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Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le projet d'une loi fédérale réglant le service des chèques et des virements postaux.

(Du 5 avril 1904.)

Monsieur le président et messieurs, A l'occasion de l'approbation du rapport du Conseil fédéral sur sa gestion en 1902, les Conseils législatifs ont adopté, à la date du 29 octobre/5 novembre 1903, le postulat suivant: «Le Conseil fédéral est invité à présenter le plus promptement possible un projet de loi spécial sur le chèque postal et les virements.» Dans le courant de l'année 1902 déjà, l'administration des postes avait élaboré le projet d'une loi unique sur les postes suisses contenant toutes les dispositions relatives au service des postes suisses et celles aussi concernant le service du chèque et du virement.

Nous pensions pouvoir discuter ce projet et vous le soumettre avant la session d'avril.

Entre temps, à l'occasion de l'arrêté fédéral du 23 décembre 1903 concernant le budget pour 1904, vous avez adopté, entre autres, le postulat que voici :

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« Le Conseil fédéral est invité : a. à présenter un rapport sur la question de savoir s'il n'y aurait pas lieu de réunir les administrations des postes et des télégraphes ; b. à prendre les mesures nécessaires pour que les nouveaux bureaux de poste, de télégraphe et de téléphone soient, dans la règle, réunis dans les mêmes locaux et ne soient séparés que par exception ». · Ce postulat étant de grande conséquence, il faudra en faire, notamment de la lettre a, une étude approfondie, qui prendra naturellement quelque temps ; or, jusqu'à ce qu'elle soit terminée, il ne sera pas possible non plus de vous soumettre le projet d'une nouvelle loi sur les postes suisses dont il est question au début. Suivant, en effet, que vous accepterez ou rejetterez ce postulat, le projet de la loi sur les postes devra être remanié ou pourra vous être soumis après que nous l'aurons discuté. Bien que le Département des Postes et des Chemins de fer pousse le plus possible les travaux préliminaires en vue de l'examen du postulat et compte vous soumettre encore cette année-ci des propositions fermes, néanmoins la solution définitive de cette importante question exigera encore un certain temps.

Dans ces conditions, nous avons cru répondre aux voeux de l'Assemblée fédérale en proposant une loi spéciale résolvant la question du chèque postal et du virement. Le projet de loi ci-après vise à regier cette affaire dans le sens désiré en introduisant le chèque et le virement dans le service postal.

La première motion tendante à l'introduction du service de chèque et virement par la poste a été déposée au Conseil national, en date du 15 juin 1900, par MM. Köchlin, Hirter et cosignataires. M. Köchlin l'a développée dans la séance du 28 juin 1900 et le Conseil national l'a adoptée sans formuler d'objections. Il ressort de l'exposé des motifs à l'appui de cotte motion qu'elle a pour but de faciliter les paiements dans notre pays. Par suite de l'extension du commerce et des relations, les demandes de moyens de paiement deviennent toujours plus nombreuses. Pour les petits paiements, en effet, on ne se sert presque exclusivement que de billets de banque et de numéraire. L'idée des motionnaires était de vulgariser l'usage du chèque et du virement dans les paiements qui se font en Suisse, pour remédier au manque de billets de banque et de numéraire

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qui se fait sentir ici et là et rendre disponible à d'autres fins une partie de nos moyens de paiement.

Nous avons délégué un fonctionnaire du Département des Finances et un fonctionnaire du Département des Postes en Allemagne et en Autriche, avec mission d'étudier la question sur place. Ces deux fonctionnaires ont présenté un rapport détaillé, que nous joignons aux actes.

Plus tard, dans le courant du mois d'août 1902, le Département des Postes a convoqué à Berne, pour discuter la question, une commission composée de représentants autorisés des milieux financiers, commerçants, industriels et. agricoles, que cette question intéresse en première ligne. Un procès-verbal des délibérations et un rapport complémentaire de la direction générale des postes sont également joints aux actes.

En Allemagne, la création d'un service de chèque par la poste est, comme on sait, demeurée à l'état de projet, les divergences de vues entre les autorités législatives et executives n'ayant pas été réglées jusqu'ici. En Autriche, par contre, le service du chèque postal repose sur une loi décrétée en 1887 et a-pris au cours des années une importance extraordinaire pour les relations commerciales en général.

Nous ne doutons pas qu'en Suisse aussi, une fois entré dans les habitudes, le service du chèque postal et du virement ne contribue puissamment à développer les relations économiques.

Jusqu'ici le mode de paiement par chèque n'a pas conquis dans notre vie commerciale la place qu'il mériterait et il semble que l'administration des postes, qui jouit en général d'une grande confiance auprès de notre monde des affaires, qui est plus que toute autre administration publique en relations journalières avec le public et pénètre dans toutes les contrées habitées de notre pays, pourrait contribuer considérablement à la vulgarisation du chèque. En Suisse, on n'apprécie pas encore les ressources du chèque comme moyen de paiement ; on éprouve à son endroit une certaine méfiance. Si par l'introduction d'un service de chèque la poste parvenait à triompher d'un sentiment aussi peu justifié et à gagner le public à ce service, ce serait là un progrès qu'on ne saurait trop apprécier.

Comme il s'agit pour la Suisse d'une nouvelle institution appelée sans doute, après de modestes débuts, à prendre un grand développement, et comme il faut laisser à tout ce service une certaine liberté d'allure pour qu'il puisse entrer dans

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les relations de tous les jours, nous sommes d'avis qu'on n'admette dans la loi qua le principe de l'introduction du chèque et du virement et la question de l'organisation. Toutes les autres dispositions, plus ou moins susceptibles d'être modifiées et dont la plupart ne pourront être fixées définitivement qu'après une certaine expérience, seraient établies par le Conseil fédéral dans une ordonnance que l'on modifierait ou compléterait ensuite selon les besoins. Bour l'intelligence des diverses questions, nous joignons aux actes un projet d'ordonnance, qui n'est pas encore approuvé.

Nous pouvons dès maintenant vous donner l'assurance formelle que le nouveau service de chèque et de virement n'aura pas pour but d'augmenter l'excédent de recettes de l'administration des postes. La fixation de l'intérêt à bonifier sur l'avoir des comptes, ainsi que des taxes et des droits, visera simplement à couvrir l'administration de ses risques et de ses frais.

Le service du chèque et du virement dans l'administration des postes serait organisé sur la base des principes généraux réglant ce moyen de paiement. Toute personne remplissant les conditions encore à- fixer pourrait se faire ouvrir un compte de chèques auprès de l'administration des postes et effectuer elle-même ou faire effectuer par des tiers des versements sur ce compte. Elle pourrait disposer en tout temps de son avoir au moyen de chèques. La réception des versements incomberait non seulement aux bureaux de chèques institués aux sièges des 11 directions d'arrondissement, mais à tous les offices de poste comptables, donc à tous les offices chargés du service des mandats de poste. Indépendamment des versements en espèces auprès d'un bureau de chèques ou d'un office de poste, l'administration des postes réservera aux titulaires de comptes la faculté de faire inscrire à leur crédit, ou au crédit d'un tiers, les montants de mandats-poste ou de mandats de recouvrements qui, actuellement, sont portés au domicile des ayants-droit, ainsi que les montants de remboursements expédiés. Il en résultera, rien que dans le service postal, une diminution appréciable du mouvement des espèces. Ceux qui utiliseront le service du chèque pourront s'épargner la peine de conserver les fonds qui leur parviennent par la poste ou de les déposer momentanément à la banque. En sa
qualité d'institution d'Etat, l'administration des postes présente une garantie incomparable pour les fonds qui lui sont confiés, chose importante, surtout pour le paysan, le petit commerçant et l'économe, attendu que l'avoir des comptes sera productif d'intérêt. Il est vrai que

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cet intérêt sera modique. La possibilité d'effectuer les versements sur comptes de chèques auprès de tous les offices de poste comptables sera d'une grande utilité aux campagnards de toutes les classes qui aujourd'hui perdent souvent beaucoup de temps à placer leurs fonds momentanément disponibles et préfèrent dès lors renoncer à tout placement. Il est probable que petit à petit tous les établissements financiers participeront au service du chèque postal. De cette façon, il leur sera possible de faire effectuer des versements quelconques sur leurs comptes de chèques auprès de tous les offices de poste comptables. Pareille institution serait non seulement très importante pour les commerçants et les établissements financiers, mais propre à éveiller le goût de l'épargne parmi la population. Après l'introduction du service du chèque dans l'administration des postes et si les établissements financiers participent à ce service, chacun pourra verser auprès de n'importe quel office de poste des montants, même très minimes, sur le compte de chèques de sa banque et demander qu'ils soient reportés sur le carnet d'épargne qu'il possède à cette banque. Le service du chèque postal ne fera donc pas concurrence aux établissements de banque. Il introduira plutôt dans la circulation et pourra amener à ces établissements des fonds qui, actuellement, restent souvent improductifs.

De même, les remboursements sur comptes de chèques seraient facilités dans toute la mesure possible. Ils pourront avoir lieu par un bureau de chèques ou par tout autre office de poste comptable. Il faudra pour cela remplir chaque fois un formulaire de chèque. Si l'on désire que le remboursement s'effectue par un bureau de chèques, il suffira de présenter le chèque au guichet ; par contre, si on demande qu'il ait lieu par un autre office de poste, on devra l'indiquer au verso du formulaire. Le chèque sera envoyé sous enveloppe au bureau de chèques, et le montant en sera assigné sur la localité où l'on désire que le paiement soit effectué. Comme le remboursement pourra être opéré par chaque office de poste et que, de cette façon, toute course à la ville ou au siège d'un établissement financier pourra être évitée, nombre de commerçants s'épargneront ainsi une perte de temps et des frais. Même les établissements financiers y gagneront à mesure
que, par le moyen du chèque postal, ils pourront charger la poste d'effectuer des paiements à leur clientèle sur leur avoir en compte de chèques. Mais, à ne le considérer qu'en lui-même, le chèque constitue un moyen de paiement très commode, parce que, dans les limites du maximum admis, il peut être créé pour n'importe

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quelle somme et remis en paiement à une tierce personne par celui qui l'a émis. Lorsque le titulaire d'un compte de chèques postaux veut effectuer un paiement, il peut remplir un formulaire de chèque et le remettre au créancier ; celui-ci a la faculté de le passer à un tiers. Il faut seulement veiller à ce que le délai de circulation ne soit pas dépassé.

Le service du virement, qui serait réuni au service du chèque, a aussi une grande importance en matière de politique financière. S'il était possible de gagner une nombreuse clientèle au service du chèque postal, une grande partie des paiements réciproques entre participants pourraient avoir lieu par inscription au débit ou au crédit des comptes de chèques sans qu'il fût nécessaire d'avoir recours à des billets de banque ou à du numéraire. Dans ce but également, il y aurait lieu d'utiliser des formulaires de chèques. Le porteur du chèque enverrait celui-ci au bureau de chèques avec indication, au verso, du nom de la personne au crédit de laquelle le montant doit être inscrit. Le bureau de chèques porterait d'abord ce dernier montant au débit du compte du tireur, puis l'inscrirait à l'avoir du compte du bénéficiaire. En Autriche, les virements dans le service du chèque postal ont atteint déjà en 1899 le 37 °/0 du mouvement total ; depuis lors la proportion a probablement augmenté encore. La même proportion serait sans doute atteinte aussi chez nous, surtout si, comme cela est prévu, l'administration des postes s'efforçait de développer le service du virement. Après quelques années d'existence, les virements atteindraient environ le tiers du mouvement total en trafic de chèques postaux, de sorte que si celui-ci s'élevait à un milliard de francs, plus de 300 millions de francs pourraient être balancés par virement, donc sans emploi de billets de banque ou
La participation au service du chèque et du virement de l'administration des postes sera facilitée dans toute la mesure possible. Conformément au projet d'ordonnance, les personnes dont la situation juridique n'est pas bien déterminée ou dont la demande n'est pas faite sérieusement doivent seules être exclues de la participation au service du chèque et du virement.

D'après le projet d'ordonnance, le dépôt de garantie insaisissable s'élève à 100 francs. Ce chiffre a été fixé aussi bas pour permettre aussi au petit commerçant de participer à ce service.

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Suivant le projet d'ordonnance, le montant de l'avoir du titulaire d'un compte n'est pas limité; par contre, en vue de prévenir les abus qui pourraient se produire en matière d'utilisation de l'avoir en compte de chèques, la limite de chaque versement est fixée à 10,000 francs.

Nous avons l'intention de fixer à 5000 francs le maximum de la somme, sur laquelle peut porter chaque chèque postal.

Cela suffira sans doute aux besoins des relations commerciales.

Nous prévoyons ensuite, pour empêcher surtout l'emploi abusif du compte de chèques, que l'administration aura le droit de dénoncer ce compte en tout temps. Le même droit existerait aussi pour le titulaire d'un compte, moyennant avertissement préalable de quatorze jours.

En vertu des dispositions du code fédéral des obligations (XXX, 832), le chèque peut être émis au porteur, en faveur d'une personne déterminée ou à l'ordre de cette personne. Cette règle doit être appliquée aux chèques postaux en ce sens que les chèques au porteur seraient seuls admis. Cela est nécessaire, parce que, en cas de mise en circulation de chèques en faveur d'une personne déterminée ou à l'ordre de cette personne, les bureaux de chèques devraient vérifier lors de chaque présentation au paiement si le porteur de ces chèques est identique avec ladite personne. Cette vérification susciterait de continuelles difficultés. Au surplus, elle ne pourrait sans doute plus avoir lieu dès que le service du chèque aurait pris une certaine extension.

Nous tenons à mentionner qu'en Autriche et en Hongrie on n'admet aussi que des chèques au porteur. De même, le projet pour l'introduction du chèque postal en Allemagne ne prévoit que des chèques au porteur.

Par les mêmes motifs, les chèques postaux ne devront pas être endossés. Au surplus, l'endossement n'est pas nécessaire sur un chèque au porteur que le tireur transmet à une autre personne, attendu que la poste reconnaîtra et paiera le chèque sans qu'il soit endossé, à condition qu'il y ait une couverture suffisante. Durant le délai de circulation admis, un chèque au porteur peut changer plusieurs fois de possesseur sans que là transmission soit notée chaque fois au verso. Il est vrai que, pour les chèques qui sont envoyés à un bureau de chèques non pas à fin de paiement en espèces au guichet, mais pour être reportés d'un compte de
chèques sur un autre compte (virement) ou pour être payés par assignation, la personne qui transmet le chèque doit indiquer au verso au profit de qui le report ou Feuille fédérale suisse. Année LVI. Vol. II 36

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l'assignation doit avoir lieu. Toutefois cette indication n'est pas considérée comme endossement, mais comme ordre au bureau de chèques de bonifier ou d'établir un mandat, et elle n'a effectivement pas d'autre signification.

Les taxes à percevoir dans le service de chèque et virement seraient aussi modiques que possible. Elles sont spécifiées à l'article 27 du projet d'ordonnance joint aux actes et s'élèvent : a. pour les versements : à 5 centimes par 100 francs ou fraction de 100 francs ; 6. pour les paiements : à 10 centimes par chèque lorsque le remboursement a lieu au guichet du bureau de chèques ; à 5 centimes par chèque, à la charge du mandant, pour le report d'un compte sur un autre compte (virement) ; à 10 centimes par 100 francs ou fraction de 100 francs pour assignation de montants sur des bureaux de poste ordinaires ; au montant de la taxe des mandats de poste pour les sommes expédiées par mandats.

Nous n'avons donc pas l'intention de donner à ce ser\ r ice un caractère fiscal, l'administration des postes ne devant au contraire percevoir que ce qui est nécessaire à la couverture de ses propres frais, en tenant compte équitablement des risques.

Dans l'intérêt de son développement, le service des virements serait favorisé par des taxes spécialement modiques. A cet égard il ne faut pas perdre de vue qu'en vertu de l'article 33 de la loi sur les taxes postales, tous les formulaires employés dans le service des chèques et virements par la poste seront exempts des droits de timbre cantonaux.

Nous avons déjà dit plus haut que l'on prévoit la bonification d'un modique intérêt sur l'avoir des comptes de chèques, y compris le dépôt de garantie. Le taux de l'intérêt serait fixé par le Conseil fédéral dans les limites d'un maximum et en tenant compte des circonstances du marché monétaire. Nous nous proposons de fixer provisoirement le taux de l'intérêt à 1,8 °/oi chiffre divisible par le nombre des mois (12).

On estime, il est vrai, et il ne s'agit pas d'une opinion isolée, que l'avoir en compte de chèques postaux ne devrait pas être productif d'intérêt, mais que, comme compensation, il y aurait lieu de ne percevoir aucune taxe. Cette opinion

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a prévalu, par exemple, au Reichstag allemand. Toutefois, nous devons faire remarquer que, s'il n'était pas bonifié d'intérêt, il est probable que, vu les conditions qui existent en Suisse, ce seraient précisément ceux que nous aimerions gagner au service du chèque et du virement qui n'en feraient pas usage, à savoir le petit commerçant, l'artisan, le paysan, l'économe, etc.

Il ne faut pas perdre de vue non plus qu'en se bornant à faire fructifier les soldes créanciers des comptes de chèques, l'administration des postes n'arriverait pas à couvrir ses propres frais et que, par conséquent, même 's'il n'était pas bonifié d'intérêts, elle devrait percevoir des taxes, si l'on veut éviter que ses comptes accusent un déficit. Il y a ici deux intérêts en présence. Les abonnés au service du chèque dont les transactions sont nombreuses désireront qu'il ne soit pas perçu de taxes ou que celles-ci soient très modiques ; ils consentiront en revanche que leur avoir en compte de chèques ne soit pas productif d'intérêt. Les autres abonnés, appartenant plutôt à la catégorie des déposants, attacheront plus d'importance à la bonification d'un intérêt qu'à la perception des taxes. Nous croyons qu'il serait juste de se montrer conciliant envers les deux groupes d'intéressés en prévoyant la bonification d'un minime intérêt et en fixant aussi les taxes au taux le plus bas possible.

L'administration des postes délivrera aux abonnés au service du chèque et virement, au prix de revient, des carnets contenant chacun 100 formulaires de chèques. Le numéro courant du formulaire, le numéro du compte de l'abonné, ainsi que son nom ou sa raison de commerce, seront imprimés sur les formulaires de chèques. Après avoir remis le carnet de chèques au titulaire du compte, l'administration des postes ne pourra empêcher par aucun moyen que des carnets de chèques ou des chèques détachés ne tombent dans des mains non autorisées et ne soient employés abusivement. Il nous paraît donc juste et équitable que la responsabilité de l'administration des postes pour l'emploi abusif, ainsi que pour la perte ou la disparition de formulaires de chèques portant le nom de celui qui les détenait, cesse dès le moment où le titulaire du compte entre en possession du carnet de chèques et des formulaires. De cette façon il prendra garde que son carnet de
chèques ou des formulaires détachés ne tombent dans 4es mains non autorisées.

L'article 29 du projet d'ordonnance contient une disposition à ce sujet.

Avec l'extension que prendra sans doute avec le temps le service du chèque, il se produira inévitablement des tentatives de

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fraude, soit que des chèques soient tirés par des personnes qui ne possèdent pas de compte, soit que ces personnes ne disposent pas de couverture suffisante auprès du bureau de chèques qui a ouvert le compte. L'administration des postes prendra, il est vrai, des mesures de précaution en vue d'empêcher des opérations illicites. L'article 24 du projet d'ordonnance contient une disposition portant que l'émission, en connaissance de cause, de chèques pour lesquels il n'y a pas de couverture ou pour lesquels la couverture est insuffisante doit être poursuivie par voie pénale.

Pour la perte de montants de chèques postaux, ainsi que pour les retards dans le paiement ou la bonification de montants de chèques postaux versés, nous prévoyons à l'article 30 du projet d'ordonnance, sur la base de l'article 25 de la loi sur la régale des postes, la compensation entière en cas de perte et la même indemnité que pour les mandats de poste en cas de retard dans le paiement.

En matière d'organisation du service du chèque et du virement dans l'administration des postes, nous prévoyons qu'indépendamment d'une nouvelle division de service à la direction générale des postes à Berne, il serait d'abord créé un bureau de chèques au siège de chaque direction d'arrondissement des postes, savoir à Genève, Lausanne, Berne, Neuchâtel, Baie, Aarau, Lucerne, Zurich, St-Gall, Coire et Bellinzone. L'expérience démontrera s'il est possible d'instituer aussi des bureaux de chèques dans d'autres localités à fort trafic. Pour le moment, nous voudrions l'éviter à raison des complications qui en résulteraient et pour ne pas provoquer des remaniements dans les arrondissements postaux actuels.

Les bureaux de chèques se subdiviseraient en une caisse et en un bureau de contrôle. La caisse pourra probablement être réunie d'une manière générale à la section des mandats du bureau principal des postes et si, plus tard, comme conséquence du service des chèques et virements, le service des mandats devait subir un recul, ce qui est à prévoir sans cependant pouvoir être apprécié exactement, le personnel qui deviendrait disponible serait employé au service de chèque et virement.

Le bureau de contrôle serait rattaché à la section du contrôle ou à la chancellerie de la, direction d'arrondissement.

Quant aux autres offices de poste comptables auxquels
incomberont la réception des versements sur les comptes des abonnés au service du chèque et les paiements à effectuer, il ne sera probablement pas nécessaire d'augmenter leur

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personnel ou de le déplacer. Les nouveaux services n'occasionneront qu'un léger surcroît de travail aux offices de poste et là où l'augmentation de charges serait importante, le traitement du titulaire pourra être fixé de manière à tenir compte de cette circonstance.

Les bureaux de chèques relèveront des directions d'arrondissement des postes et recevront par l'entremise de celles-ci les instructions de l'administration centrale. Cela est nécessaire pour que la direction d'arrondissement, à laquelle incombe la surveillance immédiate, soit constamment tenue au courant de la marche des affaires, et cela d'une manière très exacte. Le bureau de chèques sera le point central du service de chèque et virement de l'arrondissement. Il sera chargé de la tenue des comptes des abonnés au service du chèque domiciliés dans l'arrondissement postal. A cet effet, tous les versements sur les comptes de ses abonnés qui auront lieu dans le propre arrondissement ou dans d'autres lui seront notifiés au fur et à mesure. De cette façon, des versements sur le compte d'un abonné pourront être effectués non seulement dans l'intérieur d'un même arrondissement, mais dans toute l'étendue du pays. De même, tous les paiements auront lieu par son entremise, soit qu'il paie lui-même les chèques au guichet, soit qu'il en assigne le montant sur un autre office de poste. Il lui incombera aussi de comptabiliser les virements aussi bien dans l'intérieur de son arrondissement postal que dans les relations avec les titulaires de comptes domiciliés dans d'autres arrondissements. Le bureau de chèques d'arrondissement sera en mesure d'indiquer en tout temps quel est le montant des versements effectués le jour précédent dans l'arrondissement et quel est le montant des paiements ou des sommes assignées.

De cette façon, il sera possible d'avoir un clair aperçu du mouvement des fonds de chaque arrondissement; on pourra établir quels sont les offices de poste en mesure de faire des livraisons de numéraire et quels sont ceux auxquels il est besoin de faire des avances de numéraire pour assurer les paiements. Le bureau de chèques sera mis en relations avec la caisse d'arrondissement des postes, à laquelle il aura recours lorsqu'il aura besoin de fonds pour les paiements.

Pour récapituler le mouvement d'affaires des 11 bureaux de chèques, établir
la balance entre les arrondissements postaux, régler et surveiller la marche de tout le service, il devra être créé un bureau central, lequel, comme nous le prévoyons ci-dessus, formera une nouvelle division de la direction générale des postes. Ce bureau central, qui sera

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placé sous la direction et la surveillance immédiates du directeur général des postes, devra être chargé en outre d'établir le solde de chaque office de poste et de chaque bureau de chèques en service de chèques, puis de déterminer sur ces données le solde, de chaque arrondissement postal et enfin le solde général ; de vérifier la comptabilité des bureaux de chèques ; de calculer les intérêts ; d'établir les bilans mensuels et annuels ; de tenir les listes des participants au service du chèque et des abonnés au service du clearing et de faire confectionner les formulaires nécessaires. Le bureau central du chèque devra déterminer aussi journellement quels sont les arrondissements qui, indépendamment du fonds d'exploitation nécessaire, disposent, en trafic de chèques, de numéraire pouvant être affecté à des placements ou, inversement, auxquels des avances de fonds doivent être faites.

Pour le placement des fonds disponibles provenant du service de chèques, nous édicterions des prescriptions de détail déterminant auprès de quels établissements financiers et sur quels titres les placements doivent avoir lieu. Ces prescriptions sont contenues à l'article 32 du projet d'ordonnance. Pour le moment, nous supposons qu'abstraction faite d'un fonds d'exploitation que l'expérience permettra d'évaluer et qui se trouverait clans les caisses des offices, le tiers environ des fonds disponibles pourrait être déposé en compte-courant dans des banques cantonales. Les deux autres tiers seraient placés en titres de première classe. En outre, il y aura lieu d'examiner si et dans quelle mesure il pourra être tenu compte des titres étrangers. L'administration de ces titres, ainsi que les relations avec les banques cantonales ou autres désignées pour le placement des fonds en trafic de chèques, seraient confiées à la direction générale des postes, qui agirait en vertu de prescriptions à établir par voie de règlement.

Nous passons maintenant à l'exposé des motifs à l'appui des différents articles que contient le projet de loi.

Ad ari. 1. La loi sur la régale des postes doit être complétée par une disposition introduisant l'encaissement et l'expédition de sommes d'argent au moyen de chèques et virements.

Ad art. 2. Il sera créé à la direction générale des postes une nouvelle division pour le service des chèques et
virements. Cette division comprendra un inspecteur, un adjoint, des reviseurs de Ire et de IIme classe, des aides-réviseurs et d'autres aides et employés. Nous nous sommes déjà prononcés dans le présent message au sujet des obligations qui incomberont

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à cette nouvelle division, de même qu'à l'égard de l'organisation dans les arrondissements postaux, où nous ne jugeons pas nécessaire, pour le moment du moins, de créer des organes spéciaux. Les traitements que prévoit la loi générale concernant les traitements pour les divisions actuelles de la direction générale des postes, ainsi que les dispositions réglant d'une manière générale la nomination, la révocation, la compétence et les obligations du personnel postal (voir aussi l'article 1 du projet d'ordonnance) seraient applicables par analogie à la nouvelle division de service.

Ad art. 3. Nous joignons au présent message le projet d'une ordonnance que nous arrêterions après adoption de la loi et qui contient toutes les dispositions de détail se rapportant au service des chèques et virements postaux.

Nous vous recommandons l'adoption du projet de loi ciaprès et saisissons cette occasion pour vous assurer, monsieur le président et messieurs, de notre haute considération.

Berne, le 5 avril 1904.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, COMTESSE.

Le chancelier de la Confédération, RINGIER.

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Projet.

Loi fédérale concernant le service des chèques et des virements postaux.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE de la C O N F É D É R A T I O N SUISSE, En exécution de l'article 36 de la constitution fédérale, Vu le message du Conseil fédéral du 5 avril 1904, décrète : Art. 1er. La loi fédérale du 3 avril 1894 sur la régale des postes reçoit à son article 1er l'adjonction suivante : h. l'encaissement et l'expédition de sommes d'argent au moyen de chèques et virements.

Art. 2. Il est créé à la direction générale des postes une nouvelle division, chargée du service des chèques et virements. Cette division comprendra un inspecteur, un adjoint, des reviseurs de première et de seconde classe, des aides-réviseurs et d'autres aides et employés.

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Art. 3. Le Conseil fédéral édictera, par voie d'ordonnance, toutes les prescriptions nécessaires pour ce nouveau service.

Art. 4. Le Conseil fédéral est chargé, conformément aux prescriptions de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier le présent arrêté et de fixer l'époque de son entrée en vigueur.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le projet d'une loi fédérale réglant le service des chèques et des virements postaux. (Du 5 avril 1904.)

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