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6993 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi modifiant celle sur l'assurance-vieillessé et survivants (Du 8 novembre 1955)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet de loi modifiant la loi du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillessé et survivants.

I. INTRODUCTION La loi sur l'assurance-vieillessé et survivants (appelée ci-après «la loi») accorde le droit à une rente également aux personnes qui n'ont pas payé des cotisations durant une année entière au moins; mais cette rente (dite transitoire) n'est versée en principe qu'en cas de besoin, c'est-à-dire si le revenu -- compte tenu d'une part équitable de la fortune -- ne dépasse pas les limites prévues par la loi. Cette réglementation, à laquelle sont soumises surtout les personnes nées avant le 1er juillet 1883 ou devenues veuves ou orphelines avant le 1er décembre 1948, a fait l'objet, ces derniers temps, de critiques continuelles. Nombreuses ont été les interventions parlementaires et extraparlementaires tendant à la suppression de la clause du besoin pour la génération transitoire.

Nous rappelons à ce propos les postulats Monfrini et Gnägi, acceptés par le Conseil fédéral le 21 septembre 1955, ainsi que les motions Bratschi et Guinand acceptées le 28 septembre 1955 sous forme de postulats. Nous mentionnons aussi les interventions des Conseils d'Etat des cantons de Neuchâtel (du 18 janvier 1955), Genève (du 16 juillet 1955) et Vaud (du 22 juillet 1955) transmettant et recommandant des pétitions en faveur d'une suppression des limites de revenu, présentées par des groupes de personnes nées avant le 1er juillet 1883'. La pétition du 10 mars 1955 de la revue Der schweizerische Beobachter réclame également une réglementation qui

1142 permette d'accorder une rente à toutes les personnes nées avant le 1er juillet 1883 qui ne bénéficient pas d'une rente transitoire ainsi qu'à leurs survivants. Enfin nous sont parvenues de nombreuses requêtes émanant de partis, d'associations et de particuliers, tendant toutes à la suppression des limites de revenu.

A côté de la suppression des limites de revenu, d'autres points de la loi ont fait l'objet d'interventions parlementaires et extraparlementaires en grand nombre. Nous ne citerons que les postulats de Courten, Münz, Guinand, Wartmann, Meister, Bodenmann, Bratschi et Dietschi. L'examen de tous ces voeux demande naturellement du temps. D'autre part, l'assurance-invalidité est en voie d'élaboration ; et cette assurance est à tel point liée à l'assurance-vieillesse et survivants que presque chaque modification de la loi aura immanquablement des répercussions sur elle. Aussi est-il absolument nécessaire de coordonner quant au fond et dans le temps les modifications de la loi et l'introduction de l'assurance-invalidité.

L'octroi de rentes transitoires sans clause du besoin à l'ensemble de la génération transitoire est la seule question qui ne nécessite pas d'autres éclaircissements et ne préjuge pas non plus d'une manière excessive celle de l'assurance-invalidité. Etant donné l'âge des intéressés, on s'accorde en outre à qualifier cette mesure d'urgente. C'est pourquoi, en acceptant les postulats déposés au Conseil national au sujet de cette question, nous avons fait part de notre intention de présenter pour la session de décembre 1955 un projet de revision tendant à la suppression des limites de revenu.

Tel est l'objet du présent message.

II. ÉVOLUTION JUSQU'A CE JOUR Dès l'origine, les limites du besoin fixées dans la loi étaient très larges.

En 1948 déjà, la proportion moyenne des personnes de la génération transitoire qui bénéficiaient de rentes était de 50 pour cent environ. Dans certains cantons, le nombre de ces personnes se situait alors déjà bien au-delà de la moyenne (Fribourg et Appenzell Bh.-Int. 60%, Grisons 61 %, Unterwald-le-Haut 65%, Tessin 67% et Valais 74%).

Malgré cela, très rapidement, les limites de revenu furent estimées trop basses. L'assurance-vieillesse et survivants se nivelant financièrement saine, une première revision, entrée en vigueur au 1er janvier
1951, augmenta ces limites d'environ 70 pour cent en moyenne. Dès le 1er janvier 1954, une seconde revision favorisa de nouveau la génération transitoire en augmentant le montant des rentes et en élevant les limites de quelque 12 pour cent.

De 1948 à ce jour, les limites de revenu mises à l'octroi des rentes transitoires ont ainsi été élevées de près de 90 pour cent en moyenne; si l'on considère qu'il avait été décidé, lors des deux revisions de la loi, de tenir

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compte moins largement de la fortune, on peut estimer que ces limites sont approximativement deux fois plus élevées.

Le tableau ci-après indique les différentes limites de revenu effectives depuis l'introduction de l'assurance-vieillesse et survivants.

Tableau de l'évolution des limites de revenu Montants en francs Régions urbaines

Régions mi-urbaines

Régions rurales

Genres de rentes

1948

Rente de vieillesse simple 2000 Rente de vieillesse pour 3200 Rente de veuve 2000 Rente d'orphelin simple 600 Rente d'orphelin double 900

1951

1954

1948

1951

1954

3333 3750 1850 3067 3450

1948

1951

1700

2800 3150

1954

5333 6000 2950 4933 5550 2700 4533 5100 3333 3750 1850 3067 3450 1700 2800 31ÇO 1467 1650 1467 1650

525 1333 1500 800 1333 1500

450 1200 1350 700 1200 1350

Une comparaison avec les limites, en partie sensiblement plus basses qui sont déterminantes pour les aides cantonales à la vieillesse, fait ressortir nettement qu'en matière d'assurance-vieillesse et survivants l'élévation des limites est bien supérieure à, ce qu'on admet communément.

Nous verrons maintenant quelles sont les prestations que la génération transitoire a reçues, sans verser de cotisations, sur la base de ces limites de revenu. Ainsi que le montre le tableau ci-après, ces prestations sont considérables. Durant les huit premières années d'existence de l'assurancevieillesse et survivants, le nombre et la somme des rentes transitoires ont été supérieurs à ceux des rentes ordinaires.

1144 Bénéficiaires ( J ) et montants (2) de rentes transitoires et ordinaires 1948-1955 Rentes transitoires Années

Rentes ordinaires (')

Nombre de bénéficiaires {en milliers)

Montants versés (en millions de francs)

1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 ( 2 )

247 248 237 270 263 249 241 230

122 124 121 142 141 132

Total

--

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

Montants versés (en millions de francs)

,

156 151

32 70 108 147 184 221 255

43 73 100 128 194 223

1089

--

778

17

f 12 ) Y compris les bénéficiaires et les paiements à l'étranger.

( ) Estimations.

II est superflu de relever qu'on ne saurait, en face de tels chiffres, parler de «vieillards oubliés». La jeune génération, par les cotisations qu'elle a versées et qui s'ajoutent aux contributions des pouvoirs publics, a fourni des prestations vraiment considérables en faveur des personnes qui étaient âgées, veuves ou orphelines lors de l'introduction de l'assurance.

Bien que la génération transitoire ait été favorisée dans une mesure incontestablement très grande, un mouvement d'opinion quasi général se dessine en faveur de son admission complète dans l'assurance.

Comment s'explique cette quasi-unanimité de l'opinion publique alors que les limites de revenu ont été si largement tracées ? Nous croyons qu'il y a là un phénomène d'ordre essentiellement psychologique. Depuis que les rentes transitoires, par suite de l'élévation des limites de revenu, ont perdu en partie le caractère de rentes de besoin qu'elles avaient à l'origine, les personnes qui en raison de leurs revenus ou de leur fortune continuent à ne pas avoir droit à la rente se considèrent comme faisant partie d'une minorité d'«exclus» et comme les victimes d'une inégalité de traitement. De (') Nombre des bénéficiaires établi par la statistique (sans égard à la durée de perception de la rente). Chaque couple est compté comme un soûl cas de rente.

( 2 ) Résultats comptables.

1145 plus, on ne saurait contester entièrement que, malgré leur revenu, certaines personnes qui n'ont pas ou que partiellement droit à la rente puissent en raison de conditions de vie particulières avoir besoin d'une aide financière, ou, le cas échéant, d'une aide supérieure à la rente réduite dont elles bénéficient actuellement. Enfin, il ne faut pas perdre de vue que tout système de limites de revenu favorise aussi des personnes qui sont partiellement ou entièrement responsables de la situation économique difficile dans laquelle elles se trouvent. Ces diverses considérations ont conduit de larges milieux de la population à la conviction qu'il ne faut pas laisser subsister des limites de revenu.

Cet état de choses nous a amenés à conclure qu'il conviendrait d'accéder à une demande maintes fois répétée et d'accorder sans réserve à la génération transitoire le droit à la rente. Cette mesure se justifie d'autant plus que la situation financière de l'assurance permet de la prendre. Si l'on veut que la suppression des limites de revenu ait encore une portée pratique pour les classes d'âge les plus avancées, elle doit intervenir dans le plus bref délai.

Tel est le motif pour lequel nous proposons de procéder à cette revision de la loi avant toute autre et de fixer au 1er janvier 1956 l'entrée en vigueur des dispositions revisées.

III. AMPLEUR DE LA REVISION Diverses questions se posent quant à l'ampleur de la r e vision.

1. Les limites de revenu doivent-elles être intégralement supprimées ou non? On peut en effet se demander s'il se justifie de verser des rentes gratuites à des personnes dont la situation pécuniaire est très bonne. Pour répondre à toutes les exigences encore légitimables, il suffirait d'élever les limites de revenu à un niveau tel que la rente doive être versée à tout assuré auquel elle serait nécessaire pour couvrir ses besoins au sens le plus large. Si la limite était fixée, par exemple, aux environs de 10 000 francs par an pour une personne seule, on ne pourrait certainement plus parler de «cas pénibles».

Des limites aussi élevées mettraient cependant au bénéfice des rentes la presque totalité de la génération transitoire. Pour éliminer quelques cas choquants, on devrait alors continuer à exiger l'examen des conditions matérielles de chacun. Cet examen représenterait un gros
travail adminis-, tratif hors de proportion avec son résultat pratique. En outre, les intéressés le considéreraient -- peut-être encore plus que maintenant -- comme une immixtion tracassière de l'administration dans leurs affaires personnelles.

2. Les limites de revenu doivent-elles être supprimées pour toutes les personnes pouvant bénéficier de rentes transitoires, ou pour certaines d'entre elles seulement ?

1146 a. La catégorie presque toujours citée est celle des personnes nées avant le 1er juillet 1883, soit des personnes qui n'avaient en aucune façon la possibilité d'acquérir le droit à des rentes ordinaires en payant des cotisations. On parle beaucoup moins des survivants qui ont perdu leur soutien avant le 1er décembre 1948, soit avant que ce soutien ait pu payer des cotisations pendant une année entière au moins. Mais il paraît évident que ces survivants doivent être inclus dans la mesure de faveur prévue pour la génération transitoire. Et ce doit, logiquement, être aussi le cas des survivants des personnes nées avant le 1er juillet 1883, alors même que le décès aurait eu lieu après le 1er décembre 1948; le cas caractéristique en serait le suivant: du fait de la suppression des limites de revenu des époux sont au bénéfice d'une rente transitoire pour couple, et le mari décède en 1956 à un moment où la femme a 63 ou 64 ans.

Dans ces catégories de personnes, il ne peut y avoir des doutes que pour les veuves qui atteignent l'âge de 65 ans. Nées après le 1er juillet 1883, elles auraient eu la possibilité de payer des cotisations et d'acquérir le droit à une rente ordinaire. La rente transitoire doit-elle être accordée, sans condition aucune, à la veuve qui n'a pas versé de cotisations ? Si l'on considère que la loi même dispense la veuve de toutes cotisations tant qu'elle ne travaille pas, le pas doit être franchi. Il serait d'ailleurs choquant qu'une veuve touche, sans limites aucunes, une rente transitoire de veuve puis se voie supprimer une fois l'âge venu le droit à une rente transitoire de vieillesse.

o. Mais il est deux catégories de personnes n'appartenant pas à la génération transitoire et qui peuvent néanmoins bénéficier de rentes transitoires. Ce sont: -- les femmes mariées plus âgées que leur mari et -- les personnes qui se trouvaient à l'étranger sans avoir adhéré à l'assurance facultative.

Pour les femmes mariées nées après le 1er juillet 1883, on pourrait invoquer les mêmes arguments qu'en faveur des veuves. L'avantage ainsi accordé revêtirait toutefois un caractère permanent et non seulement transitoire; il suffit de penser au nombre de femmes mariées qui n'exercent aucune activité lucrative et qui, de ce fait, ne versent pas de cotisations, en particulier aux nombreuses étrangères
qui épousent un ressortissant suisse et ne s'établissent en Suisse que simultanément ou postérieurement au mariage. Or des modifications ayant des répercussions durables doivent -- nous l'avons dit -- encore faire l'objet d'examens approfondis. Elles n'ont donc pas leur place dans la revision actuellement envisagée.

Ce caractère durable se retrouve à un degré plus fort encore dans la seconde catégorie, celle des personnes à l'étranger qui n'ont pas adhéré à l'assurance facultative. Ces personnes avaient la faculté légale de participer à l'assurance et d'acquérir le droit à une rente ordinaire. Leur accorder

1147 sans restriction aucune une rente transitoire dès leur retour en Suisse reviendrait à pénaliser le ressortissant suisse qui a fait l'effort de payer volontairement des cotisations.

En résumé, la suppression des limites de revenu doit profiter à toute personne faisant partie de la véritable génération transitoire, dans son sens le plus large. En revanche, les personnes qui n'en font pas partie et n'ont cependant pas droit aux rentes ordinaires ne doivent pas, pour le moment, bénéficier d'un nouveau régime.

3. Relevons enfin que la réglementation en vigueur en matière de rentes transitoires ne devrait subir de modifications sur aucun autre point.

A ce sujet, nous aimerions encore préciser ce qui suit: a. Les conditions de la nationalité suisse et du domicile en Suisse, mises à l'obtention des rentes transitoires, doivent être maintenues; ni les ressortissants suisses résidant à l'étranger ni -- sous réserve de conventions internationales contraires -- les étrangers établis en Suisse ne doivent être mis au bénéfice de ces rentes.

b. Dans la commission fédérale de l'assurance-vieillesse et survivants, on s'est demandé s'il serait admissible que, après la suppression des limites de revenu, la rente transitoire gratuite soit quelque peu supérieure, dans les régions urbaines, à la rente ordinaire qu'un assuré s'est acquise au prix de très faibles cotisations.

A l'effet d'éliminer cette différence, il a été proposé d'augmenter le minimum de la rente ordinaire en l'adaptant à celui de la rente transitoire prévue pour les régions urbaines. Cela signifierait, par exemple, que la rente ordinaire minimum de vieillesse simple serait portée de 720 à 840 francs par an et la rente ordinaire minimum de vieillesse pour couple de 1160 à 1360 francs. Nous ne pourrions pas prêter actuellement la main à une telle augmentation, qui d'ailleurs a été repoussée également par la majorité de la commission fédérale de l'assurance-vieillesse et survivants. L'augmentation des rentes ordinaires minimums entraînerait certainement, et avec raison, d'autres demandes de modifications, car le système des rentes ordinaires forme un tout et ne peut être modifié par pièces détachées. De plus, elle favoriserait une catégorie de bénéficiaires qui, dès le début, a été avantagée et qui, lors de la dernière revision de la loi, a de
nouveau profité dans une large mesure des améliorations accordées. Or, on ne peut pas toujours faire bénéficier les mêmes catégories de personnes des améliorations que l'on décide et ne rien donner aux autres. En augmentant le minimum des rentes ordinaires sans modifier simultanément d'autres dispositions ou les conventions internationales en vigueur, on favoriserait en particulier, d'une manière intolérable, les étrangers qui ont payé des cotisations pendant une période relativement courte; selon les dispositions en vigueur, la rente minimum est en effet garantie à chaque ayant droit. Par conséquent, la

1148 question de l'augmentation des rentes ordinaires minimums doit être examinée en relation avec les autres demandes de revision et ne peut être traitée avant elles, comme peut l'être celle de la suppression des limites de revenu.

Une autre proposition encore a été examinée dans la commission fédérale de l'assurance-vieillesse et survivants; son adoption n'aurait certes pas éliminé la différence existant entre le montant de la rente ordinaire minimum et celui de la rente transitoire prévue pour régions urbaines, mais elle aurait empêché une extension du nombre des cas présentant cette différence. Aux termes de cette proposition, tout membre de la génération transitoire dont le revenu déterminant aurait atteint ou dépassé la limite de revenu aurait eu droit à une rente spéciale; celle-ci ou bien aurait correspondu au montant de la rente transitoire prévue pour les régions rurales, ou bien se serait élevée à 630 francs dans les régions rurales et à 720 francs dans les régions urbaines et mi-urbaines. On a objecté que l'adoption d'une telle proposition modifierait le fond même du système des rentes transitoires et créerait de nouvelles différences, cette fois entre les bénéficiaires de rentes transitoires qui sont dans le besoin et ceux qui ne le sont pas.

Pour ces motifs, la majorité de la commsision fédérale de l'assurancevieillesse et survivants s'est prononcée contre la deuxième solution proposée et, par là, contre toute procédure tendant à régler le problème de la différence des rentes en liaison avec la suppression des limites de revenu.

Nous nous rallions à cette manière de voir étant donné que -- cela a déjà été dit -- nous ne pourrions prêter actuellement la main à aucune revision de la loi ayant un autre objet que la suppression des limites de revenu. Il ne faut pas perdre de vue non plus que la catégorie des personnes touchant dans les régions urbaines une rente ordinaire dont le montant est moins élevé que celui de la rente transitoire se compose d'assurés qui, avant d'être mis au bénéfice de la rente, réalisaient un revenu annuel moyen en tout cas inférieur à 2250 francs. Relevons enfin que la différence en question joue un rôle pour 4 pour cent seulement des bénéficiaires de rentes ordinaires, tandis qu'une augmentation de la rente ordinaire minimum toucherait quelque 25 pour cent
de cette catégorie de personnes.

c. L'échelonnement régional des rentes transitoires ne saurait non plus faire l'objet de la revision actuelle. La seule façon de résoudre ce problème consisterait à accorder aussi dans les régions mi-urbaines et rurales les taux de rentes prévus pour les régions urbaines ; en procédant ainsi on étendrait toutefois aux régions mi-urbaines et rurales les différences entre la rente ordinaire minimum et la rente transitoire. Cela doit être évité à tout prix.

IV. RÉPERCUSSIONS FINANCIÈRES 1. La revision envisagée n'entraînant une augmentation que temporaire des prestations, ses répercussions financières ne seront pas très lourdes. Depuis

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le début de l'assurance, les dépenses en question ont fortement diminué, les personnes nées avant le 1er juillet 1883 ayant maintenant dépassé l'âge de 72 ans. Si tous les membres de la génération transitoire sont mis au bénéfice de rentes à compter du 1er janvier 1956, la revision entraînera pour l'année 1956 un supplément de dépenses de l'ordre de 50 millions de francs. Ce supplément résultera du fait que des rentes transitoires seront accordées aux quelque 70 000 personnes qui n'en ont pas bénéficié jusqu'ici et que tous les bénéficiaires actuels de rentes réduites toucheront dorénavant des rentes entières. Il diminuera ensuite rapidement, pour disparaître enfin totalement, ainsi que le montre le tableau ci-après: Répercussions financières de la suppression des limites de revenu Montants en millions de francs Total des dépenses Années

Supplément de dépenses

Avec limites de revenu

Sans limites de revenu

1956 1957 1958 1959

145 138 131 125

198 186 174 164

53 48 43 39

1960 1965 1970 1975 1980 1990

118 77 47 28 16 4

151 96 57 33 19 5

33 19 10 5 3 1

Exprimé en «annuités perpétuelles», c'est-à-dire en moyenne annuelle calculée à longue échéance, le supplément de dépenses qu'entraînera la revision peut être estimé à l l millions de francs par an, ce que la situation financière actuelle de l'assurance permet de tenir pour supportable.

2. La pétition présentée par le Schweizerischer Beobachter proposait de donner aux personnes nées avant le 1er juillet 1883 la possibilité d'acquérir le droit à une rente en versant volontairement une cotisation annuelle.

C'était la solution qu'avait proposée précédemment le conseiller national Odermatt. Nous sommes d'avis qu'on ne peut en rester à une demi-mesure et qu'il faut renoncer à percevoir des cotisations. L'idée de cotisations Feuille fédérale. 107« année. Vol. II.

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1150 volontaires serait d'ailleurs contraire -- nous l'avons déjà relevé souvent -- au principe d'une assurance obligatoire.

V. REMARQUES FINALES 1. A l'occasion de la présente revision de la loi, la troisième en date, il paraît indiqué de jeter un coup d'oeil sur le passé et de voir quel est l'ordre de grandeur des dépenses résultant des dispositions revisées entrées en vigueur au début de 1951 et 1954 et de la revision proposée pour le 1er janvier 1956. Nous constatons que la valeur capitalisée de ces améliorations atteint un montant de plus de 3,5 milliards de francs et dépasse ainsi -- exprimée en annuité perpétuelle -- la somme fort respectable de 100 millions de francs. L'importance de ce chiffre n'apparaît nettement que si on le compare avec l'ensemble des engagements futurs de l'assurance, évalués actuellement à quelque 900 millions de francs en moyenne par année.

Chacun sait que ces améliorations fort bienvenues n'ont été possibles que grâce à la façon heureuse dont a évolué la situation financière-de l'assurance même après la dernière revision de la loi. Dans notre message du 5 mai 1953 concernant le précédent projet de revision, nous avons cependant fait observer que les excédents de recettes ont pour seule et unique cause le fait que les cotisations versées par les assurés et les employeurs ont été plus élevées que prévu. Or ces cotisations sont payées par la génération des futurs bénéficiaires de rentes ordinaires; l'excédent de recettes devrait donc, en somme, servir à augmenter dans une mesure correspondante les rentes ordinaires pour toutes les classes de revenus. Il ne l'a été fait, jusqu'à ce jour, que dans une faible mesure; en effet, la moitié à peu près des 100 millions de francs qu'exigent annuellement les améliorations apportées revient aux bénéficiaires de rentes transitoires ainsi qu'aux bénéficiaires de rentes ordinaires minimums, soit à des personnes qui n'ont pas ou qu'imperceptiblement contribué à améliorer la situation financière de l'assurance. Si l'on décide que la troisième revision doit profiter à la seule génération transitoire, on va ainsi jusqu'à l'extrême limite de ce qui peut être fait, au titre de l'assurance, pour cette catégorie de bénéficiaires. Au cas où l'évolution des prix et des salaires devrait entraîner une nouvelle amélioration de la situation financière, il serait indispensable que des excédents de recettes en résultant soient utilisés exclusivement pour améliorer les
rentes ordinaires de toutes les classes de revenus.

2. Dans le sens des considérations exposées sous chiffre III, le projet ci-annexé se borne à introduire dans la loi, sous la forme d'un article 43 bis, une disposition en faveur des personnes nées avant le 1er juillet 1883 et de leurs survivants ainsi que des femmes devenues veuves et des enfants devenus orphelins avant le 1er décembre 1948.

1151

Nous avons l'honneur de vous proposer d'adopter le projet de loi ci-annexé.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre ,,haute considération.

Berne, le 8 novembre 1955.

Au nom du Conseil fédéral suisse: o Le président de, la Confédération, Max Petitpierre 1083o

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

LOI FÉDÉRALE modifiant

celle sur l'assurance-vieillesse et survivants

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 8 novembre 1955, arrête:

La loi du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants est complétée comme il suit:

Exceptions

Art. 436is Les limites de revenu mises à l'octroi des rentes transitoires par l'article 42, 1er alinéa, et la réduction des rentes prévue à l'article 43, 2e alinéa, première phrase, ne sont pas applicables : a. Aux personnes nées avant le 1er juillet 1883 et à leurs survivants; ô. Aux femmes devenues veuves et aux enfants devenus orphelins avant le 1er décembre 1948.

II

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1956.

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17.11.1955

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