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8697 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à l'approbation d'une convention complémentaire conclue entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne en matière d'assurances sociales (Du 4 mars 1963)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation la convention complémentaire en matière d'assurances sociales que la Suisse et l'Allemagne ont signée le 24 décembre 1962.

I. GÉNÉRALITÉS Les relations entre la Suisse et l'Allemagne dans le domaine des assurances sociales sont réglées par la convention signée le 24 octobre 1950 et entrée en vigueur le 5 juillet 1951. C'est une des premières conventions bilatérales en matière d'assurances sociales que la Suisse ait conclue après l'introduction de l'assurance-vieillesse et survivants le 1er janvier 1948 et englobant cette nouvelle branche d'assurance.

Depuis son entrée en vigueur, soit depuis bientôt 12 ans, la convention germano-suisse en matière d'assurances sociales (appelée ci-après «la convention») a toujours pu être appliquée sans difficultés et de nombreux citoyens suisses et ressortissants allemands en ont bénéficié.

Au cours des années, une revision de cette convention s'est pourtant révélée nécessaire. Peu de temps après le remaniement total des assurancespensions en Allemagne, opéré lors de la refonte de la législation sociale (Sozialreform 1957), les autorités allemandes ont relevé que différentes dispositions de la convention devaient être adaptées en raison des modifica-

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tions intervenues. Elles ont proposé d'entamer des négociations à cet effet.

Depuis lors, la législation suisse a, elle aussi, subi d'importantes modifications, plus particulièrement du fait de l'instauration de l'assurance-invalidité et de l'adoption du calcul des rentes ordinaires selon la méthode prò rata temporis ; dans ces circonstances une revision totale de la convention devenait indispensable.

II. LES NÉGOCIATIONS Une délégation suisse et une délégation allemande entamèrent les pourparlers en vue d'une revision de la convention en octobre 1962 à Bonn.

Au cours de leur première phase, les pourparlers permirent d'élaborer l'avant-projet d'une nouvelle [convention au champ d'application élargi, mais les deux délégations formulèrent des réserves sur des points essentiels. A cet égard, il apparut, tant du côté suisse que du côté allemand, que l'examen de certaines questions fondamentales exigerait un temps assez long.

La délégation allemande pria alors les délégués suisses d'examiner s'il n'y avait pas lieu d'envisager lin accord provisoire sur un point du programme de revision, à savoir l'octroi des rentes extraordinaires de l'assurance-vieillesse et survivants suisse à des ressortissants allemands âgés et domiciliés depuis longtemps en Suisse. A ce propos, il y a lieu de faire les remarques suivantes : La convention avec la République fédérale d'Allemagne qui est actuellement en vigueur n'accorde aucun droit aux ressortissants allemands en ce qui concerne les rentes extraordinaires non contributives (anciennement appelées rentes transitoires). Nous retrouvons d'ailleurs une situation semblable dans les conventions conclues avec l'Autriche et l'Italie, qui datent de la même époque. En revanche presque toutes les conventions relatives aux assurances sociales conclues ultérieurement prévoient pour les ressortissants des pays contractants la possibilité de toucher ces rentes au même titre que les citoyens suisses, à condition toutefois qu'ils aient été domiciliés en Suisse pendant une période déterminée.

L'absence de telles dispositions dans la convention conclue avec la République fédérale d'Allemagne est due à divers facteurs. Tout d'abord, il faut relever qu'à cette époque, où les négociations internationales en matière d'assurance-vieillesse et survivants en étaient à leur début, la Suisse
observait d'une manière générale une certaine réserve dans l'octroi d'avantages contractuels, étant donné que l'assurance suisse n'était en vigueur que depuis peu et que des expériences concluantes concernant son application et ses répercussions manquaient encore. Par ailleurs, on considérait à cette époque que le principe de la réciprocité -- dont on reconnaît généralement qu'il est une condition de l'octroi de concessions dans des

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conventions internationales -- devait s'appliquer de manière stricte à chaque genre de prestations; or le système allemand ne connaissant pas de rentes non contributives, la Suisse fut d'avis qu'il n'était pas possible d'accorder aux ressortissants allemands en Suisse un droit aux prestations .gratuites de l'assurance-vieillesse et survivants.

Depuis lors, la situation de fait, de même que les conceptions en ce domaine, se sont modifiées à divers égards. L'égalité de traitement totale entre les ressortissants étrangers et les nationaux, même pour les prestations non contributives, s'impose de plus en plus dans le droit international (conventions bilatérales et multilatérales, Conseil de l'Europe, Organisation internationale du travail, CEE). Il est en outre devenu usuel, lorsqu'on procède à l'examen de la réciprocité, de ne plus comparer séparément chaque branche d'assurances et chaque genre de prestations, mais, en raison des différences des systèmes en présence, de tenir compte de l'ensemble des avantages que les Etats contractants peuvent s'accorder mutuellement.

C'est ainsi que la Suisse en est venue peu à peu à accorder, au cours de ces dernières années, le droit aux rentes extraordinaires de l'assurance-vieillesse et survivants aux ressortissants de dix pays. Elle l'a fait soit lorsqu'elle a conclu pour la première fois une convention en matière d'assurances sociales avec un Etat déterminé, soit, comme dans le cas de la GrandeBretagne, par la conclusion d'un accord complétant la convention déjà existante.

Dans ces circonstances, la suggestion de l'Allemagne méritait que l'on s'y arrêtât. Ceci d'autant plus que les délégués allemands pouvaient faire valoir que, depuis l'entrée en vigueur de la loi portant sur le régime des rentes étrangères et servies à l'étranger (Fremdrenten- und Auslandsrentengesetz), le droit allemand connaissait également des prestations pouvant jusqu'à un certain point être considérées comme des rentes non contributives, et qu'en application de la loi du 25 février 1960 réorganisant la précédente, les ressortissants suisses résidant en Allemagne bénéficient d'une égalité de traitement totale avec les ressortissants allemands. Cette loi règle notamment le droit à des rentes de personnes assurées autrefois .selon la législation du Eeich dans des régions qui actuellement
ne font pas partie de la République fédérale (il s'agit principalement de l'Allemagne de l'Est). Les institutions d'assurance de ces régions n'étant pas assujetties au droit de la République fédérale et ne versant aucune prestation aux anciens assurés qui sont venus s'établir sur le territoire de la République fédérale, les organismes assureurs de ce dernier Etat versent subsidiairement des rentes à ces assurés, en application de la loi susmentionnée. Ce faisant, ils versent des rentes pour lesquelles ils n'ont en général pas encaissé de cotisations, tandis qu'un transfert des réserves mathématiques constituées .auprès des institutions d'assurance situées hors du territoire de la République fédérale n'a jamais eu lieu. Ces rentes sont accordées aux citoyens

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suisses vivant dans la République fédérale au même titre qu'aux ressortissants allemands.

Finalement, la Suisse pouvait accueillir favorablement la requête allemande pour une autre raison encore. L'accord provisoire ne s'appliquera qu'au groupe restreint de personnes constituant la génération transitoire.

Il s'agit essentiellement des personnes nées avant le 1er juillet 1883 et qui, n'ayant jamais été admises au versement de cotisations à l'assurancevieillesse et survivants, ne peuvent bénéficier des rentes ordinaires. Cette génération transitoire comprend également les femmes devenues veuves et les enfants devenus orphelins avant le 1er décembre 1948, c'est-à-dire les survivants d'assurés qui n'avaient pas pu, avant leur décès, verser de cotisations pendant une année entière au moins et qui, par conséquent, ne remplissaient pas les conditions qui auraient permis aux membres de leur famille de bénéficier des rentes ordinaires. La plupart des ressortissants allemands appartenant à la génération transitoire et vivant en Suisse résident chez nous depuis plusieurs dizaines d'années et nombre d'entre eux même depuis leur naissance. Ils ont trouvé dans notre pays une seconde patrie et, par leur activité et les contributions auxquelles ils ont été astreints, ont participé dans une large mesure à la vie économique suisse. Il n'existe donc aucun motif de leur refuser le traitement accordé aux ressortissants d'autres pays contractants. Or la grande majorité de ces ressortissants allemands sont actuellement âgés de 80 ans ou plus. Pour des raisons d'humanité et d'équité, il convient dès lors de leur accorder aussitôt que possible le droit aux rentes, et ceci encore avant la revision de la convention.

Compte tenu des motifs exposés ci-dessus, la forme choisie pour la solution transitoire fut celle d'une convention complémentaire à la convention en matière d'assurances sociales existante, de façon analogue à ce qui a été fait dans le cas de la Grande-Bretagne (cf. notre message du 22 janvier 1960). Le texte de cette convention complémentaire, qui devra être incorporé dans une convention générale ultérieure, a été mis au point par échange de lettres à la suite des négociations de Bonn et signé à Berne le 24 décembre 1962 par M, A. Saxer, préposé aux conventions en matière d'assurances sociales, pour la Suisse,
et par M. E. G. Mohr, ambassadeur de la République fédérale d'Allemagne.

III. LE CONTENU DE LA CONVENTION L'article premier détermine quels sont les ressortissants allemands qui ont droit aux rentes extraordinaires de l'assurance suisse. Ainsi qu'il vient d'être exposé, ce sont les personnes faisant partie de la génération transitoire domiciliées en Suisse. La durée minimale de séjour en Suisse devant précéder immédiatement une demande de prestations a été fixée à dix ans pour les rentes de vieillesse et à cinq ans pour les rentes de sur-

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vivants ou pour les rentes de vieillesse venant s'y substituer, comme cela a été prévu dans les nouvelles conventions relatives à la sécurité sociale conclues le 14 décembre 1962 avec l'Italie et le 8 juin 1962 avec la Yougoslavie. Attendu que les ressortissants suisses vivant en République fédérale touchent des prestations sans restriction et depuis de nombreuses années, selon la loi portant sur le régime des rentes étrangères et servies à l'étranger, on a prévu que les rentes extraordinaires suisses seraient versées avec effet rétroactif, mais à partir du 1er janvier 1961 au plus tôt. Ces versements rétroactifs sont toutefois réservés aux ayants droit eux-mêmes, à l'exclusion de leurs héritiers.

Le nombre exact des ressortissants allemands qui bénéficieront des rentes extraordinaires de l'assurance-vieillesse et survivants en application de la convention complémentaire ne peut être indiqué actuellement, faute de données statistiques suffisantes; il peut toutefois être évalué environ 2000 à 3000 personnes. Quant à la charge financière dans le bilan technique de l'assurance, elle est inférieure à 1 million de francs en moyenne par année.

Selon le droit suisse, la convention complémentaire doit obtenir l'approbation de l'Assemblée fédérale. Elle entrera en vigueur, conformément à son article 2, un mois après la date à laquelle le Conseil fédéral aura communiqué au gouvernement allemand que cette approbation a été accordée. En sa qualité de convention complémentaire à la convention du 24 octobre 1950, elle est liée juridiquement à cette dernière, tout particulièrement en ce qui concerne la durée de sa validité ; lorsque la convention de 1950 aura été remplacée par une convention revisée, la convention complémentaire sera abrogée.

IV. CONSIDÉRATIONS FINALES Jusqu'à présent, les ressortissants allemands de la génération transitoire vivant en Suisse étaient complètement exclus du bénéfice des prestations de l'assurance-vieillesse et survivants, malgré leur durée de résidence parfois très longue dans notre pays et leur participation à la vie économique suisse. La convention complémentaire que nous vous soumettons les mettra en mesure de toucher les rentes extraordinaires, avec effet rétroactif au 1er janvier 1961 dans les cas où les conditions spéciales de durée de résidence minimale sont remplies. Une
discrimination injustifiée par rapport aux ressortissants d'autres Etats contractants disparaît ainsi.

En considération de l'âge souvent très élevé des personnes intéressées, cette réglementation a été conçue comme solution transitoire qui s'incorporera, le moment venu, dans une convention revisée en matière d'assurances sociales. Elle donne satisfaction à une requête déjà ancienne des ressortissants allemands en Suisse. Nous sommes convaincus que cette convention

621 contribuera à améliorer encore les bonnes relations de notre pays avec la République fédérale et qu'elle facilitera les prochaines négociations concernant une nouvelle convention.

L'article 34tquater de la constitution fédérale accorde à la Confédération la compétence de légiférer dans le domaine de l'assurance-vieillesse et survivants, tandis que l'article 8 de la constitution lui accorde entre autres la compétence de conclure des conventions avec l'étranger. Il découle de ces dispositions que la convention complémentaire que nous vous soumettons et le projet d'arrêté fédéral concernant son approbation sont conformes à la constitution. Nous vous prions dès lors d'approuver le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 4 mars 1963.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Spuhler 14627

Le chancelier de fo Confédération, Ch. Oser

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ARRÊTÉ FÉDÉRAL approuvant la convention complémentaire relative aux assurances sociales entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message clu Conseil fédéral du 4 mars 1963, arrête: Article premier La convention complémentaire relative aux assurances sociales, signée le 24 décembre 1962 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne est approuvée.

Le Conseil fédéral est autorisé à la ratifier.

Art. 2 Le Conseil fédéral est autorisé à prendre les mesures d'exécution nécessaires.

14627

623 Traduction du texte, original allemand.

CONVENTION COMPLÉMENTAIRE relative

aux assurances sociales entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne

LE CONSEIL FÉDÉRAL SUISSE et LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE, animés du désir d'élargir leurs relations réciproques dans le domaine des assurances sociales, ont décidé de compléter la Convention relative aux assurances sociales, signée par les deux Etats le 24 octobre 1950, par des dispositions concernant les rentes extraordinaires de la législation suisse sur l'assurance-vieillesse et survivants et, à cet effet, sont convenus de ce qui suit : Article premier 1. Les ressortissants allemands, domiciliés en Suisse, ont droit aux rentes extraordinaires de l'assurance-vieillesse et survivants suisse, aux mêmes conditions que les ressortissants suisses, si, immédiatement avant la date à partir de laquelle ils demandent la rente, ils ont résidé en Suisse d'une manière ininterrompue pendant dix années entières au moins, lorsqu'il s'agit d'une rente de vieillesse, ou pendant cinq années entières au moins, lorsqu'il s'agit d'une rente de survivants ou d'une rente de vieillesse venant s'y substituer, et à la condition qu'ils appartiennent à l'une des catégories de personnes suivantes : a. Les personnes nées avant le 1er juillet 1883 et leurs survivants; b. Les femmes devenues veuves et les enfants devenus orphelins avant le 1er décembre 1948.

2. Les rentes visées à l'alinéa 1, auxquelles un droit existe pour le mois de l'entrée en vigueur de la présente Convention, sont accordées avec effet rétroactif, mais au plus tôt à partir du 1er janvier 1961.

624 3. Sont considérés comme ressortissants allemands, aux termes de la présente Convention complémentaire, les Allemands au sens de la loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne.

Article 2 La Convention complémentaire entrera en vigueur un mois après la date à laquelle le Conseil fédéral aura communiqué au Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne que la procédure exigée à cet effet par les dispositions du droit suisse a abouti.

Fait à Berne, le 24 décembre 1962, en double exemplaire.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés, ont revêtu la présente Convention complémentaire de leurs signatures et de leurs cachets.

Pour le Conseil fédéral suisse: (signé) Saxcr 14627

Pour le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne: (signé) E. G. Mohr

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à l'approbation d'une convention complémentaire conclue entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagne en matière d'assurances sociales (Du 4 mars 1963)

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