03.028 Message concernant la garantie de la Constitution du canton de Schaffhouse du 9 avril 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral simple accordant la garantie fédérale à la Constitution du canton de Schaffhouse et nous vous proposons de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

9 avril 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2003-0160

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Condensé En vertu de l'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale, chaque canton doit se doter d'une constitution démocratique. Celle-ci doit avoir été acceptée par le peuple et doit pouvoir être révisée si la majorité du corps électoral le demande. Selon l'al. 2 de cet article, les constitutions cantonales doivent être garanties par la Confédération. Cette garantie est accordée si elles ne sont pas contraires au droit fédéral. Si une disposition constitutionnelle cantonale remplit ces conditions, la garantie fédérale doit lui être accordée; sinon, elle lui est refusée.

Le corps électoral du canton de Schaffhouse a adopté, lors de la votation populaire du 22 septembre 2002, la Constitution cantonale totalement révisée qui lui était soumise. La nouvelle Constitution est, de par sa forme et son contenu, une charte fondamentale moderne. Ordonnée selon une systématique claire, elle est rédigée dans un langage adapté à notre époque et accessible au citoyen. Elle se caractérise en outre par une série d'innovations de droit matériel, en particulier dans le domaine des droits politiques. Enfin, la nouvelle Constitution comprend, outre un article sur les buts sociaux, des dispositions permettant d'intégrer la notion de développement durable dans l'action de l'Etat, de transférer des tâches publiques à des particuliers et de renforcer la participation démocratique dans les syndicats de communes.

L'examen auquel nous avons procédé a révélé que toutes les dispositions de la nouvelle Constitution remplissent les conditions requises pour l'octroi de la garantie.

Nous ne considérerons, dans le présent message, que les dispositions qui ont un rapport direct avec des matières réglées par le droit fédéral.

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Message 1

Bref historique de la révision totale

Lors de la votation populaire du 6 avril 1997, le corps électoral du canton de Schaffhouse a accepté le principe d'une révision totale de la Constitution cantonale du 24 mars 1876 et a chargé le Grand Conseil d'élaborer une nouvelle constitution.

Le 4 mars 2001, le corps électoral a rejeté un premier projet de nouvelle constitution. Il a aussi clairement rejeté un projet relatif au droit de vote des étrangers, soumis à un vote distinct, en tant que complément à la constitution. Une commission spéciale a délibéré sur toutes les objections invoquées dans la campagne électorale, ensuite de quoi le Grand Conseil a procédé, après deux lectures, à de nombreuses adaptations du premier projet. Lors de la votation populaire du 22 septembre 2002, le corps électoral du canton de Schaffhouse a accepté la nouvelle Constitution par 16 907 oui contre 8832 non. Il a simultanément adopté la modification de l'art. 33, al. 1, let. a, proposée en tant que variante, par 11 805 oui contre 11 723 non.

Par lettre du 7 octobre 2002, la Chancellerie d'Etat du canton de Schaffhouse demande la garantie fédérale.

2

Structure et contenu de la Constitution

La nouvelle Constitution a pour ambition d'instaurer des bases juridiques propres à donner réponse aux questions sociales importantes et aux développements en cours.

La nouvelle Constitution présente une systématique claire. Elle est rédigée dans un langage à la fois moderne, accessible à tous et neutre du point de vue des genres. On en a écarté les dispositions superflues, mais on a repris du droit constitutionnel en vigueur les normes les plus importantes. La Constitution contient cependant des innovations dont les principales peuvent être résumées comme suit: ­

L'action de l'Etat est axée sur le développement durable (art. 9);

­

Dans le domaine des droits populaires, plusieurs innovations sont introduites: le champ d'application de l'initiative populaire est étendu (art. 27, al. 1); sont soumis au référendum facultatif les lois approuvées par quatre cinquièmes au moins des membres du Grand Conseil présents au moment du vote, ainsi que les décisions de principe voire d'autres décisions, si la loi le prévoit (art. 33, al. 1, let. a, e et f); on prévoit la possibilité pour le Grand Conseil de soumettre au vote du peuple une partie d'un projet seulement ou un projet complet assorti de variantes (art. 35); la motion populaire constitue un nouveau droit populaire (art. 31); enfin, la réglementation concernant le nombre de signatures et les délais est uniformisée.

­

Le principe de la transparence est introduit, sous réserve de l'obligation de garder le secret. La même disposition garantit ­ ce qui constitue une nouveauté au niveau constitutionnel ­ l'archivage des documents administratifs (art. 47).

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­

L'accomplissement de tâches publiques peut être délégué à des particuliers à certaines conditions. En cas de dommage, la collectivité ou l'établissement qui a donné le mandat assume une responsabilité subsidiaire (art. 51).

­

La compétence législative du Conseil d'Etat est adaptée aux exigences actuelles; celui-ci pourra ainsi adopter les dispositions urgentes nécessaires à l'introduction du droit supérieur et, dans le cadre de son pouvoir réglementaire, conclure des traités internationaux ou des conventions intercantonales (art. 65, al. 3 et 4).

­

Une nouvelle disposition permet de soutenir des services d'informations juridiques privés offrant gratuitement leurs services (art. 74, al. 2).

­

Une disposition prévoit que le juge de paix intervient en qualité de médiateur dans des affaires de droit civil et d'atteinte à l'honneur (art. 75, al. 2).

­

La nouvelle Constitution instaure des principes de gestion des finances et oblige le canton à une planification des tâches et des finances prévisionnelle et coordonnée (art. 96). Un mécanisme contraignant est mis en place pour équilibrer les finances (art. 97).

­

La participation démocratique dans les syndicats de communes est renforcée (art. 106).

La nouvelle Constitution s'ouvre sur un préambule qui traduit les valeurs fondamentales. Les 123 articles de la nouvelle Constitution sont divisés en dix parties intitulées: 1.

Principes généraux,

2.

Droits fondamentaux et buts sociaux,

3.

Droits populaires,

4.

Autorités,

5.

Tâches publiques,

6.

Régime des finances,

7.

Communes,

8.

Eglises et communautés religieuses,

9.

Révision de la Constitution cantonale,

10. Dispositions transitoires et finales.

Le titre 1 (art. 1 à 9) définit la forme de l'Etat, le statut du canton au sein de la Confédération, sa division en communes, le droit de cité, les principes de l'activité étatique ­ tels la bonne foi ­, la séparation des pouvoirs, le développement durable, la responsabilité individuelle et les devoirs de chacun.

Le titre 2 (art. 10 à 22) ancre les droits fondamentaux dans la Constitution cantonale, règle leur portée et la possibilité de les soumettre à restriction et fixe également les droits sociaux.

Le titre 3 (art. 23 à 37) règle le droit de prendre part aux élections et votations, les élections, l'objet, la forme et le traitement de l'initiative populaire, ainsi que la motion populaire; il fixe les objets qui sont soumis au référendum populaire obligatoire ou facultatif et contient des dispositions sur le droit de participation.

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Le titre 4 (art. 38 à 78) établit les principes de l'organisation des autorités. Il consacre le principe de la légalité, réglemente l'éligibilité, la durée de fonction et les incompatibilités ainsi que l'information et la publicité; il réglemente aussi la responsabilité de l'Etat. Ce titre statue aussi le principe de la délégation des tâches et l'appel à des particuliers. Il règle en outre le statut, la composition et les tâches du Grand Conseil, du Conseil d'Etat et des autorités judiciaires.

Le titre 5 (art. 79 à 95) traite des tâches publiques. Il fixe les principes à respecter dans l'accomplissement des tâches publiques, dont il concrétise un certain nombre (sécurité et paix publiques, espace naturel, domaine social, formation, culture, protection du patrimoine, loisirs et économie).

Le titre 6 (art. 96 à 101) est consacré au régime des finances. Il établit des principes en matière de finances et d'impôts et prévoit une péréquation financière entre les communes.

Le titre 7 (art. 102 à 107) consacre les principes de l'organisation des communes.

L'autonomie communale est prévue expressément; de même, la fusion, la division de communes ou toute cession de territoire d'une commune à une autre requiert l'accord des communes concernées. Ce titre prévoit que le canton encourage la coopération entre les communes; ces dernières peuvent se constituer en syndicats de communes ou choisir d'autres formes d'organisation définies par la loi. Les droits de participation du corps électoral et des autorités des différentes communes doivent toutefois être maintenus.

Le titre 8 (art. 108 à 113) régit les principes concernant les Eglises et les communautés religieuses. Trois Eglises sont reconnues comme corporations de droit public; le Grand Conseil est autorisé à reconnaître d'autres communautés religieuses comme étant de droit public. Une grande autonomie est laissée aux Eglises reconnues; ces dernières doivent se doter de statuts d'organisation soumis à l'approbation du Conseil d'Etat. La possibilité de quitter l'Eglise à tout moment par une déclaration écrite est garantie. Les Eglises veillent à assurer une protection juridique suffisante à leurs membres et aux paroisses. Les Eglises reconnues sont en outre autorisées à prélever un impôt auprès de leurs membres.

Le titre 9 (art. 114 à 116) a trait à la révision totale et partielle de la Constitution.

Le titre 10 (art. 117 à 123) contient les dispositions transitoires et finales.

3

Conditions nécessaires à l'octroi de la garantie

3.1

Généralités

En vertu de l'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale, chaque canton doit se doter d'une constitution démocratique. Celle-ci doit avoir été acceptée par le peuple et doit pouvoir être révisée si la majorité du corps électoral le demande. Selon l'al. 2 de cet article, les constitutions cantonales doivent être garanties par la Confédération. Cette garantie est accordée si elles ne sont pas contraires au droit fédéral. Si une constitution cantonale remplit ces conditions, la garantie fédérale doit lui être accordée; si une norme constitutionnelle cantonale ne remplit pas une des conditions, la garantie fédérale sera refusée.

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3.2

Acceptation par le peuple

La nouvelle Constitution a été soumise au vote du peuple le 22 septembre 2002. Le corps électoral du canton de Schaffhouse l'a acceptée à une large majorité (cf. ch. 1) et a approuvé en même temps une modification de l'art. 33, al. 1, let. a, soumise à un vote distinct en tant que variante. Cette consultation populaire n'a donné lieu à aucun recours auprès des autorités compétentes.

L'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale, qui pose l'exigence de l'acceptation de la Constitution par le peuple, est donc pleinement respecté.

3.3

Révisibilité

Les art. 114 à 116, en combinaison avec les art. 27 à 30 et l'art. 32, let. a, de la nouvelle Constitution règlent les procédures de révision constitutionnelle. Selon l'art. 27 de la nouvelle Constitution, 1000 électeurs peuvent demander une révision totale ou partielle de la Constitution cantonale. L'art. 28, al. 2, fixe les exigences en matière de validité des initiatives ainsi que la procédure. Ces dispositions sont conformes au droit fédéral. La possibilité de réviser librement la Constitution cantonale au sens où l'exige l'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale est dès lors assurée.

3.4

Constitution démocratique

Une constitution cantonale satisfait à l'exigence du caractère démocratique dès lors qu'elle prévoit un parlement élu par le souverain et respecte le principe de la séparation des pouvoirs (FF 1997 I 221). En vertu de l'art. 39, al. 1, de la Constitution fédérale, la réglementation de l'exercice des droits politiques par le souverain relève, au niveau cantonal, de la compétence des cantons. Dans l'exercice de cette compétence, ils sont toutefois tenus de respecter certaines règles matérielles fédérales et, en particulier, le principe de l'égalité inscrit à l'art. 8 de la Constitution fédérale et celui du suffrage universel et égal (FF 2001 2359 s.; Ulrich Häfelin/Walter Haller, Schweizerisches Bundesstaatsrecht, 5e éd., Zurich 2001, n° 1016). Quant au principe de la séparation des pouvoirs, les cantons disposent d'une importante marge de manoeuvre puisque la manière dont ils le concrétisent dans leur droit constitutionnel relève de leur compétence.

L'art. 24, let. a, de la nouvelle Constitution prévoit que les membres du Grand Conseil sont élus par le corps électoral. Tous les Suisses majeurs domiciliés dans le canton ont, selon l'art. 23, al. 1, le droit de prendre part aux élections et aux votations en matière cantonale. Cette règle est conforme à l'art. 39, al. 3, de la Constitution fédérale, lequel dispose que nul ne peut exercer ses droits politiques dans plus d'un canton. En vertu de l'art. 23, al. 3, la loi doit régir l'exclusion du droit de vote.

Dans l'exercice de cette compétence législative, le législateur devra veiller à ce que le droit de vote ne soit pas restreint de manière disproportionnée et à ce que le principe de l'égalité ne soit pas violé. L'art. 23, al. 2, instaure une obligation de vote, laquelle impose à toute personne ayant le droit de vote de participer aux votations et aux élections. Le droit fédéral ne prévoit pas de participation obligatoire aux votations et aux élections fédérales; le fait que les cantons prévoient, pour 2964

les élections et votations cantonales, le vote obligatoire est néanmoins considéré comme conforme au droit fédéral (FF 1985 II 629; FF 1981 II 253; Yvo Hangartner/Andreas Kley, Die demokratischen Rechte im Bund und Kantonen der Schweizerischen Eidgenossenschaft, Zurich 2000, n° 34 ss). Lors de l'aménagement concret et de l'exercice du vote obligatoire, les cantons sont tenus de prendre en compte l'interdiction de l'arbitraire et le principe de la proportionnalité en prévoyant certaines exceptions à l'obligation de voter; ils doivent agir de même lorsqu'ils fixent les sanctions possibles.

En plus du droit d'élire les membres du Grand Conseil, les électeurs du canton de Schaffhouse disposent de tout un éventail d'autres droits politiques en vertu du droit cantonal. Il s'agit en particulier de l'élection des membres du Conseil d'Etat et du Conseil des Etats (art. 24), du droit d'initiative populaire (art. 27), du vote obligatoire sur certains objets déterminés, notamment en cas de modification de la Constitution (art. 32), ainsi que de la possibilité de voter sur d'autres objets si 1000 électeurs en font la demande (votations populaires facultatives, art. 33). En outre, les électeurs du canton de Schaffhouse se sont prononcés en faveur d'une variante; celle-ci prévoit que toutes les lois approuvées par quatre cinquièmes au moins des membres du Grand Conseil présents au moment du vote ne sont soumises qu'au référendum facultatif et non plus au référendum obligatoire.

L'organisation des autorités du canton de Schaffhouse, telle qu'elle ressort des art. 38 ss (voir également, à ce propos, infra ch. 3.5.5), répond en tous points au principe de la séparation des pouvoirs, lequel est d'ailleurs expressément mentionné (art. 8).

L'art. 51, al. 1, de la Constitution fédérale, qui exige des cantons qu'ils se dotent d'une constitution démocratique, est donc respecté.

3.5

Conformité au droit fédéral

3.5.1

Considérations générales

L'un des problèmes qui se pose, lorsqu'il s'agit d'examiner la conformité au droit fédéral d'une constitution cantonale qui a subi une révision totale, est que l'on doit confronter des dispositions fondamentales cantonales, en principe conçues pour durer plusieurs décennies, avec l'ensemble du droit fédéral, qui, lui, est sujet à de fréquents changements (surtout en ce qui concerne les lois). Par conséquent, il n'est pas exclu que certaines des dispositions de la nouvelle Constitution soient, d'ici quelques années déjà, rendues sans objet ou du moins voient leur portée limitée par des modifications ultérieures du droit fédéral.

Un canton ne peut réglementer un domaine dans lequel la Confédération possède une compétence exclusive. En revanche, il peut assumer des tâches qui relèvent d'une compétence fédérale concurrente lorsque la Confédération n'a pas entièrement utilisé sa compétence. Dans cette hypothèse toutefois, les normes constitutionnelles cantonales ont, examinées à la lumière du droit fédéral, une portée plus limitée que ne le laisse supposer leur libellé. Mais, dans la mesure où, interprétées conformément au droit fédéral, ces normes peuvent se fonder sur une compétence cantonale résiduelle, elles doivent recevoir la garantie fédérale.

2965

3.5.2

Structure et organisation du canton

Le canton de Schaffhouse est subdivisé en communes, qui sont des collectivités publiques autonomes (art. 102, al. 1). La Constitution elle-même n'en fixe pas le nombre, mais l'autonomie communale est expressément inscrite et décrite (art. 105). La Constitution garantit aux communes leur existence, en exigeant, pour toute fusion, division ou toute cession de territoire d'une commune à une autre, l'accord des communes concernées (art. 104, al. 1). La Constitution règle en outre les principes de la coopération intercommunale (art. 106). Le législateur aura la tâche de prévoir les exigences minimales de cette coopération (art. 106, al. 3, 1re phr.); de plus, les droits de participation du corps électoral et des autorités des différentes communes doivent être préservés (art. 106, al. 3, 2e phr.). Enfin, l'art. 107 forme la base constitutionnelle pour le transfert de certaines tâches administratives entre les communes ou au canton.

Toutes ces dispositions, qui ressortissent au domaine des compétences organisationnelles des cantons (art. 3 et 43 de la Constitution fédérale), ne contiennent aucun élément contraire au droit fédéral.

3.5.3

Droits fondamentaux

Selon la doctrine et la jurisprudence, les droits fondamentaux garantis par les cantons ont une portée autonome dans la mesure où ils accordent une protection plus étendue que le droit fédéral (Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II: Les droits fondamentaux, Berne 2000, p. 40 ss; Vincent Martenet, L'autonomie constitutionnelle des cantons, Bâle 1999, p. 420 ss; Regula Kägi-Diener, Grundrechtsschutz durch die Kantone, in: Daniel Thürer/JeanFrançois Aubert/Jörg Paul Müller [édit.], Verfassungsrecht der Schweiz, Zurich 2001, p. 843 s., n° 19; ATF 121 I 267, 269; 119 Ia 53, 55). Cela signifie que les cantons peuvent protéger les mêmes droits que la Confédération ou aller au-delà.

Mais cela signifie aussi que la garantie fédérale ne saurait être octroyée lorsque le canton accorde, expressément et de manière impérative, une protection moins étendue que la Confédération ne le fait par ses droits fondamentaux.

Les libertés fondamentales déjà garanties par la Constitution fédérale sont énumérées dans la Constitution du canton de Schaffhouse, mais ne sont pas décrites de manière plus détaillée (art. 12; pour l'art. 12, al. 1, let. c, voir plus bas). Les autres droits fondamentaux ainsi que la réglementation relative à la portée des droits fondamentaux et à leur restriction correspondent à la réglementation fédérale. Les droits fondamentaux suivants vont au-delà du droit fédéral; ils sont décrits plus précisément en relation avec le droit fédéral ci-dessous: ­

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L'art. 17, al. 2, de la nouvelle Constitution, instaure le droit d'exiger d'être déclaré coupable ou non coupable, si un non-lieu est prononcé dans une procédure pénale. Selon l'art. 123, al. 3, de la Constitution fédérale, l'organisation judiciaire, la procédure et l'administration de la justice en matière de droit pénal sont du ressort des cantons. Dans le cadre de la réforme de la justice, cette disposition a été modifiée; selon le nouvel art. 123, al. 1, de la Constitution fédérale (FF 1999 7831), qui a été adopté mais n'est pas encore entré en vigueur, la législation en matière de procédure pénale relèvera de la

compétence de la Confédération. En vertu du droit en vigueur, les cantons sont autorisés à garantir un droit à être déclaré coupable ou non coupable en cas de non-lieu dans une procédure pénale. Reste encore ouverte la question de savoir si la future procédure pénale fédérale prévoira un tel droit ou si elle permettra aux cantons de prévoir cette exigence. Le droit fédéral actuellement en vigueur est déterminant pour l'octroi de la garantie fédérale à une disposition constitutionnelle cantonale. L'art. 17, al. 2, de la nouvelle Constitution du canton de Schaffhouse consacre un droit qui ne contredit pas le droit fédéral en vigueur; la garantie peut dès lors être octroyée à la disposition mentionnée.

­

L'art. 19, al. 2, de la Constitution du canton de Schaffhouse oblige les autorités à répondre aux pétitions dans un délai raisonnable. Selon l'art. 33, al. 2, de la Constitution fédérale, les autorités doivent prendre connaissance des pétitions. La Constitution du canton de Schaffhouse, en inscrivant le droit à une réponse aux pétitions dans un délai raisonnable, va au-delà de l'exigence garantie par le droit fédéral.

Par ailleurs, l'art. 12, al. 1, let. c, appelle la brève explication suivante quant à son rapport avec le droit fédéral; cette disposition garantit, en plus du droit au mariage et à la famille, le droit à une autre forme de vie commune. L'interdiction de faire subir une discrimination à une personne du fait de son mode de vie découle directement de l'art. 8, al. 2, de la Constitution fédérale. Or, conformément à l'art. 122, al. 1, de la Constitution fédérale, la Confédération légifère dans le domaine du droit civil; l'art. 12, al. 1, let. c, de la nouvelle Constitution du canton de Schaffhouse ne peut donc pas déployer d'effets sur les relations de droit civil des couples non mariés et étendre par exemple les effets du mariage à l'état de concubinage ou à des couples homosexuels. En revanche, elle pourrait avoir des effets par exemple sur l'exercice de droits proches des droits de la personnalité (Jörg Paul Müller in: Walter Kälin/Urs Bolz [éd.], Manuel de droit constitutionnel bernois, Berne 1995, p. 39 s.)

ou sur les impôts sur les successions (Bernhard Pulver, L'union libre, Droit actuel et réformes nécessaires, Lausanne 1999, p. 210).

Après examen, aucun des droits fondamentaux garantis ne se voit accorder, dans la Constitution du canton de Schaffhouse, une protection qui irait moins loin que celle du droit fédéral. Rien ne s'oppose dès lors à l'octroi de la garantie fédérale.

Enfin, la Constitution schaffhousoise consacre des buts sociaux (art. 22). Contrairement aux droits fondamentaux, les buts sociaux ne confèrent pas aux particuliers des droits susceptibles d'être directement justiciables; il s'agit de normes à caractère de programme qui obligent le canton et les communes à concrétiser une politique sociale. Les buts sociaux de la Constitution du canton de Schaffhouse, dans la mesure où ils sont identiques, du point de vue matériel, aux buts sociaux inscrits dans la Constitution fédérale (art. 41), sont conformes au droit fédéral.

3.5.4

Tâches publiques

Selon les art. 3 et 43 de la Constitution fédérale, les cantons exercent toutes les compétences que la Constitution fédérale n'attribue pas à la Confédération. C'est pourquoi le droit fédéral n'exige pas que les législations cantonales aient une base expresse dans la Constitution du canton. La plupart des cantons ont ainsi renoncé à 2967

une énumération exhaustive des tâches publiques et des compétences législatives correspondantes dans leur Constitution. Cela vaut également pour la nouvelle Constitution du canton de Schaffhouse, qui, pour la prise en compte de nouvelles tâches publiques, exige certes une loi au sens formel (art. 50, let. e), mais pas obligatoirement une base constitutionnelle. On peut toutefois partir de l'idée que l'énumération des tâches publiques aux art. 80 à 95 fait état des principaux domaines d'activités des cantons et des communes.

La plupart des domaines de compétence mentionnés se recoupent certes avec les compétences de la Confédération (soit les art. 81 à 83, 85 à 87, 91 à 93), mais ne contredisent en aucune façon le droit fédéral. En effet, même dans les domaines où la Confédération a légiféré, les cantons conservent d'importantes tâches d'exécution et des compétences résiduelles; une liste de ces tâches peut de surcroît également se justifier dans la mesure où la Constitution remplit une fonction d'information.

3.5.5

Organisation des autorités et procédure

Les règles sur la composition, les attributions et l'organisation des autorités cantonales et communales ainsi que les procédures prévues pour leur activité tiennent suffisamment compte des exigences du droit fédéral.

Les conditions d'éligibilité à une fonction officielle et les règles d'incompatibilités (art. 40 et 42) sont conformes au droit fédéral. Le principe de la séparation des pouvoirs est expressément inscrit à l'art. 8 et est mis en oeuvre par la répartition des compétences entre le Grand Conseil, le Conseil d'Etat et les autorités judiciaires. La procédure législative, qui confère au Grand Conseil ­ sous réserve du référendum obligatoire (art. 32) ou facultatif (art. 33) ­ la compétence d'édicter les lois (art. 53, al. 1), répond aux exigences démocratiques fixées à l'art. 51, al. 1, 1re phr., de la Constitution fédérale. La notion de loi est décrite à l'art. 50. Les art. 75 à 78 prévoient les organes juridictionnels imposés par le droit fédéral pour assurer l'exécution de la loi.

Les différentes règles d'organisation de la Constitution schaffhousoise sont conformes à l'autonomie des cantons en matière d'organisation (art. 3, 39, al. 1, et 47, de la Constitution fédérale) et ne violent aucune disposition du droit fédéral.

3.6

Résumé

La Constitution du canton de Schaffhouse du 17 juin 2002 satisfait aux exigences posées à l'art. 51, al. 2, 2e phrase, de la Constitution fédérale; la garantie doit donc lui être accordée.

4

Constitutionnalité

En vertu des art. 51 et 172, al. 2, de la Constitution fédérale, il appartient à l'Assemblée fédérale d'accorder la garantie aux constitutions cantonales.

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