03.034 Message concernant l'approbation de l'adhésion de la Suisse au Centre international pour le développement de politiques migratoires (CIDPM) (International Centre for Migration Policy Development ­ ICMPD) du 30 avril 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons ci-joint, accompagné du présent message, un projet d'arrêté fédéral relatif à l'approbation de l'adhésion de la Suisse au Centre international pour le développement de politiques migratoires (CIDPM; International Centre for Migration Policy Development ­ ICMPD), en vous demandant de l'approuver.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

30 avril 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2002-2571

3297

Condensé C'est le 1er juin 1993 que le Centre international pour le développement de politiques migratoires (CIDPM; International Centre for Migration Policy Development ­ ICMPD), sis à Vienne, a été fondé par un traité entre l'Autriche et la Suisse. Le traité du 26 avril 1996 signé par la Suisse, la République d'Autriche et la Hongrie fit du CIDPM une organisation internationale, qui, grâce à ses connaissances spécifiques de l'asile et de la migration, développe et favorise l'adoption de stratégies à long terme en la matière, mettant à disposition un mécanisme efficace de consultation. Par ailleurs, le CIDPM fournit aux gouvernements et aux organisations en Europe des services dans les domaines de l'asile et de la migration et s'implique dans la lutte contre la migration clandestine. Dans le cadre de ses activités liées au Pacte de stabilité et au Groupe de Budapest, il traite tout particulièrement de la problématique de la migration en Europe centrale et en Europe du SudEst dans le but d'intégrer divers Etats de cette région dans les structures migratoires mises en place en Europe et de contribuer ainsi à mieux gérer les flux migratoires clandestins. Enfin, le CIDPM a soutenu activement la Suisse pendant et après les conflits armés en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, notamment s'agissant du rapatriement de requérants d'asile déboutés et de personnes ne nécessitant plus de protection. Aujourd'hui, l'Autriche, la Hongrie, la Slovénie, la République tchèque, le Portugal, la Suède et la Suisse comptent parmi ses membres. La Pologne, la Croatie, la Slovaquie et la Bulgarie, quant à elles, sont sur le point d'y adhérer.

La Suisse a participé, de manière déterminante, à la naissance et à la fondation du CIDPM. Depuis la fondation de cette organisation en 1993, notre pays a, en tant que membre, contribué à définir les nombreuses activités, ainsi que l'élargissement continu du champ d'action du CIDPM. Ce dernier s'est avéré être pour la Suisse une plaque tournante en ce qui concerne la transmission d'informations et l'offre de services dans le contexte de l'asile et de la migration; il lui permet, d'une part, d'intervenir dans le débat politique avec l'Union européenne (UE), d'autre part, de participer à des projets de l'UE et de bénéficier d'un soutien actif dans la résolution de problèmes pratiques,
par exemple dans le domaine des retours.

A l'heure qu'il est, la Suisse ne peut mener une politique efficace en matière d'asile et de migration qu'en coopérant étroitement avec ses Etats voisins. Sa qualité de membre du CIDPM lui donne l'occasion de participer à nombre de projets mis sur pied par l'UE dans le domaine de la migration. En outre, cette organisation représente pour elle une plate-forme internationale lui permettant de prendre une part active à l'échange de vues entre pays et de faire connaître également ses préoccupations en matière d'asile et de migration au-delà des frontières de l'UE. Pour finir, les informations recueillies par le CIDPM sur les Etats d'origine ou de provenance de requérants d'asile constituent un soutien essentiel à la procédure d'asile et de renvoi, dont elles contribuent à accroître l'efficacité.

3298

L'adhésion de la Suisse à une organisation internationale doit être approuvée par le Parlement. Conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 2, de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.; RS 101), le traité du 26 avril 1996 instituant le CIDPM en tant qu'organisation internationale est sujet au référendum facultatif.

Jusque-là, le traité n'a pas été soumis au Parlement. Le présent message entend remédier à cette situation.

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Message 1

Partie générale

1.1

Point de la situation

Le 1er juin 1993, il a été stipulé, dans un traité conclu entre l'Autriche et la Suisse, que le débat sur les flux migratoires internationaux, en particulier la migration entre l'Est et l'Ouest, devait être approfondi et la coopération internationale entre les gouvernements concernés d'Europe centrale, occidentale et orientale renforcée.

C'est ainsi que le CIDPM, sis à Vienne, a été fondé sous le régime du droit privé autrichien. Le traité du 26 avril 1996 signé par la Suisse, la République d'Autriche et la Hongrie fit du CIDPM une organisation internationale. Cette étape tenait compte de l'importance grandissante des questions traitées par le CIDPM et de la reconnaissance croissante par les Etats membres du travail fourni par l'organisation dans le domaine de la migration. Le 8 septembre 1999, un accord fixant le siège de l'organisation a été signé à Vienne entre le CIDPM et l'Autriche, qui réglemente les immunités et les prérogatives de l'organisation. Aujourd'hui, le CIDPM compte l'Autriche, la Hongrie, la Slovénie, la République tchèque, le Portugal, la Suisse et la Suède parmi ses membres. La Pologne, la Croatie, la Slovaquie et la Bulgarie, quant à elles, se sont portées candidates à l'adhésion.

La Suisse a participé, de manière déterminante, à la fondation du CIDPM. Sa qualité de membre a montré que cette organisation internationale, de par les services aussi divers qu'étendus qu'elle fournit, permettait à notre pays de prendre part au débat politique avec l'UE et d'échanger de multiples informations en matière d'asile et de migration avec des Etats non membres de l'UE. De plus, le CIDPM donne, à ce titre, à la Suisse l'occasion d'exposer clairement à la Communauté internationale ses préoccupations dans les domaines de l'asile et de la migration. Enfin, il la soutient activement dans la recherche de solutions aux différents problèmes concrets qui se posent dans ces domaines.

La coopération avec le CIDPM s'est avérée particulièrement fructueuse pour la Suisse. Depuis la fondation de cette organisation internationale en 1993, notre pays a, en tant que membre, contribué activement à son édification et à son extension.

Jusque-là, le traité du 26 avril 1996 instituant le CIDPM en tant qu'organisation internationale n'a cependant pas été soumis au Parlement pour approbation.

Les compétences
nationales en matière de conclusion de traités internationaux sont réglementées par les art. 166 et 184 Cst. Conformément à ces dispositions, le Parlement doit donner son approbation lors de la conclusion de traités internationaux. Par le présent message, le Conseil fédéral demande au Parlement d'approuver le traité du 26 avril 1996 instituant le CIDPM en tant qu'organisation internationale.

3300

1.2

Genèse et évolution du CIDPM

L'idée de fonder le CIDPM est née d'une rencontre, organisée par la Suisse en automne 1992, entre les représentants gouvernementaux de différents Etats européens. A cette époque, la situation dans le domaine de l'asile devenait critique en Europe occidentale. En effet, l'émergence de nouveaux Etats démocratiques en Europe centrale et orientale, ainsi que les expulsions massives de population durant la guerre civile en Bosnie-Herzégovine ont entraîné un accroissement considérable des mouvements migratoires en direction de l'Europe occidentale. Il ne faisait alors plus aucun doute: la question de la migration ne pouvait pas être abordée exclusivement sur le plan national; une étroite coopération internationale et une péréquation des charges entre les pays s'imposaient.

La Suisse et la République d'Autriche comprirent la nécessité d'un soutien international dans le domaine de la migration. L'objectif était donc de créer une plateforme favorisant une coopération informelle entre les Etats concernés et de fournir des prestations au service de la coopération internationale en matière d'asile et de migration. A cette fin, un centre fut, dans un premier temps, fondé sous le régime du droit privé autrichien, dont la direction put être confiée à un spécialiste des problèmes migratoires. L'accord portant création du CIDPM est entré en vigueur au mois de mai 1993. Suite à une révision de la loi fiscale effectuée en Autriche en 1996, il fallait cependant s'attendre à ce que le CIDPM doive, en tant qu'organisation de droit privé, remettre au fisc environ la moitié de son budget sous forme d'impôts, de taxes et de cotisations sociales. En 1995, la République de Hongrie y adhéra par décision présidentielle. L'accord de fondation de 1993 ne constituant pas un accord international et les modifications fiscales susmentionnées représentant une lourde charge, il devint incontournable de clarifier le statut du CIDPM. La solution consistait à le transformer, grâce au traité du 26 avril 1996, en une organisation internationale. L'accord entre le CIDPM et la République d'Autriche sur le siège de l'organisation permit enfin au centre de bénéficier d'avantages fiscaux et d'immunités. Cet accord entra en vigueur le 31 août 2000.

Afin d'inclure les nouvelles démocraties d'Europe orientale et d'Europe centrale dans la
problématique de la migration européenne et d'intensifier ainsi le débat sur le développement de la migration clandestine, les membres fondateurs du CIDPM se sont fixé pour but d'encourager la coopération avec ces deux régions de l'Europe.

Au cours d'une conférence ministérielle qui s'est tenue à Budapest en 1993, il a donc été décidé que le CIDPM assurerait le secrétariat du processus de Budapest. Ce dernier est un forum consultatif, à l'échelle européenne, qui vise à la fois à lutter contre la migration clandestine et à créer des structures efficaces dans le domaine de la migration légale en Europe (cf. à ce sujet ch. 2.2.2.1).

3301

2

Partie spéciale

2.1

Bases légales et qualification du CIDPM à la lumière du droit international public

2.1.1

Bases légales

A l'origine, l'accord signé entre la République d'Autriche et la Suisse le 1er juin 1993 visait non pas la création d'une organisation internationale, mais l'édification d'un centre soumis au régime du droit privé et permettant l'échange réciproque de services de nature technique. C'est ainsi que les activités du CIDPM furent tout d'abord menées dans le cadre de l'Institut Ludwig Boltzmann, une association autrichienne visant à promouvoir la recherche scientifique. Suite à l'adhésion de la Hongrie le 8 septembre 1995, l'accord fondateur de 1993, qui devait expirer le 30 avril 1996, fut prorogé de huit ans par un accord additionnel. Ce dernier fut signé le 27 mars 1996 par la Suisse, la République d'Autriche et la Hongrie. Conformément à l'art. 1 dudit accord, il était prévu de faire du CIDPM une organisation internationale dont le siège principal serait à Vienne. Un autre traité signé par les mêmes pays le 26 avril 1996 érigea le CIDPM en une organisation internationale soumise au droit international public et dotée d'une personnalité morale. Par l'accord de siège, conclu entre le CIDPM et la République d'Autriche et entré en vigueur le 31 août 2000, le gouvernement autrichien reconnaissait la personnalité morale du CIDPM que lui conférait l'accord additionnel, de même que sa capacité juridique. Par ailleurs, cet accord octroyait des privilèges au CIDPM, comme l'immunité de juridiction, l'immunité d'exécution et l'exemption d'impôts.

2.1.2

Autres évolutions juridiques

Il convient d'abroger la limitation de la durée de validité, prévue à l'origine dans l'accord fondateur de 1993, par une convention additionnelle qui doit être signée au printemps 2003 et entrer en vigueur le 30 avril 2004. Cette décision s'impose pour plusieurs raisons: tout d'abord, parce que les Etats membres estiment que la gestion des flux migratoires représente un processus agissant sur le long terme; ensuite, parce que le CIDPM a considérablement élargi son champ d'action; enfin, parce qu'un grand nombre d'Etats souhaitent y adhérer. Le CIDPM deviendra alors, sous réserve d'une autre décision des Etats membres, une organisation internationale aux activités illimitées dans le temps. S'agissant de la conclusion de la convention additionnelle, la compétence incombe, sous réserve de l'approbation par le Parlement de la qualité de membre de la Suisse, au Conseil fédéral (cf. art. 47bisb, al. 3, de la loi sur les rapports entre les conseils; LREC1).

1

RS 171.11

3302

2.1.3

Qualification du CIDPM à la lumière du droit international public

Dans une expertise datée du 1er mai 20022, la Direction du droit international public (DDIP), du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), a constaté que l'accord de fondation d'une organisation internationale devait comporter deux types de dispositions. D'une part, il doit exprimer la volonté des parties de fonder une organisation internationale. D'autre part, il doit mentionner les règles relatives à la vie de l'association, ainsi qu'aux rapports juridiques à la fois au sein de l'organisation internationale et avec l'extérieur. On parle de prescriptions matérielles, qui jouent le même rôle qu'une constitution pour un Etat. Selon l'expertise précitée, l'accord portant création du CIDPM remplit cette double condition. Le CIDPM constitue donc une organisation internationale au sens du droit international public.

2.2

Objectif et champ d'action du CIDPM

2.2.1

Objectif

L'art. 2 de l'accord fondateur de 1993 stipule que le CIDPM traite du problème des flux migratoires actuels et potentiels dans des pays cibles européens. Pour ce faire, il se fixe pour objectif, conformément à l'art. 1 dudit accord, de favoriser une politique migratoire aussi étendue que durable et de fournir aux Etats membres des prestations de service dans le domaine de la migration. Abordant essentiellement les aspects politiques de la migration, le centre vise, grâce à ses vastes connaissances, à développer et favoriser des stratégies à long terme en matière de migration. Par ailleurs, le CIDPM étudie des questions ayant trait à l'asile et à la problématique de la migration clandestine et s'occupe de projets en rapport avec le contrôle aux frontières, le retour de requérants d'asile déboutés et l'harmonisation des visas, ainsi que de projets d'information sur les pays et de l'adoption de mesures contre les activités des passeurs. Développer et encourager une coopération paneuropéenne en matière de migration fait également partie de ses objectifs. C'est ainsi qu'il importe de s'assurer, dans le cadre du processus de Budapest (cf. à ce sujet également ch.

2.2.2.1), que des Etats d'Europe centrale, orientale et de l'Europe du Sud-Est soient intégrés dans la politique européenne en matière d'asile et migration. Enfin, l'art. 6 de l'accord de fondation garantit que les Etats membres peuvent bénéficier du fruit du travail du CIDPM, par exemple des études menées sur la migration, et lui demander des services, voire la mandater pour accomplir des missions.

2

Expertise du Département fédéral des affaires étrangères, Direction du droit international public: «Völkerrechtliche Qualifikation des ICMPD» (Qualification du CIDPM à la lumière du droit international public), datée du 1er mai 2002.

3303

2.2.2

Champ d'action

2.2.2.1

Secrétariat du processus de Budapest

L'un des principaux objectifs du CIDPM consiste à encourager la coopération entre Etats européens en vue de lutter contre la migration clandestine. Les Etats d'Europe centrale et orientale, eux-mêmes largement concernés par les flux migratoires, doivent tout particulièrement être associés, en tant que partenaires égaux, au débat européen sur la migration. Par conséquent, assurer le secrétariat du processus de Budapest compte parmi les tâches essentielles du CIDPM. Le processus de Budapest tire son origine d'une conférence ministérielle tenue en 1993 à Budapest, qui était consacrée aux questions liées à la migration clandestine. Il fut fondé en 1994 afin de veiller au respect des recommandations adoptées lors de la conférence ministérielle, son secrétariat étant confié au CIDPM.

Le processus de Budapest est un forum consultatif, dans lequel 43 pays (tous les Etats européens, y compris les Etats d'Europe centrale, d'Europe orientale et d'Europe du Sud-Est) sont aujourd'hui représentés. En sont également membres dix organisations internationales, dont le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et Europol.

Le processus de Budapest a pour objectif de mettre au point des mesures efficaces visant à lutter contre la migration irrégulière et de veiller à leur application, ainsi que de créer des structures étatiques efficaces dans le domaine de la migration légale.

Face à l'augmentation constante des mouvements migratoires clandestins à travers l'Europe, les Etats membres de l'UE, tout comme la Commission de l'UE, ont vu dans le processus de Budapest un instrument approprié pour promouvoir le contrôle de la migration. Le caractère flexible et informel de la coopération entre les Etats dans le cadre du processus n'y est pas pour rien. C'est ainsi qu'en 1997, une autre conférence ministérielle se déroula à Prague, au cours de laquelle les Etats adoptèrent 55 recommandations portant, entre autres, sur l'harmonisation du droit en ce qui concerne les mesures prises à l'encontre des passeurs, l'harmonisation des politiques des visas, l'échange d'informations en matière de migration clandestine, mais aussi sur la conclusion d'accords relatifs au retour d'étrangers dans leur Etat d'origine et les mesures de lutte contre le crime
organisé. Différents groupes de travail furent ensuite institués pour appliquer ces recommandations. L'un d'entre eux, par exemple, se concentre sur la question de l'harmonisation du droit en ce qui concerne les mesures adoptées à l'encontre des passeurs, tandis qu'un autre, dont fait également partie la Suisse, s'efforce d'harmoniser les politiques des visas. Suite à l'accroissement des flux migratoires dans les Balkans, un autre groupe de travail fut constitué au mois de février 1999 en vue d'empêcher la migration clandestine en Europe du Sud-Est. Il proposa notamment des mesures visant à lutter contre les activités des passeurs et à améliorer la sécurité aux frontières terrestres et maritimes, ainsi que dans les aéroports de cette région. De même, des groupes de travail spécialisés dans certains pays (comme la Moldavie ou l'Albanie) furent formés afin de se pencher sur les modalités concrètes de la coopération en matière de migration.

Toutes ces activités menées dans le cadre du processus de Budapest démontrent que le CIDPM assume une fonction importante d'un point de vue non seulement organisationnel, mais aussi technique. Depuis 1995, il a ainsi organisé et coordonné plus de 70 conférences interétatiques, dont la conférence ministérielle à Prague en 1997.

3304

Par ailleurs, il a, sur mandat du processus de Budapest, rédigé des rapports à l'attention des différentes conférences et des divers groupes de travail. Il a, par là-même, contribué de façon décisive à ce que les Etats qui ne sont pas inclus dans les structures mises en place par l'UE pour lutter contre la migration clandestine puissent également tirer parti d'une plate-forme efficace dans ce domaine. C'est là un avantage de taille, notamment pour la Suisse, qui n'est pas membre de l'UE.

Le printemps 2003 offrira aux Etats participant au processus de Budapest l'occasion de faire l'état des lieux et de donner au processus une nouvelle orientation. La conférence ministérielle prévue à Athènes s'attachera à tracer les grandes lignes de la future coopération et des débats dans le domaine de la migration et à évaluer les événements survenus depuis la dernière conférence à Prague.

2.2.2.2

Europe du Sud-Est et Pacte de stabilité

Suite à l'émergence de nouveaux Etats démocratiques, ainsi qu'aux deux guerres civiles qui ont sévi en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, l'Europe du Sud-Est a, ces dernières années, été responsable des plus grands flux migratoires à travers l'Europe.

Aussi le CIDPM s'est-il, dès sa fondation en 1993, penché tout particulièrement sur cette région.

Les activités menées par le CIDPM en Europe du Sud-Est sont essentiellement déterminées par celles accomplies dans le cadre du Pacte de stabilité, mais aussi du Groupe de Budapest. Le Pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est a été fondé en 1999 dans le but d'intégrer progressivement dans les structures européennes divers Etats de cette région, à savoir l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Macédoine et la République fédérale de Yougoslavie. En sont membres, outre les Etats de l'Europe du Sud-Est, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie, la Moldavie et la Turquie, ainsi que tous les Etats membres de l'UE, le Japon, la Norvège, la Russie, la Suisse et les Etats-Unis d'Amérique, sans oublier d'importantes organisations internationales.

Dans le cadre de ses activités s'inscrivant dans le contexte du Pacte de stabilité, le CIDPM a conclu des accords de coopération avec l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, la Hongrie, la Macédoine, la Slovénie et la Turquie et établi des représentations à Zagreb, Sarajevo, Skopje et Tirana. Par ailleurs, il a publié différents rapports portant, entre autres, sur la crise du Kosovo et les élections en Bosnie-Herzégovine.

L'une des principales activités du CIDPM en Europe du Sud-Est a consisté à soutenir le retour d'anciens réfugiés de guerre dans leur Etat d'origine ou de provenance.

Dans ce but, le CIDPM a, entre 1994 et 1997, organisé de nombreuses rencontres internationales, notamment avec la participation du HCR. Afin de faciliter la réintégration économique des personnes concernées dans une Bosnie-Herzégovine ravagée par la guerre civile et ainsi d'encourager le retour volontaire d'anciens réfugiés de guerre bosniaques, il a, avec le soutien de la Commission de l'UE, dispensé, dans le cadre de trois projets, une formation en économie d'entreprise à de petits entrepreneurs bosniaques, financé la création de petites entreprises et renseigné les intéressés sur tous les aspects essentiels de leur retour. Ces projets ont permis de faciliter considérablement, d'un point de vue économique, le retour en Bosnie-Herzégovine

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de plusieurs centaines de petits entrepreneurs et de leurs proches. Suite à cette expérience concluante, un quatrième projet semblable fut lancé en 2000 en vue d'encourager le retour au Kosovo de personnes déplacées par la guerre.

Grâce à des conventions passées avec l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l'OIM, le CIDPM a coopéré activement à la mise en oeuvre de l'accord de paix de Dayton, daté du 21 novembre 1995. Ces conventions visaient une participation active des réfugiés de guerre bosniaques séjournant à l'étranger aux élections organisées dans leur pays d'origine entre 1996 et 1998. A cette fin, le CIDPM mit à disposition l'infrastructure logistique nécessaire pour que les personnes déplacées par la guerre vivant en Europe et outre-mer puissent y prendre part. Au moyen de stations de radio mises en place par le CIDPM et financées par le HCR et la Suisse, les réfugiés kosovars qui séjournaient en Albanie durant la guerre civile, purent, en 1998 et 1999, obtenir des informations sur la situation régnant alors au Kosovo. Le but ultime était d'assurer un retour ultérieur des réfugiés et d'empêcher que les mouvements migratoires clandestins en direction de l'Europe occidentale ne prennent de l'ampleur.

Une autre activité cruciale du CIDPM dans le cadre du Pacte de stabilité réside dans la mise au point de dispositifs efficaces de contrôle aux frontières en vue de lutter contre la migration clandestine. En Albanie, en Bosnie-Herzégovine, en Bulgarie, en Croatie, en Macédoine, en Roumanie et en Turquie, le CIDPM a, d'entente avec les autorités desdits Etats, adopté différentes mesures tendant à améliorer les systèmes de contrôle. Ainsi, il a examiné les aéroports d'Albanie et de Roumanie sous l'angle de la sécurité et organisé, avec le soutien financier de l'UE, des séminaires dans divers Etats, tels que la Bosnie-Herzégovie, la Croatie et la Macédoine, à l'attention des fonctionnaires afin qu'ils appliquent les normes de l'UE dans les domaines des contrôles aux frontières et de la migration.

Afin d'améliorer l'échange réciproque d'informations entre les Etats d'accueil et les Etats de provenance et d'aider ainsi les autorités en matière d'asile à mener une procédure d'asile et de renvoi aussi rapide qu'efficace, le CIDPM a, après entente avec le HCR et la Force
multinationale de stabilisation (SFOR), institué, en 1997, le «Repatriation Information Centre» (RIC) en Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait là d'une centrale d'information chargée de répondre à toutes les questions ayant trait au rapatriement et au retour de ressortissants bosniaques en Bosnie-Herzégovine. Ce réseau d'information, le plus important en Bosnie-Herzégovine, était géré à Sarajevo par le CIDPM. Le traitement d'informations fondamentales sur la situation régnant alors en Bosnie permit de bien mieux connaître l'infrastructure publique disponible sur place. Il permit également de faciliter l'octroi d'aides et d'apporter aux autorités chargées de l'asile dans les Etats d'accueil un soutien décisif dans la prise de décisions aussi rapides qu'efficaces.

Suite aux expériences positives faites avec le RIC, un projet d'information semblable fut, à la demande expresse de la Suisse, lancé au Kosovo en mars 2000. Le «Source Country Information System»-Kosovo (SCIS-Kosovo) fait partie du projet d'information «Source Country Information Systems» (SCIS) géré par le CIDPM et est pris en charge, pour ce qui est de l'organisation, par le CIDPM et l'OIM. Il fournit aux Etats d'accueil des informations émanant de régions de provenance ellesmêmes dans le but d'instaurer une procédure uniforme et régulière en matière de rapatriements au Kosovo. Les diverses requêtes formulées par les Etats et les organisations participant au projet (comme l'Autriche, la Belgique, la Grande-Bretagne, le 3306

Danemark, les Pays-Bas, l'Allemagne, la Suède, la Norvège, l'OIM et l'UE) sont transmises par la centrale du SCIS-Kosovo, sise à Vienne, aux antennes du SCIS établies dans les différentes communes du Kosovo. Toutefois, elles ne doivent l'être que dans le respect des dispositions légales nationales régissant la protection des données. A la demande des Etats intéressés et de la Commission européenne, la diffusion d'informations aux autorités chargées des questions ayant trait aux visas, à l'asile, au regroupement familial et au retour a, depuis un certain temps, été étendue à toute une série d'Etats foyers de mouvements migratoires clandestins vers l'Europe.

Outre ces activités, le CIDPM a aussi récemment coopéré de manière intensive au Pacte de stabilité. En effet, le groupe de travail «Europe du Sud-Est», institué par le processus de Budapest (cf. ch. 2.2.2.1) en 2000, s'est associé au Pacte de stabilité pour convoquer une Task Force commune chargée d'intensifier les contrôles aux frontières des pays d'Europe du Sud-Est afin de lutter contre les flux migratoires irréguliers. Le CIDPM s'est alors vu confier le secrétariat de cette Task Force. Au mois de juin de la même année, un autre projet visant à lutter contre la migration clandestine fut lancé dans le but d'améliorer le système de contrôle des frontières en Albanie en coopération avec les autorités frontalières albanaises.

2.2.2.3

Autres activités du CIDPM

Conformément à l'art. 1 de l'accord de fondation de 1993, le CIDPM vise à favoriser une politique migratoire européenne réaliste et durable. Il s'acquitte de cette mission en conseillant les Etats membres notamment en matière de migration et en rédigeant des rapports et des études à ce sujet. En outre, il s'engage activement dans des forums multilatéraux consacrés aux questions de politique migratoire. Mener des projets dans le domaine de la migration et assurer le secrétariat du processus de Budapest (cf. ch. 2.2.2.1) font également partie des activités grâce auxquelles il apporte une contibution décisive à la politique migratoire européenne.

Dans le cadre de son activité liée au processus de Budapest, le CIDPM décela très vite que les autorités européennes chargées du contrôle des frontières dans les Etats non membres de l'UE et de l'Accord de Schengen de 1985 et 1990 ne disposaient pas d'un forum de coopération comparable à celui de l'UE. Aussi décida-t-il d'intervenir et d'encourager, par ses activités, la coopération interétatique en matière de contrôle des frontières européennes dans le but de contrer, à long terme, les mouvements migratoires clandestins. En tant que secrétariat, le CIDPM fournit notamment des prestations dans le domaine du contrôle des frontières à l'«International Border Police Conference» (IBPC), à laquelle la Suisse participe aussi régulièrement. L'IBPC est un forum réunissant des représentants des autorités chargées du contrôle des frontières de quelque 35 Etats européens, qui traitent de questions stratégiques et pratiques ayant trait au trafic de drogue ou d'armes, aux passeurs ou à d'autres activités criminelles transfrontalières. De plus, en dispensant aux pays candidats à l'UE une formation sur le thème du contrôle des frontières de l'UE et de l'espace Schengen, le CIDPM contribue considérablement à la mise en application des normes de l'UE et du dispositif de Schengen en Europe centrale et en Europe du Sud-Est.

3307

Transmettre des informations à des Etats, qu'ils soient membres ou non de l'organisation, constitue une autre activité importante du CIDPM. Celui-ci compare les pays sous l'angle des politiques migratoires nationales, suit et évalue les tendances migratoires, compare les législations dans les domaines des étrangers et de l'asile et collecte des informations sur les pays de provenance de requérants d'asile.

De plus, le CIDPM recueille des données statistiques dans les domaines de l'asile et de la migration en vue de procéder à leur évaluation.

En outre, le CIDPM se charge de l'organisation et de la coordination de conférences internationales portant sur la migration. C'est ainsi qu'en 2000, il a, suite à l'afflux croissant de Rom, réuni et dirigé une conférence à laquelle seize gouvernements, quatorze organisations internationales et les principales associations européennes de Rom étaient représentés.

Enfin, le CIDPM encourage, dans l'intérêt des Etats membres, la coopération avec et entre les organisations internationales, telles que le HCR, l'OIM, les Consultations intergouvernementales sur les politiques d'asile, de réfugiés et de migration en Europe, Amérique du Nord et Australie [CIG; «Intergovernemental Consultations on Asylum, Refugee and Migration» (IGC)] et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Par ailleurs, il bénéficie, depuis l'automne 2002, du statut d'observateur auprès de l'Organisation des Nations Unies (ONU).

2.3

Importance pour la Suisse d'une participation au CIDPM

La Suisse a participé de manière déterminante à la naissance, à la fondation et au développement du CIDPM. Depuis la fondation de cette organisation en 1993, notre pays a, en tant que membre, suivi de près les diverses activités, ainsi que l'élargissement continu du champ d'action du CIDPM, y contribuant dans une large mesure.

Il s'est avéré que ce dernier revêtait pour la Suisse tout particulièrement une importance capitale et ce, pour trois raisons: ­

il lui transmet des informations précieuses en matière de visas, d'asile et de renvois;

­

il lui permet d'intervenir dans le débat politique avec l'UE et de participer à des projets de l'UE réalisés dans le contexte de la migration;

­

il l'aide activement à résoudre les situations de crise et à lutter contre la migration clandestine.

2.3.1

Transmission d'informations en matière d'asile et de renvoi

Au mois de janvier 2000, le CIDPM et l'OIM ont, à la demande de la Suisse, mis sur pied le projet d'information SCIS-Kosovo. Ce projet est axé sur les besoins d'information spécifiques concernant le retour au Kosovo de requérants d'asile déboutés. Seules les instances gouvernementales officielles et les organisations non gouvernementales (ONG) y ont accès. Outre l'Office fédéral des réfugiés (ODR) et d'autres offices fédéraux [la Direction du développement et de la coopération (DDC) 3308

et le Secrétariat d'Etat à l'économie (seco)], tous les services-conseils cantonaux en vue du retour et toutes les autorités de police cantonale des étrangers en Suisse en font partie.

La Suisse, qui coopère au SCIS-Kosovo depuis avril 2000, soumet environ 120 requêtes par mois. Entre janvier et mi-novembre 2002, 965 requêtes au total sont parvenues au SCIS-Kosovo. Dans la plupart des cas, il s'agit de vérifier l'identité et/ou l'ethnie d'étrangers; des questions de nature médicale sont également posées au sujet des établissements, des médicaments disponibles et des possibilités de traitement. Un besoin de précision se faisant encore sentir dans le domaine du retour de requérants d'asile déboutés, tout comme s'agissant des minorités au Kosovo, le SCIS-Kosovo sera probablement maintenu en activité jusqu'au second semestre 2003.

Le SCIS permet aux autorités suisses chargées de l'asile et des étrangers de transmettre rapidement et efficacement des informations objectives en matière d'asile et de renvoi et, qui plus est, des informations ciblées sur les problèmes et tenant compte de la situation. En mettant à disposition de telles informations, le SCIS aide les autorités suisses à clore les procédures d'asile et de renvoi en rendant des décisions répondant au double impératif de la rapidité et de l'efficacité. Les informations nécessaires peuvent être obtenues dans un délai très court (compter entre cinq et dix jours) de n'importe quel endroit du Kosovo. La procédure en matière d'asile et d'étrangers s'en trouve considérablement accélérée. En outre, d'autres sources d'information sur place, comme une représentation suisse, peuvent bénéficier des prestations proposées par le SCIS. Même dans les pays dans lesquels la Suisse n'est pas représentée, le SCIS serait à même de répondre à un besoin d'information. Du fait que les Etats et les organisations participant au projet nourrissent des intérêts communs, le SCIS garantit une coopération source de synergies et, surtout, financée en partenariat. Ainsi, la Suisse n'a, en 2002, participé qu'à hauteur de 100 000 euros à un budget global d'environ 1 047 000 euros, les autres participants assumant les 900 000 euros restants. Enfin, disposer d'informations concrètes concernant la situation sur place peut encourager les requérants d'asile déboutés à rentrer
volontairement dans leur pays.

En étant membre à part entière du CIDPM, la Suisse peut, suite aux expériences concluantes faites avec le Kosovo, participer activement à la promotion et à la planification d'autres projets SCIS et faire part de ses préoccupations concernant les principaux pays de provenance de requérants d'asile. Ainsi, il est prévu de lancer d'autres réseaux d'information, entre autres, au Sri Lanka et en Afghanistan, qui devraient être opérationnels au printemps ou en été 2003. De même, un projet SCIS consacré à l'Afrique occidentale, qui revêtirait une importance capitale pour la Suisse en raison de l'augmentation du nombre de demandes d'asile enregistrées pour cette région, est sur le point de voir le jour. Enfin, un projet SCIS consacré aux Etats du Maghreb est également à l'étude.

3309

2.3.2

Participation au débat européen sur la migration et à des projets de l'UE réalisés dans le domaine de la migration

2.3.2.1

Evolution au sein de l'UE

Entré en vigueur le 1er mai 1999, le Traité d'Amsterdam (TCE)3, prévoit la création d'un espace de liberté, de sécurité et de droit dans lequel non seulement les biens, les services et les capitaux, mais aussi les personnes peuvent circuler librement. Il en découle également la mise en place d'un espace commun en matière d'asile et de réfugiés. Le TCE prévoit, à ce titre, différentes mesures tendant à harmoniser les dispositions dans le domaine de l'asile, qui doivent être appliquées d'ici à 2004.

Outre ces mesures, la Convention de Dublin4, qui permet de déterminer l'Etat compétent pour traiter une demande d'asile, constitue un autre élément fondamental dans la création d'un système d'asile commun. Le traité prévoit d'intégrer dans le droit communautaire la coopération entre les Etats membres de l'UE, régie jusqu'ici par le droit international public, dans le cadre de la Convention de Dublin.

La convention est assortie de nombreux instruments permettant sa mise en oeuvre et son évolution. A titre d'exemple, on peut citer le règlement concernant la création du système «Eurodac» pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de ladite convention. De même, la Convention d'application de l'Accord de Schengen5, datée du 19 juin 1990, et l'acquis de Schengen qui a suivi, comportent des décisions et des directives importantes dans les domaines de l'asile et de la migration, s'agissant notamment du retour et de la politique des visas.

Les négociations menées avec l'UE dans le but d'associer la Suisse aux structures de Schengen et de Dublin se poursuivent depuis le 11 juillet 2002. Pour ce qui est de la Convention de Dublin, le règlement «Dublin II», qui doit intégrer la Convention de Dublin dans le droit communautaire, servira de base de négociation. Dans les prochains mois, l'UE franchira la première étape de la mise en place d'une politique commune d'asile, reposant sur une meilleure définition du statut de réfugié, le règlement «Dublin II», qui remplace la Convention de Dublin, et la directive relative aux normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les Etats membres. Les questions encore ouvertes concernent la délimitation définitive de la notion de réfugié, les droits des réfugiés, les décisions portant sur les formes de protection subsidiaire et la directive relative aux normes minimales applicables dans le cadre de la procédure d'asile.

3

4

5

Traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes, signé à Amsterdam le 2 octobre 1997 et entré en vigueur en mai 1999 (JO C 340 du 10 novembre 1997) Convention relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres des Communautés européennes ­ Convention de Dublin (JO C 254 du 19 août 1997) Convention d'application de l'Accord de Schengen, datée du 14 juin 1985 (JO L 239 du 22 septembre 2000)

3310

2.3.2.2

Etroite coopération entre le CIDPM et l'UE

Etant donné l'importance du rôle que joue l'UE dans les questions migratoires et vu notamment la coopération établie entre les Etats membres de l'UE en matière de justice et d'affaires intérieures, le CIDPM s'est, depuis sa fondation, toujours efforcé de coopérer étroitement avec les principaux organes de l'UE et l'Etat assumant la présidence de l'UE. C'est ainsi qu'il a, sur mandat et grâce au financement de l'UE, réalisé divers projets, en particulier dans les domaines de l'accueil et du retour de réfugiés, ainsi que de la formation à la question du contrôle des frontières. Par exemple, il a, en 2001, organisé un séminaire concernant l'utilisation effective d'informations sur les pays d'origine et de provenance dans le cadre des procédures d'asile menées par les Etats candidats à l'UE (programme Odysseus). Le CIDPM met également sur pied des projets financés par le «Groupe à haut niveau Asile et migration» de l'UE: c'est le cas d'un projet visant à adapter le système albanais de contrôle du franchissement des frontières aux normes de l'UE ou du projet SCIS au Sri Lanka déjà mentionné (cf. ch. 2.3.1). A noter également la tenue, en Turquie au printemps 2000, d'un séminaire d'introduction à la politique de l'UE dans les domaines de la migration, de l'asile et du contrôle des frontières, projet du CIDPM qui a également bénéficié d'un financement communautaire.

Le processus de Budapest entend étendre les mécanismes de coopération convenus entre les Etats membres de l'UE dans le cadre de leur coopération en matière de justice et d'affaires intérieures aux Etats européens non membres de l'UE. En raison de sa participation active au processus et de ses activités dans le domaine du contrôle des frontières (cf. ch. 2.2.2.1), le CIDPM a également été chargé par l'UE de mener à bien plusieurs projets dans les domaines du contrôle du franchissement des frontières et de la formation d'Etats candidats à l'UE, comme les programmes de formation sur le contrôle aux frontières extérieures de Schengen en 1999 et les projets de formation sur les visas destinés aux Etats candidats à l'UE entre 2001 et 2002. Parallèlement, le CIDPM a réalisé de nombreux projets de l'UE en rapport avec la situation des réfugiés en Bosnie-Herzégovine, tels que des projets liés au retour, des études sur des informations ayant trait aux
Etats d'origine ou de provenance et des travaux portant sur la migration des Rom. Une politique globale en matière de retour faisant partie intégrante d'une politique migratoire de l'UE et aucun écrit exhaustif n'ayant jusqu'ici été rédigé à ce sujet par l'UE, le CIDPM a, en janvier 2002, mené, sur mandat du Fonds Européen pour les Réfugiés (FER), une étude6 sur la politique de l'UE en matière de retour et la pratique des différents Etats européens à l'égard des personnes déplacées bénéficiant d'une protection provisoire, des personnes ne jouissant plus d'une protection internationale et des requérants d'asile déboutés.

S'il coopère étroitement avec l'Union européenne, le CIDPM n'en reste pas moins une organisation internationale qui déploie ses activités en dehors des structures de l'UE. Par conséquent, l'éventuel élargissement de l'UE vers l'Est n'aura aucune incidence sur sa coopération avec le CIDPM. Par ailleurs, l'organisation se penche 6

«Study on comprehensive EU return policies and practices for displaced persons under temporary protection, other persons whose international protection has ended, and rejected asylum-seekers», rapport final du CIDPM à l'attention du Fonds Européen pour les Réfugiés, janvier 2002

3311

également sur la situation d'Etats qui ne sont pas près d'adhérer à l'UE, comme p. ex. la Moldavie, la Bulgarie et la Roumanie.

2.3.2.3

Avantages pour la Suisse d'une coopération au sein du CIDPM

Les efforts d'harmonisation déployés au sein de l'UE revêtent, pour la Suisse, une importance capitale dans les domaines de l'asile et de la migration. A l'heure qu'il est, notre pays ne peut effectivement mener une politique efficace en matière d'asile et de migration qu'en coopérant étroitement avec ses Etats voisins. Cependant, l'adhésion de la Suisse à l'UE n'étant, pour l'instant, pas à l'ordre du jour, les négociations bilatérales en cours restent actuellement le seul espoir d'élaborer des stratégies en matière de politique d'asile et de politique migratoire. Afin d'éviter l'isolement total de notre pays dans le domaine de la migration, une coopération avec des organisations internationales telles que le CIDPM s'impose donc. En effet, la Suisse dépend, justement dans les domaines de l'asile et de la migration, de la coopération tant européenne qu'internationale.

En étant membre du CIDPM, la Suisse peut participer activement à de nombreux projets menés par l'UE en matière d'asile et de migration (cf. ch. 2.3.2) auxquels elle ne pourrait autrement prendre part que difficilement, n'étant pas membre de l'UE. Elle peut ainsi également faire entendre, à l'échelle européenne, ses préoccupations sur les dossiers de l'asile et de la migration. En outre, l'étroite coopération du CIDPM avec l'UE, notamment avec la Commission européenne, lui donne la possibilité de participer à un échange de vues informel dépassant le cadre et les structures de l'UE. Ainsi, la Suisse peut indirectement contribuer à l'élaboration de la politique migratoire européenne et exercer une certaine influence sur des domaines suscitant un intérêt particulier pour elle (p. ex., la conclusion d'accords de réadmission).

C'est tout particulièrement dans le domaine du retour des requérants d'asile déboutés que la Suisse est tributaire d'une coopération multilatérale. Sa participation au sein du CIDPM lui permet donc de prendre part à des débats européens et, par là-même, de lier et d'entretenir des contacts informels avec des Etats partenaires dans le domaine des retours. Une participation active au débat européen renforce le rapport de confiance entre notre pays et ses partenaires de négociation sur les dossiers de l'asile et de la migration et prépare ainsi la voie à une coopération croissante.

Pour toutes ces raisons, la qualité
de membre du CIDPM constitue, pour l'avenir également, un moyen aussi judicieux qu'important pour la Suisse de se rapprocher continuellement d'une politique européenne en matière d'asile et de migration.

3312

2.3.3

Résolution de situations de crise et lutte contre la migration irrégulière

A la suite de la guerre civile en Bosnie-Herzégovine, le CIDPM a activement aidé la Suisse à trouver des solutions, notamment dans l'optique du retour et de la réintégration des réfugiés de guerre bosniaques (cf. à ce sujet ch. 2.2.2.2). Il lui a également apporté son soutien durant la crise du Kosovo (cf. à ce sujet ch. 2.2.2.2 et ch.

2.3.1). A la demande de la Suisse, le CIDPM a ainsi organisé, en 1994 et 1995, plusieurs rencontres entre des représentants du gouvernement macédonien et des représentants gouvernementaux des principaux Etats d'accueil. Les discussions tournaient autour de la question du retour au Kosovo par la Macédoine des requérants d'asile déboutés, vu le refus exprimé alors par les autorités serbes de réadmettre ou de laisser entrer sur leur territoire les personnes provenant du Kosovo. De plus, dès le début du conflit au Kosovo en 1998, le CIDPM a régulièrement informé la Suisse et d'autres Etats d'accueil importants de l'évolution de la situation sur place, les avertissant en particulier des flux de réfugiés albanais du Kosovo qui se préparaient. Etablir des rapports hebdomadaires et des rapports de fond périodiques, de même qu'organiser de nombreuses rencontres entre les Etats concernés faisait partie des autres prestations fournies par le CIDPM. Ce dernier a ainsi considérablement aidé les Etats d'accueil à gérer la crise du Kosovo d'un point du vue administratif. Enfin, il a, à la demande expresse de la Suisse, mis en place le réseau d'information SCIS-Kosovo (cf. à ce sujet ch. 2.3.1).

Dans le cadre du processus de Budapest, le CIDPM a également contribué de différentes manières à lutter contre la migration irrégulière (cf. à ce sujet ch. 2.2.2.1). En raison de l'accroissement des flux migratoires en provenance des pays voisins des Etats candidats à l'UE, le processus de Budapest va être de plus en plus souvent confronté au problème du contrôle migratoire en Russie, en Ukraine et en Moldavie.

D'où la décision, en mai 2002, d'instituer, pour la Moldavie, un groupe de travail sur le thème de la migration. A l'origine du phénomène migratoire dans ce pays: la morosité de l'économie, avec un taux de chômage avoisinant actuellement 75 %.

Conséquences: une augmentation des flux migratoires irréguliers, une recrudescence de la traite des êtres humains et bien d'autres graves
problèmes. Il s'agit donc, dans le cadre du groupe de travail, de mettre au point, avec les autorités moldaves, un plan d'action national. Ce plan doit comprendre à la fois une enquête sur la situation que connaît actuellement la Moldavie dans le domaine de la migration (asile, migration régulière ou non, réadmission des ressortissants, système de contrôle du franchissement des frontières, etc.) et des recommandations quant à l'application de mesures. Le CIDPM a été chargé d'assurer le suivi dudit projet. D'autres groupes de travail sont prévus pour la Russie et l'Ukraine.

Durant les deux guerres en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, les pays d'accueil ont pu réaliser combien l'aide que le CIDPM apporte à ses Etats membres en période de crise politique était précieuse, efficace et pratique. L'exemple du groupe de travail institué pour la Moldavie souligne qu'il est possible d'aborder et de résoudre efficacement, en coopération avec les autorités des Etats de provenance ou de transit, les problèmes rencontrés dans le domaine de la migration. En raison du conflit tchétchène et de l'instabilité économique de la Russie, le nombre de requérants d'asile provenant de ce pays ne cesse d'augmenter en Suisse et dans d'autres Etats

3313

européens7. Il en va de même pour l'Ukraine, dont la conjoncture est en partie responsable de l'émigration en Europe occidentale de 5000 à 6000 personnes par an.

C'est pourquoi la Suisse a également tout intérêt à ce que le processus de Budapest porte toute son attention sur ces régions.

En conséquence, il est décisif pour la Suisse que le Parlement approuve sa qualité de membre. Seule cette dernière lui permet d'attirer, dans le cadre de la lutte contre la migration clandestine, l'attention sur la formation d'autres foyers de crise, notamment en Afrique occidentale.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

Le revenu ordinaire du CIDPM se compose, entre autres, des cotisations de ses Etats membres, de celles d'autres Etats participant au processus de Budapest et des recettes résultant de la réalisation de projets. Ces dernières années, les cotisations versées par ses membres n'ont représenté qu'un tiers environ du budget, de sorte que le financement de son infrastructure de base a largement dépendu du volume des revenus dégagés de ses activités de projets. La Commission européenne s'est donc révélée être de loin le plus gros cotisant. En finançant des projets par des moyens provenant de différentes sources, elle a tissé d'étroites et intenses relations avec le CIDPM (p. ex., s'agissant du programme «Odysseus», des projets visant à adapter aux normes de l'UE le système albanais de contrôle des frontières et d'autres projets en matière de migration s'inscrivant dans le cadre des programmes «Phare» et «Argo», des projets visant à initier les pays candidats aux normes communautaires et à accroître l'efficacité des instruments de gestion des flux migratoires, le projet SCIS au Sri Lanka déjà mentionné (cf. ch. 2.3.1) et en Afghanistan, des projets visant à analyser l'état des structures migratoires dans de nombreux pays d'Europe centrale et orientale, ainsi que nombre de séminaires de formation et des séminaires pratiques). Pour ce qui est du budget ordinaire, la Suisse fait, avec la Suède et l'Autriche, partie des principaux cotisants, proportionnellement à sa capacité financière. En outre, elle alloue d'autres sommes au financement de projets dont elle est elle-même la mandante ou pour lesquels elle nourrit un intérêt particulier, comme récolter des informations dans les Etats de provenance. C'est ainsi qu'en 2001, la Suisse a versé une participation d'environ 526 000 euros, équivalant à 18 % du revenu global (cf.

Annexe, Revenu du CIDPM de 1993 à 2001). Depuis 1997, ses cotisations au budget ordinaire sont restées semblables, se montant à 145 300 euros par an. Pour l'année 2002, la participation de notre pays s'élèvera vraisemblablement à 167 331 euros. Cette somme se compose de la cotisation annuelle de la Suisse et de 21 981 euros résultant de cotisations liées à des projets (par ex., cotisation versée au Groupe de Budapest). Outre les cotisations susmentionnées, la Suisse met, depuis le 1er avril
2002, à la disposition du CIDPM un ressortissant suisse au poste de directeur général suppléant. Le fait que ce poste soit occupé par un Suisse lui garantit une prise en compte de ses intérêts et une concentration de l'activité sur les principaux aspects de la gestion de la migration.

7

Alors qu'en 1998, 174 demandes d'asile étaient déposées en Suisse, 461 requêtes émanant de ressortissants russes ont été enregistrées en 2001.

3314

Dans les années à venir, il faut s'attendre à un budget ordinaire légèrement plus élevé, pour lequel l'organisation cherchera à mieux équilibrer les cotisations des membres et celles liées au financement de projets. Il s'agit de tenir compte de la demande croissante de services et de produits fournis par le CIDPM et de l'élargissement de son champ d'action, mais aussi de stabiliser durablement sa structure financière et organisationnelle. Les réformes prévues résultent d'une stratégie élaborée et appliquée par les Etats membres, qui prévoit de concentrer les activités sur des processus visant à soutenir leurs compétences-clés en matière de gestion des flux migratoires. Le financement du budget par les cotisations des membres sera accru, en premier lieu, par l'adhésion de nouveaux Etats et, en second lieu, par l'adoption d'une clé de répartition des coûts sur le modèle de celle d'autres organisations internationales rattachées ou non au système de l'ONU.

Vu les nombreuses prestations fournies par le CIDPM et les avantages considérables que la Suisse tire de sa qualité de membre, en particulier dans le domaine de l'information et sur le plan international, les moyens déployés semblent justifiés et sa qualité de membre aussi judicieuse que nécessaire. Les dépenses occasionnées sont comprises dans le budget de l'ODR consacré à la coopération internationale.

Notre pays versant déjà des cotisations en tant que membre du CIDPM, il n'en résultera pas de frais supplémentaires. Il n'est donc pas indispensable de revoir à la hausse le crédit de l'article budgétaire 450.3600.

Il n'est pas non plus nécessaire d'augmenter les effectifs en personnel.

4

Programme de la législature

Le projet n'est pas expressément mentionné dans le rapport sur le Programme de la législature 1999­2003 (FF 2000 2194). Néanmoins, il correspond à la teneur de l'objectif 2 (Elargissement de la politique étrangère dans les domaines de la promotion de la paix, de la défense des droits de l'homme et de la coopération au développement ­ Renforcement de la position de la Suisse sur la scène internationale et amélioration de la façon dont elle est perçue à l'étranger). L'adhésion de la Suisse au CIDPM figure, sous le chiffre 19, parmi les objectifs que le Conseil fédéral s'est fixé pour 2003.

5

Relation avec le droit européen

Comme exposé sous le ch. 2.3.2, le CIDPM entretient une étroite coopération avec l'UE, les Communautés européennes (CE) et leurs institutions. De plus, il mène régulièrement à bien des projets sur mandat de la Commission européenne. Parmi ses membres, le CIDPM compte deux pays membres de l'UE, l'Autriche et la Suède; d'autres sont candidats à l'adhésion à l'UE. S'agissant de la Suisse, sa qualité de membre du CIDPM est donc, en principe, compatible avec le droit de l'UE et des CE en vigueur.

3315

6

Constitutionnalité

Conformément à l'art. 54, al. 1, Cst., les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. La compétence de l'Assemblée fédérale en matière d'approbation de traités internationaux est fixée à l'art. 166, al. 2, Cst.

7

Forme de l'acte

Conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont soumis au référendum facultatif lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou entraînent une unification multilatérale du droit. Dans son expertise du 1er mai 2002, la DDIP, du DFAE, a constaté que le CIDPM était une organisation internationale au sens du droit international public. Aussi l'art. 141, al. 1, let. d (ch. 2), Cst. s'applique-t-il au CIDPM. Par conséquent, le projet est soumis au référendum facultatif.

3316

232.262 36.336

268.598

Suisse Autriche Hongrie Slovénie République tchèque Pologne Suède Norvège Pays-Bas Finlande Danemark Allemagne Belgique Etats-Unis Royaume-Uni Portugal Liechtenstein Australie Croatie UE Fondation privée OIM OSCE HCR Autres

Total

1993

338.292

1.235 1.090

88.806

49.490

377.389

18.532 1.889

193.455 60.318 14.389

1995

231.972 54.505

1994

Annexe: Revenu du CIDPM de 1993 à 2001 en euros

470.557

6.323

78.123

16.206 3.343

37.863 22.529

181.682 97.454 27.034

1996

1903.446

373.175 47.528 17.587 2.253 991.984 53.051

4.796

53.560 25.944 22.747 8.721 25.435

162.860 83.210 30.595

1997

3007.783

859.574 123.544

1098.159 61.045

2758.662

191.784 36.336

1148.231 63.661

32.993 178.339 23.764 322.595 19.186 14.171 67.368

17.078 52.252 24.418 16.642 14.317 93.675

368.597 240.184 33.139 18.314

1999

336.403 262.058 31.831 16.787

1998

1956.933

6.831 79.940

404.788 21.656

578.476 232.553 35.319 21.438 10.901 49.418 73.400 29.069 27.252 15.043 33.211 254.355 24.781 21.729 6.541 9.157 21.075

2000

2873.046

4.333 97.004

210.664 54.024 41.708

129.349 5.643 22.826 4.364

5.000 58.625 734.718 24.786

260.192 56.200

526.072 549.851 53.064 23.294 11.329

2001

3317

13 954.706

2 811.779 1 616.469 225.371 79.833 22.230 99.489 793.902 181.924 372.594 64.592 145.759 1 150.116 49.567 26.525 135.890 14.800 43.901 4.364 16.206 3 256.892 251.038 60.385 80.376 2 054.506 396.198

Total