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6959 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires (Du 1er novembre 1955)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, dans le présent message, avec notre rapport et notre proposition sur la motion concernant des réductions d'impôt, adoptée par les chambres le 21 et le 22 juin 1955, un projet d'arrêté fédéral accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires.

I. Interventions parlementaires pour une réduction des impôts Le 21 et le 22 juin 1955, les chambres ont accepté une motion présentée le 8 juin 1955 par MM. Gemperli, Guinand, Jaquet et Renold au Conseil national, ainsi que par M. Haefelin au Conseil des Etats, et leurs cosignataires; cette motion a la teneur suivante: Etant donné le résultat favorable -- inattendu -- des comptes de la Confédération, le Conseil fédéral est invité à présenter aux conseils législatifs un rapport et des propositions tendant à de sensibles réductions des impôts fédéraux. Ces propositions devront être faites au plus tard lors de la présentation du budget pour 1956, les réductions entrant en vigueur le 1er janvier 1956. Ces réductions, fondées sur l'article 5 de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958, s'étendront en particulier à l'impôt pour la défense nationale dû pour les années 1955 à 1958 et à l'impôt sur le chiffre d'affaires dû à partir du 1er janvier 1956.

Nous ne nous sommes pas opposés à la motion, considérant qu'elle répond à un vaste courant d'opinion et que l'évolution actuelle favorable des finances fédérales permet de justifier un dégrèvement des contribuables.

1013 En outre, le 21 juin 1955, le Conseil national nous a renvoyé deux postulats de MM. Hauser et Münz qu'il avait adoptés sans opposition et dont la teneur suit: Postulat Hauser Etant donné le résultat favorable des comptes de la Confédération, le Conseil fédéral est invité à examiner s'il n'y aurait pas lieu de présenter aux conseils législatifs un rapport et des propositions sur les dégrèvements fiscaux qui peuvent être accordés au 1er janvier 1956 sur la base de l'article 5 de l'arrêté fédéral concernant le régime financier transitoire. Ces dégrèvements devraient consister en une réduction, à but social, de l'impôt pour la défense nationale et dans une extension de la liste des marchandises exonérées de l'impôt sur le chiffre d'affaires.

Postulat Münz Si la prospérité économique subsiste et si la charge fiscale demeure inchangée, le produit des impôts continuera d'augmenter, ces années prochaines, dans les comptes de la Confédération. Mais la politique du soutien du taux de l'intérêt suivie depuis quelque temps empêche d'affecter les excédents de ces comptes à un amortissement de la dette.

Le Conseil fédéral est invité à examiner s'il n'y aurait pas lieu de présenter aux chambres un rapport et des propositions concernant de notables réductions d'impôts, à opérer par exemple: 1. En supprimant l'impôt sur le chiffre d'affaires sur toutes les marchandises indispensables ; 2. En élevant par exemple à 150 000 francs la limite de la fortune exonérée de l'impôt complémentaire, qui est actuellement de 30 000 francs, pour les personnes physiques ; 3. En allégeant l'impôt pour la défense nationale, notamment pour les petits et moyens revenus, que ce soit en diminuant le taux de l'impôt ou en élevant la limite du revenu exonéré; 4. En diminuant, ainsi que le recommande le rapport du 14 février 1955 de la commission fédérale d'experts, l'impôt sur les coupons, qui est injuste et touche en particulier durement les épargnants et petits rentiers.

Les réductions d'impôts devraient autant que possible avoir effet au 1er janvier 1956, en tant qu'elles peuvent se fonder sur l'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier de 1955 à 1958.

Nous avons accepté ces deux postulats pour étudier si et dans quelle mesure certaines des suggestions qui y sont contenues peuvent être réalisées sur la base de l'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954.

En revanche, le 21 juin 1955, le Conseil national a repoussé, à la majorité, les motions, combattues par le Conseil fédéral, de MM. Spuhler et Bodenmann, car elles demandaient un relèvement des déductions de renchérissement en matière d'impôt pour la défense nationale et une extension de la liste des marchandises franches de l'impôt sur le chiffre d'affaires. Il en fut de même le 22 juin 1955 au Conseil des Etats pour une motion déposée par M. Klaus, qui concordait quant à son contenu avec la motion Spuhler.

Feuille fédérale. 107» année. Vol. II.

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II, Est-il justifié que la Confédération accorde des allégements fiscaux ?

Depuis 1947, le compte d'Etat de la Confédération accuse régulièrement, sauf en 1952 et 1953, un boni. Pour 1955 également, d'après les résultats des mois écoulés, on peut s'attendre à un boni d'environ 240 millions de francs; le projet de budget établi pour 1956 en prévoit un de 348 millions.

S'il était possible de se borner à considérer ainsi l'évolution des finances fédérales pendant les dix années 1947 à 1956, on pourrait sans hésitation trouver justifié que la Confédération accorde des allégements fiscaux. Mais si l'on se souvient que le bilan de la Confédération à la fin de 1954 accusait encore un déficit de 7,8 millia.rds de francs, on s'aperçoit que des bonis s'élevant à 200 ou 300 millions par an suffisent tout au plus à amortir au cours d'une génération le déficit du bilan.

Selon les principes éprouvés de la politique financière, il convient que les pouvoirs publics obtiennent des excédents de comptes pendant les périodes de prospérité économique. Ces excédents sont nécessaires pour diminuer la dette ou constituer des provisions et créer ainsi une situation permettant, en période de dépression, de continuer à mener une politique économique active. Les excédents des comptes d'Etat constituent en outre un moyen efficace de lutter contre les tendances à l'inflation qui se manifestent dans les périodes de prospérité économique. L'équilibre des finances fédérales pendant les années d'après-guerre a contribué d'une manière essentielle à maintenir largement le pouvoir d'achat du franc suisse, alors que d'autres pays ont vu leur monnaie suivre une évolution contraire.

Les allégements fiscaux ont, en revanche, pour effet d'augmenter le pouvoir d'achat. C'est pourquoi l'on a déjà proposé de ne pas en accorder actuellement, mais d'allouer des crédits fiscaux qui pourraient être employés, en période de dépression économique, à acquitter des dettes fiscales. Cette proposition, soutenable en théorie, est cependant difficilement réalisable. Si l'on ne veut pourtant pas écarter tout à fait ces constatations, on devra donc, pour ces raisons déjà, maintenir la réduction des impôts dans certaines limites.

Il faut reconnaître que les excédents des comptes ne peuvent pas toujours être employés de façon illimitée à l'amortissement
des dettes. Le remboursement des dettes publiques peut avoir des conséquences fâcheuses lorsque le marché de l'argent et des capitaux souffre d'une trop grande liquidité. C'est pourquoi la Confédération a renoncé, ces dernières années, à amortir sa dette et a conservé d'assez grandes liquidités. La constitution de ces réserves en vue de financer des mesures pour procurer du travail pourrait se révéler un moyen particulièrement efficace de lutte contre les crises; elle permet en outre d'amortir les dettes dans les périodes où le

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marché des capitaux s'y prête. L'évolution qui s'est manifestée ces derniers temps sur le marché de l'argent et des capitaux ne semble pas exclure que l'on recommence d'amortir la dette dans une certaine mesure.

La grande tâche politique de la Confédération est aujourd'hui sans nul doute d'établir une réglementation durable de ses finances. Nous avons l'intention de pousser les travaux de manière à pouvoir soumettre à l'Assemblée fédérale au plus tard au début de 1957 nos propositions en vue de résoudre ce problème. Plus les excédents des comptes de la Confédération resteront grands jusqu'alors, plus le point de départ de la nouvelle réglementation sera favorable. Ils permettent de diminuer la dépense pour le service de la dette dans le plan financier de la réforme des finances fédérales et ils donnent la marge nécessaire pour déterminer de manière satisfaisante la structure des recettes dans le compte de la Confédération. Mais la réduction des impôts ne devrait pas non plus préjuger la future réorganisation des finances fédérales par des mesures allant trop loin dans l'un ou l'autre domaine. Quelles que soient les dispositions que nous arrêtons aujourd'hui, nous ne devons jamais perdre de vue la grande tâche qui nous attend. Pour ces raisons, le Conseil fédéral ne pouvait prendre de son chef l'initiative d'une réduction immédiate des impôts, sans compter qu'il s'estimait lié par la prorogation sans changement du régime transitoire, selon le mot d'ordre approuvé par le peuple. Etant donnés les voeux concordants du peuple et des partis, des allégements fiscaux sont cependant devenus déjà maintenant une nécessité politique dans le domaine fédéral. Mais une réduction immédiate des impôts fédéraux ne peut se faire que si l'on tient compte des considérations exposées. Elle doit donc se maintenir dans des Limites relativement étroites.

Ces raisonnements nous détournent de faire des propositions qui réduiraient le boni des comptes fédéraux d'un montant excédant sensiblement 100 millions par an. Des réductions d'impôts plus considérables mettraient en question la politique actuelle en matière financière et économique, qui vise à maintenir le pouvoir d'achat du franc suisse, ainsi que toute politique de prévoyance à long terme. Elles rendraient plus difficile l'établissement d'une réglementation durable
des finances fédérales.

III. Forme juridique Les recettes actuelles de la Confédération ont toutes, il est vrai, une base constitutionnelle ; mais, pour les principaux impôts du régime financier de 1951 à 1954, savoir l'impôt pour la défense nationale, l'impôt sur le chiffre d'affaires, l'impôt sur le luxe, l'impôt anticipé et l'impôt déduit des prestations d'assurances sur la vie, la durée de perception est limitée dans le temps jusqu'à la fin de 1958 (arrêté fédéral du 25 juin 1954 concernant le régime financier de 1955 à 1958; RO 1954, 1347). Ces impôts ont rapporté

1016 en 1954 à la Confédération 1096 millions de francs, c'est-à-dire 47 pour cent de l'ensemble des recettes fédérales. Une nouvelle répartition fondamentale des charges fiscales actuelles, avec modification des bases constitutionnelles existantes, ne pourrait se faire que par la voie d'un additif à la constitution, soumis au referendum obligatoire du peuple et des cantons; les débats devant le parlement et le referendum prendraient cependant tellement de temps que les réductions fiscales qui seraient ainsi proposées pourraient avoir effet au plus tôt pour 1957.

C'est pour ces raisons que la motion et les deux postulats demandent des allégements fiscaux sur la base de l'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier, ces allégements devant s'étendre en particulier à l'impôt pour la défense nationale dû pour les années 1955 à 1958 et à l'impôt sur le chiffre d'affaires dû à partir du 1er janvier 1956.

L'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954, qui a été prorogé de quatre ans encore par l'arrêté concernant le régime financier de 1955 à 1958, a la teneur suivante: 1

L'Assemblée fédérale peut modifier les arrêtés désignés aux articles 1er et 2, si » ces modifications n'ont pas pour but une augmentation du rendement. Il ne peut être procédé à des augmentations de taux du tarif qui entraîneraient une charge supplémentaire pour le contribuable.

2 L'Assemblée fédérale peut, dans des cas déterminés, déléguer au Conseil fédéral la compétence qui lui appartient en vertu du 1er alinéa.

Selon l'idée initiale encore admise aujourd'hui, cette disposition a été créée pour pouvoir modifier le régime financier dans une procédure rapide, relevant exclusivement de la compétence de l'Assemblée fédérale, s'il le fallait pour atténuer ou éliminer certaines duretés, pour faire disparaître des inégalités choquantes de la charge fiscale, pour s'adapter aux changements de situation ou pour simplifier la perception des impôts (voir FF 1950, II, 423 et s., 431; IH, 575; 1954, I, 326; II, 773). Il est exact que l'article 5, d'après sa lettre, ne contient que des restrictions tendant à empêcher le renforcement des charges fiscales. Cela signifie que si l'on voulait accroître le rendement fiscal ou opérer des augmentations de tarifs entraînant une charge supplémentaire pour le contribuable, on ne pourrait le faire en modifiant les dispositions du régime financier de 1939 à 1949 et de l'arrêté fédéral sur les économies (art. 1er de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954), ainsi que les arrêtés du Conseil fédéral instituant l'impôt pour la défense nationale, l'impôt sur le chiffre d'affaires, l'impôt sur le luxe, l'impôt anticipé, l'impôt déduit des prestations d'assurances sur la vie (art. 2 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954). Mais si l'on voulait en déduire l'inverse, c'est-à-dire affirmer que le régime financier peut être modifié par des réductions fiscales sans limite, la conclusion serait inexacte, pour les motifs suivants: L'article 5 permet bien de modifier les arrêtés désignés aux articles 1er et 2 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954, mais non de

1017 changer les dispositions de l'arrêté fédéral lui-même. Dans la mesure où le régime financier a modifié, par exemple, l'impôt pour la défense nationale et l'impôt sur le chiffre d'affaires (art. 3 et 4 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954), ces dispositions sont, dans la forme et dans le fond, de droit constitutionnel; elles peuvent donc être modifiées seulement par un arrêté fédéral soumis au referendum obligatoire, et non par un arrêté fédéral simple au sens de l'article 5. L'Assemblée fédérale n'aurait donc pas la faculté de fixer les déductions de renchérissement à opérer sur le revenu et sur la fortune soumis à l'impôt pour la défense nationale d'une autre manière que ne le fait l'article 3 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 (FF 1954, II, 773-774), ni de délimiter autrement la liste des marchandises franches de l'impôt sur le chiffre d'affaires (art. 4, lettre a, de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954) ou les catégories de marchandises imposables au même titre à 2 et 2,5 pour cent (art. 4, lettre b, du même arrêté). En outre, il ressort du sens et du but de l'arrêté sur le régime financier de 1955 à 1958, qui a été voté par les chambres et admis par le peuple et les cantons comme une trêve politique exprimée dans la maxime «sans changement pour quatre ans», que l'on ne pourrait, sur la base de l'article 5, procéder à des modifications entraînant la suppression formelle ou matérielle de l'un des impôts que les articles 1er et 2 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 ont prorogés. Il en serait de même des modifications touchant à la structure de l'un de ces impôts ou du système fiscal en vigueur, ou encore ayant pour conséquence un remaniement essentiel de la répartition actuelle des charges entre les diverses catégories de contribuables. C'est pourquoi le Conseil fédéral et le parlement ont déjà refusé en particulier: -- la majoration des déductions de renchérissement en matière d'impôt pour la défense nationale (FF 1954, II, 773-774) ; -- la suppression de l'impôt pour la défense nationale sur la fortune (Bulletin sténographique CE 1954, p. 17, 21); -- l'extension de la liste des marchandises franches de l'impôt sur le chiffre d'affaires (livres, médicaments, cidre doux, jus de raisins: Bulletin sténographique
ON 1950, p. 434, 439, 797, 847 ; Bulletin sténographique CE 1950, p. 421 ; chaussures, vêtements, lingerie d'usage courant, médicaments, combustibles: Bulletin sténographique CN 1954, p. 126, 415); -- la suppression de l'impôt sur le luxe (FF 1954, I, 326; Bulletin sténographique CN 1954, p. 389 s.).

L'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 donne aux chambres la faculté extraordinaire de décider des changements de lois sans recours possible au referendum facultatif en matière législative. La nature même de cette disposition et le respect dû aux institutions constitutionnelles obligent à n'employer cette forme juridique

1018 extraordinaire qu'avec réserve et à ne décider une réduction d'impôt sur la base de l'article 5 que si le sens et le but de ce dernier permettent réellement de prendre une telle mesure.

IV. Nature et étendue de la réduction en matière d'impôt pour la défense nationale et d'impôt sur le chiffre d'affaires La motion des chambres et les deux postulats Hauser et Münz demandent de notables dégrèvements en matière d'impôt pour la défense nationale et d'impôt sur le chiffre d'affaires. M. le conseiller national Münz réclame en outre une réduction du droit de timbre sur les coupons. Ces allégements devraient entrer en vigueur à partir du 1er janvier 1956.

La motion demande une réduction sensible de l'impôt pour la défense nationale sur le revenu et sur la fortune; le postulat Hauser envisage une réduction à but social, tandis que le postulat Münz propose un dégrèvement notamment pour les revenus petits et moyens, soit par diminution des taux d'impôt, soit par majoration des limites du revenu exonéré, ainsi qu'une augmentation de la limite au-dessous de laquelle l'impôt complémentaire sur la fortune des personnes physiques n'est pas perçu. Il suggère d'élever cette limite de 30 000 à 150 000 francs, par exemple.

Pour l'impôt sur le chiffre d'affaires, la motion demande aussi une réduction sensible, sans en indiquer la nature et l'étendue. M. le conseiller national Hauser propose, sans autres précisions, une extension de la liste des marchandises exonérées, tandis que le postulat Münz recommande la suppression de l'impôt sur le chiffre d'affaires sur toutes les marchandises indispensables.

D'après ce que nous avons dit sous chiffres II et III ci-dessus, il faut renoncer à certaines mesures, si la réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires doit être opérée sans revision constitutionnelle, sans préjuger la future réglementation permanente des finances fédérales, et sur la base de l'article 5 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954, de sorte qu'elle puisse devenir effective et administrativeroent réalisable sans difficultés déjà pour la 8e période de l'impôt pour la défense nationale (années fiscales 1955 et 1956) et dès le 1er janvier 1956 en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires. Ces mesures auxquelles il faut renoncer sont les suivantes:
a. Impôt pour la défense nationale: -- la majoration des déductions de renchérissement fixées à l'article 3 de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954 (2000 fr. pour l'impôt sur le revenu et 20 000 francs pour l'impôt complémentaire sur la fortune) ;

1019 -- la suppression de l'impôt complémentaire sur la fortune; -- la modification des tarifs d'impôt (tarifs I, II et III de l'impôt pour la défense nationale); b. Impôt sur le chiffre d'affaires: -- l'extension de la liste des marchandises franches d'impôt telle qu'elle est délimitée de façon absolue par l'article 4, lettre a, de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954; -- la modification des taux d'impôt ou de la liste des livraisons imposables à 2 et 2,5 pour cent selon l'article 19, 1er alinéa, lettre a, de l'arrêté instituant l'impôt sur le chiffre d'affaires (art. 4, lettre b, de l'arrêté concernant le régime financier de 1951 à 1954); -- la réduction des taux d'impôt actuels de 4 et 6 pour cent.

En outre, il est exclu que l'on puisse réaliser par la même voie le postulat Münz tendant à la réduction du droit de timbre sur les coupons, car cette question est en rapport étroit avec celle de la fusion du droit de timbre sur les coupons et de l'impôt anticipé, qui ne pourra être décidée que lors de la réforme des finances fédérales.

' Dans ces conditions, il ne reste qu'à envisager une réduction du montant d'impôt, en principe égale, quant à l'impôt pour la défense nationale et quant à l'impôt sur le chiffre d'affaires. On devra prendre garde que cette réduction se maintienne dans des limites convenables pour la Confédération, qu'elle ne dépasse donc pas sensiblement un montant d'environ 100 millions de francs, tout en apportant aux contribuables un dégrèvement substantiel, qui s'équilibre à peu près entre l'impôt pour la défense nationale et l'impôt sur le chiffre d'affaires. Toute réduction de l'impôt pour la défense nationale a aussi son effet pour les cantons qui participent au rendement de cet impôt à raison de 30 pour cent. Si l'on considère en outre que la plupart des cantons ont bien décidé ou envisagé ces derniers mois des réductions en matière d'impôts directs, mais que ces réductions n'excèdent que dans peu de cas 5 pour cent du montant d'impôt, il appert qu'une réduction mesurée en principe à 10 pour cent en matière d'impôts fédéraux procure aussi aux contribuables un dégrèvement sensible, sans trop influencer la future réorganisation des finances fédérales.

Une réduction purement «linéaire» de 10 pour cent en matière d'impôt pour la défense nationale et d'impôt
sur le chiffre d'affaires entraînerait une diminution de recettes de 38 millions de francs pour le premier et de 54 millions pour le second, donc au total 92 millions de francs. La perte nette pour la Confédération, en raison de la part cantonale de 30 pour cent au rendement de l'impôt pour la défense nationale, se réduirait de 11,4 miluons et s'établirait à 80,6 millions de francs.

1020 Cette réduction tiendrait trop peu compte du fait que, depuis 1951, le rendement de l'impôt pour la défense nationale s'est accru relativement plus que celui de l'impôt sur le chiffre d'affaires (l'impôt pour la défense nationale a passé de 100 à 143, l'impôt sur le chiffre d'affaires de 100 à 126) ; en outre, précisément en matière d'impôt pour la défense nationale, la dépréciation de l'argent a fait passer dans des classes de progression plus élevées les revenus inférieurs et moyens. Ces circonstances particulières justifient donc que l'on prévoie une réduction plus forte pour les classes inférieures et moyennes du revenu et de la fortune des personnes physiques. Nous proposons donc, en matière d'impôt pour la défense nationale, de fixer en principe la réduction à 10 pour cent du montant d'impôt annuel comme en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, mais de la relever à 40 pour cent pour les premiers 500 francs de l'impôt annuel sur le revenu et la fortune des personnes physiques. Cette réduction plus forte de 40 pour cent s'applique entièrement, pour les personnes mariées, au revenu du travail jusqu'à 20 000 francs et, pour les célibataires, jusqu'à 18 000 francs; les rentiers en jouissent entièrement jusqu'à 367 000 francs de fortune et 11 000 francs de rendement de fortune. Les contribuables dont le revenu et la fortune sont plus élevés bénéficient également d'une réduction de 40 pour cent sur les premiers 500 francs de leur dette annuelle au titre de l'impôt pour la défense nationale; en revanche, pour la partie de leur dette fiscale qui excède 500 francs, la réduction est de 10 pour cent. Il faut rejeter l'idée d'établir un abattement minimum, parce que la réduction de 40 pour cent sur les montants d'impôts jusqu'à 500 francs a pour effet un dégrèvement sensible des contribuables ayant un petit revenu, en particulier des petits rentiers, et qu'un abattement minimum de 20 francs seulement porterait à près d'un demi-million le nombre des personnes physiques soumises à l'impôt pour la défense nationale qui échapperaient à l'assujettissement, ce qui n'irait pas sans préjuger la réglementation définitive des finances fédérales.

Les effets de la réduction en matière d'impôt pour la défense nationale sont expliqués dans les annexes 1 et 2 au présent message.

La perte annuelle quant à
l'impôt pour la défense nationale s'établit comme il suit: Fr a. Impôt des personnes physiques (réduction de 10 ou 40% du montant d'impôt) 59 millions b. Impôt des personnes morales (réduction de 10% du montant d'impôt) 12 millions c. Dégrèvement total des contribuables 71 millions d. Perte pour la Confédération (70%) 50 millions e. Perte pour les cantons (30%) 21 millions

1021 La perte pour les cantons est d'autant plus supportable que les parts cantonales pour la 8e période de taxation (années fiscales 1955 et 1956) seront notablement plus élevées que dans la 7e période (années fiscales 1953 et 1954), de sorte que la diminution de recettes des cantons par rapport à la 7e période s'élèvera non pas à 21, mais à environ 10 millions de francs.

A la réduction de 10 pour cent de l'impôt sur le chiffre d'affaires on pourrait objecter, s'agissant de l'impôt dû par les grossistes, que cette réduction n'a pas d'effet pour le consommateur, car elle se perd au cours des différentes transactions précédant la livraison au détail. Cette objection ne peut être considérée comme justifiée. L'impôt est perçu pour une partie seulement lors des transactions précédentes et pour l'autre partie sur les livraisons au détail faites aux consommateurs. Au surplus, le jeu de la concurrence économique, où l'impôt sur le chiffre d'affaires est pour le fabricant et le commerçant un élément de frais parmi plusieurs autres (matières premières, salaires, frais de transport, assurances, etc.), obligera de tenir compte aussi de la réduction de la charge fiscale dans la formation des prix. Il n'est pas possible d'édicter des dispositions enjoignant de reporter la réduction dans chaque cas particulier jusqu'au dernier consommateur, car des dispositions de ce genre n'existent pas non plus pour le transfert de l'impôt. La loi (art. 29 de l'arrêté instituant l'impôt sur le chiffre d'affaires) réserve en effet intentionnellement la question du transfert de l'impôt à une entente de droit privé entre fournisseur et client. Le transfert de l'impôt, comme aussi la répercussion d'une réduction d'impôt, rentrent dans le domaine de la formation des prix. C'est seulement si l'Etat avait entièrement en mains cette formation qu'il pourrait prescrire de manière obligatoire et efficace la répercussion de la réduction d'impôt, sous quelque forme qu'elle ait été accordée. Mais, sous le régime actuel, on doit s'en remettre pour cette répercussion aux forces entrant en jeu dans la formation des prix. Les conditions de la concurrence sont parfaitement propres à amener la répercussion. Celle-ci se fera peut-être de façon un peu plus lente pour les articles de prix modeste que pour les marchandises de prix plus élevé ;
il n'y a là cependant aucun motif de renoncer à la réduction.

D'autre part, la réduction de la charge fiscale peut aussi avoir pour effet de diminuer les frais des quelques centimes qui manqueraient encore par unité de vente d'un article pour permettre d'en abaisser le prix, de sorte que la diminution du prix peut, dans certains cas, être plus grande que le montant de la réduction d'impôt de 10 pour cent.

Le même reproche, savoir l'incertitude de la répercussion, pourrait d'ailleurs être formulé contre tout autre genre de réduction de l'impôt sur le chiffre d'affaires, et même contre l'extension de la liste des marchandises exonérées. En effet, lorsque l'Etat n'a pas la haute main sur la formation des prix, la répercussion dépend, quel que soit le genre de réduction, du libre jeu de la concurrence. Contre l'extension de la liste des marchandises

1022 exonérées, telle que le demande le postulat Münz, il y a d'ailleurs non seulement des raisons d'ordre juridique (incompatibilité avec l'article 5, qui n'autorise pas à modifier l'article 4 de l'arrêté sur le régime financier), mais aussi un motif de politique fiscale, savoir le danger d'anticiper considérablement sur la réglementation définitive des finances fédérales; en outre, toute extension de la liste des marchandises exonérées a pour effet d'enlever de sa substance à l'impôt sur le chiffre d'affaires, qui perd ainsi son caractère d'impôt de consommation et se transforme en un simple impôt sur les biens dits d'«investissement». A l'époque actuelle, le Conseil fédéral devrait considérer cette évolution comme fâcheuse. En revanche, la réduction uniforme de l'impôt sur toutes les marchandises est la seule solution qui permette, sans préjuger la future réforme des finances fédérales et sans violer le droit constitutionnel en vigueur, de réaliser en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires le dégrèvement que réclame la motion.

La réduction proposée de l'impôt sur le chiffre d'affaires aura pour conséquence une diminution de recettes de 54 millions de francs par an.

Les réductions doivent avoir effet aussitôt que possible. Ce qui veut dire qu'elles sont applicables, en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, pour les impôts échéant après le 31 décembre 1955 quant aux transactions en marchandises sur territoire suisse et quant à l'importation de marchandises. Il serait impossible d'appliquer la réduction rétroactivement aux montants d'impôt dus dans l'année civile 1955, car il serait exclu dans ce cas que l'on puisse en faire bénéficier rétroactivement les consommateurs.

L'impôt pour la défense nationale dû pour 1955, calculé sur la base des années 1953 et 1954, échoit en mars 1956. Rien ne s'oppose donc à ce que la réduction soit accordée non seulement pour l'impôt annuel de 1956, mais déjà pour 1955, première année de taxation. Si l'impôt de 1955 a été déjà payé en tout ou en partie avant l'entrée en vigueur de l'arrêté fédéral accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires, par exemple en cas de dévolution d'hérédité, de départ pour l'étranger, etc., l'impôt sera rectifié d'office et le trop-perçu remboursé.

Le Conseil fédéral ou,
par délégation, le département des finances et des douanes doit pouvoir édicter les dispositions d'exécution qui seraient nécessaires.

Les réductions proposées dégrèveront les contribuables de 125 millions de francs au total (71 millions de francs en matière d'impôt pour la défense nationale; 54 millions de francs en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires).

Sur ce montant, 104 millions iront au débit de la Confédération et 21 millions (parts cantonales à l'impôt pour la défense nationale) au débit des cantons.

1023 Vu ce qui précède, nous avons l'honneur de vous prier d'adopter le projet d'arrêté fédéral ci-joint accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires.

Nous saisissons cette occasion pour vous renouveler, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 1er novembre 1955.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max Petitpierre 10809

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

1024 (Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le chiffre Ier de l'arrêté fédéral du 25 juin 1954 concernant le régime financier de 1955 à 1958, combiné avec le chiffre Ier, article 5, de l'arrêté fédéral du 29 septembre 1950 concernant le régime financier de 1951 à 1954,; vu le message du Conseil fédéral du 1er novembre 1955, arrête: Article premier L'impôt pour la défense nationale et l'impôt sur le chiffre d'affaires qui doivent être perçus en vertu de l'arrêté concernant le régime financier de 1955 à 1958 sont réduits en conformité de l'article 2.

Art. 2 La réduction s'applique aux montants d'impôt pour la défense nationale dus pour les années 1955 à 1958 et aux montants d'impôt sur le chiffre d'affaires échus après le 31 décembre 1955.

2 En matière d'impôt pour la défense nationale, la réduction est de 10 pour cent du montant d'impôt. Pour les premiers 500 francs de l'impôt annuel sur le revenu et sur la fortune des personnes physiques, la réduction est portée à 40 pour cent.

3 En matière d'impôt sur le chiffre d'affaires, la réduction est de 10 pour cent du montant d'impôt.

Art. 3 1 Le présent arrêté entre en vigueur le 1er janvier 1956.

2 II est aussi applicable aux montants d'impôt pour la défense nationale dont la taxation est passée en force avant cette date. Les bordereaux seront rectifiés d'office; les montants payés en trop seront remboursés.

3 Le Conseil fédéral édicté les dispositions d'exécution nécessaires. Il peut déléguer cette compétence au département fédéral des finances et des douanes.

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Annexe l Effets de la réduction de l'impôt pour la défense nationale sur le revenu (Contribuable marié, sans enfants) Revenu Fr.

Impôt pour la défense nationale sans réduction ' Fr.

5000 6000

Impôt pour la défense nationale avee réduction Fr.

12.-- 25.-- 45.-- 63.-- 84.-- 108.-- 273.-- 513.-- 1 188.60 2 040.60 3 117.60 4419.60 5 946.60 7 605.-- 8 580.-- 9 555. -- 11 505.-- 14 430.-- 19305.--

7000 8000 9000 10000 15000 20000 30000 40 000 50 000 60000 70000 80000 90000 100 000 120 000 150 000 200 000

7.20 15.--

27.-- 37.80 50.40 64.80 163.80 311.70 919.75 1 686.55 2 655.85 3 827.65 5201.95 6 694.50 7 572.-- 8 449.50 10 204.50 12 837.-- 17 224.50

Effets de la réduction de l'impôt pour la défense nationale sur la fortune et sur le rendement de la fortune (Contribuable marié, sans enfants) Fortune Fr.

30000 50000 90000 100 000 110000 120 000 150 000 200 000 300 000 500 000 1 000 000 2 000 000

Rendement de la fortune 3% Fr.

900 1 500 2700 3000 3 300

3600

4500 6000 9000 15000 30000 60000

Impôt pour la défense nationale sans réduction Fr.

5.-- 15.-- 42.-- 48.-- 54. -- 70.-- 91.-- 169.-- 364.-- 945. -- 3 540.60 11 349.60

Impôt pour la défense nationale avec réduction Fr.

3.-- g

25.20 28.80 32.40 42.-- 54.60 101.40 218.40 700.50 3 036.55 10 064.65

1026

Annexe 2 Impôt pour la défense nationale, personnes physiques Charge avant et après la réduction Impôt en fr.

Courbes générales des charges jusqu'à 150 000 francs de revenu

30000

Impôt sur le revenu avant la réduction après la réduction Impôt sur la fortune et sur un rendement de 3% -- avant la réduction ········· après la réduction

25000

20000

15000

10000

5000

0 20

30

40

50

60

70

80

90

100

110

120

130

140

150

Revenu en 1000 francs Impôt

Courbes indiquant les détails pour les revenus petits et moyens

3000

2500

2000

1500

1000

500

0 0

5

10

15

Revenu en 1000 francs

20

25

30

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires (Du 1er novembre 1955)

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Jahr

1955

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Volume Volume Heft

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10.11.1955

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1012-1026

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