03.022 Message concernant l'Accord entre la Confédération suisse et la République française relatif à la coopération entre les deux Etats à l'occasion du Sommet d'Evian du 7 mars 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre par le présent message, en vous proposant de l'adopter, un projet d'arrêté fédéral portant approbation de l'Accord entre la Confédération suisse et la République française relatif à la coopération entre les deux Etats à l'occasion du Sommet d'Evian.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

7 mars 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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2003-0294

Condensé Le président de la Confédération Kaspar Villiger a accepté en été 2002, à la demande du président français Jacques Chirac que la Suisse soutienne la France pendant la durée du prochain Sommet du G8 qui aura lieu à Evian du 1er au 3 juin 2003 (ci-après Sommet d'Evian).

Ce soutien s'inscrit dans le cadre de l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière. Il implique en outre une coopération militaire accrue réglée par l'accord bilatéral soumis à votre approbation. La France et la Suisse sont responsables de la sécurité sur leur propre territoire. Pendant le Sommet d'Evian, les deux Etats coordonneront les opérations de sécurité et de maintien de l'ordre public dans des zones d'intérêt mutuel clairement définies.

Les problèmes de sécurité posés par la tenue du Sommet d'Evian requièrent de la part de la Confédération des mesures exceptionnelles qui vont au-delà des tâches de police. A la demande des cantons de Genève, de Vaud et du Valais, le Conseil fédéral a envisagé, à la mi-janvier 2003, un engagement subsidiaire de sûreté de l'armée, assumé par des formations entières ou partielles dans le cadre du calendrier révisé des cours 2003, auxquelles viennent s'ajouter des militaires de métier du Corps des gardes-fortifications et des Forces aériennes. Le 12 février 2003, le Conseil fédéral a approuvé le message concernant l'arrêté fédéral sur l'engagement de l'armée en service d'appui au profit des autorités civiles (cf. FF 2003 1373). En plus de la complexité d'une collaboration intercantonale, confédérale, civile et militaire, ces tâches de protection et de sûreté comportent une nouvelle dimension: celle d'une coopération transfrontalière et binationale dont les contours doivent être réglés dans l'accord bilatéral soumis à votre approbation.

La France s'est engagée à participer aux frais encourus par la Suisse du fait de l'organisation du Sommet d'Evian. Les deux Etats détermineront dans les meilleurs délais le montant de la participation française, selon une clé de répartition à définir en tenant compte du fait que la responsabilité principale revient à la France en tant que pays hôte du Sommet. La participation française sera non seulement substantielle mais devra couvrir la majorité des dépenses. Elle sera établie sur
présentation par la Suisse d'un décompte détaillé des dépenses à l'issue du Sommet d'Evian et dans la limite d'un plafond fixé à 12 millions d'euros (environ 18 millions de francs). Cette limite correspond aux 2/3 environ des dépenses totales encourues par la Confédération.

Finalement, la France est prête à offrir à la Suisse son soutien pour assurer la sécurité en cas d'événements similaires qui seraient organisés en Suisse.

Etant donné que le Conseil fédéral ne dispose pas d'une compétence propre pour conclure un accord en matière de coopération policière, douanière et militaire, l'accord négocié avec la France en vue du Sommet d'Evian doit être soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale conformément aux art. 166, al. 2, et 184, al. 2, de la Constitution (Cst.).

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Le présent accord est conclu pour une durée déterminée (art. 16, al. 3). Il ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale et n'entraîne pas une unification multilatérale du droit. Il n'est donc pas sujet au référendum facultatif selon l'art. 141, al. 1, let. d, Cst.

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Message 1

Partie générale

1.1

Contexte

A l'invitation du président français Jacques Chirac, le prochain Sommet du G8 aura lieu en France, à Evian-les-Bains, du 1er au 3 juin 2003. Une réunion du Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NEPAD) lui étant associé, le Sommet d'Evian comportera aussi un volet «Afrique». En été 2002, le président français a informé le président de la Confédération Kaspar Villiger de l'organisation de ce sommet et lui a demandé le soutien de la Suisse. Début août 2002, le président de la Confédération a communiqué à la France l'accord de la Suisse quant à l'octroi de ce soutien.

A l'occasion du Sommet d'Evian, le Bassin lémanique accueillera les chefs d'Etats des huit nations les plus puissantes du monde et près de 20 autres chefs d'Etat et de gouvernement de pays en développement ou de pays émergents. Ces personnalités seront accompagnées de délégations officielles, soit au total près de 10 000 personnes auxquelles viendront s'ajouter plus de 3000 représentants des médias.

L'aéroport de Genève-Cointrin sera le point principal d'arrivée des participants. Les principaux membres des délégations des Etats appartenant au G8 seront directement transportés par hélicoptère de l'Aéroport de Genève-Cointrin à Evian par les soins de la France. Ils seront hébergés à Evian même. Les autres participants, soit la majorité, seront transportés de l'aéroport de Genève-Cointrin sur la rive suisse du Lac Léman, dans la région de Lausanne-Montreux, où ils seront hébergés. Ils se déplaceront à Evian au moyen des bateaux de la Compagnie générale de navigation du Léman (CGN). Il faut aussi s'attendre à ce que cette conférence mobilise des dizaines de milliers d'opposants à la mondialisation, en provenance du monde entier.

Les mesures de protection et de sécurité pendant le déroulement du Sommet d'Evian dans le Bassin lémanique demandent, de la part de la Suisse, des contributions qui dépassent le volume et la complexité habituels de ce type de mission. Le Conseil fédéral est disposé à relever le défi, compte tenu de l'intérêt de la Suisse comme lieu de conférences, en particulier Genève, et à soutenir la France pendant la durée du Sommet.

Le Conseil fédéral est conscient que les tâches qui incombent à la Suisse mettent les cantons dans une situation qu'ils ne pourront maîtriser qu'en recevant un soutien subsidiaire
de la Confédération, en particulier pour les tâches de protection et de sûreté. En plus de la complexité d'une collaboration intercantonale, confédérale, civile et militaire, ces tâches comportent une nouvelle dimension: celle d'une coopération transfrontalière et binationale dont les contours sont réglés dans le présent accord.

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1.2

Organisation du projet

Pour assurer la coordination entre la Suisse et la France, un Comité bilatéral francosuisse de coordination (COBI) a été mis sur pied en automne 2002. Il regroupe des représentants de la Confédération et des cantons, du côté suisse, et des représentants du Quai d'Orsay, des ministères de la défense et de l'intérieur et des départements de la Haute-Savoie et de l'Ain, du côté français. Depuis octobre 2002, le COBI s'est réuni à intervalles réguliers.

Pour préparer la participation de la Suisse, un Comité directeur a été mis en place. Il est composé de représentants de la Confédération (DFAE, DFJP, DDPS) et des cantons concernés, et il est accompagné par la Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité et une délégation intercantonale. Le Comité directeur sert d'interface avec son homologue français dans le cadre du COBI, évalue les ressources nécessaires en Suisse, planifie leur mise en oeuvre et supervise les travaux des groupes de travail sectoriels «sécurité», «logistique», «aéroport de Genève», «communications», «finances» et «aspects juridiques».

Le Conseil fédéral, après consultation des cantons impliqués, a nommé président du Comité directeur M. Pierre Aepli, ancien commandant de la police cantonale vaudoise. Pour la Confédération, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) assume la responsabilité de ce dossier et a été chargé de négocier avec la France le présent accord.

Lors d'une rencontre à Paris le 28 février 2003, la cheffe du DFAE, Mme Micheline Calmy-Rey et le ministre français des affaires étrangères, M. Dominique de Villepin, ont réitéré leur volonté de coopérer, conformément à la longue tradition qui s'est instaurée entre la France et la Suisse, en vue d'assurer le bon déroulement du Sommet d'Evian. Les deux ministres ont pris acte de l'avancement des travaux de rédaction du présent accord réglant les modalités juridiques de leur coopération, en particulier dans les domaines policier, douanier et militaire. Ils se sont en outre entendus sur le principe d'une participation de la France aux frais encourus par la Suisse du fait de l'organisation du Sommet.

1.3

Position du Conseil fédéral

Le 5 février 2003, le Conseil fédéral a jugé que la coopération entre la Suisse et la France relative à l'organisation du Sommet d'Evian devait être réglée moyennant la conclusion d'un accord international.

Le 12 février 2003, le Conseil fédéral a approuvé le message concernant l'arrêté fédéral sur l'engagement de l'armée en service d'appui au profit des autorités civiles (FF 2003 1373). Il a également décidé que la Confédération apporterait un soutien financier et matériel aux cantons dans le domaine de la sécurité.

Le 19 février 2003, le Conseil fédéral a décidé que la Suisse pouvait se montrer accommodante s'agissant de la participation française aux frais engagés par notre pays, pour autant que la Suisse obtienne de la France l'assurance que celle-ci la soutiendrait à l'avenir lors de manifestations internationales qu'elle organiserait à Genève.

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1.4

Nécessité de conclure un accord

Compte tenu de la nature et de l'ampleur du Sommet d'Evian, des dangers potentiels pour la sécurité et pour l'ordre public et des conditions géographiques, il est indispensable que la sécurité du Sommet d'Evian, tant du point de vue de sa préparation que de son bon déroulement, soit considérée comme une tâche commune francosuisse. Pour les deux Etats, cette tâche ne peut être exécutée qu'en trouvant de nouveaux modes de coopération et en adoptant des solutions novatrices qui vont au-delà de l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière du 11 mai 1998 (RS 0.360.349.1). La sécurité dans la zone frontalière franco-suisse sur le lac Léman, et plus particulièrement dans l'espace aérien au-dessus du Bassin lémanique, ne peut être garantie avec efficacité que si la Suisse et la France, pendant une durée déterminée, exercent en commun leur souveraineté sur une zone géographique clairement délimitée.

La coopération envisagée entre les deux pays doit se fonder sur une base légale formelle. Pour définir cette collaboration, la conclusion d'un accord bilatéral est donc impérative. Elle répond également aux obligations de la Suisse en matière de protection internationale des représentants officiels des Etats qui participent au Sommet d'Evian.

1.5

Déroulement des négociations

Le Conseil fédéral a mandaté la Direction du Droit international public (DDIP) pour négocier avec la partie française un accord de coopération en vue du Sommet d'Evian. La délégation suisse se compose, outre du représentant de la DDIP, de représentants du DFJP et du DDPS et d'un représentant des cantons.

Bien que la partie française ne disposât pas encore d'un mandat de négociation, deux réunions à caractère technique visant à discuter du futur accord ont eu lieu entre la Suisse et la France les 12 et 26 février 2003.

Les négociations ont eu lieu à Paris les 4 et 5 mars 2003 et le texte de l'Accord a été paraphé le 5 mars 2003.

2

Partie spéciale

2.1

Contenu de l'Accord

Le présent accord est conçu comme un accord-cadre qui fixe les grandes lignes de la coopération entre la Suisse et la France. Il tient compte à la fois de la souveraineté des deux Etats et des accords bilatéraux en vigueur, en particulier l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1).

La partie principale comporte des dispositions générales se rapportant à la création d'un organe de coordination commun et au règlement d'éventuels différends.

L'accord précise aussi que la Suisse appliquera, par analogie, les principes de la Convention des Nations-Unies sur les missions spéciales du 8 décembre 1969

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(RS 0.191.2) à l'égard des participants officiels au Sommet d'Evian qui seront hébergés en Suisse ou qui voyageront sur territoire suisse. Des questions relatives à l'indemnisation des prestations de la Suisse en faveur de la France liées à la tenue du Sommet d'Evian font également l'objet du présent accord. Les modalités de la collaboration entre les autorités policière, douanière et militaires, dont les principes sont énoncés dans le corps du texte, sont réglées dans des annexes. Les autorités compétentes des deux Etats restent en outre compétentes pour déterminer d'un commun accord les mesures d'exécution pour la mise en oeuvre de la coopération policière et de la coopération militaire.

Le statut des militaires engagés est réglé par la Convention entre les Etats parties au Traité de l'Atlantique Nord et les autres Etats participant au Partenariat pour la paix sur le statut de leurs Forces, du 19 juin 1995 (Statut des forces du PPP), que le Conseil fédéral envisage de ratifier avant le Sommet d'Evian.

En raison des contraintes temporelles imposées par les mesures organisationnelles du Sommet d'Evian, il est prévu que le présent accord puisse entrer en vigueur dès sa signature.

2.1.1

Objectif, souveraineté et applicabilité des autres accords

Objectif (art. 1) L'accord a pour objectif de fixer le cadre juridique de la coopération entre la Suisse et la France lors du Sommet d'Evian du 1er au 3 juin 2003.

Applicabilité des accords existants (art. 2) L'accord n'affecte pas les droits et obligations découlant d'autres accords auxquels la Suisse et la France sont parties. Pendant sa durée d'application limitée, il complète notamment l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1).

Souveraineté (art. 3) La coopération respecte la souveraineté et les compétences de la Suisse et de la France. Pour assurer une coopération effective et efficace, les autorités de chacun des deux Etats ont toutefois une compétence limitée d'agir dans des zones délimitées du territoire national de l'autre Etat, conformément aux modalités prévues par les annexes sur la coopération policière, douanière et militaire.

2.1.2

Zones d'intérêt mutuel (art. 4)

L'accord définit trois zones d'intérêt mutuel de coopération. Il s'agit du Lac Léman (qui est à cette fin considéré comme un espace homogène), de l'espace aérien des deux Etats, ainsi que des lieux qui nécessitent une protection particulière (tels les itinéraires empruntés par les délégations officielles, les aéroports, les résidences et les postes de commandement). Le but de cette disposition est d'expliciter et de

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circonscrire les zones dans lesquelles la coopération entre les deux Etats doit être renforcée.

2.1.3

Coopération policière (art. 5)

L'accord prévoit que les forces de police suisses et françaises coopèrent pour assurer la sécurité des délégations participant au Sommet d'Evian, des populations civiles et des manifestants. Les modalités de cette coopération sont réglées à l'Annexe I (cf. ch. 2.1.13).

Il laisse aux autorités suisses et françaises compétentes, telles que définies à l'Annexe I, le soin de déterminer d'un commun accord les mesures d'exécution nécessaires à la mise en oeuvre de la coopération policière.

2.1.4

Coopération douanière (art. 6)

L'accord prévoit que les autorités compétentes suisses (Corps des gardes-frontière) et françaises (Douane et Police des frontières) se prêtent assistance pour faciliter le franchissement de la frontière aux délégations participant au Sommet d'Evian ainsi qu'aux personnes, moyens de transport et biens nécessaires à la réalisation du Sommet. Ces autorités coopèrent pour assurer dans l'espace frontalier la circulation et la sécurité des délégations participant au Sommet d'Evian, des populations civiles et des manifestants. Les modalités de cette coopération sont réglées à l'Annexe I (cf. ch. 2.1.13).

2.1.5

Coopération militaire (art. 7)

L'accord prévoit que les forces armées suisses et françaises coopèrent pour assurer la sécurité du territoire transfrontalier. Les modalités de cette coopération sont réglées à l'Annexe II (cf. ch. 2.1.14).

Il laisse aux autorités suisses et françaises compétentes, telles que définies à l'Annexe II, le soin de déterminer d'un commun accord, par le biais d'arrangements techniques, les mesures d'exécution nécessaires à la mise en oeuvre de la coopération militaire.

2.1.6

Armes à feu et mesures de contraintes (art. 8)

Conformément à l'Annexe I, les agents des services compétents d'un des deux Etats ne pourront pas, dans le cadre de leurs missions policière et douanière, utiliser d'armes à feu ou exercer des mesures de contrainte sur le territoire de l'autre Etat, sauf en cas de légitime défense.

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2.1.7

Clauses financières (art. 9)

Conformément aux termes de la déclaration conjointe adoptée le 28 février 2003 par les deux ministres des affaires étrangères, la France participe aux frais encourus par la Suisse du fait de l'organisation du Sommet d'Evian. Il s'agit d'une obligation de principe à laquelle la France a souscrit, faute de pouvoir s'engager dès à présent sur un montant déterminé. Un tel engagement nécessiterait en effet une modification de la loi française sur le budget, modification qui ne pourrait pas intervenir dans les prochains mois. Il est cependant clair qu'en acceptant le principe d'une participation aux frais encourus par la Suisse du fait de l'organisation du Sommet d'Evian, le gouvernement français s'est également engagé à présenter au parlement français une proposition de modification de la loi sur le budget.

Par ailleurs, les deux Etats détermineront dans les meilleurs délais le montant de la participation française, selon une clé de répartition à définir en tenant compte de la responsabilité principale de la France en tant que pays hôte du Sommet. Il est dès lors clair que la participation française sera non seulement substantielle, mais qu'elle devra couvrir la majorité des dépenses. La participation française sera établie sur présentation par la Suisse d'un décompte détaillé des dépenses à l'issue du Sommet d'Evian et dans la limite d'un plafond fixé à 12 millions d'euros (environ 18 millions de francs). Cette limite correspond aux 2/3 environ des dépenses totales encourues par la Confédération.

Finalement, la France est prête à offrir à la Suisse son soutien pour assurer la sécurité en cas d'événements similaires qui seraient organisés en Suisse.

2.1.8

Immunités (art. 11)

Il est établi en droit international que les chefs d'Etat et leurs délégations officielles bénéficient durant leur visite officielle à l'étranger d'un statut privilégié. La Suisse, pour sa part, applique lors de rencontres officielles la Convention du 8 décembre 1969 sur les missions spéciales (RS 0.191.2), qui règle notamment le statut des chefs d'Etat et celui des représentants d'Etat faisant partie de la mission spéciale. Il s'ensuit que les chefs d'Etat du G8 et leurs délégations qui transiteront par Genève pour se rendre à Evian, de même que les chefs d'Etat des pays invités par le G8 et leurs délégations qui séjourneront à Lausanne, se verront appliquer les dispositions pertinentes de la Convention sur les missions spéciales.

2.1.9

Annexes (art. 12)

Le présent accord comprend deux annexes. L'Annexe I règle les modalités de la coopération policière et de la coopération douanière (cf. Annexe I, ch. 2.1.13) et L'Annexe II la coopération militaire (cf. Annexe II, ch. 2.1.14).

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2.1.10

Organe commun (art. 13)

Pour assurer la coordination entre la Suisse et la France jusqu'à la fin du Sommet d'Evian, le présent accord prévoit l'institution d'un Comité directeur bilatéral franco-suisse (COBI) composé de représentants des comités directeurs suisse et français.

Le COBI est associé à la définition des structures de conduite, qui seraient opérationnelles notamment en cas de situation de crise, mises en place par les comités directeurs nationaux en vue du Sommet d'Evian.

2.1.11

Règlement des différends (art. 14)

Le présent accord contient une clause arbitrale de règlement des différends classique selon laquelle tout différend concernant l'interprétation ou l'application du présent accord n'ayant pu être réglé par voie de négociations sera soumis à un tribunal arbitral composé de trois membres.

2.1.12

Application et durée

Application provisoire (art. 15, al. 2) En raison de la date très rapprochée du Sommet d'Evian, pour des motifs d'organisation des préparatifs dudit Sommet et en vue de l'engagement pris par la France de négocier avec la Suisse la prise en charge d'une partie de ses frais, il est essentiel que le présent accord puisse déployer ses effets le plus rapidement possible. En conséquence, l'accord prévoit sa propre application provisoire dès la date de sa signature.

En vertu de ses prérogatives et de sa responsabilité en matière de politique étrangère, le Conseil fédéral peut accepter l'introduction dans un traité international d'une disposition relative à l'application provisoire du traité lorsque la protection d'intérêts suisses ou le caractère particulièrement urgent l'exige. L'application provisoire d'un traité international ne remet aucunement en question la compétence parlementaire en matière d'approbation parce qu'une telle application peut être interrompue à tout moment conformément à l'art. 25 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (RS 0.111) (FF 1999 V 4492).

Durée limitée (art. 15, al. 3 et 4) Les coopérations policière, douanière et militaire étant limitées à la période de préparation du Sommet d'Evian, au Sommet lui-même et aux quelques jours qui suivent, il est prévu que le présent accord cesse de produire ses effets dans le domaine de ces coopérations dès le 10 juin 2003.

Par contre, les dispositions relatives aux aspects financiers et au règlement des différends déploieront leurs effets tant que les questions financières ou d'éventuels différends n'auront pas été réglés.

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2.1.13

Annexe I sur la coopération policière et douanière

L'essentiel des mesures de coopération planifiées entre la Suisse et la France en matière de police et de douane se fonde sur l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1).

L'Annexe I vise donc d'une part à préciser certaines modalités de la coopération entrant dans le cadre légal existant, et d'autre part à étendre la portée de celui-ci de manière ponctuelle et limitée, aussi bien du point de vue temporel que du point de vue de l'étendue, à des mesures permettant de faciliter l'accomplissement des missions d'escorte et de protection rapprochée sur le lac Léman. Ainsi, s'agissant de l'intervention sur le lac Léman des autorités françaises au moyen d'hélicoptères et d'embarcations pour la protection rapprochée et immédiate des bateaux transportant des délégations, elle constitue une prestation supplémentaire de la France en tant qu'Etat hôte du Sommet d'Evian. Cette tâche entraîne, certes, une extension matérielle de la portée de l'intervention d'autorités étrangères sur le lac Léman. Il s'agit toutefois d'une mesure conforme aux intérêts suisses qui ne saurait être considérée comme un précédent eu égard aux limites matérielle et temporelle du présent accord.

L'Annexe I prévoit que des agents de liaison d'un Etat peuvent participer à des missions de conseil, de soutien et de sécurité publique auprès des services compétents et des états-majors de l'autre Etat. Les compétences d'action de ces agents seront toutefois limitées. En tous les cas, ils ne pourront qu'assister les agents nationaux dans la prise de mesures de contrainte ou de tout autre acte de souveraineté sur le territoire de l'Etat de séjour.

L'engagement d'unités étrangères avec exercice du droit de souveraineté, par exemple à des fins de surveillance de manifestations, n'est en revanche pas envisagé par le présent Accord.

Hormis le règlement des échanges de personnel, l'Annexe I vise essentiellement, par des dispositions à caractère déclaratoire, à souligner le rôle d'institutions existantes, comme par exemple le Centre de coopération policière et douanière de Genève (CCPD), à préciser le cadre de certaines prestations d'assistance (en particulier l'échange de matériel et d'équipements, ainsi que le renforcement des échanges d'informations et de
renseignements et la simplification des formalités douanières), et à déléguer formellement aux services concernés ainsi qu'à leurs organes de coordination la compétence de régler dans des accords particuliers les modalités de la coopération et les questions de responsabilité.

L'Annexe I s'applique à l'ensemble des services compétents mentionnés en son art. 1, de même qu'aux militaires affectés à des missions subsidiaires de police.

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2.1.14

Annexe II sur la coopération militaire

2.1.14.1

Remarque préliminaire

Le Conseil fédéral envisage, eu égard au Sommet d'Evian, de ratifier le statut des troupes PPP. Ainsi, un renvoi à ce statut peut figurer dans l'Annexe II de l'accord avec la France et les questions de statut de la coopération militaire ­ complétées par quelques règles spécifiques ­ peuvent être réglées par le biais du statut des troupes PPP.

2.1.14.2

Dispositions générales

Objet de la réglementation, échange de personnel et information, ainsi que franchissement de la frontière L'Annexe II règle la coopération militaire entre la France et la Suisse à l'occasion du Sommet d'Evian.

Il existe fondamentalement la possibilité d'échanger et d'engager réciproquement du personnel. Les détails sont réglés dans le cadre d'arrangements techniques subséquents.

L'échange d'informations entre les deux Etats s'effectue selon les prescriptions nationales de chacun et se fonde sur la Convention de 1972 relative à la protection du secret défense conclue entre les parties.

Sécurité L'Etat d'origine n'assume aucune tâche de garde armée sur le territoire de l'Etat de séjour et ne dispose pas non plus du pouvoir de police à l'égard de tiers.

Coûts Contrairement à la règle générale de la participation financière de la France aux coûts qui incombent à la Suisse dans le cadre du Sommet d'Evian (art. 9 de l'accord), chaque Etat assume ses propres dépenses dans le domaine militaire.

Dispositions d'exécution D'autres détails de la coopération militaire sont réglés par des arrangements techniques subséquents.

2.1.14.3

Coopération militaire au sol

La troupe fournit un service d'assistance au profit des forces civiles de sécurité.

Pour les détails nous renvoyons au Message du 12 février 2003 concernant l'arrêté fédéral sur l'engagement de l'armée en service d'appui au profit des autorités civiles dans le cadre de l'accord bilatéral avec la France à l'occasion du Sommet du G8 à Evian, du 1er au 3 juin 2003 (FF 2003, 1517), déjà mentionné.

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2.1.14.4

Coopération militaire dans les airs

Soutien réciproque Les parties se soutiennent réciproquement dans le cadre des moyens disponibles et règlent les détails dans des arrangements techniques subséquents.

Déploiement et engagements communs Les conditions préalables pour un déploiement de moyens opérationnels de surveillance aérienne et de défense sur le territoire de l'autre partie font l'objet d'arrangements techniques subséquents.

La coopération en matière de sûreté de l'espace aérien en relation avec le Sommet d'Evian comprend l'enregistrement des aéronefs des Etats partenaires, le ravitaillement au sol et en vol, un service de sûreté aérienne et un service de surveillance, des missions de recherche et de sauvetage et la concrétisation de mesures de police aérienne jusqu'au tir de semonce. La compétence d'en décider reste par contre de la responsabilité nationale.

Enquête en cas d'accident aérien En cas d'enquête en relation avec un accident aérien sur le territoire d'un Etat impliquant la participation d'un aéronef de l'autre Etat, ce dernier a le droit de siéger dans la commission d'enquête.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

Les coûts de la coopération prévue entre la Suisse et la France à l'occasion du Sommet d'Evian se répartiront entre la Confédération, les cantons et la France de la manière suivante: a.

pour la Confédération: ­ frais liés à l'engagement des gardes-frontière: 1,6 million de francs; ­ dépenses militaires variant en fonction du degré d'engagement de l'armée et des services logistiques fournis par la France: 3,6 millions de francs;

b.

pour les cantons de Genève, de Vaud et du Valais: ­ coûts supplémentaires liés aux frais de fonctionnement: 14 millions de francs; ­ coûts liés à l'engagement intercantonal des polices: 5,8 millions de francs; ­ frais liés à l'engagement de la protection civile: 1,6 million de francs; ­ frais d'investissement: 11 millions de francs.

Le Conseil fédéral a décidé le 12 février 2003 que la Confédération prendrait à sa charge, outre les coûts qui lui incombent, ceux revenant aux cantons qui sont liés aux frais de fonctionnement (14 millions de francs) et à l'engagement intercantonal des polices (5,8 millions de francs). Ainsi, le montant total à la charge de la Confé2262

dération s'élève à quelque 25 millions de francs et celui restant à la charge des cantons à quelque 12,6 millions de francs.

La France quant à elle remboursera à la Suisse un montant maximum de 12 millions d'euros qui sera entièrement dévolu à la Confédération (cf. ch. 2.1.7).

Le présent accord n'implique pas l'engagement de personnel supplémentaire.

4

Relations avec le droit européen

S'agissant de la coopération douanière et policière, le présent Accord complète l'Accord du 11 mai 1998 relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (RS 0.360.349.1), lequel s'inspire largement des Accords de Schengen.

Pour le reste, le présent accord n'a pas de point de contact avec le droit européen.

5

Constitutionnalité

La compétence générale de la Confédération dans le domaine des affaires étrangères résulte de l'art. 54, al. 1, Cst. En matière de traités internationaux, le principe est que la Confédération peut conclure un traité en n'importe quelle matière, qu'elle relève de la compétence fédérale ou cantonale (cf. FF 1994 II 608).

Alors que les aspects liés à la coopération militaire et douanière relèvent de la compétence de la Confédération, ceux liés à la coopération policière sont du ressort des cantons. Les cantons touchés par cette opération, soit Genève, Vaud et Valais, participent directement aux préparatifs nécessaires du côté suisse à l'organisation du Sommet d'Evian. Ils sont en outre représentés au sein du Comité directeur suisse et ont été associés aux négociations du présent accord.

Etant donné que le Conseil fédéral ne dispose pas d'une compétence propre pour conclure un accord en matière de coopération policière, douanière et militaire, le présent accord doit être soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale conformément aux art. 166, al. 2, et 184, al. 2, Cst.

Le présent accord est conclu pour une durée déterminée. Il ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale et n'entraîne pas une unification multilatérale du droit. Il n'est donc pas sujet au référendum facultatif selon l'art. 141, al. 1, let. d, Cst.

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