00.421 Initiative parlementaire Time-sharing en matière immobilière.

Protection des consommateurs Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil national du 21 octobre 2005

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de modification du Code des obligations que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet de l'acte ci-joint.

21 octobre 2005

Pour la commission: Le président, Luzi Stamm

2005-3418

2483

Condensé Le présent projet de loi a pour but de renforcer la protection du consommateur qui acquiert un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers. Le projet s'inspire de la directive européenne correspondante du 26 octobre 1994 (94/47/CE).

Il règle la phase de la conclusion des contrats, en particulier et de manière détaillée la question de l'information du consommateur avant la conclusion du contrat.

La Commission des affaires juridiques du Conseil national propose une réglementation qui s'applique indépendamment de la nature juridique du droit d'utilisation d'un immeuble en temps partagé (droit des contrats, droit des sociétés ou droits réels). Ainsi, les règles sur la copropriété, le contrat de bail ou le contrat de vente pourront s'appliquer parallèlement à la réglementation envisagée.

Reprenant la systématique de la directive européenne, le projet comprend une définition du contrat. Il détermine quelles informations doivent être données au consommateur avant la conclusion du contrat. Il précise la forme et le contenu du contrat, ainsi que les conséquences liées au non-respect des exigences quant au contenu et à la forme du contrat. Il prévoit un droit de révocation, l'interdiction des paiements d'avances durant le délai de révocation et l'annulation de contrats de crédit liés.

2484

Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Initiative parlementaire

Le 15 juin 2000, M. Nils de Dardel, conseiller national, a déposé une initiative parlementaire visant à introduire dans le droit suisse une protection accrue des acquéreurs de droits d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers, inspirée du droit européen.

Le 20 février 2001, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a procédé à l'examen préalable de cette initiative. Elle a proposé par 11 voix contre 8 et 2 abstentions d'y donner suite. Une minorité proposait de ne pas y donner suite.

Le 20 septembre 2001, le Conseil national a décidé par 95 voix contre 71 de donner suite à l'initiative parlementaire1.

Conformément à l'art. 21quater, al. 1, de la Loi sur les rapports entre les conseils (LREC; RS 171.11)2, le Conseil national a chargé sa Commission des affaires juridiques d'élaborer un projet d'acte législatif.

1.2

Travaux de la commission et de la sous-commission

Le 28 octobre 2002, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a chargé une sous-commission d'examiner les mesures à prendre à la lumière du droit européen et où cette problématique devrait être intégrée dans la systématique du droit suisse. La sous-commission, composée de cinq membres (Hanspeter Seiler, président; Fabio Abate; Nils de Dardel; Erwin Jutzet; Hubert Lauper), s'est réunie quatre fois en 2003 et elle a élaboré un avant-projet à l'intention de la commission.

Cette dernière a adopté l'avant-projet à l'unanimité le 3 novembre 2003 et a chargé le Conseil fédéral de le soumettre à une procédure de consultation.

Le 29 octobre 2004, la commission a pris connaissance des résultats de la procédure de consultation. Elle a mandaté la sous-commission de réexaminer le projet à la lumière des remarques émises par les participants à la consultation. La souscommission dans sa nouvelle composition (Rudolf Joder, président; Valérie Garbani; Didier Burkhalter; Maurice Chevrier; Hans Ulrich Mathys) s'est réunie à trois reprises entre février et juin 2005. Le 13 juin 2005, elle a adopté un projet à l'intention de la commission plénière.

La commission a adopté par 18 voix contre 3 et une abstention le présent projet de loi en date du 21 octobre 2005.

La commission a été secondée dans ses travaux par le Département fédéral de justice et police conformément à l'art. 21quater, al. 2, LREC.

1 2

BO 2001 N 1091.

Voir art. 173, ch. 3, de la Loi sur l'Assemblée fédérale (Loi sur le Parlement, LParl; RS 171.10).

2485

1.3

Utilisation d'immeubles en temps partagé dans le droit suisse

Dans un rapport du 31 mai 20003 en réponse à un postulat adopté par le Conseil des Etats le 8 décembre 19984, le Conseil fédéral a fait une présentation générale de la situation en Suisse concernant le time-sharing ou l'utilisation d'immeubles en temps partagé5. La commission se réfère à ce rapport pour présenter brièvement le droit actuel.

L'utilisation d'immeubles en temps partagé est le fait de disposer d'un immeuble chaque année pour une durée déterminée plus ou moins courte, ce qui permet l'utilisation échelonnée dans le temps d'un même immeuble par plusieurs personnes.

Cette notion n'est utilisée en pratique que lorsque l'immeuble sert d'habitation, le plus souvent d'habitation de vacances.

1.3.1

Droit privé

La cession d'usage d'immeubles en temps partagé peut avoir un fondement dans le droit des contrats, dans le droit des sociétés ou dans les droits réels. Quelle que soit la construction juridique, l'aliénation et l'acquisition de ces droits d'utilisation reposent sur un contrat de vente. Ce sont alors les art. 165 et 184 ss du Code des obligations (CO; RS 220) qui s'appliquent. S'agissant de l'acquisition ou de l'aliénation de droits d'utilisation de nature contractuelle ou sociétaire, le contrat de vente n'est soumis à aucune forme (art. 165, al. 2, et 184, al. 1, en relation avec l'art. 11 CO). Lorsqu'il s'agit de droits d'utilisation de nature réelle, la forme authentique est exigée (art. 216 CO). La Loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD; RS 241) s'applique aussi au commerce de droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé.

En particulier l'art. 3 (Méthodes déloyales de publicité et de vente et autres comportements illicites) et l'art. 8 (Utilisation de conditions commerciales abusives) offrent une protection contre des pratiques commerciales déloyales ou abusives. Les violations de l'art. 3 LCD sont passibles de sanctions pénales (art. 23 LCD). Enfin, l'art. 10, al. 1, let. s, de l'Ordonnance sur l'indication des prix (RS 942.211) exige l'indication en francs suisses du prix à payer effectivement pour les droits d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers.

1.3.2

Droit international privé

La question de savoir quel juge est compétent lors d'un litige à caractère international en matière de droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé est réglée dans 3

4 5

Publié sous http://www.ofj.admin.ch/bj/fr/home/themen/wirtschaft/gesetzgebung/konsumentenschutz.

html 98.3488 Po. Frick. Commerce avec le droit de domicile temporaire dans le domaine du tourisme. Protection envers des méthodes douteuses.

Cette expression sera utilisée en français comme équivalent à la notion de time-sharing.

La directive européenne utilise le terme «droit d'utilisation à temps partiel», mais cette expression n'a pas été utilisée dans toutes les législations nationales de transposition, où l'on voit également les expressions de droit d'utilisation (ou de jouissance) en temps partagé ou par rotation.

2486

la Convention du 16 septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Convention de Lugano, CLug; RS 0.275.11) et dans la Loi fédérale sur le droit international privé (LDIP; RS 291). Une présentation générale des dispositions du droit international privé est faite dans le rapport du Conseil fédéral concernant le postulat Frick (voir également ch. 2.2 ci-après).

1.4

Utilisation d'immeubles en temps partagé dans le droit de l'Union européenne

En droit européen, les droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé sont réglés principalement par la directive 94/47/CE du 26 octobre 19946 concernant la protection des acquéreurs pour certains aspects des contrats portant sur l'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers (ci-après: la directive).

D'autres directives relatives à la protection des consommateurs sont par ailleurs applicables: directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs; directive 84/450/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de publicité trompeuse; directive 97/55/CE modificant la directive 84/450/CEE; directive 98/27/CE relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs; directive 85/577/CEE concernant la protection des consommateurs dans le cadre de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux.

La directive 94/47/CE s'applique à toutes les formes de droits d'utilisation en temps partagé. Elle prescrit la forme écrite du contrat et contient une liste détaillée des informations que le vendeur doit donner à l'acquéreur (art. 3 et 4, et annexe).

L'acquéreur a le droit de se rétracter du contrat dans un délai de 10 jours; ce délai peut se prolonger jusqu'à trois mois au plus si le vendeur n'a pas respecté ses obligations d'information (art. 5). Les paiements d'avances pendant le délai de rétractation sont interdits (art. 6). Enfin, la révocation du contrat annule tout crédit octroyé par un tiers sur la base d'un accord conclu entre celui-ci et le vendeur (art. 7).

La directive prescrit des normes minimales. Les Etats membres peuvent prévoir dans leurs lois nationales de transposition des normes allant au-delà de ces minimas.

Au terme d'un processus d'évaluation de la directive, l'Union européenne a conclu que les mesures protectrices de la directive de 1994 n'ont pas résolu tous les problèmes posés par l'utilisation d'immeubles en temps partagé.7 La Commission européenne compte y remédier8 dans un premier temps dans le contexte de l'adop6 7

8

JOCE 1994 L 280 du 29.10.1994, p. 83 ss.

Voir le rapport de la Commission européenne de 1999 sur l'application de la directive 94/47/CE (SEC(1999) 1795 final) (ci-après «rapport de la Commission»); la résolution du Parlement européen du 4 juillet 2002 sur le suivi de la politique communautaire relative à la protection des acquéreurs d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers (directive 94/47/CE) (JOCE 2003 C 271 E du 12.11.2003 p. 578 ss); le rapport du 3 juin 2002 d'une commission parlementaire sur le suivi de la politique communautaire relative à la protection des acquéreurs d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers (directive 94/47/CE).

Suivant des informations fournies par la Commission européenne et fondées sur la réponse que le Commissaire européen responsable de la Direction générale santé et consommation a donnée au Parlement européen.

2487

tion de la directive-cadre sur les pratiques commerciales déloyales9 ainsi que par l'autorégulation et une coopération plus systématique avec les fournisseurs. La révision de la directive, dans le sens d'un renforcement des mesures existantes relatives à la conclusion du contrat (extension du champ d'application, renforcement de l'obligation d'information, prolongation du délai de révocation) et d'une réglementation du stade de l'exécution du contrat, initialement envisagée par la Commission et privilégiée par le Parlement européen10, ne sera considérée que si ces mesures ne s'avèrent pas efficaces. La nécessité de renforcer la protection qu'offre la directive aux acquéreurs est donc reconnue, mais la manière d'y parvenir n'est pas encore clairement arrêtée.

1.5

Nécessité de renforcer la protection des consommateurs en droit suisse

En donnant suite à l'initiative parlementaire, le Conseil national a reconnu l'importance quantitative du mode d'utilisation d'immeubles en temps partagé. Il a admis la nécessité de renforcer la protection des acquéreurs de tels droits d'utilisation.

Même s'il n'existe pas de statistiques fiables, le phénomène de l'utilisation d'immeubles en temps partagé peut être considéré comme important pour la Suisse. La société «Hotel- und Appartmenthaus Immobilien AG» (Hapimag) domiciliée à Zoug est une des rares entreprises qui publie des informations sur ses activités dans ce domaine. Elle fait état dans son rapport annuel 2004 de 137'071 partenaires (personnes possédant une action Hapimag ou un passeport vacances). Cette société dispose de 5'336 appartements répartis dans 55 résidences dans 17 pays.

L'utilisation d'immeubles en temps partagé permet à des personnes dont les moyens financiers sont limités de devenir des quasi-propriétaires de logements de vacances.

Le revers de la médaille mérite attention. Depuis plusieurs années, il ressort de divers comptes-rendus dans la presse11 que certains fournisseurs de droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé établis en Suisse utilisent des méthodes de vente douteuses pour les amener à s'engager de façon importante et pour une durée indéterminée. Les personnes concernées n'entrevoient pas toujors toute l'étendue de leur engagement. En effet, leurs droits sur le logement sont limités, et elles ne sont pas à l'abri d'une forte augmentation sans raisons des charges d'exploitation, le contrat restant en général muet sur ce point. De même, la revente ou l'échange d'un tel bien immobilier peuvent s'avérer difficile. Les risques de pertes financières importantes ne sont donc pas négligeables. Se rendant compte après coup des engagements qu'elles ont pris, elles ne disposent pas d'un droit de révocation et sont souvent réticentes à l'idée de rendre leur expérience publique en s'adressant à la justice.

9 10

11

Adoptée le 11 mai 2005; JOCE 2005 L 149 du 11.06.2005, p. 22 ss.

Rapport de la Commission, p. 21­24; révision de la directive annoncée pour l'année 2003 dans la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions ­ Stratégie pour la politique des consommateurs 2002­2006, JOCE 2002 C 137 du 8.6.2002, p. 2 ss, p. 16; résolution du Parlement européen, considérant H, ch. 1 et 2.

Voir par ex. Beobachter 02/05 du 20.01.2005; K-Tipp du 17.11.2005; Saldo no 8 du 24.04.2002; K-Tipp no 10 du 15.05.2002; beobachter.ch nos 4/00 et 11/02.

2488

2

Grandes lignes du projet

2.1

Contenu et systématique

Sur le modèle de la directive, la commission propose des mesures relevant du droit de la consommation. Dans cette optique, les propositions concernent le droit des contrats. Deux types de règles sont envisageables: d'une part, celles relatives à la phase de la conclusion du contrat et visant à garantir une décision en connaissance de cause de l'acquéreur et, d'autre part, celles relatives à la phase postérieure à la conclusion du contrat visant à garantir une bonne exécution de la prestation du fournisseur vis-à-vis de l'acquéreur. S'appuyant sur le modèle de la directive, la commission propose des mesures relevant de la conclusion du contrat.

La commission propose une réglementation qui s'applique indépendamment de la nature juridique du droit d'utilisation d'un immeuble en temps partagé (droit des contrats, droit des sociétés ou droits réels). Ainsi, les règles sur la copropriété, sur le contrat de bail ou le contrat de vente pourront s'appliquer parallèlement à la réglementation envisagée. De ce point de vue, cette réglementation s'apparente aux règles de la partie générale du CO et la commission propose d'intégrer la nouvelle réglementation à la suite des art. 40a ss CO sur le démarchage à domicile.

Le contenu et la structure des nouvelles dispositions (définition, forme et contenu du contrat) correspondent certes à la réglementation d'un type contractuel nouveau qui serait à intégrer dans la partie spéciale du CO. Cette option contredirait cependant la volonté de ne pas se limiter à une forme juridique particulière de l'utilisation en temps partagé. L'intégration dans la partie spéciale du CO impliquerait alors de rattacher les règles nouvelles à un type contractuel existant (vente ou bail par exemple). Il faudrait alors exclure l'application des règles régissant ce type de contrat et envisager l'application de règles régissant d'autres types contractuels.

Reprenant la systématique de la directive, le projet comprend une définition du contrat. Il détermine quelles informations doivent être données au consommateur avant la conclusion du contrat. Il précise la forme et le contenu du contrat, ainsi que les conséquences liées au non-respect des exigences quant à la forme et au contenu du contrat. Il prévoit un droit de révocation, l'interdiction du paiement du prix ou de frais avant l'échéance du délai de révocation et l'annulation automatique de contrats de crédit liés en cas de révocation.

2.2

Le droit international privé

La commission a analysé plusieurs cas de figure du droit des contrats afin de déterminer si une réglementation spéciale en la matière est opportune. Pour les contrats de nature réelle, le for et le droit applicable sont en principe ceux du lieu de situation de l'immeuble. Pour les litiges relevant du droit des sociétés, c'est le for et le droit applicable du siège de la société qui sont pertinents.

En matière contractuelle, l'application des règles générales du droit international privé de la consommation garantit déjà au consommateur un for en Suisse. C'est la Convention de Lugano qui s'applique dans la grande majorité des cas. Pour le reste, les conditions auxquelles un for est donné au domicile des consommateurs (art. 120

2489

LDIP) suivent en grande partie le droit européen actuel (Règlement européen12 et CLug.). Il est vrai qu'en regard du nouveau Règlement européen, le consommateur suisse est moins bien loti. En effet, selon l'art. 15 du Règlement européen, il suffit que le fournisseur dirige son activité professionnelle ou économique vers l'Etat du domicile du consommateur pour que celui-ci bénéficie d'un for à son domicile. A l'inverse, le consommateur suisse est mieux protégé par rapport au Règlement européen dans la mesure où il peut intenter une action en Suisse sans ladite condition s'il a été incité par le fournisseur à se rendre à l'étranger afin d'y conclure le contrat (art. 120, al. 1, let. c, LDIP).

Dans la mesure où des fournisseurs agissent à l'étranger contre des consommateurs suisses, la LDIP n'a aucune influence sur la compétence des tribunaux étrangers.

Une réglementation spécifique n'aurait aucun sens à cet égard.

Il en va de même du point de vue du droit applicable. Les tribunaux suisses appliqueront le droit suisse dans la plupart des cas. Les exceptions à ce principe correspondent à un consensus international. Cela vaut surtout pour le droit des sociétés et le droit réel immobilier. Mais les conditions pour appliquer le droit suisse des contrats prévues à l'art. 120 LDIP concordent également avec celles de l'art. 5 de la Convention de Rome qui est en vigueur dans les Etats de l'Union européenne. De plus, l'art. 9 de la directive prévoit que les Etats membres doivent offrir la protection que la directive accorde à l'acquéreur indépendamment du droit applicable en l'espèce, si l'immeuble est situé dans un Etat membre. Une règle analogue dans la LDIP n'est logiquement pas possible. Si un immeuble ou une société en Suisse sont concernés, le droit suisse est applicable dans la plupart des cas (art. 99, 120 et 154 LDIP).

Si une affaire est portée devant un tribunal d'un Etat membre de l'Union européenne, c'est la Convention de Rome qui déterminera le droit applicable. Il s'agit de la grande majorité des cas d'action possibles à l'étranger. Devant les tribunaux d'autres Etats étrangers, c'est le droit international privé national qui est déterminant. Dans tous ces cas, une modification de la LDIP n'aura donc aucun effet puisqu'elle ne s'applique pas.

La commission en conclut qu'il n'y a pas de nécessité de prévoir des règles spécifiques en matière de droit international privé.

2.3

Pas de disposition relative à la langue du contrat

Selon la directive (art. 4, 2e tiret), le consommateur a droit à ce que les documents soient rédigés dans la langue du pays où il réside ou dont il est ressortissant. Les Etats membres ont de plus la faculté d'exiger dans tous les cas une version dans leur langue nationale et une traduction dans la langue du pays où l'immeuble est situé. Le but est clair: au vu du caractère international du temps partagé, le consommateur doit pouvoir disposer d'une version du contrat dans une langue qu'il comprend.

Une norme qui formalise ainsi la langue dans laquelle un contrat est rédigé est inconnue du droit suisse des contrats, même conclus avec des consommateurs. Ce 12

Règlement (CE) N° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concerant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisons en matière civile et commerciale, JOCE 2001 L 12 du 16.1. 2001, p. 1 ss.

2490

sont les règles générales du droit des contrats qui s'appliquent. A cet égard, la forme écrite, au vu de ses finalités (protection contre une décision irréfléchie, consignation du contenu), est interprétée comme exigeant que le contrat soit rédigé dans une langue que les parties comprennent, sans qu'il s'agisse nécessairement de la langue nationale ou de la langue du lieu de résidence13. Par ailleurs, l'auteur d'une déclaration de volonté peut être considéré comme devant de bonne foi s'assurer qu'elle est compréhensible pour le destinataire14. Ce n'est que dans les situations où il a pu croire de bonne foi que la langue utilisée était compréhensible pour son cocontractant que le fournisseur ne portera pas le risque d'une mauvaise compréhension du contrat par le consommateur. La bonne foi du fournisseur, partie expérimentée soumise à une obligation légale spéciale d'information, devrait répondre à des critères stricts.

La protection du consommateur est donc assurée par l'application des règles générales du droit des contrats. Cette solution est certainement moins prévisible qu'une réglementation formelle. Elle permet cependant de trouver une solution différenciée adaptée à chaque cas concret et évite des frais de traduction inutiles au fournisseur.

2.4

Procédure d'autorisation

La commission a examiné la question de savoir s'il conviendrait de soumettre à autorisation l'activité des professionnels du temps partagé. Tout en reconnaissant que de telles autorisations peuvent contribuer à éviter des abus, elle y a renoncé en vertu du principe du respect de la proportionnalité. Cette procédure nécessiterait en effet pour être efficace la mise en place de structures importantes et coûteuses. Sa portée serait sensiblement limitée du fait du caractère international du secteur du temps partagé.

Dans un premier temps, la commission préfère se concentrer sur l'intégration dans le droit suisse des règles de la directive européenne, laquelle ne prescrit pas une telle autorisation.

2.5

Transfert de l'immeuble ou des actions de la société

La commission s'est intéressée aux conséquences du transfert de l'immeuble ou des actions de la société sur le droit d'utilisation du consommateur.

S'agissant du transfert de l'immeuble, elle a constaté que le droit d'utilisation du consommateur est préservé si celui-ci se fonde sur une copropriété ou un droit réel limité inscrit au registre foncier. La situation est plus délicate si le droit d'utilisation est de nature contractuelle car celui-ci est alors inopposable au tiers acquéreur.

Toutefois, si le contrat d'utilisation en temps partagé est qualifié de contrat de bail, ce qui sera fréquemment le cas, les art. 261 à 261b CO qui règlent les conséquences du changement de propriétaire s'appliquent et le bail passe au nouvel acquéreur avec la propriété du bien immobilier. S'agissant d'un droit réel limité ou d'un contrat de 13

14

Commentaire bâlois ­ Schmidlin/Kramer, N 5 ad Allgemeine Erläuterungen zu Art. 12­15 CO; Commentaire zürichois ­ Schönenberger/Jäggi, N 12 ad art. 13 CO, N 18 ad art. 14­15 CO.

Commentaire zürichois ­ Schönenberger/Jäggi, N 417 ad art. 1 CO.

2491

bail, les principes souffrent toutefois d'une exception en cas de vente aux enchères dans le cadre d'une procédure d'exécution forcée15.

En cas de transfert de la majorité des actions de la société, les droits d'utilisation en temps partagé du consommateur ne sont pas affectés. La société demeure obligée de céder l'usage de l'immeuble aux consommateurs.

La commission en conclut que le droit actuel offre généralement une protection adéquate aux consommateurs et que des modifications législatives pour régler les conséquences du transfert de l'immeuble ou des actions de la société ne sont pas nécessaires.

2.6

Procédure de consultation

23 cantons, 5 partis politiques, le Tribunal fédéral, 21 organisations ainsi que 2 participants non officiels ont pris part à la procédure de consultation sur l'avantprojet16.

La grande majorité des participants, à savoir 18 cantons, 3 partis politiques ainsi que 17 organisations, a reconnu qu'il existe un besoin de légiférer pour accroître la protection des consommateurs. Plusieurs questions et objections ont cependant été soulevées, tant par les partisans que par les opposants à l'avant-projet. Plusieurs milieux consultés ont estimé que l'objet et le champ d'application de la réglementation étaient trop larges et que certaines notions étaient trop vagues. Certains ont déploré la construction juridique retenue, c'est-à-dire des règles générales qui s'appliquent indépendamment de la nature juridique du droit d'utilisation d'un immeuble en temps partagé (droit des contrats, droit des sociétés ou droits réels).

Des regrets ont également été formulés quant au fait que la réglementation ne réserve pas la forme authentique. Enfin, certains participants ont rejeté l'introduction d'un droit de révocation de 14 jours ou du moins auraient souhaité que le délai pour l'exercice de ce droit soit raccourci. Parmi d'autres éléments de l'avant-projet, la sanction à appliquer lorsque le contrat ne respecte pas la forme écrite ou ne contient pas certaines indications a également été discutée par les participants.

La commission a réexaminé le projet en tenant compte des critiques émises par les participants à la procédure de consultation mais aussi du fait que le projet a été globalement jugé positif. Elle s'est dès lors attachée à améliorer la réglementation dans le sens voulu par les participants à la consultation tout en restant dans le cadre choisi. Elle a ainsi notamment réservé la forme authentique et disposé que le contrat doit réserver les modifications possibles des indications qu'il contient du fait de modifications statutaires ou réglementaires ultérieures. Elle a prévu en cas de révocation l'annulation automatique des contrats de crédits conclus avec un tiers mais aussi avec le fournisseur pour financer l'acquisition du droit. Elle a réduit le délai de révocation à 10 jours. Cette solution se rapproche du délai usuel de 7 jours prévu en droit suisse des contrats et correspond au délai minimum exigé dans l'Union européenne.

15 16

Voir art. 142 de la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP; RS 281.1) et ATF 125 III 123.

Le rapport sur les résultats de la consultation peut être consulté sur le site Internet de l'Office fédéral de la justice (http://www.ofj.admin.ch/bj/fr/home/themen/wirtschaft/gesetzgebung/konsumentenschutz .html).

2492

3

Commentaire article par article

3.1

Code des obligations

A propos de la systématique, il est renvoyé au ch. 2.1 ci-avant.

Titre marginal de l'art. 40g: I. De l'utilisation d'immeubles en temps partagé Art. 40g

Objet et champ d'application

L'al. 1 définit le contrat de base, qui crée ou transfère le droit. Le caractère déterminé ou déterminable de l'immeuble à utiliser d'une part et de la période d'usage d'autre part n'a pas été explicité dans la définition. Cette dernière n'exclut cependant aucune de ces possibilités. La définition ne reprend pas les limites temporelles de la directive (période minimale d'utilisation d'une semaine; durée minimale du contrat de 3 ans). Ces limites ne se justifient pas et facilitent le contournement de la loi. De même, la limitation aux immeubles à usage d'habitation n'a pas été reprise, l'usage à des fins privées, caractéristique de la notion de consommateur, étant suffisant. Le terme «à titre onéreux» permet de ne pas se limiter à une forme de paiement particulière (prix global ou redevances périodiques).

L'al. 2, let. a étend le champ d'application de la loi aux contrats par lesquels le consommateur qui possède un droit d'utilisation en temps partagé revend son droit à un autre consommateur, souvent par l'intermédiaire d'une société de revente (voir ci-après).

L'al. 2, let. b inclut dans le champ d'application les contrats de service ayant pour objet l'échange ou la revente de droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé.

La directive en revanche se limite aux seuls contrats qui prévoient la création ou le transfert d'un droit d'utilisation. Sont ainsi en particulier exclus les contrats d'adhésion à une bourse d'échange ou les contrats de courtage par lesquels une société de revente se charge de trouver un acheteur pour un consommateur qui possède un droit et souhaite le revendre. La raison de cette exclusion est que, dans ces contrats, le consommateur est celui qui aliène et non qui acquiert le droit. Ils ne correspondent pas à la figure et au type du contrat principal défini à l'al. 1. Ces contrats ne sont toutefois pas sans risques pour le consommateur. Ils jouent un rôle important en pratique et sont liés au contrat principal sans toujours en dépendre entièrement. En effet, l'adhésion aux sociétés d'échange se fait en général par l'intermédiaire du vendeur, lors de la conclusion du contrat d'acquisition du droit.

Ce dernier peut donc informer le consommateur sur la participation à une société d'échange. Le droit de révocation doit également porter sur le contrat avec la société
d'échange. A cette fin, il faut l'inclure dans le champ d'application. Les sociétés de revente n'agissent pas nécessairement par l'intermédiaire des vendeurs de droits17.

Le contrat de revente peut être conclu des années après l'acquisition du droit. Il se justifie donc de l'inclure également dans le champ d'application de la nouvelle réglementation.

17

Voir la description du fonctionnement du timesharing sur le site Internet de l'Organisation du temps partiel en Europe (OTE): http://www.oteinfo.com/fr/medianews/body_holiday_chain2.html

2493

Art. 40h

Forme et contenu du contrat

La commission reprend l'exigence de la forme écrite qualifiée prévue dans la directive. Cette forme écrite qualifiée permet de rendre attentif le consommateur à l'engagement qu'il prend et établit le contenu du contrat. Un tel formalisme se justifie au vu de l'engagement financier important que prend le consommateur et des risques liés aux méthodes de vente pratiquées dans le domaine du temps partagé.

L'al. 1 pose l'exigence de la forme écrite et réserve la forme authentique. Ainsi, les règles générales du Code civil (RS 210) et du CO priment lorsqu'elles requièrent la forme authentique qui est plus exigeante.

L'al. 2 énumère les indications que doit contenir le contrat. Cet alinéa s'applique également aux contrats faits en la forme authentique. Les indications que doit contenir le contrat sont constituées des informations précontractuelles prévues dans la LCD (voir ch. 3.2). Ce système, repris de la directive, vise à ce que l'information précontractuelle donnée au consommateur trouve sa confirmation dans le document contractuel écrit. Ont cependant été exclus l'identité et le domicile du propriétaire, qui sont utiles au consommateur en tant qu'informations précontractuelles, mais qu'il n'est pas nécessaire d'indiquer dans le contrat. De même, les questions liées à la qualité juridique de la personne avec laquelle le consommateur traite seront résolues selon les art. 32 ss CO sur la représentation, sans qu'il faille en faire une mention obligatoire dans le contrat.

Le projet exige en outre les indications ci-dessous, requises également par la directive: -

Période pendant laquelle le consommateur peut exercer son droit d'utilisation, durée du contrat, date du début de l'exercice du droit. Ces éléments peuvent varier d'un contrat à l'autre et ne peuvent être connus qu'au moment de la conclusion.

-

Clause excluant que d'autres frais liés à l'utilisation du bien ou aux services offerts dans le contrat soient mis à la charge du consommateur. Il ne s'agit pas ici d'une information sur le contenu du contrat, mais d'une clause contractuelle interdisant toute modification qui permettrait au fournisseur de prévoir ultérieurement de nouvelles charges de manière unilatérale.

L'augmentation du montant des charges et frais accessoires prévus dans le contrat reste par contre possible. Les frais liés à l'utilisation du bien sont les frais accessoires dont il est question à la let. i. Les services offerts renvoient aux installations communes à disposition prévues à la let. e in fine. Le fournisseur peut facturer au consommateur des prestations supplémentaires offertes ultérieurement, lesquelles doivent reposer sur un accord entre les parties.

Une minorité (Thanei, Gyr, Hubmann, Leutenegger Oberholzer, Marty Kälin, Menétrey-Savary, Rechsteiner-Basel, Vischer) souhaite que l'exclusion se rapporte à «d'autres frais» quels qu'ils soient, sans préciser qu'il s'agit des frais liés à l'utilisation du bien ou aux services offerts dans le contrat. Cette formulation large évite que d'éventuels frais qui ne seraient pas liés à l'utilisation du bien ou aux services offerts soient mis ultérieurement à la charge du consommateur de manière unilatérale. Une modification du contrat d'un commun accord reste ici aussi toujours possible.

2494

-

Date et lieu de la signature du contrat: cette indication n'a pas d'influence sur le délai de révocation, qui court dès la remise d'une copie du contrat.

Elle reste cependant utile pour établir les circonstances de la conclusion du contrat.

Conséquence directe de sa proposition de ne pas prévoir de droit de révocation (voir commentaire de l'art. 40i), une minorité (Baumann J. Alexander, Miesch, Pagan) propose de biffer l'al. 2, let. l.

L'al. 3 vise les cas où l'utilisation en temps partagé a son fondement juridique en droit des sociétés ou en droits réels. Les informations que l'al. 2 impose comme contenu contractuel peuvent correspondre à des clauses statutaires de la société ou à des dispositions du règlement de copropriété. Le consommateur reçoit donc un contrat dont les clauses peuvent devenir caduques du fait de la modification ultérieure des statuts de la société ou du règlement de copropriété. Lorsque ces textes sont modifiés, le contrat doit en conséquence lui aussi être modifié. L'al. 3 prévoit de ce fait que le contrat doit réserver les modifications possibles des indications qu'il contient du fait de modifications statutaires ou réglementaires ultérieures. Le consommateur doit en outre être informé des conditions auxquelles les clauses statutaires ou le règlement de copropriété peuvent être modifiés.

L'al. 4 prévoit que le consommateur reçoit une copie écrite et datée du contrat en vue de l'exercice de son droit de révocation.

L'al. 5 règle les sanctions du non-respect des exigences relatives à la forme du contrat. Le non-respect de la forme écrite entraîne la nullité du contrat (art. 11, al. 2, CO). L'omission d'indications dans le contrat n'entraîne par contre pas systématiquement la nullité. Cette sanction n'intervient qu'en cas d'omission de certaines d'entre elles. Il s'agit des indications relatives à l'identité et au domicile des parties (let. a), au contenu précis du droit (let. b), aux immeubles en construction (let. f), au prix à payer pour le droit d'utilisation et aux frais à charge du consommateur (let. i et j), aux systèmes d'échange ou de revente (let. k), au droit de révocation (let. l) et à la date et au lieu de signature du contrat (let. m). L'identité et le domicile des parties sont particulièrement importants en matière de temps partagé au vu des différentes personnes auxquelles le consommateur peut avoir affaire (représentant, propriétaire, promoteur, etc.). Le contenu du droit est également central au vu des différentes formes juridiques qui existent. Les indications relatives aux immeubles en
construction, au prix et aux frais, aux systèmes d'échange ou de revente sont également particulièrement importantes en matière d'utilisation d'immeubles en temps partagé.

Les abus constatés portent souvent sur ces points. De même, l'information sur le droit de révocation est essentielle afin que le consommateur puisse exercer son droit (voir sur le droit de révocation le commentaire de l'art. 40i). Enfin, la date et le lieu de signature du contrat ont plusieurs fonctions importantes: preuve, établissement de la date de fin du contrat, adéquation du moment de l'information précontractuelle.

Les indications restantes concernent la description des prestations offertes (let. d, e, g, et h). Le contrat n'est pas nul en cas d'omission de ces indications. Le consommateur ne pourra se départir du contrat qu'aux conditions plus restrictives des règles sur les vices du consentement (art. 23 ss CO). Pour cette catégorie d'indications, la sanction ne touche que la clause manquante. Si les prestations offertes ne figurent pas dans le contrat, il sera complété et interprété selon ce à quoi le consommateur pouvait s'attendre de bonne foi, sans tenir compte de la volonté du fournisseur. Si par exemple l'indication des services communs (eau courante, électricité, etc.)

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manque, le consommateur pourra en principe s'attendre à avoir l'eau courante et l'électricité.

Selon l'al. 6, les contrats d'échange et de revente contiennent les indications fixées aux let. a, l et m et indiquent le prix et les frais liés à la prestation proposée.

Art. 40i

Droit de révocation

Le droit de révocation est un des instruments principaux de protection des consommateurs prévus par la directive (art. 5)18. Le consommateur correctement informé doit disposer d'un délai de réflexion pendant lequel il peut revenir sur son engagement. Le délai prévu par la directive est de 10 jours. Plusieurs Etats membres ont prévu un délai de 14 jours19.

La directive prévoit que le délai commence à courir dès la signature du contrat. Le point de départ du délai est cependant repoussé si certaines indications obligatoires ne figurent pas dans le contrat. Il ne commence alors à courir qu'au moment où ces informations sont fournies (art. 5, al. 1, 2e tiret). Le délai n'excédera cependant jamais trois mois et dix jours (art. 5, al. 1, 3e tiret). Le consommateur qui révoque le contrat ne doit rembourser au fournisseur que les frais rendus nécessaires par la conclusion du contrat ou la révocation. Cette limite permet de ne pas vider le droit de révocation de son sens. Aucun frais n'est dû au fournisseur qui ne mentionne pas certaines informations dans le contrat car le consommateur n'aurait alors pas eu l'occasion de se déterminer en connaissance de cause.

Selon ce projet également, le droit de révocation prévu à l'art. 40i, al. 1, CO est l'instrument principal de la protection du consommateur. Par 11 voix contre 9, la commission a décidé de prévoir un délai de 10 jours pour l'exercice du droit de révocation. Ce laps de temps permet au consommateur d'examiner l'offre qui lui est soumise. Plus long que les autres délais de révocation prévus en droit suisse, qui sont de 7 jours pour le démarchage à domicile, le courtage matriomonial et le crédit à la consommation, ce délai de 10 jours tient compte de la situation particulière dans laquelle peut se trouver le consommateur au moment de la signature du contrat, à savoir qu'il se trouve par exemple sur son lieu de vacances. Il est de plus conforme au droit européen.

Une minorité de la commission (Garbani, Aeschbacher, Gyr, Hubmann, Leutenegger Oberholzer, Marty Kälin, Menétrey-Savary, Rechsteiner-Basel, Thanei, Vischer) souhaite un délai de révocation plus long de 14 jours tel que le prévoyait l'avantprojet soumis à consultation. Elle est d'avis qu'il se justifie d'avoir dans cette matière un long délai car les sommes en jeu sont importantes et le consommateur
a besoin de temps pour être en mesure de révoquer le contrat, notamment s'il est conclu sur le lieu de vacances.

Le projet diffère de la directive en ce qu'il prévoit à l'al. 1 le point de départ du délai dès la remise d'une copie écrite du contrat. Le consommateur a ainsi en sa possession un document contractuel qu'il peut examiner. Aucun délai maximal n'est prévu pour l'exercicie du droit de révocation; l'interdiction de l'abus de droit devrait suffire. Ce système plus sévère que celui de la directive est connu du droit suisse 18

19

La directive utilise les termes de «rétractation» et de «résiliation», mais ils n'ont aucune portée technique précise. Ce sont les droits nationaux qui prévoient les conséquences de la révocation.

Voir rapport de la Commission, p. 13.

2496

(art. 40e, al. 2, CO; art. 16, al. 2, Loi fédérale sur le crédit à la consommation; LCC; RS 221.214.1). Il vise à prévenir que des fournisseurs peu scrupuleux n'informent pas le consommateur sur son droit de révocation en attendant que le délai maximal ne s'écoule.

L'al. 3 règle les conséquences de la révocation. La première phrase prévoit ainsi l'application de l'art. 40f CO, applicable en matière de démarchage à domicile et d'acquisition de biens ou de services financée par un crédit à la consommation (art. 16, al. 3, LCC). Le consommateur devra verser un loyer approprié pour l'usage du bien (art. 40f, al. 2, CO). Le juge détermine le loyer approprié en équité, en tenant compte notamment du respect par le fournisseur de ses obligations20. Le consommateur devra également rembourser les avances et frais faits par le fournisseur pour les prestations de services (art. 40f, al. 3, CO). Il ne devra aucune autre indemnité (art. 40f, al. 4, CO). La deuxième phrase prévoit à titre d'exemple et de clarification l'exclusion des frais liés à la conclusion ou à la révocation21. Le projet va à cet égard plus loin que la directive européenne.

Selon le concept d'une seconde minorité (Baumann J. Alexander, Miesch, Pagan) (voir art. 40h, al. 2, let. l, CO; 40i CO; 3a, al. 1, let. i, LCD), il ne doit pas être instauré de droit de révocation. Elle estime qu'un droit de révocation n'est pas nécessaire dès lors que le projet prévoit une réglementation détaillée du contrat qui assure déjà la protection des consommateurs. Il n'y a en conséquence pas lieu de craindre que les effets d'un tel contrat ne soient pas connus et le principe de la fidélité contractuelle doit trouver application. Par 18 voix contre 3, la commission a rejeté cette proposition qui enlève au projet son noyau. La majorité relève de surcroît que cette protection particulière est aussi offerte au consommateur dans d'autres contrats de même nature (démarchage à domicile, courtage matriomonial et crédit à la consommation).

Art. 40ibis

Droit de renoncer

Une minorité de la commission (Garbani, Gyr, Hubmann, Leutenegger Oberholzer, Marty Kälin, Menétrey-Savary, Rechsteiner-Basel, Thanei, Vischer) souhaite introduire dans le projet une durée initiale maximale du contrat de 3 années. A titre subsidiaire, une seconde minorité (Thanei, Garbani, Gyr, Hubmann, Leutenegger Oberholzer, Marty Kälin, Menétrey-Savary, Rechsteiner-Basel, Vischer) souhaite que la durée initiale maximale soit de 5 années. Ainsi, un contrat d'utilisation en temps partagé ne pourra être conclu dans un premier temps que pour une durée initiale maximale de 3, respectivement 5 années. Au terme de cette période, le consommateur peut décider de s'engager pour une période plus longue ou renoncer au contrat. Cela présente l'avantage que le consommateur prend une décision définitive en se représentant concrètement l'offre du fournisseur. La protection du consommateur est renforcée.

La majorité de la commission constate qu'une durée initiale maximale est un instrument inconnu des droits suisse et européen de la consommation. Elle relève que l'introduction d'une telle durée représente une lourde charge pour le fournisseur qui 20

21

Message du Conseil fédéral du 7 mai 1986 à l'appui d'une loi fédérale visant à améliorer l'information des consommateurs et d'une loi fédérale modifiant le code des obligations (De la formation des obligations), FF 1986 II 360, 402.

Ils sont en principe exclus des avances et frais dus selon l'art. 40f, al. 3, CO, mais cela n'est pas clair; voir Message , p. 403, où il est question d'«une partie des frais généraux».

2497

a respecté ses obligations d'information et n'a pas eu de comportement abusif, que cette durée soit de 3 ou de 5 années. La majorité relève de surcroît que les milieux intéressés sont opposés à l'introduction d'un droit de renoncer qui aurait des conséquences notamment sur les coûts et les investissements immobiliers.

Art. 40j

Paiement

Cette disposition reprend l'art. 6 de la directive. Il s'agit d'une mesure nécessaire à l'exercice du droit de révocation. La personne qui aurait déjà payé le prix à un fournisseur pourrait en effet avoir des difficultés à récupérer les sommes versées et être de ce fait dissuadée de faire usage de son droit de révocation. La directive laisse aux Etats membres le soin de déterminer les sanctions de cette interdiction. La grande majorité a sanctionné la violation de cette disposition par l'amende22.

La norme est également intégrée en droit suisse dans la LCD, permettant l'application des sanctions de l'art. 23 LCD.

Art. 40k

Annulation de contrats de crédit

Cette disposition reprend l'art. 7 de la directive. Ainsi, le consommateur qui révoque le contrat d'utilisation d'immeubles en temps partagé ne reste pas lié par un contrat de crédit destiné à financer son acquisition.

Le crédit peut être octroyé par le fournisseur. Il peut également l'être par un tiers.

Dans ce dernier cas toutefois, le crédit est annulé à condition qu'il existe un accord entre le tiers et le fournisseur prévoyant l'octroi de prêts aux clients du fournisseur.

L'al. 2 prévoit l'application de la première phrase de l'art. 16, al. 3, LCC. Le consommateur n'aura ainsi pas à payer d'intérêts sur des sommes qu'il aurait reçues avant l'écoulement du délai de révocation prévu pour le contrat d'utilisation d'immeubles en temps partagé.

3.2

Loi fédérale contre la concurrence déloyale

Art. 3a

Droits d'utilisation d'immeubles en temps partagé

L'art. 3 de la directive impose au fournisseur d'éditer un prospectus écrit au contenu déterminé et de le remettre à toute personne qui le demande. En droit suisse, les phases précontractuelles (notamment la publicité) sont réglées dans la LCD23. La reprise telle quelle de l'art. 3 de la directive en droit des contrats constituerait donc une nouveauté en droit suisse de la consommation. L'art. 3 de la Loi fédérale sur les voyages à forfait (LVF; RS 944.3) peut sembler similaire, mais il ne prévoit que le caractère obligatoire des informations que contient un prospectus et non l'obligation d'en publier un avec un contenu déterminé.

Le projet propose de régler dans la LCD l'information du consommateur avant la conclusion du contrat. Une règle spécifique au contrat d'utilisation d'immeubles en temps partagé est ainsi introduite dans cette loi. L'information du consommateur dans la phase contractuelle est réglée en droit des contrats (art. 40h CO). Elle inter22 23

Rapport de la Commission, p. 15.

Voir art. 3, let. k à m, LCD.

2498

vient au moment de la conclusion. Il est à noter que la réglementation actuelle, à l'art. 10, al. 1, let. s, de l'ordonnance sur l'indication des prix (OIP; RS 942.211), prévoit déjà l'indication du prix. Cette obligation impose également l'indication précise des prestations auxquelles le prix correspond. Le nouvel art. 3a LCD permet de reprendre la plupart des indications de l'annexe à la directive et entraîne l'application des sanctions pénales prévues à l'art. 23 LCD24. L'art. 3a, al. 1, let. i, LCD étant le pendant de l'art. 40h, al. 2, let. l, CO, il convient de le supprimer selon le concept de la minorité (Baumann J. Alexander, Miesch, Pagan) qui entend renoncer à l'introduction d'un droit de révocation.

La plupart des informations prévues dans la directive ont été reprises dans la LCD, à l'exception des quelques-unes mentionnées ci-dessous.

L'information sur l'exercice du droit n'a pas été reprise (annexe, let. b, de la directive). Concernant la constitution du droit, du point de vue du consommateur, c'est la conclusion du contrat qui lui donne droit à l'utilisation.

Il semble également disproportionné de demander au fournisseur de faire un exposé au consommateur sur la manière d'exercer son droit dans tous les Etats de situation des immeubles. Cette disproportion serait particulièrement aiguë dans les cas où le consommateur a le choix entre plusieurs immeubles situés dans différents pays. Le consommateur non spécialiste aurait par ailleurs de la peine à assimiler toutes ces explications. Son attente réside bien plus dans la possibilité d'exercer son droit sans obstacles. Il revient au fournisseur de faire les démarches nécessaires dans les Etats concernés pour que le consommateur puisse passer sa période de vacances sans problèmes.

L'information sur l'état d'achèvement de raccordements divers (annexe, let. d, ch. 4, de la directive) n'a pas été reprise. Elle est incluse dans l'information générale sur l'achèvement du bien, sans qu'il faille la mentionner explicitement.

Selon la directive, le fournisseur doit indiquer les principes de l'administration et de la gestion du bien (annexe, let. g, de la directive). Il s'agit d'une question liée à l'organisation interne de l'entreprise du fournisseur. Le consommateur dispose déjà d'une information sur les prestations du fournisseur (immeubles
concernés, installations communes et services garantis). Il peut déjà comparer les différentes offres qui lui sont faites sur cette base et se décider sur celle qui lui convient le mieux, sans qu'il soit nécessaire de le surcharger d'informations sur l'organisation qui amène à l'exécution de ces prestations. Il n'aura pas nécessairement les connaissances pour comparer les formes d'organisation divergentes des différents fournisseurs. Pour ces raisons, le projet ne reprend pas cette exigence relative à l'administration et à la gestion du bien.

La directive prévoit l'indication d'une estimation des frais liés aux installations communes (annexe, let. i, de la directive). Les raisons pour lesquelles il ne s'agirait que d'une estimation ne sont pas claires. Le fournisseur peut donner un prix fixe pour l'utilisation d'une piscine ou d'un terrain de tennis (abonnement, prix d'entrée).

C'est pourquoi le projet ne reprend pas le terme «estimation». Le contrat peut prévoir que ces frais peuvent être modifiés par la suite. Par ailleurs, les autres charges ont été regroupées sous le terme «frais accessoires» (eau, chauffage, etc.).

24

Une majorité de lois de transposition des Etats membres prévoient l'amende comme sanction du non-respect de l'obligation de remettre un prospectus; voir rapport de la Commission, p. 8.

2499

La directive ne prévoit l'information relative aux sociétés d'échanges ou de revente que dans le document contractuel (annexe, let. k, en relation avec l'art. 3, al. 1, de la directive). Il n'y a pas de raison à cela. Le fournisseur est à même de fournir ces informations avant la conclusion du contrat. C'est pourquoi elles ont été prévues dans le projet.

Pour les contrats visant l'échange ou la revente du droit et conclus indépendamment du contrat principal, l'obligation d'information se limite à l'indication du prix et des frais de la prestation proposée. Le consommateur agit dans ces cas à titre d'aliénateur et non d'acquéreur du droit. Ce sont les problèmes liés aux coûts excessifs de ces prestations qui sont régulièrement évoqués.

Une minorité de la commission (Thanei, Garbani, Gyr, Hubmann, Leutenegger Oberholzer, Menétrey-Savary, Rechsteiner-Basel, Vischer) propose d'ajouter que l'aliénation de droits d'utilisation au moyen de méthodes commerciales agressives est constitutive de concurrence déloyale. La majorité s'y oppose au motif que la protection des consommateurs est suffisamment servie par l'obligation de leur fournir une série d'informations précontractuelles et parce que la notion d'utilisation de méthodes commerciales agressives est difficilement saisissable et ne sert pas l'intérêt des consommateurs.

4

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

Les modifications législatives proposées n'entraîneront ni dépenses supplémentaires à charge de la Confédération, des cantons ou des communes, ni effets sur l'état du personnel.

5

Constitutionnalité

La compétence de la Confédération pour édicter des dispositions en matière de droit civil se fonde sur l'art. 122, al. 1, de la Constitution (Cst.; RS 101). En vertu de l'art. 97, al. 1, Cst., la Confédération est compétente pour prendre des mesures destinées à protéger les consommateurs et les consommatrices.

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