06.400 Initiative parlementaire Nombre de juges au Tribunal fédéral.

Ordonnance de l'Assemblée fédérale Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats du 21 février 2006

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet d'une ordonnance de l'Assemblée fédérale que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet de l'acte ci-joint.

21 février 2006

Pour la commission: Le président, Franz Wicki

2006-0685

3347

Condensé La loi fédérale sur le Tribunal fédéral dispose que le Tribunal fédéral sur les deux sites de Lausanne et Lucerne, se compose de 35 à 45 juges ordinaires et que le nombre des juges suppléants n'excède pas les deux tiers de celui des juges ordinaires. Elle prévoit par ailleurs que le nombre exact des juges soit fixé dans une ordonnance de l'Assemblée fédérale. La Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats a été chargée par le Bureau du Conseil des Etats d'élaborer cet acte.

Au total aujourd'hui, 41 juges ordinaires et 41 juges suppléants travaillent auprès du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances. Par le présent projet d'ordonnance, la commission propose de fixer à titre provisoire, soit jusqu'en 2011, le nombre des juges ordinaires à 38 et le nombre des juges suppléants à 19.

Une comparaison de l'activité du Tribunal fédéral sur deux périodes et la probable baisse de la charge de travail résultant de la nouvelle loi plaident pour une réduction du nombre des juges. Toutefois, comme tous les effets de la révision de l'organisation judiciaire fédérale sur la charge de travail ­ dans un sens comme dans l'autre ­ ne sont pas quantifiables à l'heure actuelle, il faudra procéder à un nouvel examen du nombre de juges en 2011.

Jusqu'à la fin de la période de fonction actuelle (fin 2008), les postes de juges vacants auprès du Tribunal fédéral ne seront pas pourvus. Si le Tribunal fédéral devait compter à fin 2008 plus de 38 juges ordinaires et 19 juges suppléants, l'Assemblée fédérale devrait réduire leur nombre dans le cadre du renouvellement intégral des juges pour la période de fonction allant de 2009 à 2014.

Le nombre définitif des juges ne peut être fixé que sur la base d'une analyse détaillée des coûts et de l'organisation du Tribunal fédéral. Aussi la présente ordonnance fait-elle obligation au Tribunal fédéral de mettre en place une procédure de contrôle de gestion qui permette de connaître précisément sa charge de travail.

3348

Rapport 1

Genèse du projet

1.1

L'initiative parlementaire

Actuellement, le nombre de juges fédéraux est fixé aux art. 1 et 123 de la loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ; RS 173.110). Le Tribunal fédéral se compose de 30 juges et de 30 juges suppléants, le Tribunal fédéral des assurances compte 11 juges et 11 juges suppléants. Selon l'art. 1, al. 3 et 4, de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF)1, le Tribunal fédéral (comprenant le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances actuels) se compose de 35 à 45 juges ordinaires et de juges suppléants, dont le nombre n'excède pas les deux tiers de celui des juges ordinaires. Selon l'art. 1, al. 5, LTF, l'Assemblée fédérale fixe l'effectif des juges dans une ordonnance. La LTF entrera vraisemblablement en vigueur au 1er janvier 2007.

La question du nombre de juges au Tribunal fédéral est étroitement liée à la manière dont le Tribunal est organisé ainsi qu'à son budget. Le Tribunal fédéral règle l'organisation de son administration (art. 188 al. 3 Cst.; RS 101). Dans le projet de budget et les comptes, le Conseil fédéral reprend tels quels les projets du Tribunal fédéral; ce dernier défend son budget et ses comptes devant l'Assemblée fédérale (art. 142 LParl; RS 171.10). Aussi le Conseil fédéral a-t-il renoncé à soumettre comme d'ordinaire un projet d'ordonnance au Parlement, et a-t-il prié la Conférence de coordination de l'Assemblée fédérale de désigner une commission parlementaire qui serait chargée d'élaborer l'ordonnance sur le nombre de juges. Le 26 août 2005, le bureau du Conseil des Etats a chargé sa Commission des affaires juridiques (ciaprès: la commission) de soumettre au Parlement un projet d'ordonnance réglant le nombre de juges du Tribunal fédéral, en accord avec la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N). La présidente du Conseil national a approuvé cette démarche.

Le 29 août 2005, la commission a décidé à l'unanimité, sous réserve de l'approbation de la CAJ-N, d'élaborer un tel projet. Le 5 septembre 2005, La CAJ-N a approuvé cette décision, également à l'unanimité.

1.2

Travaux de la commission

La commission a travaillé en étroite collaboration avec le Tribunal fédéral (TF) ainsi qu'avec le Tribunal fédéral des assurances (TFA). Elle a prié les deux tribunaux de lui remettre un avis écrit sur l'évolution des effectifs et des coûts au cours des dernières années et notamment de lui présenter une estimation concernant les effets escomptés de la réforme de la justice sur leurs charges de travail respectives (augmentation ou diminution). En complément à ces estimations écrites, la commission a procédé à l'audition d'une délégation des deux tribunaux le 31 octobre 2005.

1

FF 2005 3829

3349

Afin de planifier les travaux à venir, la commission a institué un groupe de travail, composé des conseillers aux Etats Rolf Schweiger (président), Hermann Bürgi, Pierre-Alain Gentil et Hansheiri Inderkum.

A sa séance du 21 novembre 2005, la commission a en outre auditionné un expert en gestion des tribunaux.

En vue des travaux ultérieurs de la commission, le groupe de travail a élaboré par la suite des documents-cadre, des statistiques, des calculs et des estimations concernant les effets escomptés en termes de charge de travail, et les a soumis aux deux tribunaux fédéraux. Leurs remarques, leurs corrections et leurs suggestions ont été partiellement prises en compte dans le document final du groupe de travail, rédigé à l'intention de la commission. Ce document a servi de base aux discussions menées par la commission lors de sa séance du 23 janvier 2006, à laquelle a assisté une délégation des deux tribunaux.

Le 21 février 2006, la commission a adopté le projet d'ordonnance ci-joint par 7 voix contre 3, avec une abstention. Conformément à ce que prévoit l'art. 112, al. 1, LParl, elle a été soutenue dans ses travaux par le Département fédéral de justice et de police.

2

Grandes lignes du projet

Avec la révision totale de l'organisation judiciaire, le Parlement se doit d'examiner quel est le nombre adéquat de juges au Tribunal fédéral pour l'avenir. Pour la commission, il est particulièrement important que le souci du maintien d'une justice suprême de haute qualité soit primordial dans cette réflexion. Pour déterminer le nombre adéquat de juges, la commission a analysé l'évolution de la charge de travail des tribunaux fédéraux pendant ces dernières années, ainsi que l'évolution de leurs effectifs en personnel. Elle a aussi examiné quels sont les effets de la révision totale de l'organisation judiciaire auxquels on peut s'attendre sur la charge de travail du Tribunal fédéral. Enfin, en l'absence de données complètes, la commission estime que le nombre de juges ne peut aujourd'hui être fixé que de façon provisoire. Seule l'expérience pratique de la nouvelle organisation judiciaire ainsi qu'une analyse des coûts et de l'organisation permettront de déterminer de façon fiable le nombre de juges nécessaires.

2.1

Charge de travail et effectifs des tribunaux fédéraux

2.1.1

Evolution de la charge de travail entre 1990 et 2005

De 1990 à 1999, le Tribunal fédéral a connu une augmentation constante plus ou moins marquée de sa charge de travail. Le nombre des nouvelles affaires est passé durant cette période d'environ 4600 à 5400 par an. Parallèlement, le nombre des affaires liquidées a lui aussi connu une augmentation constante: alors qu'en 1990, le Tribunal fédéral avait traité 4250 cas environ, le nombre d'affaires qu'il a traitées s'est élevé à 5600 en 1999. En l'an 2000, cette augmentation a marqué le pas, et ce nombre a diminué d'environ 200 par an pendant les trois années qui ont suivi, pour atteindre en 2002 celui de 4554 affaires, soit un retour au niveau le plus bas. Le nombre d'affaires liquidées a connu une évolution similaire, puisqu'il est passé de 3350

5316 cas traités en 2000 à 5047 cas traités en 2001, puis à 4648 cas traités en 2002.

Depuis 2003, le nombre des nouvelles affaires a recommencé à augmenter. En 2005, le nombre des nouvelles affaires a franchi de nouveau ­ pour la première fois depuis l'an 2000 ­ la barre des 5000 cas (voir tableau 1 en annexe).

Au Tribunal fédéral des assurances, la charge de travail a connu une augmentation constante depuis le début des années 1990 (près de 1100 cas par an) d'environ 100 à 200 nouvelles affaires par an. En l'an 2000, un maximum a été atteint avec 2521 cas.

Au cours de la même période, le nombre des affaires liquidées a été quasiment multiplié par deux: de 1137 en 1990, il est passé à 2242 en l'an 2000. À partir de 2001, le Tribunal fédéral des assurances a connu lui aussi un reflux temporaire du nombre des nouvelles affaires, mais cette tendance s'est de nouveau inversée à partir de 2004. En 2005, 2475 nouvelles affaires ont été enregistrées. Une comparaison avec le début des années 1990 permet de constater que le nombre des affaires traitées reste très élevé depuis l'an 2000, puisqu'il s'inscrit dans une fourchette comprise entre 2200 et 2600 cas par an environ (voir tableau 2 en annexe).

2.1.2

Evolution des effectifs

Depuis 1979, le nombre des juges ordinaires du Tribunal fédéral n'a pas changé: le tribunal se compose encore aujourd'hui de 30 juges ordinaires. Depuis 1970, le Tribunal fédéral faisait également travailler un effectif de 15 juges suppléants, qui a été porté à 30 par l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral2, adopté en raison de l'augmentation constante de la charge de travail. Initialement, cet arrêté devait être limité dans le temps (jusqu'au 31 décembre 1988), mais le Parlement a décidé de le proroger à deux reprises, en 1988 puis en 1991. Il reste valable jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF). L'accroissement constant de la charge de travail a également rendu nécessaire une augmentation du nombre des postes de greffier.

Entre 1979 et 1999, leurs effectifs ont plus que triplé pour passer de 28 à 85; cette augmentation a été la plus forte entre 1988 et 1991, période durant laquelle 30 collaborateurs personnels des juges fédéraux au total ont été engagés. Depuis l'an 2000, le nombre des greffiers est en recul. En 2004, 81,5 postes de greffiers étaient effectivement pourvus.

Depuis 1980, le Tribunal fédéral des assurances employait 9 juges ordinaires et 9 juges suppléants. En 2001, cet effectif a été renforcé en raison de la charge de travail croissante pour passer à 11 juges ordinaires et 11 juges suppléants, et il est encore en vigueur à ce jour. La croissance de la charge de travail a également entraîné au Tribunal fédéral des assurances, au cours des 20 dernières années, un renforcement significatif du nombre des greffiers: au début des années 1980, le tribunal en employait 20. Alors qu'en 1997, leur nombre s'élevait à 28, le nombre des postes de greffiers effectivement pourvus en 2003 était de 42,4. Depuis, un poste a pu être supprimé.

2

RS 173.110.1

3351

2.1.3

Estimation pour l'année 2006

Se fondant sur l'augmentation du nombre des nouvelles affaires constatée en 2005, les deux tribunaux fédéraux estiment que cette augmentation se poursuivra en 2006 et au cours des années suivantes. Selon une estimation du Tribunal fédéral, la modification législative entrée en vigueur au 1er janvier 2005 dans le canton de Zurich pourrait entraîner une augmentation massive des nouveaux cas en 2006: cette modification prévoit en effet que les recours en nullité adressés au tribunal de cassation se limiteront désormais à la contestation des décisions de la cour d'assises et du tribunal cantonal statuant en première instance.

Au Tribunal fédéral des assurances (TFA), la charge de travail ne cesse d'augmenter de nouveau depuis 2004. La majorité des instances précédentes continuent d'escompter une augmentation ayant des effets sur le Tribunal fédéral des assurances, dans la mesure notamment où la tendance à recourir au TFA contre des décisions d'instances inférieures est passée de 11 % en 2001 à 21 % aujourd'hui.

2.2

Effets escomptés de la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral en termes de charge de travail à compter de 2007

2.2.1

Objectif de la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale

La révision totale de l'organisation judiciaire fédérale (voir message du Conseil fédéral du 28 février 2001; FF 2001 4000) s'inscrit dans le contexte d'une forte surcharge des tribunaux fédéraux. Le Conseil fédéral a d'ailleurs indiqué qu'un des objectifs principaux de cette révision était précisément de réduire cette charge de travail. Or, le nombre des nouveaux cas au Tribunal fédéral a clairement diminué au cours des délibérations parlementaires. Traitées en amont, certaines parties de la réforme judiciaire ­ telle la révision partielle de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 23 juin 20003 et la réduction de 90 % des procès directs qui en a résulté ­ ont du reste contribué à décharger le Tribunal fédéral dès l'année 2001. Aussi, lors des délibérations parlementaires, les tribunaux ont-t-ils accordé eux-mêmes moins d'importance à l'aspect de la réduction de la charge de travail. Les déclarations qui figurent dans le message du Conseil fédéral du 28 février 2001 concernant la portée de la réduction escomptée de la charge de travail ne peuvent donc être considérées comme exactes que dans une certaine mesure.

2.2.2

Réduction de la charge de travail

La réduction initialement escomptée de la charge de travail due à la nouvelle législation a été décrite en détail dans le message du Conseil fédéral du 28 février 2001.

Dans le cadre des délibérations parlementaires, des modifications ont été cependant apportées. Ainsi, le Parlement a entre autres décidé de supprimer certains motifs d'exclusion en cas de recours de droit public ou de droit pénal (art. 79 et art. 83 LTF) et de réintroduire un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss. LTF). Il 3

RO 2000 2719

3352

n'en reste pas moins que la loi sur le Tribunal fédéral qu'a adoptée le Parlement consacre une tendance vers une charge de travail moindre. Les effets d'une partie des modifications sur la charge de travail ne sont pour l'instant pas encore quantifiables de manière définitive. En revanche, d'autres effets induisant une réduction de la charge de travail ont pu être quantifiés en collaboration avec les tribunaux fédéraux et l'administration. Les réductions escomptées sont présentées ci-après: Le Tribunal pénal fédéral déchargera le Tribunal fédéral des procès pénaux directs.

Cette diminution de la charge de travail est toutefois avérée depuis l'an 2000 déjà, date à laquelle s'est déroulée la dernière procédure pénale fédérale. Depuis, ces cas ont été régulièrement délégués aux cantons. D'après les estimations du Tribunal fédéral, cela représentera à l'avenir un potentiel de réduction d'environ 8 cas par an.

Avec le remplacement de la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral par la Chambre de recours du Tribunal pénal fédéral, il convient de noter qu'une partie des décisions du Tribunal pénal fédéral peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. D'après l'estimation du Tribunal fédéral, la charge antérieure sera réduite de moitié environ, soit 50 cas par an environ.

La nouvelle compétence du Tribunal pénal fédéral dans le domaine de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale signifie que le Tribunal fédéral ne devra plus juger sur le fond qu'une infime partie des anciens cas. Il est possible d'escompter une réduction d'environ 100 cas par an.

L'abandon de la haute surveillance en matière de poursuite et de faillite (art. 15 LP; RS 281.1) et sur les commissions fédérales d'estimation (art. 63 LEx; RS 711) entraînera au total une diminution correspondant environ à quatre semaines de travail d'un juge et à trois semaines de travail d'un greffier.

L'augmentation de la valeur litigieuse de 8000 francs à 15 000 francs en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer ainsi qu'à 30 000 francs dans les autres cas (art. 74, al. 2, LTF) signifiera vraisemblablement qu'environ 10 pour cent des cas de droit civil jusqu'alors adressés au Tribunal fédéral ne pourront plus l'être. Une question qui reste en suspens à ce jour est de savoir dans combien de ces cas une question
juridique de principe sera soulevée (art. 74, al. 2, LTF) et dans combien de cas sera formé un recours constitutionnel subsidiaire. Au total, l'augmentation des seuils des valeurs litigieuses devrait entraîner une diminution d'environ 65 cas par an.

Un certain facteur d'incertitude concernant cette fois-ci l'évolution de la charge de travail du Tribunal fédéral des assurances est liée à la limitation du pouvoir d'examen. Dans le cadre du groupe de travail «Loi sur le Tribunal fédéral» institué par le DFJP lors de la révision totale de l'organisation judiciaire, le Tribunal fédéral des assurances a estimé en 2004 que la compétence d'examen limitée telle qu'elle était initialement envisagée par le Conseil fédéral pourrait entraîner une réduction d'environ 20 % de la charge de travail du tribunal. Le Parlement ne s'est toutefois rallié que partiellement à la proposition du Conseil fédéral: adoptée le 16 décembre 20054, la modification de l'art. 97 LTF signifie que la limitation du pouvoir d'examen s'applique certes au domaine important de l'assurance-invalidité, mais non à ceux de l'assurance militaire et de l'assurance-accident. Il est donc justifié d'escompter une diminution d'environ 15 % de la charge de travail.

4

Dans le cadre d'une révision de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité; FF 2005 6805

3353

À l'heure actuelle, il n'est pas possible d'estimer de manière définitive le volume de la réduction de la charge de travail qui résultera de l'intégration partielle du Tribunal fédéral des assurances au Tribunal fédéral. En effet, l'abandon des tâches administratives de l'actuelle direction du Tribunal fédéral des assurances devra probablement être contrebalancé par un renforcement des efforts de coordination. Dans le cadre du groupe de travail «Loi sur le Tribunal fédéral», le Tribunal fédéral des assurances a estimé que cette intégration partielle devrait pouvoir se traduire par des économies correspondant à quelques 240 jours de travail d'un juge, soit environ un poste de juge. Grâce aux simplifications administratives et à l'abandon de doublons, le tribunal estime en outre qu'il devrait être possible de diminuer l'effectif de 3,5 postes supplémentaires, dont un poste de greffier.

L'obligation imposée aux cantons d'instituer des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance en matière civile et pénale conduira à une réduction de la charge de travail du Tribunal fédéral. L'institution de ces tribunaux ne devant toutefois être effective qu'à l'issue d'un délai de cinq ans (art. 130, al. 1, LTF), il n'est pas possible d'estimer aujourd'hui si et dans quelle mesure cette disposition entraînera dès 2007 une réduction de la charge de travail du Tribunal fédéral.

Il est prématuré de se prononcer sur le point de savoir si le remplacement des Commissions de recours par le Tribunal administratif fédéral entraînera une diminution de la charge de travail au Tribunal fédéral. Sur ce point, il conviendra d'attendre quelques années avant de pouvoir dresser un bilan.

2.2.3

Accroissement de la charge de travail

Ce qui a été dit au sujet de la réduction de la charge de travail s'applique également à un éventuel accroissement de la charge de travail du Tribunal fédéral: cet accroissement n'est quantifiable que sous réserve ou seulement de manière partielle.

L'accroissement escompté de la charge de travail résultant de la suppression du tribunal de cassation du canton de Zurich a déjà été évoquée au point 2.1.3. Le Tribunal fédéral escompte de ce fait un accroissement de sa charge de travail d'environ 100 cas par an.

Dans le domaine des recours en matière de droit public, il est désormais possible ­ à compter d'un certain seuil et pour autant qu'une question juridique de principe soit soulevée ­ de transmettre au Tribunal fédéral des cas concernant également le domaine des marchés publics, cas pour lesquels la Commission fédérale de recours se prononçait jusqu'à présent en dernière instance (art. 83, let. f, LTF). Dans ce domaine, le Tribunal fédéral escompte un accroissement de sa charge de travail correspondant à environ 25 cas par an.

En vertu de l'art. 1, al. 2, LTF, le Tribunal fédéral exerce désormais la surveillance sur le Tribunal pénal fédéral et sur le Tribunal administratif fédéral. Le Tribunal fédéral ne disposant pas d'expérience en la matière, il est donc difficile de fournir des estimations relatives à la charge de travail qu'impliquera cette nouvelle activité.

Le Tribunal fédéral estime actuellement que cela représentera une charge de travail supplémentaire correspondant à 20 % du temps de travail d'un juge et d'un greffier.

3354

Pour le Tribunal fédéral, la simplification du système des voies de droit est liée au développement d'une nouvelle jurisprudence, laquelle impliquera une charge de travail supplémentaire, du moins pendant les premières années qui suivront l'entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal fédéral. En outre, la loi prévoyant que lorsqu'une question juridique à trancher concerne plusieurs cours, l'accord des cours intéressées réunies est requis (art. 23, al. 2, LTF), il s'agira vraisemblablement de prévoir un renforcement de la coordination entre les différentes cours. Des estimations fiables concernant l'accroissement de la charge de travail que cela impliquera ne peuvent être formulées à l'heure actuelle.

2.3

Considérations de la commission concernant le nombre de postes de juges

2.3.1

Nécessité d'une estimation globale des besoins en effectifs

Dans ses rapports avec le Tribunal fédéral, l'Assemblée fédérale agit à quatre niveaux: ­

Elle est chargée de l'élection des juges.

­

Elle exerce la haute surveillance sur le Tribunal fédéral.

­

Elle est compétente en matière de législation judiciaire et donc notamment en ce qui concerne le règlement des questions d'organisation de portée majeure.

­

Elle vote le budget et approuve les comptes annuels.

Le Tribunal fédéral règle l'organisation de son administration.

La préparation des dossiers du Parlement concernant le Tribunal fédéral est du ressort de plusieurs commissions. En laissant de côté la Commission des constructions publiques, sept commissions sont impliquées dans ces travaux: les deux Commissions de gestion en ce qui concerne la surveillance sur la gestion des tribunaux fédéraux; les deux Commissions des finances en ce qui concerne la surveillance financière et les propositions relatives au compte d'Etat et au budget; les deux Commissions des affaires juridiques en ce qui concerne les propositions en matière de législation judiciaire ainsi que la Commission judiciaire de l'Assemblée fédérale pour l'élection des juges.

La question de savoir si et dans quelle mesure une certaine rationalisation serait nécessaire n'était pas le propos de la commission. Pour déterminer le nombre de juges, il a toutefois été nécessaire de procéder à des analyses d'ensemble. Le futur cadre financier, le nombre de juges, le nombre de greffiers et l'organisation des services sont des questions étroitement liées entre elles. Il en va de même en ce qui concerne d'éventuelles adaptations des structures organisationnelles et de direction, qui devront assumer à l'avenir un nombre croissant de tâches de gestion en plus des tâches judiciaires à proprement parler.

La commission a essayé d'obtenir une vision globale en se fondant sur des modèles établis à partir d'estimations. Dans un premier temps (voir ch. 2.3.3), elle a retenu l'hypothèse d'un nombre d'affaires à traiter par le nouveau Tribunal fédéral s'élevant à 7050 cas. Ce nombre correspond au nombre d'affaires conjointement traitées 3355

en moyenne par le Tribunal fédéral et par le Tribunal fédéral des assurances au cours des années 1992 à 1999 (période 1) puis au cours des années 2002 à 2004 (période 2) (voir tableau 3 en annexe). Partant de cette hypothèse, la commission s'est posé les questions suivantes: a.

Avec quel effectif (juges, juges suppléants et greffiers) en moyenne les 7050 cas (nombre arrondi) ont-ils été traités au cours de ces deux périodes?

b.

Existe-t-il entre ces deux périodes des différences qui auraient pu être à l'origine de besoins spécifiques en matière d'effectif?

c.

Quels ont été ­ ou auraient pu être ­ les effets de l'augmentation des effectifs de certains services (infrastructure, documentation, etc.) sur le temps nécessaire au traitement des recours?

d.

Est-il possible de définir un cadre financier qui, eu égard à la rémunération du personnel judiciaire (juges et greffiers), permette le traitement de 7050 cas?

La commission a laissé de côté la question de savoir dans quelle mesure des modifications de la structure de direction pourraient avoir des effets sur la charge de travail future.

La volonté de parvenir à une vision globale ne doit pas conduire à remettre en cause le noyau dur de l'autonomie administrative des tribunaux fédéraux. Il faut néanmoins admettre de relativiser quelque peu cette autonomie, car la compétence du Parlement ­ et notamment sa souveraineté budgétaire ­ lui fixe par définition des limites.

2.3.2

Procédure par étapes

La commission a retenu une procédure en quatre étapes: a.

Estimation des besoins sans tenir compte ni de la nouvelle LTF ni de la croissance des services (étape 1, ch. 2.3.3)

b.

Correction de cette première estimation due aux modifications constatées entre les périodes 1 et 2 ainsi qu'après la période 2 (étape 2, ch. 2.3.4)

c.

Conséquences de la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral (étape 3, ch. 2.3.5)

d.

Conséquences d'une réduction massive du nombre de juges suppléants (étape 4, ch. 2.3.6)

3356

2.3.3

Etape 1: estimation des besoins à partir d'une comparaison des périodes 1 et 2

Le nombre des affaires traitées a été quasiment aussi élevé au cours de la période 1992 à 1999 qu'au cours de la période 2002 à 2004, soit une moyenne de 7050 (7059 pour la première et 7040 pour la seconde). Ces affaires ont été traitées par: Juges

Greffiers

Juges suppléants

Période 1

39

107

39

Période 2

41

124

41

Le rapport «greffier/juge» était de 2.75 au cours de la période 1, et de 3 au cours de la période 2.

La commission a retenu l'hypothèse selon laquelle le cadre financier prévu pour la rémunération des juges et des greffiers au cours de la seconde période devait correspondre, compte tenu du nombre quasiment similaire de cas à traiter, à celui de la première période, même si elle s'est basée, à des fins de comparaison, sur le montant arrondi des rémunérations de l'année 20045. Tout d'abord, il a été nécessaire de tenir compte du fait qu'au cours de la première période, le recours aux juges suppléants a été légèrement plus important: leur taux d'occupation global correspondait à 7.5 postes à temps complet. Au cours de la seconde période, ce taux a été de 6.4 postes à temps complet (voir tableau 3 en annexe). Il convient de tenir compte de cette différence de 1.1 poste dans le calcul ci-après afin d'obtenir une comparaison fiable entre les deux périodes. Etant donné qu'un juge suppléant travaillant à temps complet percevrait une rémunération correspondant à 70 % de la rémunération d'un juge fédéral, 1.1 poste de juge suppléant représente financièrement l'équivalent d'un poste de juge fédéral à 80 % (soit 0.8 poste).

Afin de pouvoir définir le cadre financier prévu pour les personnes travaillant à temps complet au tribunal (juges et greffiers), le calcul suivant a été effectué (sur la base de chiffres arrondis):

5

La rémunération annuelle des juges du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances s'est élevée en 2004 à 329 678 francs (voir art. 1a de l'ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant les traitements et la prévoyance professionnelle des magistrats, RS 172.121.1). Les données relatives aux traitements des greffiers et des juges suppléants proviennent des tribunaux fédéraux.

3357

Période 1:

Francs

39 juges fédéraux à Fr. 330 000 0,8 équivalent de poste de juge fédéral 107 greffiers à Fr. 156 000

16 692 000

Total

29 831 000

Période 2:

12 870 000 264 000

Francs

41 juges fédéraux à Fr. 330 000 124 greffiers à Fr. 156 000

13 530 000 19 344 000

Total

32 874 000

Une autre question à examiner était celle de la répartition de la masse salariale globale entre les juges ordinaires et les greffiers. Il est incontesté que la commission n'est pas compétente pour déterminer le nombre de greffiers. Elle a néanmoins dû faire des estimations à ce sujet (qui ne sont pas préjudiciables pour le Tribunal fédéral); un examen global ne serait sinon pas possible. Le nombre de greffiers sera en revanche important dans le cadre de la fixation du budget.

La commission est partie de l'idée que les greffiers seront de plus en plus impliqués dans l'examen de la grande majorité des cas portés au Tribunal fédéral. Cette évolution de la jurisprudence est aujourd'hui déjà réalité. Jusqu'en 2004, le ratio entre juge et greffiers a augmenté de 0,25 (de 2,75 à 3). Si ce rapport reste déterminant, il convient de répartir la masse salariale définie pour la période 1 (1992 à 1999), soit 29 831 000 francs en conséquence. La masse salariale pour un «groupe de juge» (un juge et 3 greffiers) s'élève à 798 000 francs. La masse salariale totale de la période 1992 à 1999 divisée par ce montant dégage un besoin de 37,4 juges et 112,2 greffiers.

La commission est d'avis que les deux périodes considérées sont assez semblables pour qu'il se justifie de se baser sur la première période (1992 à 1999) pour déterminer le futur cadre financier.

La première période (1992 à 1999) est caractérisée par un fort accroissement du nombre d'affaires et une adaptation des ressources en personnel toujours décalée dans le temps. Ceci créa une certaine pression et contraignit le Tribunal fédéral de rationnaliser les procédures, non pas en ce qui concerne la décision sur le fond, mais du point de vue de la motivation des jugements. Les procédures simplifiées avec motivation sommaire (art. 36a OJ; RS 173.110) ont en particulier augmenté.

Etant donné que ce sont en premier lieu les greffiers qui élaborent la motivation des jugements, c'est leur nombre qui a tout d'abord augmenté. Les juges sont devenus dans la plupart des cas des «managers de cas». Ils déterminaient les questions les plus fondamentales, donnaient des impulsions pour leur traitement, discutaient les solutions possibles et, de manière générale, contrôlaient et coordonnaient le traitement des affaires.

3358

Le Tribunal fédéral souligne que la législation est devenue plus complexe, notamment si l'on considère l'aspect du droit européen. Il est par ailleurs d'avis que l'augmentation du nombre d'avocats est un facteur qui fait que les cas sont devenus plus compliqués.

La commission est d'avis que les différences entre les deux périodes considérées ne sont pas importantes. Il est possible que la complexité des procès ait quelque peu augmenté. D'un autre côté, le fait que la plupart des cas soient traités par des avocats assure dans une certaine mesure que le contenu du procès est, tout au moins en partie, élaboré et présenté de manière systématique. La commission est en revanche d'avis qu'il convient d'utiliser avec réserve la procédure simplifiée avec motivation sommaire. Ceci n'a en principe d'effet que sur le nombre des greffiers. La commission admet que dans les deux périodes considérées le même sérieux a été consacré à produire des jugements corrects sur le fond et donc que le même temps y a été nécessaire et effectivement consacré. Ainsi, seul le nombre des jugements rendus, et non pas l'ampleur de leur motivation, est déterminant pour déterminer le nombre de juges. Si l'on admet que cette prémisse est exacte, on peut déterminer le nombre requis de juges en se fondant sur le nombre de cas liquidés.

La commission est d'avis qu'il est inévitable que les juges opèrent comme des managers de cas. Ceci découle déjà de la LTF. Il n'est en effet pas déterminant que l'ensemble des cas soient traités par 37.4 juges, ou par 45 juges, nombre maximum prévu par la LTF (art. 1, al. 3). Dans les deux cas, la contribution des greffiers sera toujours plus importante. Le facteur déterminant est que les impulsions prépondérantes pour le jugement matériel viennent des juges, et que ceux-ci assurent la coordination et le contrôle. Sur la base de cette appréciation, la commission est arrivée à la conclusion que le nombre de 37.4 postes de juges est correct, même si le nombre de cas à traiter à l'avenir s'élèverait à 7050 par année. Dans la première étape, elle a donc retenu ce chiffre.

2.3.4

Etape 2: Modification de l'étape 1

2.3.4.1

Développement des services

Outre les juges et les greffiers, 99 postes (secrétariat, services, informatique, documentation etc.) étaient occupés au seul Tribunal fédéral en 1999. Ce nombre a augmenté jusqu'en 2004 de 14,5 unités pour arriver à 113,5 postes. En 2005, cinq postes supplémentaires ont été créés ans le domaine de l'informatique, essentiellement pour couvrir les besoins du nouveau Tribunal pénal fédéral et du nouveau Tribunal administratif fédéral6. La commission n'en déduit donc pas un accroissement de l'efficacité dans le rendement des jugements et ainsi une diminution des besoins en ce qui concerne les juges et les greffiers. Toutefois, elle estime que le seul accroissement de l'efficacité du fait du développement de l'informatique et de la documentation permettrait de réduire de 5 % le temps consacré au traitement des recours.

Ceci permettrait de réduire le nombre des juges à 35,6 et celui des greffiers à 106,6.

Dans la discussion sur le nombre adéquat de juges, le développement des services

6

Les informations concernant l'évolution des postes de travail proviennent du Tribunal fédéral

3359

peut à tout le moins être pris en considération comme critère d'arrondissement vers le haut ou vers le bas, au cas où les bases retenues par la commission seraient jugées trop pessimistes ou trop optimistes.

2.3.4.2

Augmentation du nombre de cas en 2005

En 2005, les tribunaux fédéraux ont enregistré 7487 nouveaux recours, soit 473 de plus que ce que la commission a admis dans son modèle de calcul présenté sous chiffre 2.3.3. La question s'est posée de savoir si cette augmentation doit être considérée comme isolée, ou si elle constitue le début d'une période d'accroissement du nombre d'affaires. Etant donné que le nombre de cas a varié dans les années 2002 à 2004 (voir tableaux 1 et 2 en annexe), on pourrait admettre que ce sera le cas à l'avenir aussi et que l'on ne peut pas encore parler d'une tendance claire. Les tribunaux fédéraux sont toutefois d'avis qu'il faut compter avec une tendance à la hausse pour 2006 aussi (voir chiffre 2.1.3). C'est pourquoi la commission a admis qu'il y aura à l'avenir un accroissement de recours. Dans son estimation des besoins, elle se base sur 350 cas supplémentaires par année. Cette estimation tient compte de la responsabilité du Parlement d'assurer une jurisprudence optimale à l'avenir aussi. Si l'on compte 350 cas supplémentaires par année, cela implique une augmentation de 5 % du nombre de juges et de greffiers.

Juges Greffiers

2.3.5

37,4

+

1,9

=

39,4

112,2

+

5,6

=

117,8

Etape 3: Prise en compte des effets résultant de la nouvelle LTF

La comparaison des deux périodes effectuée au chiffre 2.3.3 l'a été en se référant à la charge de travail des deux tribunaux en fonction de la législation actuelle. N'a pas été prise en compte la réduction escomptée de la charge de travail du nouveau tribunal découlant de la révision de la législation sur le Tribunal fédéral. Ainsi qu'il a été montré aux chiffres 2.2.2 et 2.2.3, les effets de la nouvelle législation ­ qu'ils impliquent une réduction ou une augmentation de la charge de travail ­ ne sont pas encore quantifiables de manière définitive. N'ont donc été pris en compte dans le calcul des effets de l'entrée en vigueur de la LTF sur la charge de travail des juges et des greffiers que les facteurs qui peuvent dès aujourd'hui faire l'objet d'estimations quantitatives.

Afin de pouvoir examiner les effets quantifiables de la LTF, la commission a retenu l'hypothèse d'un nombre d'affaires traitées s'élevant à 7400 par année. Au moyen d'un calcul, il est possible d'illustrer la charge de travail à laquelle auraient dû faire face les juges et les greffiers si les deux tribunaux fédéraux avaient dû traiter ces cas avec un effectif de 39,4 juges et de 117,8 greffiers et si les méthodes de travail avaient été les mêmes qu'au cours des années 2002 à 2004.

3360

Sur les 7400 cas, 270 environ seraient liquidés par ordre présidentiel7 et 510 autres feraient l'objet d'un rapport et d'une proposition établis par un juge suppléant8.

Ainsi, il reste 6620 cas qui représentent une charge significative pour les juges ordinaires et les greffiers. Avec un effectif de 39,4 postes de juge, cela donnerait un total par juge d'environ 168 cas à traiter et d'environ 375 autres cas à traiter par voie de circulation.

Pour les 117,8 greffiers, cela signifierait ­ pour autant qu'un seul d'entre eux soit chaque fois associé au traitement d'une affaire ­ qu'ils participent chacun au traitement d'environ 56 cas.

2.3.5.1

Prise en compte de la réduction de la charge de travail

Les éléments qui devraient avoir pour effet une diminution de la charge de travail sont indiqués sous chiffre 2.2.2. Les chiffres qui y sont indiqués peuvent servir de base pour calculer l'effet de cette diminution sur le nombre de postes de juges.

L'abandon des procès directs entraîne une réduction de 8 cas par an pour le nouveau Tribunal fédéral. Partant de l'hypothèse selon laquelle chacun des 39,4 juges doit statuer sur 168 cas par an (voir ch. 2.3.5), 8 cas en moins représentent une réduction d'environ 0,05 poste de juge. S'agissant des greffiers, cela représente ­ en admettant qu'ils participent en moyenne au traitement de 56 cas par an ­ un potentiel de réduction de 0,14 poste.

Le remplacement de la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral par la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral apporte au premier une réduction d'environ 50 cas par an. Celle-ci correspond à 0,3 poste de juge et à 0,9 poste de greffier.

Dans le domaine de l'entraide internationale en matière pénale, la nouvelle compétence du Tribunal pénal fédéral va entraîner une diminution d'environ 100 cas par an au Tribunal fédéral. Cette diminution correspond à 0,6 poste de juge et à 1,78 poste de greffier.

L'abandon de la haute surveillance en matière de poursuite et de faillite et sur les commissions fédérales d'estimation entraînera dans l'ensemble une diminution correspondant environ à quatre semaines de travail d'un juge et à trois semaines de travail d'un greffier. En admettant qu'une année comporte 47 semaines de travail, cela représenterait une réduction de 0,08 poste de juge et de 0,06 poste de greffier.

L'augmentation du seuil des valeurs litigieuses et la suppression qu'elle entraîne d'environ 65 cas par an permet d'obtenir une réduction de 0,4 poste de juge et de 1,16 poste de greffier.

En supposant que la limitation de la cognition entraîne une diminution de 15 % de la charge de travail, cela signifie que les 11 juges travaillant actuellement au sein des cours chargées du droit des assurances sociales sont concernés par une réduction de

7 8

Au Tribunal fédéral: 264 cas en 2003 et 273 en 2004. Pas de cas liquidés par ordre présidentiel au TFA.

Les juges suppléants des deux tribunaux fédéraux ont traité en moyenne 510 cas entre 2002 et 2004 (voir sur ce point les rapports de gestion du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances pour les années 2002 à 2004).

3361

1,65 poste de juge. En ce qui concerne les 41 greffiers travaillant actuellement au Tribunal fédéral des assurances9, cela représenterait une économie de 6,15 postes.

Grâce à l'intégration partielle du Tribunal fédéral des assurances, il sera possible de faire l'économie d'un poste de juge et d'un poste de greffier.

En additionnant tous ces effets quantifiables, on obtient un potentiel de réduction de la charge de travail qui s'élève au total à 4,08 postes de juge et à 11,13 postes de greffier.

2.3.5.2

Prise en compte de l'accroissement de la charge de travail

Ainsi qu'il a été montré au chiffre 2.2.3, la réduction de la charge de travail sera vraisemblablement contrebalancée par un accroissement de celle-ci. En raison de la suppression du tribunal de cassation du canton de Zurich, le Tribunal fédéral escompte 100 cas supplémentaires par an. Cela se traduirait ­ en admettant de nouveau qu'un juge statue sur 168 cas en moyenne par an et qu'un greffier participe au traitement de 56 cas ­ par un accroissement de la charge de travail correspondant à 0,6 poste de juge et à 1,78 poste de greffier.

D'après les estimations du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances, la surveillance sur le Tribunal pénal fédéral et sur le Tribunal administratif fédéral entraînera un accroissement de la charge de travail correspondant à 0,2 poste de juge et à 0,2 poste de greffier.

Les 25 cas supplémentaires dans le domaine des recours en matière de droit public entraînera quant à lui un accroissement de la charge de travail correspondant à 0,15 poste de juge et à 0,45 poste de greffier.

L'accroissement quantifiable de la charge de travail correspond donc au total à 0,95 poste de juge et à 2,43 postes de greffier.

2.3.5.3

Calcul du solde

La différence entre la réduction et l'accroissement quantifiables de la charge de travail (3,13 postes de juge) porte l'effectif nécessaire, à l'issue de l'étape 3, à un total de 36,27 postes de juge (39,4 moins 4,08 plus 0,95).

Le nombre requis de greffiers s'établirait à 109,01 (117,8 moins 11,13 plus 2,43).

2.3.6

Etape 4: réduction de l'effectif des juges suppléants

Dans la moyenne des années 2002 à 2004, les juges suppléants ont été engagés pendant 1465 jours pour le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances (voir tableau 3 en annexe). À l'avenir, ils pourront continuer d'effectuer un volume de travail total de 912 jours. Il n'est pas nécessaire pour cela de s'aligner sur le 9

D'après les données des tribunaux fédéraux, le Tribunal fédéral employait 81.5 greffiers en 2004, tandis que le Tribunal fédéral des assurances en employait 41.4.

3362

maximum prévu à l'art. 1, al. 4, LTF, soit deux tiers du nombre de juges ordinaires.

La moitié, soit 19, suffit pour ce faire.

Si l'on répartit 912 jours de travail entre 19 juges suppléants, cela signifie chacun des juges suppléants travaillera pendant 48 jours par année (soit 4 jours par mois) pour le Tribunal fédéral. Cela correspond à un taux d'occupation d'environ 20 %. La commission estime qu'un tel pourcentage est nécessaire afin de garantir que les juges suppléants maintiennent leur niveau d'expérience et qu'il puisse en tout temps être fait appel à eux (voire avec un taux d'occupation légèrement plus élevé).

Si, à l'avenir, les juges suppléants ne travaillent plus que 912 jours par année, on obtient une différence de 553 jours de travail par rapport aux 1465 jours qu'ils ont effectués jusqu'à présent. Si l'on admet qu'une année compte 230 jours de travail, 553 jours correspondent à environ 2,4 postes à plein temps. A l'avenir, les juges fédéraux (conjointement avec les greffiers) devraient prendre en charge ce volume de travail de 2,4 postes. En partant du principe que l'efficacité d'un juge fédéral est supérieure de 30 % environ à celle d'un juge suppléant (principe qui se traduit par une différence de rémunération correspondante), on arrive à la conclusion qu'il convient d'augmenter l'effectif des juges fédéraux de 1,7 poste.

Cela conduit au résultat final suivant pour les juges fédéraux: 36,27 (conformément à l'étape 3) plus 1,7 (conformément à l'étape 4) = 37,79.

En admettant que l'efficacité des juges ordinaires et des juges suppléants soit identique, de même que le temps nécessaire au traitement de cas identiques, cela entraînerait une augmentation du nombre de juges (36,27 + 2,4), qui passerait à 38,67.

2.4

Détermination du nombre de juges

Sur la base de ces réflexions, la commission a décidé par 6 voix contre 2, avec 3 abstentions, de prévoir un nombre de 38 juges. Elle estime que le potentiel de réduction du volume de travail par un développement des services (ch. 2.3.4.1) justifient en l'occurrence d'arrondir le chiffre de 38,67 à 38. Elle propose par ailleurs de fixer à 19 le nombre des juges suppléants.

Le nombre 38 se situe exactement entre le nombre actuel de 41 juges et le minimum de 35 juges prévu à l'art. 1, al. 3, LTF. De l'avis de la majorité de la commission, ce nombre ne doit toutefois pas être interprété comme un compromis destiné à satisfaire tout le monde, car il est bien plus le résultat des diverses réflexions développées précédemment. La majorité de la commission admet qu'il serait tout à fait envisageable de mener d'autres réflexions. Certaines d'entre elles sont indiquées ci-après sous forme d'ébauche, de mêmes que leurs conséquences: a.

Conformément au maximum prévu par la LTF, le nombre de juges suppléants serait fixé à 25. Cela correspondrait à un poste de juge et entraînerait une réduction du nombre de juges, qui passerait à 37.

b.

Il serait envisageable de prévoir un taux d'occupation de 10 % pour les juges suppléants. Le nombre de juges passerait alors à 40. L'emploi de juges suppléants ne serait plus dès lors garanti que dans une certaine mesure.

3363

c.

Le rapport juge/greffiers pourrait passer de 1 à 2,75. Cela signifierait une augmentation de 2,5 du nombre de juges et une réduction de 7,5 du nombre de greffiers (et ce pour un cadre financier prédéfini et inchangé concernant le personnel judiciaire employé à temps complet).

d.

Les nouvelles affaires de l'année 2005 sont considérées comme un cas unique, l'hypothèse déterminante restant celle d'un nombre de cas moyen correspondant à celui des années 2002-2004, soit 7050 cas. Le nombre des juges fédéraux diminuerait de 2,25 (arrondi à 2).

e.

Le développement des services (informatique, documentation, etc.) est pris en considération, en ce sens qu'il devrait entraîner un surcroît d'efficacité.

Ceci aurait pour effet une réduction du nombre de juges, variant en fonction de l'appréciation du surcroît d'efficacité.

Cette série d'appréciations diverses montre que le nombre de juges idéal n'existe pas. Toutes les réflexions menées ­ quels que soient les résultats auxquelles elles conduisent ­ reposent sur des estimations. La majorité de la commission estime que celles qu'elle a retenues sont à la fois plausibles et compréhensibles. Si elles devaient s'avérer inexactes par la suite, il serait possible de les corriger à tout moment. L'instrument que constitue l'ordonnance parlementaire a justement été choisi parce qu'il permettrait de les modifier relativement simplement. Des corrections ­ qui ne concerneraient certes pas le nombre de juges ­ sont également envisageables dans le cadre de la procédure budgétaire. Il est tout à fait possible par ailleurs d'adapter le taux d'occupation des juges suppléants en fonction de l'évolution du nombre de cas à traiter.

Une minorité I (Marty Dick, Berset, Bonhôte) propose de maintenir le nombre actuel de 41 juges. Elle est particulièrement réservée à l'égard des diverses réflexions faites par la commission; celles-ci reposent essentiellement sur des estimations, à l'heure actuelle non vérifiables. Elle estime par ailleurs qu'il est discutable de vouloir soumettre l'activité du Tribunal fédéral, la plus haute juridiction du pays et le troisième pouvoir de l'Etat fédéral, à une analyse aussi détaillée. Pour pouvoir déterminer les effets de la nouvelle organisation judiciaire sur le volume de travail du Tribunal fédéral, il convient d'en faire l'expérience pratique pendant un certain temps. Ce n'est que sur une telle base que l'on pourrait envisager de réduire le nombre de juges. La minorité estime qu'il faut en premier lieu viser le maintien de la haute qualité de la justice, ce qui est mis en péril avec une diminution du nombre de juges.

Une minorité II (Hess Hans, Germann) est d'avis que, sur la base des estimations et réflexions exposées sous chiffre 2.3, le nombre de juges peut être réduit à 35. Elle se réfère par ailleurs à l'intention déclarée par le Tribunal fédéral de créer sept cours.

Le nombre de 35 juges permettrait de constituer sept cours de même grandeur. Si des informations plus précises sur le nombre d'affaires traitées par chaque juge devaient ultérieurement démontrer que des juges supplémentaires sont nécessaires, il serait toujours possible d'en augmenter le nombre.

3364

3

Position du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances

Conformément à l'art. 162, al. 4, LParl10, la commission a donné aux tribunaux fédéraux la possibilité de se prononcer dans le cadre de ses travaux. Ceux-ci se prononceront encore par écrit à l'intention du Conseil des Etats sur le projet de la commission.

Ci-après, il est rendu compte de l'avis défendu par les tribunaux dans le cadre des travaux de la commission.

Le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances estiment que l'introduction de la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral ne devrait pas s'accompagner d'une réduction du nombre de juges, du moins dans un premier temps. À leurs yeux, en effet, modifier le nombre de juges de manière responsable nécessite une analyse économique qui tienne compte des missions assignées à la cour suprême. Or, tout comme la commission, les tribunaux fédéraux considèrent qu'une analyse détaillée des coûts et de l'organisation ne pourra être menée judicieusement qu'après l'entrée en vigueur de la LTF et seulement une fois que son application sera bien établie.

3.1

Nécessité d'une jurisprudence de haute qualité

Une cour suprême n'a pas seulement pour but de dire le droit; elle doit aussi veiller à son unification et à son développement. Ces deux dernières missions doivent rester du ressort des juges fédéraux; il serait inadmissible de les déléguer aux greffiers.

Pour rendre des décisions de principe avec toute la rigueur requise, les juges doivent bien sûr posséder de solides connaissances juridiques et agir en toute indépendance, mais ils ont surtout besoin de temps. Le volume de travail auquel chaque juge doit faire face a déjà fortement augmenté ces dernières décennies: en 1979, un juge auprès du Tribunal fédéral était saisi d'environ 100 affaires par an; en 2004, ce chiffre s'élevait à 161. Accroissement similaire au Tribunal fédéral des assurances: il y a 20 ans, chacun des neuf juges traitait environ 150 affaires par an en qualité de juge d'instruction; aujourd'hui, chacun des onze juges en traite plus de 200 en moyenne par an. Une diminution du nombre de juges aurait pour corollaire une augmentation supplémentaire du nombre d'affaires confiées à chaque juge, ce qui compromettrait sérieusement la capacité de l'instance suprême à rendre une jurisprudence de qualité dans des délais raisonnables.

Pour les mêmes raisons, le Tribunal fédéral estime qu'il lui est nécessaire de disposer du maximum du nombre de juges suppléants prévus à l'art. 1, al. 4, LTF, soit 27 postes, afin de pouvoir absorber les pics d'activité du tribunal. Pour le Tribunal fédéral, il va de soi d'utiliser avec parcimonie les ressources en personnel mises à sa disposition et de recourir à moins de juges suppléants en cas de baisse du volume de travail. De même, le tribunal est prêt à gérer de manière flexible le nombre de ses greffiers.

10

RS 171.10

3365

3.2

Principe de la comparaison entre deux périodes

Le fait de comparer l'activité du Tribunal fédéral sur deux périodes en se fondant uniquement sur le nombre d'affaires traitées pour juger du travail des juges et des greffiers pose un problème de fond. En effet, une telle méthode pourrait donner l'impression que le Tribunal fédéral n'est qu'une machine à statuer. Or si l'efficacité et la rapidité avec laquelle les affaires sont traitées par la plus haute juridiction du pays sont importantes, la qualité de la jurisprudence, notamment, est tout aussi déterminante. Il est à cet égard particulièrement problématique de comparer deux périodes pendant lesquelles la charge de travail des tribunaux était totalement différente.

De 1992 à 1999, les tribunaux fédéraux ont été confrontés à une surcharge de travail chronique, si bien que des premiers signes de dysfonctionnement sont apparus tant au Tribunal fédéral qu'au Tribunal fédéral des assurances: augmentation massive depuis la fin des années 80 du nombre d'affaires pendantes et pic, en 1992, de la durée moyenne des procédures (200 jours). Pour faire face à cet accroissement, le Tribunal fédéral avait dû traiter en procédure simplifiée deux tiers des affaires dont il était saisi en ne motivant que sommairement sa décision. Si la qualité de la jurisprudence n'a pas souffert de cette mesure, celle-ci s'est faite au détriment du service au justiciable. La période allant de 1992 à 1999 ne peut donc être comparée avec la situation prévalant ces dernières années, et encore moins être utilisée comme base pour fixer le nombre de juges.

À l'époque, d'ailleurs, le Parlement avait reconnu que les tribunaux fédéraux étaient surchargés; il avait alors mis davantage de moyens à leur disposition dans le cadre du budget pour créer des postes supplémentaires de greffiers. En 2001, le nombre de juges auprès du Tribunal fédéral des assurances était passé de 9 à 11. Ces mesures ne sont pas étrangères au reflux observé depuis 2001. Aujourd'hui, le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances sont en mesure d'assumer leur travail dans des délais raisonnables ou quasiment. Le nombre d'affaires pendantes en fin d'année a diminué et la durée moyenne des procédures est désormais de 90 jours. La procédure simplifiée n'est plus utilisée que pour un tiers des affaires.

3.3

Accroissement de la charge de travail du fait de l'introduction d'une nouvelle procédure de recours

Du point de vue des tribunaux fédéraux, le fait de se fonder sur des critères purement quantitatifs pour calculer les effets hypothétiques de la nouvelle LTF sur la charge de travail (accroissement et réduction) pose problème. En effet, cette méthode néglige notamment que le Tribunal fédéral devra développer une nouvelle jurisprudence les premières années suivant l'entrée en vigueur de la nouvelle LTF.

La charge de travail qui en résultera n'est pas quantifiable aujourd'hui, mais elle sera lourde: étant donné que de nombreuses questions de procédure sont nouvelles, le Tribunal fédéral devra coordonner une part considérable de ses décisions avec plusieurs de ses cours, voire avec la totalité d'entre elles. Dès lors, même en postulant que certaines dispositions de la LTF entraînant une réduction de la charge de travail soient mises en oeuvre immédiatement, il ne faudra guère tabler sur une diminution globale du volume de travail du tribunal pendant les premières années suivant l'introduction de la loi. De l'avis des tribunaux, il serait imprudent de com3366

promettre l'un des objectifs de la révision, à savoir la simplification de la procédure pour les justiciables, en ne donnant pas au Tribunal fédéral les moyens nécessaires pour développer une jurisprudence de qualité.

3.4

Un gisement d'économies minime

Les frais de personnel représentent certes 85 % environ du budget du Tribunal fédéral et du Tribunal fédéral des assurances, mais celui-ci ne s'élève qu'à 0,12 % de l'ensemble des dépenses de l'Etat. Sur les 41 postes de juges que les tribunaux fédéraux estiment nécessaires, la commission propose d'en biffer trois, alors même que cette mesure sera quasiment invisible pour le budget de la Confédération: le potentiel d'économies est minime. On ne saurait donc ici se prévaloir de considérations purement budgétaires pour trancher la question du nombre de juges nécessaires au bon fonctionnement de la plus haute juridiction du pays.

4

Commentaire par article

Art. 1 Le nombre de juges ordinaires est fixé à l'al. 1. La majorité de la commission propose de prévoir 38 juges, alors qu'une minorité désire rester à l'effectif actuel de 41 et qu'une autre minorité propose de réduire le nombre des juges à 35. Le commentaire de ces propositions se trouve au chiffre 2.4.

L'al. 2 fixe le nombre de juges suppléants à 19.

Art. 2 L'al. 1 impose au Tribunal fédéral l'établissement d'une procédure de contrôle de gestion qui servira à fournir des informations à l'intention de la commission parlementaire compétente. L'instauration de cette procédure doit permettre de disposer d'indications précises concernant la charge de travail du Tribunal fédéral. Ainsi qu'il a été mentionné aux chiffres 2.2.2 et 2.2.3, la portée exacte de la diminution de la charge de travail du Tribunal fédéral qu'entraînera la nouvelle législation ne peut pas pour l'instant faire l'objet d'une estimation définitive. Si des estimations quantifiables sont possibles dans certains domaines, d'autres domaines ne s'y prêtent pas pour le moment.

Le nombre de postes de juge ne pourra être fixé de manière définitive que sur la base d'une analyse détaillée des coûts et de l'organisation du Tribunal fédéral. Or, la réalisation d'une telle analyse suppose de posséder des données exactes concernant notamment le temps consacré par les juges et les greffiers au traitement de chacun des dossiers. Le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances disposent certes d'un programme statistique spécifique qui est conçu comme un instrument de conduite et qui leur permet de répartir au mieux le travail en fonction des charges de travail respectives et des types d'affaire, des langues, des cours, des juges et des

3367

greffiers11, mais le temps consacré par un juge ou par un greffier au traitement de chaque dossier ne fait l'objet d'aucun relevé statistique. Pour des raisons pratiques, il n'est donc pas possible aujourd'hui de réaliser une analyse des coûts et de l'organisation des tribunaux fédéraux. Lorsqu'il s'agira de fixer le nombre de juges de manière définitive, il sera essentiel de disposer de telles statistiques.

La procédure de contrôle de gestion à instaurer à cet effet doit donc fournir des indications sur le nombre de dossiers traités par les juges (let. a). Il conviendra en l'occurrence de faire la distinction entre la fonction occupée par un juge dans le traitement d'un dossier (rapporteur, corapporteur, 2e juge ou 3e juge, etc.). Lorsqu'un juge aura été rapporteur, il conviendra de préciser s'il a lui-même rédigé le rapport ou s'il a confié cette rédaction à un greffier (let. b et d). En outre, le contrôle de gestion doit permettre de mesurer le temps consacré par un juge au traitement de chaque dossier (let. c).

Dans le cadre de son rapport de gestion annuel, le Tribunal fédéral rendra compte de l'évolution de sa charge de travail et, de manière générale, des résultats du contrôle de gestion (al. 2). Ainsi, les informations détaillées énumérées à l'al 1 ne sont destinées qu'à la commission parlementaire compétente.

Art. 3 (Disposition transitoire à l'article 1) Les juges actuellement employés au Tribunal fédéral ont été élus pour une période de fonction de six ans. La période de fonction en cours s'achèvera à la fin de l'année 2007 pour les juges du Tribunal fédéral des assurances ou à la fin de l'année 2008 pour les juges du Tribunal fédéral. Dans le cadre de l'intégration partielle du Tribunal fédéral des assurances au Tribunal fédéral, ces deux périodes de fonction devront être synchronisées. Un projet visant à prolonger d'une année, soit jusqu'à fin 2008, la période de fonction en cours au Tribunal fédéral des assurances, est en cours d'élaboration.

Le fait que les périodes de fonction de juges élus en vertu de la loi d'organisation judiciaire (RS 173.110) et de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral (RS 173.110.1) aillent au-delà de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance signifie que la réduction des postes
de juge à 38 ne pourra pas être appliquée dès le départ. C'est la raison pour laquelle la disposition transitoire à l'art. 1 dispose que le nombre de juges prévu à l'art. 1 sera atteint en ne repourvoyant pas les postes devenus vacants.

Si à la fin de la période de fonction actuelle (fin 2008), le nombre de juges devait être néanmoins supérieur à 38, l'Assemblée fédérale devrait mettre en oeuvre la disposition visée à l'art. 1 dans le cadre de l'élection générale pour la période de fonction 2009 à 2014.

Le principe selon lequel le nombre de juge prévu à l'art. 1 est atteint en ne repourvoyant pas les postes devenus vacants s'applique également aux juges suppléants.

En ce qui les concerne, il est de même impératif de respecter la fin de la période de fonction, qui va au-delà du changement de législation. Pour ce qui est de cette catégorie de juges, il est toutefois prévisible que le nombre fixé à l'art. 1, al. 2, ne pourra pratiquement pas être atteint dans le cadre des seuls départs volontaires ou à la retraite. Dans le cadre de la préparation des élections de renouvellement général 11

Voir sur ce point Paul Tschümperlin: Gerichtsmanagement am Bundesgericht ­ Stand und Entwicklungstendenzen, März 2003 (http://www.bger.ch/gerichtsmanagement.pdf).

3368

2009 à 2014, la Commission judiciaire va donc devoir s'employer à formuler des propositions concernant un effectif nettement moins important. Le projet précédemment mentionné, visant à synchroniser les périodes de fonction des juges fédéraux, tiendra compte du fait que la disposition selon laquelle le nombre des juges suppléants n'excède pas les deux tiers de celui des juges ordinaires est applicable dès le 1er janvier 2007.

Une exception au principe de ne pas repourvoir des postes devenus vacants s'applique au cas où ceci entraînerait un tel déséquilibre dans la composition du tribunal sur le plan des spécialités ou des langues que le bon fonctionnement du Tribunal fédéral ne pourrait plus être garanti. Ce pourrait être le cas par exemple si un juge italophone démissionnait (la démission d'un juge germanophone ou francophone n'entraînerait qu'une légère modification dans la composition linguistique du Tribunal fédéral, et il pourrait y être remédié au moyen de mesures d'ordre organisationnel). La proposition de repourvoir ou non un poste à titre exceptionnel est du ressort de la Commission judiciaire (voir art. 40a LParl; RS 171.10).

Art. 4 L'al. 1 dispose que l'ordonnance entre en vigueur en même temps que la loi sur le Tribunal fédéral.

L'al. 2 limite la durée de validité de l'ordonnance à fin 2011.

Aux yeux de la commission, il est évident que le nombre de juges ne peut actuellement être fixé que de manière provisoire. Le fixer de manière définitive sans connaître les effets réels de la LTF et sans disposer d'une analyse des coûts et de l'organisation du Tribunal fédéral serait problématique.

Etant donné que le nombre de juges est fixé de manière provisoire, il convient de définir la date à laquelle celui-ci devra faire l'objet d'un nouvel examen. La commission estime qu'un délai de trois ans à compter du début de la période de fonction 2009 à 2014 est pertinent. Le nombre de juges visé à l'art. 1 doit être atteint au plus tard au début de cette période de fonction. Le Tribunal fédéral disposerait ainsi de trois ans au minimum pour faire un bilan sur son nouvel effectif; il disposerait en outre de cinq ans pour faire un bilan concernant les effets de la nouvelle législation sur sa charge de travail. Il serait ainsi possible de rassembler des données statistiques sur une période suffisamment
longue sur le temps consacré par les juges et les greffiers au traitement des dossiers, de sorte qu'au début de 2011, il pourrait être procédé à une analyse des coûts et de l'organisation reposant sur une base solide.

5

Conséquences financières

En 2004, le traitement annuel des juges fédéraux s'élevait à 329 678 francs (voir ch. 2.3.3). Une réduction du nombre de postes de juge à 38 permettrait d'économiser près d'un million de francs par année.

Entre 2002 et 2004, les juges suppléants ont traité en moyenne un volume de travail équivalent à 6.4 postes à plein temps (voir tableau 3 en annexe). À l'avenir, les 19 juges suppléants accompliront un volume de travail équivalent à environ 4 postes à plein temps (voir ch. 2.3.6). Comme un juge suppléant à temps plein touche un traitement annuel d'environ 231 000 francs, l'économie réalisée s'élève à environ 3369

554 000 francs par année. Les contributions de l'employeur aux assurances sociales et les frais de secrétariat sont également réduits en proportion.

Au total, 1,5 million de francs environ pourront être économisés chaque année sur le traitement annuel des juges ordinaires et des juges suppléants.

6

Bases légales

Selon l'art. 1, al. 5, LTF, l'Assemblée fédérale fixe l'effectif des juges dans une ordonnance.

3370

Annexe Tableau 1

Charge de travail du Tribunal fédéral 1985 à 2005 Données ressortant des rapports annuels Année

Nouvelles affaires

Affaires liquidées

Reportées à l'année suivante

1985

4165

4144

...

1986

4061

4131

1595

1987

3921

4074

1439

1988

3932

3954

1407

1989

4313

3987

1733

1990

4650

4252

2131

1991

4555

4366

2320

1992

4665

4810

2175

1993

5178

5001

2352

1994

5240

5538

2051

1995

5185

5190

2045

1996

5615

5571

2089

1997

5408

5462

2041

1998

5263

5518

1784

1999

5406

5597

1593

2000

5139

5316

1414

2001

4953

5047

1317

2002

4554

4648

1223

2003

4588

4597

1215

2004

4830

4738

1302

200512

5007

4827

1482

12

Les données pour l'année 2005 ont été livrées par le Tribunal fédéral (le rapport annuel 2005 n'était pas encore publié)

3371

Tableau 2

Charge de travail du Tribunal fédéral des assurances 1985 à 2005 Données ressortant des rapports annuels Année

Nouvelles affaires

Affaires liquidées

Reportées à l'année suivante

1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 200513

1433 1355 1291 1247 1195 1139 1194 1344 1589 1588 1699 1866 2019 2205 2423 2521 2386 2269 2172 2233 2475

1336 1385 1363 1294 1165 1137 1158 1337 1480 1652 1530 1632 1755 2151 2251 2242 2447 2298 2619 2222 2320

...

934 862 815 845 847 883 890 999 935 1104 1338 1602 1658 1830 2109 2048 2021 1573 1584 1739

13

Les données pour l'année 2005 ont été livrées par le Tribunal fédéral des assurances (le rapport annuel 2005 n'était pas encore publié)

3372

Tableau 3

Nombre d'affaires liquidées en comparaison du nombre d'unités de personnel 1992 à 200414 Années

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004

14 15

Affaires liquidées

Personnel judiciaire (Total TF et TFA)

Total TF et TFA

Nombre de juges

Nombre Nombre de juges suppl. de journées de travail des juges suppléants (arrondi)

Charge des juges Nombre de greffiers suppléants15

6147 6481 7190 6720 7203 7217 7669 7848 7558 7494 6946 7216 6960

39 39 39 39 39 39 39 39 39 41 41 41 41

39 39 39 39 39 39 39 39 39 41 41 41 41

8,05 7,95 7,5 6,8 7,9 6,7 8,0 7,15 7,5 6,9 6,7 6,5 6,0

1852 1827 1721 1572 1817 1557 1841 1646 1719 1588 1535 1486 1375

98 104 104 108 108 108 111 116 115,9 121,9 123,5 126 122,9

Les chiffres concernant les cas liquidés, l'effectif du personnel et le nombre de journées de travail des juges suppléants ont été livrés par les tribunaux fédéraux.

On calcule le nombre de postes de juges suppléants à plein temps qui seraient nécessaires pour effectuer les journées de travail accomplies (nb. de journées de travail divisé par 230 journées de travail par année)

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