06.014 Message concernant les accords avec l'Albanie et la Macédoine sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité du 1er février 2006

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, deux projets d'arrêtés fédéraux portant approbation des deux accords bilatéraux signés par la Suisse: ­

Accord du 20 septembre 2005 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil des ministres de la République d'Albanie sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité;

­

Accord du 21 septembre 2005 entre le Conseil fédéral suisse et la République de Macédoine sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

1er février 2006

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération: Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération: Annemarie Huber-Hotz

2005-1968

2127

Condensé Les menaces qui pèsent sur la Suisse ne dépendent pas uniquement de facteurs intérieurs, mais sont de plus en plus étroitement liées au contexte international. La lutte contre la criminalité internationale ne portera ses fruits que si elle est menée aussi au niveau international. Pour combattre ces menaces, la Suisse est donc tenue de coopérer avec ses partenaires étrangers.

Outre la coopération internationale mise en place dans le cadre d'Interpol et les efforts déployés au niveau européen avec Schengen, Europol et Eurojust, la coopération bilatérale est un pilier de la coopération policière internationale de la Suisse.

Des accords de coopération bilatéraux existent d'ores et déjà avec les Etats voisins et la Hongrie. D'autres traités ont été signés avec la Slovénie, la Lettonie, la République tchèque et la Roumanie. Les deux accords avec la République d'Albanie et la République de Macédoine renforcent la coopération à l'échelon bilatéral avec deux Etats de l'Europe du Sud-Est, région importante pour la sécurité intérieure de la Suisse.

L'accord avec l'Albanie a été négocié au cours de deux rencontres qui ont eu lieu au second semestre 200,4 et l'accord avec la Macédoine au cours d'une rencontre tenue au début de 2005. Par ailleurs, dans la perspective du stationnement d'un attaché de police suisse à Skopje, un échange de notes a été conclu avec la Macédoine dans le but d'établir les bases légales de ce stationnement. Les deux accords ont été approuvés le 10 juin 2005 par le Conseil fédéral et signés par le conseiller fédéral Christoph Blocher le 20 septembre 2005 à Skopje pour la Macédoine, et le 21 septembre 2005 à Tirana pour l'Albanie.

Les deux accords règlent la collaboration transfrontalière entre les autorités de police compétentes en vertu de leur droit national dans les domaines de l'échange d'informations, de la coordination des engagements opérationnels, de la création de groupes de travail communs, de la formation et du perfectionnement, dans le strict respect de la protection des données. Ils ont pour but premier la lutte contre la grande criminalité, mais sont applicables à toutes les sortes de criminalité. En est explicitement exclue la coopération policière en matière de délits politiques, militaires et fiscaux.

Ces accords ne portent pas atteinte au partage des
compétences entre les autorités de justice et de police. La répartition des compétences entre la Confédération et les cantons, de même que celle entre ces derniers ne sont pas affectées. Ces accords peuvent être mis en oeuvre avec les moyens existants.

2128

Table des matières Condensé

2128

1 Partie générale 1.1 Contexte 1.2 Déroulement des négociations

2130 2130 2131

2 Partie spéciale 2.1 Systématique 2.2 Commentaires des dispositions 2.2.1 Titre I Objet de l'Accord 2.2.2 Titre II: Champ d'application 2.2.3 Titre III: Domaines de coopération et procédure 2.2.4 Titre IV: Attachés de police 2.2.5 Titre V: Protection des données et remise à des tiers 2.2.6 Titre VI: Dispositions finales

2132 2132 2132 2132 2133 2133 2136 2137 2139

3 Conséquences financières et répercussions sur l'effectif du personnel aux niveaux fédéral et cantonal 2140 4 Programme de la législature

2141

5 Relation avec le droit européen

2141

6 Constitutionnalité et conformité aux lois 6.1 Compétences de la Confédération 6.2 Référendum facultatif

2141 2141 2142

Arrêté fédéral portant approbation de l'Accord entre la Confédération suisse et la République d'Albanie sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité (Projet) 2143 Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil des ministres de la République d'Albanie sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité

2145

Arrêté fédéral portant approbation de l'Accord entre la Confédération suisse et la République de Macédoine sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité (Projet)

2155

Accord entre la Confédération suisse et la République de Macédoine sur la coopération policière en matière de lutte contre la criminalité

2157

2129

Message 1

Partie générale

1.1

Contexte

Les menaces qui pèsent sur la Suisse ne s'expliquent pas seulement par des facteurs propres à la Suisse. Elles sont aussi étroitement liées au contexte international. De nombreuses formes de criminalité, comme le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, la cybercriminalité ou le trafic de stupéfiants ont, typiquement, un caractère transfrontalier. Les acteurs de ces formes de criminalité sont censés agir par-delà les frontières. En général, la recherche de profits par le biais d'organisations criminelles présuppose aussi des contacts transfrontaliers. Or la Suisse doit coopérer étroitement avec les autorités de police étrangères si elle veut enrayer la criminalité transfrontalière. Par ailleurs, la coopération avec la Suisse est importante pour les autorités étrangères.

La coopération policière internationale repose aujourd'hui sur trois piliers. Le premier est la coopération multilatérale par le biais d'Interpol, qui regroupe aujourd'hui 184 membres. Cette coopération porte surtout sur l'échange d'informations policières et sur les avis de recherche internationaux. Interpol gère toutefois aussi ses propres banques de données et fournit à ses membres un soutien opérationnel, pour ce qui est notamment des techniques forensiques.

Le deuxième pilier est la coopération multilatérale avec les Etats européens.

L'association de la Suisse à Schengen/Dublin1 (prévue à partir de 2008) renforce, dans le domaine policier notamment, la coopération en matière de recherches transfrontalières au niveau européen. L'accord conclu avec Europol2, qui devrait entrer en vigueur au premier trimestre 2006, permettra en outre de renforcer la lutte contre les organisations criminelles grâce à l'échange d'informations et d'analyses relevant du domaine opérationnel. En outre, le Conseil Justice et Affaires Intérieures de l'Union européenne a, dans sa session d'octobre 2005, désigné la Suisse comme un des pays prioritaires pour la conclusion d'un accord avec Eurojust. Cet accord permettra d'améliorer l'efficacité de la coopération entre les autorités compétentes des Etats membres et de la Suisse en cas d'investigations en matière de crime organisé et de crimes transfrontaliers graves.

Enfin, le troisième pilier concerne la coopération policière bilatérale. Cette forme de coopération permet à la fois d'établir
des contacts directs avec un pays précis et d'adapter les accords aux besoins et aux possibilités de coopération. Des accords bilatéraux ont été conclus avec tous les Etats voisins (Allemagne3, Autriche/Principauté de Liechtenstein4, France5 et Italie6) et avec la Hongrie7. D'autres accords ont été signés avec la Slovénie, la Lettonie, la République tchèque et la

1 2 3 4 5 6 7

FF 2004 5593 FF 2005 895 RS 0.360.136.1 RS 0.360.163.1 RS 0.360.349.1 RS 0.360.454.1 RS 0.361.418.1

2130

Roumanie, tandis que de nouvelles démarches exploratoires dans la région de l'Europe de l'Est et du Sud-Est sont déjà menées.

L'Europe du Sud-Est est une zone importante du point de vue policier, car le crime organisé y demeure très présent8. La Suisse est souvent confrontée au trafic de stupéfiants, à la traite d'êtres humains et au trafic de migrants en tant que pays de destination. Dans d'autres catégories d'activités criminelles, elle constitue surtout un pays de transit. Les Albanais de souche, originaires notamment d'Albanie et de Macédoine, conservent une influence considérable sur l'évolution de la criminalité en Suisse. Organisés en réseaux flexibles, les groupes criminels de l'Europe du SudEst tendent actuellement à se diversifier. La Suisse demeurera affectée par leurs activités surtout en raison de l'attrait de sa place économique. Il s'agit donc d'approfondir davantage encore la coopération policière avec ces pays et de la soumettre à des règles de procédure et à des dispositions de protection des données claires.

1.2

Déroulement des négociations

Déroulement des négociations avec l'Albanie A l'initiative de la Suisse, des experts des deux pays se sont rencontrés les 17 et 18 mai 2004 à Tirana pour entamer des pourparlers exploratoires. A l'occasion de cette rencontre, les deux pays ont affirmé leur intérêt à conclure un accord bilatéral de coopération policière et sont convenus des domaines de coopération à réglementer. Sur la base d'un projet d'accord élaboré par la Suisse, des négociations ont eu lieu les 15 et 16 novembre 2004 à Berne. Elles ont abouti au paraphe de l'accord.

L'accord a été approuvé le 10 juin 2005 par le Conseil fédéral et signé par le conseiller fédéral Christoph Blocher et le ministre albanais de l'Intérieur Sikol Olldashi le 21 septembre 2005 à Tirana.

Déroulement des négociations avec la Macédoine Une délégation de haut rang de la police macédonienne a effectué une visite officielle en Suisse du 17 au 23 août 2003 dans le cadre du programme «Community Policing». Cette visite était placée sous la conduite de la Direction du développement et de la coopération. A l'occasion de cette rencontre, la Suisse a manifesté son intérêt à conclure un accord de coopération policière avec la Macédoine. Plusieurs échanges de lettres ont suivi, par lesquels la Macédoine a confirmé un intérêt similaire. La Suisse a ensuite soumis un projet d'accord, et les délégations des deux pays se sont rencontrées à Skopje les 21 et 22 février 2005 pour négocier l'accord. La Macédoine ne connaissant pas le paraphe d'accords, les résultats des négociations ont été consignés dans un protocole commun par les deux chefs de délégation.

L'accord a été approuvé le 10 juin 2005 par le Conseil fédéral et signé par le conseiller fédéral Christoph Blocher et le ministre macédonien de l'Intérieur Ljubomir Mihailovski le 20 septembre 2005 à Skopje.

8

Cf. Rapport sur la sécurité intérieure de la Suisse 2004 (Office fédéral de la police, DFJP, mai 2005).

2131

2

Partie spéciale

2.1

Systématique

Les deux accords ayant été établis en parallèle, ils sont commentés ensemble. On entend par accord aussi bien celui passé avec l'Albanie que celui conclu avec la Macédoine.

Dans le préambule, les parties confirment leur intérêt au renforcement de la coopération, en particulier dans le domaine de la grande criminalité. On fait ainsi référence implicitement à la coopération existante, notamment dans le domaine d'Interpol. Le préambule précise en outre que la coopération sera concrétisée dans le respect des droits et des devoirs des ressortissants des deux Etats contractants et qu'elle sera attentive aux engagements internationaux.

Le titre I de l'accord définit l'objet de celui-ci.

Le titre II fixe le champ d'application matériel, à savoir les formes d'activités criminelles sur lesquelles porte l'accord et le respect des dispositions légales nationales et internationales.

Le titre III règle les domaines de coopération, la responsabilité civile et pénale, les règles de procédure et les coûts. La coopération englobe en substance l'échange d'informations, la coordination des engagements opérationnels, la mise sur pied d'équipes communes, la formation et le perfectionnement.

Le titre IV autorise les parties contractantes à conclure des accords particuliers permettant le stationnement d'attachés de police.

Le titre V règle la protection des données, la protection des informations classifiées et la remise de ces informations à des tiers.

Le titre VI contient les dispositions finales et définit entre autres les autorités compétentes pour l'exécution de l'accord, la compétence de conclure des accords complémentaires sur la base de l'accord, ainsi que les modalités d'entrée en vigueur et de dénonciation.

2.2

Commentaires des dispositions

2.2.1

Titre I: Objet de l'Accord

Art. 1

Objet

L'accord a pour objectif de renforcer la coopération bilatérale entre les Parties contractantes dans la prévention et la détection des infractions et dans les enquêtes en la matière. La formulation choisie indique clairement que la coopération ne porte pas uniquement sur la répression, mais aussi sur la prévention de la criminalité, étant entendu que les tâches préventives relevant des services de renseignements et la coopération internationale y relative restent régies, en Suisse, par la loi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure9.

L'interprétation du terme «infraction» renvoie ici exclusivement au droit national 9

RS 120

2132

des parties contractantes; pour la Suisse, il s'agit des dispositions du code pénal (CP)10, du droit pénal accessoire et du droit pénal cantonal.

2.2.2 Art. 2

Titre II: Champ d'application Champ d'application

L'art. 2 règle le champ d'application matériel. Il prévoit une coopération dans tous les domaines de la criminalité. L'énumération des délits particulièrement graves que sont notamment le crime organisé, le terrorisme, la traite d'êtres humains, la pédocriminalité, la cybercriminalité ou la corruption indique clairement que la coopération sera axée sur la lutte contre ces infractions. Le par. 2 interdit expressément la coopération dans des affaires de nature politique, militaire et fiscale, ce qui permet de garantir entre autres que la Suisse ne devra pas communiquer d'informations en violation du secret bancaire.

Art. 3

Droit applicable

Aux termes de l'art. 3, la coopération se déroulera conformément à la législation nationale et dans les limites des engagements de droit international. Cela signifie que les prescriptions de procédure et de compétence du droit suisse devront être respectées lors de la mise en oeuvre opérationnelle de mesures. Il ne sera possible de dire que dans des cas concrets quels actes législatifs du droit suisse pertinents pour le domaine policier seront effectivement applicables. Le renvoi au droit national indique par exemple que des mesures coercitives (perquisitions domiciliaires, séquestres, surveillance téléphonique, etc.) pourront être ordonnées par la seule voie de l'entraide judiciaire.

Par ailleurs, la réserve en faveur des accords internationaux existants signifie que les accords ne dérogent en rien aux dispositions d'accords internationaux bilatéraux ou multilatéraux ratifiés par la Suisse, l'Albanie ou la Macédoine.

2.2.3 Art. 4

Titre III: Domaines de coopération et procédure Coopération en général

L'art. 4 énumère les quatre domaines de la coopération qui sont ensuite spécifiés dans l'accord. Ces domaines sont l'échange d'informations, la coordination d'engagements opérationnels, la création d'équipes communes, la formation et le perfectionnement.

Art. 5

Echange d'informations

L'art. 5 règle le soutien que se portent mutuellement les Parties contractantes en échangeant des données et du matériel à caractère personnel et non personnel.

10

RS 311.0

2133

L'échange de données personnelles, y compris les données personnelles sensibles conformément à l'art. 14, let. a, et de matériel à caractère personnel comprend par exemple la communication des données personnelles de particuliers ayant participé à des infractions, les renseignements sur des suspects, les informations sur le mode opératoire des criminels, les mesures prises ou les actes criminels planifiés. Cet échange d'informations à caractère personnel sert en premier lieu aux tâches opérationnelles de police.

L'échange de données et de matériel non personnels sert en premier lieu à l'analyse, à la coordination et à l'information générale, mais peut aussi s'avérer utile dans le domaine des tâches opérationnelles de police. Dans le domaine de l'analyse, l'échange d'analyses criminelles et de points de la situation revêt un caractère prioritaire, mais englobe également la documentation spécialisée d'ordre général. La coordination porte sur l'échange d'informations concernant les interventions prévues. Le moment prévu pour ces interventions doit être coordonné avec l'autre pays.

Enfin, l'information sur des modifications de lois entrant dans le champ d'application de l'accord est aussi explicitement mentionnée.

L'art. 5 n'énumère pas de manière exhaustive les domaines dans lesquels les Parties peuvent échanger des données. Comme précédemment mentionné, le droit national des parties contractantes est déterminant pour tous les aspects ayant trait à l'étendue de l'échange de données et aux principes le régissant. En Suisse, l'échange d'informations relevant de la police judiciaire s'effectue conformément aux principes de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP) [BOL]11et conformément aux statuts et aux règlements d'Interpol que le Conseil fédéral aura déclarés applicables (art. 351quinquies CP).

Art. 6

Coordination

La lutte contre la criminalité transfrontalière peut amener un Etat à planifier, en coopération avec d'autres Etats concernés, des opérations de police organisées au niveau national et à coordonner avec eux, au besoin, le moment prévu pour les interventions. Ces interventions concernent en particulier la recherche de personnes et d'objets, et la mise en oeuvre de techniques d'enquête spéciales comme la livraison contrôlée, l'observation ou l'investigation secrète. Toutefois, la coordination peut aussi porter sur les mesures concernant la protection des victimes et des témoins prévue par le droit national, qui sont d'un grand intérêt pour les deux pays.

La planification et la réalisation de programmes communs en matière de prévention criminelle sont également incluses.

La mise en oeuvre de certaines mesures peut aussi être la source de grosses dépenses.

En dérogation au principe figurant à l'art. 12, par. 7, selon lequel chaque Etat contractant supporte ses propres coûts, le par. 2 établit que les autorités compétentes détermineront dans chaque cas d'espèce s'il est nécessaire de procéder à une répartition des frais.

Art. 7

Equipes communes

L'art. 7 prévoit la constitution d'équipes communes en fonction des besoins. Il pourra s'agir d'équipes d'analyse chargées d'élaborer des points de la situation ou 11

RS 351.1

2134

des analyses criminelles, ou bien d'équipes mixtes de contrôle et d'observation en cas de mesures opérationnelles. Il sera en outre possible de former, avec la Macédoine, des groupes mixtes d'enquête pour des cas spécifiques12. Les agents d'un Etat contractant qui assument, sur le territoire de l'autre Etat contractant, des fonctions de conseil et d'appui, ne pourront disposer du pouvoir de souveraineté. Selon les besoins, et d'entente avec l'autre partie contractante, les modalités régissant les groupes communs de travail pourront être en outre spécifiées dans un accord complémentaire, conformément à l'art. 19 de l'accord.

Art. 8

Assistance et rapports de service

L'Etat contractant destinataire accordera aux agents qui sont en opération sur son territoire pour le compte de l'autre Etat, conformément à l'art. 7, la même protection et la même assistance qu'à ses propres agents. Cette obligation porte, en particulier, sur les conditions de travail et sur la protection contre la mise en danger de la santé et de la vie des agents.

En vertu du par. 2, les agents détachés demeureront néanmoins soumis à leur Etat d'origine en ce qui concerne leurs rapports de service, leurs conditions d'engagement et leur statut disciplinaire.

Art. 9

Responsabilité civile des agents

L'art. 9 réglemente couvrant les prétentions de droit civil auxquelles pourrait donner lieu l'engagement d'agents en vertu de l'art. 7. Selon la règle de base applicable, une partie contractante sera responsable de tous les dommages causés par ses agents lors d'une mission. La partie contractante sur le territoire duquel le dommage a été causé sera tenue, en premier lieu, de réparer ce dommage de la même manière que s'il avait été causé par ses propres agents. En pareil cas, l'autre partie contractante devra rembourser intégralement toute indemnisation versée aux victimes du dommage ou à leurs ayants droit. Sous réserve de ce remboursement et de tout droit qu'il pourrait faire valoir à l'égard de tiers, l'Etat contractant sur le territoire duquel le dommage a été causé ne pourra réclamer aucun autre remboursement.

Art. 10

Responsabilité pénale des agents

L'art. 10 établit qu'au cours des opérations visées à l'art. 7, les agents en mission sur le territoire de l'autre partie contractante seront soumis aux dispositions pénales de cette dernière en ce qui concerne les infractions dont ils seraient victimes ou qu'ils commettraient.

Art. 11

Formation et perfectionnement

En vertu de l'art. 11, la coopération pourra être renforcée par le biais de mesures de formation et de perfectionnement dans les domaines policier ou linguistique. A cet effet, la participation à des cours de formation, l'organisation en commun de séminaires et d'exercices et la formation de spécialistes revêtiront un caractère priori-

12

Les dispositions relatives aux équipes communes d'enquête au sens de l'art. 20 du Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (RS 0.351.12; RO 2005 333) sont réservées.

2135

taire. L'échange de concepts de formation et la participation d'observateurs aux exercices de l'autre partie contractante seront également possibles.

Art. 12

Procédure et coûts

L'art. 12 règle les procédures et la répartition des frais dans le cadre de la coopération. En vertu de cette disposition, les demandes d'informations ou les autres requêtes d'assistance devront être déposées en principe sous forme écrite par le biais de moyens de transmission cryptés. Si le contenu de la demande le permet, celle-ci pourra aussi être transmise par fax ou courrier électronique. En cas d'urgence, la demande pourra être transmise de vive voix et la demande écrite sera déposée sans retard. Les demandes contiendront au moins les données suivantes: ­

la désignation de l'autorité qui a formulé la demande;

­

le motif de la demande;

­

une brève description des faits essentiels, notamment les liens avec le pays requis;

­

les données concernant les principales personnes mentionnées dans la demande.

Dans les cas d'espèce, en vertu du par. 2, les autorités compétentes pourront aussi se communiquer mutuellement, et spontanément, des informations jugées pertinentes pour le destinataire dans la prévention de dangers concrets pour la sécurité publique ou dans la lutte contre les infractions. Le par. 3 établit que l'aide devra avoir lieu directement entre les autorités compétentes, sauf si le droit national en réserve le traitement aux autorités judiciaires. En outre, les parties contractantes sont tenues de répondre aux requêtes aussi rapidement que possible.

Le par. 5 réserve à chaque partie contractante le droit de refuser son aide dans un cas concret, en tout ou en partie, si elle estime que le traitement de la demande d'aide pourrait porter préjudice à sa souveraineté, à sa sécurité ou à d'autres intérêts étatiques essentiels, ou contrevenir à ses prescriptions légales ou à ses engagements à l'égard de conventions internationales. Dans ce cas, la Partie contractante requise devra en informer immédiatement l'autre Partie, par écrit et de façon motivée.

Le par. 7 établit le principe selon lequel les coûts engendrés par l'exécution d'une demande sont supportés par la partie contractante requise. Les mesures prises dans le cadre de l'art. 6, par. 1, font exception. Il s'agit par exemple de la mise en oeuvre de programmes de prévention de la criminalité ou de protection des témoins et des victimes. Sur demande de la délégation albanaise, la réglementation des frais a aussi été intégrée dans l'accord à propos de la mise en oeuvre des groupes de travail communs (art. 7, par. 2).

2.2.4 Art. 13

Titre IV: Attachés de police Attachés de police

L'art. 13 confère aux autorités compétentes des parties contractantes la compétence de conclure des accords particuliers permettant le détachement de durée limitée ou 2136

illimitée d'attachés de police sur le territoire de l'autre Partie contractante. Cette attribution de compétences se fait généralement au moyen d'un échange de notes. En vertu de l'art. 8, al. 4, de l'ordonnance du 30 novembre 2001 concernant l'exécution de tâches de police judiciaire au sein de l'Office fédéral de la police13, c'est le Département fédéral de justice et police qui, en Suisse, est compétent en la matière.

La coaccréditation éventuelle d'un attaché de police, c'est-à-dire l'accréditation au profit d'une partie contractante d'un attaché de police stationné dans un Etat tiers, tombe également sous le coup de l'art. 13. Le statut des agents stationnés est régi par les dispositions de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques14.

Les par. 2 et 3 posent les principes sur lesquels reposent les tâches d'un attaché de police. L'objectif visé est une intensification de la coopération policière, notamment par les procédures d'entraide policière ou judiciaire, les agents ne pouvant pas exercer de fonctions relevant de la puissance publique sur le territoire de l'autre Partie contractante. Les détails des droits et des devoirs des agents stationnés sont régis dans les accords particuliers.

La Suisse prévoyant le stationnement d'un attaché de police à Skopje, elle a soumis lors des négociations une note en vue de la préparation des bases légales à la délégation macédonienne. La Suisse attend actuellement la réponse du gouvernement macédonien.

2.2.5

Titre V: Protection des données et remise à des tiers

La coopération entre autorités policières englobe aussi l'échange de données personnelles, dont les données sensibles. Le traitement de ces données affectera les droits de la personnalité des intéressés. Les art. 14 et 15 sont destinés à mettre en accord les objectifs d'une répression efficace avec ceux de la protection des droits fondamentaux.

Art. 14

Protection des données

L'art. 14 de l'accord fixe les principales prescriptions régissant la transmission de données personnelles, qui devront être impérativement observées dans le cadre de la coopération déployée par les autorités des deux pays. En vertu du droit national et des accords multilatéraux ratifiés par la Suisse15, les autorités de police de la Confédération et des cantons sont tenues de respecter les dispositions figurant dans l'accord.

Cet article prescrit explicitement que les données sensibles présentant un intérêt pour la police, telles que les éléments relatifs aux convictions religieuses ou les profils de la personnalité, ne pourront être transmises qu'en cas d'absolue nécessité et que si elles sont jointes à d'autres données relatives à la poursuite pénale.

13 14 15

RS 360.1 RS 0.191.01 II s'agit surtout de la Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (RS 0.235.1) et de la Recommandation R (87)15 du Comité ministériel du Conseil de l'Europe du 17 septembre 1987 sur l'utilisation des données à caractère personnel dans le secteur de la police.

2137

En outre, relevons les principes suivants de protection des données: ­

l'affectation des données à un usage déterminé et la limitation de leur emploi aux autorités ayant le droit de les utiliser;

­

les principes de l'exactitude des données, de la nécessité et de la proportionnalité de leur transmission au regard du droit de la protection des données, ainsi que l'obligation de rectification et d'effacement des données qui en découle;

­

la garantie pour l'autre partie et la personne concernée du droit d'être renseignées sur l'utilisation faite des données transmises;

­

le devoir pour le destinataire d'observer les délais de suppression de données prévus dans le droit national applicable;

­

l'obligation de consigner dans les dossiers la transmission, la réception et la suppression de données;

­

les modalités de remboursement entre les parties contractantes en cas de recours;

­

l'obligation de prendre des mesures en vue de la sécurité des données.

Art. 15

Protection d'informations classifiées et remise à des tiers

L'art. 15 contraint les parties à garantir la confidentialité des données qui leur auront été transmises par l'autre Partie et qui, selon son droit national, sont classifiées (p.ex.

«SECRET» ou «CONFIDENTIEL»). Attendu que les systèmes de classification varient d'un pays à l'autre, la partie expéditrice devra, lors de la transmission des données, faire une description précise des dispositions spéciales à prendre pour assurer la protection de telles données. La question de savoir si une information doit être classifiée, et si oui comment, sera réglée par le droit respectif des parties. Ainsi, les autorités civiles de la Confédération devront appliquer en la matière l'ordonnance du 10 décembre 1990 sur la classification et le traitement d'informations de l'administration civile16.

Le par. 2 règle la question de la remise des données classifiées à des tiers. Il peut s'agir d'un Etat tiers ou d'une autorité non mandatée pour lutter contre la criminalité. Les données et les objets transmis dans le cadre de l'accord ne pourront être remis à des tiers qu'avec le consentement préalable écrit de la partie expéditrice. A cet égard, les demandes de remise de données, et notamment de données personnelles, à des pays tiers ne devraient être acceptées qu'à titre exceptionnel et uniquement lorsque le pays tiers concerné garantit un niveau de protection approprié.

16

RS 172.015

2138

2.2.6 Art. 16

Titre VI: Dispositions finales Autorités compétentes

L'art. 16 désigne les services qui sont habilités, de par leurs compétences, à exécuter les accords. Cette exécution concerne en premier lieu l'échange direct d'informations et l'application des mesures de coopération fixées dans les accords. En Suisse, il s'agit de l'Office fédéral de la police, du Département fédéral de justice et police.

En Albanie, il s'agit de la Direction générale de la police d'Etat du ministère de la Sécurité publique, et en Macédoine, du Bureau de la sécurité publique du ministère de l'Intérieur.

A l'instar de la coopération intervenant dans le cadre d'Interpol et d'Europol, la coopération s'opérera exclusivement entre les autorités centrales. Ce principe est appliqué non seulement à la coopération avec les Etat voisins mais également à celle avec d'autres Etats. Les requêtes pourront être ainsi transmises à un service central qui les traitera conformément aux prescriptions nationales et, si besoin est, les transmettra à l'autorité compétente. La communication s'en trouvera clarifiée et la coordination facilitée.

De plus, les autorités centrales, organes compétents en matière d'exécution, seront les principaux interlocuteurs lorsqu'il s'agira de clarifier des questions d'interprétation ou d'élaborer des propositions de développement des accords. L'application de ce principe consistant à désigner une autorité centrale permettra au Corps des gardes-frontière et aux autorités policières et de poursuite pénale des cantons, tout comme à l'Office fédéral de la police, de s'appuyer sur les accords.

Le par. 2 établit que les parties se communiquent mutuellement par voie diplomatique, 30 jours après l'entrée en vigueur des accords, les adresses, les numéros de téléphone et de télécopie ainsi que d'autres moyens de communication des principaux services des organes responsables. La Centrale d'engagement de l'Office fédéral de la police sera l'instance principale pour la Suisse. Elle assure aujourd'hui déjà, 24 heures sur 24, un échange d'informations efficace entre les autorités de police étrangères et les autorités de police suisses, ou entre celles-là et l'Administration fédérale des douanes, à savoir le Corps des gardes-frontière.

Aux termes du par. 3, les parties contractantes sont tenues de signaler par la voie diplomatique les modifications intervenues dans les compétences et les appellations des autorités visées aux par. 1 et 2.

Art. 17

Langue

L'art. 17 règle les modalités linguistiques de la coopération. En règle générale, les informations devront être échangées en langue anglaise afin d'éviter les frais de traduction. Dans des cas concrets, les autorités de police concernées pourront toutefois convenir entre elles de communiquer dans une autre langue.

Art. 18

Rencontre d'experts

L'art. 18 prévoit, pour des représentants de haut rang des parties contractantes, la possibilité de se rencontrer. Ces rencontres seront organisées selon les besoins et permettront de faire le point sur la mise en oeuvre des accords. Dans le cadre de ces 2139

rencontres, les spécialistes pourront également échanger leurs expériences relatives aux nouvelles stratégies en matière de sécurité ou prendre des initiatives visant à compléter ou à développer la coopération et soumettre aux Etats contractants des propositions allant dans ce sens.

Art. 19

Accords complémentaires

Les autorités chargées de l'application des accords pourront, sur la base et dans les limites des accords, rédiger des conventions d'application. Il peut s'agir soit de conventions d'application spécifiques et de durée déterminée réglant l'assistance dans des cas particuliers, soit de conventions générales et de durée indéterminée fixant les modalités générales de la coopération.

Art. 20

Relation avec d'autres accords internationaux

L'art. 20 de l'accord avec l'Albanie et de l'accord avec la Macédoine contient une réserve en faveur des accords internationaux auxquels les deux pays et la Suisse sont parties. Ainsi, les accords de coopération policière ne dérogent en rien aux dispositions découlant d'autres accords internationaux bilatéraux ou multilatéraux contraignants pour la Suisse, l'Albanie ou la Macédoine. Cette clause implique aussi que les règles des accords qui introduisent des modifications ou une concrétisation des droits et des obligations découlant d'accords internationaux doivent êtes respectées.

Art. 21

Entrée en vigueur et dénonciation

L'accord est soumis à ratification. Il prendra effet le jour qui suit la réception de la dernière notification par laquelle les parties s'informeront mutuellement que les conditions juridiques nationales d'entrée en vigueur sont réunies. L'accord, conclu pour une durée indéterminée, pourra être dénoncé à tout moment moyennant un délai de révocation de six mois.

3

Conséquences financières et répercussions sur l'effectif du personnel aux niveaux fédéral et cantonal

L'exécution des accords pourra se faire avec les moyens disponibles et n'entraînera aucune charge supplémentaire pour la Confédération et les cantons en termes de finance et de personnel. Certaines mesures telles que la coordination d'engagements opérationnels et la constitution d'équipes communes peuvent toutefois, dans des cas particuliers et moyennant entente entre les parties contractantes, conduire à une répartition des coûts. Comme le texte soumis ne contient pas de dispositions relatives aux subventions et qu'il ne requiert en outre aucun crédit d'engagement ni plafond de dépenses, il n'est pas soumis au frein aux dépenses prévu par l'art. 159, al. 3, let. b, de la Constitution fédérale (Cst.)17.

17

RS 101

2140

4

Programme de la législature

Les présents objets sont inscrits au programme de la législature 2003 à 2007 (FF 2004 1141).

5

Relation avec le droit européen

L'Union européenne s'efforce déjà depuis quelques années de renforcer la coopération policière avec l'Albanie et la Macédoine (cf. proposition d'arrêté du Conseil sur les principes, les priorités et les conditions du partenariat européen avec la Macédoine et l'Albanie). La conclusion par la Suisse des accords avec l'Albanie et la Macédoine va dans la même direction et se trouve dès lors en conformité avec les arrangements déjà discutés dans ce domaine entre l'Union européenne et les deux pays en question, ainsi qu'avec le droit européen en vigueur, en particulier la réglementation de Schengen relative à la coopération policière.

6

Constitutionnalité et conformité aux lois

6.1

Compétences de la Confédération

Les accords se fondent sur l'art. 54, al. 1, Cst., qui confère à la Confédération une compétence générale dans le domaine des affaires étrangères et l'autorise à conclure des traités avec l'étranger. S'agissant des traités internationaux, le principe applicable est celui selon lequel la Confédération peut conclure des accords sur les objets qu'elle souhaite, indépendamment de la question de savoir si ceux-ci relèvent de la compétence fédérale ou cantonale (cf. FF 1994 II 608). Le droit des cantons de conclure des traités avec l'étranger dans les domaines relevant de leur compétence (art. 56, al. 1, Cst.) est ainsi subsidiaire. Cependant, la Confédération fait un usage retenu de sa compétence générale lorsque les domaines à régler touchent essentiellement la compétence des cantons. Dès lors que la Confédération a conclu ellemême un traité, les cantons ne peuvent plus invoquer leur propre compétence dans la matière en question.

Les dispositions des accords concernent essentiellement l'échange d'informations entre les autorités centrales nationales suisses et les autorités centrales nationales albanaises et macédoniennes. Dans la mesure où les pays limitrophes ne sont pas concernés, l'échange d'informations international est, aujourd'hui déjà, réservé aux autorités fédérales. Ainsi, rien ne change sur le plan des compétences attribuées aux cantons dans le domaine de la police.

Le Conseil fédéral ne dispose pas ici de la compétence que lui confère l'art. 7a de la loi fédérale du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration18 de conclure seul des traités internationaux. Aussi les accords sont-ils soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale conformément à l'art. 166, al. 2, Cst.

18

RS 172.010

2141

6.2

Référendum facultatif

Aux termes de l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum s'ils sont d'une durée indéterminée et qu'ils ne sont pas dénonçables, s'ils prévoient l'adhésion à une organisation internationale, ou s'ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Or, selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement19, est réputée fixant des règles de droit toute disposition générale et abstraite d'application directe qui crée des obligations, confère des droits ou attribue des compétences. Une telle norme est importante lorsque l'objet à régler devrait être édicté dans le droit national, en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., sous la forme d'une loi. Or les accords avec l'Albanie et la Macédoine peuvent être dénoncés à tout moment; ils ne prévoient pas l'adhésion à une organisation internationale et leur mise en oeuvre n'exige pas l'adoption de lois fédérales. En revanche, ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit. D'une part, de nouvelles compétences seront conférées aux autorités qui appliqueront la loi (p. ex. constitution de groupes d'analyse et d'investigation communs). D'autre part, les parties ont des obligations (p. ex. l'obligation de dédommager si des données inexactes ont été transmises). Ces normes sont des dispositions importantes fixant des règles de droit au sens défini par l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. qui, si elles étaient édictées dans le droit national, donneraient lieu à une loi formelle. En conséquence, les accords sont sujets au référendum et approuvés sous la forme d'un arrêté fédéral.

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RS 171.10

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