09.095 Message relatif à l'initiative populaire «jeunesse + musique» du 4 décembre 2009

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre au vote du peuple et des cantons l'initiative populaire «jeunesse + musique» en leur recommandant de la rejeter.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

4 décembre 2009

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2009-2461

1

Condensé L'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» se propose de renforcer la formation musicale dans les domaines scolaire et extrascolaire. Le Conseil fédéral reconnaît l'importance sociale de la formation musicale. Il rejette toutefois l'initiative parce que celle-ci met en question la souveraineté cantonale en matière de formation et qu'elle se heurte à plusieurs projets de réglementation.

L'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» a été déposée le 18 décembre 2008, munie de 153 626 signatures valables. Elle se propose d'améliorer la place de la musique dans la formation en obligeant la Confédération et les cantons à encourager la formation musicale, en particulier des enfants et des jeunes. A cette fin, la Confédération aurait à fixer les principes applicables à l'enseignement de la musique à l'école, à l'accès des jeunes à la pratique musicale et à l'encouragement des talents musicaux.

La formation musicale des enfants et des jeunes représente sans aucun doute un enjeu majeur pour notre société, et l'initiative fait bien de rappeler l'importance de la musique dans la formation scolaire et extrascolaire.

Cependant, le chemin suivi par l'initiative part dans la fausse direction. Premièrement, donner à la Confédération la compétence de légiférer sur l'enseignement de la musique à l'école, comme le demande l'initiative, serait une grave ingérence dans la souveraineté des cantons en matière de formation. Le Conseil fédéral ne souhaite pas élargir les compétences de la Confédération au détriment des cantons. Il ne serait pas judicieux d'opérer un déplacement de compétences pour le seul domaine de la musique. Deuxièmement, les cantons s'apprêtent à régler au plan suisse certains éléments essentiels de l'instruction publique (Concordat HarmoS, plans d'études pour les régions linguistiques). Accepter l'initiative saperait les efforts en cours. Troisièmement, le nouvel art. 67a, al. 1, Cst. que propose l'initiative est inutile, puisque l'art. 67, al. 2, Cst. et l'art. 69, al. 2, Cst. donnent déjà à la Confédération la compétence de prendre des mesures d'encouragement de la formation musicale extrascolaire. Pour toutes ces raisons, le Conseil fédéral propose aux Chambres fédérales par le présent message de recommander au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique».

2

Message 1

Aspects formels et validité de l'initiative

1.1

Texte de l'initiative

L'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» a la teneur suivante: La Constitution1 est modifiée comme suit: Art. 67a (nouveau)

Formation musicale

La Confédération et les cantons encouragent la formation musicale, en particulier des enfants et des jeunes.

1

La Confédération fixe les principes applicables à l'enseignement de la musique à l'école, à l'accès des jeunes à la pratique musicale et à l'encouragement des talents musicaux.

2

1.2

Aboutissement et délais de traitement

L'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 5 juin 20072 et a été déposée le 18 décembre 2008 munie des signatures nécessaires.

Par décision du 21 janvier 2009, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative populaire, pourvue de 153 626 signatures valables, avait abouti sur le plan formel3.

L'initiative est présentée sous la forme du projet rédigé. Le Conseil fédéral ne lui oppose pas de contre-projet. Aux termes de l'art. 97, al. 1, let. a, de la loi du 13 septembre 2002 sur le Parlement (LParl)4, le Conseil fédéral a jusqu'au 18 décembre 2009 pour soumettre un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message au Parlement. Conformément à l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale doit statuer sur l'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» d'ici au 18 juin 2011.

1.3

Validité

L'initiative remplit les critères de validité fixés à l'art. 139, al. 2, de la Constitution (Cst.): ­

1 2 3 4

Elle est présentée sous la forme d'un projet entièrement rédigé et elle respecte le principe de l'unité de la forme.

RS 101 FF 2007 4071 FF 2009 507 RS 171.10

3

­

Les différentes parties de l'initiative présentent un lien objectif entre elles.

Le principe de l'unité de la matière est donc aussi respecté.

­

L'initiative ne porte atteinte à aucune règle impérative du droit international.

Elle remplit ainsi le critère de la compatibilité avec le droit international.

L'initiative doit donc être déclarée valable.

2

Contexte

2.1

Genèse

En 2005, en réponse à quatre postulats parlementaires, l'Office fédéral de la culture (OFC) a publié le rapport «La formation musicale en Suisse» (appelé ci-après: rapport sur la formation musicale). Le postulat 99.3507 «Encouragement de l'expression musicale par la Confédération» du conseiller national Remo Gysin en était à l'origine.

Le rapport sur la formation musicale dresse un état des lieux de la formation musicale en Suisse. Le chap. 4 expose les mesures que la Confédération pourrait prendre dans le domaine de l'encouragement extrascolaire de la musique (en particulier la promotion de la relève et l'accès à la musique).5 En l'absence de bases légales au niveau fédéral, les mesures mentionnées dans le rapport n'ont pu être mises en oeuvre que partiellement.6 Le 8 juin 2007, le Conseil fédéral a transmis au Parlement le message et le projet de loi fédérale sur l'encouragement de la culture (loi sur l'encouragement de la culture, LEC).7 La LEC est actuellement examinée par le Parlement (stade de l'élimination des divergences) et sera vraisemblablement adoptée par les deux Chambres pendant la session d'hiver 2009. L'art. 10a de la LEC8 donne à la Confédération une base légale globale pour l'encouragement de la musique dans le domaine extrascolaire.

En ce qui concerne l'encouragement de la musique dans le domaine scolaire, le rapport sur la formation musicale explique que la Confédération, du fait de ses compétences constitutionnelles très limitées par rapport aux cantons, ne peut prendre aucune mesure pour combler les lacunes éventuelles. L'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique» vise à modifier la réglementation des compétences entre la Confédération et les cantons dans ce domaine. Selon l'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau), la Confédération recevrait notamment la compétence de fixer des principes pour les leçons de musique à l'école qui auraient force obligatoire pour tous les cantons.

L'initiative a le soutien du Conseil suisse de la musique, l'association faîtière de quelque 60 organisations et associations (comptant près de 500 000 membres) qui font et animent la vie musicale en Suisse. Fondée en 1999, l'association «jeunesse + musique» est la force agissante de l'initiative; elle représente l'association faîtière des institutions qui s'occupent de la pratique et de la formation musicales des

5 6 7 8

4

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 30 ss.

A propos des activités de promotion de la Confédération dans le domaine de l'encouragement extrascolaire de la musique, cf. ch. 2.4.

FF 2007 4579 4607 La numérotation des dispositions de la LEC subira probablement encore des adaptations d'ici au vote final.

enfants et des jeunes. Elle a notamment pour objectif d'inscrire le droit à la formation musicale dans la Constitution fédérale, dans la loi et dans la société.

2.2

Importance sociale de la formation musicale

Le rapport sur la formation musicale nous rappelle que la musique fait partie des éléments indispensables de la vie culturelle suisse.9 La musique satisfait ces deux besoins élémentaires que sont plaisir des sens et plaisir esthétique. La musique fait partie de nos expressions culturelles et contribue à la constitution d'une forme d'identité collective. S'occuper de musique est l'une des activités culturelles les plus répandues, que ce soit la simple écoute chez soi ou à un concert, ou la pratique d'un instrument ou du chant, seul ou dans une association, un orchestre, un choeur. Sans parler des nombreux jeunes qui jouent dans leur propre groupe de musique rock ou pop.

Les récentes enquêtes de l'Office fédéral de la statistique et de l'OFC témoignent de l'importance de la musique en Suisse; il apparaît qu'un cinquième de la population joue d'un instrument et qu'un sixième chante dans un choeur. Deux tiers de la population se rendent régulièrement aux concerts ou assistent à des manifestations où de la musique est jouée en «live»; quatre personnes sur cinq écoutent une fois par semaine au moins de la musique en privé (chez soi ou en route). Près d'une personne sur deux domiciliée en Suisse a suivi une fois dans sa vie un enseignement musical pendant une année au moins.10 La valeur de la formation musicale est également manifeste dans l'éducation. La pratique de la musique est un savoir élémentaire au même titre que la lecture, l'écriture ou le calcul. L'approche des différents registres musicaux est quelque chose qui s'apprend, il faut étudier pour comprendre la portée et la profondeur de la musique. La formation musicale fait partie du processus de socialisation et joue un rôle important dans le développement personnel des jeunes. Elle transmet des compétences culturelles et permet de participer et d'être partie prenante à la culture. Il est de plus avéré que l'enseignement de la musique a des répercussions sur les compétences créatrices, émotionnelles, intellectuelles et sociales des élèves, qui sont bénéfiques dans l'apprentissage des autres branches.11

2.3

Encouragement de la musique à l'école

2.3.1

Système éducatif suisse

En vertu des dispositions constitutionnelles sur la formation (art. 61a à 66 Cst.), la Confédération et les cantons, dans les limites de leurs compétences respectives, veillent ensemble à la qualité et à la perméabilité de l'espace suisse de formation.

Selon la Constitution, l'instruction publique est du ressort des cantons, qui pourvoient à un enseignement de base suffisant ouvert à tous les enfants.

9 10 11

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 2.

Statistique des pratiques culturelles en 2008.

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 2; Scheidegger 2005, p. 1.

5

Tous les cantons proposent un ou deux ans d'enseignement préscolaire gratuit (canton du Tessin: 3 ans). L'école obligatoire dure 9 ans. Une extension du régime obligatoire à l'école maternelle est en cours (cf. ch. 2.5.1). Aujourd'hui, dans la majorité des cantons, l'école primaire va de la première à la sixième année scolaire.

Au degré secondaire I (années 7 à 9), les élèves répartis en différentes filières reçoivent un enseignement dans toutes les matières ou dans une partie des matières.

Les formes d'organisation sont très variables.

L'offre de formation de l'enseignement postobligatoire (degré secondaire II) se fait en général sur la base de prescriptions intercantonales ou fédérales. Il incombe aux cantons de les exécuter et de diriger les écoles. Près de 90 % des jeunes âgés de 18 ou 19 ans achèvent le degré secondaire II. Ils ont ensuite la possibilité d'accéder directement à la vie professionnelle, d'entrer dans une école supérieure ou (avec une maturité) de poursuivre leur formation dans une haute école.

2.3.2

L'enseignement de la musique au niveau préscolaire (école enfantine)

La compétence de l'enseignement musical à l'école enfantine est du ressort des cantons. Les plans d'études* cantonaux destinés à l'école enfantine mettent au programme la perception et la production ludiques de musique et de rythmes ainsi que l'apprentissage de chansons et de comptines.12

2.3.3

L'enseignement de la musique aux degrés primaire et secondaire I

La compétence de l'enseignement musical aux degrés primaire et secondaire I est également du ressort des cantons. Les cantons fixent notamment les standards relatifs au contenu* qui seront enseignés et appris dans le domaine de la musique et le nombre de leçons dévolues à l'enseignement de la musique. Les standards sont définis dans les plans d'études cantonaux.

Les cantons s'efforcent d'harmoniser leurs programmes scolaires. A l'avenir, il n'existera plus qu'un plan d'études par région linguistique, soit la Suisse alémanique, la Suisse romande et la Suisse italienne, qui fixera les standards relatifs au contenu pour toutes les branches et toutes les matières (sur l'état des travaux correspondants cf. ch. 2.5.1).

La dotation horaire de l'enseignement de la musique aux degrés primaire et secondaire I se monte, selon le canton et le degré de la scolarité, à une ou deux leçons obligatoires par semaine, soit environ 4 à 8 % du temps d'enseignement obligatoire.13 En comparaison, près d'un tiers des leçons est consacré à la langue régionale et à la première langue étrangère, un tiers aux mathématiques et à «l'environnement» (histoire, géographie, sciences naturelles) et un tiers aux branches «artisti-

12 13

6

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 9.

Renseignement du centre d'information et de documentation IDES de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP).

ques», au sport et à la religion.14 Dans de nombreux cantons, la musique peut être choisie comme branche à option.

2.3.4

L'enseignement de la musique au degré secondaire II (maturité)

La Confédération et la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP) exercent ensemble la compétence de reconnaître les écoles délivrant des certificats de maturité et influent sur l'offre des branches d'enseignement au moyen de l'ordonnance du 15 février 1995 sur la reconnaissance des certificats de maturité gymnasiale (ORM)15. Aujourd'hui déjà, grâce à l'ORM, les disciplines artistiques disposent d'un pourcentage fixe de l'horaire.

Tous les élèves reçoivent un enseignement obligatoire dans la branche fondamentale Art (musique et/ou arts visuels) représentant entre 5 et 10 % du temps total d'enseignement. Le nombre d'heures augmente considérablement quand la musique est choisie comme branche spécifique ou option complémentaire et/ou que le travail de maturité lui est consacré. L'ORM prévoit dans ce cas que la part prise par la musique soit de 15 à 25 % de l'horaire. En 2003 déjà, 21 cantons proposaient les arts visuels et la musique en branches spécifiques. Quelque 11,5 % d'élèves les ont suivies.16 Le plan d'études cadre* de la CDIP fixe les objectifs de formation et assure ainsi la qualité du contenu des leçons de musique. La formation accorde autant d'importance à la théorie qu'à la pratique.

La réforme de la maturité de 1995 (RRM 95) a introduit un plus large choix de disciplines. Les aptitudes particulières de chacun peuvent être soutenues de manière ciblée et sont mieux prises en compte grâce au fait que les élèves ont le libre choix de la branche spécifique, de l'option complémentaire et de leur travail de maturité, notamment dans l'enseignement musical.

2.3.5

L'enseignement de la musique au degré secondaire II (formation professionnelle initiale)

La Confédération édicte des dispositions minimales pour l'enseignement de la culture générale17 au cours de la formation professionnelle initiale; elle fixe également les champs thématiques à prendre en considération et les objectifs éducatifs à atteindre dans le plan d'études cadre.

La relation directe que la formation professionnelle entretient avec le monde du travail est à la fois sa caractéristique et sa force. L'accent est mis sur la formation en entreprise, où les apprentis acquièrent leurs connaissances pratiques. L'enseignement des connaissances théoriques et de la culture générale se fait à l'école professionnelle. Les cours de culture générale doivent permettre aux apprentis de s'intégrer dans le monde du travail et dans la société. La formation professionnelle étant 14 15 16 17

Rapport sur l'éducation en Suisse 2006, p. 57.

RS 413.11 Ramseier 2005.

Ordonnance de l'OFFT du 27 avril 2006 concernant les conditions minimales relatives à la culture générale dans la formation professionnelle initiale (RS 412.101.241).

7

principalement orientée vers la pratique et vers les branches spécifiques à la profession, les cours de culture générale représentent une demi-journée par semaine et ne contiennent aucune leçon de musique obligatoire. Mais les cantons peuvent proposer un enseignement musical sous forme de cours facultatifs dans les écoles professionnelles.

2.3.6

Soutien scolaire pour les élèves surdoués

Aux degrés secondaires I et II (exception faite de la formation professionnelle initiale), il existe en Suisse des filières de formation spéciales destinées à soutenir les élèves surdoués dans les domaines du sport, de la musique et de l'art.

Ces filières soutiennent de manière ciblée les talents hors du commun et garantissent en même temps une formation scolaire ou professionnelle. Elles sont taillées sur mesure en fonction de l'élève (suivi, leçons supplémentaires, plan de carrière, dispenses, étalement dans le temps d'une ou de plusieurs années scolaires, etc.). Les élèves sont tenus de remplir certaines conditions pour le second cycle et de passer un test d'aptitude.

L'«accord intercantonal du 20 février 2003 sur les écoles offrant des formations spécifiques aux élèves surdoués» de la CDIP règle notamment l'accès intercantonal à ces écoles et l'indemnisation par le canton de domicile de l'élève de l'organisme responsable de l'école. L'accord a jusqu'ici été signé par les cantons d'Appenzell Rhodes extérieures, de Berne, de Glaris, des Grisons, de Lucerne, de Nidwald, d'Obwald, de Saint-Gall, de Schaffhouse, de Thurgovie, d'Uri, du Valais, de Zoug et de Zurich ainsi que par la principauté du Liechtenstein.

Près de la moitié de ces cantons proposent déjà une filière musique placée le plus souvent sur le même pied que le sport (BE, GR, LU, SG, SH, TG, VS, ZH). Certaines écoles se sont même spécialisées dans le domaine de la formation musicale (comme l'Evangelische Mittelschule Schiers, les Tagesschulen für Begabte à Weinfelden et Kreuzlingen en Thurgovie, la Oberstufenschule Altstätten et la Oberstufenschule Grünau à Wittenbach).

Pour l'école enfantine et l'école primaire, des offres d'appoint et de soutien n'existent qu'au niveau local.

2.3.7

Formation des enseignants de musique

La formation des enseignants en Suisse a profondément changé ces dernières années. Au milieu des années 1990, la formation des maîtres d'école enfantine et primaire est passée du degré secondaire II (école normale) au degré tertiaire. Depuis, les enseignants de toutes les branches sont en principe formés dans les hautes écoles pédagogiques: ­

8

Pour l'école enfantine et l'école primaire, la formation des enseignants de musique se fait dans le cadre de la formation générale : la haute école pédagogiques offre une formation spécialisée, didactique et professionnelle et délivre un diplôme complet d'enseignant pour toutes les branches ou pour une majorité d'entre elles.

­

Pour le degré secondaire I, la formation des enseignants de musique n'est pas uniforme. Certaines hautes écoles pédagogiques offrent une formation complète, d'autres se limitent à ce degré à la partie didactique et professionnelle et collaborent avec une école supérieure de musique pour la partie spécialisée (qualification musicale).

­

Les enseignants des écoles de maturité acquièrent leurs compétences spécialisées dans des hautes écoles de musique (qui font partie des hautes écoles spécialisées). La partie didactique et professionnelle se fait ensuite au sein d'une haute école pédagogique ou à l'université, partiellement aussi à la haute école de musique (formation intégrée).

La CDIP coordonne les filières cantonales de formation via des règlements de reconnaissance (règlements de la CDIP sur la reconnaissance des diplômes d'enseignement). Les règlements de reconnaissance énumèrent les exigences minimales auxquelles doit satisfaire un diplôme de fin d'études. Un groupe de travail régional de la CDIP nommé «pédagogie de la musique» a établi des standards pour la formation d'enseignants dans le domaine de la musique.18

2.4

Encouragement de la musique dans le domaine extrascolaire

Dans le domaine extrascolaire, l'offre de formation musicale est diversifiée. Les écoles de musique jouent ici un rôle central. Des professeurs de musique professionnels y proposent aux enfants et aux jeunes un enseignement instrumental et vocal ainsi que des cours de pratique d'ensemble, le tout sur une base volontaire. L'accent est mis principalement sur la musique classique, mais d'autres genres musicaux comme le pop/rock, le jazz ou la musique populaire y prennent une place croissante.

Selon les enquêtes pour l'année 2007, les quelque 400 écoles de musique de Suisse regroupent au total environ 260 000 élèves et 12 500 enseignants.

Les écoles de musique sont des institutions de droit privé pour un tiers et de droit public pour deux tiers d'entre elles. Leur financement est assuré en partie par les cantons (14,1 %) et les communes (46,2 %) ainsi que par les écolages (39,7 %).

Certains cantons ont inscrit le financement public des écoles de musique dans la législation, d'autres non. L'Association suisse des écoles de musique (ASEM) soutient, encourage et coordonne le travail des écoles de musique et s'efforce de garantir la qualité de l'offre de ces écoles. Il existe à côté des écoles de musique de nombreux prestataires privés, qui proposent un enseignement, en particulier instrumental, aux enfants et aux jeunes (par ex. des cours privés donnés par des musiciens ou par des écoles privées).

Dans le domaine particulier de la formation aux instruments à vent et aux percussions, on mentionnera le rôle important joué par les multiples musiques de jeunes, orchestres intergénérationnels et orchestres d'élite, dont 165 (soit quelque 75 % des musiques de jeunes) sont affiliés à l'Association suisse des musiques de jeunes (ASMJ). Les musiques de jeunes sont généralement dirigées par des diplômés de hautes écoles, et accessoirement par des musiciens amateurs. Les orchestres regroupent quelque 6100 enfants et adolescents, dont environ 2400 font usage de la pos18

Rusterholz 2004.

9

sibilité qui leur est offerte de suivre la formation de base dans les écoles de musique.

Les musiques de jeunes fournissent une formation musicale de base à vaste échelle, assurant ainsi la relève des orchestres, des choeurs et des sociétés de musique amateurs. Elles contribuent en même temps à découvrir et à promouvoir les jeunes talents musicaux. Le financement de l'ASMJ est assuré essentiellement par les cotisations des membres, les subventions des pouvoirs publics et les sponsors privés.

Les musiques de jeunes, prises individuellement, sont essentiellement financées par les communes.

A côté des écoles de musique et des musiques de jeunes, on soulignera la très grande importance du monde associatif dans la vie musicale suisse. Les multiples sociétés de musique, chorales, orchestres, groupes de rock et de pop, théâtres musicaux ou autres écoles et centres de formation sont regroupées au sein du CSM. Les sociétés s'engagent fortement dans la formation de base et dans la formation continue, surtout auprès des amateurs, et sont actives dans le domaine de la promotion de la relève et des jeunes talents. Ces activités ne bénéficient que rarement de l'aide de sponsors et de collectivités publiques et sont généralement financées par les sociétés elles-mêmes (cotisations des membres).

Les enfants et les adolescents particulièrement doués ont la possibilité de se présenter à des concours nationaux ou de jouer dans des orchestres nationaux. On citera à titre d'exemples les concours et orchestres suivants: ­

le Concours suisse de musique pour la jeunesse, régulièrement organisé depuis 1975 (1086 participants en 2009);

­

l'Orchestre Symphonique Suisse des Jeunes (environ 120 musiciens ayant entre 15 et 25 ans);

­

l'Harmonie nationale des jeunes (environ 70 musiciens ayant entre 16 et 22 ans);

­

le Brass Band National des Jeunes (environ 130 musiciens ayant entre 12 et 22 ans).

Sur la base de la loi du 6 octobre 1989 sur les activités de jeunesse19, la Confédération a soutenu en 2008 l'Orchestre Symphonique Suisse des Jeunes, l'Harmonie nationale des jeunes, le Choeur Suisse des Jeunes, les Jeunesses musicales de Suisse et le Brass Band National des Jeunes. Les aides ont été allouées par l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS). En 2008, l'OFAS a par ailleurs soutenu le projet «showband.ch» de l'Association suisse des musiques de jeunes.

Outre les mesures et les structures évoquées ci-dessus, les jeunes talents peuvent également bénéficier de mécanismes d'encouragement non spécifiquement destinés aux enfants et aux jeunes mis en place par la Confédération, les cantons ou les communes (aide à la première oeuvre, aides à des travaux de composition, aides à des projets dans le cadre d'ateliers musicaux, aides financières et garanties de déficits pour concerts, etc.). A l'échelon fédéral, on mentionnera en particulier le soutien de l'OFC aux organisations culturelles. En 2008, l'OFC a soutenu financièrement quatorze organisations culturelles dans le domaine musical, dont l'Association suisse des yodleurs, l'Association suisse des musiques et l'Association suisse des musiques de jeunes.

19

10

RS 446.1

2.5

Projets de réglementation en cours

2.5.1

Mise en oeuvre d'HarmoS et des plans d'études au niveau des régions linguistiques

Le 21 mai 2006, le peuple suisse a accepté par 86 % des voix les nouveaux articles constitutionnels sur la formation. Ces articles confirment la répartition des compétences dans le domaine de la formation en Suisse. Toutefois, les responsables de l'éducation (c.-à-d. les cantons ou, selon l'échelon de formation, les cantons et la Confédération) sont désormais tenus par l'art. 62, al. 4, Cst. d'harmoniser les grands principes de formation à l'échelle nationale. Ces principes touchent notamment l'âge de début de la scolarité, l'obligation de scolarité et la durée et les objectifs des différents niveaux d'enseignement. Au cas où les efforts de coordination des cantons n'aboutiraient pas, il appartiendrait à la Confédération de légiférer dans la mesure nécessaire.

Les cantons travaillent actuellement à la réalisation de ce mandat constitutionnel d'harmonisation principalement à l'aide de deux instruments: ­

Le projet HarmoS: La convention intercantonale du 14 juin 2007 sur l'harmonisation de l'école obligatoire (Concordat HarmoS) porte sur tous les points mentionnés à l'art. 62, al. 4, Cst., mais également sur d'autres points qui ne sont pas expressément mentionnés dans cet article (en particulier les horaires blocs au niveau primaire et les structures d'accueil). A la fin du mois d'avril 2009, dix cantons avaient adhéré au concordat, permettant ainsi son entrée en vigueur le 1er août 2009. Sur la base de l'art. 7 du concordat HarmoS, l'assemblée plénière de la CDIP adoptera dans un premier temps des standards de formation* (standards de performance* et standards relatifs aux contenus*) pour les disciplines suivantes: première langue, langues étrangères, mathématiques et sciences naturelles. Les standards de formation applicables aux autres disciplines (dont la musique) seront élaborés ultérieurement.

­

Plans d'études au niveau des régions linguistiques: l'art. 8 du concordat HarmoS prévoit qu'il n'y ait plus à l'avenir qu'un seul plan d'études par région linguistique. Les cantons qui n'ont pas (encore) adhéré au concordat HarmoS travaillent eux aussi activement à l'élaboration des plans d'études au sein des régions linguistiques. Un Plan d'études romand (PER) a été élaboré pour la Suisse romande. Le PER devrait entrer en vigueur dès le début de l'année scolaire 2011­2012. Les travaux préparatoires du plan d'études pour la Suisse alémanique, le «Lehrplan 21», battent également leur plein.

La consultation sur les fondements du «Lehrplan 21» s'est achevée à la fin du mois de juin 2009. La mise en oeuvre du plan d'études dans les cantons est agendée dès 2013.

2.5.2

Loi sur l'encouragement de la culture (LEC)

La LEC, fondée sur l'art. 69 Cst., définit les lignes directrices de la politique culturelle de la Confédération et indique quels seront les instruments de pilotage de l'encouragement de la culture. Elle délimite les compétences de la Confédération par rapport aux premiers acteurs de l'encouragement de la culture, à savoir les cantons, 11

les villes et les communes, et règle la répartition des compétences entre les autorités responsables de l'encouragement de la culture. La LEC est actuellement devant le Parlement (stade de l'élimination des divergences) et pourrait être adoptée par les Chambres fédérales pendant la session d'hiver 2009. L'art. 10a de la LEC, intitulé «Formation musicale», est libellé comme suit: «La Confédération encourage la formation musicale en complément aux mesures prises par les cantons et les communes». Cette nouvelle disposition légale autorise la Confédération à encourager la formation musicale dans le domaine extrascolaire pour autant que les projets présentent un intérêt national.

3

Objectifs et contenu de l'initiative

3.1

Objectifs de l'initiative

Le but de l'initiative est d'améliorer la formation musicale, en particulier celle des enfants et des jeunes, aux niveaux fédéral et cantonal. Les initiants subdivisent cet objectif général en trois objectifs spécifiques (cf. www.initiative-musique.ch): ­

les enfants et les jeunes reçoivent, au cours de leur scolarité obligatoire, un enseignement musical de qualitésimilaire à celle des autres branches;

­

les enfants et les jeunes suivant une formation en école de musique bénéficient de soutien;

­

les enfants et les jeunes particulièrement doués sur le plan musical bénéficient d'un encouragement.

3.2

Contenu de la réglementation proposée

Dans un document intitulé «Explications concernant l'initiative», les initiants décrivent comment atteindre les objectifs mentionnés au ch. 3.1: ­

Améliorer la qualité de l'enseignement de la musique: ­ augmenter le nombre d'heures d'enseignement obligatoires de la musique; ­ établir des standards et des objectifs d'enseignement de la musique à l'école obligatoire; ­ faire de la musique une branche obligatoire dans les hautes écoles spécialisées, afin de prévenir une pénurie d'enseignants de musique à l'école obligatoire.

­

Promouvoir la formation musicale dans le domaine extrascolaire: reconnaître les écoles de musique en tant qu'institutions de formation dans les législations cantonales.

­

Encourager les talents: créer un contexte optimal pour les enfants et les jeunes supérieurement doués dans le domaine musical.

La plupart des mesures que les initiants attendent de la Confédération se fonderaient sur l'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau). La Confédération serait appelée à légiférer sur les points en question et par exemple à prescrire impérativement aux cantons le nombre d'heures obligatoires aux différents échelons scolaires. Dans le domaine 12

extrascolaire, les aides financières et les autres mesures de soutien se fonderaient sur le nouvel article proposé, à savoir l'art. 67a, al. 1, ou sur l'art. 69, al. 2, Cst. existant (cf. ch. 3.3.2).

3.3

Commentaire du texte de l'initiative

3.3.1

La notion d'«école»

L'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau) propose en particulier que la Confédération «fixe les principes applicables à l'enseignement de la musique à l'école». Dans ce contexte se pose la question de la définition et de l'interprétation qu'il convient de donner de l'école.

Il paraît judicieux en l'espèce d'appréhender la notion d'école en en se basant sur les objectifs visés par les initiants et aux mesures concrètes qu'ils attendent. Cette prémisse étant posée, la notion d'école se prête à une interprétation étroite ou large: les objectifs de l'initiative mentionnés par les initiants et les mesures qu'ils attendent de la Confédération font référence à la «scolarité obligatoire» et à «l'école obligatoire» (cf. ch. 3.1 et 3.2). Si l'on prend ces précisions des initiants à la lettre, la notion d'école ne s'étendrait qu'au degré primaire et au degré secondaire I ainsi qu'à la formation des enseignants dans les hautes écoles pédagogiques. La notion d'école se prête par contre à une interprétation plus large si l'on considère le but général de l'initiative, qui est d'améliorer la formation musicale, en particulier celle des enfants et des jeunes. Si l'on se réfère à ce but général, il paraît légitime d'englober sous la notion d'école l'ensemble de l'offre d'enseignement, depuis l'école enfantine jusqu'au degré secondaire II, y compris la formation du corps enseignant pour les degrés correspondants. Le Conseil fédéral opte dans le présent message pour cette interprétation large de la notion d'école, car elle permet d'appréhender la situation dans son ensemble. Au cas où l'initiative serait acceptée, il appartiendrait au législateur fédéral de tirer définitivement au clair la question du champ d'application.

3.3.2

Rapport avec l'art. 69, al. 2, Cst.

L'art. 69 Cst. règle la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons dans le domaine culturel pour les domaines qui ne sont pas spécifiquement réglementés dans la Constitution (l'encouragement du cinéma à l'art. 71ou la protection du patrimoine culturel et des monuments historiques à l'art. 78, par ex.).

L'art. 69, al. 1, Cst. confirme, au sens d'une fausse réserve, la souveraineté des cantons. L'art. 69, al. 2, Cst. a la teneur suivante: «La Confédération peut promouvoir les activités culturelles présentant un intérêt national et encourager l'expression artistique et musicale, en particulier par l'encouragement de la formation». Dans l'exercice de sa compétence au sens de l'art. 69, al. 2, Cst., la Confédération arrête des mesures d'encouragement que les cantons, les communes ou les particuliers ne sont pas eux-mêmes en mesure de déployer.

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L'art. 69, al. 2, Cst. donne ainsi aujourd'hui déjà à la Confédération la compétence d'encourager la formation musicale dans le domaine extrascolaire.20 Cette compétence trouve sa concrétisation dans l'art. 10a LEC (cf. ch. 2.5.2). L'art. 67a, al. 1, Cst. (nouveau) proposé par les initiants et l'art. 69, al. 2, Cst. assigneraient grosso modo les mêmes compétences à la Confédération. Le seul point sur lequel l'art. 67a, al. 1, Cst. (nouveau) va peut-être un peu plus loin est celui de l'encouragement de la formation musicale à l'école, pour autant qu'on considère que cet article habilite la Confédération à étendre son soutien financier aux mesures prises par les cantons dans le domaine scolaire et l'autorise par exemple à allouer des subventions qui permettent à des classes d'école d'aller au concert.

4

Appréciation de l'initiative

4.1

Objet de l'initiative

La formation musicale des enfants et des jeunes constitue assurément un important enjeu de société (cf. également ch. 2.2). L'initiative «jeunesse + musique» rappelle à juste titre l'importance que revêt la formation musicale. Promouvoir la formation, encourager la culture ainsi que l'enfance et la jeunesse sont des enjeux qui correspondent aux préceptes fondamentaux inscrits dans la Constitution. L'initiative est cependant à rejeter, essentiellement pour deux raisons:

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L'art. 67a, al. 1, Cst. (nouveau) est inutile dans la mesure où l'art. 69, al. 2, Cst. donne déjà à la Confédération la compétence de prendre des mesures pour favoriser la formation musicale dans le domaine extrascolaire (cf.

ch. 3.3.2). L'art. 69, al. 2, Cst. est concrétisé par l'art. 10a LEC. Cet article autorise la Confédération à soutenir financièrement des projets extrascolaires dans le domaine de la formation musicale (par ex. dans le domaine de la promotion de la relève). Par ailleurs, l'art. 67, al. 2, Cst. et la loi sur les activités de jeunesse qui s'y réfère permettent également de soutenir la formation musicale dans le cadre d'activités extrascolaires avec des enfants et des jeunes. La loi sur les activités de jeunesse permet notamment à l'OFAS de soutenir différents orchestres de jeunes par le biais d'une aide financière annuelle et d'allouer des aides financières à des projets (cf. ch. 2.4).

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L'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau) contrevient clairement à la norme constitutionnelle en matière de formation et sape les efforts déployés par les cantons pour harmoniser l'école obligatoire. En Suisse, l'école est du ressort des cantons (art. 62, al. 1 Cst.). Au niveau du post-obligatoire (degré secondaire II et degré tertiaire), la Confédération et les cantons assument les responsabilités en partenariat. Le peuple a confirmé ces principes à une forte majorité lors de la votation populaire du 21 mai 2006 sur le nouvel article constitutionnel sur la formation (art. 61a Cst.). La compétence législative que l'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau) prévoit de donner à la Confédération dans le domaine de la formation musicale aurait pour effet de priver les cantons, au profit de la Confédération, d'importantes compétences en la matière: la Confédération dicterait aux cantons la manière d'organiser l'enseignement Les actuelles activités d'encouragement de la Confédération dans le domaine musical extrascolaire sont présentées au ch. 2.4. A la différence de l'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau) l'art. 69, al. 2, Cst. est rédigé sous une forme «potestative».

de la musique. Permettre à la Confédération d'édicter des directives contraignantes en matière de formation des enseignants de musique constituerait une autre atteinte à la compétence des cantons. Cela déséquilibrerait le système éprouvé de répartition des compétences entre la Confédération et les cantons dans le domaine scolaire.

4.2

Conséquences en cas d'acceptation de l'initiative

4.2.1

Conséquences financières pour la Confédération et les cantons

L'acceptation de l'initiative n'aurait pas d'incidences financières directes pour la Confédération en ce qui concerne la promotion de la musique dans le domaine extrascolaire. Il est de toute manière prévu que la Confédération encourage la formation musicale extrascolaire dans le cadre de la LEC. Le Parlement établira, dans le cadre des débats budgétaires, le montant des aides financières engagées à cet effet.

Si l'initiative était acceptée, la question d'une augmentation de ces moyens se poserait certainement. Si l'on considère que l'art. 67a, al. 1, Cst. (nouveau) autorise également la Confédération à soutenir financièrement des mesures prises par les cantons dans le domaine scolaire21, l'acceptation de l'initiative aurait pour la Confédération des incidences financières, qu'on ne peut chiffrer pour l'instant.

La mise en oeuvre de certaines des mesures proposées par le comité d'initiative dans le domaine scolaire, notamment l'augmentation du nombre d'heures d'enseignement de la musique, la garantie des assises financières des écoles de musique et le développement des mesures d'encouragement des élèves particulièrement doués, pourrait par contre, selon les cas, avoir d'importantes incidences financières pour les cantons.

4.2.2

Conséquences pour le personnel de la Confédération et des cantons

L'acceptation de l'initiative n'aurait que peu d'incidences pour le personnel de la Confédération et des cantons: l'élaboration et la mise en oeuvre d'une législation de principe au niveau fédéral telle qu'elle est prévue à l'art. 67a, al. 2, Cst. (nouveau) impliquerait la création de l'équivalent d'environ deux postes à plein temps au Secrétariat d'Etat à l'éducation et à la recherche. Il faudrait également augmenter, vraisemblablement aussi dans des proportions modestes, les effectifs du côté de la CDIP et des cantons, dans la mesure où le transfert de compétences dans le domaine de la formation entraînerait des besoins accrus de coordination entre la Confédération et les cantons.

21

A propos de l'interprétation de l'art. 67a, al. 1 (nouveau), cf. ch. 3.3.2.

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4.3

Mérites et lacunes de l'initiative

4.3.1

L'encouragement de la musique à l'école

Dans le domaine scolaire, le but premier de l'initiative est d'améliorer l'enseignement de la musique. Les moyens proposés par le comité d'initiative sont les suivants: augmentation du nombre d'heures obligatoires, établissement de standards relatifs aux contenus et amélioration de la formation des enseignants.

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16

­

Dotation horaire: Les chiffres disponibles (cf. ch. 2.3.3 et 2.3.4) montrent que comparativement à d'autres branches la dotation horaire en musique est aujourd'hui appropriée. Au degré primaire et au degré secondaire I, entre 4 et 8 % des heures d'enseignement obligatoire sont consacrés à la musique.

Dans de nombreux cantons, il existe la possibilité de suivre en plus des cours en options facultatives. Au niveau des écoles de maturité, la musique occupe dans la discipline fondamentale Arts (arts visuels et musique) entre 5 et 25 % du temps d'enseignement (entre 5 et 10 % d'heures obligatoires) selon les choix de l'élève. En outre, des exigences accrues en matière d'enseignement de la musique concurrenceraient d'autres domaines. Une augmentation du nombre d'heures obligatoires d'enseignement de la musique entraînerait nécessairement une réduction des heures d'enseignement dans d'autres disciplines scolaires, sauf à augmenter le nombre total d'heures d'enseignement.

­

Standards relatifs aux contenus: Les cantons travaillent actuellement à l'établissement de grands principes de formation à l'échelle nationale (cf.

ch. 2.5.1): le concordat HarmoS prévoit l'établissement de standards de formation pour chaque discipline ainsi que l'introduction d'un seul plan d'études par région linguistique. Les cantons qui n'ont pas (encore) adhéré au concordat HarmoS appuient eux aussi les efforts d'harmonisation des plans d'études. Les préoccupations et les visées des initiants peuvent être prises en compte dans ce processus national d'harmonisation. Aussi une législation de principe de la Confédération dans le domaine de la formation musicale ne répond à aucune nécessité et ne ferait que saper les efforts d'harmonisation des cantons.

­

Formation des enseignants: Le rapport sur la formation musicale avait déjà mis en évidence les lacunes au niveau de la formation des enseignants de musique.22 Il est vrai qu'au niveau de la formation tertiaire la musique a un statut différent de celui qu'elle avait à l'école normale: d'une part, il ne peut y avoir d'examen d'admission ou de test d'aptitude dans cette discipline, dans la mesure où la maturité permet l'accès à tous les domaines d'études.

D'autre part, dans les hautes écoles pédagogiques, l'obtention d'un certificat d'enseignement en musique est laissée au libre choix des étudiants. Dans ces conditions, l'enseignement de la musique à l'école enfantine, à l'école primaire et à l'école secondaire I risque de n'être pas partout confié à des professeurs motivés et suffisamment qualifiés sur le plan musical. Mais en tout état de cause, l'amélioration de la formation des enseignants de musique (par ex. par une standardisation et un développement des offres) est l'affaire des hautes écoles pédagogiques, en d'autres termes du ressort des cantons.

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 25­27 et p. 34.

­

Formation professionnelle de base: Une adaptation de la législation sur la formation professionnelle23 au sens de l'initiative donnerait la possibilité à tous les élèves des écoles professionnelles (soit quelque deux tiers des jeunes) de suivre des cours à option, ce qui renforcerait par là même la présence de la musique dans la formation professionnelle de base. Si l'enseignement de la musique était rendu obligatoire dans les écoles professionnelles, cela se ferait au détriment de l'enseignement de la culture générale, déjà réduit à la portion congrue. Augmenter le nombre d'heures de cours augmenterait d'autant les absences dans les entreprises et pourrait influencer négativement la disposition de ces dernières à former des apprentis. La formation professionnelle duale se prête donc moins à la formation musicale que les écoles de maturité.24

4.3.2

Encouragement de la musique dans le domaine extrascolaire

Dans le domaine extrascolaire, le comité d'initiative propose d'une part que les écoles de musique soient reconnues dans les législations cantonales sur l'instruction (notamment pour asseoir leurs bases financières) et d'autre part que la relève soit mieux encouragée. Les deux mesures visent à renforcer l'accès à la musique.

23 24

25

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Ecoles de musique: Il ne fait pas de doute que les écoles de musique remplissent une fonction importante dans la formation musicale (cf. ch. 2.4).

Elles fournissent une formation musicale de base à vaste échelle et favorisant également la relève. Les écoles de musique sont toutefois du ressort des cantons, et à juste titre. Il serait malvenu de donner à la Confédération la compétence d'astreindre les cantons à reconnaître et à financer obligatoirement les écoles de musique comme des institutions de formation. La Confédération obligerait ainsi les cantons à offrir un service public dans le domaine culturel sans tenir compte des situations spécifiques de chaque canton (structure de population, traditions, offres alternatives en matière de formation musicale, etc.).

­

Encouragement de la relève et renforcement de l'accès à la musique: le rapport sur la formation musicale montre que nombre de manifestations favorisant la pratique musicale chez les enfants et les jeunes sont aujourd'hui sous-dotées financièrement. Les festivals de musique, les orchestres et les choeurs régionaux et nationaux de jeunes ainsi que les concours sont généralement organisés et financés essentiellement par les associations et grâce au bénévolat des membres.25 A l'avenir la Confédération renforcera le soutien qu'elle apporte à l'encouragement de la relève et à la pratique musicale en dehors de l'école. L'art. 10a LEC donnera à la Confédération une base RS 412.101 Il existe aujourd'hui déjà une possibilité de faciliter l'accès à la formation tertiaire par le biais d'une formation professionnelle, pour les musiciens talentueux. Les associations du monde du travail peuvent initier et accompagner la création d'une formation professionnelle de base dans le domaine musical, sur le modèle de ce qui s'est fait récemment dans le domaine de la danse (CFC de danse).

Rapport sur la formation musicale 2005, p. 18­19, 27­28 et 30­32. Pour ce qui est du soutien fédéral aux organisations de musique de jeunes, cf. ch. 2.4.

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légale matérielle qui lui permettra d'encourager les enfants et les jeunes dans les limites de ses attributions et des crédits alloués par le Parlement. Concrètement, les mesures pourraient aller du financement de projets d'associations au soutien (voire à la création) de concours de musique à l'échelle nationale.

5

Conclusions

Sur la base des considérations qui précèdent, le Conseil fédéral en arrive à la conclusion suivante: ­

Donner à la Confédération la compétence de légiférer sur les principes de l'enseignement musical à l'école, comme le propose l'initiative, constituerait une atteinte à la souveraineté cantonale en matière d'éducation récemment confirmée par le peuple et les cantons. Le Conseil fédéral ne veut pas développer les compétences de la Confédération au détriment des cantons. Un transfert de compétences dans le seul domaine musical serait en tout état de cause illogique.

­

Les cantons travaillent à l'élaboration de règles et principes à l'échelle nationale en matière de formation (concordat HarmoS, plans d'études au niveau des régions linguistiques). Le mieux serait de prendre en compte les desiderata des initiants dans le cadre de ce processus de réforme qui est en cours à l'échelle nationale.

­

La dotation horaire de la discipline musique est appropriée en comparaison avec celle d'autres branches. Des exigences accrues mettraient la musique en concurrence avec d'autres branches d'enseignement. Augmenter le nombre d'heures obligatoires en musique impliquerait nécessairement une réduction du temps d'enseignement dans d'autres disciplines.

­

L'initiative est inutile pour ce qui est de l'art. 67a, al. 1, Cst. (nouveau) proposé, dans la mesure où l'art. 67, al. 2, Cst. et l'art. 69, al. 2, Cst. donnent aujourd'hui déjà à la Confédération la compétence de prendre des mesures destinées à favoriser la formation musicale en dehors de l'école: l'art. 69, al. 2, Cst. trouve sa concrétisation légale formelle dans l'art. 10a LEC. Cette disposition permet à la Confédération de soutenir financièrement des projets de formation musicale dans le champ extrascolaire (par ex. d'encourager la relève dans le cadre du concours suisse de musique pour la jeunesse).

Aussi le Conseil fédéral propose-t-il aux Chambres fédérales de recommander au peuple et aux cantons le rejet de l'initiative populaire fédérale «jeunesse + musique».

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Glossaire Standards de formation

Les standards de formation formulent des exigences en matière d'enseignement et d'apprentissage à l'école. Ils définissent des objectifs pédagogiques, sous la forme de résultats d'apprentissage souhaités pour les élèves. Ainsi les standards de formation concrétisent le mandat de formation que doivent remplir les écoles de formation générale.

Les standards de formation se subdivisent en standards de performance et en standards relatifs aux contenus.

Plan d'études

Les plans d'études sont des documents de réglementation de l'enseignement dans lesquels sont précisés les standards relatifs aux contenus.

Standards de performance

Les standards de performance décrivent les degrés de connaissance et établissent les niveaux de prestations.

Standards relatifs aux contenus

Les standards relatifs aux contenus décrivent ce que les professeurs doivent enseigner et les élèves apprendre. Ils décrivent en termes clairs et univoques les compétences à développer et les connaissances à acquérir.

Plan d'études cadre

Les plans d'études cadre valables à l'échelle nationale ou régionale définissent les objectifs en termes généraux. Ils sont par exemple édictés par l'Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT) pour ce qui concerne la formation professionnelle, et par la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP) pour ce qui est du degré secondaire II, formation générale; les cantons et aussi en partie les écoles pour le post-obligatoire affinent ensuite les formulations dans leurs plans d'études.

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Bibliographie Rapport sur l'éducation en Suisse 2006 = Centre suisse de coordination pour la recherche en éducation (CSRE), 2006, Aarau.

Statistique des pratiques culturelles en 2008 = Office fédéral de la statistique (OFS) et Office fédéral de la culture (OFC), 2009, Les pratiques culturelles en Suisse: enquête 2008, musique, Neuchâtel.

Rapport sur la formation musicale 2005 = Office fédéral de la culture (OFC), La formation musicale en Suisse, 2005, Berne.

Ramseier, Erich et al. (éd.), 2005, Evaluation der Maturitätsreform 1995 (EVAMAR). Neue Fächerstruktur ­ Pädagogische Ziele ­ Schulentwicklung, Berne.

Rusterholz, Peter (chef de projet), 2004, Kompetenzen im Fach Musik für Volksschullehrer/-innen (mit Fachstandards für die Ausbildung).

Scheidegger, Joseph, 2005, Erste Überlegungen und mögliche Massnahmen für Bildungsstandards im Fach Musik ­ eine Machbarkeitstudie, Lucerne.

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