteur concernant le rôle social et économique important de la FAE-PE pour l'égalité des chances entre les enfants, la majorité a souhaité examiner de manière approfondie le rôle que la Confédération pourrait jouer dans l'encouragement de la FAE-PE. Le 14 mars 2018, la CSEC du Conseil des Etats a examiné les arguments de la CSEC-N et décidé, par 6 voix contre 0 et 6 abstentions, d'approuver la décision de son homologue. La CSEC-N a ainsi reçu le mandat d'élaborer un projet de mise en oeuvre de l'objet de l'initiative.

Au début de ses travaux, la commission a entrepris de dresser un état des lieux des différents engagements de la Confédération dans le domaine de la politique de la petite enfance. Pour ce faire, elle s'est appuyée sur un inventaire réalisé par l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Elle a également décidé d'associer précocement les cantons à ses travaux, ceux-ci étant directement concernés par la mise en oeuvre de l'initiative. La consultation des cantons en novembre 2018 n'a toutefois pas permis d'identifier une voie claire et cohérente pour cette mise en oeuvre. La commission a alors examiné plusieurs variantes sur la base d'un état des lieux complet dressé par l'OFAS et a décidé de ne pas mettre en oeuvre l'initiative par une modification de l'art. 4, let. a, LEEJ, mais par un
soutien ponctuel à des projets de FAE-PE. De l'avis de la majorité de la commission, ce type de projets devrait être encouragé par le biais d'un financement incitatif limité dans le temps. La commission a pris pour modèle le soutien temporaire accordé actuellement à des programmes cantonaux dans le domaine de la politique de l'enfance et de la jeunesse sur la base de l'art. 26 LEEJ.

Dans la perspective de l'élaboration de ce projet, l'OFAS a présenté à la commission les travaux en cours lors d'une séance qui s'est tenue le 21 février 2019. La stratégie de mise en oeuvre prévue, c'est-à-dire l'encouragement ponctuel de projets de FAEPE par le soutien à des programmes cantonaux, avec ses variantes et ses implications, n'a pas convaincu la majorité de la commission. Cette dernière a surtout 2

RS 446.1

3499

FF 2020

pointé du doigt un problème de financement: cette stratégie obligerait soit à prévoir des fonds supplémentaires pour un financement incitatif, mais sans connaître le contenu précis des projets de FAE-PE ainsi financés, soit à privilégier une mise en oeuvre de l'initiative à coûts constants, ce qui se ferait sans doute au détriment du soutien accordé actuellement à des organisations qui proposent des activités dans le domaine de l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse. Aucune de ces deux variantes n'a convaincu la commission. Cette dernière a donc décidé, par 12 voix contre 10, de demander au Conseil national de classer l'initiative. Une minorité de la commission souhaitait néanmoins donner suite aux demandes formulées par l'initiative et a proposé de ne pas la classer.

Lors de sa séance du 11 avril 2019, qui a précédé le débat au Conseil national sur cette initiative, la commission est revenue sur sa décision. Ce revirement s'explique principalement par le bilan intermédiaire positif du Conseil fédéral concernant l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse par la Confédération. Ce bilan intermédiaire met notamment en évidence que le soutien ciblé apporté aux cantons a été extrêmement fécond. La commission a pris acte du fait que les cantons sont parvenus à développer considérablement leur politique de l'enfance et de la jeunesse, notamment grâce au financement incitatif octroyé sur la base de l'art. 26 LEEJ. Ce soutien financier accordé pour des programmes cantonaux est limité dans le temps et prendra fin en 2022. Sur la base de cette évaluation, la majorité de la commission a souhaité s'inspirer de ces expériences et soutenir les cantons de manière analogue dans le développement d'une politique de la petite enfance. La décision d'élaborer un projet correspondant a été prise par 14 voix contre 9.

Lors de sa séance du 16 août 2019, la commission a examiné l'avant-projet. Elle a décidé, par 15 voix contre 10, d'entrer en matière sur le projet; elle a approuvé l'avant-projet de loi tout comme l'avant-projet d'arrêté fédéral par 15 voix contre 10 lors du vote sur l'ensemble. Une minorité (Pieren, Bigler, Glauser, Gutjahr, Herzog, Keller Peter, Müri, Steinemann, Tuena, Wasserfallen Christian) a proposé de n'entrer en matière ni sur l'avant-projet de loi ni sur l'avant-projet d'arrêté
fédéral. Après avoir adopté le rapport explicatif, la commission a décidé de lancer une procédure de consultation.

La procédure de consultation a été lancée le 29 août 2019 et s'est terminée le 29 novembre 2019. Réunie le 13 février 2020, la commission a pris acte des résultats: après avoir examiné les avis d'un oeil critique, la majorité de la commission est restée convaincue de l'utilité du projet et n'a apporté aucune modification de fond à l'avant-projet. Par 17 voix contre 8, la commission a décidé de soumettre à son conseil le présent projet de modification de la loi sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse ainsi qu'un projet d'arrêté fédéral, qu'elle transmet simultanément au Conseil fédéral pour avis. Une minorité (Pieren, Gafner, Gallati, Gutjahr, Haab, Herzog Verena, Keller Peter, Wasserfallen Christian) propose de n'entrer en matière ni sur le projet de loi ni sur l'arrêté fédéral.

3500

FF 2020

2

Contexte et objectif

2.1

Politique de la petite enfance: bases et défis actuels

Ces dernières années, différents acteurs ont demandé que la petite enfance soit reconnue comme champ politique à part entière et ont pris de nombreuses initiatives en la matière. Des acteurs publics et privés ont lancé des projets et créé des structures et des offres, notamment en lien avec la prévention de la pauvreté, l'encouragement à l'intégration, la promotion de la santé ainsi que la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale3.

Ces initiatives s'appuient sur des recherches qui ont mis en évidence les liens existant entre les perspectives de formation et de développement à long terme des enfants et des jeunes, d'une part, et leur environnement socio-économique à l'âge préscolaire, d'autre part. Elles partent aussi du constat que le système éducatif suisse ne garantit pas l'égalité des chances entre les enfants. Des études récentes montrent que les communes et les écoles ont souvent affaire à des enfants qui, au moment d'entrer à l'école enfantine ou à l'école primaire, maîtrisent mal la langue locale ou présentent des retards de développement au niveau moteur, social ou cognitif. Les conditions socio-économiques des familles jouent, parmi d'autres facteurs, un rôle important dans cette situation4. Les enfants ne sont souvent pas capables de rattraper de tels retards de développement au cours de leur vie et de leur parcours scolaire.

Les enfants défavorisés vivent non seulement dans des conditions difficiles (restrictions financières, logements exigus, isolement social), mais leurs parents disposent aussi de moins de ressources que les autres pour les faire évoluer dans un environnement qui soit sain et qui offre des possibilités d'apprentissage et d'expériences adaptées à leur âge. De nombreuses études attestent l'importance de l'encouragement précoce pour le développement physique, psychique et social de l'être humain et mettent en lumière les conséquences négatives d'un développement défavorable pour les individus comme pour la société5.

En Suisse, fédéralisme oblige, la politique de l'enfance et de la jeunesse se caractérise par une répartition des tâches entre la Confédération, les cantons et les communes. Elle est en outre étroitement liée aux activités d'organisations non gouvernementales et d'autres acteurs privés. Conformément à cette répartition des tâches et à cette
distribution des compétences, la politique de la petite enfance, en tant que composante spécifique de la politique de l'enfance et de la jeunesse, relève avant tout de la compétence des cantons et des communes. Du point de vue thématique, elle se situe à l'interface entre la politique de la formation, la politique sociale, la

3

4

5

Conseil fédéral (2018): Résultats du programme national de prévention et de lutte contre la pauvreté 2014-2018. Rapport du Conseil fédéral sur le programme national en réponse à la motion 14.3890 du groupe socialiste du 25.9.2014.

Stern Susanne / Schwab Cammarano Stéphanie (2018): Développement précoce: guide à l'intention des petites et moyennes communes. Berne: Programme national contre la pauvreté / OFAS.

Office fédéral de la santé publique (2018): Promotion de la santé et prévention dans la petite enfance. Berne.

3501

FF 2020

politique de la santé et la politique de l'intégration. Elle est donc portée par différents offices et services6.

Jusqu'à présent, les stratégies et les mesures prises par les cantons, les villes et les communes dans le domaine de la politique de la petite enfance étaient très diverses.

Les différences sont grandes aussi bien du point de vue de l'offre que du rôle joué par les cantons dans la mise en oeuvre. Alors que certains cantons assument la direction et la coordination de la mise en oeuvre des mesures, d'autres laissent cette responsabilité principalement aux communes. Au niveau communal, la fragmentation est également importante. Dans son rapport du 8 avril 2018 exposant les résultats du programme national de prévention et de lutte contre la pauvreté, le Conseil fédéral est arrivé à la conclusion que pour augmenter l'efficacité de l'encouragement précoce, une meilleure coordination des différentes offres dans les domaines de la santé, du social, de la formation et de l'intégration est nécessaire. Il estime par ailleurs que les communes devraient se coordonner avec le canton et collaborer davantage entre elles7.

La LEEJ constitue la base légale des mesures prises par la Confédération pour favoriser la collaboration et le développement des compétences dans le domaine de la politique de l'enfance et de la jeunesse. En ce qui concerne les aides financières pour les activités extrascolaires destinées aux enfants et aux jeunes (art. 7 ss), le législateur a fixé une limite d'âge, suivant la pratique des associations de l'enfance et de la jeunesse. Les groupes cibles de ces aides sont tous les enfants et les jeunes domiciliés en Suisse, de l'âge d'entrée à l'école enfantine à l'âge de 25 ans, ainsi que les jeunes de moins de 30 ans qui exercent bénévolement une fonction de direction, de conseil ou d'accompagnement au sein d'un organisme privé (art. 4). La limite inférieure est ainsi l'âge d'entrée à l'école enfantine, qui coïncide avec l'acquisition d'une première autonomie. La limite d'âge supérieure se justifie, car à 30 ans, la formation professionnelle ou les études sont normalement terminées et l'intégration sociale et l'insertion professionnelle ont en général déjà eu lieu8. Les mesures prises par la Confédération pour favoriser la collaboration et le développement des compétences (art. 18
à 21 LEEJ) se réfèrent, conformément à l'art. 67 de la Constitution fédérale, à la politique de l'enfance et de la jeunesse dans son ensemble et incluent donc aussi la politique de la petite enfance. En sont exclues les activités qui porteraient atteinte à la souveraineté des cantons en matière d'instruction publique.

6

7 8

Sur le plan fédéral, par exemple, la politique de la petite enfance relève de la compétence de plusieurs offices: l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), l'Office fédéral de la culture (OFC), l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) et le Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI). Au niveau intercantonal, ce thème est l'affaire de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales, de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique ainsi que de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé.

Conseil fédéral (2018) (voir note 3).

Voir FF 2010 6197 (en particulier 6204, 6216, 6224, 6232).

3502

FF 2020

2.2

Objectif et utilité d'une politique de la petite enfance

Un encouragement précoce, compris comme la FAE-PE9, contribue, par des mesures ciblées, à renforcer l'égalité des chances au moment de l'entrée à l'école. Ces mesures visent pour l'essentiel à créer et à mettre à la disposition des enfants un environnement d'apprentissage stimulant et bienveillant au sein de la famille comme à l'extérieur de celle-ci. Selon les recherches de Stern et Schwab (2018), les champs d'action de l'encouragement précoce sont notamment les soins durant la petite enfance, les offres de prise en charge et d'encouragement pour les enfants en âge préscolaire, les formations et les conseils destinés aux parents, les programmes de visites à domicile, l'encouragement précoce des compétences linguistiques ainsi que l'aménagement du lieu de vie, des environs immédiats et du quartier. Les deux chercheuses décrivent l'utilité de l'encouragement précoce de la façon suivante: ­

L'encouragement précoce augmente les chances des enfants de réussir leur scolarité, réduit les écarts entre enfants et améliore ainsi l'égalité des chances.

­

Un encouragement précoce global ne bénéficie pas seulement aux enfants. Il aide aussi les parents et augmente leur capacité d'action et leurs compétences en matière d'éducation, ce qui influe favorablement sur le développement de l'enfant.

­

L'encouragement précoce réduit le risque des enfants de familles défavorisées de se retrouver à leur tour au chômage ou dépendants de l'aide sociale à l'âge adulte. Il aide donc à éviter que la pauvreté ne se transmette d'une génération à l'autre.

­

Un encouragement précoce de qualité est efficace, surtout pour les enfants de familles défavorisées, et nettement plus économique que les mesures de soutien et d'encouragement qui interviennent plus tard dans le parcours de l'enfant10.

2.3

Nécessité d'agir

Entre le printemps 2018 et le printemps 2019, la CSEC-N s'est penchée en détail sur les objectifs d'une politique de la petite enfance et a dressé un premier état des lieux des activités existantes dans le domaine de la FAE-PE. Aux niveaux intercantonal et intercommunal, différents acteurs s'occupent de la petite enfance et s'engagent en

9

10

En font partie toutes les offres de formation, d'accueil et de soutien, de la naissance à l'entrée à l'école enfantine, ainsi que celles qui renforcent les ressources et les compétences éducatives des parents, mais non les offres de pure transmission de connaissances ou d'encouragement des enfants surdoués, comme l'apprentissage précoce du chinois (Wustmann Seiler, C. & Simoni, H. (2012): Cadre d'orientation pour la formation, l'accueil et l'éducation de la petite enfance en Suisse. Une réalisation de l'Institut Marie Meierhofer pour l'enfance sur mandat de la Commission suisse pour l'UNESCO et du Réseau suisse d'accueil extrafamilial. Zurich).

Stern Susanne / Schwab Cammarano Stéphanie (2018) (voir note 4).

3503

FF 2020

faveur d'une collaboration mieux coordonnée et plus cohérente dans ce domaine 11.

Sur la base notamment du rapport exposant les résultats du programme national de prévention et de lutte contre la pauvreté 2014­2018, la commission a toutefois constaté que l'offre reste fragmentaire et lacunaire et que la coordination entre les acteurs est insuffisante. Le Conseil suisse de la science (CSS) et la Commission suisse pour l'UNESCO ont également souligné dans leurs études l'importance de cette thématique12. La commission estime par conséquent qu'il y a nécessité d'agir.

Bien que la compétence de la Confédération dans ce domaine ne soit que subsidiaire, la commission est d'avis que l'encouragement précoce en Suisse doit aussi être soutenu et développé par la Confédération. Il s'agit d'accorder à la politique de la petite enfance une importance stratégique, y compris sur le plan fédéral.

3

Présentation du projet

3.1

Réglementation proposée

3.1.1

Financement de programmes cantonaux

Afin de réduire la fragmentation de l'offre d'encouragement précoce en Suisse et de combler les lacunes existantes, la commission a décidé de soutenir des programmes dans le domaine de la petite enfance au moyen d'un mécanisme de financement incitatif en faveur des cantons. Cela devrait permettre aux cantons et aux communes de développer leurs offres en fonction des besoins et d'établir une politique de la petite enfance sur leur territoire.

La LEEJ prévoit déjà un instrument d'encouragement de ce type pour la constitution et le développement de la politique de l'enfance et de la jeunesse des cantons (art. 26 LEEJ); sa durée est toutefois limitée à fin 2022. Les cantons sont nombreux à recourir à ces aides financières13. Une première évaluation externe de la LEEJ14, réalisée en 2018, a montré que les aides financières allouées jusqu'alors ont incité les cantons à développer durablement leur politique de l'enfance et de la jeunesse afin que

11

12

13 14

La Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales, la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique et la Conférence des directrices et des directeurs cantonaux de la santé ont fait de l'encouragement précoce une priorité commune depuis 2017. Dans un projet mené conjointement avec le programme national contre la pauvreté, l'Association des communes suisses a sensibilisé les petites et moyennes communes à l'importance de l'encouragement de la petite enfance et les a soutenues pour l'élaboration et la mise en oeuvre de stratégies communales dans le cadre de six séminaires régionaux organisés de février à mai 2018. Cf. Conseil fédéral (2018) (voir note 2) et www.sodk.ch/fr/domaines/enfance-et-jeunesse/encouragement-precoce/ (consulté le 5.8.2019).

Conseil suisse de la science (2018): Sélectivité sociale: recommandations du Conseil suisse de la science CSS (en allemand). Berne; Commission suisse de l'UNESCO (2019): Instaurer une politique de la petite enfance: un investissement pour l'avenir. Berne.

Jusqu'à présent, 19 cantons ont reçu des aides financières.

Schär, Christa / Weibel, David (2018): Évaluation de la loi sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse (LEEJ). Berne.

3504

FF 2020

celle-ci réponde aux besoins de la population15. Les critères d'octroi et de calcul ont par ailleurs été jugés adéquats. L'encouragement ciblé des cantons par la Confédération s'est donc avéré fécond et efficace, raison pour laquelle la commission estime que la Confédération et les cantons devraient continuer sur la même voie.

En prenant pour modèle le mécanisme de financement incitatif de la Confédération en faveur des cantons en vigueur jusqu'à fin 2022 pour des programmes visant à constituer et à développer leur politique de l'enfance et de la jeunesse, la commission demande que la LEEJ soit complétée par un instrument encourageant le développement de la politique de la petite enfance. La nouvelle disposition, qui prévoit un financement incitatif pour une durée limitée à dix ans, doit permettre aux cantons qui le souhaitent de mettre en oeuvre, avec le soutien de la Confédération, une série de mesures cohérentes dans le domaine de la petite enfance et d'inscrire ainsi durablement cette thématique dans la politique cantonale. Tous les cantons auront ainsi la possibilité de prendre, de concert avec les communes, des mesures supplémentaires ciblées dans les domaines dans lesquels ils identifient des lacunes et de bâtir ainsi une offre qui corresponde aux besoins de la population. Ils pourront également mieux coordonner et mettre en réseau leurs activités et leurs offres. L'égalité des chances pour tous les enfants en Suisse s'en trouverait grandement renforcée.

3.1.2

Cadre financier

Les expériences faites avec le financement incitatif temporaire en faveur des cantons pour la création et le développement de leur politique de l'enfance et de la jeunesse ont montré qu'une aide financière limitée d'un montant global d'environ 10 millions de francs a contribué de manière décisive à une politique de l'enfance et de la jeunesse coordonnée en Suisse. Le présent projet propose de mettre à disposition des cantons un nouveau crédit d'un montant de 8,45 millions de francs. De l'avis de la commission, ce financement constitue une mesure efficace et rentable pour établir plus solidement l'encouragement précoce en Suisse.

3.2

Autres solutions examinées

La commission a examiné deux autres propositions visant à établir durablement les offres de FAE-PE en Suisse. Elle les a néanmoins jugées inadéquates tant d'un point de vue financier que structurel.

15

D'après les acteurs qui ont été interrogés dans le cadre de l'évaluation et qui ont indiqué mettre en oeuvre un programme cantonal (art. 26 LEEJ), les programmes ont, d'une part, fait démarrer des travaux de fond comme l'élaboration de stratégies, de plans d'action et de lignes directrices; ils ont permis, d'autre part, de développer des mesures concrètes visant à encourager la mise en réseau, la coordination et la collaboration au sein des cantons. Il en est résulté, en maints endroits, une sensibilisation aux questions de l'enfance et de la jeunesse ainsi qu'un renforcement de la politique dans ce domaine. 88 % des acteurs estimaient que les changements induits par les programmes dans leur canton étaient durables; 12 % étaient d'avis qu'il était trop tôt pour en juger.

3505

FF 2020

Dans un premier temps, la commission a repris la proposition de l'initiative parlementaire Aebischer et a examiné la possibilité d'inclure les enfants de 0 à 4 ans dans le groupe cible des aides financières pour les activités extrascolaires. Un examen approfondi de cette solution a montré qu'une telle extension du groupe cible empêcherait la Confédération de soutenir certains projets de FAE-PE. En effet, les aides financières mentionnées aux art. 7 ss LEEJ font directement référence au groupe cible des enfants et des jeunes, excluant ainsi des offres qui s'adresseraient, par exemple, aux parents16. De plus, les activités au niveau local et communal ne pourraient être soutenues que dans le cadre de projets innovants d'importance nationale.

Enfin, comme le crédit approuvé chaque année par le Parlement pour ces aides financières, de l'ordre de 10 millions de francs, est régulièrement épuisé, une extension du groupe cible impliquerait de réduire les aides financières accordées aux organismes soutenus jusqu'ici (une centaine à ce jour). La commission est donc arrivée à la conclusion que cette façon de mettre en oeuvre l'initiative parlementaire ne serait pas satisfaisante.

Dans un deuxième temps, la commission a examiné s'il serait judicieux de rendre la petite enfance prioritaire dans le cadre des mesures prises par l'OFAS en vertu des art. 18 à 21 LEEJ pour favoriser la collaboration et le développement des compétences dans le domaine de la politique de l'enfance et de la jeunesse. Cette variante aurait consisté en un encouragement accru de l'échange d'informations et d'expériences entre les professionnels actifs dans le domaine de la politique de la petite enfance, en une mise à disposition systématique des formes de travail qui ont fait leurs preuves, en une coordination ciblée des mesures de la Confédération ainsi qu'en un renforcement des compétences spécialisées dans le domaine de l'encouragement précoce. La commission est arrivée à la conclusion qu'un changement de priorités aurait pour effet indésirable que d'autres domaines de la politique de l'enfance et de la jeunesse seraient négligés. C'est la raison pour laquelle la commission a également écarté cette deuxième solution.

3.3

Proposition de minorité: non-entrée en matière

Une minorité (Pieren, Gafner, Gallati, Gutjahr, Haab, Herzog Verena, Keller Peter, Wasserfallen Christian) propose de ne pas entrer en matière sur le projet. Elle est d'avis qu'un financement supplémentaire de programmes cantonaux n'est pas opportun, car ce type de soutien entraîne souvent un déplacement des compétences qui ne serait pas souhaitable. Pour cette minorité, la compétence principale en matière de FAE-PE revient de toute évidence aux cantons et aux communes.

La minorité a également critiqué le fait que l'état des lieux réalisé par la commission n'a pas montré comment les cantons pourraient utiliser précisément les moyens 16

Une extension du groupe cible permettrait à la Confédération d'octroyer à des organismes actifs à l'échelle du pays ou d'une région linguistique des aides financières pour des tâches de gestion et des activités régulières ainsi que pour la formation et le perfectionnement de jeunes bénévoles dans le domaine de l'encouragement de la petite enfance.

Elle pourrait soutenir financièrement des projets d'organismes privés encourageant la participation, mais aussi des projets innovants d'organismes privés ou de communes et de cantons ayant pour groupe cible les enfants dès la naissance.

3506

FF 2020

supplémentaires qui leur seraient attribués ni quelle serait l'utilité du financement incitatif proposé par la majorité. Étant donné la dynamique positive des dernières années au niveau cantonal et communal, l'identification des mesures que la Confédération devrait impérativement soutenir est loin d'être évidente.

Or, selon la minorité, les cantons et les communes disposent souvent, aujourd'hui déjà, d'offres adaptées aux besoins en matière d'encouragement précoce, notamment des offres de gymnastique parents-enfants, des cours de langue parents-enfants, des structures d'accueil collectif de jour, des aires de jeu publiques, des groupes de jeu, des services de conseil aux parents et une prise en charge par des sages-femmes.

Pour cette raison, la minorité estime que la Confédération ne devrait pas investir davantage de moyens dans de telles mesures.

3.4

Consultation

Par lettre du 29 août 2019, la CSEC-N a soumis ses avant-projets, accompagné de son rapport explicatif, aux cantons, aux partis politiques, aux associations faîtières nationales des communes, des villes et des régions de montagne ainsi qu'à d'autres organisations intéressées, pour consultation. Au total, elle a invité 74 destinataires à prendre position jusqu'au 29 novembre 2019; elle a reçu 86 avis écrits.

Les tendances suivantes se dégagent de ces avis: Avis favorables Au total, 18 cantons se sont montrés favorables, sur le principe, à la proposition de la commission visant à soutenir les cantons dans l'élaboration et la mise en oeuvre de trains de mesures d'ordre stratégique dans le domaine de la petite enfance. Les cantons concernés avancent comme principal argument en faveur de cette proposition le fait que les mesures d'encouragement dans le domaine de la petite enfance auront, selon eux, des répercussions positives, à long terme, sur les enfants et la société. Plusieurs cantons ont également salué expressément le fait que la commission se soit inspirée du financement incitatif limité en faveur des cantons pour leur permettre de constituer et de développer leur politique de l'enfance et de la jeunesse (art. 26 LEEJ). Quatre partis politiques (PBD, PDC, Vert'libéraux et PS), cinq associations économiques, l'Association des communes suisses et l'Union des villes suisses, quatre commissions extraparlementaires ainsi que tous les acteurs des domaines de l'enfance, de la jeunesse, des familles et de la société qui ont participé à la procédure de consultation ont également salué le projet de loi. Dans leur avis, l'Union patronale suisse (UPS) et l'Union syndicale suisse, entre autres, ont souligné que les mesures prises dans la petite enfance sont efficientes et produisent un effet à long terme, aussi bien sous l'angle sociétal que dans une perspective économique.

Pour l'UPS, il est important de respecter les compétences respectives de la Confédération et des cantons.

Avis défavorables Six cantons, trois partis (UDC, PLR, UDF) ainsi qu'economiesuisse, l'Union suisse des arts et métiers et le Centre patronal (cp) se sont exprimés contre le projet. Les 3507

FF 2020

cantons concernés se sont opposés au projet avant tout pour des motifs fédéralistes ou ont estimé que les tâches administratives liées à l'octroi des aides financières seraient hors de proportion ou que le développement de ce champ politique de la part de la Confédération n'était pas prioritaire. Les partis qui s'opposent au projet relèvent en particulier qu'il existe déjà des offres dans le domaine de l'encouragement précoce et qu'il incombe, selon eux, à la famille de s'organiser sous sa propre responsabilité. Ils considèrent en outre que la mesure proposée reviendrait à intervenir dans la répartition actuelle des compétences. Les associations économiques mentionnées s'opposent au projet pour les mêmes motifs.

Propositions de modification De nombreux participants à la consultation qui ont accueilli favorablement le projet ont formulé des propositions de modification. Certains ont proposé de porter à 150 000 francs, comme pour les aides financières fondées sur l'art. 26 LEEJ, la participation financière de la Confédération, au lieu des 100 000 francs au maximum par année et par canton prévus par le projet. D'autres ont proposé que les aides financières ne soient pas limitées à quatre contrats par an et que la mesure ne soit pas limitée dans le temps. Enfin, de nombreuses mesures de mise en oeuvre de l'initiative parlementaire allant au-delà de celles visées par le projet ont été proposées, comme l'élaboration d'une stratégie nationale ou la création d'un organe de coordination au niveau fédéral.

4

Commentaire des dispositions

4.1

Loi fédérale sur l'encouragement des activités extrascolaires des enfants et des jeunes

Art. 11a

Aides pour des programmes cantonaux de développement de la politique de la petite enfance

Le contenu de l'article proposé correspond à celui de l'art. 26 LEEJ actuellement en vigueur. La mise en oeuvre du nouvel art. 11a LEEJ devra par conséquent être analogue à celle de l'art. 26.

Al. 1 En dérogation à la définition des groupes cibles de la loi donnée à l'art. 4, la Confédération peut allouer à quatre cantons par an au plus des aides financières uniques pour une durée maximale de trois ans pour leurs programmes dans le domaine de la politique de la petite enfance. L'objectif des aides financières est d'aider les cantons à développer leur politique de la petite enfance et à combler les lacunes en la matière. Les cantons sont libres de recourir ou non à cette aide.

La formulation du nouvel article précise que la Confédération peut soutenir des programmes cantonaux. Il est ainsi clair que l'art. 11a LEEJ ne permettra pas de financer des projets isolés, mais des ensembles ou des trains de mesures s'inscrivant de manière cohérente dans une stratégie plus large. Pour chaque canton, les besoins 3508

FF 2020

locaux, les circonstances particulières et les développements nécessaires devront servir de repères.

La Confédération participera à hauteur de 50 % aux dépenses imputables d'un programme cantonal, mais au maximum à 100 000 francs par an et par canton. Sur la période contractuelle de trois ans, un canton pourra ainsi toucher une somme de 300 000 francs au maximum pour la mise en oeuvre de son programme. En plus de cette somme, la Confédération pourra aussi pouvoir soutenir les travaux préparatoires du canton à hauteur de 50 %, mais pour un montant de 25 000 francs supplémentaires au maximum. À supposer que les cantons utilisent la totalité des aides financières mises à leur disposition et compte tenu des ressources en personnel de l'administration fédérale (voir ch. 5.1), la Confédération devrait investir au total une somme de 10,1 millions de francs au maximum.

Cette subvention accordée aux cantons doit être comprise comme un financement initial ou incitatif, qui doit donc être limité à une période déterminée dans la loi. Les dix ans mentionnés dans l'article de loi sont calculés comme suit. En supposant que tous les cantons souhaitent lancer un programme avec le soutien financier de la Confédération et que des contrats ne puissent être conclus chaque année qu'avec quatre cantons, sept périodes contractuelles de trois ans chacune doivent être prévues (dans l'idéal six périodes avec quatre cantons et une dernière avec deux cantons). Si l'on ajoute une année pour les travaux préparatoires des quatre premiers cantons, on peut en déduire que les aides financières s'étaleront dans l'ensemble sur dix ans (voir ch. 5.1). Si plus de quatre cantons déposent une demande la même année civile, un ordre de priorité au sens de l'art. 13 de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)17 sera nécessaire. Les critères pour fixer cet ordre de priorité seront définis dans l'ordonnance du 17 octobre 2012 sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse (OEEJ)18.

Al. 2 En plus des objectifs convenus entre la Confédération et les cantons et la participation financière de la Confédération, les contrats mentionneront aussi les prestations que les cantons doivent fournir, la visée et les objectifs des programmes cantonaux, l'obligation de rédiger des rapports et de garantir la qualité (controlling), les modalités
de traitement et la durée contractuelle. Instrument de partenariat entre la Confédération et les cantons, ce type de contrats accorde aux cantons une marge de manoeuvre suffisante dans la réalisation opérationnelle des objectifs définis tout en garantissant une utilisation efficace des aides financières de la Confédération. Conclus pour une durée de plusieurs années, les contrats permettent d'inscrire les aides financières dans la durée et de faciliter la planification des cantons.

17 18

RS 616.1 RS 446.11

3509

FF 2020

4.2

Arrêté fédéral concernant les aides financières pour des programmes cantonaux visant à développer la politique de la petite enfance

Art. 1 Cette disposition fixe le montant des moyens financiers que la Confédération peut utiliser pour soutenir des programmes cantonaux visant à développer la politique de la petite enfance. Le crédit d'engagement est accordé pour une durée de dix ans à compter de l'entrée en vigueur de l'art. 11a LEEJ. La commission prévoit, pour une durée de trois ans, des aides financières à hauteur de 100 000 francs par an et par canton, ainsi que des mesures de soutien ponctuelles à hauteur de 25 000 francs, soit un crédit de 8,45 millions de francs.

Une minorité (Fivaz Fabien, Aebischer Matthias, Atici, Locher Benguerel, Piller Carrard, Python, Reynard, Rytz Regula, Schneider Meret) propose de porter ce montant à 150 000 francs, comme pour les aides financières fondées sur l'art. 26 LEEJ. Le montant total s'élèverait donc à 12,35 millions de francs.

Art. 2 Le crédit d'engagement est édicté sous la forme d'un arrêté fédéral simple, qui n'est pas sujet au référendum.

5

Conséquences

5.1

Conséquences pour la Confédération

Conséquences financières L'engagement accru de la Confédération dans le domaine de la petite enfance sous la forme d'un financement incitatif implique un relèvement temporaire de ses ressources financières. Les besoins de financement devraient s'élever à 8,45 millions de francs au total sur une période de dix ans à compter de l'entrée en vigueur du présent projet (prévue en 2021). L'objectif est de conclure chaque année avec des cantons quatre contrats d'une durée de trois ans et impliquant une participation de la Confédération à hauteur de 100 000 francs par an. Un montant supplémentaire de 100 000 francs par an doit être prévu pour financer les travaux préparatoires à la conclusion des contrats (4 fois 25 000 francs au maximum). Selon ce calendrier, les derniers contrats seront conclus pour la période allant du début de l'année 2028 à la fin de l'année 2030. Les besoins de financement culmineront par conséquent à 1,3 million de francs durant la période qui va de 2024 à 2026, puis diminueront progressivement pour disparaître en 2031 (voir tableau ci-après).

La mise en oeuvre de l'art. 26 LEEJ a montré qu'il est judicieux de limiter le nombre de contrats à quatre par année. La charge de travail peut ainsi être planifiée sur plusieurs années, ce qui permet de tirer parti efficacement des ressources en personnel de l'OFAS.

3510

FF 2020

Aides financières pour des programmes cantonaux visant à développer la politique de la petite enfance (en millions de francs) 2021 0,1

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2029

2030

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,1

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,1

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,1

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,1

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,1

0,1

2028

0,5

0,9

1,3

1,3

1,3

4 cantons (4 x 0,1 / an) 0,05

2 cantons (2 x 0,1 / an)

1,25

1

0,6

0,2

Conséquences sur les besoins en personnel Afin de mettre en oeuvre le financement incitatif des programmes cantonaux dans le domaine de la petite enfance, l'OFAS a besoin de ressources supplémentaires en personnel d'environ un équivalent plein temps (165 000 francs par an) à partir de l'entrée en vigueur du nouvel article de la LEEJ. Ce besoin en personnel supplémentaire est limité jusqu'à l'échéance des derniers contrats avec les cantons (probablement en 2030).

5.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Le recours à cet encouragement fédéral génère pour les cantons une charge financière supplémentaire, dans la mesure où les aides financières de la Confédération sont limitées à la moitié (50 %) des dépenses imputables (art. 13 LEEJ). Si les cantons associent les communes à la mise en oeuvre des programmes, celles-ci devront sans doute également faire face à une charge financière supplémentaire.

5.3

Conséquences économiques

L'économie nationale a besoin d'une main-d'oeuvre bien formée, motivée et socialement compétente. Plusieurs études attestent que les enfants qui ont bénéficié d'un encouragement précoce non seulement disposent de meilleures compétences cognitives, sociales et linguistiques, mais sont aussi en meilleure santé et présentent de meilleures dispositions au moment de la scolarisation. Comparés aux enfants qui n'ont pas bénéficié d'un tel encouragement, ils obtiennent de meilleurs résultats scolaires et, plus tard, réussissent mieux sur le marché du travail. Plusieurs études internationales montrent que l'investissement dans la petite enfance est rentable d'un

3511

FF 2020

point de vue macroéconomique. En effet, les offres d'encouragement précoce réduisent les dépenses dans les domaines de la santé, du social et de la formation19.

5.4

Conséquences sociales

Les offres de FAE-PE favorisent le développement social, émotionnel, cognitif, physique et psychique des enfants et les aident à devenir des personnes responsables et aptes à la vie en société20. Si ce sont avant tout les parents qui jouent un rôle clé dans le développement des enfants en bas âge, les familles défavorisées ne disposent souvent que de ressources limitées pour encourager leurs enfants de façon appropriée, surtout en ce qui concerne la formation, les compétences éducatives et linguistiques, la santé, les réseaux sociaux et une situation stable en matière de travail et de logement. En conséquence, les enfants issus de ces familles risquent davantage de tomber dans la pauvreté à l'âge adulte. Les offres d'encouragement précoce sont particulièrement efficaces en vue de renforcer l'égalité des chances entre les enfants en Suisse21.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité

Le projet de révision se fonde sur l'art. 67, al. 2, Cst., aux termes duquel la Confédération peut favoriser les activités extrascolaires des enfants et des jeunes en complément des mesures cantonales22. Il s'agit donc ici d'une compétence parallèle et subsidiaire de la Confédération.

Le projet de loi met également en oeuvre le droit des enfants et des jeunes à ce que leur développement soit encouragé, conformément à l'art. 11, al. 1, Cst. Il en va de même des buts sociaux mentionnés à l'art. 41, al. 1, let. g, Cst., qui s'adresse au législateur et précise que la Confédération et les cantons doivent s'engager à encourager les enfants et les jeunes à devenir des personnes indépendantes et socialement responsables, ainsi qu'à les soutenir dans leur intégration sociale, culturelle et politique.

6.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

L'avant-projet est en conformité avec les obligations internationales contractées par la Suisse. Il s'agit en particulier d'une mesure nécessaire, au sens de l'art. 4 de la 19 20 21 22

Conseil fédéral (2018) (voir note 3) et Commission suisse de l'UNESCO (2019) (voir note 12).

Wustmann Seiler, C.; Simoni, H. (2012) (voir note 9).

Conseil fédéral (2018) (voir note 3).

Le terme d'«extrascolaire» doit être entendu ici comme «en dehors des locaux et des horaires scolaires»; voir FF 2010 6197, ici 6231.

3512

FF 2020

Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant23, pour mettre en oeuvre les droits reconnus dans cette convention. En effet, cet avant-projet contribue directement ou indirectement à réaliser entre autres les droits de l'enfant au développement (art. 6, par. 2), à un niveau de vie suffisant (art. 27, par. 1) et à l'éducation sur la base de l'égalité des chances (art. 28). Il contribue aussi à soutenir les parents et les représentants légaux de l'enfant dans la responsabilité qui leur incombe d'élever celui-ci, y compris par la mise en place d'institutions, d'établissements et de services chargés de veiller au bien-être des enfants (art. 18, par. 2).

Par ailleurs, le présent avant-projet va dans le sens de ce que préconisent certaines recommandations du Conseil de l'Europe, en particulier la recommandation de 2006 sur les politiques visant à soutenir une parentalité positive24 et celle de 2011 sur les droits de l'enfant et les services sociaux adaptés aux enfants et aux familles 25.

Enfin, la proposition tient également compte de l'agenda 2030 avec ses 17 objectifs (et 169 sous-objectifs) de développement durable: le sous-objectif 4.2 précise que «d'ici à 2030, [...] toutes les filles et tous les garçons [devront avoir] accès à des activités de développement et de soins de la petite enfance et à une éducation préscolaire de qualité qui les préparent à suivre un enseignement primaire»26.

6.3

Forme de l'acte à adopter

Aux termes de l'art. 164, al. 1, Cst., toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. C'est la raison pour laquelle l'article proposé est soumis à la procédure législative ordinaire.

6.4

Frein aux dépenses

Dans le but de limiter les dépenses, l'art. 159, al. 3, let. b, Cst. prévoit que les dispositions relatives aux subventions ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs, doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil.

Le présent projet ne prévoit ni subventions ni crédits d'engagement ou plafonds de dépenses qui entraîneraient une nouvelle dépense unique ou de nouvelles dépenses périodiques supérieures à ces seuils. Le projet n'est donc pas soumis au frein aux dépenses.

23 24 25 26

RS 0.107 Voir www.search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?ObjectId=09000016805d6dc5 (consulté le 5.8.2019).

Voir www.rm.coe.int/1680472b8c (consulté le 5.8.2019).

Voir www.eda.admin.ch/agenda2030/fr/home/agenda-2030/die-17-ziele-fuer-einenachhaltige-entwicklung/ziel-4-inklusive-gleichberechtigte-und-hochwertigebildung.html (consulté le 5.8.2019).

3513

FF 2020

6.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

L'article proposé est conforme au principe de subsidiarité (art. 5a et 43a, al. 1, Cst.).

La Confédération ne se charge d'aucune tâche assumée jusqu'à présent par les cantons. Elle offre uniquement aux cantons la possibilité d'obtenir un financement incitatif pour des programmes cantonaux. Les cantons décident librement de recourir ou non à cette offre.

Le principe d'équivalence fiscale (art. 43a, al. 2, Cst.) est également respecté: la Confédération contribue au financement des programmes cantonaux et définit les conditions d'octroi. Le principe d'équivalence fiscale entre l'unité qui assume les coûts et l'unité qui prend les décisions est ainsi respecté.

6.6

Conformité à la loi sur les subventions

Dans le cadre de la répartition des compétences définie par la Constitution, la Confédération souhaite développer et mieux harmoniser, dans le domaine de la petite enfance, les mesures de politique de l'enfance et de la jeunesse prises aux niveaux fédéral et cantonal. Les aides financières de la Confédération constituent à cet effet un mode de financement incitatif qui a fait ses preuves.

Sur la base d'une demande de soutien déposée par un canton, la Confédération (OFAS) et le canton négocieront en vue de conclure un contrat définissant les objectifs du programme, la participation financière de la Confédération et les autres points du contrat.

Comme les aides financières octroyées aux cantons constituent une incitation, elles sont limitées dans le temps. Le délai prévu (dix ans) permet à tous les cantons qui le souhaitent d'en faire la demande auprès de la Confédération.

6.7

Délégation de compétences législatives

Comme pour l'art. 26 LEEJ, le nouvel art. 11a LEEJ ne réglera que le principe au niveau de la loi fédérale. Les conditions d'octroi des aides financières, la procédure de dépôt des demandes, le traitement de celle-ci par l'OFAS et les autres points du contrat seront réglés en détail dans l'OEEJ.

6.8

Protection des données

Le traitement de données personnelles ou des mesures pouvant avoir une incidence sur la protection des données ne sont pas prévus.

3514