20.058 Message concernant la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (loi COVID-19) du 12 août 2020

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (loi COVID-19), en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

12 août 2020

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2020-2068

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Condensé La loi fédérale urgente sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (loi COVID-19) crée les bases légales (normes de délégation) permettant au Conseil fédéral de reconduire les mesures qu'il a déjà prises en vertu du droit de nécessité et qui seront encore nécessaires pour surmonter l'épidémie de COVID-19.

Contexte Depuis le 13 mars 2020, le Conseil fédéral a édicté plusieurs ordonnances visant à surmonter l'épidémie de COVID-19. Celles-ci se fondent en premier lieu sur la loi sur les épidémies (LEp) ou sur l'art. 185, al. 3, de la Constitution (Cst.). En vertu de l'art. 7d, al. 2, let. a, de la loi sur l'organisation du gouvernement et de l'administration, pour prolonger une ordonnance fondée sur l'art. 185, al. 3, Cst., le Conseil fédéral doit avoir soumis à l'Assemblée fédérale un projet établissant la base légale de son contenu ou un projet d'ordonnance de l'Assemblée fédérale fondé sur l'art. 173, al. 1, let. c, Cst., destinée à remplacer l'ordonnance du Conseil fédéral au plus tard six mois après son entrée en vigueur. A défaut, les ordonnances édictées par le Conseil fédéral deviennent caduques. Les 8 et 29 avril 2020, le Conseil fédéral a par conséquent chargé la Chancellerie fédérale et le Département fédéral de justice et police, de préparer un avant-projet de loi fédérale urgente de durée limitée. Il a ouvert la consultation le 19 juin 2020 et celle-ci s'est achevée le 10 juillet 2020. La loi COVID-19 vise à créer les bases légales permettant au Conseil fédéral de reconduire les mesures qu'il a déjà prises en vertu d'ordonnances directement fondées sur l'art. 185, al. 3, Cst. et qui seront encore nécessaires pour surmonter l'épidémie de COVID-19. Il s'agit de donner une base légale formelle au train de mesures déjà prises par le Conseil fédéral afin de renforcer leur légitimité démocratique pour la durée probable de l'épidémie.

Contenu du projet Le Conseil fédéral a remanié son avant-projet à l'issue de la consultation. Il a consacré le principe de l'association générale et obligatoire des cantons à l'élaboration des mesures qui touchent leurs compétences et complété les dispositions concernant les mesures dans les domaines des capacités sanitaires, de la protection des travailleurs et de la culture. Le projet comprend
désormais 14 articles: l'art. 1 règle l'objet de la loi (les compétences du Conseil fédéral pour lutter contre l'épidémie de COVID-19 (al. 1) et les principes selon lesquels le Conseil fédéral n'use de ces compétences que dans la mesure nécessaire (al. 2) et associe les cantons à l'élaboration des mesures qui touchent leurs compétences (al. 3). Les 9 articles suivants règlent les domaines dans lesquels le Conseil fédéral se voit attribuer des compétences particulières: les mesures dans les domaines des capacités sanitaires (art. 2) et de la protection des travailleurs (art. 3), les mesures dans le domaine des étrangers et de l'asile (art. 4), les mesures dans le domaine de la justice et du droit procédural (art. 5), les mesures dans le domaine des assemblées de société (art. 6), les mesures en cas d'insolvabilité (art. 7), les mesures dans le domaine de la culture

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(art. 8), les mesures dans le domaine des médias (art. 9), les mesures en cas de perte de gain (art. 10) et les mesures dans le domaine de l'assurance-chômage (art. 11).

Les dispositions pénales (art. 12) ne couvrent que les mesures que le Conseil fédéral édicterait en vertu de l'art. 2 ou 3. L'art. 13 donne au Conseil fédéral la compétence d'édicter des dispositions d'exécution supplémentaires si elles devaient s'avérer nécessaires. Enfin, l'art. 14 fixe la durée de validité de la loi au 31 décembre 2021.

Seuls les art. 1 (objet et principes) et 11, let. a à c (assurance-chômage), doivent avoir effet jusqu'au 31 décembre 2022.

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Table des matières Condensé

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Contexte et présentation du projet 1.1 Epidémie de COVID-19 1.2 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.3 Coordination du projet avec le retour à la «situation particulière» au sens de l'art. 6 LEp 1.4 Réglementation proposée 1.5 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral 1.6 Mise en oeuvre

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Procédure de consultation 2.1 Avant-projet 2.2 Aperçu des résultats de la procédure de consultation 2.3 Appréciation des résultats de la procédure de consultation 2.3.1 Association des cantons et d'autres milieux intéressés 2.3.2 Maintien des capacités sanitaires et protection des travailleurs 2.3.3 Domaine des étrangers et de l'asile 2.3.4 Justice, assemblées de société et insolvabilité 2.3.5 Domaine de la culture 2.3.6 Domaine des médias 2.3.7 Mesures en cas de perte de gain 2.3.8 Mesures dans le domaine de l'assurance-chômage 2.3.9 Dispositions pénales 2.3.10 Exécution et durée de validité de la loi COVID-19 2.3.11 Droits politiques 2.3.12 Accueil extra-familial pour enfants

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3

Commentaire des dispositions

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4

Conséquences 4.1 Conséquences pour la Confédération 4.1.1 Conséquences financières 4.1.2 Conséquences sur l'état du personnel 4.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 4.3 Conséquences économiques 4.4 Autres conséquences

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5

Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité 5.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 5.3 Forme de l'acte à adopter 5.4 Délégation de compétences législatives

Loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (loi COVID-19) (Projet)

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Message 1

Contexte et présentation du projet

1.1

Epidémie de COVID-19

Fin décembre 2019, un foyer d'affections pulmonaires de cause inconnue est signalé à Wuhan (province de Hubei, Chine). L'agent responsable de ces cas est identifié comme un nouveau coronavirus (SARS-CoV-2). La maladie causée par ce virus, nommée COVID-191, s'est répandue à travers le monde et a été déclarée pandémie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) le 11 mars 2020.

La Suisse a enregistré son premier cas confirmé de COVID-19 le 25 février 2020. Le nouveau coronavirus s'est rapidement propagé dans toutes les régions du pays, avec une rapide progression du nombre de contaminations et de décès. Le Conseil fédéral a donc pris une série de mesures, comme l'y habilite le législateur en cas de «situation particulière», à l'art. 6 de la loi du 28 septembre 2016 sur les épidémies (LEP)2.

A l'interdiction des rassemblements de plus de 1000 personnes, arrêtée dans l'ordonnance du 28 février 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19)3, ont succédé, dans l'ordonnance 2 COVID-19 du 13 mars 20204, une interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes et la fermeture des écoles, une obligation des cantons d'informer concernant la couverture sanitaire et des mesures aux frontières. Ces dernières se fondent sur les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, de la Constitution (Cst.)5, tandis que les autres mesures, dans cette première phase, ont été arrêtées en vertu de l'art. 6, al. 2, LEp.

Le 16 mars 20206, le Conseil fédéral a déclaré que la Suisse se trouvait en «situation extraordinaire», au sens de l'art. 7 LEp, et il a ordonné un durcissement des mesures: interdiction générale des manifestations, fermeture de tous les magasins à l'exception des points de vente de denrées alimentaires et de biens de consommation courante, et quelques autres restrictions. Parallèlement, il a émis des recommandations générales, notamment concernant le strict respect de la «distanciation sociale». Le 20 mars 20207, le Conseil fédéral a interdit les rassemblements de plus de cinq personnes. Toutes ces mesures visaient à éviter une propagation rapide de la maladie, à protéger les personnes vulnérables d'une infection et à empêcher la surcharge du système de santé. Le Conseil fédéral a également pris d'autres mesures, dans plusieurs ordonnances distinctes, sur la base de l'art. 185, al. 3, Cst. et des normes de délégation existantes de lois spéciales. L'ordonnance 2 COVID-19 a été complétée 1

2 3 4 5 6 7

La graphie initiale «COVID-19» a été remplacée par «Covid-19» à la mi-avril par la Chancellerie fédérale, en adéquation avec ses directives sur la présentation des textes officiels en allemand. Cette convention graphique ne s'applique qu'à l'allemand.

Le français et l'italien obéissent à d'autres règles.

RS 818.101 RO 2020 573 RO 2020 773 783 841 863 867 1059 1065 1101 1131 1137 1155 1199 1245 1249 1333 1401 1501 1505 1585 1751 1815 1823 1835 2097 2099 2213, art. 14, ch. 2 RS 101 RO 2020 783 RO 2020 863

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et adaptée à intervalles serrés, en fonction de l'évolution de l'épidémie. Toutes les ordonnances concernées ont une durée de validité limitée.

Le nombre de nouvelles infections, d'hospitalisations et de décès a reculé depuis le début avril et les services de soins intensifs disposaient de capacités suffisantes. Le Conseil fédéral a donc décidé, le 16 avril 2020, un assouplissement progressif des mesures de protection de la population contre le COVID-19 à partir de la fin du mois d'avril, associé à des plans de protection et des mesures d'accompagnement. La stratégie visée était de passer aussi rapidement que possible de la phase d'atténuation («mitigation») à la phase d'endiguement de l'épidémie, lors de laquelle le repérage systématique des chaînes de transmission du virus au moyen d'un traçage ciblé des contacts, de l'isolement et de la mise en quarantaine des personnes infectées permettrait de contrôler la propagation de la maladie à long terme. Le Conseil fédéral a arrêté les mesures de l'étape de transition 1a (ouverture des établissements qui offrent des services impliquant un contact physique, des magasins de bricolage et des jardineries, assouplissement des mesures concernant les inhumations et les soins ambulatoires et stationnaires) le 168 et le 22 avril 20209 et celles-ci sont entrées en vigueur le 27 avril 2020.

Les mesures de l'étape de transition 1b (reprise de l'enseignement présentiel dans les écoles obligatoires, activités présentielles réunissant cinq personnes au plus dans les écoles du degré secondaire II et du degré tertiaire ainsi que dans les autres établissements de formation, ouverture des magasins et des marchés, ouverture des musées, des bibliothèques et des archives, reprise des activités sportives à l'exclusion des compétitions, assouplissement des mesures dans le secteur de la restauration) ont été arrêtées par le Conseil fédéral le 29 avril10 et sont mises en oeuvre depuis le 11 mai 2020.

Le 27 mai 2020, le Conseil fédéral a pris une décision de principe sur le retour de la Suisse de l'état de situation extraordinaire au sens de l'art. 7 LEp à celui de situation particulière au sens de l'art. 6 LEp. Dans ce contexte, le Conseil fédéral a abrogé l'ordonnance 2 COVID-19 au 22 juin 2020. Il a transféré, sous une forme réduite et simplifiée les mesures encore nécessaires
à la lutte contre l'épidémie de COVID-19 dans l'ordonnance COVID-19 du 19 juin 2020 situation particulière11. Les mesures ne reposant ni sur la LEp ni sur d'autres lois fédérales ont quant à elles été regroupées dans l'ordonnance 3 COVID-19 du 19 juin 202012, qui se fonde sur l'art. 185, al. 3, Cst. Le retour à la situation particulière a pour conséquence que les cantons sont à nouveau responsables de la lutte contre l'épidémie de COVID-19, à quelques domaines près, comme le prévoit la LEp en vigueur. En vertu du principe de la primauté du droit fédéral (force dérogatoire du droit fédéral), celui-ci prime le droit cantonal, aussi les cantons doivent-ils respecter les prescriptions fédérales pertinentes, soit les deux ordonnances susmentionnées.

Le 8 avril 2020, le Conseil fédéral a décidé que les rapports à l'appui de toutes les ordonnances COVID-19 seraient publiés. Il a par ailleurs annoncé le 4 mai, lors de 8 9 10 11 12

RO 2020 1249 RO 2020 1333 RS 2020 1401 RS 818.101.26 RS 818.101.24

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la session extraordinaire, dans une déclaration au Conseil national et au Conseil des Etats, qu'il ferait rapport au Parlement, avant chaque session, sur l'exercice des compétences du gouvernement en matière de droit de nécessité. Il a présenté un rapport dans ce sens pendant la session d'été13. Le présent message tient lieu de compte rendu pour la session d'automne. La présidente de la Confédération a en outre déclaré, à l'ouverture de la session extraordinaire, que le Conseil fédéral avait l'intention de soumettre au Parlement, au plus tard le 11 septembre 2020, dans la mesure du nécessaire, un message dans lequel il réexaminerait les ordonnances de nécessité14.

1.2

Nécessité d'agir et objectifs visés

Comme on l'a dit plus haut, le Conseil fédéral a édicté depuis le 28 février 2020 plusieurs ordonnances visant à surmonter l'épidémie de COVID-19. L'ordonnance 2 COVID-19 se fondait depuis le 16 mars sur l'art. 7 LEp, qui habilite le Conseil fédéral à agir dans une situation extraordinaire au sens de la LEp. Sa durée de validité étant de six mois à partir de sa date d'entrée en vigueur, elle aurait dû avoir effet jusqu'au 12 septembre 202015. En raison du retour à la situation particulière, le Conseil fédéral a toutefois abrogé l'ordonnance 2 COVID-19 déjà au 22 juin 2020 et adopté l'ordonnance 3 COVID-19. D'autres ordonnances se fondent sur l'art. 185, al. 3, Cst. et doivent être limitées dans le temps de par la Constitution. D'autres ordonnances encore ­ également de durée limitée ­ ont pour base légale des normes de délégation dans des lois spéciales. Par exemple, les mesures de l'ordonnance COVID-19 du 1er avril 2020 agriculture16 se fondent sur une base légale existante de la loi du 29 avril 1998 sur l'agriculture17. Les modifications du 16 avril 202018 liées à l'épidémie de l'ordonnance du 16 décembre 2016 sur les denrées alimentaires et les objets usuels19 se fondent sur une norme de délégation figurant à l' art. 18, al. 4, let. b , de la loi du 20 juin 2014 sur les denrées alimentaires20. L'ordonnance du 20 mars 2020 sur la renonciation temporaire aux intérêts moratoires en cas de paiement tardif d'impôts, de taxes d'incitation et de droits de douane ainsi que sur la 13

14

15

16 17 18 19 20

Rapport du Conseil fédéral du 27 mai 2020 concernant l'exercice de ses compétences en matière de droit de nécessité et la mise en oeuvre des motions de commission transmises depuis le début de la crise du coronavirus sous www.bk.admin.ch > Documentation > Législation > Rapport sur l'exercice des compétences BO 2020 N 377 et BO 2020 E 177: voir aussi le rapport du Conseil fédéral du 27 mai 2020 concernant l'exercice de ses compétences en matière de droit de nécessité et la mise en oeuvre des motions de commission transmises depuis le début de la crise du coronavirus.

Très exactement jusqu'au 13 septembre 2020 à 15 h 30. L'argument a été avancé, dans la doctrine, qu'il n'était pas licite que le Conseil fédéral utilise entièrement le délai de six mois; voir à ce sujet Florian Brunner/Martin Wilhelm/Felix Uhlmann, Das Coronavirus und die Grenzen des Notrechts ­ Überlegungen zu einer ausserordentlichen ausserordentlichen Lage, PJA 2020 p. 685 ss, p. 700. Rien cependant dans la genèse de l'art. 7d LOGA ne vient appuyer cette thèse.

RO 2020 1141 RS 910.1 RO 2020 1242 RS 817.02 RS 817.0

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renonciation au remboursement du prêt par la Société suisse de crédit Hôtelier21 se fonde sur des lois spéciales, de même que l'ordonnance COVID-19 du 13 mai 2020 examen suisse de maturité22. Le Conseil fédéral peut édicter ou modifier les ordonnances fondées sur des lois spéciales dans les limites de la compétence qui lui est déléguée, sans devoir les limiter dans le temps. Il n'est pas nécessaire de créer à ce propos une base légale formelle, si bien que ces ordonnances ne font pas l'objet du présent projet de loi.

Pour délimiter les ordonnances fondées sur l'art. 7 LEp et celles qu'il a édicté en se fondant directement sur la Constitution (art. 185, al. 3, Cst.), le Conseil fédéral a appliqué les critères suivants: ­

Toutes les mesures arrêtées au titre de la LEp, pour des motifs essentiellement épidémiologiques, pour limiter la propagation du COVID-19 et pour maintenir les capacités du système de santé afin de maîtriser l'épidémie («mesures primaires») ont été exclusivement fondées sur l'art. 7 LEp et intégrées à l'ordonnance 2 COVID-19.

­

Les mesures arrêtées pour surmonter les problèmes découlant de la mise en oeuvre des mesures primaires prises en vertu de la LEp ont été édictées dans des ordonnances séparées. Ces «mesures secondaires», revêtant la forme d'ordonnances du Conseil fédéral, se fondent dans la mesure du possible sur des normes de délégation et des mandats, prévus par des lois formelles, habilitant le Conseil fédéral à édicter des dispositions d'exécution. Faute d'habilitation (suffisante) par la loi, le Conseil fédéral s'est fondé sur sa compétence d'édicter des ordonnances inscrite à l'art. 185, al. 3, Cst. pour autant que les exigences formulées dans cet article constitutionnel, en particulier l'urgence et la nécessité, fussent satisfaites.

Le fait que le gouvernement agisse en se fondant directement sur la Constitution, notamment pour prendre les mesures secondaires citées, a suscité des critiques des milieux scientifiques23 et des médias ainsi que de certains membres des conseils législatifs, alors que la crise s'inscrivait dans la durée et que le volume des actes de droit de nécessité s'accroissait. La question a été posée de savoir si l'ordre public, ou la sécurité extérieure et intérieure, était réellement menacé, ou du moins dans une mesure telle qu'il se justifie d'avoir recours au droit de nécessité. De plus, la Constitution exige en outre qu'il soit impossible de reporter l'adoption des mesures visées et notamment d'attendre la création d'une base légale selon la procédure législative 21 22 23

RS 641.207.2 RS 413.17 Voir notamment Florian Brunner/Martin Wilhelm/Felix Uhlmann, Das Coronavirus und die Grenzen des Notrechts ­ Überlegungen zu einer ausserordentlichen ausserordentlichen Lage, PJA 2020 p. 685 ss; Stefan Höfler, Notrecht als Krisenkommunikation?, Aktuelle Juristische Praxis (PJA) 2020/6, p. 702 à 709; Giovanni Biaggini, «Notrecht» in Zeiten des Coronavirus ­ Eine Kritik der jüngsten Praxis des Bundesrats zu Art. 185 Abs. 3 BV, Schweizerisches Zentralblatt für Staats- und Verwaltungsrecht (ZBl), 2020/5, p. 239 à 267 et Der coronavirusbedingte Fristenstillstand bei eidgenössischen Volksbegehren ­ eine Fallstudie zur Tragfähigkeit von Art. 185 Abs. 3 BV, ZBl 2020/5, p. 277 à 288; Andreas Kley, «Ausserordentliche Situationen verlangen nach ausserordentlichen Lösungen.», ZBl 2020/5, p. 268 à 276; Andreas Zünd/Christoph Errass, Pandemie ­ Justiz ­ Menschenrechte, Revue de droit suisse (RDS, numéro spécial), p. 69 à 92.

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ordinaire (y compris la législation d'urgence au sens de l'art. 165 Cst. et la procédure parlementaire accélérée au sens par ex. de l'art. 85, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)24. Or, la condition de l'urgence posée par la Constitution n'est plus qu'exceptionnellement remplie, de l'avis du Conseil fédéral, car le Parlement est en état d'agir et est prêt à procéder avec une grande célérité 25.

Quelques ordonnances fondées directement sur la Constitution ont été conçues pour durer très peu de temps et ont cessé d'avoir effet sans suite, car une prolongation ou un renouvellement ne s'est pas avéré nécessaire. Tel fut le cas par exemple de l'ordonnance du 20 mars 2020 sur la suspension des délais applicables aux initiatives populaires fédérales et aux demandes de référendum au niveau fédéral26.

D'autres sont encore en vigueur mais ne seront pas prorogées une fois leur durée de validité écoulée, car elles se réfèrent à un évènement particulier ou à une période particulière. C'est le cas de l'ordonnance COVID-19 du 29 avril 2020 examen de maturité gymnasiale27 ou de l'ordonnance COVID-19 du 20 mai 2020 accueil extrafamilial pour enfants28.

Pour les ordonnances qui restent, la durée de validité limitée doit être examinée en fait ou en droit, pour les raisons suivantes:

24 25 26 27 28 29

­

Premièrement, est-il probable que les mesures ordonnées seront encore nécessaires à partir de l'automne, que ce soit sous leur forme actuelle ou sous une forme adaptée? Cette question dépend essentiellement de l'évolution de l'épidémie et des besoins de réglementation qui se feront jour dans les divers domaines concernés.

­

Deuxièmement, si ces ordonnances s'appliquent plus longtemps, leur base juridique doit être remplacée. Celles que le Conseil fédéral a édictées en se fondant directement sur la compétence constitutionnelle pour préserver la sécurité intérieure ou extérieure doivent être limitées dans le temps (art. 185, al. 3, 2e phrase, Cst.). Selon l'art. 7d, al. 2, ch. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA) 29, ces ordonnances deviennent caduques si, dans un délai de six mois après leur entrée en vigueur, le Conseil fédéral n'a pas soumis à l'Assemblée fédérale un projet établissant la base légale de leur contenu. Dès lors que le Conseil fédéral adopte à temps un tel projet, il peut prolonger la durée de validité des ordonnances fondées directement sur la Constitution. Dans l'intervalle, il n'est pas autorisé à les modifier sur le fond ni à les abroger avant la fin de leur durée de validité, comme il l'a fait durant les différentes étapes de la phase de transition. Les ordonnances deviennent également caduques, si le projet établissant la base légale de leur contenu est rejeté par l'Assemblée fédérale (art. 7d, al. 2, let. b, LOGA).

RS 171.10 Voir le message du 29 avril 2020 concernant une modification urgente de la loi sur l'aviation pour cause de pandémie de COVID-19 (FF 2020 3563).

RO 2020 847 RO 2020 1399 RO 2020 1753 RS 172.010

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Le Conseil fédéral a décidé le 8 avril 2020 de soumettre au Parlement un projet de loi fédérale urgente. Cette loi donnera une légitimité parlementaire aux mesures qu'il a édictées et qui seront encore en vigueur au moment de l'adoption du message, comme le prévoit l'art. 7d, al. 2, let. a, ch. 1, LOGA. Lorsque le Conseil fédéral aura adopté le message à l'intention du Parlement, il pourra en même temps prolonger la durée de validité de ses ordonnances de nécessité, dans la mesure où cela s'avère nécessaire. Il pourra aussi adapter et compléter les ordonnances de nécessité après l'adoption du message, si la situation l'exige. Au cas où il surgirait alors une nouvelle situation (par ex. une deuxième vague de l'épidémie) à laquelle seules des ordonnances du Conseil fédéral permettraient de faire face, celui-ci aurait la possibilité de se fonder de nouveau sur l'art. 185, al. 3, Cst. pour agir, dès lors que les conditions en seraient réunies.

1.3

Coordination du projet avec le retour à la «situation particulière» au sens de l'art. 6 LEp

Le 19 juin 2020, le Conseil fédéral a décidé le retour de la Suisse de l'état de situation extraordinaire au sens de l'art. 7 LEp à celui de situation particulière au sens de l'art. 6 LEp. Il a simultanément décidé de transférer les mesures arrêtées dans l'ordonnance 2 COVID-19 dans deux nouvelles ordonnances: ­

Les mesures épidémiologiques centrales visant la population, les organisations et les institutions, fondées sur l'art. 6 LEp, ont été regroupées dans l'ordonnance COVID-19 situation particulière. Cette ordonnance regroupe des mesures remaniées, et de moindre portée, visant la population, les organisations et les institutions et porte également sur les communications obligatoires dans le domaine des capacités sanitaires, par exemple le taux d'occupation des lits d'hôpitaux. Les cantons seront davantage associés à l'abrogation des mesures et à l'adoption d'éventuelles nouvelles mesures. Ils pourront également mettre en oeuvre des mesures supplémentaires, en fonction de leur situation épidémiologique et de la praticabilité du traçage des contacts.

­

La base légale des autres mesures qui pouvaient auparavant s'appuyer sur l'art. 7 LEp et qui doivent être reconduites a été créée dans l'ordonnance 3 COVID-19, fondée sur l'art. 185, al. 3, Cst.

Le présent projet de loi rassemble les diverses dispositions nécessaires pour créer les bases légales permettant au Conseil fédéral de reconduire les mesures qu'il a déjà prises, si tant est qu'elles ne sont pas déjà abrogées au moment de l'entrée en vigueur de la loi proposée ici. Il s'agit d'une part des mesures prises sur la base de l'art. 7 LEp et maintenues sur la base de l'art. 185, al. 3, Cst., et d'autre part des mesures arrêtées dans des ordonnances distinctes fondées directement sur la Consti-

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tution et pour lesquelles une durée de validité plus longue est nécessaire30. Si, dans un domaine, la réglementation nécessaire est d'une portée particulière ou que plusieurs approches politiques sont possibles, le Conseil fédéral est toutefois résolu à présenter aux conseils un projet de loi distinct. C'est notamment le cas de l'ordonnance COVID-19 du 25 mars 2020 cautionnements solidaires31. Fondée sur l'art.

185, al. 3, Cst., elle est entrée en vigueur le 26 mars 2020 et a effet six mois au plus à partir de son entrée en vigueur. Il a été décidé d'élaborer une loi distincte pour cette ordonnance, qui devrait idéalement entrer en vigueur au premier trimestre 2021.

1.4

Réglementation proposée

Le 29 avril 2020, le Conseil fédéral a décidé d'élaborer un avant-projet de loi fédérale urgente de durée limitée. Cette loi doit contenir les dispositions matérielles et normes de délégation nécessaires pour les mesures arrêtées par le Conseil fédéral dans des ordonnances directement fondées sur la Constitution et dans l'ordonnance 2 COVID-19, si ces mesures doivent durer plus longtemps que six mois. Avant de prendre cette décision, le Conseil fédéral a eu une discussion au cours de laquelle d'autres modèles ­ acte modificateur unique modifiant des lois existantes, pluralité d'actes normatifs ­ ont été débattus et finalement rejetés. Etant donné que l'ordonnance 2 COVID-19 est entrée en vigueur le 13 mars 2020 et que le délai de six mois fixé par l'art. 7d LOGA ­ valable également pour l'ordonnance 3 COVID-19 qui l'a remplacée ­ expirera le 13 septembre 2020, il a décidé que le message devait être soumis au Parlement au plus tard le 2 septembre 2020.

Dès le début du mois de mai, l'Office fédéral de la justice (OFJ) a fait un sondage auprès des secrétariats généraux et de tous les services de la Confédération qui pouvaient être directement ou indirectement concernés, afin de savoir pour quelles dispositions d'ordonnance en vigueur dont la durée de validité devrait excéder six mois il faudrait créer une base légale pour remplacer la base constitutionnelle directe. Le résultat a été qu'une base légale de durée limitée était nécessaire pour les mesures des domaines de l'épidémiologie, de la justice, du droit de procédure et de l'insolvabilité, des étrangers et de l'asile, de la culture et de l'assurance-chômage.

Les services fédéraux concernés ont été invités à préparer les normes légales nécessaires dans leur domaine, normes qui sont réunies dans la loi proposée ici.

Pour les mesures épidémiologiques, la réglementation proposée permet au Conseil fédéral de poursuivre toutes les mesures prises sur la base de l'art. 7 LEp mais qu'il n'a plus la compétence d'édicter depuis qu'il a déclaré la fin de la situation extraordinaire au sens de la LEp et le retour à la situation particulière. Depuis le 19 juin

30

31

Le projet de loi ne contient pas de dispositions sur le contrôle des exportations des produits thérapeutiques et des équipements de protection (réglé aux art. 4b et 4c de l'ordonnance 2 COVID-19). S'il fallait instaurer à nouveau de telles mesures, il faudrait examiner la possibilité de les fonder sur des bases légales existantes ou, si nécessaire, sur la Constitution.

RS 951.261

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FF 2020

2020, ces mesures sont réglées dans l'ordonnance 3 COVID-19, fondée sur l'art, 185, al. 3, Cst.

Il n'est par contre pas nécessaire de créer une base légale spéciale pour les mesures que le Conseil fédéral peut, en vertu de l'art. 6 LEp, ordonner dans une situation particulière, après avoir entendu les cantons. Dans une situation particulière, le Département fédéral de l'intérieur (DFI) coordonne les mesures de la Confédération.

Les mesures que le Conseil fédéral peut prendre en situation particulière sont énumérées exhaustivement dans la loi (art. 6, al. 2, en relation avec les art. 30 à 40 LEp).

1.5

Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies du Conseil fédéral

La loi fédérale urgente proposée n'est pas prévue dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202332 ni coordonnée avec les stratégies du Conseil fédéral. Aucun de ces instruments ne pouvait contenir de prévision de l'épidémie de COVID-19 et de ses conséquences.

1.6

Mise en oeuvre

La loi COVID-19 crée la base légale nécessaire au Conseil fédéral pour poursuivre les mesures qu'il a prises dans des ordonnances fondées directement sur la Constitution, dans la mesure où elles seront encore ou de nouveau nécessaires pour gérer l'épidémie de COVID-19. Dès que la loi sera entrée en vigueur, elle devra être mentionnée dans le préambule des ordonnances en question. Elle donne au Conseil fédéral la possibilité de moduler, d'adapter ou d'atténuer les prescriptions qu'il a déjà arrêtées, mais non de prendre de nouvelles mesures d'une autre sorte.

Des mesures fondées sur l'art. 7 LEp ou sur l'art. 185, al. 3, Cst., ou le cas échéant sur l'art. 184, al. 3, Cst., restent toutefois réservées dans le cas où il surgirait une nouvelle menace. Au moment de l'adoption du message ou immédiatement après, le Conseil fédéral prolongera la durée de validité des ordonnances pertinentes. Dès que la loi entrera en vigueur, il examinera leur contenu et leur durée et les adaptera en fonction des dispositions de la loi adoptée en vote final.

Le projet de loi utilise en de nombreuses dispositions des formulations potestatives.

En effet, le Conseil fédéral ne sera pas tenu de prolonger les mesures jusqu'à la fin de la durée de validité de la loi. S'il s'avère qu'une de ces dispositions réglementaires n'est objectivement plus nécessaire ni justifiée, il l'abrogera avant cette date, en conformité avec le principe de proportionnalité inscrit dans la Constitution (cf.

commentaire de l'art. 1, al. 2).

Pour tous les autres aspects qui devront être réglés en vue de l'exécution de la loi, on se reportera au commentaire des dispositions.

32

FF 2020 1709

6375

FF 2020

2

Procédure de consultation

2.1

Avant-projet

Le Conseil fédéral a mis l'avant-projet de loi COVID-19 (AP) en consultation du 19 juin au 10 juillet 202033. Ce dernier visait à donner une légitimité démocratique, pour la durée probable de l'épidémie de COVID-19, aux mesures arrêtées jusqu'ici par le Conseil fédéral. Il comptait 13 articles, structurés de la manière suivante: l'art. 1 règle l'objet de la loi et précise qu'il ne s'agit que de mesures visant à lutter contre l'épidémie de COVID et à maitriser les conséquences de cette dernière (art. 1, al. 1). Il s'agit de mesures en vigueur au moment de la consultation. Les mesures déjà levées ou ne devant pas être reconduites ne sont pas incluses. Le principe en vertu duquel le Conseil fédéral n'use des compétences que lui confère la loi qu'aussi longtemps et dans la mesure où elles seront nécessaires est inscrit à l'art. 1, al. 2. Les domaines dans lesquels le Conseil fédéral se voit attribuer des compétences particulières font l'objet de 9 dispositions: mesures de lutte contre l'épidémie de COVID-19, mesures dans le domaine des étrangers et de l'asile, mesures dans le domaine des étrangers et de l'asile, mesures dans le domaine de la justice et du droit procédural, mesures dans le domaine des assemblées de société, mesures en cas d'insolvabilité, mesures dans le domaine de la culture, mesures dans le domaine des médias, mesures en cas de perte de gain et mesures dans le domaine de l'assurancechômage. Ces 9 dispositions établissent de manière exhaustive et de manière suffisamment précise les mesures que le Conseil fédéral peut arrêter par voie d'ordonnance et à quelles prescriptions légales il peut déroger ce faisant. La norme pénale (art. 11) n'est nécessaire que pour les mesures que le Conseil fédéral ordonnerait en vertu de l'art. 2. La peine maximale prévue est une amende d'ordre de 300 francs au plus. Des dispositions d'exécution supplémentaires pourraient s'avérer nécessaires dans d'autres domaines, aussi le Conseil fédéral doit-il disposer de la compétence réglementaire nécessaire (art. 12). Enfin, la durée de validité de la loi doit être limitée à la fin de 2022 (art. 13).

2.2

Aperçu des résultats de la procédure de consultation

Plus de 1000 avis ont été exprimés dans le cadre de la consultation sur l'avant-projet de loi COVID-19. La plupart d'entre eux émanait de particuliers qui ont critiqué ou rejeté certains points de l'avant-projet quand ils ne l'ont pas purement et simplement rejeté en bloc. Les cantons, par contre, ont jugé le projet positif dans l'ensemble.

14 cantons (ZH, BE, LU, OW, NW, GL, FR, SO, SH, AI, SG, GR, TG, GE) sont explicitement favorables au projet. Ils estiment nécessaire de donner une base juridique aux mesures prises par le Conseil fédéral pour lutter contre l'épidémie de COVID-19, si celles-ci doivent être reconduites. 11 autres cantons (UR, ZG, BS, BL, AR, AG, TI, VD, VS, NE, JU) n'approuvent pas explicitement le projet sans pour autant le rejeter expressément. Les cantons cités ont tous envoyés des proposi33

Les documents mis en consultation sont disponibles sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > ChF.

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FF 2020

tions de modification du projet ­ parfois très complètes ­ et des commentaires. SZ, par contre, a explicitement renoncé à se prononcer, de même que la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), qui s'exprimera probablement plus tard sur le projet. Les avis des partis sont mitigés. 2 partis (PDC, PEV) approuvent le projet sans réserve. 4 autres l'approuvent avec quelques réserves (PVL, seniorGLP, Les Verts, UDF). Le PLR, le PS et l'UDC rejettent le projet tel qu'il a été mis en consultation. Le Parti-Bourgeois-démocratique (PBD), Ensemble à Gauche (EAG), La Lega dei Ticinesi (Lega) et le parti du Travail (PdT), également invités, ne sont pas prononcés. En tout, 60 organisations de différentes branches se sont exprimées. 27 approuvent le projet dans l'ensemble. 33 organisations ne l'approuvent pas explicitement mais ne le rejettent pas expressément non plus. De nombreuses organisations ont en outre envoyé des demandes de modification détaillées. L'Association suisse des banquiers et la Société suisse des employés de commerce, organisations invitées, ont renoncé à se prononcer.

2.3

Appréciation des résultats de la procédure de consultation

En raison des contraintes temporelles et du grand nombre d'avis reçus, l'appréciation se limite à quelques exigences centrales par domaine. Pour une vue complète des exigences formulées, on se reportera au rapport sur les résultats de la consultation et aux différents avis34.

2.3.1

Association des cantons et d'autres milieux intéressés

Les cantons ont presque tous demandé à être plus étroitement associés dans tous les domaines réglés par le projet de loi; le droit d'être entendu prévu à l'art. 2, al. 1, 2e phrase, AP n'est pas suffisant selon eux (cf. ch. 2.3.2). Le Conseil fédéral donne suite à cette requête ­ et répond ainsi à l'exigence centrale exprimée lors de la consultation ­ en inscrivant inscrit le principe général de l'association des cantons dans le projet. Le nouvel art. 1, al. 3, prévoit explicitement que le Conseil fédéral associe les cantons à l'élaboration des mesures qui touchent leurs compétences. Les cantons pourront ainsi participer adéquatement à la définition de la position et à l'élaboration des décisions concernant la conception des mesures. Le rôle que jouent les cantons dans la lutte contre les épidémies, en particulier dans le domaine de l'exécution, justifie leur participation. Les associations de branche, les partenaires sociaux, les partis et d'autres milieux intéressés ne sont pas explicitement prévus à l'art. 1, al. 3, du projet bien qu'ils l'aient demandé (par. ex. PS, USS, USAM, Travail.Suisse; par analogie FSA, GastroSuisse, CI Commerce de détail Suisse, FMH, PharmaSuisse ou Interpharma, etc.); ils seront néanmoins associés à l'élaboration des mesures, dans la mesure du possible, généralement dans le cadre de consultations raccourcies. La 34

Le rapport sur les résultats de la consultation et les avis sont disponibles sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > ChF.

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FF 2020

consultation publique de deux jours ouverte par l'OFJ le 1 er avril 2020 (devoirs des organes de sociétés en cas de surendettement imminent, adaptations de la procédure concordataire et introduction d'une procédure simplifiée d'ajournement de la faillite)35 illustre bien l'utilité que peuvent avoir ces consultations raccourcies.

Le principe général de l'art. 1, al. 3, du projet garantit que le Conseil fédéral associera les cantons à l'élaboration des mesures qui touchent leurs compétences, aussi n'est-il pas utile de traiter plus avant les exigences des cantons en la matière, au regard de domaines spécifiques.

2.3.2

Maintien des capacités sanitaires et protection des travailleurs

Nombreux ont été les participants, parmi lesquels les cantons et des acteurs du domaine et de la branche de la santé, à formuler des exigences concernant les mesures (épidémiologiques) de lutte contre l'épidémie de COVID-19. Leurs avis ont conduit à un remaniement de l'art. 2 AP qui a été scindé en deux dispositions (nouvel art. 2: capacités sanitaires; art. 3: protection des travailleurs) afin d'en améliorer la lisibilité et la systématique. On se reportera au commentaire des art. 2 et 3 pour les adaptations spécifiques (cf. ch. 3).

La compétence du Conseil fédéral de restreindre la circulation des marchandises à la frontière, prévue à l'art. 2, al. 2, AP, a été largement critiquée; aucun motif impérieux, notamment sanitaire, ne nécessitant plus son maintien, cette compétence a été abandonnée. Les compétences déléguées à la Confédération pour soutenir et garantir l'approvisionnement en produits thérapeutiques et en équipements de protection, regroupées à l'art. 2, al. 3, AP, ont été accueillies favorablement dans l'ensemble.

Les participants ont notamment fait valoir que les mesures de la Confédération concernant l'acquisition, la distribution et la vente de ces biens ne devaient être prises que si elles étaient effectivement nécessaires pour garantir l'approvisionnement. Cette exigence, qui n'était prévue qu'à l'art. 2, al. 3, let. a, AP est désormais étendue à toutes les activités de la Confédération en relation avec l'approvisionnement. Le Conseil fédéral n'a en revanche pas abandonné la possibilité de confisquer des produits thérapeutiques et des équipements de protection, prévue à la let. e.

L'idée n'est pas de «punir» les cantons qui disposent de stocks suffisants, comme certains l'on craint, mais bien de garantir que les biens nécessaires puissent être distribués en fonction des besoins. Dans une perspective nationale, cette mesure se justifie encore, dans l'hypothèse où l'approvisionnement serait compromis. La compétence octroyée au Conseil fédéral de déroger à la législation sur les produits thérapeutiques (art. 2, al. 3, let. g à j, AP) a été largement approuvée: la proposition selon laquelle le Conseil fédéral pourra non seulement déroger à l'autorisation de mise sur le marché de médicaments mais également adapter les conditions liées à l'autorisation de mise sur le marché ou la procédure d'autorisation de mise sur le marché a été retenue.

35

Les documents mis en consultation sont disponibles sous www.bj.admin.ch > Actualité > Coronavirus et justice > Risque de surendettement des entreprises à cause de la crise du coronavirus > Consultation publique.

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FF 2020

En ce qui concerne l'art. 2, al. 4, AP, une majorité des cantons ont fait valoir qu'il leur appartenait en premier lieu de juger s'il était nécessaire de restreindre ou d'interdire des activités médicales. La Confédération ne devrait pouvoir leur imposer des restrictions qu'en cas de situation extraordinaire au sens de la LEp. Elle devrait alors participer aux coûts de manière appropriée si les restrictions nécessitaient une indemnisation des fournisseurs de prestations. Les cantons étant responsables de la mise à disposition des capacités sanitaires, il y a lieu d'accéder à leur demande ans toute la mesure du possible. Conformément à la réglementation actuelle (art. 25 de l'ordonnance 3 COVID-19), le Conseil fédéral se limitera à autoriser les cantons à restreindre les activités médicales (par ex. les interventions électives) et ordonner d'autres mesures pour le traitement des patients, en particulier ceux atteints du COVID-19. Il semble logique que les cantons, plus ou moins touchés, puissent aménager les mesures en fonction de leur situation et en répondre. Par ailleurs, l'autorisation du Conseil fédéral permet aux cantons de disposer d'une base légale suffisante pour les mesures qu'ils auront à prendre. Il n'y a pas lieu de donner à la Confédération la possibilité d'imposer directement des interdictions ou des obligations. Rien ne semble justifier aujourd'hui la création de normes de délégation et d'obligations de dédommagement «au cas où». Il est donc inutile de prévoir dans la loi que la Confédération participera aux frais d'une éventuelle indemnisation des fournisseurs de prestations dans le domaine de la santé comme le souhaitaient les cantons. Au demeurant, la perspective de versements de la Confédération pourrait inciter les cantons à ne pas ordonner à temps les restrictions qui s'imposent dans le domaine de la santé. La présente loi ne doit pas créer d'effets indésirables.

Rien ne semble justifier non plus, du point de vue du Conseil fédéral, la création d'une base légale permettant l'indemnisation rétroactive des cantons. Premièrement, il serait difficile de déterminer dans quels cas il faudrait indemniser les fournisseurs de prestations et par conséquent quand il serait nécessaire que la Confédération participe aux coûts. Après l'apparition de l'épidémie de COVID-19, la Confédération
n'a pas ménagé ses efforts pour sauvegarder les emplois dans les entreprises qui ont dû interrompre leur activité (indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail, allocation pour perte de gain COVID-19) et a cautionné des prêts, en simplifiant la procédure, pour qu'elles puissent surmonter leurs problèmes de liquidités.

Les fournisseurs de prestations du domaine de la santé, dans la mesure où il s'agit de fournisseurs privés, bénéficient aussi de ce soutien. Cette approche a montré sa validité. Les entreprises publiques n'ont pas droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail car leurs emplois ne sont pas menacés. Les établissements publics, tels que les musées, les entreprises des transports publics et les hôpitaux publics ne reçoivent donc pas d'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail.

Le revenu du personnel temporairement sous-occupé est assuré par la collectivité publique responsable de ces établissements. Par ailleurs, le Conseil fédéral a renoncé à verser des contributions à fonds perdu pour atténuer les pertes d'entreprises et d'organisations du secteur privé pour ne pas courir le risque de privilégier certaines branches de l'économie et le maintien des structures. Lorsque de telles contributions ont été versées, à titre exceptionnel, ce sont des branches structurellement faibles qui en ont bénéficié ou celles qui dépendent fortement du bénévolat. Lorsqu'il a pris sa décision sur le financement des tests COVID-19, le Conseil fédéral a clairement dit qu'il n'entrerait pas en matière sur les demandes d'indemnisation des pertes des 6379

FF 2020

hôpitaux formulées par les cantons. Au demeurant, on ne sait pas à combien ces pertes se monteront finalement, car une grande partie des interventions qui ont été repoussées pourront sans doute être effectuées plus tard. Au surplus, le Conseil fédéral estime que les compétences en matière de financement doivent être respectées en situation extraordinaire aussi, à moins que les cantons soient dépassés par une tâche. Si tel n'était pas le cas, le fédéralisme en serait affaibli, ce qui ne saurait être dans l'intérêt des cantons.

Les dispositions concernant la prise en charge des analyses d'une infection au SARS-CoV-2 ou d'une maladie COVID-19 (art. 2, al. 5, AP) et la protection des travailleurs vulnérables (art. 2, al. 6) n'ont pas donné lieu à des remarques matérielles fondamentales. S'agissant des nombreux particuliers qui se sont prononcés contre la possibilité de déclarer obligatoire la vaccination, mentionnée dans le rapport explicatif36, le Conseil tient à préciser que la possibilité de déclarer obligatoires des vaccinations pour les groupes de population en danger, les personnes particulièrement exposées et les personnes exerçant certaines activités (par ex. dans certains services des hôpitaux ou dans des homes) est prévue à l'art. 6, al. 2, let. d, LEp. La loi COVID-19 ne prévoit pas de base à cet effet. Il ne faut pas confondre vaccination obligatoire et vaccination forcée. Il n'existe pas de base légale qui permettrait de vacciner quelqu'un sous la contrainte et il n'est pas prévu d'en créer une dans la loi COVID-19 ou un autre acte.

2.3.3

Domaine des étrangers et de l'asile

Le Conseil fédéral partage l'avis du canton de Berne: une réglementation dans le domaine de l'hébergement des requérants d'asile est susceptible de porter atteinte aux compétences des cantons. Il propose donc de préciser à l'art. 4, let. c, du projet que les mesures de la loi COVID-19 dans le domaine de l'asile ne s'appliquent qu'aux centres de la Confédération. De la sorte, les cantons resteront compétents pour ordonner des mesures liées à l'épidémie dans les structures d'hébergement cantonales. Plusieurs participants à la consultation (par ex. Les Verts, AI, OSAR, CRS) ont demandé de renoncer à ordonner une détention administrative s'il n'est pas possible déterminer quand le renvoi sera exécuté. Cela correspond à la pratique actuelle: la détention administrative n'est ordonnée que si l'exécution du renvoi est imminente. Le Conseil rejette également la proposition de surseoir totalement aux renvois sous contrainte, de même que celle de l'UDC visant à maintenir les mesures de contrainte même s'il est impossible de déterminer quand le renvoi pourra avoir lieu37.

Le Conseil fédéral partage l'avis de certains participants à la consultation (par ex.

GE, PS, Les Verts, AsyLex, JDS; avis similaire: CFM, UNHCR) concernant la nécessité de la participation d'un représentant juridique et des oeuvres d'entraide à 36 37

Cf. rapport sur les résultats de la consultation, p. 8.

Cf. avis du Conseil fédéral du 1er juillet 2020 sur la motion 20.3327 «Maintien de la détention administrative pour les étrangers condamnés», selon lequel les bases légales en vigueur concernant la détention administrative relevant du droit des étrangers sont suffisantes.

6380

FF 2020

l'audition des requérants d'asile. Il estime lui aussi que l'exécution équitable et conforme à l'état de droit des procédures d'asile et de renvoi reste prioritaire en période de crise pandémique. Le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) prend donc en premier lieu les mesures techniques et organisationnelles nécessaires pour protéger la santé de toutes les personnes concernées (par ex. locaux plus grands pour les auditions). En vertu de l'ordonnance COVID-19 du 1er avril 2020 asile38, le SEM ne peut mener des auditions sans que le représentant juridique y participe que dans des circonstances exceptionnelles liées à l'épidémie. A titre de mesure d'accompagnement, le délai de recours dans la procédure accélérée est prolongé de 7 à 30 jours pour les décisions matérielles (cf. art. 6 et 10 de l'ordonnance COVID-19 asile). Le Conseil fédéral rejette aussi la proposition de prolonger le délai de recours à 30 jours pour toutes les catégories de procédure (par ex. AI, JDS, CRS, OSAR) car cette prolongation ne concernerait que la procédure Dublin, qui vise à déterminer l'Etat responsable de l'exécution d'une procédure d'asile.

Le Conseil fédéral estime en outre que la protection de la santé ne doit pas être prise en considération seulement en ce qui concerne le logement et la vie courante mais également dans le cadre de la procédure d'asile et de renvoi. Il propose de compléter l'art. 3, let. c, de manière à ce que la santé des personnes participant à une procédure d'asile et de renvoi soit adéquatement prise en compte. Certains participants à la consultation (par ex. AI, JDS, CRS, OSAR) ont avancé que la formulation de l'art. 3, let. c, AP, trop générale, devait être précisée. Or, en situation de crise pandémique, il faut pouvoir réagir vite et de manière agile à l'évolution de la situation.

Régler de manière exhaustive les mesures nécessaires dans la loi empêcherait d'agir avec la souplesse nécessaire, ce qui ne serait pas judicieux. Il en va de même de l'attribution automatique des requérants à un canton après 140 jours (par ex. AI, OSAR). Le droit en vigueur prévoit déjà que la durée maximale du séjour dans les centres de la Confédération ne peut faire l'objet d'une prolongation appropriée notamment que si des mesures d'instruction supplémentaires sont nécessaires et qu'elles peuvent être entreprises
à brève échéance, ou que l'exécution du renvoi est imminente. Pour la question de l'aide sociale dans le cadre des mesures relevant du droit des étrangers, on se référera à l'avis du Conseil fédéral du 1er juillet 2020 concernant la motion Arslan 20.3406 («La crise du coronavirus ne doit pas compromettre l'octroi de titres de séjour ni les naturalisations»). On rappellera ici qu'avec la création d'une base légale spécifique à l'art. 4, let. c, du projet, les règles de l'ordonnance COVID-19 asile ne s'appliqueront à l'avenir qu'en cas d'un besoin avéré de protection de la santé.

2.3.4

Justice, assemblées de société et insolvabilité

Dans la mesure où certains cantons demandent à être plus étroitement associés à l'élaboration des mesures, notamment dans le domaine de la justice, on se réfèrera au principe général inscrit à l'art. 1, al. 3, du projet de loi, qui tient compte de cette exigence (cf. ch. 2.3.1). Conformément à l'avis du canton de Berne, le Conseil fédéral supprime la référence au délai fixé par l'autorité à l'art. 4 AP, aucune régle38

RS 142.318

6381

FF 2020

mentation ne semblant nécessaire à l'heure actuelle. Pour les autres adaptations (simplifications), on se référera au commentaire de l'article. Le Conseil fédéral reste sur sa décision de se limiter aux affaires civiles et administratives et de ne rien prévoir pour les affaires pénales ou les procédures selon le droit cantonal. Les art. 5 et 6 AP ne sont pas modifiés, les rares avis sur ces dispositions étant pour la plupart positifs.

2.3.5

Domaine de la culture

Dans la mesure où les cantons demandent à être plus étroitement associés à l'élaboration des mesures dans ce domaine, on se réfèrera au principe général inscrit à l'art. 1, al. 3, du projet de loi, qui tient compte de cette exigence (cf. ch. 2.3.1). Le Conseil fédéral a tenu compte de l'exigence de préciser l'aide financière et la procédure et a remanié en profondeur l'art. 7 AP. L'article compte désormais 10 alinéas et prévoit d'une part que l'Office fédéral de la culture (OFC) peut conclure des conventions de prestations avec un ou plusieurs cantons. La Confédération contribue pour moitié, dans les limites des crédits autorisés, au financement des mesures mises en oeuvre par les cantons en vertu des conventions de prestations. D'autre part, les acteurs culturels recevront, sur demande, des prestations en espèces non remboursables de l'association Suisseculture Sociale pour couvrir leurs frais d'entretien immédiats. La Confédération met à la disposition de Suisseculture Sociale les ressources financières nécessaires aux prestations en espèces sur la base d'une convention de prestations. Enfin, les associations culturelles d'amateurs seront indemnisées des pertes financières résultant de la réduction du nombre de manifestations par les associations faîtières reconnues par le DFI. Celles-ci seront indemnisées par la Confédération. Au surplus, le Conseil fédéral donne suite à la demande de certains cantons (ZH, ZG, AR, VD, VD) de compléter le ch. 3.2 «Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne» et de mentionner les conséquences financières de cette disposition.

2.3.6

Domaine des médias

Dans le cadre de la consultation, le canton de Berne a demandé à ce que les mesures dans le domaine des médias prévues par la loi COVID-19 soient coordonnées avec le train de mesure en faveur des médias prévu par le message du 29 avril 2020 39.

L'UDC a demandé que les mesures dans ce domaine soient limitées à la fin 2021, puisqu'on ne sait pas encore quand elles entreront en vigueur. Le PEV et la COMCO ont demandé que la loi COVID-19 prévoie explicitement que le Conseil fédéral ne puisse ordonner les mesures prévues à l'art. 8 AP que jusqu'à l'entrée en vigueur du train de mesures en faveur des médias. Le Conseil fédéral donne suite à ces exigences, dans la mesure où le nouvel art. 9, al. 2, du projet de loi prévoit qu'il abrogera les mesures au plus tard à l'entrée en vigueur d'une loi fédérale au sens du projet 39

FF 2020 4385, no objet 20.038

6382

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du 29 avril 2020 sur un train de mesures en faveur des médias. Il suit également l'avis du canton de Zurich et du PS: l'art. 9, al, 4, du projet prévoit expressément que les rabais sur la distribution ne sont accordés que si l'éditeur s'engage par écrit à ne pas verser de dividendes pour l'exercice 2020. Les cantons du Valais, des Grisons et d'Argovie estiment que la participation de la Confédération à la distribution régulière ne suffit pas. Les quotidiens, en particulier, font pour la plupart l'objet de la distribution matinale et seraient exclus du soutien. La Confédération devrait donc également participer aux coûts de la distribution matinale. Le Conseil fédéral comprend cette exigence, de même que le souhait de l'UDF d'étendre le soutien aux bihebdomadaires et aux mensuels en abonnement, au nom de l'égalité de traitement.

Il rappelle toutefois que ces deux exigences sont actuellement examinées dans le cadre des délibérations sur le train de mesures en faveur des médias. Les cantons de Glaris et de Saint-Gall déplorent le fait que l'art. 8 AP soit le seul à ne pas être formulé de manière potestative. L'indépendance des médias est garantie par la Constitution, c'est donc sciemment qu'aucune formulation potestative n'a été utilisée dans le domaine des médias. L'exigence du canton de Saint-Gall selon laquelle dans le domaine des médias le Conseil fédéral ne devrait être autorisé qu'à ordonner certaines mesures ne peut donc être satisfaite. Le Conseil fédéral rejette la proposition de Travail.Suisse d'accorder un soutien supplémentaire à la SRG SSR. Celle-ci, en qualité de fournisseur de médias électroniques et cliente de l'agence de presse Keystone-ATS bénéficie de la mesure mentionnée à l'art. 8, al. 1, let. c, AP. Le Conseil fédéral s'en tient à son projet et rejette donc la proposition d'un débat parlementaire préalable formulée par economiesuisse et celle du canton de Zurich de financer les prestations de l'agence Keystone-ATS par la caisse fédérale plutôt que par le produit de la redevance de radio-télévision. Il ne tient pas non plus compte de la proposition de l'USS de supprimer le plafond des coûts d'abonnement des services de base textes de l'agence de presse Keystone-ATS, de sorte à assurer le financement de ces coûts, à la charge des médias électroniques, jusqu'à l'entrée en vigueur
du train de mesures en faveur des médias. L'art. 9, al. 5, règle directement les conditions du soutien et la prise en charge des coûts d'abonnement de KeystoneATS.

2.3.7

Mesures en cas de perte de gain

La grande majorité des remarques formulées par les participants à la consultation publique fait déjà l'objet d'interventions parlementaires qui seront traitées à la session d'automne. Le Conseil fédéral ne les a pas reprises car il a proposé de rejeter ces interventions. Le Parlement pourra apporter ses modifications au projet de loi s'il le souhaite. De nombreuses remarques doivent plutôt être examinées au niveau de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 et non pas dans le cadre de la loi COVID-19. Au nombre de ces remarques on peut mentionner: (i.) le domaine de la culture et de l'événementiel ne doit pas être oublié; (ii.) il faut introduire une allocation minimale pour la culture; (iii.) il faut indemniser les personnes ayant une situation assimilable à celle d'un employeur avec l'allocation pour perte de gain COVID-19; (iv.) il faut prévoir une allocation pour d'autres secteurs en difficulté comme les agences de voyage en plus du domaine de la culture et de l'événementiel 6383

FF 2020

mais également; (v.) il faut indemniser également les indépendants indirectement touchés; (vi.) il faut prévoir une allocation pour les personnes qui doivent interrompre leur activité lucrative pour s'occuper d'un proche lorsque le personnel qui s'en occupe habituellement ne peut plus le faire, en raison d'une quarantaine ou d'une maladie; (vii.) il faut prévoir une allocation qui couvre le chiffre d'affaires et non le revenu pour les indépendants.

2.3.8

Mesures dans le domaine de l'assurance-chômage

Les résultats de la consultation montrent que la grande majorité des participants approuvent les mesures adoptées par le Conseil fédéral dans le domaine de l'assurance-chômage. Le Conseil fédéral rejette en revanche l'extension extraordinaire de l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail (RHT) à d'autres groupes d'ayants droit (GL, BS, TI, SH, ZH, ZG, USS, PS, CP, HotellerieSuisse, FSA, economiesuisse impressum, Union des villes suisses, USAM, SwissTextiles et GastroSuisse), de même que l'augmentation de la RHT pour les personnes à revenus modestes (PS, Travail.Suisse et USS). La levée progressive des restrictions depuis le 8 juin 2020 permet une reprise du travail dans la plupart des cas. L'existence d'un cas de rigueur, sur laquelle se fondent les mesures prises dans le domaine de l'assurance-chômage n'est donc plus avérée. La RHT n'a pas pour but d'assurer la survie des entreprises ni de couvrir les pertes de chiffre d'affaires ou d'exploitation mais de sauvegarder les emplois. Sa raison d'être est d'éviter que le recul temporaire de la demande de biens et de services et les pertes de travail qui en résultent se traduisent à court terme par des licenciements. Par conséquent, le Conseil fédéral s'abstient d'étendre la RHT aux groupes suivants: (i.) Le risque de perdre leur emploi est faible pour les personnes qui ont une situation assimilable à celle d'un employeur, les conjoints et les partenaires enregistrés occupés dans l'entreprise, qui exercent en général des fonctions de direction et décident de leur taux d'occupation, tandis que le risque d'abus est élevé dans ce contexte (ii.). Le droit à l'indemnité en cas de RHT pour les apprentis a été supprimé pour que les entreprises s'occupent en priorité de poursuivre la formation des apprentis. Le projet de loi propose toutefois une base légale qui permettra aux formateurs de toucher l'indemnité en cas de RHT dans la mesure de leurs tâches de formation si l'entreprise formatrice a réduit son horaire de travail (iii.) Les travailleurs sur appel dont le taux de travail fluctue sensiblement, les travailleurs qui ont un emploi d'une durée déterminée et ceux qui sont au service d'une organisation de travail temporaire ne peuvent bénéficier de l'indemnité en cas de RHT car ils ne sont pas exposés au licenciement ou font habituellement face
à des variations du taux d'occupation. (iv.) Les personnes employées par un fournisseur de prestations publiques ont droit à l'indemnité en cas de RHT si elles sont exposées à un risque concret et immédiat de licenciement. Ce droit doit être examiné au cas par cas et ne peut pas uniquement dépendre de la forme juridique ou de l'entité responsable de l'entreprise (par ex. administration publique). (v.)

L'assurance-chômage, comme une grande partie des assurances sociales, garantit une compensation convenable du revenu, soit en principe 80 % de celui-ci. Elle n'a pas pour but de garantir la couverture des besoins et d'assurer un minimum vital.

Une compensation de 100 % du gain assuré en cas de revenu modeste affaiblirait 6384

FF 2020

considérablement toute incitation à reprendre une activité ou à se passer de l'indemnité en cas de RHT.

2.3.9

Dispositions pénales

Le Conseil fédéral ne voit aucune nécessité d'adapter les dispositions pénales dans le projet de loi. En particulier, il ne partage pas l'avis selon lequel l'art. 11 AP ne respecterait pas le principe de la légalité ou celui de la légalité des délits et des peines (pas de sanction sans loi). Le droit pénal accessoire couvre les dispositions pénales des lois administratives. Il se distingue par son caractère administratif accessoire; le comportement découlant de l'état de fait n'est pas en soi susceptible d'être réprimé pénalement, mais uniquement en rapport avec la violation d'une norme de droit administratif. Le droit pénal accessoire sert avant tout à la mise en oeuvre du droit matériel. La compétence d'édicter ces dispositions légales ne découle pas de l'art. 123, al. 1, Cst., mais de la compétence de la Confédération de légiférer dans le domaine du droit administratif concerné. Le domaine réglé à l'art. 11 AP, que le Conseil fédéral précisera dans la future ordonnance (dans le cadre des art. 2 et 3 du projet), porte sur les contraventions punies de l'amende et non sur les crimes et délits au sens de l'art. 10 du code pénal (CP)40. S'agissant du principe «pas de peine sans loi», la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH)41 n'exige pas par ailleurs une loi formelle au sens du droit suisse mais une base conforme au droit. La loi peut donc habiliter le Conseil fédéral à édicter des dispositions pénales. A moins qu'une norme de délégation n'en dispose autrement, le Conseil fédéral ne peut toutefois établir que des contraventions (cf. art. 103 ss CP). Il n'est pas nécessaire de préciser dans la loi que la poursuite pénale relève des cantons, comme le demandait la CI Commerce de détail Suisse. La juridiction cantonale, sous réserve des exceptions prévues par la loi, est réglée de manière générale à l'art. 22 du code de procédure pénale42. S'agissant des autres adaptations demandées dans le cadre de la consultation, notamment en ce qui concerne la négligence, on se référera au commentaire de l'article.

2.3.10

Exécution et durée de validité de la loi COVID-19

Le Conseil fédéral estime qu'il n'y a pas lieu d'adapter l'art. 12 AP, qui n'a pas suscité de remarques dans le cadre de la consultation. Aucun canton ni aucun parti ne sont explicitement prononcés sur cet article. Il n'en va pas de même de l'art. 13 AP: 4 cantons (OW, SG, GR, NE) ont proposé de limiter la validité de la loi à la fin 2021. Le PLR, le PS, l'UDC et quelques associations faîtières se sont prononcés pour une durée de validité plus courte. Le Conseil fédéral donne suite à ses avis en raccourcissant d'un an la durée de validité de la loi COVID-19 par rapport à l'avantprojet: l'art. 14, al. 2, du projet prévoit que la loi aura effet jusqu'au 31 décembre 40 41 42

RS 311.0 RS 0.101 RS 312.0

6385

FF 2020

2021, à l'exception des art. 1 et 11, let. a à c. Pour tenir compte du fonctionnement de l'assurance-chômage la loi doit avoir effet jusqu'au 31 décembre 2022. En effet, la durée des délais-cadres applicables à la période d'indemnisation et à la période de cotisation est habituellement de deux ans. Afin de garantir que toutes les personnes au chômage pendant les 6 premiers mois de validité de l'ordonnance COVID-19 du 20 mars 2020 assurance-chômage43, qui est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 1er mars 2020, puissent effectivement toucher les indemnités journalières ordinaires auxquelles elles ont droit, le délai-cadre d'indemnisation est prolongé de la durée du chômage pendant les 6 mois en question. La prolongation des délais-cadres au 31 décembre 2022 garantit que personne n'arrivera en fin de droits prématurément.

En outre, il peut arriver que des personnes s'annoncent de nouveau au chômage à partir du 1er septembre 2022 et demandent l'ouverture d'un nouveau délai-cadre d'indemnisation. Elles peuvent au besoin bénéficier de la prolongation du délaicadre de cotisation. Pour couvrir les deux éventualités, une prolongation au 31 décembre 2022 s'impose.

2.3.11

Droits politiques

Plusieurs cantons (ZH, BE, LE, OW, GL, FR, BS, AR, AI, AG, TI: avis semblable de SG) ont proposé d'autoriser le Conseil fédéral à, le cas échéant, exempter les électeurs de l'obligation de déposer personnellement leur bulletin de vote dans l'urne, en dérogation à l'art. 5, al. 3, de la loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques44. Le Conseil fédéral estime que la législation prévoit déjà des mesures moins radicales permettant de réduire le risque d'infection au COVID-19 en relation avec une votation populaire. Les électeurs ont par exemple été invités à voter par correspondance. Des mesures organisationnelles concernant le vote à l'urne sont également possible. Une interdiction générale, là où les bureaux de vote sont peu fréquentés, ne serait pas très utile du point de vue épidémiologique. En revanche, il serait problématique, d'un point de vue démocratique, de renoncer au vote à l'urne là où cette possibilité est encore très utilisée. Renoncer au vote à l'urne affecterait par ailleurs différemment les électeurs selon les cantons, le délai pour voter par correspondance, y compris pour déposer l'enveloppe de vote dans la boîte aux lettres communale, n'étant pas partout pareil. Il ne se justifie donc pas de déroger à la législation en vigueur.

2.3.12

Accueil extra-familial pour enfants

Un bon nombre de cantons et le PS demandent une disposition supplémentaire concernant l'accueil extra-familial pour enfants, respectivement l'ordonnance COVID-19 du 20 mai 2020 accueil extra-familial pour enfants45. Le Conseil fédéral rejette l'inclusion d'une telle disposition dans la loi COVID-19 pour les raisons 43 44 45

RS 837.033 RS 161.1 RS 862.1

6386

FF 2020

suivantes: (i.) les indemnités pour pertes financières sont une aide d'urgence qui doit être limitée à la période fixée par l'ordonnance. Les cantons doivent certes statuer sur droit à l'indemnité jusqu'au 16 septembre 2020. S'ils ne sont pas en mesure de statuer définitivement sur les demandes jusqu'à cette date, ils ont toutefois la possibilité de rendre des décisions sous réserve. Il n'est pas nécessaire de prolonger la durée de validité de l'ordonnance à cet effet. (ii.) Le Parlement a déjà demandé plusieurs fois d'étendre le droit aux indemnités pour pertes financières aux institutions publiques d'accueil extra-familial pour enfants. Le Conseil fédéral s'y est toujours refusé. (iii.) L'accueil extra-familial pour enfants relève en premier lieu des cantons et des communes. En situation de crise, il leur appartient donc d'assumer leur responsabilité et de couvrir les pertes. Le soutien de la Confédération est une aide d'urgence destinée à des organismes privés dont l'existence est menacée par la perte de revenus. (iv.) Le coût de cette aide d'urgence est estimé à 65 millions de francs. Si la Confédération devait assumer les pertes des institutions publiques, elle devrait assumer des coûts supplémentaires d'environ 20 millions de francs, pour lesquels elle ne dispose d'aucun crédit. La distinction entre organisme privé et organisme public existe également en ce qui concerne l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail: les pouvoirs publics de la Confédération n'ont pas à assumer les pertes financières d'autres institutions publiques.

3

Commentaire des dispositions

Force est de constater que les ordonnances édictées par le Conseil fédéral pour lutter contre l'épidémie de COVID-19 ont donné lieu à des différences dans les termes 46 .

Dans le projet de loi, il est question uniformément de COVID-19 pour désigner la maladie causée par le virus et d'épidémie de COVID-19 pour désigner la propagation de cette maladie. Le terme de pandémie, inconnu du droit suisse en matière d'épidémies, a été écarté47. Cela permettra en outre d'éviter de créer un certain flou si l'OMS déclare la fin de la pandémie mais que la Suisse a encore besoin de mesures législatives ou a lié des droits et des obligations à la notion de pandémie.

Les dispositions du projet de loi suivent l'ordre des domaines dans le recueil systématique du droit fédéral (RS), à l'exception des art. 2 et 3, qui, ayant pour objet les mesures épidémiologiques, constitue le coeur du projet et doit être placé au début du texte afin de traduire l'importance de ces mesures et d'en assurer la visibilité.

Art. 1

Objet et principes

La fonction du projet de loi est la suivante: le législateur habilite le Conseil fédéral à poursuivre les mesures qu'il a prises. Le projet formule un certain nombre de 46 47

Voir Stefan Höfler, Notrecht als Krisenkommunikation?, Aktuelle Juristische Praxis (PJA) 2020/6, p. 702 à 709.

Il faut noter que dans le domaine des assurances, les termes d'épidémie et de pandémie sont utilisés avec des définitions et des formulations parfois différentes ­ voir par ex. le communiqué du 15 mai 2020 de l'ombudsman de l'assurance privée et de la suva.

Leur interprétation fait actuellement l'objet de controverses. Le choix fait dans la loi proposée n'anticipe pas l'issue de ces dernières.

6387

FF 2020

normes de délégation, limitées matériellement par le fait que ces mesures doivent être liées directement et exclusivement à l'épidémie de COVID-19. Ce texte ne saurait servir de base légale valable pour des ordonnances dans le contexte d'autres épidémies ou de questions qui n'ont qu'indirectement à voir avec l'épidémie de COVID-19. Sur le plan juridique, cette délimitation est garantie par le fait que la loi est limitée à la lutte contre l'épidémie de COVID-19 et à la maîtrise des conséquences de cette dernière pour la société, l'économie et les autorités.

Al. 1 Le Conseil fédéral dispose de nombreuses compétences d'édicter des ordonnances, fondées sur des lois spéciales, auxquelles il a eu recours dans la gestion de l'épidémie et qu'il peut continuer d'utiliser. Certaines dispositions lui permettent aussi de déroger à la loi (par ex. art. 62 de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite [LP]48). Le présent projet de loi lui octroie, en sus de ces normes de délégation légales, des pouvoirs supplémentaires ­ clairement circonscrits sur le plan matériel ­ pour une période bien précise. L'art. 1 de la loi, qui parle de «compétences particulières», met en évidence le fait qu'il s'agit de compétences fondées sur une base légale formelle et distinctes des compétences déjà prévues dans d'autres lois.

Ces normes de délégation couvrent d'une part les mesures qui servent directement à lutter contre l'épidémie, notamment celles de l'ordonnance 3 COVID-19 (mesures primaires), et d'autre part les mesures qui servent à surmonter les conséquences, des mesures épidémiologiques ordonnées par le Conseil fédéral (mesures secondaires, cf. ch. 1.2).

Al. 2 La loi est de durée limitée (cf. art. 14 et son commentaire). Cela ne signifie pas que le Conseil fédéral pourra et devra prendre toutes les mesures qu'elle autorise et que celles-ci resteront en vigueur jusqu'au terme de sa durée de validité. L'al. 2 souligne que le Conseil fédéral ne fera usage des compétences qu'elle lui confère qu'aussi longtemps et dans la mesure où elles seront nécessaires pour gérer l'épidémie de COVID-19. Ce principe et la réserve de la nécessité garantissent que les ordonnances que le Conseil fédéral édictera en vertu de la présente loi pourront faire l'objet d'un contrôle accessoire des normes sur le plan
de leur nécessité. S'il s'avère qu'une mesure n'est plus utile, le Conseil fédéral abrogera les dispositions d'ordonnance correspondantes en tout ou partie ou ne les édictera pas avant que la loi soit caduque. Il n'est pas tenu ni autorisé à édicter ou à maintenir des mesures qui ne sont pas (ou plus) nécessaires. L'art. 60a, al. 8, LEp prévoit une règle similaire pour le système de traçage de proximité Al. 3 Cet alinéa établit le principe selon lequel le Conseil fédéral associe les cantons à l'élaboration des mesures qui touchent leurs compétences. Il vise à garantir que les cantons pourront ainsi participer adéquatement à la définition de la position et à 48

RS 281.1

6388

FF 2020

l'élaboration des décisions concernant la conception des mesures. Le Conseil fédéral et l'administration associeront donc les cantons au processus d'élaboration des mesures aussi tôt que possible. Lorsque le temps presse, les échanges entre les cantons d'un côté et le Conseil fédéral et l'administration de l'autre côté auront lieu, comme aujourd'hui, en premier lieu dans le cadre des conférences concernées. Pour les questions sanitaires, ce sera par exemple la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) et pour les questions policières ce sera la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) (cf. ch. 2.3.1).

Art. 2

Mesures dans le domaine des capacités sanitaires

L'art. 2, avec l'art. 3, forme la base légale des mesures épidémiologiques édictées dans l'ordonnance 2 COVID-19 ou dans l'ordonnance 3 COVID-19 qui l'a remplacée qui ne peuvent pas se fonder sur l'art. 6 LEp ou d'autres compétences réglementaires spécifiques de la LEp (cf. ch. 1.4) mais qui doivent être reconduites.

Il s'agit des mesures suivantes, actuellement réglées dans l'ordonnance 3 COVID-19: ­

mesures à la frontière (art. 4 à 10a de l'ordonnance 3 COVID-19; en partie art. 41, al. 1, LEp)

­

approvisionnement en biens médicaux importants (art. 11 à 24 de l'ordonnance 3 COVID-19; en parti art. 44, al. 1, LEp)

­

capacités des hôpitaux et des cliniques (art. 25 de l'ordonnance 3 COVID-19)

­

prise en charge des analyses SARS-CoV-2 (art. 26 et 26a de l'ordonnance 3 COVID-19).

La présente loi doit créer la base légale nécessaire à ces mesures.

La collecte des données des participants ou des visiteurs par les organisateurs de manifestations et les exploitants d'installations ou d'établissements accessibles au public prévue dans les plans de protection au sens de l'art. 4 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière ne nécessite pas de base légale dans la loi COVID-19. La collecte et la conservation de ces données ont pour but exclusif leur transmission aux médecins cantonaux dans le cadre du traçage des contacts, conformément à l'art. 33 LEp. Une disposition explicite à ce sujet a été inscrite à l'art. 5 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière et dans son annexe: elle règle l'information des personnes concernées, les catégories de données collectées (nom et numéro de téléphone), le but du traitement des données, leur conservation et leur suppression. L'obligation qu'ont les organisateurs et les exploitants de collecter les données est une limitation visant les manifestations et s'inscrit dans la liste des mesures prévues par les art. 30 à 40 LEp. En situation particulière, c'est au Conseil fédéral qu'il revient d'ordonner ce type de mesure Al. 1 L'obligation de communiquer prévue permet de recenser les stocks de médicaments et de dispositifs médicaux (produits thérapeutiques), d'équipements de protection et 6389

FF 2020

d'autres biens médicaux importants pour le maintien des capacités sanitaires (cf.

art. 13 de l'ordonnance 3 COVID-19). Il sera ainsi possible de constater là où il y a pénurie et de prendre, si nécessaire, les mesures prévues à l'al. 2 afin de soutenir les cantons de manière ciblée dans leurs tâches d'approvisionnement et, s'il le faut, les approvisionner de manière ciblée (en particulier leurs établissements de santé).

L'obligation de communiquer porte sur les stocks de produits thérapeutiques et d'équipements de protection détenus par les fabricants, les distributeurs, les laboratoires, les établissements de santé et d'autres établissements des cantons (en premier lieu les hôpitaux). Au besoin, les stocks des cliniques vétérinaires pourront aussi faire l'objet d'une communication, dans la mesure où celles-ci utilisent des médicaments à usage humain soumis à l'obligation de communiquer. En relation avec les stocks à communiquer, l'ordonnance 3 COVID-19 contient une liste des médicaments, dispositifs médicaux, équipements de protection et autres biens médicaux importants, tels que les désinfectants et les articles d'hygiène en médecine intensive, nécessaires pour prévenir et combattre le coronavirus.

Le terme générique «biens médicaux importants» est introduit à l'al 1 pour désigner les produits thérapeutiques, les équipements de protection et les autres biens importants pour le maintien des capacités sanitaires.

Al. 2 Le Conseil fédéral peut ordonner une série de mesures pour garantir un approvisionnement suffisant de la population en biens médicaux importants. Ces mesures peuvent également être prises si une pénurie est à craindre: elles ont toutefois pour but de soutenir les cantons dans l'exercice de leur responsabilité et les activités des acteurs privés (cf. al. 3). Il existe certains recoupements avec les compétences que la LEp confère au Conseil fédéral pour assurer l'approvisionnement en produits thérapeutiques. Etant donné la forte connexion matérielle entre ce dernier et l'approvisionnement en d'autres biens médicaux, et afin d'éviter des lacunes de compétence, on a choisi d'englober dans l'al. 2 l'ensemble de ces mesures, à titre de complément aux possibilités qu'offre par ailleurs la législation sur les épidémies et notamment l'art. 44 LEp.

Let. a Le Conseil fédéral pourra se
fonder sur la let. a pour prévoir des dérogations aux dispositions de la loi du 15 décembre 2000 sur les produits thérapeutiques (LPTh)49 réglant l'importation de médicaments (voir art. 22 de l'ordonnance 3 COVID-19).

Le but est de pouvoir exempter des restrictions en vigueur certains traitements prometteurs pour les patients atteints du COVID-19 en Suisse. Ainsi, les centres de traitement en Suisse disposent d'une gamme aussi large que possible de canaux d'acquisition.

Let. b Cette disposition habilite le Conseil fédéral à prévoir des dérogations au régime de l'autorisation prévu par des lois fédérales pour des activités en relation avec des biens médicaux importants ou à assouplir les conditions d'autorisation afin d'amé49

RS 818.21

6390

FF 2020

liorer l'approvisionnement. Cette compétence touche en premier lieu les autorisations délivrées par l'Institut suisse des produits thérapeutiques (Swissmedic) à des établissements et des professionnels en vertu de la LPTh.

Let c.

En vertu de la let. c, le Conseil fédéral peut prévoir des dérogations à l'autorisation de mise sur le marché de médicaments ou adapter les conditions liées à l'autorisation de mise sur le marché ou la procédure d'autorisation de mise sur le marché (cf.

art. 21 de l'ordonnance 3 COVID-19). Seuls peuvent être exemptés les produits pour lesquels a été déposée une demande d'autorisation. L'objectif est de mettre le plus rapidement possible à la disposition des patients en Suisse l'expérience acquise dans la pratique médicale et les traitements prometteurs. Une mise sur le marché sans autorisation est possible uniquement pour les médicaments qui contiennent certaines substances actives (cf. médicaments énumérés à l'annexe 5 de l'ordonnance 3 COVID-19).

Let. d Les dérogations aux dispositions sur l'évaluation de la conformité des dispositifs médicaux ainsi qu'aux dispositions sur la procédure d'évaluation et la mise sur le marché d'équipements de protection visent à assurer que des dispositifs médicaux et des équipements de protection nécessaires pour combattre l'épidémie de COVID-19 en Suisse soient rapidement et facilement accessibles (cf. art. 23 et 24 de l'ordonnance 3 COVID-19). La délégation proposée habilite le Conseil fédéral à autoriser par voie d'ordonnance la mise sur le marché de dispositifs à titre d'exception, lorsque certaines conditions sont remplies.

Let. e Cette disposition habilite le Conseil fédéral à acquérir lui-même des biens médicaux importants (cf. art. 14 de l'ordonnance 3 COVID-19). Cette compétence complète l'art. 44 LEp, qui ne porte que sur les produits thérapeutiques.

La Confédération n'exercera toutefois cette compétence que pour soutenir l'approvisionnement des cantons et de leurs établissements de santé, d'organisations d'utilité publique (par ex. Croix-Rouge suisse) et de certains tiers (par ex. laboratoires, pharmacies) si les canaux d'acquisition habituels ne permettent pas de couvrir les besoins. Les besoins en biens médicaux importants sont déterminés sur la base de l'obligation de communiquer prévue à l'al. 1. Les autorités fédérales
compétentes pourront charger des tiers d'acquérir des biens médicaux importants. En vertu de l'art. 13, al. 1, let. d, de l'ordonnance du 11 décembre 1995 sur les marchés publics50, les acquisitions urgentes peuvent se faire dans le cadre de procédures de gré à gré. L'acquisition de biens médicaux importants pourra également se faire en dérogation aux directives en vigueur et à la loi du 7 octobre 2005 sur les finances (LFC)51, par exemple avec des paiements d'avance sans garantie ou couverture des risques de change. La situation du marché des équipements de protection personnels, découlant de l'épidémie de COVID-19, rend les contrats sans acomptes ou paiements d'avance problématiques.

50 51

RS 172.056.11 RS 611.0

6391

FF 2020

Le Conseil fédéral règle également, en s'appuyant sur sa compétence en matière d'approvisionnement, le financement et le remboursement des coûts par les cantons, les organisations d'utilité publique et les tiers auxquels les biens sont remis (cf.

art. 18 de l'ordonnance 3 COVID-19). La Confédération préfinance l'acquisition des biens médicaux importants lorsque c'est elle qui les acquiert, et facture aux preneurs, le plus souvent les cantons, les coûts liés à l'achat de ces biens. Elle prend par ailleurs en charge les coûts de livraison des biens médicaux importants aux cantons.

Les cantons prennent en charge les coûts liés à la redistribution sur leur territoire.

Let. f Le Conseil fédéral peut prévoir l'attribution, la livraison et la distribution de biens médicaux importants (cf. art. 15 et 16 de l'ordonnance 3 COVID-19). Conçue comme une redistribution, l'attribution porte aussi sur tous les biens médicaux importants confisqués en vertu de la let. h. Il peut se poser des questions de répartition lorsque la quantité disponible ne suffit pas pour traiter toutes les personnes menacées ou malades. Si, malgré toutes les mesures de précaution, une pénurie survient, l'attribution doit être déterminée en fonction d'une liste de priorités et d'une clef de répartition. Si nécessaire, les cantons font une demande à la Confédération, en vue de l'attribution concrète d'une certaine quantité conformément à cette clef de répartition. Le Conseil fédéral peut également régler la répartition des biens médicaux. En particulier, il lui incombe de préciser la clef de répartition et les aspects pratiques de l'attribution aux cantons ou à la population. La livraison des produits thérapeutiques et des équipements de protection a lieu sous la responsabilité de la Confédération. Celle-ci peut charger des tiers (par ex. des entreprises privées de distribution) d'y procéder. La Confédération ou les tiers qu'elle a mandatés veillent à la livraison des biens médicaux importants aux services centraux de livraison des cantons, ou directement aux établissements et organisations bénéficiaires.

Dans la mesure du possible les cliniques et les cabinets vétérinaires seront pris en considération pour l'attribution notamment de médicaments également utilisés en médecine vétérinaire qui permettent d'effectuer des interventions
urgentes pour le bien-être des animaux.

Let. g Cette disposition vise la vente directe de biens médicaux (cf. art. 17 de l'ordonnance 3 COVID-19). La Pharmacie de l'armée est autorisée, au plus tard jusqu'au retour à une situation normale ou à la mise en place d'une stratégie d'approvisionnement ou de stocks obligatoires, à vendre aux utilisateurs du domaine de la santé et aux cantons les biens qu'elle a acquis. Les preneurs doivent s'acquitter des coûts liés à l'achat ou payer les prix du marché. La Pharmacie de l'armée entre directement en concurrence avec les fournisseurs privés, ce qui contribue à la compétition économique. La disposition proposée crée la base légale nécessaire à la fourniture de prestations commerciales, comme l'exige l'art. 41 LFC.

Let. h Cette disposition habilite le Conseil fédéral à ordonner la confiscation de biens médicaux importants (cf. art. 19 de l'ordonnance 3 COVID-19). Si l'approvisionnement en biens médicaux importants ne peut pas être garanti, il peut obliger certains cantons ou établissements de santé publics qui disposent de suffisamment de 6392

FF 2020

stocks de médicaments à en livrer une partie à d'autres cantons ou établissements de santé. Il peut aussi confisquer des produits thérapeutiques ou d'autres biens médicaux de particuliers. La Confédération verse une indemnité appropriée pour les biens confisqués.

Let. i Cette disposition donne au Conseil fédéral, si l'approvisionnement en biens médicaux ne peut pas être garanti autrement, la compétence d'obliger des fabricants à produire des biens médicaux importants, à donner la priorité à la production de ces biens ou à augmenter les quantités produites (cf. art. 20 de l'ordonnance 3 COVID-19). La Confédération indemnise les fabricants s'ils subissent un préjudice financier suite au changement de production.

Ces mesures constituent indubitablement une atteinte grave à la liberté économique et ne doivent donc être ordonnées que si aucune autre mesure ne permet d'atteindre l'objectif visé, conformément au principe de la proportionnalité.

Al. 3 Les cantons et les particuliers, y compris leurs établissements de santé, sont en principe toujours responsables de leur propre approvisionnement en biens médicaux importants. Les instruments énumérés à l'al. 2, let. e à i, ne servent qu'à soutenir les cantons dans cette tâche. Les compétences prévues ne doivent donc être exercées que si l'approvisionnement ne peut être garanti par les cantons et les particuliers et qu'il y a pénurie ou risque de pénurie. Rien ne s'oppose à ce que des mesures prises soient menées à terme, même si l'approvisionnement s'est amélioré dans l'intervalle. La distribution et la vente directe de biens acquis pendant une pénurie demeurent donc possibles même lorsque les canaux de distribution et de vente habituels sont à nouveaux disponibles. La Confédération entrera alors sur le marché conformément à la situation de celui-ci, indépendamment des conditions d'achat.

Al. 4 Les cantons sont responsables de l'approvisionnement. Ceux-ci doivent assurer que les hôpitaux et les cliniques disposent de capacités suffisantes non seulement pour traiter les maladies COVID-19 mais aussi pour les autres examens et traitements urgents. On vise essentiellement les lits et le personnel, mais aussi tous les autres aspects pertinents pour une bonne prise en charge des patients (par ex. médicaments). Au regard du nombre de patients qui pourraient
avoir besoin d'une prise en charge médicale à la suite d'une infection au COVID-19, les capacités et ressources des hôpitaux et cliniques publics ou ayant un mandat public de prestations risquent d'être insuffisantes.

En vertu de la présente disposition, le Conseil fédéral peut autoriser les cantons à ordonner les mesures qui s'imposent pour garantir les capacités nécessaires. La base légale permettant aux cantons de prendre les mesures nécessaires est ainsi créée pour toute la Suisse.

Les cantons peuvent se fonder sur celle-ci pour interdire ou restreindre certaines activités médicales. Ils pourront prendre des mesures pour traiter les maladies COVID-19 et assurer d'autres traitements urgents, afin de garantir des capacités 6393

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sanitaires suffisantes. Compte tenu des mesures prises jusqu'ici ou des mesures en vigueur (cf. art. 25 de l'ordonnance 3 COVID-19): ­

Les cantons peuvent obliger les hôpitaux et les cliniques privés et publics à mettre à disposition des capacités dans le domaine stationnaire. Il ne s'agit pas uniquement d'accueillir des patients dans certains établissements mais aussi de déplacer du personnel pour l'utiliser là où c'est nécessaire.

­

De plus, les cantons peuvent ordonner si nécessaire aux hôpitaux et aux cliniques de limiter ou de suspendre les examens et les traitements non urgents.

En cas de besoin, cette mesure peut s'appliquer au domaine ambulatoire. En ce qui concerne la notion «examens et traitements non urgents» (ou «interventions électives»), on considère comme telles les interventions qui peuvent être réalisées à une date ultérieure sans que la personne concernée risque de subir d'autres inconvénients que des atteintes ou des troubles physiques et psychiques mineurs. Les interventions qui sont réalisées, principalement ou entièrement, à des fins esthétiques ou pour améliorer les performances et le bien-être sont également considérées comme non urgentes.

­

Vu la situation tendue en matière d'approvisionnement, les hôpitaux et les cliniques sont également tenus de garantir un approvisionnement suffisant en médicaments importants pour le traitement des maladies COVID-19 et pour les traitements urgents (par ex. sédatifs, relaxants musculaires). Si nécessaire, la Confédération peut continuer à attribuer les médicaments rares servant à traiter les patients atteints du COVID-19, car il faut éviter que des interventions électives ne mènent à une pénurie pour ces patients. Pour cette raison, les hôpitaux et les cliniques peuvent planifier des interventions de ce type uniquement s'ils disposent de stocks suffisants de médicaments importants, que ce soit dans le domaine stationnaire ou ambulatoire.

Les cantons étant responsables de l'approvisionnement, le Conseil fédéral ne pourra pas imposer directement des obligations aux établissements de santé; ses compétences en situation d'urgence ou en situation extraordinaire sont réservées.

Al. 5 Se fondant sur cette disposition, le Conseil fédéral pourra régler la prise en charge des coûts des tests pour le diagnostic d'une infection au SARS-Cov-2 ou d'une maladie COVID-19 (analyses COVID-19), notamment des analyses diagnostiques de biologie moléculaire et sérologiques (cf. art. 26 et 26a de l'ordonnance 3 COVID-19). Jusqu'au 25 juin 2020, la prise en charge des coûts était réglée comme suit: Les coûts des tests SARS-CoV-2 étaient pris en charge par les assurances sociales (assurance-maladie, assurance-accidents, assurance militaire) ou par les cantons conformément à la LEp (canton de résidence de la personne concernée) s'ils n'étaient pas remboursés par les assurances sociales. Seuls étaient pris en charge les coûts des tests PCR (analyses diagnostiques de biologie moléculaire et sérologiques) effectués sur les personnes remplissant les critères définis par l'OFSP mais pas les tests rapides ou les tests sérologiques visant à détecter des anticorps.

Cette réglementation a suscité de problèmes pratiques et a fait l'objet de critiques de plus en plus fréquentes du Parlement, des cantons et des fournisseurs de prestations: 6394

FF 2020

­

La différence des coûts pour les patients a été jugée injuste: en cas de prise en charge par l'assurance obligatoire des soins, la franchise et la quote-part étaient à la charge de l'assuré, alors que les cantons prenaient en charge la totalité des coûts.

­

Le modèle de financement a entraîné une charge d'exécution supplémentaires pour les cantons, faute de processus de décompte avec les laboratoires et les cabinets médicaux.

­

Le modèle de financement pouvait inciter les patients et les responsables cantonaux du traçage des contacts à faire moins de tests que ce qui était possible et aurait été judicieux.

Le Conseil fédéral a simplifié le système et prévu un financement des tests par la Confédération, en adéquation avec le rôle central que celle-ci a assumé dans la phase d'endiguement, en définissant des critères de test et en mettant à disposition l'application SwissCovid. La solution proposée garanti en outre l'accès gratuit au test pour les personnes informées par l'application de leur exposition potentielle au SARSCov-2, tel que le Parlement l'a explicitement voulu (art. 60a, al. 4, LEp). Depuis le 25 juin 2020, la Confédération prend en charge les coûts des analyses diagnostiques de biologie moléculaire et sérologiques SARS-CoV-2 effectuées en ambulatoire chez les personnes qui remplissent les critères de suspicion, de prélèvement d'échantillons et de déclaration de l'OFSP dans leur version du 24 juin 2020 52, sur la base de la nouvelle stratégie d'échantillonnage de l'OFSP.

Les analyses diagnostiques de biologie moléculaire et sérologiques qui permettent d'établir un diagnostic en cas d'apparition de symptômes compatibles avec le COVID-19 sont recommandées pour: ­

les personnes symptomatiques qui répondent aux critères cliniques d'échantillonnage (y compris celles qui présentent des symptômes moins fréquents);

­

les personnes ayant reçu une notification de contact avec un cas de COVID-19 par l'application SwissCovid et qui sont asymptomatiques.

Les personnes ayant eu un contact étroit avec un cas de COVID-19 qui sont asymptomatiques et mises en quarantaine par les autorités peuvent également être testées (par PCR ou par test sérologique). L'indication est posée par le service cantonal compétent. Si cela se justifie, les médecins cantonaux peuvent toujours décider de tester des personnes asymptomatiques (par PCR ou par test sérologique) lorsque cela est nécessaire pour investiguer et contrôler une flambée, même si les exigences cidessus ne sont pas satisfaites. La Confédération prend en charge les coûts de ces analyses.

Les coûts des tests sérologiques sont désormais aussi pris en charge, comme ceux des tests PCR. Cela correspond à la volonté du Parlement: la modification du 19 juin 202053 de la LEp en relation avec l'introduction du système de traçage de proximité permet de se soumettre gratuitement à un test d'identification du SARS-Cov-2 et à 52

53

Critères consultables sous www.ofsp.admin.ch > Maladies > Lutter contre les maladies infectieuses > Systèmes de déclaration pour maladies infectieuses > Maladies infectieuses à déclaration obligatoire > Formulaires de déclaration RO 2020 2191

6395

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un test sérologique de mise en évidence des anticorps au SARS-Cov-2, afin d'inciter le plus grand nombre possible de personnes à utiliser ce système.

Les assureurs se chargent du décompte et du remboursement des prestations. Ils facturent le montant total à la Confédération. Pour simplifier la procédure, la Confédération pend en charge un montant forfaitaire par test.

Art. 3

Mesures dans le domaine de la protection des travailleurs

Cette disposition autorise, à l'al. 1, le Conseil fédéral à ordonner des mesures visant à protéger les travailleurs vulnérables et en particulier à imposer des obligations à cet effet aux employeurs. Jusqu'au retour à la situation particulière, le 19 juin 2020, des règles dans ce sens figuraient dans l'ordonnance 2 COVID-19 (cf. art. 10b et 10c l'ordonnance 2 COVID-19). Si la situation épidémiologique venait à se dégrader, il pourrait cependant être nécessaire de reconduire ces mesures sous une forme adaptée. En l'état actuel des connaissances, les personnes vulnérables sont les personnes de 65 ans et plus et celles qui souffrent notamment des pathologies suivantes: hypertension artérielle, diabète, cancer, maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires chroniques, faiblesse immunitaire due à une maladie ou à un traitement et cancer. Le Conseil fédéral a précisé ces catégories sur la base de critères médicaux.

Pour protéger les travailleurs vulnérables, le Conseil fédéral a précisé dans quelles conditions les personnes vulnérables peuvent continuer à travailler et quand elles doivent être libérées de leur obligation de travailler avec maintien du paiement de leur salaire. Les employeurs devaient notamment permettre à leurs employés vulnérables de s'acquitter depuis chez eux des obligations prévues dans leur contrat de travail ou d'autres tâches équivalentes. Si, pour des raisons d'exploitation, la présence d'employés vulnérables sur place était partiellement ou entièrement indispensable, ces derniers pouvaient exercer leur activité habituelle sur place, pour autant que des conditions strictes soient remplies (aménagement du poste sans contact étroit avec d'autres personnes et principe STOP54). Si aucune des possibilités ne convenait, l'employé devait être libéré de son obligation de travailler avec maintien du paiement de son salaire.

L'employeur est tenu de prendre et de mettre en oeuvre les mesures de prévention nécessaires. Il s'agit d'une part des mesures que le Conseil fédéral ordonne en vertu des compétences que lui confèrent la LEp et la loi du 13 mars 1964 sur le travail (LTr)55 et d'autre part des autres mesures qu'il ordonne pour les travailleurs vulnérables, en se fondant sur l'al. 1. En application des dispositions visant à protéger la santé prévues à l'art. 6 LTr, si l'employeur
prend de telles mesures, en vertu de l'al. 2 de la présente disposition leur exécution relève des organes d'exécution de la LTr et de de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'assurance-accidents (LAA)56 (art. 11 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière).

La protection de la santé et la sécurité du travail sont les deux principes qui régissent l'exécution dans le domaine du travail. La protection de la santé se fonde sur la LTr 54 55 56

STOP = Substitution, Technique, Organisation, Personnel RS 822.11 RS 832.20

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et relève des inspections cantonales du travail et du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO). Quant à la sécurité du travail (prévention des accidents et des maladies professionnels), elle est inscrite dans la LAA et est financée par un supplément de prime destiné à la prévention des accidents et maladies professionnels, qui est géré par la Commission fédérale de coordination pour la sécurité au travail (CFST). Les organes d'exécution prévus par la LAA dans le domaine de la sécurité du travail sont la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) et ceux de la LTr. Les inspections cantonales du travail et le SECO assument donc également des tâches d'exécution dans ce domaine. Les frais supportés par la CNA et les organes d'exécution de la LTr dans le domaine de la sécurité du travail sont couverts par le supplément de prime destiné à la prévention des accidents et maladies professionnels.

La protection de la santé ne relève pas de la CNA mais des inspections cantonales du travail et du SECO. En raison de son obligation de participer au contrôle des mesures de prévention sur les chantiers et dans l'industrie, la CNA assume une tâche qui ne relève pas de son domaine de responsabilité car les mesures visant à protéger les travailleurs d'une infection au COVID-19 relèvent de la protection de la santé.

L'art. 91 de l'ordonnance du 19 décembre 1983 sur la prévention des accidents57 règle les frais couverts par le supplément de prime pour la prévention des accidents et maladies professionnels. Les frais des organes d'exécution dans le domaine de la protection de la santé n'en font pas partie, aussi les frais supportés par la CNA dans le cadre de ses contrôles liés au COVID-19 ne pourraient-ils pas, en principe, être couverts par ce supplément.

Dans un souci de pragmatisme, il est prévu que les frais des contrôles COVID-19 seront par le supplément de prime pour la prévention des accidents et maladies professionnels. Cette exception, clairement définie, se justifie. Elle est soutenue par les partenaires sociaux, qui sont prêts à accepter que le supplément de prime prévu par la LAA soit utilisé à cet effet pour que les chantiers et les entreprises puissent continuer à travailler dans le respect, d'ailleurs aussi contrôlé par la CNA, des mesures d'hygiène et des plans de protection.

Art. 4

Mesures dans le domaine des étrangers et de l'asile

Cet article contient une énumération exhaustive des points sur lesquels le Conseil fédéral peut déroger à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI)58 et à la loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LASi)59. Les dispositions devront être adaptées régulièrement à la situation et se limiter aux mesures indispensables. Actuellement, il n'est pas exclu que les mesures prises par le Conseil fédéral pour lutter contre l'épidémie de COVID-19 dans le domaine des étrangers et de l'asile doivent être prolongées.

57 58 59

RS 832.30 RS 142.20 RS 142.31

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Let. a Cette disposition crée la base légale permettant de reconduire au-delà du 12 septembre 2020 les restrictions d'entrée et d'admission des étrangers en cas de besoin avéré. Le Conseil fédéral pourra restreindre le franchissement de la frontière pour les étrangers venant d'un pays ou d'une zone à risque. Il pourra aussi restreindre l'admission en vue d'un séjour des ressortissants de l'UE/AELE ou de pays tiers.

L'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP)60 prévoit que les droits octroyés par les dispositions de l'accord peuvent être limités par des mesures justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique (art. 5 de l'annexe I de l'ALCP).

Le Conseil fédéral a ordonné le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de Schengen en raison de la situation et du risque, dans le cadre de l'ordonnance 2 COVID-19, en accord avec les règles du code frontières Schengen, qui donne aux Etats le droit réintroduire temporairement les contrôles de personnes aux frontières intérieures s'ils le jugent nécessaire en raison d'une menace pour l'ordre public et la sécurité. Il a en même temps fortement restreint le franchissement de la frontière par les personnes venant de pays et zones à risque. Au début de l'épidémie, seuls pouvaient entrer en Suisse les étrangers titulaires d'un titre de séjour suisse, d'une autorisation frontalière, d'un visa délivré par la Suisse avec comme motif «discussion d'affaires» ou «visite officielle», d'une autorisation d'entrée, accompagnée d'un visa délivré par la Suisse, d'une assurance d'autorisation de séjour ou d'une attestation d'annonce ou encore les spécialistes dans le domaine de la santé.

La situation épidémiologique s'étant améliorée, le Conseil fédéral a décidé des allègements par étapes dans le domaine des migrations, comme dans le domaine intérieur.

Let. b Cette disposition permet au Conseil fédéral de prolonger certains délais prévus par la LEI si l'épidémie de COVID-19 empêche de les respecter. Ce sont les délais pour le regroupement familial (ch. 1), les délais dans lesquels les autorisations de séjour prennent fin (ch. 2) et les délais pour la nouvelle saisie des données biométriques
lors de l'établissement ou de la prolongation d'une autorisation (ch. 3).

Let. c Cette disposition permettra de prolonger les dispositions prises dans l'ordonnance COVID-19 du 1er avril 2020 asile au-delà de sa durée de validité initiale, en cas de besoin avéré.

La mise en oeuvre des mesures du Conseil fédéral et des recommandations de l'OFSP visant à endiguer l'épidémie de COVID-19 pose aussi de grands défis au domaine de l'asile. La grande majorité des requérants d'asile est hébergée dans des centres de la Confédération pendant la procédure d'asile (art. 24, al. 3, LAsi). Environ 20 % d'entre eux sont hébergés dans des structures cantonales, souvent collectives. Or, c'est précisément dans les hébergements collectifs que les mesures de lutte 60

RS 0.142.112.681

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contre l'épidémie telles que la «distanciation sociale» posent des difficultés au SEM et aux cantons. Le déroulement de la procédure d'asile, notamment les auditions des requérants, auxquelles assistent plusieurs personnes (par ex. requérant, collaborateur du SEM menant l'audition, interprète, représentant légal et procès-verbaliste) et qui peuvent durer plusieurs heures, représentent également un défi.

Le SEM a pris de nombreuses mesures urgentes pour protéger les personnes participant à la procédure d'asile et pour mettre en oeuvre les prescriptions du Conseil fédéral et de l'OFSP (accroissement des capacités d'hébergement, installations telles que des vitres de séparation en plexiglas, désinfection régulière des salles d'interrogatoire, etc.). En outre, le Conseil fédéral a adopté l'ordonnance COVID-19 asile, le 1er avril 2020, qui déroge sur quelques points à la LAsi. Ce sont principalement des règles sur les auditions (art. 4 à 6 de l'ordonnance COVID-19 asile), des mesures assurant les capacités suffisantes des centres de la Confédération (art. 2 et 3 de l'ordonnance COVID-19 asile) et une prolongation des délais de départ dans les procédures d'asile et de renvoi (art. 9 de l'ordonnance COVID-19 asile). Cet acte est entré en vigueur de manière échelonnée, les 2 et 6 avril 2020 (art. 12 de l'ordonnance COVID-19 asile).

En vertu de l'art 4, let. c, le Conseil fédéral doit donc pouvoir édicter des dispositions dérogeant à la LEI et à la LAsi en ce qui concerne l'hébergement des requérants d'asile et l'exécution des procédures d'asile et de renvoi. A la différence de l'avant-projet, l'art. 4, let. c, prévoit explicitement que, ce faisant, il doit tenir compte de manière appropriée de la protection de la santé. Cette disposition vise à garantir que les procédures d'asile et de renvoi pourront être exécutées même en temps de crise, que la Suisse sera en mesure de respecter ses engagements internationaux et que les personnes qui n'ont pas besoin d'être protégées seront systématiquement renvoyées. Les procédures d'asile et de renvoi doivent être exécutées de manière équitable et conforme à l'état de droit même en période de crise épidémique et les engagements internationaux doivent être respectés. En ce qui concerne l'hébergement des requérants d'asile, des mesures de protection de la santé doivent
être prises là où elles sont nécessaires (par ex. mise à disposition de capacités suffisantes, amélioration des locaux). Ces mesures concernent les centres de la Confédération, comme le précise désormais l'art. 4, let. c, à la différence de l'avant-projet.

Les cantons restent responsables de l'hébergement des requérants d'asile qui leur ont été attribués. Ils sont donc responsables des mesures à prendre dans les centres cantonaux en relation avec l'épidémie.

Art. 5

Mesures dans le domaine de la justice et du droit procédural

Le Conseil fédéral a adopté, le 16 avril 2020, l'ordonnance COVID-19 justice et droit procédural61, afin d'assurer, voire d'améliorer, le fonctionnement systémique des tribunaux et des autorités en temps de crise, notamment dans le domaine de la procédure civile et des poursuites. Le bon fonctionnement de la justice implique que des actes de procédure puissent être accomplis et notamment que les tribunaux et d'autres autorités puissent tenir des audiences et procéder à des auditions. Le gel d'une partie des audiences et la prolongation des féries judiciaires pascales ne pou61

RO 2020 1229; RS 272.81

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vaient être que des mesures exceptionnelles provisoires. L'ordonnance COVID-19 justice et droit procédural prévoit que les tribunaux et autres autorités concernées doivent prendre, lors des actes de procédure impliquant la participation de tiers, les mesures qui s'imposent pour suivre les recommandations de l'OFSP en matière d'hygiène et d'éloignement social (art. 1). Il est possible de mener les audiences et auditions par vidéoconférence ou téléconférence, ou de renoncer aux débats, s'il n'est pas possible de les mener en présence des juges et des parties dans le respect des mesures appropriées (art. 2 à 6). Dans le domaine des poursuites, l'ordonnance adapte les modalités de la notification et permet les enchères sur des plateformes en ligne (art. 7 à 9).

La présente disposition habilite le Conseil fédéral à prolonger ces mesures de lutte contre l'épidémie de COVID-19 ou à prendre des mesures supplémentaires ou alternatives, au cas où cela serait encore nécessaire après le 30 septembre 2020. Il importe en effet d'assurer le fonctionnement de la justice à moyen terme (par ex. en réduisant le nombre d'affaires en suspens qui ont pu s'accumuler) et de garantir les droits de procédure consacrés par la Constitution. Les dispositions dans ce sens ne seront édictées que si elles sont nécessaires au sens de l'art. 1, al. 2, du présent projet.

Selon l'art. 5, le Conseil fédéral peut édicter des dispositions dérogeant aux lois de procédure en matière civile et administrative, énumérées de manière exhaustive, si elles sont nécessaires pour assurer le fonctionnement de la justice et garantir les droits de procédure consacrés par la Constitution. Ces lois incluent le droit de procédure civile, y compris le droit de l'exécution forcée (code de procédure civile 62, loi fédérale du 4 décembre 1947 de procédure civile fédérale 63, ainsi que l'ensemble de la procédure administrative fédérale et du droit régissant les tribunaux fédéraux (loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative 64, loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral65, loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral 66, loi du 20 mars 2009 sur le Tribunal fédéral des brevets67). Toute atteinte au droit procédural cantonal et en particulier à la procédure pénale dans son ensemble (y compris les affaires pénales relevant
du Tribunal fédéral ou du Tribunal administratif fédéral) est donc exclue, comme l'ont souhaité des participants à la consultation.

L'art. 5 règle des domaines essentiels dans lesquels des règles dérogatoires ou des mesures ponctuelles ont déjà été prises en vertu du droit de nécessité: ­

62 63 64 65 66 67

Selon la let. a, les dispositions peuvent concerner la suspension, la prolongation ou la restitution de délais fixés par la loi. Cela concernerait aussi notamment des féries judiciaires extraordinaires ou des mesures similaires telles que le Conseil fédéral en a arrêté par l'ordonnance du 20 mars 2020 sur la suspension des délais dans les procédures civiles et administra-

RS 272 RS 273 RS 172.021 RS 173.110 RS 173.32 RS 173.41

6400

FF 2020

tives pour assurer le maintien de la justice en lien avec le coronavirus (COVID-19)68. La let. a ne couvre pas les délais et les termes judiciaires.

­

Il sera également possible de prévoir des exceptions concernant l'organisation, le déroulement, les procès-verbaux et le remplacement des actes de procédure de toute sorte auxquels doivent participer des parties, témoins ou tiers tels que des audiences ou des auditions (let. b), afin d'assurer le fonctionnement de l'appareil judiciaire dans le respect notamment des recommandations de l'OFSP concernant l'hygiène et la «distanciation sociale».

Les mesures prévues aux art. 2 à 6 de l'ordonnance COVID-19 justice et droit procédural doivent donc pouvoir être reconduites si nécessaire. A la différence de ce que prévoyait l'avant-projet, l'art. 5, let. b, limite désormais la compétence du Conseil fédéral à l'édiction de dispositions dérogatoires concernant le recours aux moyens techniques.

­

Enfin, en droit des poursuites, domaine où la masse d'affaires à traiter est grande et qui est particulièrement important dans la situation actuelle, le Conseil fédéral pourra déroger aux règles concernant notamment la forme et la notification des communications, mesures et décisions des autorités des poursuites et des faillites ainsi que les enchères sur des plateformes en ligne (let. c), en prolongeant ou en remplaçant les mesures prévues par l'ordonnance COVID-19 justice et droit procédural (art. 7 à 9).

Les dispositions relatives à l'entraide internationale sont réservées.

Art. 6

Mesures dans le domaine des assemblées de société

Selon le code des obligations (CO)69, les droits de participation des actionnaires s'exercent dans l'assemblée générale des sociétés anonymes. Toute décision requiert la présence physique des actionnaires ou de leurs représentants. Des règles similaires s'appliquent aux autres formes juridiques tels que les SARL, les sociétés coopératives et les associations. Afin que les actionnaires puissent exercer leurs droits malgré l'interdiction des rassemblements ordonnée dans un premier temps par le Conseil fédéral et les règles d'hygiène et de «distanciation sociale» de l'OFSP, l'ordonnance 2 COVID-19 prévoyait une disposition particulière pour les assemblées générales: leur organisateur (le conseil d'administration) pouvait, quel que soit le nombre prévu de participants et sans respecter le délai de convocation, imposer aux participants d'exercer leurs droits exclusivement par écrit ou sous forme électronique, ou par l'intermédiaire d'un représentant indépendant désigné par l'organisateur.

La norme de délégation proposée ici crée la base légale permettant de continuer de tenir des assemblées générales sans la présence physique des participants ­ dans la mesure où cela s'avère nécessaire.

Le Conseil fédéral peut donc édicter des dispositions sur l'exercice des droits par écrit ou sous forme électronique ou bien par l'intermédiaire d'un représentant indépendant. La forme écrite est régie par les art. 12 ss CO. Elle requiert une signature 68 69

RO 2020 849. Cette ordonnance n'est plus en vigueur depuis le 19 avril 2020.

RS 220

6401

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originale, ou, selon l'art. 14, al. 2bis, CO, une signature électronique qualifiée avec horodatage électronique qualifié au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique70. Un simple courriel normal ne répond pas à ces exigences de forme.

En vue de l'exercice des droits sous forme électronique, l'immédiateté est nécessaire, et chaque participant doit être identifié ou authentifié; il doit pouvoir se prononcer lors de l'assemblée générale, entendre les interventions des autres participants et exercer ses droits et notamment le droit de vote. Il faut donc que tous les participants soient réunis par voie électronique en même temps, comme c'est le cas lors d'une conférence téléphonique ou d'une vidéoconférence.

Comme la question du respect des droits lors d'une assemblée se pose pour toutes les sociétés de capitaux, collectives et en commandite, les associations et les sociétés coopératives, la norme est formulée de manière neutre quant à la forme de la société.

Toutes les sociétés au sens large sont concernées. On se réfère à la définition de l'art. 2, let. b, de la loi du 3 octobre 2003 sur la fusion71.

Art. 7

Mesures en cas d'insolvabilité

Le Conseil fédéral a pris plusieurs mesures pour protéger les entreprises qui étaient financièrement saines fin 2019 et que l'épidémie a plongées dans des difficultés financières, en édictant l'ordonnance COVID-19 du 16 avril 2020 insolvabilité72.

Ces allègements ont donné aux entreprises ­ et surtout aux PME ­ du temps pour réorganiser leur activité et mettre en oeuvre des mesures d'assainissement. En plus des mesures de soutien direct de la Confédération (indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail, allocations pour perte de gain COVID-19, crédits de transition COVID-19, etc.) et de l'allègement de l'avis de surendettement obligatoire pour les sociétés, il a adapté la procédure concordataire prévue par la LP et créé une procédure spéciale de sursis (dite «sursis COVID-19») pour les PME. Les allègements de l'avis obligatoire en cas de surendettement et le sursis COVID-19 de durée limitée ont pour but de protéger de la faillite les entreprises qui sont en difficulté financière du fait de l'épidémie de COVID-19. En empêchant une vague de faillites dues à l'épidémie, on entend préserver les emplois et les salaires et limiter les dommages économiques causés par l'épidémie de COVID-19.

L'ordonnance COVID-19 insolvabilité est entrée en vigueur le 20 avril et a effet jusqu'au 20 septembre 2020. Comme on ne saurait affirmer que des mesures en matière d'insolvabilité ne seront plus nécessaires à partir de septembre, le projet de loi prévoit la possibilité de prolonger les dérogations et compléments à la LP, à la condition que ces mesures spécifiques soient encore nécessaires pour empêcher des faillites en masse et assurer la stabilité de l'économie et de la société suisses. Il sera possible uniquement de prolonger certaines mesures en matière d'insolvabilité et de modifier quelques points de la procédure concordataire ou du sursis. On peut toutefois renoncer à une norme de délégation concernant des dispositions en matière d'avis en cas de surendettement; la disposition correspondante du droit de nécessité deviendra caduque lorsque l'ordonnance COVID-19 insolvabilité cessera d'avoir 70 71 72

RS 943.03 RS 221.301 RS 281.242

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effet. Les motions 20.3418 Ettlin et 20.3376 Regazzi «Dérogation transitoire à l'obligation d'aviser le juge en cas de surendettement. Prolonger le délai jusqu'au 31 décembre 2021» demandent la prolongation de cette mesure.

Art. 8

Mesures dans le domaine de la culture

L'épidémie de COVID-19 pèse lourdement sur le secteur de la culture. Depuis le 28 février 2020, toutes les manifestations de plus de 1000 personnes sont interdites.

D'innombrables événements culturels d'envergure ont dû être annulés. Aucune manifestation n'a pu avoir lieu depuis le 17 mars 2020. De nombreux acteurs du secteur de la culture (par ex. théâtres, organisateurs de concerts et festivals, musées) ont dû suspendre temporairement leur activité.

Le 20 mars 2020, le Conseil fédéral a adopté l'ordonnance COVID-19 dans le secteur de la culture73 et a fixé son entrée en vigueur au 21 mars 2020. L'ordonnance, dont la durée de validité a tout d'abord été limitée à deux mois, vise à empêcher une atteinte durable au paysage culturel suisse et à contribuer à la préservation de la diversité culturelle. Elle prévoit des aides d'urgence et une indemnisation des pertes financières pour les entreprises culturelles et les acteurs culturels, ainsi qu'un soutien aux associations d'amateurs actives dans ce domaine.

Le 13 mai 2020, le Conseil fédéral a adopté une modification de l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture74. En plus de quelques adaptations mineures, l'aide d'urgence (prêts) aux entreprises culturelles a été supprimée. Le Parlement a alors relevé le crédit destiné à l'indemnisation des pertes financières que la Confédération verse aux cantons, dans la mesure où les cantons continuent de compléter les aides fédérales à concurrence du même montant. La durée de validité de l'ordonnance a en outre été prolongée de quatre mois, jusqu'au 20 septembre 2020. L'indemnisation des pertes financières est financée à parité par la Confédération et les cantons.

Les difficultés économiques rencontrées par le secteur de la culture en raison de l'épidémie de COVID-19 perdureront au-delà du 20 septembre 2020. La plupart des entrprises culturelles sont encore bien loin d'un retour à la normale, notamment pour les raisons suivantes:

73 74

­

Les manifestations culturelles demandent du temps: les nouvelles mises en scène doivent être conçues et répétées, les tournées théâtrales et musicales doivent être préparées, les expositions doivent être montées, les artistes engagés et les fournisseurs réservés: une nouvelle manifestation doit être préparée entre 3 et 18 mois à l'avance.

­

Le respect des plans de protection impose une réduction de la taille des manifestation (pas plus de 1000 personnes) et de leur fréquentation (règles en matière de distance). Plusieurs cantons (BL, BS, AG, TI, VS, ZG, LU et FR) ont en outre arrêté des règles plus restrictives que celles de la Confédération dans le domaine des manifestations, de la restauration, des clubs et des bars,

RS 442.15 RO 2020 1583

6403

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ce qui a aggravé la situation financière dans le secteur de la culture (les artistes ont moins de possibilités de se produire).

­

Selon un sondage représentatif du début juin 2020, environ 75 % de la population suisse hésite à fréquenter des manifestations culturelles pour des raisons de santé, ce qui a fait plonger la demande75.

En conséquence, les entreprises culturelles, les acteurs culturels et les associations culturelles d'amateurs subissent des pertes de chiffre d'affaires qui menacent leur existence et doivent faire face à des coûts supplémentaires. Avant l'épidémie de COVID-19, la fréquentation des théâtres en Suisse se situait ­ selon les théâtres ­ entre 60 et 75 % (avec des exceptions). En raison des règles en matière de distance, un siège sur deux doit rester libre aujourd'hui, ce qui équivaut à une fréquentation de 50 % au plus et entraîne des pertes du même ordre. Depuis leur réouverture le 8 juin 2020, les cinémas ont vu leur chiffre d'affaires reculer de 71 % par rapport à l'année précédente pendant les quatre premières semaines. Nombre d'entre eux ont de nouveau fermer. Les acteurs culturels auront encore longtemps du mal à trouver des engagements, car les organisateurs programment actuellement nettement moins de manifestations que pendant la même période de l'année passée. En outre, les possibilités de se produire à l'étranger sont encore quasiment nulles. La culture fait partie des secteurs qui ont subi des pertes de création de valeur très élevées, parfois totales, pendant le confinement et qui mettront beaucoup de temps à se relever malgré les mesures d'assouplissement. Il sera nécessaire de continuer à soutenir financièrement ce secteur, durablement touché, au-delà du 20 septembre 2020. Selon l'art. 69, al. 2, Cst., la Confédération peut promouvoir les activités culturelles pour autant qu'elles présentent un intérêt national. L'objectif des mesures de soutien, qui est d'atténuer l'impact de l'épidémie de COVID-19 sur le paysage culturel suisse, est compatible avec cette condition.

Au vu de l'expérience acquise dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture et des avis exprimés lors de la consultation, les mesures dans le secteur de la culture doivent être simplifiées. Il faut en premier lieu réduire le nombre d'instruments. A l'avenir, il n'y aura plus qu'une mesure de soutien pour chaque groupe d'ayants droit (entreprises culturelles, acteurs culturels, associations culturelles d'amateurs). L'interdépendance des deux mesures auparavant destinées aux acteurs culturels, qui compliquait l'exécution, disparaîtra donc. Ensuite, l'aménagement de la mesure de soutien
destinée aux entreprises culturelles est simplifié.

A l'avenir, les cantons recevront des fonds de la Confédération ­ qu'ils pourront affecter au soutien des entreprises culturelles ­ dans le cadre de conventions de prestations. Les cantons ne devront plus se livrer à des calculs compliqués des dommages avant d'utiliser les moyens à disposition (cf. commentaire de l'al. 2). Le soutien actuel aux associations culturelles d'amateurs est maintenu.

Al. 1 La Confédération pourra continuer à soutenir les entrprises culturelles de droit privé, les acteurs culturels et les associations culturelles d'amateurs, comme le prévoyait l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture. Une entreprise culturelle est une 75

L'Oeil du public, Les sorties culturelles post-COVID-2019, juin 2020, p. 15

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personne morale active dans le secteur de la culture. Un acteur culturel est une personne physique exerçant une activité dans le secteur culturel. Ce qu'il faut entendre par secteur culturel sera précisé, après consultation des cantons, dans une ordonnance du Conseil fédéral. Cette définition se rapprochera de celle de l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture mais subira peut-être des adaptions ponctuelles. Les cantons pourront continuer à fixer leurs priorités dans le secteur de la culture.

Al. 2 La convention de prestations accorde une grande latitude aux cantons et fixe notamment les objectifs à atteindre. Les cantons disposent donc de la marge de manoeuvre et des possibilités de participation qui correspondent à leurs besoins. Les objectifs seront formulés, conformément à l'article de but du projet, pour surmonter les conséquences de l'épidémie de COVID-19. A cet effet, l'OFC met 80 millions de francs au plus à la disposition des cantons pour l'année 2021. Un des objectifs consistera à atténuer la pression financière que subissent les entreprises culturelles, afin d'éviter autant que faire se peut la faillite d'acteurs importants de la politique culturelle. La survie des entreprises culturelles profite également aux acteurs culturels en leur donnant la possibilité de se produire et de gagner leur vie. Les entreprises culturelles doivent néanmoins s'adapter aux nouvelles réalités. Les cantons doivent donc pouvoir s'appuyer sur une convention de prestations pour soutenir des projets de transformation. Les projets d'acteurs culturels réunis en une communauté de travail juridiquement autonome peuvent également être soutenus. Les valeurs de référence pour toutes les mesures prévues par la convention de prestations seront fixées dans une ordonnance du Conseil fédéral, conformément à l'al. 10.

Al. 3 Les cantons devront toujours compléter les aides fédérales à concurrence du même montant, comme le prévoyait l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture. Ils décideront librement de conclure ou non une convention de prestations, la participation n'est pas obligatoire. Leur souveraineté culturelle est donc garantie. Les contributions éventuelles des villes, des communes et des loteries seront imputées à la part des cantons au financement des mesures prévues par la convention de prestations.
Afin de garantir que les contributions ne serviront qu'à atténuer les conséquences de l'épidémie de COVID-19, les contributions des cantons ne seront prises en compte que si elles dépassent le niveau actuel de leurs dépenses dans le domaine de la culture. Les comptes de 2019 serviront de référence. La Confédération et les cantons doivent fournir un effort commun pour répondre aux besoins supplémentaires des entreprises culturelles.

Al. 4 Cette disposition correspond sur le fond à la réglementation actuelle de l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture. A l'avenir aussi, les besoins des acteurs culturels seront calculés en fonction de leur fortune et de leur revenu. Le Conseil fédéral exclut de la possibilité d'un forfait, sans examen de la fortune et du revenu effectifs, comme certains l'ont souhaité dans le cadre de la consultation. Le soutien ne se justifie qu'en présence d'un besoin avéré. L'association Suisseculture Sociale de6405

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meurera chargée du traitement des demandes. Elle a démontré son efficacité en qualité d'organe d'exécution et poursuivra cette tâche. L'OFC met à la disposition de Suisseculture Sociale 20 millions de francs au plus pour l'année 2021, au titre des ressources financières nécessaires aux prestations en espèces, sur la base d'une convention de prestations.

Al. 5 Suisseculture Sociale est indemnisée sur la base d'une convention de prestations pour le travail administratif qu'elle effectue en qualité d'organe d'exécution.

Al. 6 Le Conseil fédéral fixera les conditions (droit à l'aide, calcul du montant de celle-ci, voies de droit, etc.) relatives à l'aide d'urgence destinée aux acteurs culturels dans une ordonnance. Le règlement des contributions de Suisseculture Sociale, qui doit être approuvé par l'OFC, réglera les modalités et la procédure de demande. L'association dispose déjà d'un «règlement d'attribution» fondé sur l'ordonnance COVID dans le secteur de la culture. Les conditions d'octroi et le calcul des prestations en espèces, de même que les modalités de mise en oeuvre seront conservées dans l'ensemble et feront éventuellement l'objet d'adaptations ponctuelles. Les indemnités pour pertes financières en faveur des acteurs culturels étant supprimées, il faut s'attendre à ce que la différence entre les besoins vitaux immédiats et le revenu pris en compte s'accroisse à l'avenir. L'aide d'urgence sera donc en moyenne plus élevée que jusqu'ici.

Al. 7 La possibilité d'indemniser les associations culturelles d'amateurs et l'indemnité de 10 000 francs au plus correspondent à la réglementation actuelle de l'ordonnance COVID secteur de la culture. Les associations faîtières reconnues sont l'Association suisse des musiques (ASM), l'Union suisse des chorales (USC) et la Fédération suisse des sociétés théâtrales d'amateurs (FSSTA). L'OFC met à la disposition des associations faîtières 10 millions de francs au plus pour l'année 2021, au titre des ressources financières nécessaires à l'indemnisation, sur la base de conventions de prestations.

Al. 8 Les associations faîtières au sens de l'al. 7 sont indemnisées pour le travail administratif qu'elles effectuent en qualité d'organes d'exécution, sur la base de conventions de prestations.

Al. 9 Les indemnités seront octroyées comme aujourd'hui sous la forme
d'un forfait calculé en fonction du préjudice financier et du nombre de membres actifs de l'association culturelle. Les modalités de la procédure seront réglées dans les conventions de prestations conclues entre l'OFC et les associations faîtières.

6406

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Al. 10 Cette disposition permet d'accepter ou de rejeter les demandes pendant la durée de validité de la loi. Un délai supplémentaire de deux mois au plus peut être accordé pour les dossiers complexes dans le domaine de l'indemnisation des pertes financières des entreprises culturelles.

Al. 11 Cette disposition habilite le Conseil fédéral à fixer par voie d'ordonnance les secteurs culturels ayant droit à un soutien et les modalités du droit aux aides. Conformément à l'art. 1, al. 3, il associera les cantons à ses travaux.

Art. 9

Mesures dans le domaine des médias

La Commission des transports et des télécommunications du Conseil des Etats (CTT-E) et celle du Conseil national (CTT-N) ont déposé, respectivement le 23 et le 27 avril 2020, les motions 20.3145 et 20.3154 «Des médias indépendants et efficaces sont l'épine dorsale de notre démocratie». Transmises les 4 et 5 mai, ces deux motions chargeaient le Conseil fédéral de veiller à ce qu'une aide de transition soit accordée aux médias suisses. Le Conseil fédéral a édicté deux ordonnances à cet effet.

L'ordonnance COVID-19 du 20 mai 2020 presse écrite76 étend l'aide indirecte à la presse. Depuis le 1er juin 2020 et pour six mois, les quotidiens et les hebdomadaires en abonnement de la presse locale et régionale qui bénéficiaient déjà d'un soutien sont distribués gratuitement dans le cadre de la tournée régulière de la Poste. En outre, la Confédération participe temporairement, depuis la même date, aux coûts de la distribution régulière des quotidiens et hebdomadaires en abonnement ayant un tirage global de plus de 40 000 exemplaires par édition, lesquels n'avaient pas droit à un soutien financier auparavant. Ils profitent temporairement du rabais sur la distribution, qui est de 27 centimes par exemplaire en 2020, dans la mesure où les autres conditions d'octroi du rabais sur la distribution pour la presse locale et régionale sont remplies. Le coût total de ces mesures est de 17,5 millions de francs. Les contributions ne sont accordées qu'à la condition que les éditeurs s'engagent par écrit à ne pas verser de dividendes pour l'exercice 2020.

Selon l'ordonnance COVID-19 du 20 mai 2020 médias électroniques77, du 1er juin au 30 novembre 2020, la Confédération prend en charge les coûts d'abonnement des services de base textes de l'agence de presse Keystone-ATS s'agissant des droits d'utilisation pour les médias électroniques, pour un total de 10 millions de francs.

Le mandat donné par les motions au Conseil fédéral n'est cependant pas réalisé, du fait de la nécessaire limitation de la durée de validité à six mois. La loi proposée permettra de prévoir un soutien financier au-delà de cette période, comme l'exige le texte des motions. Les mesures en faveur de la presse écrite, qui représentent environ 3 millions de francs par mois, s'appliqueront au plus tard jusqu'à l'entrée en vigueur du train de mesures en faveur des médias. Celui-ci est actuellement examiné 76 77

RS 783.03 RS 784.402

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par le Parlement et devrait entrer en vigueur au milieu de 2021. Quant à la prise en charge des coûts d'abonnement des services de Keystone-ATS, elle est assurée jusqu'à l'épuisement du plafond de dépenses prévu de 10 millions de francs, mais sans excéder toutefois la date d'entrée en vigueur du train de mesures en faveur des médias. Il n'est pas nécessaire d'allouer des moyens financiers supplémentaires dans ce domaine.

Afin d'éviter un doublon, le législateur devra abroger l'article proposé ici à l'entrée en vigueur du train de mesures en faveur des médias. A la différence de l'avantprojet, l'al. 2 du projet prévoit expressément que les mesures dans le domaine des médias seront abrogées à l'entrée en vigueur de ce train de mesures.

Comme le prévoit l'ordonnance COVID-19 presse écrite, les rabais ne sont octroyés que si l'éditeur concerné s'engage par écrit vis-à-vis de l'Office fédéral de la communication (OFCOM) à ne pas verser de dividendes pour l'exercice 2020. A la différence de l'avant-projet, l'al. 4 du projet mentionne expressément cette condition.

A la différence de l'avant-projet, le projet comprend un nouvel al. 5, qui règle la procédure de prise en charge des coûts d'abonnement des services de base textes de l'agence de presse Keystone-ATS.

Art. 10

Mesures en cas de perte de gain

Le Conseil fédéral a rapidement réagi pour pallier les pertes de gain liées aux mesures de lutte contre le COVID-19. Il a décidé, le 20 mars 2020, d'accorder une allocation perte de gain spéciale aux employés, aux indépendants et aux parents, en vertu de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-1978. Celle-ci est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 17 mars 2020 et a effet jusqu'au 16 septembre 2020.

Ont droit à l'allocation les parents qui ont dû interrompre leur activité lucrative (salariée ou indépendante) parce que la garde de leurs enfants par des tiers n'était plus assurée notamment en raison de la fermeture des écoles ou des écoles spéciales ou encore parce qu'elle était assurée par des personnes vulnérables. L'interruption de l'activité lucrative (salariée ou indépendante) en raison d'une mise en quarantaine ordonnée par un médecin ou les autorités donne également droit à l'allocation pour une durée de dix jours. Les indépendants qui ont subi ou subissent une perte de gain en raison des mesures prévues à l'art. 6, al. 1 et 2, de l'ordonnance 2 COVID-19 et qui sont touchés par la fermeture d'établissements publics tels que les restaurants, les petits commerces, les salons de coiffure ou les centres de fitness, ou encore les musiciens, les artistes et les auteurs affectés par l'interdiction des manifestations, ont également droit à l'allocation. Celle-ci est aussi accordée aux indépendants qui ne sont pas directement touchés par les mesures prévues à l'art. 6, al. 1 et 2, de l'ordonnance 2 COVID-19 mais qui subissent une perte de gain en raison des mesures prises par le Conseil fédéral afin de lutter contre le COVID-19 et dont le revenu déterminant pour le calcul des cotisations AVS de l'année 2019 se situe entre 10 000 et 90 000 francs (cas de rigueur).

78

RS 830.31

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Au niveau de la mise en oeuvre et de la procédure, cette nouvelle prestation temporaire se calque sur le système des allocations pour perte de gain prévu par la loi du 25 septembre 1952 sur les allocations pour perte de gain (LAPG) 79. Cette approche a permis de verser très rapidement des allocations. Ces deux assurances sont toutefois complètement séparées tant sur le plan du financement qu'au niveau des prestations accordées.

Il est important de prévoir une disposition légale donnant la compétence au Conseil fédéral de poursuivre le versement de l'allocation en lien avec les restrictions qui demeureraient après l'expiration de la durée de validité de l'ordonnance.

Al. 1 Cet alinéa crée la base légale qui permet au Conseil fédéral de poursuivre le versement de l'allocation pour perte de gain en lien avec les mesures de restrictions éventuelles qui demeureraient après le 16 septembre. Le cercle des bénéficiaires comprend les personnes qui ont dû interrompre leur activité lucrative salariée ou indépendante à cause des mesures de lutte contre le coronavirus. Sont notamment concernés les employés et les indépendants qui sont mis en quarantaine par un médecin ou les autorités (à l'exclusion des personnes qui reviennent d'une zone à risque); les employés et les indépendants qui doivent interrompre temporairement leur activité lucrative parce que la garde de leurs enfants par des tiers n'est plus assurée en raison d'une mise en quarantaine; les indépendants dont l'entreprise est fermée en raison des mesures de lutte contre le COVID-19 ordonnées par les autorités fédérales ou cantonales; les indépendants qui peuvent démontrer qu'il sont dans l'incapacité totale d'exercer leur activité en raison de l'interdiction des manifestations décidée par les autorités. Les indépendants qui ne sont pas obligés d'interrompre leur activité n'ont pas droit à l'allocation.

Al. 2 Cet alinéa définit l'ampleur de la délégation. Comme dans l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, le Conseil fédéral règle en particulier le début et la fin du droit à l'allocation (let. a), le nombre maximal d'indemnités (let. b), le montant et le calcul de l'indemnisation (let. c), ainsi que la procédure (let. d). Le Conseil fédéral se fondera sur l'al. 2, let. d, pour préciser que le requérant doit faire valoir sa prétention pendant la durée de validité de la loi et que le délai de prescription de cinq ans prévu par LAPG n'est pas applicable.

Art. 11

Mesures dans le domaine de l'assurance-chômage

Les mesures ordonnées par le Conseil fédéral pour lutter contre l'épidémie de COVID-19 ont considérablement limité l'activité économique dans de nombreux domaines, déclenchant une vague de demandes d'indemnités de l'assurancechômage. La crise a eu des répercussions sur le marché du travail bien plus importantes que les fluctuations conjoncturelles habituelles, car de nombreuses activités ont été totalement mises à l'arrêt pour une certaine durée. L'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail (RHT) de l'assurance-chômage s'est révélée un 79

RS 834.1

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FF 2020

instrument efficace en cas de difficultés sur le marché du travail. Elle offre aux entreprises une alternative aux licenciements lorsque le volume des commandes s'effondre mais que l'on peut prévoir que la crise est passagère. Le recours à la RHT permet de combler les lacunes dans l'occupation des travailleurs et de maintenir les emplois. Les employés et leur savoir-faire restent acquis à l'entreprise, tandis que l'employeur peut disposer rapidement de main-d'oeuvre lorsque l'activité reprend.

L'ordonnance COVID-19 du 20 mars 2020 assurance-chômage80 est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 1er mars 2020 et a effet jusqu'au 31 août 2020. Tout d'abord, le droit à la RHT a été étendu aux personnes qui ont un emploi d'une durée déterminée, sont en apprentissage ou au service d'une organisation de travail temporaire. Ensuite, le délai d'attente pour la perception de la RHT a été abrogé; l'art. 50, al. 2, de l'ordonnance du 31 août 1983 sur l'assurance chômage81 a été formellement abrogé dans l'ordonnance du 20 mars 2020 COVID-19 sur les mesures en lien avec le coronavirus (COVID-19) concernant l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail et le décompte des cotisations aux assurances sociales82. Troisièmement, le droit à la RHT a été étendu aux personnes dont la situation est assimilable à celle d'un employeur ou qui sont occupées dans l'entreprise de leur conjoint ou de leur partenaire enregistré. Elles ont bénéficié, pour un emploi à plein temps, d'une indemnité basée sur un montant forfaitaire de 3320 francs. Enfin, les employeurs ont été libérés de l'obligation d'avancer le versement de la RHT en cas de réduction de l'horaire de travail et de remettre à la caisse de chômage l'attestation certifiant qu'ils continuent à payer les cotisations des assurances sociales. Le Conseil fédéral a adapté l'ordonnance le 25 mars 202083 sur quelques points: (i.) l'assuré ne doit plus remettre régulièrement la preuve de ses recherches d'emploi; (ii.) le premier entretien de conseil et de contrôle est mené les 30 jours au lieu de 15 suivant l'inscription au service de l'emploi; (iii.) l'entretien est mené par téléphone; (iv.) en outre, le nombre d'indemnités journalières a été augmenté et le délai-cadre d'indemnisation pour les assurés a été prolongé; (v.) le délai de préavis de réduction de
l'horaire de travail a été raccourci et (vii.) la durée du préavis de réduction de l'horaire de travail a été portée de trois à six mois. Le 8 avril 202084, le Conseil fédéral a étendu le droit à la RHT aux travailleurs sur appel dont le taux d'occupation fluctue de plus de 20 %.

La plupart des mesures prévues par l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage seront levées au plus tard le 31 août 2020, mais certaines, décrites dans les paragraphes qui suivent consacrés aux let. a à d, doivent être prolongées.

Let. a Selon l'art. 4 de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, une perte de travail est prise en considération lorsqu'elle touche des personnes en apprentissage. Cette mesure permet de protéger la formation duale qui est un des piliers de notre système de formation professionnelle.

80 81 82 83 84

RS 837.033 RS 837.02 RO 2020 875 RO 2020 1075 RO 2020 1201

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Le Conseil fédéral peut, en dérogation à l'art. 31, al. 1, let. b, de la loi du 25 juin 1982 sue l'assurance-chômage (LACI)85, prévoir un droit à l'indemnité pour les formateurs et maîtres d'apprentissage lorsqu'ils encadrent et forment les apprentis.

Le but est de soutenir les entreprises formatrices confrontées à des difficultés pour maintenir une formation de qualité et les contrats d'apprentissage de leurs apprentis lorsqu'elles sont confrontées à des difficultés économiques et doivent recourir à la RHT.

Ainsi, les formateurs peuvent bénéficier de la RHT, même en l'absence d'une perte de travail à prendre en considération, et assurer l'encadrement des jeunes en formation. Ces derniers continuent, dans l'entreprise, à être formés et encadrés afin d'acquérir dans les meilleures conditions possible les connaissances pratiques à leur future profession.

La disposition proposée permet également de mettre en oeuvre la motion Bühler 16.3884 «Soutien rapide aux entreprises formatrices dans le cadre des RHT» qui a été adoptée par le Parlement.

Let. b Selon l'art. 8g, al. 1, de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, les entreprises peuvent, en dérogation à l'art. 35, al. 1bis, LACI, faire valoir une perte de travail supérieure à 85 % de l'horaire normal de l'entreprise pendant plus de quatre périodes de décompte.

Les périodes de décompte pour lesquelles une entreprise a fait valoir une perte de travail de plus de 85 % entre le 1er mars et le 31 août 2020 n'ont pas de conséquences pour le droit de l'entreprise de recourir à la RHT pendant quatre périodes de décompte en cas de perte de travail de plus de 85 % en dehors de cette période.

Cette mesure ayant un effet après la fin de la durée de validité de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, le Conseil fédéral doit disposer de la compétence de prévoir que les périodes de décompte pour lesquelles la perte de travail est supérieure à 85 % de l'horaire normal de l'entreprise du 1er mars au 31 août 2020 ne sont pas prises en compte lors de l'application de l'art. 35, al. 1 bis, LACI. C'est particulièrement important pour les entreprises dont l'activité reste fortement limitée en raison des mesures des autorités.

Let. c Selon l'art. 8a de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, toute personne ayant droit à l'indemnité en vertu de la LACI bénéficie
au maximum de 120 indemnités journalières supplémentaires, et le délai-cadre d'indemnisation peut être si nécessaire prolongé de deux ans. Il s'agit d'éviter que des personnes se trouvent en fin de droits pendant l'épidémie de COVID-19 et d'assurer que les indemnités puissent réellement être touchées. On veut éviter ainsi de désavantager les personnes qui avaient très peu de chances de retrouver une occupation pendant cette période.

Du fait de la durée limitée de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, la prolongation du délai-cadre d'indemnisation prendrait fin le 31 août 2020. Toutes les personnes que l'ordonnance protégeait arriveraient en fin de droits à cette date.

85

RS 837.0

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Sans prolongation de la disposition, il serait également impossible, dans certains cas, aux personnes qui ne sont pas en fin de droits, de toucher les indemnités ordinaires qu'elles n'ont pas pu percevoir durant l'épidémie de COVID-19, leur délai-cadre étant échu.

Les assurés qui étaient au chômage durant l'épidémie de COVID-19 n'ont pas pu acquérir de période de cotisation ni de gain qui pourraient être pris en compte s'ils se trouvent de nouveau au chômage. Il faut donc prolonger au besoin le délai-cadre applicable à la période de cotisation afin d'éviter que le chômage durant l'épidémie de COVID-19 n'ait des répercussions négatives plus tard.

La prolongation symétrique du délai-cadre pour la période de cotisation et d'un éventuel délai-cadre d'indemnisation préexistant permettront d'éviter que les délais se chevauchent et que l'on prenne en compte des mois de cotisation déjà imputés sur une période de chômage antérieure.

Let. d Pendant le confinement, les entreprises suisses ont recouru massivement au chômage partiel. Il n'était plus possible d'appliquer les procédures ordinaires de préavis et de décompte dans le cadre de la RHT. Le Conseil fédéral a renoncé, dans la procédure de préavis, à une partie des questions relatives à l'octroi du droit et, dans la d'indemnisation, au décompte individuel.

Le décompte des indemnités a été effectué selon une procédure sommaire pendant la situation extraordinaire. Cette procédure simplifiée, qui fait abstraction de certains paramètres de calcul, était nécessaire pour pouvoir effectuer les versements aux entreprises concernées aussi rapidement et simplement que possible (sans complication administrative et sans attente d'indemnisation considérable). La procédure globale des indemnités (par entreprise) a toutefois pour corollaire que les montants ainsi calculés peuvent s'écarter des résultats obtenus selon la méthode ordinaire du décompte individuel (par travailleur). Tel est le cas si des travailleurs aux salaires différents ne sont pas touchés dans la même mesure par la perte de travail due à des facteurs d'ordre économique.

Etant donné que les deux procédures susmentionnées, adoptées dans le cadre du droit de nécessité, dérogent aux procédures ordinairement applicables dans le cadre de la RHT (art. 34, al, 2, et 38, al. 3, let. b, LACI), l'art. 11, let. d, délègue au Conseil fédéral la compétence de régler les modalités de ces procédures sommaires dans l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage.

Art. 12

Dispositions pénales

L'art. 12, al. 1, habilite le Conseil fédéral à déclarer punissables les contraventions à des mesures qu'il ordonne en application de l'art. 2 ou 3 («Est puni de l'amende...»).

Il incombera au Conseil fédéral de fixer quelles seront les mesures dont le nonrespect sera puni comme contravention.

La disposition pénale proposée précise que les infractions intentionnelles et par négligence sont punissables.

6412

FF 2020

L'al. 2 habilite le Conseil fédéral à fixer si les infractions aux mesures prévues par l'art. 2 ou 3 doivent être réprimées selon la procédure de l'amende d'ordre et, le cas échéant, lesquelles. Le Conseil fédéral doit également déterminer le montant de l'amende; elle ne pourra excéder 300 francs, qui est la limite fixée par la loi du 18 mars 2016 sur les amendes d'ordre86.

Art. 13

Exécution

Cette disposition prévoit que le Conseil fédéral règle l'exécution des mesures prévues par la loi. Il s'agit de donner une base légale formelle à l'exécution par voie d'ordonnance des mesures visant à surmonter l'épidémie de COVID-19.

Art. 14

Référendum, entrée en vigueur et durée de validité

Les lois fédérales urgentes doivent être limitées dans le temps, conformément à l'art. 165, al. 1, Cst. La Constitution ne dit rien de leur durée maximale. La pratique s'est établie de prévoir des délais de deux à six ans87. La modification urgente de la loi sur l'aviation en relation avec l'épidémie de COVID-19, par exemple, doit avoir effet jusque fin 2025. Une prolongation (la Constitution parle de «renouvellement») est possible88. Au vu des scénarios épidémiologiques et compte tenu des mesures que l'on peut présumer devoir être prises, le Conseil fédéral estime qu'une durée de validité jusqu'au 31 décembre 2021 est à l'heure actuelle suffisante.

L'art. 14, al. 3, en relation avec la réserve de l'al. 2, ne prévoit une durée de validité jusqu'au 31 décembre 2022 (cf. ch. 3.2.10) que pour les art. 11 (mesures dans le domaine de l'assurance-chômage), let. a à c, et 1 (objet et principes). Il faudra suivre l'évolution de l'épidémie et décider au plus tard au milieu de 2021 si la loi doit être adaptée ou si sa durée de validité doit être prolongée.

Le projet de loi est une loi fédérale disposant d'une base constitutionnelle et qui doit être déclarée urgente, dont la durée de validité dépasse un an. Elle est donc sujette au référendum (art. 141, al. 1, let. b, Cst.). Les lois fédérales urgentes entrent normalement en vigueur le jour suivant leur adoption. Une publication urgente au sens de l'art. 7, al. 3, de la loi du 18 juin 2004 sur les publications officielles (LPubl)89 est en ce cas prévue.

4

Conséquences

4.1

Conséquences pour la Confédération

4.1.1

Conséquences financières

Le projet de loi a des conséquences financières, essentiellement dans les domaines suivants: 86 87 88 89

RS 314.1 Voir par ex. Pierre Tschannen, St. Galler BV-Kommentar, 3e éd., art. 165 n° 8 s.

Voir à ce sujet Tschannen, op. cit., no 22.

RS 170.512

6413

FF 2020

Culture Pour le financement des mesures en 2021, le Conseil fédéral inscrira un montant de 110 millions de francs au budget 2021. Afin d'assurer la poursuite, si possible ininterrompue, des mesures de soutien jusqu'à la fin de l'année, le DFI est autorisé à proposer les crédits supplémentaires suivants à hauteur de 35 millions de francs dans le message spécial relatif au supplément IIb au budget 2020: a)

34 millions de francs pour le nouveau crédit budgétaire «COVID: conventions de prestations culture cantons» (A290.0131);

b)

1 million de francs pour le crédit budgétaire «COVID: associations culturelles d'amateurs» (A290.0111).

Les crédits supplémentaires a) et b) sont entièrement compensés sur le crédit «COVID: aide d'urgence pour les entreprises culturelles» (A290.0107). Ce crédit budgétaire est soumis à un blocage pour un montant équivalent.

En outre, le blocage pour un montant de 15 millions de francs du crédit «COVID: aide d'urgence pour les acteurs culturels» (A290.0108) est levé. En lieu et place, le crédit budgétaire «COVID: aide d'urgence pour les entreprises culturelles» (A290.0107) est soumis à un blocage pour le même montant. Le solde du crédit (526 000 francs) est indiqué comme crédit non utilisé.

Médias Pour les mesures du domaine des médias, on se reportera au message du 29 avril 2020 sur le train de mesures en faveur des médias 90. La poursuite de l'aide supplémentaire temporaire à la presse dans le cadre des mesures COVID-19 (rabais sur la distribution) de décembre 2020 au milieu de 2021 (date probable de l'entrée en vigueur du train de mesures en faveur des médias) entraînera des coûts supplémentaires estimés à environ 20,5 millions de francs.

Allocations pour perte de gain A ce stade, il est impossible de quantifier les coûts qu'engendrerait une prolongation de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 au-delà du 16 septembre 2020.

Pour la suite, les prestations pouvant entrer en ligne de compte pourraient concerner les cas de quarantaine ou les indépendants touchés par l'interdiction éventuelle des manifestations de plus de 1000 personnes. A la mi-juillet 2020, quelque 7000 cas de quarantaine de mars à mi-juillet avaient donné lieu à des allocations pour un montant total d'environ 7,5 millions de francs. Les coûts d'une prolongation de l'allocation pour les cas de quarantaine dépendent de la situation épidémiologique après le 16 septembre. A ce stade, aucune projection ne peut donc être effectuée pour la suite.

Analyses de biologie moléculaire pour le SARS-CoV-2 Le 24 juin 2020, le Conseil fédéral a autorisé le DFI à proposer un crédit de 288,5 millions de francs dans le cadre du supplément IIb au budget 2020 pour le financement des tests SARS-Cov-2.

90

FF 2020 4385 4428

6414

FF 2020

Il n'est pas possible faire une estimation précise des coûts car ceux-ci dépendent fortement de l'évolution de la situation épidémiologique Sur la base des chiffres des derniers mois, on peut estimer que 5000 analyses de biologie moléculaire par jour seront effectuées pendant les 5 derniers mois de 2020. On s'attend à ce que les tests soient moins nombreux en été mais qu'il faudra compter avec une certaine augmentation à partir du mois de septembre. Si la situation épidémiologique se dégrade et de que le nombre d'infections augmente de nouveau, il faudra compter avec une forte augmentation du nombre de tests. Le montant du crédit demandé tient compte d'une telle augmentation et couvre une moyenne de 8000 tests par jour.

En multipliant par 8000 le prix de l'analyse de biologique moléculaire (169 francs), on arrive à un total de 1 352 000 francs par jour. La Confédération devrait donc débourser environ 40,56 millions de francs par mois pour ce type d'analyses. Il est encore plus difficile de faire une estimation pour les tests sérologiques car l'OFSP ne recommande pas de les utiliser à large échelle en raison de leur manque de précision. Pour les besoins du calcul, on peut estimer que 2000 tests sérologiques seront effectués en plus à partir du mois d'août, ce qui équivaut à 2000 tests à 113 francs, soit à 226 000 francs par jour. La Confédération devrait donc débourser environ 6,8 millions de francs par mois pour les tests sérologiques.

Aperçu des coûts Coûts par Nombre de Nombre de analyse tests par jour jours jusqu'à la fin 2020

Coûts Coûts totaux par jour jusqu'à la fin 2020

Analyses de biologie moléculaire

169

8 000

188

1 352 000

254 176 000

Tests sérologiques

113

2 000

152

226 000

34 352 000

1 578 000

288 528 000

Total en francs

Les coûts sont donc estimés grosso modo à 288,528 millions de francs pour 2020.

Depuis que la Confédération rembourse les analyses (25 juin 2020) jusqu'au 1er août 2020, 262 000 analyses ont été réalisées, ce qui correspond à une moyenne de 6901 analyses par jour, pour un montant de 44,3 millions de francs. L'estimation des coûts se fonde toutefois sur 8000 analyses par jour, ce qui signifie que sur les 38 jours de remboursement, la Confédération a dépensé 7,1 millions de francs de moins que ce qui avait été budgété. Ce montant est disponible si le nombre de 8000 analyses par jour devait être dépassé.

4.1.2

Conséquences sur l'état du personnel

Le projet de loi n'a pas de conséquences en termes de personnel. Il peut être mis en oeuvre avec les effectifs actuels de l'administration fédérale.

6415

FF 2020

4.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Il n'est pas exclu qu'en plus des coûts dans le domaine de la culture (cf. commentaire de l'art. 8, al. 3), les cantons doivent assumer des frais d'exécution supplémentaires. A ce stade, ceux-ci ne peuvent être estimés de manière fiable. Le projet de loi n'a pas de plus amples conséquences pour les cantons et les communes; les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne ne sont pas particulièrement touchés.

4.3

Conséquences économiques

Les conséquences pour l'économie dépendent beaucoup du fait que le Conseil fédéral doive ou non faire usage des compétences que lui accorde la loi, et pendant combien de temps. D'autre part, il faut noter que plusieurs mesures ­ par exemple dans le domaine de l'insolvabilité, de la perte de gain et de l'assurance-chômage ­ servent précisément à atténuer les retombées économiques négatives de la lutte contre l'épidémie. Le Conseil fédéral a publié ses explications à ce sujet lors de l'adoption des ordonnances de nécessité et dans son rapport du 27 mai 2020 concernant l'exercice de ses compétences en matière de droit de nécessité (cf. ch. 1.1).

4.4

Autres conséquences

Le projet n'a manifestement aucune conséquence dans les domaines sociétal et environnemental, ni dans d'autres domaines tels que la politique extérieure; ces questions n'ont donc pas été examinées plus avant. Aucune conséquence sous l'angle de l'égalité entre hommes et femmes n'est prévisible aujourd'hui, faute d'analyses dans ce domaine.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Le projet de loi se fonde sur les compétences matérielles que la Constitution confère à la Confédération. Ces compétences législatives sont les suivantes: ­

L'art. 69, al. 2, Cst. habilite la Confédération à promouvoir les activités culturelles présentant un intérêt national. C'est sur lui que s'appuient les mesures du domaine de la culture (art. 8).

­

Pour les mesures dans le domaine des médias (art. 9), les art. 92 et 93 Cst.

fondent la compétence de la Confédération en matière de services postaux et de télécommunications et en matière de législation sur la radio et la télévision.

6416

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­

L'art. 101, al. 2, Cst. permet à la Confédération de prendre des mesures pour protéger l'économie suisse, ce qui recouvre les dispositions de la loi pertinentes dans le domaine économique.

­

Les aspects d'approvisionnement du pays (art. 2) se fondent sur l'art. 102 Cst.

­

L'art. 114, al. 1, Cst. donne à la Confédération la compétence de légiférer sur l'assurance-chômage, dont relèvent les mesures du domaine de l'indemnisation de la perte de gain et de l'assurance-chômage (art. 10 et 11).

­

L'art. 117, al. 1, Cst. donne à la Confédération la compétence de légiférer sur l'assurance-maladie et l'assurance-chômage. C'est sur lui que se fondent les dispositions relatives à la prise en charge des coûts des analyses COVID-19 (art. 2, al. 5).

­

L'art. 118, al. 2, let. b, Cst. donne à la Confédération la compétence de légiférer sur la lutte contre les maladies transmissibles, les maladies très répandues et les maladies particulièrement dangereuses de l'être humain et des animaux. Les art. 2 et 3 du projet de loi se fonde sur cette compétence.

­

L'art. 121, al. 1, Cst. fonde la compétence de la Confédération de légiférer dans le domaine des étrangers et de l'asile. Les mesures prévues à l'art. 4 du projet de loi se fondent sur cette base.

­

Les mesures en matière de droit de procédure, de justice, de droit des sociétés et d'insolvabilité (art. 5 à 7) découlent de la compétence de la Confédération en matière de droit civil et de procédure civile, consacrée à l'art. 122 Cst.

­

L'art. 123 Cst. donne à la Confédération la compétence de légiférer en matière de droit pénal. C'est sur lui que se fonde la norme pénale du projet (art. 12).

Le projet de loi rassemble des mesures relevant de nombreux domaines. Il existe entre elles une étroite connexion matérielle, si bien que le principe de l'unité de la matière est respecté. Le projet est conçu comme un ensemble homogène de mesures qui ont déjà été ordonnées et qui sont encore nécessaires pour surmonter l'épidémie de COVID-19. Ces mesures, primaires ou secondaires, servent le même but et règlent de manière similaire comment le Conseil fédéral peut temporairement déroger aux dispositions légales ordinaires pour surmonter l'épidémie et ses conséquences.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet de loi touche des thèmes qui font l'objet de traités ratifiés par la Suisse. On doit donc se poser la question de savoir combien les mesures qu'il autorise le Conseil fédéral à prendre sont compatibles avec la CEDH et les autres traités garantissant des droits de l'homme.

Les droits de l'homme ou les droits fondamentaux garantis par la Constitution et le droit international demeurent en principe valables même si un pays déclare l'état de 6417

FF 2020

nécessité, mais ils peuvent être assez largement restreints face à des intérêts publics supérieurs. Une véritable dérogation, c'est-à-dire la suspension, pour une période temporaire, de traités garantissant des droits de l'homme ou de certaines de leur garantie, n'est permise que si la situation et les mesures prises le requièrent absolument. Un certain nombre de conditions doivent être réunies (notamment un état de nécessité, le respect du principe de proportionnalité et du principe de nondiscrimination, le respect des droits auxquels il ne peut être dérogé même en cas de nécessité, l'adéquation des mesures dérogatoires avec les autres engagements internationaux de l'Etat concerné, la proclamation et la notification des mesures de nécessité [cf. art. 15, CEDH et 4, par. 2, du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques, Pacte II de l'ONU91]).

La protection des droits de l'homme est cruciale précisément en temps de crise. Il est manifeste que les nombreuses mesures que le Conseil fédéral a prises en se fondant directement sur la Constitution ont porté atteinte, parfois assez fortement, à plusieurs droits fondamentaux. L'ampleur extraordinaire de la crise justifie cependant que les Etats aient une très grande marge d'appréciation dans le choix des mesures qu'ils jugent indispensable pour lutter contre l'épidémie. Les dispositions édictées par le Conseil fédéral se fondent sur une base légale, elles répondent à l'intérêt public et respectent le principe de proportionnalité. Elles s'inscrivent donc dans le cadre de ce que permettent l'art. 36 Cst. et les traités internationaux applicables (notamment les art. 8 à 11 CEDH). Il n'a donc pas été nécessaire de faire usage de la possibilité de suspendre certains droits de l'homme par une notification de dérogation.

Dans les autres domaines, en particulier celui du droit des étrangers et de l'asile, ou pour ce qui est des mesures qui touchent les traités commerciaux, le projet de loi est compatible avec les engagements internationaux de la Suisse et notamment avec les traités bilatéraux conclus avec l'UE.

5.3

Forme de l'acte à adopter

Le Conseil fédéral a décidé le 8 avril 2020 de soumettre au Parlement une loi fédérale urgente qui reprendrait le contenu des ordonnances de nécessité qu'il a édictées.

Il s'agit de donner une base légale formelle aux ordonnances que le Conseil fédéral a arrêtées en se fondant directement sur la Constitution pour lutter contre l'épidémie de COVID-19 afin de pouvoir reconduire les mesures qui seront encore nécessaires.

Pour prolonger ces ordonnances fondées sur l'art. 185, al. 3, Cst., le Conseil fédéral doit avoir soumis à l'Assemblée fédérale un projet établissant la base légale de leur contenu au plus tard six mois après leur entrée en vigueur (art. 7d, al. 2, let. a, LOGA). Le projet contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit et doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst. L'art. 163, al. 1, fonde la compétence de l'Assemblée fédérale d'édicter la présente loi.

L'art. 165 Cst. habilite le Parlement à déclarer urgente une loi fédérale dont l'entrée en vigueur ne souffre aucun retard. Comme la loi proposée s'inscrit dans le cadre 91

RS 0.103.2

6418

FF 2020

des compétences accordées par la Constitution à la Confédération, elle est sujette au référendum (référendum facultatif, majorité du peuple; art. 165, al. 2, et 141, al. 1, let. b, Cst.). Le Conseil fédéral propose au Parlement de délibérer en urgence sur cette loi et de la déclarer urgente, afin que le débat sur les mesures nécessaires pour surmonter l'épidémie de COVID-19 ait lieu rapidement et que ces mesures reçoivent une légitimation du pouvoir législatif.

5.4

Délégation de compétences législatives

Le Conseil fédéral a décidé le 29 avril 2020 que le projet de loi devrait contenir les dispositions matérielles et les normes de délégation nécessaires pour fonder les mesures réglées dans les ordonnances édictées par lui directement sur la base de la Constitution, si elles devaient durer plus de six mois.

Le projet de loi contient principalement des normes de délégation permettant d'ordonner des mesures déjà contenues dans des ordonnances de nécessité. Ce sont: les mesures dans le domaine des capacités sanitaires (art. 2), les mesures dans le domaine de la protection des travailleurs (art. 3), les mesures dans le domaine des étrangers et de l'asile (art. 4), les mesures dans le domaine de la justice et du droit procédural (art. 5), les mesures dans le domaine des assemblées de société (art. 6), les mesures en cas d'insolvabilité (art. 7), les mesures dans le domaine de la culture (art. 8), les mesures dans le domaine des médias (art. 9), les mesures en cas de perte de gain (art. 10), les mesures dans le domaine de l'assurance-chômage (art. 11) et les dispositions pénales (art. 12).

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