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6942 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de l'accord entre la Confédération suisse et la République italienne sur le financement de la construction et de l'électrification de certaines voies d'accès en Suisse des chemins de fer italiens de l'Etat (Du 24 août 1955)

Monsieur le Président et Messieurs, Le 23 juillet 1955, la Confédération suisse et la République italienne ont signé à Rome un accord concernant la construction et l'électrification de certaines voies d'accès en Suisse des chemins de fer italiens de l'Etat.

Nous avons l'honneur de soumettre cet accord à votre approbation.

I. GÉNÉRALITÉS Au début de cette année, l'Italie a proposé à la Suisse d'accorder aux chemins de fer italiens de l'Etat (FS) un prêt destiné à financer l'amélioration et l'électrification de certaines lignes d'accès à la Suisse. Dans un rapport général du 3 février 1955, les chemins de fer italiens de l'Etat notent que la récente mise en valeur agricole et industrielle de l'Italie méridionale aura pour effet d'intensifier, dans une forte mesure, l'échange des marchandises et qu'il faut s'attendre, dans un proche avenir déjà, à une multiplication, par rapport à l'avant-guerre, du volume des transports dans les directions sud-nord et nord-sud. Pour faire face à cet accroissement du trafic, il importe de développer la capacité des lignes ferroviaires donnant accès aux deux grands tunnels alpins du Saint-Gothard et du Simplon.

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Dans notre message du 4 juin 1954 concernant l'approbation de l'accord conclu entre la Suisse et la France en vue de l'électrification de certaines lignes de chemin de fer françaises accédant à la Suisse (FF 1954, I, 973), nous avons déjà signalé l'importance croissante, pour notre pays, des transports par chemin de fer entre le nord et le sud de l'Europe. Alors que les lignes transalpines conduisant à l'ouest et à l'est de notre pays et leurs voies d'accès étrangères ont été progressivement améliorées et électrifiées, nous aurions risqué de voir les transports entre le nord et le sud abandonner les itinéraires passant par la Suisse si nous n'avions pas assuré, par des prêts au chemin de fer fédéral allemand et à la société nationale des chemins de fer français, l'électrification des plus importantes lignes d'accès au nord et à l'ouest de notre pays.

Au sud, la situation se présente d'une façon un peu plus favorable, parce que les chemins de fer italiens de l'Etat ont électrifié la ligne MilanChiasso en 1939 déjà, et que, immédiatement après la dernière guerre, alors que leur réseau souffrait encore des nombreux dégâts causés par les hostilités, ils se sont attelés sans désemparer à l'électrification de la ligne Milan-Domodossola. Les chemins de fer italiens de l'Etat ont de nouveau montré en 1951, lors des éboulements dans le val Diveria, qu'ils étaient prêts à engager d'importants moyens pour assurer l'exploitation de la ligne du Simplon. A ce propos, l'on peut rappeler que, par des subventions équivalant aux prestations réunies de la Suisse et de l'Allemagne, l'Italie a jadis rendu possible et favorisé opportunément la construction de la ligne du Saint-Gothard. Pourtant l'électrification des deux principales lignes d'accès au Saint-Gothard et au Simplon ne leur a pas assuré la capacité qu'exigé notamment un trafic de voyageurs et de marchandises en constante augmentation. Un tronçon important de la ligne du Simplon, entre Gallarate et Arona, est encore à voie unique; aucune des trois gares frontières de Chiasso, Domodossola et Luino .n'a pu, jusqu'ici, être aménagée selon les exigences de la technique moderne; la totalité du trafic, enfin (y compris celui à destination et en provenance de Gênes), se concentre aujourd'hui sur les deux lignes qui se rejoignent à la gare de Milan, déjà surchargée.
La position de la Suisse dans les transports internationaux ne peut donc que gagner à une amélioration des lignes d'accès du sud. Bien que le rapport des chemins de fer italiens de l'Etat du 3 février 1955, dont il a été fait mention, ait mis en tête du programme d'exécution certains ouvrages de moins d'intérêt pour la Suisse, l'Italie s'est déclarée disposée à affecter exclusivement aux lignes d'accès à la Suisse le prêt qui lui serait consenti -- voir à ce sujet la carte annexée -- et à accepter l'ordre d'exécution des travaux qui répond à nos souhaits. Ainsi, lorsque la voie entre Gallarate et Arona aura été doublée et la gare deDomodossola agrandie, la ligne du Simplon aura la même capacité que celle du Saint-Gothard. De plus, l'électrification des deux lignes italiennes destinées aux trains de marchandises qui accèdent, l'une, au Simplon (Gênes-Alexandrie-Novare-Arona-Domodossola) et

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l'autre, au Saint-Gothard ( Gênes-Alexandrie-Novare-Sesto CalendeLuino-Bellinzone), sera d'une grande utilité et provoquera l'allégement désiré des lignes d'accès principales passant par Milan. La construction de la double voie dont il a été question et l'électrification des lignes en direction de Novare-Gênes (et Turin), présentent un intérêt particulier pour la ligne du Loetschberg, puisque ces voies ferrées italiennes se trouvent en majeure partie dans sa zone d'apport méridionale à laquelle l'itinéraire SimplonLcetschberg offre, pour beaucoup de destinations, les conditions tarifaires les plus favorables. L'agrandissement de la gare de Chiasso, rendu urgent par l'accroissement notable du trafic auquel il faut s'attendre, n'est pas inscrit parmi les projets liés au prêt à l'Italie, de sorte que les chemins de fer fédéraux y procéderont par leurs propres moyens, prélevés sur leur budget ordinaire.

Sont donc valables, pour ces voies d'accès à la Suisse par le sud, les considérations qui l'étaient pour les voies d'accès par le nord et l'ouest de notre pays: Ce n'est qu'à condition que ces lignes soient développées et adaptées aux exigences du trafic moderne que la Suisse pourra, à l'avenir, maintenir et renforcer sa position dans le trafic ferroviaire international.

Le trafic avec l'Italie est intense, et, grâce à son essor économique, au développement de son agriculture et aux exigences de ses exportations traditionnelles, ce pays est parfaitement.en mesure d'accroître encore sensiblement sa production, ses livraisons de marchandises, ainsi que les transports qui les conditionnent.

S'il est vrai que les chemins de fer italiens de l'Etat sont disposés, avec d'importants moyens financiers et à l'aide d'un prêt accordé par la Suisse, à améliorer leurs installations, nous ne devons pourtant pas oublier que les chemins de fer fédéraux, eux aussi, ont en perspective de gros investissements. Mais les tâches envisagées seront entreprises avec d'autant moins d'hésitations que le rendement économique des nouvelles installations sera garanti par l'heureux aménagement des voies d'accès et le trafic de transit qui en résultera. Le financement des investissements prévus par les chemins de fer fédéraux ne devrait pas susciter de difficulté. Il s'agira seulement de décider dans quelle mesure la Confédération
peut, au sens de l'article 18, 3e alinéa, de la loi du 23 juin 1924 sur les chemins de fer fédéraux, autoriser une augmentation des dettes à intérêt fixe.

Outre ces considérations, qui relèvent du problème général du trafic, la Suisse a aussi un intérêt politique à favoriser, dans la mesure du possible, les travaux d'équipement en Italie. Le programme de construction et d'électrification des chemins de fer italiens sera inclus dans le cadre du plan Vanoni, qui vise à développer le revenu national et à résoudre le problème du chômage. Ce plan prévoit en premier lieu des investissements dans l'agriculture, les services et les entreprises publics, y compris les chemins de fer et les travaux publics. Comme son exécution suppose une large contribution de l'étranger, tous les Etats membres de l'Organisation

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européenne de coopération économique ont été invités à fournir leur appui à l'Italie, spécialement en ce qui concerne la mise à disposition des capitaux. Le prêt aux chemins de fer italiens dont il est question ici répond à cet appel.

Il a été envisagé d'en payer le montant de 200 millions de francs paç l'intermédiaire de l'Union européenne de paiements. Le message du 6 mai 1955, qui a été adressé aux chambres fédérales au cours de leur dernière session d'été et qui concerne l'Union européenne de paiements, le Fonds européen et un accord entre la Suisse et l'Islande sur le remboursement et la consolidation d'une partie des créances suisses envers l'Union européenne de paiements, exposait que lors de la prolongation de l'Union européenne de paiements, la part des versements en or de chaque pays pour le règlement des excédents et des déficits serait portée de 50 pour cent qu'elle était alors, à 75 pour cent et que la part des crédits serait ramenée de 50 pour cent à 25 pour cent. Ceci signifie qu'en cas de transfert du prêt de 200 millions sur la base de l'ancien rapport or/crédit de 50/50 pour cent, le déficit suisse à l'égard de l'union, qui résulterait de l'obligation de payer en or 100 millions de francs, serait équilibré par une diminution égale de l'avance de la Confédération. Si le transfert intervenait selon le nouveau rapport or/crédit de 75/25 pour cent qui est entré en vigueur le 1er août 1955, le solde passif suisse à l'égard de l'union serait compensé par un versement en or de 150 millions et une réduction de l'avance de la Confédération de 50 millions de francs seulement. Dans l'idée de réduire autant que possible l'avance de la Confédération et d'alléger la position débitrice de l'Italie à l'égard de l'union -- mais en prévision aussi d'une liquidation éventuelle de l'union dans un proche avenir -- les parties contractantes sont convenues de procéder au transfert du prêt par un pré-financement effectué sur la base de l'ancien rapport or/crédit, c'est-à-dire avant le 1er août 1955. Jusqu'à ce qu'ait pris fin la procédure de ratification, le montant transféré demeurera en dépôt à l'office italien des changes et les mesures de garantie voulues seront maintenues en Suisse. Au cas où cette ratification n'aboutirait pas, l'opération de transfert serait rapportée.

Les pourparlers relatifs
au prêt ont donné l'occasion de résoudre diverses questions pendantes entre les deux pays ou d'en préparer la solution.

Il s'agit des questions suivantes: a. Au cours de la guerre, des marchandises suisses furent réquisitionnées par les troupes italiennes. D'autres biens suisses subirent des pertes du fait de mesures prises par les autorités italiennes. L'indemnité globale proposée par l'Italie a été considérée comme acceptable par la Suisse.

b. Une grande propriété agricole suisse a été expropriée en Italie en vertu de la loi sur la réforme agraire du 21 octobre 1950. Sans con-

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tester que les autorités italiennes aient le droit d'appliquer la réforme agraire à la propriété suisse, les autorités fédérales sont intervenues en 1952 déjà pour demander, en dédommagement de l'expropriation du bien-fonds, une indemnité conforme aux principes du droit des gens. Un accord a été conclu qui prévoit le paiement d'une indemnité équitable.

c. Bien qu'un arrêt du conseil d'Etat italien admette la possibilité de faire breveter les procédés de fabrication de produits pharmaceutiques, l'office italien des brevets s'est refusé à délivrer de tels brevets à des entreprises suisses. Les autorités italiennes ont donné maintenant l'assurance que cette question serait réglée.

d. La création de l'usine hydro-électrique Val di Lei-Innerferrera, à la frontière italo-suisse, exige l'octroi d'une concession de droit d'eau par chacun des deux pays. Mais lorsqu'il s'est agi, ces dernières années, d'établir et de mettre au point des projets de concession concordants, les pourparlers avec l'Italie n'ont progressé que très lentement. Bien que les accords italo-suisses de 1949 et 1952 sur la concession des forces hydrauliques du Reno di Lei et la modification de la frontière dans le Val di Lei soient entrés en vigueur au printemps dernier, de nouvelles difficultés sont apparues.

Au cours des négociations sur le prêt de 200 millions, la Suisse a obtenu l'assurance que l'octroi de la concession désirée depuis longtemps, surtout par le canton des Grisons, ne se ferait plus beaucoup attendre. L'Italie s'est engagée à l'accorder avant la fin de l'année.

e. Alors qu'il n'avait été question d'abord que d'un prêt de 200 millions de francs au chemin de fer de l'Etat italien, il s'est révélé nécessaire, au cours des discussions préliminaires, d'élargir quelque peu les limites de ce projet et de faire bénéficier certaines lignes privées du réseau ferroviaire italien des avantages de cette aide financière. Il s'agit, en l'occurrence, du chemin de fer des Centovalli et de celui de la Valteline (Ferrovia Alta Valtellina) ; voir la carte annexée.

Le tronçon italien de la ligne privée des Centovalli qui, de la grande voie ferrée du Simplon, relie Domodossola à Locamo' et franchit la frontière à Camedo, est en mauvais état depuis de nombreuses années, ce qui ne va pas sans nuire aux intérêts touristiques de la région
de Locamo. Pour la Suisse romande, le Valais et certaines régions du canton de Berne, la ligne des Centovalli offre la liaison ferroviaire la plus courte en direction de Locamo et de toute une partie du Tessin.

En tant que réseaux reliés aux Centovalli, les chemins de fer fédéraux aussi bien que la compagnie du Berne-Loetschberg-Simplon sont intéressés au trafic de cette ligne. Le tronçon suisse Locarno-Camedo, concédé aux Ferrovie Regionali Ticinesi (FRT), a fait l'objet, lors de

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l'assainissement de cette compagnie, d'importantes subventions de la Confédération et du canton pour sa remise en état.

Une expertise technique entreprise en 1947 avec le concours de spécialistes italiens a révélé que le tronçon Domodossola-Camedo, qui appartient à la Società Subalpina di imprese ferroviarie à Rome, pourrait être renouvelé d'une façon satisfaisante avec une dépense d'environ 500 millions de lires, soit 3,6 millions de francs suisses en chiffres ronds. Au cours de pourparlers qui eurent lieu en juin dernier, l'Italie s'est déclarée d'accord de procéder à l'assainissement technique du chemin de fer des Centovalli et d'assumer la moitié des dépenses nécessaires à la remise en état du tronçon italien, soit, en chiffres ronds, 250 millions de lires ou environ 1,8 million de francs suisses. L'autre moitié serait à la charge de la Società Subalpina, mais celle-ci n'est pas en mesure de supporter une telle dépense. Notre pays ayant un grand intérêt au maintien de cette importante voie touristique, il a été convenu avec l'Italie que la Suisse mettrait à la disposition de la Società Subalpina un prêt d'environ 2 millions prélevés sur les intérêts qui lui reviennent de son prêt de 200 millions aux chemins de fer italiens de l'Etat.

Le second chemin de fer privé italien entrant en considération, la Ferrovia Alta Valtellina, exploite une ligne à voie normale de 26 km reliant Tirano, terminus de la ligne de la Bernina du chemin de fer rhétique, et Sondrio, point de départ d'une ligne des chemins de fer italiens de l'Etat menant à Milan, via Colico et Lecco. Au cours de ces dernières années, celle-ci a été modernisée et adaptée à l'exploitation en courant continu, tandis que la Ferrovia Alta Valtellina utilise le courant triphasé. Ainsi, les trains ne peuvent plus accomplir le parcours complet sans changement d'automotrice électrique.

De même que maints autres chemins de fer privés italiens, celui de la Valteline a considérablement souffert des conséquences de la deuxième guerre mondiale, et notamment parce que l'infrastructure, les installations de voies et le matériel roulant n'ont pas été renouvelés, ou ne l'ont été que d'une manière tout à fait insuffisante. En vertu de la loi italienne d'aide aux chemins de fer privés, la compagnie de la Valteline a déposé une demande d'assainissement
avec l'appui de l'Etat, qui est actuellement à l'étude auprès du ministère des transports, à Rome. La question de principe, qui est de savoir si le chemin de fer doit être maintenu et modernisé avec l'aide de l'Etat ou s'il doit être remplacé par un mode de transport public non ferroviaire, n'a pas encore été tranchée.

Toutefois, le remplacement de la voie ferrée par un service routier ferait perdre 300 000 à 350 000 francs de recettes annuelles au chemin de fer rhétique. La ligne de la Bernina est déjà déficitaire; elle le deviendrait

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bien davantage si elle devait perdre la majeure partie des transports en transit que le chemin de fer italien? de la Valteline reprend à Sondrio des chemins de fer de l'Etat et achemine à Tirano, d'où ils sont pris en charge par le chemin de fer rhétique en direction de l'Engadine, et en partie même au-delà.

Sur la base d'une première expertise sommaire, le montant total des dépenses nécessaires à l'assainissement technique du chemin de fer de la Valteline a été évalué à environ 1300 millions de lires, soit 9,1 millions de francs suisses. L'Italie s'est engagée à soumettre au parlement italien un projet de loi ad hoc, proposant de maintenir ce chemin de fer privé et de mettre à disposition la moitié des fonds nécessaires à son assainissement, c'est-à-dire 650 millions de lires en chiffres ronds, soit 4,55 millions de francs suisses. Cette procédure parlementaire est nécessaire en raison du montant de la dépense en cause. Si ce projet de loi est adopté, la Suisse, considérant l'intérêt du chemin de fer rhétique au maintien et à la modernisation de cette ligne, se déclare prête à couvrir l'autre moitié des frais, de la même manière que pour le chemin de fer des Centovalli, celui de la Valteline n'étant pas non plus en mesure d'assumer cette dépense.

Les deux gouvernements devront s'entendre ultérieurement sur les modalités de cette mesure. Les prêts suisses seraient octroyés pour une durée de 25 ans environ et l'Etat italien en garantirait les intérêts et le remboursement.

/. Les entretiens au sujet du prêt de 200 millions ont également porté sur le conflit d'intérêts italo-suisse relatif à la navigation sur le lac Majeur et le lac de Lugano.

Avant la deuxième guerre mondiale, la navigation sur les deux lacs qui forment la frontière entre la Suisse et l'Italie était organisée de manière que l'exclusivité en fût assurée à la Suisse pour le lac de Lugano et à l'Italie pour le lac Majeur. La Società Navigazione del Lago di Lugano (SNL), à Lugano, titulaire d'une concession fédérale pour la navigation sur les eaux suisses de ce lac, dessert aussi depuis bientôt 100 ans les stations riveraines italiennes, mais sans être au bénéfice d'une concession de l'Etat italien.

La navigation italienne sur le lac Majeur fut pratiquement suspendue pendant la seconde guerre mondiale et ne reprit ensuite que très
lentement ; la Suisse s'est ainsi trouvée dans l'obligation d'instituer un service de navigation dans le bassin suisse. A cet effet, une concession fédérale fut octroyée aux Ferrovie Regionali Ticinesi (FRT), à Locamo.

Depuis 1953, l'Italie revendique le rétablissement de la situation antérieure. Notons qu'une entreprise italienne a sollicité des autorités de ce pays une concession pour la navigation sur les eaux italiennes du Feuille fédérale. 107« année. Vol. II.

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lac de Lugano. Selon les autorités italiennes, cette demande ne pourrait être rejetée que si la Suisse décide de confier à nouveau à une entreprise italienne toute la navigation sur le bassin suisse du lac Majeur. Or, il est à craindre que la concurrence d'une société de navigation italienne sur le lac de Lugano ne provoque de lourdes pertes financières pour l'entreprise concessionnaire suisse. D'autre part, la navigation suisse sur le lac Majeur est déficitaire.

Les négociations concernant l'octroi du prêt ont permis de régler les problèmes de la navigation sur les lacs italo-suisses en ce sens que l'Italie accordera à la société suisse la concession exclusive des courses régulières sur les eaux italiennes du lac de Lugano dès que la Suisse, de son côté, aura accordé à une entreprise italienne la concession de navigation dans le bassin suisse du lac Majeur.

g. Enfin les autorités italiennes se sont déclarées d'accord de reprendre les pourparlers en vue de la conclusion d'une convention sur le trafic aérien et sur la double imposition.

L'accord du 23 juillet 1955 entre les deux gouvernements sur le financement de la construction et de l'électriôcation de certaines voies d'accès en Suisse des chemins de fer italiens de l'Etat (appelé ci-après «accord») a été complété par une convention signée le même jour entre les chemins de fer fédéraux suisses et les chemins de fer de l'Etat italien (désignée par «convention») qui traite en particulier des modalités du prêt. L'accord seul sera soumis à ratification.

II. L'ACCORD INTERGOUVERNEMENTAL Article premier Par cet article -- voir aussi l'article premier de la convention -- le gouvernement italien s'engage à mettre les chemins de fer italiens de l'Etat en mesure de réaliser, dans un délai de 4 à 6 ans, les travaux mentionnés sous chiffres I à 6 -- voir la carte annexée -- pour lesquels le prêt a été accordé. Les chemins de fer italiens de l'Etat sont tenus d'observer l'ordre d'exécution des travaux fixé en commun, mais -- dans l'intérêt de la Suisse aussi -- ils sont libres d'entreprendre simultanément divers de ces ouvrages.

L'ordre de succession des travaux qui a été arrêté montre qu'il convient d'abord de donner à la voie d'accès principale au Simplon et au Loetschberg qui est déjà électrifiée, sa pleine capacité de transport. Pour cela, il faut
surtout doubler la voie sur le tronçon encore à voie unique et achever l'agrandissement de la gare de Domodossola.

Dans la troisième étape des travaux, l'électrification de la ligne (Bellinzone-Cadenazzo)-Pino-Luino avec le système de courant utilisé en Suisse, permettra aux chemins de fer fédéraux d'obtenir un rendement plus écono-

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mique de cette ligne, qui est la plus longue ligne suisse qui soit encore exploitée à la vapeur. Encore que les installations fixes situées sur territoire italien soient propriété des chemins de fer italiens de l'Etat, ce sont les chemins de fer fédéraux qui pourvoient au service de la traction et convoient les trains de Bellinzone à Luino. Le tronçon suisse Cadenazzofrontière/Pino, encore exploité à la vapeur, sera électrifié par les chemins de fer fédéraux.

En quatrième étape seulement, vient l'électrification des voies d'accès proprement dites des chemins de fer italiens de l'Etat, dont fait partie, nous l'avons dit, la ligne d'apport directe au Simplon et au Loetschberg (Alexandrie-Novare-Arona).

Avec l'aménagement subséquent de la ligne de la rive gauche du lac Majeur à destination de Luino, la ligne du Saint- Gothard disposera d'une autre bonne voie d'accès pour le trafic en provenance du sud. L'électrification des lignes de jonction Gallarate-Laveno permettra enfin au trafic en provenance de Milan et de Rhô (où se trouvent plusieurs raffineries de pétrole) d'être acheminé, directement et sans changement des moyens de traction, sur Luino.

Le solde du prêt de 200 millions de francs subsistant après le financement de ces ouvrages, soit, probablement, quelque 60 millions de francs, sera utilisé au développement, prévu sous chiffre 6, des usines électriques nécessaires à l'alimentation en énergie des lignes nouvellement électrifiées, ainsi qu'à l'acquisition de locomotives électriques.

Les chemins de fer italiens de l'Etat devront donc financer eux-mêmes les autres travaux de leur programme : remplacement sur le réseau ligurien du courant triphasé par du courant continu et électrification des lignes Ancóne--Sulmona et (Milan)-Rho-Santhià--Turin. Tenant compte de la suggestion contenue dans le postulat Agostinetti du 22 juin 1955 mais formulée aussi par le chemin de fer Berne-Loetschberg-Simplon, la délégation suisse, dans ses négociai/ions avec l'Italie, a tenté de faire inclure l'électrification de la ligne Arona-Santhià dans la liste des ouvrages à exécuter avec le prêt de 200 millions de francs. Les représentants des chemins de fer italiens de l'Etat ont fait cependant observer que l'électrification de cette ligne peu fréquentée exigerait de coûteuses installations pour son alimentation
en énergie mais n'aurait une grande utilité ni pour l'Italie, ni pour la Suisse, tant que ne serait pas également électrifiée la ligne principale Santhià--Turin. Si cette dernière éventualité venait à se produire, l'alimentation en énergie électrique de cette ligne Arona-Santhià pourrait se faire à partir de ses deux extrémités avec des moyens beaucoup plus simples, et les chemins de fer italiens de l'Etat ne seraient alors pas opposés à en envisager la réalisation. Pour donner tous apaisements à la délégation suisse, les représentants des chemins de fer italiens de l'Etat se sont liés par une déclaration consignée au procès-verbal et selon laquelle,

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quelle que soit la décision qui sera prise au sujet de l'électrification de cette ligne, les envois à destination ou en provenance de Turin, ou au-delà, resteront au. bénéfice des taxes applicables au trajet par Arona-Santhià, même si les exigences d'une exploitation plus rationnelle obligeaient les chemins de fer italiens de l'Etat à acheminer ces envois par Novare, c'està-dire par la ligne électrifiée qui comporte un parcours plus long.

Article 2 Par cet article, le gouvernement suisse s'engage à autoriser le financement des travaux mentionnés à l'article premier. A cet effet, les chemins de fer fédéraux accorderont aux chemins de fer italiens de l'Etat un prêt de 200 millions de francs suisses. La Confédération mettra le montant à disposition des chemins de fer fédéraux, qui, comme dans le cas de la société nationale des chemins de fer français, deviendront débiteurs de la Confédération et créanciers des chemins de fer italiens de l'Etat. De cette façon, il a pu être tenu compte, dans l'accord et dans la convention entre les deux administrations à la fois des postulats suisses de caractère général déjà mentionnés et des désirs particuliers exprimés par les chemins de fer fédéraux. On encourage ainsi l'amicale collaboration entre administrations ferroviaires de pays voisins, qui est indispensable à la bonne marche du trafic international, et la situation des chemins de fer fédéraux en sera affermie. En leur qualité d'intermédiaires, les chemins de fer fédéraux céderont à la Confédération les montants qu'ils recevront des chemins de fer italiens de l'Etat au titre d'intérêts et d'amortissements annuels.

La transaction n'entraîne, pour les chemins de fer fédéraux, aucun engagement financier. Leurs rapports avec la Confédération seront réglés par une convention spéciale avec le département fédéral des finances et des douanes.

Aux termes de l'article 2 de la convention, les chemins de fer italiens de l'Etat s'engagent à n'affecter le montant du prêt qu'aux seuls ouvrages ferroviaires envisagés.

Article 3 Les modalités du prêt sont déterminées par la convention. En vertu de l'article 3 de cette convention, les chemins de fer italiens prennent possession du total du prêt dès l'entrée en vigueur de l'accord.

L'intérêt est fixé à 3 % pour cent pour les six premières années. Il passe à 4% pour cent
pour les six années suivantes et à 4% pour cent pour les 14 dernières années. Pour la durée du prêt, l'intérêt moyen est donc de 4,22 pour cent. Les intérêts seront payés annuellement dès le 1er février 1957.

Comme l'indique l'article 4 de la convention, le prêt est consenti pour une durée de 26 ans, qui débutera avec l'entrée en vigueur de l'accord.

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Le total de la somme est prêté ferme pour 16 ans et sera amorti durant les dix années qui suivront, moyennant des annuités fixes.

Les chemins de fer italiens de l'Etat ont la faculté de procéder au remboursement anticipé du prêt. S'il y a lieu, les parties contractantes se mettront d'accord sur les modalités d'un tel remboursement.

Article 4 Compte tenu des réserves mentionnées plus haut, le montant total du prêt a déjà été transféré en Italie par la voie de l'accord de paiement italosuisse, soit par l'intermédiaire de l'Union européenne de paiements. D'autre part, le service des intérêts et des amortissements sera réglé eh francs suisses libres et en dehors de tout système réglementé des paiements.

Comme cela a déjà été relevé, cette solution est particulièrement avantageuse pour la Suisse, puisque la remise de capital a pour effet d'alléger la position créditrice de la Confédération à l'égard de l'Union européenne de paiements, sans que l'on doive recourir par la suite au système réglementé des paiements pour le service du prêt.

Article 5 L'Etat italien se porte garant du paiement des intérêts et du remboursement du prêt.

Dans les comptes ferroviaires avec l'Italie, les chemins de fer fédéraux sont régulièrement créanciers. C'est pourquoi il n'a pas été possible d'envisager une réglementation analogue à celle qui est prévue dans le cas du prêt accordé à la société nationale des chemins de fer français de laquelle les chemins de fer fédéraux sont régulièrement débiteurs; cette réglementation fixe que, le cas échéant, les obligations découlant du service des intérêts et de l'amortissement du prêt peuvent être compensés par des contre-prestations des chemins de fer fédéraux.

Article 6 II importe au développement du trafic ferroviaire par les points de passage italo-suisses de Chiasso, Domodossola et Luino, que l'administration italienne des chemins de fer, et surtout le gouvernement italien, se déclarent disposés à prendre les mesures propres à promouvoir le trafic ferroviaire entre les deux pays et le trafic de transit par ces gares-frontière.

Ces mesures garantiront à la fois une évolution satisfaisante du trafic international et un accomplissement prompt et empressé des formalités de contrôle dans le trafic ferroviaire entre les deux Etats. Mais il est essentiel aussi que les chemins de
fer fédéraux puissent compter sur les chemins de fer italiens pour l'exécution rapide des aménagements prévus et surtout des travaux d'agrandissement de la gare de Chiasso.

490 L'article 6 prévoit encore que les trois points frontière ne seront en aucun cas traités moins favorablement par les deux pays que les autres points frontière; les deux gouvernements s'abstiendront de toutes mesures discriminatoires, notamment en ce qui concerne les formalités de la police frontière, de l'administration et de la douane.

Les articles 6, 7 et 8 de la convention complètent ces dispositions.

Article 7 Cet article dispose que le présent accord entrera en vigueur après l'échange des instruments de ratification.

L'article 9 de la convention traite de la même question.

Nous avons l'honneur de vous proposer d'approuver le présent accord en adoptant le projet d'arrêté ci-joint.

Nous saisissons cette occasion pour vous présenter, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 24 août 1955.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max Petitpierre 10740

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL approuvant

l'accord signé le 23 juillet 1955 entre la Confédération suisse et la République italienne sur le financement de la construction et l'électrification de certaines voies d'accès en Suisse des chemins de fer italiens de l'Etat

L'Assemblée, fédérale, de la Confédération suisse, vu l'article 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 24 août 1955, arrête: Article premier L'accord signé le 23 juillet 1955 entre la Confédération suisse et la République italienne sur le financement de la construction et l'électrification de certaines voies d'accès en Suisse des chemins de fer italiens de l'Etat est approuvé.

Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier cet accord.

Art. 2 Le présent arrêté est soumis aux dispositions de l'article 89, 3e alinéa, de la constitution concernant le referendum en matière de traités internationaux.

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ACCORD entre

la Confédération suisse et la République italienne concernant le financement de travaux en vue du développement et de l'électrification de certaines lignes des «Ferrovie italiane dello Stato» accédant à la Suisse

LA CONFÉDÉRATION SUISSE, d'une part, et LA RÉPUBLIQUE ITALIENNE, d'autre part, tenant compte de l'intérêt que le développement et l'électrifioation de certaines lignes de chemin de fer d'Italie accédant à la Suisse présentent pour les relations ferroviaires italo-suisses et le trafic de transit, se sont consultées dans le cadre des rapports de collaboration et d'amitié qui ont toujours heureusement caractérisé les relations entre les deux pays et sont convenues des dispositions suivantes: Article premier Le Gouvernement italien s'engage à mettre les chemins de fer italiens en mesure de réaliser, dans un délai de 4-6 ans dès l'entrée en vigueur du présent accord et dans l'ordre adopté ci-dessous ou simultanément, les projets de travaux mentionnés dans la convention passée le 23 juillet 1955 entre les Chemins de fer fédéraux suisses (CFF) et les Ferrovie italiane dello Stato (FS), concernant le financement de travaux en vue du développement' et de l'électrification de certaines lignes de chemins de fer de l'Italie accédant à la Suisse.

Ces projets concernent: 1. Construction de la double voie entre Gallarate et Arona, y compris l'électrification de la deuxième voie; 2. Achèvement des travaux d'agrandissement à la gare de Domodossola dans le cadre de la convention existante à ce sujet;

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3. Electrification de la ligne Pino (fr.)-Luino (courant alternatif monophasé à 15 kV, 162/3 périodes), sur la base d'un contrat particulier à conclure entre les deux administrations; 4. Electrification de la ligne Alessandria-Novara-Oleggio-Arona; 5. Electrification des lignes Oleggio-Sesto Calende-Luino et LavenoGallarate, y compris l'extension de la gare de Luino; 6. Agrandissement des centrales hydro-électriques destinées à alimenter les lignes à électrifier susmentionnées et achat de locomotives destinées à l'exploitation de ces lignes.

En outre, le Gouvernement italien s'engage à mettre en mesure les ES, en ce qui a trait à l'électrification des lignes mentionnées sous chiffres 4 et 5, à adapter leurs installations aux exigences de lignes de trains de marchandises bien équipées.

Article 2 Le Gouvernement suisse s'engage à autoriser le financement des travaux de développement et d'électrification mentionnés à l'article premier par un prêt des OFF aux FS de 200 millions de francs suisses.

Article 3 Les conditions du financement prévu à l'article précédent sont fixées par une convention, passée entre les CFF et les FS.

Article 4 Le transfert du prêt sera effectué par le service réglementé des paiements, soit par l'intermédiaire de l'Accord de paiement italo-suisse en vigueur. Le service des amortissements et des intérêts sera effectué en dehors de tout service réglementé des paiements, soit en francs suisses libres.

Article 5 L'Etat italien se porte garant du remboursement du capital et du service des intérêts du prêt mentionné ci-dessus.

Article 6 Les deux gouvernements s'engagent à prendre toutes mesures propres à développer le trafic ferroviaire entre les deux pays et le trafic de transit par Chiasso, Domodossola et Luino. Ces points frontières ne seront soumis en aucun cas à un régime moins favorable que celui appliqué aux autres points frontières par chacun des deux pays. Les deux gouvernements s'abstiendront de toute mesure discriminatoire, notamment en ce qui concerne les formalités

494 de contrôle. Us s'engagent en outre à prendre dans leur trafic réciproque toutes les mesures adéquates pour que les opérations de douane, de police de frontière et d'administration puissent s'effectuer dans les plus brefs délais et dans les meilleures conditions.

Article 7 Le présent Accord entrera en vigueur dès l'échange des instruments de ratification.

Fait à Rome, en deux exemplaires, le 23 juillet 1955.

Pour la Confédération suisse: r

(signé) D M. Iklé

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Pour la République italienne: (signé) A. Cattani

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de l'accord entre la Confédération suisse et la République italienne sur le financement de la construction et de l'électrification de certaines voies d'accès en Suisse des che...

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1955

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6942

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

02.09.1955

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479-494

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