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FEUILLE FÉDÉRALE 81 année Berne, le 16 janvier 1929 Volume I e

Paraît une fois par semaine. Prix: 2O francs par an; lo francs pour six mois plus la finance d'abonnement ou de remboursement par la poste.

Insertions : 50 centime» la ligne ou son espace ; doivent être adressées franco à l'imprimerie K.-J. Wyss Erben, à Berne.

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Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi fédérale sur les voyageurs de commerce.

(Du 11 janvier 1929.)

Monsieur le Président et Messieurs, L Les rapports des voyageurs de commerce avec la clientèle sont xégis actuellement par la loi fédérale du 24 juin 1922 concernant les taxes de patente des voyageurs de commerce. A propos des origines
Il n'était assuré qu'aux citoyens suisses « établis », et seulement dans les limites tracées par les lois et ordonnances des cantons; ceux-ci devaient, au surplus, traiter à tous égards les citoyens « établis » comme leurs propres ressortissants. Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie n'était donc nullement reconnu. A cette époque, les cantons frappaient de taxes les plus diverses parleur1 nature et leur montant non seulement les colporteurs, mais aussi les voyageurs de commerce, leur appliquant souvent un traitement différentiel suivant qu'il s'agissait de leurs propres ressortissants ou desressortis-^ sants « non établis » d'autres cantons. En 1854 déjà, les chambres avaient invité le Conseil fédéral à examiner si les prescriptions cantonales sur les taxes de patente des voyageurs de commerce étaient compatibles avec laconstitution.. Contrairement à l'avis du Conseil fédéral, qui déclara à réitérées fois que la constitution ne fournissait aucun moyen juridique d'empêcher l e s cantons d'exiger ces Feuille fédérale. 81e année. Vol. I.

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aux cantons d'assujettir les voyageurs de commerce de maisons àuisses à des taxes de patente ou à d'autres droits, pourvu que ces voyageurs se bornassent à prendre des commandes, sur échantillon' jtfu non, et n'eussent avec eux aucune marchandise destinée à la vente.

Cet arrêté, fondé sur une interprétation un peu singulière de l'article 29 de la constitution de 1848, souleva de nombreuses critiques, mais fixa pour longtemps le droit fédéral en la matière. La pratique étendit la franchise de taxe aux voyageurs de commerce de maisons étrangères. Lorsque, dans les années 1860, la Suisse conclut de nouveaux traités de commerce avec divers Etats, en particulier avec :ses voisins, elle réussit à faire stipuler, sur le terrain international, l'exemption réciproque des taxes de voyageurs de commerce. Cependant, après l'adoption de la constitution fédérale de 1874, plusieurs cantons, dont les ressources fiscales semblaient atteintes par l'arrêté fédéral de 1859, prétendirent que celui-ci n'était pas en harmonie avec le nouvel article 31 de la constitution, lequel réserve expressément . aux cantons le droit de soumettre à des impôts l'exercice des professions commerciales et industrielles. Le Conseil fédéral s'opposa tout d'abord à cette interprétation, mais céda finalement, lorsqu'il vit qu'elle gagnait de plus en plus de terrain dans l'Assemblée fédérale.

C'est pourquoi, sans que l'arrêté fédéral de 1859 eût été formellement ïapporté, le droit des cantons d'imposer la profession de voyageur de commerce fut de nouveau admis. Presque tous les cantons se hâtèrent de modifier leur législation, afin d'exploiter cette nouvelle source de revenus fiscaux. Le Conseil fédéral n'intervint plus que dans les cas où l'es taxes atteignaient un niveau si élevé qu'elles rendaient très difficile ou même impossible l'exercice de la profession'.

et, dès lors, étaient contraires au principe de la liberté du commerce et de l'industrie posé par l'article 31.

Cependant, les traités de commerce, empêchaient d'aggraver la situation des voyageurs de maisons étrangères comme ou avait aggravé celle des voyageurs de maisons suisses. Lorsque ces traités.

durent être renouvelés, le Conseil fédéral ne parvint pas à faire éliminer les clauses portant exonération réciproque de taxes, exoné-ratiott qu'il avait lui-même proposée
jadis. C'est pourquoi, des années, durant, les voyageurs d'entreprises étrangères purent prendre des commandes en Suisse sans avoir à payer de taxe, tandis que les voyageurs de maisons suisses étaient assujettis à des taxes cantonales souvent très élevées. Cet état de choses étant devenu intenable,le Conseil fédéral, conformément à un mandat qu'il avait reçu des.

chambres, présenta, le 9 novembre 1883, un rapport sur toute cettequestion. Il proposa l'adoption d'un arrêté fédéral d'après lequel' les voyageurs de commerce voyageant en Suisse pour le compte d'une-

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maison établie dans le pays seraient autorisés, sur la seule preuve de leur identité, à rechercher et à prendre des commandes sans avoir à payer aucune taxe, pourvu qu'ils n'eussent pas. avec, eux de marchandises destinées à la vente. Le 11 décembre 1883, les chambres adoptèrent ce projet d'arrêté, mais le peuple suisse le repoussa à une faible majorité par son vote du 11 mai 1884. Nombre de cantons, habitués à tirer des recettes de l'imposition des voyageurs de corn-, mercé, ne voulaient pas renoncer à cette source de revenus.

Les voyageurs de maisons établies en Suisse continuèrent donc d'être désavantagés par rapport à leurs concurrents étrangers. Cette anomalie engendra un mécontentement croissant. Finalement, la question reçut, sur l'initiative de l'union suisse du comimierce et de l'industrie et de l'union suisse des arts et métiers, une autre solution :· celle que consacre la loi fédérale de 1892, encore en vigueur aujourd'hui. Cette loi n'exonère de la taxe que les « voyageurs en gros », c'est-à-dire les voyageurs qui ne traitent pas avec les particuliers et s'adressent uniquement aux personnes exerçant une industrie ou un commerce. Les voyageurs au détail, par contre, doivent acquitter une taxe uniforme de 150 francs par année civile ou de 100 francs par semestre. Ces taxes sont perçues par les offices cantonaux préposés à là délivrance des cartes de légitimation. L'administration fédérale en répartit chaque année le produit entr.e les cantons, au prorata du chiffre de leur population résidente.

Cet historique met en lumière le but et la portée de la loi de 1892.

Il s'agissait avant tout de concilier les besoins des finances cantonales avec les intérêts économiiques généraux, notamment avec les intérêts des commerçants-voyageurs. Le législateur n'a guère songé à sauver garder le public contre certaines catégories de voyageurs de commerce ou à assainir la profession. Cela ressort déjà du titre même de la loi, qui mentionne uniquement les taxes de patente dés voyageurs de commerce.

La loi de 1892 n'invoque, dans son préambule, aucune disposition de la constitution fédérale; aussi sa constitutionnalité 'fut-elle contestée de divera côtés. Mais il est hors de doute que, depuis lors, l'article 34ter de la constitution fédérale est venu lui donner un fondement juridique. C'est également sur cet article 34ter que repose notre projet.

II.

La loi de 1892 fut longtemps d'une application très malaisée. En première ligne, les dispositions concernant l'assujettissement à la taxe furent interprétées dans un sens trop fiscal aussi bien par les tribunaux que par les autorités administratives. La discrimination

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faite entre 1« « voyageur en gros » exonéré de la taxe et le « voyageur au détail » soumis à celle-ci donna naissance à de nombreuses difficultés et contestations. On en vint peni à peu à donner du voyageur en gros une définition extraordinairement étroite. En février 1898, le déparlement fédéral du commerce publia, sous le titre : Interprétationdé la loi fédérale du 2î juin 1892 concernant les taxes de patente des voyageurs de commerce, un résumé de la jurisprudence restrictive dies tribunaux et des autorités administratives. Mais les difficultés et les plaintes ne cessèrent pas. En effet, de nouveaux jugements, fondés sur des distinctions subtiles et imprécises, ne firent qu'accroître l'incertitude juridique qui régnait dans ce domaine. C'est pourquoi, en 1907 déjà, la revision de la loi fut sollicitée au Conseil national. En 1910, la société suisse des voyageurs de commerce déposa une requête à cet effet et demanda que la carte de voyageur ne fût accordée qu'aux personnes justifiant d'une bonne réputation. D'après le projet de loi fédérale sur les arts et métiers, publié en 1911 par l'union suisse des arts et métiers, les voyageurs au détail devaient se borner à rechercher des commandes de travail. C'est pour lutter contre ces tentatives que fut créée, la même année, 1'« association suisse des maisons de commerce faisant voyager pour le détail ».

Le Conseil fédéral chercha à tenir compte des réclamations en décrétant le règlement d'exécution du 29 novembre 1912. Celui-ci réglait dans un sens plus libéral divers points contestés et revenait à une interprétation naturelle de la loi. Néanmoins, de nombreuses difficultés subsistèrent, et la revision de la loi continua d'être réclamée.

Les réclamations devinrent particulièrement pressantes lorsque, avec le temps, surtout dans l'a période d'après-guerre, de nombreux éléments douteux envahirent la profession de voyageur de commerce, importunèrent de plus en plus les particuliers et devinrent pour ceuxci un véritable péril. La population agricole notamment se trouvait exposée. Cela amena le Conseil national à adopter, en 1920, le « postulat » Ming, ainsi conçu : «Le'Conseil fédéral est invité à présenter un rapport sur les questions suivantes : 1. L'activité des voyageurs de commerce qui placent des articles que les acheteurs n'emploient ni dans leur
commerce ni dans leur industrie ne constitue-t-elle pas, notamment à l'égard des populations agricoles, un danger social, économique' et moral: ?

2. N'est-il pas possible à l'Etat de remédier à cet abus dans le cadre de l'article 31 de la constitution fédérale ? » L'auteur du « postulat » s'appliqua à démontrer, en citant des exemples, qu'il convenait d'apporter! certaines restrictions à la re-

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cherche de commandes de maison à maison; il attira, en particulier, l'attention sur les régions de montagne, où les voyageurs, s'adressant à une population disséminée et peu nombreuse, lui arrachent, par des affirmations fallacieuses, des commandes de toutes sortes d'articles, tels que pierres à aiguiser, chaussures, livres, montres, bagues, obligations à prime, denrées alimentaires et boissons, spé>cialement du café, du sucre et du vin de Malaga, commandes qui sont ensuite exécutées le plus souvent d'une manière frauduleuse. De l'avis de M. Ming, de telles commandes ne devraient pouvoir être prises qu'auprès de revendeurs, et les maisons qui emploient des voyageurs devraient être inscrites au registre du commerce. Selon lui, l'expérience prouve que les certificats de bonnes moeurs sont insuffisants; pour permettre à la police d'exercer un contrôle plus efficace sur les voyageurs, il faudrait exiger qu'ils eussent un domicile et que la carte de légitimation fût munie de la photographie du titulaire.

Comme il a été exposé plus haut, le règlement d'exécution de 1912 avait déjà tenu compte de quelques-unes des réclamations formulées.

On crut tout d'abord pouvoir comibiner encore d'autres améliorations avec l'introduction d'une loi fédérale sur les arts et métiers, qui, de toutes façons, devait contenir des dispositions relatives aux professions ambulantes. Mais cette loi, qui ne laissera pas d'être complexe, se fera vraisemblablement attendre pendant un certain temps encore. Les réformes voulues ne pourront être réalisées dans un avenir assez rapproché que par une revision d© la loi sur les taxes de patente des voyageurs de commerce.

Afin d'avoir l'avis et de connaître les voeux des milieux intéressés à cette revision, la division du commerce adressa, à la fin de l'année 1921, une circulaire aux associations ci-après mentionnées : Union suisse du commerce et de l'industrie, Union suisse des arts et métiers, Union suisse des paysans, Société suisse des voyageurs de commerce, Association des voyageurs de 'commerce « de 1918 » en Suisse, Union des voyageurs de commerce de la Suisse romande, Société suisse des commerçants, Association suisse des maisons de commerce faisant voyager pour le détail, Association suisse des détaillants en textiles, Union suisse des services d'escompte, Union centrale des horlogers suisses, Association des orfèvres suisses.

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Vu les réponses données par ces divers groupements et se fondant sur ses propres expériences, la division du commerce élabora, en mars 1923, l'avant-projet d'une loi nouvelle et d'un règlement d'exécution. Le 15 mai 1923, cet avant-projet fut discuté dans une conférence réunissant les représentants des associations susmentionnées et des administrations fédérales intéressées. Diverses questions ne purent être complètement élucidées; par ailleurs, on suggéra sur certains points des modifications et adjonctions qui nécessitèrent uu nouvel examen. Enfin, l'assemblée émit à l'unanimité le voeu que le département de l'économie publique et le Conseil fédéral prissent en main la revision de la loi sur les taxes de patente et soumissent le plus tôt possible un projet de loi à l'Assemblée fédérale.

Le département décida d'entreprendre cette révision et chargea la division du commerce de préparer, de concert avec les associations et services intéressés, un nouveau projet de loi et de règlement d'exécution, qui tînt compte des voeux formulés à la conférence.

Là-dessus, la division du commerce changea deux fois de directeur; en outre, la négociation, à intervalles rapprochés, de nombreux traités de commerce imposa un gros surcroît de besogne aux organes compétents. Les travaux durent, en conséquence, être différés. C'est en octobre 1926 seulement qu'il fut possible de soumettre aux intéressés un projet remanié et de les convoquer pour le discuter. Dans deux conférences, qui eurent lieu le 29 novembre 1926 et le 11 janvier 1927 et auxquelles prirent aussi part quelques représentants d'offices préposés à la délivrance des cartes de légitimation, le projet fit l'objet de discussions approfondies et parfois laborieuses ; les divers groupes d'intéressés émirent un grand1 nombre de propositions divergentes et des voeux souvent contradictoires. Mais les débats amenèrent les intéressés à abandonner nombre de revendications qui avaient été présentées pendant les premières années d'après-guerre, o'est-à-dire à l'époque des grosses difficultés d'ordre économique; avec le retour à des temps meilleurs, ces revendications étaient devenues sans objet. La division du commerce dut modifier le projet en conséquence. La discussion fournit cependant diverses données utiles dont il a été tenu compte dans le'projet que nous vous
présentons aujourd'hui.

III.

Nous avons approuvé le projet établi par notre département de l'économie publique. Ce projet modifie et comrplète la loi actuelle principalement sur les points suivants : 1. Il définit le voyageur de cofmmerce d'une façon plus précise que ne le fait la loi aujourd'hui en vigueur. Diverses opérations sont

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expressément soumises ou soustraites à la loi, alors que jusqu'ici il y avait souvent doute à ce sujet.

2. La recherche de commandes auprès d'« exploitants » (tels'que négociants, industriels, artisans, personnes exerçant une profession libérale ou autre), ainsi qu'auprès d'entreprises, d'administrations et d'établissements de tout genre, privés ou publics, est exonérée de la taxe, si les articles offerts sont destinés à la revente qu sont emi^ ployés d'une manière quelconque dans l'exploitation, l'entreprise, l'ad* ministration ou l'établissement dont il s'agit. Contrairement à ce que disposait l'article 4, 2e alinéa, du règlement d'exécution du 29 novembre 1912, on ne distinguera plus entre les entreprises, administrations et établissements ayant ou non un caractère commercial ou industriel.

3. Il ne sera plus délivré de cartes payantes semestrietles. La taxe annuelle est portée d© 150t à 200 francs( et chaque carte est désormais valable douze mois à partir du jour où elle a été établie.

4. Toute maison suisse qui demande une carte de légitimation poun son voyageur en gros ou au détail doit prouver qu'elle est inscrite au registre du commerce. En outre, le voyageur au détail d'une maison suisse doit produire un permis d'établissement ou de séjour, ainsi qu'un certificat de bonnes moeurs. Pour les voyageurs de maisons établies à l'étranger, la carte de légitimation industrielle tient lieu de permis d'établissement ou de séjour, ainsi que de certificat de bonnes moeurs.

5. La délivrance de la carte payante sera refusée lorsque le voyageur pour lequel elle est sollicitée aura été condamné pour un délit quelconque, au cours des trois années qui ont précédé la présentation de la demande, à une peine infamante privative de liberté; de même, la carte payante sera refusée lorsque, durant les trois années qui ont précédé la présentation de la demande, la maison requérante aura été condamnée judiciairement pour avoir porté préjudice à sa clientèle en usant de procédés commerciaux déloyaux.

6. Contrairement à l'ancienne loi, le projet donne la faculté de retirer une carte de légitimation lorsque surviennent ou se révèlent, à l'endroit du voyageur lui-même ou de la maison qui l'emploie, des faits ou modifications qui eussent justifié le refus de la carte.

7. Le Conseil fédéral peut interdire à tous
les voyageurs au détail de rechercher des commandeis de marchandises dont l'offre et la livraison peuvent très facilement avoir pour effet de léser l'acheteur.

8. Est nulle toute convention passée entre un' voyageur au détail et un particulier, aux termes de laquelle ce dernier renonce au for de son domicile; en cas de litige, le juge ne tiendra aucun comrpte d'une telle convention.

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Le titre, le préambule et les différents articles du projet de lo£ donnent lieu aux observations suivantes : Titre. -- Le projet est intitulé : « Loi fédérale sur les voyageurs^ de commerce ». A vrai dire, ce titre, qui a l'avantage d'être bref, est tur peu trop compréhensif, vu le contenu die la loi, qui ne règle qu'enpartie le statut juridique du voyageur de commerce. Mais l'ancienne loi porte un titre encore mioins adéquat à son contenu; en effet, le?

but de cette loi était moins d'imposer des taxes que d'exonérer Ie«; voyageurs en gros des anciennes taxes cantonales. Notre projet renferme par ailleurs des dispositions importantes, qui n'ont rien décommun avec la question des taxes.

Préambule. -- La nouvelle loi se fonde sur l'article 34^1' die la constitution fédérale, aux termes duquel « l'a Confédération a le droit de statuer des prescriptions uniformes dans le doinuaine des arts et métiers ». Pour l'ancienne loi, il avait fallu se contenter de l'article31; or, celui-ci dispose que « la liberté de commerce et d'industrie est garantie dans toute l'étendue de la Confédération » et ne réserve, sous.

lettre e, les dispositions touchant « l'exercice des professions commerciales et industrielles et les impôts qui s'y rattachent » que dansla mesure où elles ne renferment rien de «contraire au principe delà liberté de commerce et d'industrie ».

La loi de 1892 était entièremient conforme à la lettre et à l'esprit de cet article 31, puisque, loin d'entraver la liberté du commerce et die l'industrie, elle libérait les voyageurs en gros des taxes, parfoistrès élevées et, partant, anticonstitutionnelles, imposées par les can*tons, et dégrevait les voyageurs au détail, en remplaçant ces taxes cantonales par une taxe fédérale, unique et modérée. D'un autre côté,, le Conseil fédéral faisait valoir qu'il était impossible et sans douteincompatible avec la constitution de continuer à assujettir à des taxes cantonales les voyageurs die maisons établies en Suisse, alors que lesvoyageurs de maisons domiciliées à l'étranger en étaient exonérés par les traités.

If article premier définit le voyageur de commerce et formule enoutre le principe général suivant lequel la recherche de commandes n'est permise aux voyageurs en gros ou au détail que s'ils sont muinis d'une carte de légitimation. Comme sous le régime
actuel, les voyageurs de profession ne so'nt pas les seuls voyageurs de comimercé au sens de la loi; celle-ci considère aussi comme tels le chef «t les employés die la maison, lorsqu'ils voyagent pour rechercher des commandes.

Article 2. -- Aux termes de son article 10, la loi de 1892 sur les taxes de patente ne porte aucune atteinte à la législation sur le& spir

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ritueux. Dans la pratique, cette disposition a été interprétée en cesens que la recherche de commandes de spiritueux est tenue pour un élément du comimierce de ces articles. Ce commerce est censé former un domaine distinct auquel sont seules applicables les dispositionsspéciales de la loi sur l'alcool. Jusqu'ici, il n'était donc délivré decartes de légitimation pour voyageurs de commerce ni aux voyageurs en gros de cette branche, considérés comme exerçant une profession « libre », ni aux voyageurs au détail soumis aux lois et ordonnances cantonales. Comme il ne sermble pas justifié di'exemipter ces voyageurs en gros du contrôle général exercé sur les voyageurs de commerce de toutes les autres branches, les représentants qui recherchent, dans le commerce en gros au sens de l'article 17 de la loi.

fédérale du 29 juin 1900, des commandes de spiritueux auprès d'indus.* triels ou de revendeurs, seront tenus, désormais, de se procurer une carte gratuite. En revanche, la recherche de commiandes et la vente d'alcool aux particuliers par quantités inférieures à 40 litres -- c'està-dire le commerce en détail dies spiritueux -- continuera de dépendra exclusivement de l'autorisation des cantons et de l'acquittement du' droit cantonal de vente.

Seront en outre soumises à la loi les expositions temporaires d'échantillons ou de modèles que des maisons établies en1 dehors d'unie commune donnée organisent à l'intention de revendeurs ou du gros public dans des chambres d'hôtel ou dans d'autres locaux loués à cet effet. Toutefois, les représentants des maisons exposantes doivent seborner à présenter des échantillons ou à prendre des commandes; il ne leur est pas permis de livrer directement la marchandise au client.

Dès le moment où des objets exposés sont remis directement à l'acheteur1, l'on se trouve en présence d'un dépôt ambulant (déballage), qui est soumis à la législation cantonale. De mêmie, le fait de livrer, immédiatement après la prise de commande, une marchandise prélevéesur un « dépôt volant » (art. 8, 1er alinéa, du projet de loi) constitue une opération de colportage et, partant, est régi par la loi cantonale.

Il a toujours été admis que la personne qui recherche uniquement des corn/mandes de travail n'Lmipliquant pas la livraison de matériel n'était pas un voyageur de commerce au sens de la loi. Un
arrêt rendu le 30 décembre 1901 par la cour de cassation du Tribunal fédéral a consacré cette manière de voir; il a ajouté toutefois qu'il ne s'agit plus d'une commanda de travail lorsque l'exécution de la commande exige non seulement du travail, mais aussi la fourniture de matériel et que ce matériel forme un élément essentiel
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si blé d'établir, pour différencier- l'essentiel de l'accessoire, un critérium précis pouvant servir dans tous les cas et prémunir les tribunaux contre une jurisprudence contradictoire, le projet ne fait plus cette distinction; il dispose que la loi est applicable chaque fois que l'exécution d'une commande de travail est liée à la fourniture de matériel. En conséquence, seront réputés voyageurs de commerce, par exemple, les tailleurs, les menuisiers ou les sculpteurs qui voyagent de leur propre initiative en dehors du siège de leur entreprise, s'ils ont à fournir, outre leur travail, le matériel (étoffe, bois, pierre) nécessaire pour exécuter les commandes qui leur sont faites.

Le second alinéa énumère les cas de recherches de commandes qui, à notre avis, ne tombent pas sous l'application de la loi sur les voyageurs de commerce; ainsi, un' agriculteur qui recherche des commandes pour les produits naturels de son exploitation ne sera pas tenu die se munir d'une carte de légitimation.

Conformément à la pratique actuelle, les « placiers », c'est-à-dire les personnes recherchant des commandes dans la commune du siège de la maison, seront dispensés de l'obligation de se munir d'une carte, s'ils remplissent les conditions fixées. Pour être exonéré de cette obligation et die celle de payer la taxe, le « placier » doit être au service d'une maison inscrite au registre du commerce dont relève la localité où il exerce son activité. Cependant, afin de permettre aux petits artisans de la campagne, qui ne sont pas tenus de se faire inscrire au registre du commerce, de visiter la clientièle particulière au siège de leur entreprise, sans payer de taxe, la loi exige, en pareil cas, en lieu et place de l'inscription au registre diu comm'erce, l'existence d'un centre fixe d'activité consistant soit en un local de production, soit en un magasin de vente.

Relativement à la prise de commandes sur l'invitation du client, il y a lieu d'observer que, déjà par le passé, la loi n'était pas appliquée aux cas de ce genre. Dans ses arrêts du 9 juin et du 15 juillet 1908, la cour de cassation du Tribunal fédéral a déclaré à ce propos que la loi concernant les taxes de patente était applicable ou non, suivant que l'initiative de l'a commande venait du voyageur ou du client; que si cette initiative émanait du client, la personne
qui prenait la commande n'était pas un voyageur de commerce proprement 'dit, celui-ci ayant pour tâche normale de favoriser et d'augmenter de «on propre chef le placement des marchandises offertes par la maison qu'il représente.

Article 3. -- Le 1er alinéa remplace l'article premier de la loi de 1892 et l'article 4 du règlement d'exécution de 1912. Seront désormais exemptés de la taxe les voyageurs qui sont en relations d'affaires

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exclusivement avec des « exploitants » (tels que négociants, industriels, artisans, personnes exerçant une profession libérale ou autre) ainsi qu'avec des entreprises, administrations ou établissements, privés ou publics, qui opèrent la revente des marchandises offertes ou les emploient d'une manière quelconque dians l'exercice de l'activité qui leur est propre. Ce texte correspond à l'interprétation extensive que le règlement d'exécution de 1912 a donnée à l'article premier de l'ancienne loi; il va même plus loin en ce sens que désormais le voyageur peut visiter, sans être assujetti à la taxe, les entreprises et administrations de tout genre et non pas seulement celles dont l'activité revêt un caractère commercial ou industriel. Dès lors, l'obligation de payer la taxe est limitée aux personnes qui visitent la clientèle particulière. C'est surtout die l'augmentation du nombre de ces personnes que se plaignent les commerçants et le public. Aussi convientil d'assujettir à une taxe les voyageurs au détail et d'aviser aux moyens d'en diminuer le nombre. Le critérium admis jusqu'ici pour différencier les entreprises, administrations et institutions publiques, suivant qu'elles exercent ou non une activité commerciale ou industrielle, a prêté souvent à controverse. Comme le projet ne fait plus cette distinction, nous espérons que le nombi*e des conflits se réduira considérablement.

Le second alinéa de l'article 3 ccincerne leu voyaueurs au détail, o'est-à-dire les personnes qui recherchent des commandes non seulement auprès de la clientèle des voyageurs en gros, décrite au premier alinéa, mais aussi auprès des particuliers. Jusqu'ici, il était délivré à l'intention des voyageurs au détail des cartes annuelles ou semestrielles dont la validité expirait à la fin du mois de juin ou du mois de décembre de chaque année. Les associations de voyageurs rie commerce sont presque toutes favorables à la suppression de In carte, semestrielle, attendu que la possibilité d'obtenir cette carte moyennant paiement d'une taxe réduite incite beaucoup de personnes non qualifiées à tenter un' essai dans la profession. D'autre part, la carte semestrielle est surtout demandée pour les voyageurs au détail de maisons domiciliées à l'étranger. Il convient de remédder à cet état do choses, d'autant plus que la suppression de la
carte semestrielle simplifiera la tâcbe des offices chargés de la délivrance des cartes. A l'occasion de cette modification, on a jugé opportun de prévoir à l'article 6 que la carte annuelle sera désormais valable non plus pour l'année civile, mais pour douze mois à compter du jour où elle a été établie. Toutes les cartes pourront ainsi être entièrement utilisées, quelle que soit la diate à laquelle elles auront été délivrées. Ce laps d'une année à compter du jour de l'établissement de la carte correspond d'ailleurs à la durée de validité de la carta de légitimation in-

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dustrielle qui est prévue dans la convention internationale pour l& simplification des formalités douanières, signée à Genève, le 3 novembre 1923, et dont la production est exigée pour la prise de commandes en pays étranger.

Pour ce qui est du montant de la taxe, rappelons que la carte annuelle a coûté jusqu'ici 150 francs, la carte semestrielle 100 francs: Mais la dépréciation de l'argent a eu en somme pour effet d'abaisser le niveau .de ces taxes, déjà modiques, comparées aux taxes cantonales sur le colportage, qui atteignent jusqu'à 300 francs par mois et auxquelles viennent encore s'ajouter, dans certains cantons, des taxe» communales élevées. Le nombre des voyageurs au détail allant toujours en augmentant et la tendance générale étant d'aggraver et non pas d'alléger les conditions à remplir pour être en droit de recueillir des commandes auprès de la clientèle particulière, nous avions d'abord envisagé de porter la taxe annuelle à 250 francs. Toutefois, la société suisse des voyageurs de commerce fit valoir que la plupart des voyageurs ont peine, aujourd'hui déjà, à subvenir à leur entretien et à celui de leur famille. Si, dit-elle, une augmentation est inévitable, la taxe nouvelle ne devrait pas dépasser 200 francs. Tenant compte de cette objection, nous avons fixé, à l'article 3, le montant de la taxe au chiffre de 200 francs.

Ce ne sont évidemment pas des considérations d'ordre fiscal qui nous engagent à proposer le relèvement de la taxe. En effet, le produit des taxes reviendra comme précédemment non pas à la Confédération, mais aux cantons (art. 12 du projet), sous déduction des frais d'administration, relativement insignifiants, que l'exécution de la loi occasionnera à la Confédération. Il n'exerce, d'ailleurs, qu'une faible influence sur les budgets cantonaux. En 1927, alors qu'il se chiffrait au total par 895,954 fr. 40, la quote-part la plus élevée -- celle du canton de Berne --· a été de 115,441 francs, la plus faible -- celle du canton de Nidwald -- de 3193 francs.

Comme c'est déjà le cas sous le régime de la loi actuelle, le décompte s'établira de la manière suivante : Les offices préposés à la délivrance des cartes de légitimation adresseront chaque mois les relevés des taxes perçues aux offices centraux des cantons. Ceux-ci les examineront, puis les enverront à l'office fédéral
compétent (actuellement la division du commerce près le departement.de l'économie publique), qui les contrôlera et, une fois l'année civile écoulée, fixera le montant total à répartir entre les cantons. Chaque canton obtiendra tout d'abord un émo-lument s'élevant à 4 pour cent des taxes qu'il aura encaissées lui-même et, aprèsdéduction des frais d'administration occasionnés à la Confédération»

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une part du solde proportionnelle au chiffre de sa population résidente. Les cantons qui auront encaissé des taxes pour un montant supérieur à leur part verseront l'excédent à la caisse fédérale. Celle*i fera parvenir les sommes manquantes aux cantons dont les encaissements seront inférieurs à leur part. Pour l'année 1927 par exemple, le décompte final s'établit comme il suit : Cartes payantes

Taxes Fr.

Droit ()uote-part au prode per- rata du chiffre de la population ception Fr.

Fr.

Total Fr.

Zurich . . . . 1,295 182,700.-- 7,308.-- 119,343.-- 126,651.-- Berne .

. . . 1,065 150,217.50 6,009.-- 149,432.-- 155,441.-- 40,994.-- 304 43,950.-- 1,758.-- 39,236.-- Lucerne . . . .

54.-- 1,350.-- 5,312.-- 5,366.-- 9 Uri 344.-- 13,579.-- Schwytz . . . .

61 8,600.-- JLO juOOi ' 11 3,893.-- 3,953.-- Obwald . . . .

1,500.-- 60.-- 100.-- 3,193.-- .Nidwald . . . .

18 2,500.-- 3,093.-- 602.-- 7,497.-- 8,099.-- ·Glaris . . . .

103 15,050.-- 124.-- 7,119.-- 22 3,100.-- 6,995.-- Zoos: 19,700.-- 32,486.-- T?ribourg . . .

788.-- 31,698.-- 140 28,942.-- 30,387.-- 254 36,130.-- 1,445.-- -Soleure . . . .

325 45,050.-- 1,802.-- 31,178.-- 32,980.-- Baie-Ville . . .

566.-- 18,822.-- 104 14,150.-- 18,256.-- Baie-Campagne .

320.-- 11,494.-- 58 8,000.-- 11,174.-- .Schaffhouse . .

572.-- 12,837.-- 12,265.-- Appenzell Rh.-Ext.

108 14,310.-- 7 Appenzell Rh.-Int.

950 -- 38.-- 3,238.-- 3,276.-- 69,164.-- St-Gall . . . .

647 91,950.-- 3,678.-- 65,486.-- 26,557.-- 788.-- 27,345.-- Grisons . . . .

140 19,700.-- 55,747.-- Argovie . . . .

426 59,900.-- 2,396.-- 53,351.-- 30,120.-- 31,208.-- 'Thurgovie . . .

191 27,200.-- 1,088.-- 514.-- 33,737.-- Tessin . . . .

34,251.-- 91 12,850.-- Vaud 476 66,650.-- 2,666.-- 70,351.-- 73,017.-- 7" 27 28,567.-- "Valais . . . .

3,750.-- 28,417.-- 150.-- 30,567.-- 287 29,104.-- Neuchâtel . . .

40,950.-- 1,638.-- 247 Genève . . . .

39,236.40 33,650.-- 1,346.-- 37,890 40 Total

6,416

903,857.50 36,154.--

859,800.40

"Coût des cartes de légitimation, des formulaires, etc.

895,954.40 7,903.10

Total

903,857.50

Article î. -- Cet article énumère les côniditions que doivent reni'·plir les voyageurs de commerce des maisons établies en Suisse pour.

·obtenir une carte de légitimation, c'est-à-dire pour être autorisés à

70

rechercher des commandes en Suisse. Jusqu'ici, la remise de cette carte, aux voyageurs en gros comme aux voyageurs au détail,, n'était subordonnée à aucune condition quelconque : toute personne, si mauvaise que fût sa réputation, était en droit die l'obtenir. Il n'est donc pas étonnant que des individus peu recommandables aient pu s'insinuer parmi les voyageurs de commerce honnêtes, surtout parmi les voyageurs au détail, et jeter le discrédit sur la profession tout entière.

Le public demande que la délivrance de la carte de légitimation, spécialement de celle qui autorise à visiter la clientèle particulière, soit soumise désormais à des conditions strictes. La loi cherche à réaliser, par divers moyens, l'assainissement de la profession de voyageur de commerce et à assurer à la clientèle une protection efficace contre les ·gens malhonnêtes pouvant se trouver parmi les voyageurs qui la visitent. Tout d'abordi, seules les maisons inscrites au registre du com^ mercé seront autorisées à faire prendre des commandes par des voyageurs en gros ou au détail. On peut présumer que tout commerçant désireux d'accroître la vente de ses marchandises par l'intermédiairede voyageurs réalise chaque année un chiffre de vente ou de production assez élevé ou possède un stock assez considérable pour atteindre le minimum fixé par l'ordonnance sur le registre du commerce.

D'autre part, les voyageurs au détail de maisons suisses sont tenus de produire un permis d'établissement ou de séjour et un certificat de bonnes moeurs. Aux termes de l'article 5, 3e alinéa, les voyageurs au détail de maisons domiciliées à l'étranger présenteront, en lieu et place de ces documents, une carte de légitimation industrielle.

Le projet de loi donne un autre moyen de contrôler la moralité du voyageur; il exige la preuve qu'il n'a été condamné, au cours des trois années qui précèdent la demande de la carte, à aucune peine infamante privative de liberté. Cette preuve n'incomberait pas au voyageur lui-même. Il appartiendrait plutôt aux offices cantonaux préposés à la délivrance des cartes de transmettre au bureau fédéral de la police centrale à Berne chaque demande de carte payante dont ils seraient saisis; ce bureau rechercherait si le requérant a un casier judiciaire.

En revanche, nous nous sommes abstenus d'introduire dans le projet une
disposition d'après laquelle la carte de légitimation payante eût été refusée à toute personne atteinte d'une maladie contagieuse ou répugnante ou d'une difformité physique effroyable. Une disposition de ce genre figure dans diverses lois étrangères.

Une autre mesure propre à assurer la protection des acheteurs est enfin prévue à l'article 4, 3e alinéa, du projet, aux termes duquel la carte de légitimation sollicitée pour un voyageur, au détail sera'

71.

refusée, lorsque la maison pour laquelle il désire voyager a été condamnée judiciairement, au cours des trois années antérieures à la présentation de la demande, pour préjudice porté à la clientèle pair: des procédés commerciaux déloyaux. Il est tout à fait logique que l'on1 examine non seulement la moralité du voyageur lui-même, mais aussi celle de la maison qu'il représente. Cette disposition doit empêcher que des maisons malhonnêtes puissent, comme il arrive assez.

souvent, faire voyager des représentants en les chargeant d'obtenir, à force de faconde, des commandes qui, plus tard, seront la cause do litiges, soit pour livraison de marchandises de mauvaise qualité,, soit pour livraison de quantités plus grandes que celles voulues par l'acheteur.

C'est la même catégorie de maisons de commerce que vise l'article 11 du projet. Aussi jugeons-nous utile d'en donner dès maintenant un bref commentaire. Aux termes de cet article, est nulle toute clause conventionnelle par laquelle le particulier, que visite un, voyageur au détail renonce au for de son domicile. On sait que l'article 59 de la constitution fédérale assure au débiteur solvable le droit de n'être recherché que devant le juge de son domicile. Or, nombre de maisons de commerce ont l'habitude, lorsqu'un client leur fait une commande par l'intermédiaire d'un "voyageur au détail, de faire souscrire à l'acheteur une clause par laquelle celui-ci reconnaît comme for celui du domicile de la maison, pour le cas où la commande donnerait lieu à un différend entre parties. Lorsque des contestations viennent à surgir au sujet de marchés conclus par l'intermédiaire du voyageur, l'acheteur, en général inexpérimenté en affaires, est obligé de porter le litige devant le tribunal d'une localité souvent éloignée, à moins qu'il ne renonce à faire valoir son droit en raison des frais trop élevés.

Sans doute l'article 11 est-il de nature à limiter assez sérieusement la liberté des contractants. Mais nous pensons que cette disposition, combinée avec le contrôle sur les maisons et les voyageurs, contrôle qui est prescrit par l'article 4 et appelé à combler la principale lacune de la loi de 1892, aura un effet salutaire, en contribuant très efficacement à la protection du public et à la bonne réputation, des voyageurs de commerce.

Il y a lieu de mentionner ici
une revendication formulée plusieurs fois et avec insistance par la fédération des sociétés suisses d'employés et par l'association des voyageurs du commerce « de 1918 », qui y est affiliée. Ces 'groupements demandaient que la nouvelle loi interdît de délivrer une carte de légitimation à une maison de commerce domiciliée en Suisse, avant que celle-ci eût garanti au voyageur le remboursement des frais causés par son activité profession-

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»ielle et se fût engagée à lui payer ua salaire minimum. Autrement 'dit, une maison de commerce n'aurait plus eu la possibilité d'emjsloyer des voyageurs touchant uniquement une provision.

Apres examen de la question, nous sommes arrivés à la eonvie,tion qu'une semblable disposition ne pouvait trouver, place dans une loi fondée sur l'article 34*«* de la constitution fédérale, qui autorise le Conseil fédéral à légiférer dans le domaine des arts et métiers.

.D'ailleurs, la revision de la loi actuelle sur les taxes de patente a pour point de départ le « postulat » Ming; or, la disposition proposée n'est pas conciliable avec l'objet de ce « postulat ». Ajoutons que la proposition dont il s'agit n'a pas été combattue seulement dans des milieux commerciaux et industriels; dans le monde des voyageurs ·de commerce eux-mêmes, on a fait observer à bon droit que des dispositions d'ordre social ne devaient pas figurer dans une loi dont le but principal est d'assurer la protection des acheteurs.

ïïarticle 5 vise les voyageurs en gros et au détail de maisons ^établies à l'étranger. Aux termes de l'article 3 de la loi de 1892, ces voyageurs peuvent rechercher des commandes dans le pays, aux mêmes conditions que les voyageurs de maisons établies en Suisse, si un accord conclu entre la Suisse et l'Etat où la firme étrangère est domiciliée le stipule expressément. A défaut d'une telle stipulation, le "voyageur doit acquitter des taxes spéciales (article 3, 2e alinéa, de la loi de 1892). En outre, le Conseil fédéral a le droit de prendre des mesures de rétorsion contre les voyageurs de commerce de maisons 'établies dans des Etats qui interdisent aux voyageurs de maisons : suisses de rechercher des commandes ou ene le leur permettent qu'à ·des conditions très onéreuses (article 3, 4 alinéa, de l'ancienne loi).

L'article 5, 1er alinéa, in fine, prévoit que les voyageurs en gros de maisons établies à l'étranger peuvent, le cas échéant, être dispensés de se procurer une carte gratuite suisse; cette disposition répond à la nouvelle pratique découlant de l'introduction de la carte 'dite « de la Société des Nations », dont la teneur est fixée par la convention internationale sur la simplification des formalités douanières, signée à Genève, le 3 novembre 1923 et ratifiée par la Suisse le '7 décembre 1926. Cette carte
autorise le titulaire à rechercher des commandes dans tous les Etats dont elle porte l'indication. Les Etats parties à la convention sont de plus en plus portés à assimiler la ·earte dont il s'agit à la légitimation nationale qu'ils remettent ;aux voyageurs en gros de maisons indigènes et, dès lors, à ne plus exiger des voyageurs en gros de maisons domiciliées à l'étranger la production d'une carte de légitimation spéciale établie par une autorité du pays dans lequel ils recueillent des commandes. En Suisse ·également, les offices chargés de la délivrance des cartes de légiti-

73

mation des voyageurs de commerce ont reçu pour instructions de ne plus remettre, dès le 1er janvier, 1928, de cartes gratuites aux voyageurs en gros de maisons domiciliées à l'étranger, lorsqu'ils sont titulaires d'un certificat de légitimation industrielle établi danser le pays où la maison qu'ils représentent a son siège. Depuis le 1 janvier 1928, il suffit que ces voyageurs soient porteurs de la carte internationale, considérée comme une légitimation suffisante. De même, le voyageur, de commerce en gros d'une maison ressortissant à un Etat qui n'a pas encore adhéré à la convention de 1923 n'est plus tenu de se procurer une carte gratuite, s'il possède déjà un certificat de légitimation industrielle valable.

Le texte du projet, tout en maintenant pour les voyageurs en gros de maisons établies à l'étranger l'obligation de se procurer une carte gratuite, permet les facilités prévues par la convention internationale pour Ja simplification des formalités douanières.

Quant au régime à appliquer aux voyageurs au détail de maisons établies à. l'étranger, tous les Etats tendent, depuis un certain temps, à se réserver une autonomie complète et évitent de prendre à ce sujet aucun engagement international. Les voyageurs au détail sont donc assimilés aux colporteurs. La Suisse s'est refusée à prendre sur; ce point un engagement quelconque dans les derniers traités de commerce qu'elle a conclus; elle persistera dans cette attitude. A cet égard, nous sommes d'accord aussi bien a,vec les consommateurs qu'avec les groupements de voyageurs de commerce; nous espérons pouvoir mettre fin peu à peu, dans notre pays, à l'activité des voyageurs au détail de maisons établies à l'étranger. Actuellement déjà, leur nombre est relativement minime. En 1927, on a enregistré dans notre pays 6937 voyageurs au détail de maisons, établies en Suisse et seulement 238 voyageurs au détail de maisons domiciliées à l'étranger.

L'élimination complète de ces derniers n'a pas été possible jusqu'ici, parce que certains traités de commerce remontant au siècle dernier contiennent des dispositions qui y mettent obstacle. L'article 5, 3e alinéa, tient compte de cette situation, mais nous espérons voir, disparaître procbainement tout engagement international en cette matière.

Les tableaux suivants renseignent sur le nombre des cartes de légitimation délivrées et sur le mouvement des voyageurs de commerce en Suisse durant l'année 1927 :

Feuille fédérale. 81e année. Vol. I.

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A. D'après le nombre des cartes délivrées : Cartes gratuites délivrées à des maisons suisses . . 35,805 Cartes gratuites délivrées à des maisons étrangères . 2,580 Cartes payantes délivrées à des maisons suisses (dont 1003 cartes semestrielles) Cartes payantes délivrées à des maisons étrangères (dont 134 cartes semestrielles) Nombre des cartes gratuites 38,385 Nombre des cartes payantes .

Cartes délivrées à des maisons suisses 41,983 Cartes délivrées à des maisons étrangères 2,818 Total des cartes de légitimation délivrées 44,801

6,178 238 6,416

B. D'après le nombre des voyageurs et la nationalité des maisons représentées : Voyageurs de maisons suisses munis de cartes gratuites 35,805 Voyageurs de maisons étrangères munis de cartes gratuites 2,580 Voyageurs de maisons suisses munis de cartes payantes (dont 759 étaient exonérés du paiement de la taxe, chacun d'eux figurant avec un autre voyageur sur une carte dite « collective ») 6,937 Voyageurs de maisons étrangères munis de cartes payantes 238 Nombre des voyageurs en gros 38,385 Nombre des voyageurs au détail 7,175 Nombre des voyageurs de maisons suisses . .

42,742 Nombre des voyageurs de maisons étrangères .

2,818 Nombre total des voyageurs 45,560 Les 2818 voyageurs étrangers se répartissent entre les pays suivants : Allemagne, 1341 ; Autriche, 130; Belgique, 42; Chine, 1; Espagne, 3; France, 1029; Grande-Bretagne, 64; Hongrie, 4; Italie, 164; Luxembourg, 2; Pays-Bas, 17; Koumanie, 1; Suède, 2; Tchécoslovaquie, 18.

En 1927, 238 cartes payantes ont été délivrées à des voyageurs représentant des maisons étrangères. De ces voyageurs au détail, 90 voyageaient pour des maisons établies en Allemagne, 12 en Autriche, 3 en Belgique, 95 en France, 32 en Grande-Bretagne et 6 en Italie.

Article 6. -- Dans nos observations relatives à l'article 3, nous avons déjà parlé du changement apporté à la durée de validité des cartes de légitimation, en conformité des dispositions sur la nouvelle

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carte, de légitimation industrielle internationale. Cette modification permettra au titulaire d'utiliser sa carte pendant douze mois, quelle que soit la date à laquelle elle aura été délivrée.

ii'article 7 autorise l'autorité administrative à retirer en tout temps la carte de légitimation, lorsque les conditions auxquelles les articles 4 et 5 du projet subordonnent la délivrance d'une carte ne peuvent plus être considérées comme remplies. Cette disposition doit empêcher le voyageur., de continuer à recueillir des commandes pour, le compte d'une maison qui a été radiée du registre du commerce durant la validité de la carte. En outre, les voyageurs au détail qui ne possèdent pas de permis de séjour, ceux qui :ont été condamnés à l'emprisonnement, après avoir obtenu la carte payante, ou ceux dont la maison a été condamnée pour avoir usé. de procédés commerciaux déloyaux n'auront plus le droit de rechercher des commandes pendant le temps pour lequel leur carte eût encore été valable. Si le retrait ordonné dans les circonstances exposées ci-dessus devait priver injustement un voyageur au détail de: l'usage de sa carte ou si une restitution partielle de la taxe payée paraissait équitable, cette restitution pourrait être accordée, conformément à l'article 18, 2e alinéa, après examen de chaque cas d'espèce.

ii'article 8 dispose que les voyageurs de commerce peuvent, comme auparavant, avoir avec eux des échantillons, mais non pas des marchandises destinées à la vente. Le Conseil fédéral peut cependant autoriser des exceptions à cette règle lorsque la remise immédiate de la marchandise vendue s'impose dans le genre de commerce pratiqué par le vendeur1. Ces dérogations ne sont toutefois applicables qu'en faveur des voyageurs en gros; quiconque, en allant visiter les particuliers, emporte des marchandises avec soi et les livre à l'acheteur, doit être considéré dans tous les cas comme un colporteur et est soumis aux dispositions cantonales qui régissent le colportage. Sous le régime de l'article premier, de l'ancienne loi, les voyageurs en gros étaient habituellement autorisés à avoir avec eux et à remettre directement à l'acheteur des montres, des objets en métaux précieux, des pierres précieuses, des coupons d'étoffe et certains articles de mode (modèles de chapeaux, fleurs artificielles, etc.).

Article 9. --
Cet article innove en ce qu'il permet au Conseil fédéral ff interdir e aux voyageurs au détail la recherche de commandes de marchandises dont l'offre et la livraison peuvent très facilement donner lieu à des abus dans le commerce pratiqué par. l'intermédiaire de voyageurs. Kentrent en particulier dans cette catégorie de marchandises les montres, les articles en métaux précieux et en imitation, les pierres précieuses et les perles et leurs imitations, les lunettes et autres instruments d'optique, ainsi que les titr.es. La qua-

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lite et la valeur de ces articles ne peuvent pas être appréciées exactement par la clientèle particulière. Ces restrictions à l'activité des voyageurs sont conformes au « postulat » Ming et à un voeu très souvent exprimé. Nombre d'intéressés désiraient que l'on allât plus loin encore, en interdisant au voyageur, au détail de prendre des commandes de certaines denrées alimentaires, telles que le sucre, le cacao, le thé, le café, le vin1 de Malaga, le cognac, les huiles, le beurre et le fromage, ainsi que des commandes de semences et de fourrage à livrer aux agriculteurs, ou en exigeant pour ces marchandises des garanties de qualité. On se plaignait surtout de la manière dont le commerce du sucre, du café et du cognac est pratiqué par certaines maisons et leurs agents, de préférence dans les régions écartées, où des contestations ont été souvent causées par l'insistance et la faconde des voyageurs et par l'exécution frauduleuse des commandes obtenues. Outre le contrôle prévu par la législation sur les denrées alimentaires et les dispositions pénales du projet qui répriment plus sévèrement qu'auparavant les infractions à la loi, l'article 4 offre une certaine protection contre l'envahissement et les agissements des voyageurs de ces maisons. Dans ces conditions, nous avons cru pouvoir renoncer à interdire la recherche de commandes de denrées alimentaires.

^L'article 10 exempte, comme le fait déjà l'article 6 de l'ancienne loi, les voiyagenTS de -commerce de toute taxe cantonale et commiMale.

Article 11. -- Nous avons déjà tr.aité, en commentant l'article 4, de l'interdiction énoncée à l'article tl, de conclure des conventions spéciales sur le for judiciaire.

ïi'article 12 règle la confection de la carte de légitimation et la répartition des recettes. .11 correspond à l'article 7 de l'ancienne loi.

Pour ce qui a trait aux recettes, que l'on veuille bien se reporter au commentaire de l'article 3.

Les articles 13 à 15 contiennent les dispositions pénales. Celles-ci sont très différentes, dans la forme comme au fond, des dispositions de la loi de 1892. Cette loi ne prévoit, pour toutes les contraventions, que la peine de l'amende, avec un maximum unique de 1000 francs.

Le présent projet pefMet de frapper les infractions de trois sanctions différentes qui, selon l'appréciation du juge, peuvent être
l'emprisonnement, l'amende ou ces deux peines cumulées- II y a lieu de signaler aussi la sanction prévue pour, divers actes (articles 13,14 c, 14 d et 15 6), qui n'étaient pas expressément réprimés jusqu'ici, ainsi que la faculté de retirer ou de refuser la carte de légitimation, dans des cas déterminés, dès la première condamnation déjà, c'est-à-dire sans qu'il faille, comme jusqu'ici, que l'accusé ait déjà été condamné une fois pour infraction aux dispositions légales régissant la matière. D'autre

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part, la nouvelle rédaction des dispositions pénales comble une lacune, en fournissant le moyen de punir des mêmes peines que celles applicables aux voyageurs les maisons de commerce qui incitent sciemment leurs représentants à contrevenir aux dispositions légales.

En outre, l'article 14, 3e alinéa, oblige le juge à prononcer, en même temps que l'amende, la condamnation au paiement de la taxe éludée.

Cette obligation n'existait pas dans l'ancienne loi.

Les divers articles relatifs aux dispositions pénales donnent lieu aux observations suivantes : ii'article 13 réprime les délits graves : l'obtention d'une carte de légitimation par des manoeuvres frauduleuses et l'altération ou l'emploi d'une carte modifiée dans 'an dessein frauduleux. A titre de sanction accessoire obligatoire, l'article 13 prévoit, outre la prison et l'amende cumulées, au l'une ou l'autre de ces deux peines, le retrait de la carte de légitimation. De plus, le condamné peut être privé, pour un certain temps, du droit de prendre des commandes sur tout le territoire de la Confédération.

Uarticle 14 frappe de l'amende, mais de l'amende seulement, le voyageur convaincu d'avoir recherché des commandes auprès de particuliers sans s'être procuré une carte payante. De même, les malsons qui font rechercher de telles commandes par des personnes auxquelles elles n'ont pas procuré ladite carte sont punissables de l'amer de. Celle-ci sera aussi appliquée aux voyageurs en gros qui ont avec eux des marchandises destinées à la ventee sans être en possession de l'autorisation requise par l'article 8, 2 alinéa. (Les personnes qui visitent des particuliers et ont avec elles des marchandises destinées à la vente sont des colporteurs et sont soumises, comme tels, aux dispositions pénales que les cantons ont édictées en la matière). Sont également punissables de l'amende les voyageurs au détail qui offriront aux particuliers des marchandises dont il sera interdit de rechercher des commandes, conformément à l'article 9. Enfin, le nouvel article 14 frappe de l'amende celui qui transfère de son propre chef une carte de légitimation à une personne dont le nom ne figure pas sur celle-ci.

Dans les cas qu'il vise, l'article 14 donne, lui aussi, la faculté au juge d'ordonner le retrait immédiat de la carte. En revanche, le retrait de la carte pour un laps
de temps déterminé et le maximum de l'amende de 2000 francs, ne peuvent être prononcés qu'en cas de récidive.

lïartiele 15 ne réprime que les contraventions légères, qui ne peuvent être considérées comme des délits proprement dits. Leurs auteurs n'encourent que des peines minimes.

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ii'article 16 a trait à la procédure. Pour que l'on puisse toujours savoir si un voyageur de 'Commerce a déjà été condamné (art. 4 c et 14, 2e alinéa), il est indispensable que toutes les condamnations prononcées à la suite d'infractions à la présente loi soient annoncées au bureau fédéral de la police centrale.

TJarticle 17 correspond à l'article 9 de la loi die 1892.

L'article 18 charge le Conseil fédéral de pourvoir à l'exécution de la loi et l'autorise à décider, en cas de doute et dans la mesure où la question n'est pas réglée par l'article 2, si certains cas de recherche de commandes ou certains articles offerts tombent ou non sous l'application de la loi. L'alinéa 2 permet en outre au Conseil fédéral de prononcer, dans des cas exceptionnels et si cela paraît manifestement opportun pour éviter de trop grandes rigueurs, la restitution toltale ou partielle d'une taxe payée ou la dispense de payer une taxe diue. Une telle mesure de clémence s'imposera souvent; mais, comine elle doit s'inspirer de principes uniformes, la décision ne peut être laissée aux autorités cantonales.

Les articles 19 et 20 concernent l'abrogation de l'ancienne loi, ainsi que la publication et la date d'entrée en vigueur de la loi nouvelle.

Bien que le projet de loi ne tienne pas compte de toutes les -demandes présentées par les intéressés, nous sommes convaincus que son adoption marquera un véritable progrès. C'est ainsi qu'il indique d'une façon plus précise dans quels cas la taxe doit être acquittée ou ne doit pas l'être; il empêche, en principe, les voyageurs au détail de maisons établies à l'étranger de rechercher des commandes en Suisse et, ce qui nous paraît être le point le plus important, il subordonne la délivrance die la carte de légitimation des voyageurs au détail de maisons suisses à des conditions propres à éloigner1 de la profession les éléments indésirables et à garantir ainsi à l'acheteur une meilleure protection.

En vous recommandant l'adoption du projet de loi fédérale cijoint, nous vous présentons, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 11 janvier 1929.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le '[»resident de la Confédération, Dr HAAB.

Le chancelier · de la Confédération, KAESLIN.

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(Projet)

LOI FÉDÉRALE sur

les voyageurs de commerce.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE, vu l'article 34ter de la constitution fédérale; vu le message du Conseil fédéral du 11 janvier 1929, arrête: Article premier.

Toute personne qui, en qualité de ohef, d'employé ou de représentant d'une exploitation industrielle ou commerciale, recherche des commandes de marchandises, est considérée comme voyag-eur de commerce au sens de la présente loi et tenue, pour exercer cette activité, de justifier de la possession d'une carte de légitimation.

Article 2.

La présente loi est également applicable: a. à la recherche de commandes de boissons distillées (spiritueux, liqueurs, etc.) dans le commerce de gros, en conformité de l'article 17 de la loi fédérale sur l'alcool, du 29 juin 1900; o. aux expositions d'échantillons ou de modèles où l'on accepte des commandes, sans toutefois livrer de marchandises; c. à la recherche ou à la prise de commandes de travail dont l'exécution emporte une livraison de matériel.

Par contre, la présente loi n'est pas applicable: a. à la recherche, par les cultivateurs, de commandes concernant les produits de leur exploitation agricole; 6. à la recherche, sur le territoire d'une commune, de commandes pour le compte d'une entreprise qui, établie dans cette même communie, y est inscrite au registre du commerce ou, à défaut, y possède un centre fixe d'activité consistant soit en un local de production, soit en un magasin de vente; .c. à l'acceptation de commandes dont le client lui-même a pris Finitiative.

80

Article 3.

Aucune taxe ne sera perçue pour la carte de légitimation des voyageurs de commerce qui entrent en relations d'affaires uniquement avec des exploitants pratiquant la revente des marchandises de l'espèce offerte ou employant celles-ci d'une manière quelconque dans l'exercice de leur profession (voyageurs en gros). Sont assimilés à ces exploitants les entreprises, administrations et établissements de tout genre, privés ou publics, employant les marchandises de l'espèce offerte dans l'exercice de l'activité qui leur est propre, ainsi que les cultivateurs employant dans leur exploitation agricole les articles offerts.

Une taxe annuelle de deux cents francs sera perçue pour la carte de légitimation de tous les autres voyageurs de commerce (voyageurs au détail).

Article 4.

La carte de légitimation pour voyageurs d'une maison suisse ne sera délivrée que si cette dernière est inscrite au registre du commerce.

La carte de légitimation de voyageur au détail (carte payante) me sera delivr.ee que si le voyageur : a. possède un permis d'établissement ou de séjour; 6. justifie d'une bonne réputation; c. n'a été condamné à aucune peine infamante privative de liberté durant les trois années qui ont précédé le jour où a été sollicitée la délivrance de la carte. S'il a subi une peine, le délai de trois ans court du jour de l'élargissement.

La carte payante sera refusée, si le voyageur représente une maison convaincue, par un jugement exécutoire rendu au GOUTS des trois années qui ont précédé le jour de la demande, d'avoir porté préjudice à sa clientèle par des procédés commerciaux déloyaux.

Article 5.

.

e Sous réserve des dispositions du 2 alinéa du présent article, la carte de légitimation, pour voyageurs en gros de maisons étrangères sera délivrée gratuitement, moyennant production d'un certificat (carte de légitimation industrielle) dressé par les autorités compétentes du pays intéressé et attestant que la maison est autorisée à y pratiquer- son commerce ou son industrie, et à condition que, dans ce pays, les voyageurs des maisons établies en Suisse soient traités comme les voyageurs des maisons indigènes ou ressortissantes au pays le plus favorisé. En application d'accords internationaux, les voyageurs en gros de maisons étrangères pourront être dispensés de la carte de. légitimation suisse.

8t

Le Conseil fédéral peut interdire ou assujettir à une taxe spéciale la délivrance de la carte de légitimation pour voyageurs en gros de maisons ressortissantes aux Etats qui défendent aux voyageurs en gros de maisons suisses de rechercher des commandes ou ne les y autorisent qu'à des conditions onéreuses.

La carte de légitimation pour voyageurs au détail de maisons étrangères ne sera délivrée qu'en vertu d'un engagement international et sur présentation du certificat de légitimation industrielle mentionné au premier alinéa du présent article. Sont applicables par analogie lès dispositions et taxes auxquelles sont assujettis les voyageurs au détail de maisons suisses; toutefois, le certificat de légitimation industrielle tiendra lieu de permis d'établissement ou de séjour et de certificat de bonnes moeurs. Demeurent réservées les prescriptions sur la police des étrangers.

Article 6.

La carte de légitimation est valable une année à compter dm jour où elle a été établie.

Article 7.

La carte de légitimation peut être retirée par l'office qui l'a délivrée, lorsque surviennent des faits qui en auraient justifié le refus (art. 4 et 5).

Article 8.

Le voyageur de commerce peut avoir avec soi des échantillons, jnais non des marchandises destinées à la vente. Sont assimilés aux marchandises destinées à la vente les articles qui se trouvent dans un dépôt non permanent et sont livrés immédiatement après la prise de commande.

A titre exceptionnel, le Conseil fédéral peut permettre qu'un voyageur de commerce en gros ait des marchandises avec soi, si le genre d'entreprise du vendeur exige la remise immédiate de la marchandise à l'acheteur.

Artici« 9.

Le Conseil fédéral a le droit d'interdire aux voyageurs au détail de rechercher des commandes de marchandises dont l'offre et la livraison peuvent très facilement donner lieu à des abus dans le commerce pratiqué par l'intermédiaire de voyageurs.

Article 10.

Le titulaire d'ime carte de légitimation est exempté de toute taxe cantonale ou communale qui frapperait la prise de commande.-

82

Article 11.

Est nulle toute convention conclue, à l'occasion de la recherche de commandes, entre un voyageur au détail et une personne non inscrite au registre dfu commerce, par laquelle l'acheteur renonce à son for ordinaire. Cette nullité sera constatée d'office.

Article 12.

Les cartes de légitimation sont confectionnées par les soins de la Confédération, mais aux frais des cantons, d'après un modèle uniforme.

A la fin de chaque année, les recettes provenant de la délivrance des cartes de légitimation seront versées à la caisse fédérale, sous déduction d'an droit de perception de quatre pour cent au profit des cantons. Après prélèvement du montani; des frais d'administration que M occasionnera l'exécution de la présente loi, la Confédération répartira le solde des recettes entre les cantons au prorata du chiffre de leur population résidente.

Article 13.

Sera puni de l'emprisonnement jusqu'à trois mois et de l'amende jusqu'à mille francs ou de l'une ou l'autre de ces peines: a. celui qui aura fait de fausses déclarations en vue d'obtenir une carte de légitimation; b. celui qui aura modifié de son propre chef la teneur d'une carte de légitimation ou se sera servi d'une carte ainsi modifiée.

La carte de légitimation sera retirée au condamné; il pourra en outre être déclaré déchu, pour une période de un à cinq ans, du droit d'obtenir une nouvelle carte.

Article 14.

Sera puni de l?amende jusqu'à mille, francs: «. celui qui, sans s'être procuré la carte payante, aura recherché ou fait rechercher des commandes auprès de clients autres que ceux mentionnés à l'article 3, 1er alinéa; o. celui qui, sans y avoir été autorisé conformément à l'article 8, aura eu avec soi, en qualité de voyageur de commerce en gros, des marchandises destinées à la vente; c. celui qui aura recherché ou fait rechercher auprès de clients autres que ceux mentionnés à l'article 3, 1er alinéa, des commandes de marchandises qui, en exécution de l'article 9, ne peuvent faire l'objet d'une prise de commande; d. celui qui aura remis une carte de légitimation établie à son nom à une tierce personne pour qu'elle en fasse usage.

83

En outre, la carte de légitimation pourra être retirée au condamné. Si, au cours des cinq années qui ont précédé la contravention, 1« contrevenant a été condamné pour infraction aux articles 13 ou 14 de la présente loi ou à l'article 8 de la loi fédérale du 24 juin 1892 concernant les taxes de patente des voyageurs de commerce, l'amende pourra être doublée et le condamné déclaré déchu, pour une période dé un. à cinq ans, du droit d'ob'tenir unie nouvelle carte.

En règle générale, le contrevenant sera condamné à acquitter, outre l'amende qui lui est infligée, la taxe au paiement de laquelle il s'est soustrait.

Article 15.

Sera puni d'une amende de cinq à cinquante francs: a. tout voyageur en gros qui aura recherché des commandes sans s'être procuré la carte de légitimation requise; &. tout voyageur qui, dans l'exercice de sa profession, n'aura pas porté sa carte sur lui.

Article 16.

La poursuite et le jugement des contraventions à la présente loi incombent aux cantons.

Les condamnations pour contraventions seront communiquées au bureau fédéral du registre central des casiers judiciaires.

Sont applicables. les dispositions générales du code pénal fédéral, du 4 février 1853.

Article 17.

La présente loi ne s'applique pas aux professions ambulantes (colportage, déballage, etc.).

Article 18.

Le Conseil fédéral, prendra les dispositions nécessaires à l'exécution de la présente loi. Dans le doute, il décidera notamment si la présente loi est applicable ou non à des cas de recherche de commandes autres que ceux énumérés à l'article 2 ou à certains articles qui font l'objet de recherche de commandes.

Lorsque des circonstances extraordinaires le justifient, le Conseil fédéral est autorisé à ordonner le remboursement total ou partiel d'une taxe déjà payée ou la remise d'une taxe dont le paiement a été éludé.

84

Article 19.

Là presente loi abroge la loi federale du 24 juin 1892 concernant les taxes de patente des voyageurs de commerce.

Article 20.

Le Conseil fédéral est chargé, conformément aux dispositions de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sue les lois et arrêtés fédéraux, de publier la présente loi et de fixer la date de son entrée en vigueur.

# S T #

Extrait des délibérations du Conseil fédéral (Du 7 janvier 1929.)

Le Conseil fédéral a approuvé l'ordonnance du canton de Soleure du 11 décembre 1928 concernant l'exercice de la police de la chasse par les gardes-chasse.

(Du 8 janvier 1929.)

Le Conseil fédéral a alloué les subventions suivantes : 1. au canton de Zurich : a. 30 pour cent des frais de travaux de défense contre les glissements de terrain et de consolidation! sur le territoire de la commune de Fischenthal, district de Hinwil (devis : 215,700 fr;. max. : 64,710 fr.); · b. 15 pour cent des frais de construction d'un bâtiment rural: dans la zone d'améliorations foncières de Rudolfingen, commune de Trüllikon (devis: 60,000 fr.; maximum : 9000 fr.); 2. au canton des Grisons, 75 pour cent des frais de travaux de défense contre les avalanches et de reboisement au Mattelti, commune de Peist (devis : 23,000 fr.; maximum : 14,950 fr.); 3. au canton du Tessin : a. 35 pour cent des frais de construction de deux conduites d'eau sur les pâturages de « Crée » et de « Selva », commune de Breno (devis : 5900 fr.; maximum. : 2065 fr.); b. 30 pour cent des frais de construction d'une étable avec chalet « sul monte di Valle » s/Altanca, commune de Quinto (devis : 9800 fr. ; maximum : 2940 fr.) ;

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale à l'appui d'un projet de loi fédérale sur les voyageurs de commerce. (Du 11 janvier 1929.)

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1929

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2409

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16.02.1929

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