03.057 Message relatif à la révision de la loi fédérale sur l'aviation (Examen de la compatibilité des aides d'Etat avec l'Accord sur le transport aérien entre la Suisse et la CE) du 10 septembre 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons le message relatif au projet de révision de la loi fédérale sur l'aviation en vous priant de l'approuver.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

10 septembre 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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2003-1711

Condensé L'Accord sur le transport aérien conclu entre la Confédération suisse et la Communauté européenne le 21 juin 1999 est entré en vigueur le 1er juin 2002. Il fixe les conditions spécifiques qui régissent l'éventuel octroi d'aides d'Etat. Il confie aux autorités suisses le soin de veiller au respect de ces règles par la Suisse.

La nouvelle disposition de la loi fédérale sur l'aviation confie à la Commission de la concurrence (Comco), indépendante du Conseil fédéral et des autorités administratives, la tâche de veiller au respect par la Suisse des règles de l'accord en matière d'aides d'Etat. Les projets de décisions du Conseil fédéral concernant les prestations et les participations de la Confédération à l'aviation, les mesures similaires prises par les cantons et les communes ainsi que par la CE et ses Etats membres seront ainsi soumis à un examen de leur compatibilité avec l'accord.

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Message 1

Partie générale

1.1

Contexte

L'Accord du 21 juin 1999 conclu entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport aérien (RS 0.748.127.192.68; ci-après dénommé l'accord) est entré en vigueur le 1er juin 2002. Il met sur pied un système de contrôle des aides d'Etat fondé sur deux piliers, en vertu duquel chaque partie contractante doit s'assurer en permanence de la compatibilité des aides avec les dispositions de l'accord (art. 14).

Le projet de révision vise à mettre en place les structures de contrôle nécessaires pour assurer le respect, par la Suisse, des engagements pris par elle au titre de l'accord; les aides étrangères peuvent aussi faire l'objet d'un examen. Le nouvel art. 102a de la loi fédérale sur l'aviation (LA; RS 748.0) confie à la Commission de la concurrence (Comco) la tâche d'examiner la compatibilité des aides d'Etat dans le domaine de l'aviation.

1.2

Accord sur le transport aérien

Selon l'art. 13 de l'accord, sont incompatibles avec ledit accord, pour autant qu'elles affectent les échanges entre les parties contractantes, les aides accordées par la Suisse ou par un Etat membre de la CE ou provenant de fonds publics, sous quelque forme que ce soit, et qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou la production de certains produits. Les al. 2 et 3 du même article fixent les conditions auxquelles les aides sont compatibles avec l'accord ou peuvent être considérées comme telles. C'est le cas des aides visant à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, lorsqu'elles ne portent pas atteinte aux conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun (art. 13, al. 3, let. c). La Commission des Communautés européennes a réglementé rigoureusement les aides d'Etat dans le domaine de l'aviation, celles-ci ne pouvant être accordées qu'à titre exceptionnel. Les aides à la restructuration d'entreprises en difficulté sont également soumises à des conditions strictes.

L'art. 13 de l'accord correspond à l'art. 87 du Traité CE; selon l'art. 1, al. 2, de l'accord, il doit être interprété conformément aux décisions et arrêts rendus avant le 21 juin 1999 par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) et par la Commission des Communautés européennes.

L'art. 14 crée un système de surveillance fondé sur deux piliers. Chaque partie contractante est responsable, sur son territoire, du contrôle des aides d'Etat. Cette disposition institue non seulement le droit mais aussi l'obligation de soumettre toutes les aides d'Etat à un examen de leur compatibilité avec le droit matériel. Chaque partie veillera en outre à ce que l'autre partie soit informée des procédures engagées, et si nécessaire, puisse soumettre des observations avant qu'une décision définitive ne soit prise.

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La dernière phrase de l'art. 14 de l'accord dispose qu'à la demande de la CE ou de la Suisse, le Comité mixte examinera toute mesure appropriée relative à l'objet et au fonctionnement de l'accord. En cas de violation alléguée de l'accord par l'une des parties, l'autre partie peut prendre les mesures de sauvegarde temporaires appropriées afin de maintenir l'équilibre de l'accord conformément à l'art. 31.

1.3

Nécessité d'agir

Si la Suisse a conservé son autonomie en matière d'application de la réglementation des aides d'Etat grâce au principe des deux piliers consacré à l'art. 14, elle s'est engagée à créer les structures et les procédures nécessaires à un contrôle uniforme et approprié de la compatibilité des aides.

Jusqu'ici, aucune structure spécifique n'a été prévue. Les mesures concernées ont été évaluées dans le cadre de la procédure administrative interne ordinaire sous l'angle de leur compatibilité avec le droit européen, avant que l'autorité compétente ne se prononce. Il est indispensable de désigner une autorité chargée de vérifier la compatibilité des aides d'Etat avec l'accord, en raison non seulement de l'intervention de la Confédération dans le cadre du programme de redimensionnement de l'aviation civile en 2001 et des réactions qu'elle a suscitées auprès de la Commission des CE, mais aussi d'éventuelles nouvelles demandes.

La Suisse a tout intérêt à apporter la preuve de sa capacité et de sa volonté d'assurer le respect des règles de droit matériel sur les aides d'Etat vu les engagements qu'elle a pris au titre de l'accord.

2

Partie spéciale

2.1

Compétences

Le nouvel art. 102a de la loi fédérale sur l'aviation confie à la Commission de la concurrence la tâche d'examiner la compatibilité des aides d'Etat avec l'accord.

La Commission de la concurrence travaille de manière indépendante; elle doit être consultée avant toute décision définitive d'octroi d'une aide. Elle doit tenir compte du droit de la concurrence et des intérêts publics lors de l'examen. Etant donné l'importance des aspects liés au droit de la concurrence, il paraît judicieux de lui confier cette tâche.

Dans le domaine du droit des cartels, la Comco doit procéder à un examen uniquement sous l'angle du droit de la concurrence; la prise en compte d'intérêts publics prépondérants nécessite quant à elle une autorisation exceptionnelle du Conseil fédéral (art. 8 et 11 de la loi sur les cartels; LCart; RS 251). On comprend dès lors pourquoi l'examen de la compatibilité des aides d'Etat va au-delà des fonctions et des compétences attribuées jusqu'ici à la Comco, justement parce que d'autres intérêts que ceux liés à la concurrence (tels que ceux de la politique régionale ou de la politique structurelle) sont en jeu. Les considérations en matière de droit de la concurrence continuent néanmoins de jouer un rôle essentiel, raison pour laquelle il est justifié de confier cet examen à la Comco et non à une commission instituée pour la circonstance.

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2.2

Indépendance

Conformément à l'art. 18 LCart, la Commission de la concurrence comprend entre onze et quinze membres, en majorité des experts indépendants nommés par le Conseil fédéral. La commission est indépendante des autorités administratives et elle est rattachée au Département fédéral de l'économie sur le plan administratif uniquement (art. 19 LCart). Elle dispose d'un secrétariat, qui prépare les affaires à son intention et mène les enquêtes (art. 23 LCart).

L'indépendance de la Commission de la concurrence dans l'exercice de ses fonctions est importante dans la pratique; sur ce plan, la Commission de la concurrence jouit des mêmes prérogatives que la Commission des CE, autorité supra-étatique indépendante des Etats membres qui est chargée de veiller au respect du droit de la CE (y compris du droit de la concurrence et de celui des aides accordées par les Etats membres).

C'est pour cette raison, que l'art. 102, al. 2, LA souligne l'indépendance, dans ce domaine d'activités également, de la Commission de la concurrence par rapport au Conseil fédéral et à l'administration.

2.3

Tâches

La Commission de la concurrence examinera les projets de décisions du Conseil fédéral mentionnés à l'art. 102a, al. 1, let. a, LA. Sont concernés tous les types de mesures que la Confédération pourrait prendre et qui favoriseraient certaines entreprises ou la production de certains produits entrant dans le champ d'application de l'accord, le but étant de s'assurer que les mesures prises respectent les dispositions de l'accord.

La Commission de la concurrence examinera, avant la prise de décision du Conseil fédéral, les projets de décisions de ce dernier, qui seraient susceptibles de favoriser certaines entreprises dans le champ d'application de l'accord. Le Conseil fédéral sera tenu de prendre en considération le résultat de l'examen auquel aura procédé la Commission de la concurrence. Le Conseil fédéral devra donc y faire explicitement référence dans le message qu'il adressera au Parlement ­ en particulier si la Commission de la concurrence conclut que la mesure examinée contrevient à l'accord. Si le Conseil fédéral ou le Parlement décident d'allouer une aide d'Etat que la Commission de la concurrence juge incompatible avec l'accord, la CE pourra, conformément à l'art. 14 de l'accord, saisir le Comité mixte et envisager la prise de mesures temporaires de sauvegarde.

En vertu de l'art. 102a, al. 1, let. b LA, la Commission de la concurrence disposera également de la compétence d'examiner les mesures similaires prises par les cantons et les communes. Ceux-ci sont en effet liés par l'accord au même titre que la Confédération.

En outre, l'art. 102a, al. 1, let. c LA prévoit que la Commission de la concurrence pourra, conformément à l'art. 14 de l'accord, examiner les mesures de soutien prises par la CE et ses Etats membres. Les autorités suisses pourront ainsi vérifier de quelle manière la CE applique les règles concernant les aides d'Etat.

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3

Conséquences

3.1

Conséquences pour les finances et le personnel

Les nouvelles tâches de la Commission de la concurrence n'ont, pour cette dernière et son secrétariat, que des conséquences mineures sur les plans des finances et du personnel. Normalement, elle traitera rarement de tels dossiers. En effet, l'intervention de la Confédération en 2001 dans le cadre du redimensionnement de l'aviation civile nationale doit rester exceptionnelle. Néanmoins, la Commission de la concurrence pourrait être appelée occasionnellement à examiner les aides d'Etat accordées au sein de la CE.

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Les cantons et les communes ont l'obligation d'informer la Commission de la concurrence des aides d'Etat qui s'inscrivent dans le cadre de la nouvelle disposition et de tenir compte de sa prise de position. Leur devoir consiste avant tout à consulter la Commission de la concurrence. La nouvelle disposition ne modifiera donc en rien le droit de décider de l'octroi d'aides d'Etat ou de participations de l'Etat mais vise à garantir l'application correcte et uniforme des dispositions de l'accord.

4

Programme de la législature

Le présent projet ne figure pas dans le programme de la législature 1999­2003. Il s'inscrit dans le cadre des accords bilatéraux, dont la mise en oeuvre ne souffre plus aucun retard.

5

Relations avec le droit européen

La proposition de modification de la loi sur l'aviation a pour objectif de permettre le respect d'une obligation qui découle de l'accord sur le transport aérien conclu avec la CE.

6

Bases légales/Constitutionnalité

L'ajout apporté à la loi sur l'aviation ne modifie pas la répartition des compétences des organes sur le plan constitutionnel. La souveraineté des Chambres en matière de budget et le pouvoir de décision du Conseil fédéral ne sont pas davantage touchés.

Toutefois, si le Conseil fédéral ou l'Assemblée fédérale prennent des décisions contraires à la prise de position de la commission, ils pourraient se voir reprocher de contrevenir à l'accord, s'exposant ainsi aux conséquences prévues par l'accord dans un tel cas.

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Les compétences des cantons (et des communes) en matière de promotion économique ne sont pas non plus remises en question. La nouvelle disposition de la loi sur l'aviation ne soumet pas les mesures d'encouragement des cantons à un régime d'autorisation sur le plan du droit fédéral. Cependant, les cantons sont tenus de se conformer au droit international, comme le stipule l'art. 5, al. 4 Cst.

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