03.056 Message concernant l'accord bilatéral en matière d'immigration avec le Nigéria du 10 septembre 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, un projet d'arrêté fédéral portant approbation de l'Accord en matière d'immigration entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République fédérale du Nigéria, signé le 9 janvier 2003.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

10 septembre 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération: Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération: Annemarie Huber-Hotz

2003-0807

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Condensé Les demandes d'asile qui déposées par des citoyens du Nigéria oscillaient entre 122 et 289 entre 1996 et 2001, sont passées à 1062 au 31 décembre 2002. Dans le même temps, les personnes tenues de quitter la Suisse passaient de 85 à 572. Au cours de la même période, le nombre de personnes sans pièce d'identité au moment où elles ont disposé une demande d'asile en Suisse ou qui, contrôlées par les autorités, n'ont pas été en mesure de présenter de tels documents a augmenté. Les autorités nigérianes ont communiqué à plusieurs reprises au Département fédéral de justice et police (DFJP) qu'elles ne coopéreraient avec les autorités suisses compétentes en matière de renvoi qu'après la conclusion d'un accord de réadmission sur le modèle de ceux passés par le Nigéria avec l'Italie, l'Espagne ou encore l'Irlande.

Le Nigéria est le premier Etat du continent africain avec lequel la Suisse a négocié un accord en matière d'immigration (accord de réadmission). Il s'agit d'un accord important, passé avec un des Etats d'Afrique sub-saharienne les plus peuplés (environ 130 millions d'habitants) et dont les ressortissants représentent à eux seul un peu plus de 15 % de l'ensemble des ressortissants des Etats d'Afrique. Cet accord s'inscrit dans la politique du Conseil fédéral visant à conclure des accords de réadmission avec les Etats tiers. Après les traités conclus avec quasiment l'ensemble des Etats européens, puis avec des Etats comme le Sri Lanka, Hong Kong, les Philippines ou le Kirghizstan, l'accord avec le Nigéria marque une étape supplémentaire, logique et cohérente, de cette politique.

L'accord reprend les principes d'autres accords de réadmission conclus entre la Suisse et certains Etats européens. Il diffère en ce sens qu'il prévoit une clause programme visant à apporter un soutien dans le cadre de la coopération recherchée avec le Nigéria. En outre, la transmission de données, telle que prévue par l'art. IV, par. 5, nécessite une base légale ne pouvant être donnée que par l'approbation de l'accord par les Chambres fédérales.

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Message 1

Partie générale

1.1

Contexte

Afin de lutter contre la migration irrégulière, notre pays s'est efforcé au cours des dernières années de négocier, dans un premier temps, de nouveaux accords de réadmission bilatéraux avec ses voisins (Italie) ou de renégocier certains accords afin de les adapter aux nouvelles exigences (Allemagne, France et Autriche). Dans un deuxième temps, la coopération de la Suisse dans le domaine de l'asile et de la migration a été étendue à d'autres Etats membres de l'Union européenne. La pierre angulaire de cette coopération est constituée par le règlement de la réadmission et du transit, comme de l'accompagnement lors du transit de personnes tenues de quitter la Suisse. De cette manière, la Suisse s'est mise au diapason des Etats membres de l'Union européenne, lesquels ont renforcé leurs liens bilatéraux et procédé à une harmonisation et à une sécurisation du droit dans ce domaine.

Toutefois, la constante pression migratoire qui s'exerce sur la Suisse a de multiples origines. Dans de nombreux pays et régions qui génèrent des flux migratoires, la situation a continué de se détériorer au cours des dernières années. Ainsi, dans un monde caractérisé par la communication et la mobilité, les crises latentes qui couvent dans certains Etats se répercutent de manière sensible sur la Suisse. La migration irrégulière étant un phénomène global et en expansion, notre pays a été amené à rechercher la coopération, et à engager des négociations, directement avec les autorités des pays d'origine et de transit de la migration irrégulière.

Pour la seule Afrique de l'Ouest, le nombre de ressortissants en situation irrégulière est passé de 28 à la fin de l'année 1992 à 2272 au 31 décembre 2002. Au cours de la même période, le nombre de personnes sans pièce d'identité au moment où elles ont déposé une demande d'asile en Suisse ou qui, contrôlées par les autorités, n'ont pas été en mesure de présenter de tels documents a augmenté. En 2002, pratiquement aucune des personnes originaires d'un des 14 Etats de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) ne disposait de papiers d'identité. Le Nigéria ne fait pas exception, les demandes d'asile qui oscillaient entre 122 et 289 entre 1996 et 2001, sont passées à 1062 en 2002. Dans le même temps, les personnes contraintes de quitter la Suisse passaient de 85
à 572. Enfin, les autorités nigérianes ont communiqué à plusieurs reprises au Département fédéral de justice et police (DFJP) qu'elles ne coopéreraient avec les autorités suisses compétentes en matière de renvoi qu'après la conclusion d'un accord de réadmission, sur le modèle de ceux passés par le Nigéria avec l'Italie, l'Espagne ou encore l'Irlande.

Le Nigéria est le premier Etat du continent africain avec lequel la Suisse a négocié un accord en matière d'immigration (accord de réadmission). Il s'agit d'un accord important, passé avec un des Etats d'Afrique sub-saharienne les plus peuplés (environ 130 millions d'habitants) et dont les ressortissants représentent à eux seul un peu plus de 15 % de l'ensemble des ressortissants des Etats d'Afrique. Pour le Nigéria, cet accord constitue la condition sine qua non de la reprise d'une collaboration en vue de garantir une politique de retour à l'endroit de ses ressortissants en situation irrégulière en Suisse. Au vu du nombre de personnes dont le renvoi est 5881

suspendu ou bloqué, et du potentiel migratoire d'un pays comme le Nigéria, il est prioritaire et urgent qu'une solution soit trouvée afin de débloquer la situation prévalant dans le domaine du retour avec cet Etat.

1.2

Déroulement des négociations

Sur la base de la demande déposée par la mission suisse à Abuja auprès du Ministère des affaires étrangères de la République fédérale du Nigéria, en juillet 2001, une première délégation d'experts nigérians a été reçue à Berne du 3 au 4 décembre 2001 pour des entretiens exploratoires. Cette rencontre a permis aux deux délégations de convenir de l'échange de projets d'accord, puis de réunir les experts des deux Parties afin d'engager des négociations formelles sur les textes.

Les deux délégations se sont retrouvées les 11 et 12 juillet 2002 à Abuja afin de négocier les textes. Elles ont convenu de travailler sur la base du modèle nigérian, dans la mesure où celui-ci répondait aux préoccupations matérielles de la Suisse et correspondait à ce que le Nigéria avait précédemment négocié avec l'Italie, l'Espagne, puis l'Irlande. Les deux Parties ont paraphé le projet d'accord le 12 juillet 2002 à Abuja, à l'exception de trois articles portant principalement sur des questions de protection des données et de coopération technique dans le domaine migratoire.

A la suite d'échanges correspondance entre les autorités suisses et nigérianes, les négociations ont pu être définitivement conclues et le Conseil fédéral a approuvé l'accord le 18 décembre 2002. Cette décision incluait la possibilité d'une mise en oeuvre provisoire de l'accord du fait de l'importance des intérêts suisses en la matière. Le Nigéria n'agent pas donné son accord formel à cette application provisoire, la question est devenue sans objet.

L'accord a été signé le 9 janvier 2003 à Abuja entre le ministre Sule Lamido et Madame la conseillère fédérale Ruth Metzler-Arnold, lors de la visite de travail de la cheffe du Département fédéral de justice et police.

2

Partie spéciale

2.1

Contenu de l'accord

2.1.1

Titre et préambule

Le titre de l'Accord en matière d'immigration entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République fédérale du Nigéria révèle le souci de la Partie nigériane, né de l'histoire de ce pays, comme de celle de l'Afrique sub-saharienne, de ne pas faire usage du terme «accord de réadmission». En effet, aux yeux de la Partie nigériane, cette notion rappelle trop l'histoire coloniale et l'esclavage qui ont dominé les rapports des Etats du continent africain avec les Etats du Nord. Il convient de noter que ce titre ne change en rien le contenu matériel de l'accord. C'est d'ailleurs ce que rappelle le préambule, sui exprime la volonté des deux Parties contractantes de faciliter le rapatriement des personnes résidant irrégulièrement sur le territoire de l'autre Partie contractante.

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2.1.2

Commentaires des dispositions

Généralités et lois nationales sur l'immigration (art. I et II) Ces dispositions renvoient au droit interne et affirment l'engagement des parties à s'accorder une assistance mutuelle dans le but de mettre en oeuvre l'accord.

Admission des personnes, procédure de rapatriement, preuve de la nationalité, procédure spéciale d'identification (art. III à VI) Ces articles consacrent l'obligation de chacune des Parties de reprendre ses propres ressortissants qui se trouveraient en situation irrégulière sur le territoire de l'autre Partie. Ils prévoient l'obligation exhaustive de réadmettre sans formalités ses propres ressortissants (art. III) et énoncent quels sont les documents ainsi que les éléments permettant d'établir ou de présumer de la nationalité de ces personnes (art. IV, V et VI). Dans ces circonstances, l'autorité compétente délivre dans les quatre jours un laissez-passer (art. V, par. 6, et VI, par. 1, ch. [iv]). L'audition en vue d'établir la nationalité, condition sine qua non pour la délivrance d'un laissezpasser et, en conséquence, d'une réadmission est également réglée (art. IV).

Conditions de rapatriement (art. VII) Il est prévu que la Partie requise examine et vérifie que la personne qui arrive sur son sol est bien la personne pour laquelle elle a délivré des documents de voyage. Il ne s'agit pas de procéder à une nouvelle identification ou à une confirmation de la nationalité. Ainsi, s'il s'avérait que l'intéressé ne posséde pas la nationalité de la Partie requise, l'autre Partie le reprendrait en charge dans les mêmes conditions (art. XI).

Assistance mutuelle (art. VIII) Il s'agit d'un rappel du principe de l'engagement à s'accorder une assistance mutuelle en vue de l'identification des ressortissants des deux Parties contractantes.

Frais (art. IX) Les frais liés à la réadmission d'un ressortissant de l'autre Partie contractante sont supportés par la Partie requérante jusqu'à l'aéroport de destination.

Transport des bagages (art. X) La Partie requérante doit s'assurer que les effets personnels de la personne réadmise suivent cette dernière dans son pays de destination.

Droits et responsabilités (art. XII) Aux fins de cette disposition, les droits acquis lors d'un séjour légal en Suisse (par exemple par mariage) doivent être préservés, étant entendu que ces droits ne peuvent être
acquis qu'aux conditions de l'Etat requérant.

Entrée des personnes rapatriées (art. XIII) Selon le libellé de cet article, la possibilité subsiste pour une personne rapatriée de déposer une requête en vue d'une entrée légale sur le territoire de l'autre Partie contractante conformément aux lois et réglementations internes de cette dernière.

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Conséquences sur le droit international (art. XIV) Le texte stipule que l'accord ne saurait porter atteinte aux obligations de l'une ou l'autre des Parties contractantes en vertu du droit international.

Autorités compétentes (art. XV) La disposition désigne les ministères compétents pour appliquer l'accord.

Echange d'informations (art. XVI) La disposition définit les documents devant être échangés entre les Parties contractantes en vue de l'application de l'accord, en particulier la liste du personnel diplomatique et consulaire présent sur les territoires des deux Parties contractantes ainsi que la liste des aéroports pouvant être utilisés pour la réadmission des personnes concernées.

Protection des données personnelles (art. XVII) Fondé sur l'art. 25c de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), l'art. XVII définit les données personnelles qui peuvent être communiquées aux Parties contractantes aux fins de l'application de l'accord. Il prévoit en outre un catalogue de mesures visant à garantir la protection des informations ainsi transmises. L'art. IV, par. 5, contient également une disposition pertinente au regard de la protection des données personnelles (cf. à ce sujet les commentaires sous ch. 2.2).

Assistance technique et application de l'accord (art. XVIII et XIX) L'exemple du Nigéria montre bien les limites de ce qui était compris jusqu'à présent comme coopération dans le domaine de la migration, en particulier de la réadmission. En effet, ces questions se réglaient jusqu'ici sans grandes difficultés par l'aménagement de la coopération administrative entre Etats disposants de systèmes juridiques, de structures administratives et de moyens similaires. En outre, ces Etats avaient des politiques migratoires proches les unes des autres. La situation est bien différente avec le Nigéria. En l'espèce, il s'agit moins, pour la Suisse, de chercher une concordance d'intérêts préexistants que de trouver des intérêts compensatoires afin d'assurer une meilleure base à la coopération en vue de la réadmission effective de personnes en situation irrégulière sur le territoire suisse. Ces intérêts compensatoires peuvent être recherchés par les Etats parties à la négociation dans d'autres domaines de la politique extérieure et des relations
bilatérales. Dans le cas présent, ces efforts se limitent à une forme de soutien dans des domaines touchant à la migration qu'il s'agisse, comme il est prévu d'en discuter avec le Nigéria (art. XVIII), de la formation de fonctionnaires des services de l'immigration nigériane ou de la définition de programmes d'aide au retour pour les ressortissants de cet Etat en situation irrégulière en Suisse.

L'art. XVIII est une clause par laquelle les deux Parties contractantes s'efforcent d'identifier, par le biais d'un comité de coordination (art. XIX), formés d'experts des deux Parties contractantes, des éléments pratiques de coopération plus précis dans le cadre des domaines exposés à l'art. XVIII. Cette disposition n'entraîne en aucun cas une obligation de prestation. Au contraire, il s'agit de définir les éléments de soutien pratique qu'une Partie contractante peut fournir à l'autre, conformément au droit interne et aux politiques prévalant en la matière, tels que les exemples 5884

pratiques cités au paragraphe précédent. Ces éléments sont arrêtés dans le domaine des compétences préexistantes de l'Office fédéral des réfugiés et en coordination avec les départements et offices concernés.

Garanties des droits de l'homme (art. XX) Cette disposition met en exergue les droits des intéressés, rappelle les obligations des Parties contractantes préexistantes découlant du droit international, telles que le Pacte sur les droit civils et politiques de 1966.

En outre, il est expressément rappelé que, en conformité avec l'art. 36 de la Convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires (RS 0.191.02), les autorités de l'une des Partie contractante doivent informer tout ressortissant de l'autre Partie contractante qui est arrêté de son droit de contacter son ambassade, et s'il le demande, de faire notifier immédiatement à son ambassade son arrestation.

Règlement des différends, amendements, application, entrée en vigueur, suspension et dénonciation (art. XXI à XXVI) Ces dispositions générales et finales étendent en particulier le champ d'application de l'accord à la principauté de Liechtenstein (art. XXIII), qui fait partie du territoire douanier suisse.

2.2

Protection des données

Outre les dispositions usuelles relatives à la protection des données figurant à l'art. XVII, le présent accord contient également une réglementation particulière: l'art. IV, par. 5, prévoit que la Partie contractante tenue de réadmettre un ressortissant en application de l'accord doit être informée des autorités à l'origine de la décision de d'éloignement ou de renvoi, ainsi que de la date de ladite décision.

L'adoption de cette disposition répond à une demande des autorités nigérianes: pour des raisons de sécurités, celles-ci souhaitent en effet connaître les raisons pour lesquelles la personne à rapatrier doit quitter la Suisse. Concrètement, il s'agit de savoir si la décision d'expulsion ou d'éloignement est liée à une condamnation pénale (cf. art. 55 du code pénal [RS 311.0] et art. 10, al. 1, let. a, LSEE) ou si elle découle exclusivement de l'application du droit des étrangers (décision d'asile entrée en force, non-renouvellement d'une autorisation de séjour ou séjour irrégulier). A cette fin, les autorités nigérianes exigeaient de recevoir une copie de la décision. Or, en l'occurrence, la base légale est indispensable, puisqu'il s'agit de données sensibles au sens de l'art. 3, let. c, de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD; RS 235.1). Le deuxième obstacle tient quant à lui à la proportionnalité: la question est de savoir si, indépendamment de l'existence d'une base légale, la communication de données personnelles aussi complètes et sensibles est légitime eu égard au but poursuivi, à savoir la réadmission d'un ressortissant. Les autorités helvétiques sont d'avis qu'une telle démarche n'est pas légitime. Au cours des négociations, les Parties sont néanmoins parvenues au compromis suivant: la Partie requérante ne transmet pas à la Partie requise une copie de la décision à proprement parler, mais lui indique seulement le type d'autorité qui a pris la décision (autorité judiciaire ou administrative), de même que la date à laquelle la décision a été rendue. Ainsi, la Suisse n'indique pas aux autorités nigérianes si la

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personne a présenté une demande d'asile. Toutefois, si la décision de renvoi a été rendue par une autorité administrative, mais suite à une condamnation pénale (p. ex.

une mesure d'expulsion prononcée en vertu de l'art. 10, al. 1, let. a, LSEE), la Suisse doit en informer le Nigéria. Si elle omettait de le faire, elle enfreindrait les dispositions de l'art. IV, par. 5, de l'accord. Or, le droit en vigueur ne prévoit pas la transmission de ces données. Il faut donc que les Chambres fédérales ratifient le présent accord (cf. à ce sujet ch. 6.1.2) afin de créer la base légale indispensable.

A titre de comparaison et eu égard à leurs législations internes, il convient de relever que l'Espagne et l'Irlande ont accepté de communiquer à l'autre Partie contractante la teneur des décisions prises par leurs autorités judiciaires et administratives, voire de lui transmettre une copie décisions. Cependant, cette transmission est totalement inacceptable tant du point de vue du droit suisse que de celui des directives du droit européen pertinent, auquel l'Espagne et l'Irlande sont soumises.

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Conséquences pour les finances et le personnel de la Confédération et des cantons

Tant du point de vue financier, que du point de vue des effets sur le personnel, l'accord en matière d'immigration avec le Nigéria est justifié. En effet, les frais supplémentaires engendrés par l'exécution des renvois conduisent en fait à des économies nettes dans le domaine de l'aide sociale et peuvent être compensés par un transfert des coûts sur le plan interne. La mise en oeuvre de l'assistance technique prévue aux art. XVIII et XIX de l'accord est couvert par le budget de l'Office fédéral des réfugiés. Les coûts qui en découlent sont compensés par les économies réalisées dans le domaine de l'aide sociale. Ainsi, si, suite à l'application de l'accord, 100 personnes dépendent de l'aide sociale étaient identifiées, puis renvoyées, une économie de 1,44 million de francs suisses pourrait être réalisée.

L'application de l'accord conduit dans un premier temps, à une augmentation de la charge financière et du personnel pour les autorités fédérales (organisation de l'identification, réservation de vols, etc.). Pour les cantons, un déplacement des charges devrait s'opérer, dans le même temps, des autorités compétentes en matière d'aide sociale à celles chargées de l'exécution des renvois. Toutefois, des économies importantes devraient être réalisées à long terme. Enfin, la loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi; RS 142.31) règle, à l'art. 92, al. 2, la prise en charge des coûts pour le rapatriement des personnes tenues de rentrer chez elles.

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Programme de la législature

La conclusion de l'accord en matière d'immigration entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République fédérale du Nigéria répond aux objectifs fixés par le Conseil fédéral dans le programme de la législature 1999­2003 (cf. rapport du 1er mars 2000 sur le programme de la législature 1999­2003: objectif 11, R24, par. 3; FF 2000 III 2168).

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Rapports avec le droit européen

Le présent accord présente de nombreuses similitudes avec les accords analogues que le Nigéria a conclus avec l'Italie, l'Espagne et l'Irlande. Ceux-ci se basent pour l'essentiel sur la recommandation du Conseil de l'Union européenne du 30 novembre 1994 concernant un accord type bilatéral de réadmission entre un Etat membre et un pays tiers (JOCE n° C 274 du 19.9.1996, p. 20).

6

Constitutionnalité

6.1

Compétence de la Confédération

6.1.1

Compétence générale

La compétence générale de la Confédération dans le domaine des affaires étrangères découle des art. 54 et 184 de la Constitution (Cst.; RS 101). La Confédération peut conclure un traité en n'importe quelle matière, qu'elle relève de la compétence législative fédérale ou cantonale (cf. rapport du 7 mars 1994 sur la coopération transfrontalière et la participation des cantons à la politique étrangère; FF 1994 II 608).

6.1.2

Compétence en matière d'accord de réadmission

Conformément à l'art. 25b LSEE, le Conseil fédéral peut conclure avec des Etats étrangers des conventions relatives à la réadmission et au transit de personnes en situation irrégulière sur le territoire suisse.

Toutefois, étant donné que l'art. IV, par. 5, de l'accord prévoit que le type d'autorité et la date de la décision de renvoi sont communiqués et qu'il s'agit de données sensibles au sens de l'art. 3, let. c, LPD, la compétence du Conseil fédéral ne saurait s'étendre à cette disposition. En effet, une telle transmission ne peut être prévue que si une loi au sens formel l'autorise (art. 17, al. 2, et 19 LPD). Les traités de droit international approuvés par l'Assemblée fédérale, comportant des règles de droit sont des lois au sens formel (art. 3, let. k, ch. 2 LPD). Dès lors, l'accord doit être soumis aux Chambres fédérales conformément à l'art. 166, al. 2, Cst.

Ainsi, sur la base de l'art. 25b LSEE le projet d'accord est soumis à l'approbation du Conseil fédéral; mais, l'art. IV, par. 5, de l'accord avec le Nigéria nécessite l'approbation du Parlement.

6.2

Référendum

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum facultatif s'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables (ch. 1), s'ils prévoient l'adhésion à une organisation internationale (ch. 2), ou s'ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales (ch. 3). Le présent accord ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale et est dénonçable en tout temps (Art.

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XXVI). Au sens de l'art. 22, al. 4, de la loi fédérale sur le Parlement, une disposition exige l'adoption de lois fédérales lorsqu'elle prévoit des obligations de caractère général et abstrait, octroie des droits ou attribue des compétences. Une telle norme est importante lorsque, par analogie avec l'art. 164, al. 2, Cst., elle devrait faire l'objet d'un processus législatif formel au sens du droit interne.

Le présent accord contient certes diverses dispositions exigeant l'adoption de normes de droit interne, mais dans l'ensemble elles ne peuvent être considérées comme importantes. La question peut uniquement se poser en ce qui concerne l'art. IV, par.

5 : il s'agit de savoir si cette disposition doit être considérée comme importante au sens des critères énoncés. En tout état de cause, elle justifie que l'accord soit soumis au Parlement en vue de créer la base légale exigée par le droit de la protection des données pour la transmission de données. Le droit de la protection des données exige en effet pour le traitement des données en question qu'une base légale soit donnée au travers d'une loi formelle ou par l'approbation d'un accord interétatique par le Parlement. Si l'on observe l'ensemble du contenu de l'accord, cette disposition n'est pas substantiellement d'une importance telle, qu'il soit justifiable que l'accord soit de ce seul fait soumis au référendum facultatif. Par la présente appréciation, nous tenons compte du fait que le libellé de l'art. IV, par. 5 respecte explicitement les exigences du droit interne. Cette norme inclut en particulier une réserve expresse en faveur du droit national. En conséquence, l'arrêté fédéral portant approbation de l'accord n'est pas sujet au référendum relatif au traités internationaux.

7

Conclusion

L'Accord en matière d'immigration entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République fédérale du Nigéria permet de créer les bases juridiques de la coopération bilatérale dans le domaine de la gestion de la migration irrégulière. Les solutions prévues par le présent accord sont fondées sur la pratique et favorisent la réadmission rapide des personnes en situation irrégulière sur le territoire des Parties contractantes sans tracasseries administratives. La mise en oeuvre du présent accord dépendra de l'esprit de coopération qui se développera au sein du comité de coordination et à travers la mise en place de soutiens effectifs, tels que prévus à l'art. XVIII. Par ailleurs, le présent accord n'atteint pas le niveau de qualité de ceux conclus avec d'autres Etats, en particulier avec les membres de l'Union européenne.

En effet, pour un Etat du Sud, qui plus est Etat d'origine de la migration irrégulière, la question de la réadmission de ses propres ressortissants n'apparaît pas comme la première des priorités. Cette observation, abstraction faite de la difficulté à entrer en matière sur un sujet comme la réadmission de personnes en situation irrégulière, amène à limiter le champ de la négociation aux intérêts compensatoires. En outre, ce domaine est traditionnellement dépendant des ministères de l'intérieur, et donc étroitement lié à l'exercice de la souveraineté étatique cette perception freine encore la négociation bilatérale dans le cadre de la politique extérieure. Le présent accord constitue une première pour la Suisse qui, à la lumière des expériences italiennes, espagnoles ou irlandaises, peut espérer des résultats dans le domaine des retours. Il constitue un pas nécessaire pour débloquer la situation. Inversement, l'absence d'un tel instrument mettrait en danger la crédibilité de notre politique d'asile. Par ailleurs, les résultats escomptés ne remplaceront pas les bénéfices d'une politique concertée avec l'Union européenne, par l'adhésion à la Convention de Dublin ou, dans les 5888

rapports avec les pays du Sud, par la mise en oeuvre de l'accord de Cotonou entre les Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et le Communauté européenne et ses Etats membres, qui traite tout à la fois de la migration, du développement et du commerce.

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