ad 01.451 Initiative parlementaire Extraction de pierre naturelle et Limpmin Rapport du 22 novembre 2005 de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national Avis du Conseil fédéral du 15 février 2006

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 112, al. 3, de la loi sur le parlement, nous exprimons ci-dessous notre avis sur le rapport du 22 novembre 2005 de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national concernant l'initiative parlementaire «Extraction de pierre naturelle et Limpmin».

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 février 2006

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2006-0014

2403

Avis 1

Contexte

Dans son initiative du 4 octobre 2001, le conseiller national Meinrado Robbiani réclame que le remboursement de la surtaxe sur les huiles minérales soit octroyé aux entreprises actives dans le domaine de l'extraction de pierre naturelle. Le 20 juin 2003, le Conseil national a donné suite à cette initiative par 123 voix contre 31. La Commission des transports et des télécommunications a alors élaboré un projet d'acte législatif et de rapport; elle a adopté le rapport définitif à l'intention du Conseil national lors de sa séance du 22 novembre 2005.

2

Evaluation de la proposition de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national

Pour les carburants destinés à la propulsion de moteurs, la Confédération perçoit un impôt à la consommation composé de l'impôt sur les huiles minérales et de la surtaxe sur les huiles minérales. Aux termes de l'art. 17, al. 3, de la loi sur l'imposition des huiles minérales (RS 641.61), les carburants utilisés par les entreprises de transport concessionnaires de la Confédération sont exonérés de l'impôt totalement ou en partie. L'art. 18, al. 2, dispose que la surtaxe sur les huiles minérales est remboursée lorsque le carburant a été utilisé dans l'agriculture, la sylviculture ou la pêche professionnelle. L'auteur de l'initiative réclame les mêmes allégements pour l'extraction de pierre naturelle et propose l'adaptation de l'article de loi correspondant.

L'initiative serait exécutée par analogie avec les autres remboursements d'impôt prévus dans la loi sur l'imposition des huiles minérales. C'est l'entreprise d'extraction de pierre naturelle qui aurait droit au remboursement. Elle devrait prouver les quantités de carburants utilisées à des fins bénéficiant de l'allégement et tenir à cet effet des contrôles de consommation.

En cas d'introduction du remboursement de l'impôt pour les carburants utilisés dans le cadre de l'extraction de pierre naturelle, il faudrait compter avec une perte fiscale de l'ordre de 5 millions de francs par année. Il faudrait consacrer un demi-poste à la charge administrative qui en résulterait.

L'auteur de l'initiative relève qu'il ne s'agit pas d'un nouvel allégement fiscal, mais bien de la réintroduction de celui dont le Parlement a décidé la suppression en 1993.

Un allégement était naguère accordé, sous le régime douanier, pour l'huile diesel servant à la propulsion de machines de chantier et de moteurs stationnaires; cet allégement, qui s'appliquait également à l'extraction de pierre naturelle, a été supprimé avec effet au 1er avril 1994 dans le cadre de l'assainissement des finances fédérales. Au cours des débats de 1996 relatifs à la loi sur l'imposition des huiles minérales, le Parlement a refusé la réintroduction des allégements qui venaient d'être supprimés.

Dans le cadre du message concernant le programme d'allégement budgétaire 2004, le Conseil fédéral a proposé la suppression du remboursement de l'impôt sur les huiles minérales pour les branches susmentionnées et les entreprises de transport 2404

concessionnaires. Même si le Parlement a par la suite rejeté cette suppression, une extension du remboursement au domaine de l'extraction de pierre naturelle ne semble pas opportune. Cette nouvelle mesure pourrait en outre avoir un effet préjudiciel sur d'autres domaines.

L'art. 7, let. g, de la loi sur les subventions (RS 616.1) dispose que l'on renonce en principe aux aides sous forme d'allégements fiscaux. Pour des raisons financières et juridiques et dans l'intérêt de la transparence, ce genre de subventions cachées doit en principe être rejeté.

Aux termes de l'accord de libre-échange Suisse-CE de 1972 (RS 0.632.401), dont les dispositions s'appliquent aux produits de l'extraction de la pierre naturelle, l'allégement fiscal accordé à ces exploitations pourrait être contraire aux engagements qui résultent de cet accord pour la Suisse. L'art. 18 de l'accord interdit aux parties contractantes toute mesure ou pratique de nature fiscale interne établissant directement ou indirectement une discrimination entre les produits d'une partie contractante et les produits similaires originaires de l'autre partie contractante. En outre, l'art. 23, al. 1, ch. iii) de cet accord dispose que, dans la mesure où elle est susceptible d'affecter les échanges entre la Communauté et la Suisse, toute aide publique faussant ou menaçant de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions est incompatible avec le bon fonctionnement de l'accord. A cela s'ajoute le fait que l'UE n'accorde aucun allégement pour les carburants qui sont utilisés pour l'extraction de pierre naturelle.

Selon les critères de l'accord OMC, cette mesure devrait être considérée comme une subvention pouvant donner lieu à une action. En d'autres termes, si cette subvention devait porter préjudice à un membre de l'OMC, le remboursement de l'impôt sur les huiles minérales pourrait faire l'objet d'une action dans le cadre de cette organisation.

Sur le plan économique, les arguments en défaveur du remboursement prédominent.

Le rapport met certes en évidence le déclin de l'extraction de pierre naturelle au niveau suisse et la concentration de la branche dans les régions périphériques, mais aussi le dynamisme de ces régions, à l'exemple du Tessin et des Grisons, qui sont les plus compétitives de la branche. Après une
importante restructuration entre 1995 et 1998, la branche a même généré de nouvelles entreprises (+ 6) et de nouveaux emplois (+ 125) au Tessin. Comme le remboursement (5 millions de francs par an) ne représenterait que 1,6 % du chiffre d'affaires annuel (309,2 millions de francs en 2001) et 66 000 francs en moyenne par entreprise (76), son impact serait dans le meilleur des cas modéré et dépendrait fondamentalement des entrepreneurs euxmêmes. Pour que cette légère baisse des coûts de production se concrétise en un gain de compétitivité, il faudrait en effet que les entreprises la répercutent sur les prix de vente. Afin de réaliser le faible potentiel du remboursement en terme d'emplois, il faudrait encore que les entrepreneurs de la branche soient également sensibles aux arguments sociaux, ce qui à première vue n'est pas assuré. Vu son importance modeste pour la branche, le remboursement de l'impôt sur les huiles minérales ne permettrait pas d'améliorer simultanément la compétitivité et l'emploi.

3

Avis du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral propose de renoncer au remboursement de la surtaxe sur les huiles minérales pour l'extraction de pierre naturelle.

2405

2406