10.065 Message portant approbation de l'accord entre la Suisse et le Liechtenstein concernant l'attribution d'organes destinés à une transplantation du 18 août 2010

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous priant de l'adopter, le projet d'arrêté fédéral portant approbation de l'accord entre la Suisse et le Liechtenstein concernant l'attribution d'organes destinés à une transplantation.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 août 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-0616

5019

Condensé Lors de l'attribution d'organes, la loi suisse sur la transplantation favorise les personnes domiciliées en Suisse par rapport à celles qui ne le sont pas. Le présent accord mettra désormais les personnes domiciliées au Liechtenstein sur un pied d'égalité avec les personnes domiciliées en Suisse. En contrepartie, le Liechtenstein s'engage à prendre, dans ses hôpitaux, les mesures applicables en Suisse en vue d'identifier et de déclarer les donneurs potentiels ainsi qu'à participer proportionnellement aux coûts que la Confédération doit assumer pour l'attribution d'organes.

Le Conseil fédéral a approuvé l'accord le 18 novembre 2009. Simultanément, il a décidé, sous réserve des résultats de la consultation des commissions parlementaires concernées, son application à titre provisoire à partir du 1er avril 2010.

L'accord a été signé le 1er mars 2010.

5020

Message 1

Présentation de l'objet

1.1

Contexte

La loi du 8 octobre 2004 sur la transplantation1 est entrée en vigueur le 1er juillet 2007. S'agissant de l'attribution d'organes, elle consacre le principe du domicile en ce sens que les personnes domiciliées en Suisse sont favorisées. De ce fait, un organe disponible n'est attribué à une personne non domiciliée en Suisse que si la transplantation constitue une urgence du point de vue médical et qu'aucune personne domiciliée en Suisse ne se trouve dans la même situation. Si la transplantation n'est pas urgente du point de vue médical, l'organe est attribué à une personne non domiciliée en Suisse s'il n'y a aucun receveur domicilié en Suisse (art. 17, al. 3, de la loi sur la transplantation). Les personnes domiciliées au Liechtenstein passent après les personnes domiciliées en Suisse en ce qui concerne l'attribution d'organes.

La loi sur la transplantation avait entraîné un changement dans la pratique qui avait cours avant son entrée en vigueur: jusque-là, les personnes domiciliées au Liechtenstein étaient traitées comme des personnes domiciliées en Suisse et avaient donc les mêmes chances en matière d'attribution d'organes et de transplantation (pas de «ségrégation» en fonction du domicile). Dans la pratique, cinq organes prélevés sur des personnes décédées en Suisse ont été attribués à des patients liechtensteinois entre 2002 et 2006, qui ont fait l'objet d'une transplantation. Durant cette même période, des patients suisses ont reçu les organes prélevés sur un citoyen décédé du Liechtenstein.

Comme il dispose d'un faible nombre de donneurs, le Liechtenstein doit s'affilier à une structure plus importante pour trouver tous les types d'organes dont ont besoin les personnes résidant sur son territoire. Dans ce contexte et compte tenu de la pratique appliquée jusque-là, la Principauté de Liechtenstein cherche à trouver une solution permettant à ses patients d'être traités de la même manière que les personnes domiciliées en Suisse en matière d'attribution d'organes.

1.2

Bases légales en prévision d'un accord

La loi sur la transplantation ne contient aucune disposition qui permette une réglementation spécifique de l'attribution d'organes à des patients liechtensteinois. Il en va de même du traité du 29 mars 1923 conclu avec le Liechtenstein en matière de territoire douanier2. Ce traité réunit la Principauté de Liechtenstein au territoire douanier suisse et, de ce fait, l'inclut dans la zone économique suisse. Outre la législation sur les douanes, le reste de la législation fédérale s'applique au Liechtenstein dans la mesure où l'union douanière l'exige. La législation fédérale applicable comprend notamment des prescriptions sur les importations, les exportations et le transit ainsi que sur la fabrication de marchandises. La plupart des dispositions de la loi sur la transplantation ­ notamment celles régissant l'attribution d'organes ­ 1 2

RS 810.21 RS 0.631.112.514

5021

n'entrent pas dans le champ d'application de ce traité. L'égalité de traitement des patients liechtensteinois et des personnes domiciliées en Suisse n'est donc pas possible dans le cadre du traité. La Suisse et le Liechtenstein sont d'accord sur ce point.

Le Liechtenstein dispose uniquement d'une réglementation définissant, pour l'essentiel, les conditions dans lesquelles des organes peuvent être prélevés sur des personnes décédées. En outre, il n'a pas l'intention de reprendre les dispositions de la loi sur la transplantation qui ne font pas l'objet du contrat douanier étant donné qu'une loi sur la transplantation n'aurait guère de chances d'être appliquée efficacement sur son territoire. L'égalité de traitement des patients liechtensteinois et des personnes domiciliées en Suisse en matière d'accès à des organes nécessite donc la conclusion d'un accord entre la Suisse et le Liechtenstein.

1.3

Utilité pour la Suisse

La Suisse a intérêt à conclure cet accord d'abord en raison des relations d'amitié très étroites qu'elle entretient avec son voisin et qui lui sont aussi d'une grande utilité dans différents domaines. Son intérêt politique exige que ces bonnes relations se maintiennent et perdurent. Ensuite, le Liechtenstein est tenu, aux termes de cet accord, de prendre, dans ses hôpitaux, les mesures applicables en Suisse pour identifier et déclarer les donneurs potentiels et de participer proportionnellement aux coûts assumés par la Confédération pour l'attribution d'organes. Dans ce contexte et vu le faible nombre de patients liechtensteinois concernés, il convient de mettre sur un pied d'égalité les patients liechtensteinois et les patients domiciliés en Suisse.

Le 18 novembre 2009, le Conseil fédéral a approuvé l'accord entre la Suisse et le Liechtenstein. Dans l'intérêt des personnes concernées, il a, en outre, décidé son application à titre provisoire à partir du 1er avril 2010. Les commissions parlementaires de la sécurité sociale et de la santé publique compétentes en la matière ont été préalablement consultées. L'accord a été signé à Berne le 1er mars 2010.

2

Contenu de l'accord

Art. 1

Inscription sur la liste d'attente et radiation

Les personnes domiciliées au Liechtenstein sont inscrites sur la liste d'attente suisse ou en sont radiées aux mêmes conditions que les personnes domiciliées en Suisse le sont en vertu de l'ordonnance du 16 mars 2007 sur l'attribution d'organes3. Par conséquent, une personne est inscrite sur la liste d'attente lorsqu'elle doit subir une transplantation qui relève de l'urgence médicale, si aucune contre-indication médicale durable ne s'y oppose et si aucune autre raison médicale n'est susceptible de compromettre le succès de la transplantation. L'inscription présuppose l'accord écrit du patient (art. 3 de l'ordonnance sur l'attribution d'organes). Celui-ci est radié de la liste d'attente lorsqu'il cesse de remplir les conditions (art. 5 de l'ordonnance sur l'attribution d'organes).

3

RS 810.212.4

5022

Art. 2

Attribution d'organes

Lors de l'attribution des organes, les personnes domiciliées au Liechtenstein doivent être traitées de la même manière que les personnes domiciliées en Suisse (art. 17, al. 2, de la loi sur la transplantation). L'art. 17, al. 3, de la loi sur la transplantation prévoit qu'un organe disponible ne peut être attribué à une personne non domiciliée en Suisse que si la transplantation est urgente du point de vue médical et qu'aucune personne domiciliée en Suisse ne se trouve dans la même situation, ou si la transplantation n'est pas urgente mais qu'il n'y a aucun receveur domicilié en Suisse.

Cette disposition n'est donc pas applicable aux personnes domiciliées au Liechtenstein.

Art. 3

Communication des noms de donneurs du Liechtenstein

L'intégration de personnes domiciliées au Liechtenstein dans le système suisse d'attributions d'organes implique que le Liechtenstein assume les obligations qui sont liées à ce système et contribue ainsi à son bon fonctionnement. De ce fait, les hôpitaux du Liechtenstein s'engagent en contrepartie à communiquer au service national des attributions, avec les données nécessaires, le nom des donneurs potentiels. Ces hôpitaux ainsi que les médecins autorisés à pratiquer au Liechtenstein communiquent également au service national des attributions le nom des personnes qui ont déclaré leur volonté de donner de leur vivant un organe à une personne inconnue (art. 22 de la loi sur la transplantation).

Art. 4

Organisation et coordination dans les hôpitaux

La participation au système suisse d'attribution implique, en outre, que le Liechtenstein prenne les mesures nécessaires en vue d'identifier et de prendre en charge les donneurs. Le Liechtenstein assume les mêmes tâches en matière d'organisation et de coordination des hôpitaux que les cantons selon l'art. 56 de la loi sur la transplantation et les art. 45 et 47 de l'ordonnance du 16 mars 2007 sur la transplantation4. Le soutien de la Confédération en matière de programmes de perfectionnement professionnel et de formation continue du personnel médical selon l'art. 53 de la loi sur la transplantation doit également s'appliquer aux hôpitaux liechtensteinois.

Art. 5

Voies de droit

Les décisions des hôpitaux concernant l'inscription d'une personne sur la liste d'attente ou la radiation de celle-ci et les décisions du service national des attributions sont des décisions telles qu'elles sont définies à l'art. 5 de la loi du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative5 et peuvent donc être attaquées par un recours. Les personnes domiciliées au Liechtenstein peuvent aussi bénéficier de ce droit de recours. Par conséquent, les voies de droit concernant l'inscription sur la liste d'attente et l'attribution d'organes sont régies par l'art. 68 de la loi sur la transplantation.

4 5

RS 810.211 RS 172.021

5023

Art. 6

Financement du service national des attributions

Par ailleurs, le Liechtenstein participe proportionnellement aux coûts que la Confédération doit assumer pour l'attribution d'organes. Sa participation est calculée au prorata des dépenses occasionnées par les patients de ce pays. Pour ce faire, on tient compte du nombre de patients figurant sur la liste d'attente. La Suisse compte entre 1300 et 1400 patients par année et le Liechtenstein cinq.

Art. 7

Droit applicable

L'art. 7 précise que le droit suisse est applicable au Liechtenstein dans les limites du présent accord et renvoie à cet effet à l'annexe de celui-ci. Une «clause évolutive» décrit la procédure en cas de modification des dispositions suisses fixées dans l'accord. De cette manière, on évite que, lors de révisions de lois ou d'ordonnances, il soit nécessaire de soumettre au Parlement une révision de l'accord. Le Conseil fédéral a délégué le suivi de l'annexe de l'accord à l'OFSP.

Art. 8 et 9

Dénonciation et entrée en vigueur

Enfin, l'accord contient des réglementations sur la dénonciation et l'entrée en vigueur. Chacune des parties contractantes peut dénoncer cet accord en tout temps, en observant un préavis de douze mois, pour la fin d'une année civile. Une fois que l'accord a perdu sa validité, les patients liechtensteinois n'ont en principe plus droit à l'égalité de traitement par rapport aux personnes domiciliées en Suisse. Font exception les patients pour lesquels la transplantation présente une urgence médicale.

L'accord est appliqué à titre provisoire à partir du 1er avril 2010 (voir ch. 6.4). Il entrera en vigueur dès que les parties contractantes se seront mutuellement communiqué l'accomplissement des procédures exigées par leur droit interne.

3

Procédure préliminaire

L'accord ne nécessite pas d'adaptation du droit national, puisque les réglementations qui y figurent sont directement applicables. Conformément à l'art. 2 de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation6, on a donc renoncé à ouvrir une procédure de consultation.

4

Conséquences

L'accord n'a pas de répercussions sur les finances et le personnel de la Confédération et des cantons, puisque le Liechtenstein participe proportionnellement aux coûts que la Confédération doit assumer pour l'attribution des organes. Le perfectionnement professionnel et la formation continue prévus à l'art. 4, al. 2, de l'accord seront soutenus dans le cadre des ressources inscrites au budget et dans le plan financier.

En ce qui concerne l'assurance-maladie, l'accord n'occasionne aucun coût supplémentaire.

6

RS 172.061

5024

Le projet n'a aucune conséquence sur l'informatique; cette dernière a été adaptée aux exigences d'exécution dans le cadre de la mise en oeuvre de la législation sur la transplantation.

L'accord n'a pas non plus de conséquences économiques.

5

Liens avec le programme de la législature

Le projet n'est pas annoncé dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20117, ni dans l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de la législature 2007 à 20118. Comme le Conseil fédéral le mentionne dans l'introduction à l'annexe 1 «Programme législatif 2007 à 2011»9, il ne s'agit pas d'une liste exhaustive de tous les objets parlementaires qu'il a prévus. Si le présent message n'y figure pas, c'est notamment parce qu'il ne saurait être considéré comme un objet prioritaire du domaine de la santé.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité et approbation

La compétence de la Confédération pour la conclusion de l'accord découle de l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.)10, selon lequel les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. L'art. 184, al. 2, Cst. autorise le Conseil fédéral à signer les traités et à les ratifier. En l'espèce, ce dernier ne peut pas conclure seul un traité, conformément à l'art. 7a de la loi du 21 mars 1997 sur l' organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA)11: d'une part, il n'existe pas de base légale spécifique ni de traité international, d'autre part, il ne s'agit pas d'un accord de portée mineure. L'accord doit donc être soumis au Parlement pour approbation (art. 166, al. 2, Cst.).

6.2

Référendum

Conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., sont soumis au vote du peuple les traités internationaux qui sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. L'accord concernant l'attribution d'organes en vue de transplantations est dénonçable (cf. art. 8) et ne prévoit pas d'adhésion à une organisation internationale.

Reste ouverte la question de savoir si l'accord contient des dispositions fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Confor-

7 8 9 10 11

FF 2008 639 FF 2008 7745 FF 2008 705 RS 101 RS 172.010

5025

mément à l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement12, sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Ce sont celles qui, dans le droit interne, en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

L'accord prévoit, lors de l'attribution d'organes, l'égalité de traitement pour les personnes domiciliées au Liechtenstein et les personnes domiciliées en Suisse. Les dispositions sont directement applicables et créent des droits et des obligations.

L'accord contient donc des dispositions fixant des règles de droit. De plus, elles doivent être considérées comme importantes dans la mesure où ­ si elles étaient édictées au niveau national ­ elles le seraient sous la forme d'une loi au sens formel en vertu de l'art. 164, al. 1, let. c, Cst. (cf. aussi la loi sur la transplantation). Par conséquent, l'arrêté fédéral portant approbation de l'accord doit, en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst., être soumis au référendum facultatif en tant que traité international.

6.3

Forme de l'acte

En vertu de l'art. 163, al. 2, Cst., l'accord revêtira la forme d'un arrêté fédéral.

6.4

Application à titre provisoire et entrée en vigueur

L'accord est appliqué à titre provisoire à partir du 1er avril 2010 (art. 7b, al. 1, LOGA).

Conformément à l'art. 7b, al. 2, LOGA, l'application à titre provisoire d'un traité international prend fin si, dans un délai de six mois à compter du début de l'application à titre provisoire, le Conseil fédéral n'a pas soumis à l'Assemblée fédérale le projet d'arrêté fédéral portant approbation du traité concerné. Ce délai est respecté avec la transmission du présent message. L'accord entrera en vigueur dès que les Parties contractantes se seront mutuellement communiqué l'accomplissement des procédures exigées par leur droit interne (art. 9 de l'accord).

12

RS 171.10

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