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7866 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien du contrôle des prix (Du 25 août 1959)

Monsieur le Président et Messieurs, L'additif constitutionnel du 26 septembre 1952 sur le maintien temporaire d'un contrôle des pris réduit, prorogé par l'arrêté fédéral du 22 décembre 1955, cessera de porter effet le 31 décembre 1960. La question se pose donc de savoir quelles mesures il convient de prévoir dans ce domaine pour la période ultérieure.

Nous avons l'honneur de vous adresser le présent message sur la continuation des différentes tâches en matière de contrôle des prix. Il y est joint un projet d'arrêté sur le maintien de mesures temporaires dans ce secteur.

Puisque noua devons vous proposer pour la troisième fois de maintenir certaines activités en matière de contrôle des prix, il convient, selon nous, de remanier les dispositions pour tenir compte du fait que les diverses mesures en question n'ont pas toutes le même caractère. Notre projet d'additif constitutionnel ne se rapporte qu'au maintien des mesures d'économie de guerre limitées dans le temps et de la disposition de l'article 2 de l'additif constitutionnel en vigueur. Ces mesures et cette disposition ne peuvent se fonder sur des articles de la constitution; il est nécessaire de leur donner une base constitutionnelle. En restreignant ainsi le contenu de l'additif constitutionnel, nous entendons éliminer la mention de tâches relevant de la politique économique du temps de paix et pour lesquelles la Confédération est de toute manière en droit de légiférer en vertu d'un article de la constitution concernant l'ordre économique (art, 316is, 3e al., lettres a et 6).

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I. Tâches temporaires découlant de l'économie de guerre et tâches permanentes du régime de paix 1. Distinction entre tâches de l'économie de guerre et tâchée du régime de paix

L'additif constitutionnel en vigueur a pour objet une série de mesures qui visent toutes à régler la formation des pris et à protéger par là les consommateurs, les locataires ou les fermiers. Ces mesures différent toutefois économiquement et juridiquement selon qu'elles se rapportent à des tâches subsistant de l'économie de guerre ou à des tâches permanentes ou à long terme du régime de paix.

En se fondant sur l'additif constitutionnel, la Confédération peut édicter des prescriptions sur -- les loyers, y compris les fermages non agricoles, et la limitation du droit de résiliation (art. 1er, 1er al.); -- les fermages agricoles (art. 1er, 1er al.), -- les prix des marchandises protégées (art. 1er, 2« al.), -- la compensation des prix (art. 1er, 2e al.), -- les prix de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur (art. 2).

Ces dispositions, groupées pendant la guerre et dans l'additif constitutionnel sous la rubrique des «mesures concernant le coût de la vie et destinées à protéger le marché», ce qui revient à dire de mesures destinées à la protection des consommateurs, sont toutefois loin d'être homogènes.

On distingue deux catégories de dispositions. Leur caractère différent doit être pris en considération, car il ne s'agit plus que d'accomplir certaines tâches bien déterminées, le contrôle des prix ne constituant plus, comme pendant la guerre, un champ de travail quasi universel.

Le contrôle des loyers, y compris la limitation du droit de résiliation et la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers, sont des institutions de la période d'économie de guerre qui n'ont pas pu être supprimées mais qui ne doivent être maintenues que temporairement pour pouvoir être abolies graduellement. Au groupe des dispositions en question se rattache l'article 2 de l'additif constitutionnel, qui autorise le Conseil fédéral à mettre immédiatement en vigueur les prescriptions qu'il propose à l'Assemblée fédérale au sujet des prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur. Cette disposition, si elle ne représente pas une mesure d'économie de guerre proprement dite, n'en constitue pas moins une précaution de caractère temporaire, justifiée par la période de «guerre froide» que nous vivons.

Les autres institutions, comme le contrôle des fermages, la surveillance des prix des marchandises protégées et la caisse de compensation des prix

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des oeufs et des produits à base d'oeufs, sont des mesures de politique économique qui sont valables aussi en temps de paix et peuvent se fonder sur un article d'ordre économique de la constitution (articles 31&»s, 3e al., lettres a et o).

2. Historique de la distinction à faire entre les tâches d'économie de guerre et les tâches du régime de paix Dans nos différents messages sur le maintien temporaire du contrôle des prix, nous avons relevé que le contrôle des prix des marchandises protégées (par exemple oeufs, viande, fruits, légumes, lait) est corollaire des mesures de protection et de soutien prises par la Confédération et représente une tâche du temps de paix, dont il avait fallu s'acquitter déjà avant la dernière guerre. Signalons en particulier, dans ce sens, le message sur le maintien temporaire du contrôle des prix, du 2 mai 1952 (FF 1952, II, 63), le message sur l'exécution de l'additif constitutionnel concernant le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit, du 3 février 1953 (FF 1953, I, 319), le rapport sur l'initiative populaire concernant la protection des locataires et des consommateurs, du 20 juillet 1954 (FF 1954, II, 164), le message concernant la prorogation de l'additif constitutionnel sur le maintien d'un contrôle des prix réduit, du 1er novembre 1955 (FF 1955, II, 1032) et le message concernant l'application du contrôle des prix du 8 mai 1956 (FF 1956, I, 1071). Notre thèse n'a été contestée par personne lors des délibérations parlementaires auxquelles ont donné lieu les messages susmentionnés. Bien que la surveillance des prix des marchandises protégées soit une tâche permanente, nous l'avons toujours indiquée, pour plus de simplicité, dans les arrêtés fédéraux sur le maintien temporaire du contrôle des prix et dans les arrêtés d'exécution. Dans notre rapport du 20 juillet 1954 sur l'initiative populaire concernant la protection des locataires et des consommateurs (FF 1954, II, 149 s.) et dans notre message du 1er novembre 1955, nous avions d'ailleurs déjà dit que l'on peut soutenir l'opinion selon laquelle la faculté de fixer des prix maximums pour les marchandises protégées découle, pour le législateur fédéral, du pouvoir de prendre des mesures pouvant influer sur les prix. Nous ajoutions qu'on pourrait ainsi se passer d'une disposition constitutionnelle ad hoc. Nous
n'avons pas moins englobé dans l'additif constitutionnel à prolonger la disposition sur la surveillance des prix des marchandises protégées, du fait que la question appelait un examen plus approfondi et qu'il était de toute manière nécessaire de proroger d'autres mesures du contrôle des prix découlant de l'économie de guerre.

Pour ce qui est du contrôle des fermages agricoles également, les précédents messages du Conseil fédéral envisageaient déjà la possibilité de l'ancrer définitivement dans la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale [messages sur le maintien ou sur l'exécution

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du contrôle des prix du 2 juin 1952 (FF 1952, II, 86/87), du 3 février 1953 (FF 1953,1, 317), du 1<* novembre 1955 (FF 1955, II, 1032), et du 8 mai 1956 (FF 1956, I, 1070)]. De divers côtés, on a émis l'avis, ces dernières années, qu'il conviendrait d'ancrer le contrôle des fermages dans la législation agricole, une réglementation provisoire ne répondant plus aux conditions de fait. Dans sa session d'automne 1954, le Conseil national a adopté sous forme de postulat une motion Stahli demandant au Conseil fédéral de préparer l'insertion du contrôle des fermages dans la loi sur le maintien de la propriété foncière rurale. Le département fédéral de justice et police ayant déjà commencé les préparatifs d'une revision du droit foncier, le contrôle des fermages fut prévu une fois de plus pour une période transitoire en 1955 dans le projet de dispositions prorogeant l'additif constitutionnel du 26 septembre 1952 sur le contrôle des prix.

Conformément à notre proposition, l'arrêté fédéral du 26 septembre 1952 fut prorogé par l'arrêté fédéral du 22 décembre 1955. L'ancien arrêté ne fut pas modifié, de sorte qu'il y eut aussi prorogation des dispositions sur le contrôle des fermages agricoles et la surveillance des prix des marchandises protégées.

Les considérations émises dans nos messages suscitèrent toutefois, lors des délibérations sur l'arrêté fédéral du 28 septembre 1956 instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle réduit, le dépôt de deux postulats, qui furent acceptés sans opposition.

Le premier de ces postulats est celui de la commission du Conseil des Etats. Daté du 26 juin 1956, il est rédigé comme suit: Le Conseil fédéral est invité à prendre en temps opportun les mesures nécessaires pour que, à l'expiration de l'arrêté fédéral concernant le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit: 1. Le maintien du contrôle des fermages agricoles soit assuré; 2. Les prix et les marges de marchandises dont la formation est influencée par des mesures de protection ou de soutien de l'Etat puissent être surveillés et, au besoin, fixés d'après des principes uniformes, de manière à prévenir toute formation injustifiée des prix.

Le second postulat (postulat Herzog), adopté par le Conseil national le 21 septembre 1956, a la teneur suivante: Le Conseil fédéral est invité à prendre en temps opportun les mesures nécessaires pour que, à l'expiration de l'arrêté fédéral concernant le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit; 1. Le maintien du contrôle des fermages agricoles soit assuré; 2. Les prix et les marges de marchandises dont la formation est influencée par des mesures de protection ou de soutien de l'Etat puissent être surveillés et, au besoin, fixés d'après des principes uniformes, de manière à prévenir toute formation injustifiée des prix; 3. La conservation de la caisse do compensation des prix du lait et dee produite laitiers soit assurée en vue de maintenir, dans l'intérêt du consommateur, le prix du lait à un niveau bas dans les régions de production insuffisante et dans les centres de consommation.

445 Bien que leur texte n'en fasse pas expressément mention, les deux postulats partent de l'idée qu'il convient de tenir compte du caractère durable de la surveillance des prix des marchandises protégées et du contrôle des fermages dans la forme que l'on donnera à la future législation sur le contrôle des prix.

Cette manière d'envisager les choses correspond aux idées que nous avions exprimées dans nos précédents messages. Il convenait toutefois de tirer au clair si l'on pourrait ancrer dans le droit ordinaire ces tâches permanentes ou du moins à long terme de l'économie du temps de paix.

Vu la portée de principe de cette question d'ordre constitutionnel, le département fédéral de l'économie publique tint à la soumettre à l'examen d'une personne compétente. Il pria donc le professeur Hans Huber à Berne, d'exprimer son opinion. Dans ces deux préavis des 28 juin 1958 et 5 février 1959, le professeur Huber affirme qu'il est possible de fonder le contrôle des fermages, la surveillance des prix des marchandises protégées et la caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs sur un article d'ordre économique de la constitution (art. Slois, 3e al., lettres a et b). En revanche, il nie cette possibilité pour la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers.

Nous fondant sur le résultat de cette expertise, nous donnons la préférence à une solution tenant compte du caractère des différentes mesures. Cette solution consiste à ne plus inscrire dans l'additif constitutionnel, les tâches permanentes de la politique économique en temps de paix, mais à se fonder sur l'article 31bis, 3e al., lettres a et b, de la constitution et à régler les choses par des actes législatifs particuliers, 3. Tâches permanentes de la politique économique en temps de paix a. La surveillance, des prix des marchandises protégées Dans la question de la surveillance des prix des marchandises protégées, le professeur Huber fut invité à dire si la faculté accordée par la constitution à la Confédération de prendre des mesures de protection et de soutien de nature à influencer la formation des prix de certaines marchandises comprend la compétence de surveiller ces prix, c'est-à-dire, le cas échéant, d'édicter des prescriptions en matière de prix. Le professeur Huber a examiné cette question dans
son avis de droit du 28 juin 1958, en particulier en relation avec l'article Slbis, 3e al., lettres a et b, de la constitution. Il répond par l'affirmative au sujet de ces deux compétences et écrit: «La Confédération a également la compétence de prendre des dispositions de surveillance et d'édicter des prescriptions limitatives pour ce qui est des prix dont la formation eat ou peut être influencée par des mesures de protection». La faculté qu'a la Confédération d'assortir, dans l'intérêt général, de prescriptions sur les prix maximums les mesures de protection et de Feuille fédérale. 111« année. Vol. II.

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soutien qu'elle prend en vertu de l'article Slbis, 3e al., lettres a et b, de la constitution est considérée comme «une compétence implicite résultant d'une corrélation nécessaire avec une faculté explicite».

L'avis de droit au professeur Huber est convaincant. Il confirme l'opinion que nous avons exprimée dans de précédents messages. Les mesures de protection et de soutien exerçant une influence sur les prix (à compléter par des prescriptions au sujet des prix maximums) sont pour l'instant toutes prises en vertu de l'article SUis, 3e al., lettres a et b, de la constitution. Il ne paraît donc pas nécessaire de prévoir une disposition constitutionnelle particulière accordant à la Confédération la faculté de contrôler le» prix des marchandises protégées. La grande majorité des gouvernements cantonaux et des organisations économiques, que nous avons consultés, partagent cet avis.

b. La caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs Le professeur Huber devait aussi répondre à la question de savoir si l'article Slbis, 3e alinéa, lettres a et b, de la constitution donne de manière dérivée et implicite à la Confédération la compétence d'instituer une compensation des prix, en particulier dans le secteur du lait et des oeufs.

Dans son avis de droit du 5 février 1959, le professeur Huber s'exprime sur la différence (pas aisément saisissable) entre les deux caisses de compensation. Il déclare sans pertinence le fait que les deux organismes sont appelés «caisses de compensation» et qu'il y a compensation dans l'un et l'autre cas. Ce qui compte, dit-il, c'est le but des mesures. Or on constate qu'il n'est pas du tout le même dans les deux cas. Le procédé de la compensation est une affaire purement technique. Pour juger la question de droit constitutionnel, ce n'est pas l'aspect technique qu'il faut considérer, c'est le fond et le but.

Si l'on applique ces considérations à la caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs, on constate que cette caisse est d'une manière très nette un organisme destiné à faciliter le placement.

Elle doit permettre aux importateurs de s'acquitter de leur obligation de prendre en charge des oeufs du pays. Dans le régime créé par l'ordonnance du 19 février 1954 concernant le marché des oeufs, elle est un élément que l'on ne
saurait supprimer sans mettre en question la conservation de tout l'édifice. La caisse est donc partie intégrante d'un ensemble de mesures prises «pour conserver une forte population paysanne et assurer la productivité de l'agriculture», en vertu de l'article Slbis, 3e alinéa, lettre b, de la constitution. Institution créée à ce titre dans l'intérêt des producteurs d'oeufs, cette caisse de compensation sert également l'intérêt général puisqu'elle représente la solution la plus judicieuse. En effet, non seulement elle aide à accorder aux paysans un prix couvrant les frais de production, mais encore elle abaisse pour les consommateurs les prix des oeufs du pays,

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tout en permettant aux importateurs d'écouler, à côté des oeufs importés bon marché, les oeufs du pays qu'ils ont dû prendre en charge. Cela se fait sans entraver les importations, ainsi que l'ont prouvé les expériences faites ces dernières années.

La caisse est alimentée par des taxes perçues des importateurs sur les oeufs importés (oeufs en coquilles, oeufs congelés, poudre d'oeufs). Les subsides versés permettent d'abaisser les prix des oeufs du pays récoltés par les organisations de ramassage que les importateurs sont obligés de prendre en charge. Les importateurs d'oeufs congelés et de poudre d'oeufs ont l'avantage de pouvoir, en payant les taxes perçues sur leurs importations, se libérer de l'obligation de prendre en charge et d'écouler des oeufs du pays.

Ainsi donc, ce sont les mêmes milieux qui sont grevés et qui sont favorisés ; la caisse subvenant elle-même à ses frais, les taxes et les versements ou les avantages s'équilibrent.

Quel que soit l'angle sous lequel on envisage la question, on constate ainsi que la caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs peut être fondée sur l'article 316w, 3e al., lettre b, de la constitution.

Notre opinion est confirmée par le professeur Huber et partagée par presque tous les gouvernements cantonaux et par la majorité des organisations économiques.

c. Le contrôle des fermages agricoles

Si l'on veut examiner sous son aspect constitutionnel la question du contrôle des fermages agricoles, on doit considérer que, en vue de conserver une forte population paysanne et assurer la productivité de l'agriculture, il est d'une part nécessaire de maintenir une juste relation entre la valeur de rendement des terres et le fermage et d'autre part justifié, dans l'intérêt général, d'édicter à ce sujet des prescriptions s'écartant du principe de la liberté du commerce et de l'industrie. La compétence accordée à la Confédération par l'article Slbis, 3e alinéa, lettre &, de la constitution comprend donc la faculté d'édicter des prescriptions sur les fermages agricoles. Comme le relève le professeur Huber dans son avis de droit, du 5 février 1959, le fermier, considéré sous l'angle agricole général, n'est pas simplement l'usager du bien cédé ainsi que l'est le locataire d'un logement ; il est aussi producteur et bénéficie ainsi de la protection prévue à l'article Slbis, 3e alinéa, lettre b, de la constitution.

En résumé, on peut constater que la surveillance des prix des marchandises protégées, la caisse de compensation des prix des oeufs ainsi que le contrôle des fermages peuvent être fondés, la première sur les lettres a et 6, et les deux autres sur la lettre 6 de l'article 316is, 3e alinéa, de la constitution. A peu d'exceptions près, les gouvernements cantonaux et les organisations économiques acceptèrent que l'on prenne ces mesures par des arrêtés fédéraux à l'échelon législatif, sans les mentionner dans l'additif constitutionnel.

448 4. Tâches temporaires de l'économie de guerre a. Le contrôle des loyers et la protection des locataires (limitation du droit de résiliation) Dans la question du contrôle des loyers et de la protection des locataires, il faut accorder une importance décisive au fait que les locataires, ne peuvent pas être considérés comme une profession particulière ou une branche économique au sens de l'article Îlbîs, 3e alinéa, lettre a, de la constitution. C'est la raison pour laquelle le droit constitutionnel permanent n'offre pas de base suffisante pour le maintien du contrôle des loyers. Le contrôle des loyers et la protection des locataires sont des mesures temporaires qui subsistent du régime de l'économie de guerre et avaient pour base primitive les pouvoirs extraordinaires conférés au Conseil fédéral. Elles ne peuvent être prorogées par un additif constitutionnel qu'aussi longtemps que des considérations économiques d'ordre général le commandent, le but étant une abolition graduelle.

6. La caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers Nous référant à ce qui a été dit sous chiffre 3, lettre 6, nous constatons que la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers --· contrairement à celle des oeufs -- n'est pas un instrument destiné à faciliter le placement du lait. Ayant exposé le financement et l'activité de cette caisse dans notre message du 8 mai 1956 concernant l'application du contrôle des prix (FF 1956, I, 1044 s.), nous pouvons renvoyer à ces indications. Le but de la caisse est de «maintenir dans l'intérêt du consommateur le prix du lait à un niveau bas dans les régions de production insuffisante et dans les centres de consommation». Elle a donc le caractère d'un instrument de politique sociale forgé dans l'intérêt des consommateurs. Sa création ne saurait être considérée comme une disposition prise «pour conserver une forte population paysanne et assurer la productivité de l'agriculture» au sens de l'article 3lbis, 3e alinéa, lettre 6, de la constitution.

De plus, les taxes qui alimentent la caisse ne sont pas du tout l'équivalent des prestations qu'elle accorde pour maintenir le prix du lait à un niveau bas. Les taxes sur le lait et la crème de consommation et le droit de douane supplémentaire sur le beurre prélevés pour assurer le financement de la caisse
grèvent ces produits dans une même mesure pour tous les consommateurs du pays. En revanche, les prestations de la caisse grâce auxquelles le prix de détail du lait est maintenu bas ne profitent pas à toutes les communes. Il est vrai que le nombre de celles qui en bénéficient est relativement élevé. Seuls trois millions d'habitants en chiffre rond bénéficient de l'abaissement du prix du lait, et encore dans une mesure variable, puisque les prestations de la caisse sont plus ou moins élevées selon les localités. Le droit de faire fonctionner cette caisse de compensation ne peut

449 donc pas être considéré comme découlant implicitement de l'article Slbis, 3e al., lettre b, de la constitution. Le professeur Huber confirme cette manière de voir dans son avis de droit du 5 février 1959.

Ainsi que nous l'avions indiqué notre message du 6 février 1959 concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et financier à prendre dans le secteur laitier (FF 1959,1, 310), il faut constater également que la constitution ne contient aucune disposition qui permettrait un abaissement général de prix du lait pour des raisons de politique sociale.

Les considérations ci-dessus montrent que la caisse ne peut être maintenue que par une disposition constitutionnelle expresse.

c. La compétence d'édicter des prescriptions sur les prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur A part l'article 2 de l'additif constitutionnel, la constitution ne contient aucune disposition permettant au Conseil fédéral de mettre immédiatement en vigueur les prescriptions qu'il propose à l'Assemblée fédérale au sujet des prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur. Si l'on entend maintenir cette compétence du Conseil fédéral, prévue pour les cas extraordinaires pouvant se produire de façon inattendue au cours de périodes de troubles politiques et d'instabilité économique, on est obligé d'inclure cette disposition de caractère préventif dans le nouvel additif constitutionnel.

5. Procédure proposée en ce qui concerne la législation pour lo maintien des diverses tâches

Comme nous l'avons dit, nous considérons que la meilleure solution consiste à adopter un procédé différencié répondant au caractère particulier des diverses mesures.

Une simple prorogation de l'additif constitutionnel serait peut-être moins compliquée, mais elle ne tiendrait compte ni du long terme à prévoir pour les mesures de politique économique du régime de paix ni des postulats adoptés par les chambres.

Lorsque les activités du contrôle des prix s'étendaient en quelque sorte à tous les domaines et que l'on n'était pas absolument au clair sur la possibilité de maintenir certaines d'entre elles en se fondant sur les articles économiques de la constitution, il pouvait être justifié de les énumérer dans un seul arrêté, au titre de la protection des consommateurs. Maintenant qu'il ne s'agit plus que de l'accomplissement de quelques tâches isolées, il est indispensable de créer des bases légales variant selon la nature de ces tâches.

Il est certainement juste, du point de vue constitutionnel, de ne pas demander au peuple et aux Etats de voter une seconde fois au sujet de

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tâches durables de politique économique généralement admises, sur lesquelles la Confédération est déjà en droit de légiférer en vertu des articles économiques de la constitution. Il convient donc de ne soumettre au peuple et aux Etats, en posant le problème de façon claire et nette, qu'un additif constitutionnel d'une durée limitée portant sur des mesures également limitées dans le temps.

La grande majorité des gouvernements cantonaux et des associations économiques ont approuvé notre proposition de régler séparément -- par des arrêtés à l'échelon législatif fondés sur les attributions que confèrent déjà les articles économiques de la constitution -- la surveillance des prix des marchandises protégées, la caisse de compensation des prix des oeufs et le contrôle des fermages. Nous vous adresserons en temps utile les messages et projets y relatifs.

La constitution ne contient en revanche aucune disposition qui pourrait servir de base au maintien du contrôle des loyers, de la protection des locataires (limitation du droit de résiliation) et de la caisse de compensation des prix du lait ou à l'adoption de prescriptions sur les prix de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur. H convient par conséquent de rendre possible ce maintien en adoptant l'additif constitutionnel joint au présent message, II. Enquête auprès des gouvernements cantonaux et des associations de l'économie Par circulaire du 3 décembre 1958, le département fédéral de l'économie publique a soumis deux questions aux gouvernements cantonaux et aux associations faîtières de l'économie, ainsi qu'aux autres organisations intéressées.

Il leur demandait d'une part s'ils pensaient qu'il conviendrait de proroger après 1960 certaines mesures du contrôle des prix fondées sur l'additif constitutionnel en vigueur, et lesquelles. Il les priait d'autre part d'indiquer s'ils estimaient qu'il serait judicieux de faire, à cette occasion, une distinction entre les tâches limitées dans le temps et les tâches permanentes du contrôle des prix, de ne pas englober ces dernières dans le projet d'additif constitutionnel d'une durée limitée, mais d'en faire l'objet d'arrêtés à l'échelon législatif fondés sur des dispositions déjà existantes de la constitution.

A. LES QUESTIONS POSÉES Voici la teneur des questions posées dans cette
enquête : I. Contrôle dea loyers: 1. Pensez-vous que l'on puisée renoncer, à partir du 1er janvier 1961, à accorder à la Confédération la compétence d'édicter des prescriptions au sujet des loyers ?

(Le terme de loyer, lorsqu'il est utilisé dans ces questions, comprend toujours aussi, pour simplifier, la notion de fermages non agricoles.)

451 2. Au cas où cette compétence serait maintenue, êtes-vous d'avis qu'il faudrait en limiter la durée à quatre ans (comme jusqu'ici) ou à une période plus courte ou plus longue î 3. L'ampleur du contrôle des loyers (c'est-à-dire les catégories de choses louées qu'il peut englober) devrait-elle, à votre avis, être fixée dans l'arrêté d'exécution ou dans la constitution elle-même?

4. a. Les règles en ce qui concerne la réduction ou l'assouplissement du contrôle des loyers doivent-elles comme jusqu'ici figurer dans l'arrêté d'exécution ou faut-il ancrer les principes de cette réduction dans la constitution elle-même 2 6. Si vous proposez d'introduire dans la constitution une disposition au sujet de la réduction du contrôle des loyers, aa. Cette réduction doit-elle être liée à certaines conditions ? Si oui, lesquelles ?

66. Doit-on accorder aux cantons la compétence de supprimer le contrôle des loyers par régions, pour certaines catégories d'immeubles, ou seulement prévoir, comme jusqu'ici, que les gouvernements cantonaux pourront faire des propositions dans ce sens au Conseil fédéral î II. Protection des locataires (limitation du droit de résiliation); 1. Estimez-vous que l'on puisée renoncer, à partir du 1er janvier 1961, à conférer au Conseil fédéral la compétence de prendre des mesures pour la protection des locataires (limitation du droit de résiliation) ?

2. Question particulière aux gouvernements cantonaux: Quelles sont vos expériences en-matière de protection des locataires î III, Caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers:] 1. Pensez-vous que l'on puisse renoncer, à partir du l«r janvier 1961, à la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitière ou qu'il conviendra de la maintenir ?

2. Si vous admettez qu'il faudra la conserver, êtes-vous d'avis qu'il faudrait prévoir ce maintien pour quatre ans (comme jusqu'ici) ou pour une période plus courte ou plus longue î 3. a. Etes-vous d'avis qu'il faut prévoir dans la constitution une limitation des prestations de la caisse, par exemple par les mots «tout au plus dans les mêmes limites que jusqu'ici » ?

6. Faut-il comme jusqu'ici laisser aux dispositions d'exécution le soin de régler la démobilisation de cette caisse ou êtes-vous d'avis qu'il vaudrait mieux en parler dans l'additif constitutionnel lui-même ?
c. Convient-il, à votre avis, d'exclure expressément l'octroi de subsides émanant de ressources générales de la Confédération, ou, en d'autres termes, les prestations de la caisse devraient-elles être limitées de telle façon qu'elles ne dépassent pas ses ressources normales (produit des taxes sur le lait et la crème de consommation, produit du droit de douane supplémentaire sur le beurre) ?

IV, Promulgaticn de prescriptions sur les prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marcile intérieur: 1. Estimez-vous que l'on puisse renoncer, à partir du 1er janvier 1961, à une disposition constitutionnelle particulière au sens de l'article 2 de l'additif constitutionnel rlii 26 septembre 1952/22 décembre 1955 ?

Cet article 2 a la teneur suivante : «Si le Conseil fédéral propose à l'Assemblée fédérale d'édicter des prescriptions sur les prix maxima de marchandises de première nécessité destinées au

452 marché intérieur, il est autorisé a mettre lui-même ces prescriptions immédiatement en vigueur.

Ces prescriptions cesseront de porter eSet si, au cours de la session qui suit leur entrée en vigueur, l'Assemblée fédérale ne les approuve pas par un arrêté fédéral soumis au référendum.» 2. Si vous pensez qu'il sera nécessaire de maintenir une telle disposition: Etes-vous d'avis qu'il faudrait prévoir ce maintien pour quatre ans (comme jusqu'ici) ou pour une période plus courte ou plus longue ?

V, Contrôle des fermages agricoles, prix des marchandises protégées, caisse de compensation pour les a}up: Partagez-vous l'avis que le contrôle des fermages doit se fonder sur l'article Slbis, 3e al., lettre 6, les prescriptions sur les prix des marchandises protégées sur l'article 316is, 3e al., lettres a et 6, et la caisse de compensation des prix des oeuf« sur l'article Slbis 3e al., lettre 6, de la constitution fédérale et que, par conséquent, il n'est pas nécessaire de mettre sur pied une disposition constitutionnelle particulière pour justifier ces mesures ?

B. L'ATTITUDE ADOPTÉE PAR, LES GOUVERNEMENTS CANTONAUX ET LES ASSOCIATIONS ÉCONOMIQUES Nous résumerons ci-après, aussi brièvement que possible, les avis que nous avons reçus: 1. Contrôle des loyers a. Nécessité du maintien Tous les cantons (à l'exception d'un seul qui n'a pas répondu, le contrôle ayant été supprimé sur son territoire) sont d'avis que la Confédération devra pouvoir maintenir le contrôle des loyers même après le 31 décembre 1960. Cette opinion n'est accompagnée de réserves que dans des cas tout à fait isolés. Ainsi le canton d'Unterwald-le-Haut propose de ne maintenir le contrôle des loyers que pour les villes et les localités de plus de 5000 habitants. Le canton de Thurgovie, pour sa part, estime que le contrôle des loyers devra être maintenu s'il n'est pas possible de procéder, en 1959 et 1960, à d'importants assouplissements.

Ainsi qu'il fallait s'y attendre, les opinions exprimées à ce sujet par les associations économiques divergent fortement. Se sont prononcés pour la suppression du contrôle des loyers, outre les organisations de propriétaires immobiliers, avant tout l'union suisse du commerce et de l'industrie, l'union centrale des associations patronales suisses, la ligue suisse des femmes catholiques, l'association suisse des banquiers, la majorité des membres de l'union des banques cantonales suisses, la société suisse des entrepreneurs et la société suisse des ingénieurs et des architectes. Ces associations font surtout valoir des arguments de principe et d'ordre économique général contre le contrôle des loyers.

Les associations suivantes, entre autres, estiment en revanche que l'on ne pourra pas se passer du contrôle des loyers à partir du 1er janvier 1961 :

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union suisse des locataires, union suisse pour l'amélioration du logement, union syndicale suisse, fédération suisse des syndicats chrétiens nationaux, union suisse des syndicats autonomes, association suisse des syndicats évangéliques, communauté d'action nationale des salariés, fédération des sociétés suisses d'employés, alliance des sociétés féminines suisses, union suisse des coopératives de consommation, fédération des coopératives Migros, union suisse des paysans. La banque nationale suisse est aussi de cet avis. L'union suisse des arts et métiers reconnaît qu'il n'est guère possible de renoncer à une nouvelle prorogation du contrôle des loyers ; elle en signale toutefois les graves inconvénients d'ordre économique et fait dépendre son approbation de la condition que le contrôle soit aboli progressivement mais rapidement, d'ici à la fin de la période de validité du nouvel additif constitutionnel. Les associations qui approuvent le maintien du contrôle des loyers sont d'avis qu'il doit être prorogé du fait de la situation régnant sur le marché du logement ; elles estiment qu'une suppression d'ici à la fin de 1960 ne serait pas admissible, étant donné la hausse des loyers à laquelle il faudrait s'attendre et les répercussions qui en résulteraient sur le plan économique.

b. Limitation dans le temps S'exprimant sur la question de la limitation dans le temps de la compétence accordée à la Confédération en matière de contrôle des loyers, la majorité des gouvernements cantonaux estiment que la durée devrait en être de quatre ans. Saint-Gall et Neuchâtel pensent que l'on pourrait se contenter d'une période de trois ans, Lucerne, Uri et Zoug se prononcent même pour deux ans.

Parmi les associations économiques, celles qui se prononcent (parfois sous réserve) pour une durée de quatre ans prédominent également. L'union centrale des associations patronales suisses, l'association suisse des banquiers, la société suisse des entrepreneurs, la ligue suisse des femmes catholiques, l'union des banques cantonales suisses et les organisations de propriétaires d'immeubles opinent en revanche, pour le cas où le contrôle serait maintenu, en faveur d'une limitation à deux ans.

c. Champ d'application Tous les cantons sont d'avis que la délimitation du champ d'application ne devrait se faire qu'à l'échelon législatif.
Parmi les associations économiques, les opinions ne divergent guère.

La plupart d'entre elles estiment que le champ d'application devrait être réglé à l'échelon législatif.

d. Réduction Les cantons de Lucerne, Zoug, Fribourg, Baie-Campagne, Appenzell Rhodes-extérieures, Saint-Gall, Argo vie et Thurgovie désirent que le

454

principe d'une réduction graduelle du contrôle des loyers figure dans l'additif lui-même alors que la majorité des cantons préféreraient que la question soit réglée à l'échelon législatif. La plupart des cantons estiment en outre que les conditions auxquelles serait liée cette réduction ne devraient pas être énoncées dans la constitution. Les cantons qui s'expriment sur la question des conditions d'une réduction estiment qu'il faudra tenir compte de la situation sur le marché du logement. Neuf gouvernements cantonaux sont d'avis qu'une disposition de l'additif constitutionnel devrait faire dépendre la réduction de la situation sur le marché du logement.

Les organisations suivantes, parmi d'autres, demandent que l'idée d'une démobilisation trouve déjà d'une façon ou d'une autre son expression dans un acte à l'échelon de la constitution: union suisse des propriétaires immobiliers, fédération romande des intérêts immobiliers, union suisse du commerce et de l'industrie, association suisse des banquiers, union des banques cantonales suisses, union centrale des associations patronales suisses, union suisse des arts et métiers, ligue suisse des femmes catholiques, fédération des coopératives Migros et union suisse des syndicats autonomes.

Les organisations qui préféreraient que la question de la réduction du contrôle soit laissée en repos jusqu'au moment où l'on préparera l'arrêté d'exécution sont l'union suisse des locataires, l'union syndicale suisse, la fédération suisse des syndicats chrétiens nationaux, l'association suisse des syndicats évangéliques, la fédération des sociétés suisses d'employés, l'union suisse des coopératives de consommation, l'union suisse des paysans, l'union des villes suisses et l'alliance des sociétés féminines suisses. La banque nationale suisse s'est prononcée dans le même sens que ces organisations.

Seules cinq associations économiques, dont aucune ne fait, à vrai dire, partie de ce qu'il est convenu d'appeler les organisations de faîte, sont d'avis que l'additif constitutionnel doit déjà subordonner à certaines conditions la réduction du contrôle des loyers.

e. Compétence accordée aux cantons

Les gouvernements cantonaux et les associations économiques n'ont pas tous répondu à la question de savoir s'il conviendrait éventuellement d'introduire dans l'additif constitutionnel une disposition accordant aux cantons certaines attributions en ce qui concerne la suppression du contrôle des loyers. Lucerne, Unterwald-le-Haut et lé-Bas, Glaris, Fribourg, Appenzell Bhodes-extérieures, Argovie, les Grisons et Neuchâtel estiment que les cantons devraient recevoir la compétence de supprimer le contrôle par régions ou par catégories d'immeubles. Berne, Zoug, Baie-Ville, BaieCampagne, Saint-Gali, Thurgovie et le Tessin préféreraient que les gouvernements cantonaux n'aient que le droit de faire des propositions dans ce sens. Parmi les organisations, l'union suisse des propriétaires immobiliers, la fédération romande des intérêts immobiliers, l'union suisse du commerce et de l'industrie, l'union centrale des associations patronales

455

suisses, l'union suisse des arts et métiers, l'association suisse des banquiers, la société suisse des entrepreneurs, la société suisse des ingénieurs et architectes, la fédération suisse des importateurs et du commerce du gros et la fédération des coopératives Migros voudraient que les cantons eussent le droit de supprimer le contrôle par région ou par catégories. L'union suisse des locataires, l'union suisse pour l'amélioration du logement, l'union suisse des coopératives de consommation, la fédération suisse des syndicats chrétiens nationaux et l'union suisse des syndicats autonomes sont d'avis que les cantons devraient seulement avoir le droit de faire des propositions.

2. Protection des locataires (limitation du droit de résiliation et prolongation des délais de résiliation)

Les cantons de Zurich, Berne, Lucerne, Uri, Schwyz, Fribourg, Soleure, Baie-Ville, Baie-Campagne, Schaffhouse, Saint-Gall, Grisons, Tessin, Vaud, Valais, Neuchâtel et Genève estiment que l'on ne saurait renoncer à la protection des locataires. Unterwald-le-Bas, Glaris, Zoug, Appenzell Rhodes-extérieures, Argovie et Thurgovie pensent que l'on pourrait s'en passer. Bien qu'il se prononce pour le maintien du contrôle des loyers, principalement à cause des villes, le canton de Berne fait observer que le champ d'application dudit contrôle est actuellement très limité sur le territoire cantonal et que, par conséquent, la limitation du droit de résiliation en tant que l'un des aspects du contrôle des loyers a bien perdu de son importance. S'exprimant sur les expériences faites en matière de protection des locataires, certains cantons soulignent l'importance qu'a cette protection à titre préventif alors que d'autres insistent sur les effets utiles qu'elle exerce lorsqu'on y fait appel. Ces préavis font valoir soit que la protection des locataires empêche les propriétaires d'user du droit de résiliation en vue d'obtenir des hausses de loyer illégales, soit --- d'une façon toute générale -- que la limitation du droit de résiliation permet d'atténuer les rigueurs qui découlent souvent de ce droit. Les cantons qui considèrent la protection des locataires comme inutile font valoir qu'elle est souvent invoquée par des personnes qui ne se sont pas dans une situation particulièrement difficile ou qui n'en sont pas dignes pour un autre motif. Parmi les associations, l'union suisse des propriétaires immobiliers, la société suisse des entrepreneurs, l'union centrale des associations patronales suisses, l'union suisse des arts et métiers, l'association suisse des banquiers, la ligue suisse de femmes catholiques et l'association suisse des commerces de denrées alimentaires avec succursales approuveraient sans réserve que l'on renonce à la protection des locataires. L'union suisse du commerce et de l'industrie, la fédération romande des intérêts immobiliers et l'union des banques cantonales suisses voudraient que l'on renonce à la protection mais à la condition qu'on puisse maintenir la possibilité de prolonger les délais de résiliation, forme la plus atténuée de la protection des locataires.

456 3. Caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers

a. Nécessité du maintien Tous les cantons sauf deux considèrent qu'il est nécessaire de proroger la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers. D'une façon générale, leur avis est principalement fondé sur le fait qu'une suppression subite et complète de la caisse entraînerait une hausse du prix de détail et contribuerait ainsi au renchérissement du coût de la vie. Certains cantons redoutent aussi qu'il en résulte un effet nuisible sur le placement. Le demicanton d'Appenzel Rhodes-extérieures se prononce contre le maintien de la caisse, considérant qu'il est contraire au bon sens que la population citadine bénéficie d'un abaissement du prix du lait aux dépens des montagnards. Le canton du Valais est lui aussi adversaire du maintien de la caisse, parce que l'agriculture est ainsi privée des ressources qui lui reviennent au titre de l'article 26 de la loi sur l'agriculture et dont elle aurait besoin pour faciliter le placement, dans la lutte contre la forte concurrence étrangère. Il est d'avis que les grandes villes pourraient supporter une hausse du prix du lait et qu'il n'est pas juste d'utiliser les taxes perçues dans le pays tout entier en vue d'abaisser le prix du lait avant tout dans les centres de consommation.

Parmi les organisations de faîte de l'économie et les autres organisations intéressées, ce sont notamment celles de l'industrie, des arts et métiers et du commerce de gros qui demandent que l'on renonce au maintien de la caisse. Elles estiment qu'il n'en résulterait qu'une hausse pour ainsi dire insignifiante du coût de la vie, A leur avis, les effets nuisibles sur le placement du lait ne seraient probablement que de très courte durée, les allocations versées pour abaisser le prix du lait ne jouant strictement aucun rôle pour la très grande majorité des consommateurs. Bien ne justifie, à leurs yeux, le maintien d'un abaissement de prix pour un bien de consommation, abaissement opéré pour une part au moyen de ressources fiscales et pour une autre au détriment des régions moins favorisées. Ces organisations estiment qu'il faut en revenir à la conception originale de la loi sur l'agriculture en ce qui concerne l'utilisation de la taxe sur le lait et la crème de consommation ainsi que sur les importations de beurre. En revanche, les groupements de salariés, de même
que l'alliance des sociétés féminines suisses et la ligue suisse des femmes catholiques se prononcent en faveur du maintien de la caisse de compensation des prix, en avançant, pour l'essentiel, des arguments semblables à ceux des cantons qui expriment le même avis. L'union suisse des syndicats autonomes opine pour la suppression de la caisse s'il n'en résultera pas un renchérissement sensible du coût de la vie. L'union suisse des paysans et l'union centrale des producteurs suisses de lait sont d'avis qu'ü faut maintenir la caisse pour éviter les répercussions indésirables d'une brusque suppression. Elles soulignent toutefois que l'agriculture a toujours défendu l'idée d'un prix à la consommation

457

qui corresponde aux frais réels et considèrent qu'il convient d'en revenir à longue échéance à un tel prix. Il n'existe, à leurs yeux, pas non plus de rapport nécessaire entre la caisse de compensation des prix du lait, en tant qu'instrument de politique sociale, et la loi sur l'agriculture. Les deux organisations estiment par conséquent qu'il y aurait lieu de modifier le nom de la caisse et son mode de financement. Considérant les effets d'une suppression sur les prix, l'union suisse des acheteurs de lait et l'union suisse du commerce de lait, beurre et fromage se prononcent pour le maintien temporaire de la caisse. La seconde de ces deux organisations propose le maintien permanent de la caisse avec des ressources réduites, en vue de compenser les hausses passagères des frais. L'union syndicale suisse considère aussi que la compensation des frais de transport qu'assumé la caisse est une tâche à longue échéance. L'union des coopératives suisses de consommation, la fédération des coopératives Migros et l'union des villes suisses approuvent également le principe du maintien. De l'avis de la banque nationale suisse, la caisse devrait être conservée temporairement pour éviter des hausses de prix et maintenir le pouvoir d'achat de l'argent.

b. Limitation dans k temps Pour le cas où la caisse de compensation des prix serait maintenue, la grande majorité des cantons et la plupart des organisations économiques de faîte déclarent, en tant qu'ils se prononcent sur ce point, qu'une période de quatre ans, comme jusqu'ici, est appropriée. Berne, Baie-Ville, Soleure et Schaffhouse admettent que la validité doit être d'au moins quatre ans, tandis que Saint-Gali et Neuchâtel proposent une durée de trois ans et Unterwald-le-Haut un laps de temps de deux ans. L'union centrale des associations patronales suisses et l'union suisse des acheteurs de lait estiment également qu'une période de deux ans est suffisante. La fédération suisse des importateurs et du commerce de gros demande que l'on maintienne la caisse pendant trois ou quatre ans, alors que l'association suisse des commerces de denrées alimentaires avec succursales estime que la durée la plus courte sera la meilleure. L'union suisse des paysans et l'union des coopératives suisses de consommation préconisent une validité de plus de quatre ans, c'est-à-dire de
six ans.

c. Limitation des prestations A l'exception de Zurich, Uri, Unterwald-le-Haut et lé-Bas, Saint-Gali et Genève, tous les cantons s'opposent à ce que l'on prévoie dans l'additif constitutionnel lui-même une limitation des prestations de la caisse. La majorité des organisations de faîte, en tant qu'elles se sont prononcées expressément sur ce point, repoussent également cette idée. D'une façon générale, on estime peu judicieux de limiter dans l'additif constitutionnel

458 les prestations de la caisse, étant donné l'éventualité d'une rapide modification des circonstances. L'union centrale des producteurs suisses de lait propose de mentionner par leur titre dans l'additif les prestations accordées jusqu'ici, mais elle repousse l'idée d'en limiter la valeur, étant d'avis que dans un tel cas, on ne pourrait faire autrement que de reporter les frais croissants de l'approvisionnement en lait sur le prix de détail du lait.

D'aucuns pensent qu'une limitation des prescriptions figurant dans l'additif constitutionnel fournirait aux organes d'exécution l'appui voulu pour prendre les mesures de démobilisation qui sont nécessaires.

d. Réduction La majorité des cantons et des associations s'opposent à ce qu'on règle dans l'additif constitutionnel lui-même la suppression de ces mesures de compensation des prix, estimant que des dispositions d'exécution n'ont rien à faire dans la constitution et qu'une telle réglementation ne serait pas judicieuse. D'ailleurs, même les cantons et les organisations de faîte qui approuvent cette idée désirent généralement, en tant qu'ils s'expliquent de façon détaillée, que l'on ne fixe dans l'additif que le principe de la démobilisation, en laissant aux dispositions d'exécution le soin d'en régler les modalités.

e. Exclusion de subsides provenant des ressources générales de la Confédération La plupart des cantons et des organisations économiques ne sont pas d'avis qu'il conviendrait d'exclure expressément, dans l'additif lui-même, l'octroi de subsides fédéraux. Ils motivent généralement cette opinion en faisant valoir que, sans subventions, la caisse ne pourrait atteindre que partiellement son but et qu'il n'est pas certain qu'elle puisse se passer de subsides de la Confédération à l'avenir. Les cantons de Zurich, Uri, Unterwald-le-Haut, Lucerne, Schaffhouse et Grisons, de même que les associations de faîte de l'industrie, des arts et métiers et du commerce de gros, approuvent expressément l'idée d'exclure, dans l'additif, l'octroi de subsides fournis par les ressources générales de la Confédération. Pour ce qui est des représentants des consommateurs, la ligue suisse des femmes catholiques propose aussi, expressément, d'exclure les subsides fédéraux, mais de le faire dans la législation d'exécution. Plusieurs de ceux qui approuvent l'idée
d'exclure les subsides relèvent que la caisse ne vise qu'à une péréquation des charges et devrait par conséquent snbvenir elle-même à ses frais. Zurich exprime l'avis que dans l'actuelle période de prospérité économique l'approvisionnement en denrées alimentaires de base devrait en principe s'opérer sans subsides de l'Etat.

459 4. Prescriptions sur les prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur

La majorité des cantons et des organisations approuvent l'idée de conserver à la Confédération la faculté d'édicter des prescriptions sur les prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur, ou plus exactement de maintenir les dispositions constitutionnelles qui règlent l'exercice de cette compétence. Parmi les cantons, seuls Unterwald-le-Haut et Zoug se sont prononcés contre l'insertion d'une disposition correspondant à l'article 2 de l'additif constitutionnel en vigueur. Parmi les organisations économiques, l'union centraledes asso ciations patronales suisses, l'union suisse des arts et métiers, la fédération suisse des importateurs et du commerce de gros, l'union suisse des acheteurs de lait et l'association suisse des commerces des denrées alimentaires avec succursales se sont exprimées sans réserves contre le maintien de cette compétence. La majorité des organisations groupées au sein de l'union suisse du commerce et de l'industrie ont également pris position dans ce sens. Elles estiment que cette compétence n'est plus nécessaire du moment que notre approvisionnement est normal et que l'on peut faire appel dans les périodes troublées à la loi sur la préparation de la défense nationale économique. D'aucuns ont aussi fait valoir qu'il n'est pas nécessaire d'avoir des lois «en réserve».

Pour ce qui est de la durée à donner à la disposition de l'additif constitutionnel, les gouvernements cantonaux et les associations économiques sont en majeure partie d'avis qu'il faudrait de nouveau prévoir une période de quatre ans. Seul le canton de Neuchâtel propose une durée plus courte (trois ans). Les cantons d'Unterwald-le-Bas, Soleure, Appenzell Rhodesextérieures, Saint-Gali, Vaud et Genève, de même que l'union suisse des paysans, l'union syndicale suisse, l'union suisse des syndicats autonomes, l'union des coopératives suisses de consommation, la fédération des coopératives Migros ainsi que la banque nationale suisse ne verraient pas d'inconvénient à une durée de validité plus longue, voire à ce que l'on renonce à une limitation dans le temps.

5. Contrôle des fermages, surveillance des prix des marchandises protégées, caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs

Aucun gouvernement cantonal ne conteste la thèse posée sous chiffre V du questionnaire, à savoir que le contrôle des fermages agricoles, la surveillance des prix des marchandises protégées et la caisse de compensation des prix des oeufs doivent se fonder sur l'article 3 lots, 3e alinéa, lettres a ou Ô, de la constitution. Tous estiment qu'il n'est par conséquent pas nécessaire de mettre sur pied une disposition constitutionnelle partioulièro pour asseoir ces mesures. Les organisations économiques sont également toutes de cet avis et approuvent la procédure proposée, sauf l'union syndicale

460

suisse, l'union suisse des locataires et l'association suisse des commerces de denrées alimentaires avec succursales, qui expriment des doutes à ce sujet. L'union syndicale suisse craint que le fait d'insérer dans divers actes législatifs les dispositions qui étaient jusqu'ici groupées dans l'additif n'ait pour effet de mettre en danger, dans la votation populaire, le maintien du contrôle des loyers, de la protection des locataires et de la caisse de compensation des pris du lait. Elle estime que cette séparation des matières n'est pas non plus acceptable en fait, le contrôle des loyers et le contrôle des fermages, d'une part, et les deux caisses de compensation, d'autre part, étant des institutions juridiques analogues. Les cantons de Schwyz, Baie-Ville et Neuchâtel, de même que l'union des coopératives suisses de consommation, la fédération suisse des syndicats chrétiens nationaux, la fédération suisse des ouvriers sur bois et du bâtiment et l'alliance des sociétés féminines suisses repoussent eux aussi, pour des raisons pratiques, l'idée de fonder sur l'article Slbis, 3e alinéa, lettre a ou b, de la constitution le contrôle des fermages, les prescriptions sur les prix des marchandises protégées et la caisse de compensation des prix des oeufs.

III. La situation économique Notre économie est encore, d'une façon générale, dans une phase de prospérité laissant, à vrai dire, apparaître certaines différences selon les branches. Les chiffres concernant le commerce extérieur, la production, l'emploi et la consommation sont encore élevés, mais ils n'en dénotent pas moins souvent une certaine régression comparativement aux records enregistrés tout récemment dans la phase de suroccupation. La concurrence étrangère se fait plus fortement sentir dans diverses branches.

Depuis le milieu de 1958, le niveau des prix dans le pays dénote une stabilité à laquelle on n'était plus habitué ces dernières années, et qui résulte de l'affaiblissement de l'essor général des affaires, de la concurrence accrue et de la baisse des prix des matières premières. Il serait toutefois prématuré d'en conclure que les tendances à la hausse des prix sont maintenant surmontées définitivement. Si les affaires devaient reprendre l'essor d'il y a deux ans, il y aurait lieu de s'attendre dans un proche avenir à de nouvelles augmentations
des frais dues au relèvement des salaires --· en relation aussi avec la réduction de la durée du travail -- et à des hausses de prix touchant des secteurs restés stationnaires jusqu'ici, comme celui des loyers et d'autres encore. C'est essentiellement du cours que prendront les affaires que dépend la réponse à la question de savoir à quel point les mesures de rationalisation et la pression exercée par la concurrence parviendront à freiner le mouvement des prix. Sur ce point, le développement de nos relations commerciales avec l'étranger aura une importance capitale.

461 L'évolution des prix à la consommation dans différents pays de 1953 à 1968 (1953 = 100) ......

:.

Paye . -. . ·

Allemagne occidentale . . . . .

Angleterre . .

Danemark . .

France . . .

.

Italie . . . .

Pava-Bas Suède

. . .

. .

Etats-Unis d'Amérique

. . . .

1954

1955

1956

1957

1958

100

102 . 106 101 101 107 101 105 106 104 102 100

105 112 104 102 113 103 109 108 109 103 102

106

no

116 107 106 116 106 110 .. 11* 113 105 105

119 108 108 1.17 122 113 117 119 107 108

102 101 101 101 100 103 104 101 101 100

..

Source: Bureau international du travail

Dans les pays qui revêtent le plus d'importance pour nos relations commerciales, les prix à la consommation ont généralement augmenté plus fortement qu'en Suisse ces dernières années. Les prix se sont cependant stabilisés l'an dernier dans tous ces pays, et ont même enregistré une légère baisse dans certains. Il serait toutefois prématuré d'en tirer des conclusions pour l'avenir.

Cette évolution n'en requiert pas moins toute notre attention. Pour que notre économie reste à même d'affronter la concurrence, il est de toute importance que le niveau des prix et des frais ne devienne pas plus défavorable chez nous qu'à l'étranger. Les adaptations inévitables dans le domaine des prix, telles celles auxquelles il faudra procéder pour les loyers, le lait et les tarifs des chemins de fer par exemple, doivent pouvoir être opérées avec mesure et progressivement, dans les limites de ce qui est supportable pour l'économie dans son ensemble. C'est pourquoi il paraît désirable -- à considérer les choses d'une manière tout à fait générale -- de laisser pour quelque temps encore à la Confédération certaines attributions en ce qui concerne les loyers, la compensation des prix du lait et aussi, compte tenu des circonstances extraordinaires qui peuvent se produire, les prix dès. marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur.

..

Feuille fédérale. 111e année. Vol. II.

33

462

IV. Le contrôle des loyers 1. La situation actuelle Sont aujourd'hui encore soumis au contrôle des loyers les immeubles locatifs et commerciaux non subventionnés qui étaient prêts à être occupés avant le 1er janvier 1947. Ne relèvent pas du contrôle, indépendamment des nouvelles constructions prêtes à être occupées depuis le 1er janvier 1947 : les biens-fonds agricoles affermés, qui sont soumis à des dispositions particulières en matière de contrôle ; les biens-fonds non bâtis, à l'exception des terrains de culture; les garages, les devantures et les surfaces publicitaires en tant qu'ils ne sont pas loués conjointement avec d'autres choses immobilières; les chambres meublées louées dans des conditions usuelles; les appartements de vacances. Sont également exempts du contrôle les loyers des appartements construits avec subventions dès 1942; ils demeurent assujettis à la surveillance des autorités qui ont accordé ces subventions.

Abstraction faite des trois hausses générales qui ont été autorisées, les loyers des choses louées soumises au contrôle ne peuvent être majorés qu'avec la permission des autorités du contrôle des prix. Depuis le 1er janvier 1954, les possibilités d'obtenir des autorisations individuelles de hausse des loyers sont fortement restreintes, contrairement à ce qui était le cas pendant la guerre et les premières années d'après-guerre. Avant cette date, les hausses individuelles pouvaient être accordées tant proportionnellement à la hausse des frais que pour cause de rendement insuffisant. Depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté fédéral du 10 juin 1953, fondé sur l'additif constitutionnel du 26 septembre 1952, les autorisations individuelles ne peuvent plus être accordées que dans deux cas. Le premier est celui où le bailleur augmente ses prestations d'une manière ou de l'autre au bénéfice du preneur, en procédant par exemple à des améliorations à plus-value; le second cas est celui où un loyer licite au 31 décembre 1956 est, par suite de circonstances spéciales, inférieur aux loyers usuels pratiqués dans le quartier pour des immeubles de valeur semblable, construits à la même époque. Des autorisations individuelles en raison d'un rendement insuffisant ou d'une augmentation des frais qui n'est pas due à des travaux entraînant une plus-value ne peuvent plus être accordées aux termes
de la législation actuelle. Si l'on a supprimé -- d'entente avec les associations de propriétaires d'immeubles -- ces possibilités d'adapter individuellement les loyers en cas d'augmentation des frais ou de rendement insuffisant, c'est parce que l'application de cette procédure devenait toujours plus difficile, au fur et à mesure que l'on s'éloignait de l'année de base 1939, et que le maintien du contrôle des loyers n'était plus envisagé que comme un dernier prolongement d'un régime en voie de disparition. Au lieu des adaptations individuelles, il était prévu d'assouplir le contrôle par des hausses générales, par sa suppression pour certaines catégories d'immeubles et par des libérations

463

portant sur des régions ou des localités entières. L'écart existant entre les loyers des constructions anciennes et nouvelles devait aussi être peu à peu ramené à un niveau supportable, permettant de supprimer un jour ou l'autre le contrôle. C'est pourquoi chacun des arrêtés du Conseil fédéral des 1er juin 1954 et 26 novembre 1957 a accordé des autorisations générales de hausser de 5 pour cent les loyers encore soumis au contrôle, après qu'on eût déjà autorisé en 1950 une haussé générale de 10 pour cent. De plus, l'arrêté du Conseil fédéral du 1er décembre 1958 a entièrement supprimé le contrôle des loyers dans les cantons d'TJnterwald-le-Haut et lé-Bas et les deux Appenzell, à l'exception de la commune de Hérisau.

Il faut bien constater que l'on n'est pas parvenu à faire, avec cette réglementation appliquée depuis plus de cinq ans, les progrès que l'on escomptait à l'origine. L'arrêté fédéral instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit subordonne les mesures générales d'assouplissement à des conditions si sévères qu'il est difficile de prendre des décisions d'une large portée, indispensables pour rétablir un marché libre du logement. Les trois hausses générales autorisées n'ont fait que compenser tout juste le renchérissement généralisé des charges de la propriété immobilière. Ce renchérissement des frais, et notamment la hausse des taux hypothécaires, intervenue en 1957, a cependant aussi exercé ses effets sur les loyers qui ne sont plus soumis au contrôle, de sorte que ceux-ci ont également subi une hausse. Etant donné que les nouvelles constructions sont en général plus fortement grevées d'hypothèques que les anciennes et que la plupart des établissements de crédit hypothécaire ont majoré plus fortement les taux appliqués aux bâtiments neufs, les loyers de ceux-ci ont subi en 1957 et 1958 des hausses parfois plus fortes que ceux des anciennes constructions. L'application de ces hausses de loyer a été facilitée dans une large mesure par le recul enregistré dans la construction de logements l'année dernière et par le fait que le nombre des appartements vacants est tombé à un minimum. Par suite de cette évolution et du. renchérissement constant de la construction, l'écart entre les loyers des bâtiments anciens et ceux des bâtiments nouveaux s'est encore accru
depuis 1957 -- en dépit des diverses autorisations de hausse générales -- partout où une situation tendue permettait de majorer de façon parfois sensible les loyers des bâtiments neufs.

L'évolution, est, à vrai dire, très différente selon les régions et les localités. Dans l'ensemble du pays, l'écart entre les loyers des bâtiments anciens et nouveaux ne s'est peut-être pas accru, mais il ne s'est pas non plus réduit, malgré les deux autorisations de hausse générale de cinq pour cent chacune.

La comparaison ci-après de l'indice des loyers et de l'indice des frais de construction -- ce dernier pouvant être considéré comme déterminant au premier chef, indépendamment du prix du terrain, pour les loyers des

464

bâtiments neufs ---fait ressortir la différence entre les loyers des constructions anciennes et nouvelles. L'indice des loyers s'établissait pour mai 1959, à 145,5 points (1939 = 100) pour l'ensemble des logements, tant anciens que nouveaux, alors que l'indice des loyers des bâtiments construits avant 1940 atteignait 127,0 points. Comparativement, l'indice des frais de construction à Zurich, se montait à 215,1 points au 1er février 1959. La différence entre l'indice des loyers et celui des frais de construction a quelque peu. diminué depuis 1953 puisque [l'indice des loyers dans leur ensemble s'est accru de 20,4 pour cent et celui des loyers des anciens logements de 12,4 pour cent, alors que l'indice des frais de construction n'a augmente que de 8 pour cent.

La différence entre le niveau des loyers et celui des autres éléments du coût de la vie s'est aussi un peu atténué ces dernières années.

Evolution, do 1950 à Ì959, des loyers et des autres éléments pris en considération dans l'indice des prix à la consommation (août 1939 = 100) ' · "· Année mois

:

1950, mai 1951, mai 1951, novembre 1952, mai , 1953 mai .

.

1954, m a i . . . . . . . .

1954, novembre . , .

1956, 1957, 1958, 1959

mai .

mai .

mai . . .

niai .

. . . .

. .

. .

Loyere

de l'ensemble des logements

dea logements construits avant 1940

108,8 = 100 113,4 116,8

104,0 = 100 107,9 110,8 112,3 : 113 .

113,6

:118,7

:

·'·

-·.

120,8 123,0 124,8127,8 131,0 134,1 : 141,1 145,5 = 133,7

117,2 118,7 119,8 : :. .

124,5 127,0 = 122,1

Autres éléments de l'indice des prix à la consommation

170,6 = 100 179,3 184,3 183,9 181,7 181,9 ..

185,1 ·:.· .

183,4. : ·:-.:· ..'

186,0 .

, 188,9 .: ...

192,4 188,8 = 110,7

Jusqu'en 1950, les loyers sont restés manifestement en retard par rapport à l'évolution du niveau général des prix. Es ne se sont accrus que de 9 pour cent de 1939 à 1950 alors que les autres éléments de l'indice des prix à la consommation ont subi une hausse de 71 pour cent. Depuis lors, ces autres éléments ne se sont accrus que de 11 pour cent jusqu'en

465

mai 1959 alors que les loyers augmentaient de 34 pour cent. C'est dire que les loyers se sont tout de même un peu rapprochés ces dernières années du niveau général des prix.

2. Construction de logements En dépit des chiffres-records enregistrés dans la construction de 1954 à 1957 et du fait que l'activité, comparativement à certaines périodes précédentes, a été encore considérable dans ce domaine l'an dernier, la situation du marché du logement ne s'est pas améliorée.

Construction de logements dans 42 villes Années

1952 J953

. . . .

1954 1953 1956 1957 1958

. . . .

. . . .

. . . .

. . . .

1958 1er t.rimeüfa-n

Logements neufs cons truite

Autorisations de construire

14274 14 550

16 498 16 735 16 519 18 384 12 423

14 840 19 374 2l 411 23 146 18 123 14 468 17 674

3 181

2 786

2 '69

5 012

Diminution du nombre, dea logements par suite de démolition, etc.

786

1159 1408 1776 2099

1756 1701

1959 1er trimestre

Logements ncuts construits dans les communes de plus de 1000 habitants de 1926 à 1958 Périodes ou années

1926/1929 1930/1934 1935/1939 1940/1945 1946/1950.

1951/1953 1954/1957

1958

. .

. . . .

. , .

:

Chiffre absolus

Chiffres exprimés pour 1000 habitants

12 553

40 56

17 187 8 638 7 178 14 129

25 862 34 313 23 176

2,8

2,1 53 66

88 59

466

La construction de logements a marqué un recul en 1958 et n'a plus atteint les chiffres-records des années 1954 à 1957. La production de l'an dernier n'en a pas moins été plus élevée que celle des meilleures années d'avant-guerre, soit celle de 1930/1934. De plus, l'augmentation du nombre des autorisations de construire indique que la construction va reprendre son élan. C'est ce qui ressort également du nombre des logements en voie de construction; avec 14425 pour 42 villes, ce nombre était déjà un peu plus élevé au début de l'année 1959 que celui des logements terminés au cours de l'année précédente.

Les appartements qui seront construits sur la base de l'arrêté fédéral du 31 janvier 1958 concernant l'encouragement à la construction de logements à caractère social compenseront en outre une partie de ce qui manque.

Aux termes de cet arrêté, entré en vigueur le 1er août 1958, il pourra être construit en quatre ans avec l'aide de la Confédération 10 000 logements dont les loyers seront supportables même pour les familles à revenus modestes. L'aide de la Confédération consistera dans l'octroi de subsides annuels aux propriétaires pendant vingt ans au plus pour le paiement des intérêts du capital engagé. L'ensemble des engagements de la Confédération à cet effet ne dépassera pas 47 millions de francs. L'aide prévue pourra, avec les prestations des cantons, abaisser les loyers jusqu'à un tiers.

3. Le mouvement de l'offre et de la demande L'accroissement massif de la construction de logements de 1954 à 1957 avait permis d'espérer qu'il se produirait rapidement une détente sensible sur le marché du logement. Selon les constatations des offices statistiques de Zurich, Berne et Baie, l'augmentation du nombre des logements a été plus forte ces dernières années que l'accroissement de la population. De 1939 à 1956, la population a augmenté de 26 pour cent à Zurich, de 27 pour cent à Berne et de 25 pour cent à Baie, alors que le nombre des logements s'accroissait dans ces mêmes villes de 40, 41 et 33 pour cent.

L'article consacré au marché du logement dans le Handbuch der Schweizerisch&n Volkswirtschaft, édition de 1955 (volume II, page 640), mentionne que, de 1942 à 1950, le nombre des logements nouvellement occupés a été dans les villes de Baie, Berne et Zurich de 18 à 19 pour cent plus élevé que le
chiffre auquel on aurait pu théoriquement s'attendre au vu du mouvement de la population. Il ajoute, à vrai dire, qu'il serait prématuré de considérer sans plus et dans son ensemble ce surcroît de besoins comme un «gonflement» de la demande. Les chiffres théoriques utilisés pour de telles comparaisons, qui doivent être tirés de conclusions très schématiques, sont loin d'être concluants partout et en tout temps, ceci d'autant moins qu'à côté de mouvements de brève durée, résultant des conditions momentanées, des modifications à -long terme, de caractère tendanciel, subis par

467

les habitudes en matière de logement, ont également exercé leurs effets sur la demande. Certaines de ces modifications, d'ailleurs, peuvent être être considérées comme progrès social.

Depuis lors, la construction s'est développée d'une façon encore beaucoup plus considérable, en particulier de 1954 à 1957. En dépit de cet essor, il s'est cependant produit sur le marché du logement non pas une détente, mais une très nette aggravation.

Le recensement des logements vacants du 1er décembre 1958 a fait apparaître dans toutes les catégories de communes prises en considération, mais en particulier dans les villes, une nouvelle aggravation de la situation.

Logements vacants au 1" décembre, de 1952 à 1958, exprimés en pour-cent de l'ensemble des logements Communes rurales

Villes

1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958

grandes

autres

grandes

autres

0,15 0,10 0,11 0,19 0,11 0,09 0,03

0,18

0,39 0,44

0,43 0,45

0,64 0,85

0,59 0,78 0,78 0,56 0,42

0,22 0,47 0,58 0,46 0,27 0,19

0,65 0,43 0,22

Moyenne de la Suisse

0,27

0,28 0,41 0,85 0,46 0,32 0,20

468

Recensement des logements vacants au 1er décembre 1957 et 1958 dans 42 villes Logements vaoanta Population résidente

Villes

Baie Genève . .

LflrTIPfl.TInfl

. . . . . .

,

.

.

.

L

.

Saint- Gali.. , , . . . . : . . .

Winterthour Lucerne . . .

Bienne . . .

Fï'ibourg Neuchâtel .

Schaffhotise .

Thoune Köniz Cuira . . . . .

.- .

. . .

. . . . . .

,

Soleure , .

Olten Zous: , .

Aarau . . . .

Grätiges . . .

Hiehen . . . .

Uster.

. . . . ' . .

. . . . . .

. . .

. . ,

Bellinzone . . .

L e Lode . . . . .

W^ttlTlg^Tl

.

,

,

Montreux-Châtelard . . .

Bertlloud .

. . .

Baden . . .

. . . . .

Ttorschach . . .

T^rauenfeld Sion . . .

. .

. . . .

Wadpnswil

. . ,

Kreuzungen. . . .

. . . . . .

chiffres absolus

en 1950

1957

1958

390 020 183 543 146 499 145 473 106 807 68011 66925 60 526 48 342 33 300 ·29 005 27 998 25 971 24 157 20 742 19382 18 122 16 743 16 485 14488 14280 14264 13 407 12 650 12 955 12 350 12266 12060 11 979 11 667 11 614 11 586 11 575 11 325 11 114 11 065 10904 10433 10259 10 155 10 118 10045

17 70 57 3 201 25 19 18 5

18 29 16 10 39 9 30 4 6 12 66 21 13 28 34 2 14 1 24 8 8 11 4 1

105 15 48 26 5 36 1 33 6 14 27 4 3 11 5 60

3 94

en pour-cent de l'ensemble des logements

1957

0,0 0,1 0,1 0,0 0,5 0,1 0,1 0,1 0,0 1,3 0,2 0,6 0,3 0,1 0,6 0,0 0,6 0,1 0,3 0,5 0,1 0,1 0,2 0,1 1,1

5 31 6 6 9 41 6 73 1 20 2

a

25

4 9 7 8 32 26 1 15 2 1 7

1958

0,0 0,0 0,0 0,0 0,1 0,0 0,1 0,0 0,0 0,1 0,8 0,2 0,1 0,3 0,4 0,0 0,2 0,0 0,4 0,2 0,2 0,2 0,1 0,0 0,1 1,7 0,1

0,8 0,2 0,2 0,2 1,0 0,2 2,0 0,1 0,8 0,1 0,1 0,7

0,1 0,2 0,2 0,2 0,8 0,7 0,1 0,6 0,1 0,0 0,2

469

Ces rares logements vacants sont, pour la plupart, situés dans des constructions neuves. C'est ainsi par exemple que pas moins de 13 dès 26 appartements vacants à Zurich au 1er janvier 1959 (représentant une proportion de logements vacants de 0,2 pour cent) avaient été construits en 1958.

Dans son rapport sur «La nouvelle réglementation à longue échéance des loyers», de mai 1950, la commission fédérale du contrôle des pris considère comme suffisant pour le rétablissement de la liberté sur le marché du logement un nombre d'appartements vacants d'environ 1 pour cent pour l'ensemble du pays, réparti équitablement entre les catégories de logements les plus demandées et en période de conjoncture moyenne (pages 88 et 114), Ce taux des appartements vacants devrait être de 1% pour cent au moins dans les grandes villes, alors que l'on pourrait se contenter d'un pourcentage plus faible à la campagne. Il est toutefois permis de se demander si le chiffre des logements vacants représente bien une juste mesure de la demande, tant que subsiste le contrôle des loyers.

La cause de cette tension sur le marché des logements réside, indépendamment du recul de l'offre au cours de l'an dernier, dans l'accroissement correspondant de la demande. Les besoins ne sont plus déterminés uniquement par le chiffre des mariages et celui des dissolutions de ménages.

Le besoin d'espace habitable par tête de population s'est constamment accru depuis des dizaines d'années, et non pas seulement depuis le début de la guerre. Cela provient principalement de l'évolution favorable des affaires et des conditions de revenu. L'importance de la demande dépend dans une large mesure du niveau des revenus, en ce sens que plus les revenus sont élevés plus on réclame d'espace pour habiter. Une modification des habitudes en matière de logement contribue aussi à cette évolution; c'est ainsi que le besoin plus marqué qu'ont les jeunes gens d'habiter dans un.

autre logement que leurs parents, l'âge, plus précoce où l'on se marie, etc.

jouent aussi leur rôle. Il est aussi plus fréquent que des personnes seules -- qui se contentaient précédemment d'une chambre meublée -- occupent un logement entier. D'autre part, les couples âgés ou les veufs et veuves vivant seuls sont plus souvent à même qu'autrefois de conserver leur logement grâce à l'amélioration
de la prévoyance sociale.

Si l'ampleur de la demande d'espace habitable dépend, comme on le reconnaît généralement, du niveau du revenu, on peut admettre que là demande subit sur ce point également les effets du niveau des loyers. Cela revient à dire que le maintien des loyers anciens à un niveau bas accroîtrait jusqu'à un certain point la demande et; aurait aussi pour effet de diminuer le nombre des logements .vacants, dans la mesure même où la .demande s'est accrue.

.

. · : · · . .

Un rapport du «sous-comité de l'habitat» de la commission économique pour l'Europe des Nations Unies, du 20 août 1953, intitulé «La politique

470

des loyers dans les pays d'Europe» (page 21) contenait la constatation suivante : La première tendance à laquelle donne naissance le blocage des loyers, c'est la création on l'intensification de la pénurie de logements par suite du grossissement de la demande, mais il est difficile de déterminer quantitativement dans quelle mesure la pénurie actuelle peut être imputée au contrôle des loyers.

Cette constatation se rapporte avant tout aux différents pays d'Europe dans lesquels les conditions sont beaucoup plus difficiles, ce qui fait manifestement mieux apparaître certains effets. Ainsi le contrôle des loyers -- mis sur pied pour parer aux abus résultant du nombre insuffisant des appartements disponibles -- accroîtrait la demande et augmenterait, paradoxalement, la pénurie de logements.

Dans une expertise sur «Le contrôle des loyers et sa future suppression» remise le 31 mars 1959 au département fédéral de l'économie publique, le professeur Hugo Sieber, à Berne, exprime et motive également l'avis que le contrôle des loyers a incontestablement pour effet d'augmenter la demande moyenne d'espace habitable ou, en d'autres termes, de réduire la densité moyenne d'habitation (qu'il n'est, à vrai dire, pas possible d'exprimer en chiffres) et que ledit contrôle a par conséquent aussi des répercussions défavorables sur le nombre des logements vacants. Cette constatation résulte du raisonnement selon lequel la demande de logements subit sans doute jusqu'à un certain point l'influence du niveau des loyers si elle dépend, comme on le reconnaît généralement, du niveau des revenus.

Si donc le contrôle des loyers contribue à, réduire la densité moyenne d'habitation dans les logements anciens, il est aussi, pour une part, la cause du fait que le nombre des logements vacants est actuellement presque partout trop bas et qu'il y a ainsi pénurie.

On admet généralement que le fait d'exercer un contrôle des loyers, c'est-à-dire de maintenir à un niveau bas les loyers des anciens logements, doit avoir pour effet une certaine augmentation de la demande moyenne d'espace habitable, c'est-à-dire une réduction de la densité moyenne d'habitation, et entraîne ainsi des répercussions défavorables sur le nombre des logements vacants. Ce qui est contesté, en revanche, c'est l'ampleur de ces effets, qui, comme l'indique lui-même le professeur Sieber, ne peuvent être chiffrés exactement. Notons à ce propos qu'une augmentation minime, en chiffres relatifs, de la densité d'habitation peut déjà représenter, en chiffres absolus, dans une grande ville une augmentation sensible du nombre des logements vacants.

Si donc il faut considérer que le contrôle des loyers exerce une influence sur la demande, sur la densité d'habitation
et sur le marché du logement en général, il y a lieu d'admettre, en sens inverse, qu'une suppression ou un assouplissement progressif de ce contrôle pourrait faire augmenter l'offre de logements, réduire la demande et accroître dans une mesure

471

correspondante la densité d'habitation. H n'est cependant non plus pas possible d'exprimer par des chiffres quelque peu sûrs l'ampleur de ces effets probables et le temps qu'ils mettraient à se manifester. Quand bien meine le nombre des anciens appartements qui deviendraient ainsi disponibles ne serait pas bien important, il n'en pourrait pas moins exercer sur le marché du logement des effets qui seraient sensibles, précisément pour les couches de la population dont le revenu est modeste. Aujourd'hui, les logements les plus anciens, qui ont perdu de leur valeur par suite du peu de confort qu'ils offrent, restent souvent occupés par des personnes qui pourraient payer des loyers plus élevés mais qui, du fait que le loyer est maintenu bas, n'ont pas intérêt à rechercher un appartement plus moderne. Si de tels logements se trouvaient disponibles, ils pourraient servir, comme c'était le cas précédemment, à satisfaire à bon compte les besoins des classes les plus modestes.

H ne fait pas de doute que la demande subit également les conséquences du fait que les exigences en matière d'équipement moderne des appartements se sont accrues depuis la guerre, parallèlement à l'amélioration du standard de vie. L'expérience prouve que de nombreux couples ayant habité un appartement moderne ne consentiraient à loger dans un appartement moins confortable que s'ils y étaient absolument contraints par les circonstances. C'est ce qui semble expliquer en bonne partie le fait que, ces dernières années, la demande d'appartements a largement dépassé ce que faisait prévoir l'évolution démographique.

On peut d'ailleurs se demander si le chiffre des logements vacants n'a pas perdu de sa valeur en tant qu'indice dans les circonstances actuelles.

Ce serait en effet une erreur de vouloir tabler uniquement sur le nombre restreint des appartements libres pour juger de la situation du marché du logement et d'en conclure que la satisfaction des besoins est aujourd'hui, pour l'ensemble de la Suisse, inférieure à ce qu'elle était à la fin de la guerre.

Le marché est actuellement beaucoup plus différencié qu'alors. Les phénomènes de saturation voisinent avec ceux de pénurie. Ces derniers résultent de conditions tout à fait particulières, qui donnent à penser qu'il s'agit là d'une stiuation de caractère durable, qui ne pourrait être
modifiée qu'en cas de crise ou par des mesures radicales concernant le sol, les communications, la colonisation intérieure et la fiscalité. Dans les grandes villes, l'accroissement de la population est si marqué -- par suite des avantages offerts en ce qui a trait aux perspectives de gain, aux commodités, aux possibilités d'approvisionnement, aux charges fiscales et aux conditions d'ordre social -- qu'il n'y a lieu de prévoir, compte tenu de la réduction progressive des réserves de terrain, une satisfaction de la demande et, par là, l'apparition d'un numbre appréciable de logements libres que dans le cas d'une dépression économique de nature à ralentir l'afflux de population ou même à provoquer des départs. D'ailleurs, le maintien des anciens loyers

472 à un niveau bas favorise le nouvement de concentration dans les villes, en ce sens qu'il accroît la différence en faveur des viHes. Dans les communes voisines des grandes, villes, en revanche, les frais de construction et les prix des terrains constituent un obstacle toujours plus grand à la création de logements. Pour engager la population à se déplacer en grand nombre vers ces communes suburbaines, il faudrait que les loyers y soient beaucoup plus bas qu'en ville. Mais les frais de construction y sont à .peu près aussi élevés.. C'est pourquoi les logements .de ces communes ne sont occupés que faute de mieux, ce qui entraîne de fréquents changements de locataires.

Si la situation reste favorable et si l'on ne modifie pas radicalement la politique suivie actuellement en matière de communications, de colonisation et d'impôts, il n'y a donc pas lieu de s'attendre qu'il se reconstitue, de même dans les faubourgs, un effectif d'appartements vacants d'une certaine importance. C'est dans les petites villes, où les revenus sont relativement favorables et les réserves de terrain suffisantes, qu'on a le plus de chances de voir s'établir un équilibre satisfaisant et un chiffre normal de logements vacants. Si donc, dans les conditions présentes, on entendait faire dépendre exclusivement d'un chiffre normal de logements libres l'assouplissement du contrôle des loyers, il serait tout simplement impossible d'abandonner le régime dirigiste actuel tant que la situation économique resterait favorable.

En cas de crise, il faudrait sans doute renoncer à une démobilisation du contrôle, eu égard à l'évolution des revenus et pour des considérations d'ordre politique. Ainsi, le nombre des logements vacants ne saurait être le seul critère à considérer pour juger de la situation du marché et de la possibilité comme de la nécessité d'assouplir le contrôle des loyers. Il importe au contraire de tenir compte de tous les facteurs déterminants.

Une détente décisive sur le marché du logement pourrait résulter d'une dépression économique sensible et durable. Il n'y a toutefois pas lieu de s'attendre à une telle aggravation ces prochains temps. Dans la situation actuelle, on doit tout au plus s'attendre à un allégement régional, mais non pas général et sensible du marché du logement.

4. Nécessité de prolonger le contrôle
des loyers après I960 et do le réduire graduellement Dans les conditions indiquées ci-dessus, la situation du marché du logement ne s'améliorera probablement pas d'ici à la fin dé 1960 à un point tel que l'on puisse renoncer dès lors immédiatement à tout contrôle des loyers sans fâcheuses répercussions d'ordre économique ou social.

Une suppression soudaine de toutes les restrictions imposées à la propriété immobilière dans une période de pénurie extrême de logements entraînerait de nombreuses hausses de loyers. A la tête de ce mouvement général d'adaptationa des loyers au renchérissement du coût dé la vie; des frais de construction et des prix du sol, on trouverait sans doute lès propriétaires dont les

473

immeubles ne représentent qu'un intérêt financier et qui attendent depuis des années le moment de pouvoir adapter au renchérissement général les rendements nominaux des capitaux engagés. Les propriétaires pour lesquels le rendement d'un ou de plusieurs immeubles est la seule ou la principale source de revenu emboîteraient probablement le pas sans tarder.

Les loyers dee immeubles qui ont changé de -main au cours des dix ou quinze dernières années soit par suite d'un achat soit par suite d'un héritage sont particulièrement exposés à subir des hausses. En effet, si les loyers sont démesurés bloqués, les prix des immeubles ont, eux, augmenté dans une forte mesure conformément à la tendance générale et à l'évolution des prix des terrains. Cette augmentation est, d'une façon générale, au moins égale au renchérissement du coût de la vie. Pour les acquéreurs de ces immeubles, qui ne sont certes pas toujours des personnes vivant dans des conditions financières favorables, la valeur de l'immeuble augmentée par rapport aux loyers bloqués donne un taux de rendement brut qui ne laisse qu'un montant tout à fait insuffisant ou même rien du tout pour l'intérêt du capital investi, n n'y aurait donc pas lieu de s'étonner que ces propriétaires profitent de l'occasion pour accroître les loyers de façon à obtenir un rendement brut normal. Comme Tont montré les expériences faites après la première guerre mondiale, les loyers de nombreux autres logements anciens se trouveraient probablement antraînés dans le mouvement général de hausse, quand bien même on peut admettre que certains bailleurs feraient preuve d'une certaine retenue, due à la résistance des locataires à l'égard des hausses, ou aux relations personnelles entretenues durant des années.

Les estimations de divers experts et des milieux professionnels au sujet dès effets probables d'une suppression du contrôle des loyers divergent fortement. Les estimations les plus élevées tablent sur les frais de reconstitution passablement augmentés en l'état actuel du renchérissement de la construction et portent en compte une certaine moin s-value pour la qualité inférieure des vieux logements d'avant-guerre. On peut cependant objecter que l'état actuel du renchérissement de la construction est, pour une part, dû à la présente période de prospérité économique et ne saurait
être considéré comme définitif. C'est pourquoi il pourrait se produire une réduction des frais de construction. Ces évaluations sous-estiment en outre l'importance de la demande et, par là, les effets de différences de qualité.

La moins-vàlue généralement admise pour les anciens logements résulte d'un calcul établi pour les appartements de toutes les catégories d'âge et pour la moyenne des régions urbaines et rurales; elle est donc trop faible, en particulier si l'on tient compte du fait que les exigences en ce qui concerne l'équipement moderne des logements ont augmenté depuis la fin de la guerre, ainsi que nous l'avons indiqué sous chiffre 3, et qu'il est par conséquent nécessaire de fixer à un chiffre beaucoup plus élevé que jusqu'ici le facteur du vieillissement en ce qui a trait aux anciens logements. Notons

474

d'ailleurs que cette évaluation porte sur la moyenne de la Suisse. La hausse des loyers semble toutefois devoir varier beaucoup selon les conditions locales, dans les villes grandes ou petites ou à la campagne, de même que selon les régions ; elle dépendrait du reste de la situation économique au moment de la suppression du contrôle. Compte tenu de tous les facteurs à considérer, dont il est impossible de prévoir avec certitude l'évolution, on voit qu'il n'est guère possible d'établir une évaluation quelque peu sûre de la hausse des loyers à laquelle il faudrait s'attendre en cas d'abolition du contrôle.

Une chose est cependant certaine, c'est que les hausses de loyers auxquelles il faudrait s'attendre pour les anciens logements détermineraient une montée considérable de l'indice des loyers et par conséquent aussi de l'indice général des prix à la consommation.

Si les loyers des bâtiments construits depuis la guerre subissaient également une certaine majoration -- et c'est là une éventualité qui n'est, à notre avis, pas du tout exclue, étant donnée la pénurie actuelle de logements et les expériences faites en 1957 et 1958 -- la hausse de l'indice des loyers et de l'indice des prix à la consommation serait naturellement d'autant plus marquée. Si l'on tient compte en outre des répercussions qui pourraient se faire sentir sur le niveau des salaires et par là sur les prix des produits agricoles ainsi que des effets d'une hausse d'autres frais de production, on voit en outre clairement que le niveau général des prix et des frais pourrait se relever d'une façon notable.

Les hausses sensibles des loyers auxquelles il y aurait lieu de s'attendre en cas de suppression du contrôle et la spirale des prix et des salaires qui en résulterait montrent qu'il n'est pas possible de rétablir d'un seul coup la liberté pleine et entière sur le marché du logement. Une suppression soudaine du contrôle des loyers pourrait avoir l'avantage de ne jeter qu'un trouble passager (mais profond), ce qui ne serait pas le cas si l'on procédait par étapes. Elle permettrait aussi de renoncer à l'établissement de pourcentages de hausse qui pourraient déterminer certains bailleurs à tirer pleinement parti de ces possibilités quand bien même la nécessité ne s'en ferait pas absolument sentir pour eux. En revanche, une suppression
abrupte aurait le grave inconvénient que toutes les répercussions fâcheuses de la libération des loyers se produiraient partout d'un seul coup, entraînant une rupture excessive de l'équilibre général des prix, étant donnée la différence considérable entre les loyers des anciens et des nouveaux logements. Ainsi que nous l'avons indiqué sous chiffre 3, on ne pourrait, d'autre part, même pas compter avec certitude que la hausse des loyers résultant de cette libération accroîtrait l'offre d'appartements dans une mesure décisive et dans le laps de temps voulu et qu'elle déterminerait ainsi une détente sur le marche" du logement.

Il convient avant tout d'éviter que les hausses de loyers ne prennent en un bref laps de temps des proportions de nature à entraîner des réper-

475

eussions indésirables dans le domaine de l'économie nationale, ébranlant tout l'équilibre du coût de la vie. Le contrôle des loyers a, jadis, été instauré entre autres pour parer à une menace portant sur l'équilibre général de nos prix par rapport à l'étranger. Il importe de tenir compte de cet aspect de la question également lors de l'assouplissement du contrôle et de procéder par étapes afin d'éviter toutes répercussions fâcheuses sur l'ensemble de l'économie. Des considérations de politique sociale (protection des locataires dont le revenu est le plus faible) commandent d'ailleurs d'éviter une hausse des loyers excessive et subite.

Nous sommes ainsi contraints de vous proposer de proroger une fois de plus, pour une durée limitée de nouveau à quatre ans, le fondement constitutionnel d'un nouveau régime de réduction graduelle, afin d'éviter les répercussions fâcheuses d'ordre économique et social d'une trop brusque suppression des mesures prises en faveur des locataires.

En vous proposant de maintenir le contrôle des loyers, nous sommes parfaitement conscients du fait qu'il faudra pendant un certain temps supporter les inconvénients inhérents au système. Le maintien des loyers à un niveau bas, en particulier dans les bâtiments d'avant-guerre, favorise leurs locataires. Grâce au contrôle des loyers, ils ne doivent consacrer à leur logement qu'une proportion de leur revenu sensiblement plus faible que les locataires des bâtiments nouveaux. Cela est d'autant plus choquant que les locataires des nouveaux logements sont souvent des personnes jeunes, qui entrent dans la carrière qu'elles ont choisie et ont par conséquent un salaire de débutants alors que leurs charges pour la création d'un foyer et pour les enfants sont élevées. Au contraire, une bonne partie tout au moins des locataires privilégiés des anciens appartements en sont au point le plus élevé de leur carrière professionnelle et de leur revenu et seraient ainsi mieux à même, d'une façon générale, de supporter le poids des loyers élevés des bâtiments nouveaux. Nous avons déjà fait valoir ailleurs que le maintien des loyers à un niveau bas dans les constructions d'avant-guerre peut contribuer à accroître la pénurie de logements par le fait que des familles qui deviennent plus petites préfèrent renoncer à échanger contre un logement moins
spacieux leur appartement, trop grand pour leurs besoins mais avantageux. Il est d'ailleurs parfaitement compréhensible que ces familles ou couples restent dans leur appartement trop grand, étant donné que, par suite de la pénurie croissante dé logements anciens et bon marché, ils ne pourraient l'échanger que contre un appartement plus petit, mais nettement plus cher. Si la suppression du contrôle doit entraîner une augmentation impossible à déterminer mais en tout cas sensible des loyers des anciens logements, cela signifie que ces loyers ont été bloqués dans la même mesure et d'une manière durable à un niveau bien inférieur à celui d'un marché normal et que les locataires fortuits de ces logements ont bénéficié peudant des années de cette différence, comme d'une rente, sans avoir contribué en quoi que ce soit à la construction de l'immeuble et

476

sans être liés à celui-ci. Cela signifie aussi, inversement, que les propriétaires qui ont engagé leur capital dans l'entreprise et assumé les .risques ont été frustrés de cette même différence parce que sous le régime du contrôle des loyers les charges à couvrir n'ont toujours été calculées que sur Ja valeur qu'avaient les immeubles en 1939. Les locataires des anciens logements sont d'ailleurs aussi favorisés en ce sens qu'ils paient un loyer qui est bien inférieur à la valeur moyenne qui, sous la forme de l'indice des loyers, sert au calcul statistique des salaires réels. L'indice des loyers se montait, selon les dernières enquêtes, à 145,5.points à la fin de mai 1959 pour l'ensemble des logements, alors qu'il n'était que de 127,0 points pour les appartements construits avant 1940. Par. conséquent, les locataires des anciens logements bénéficient d'une amélioration supplémentaire de leur salaire réel, au delà des chiffres établis par la statistique. Cette discrimination des propriétaires d'immeubles par rapport à tous les autres propriétaires de valeurs réelles constitue une immixtion difficilement supportable dans leurs droits de propriété et une atteinte au principe de l'égalité devant la loi, qui ne peuvent être tolérées qu'aussi longtemps qu'elles sont vraiment commandées par l'intérêt du pays tout entier, notamment en temps de guerre et de crise. Il conviendrait en temps de paix de manifester pour le moins la ferme volonté de supprimer le privilège en question et la discrimination qui en résulte. L'actuel contrôle des loyers crée, pour ce qui est des propriétaires également, deux catégories, les uns étant entièrement libres d'utiliser comme ils l'entendent leur propriété et de tirer parti de la situation favorable du marché, les autres subissant une grave limitation en ce qui concerne l'intérêt des capitaux qu'ils ont engagés.dans les immeubles. En assouplissant le contrôle des loyers par catégories et par régions, on a d'ailleurs nécessairement créé de nouvelles inégalités. Le maintien des loyers des logements d'avant-guerre à un niveau bas a en outre pour conséquence que la réserve d'appartements vacants, si .tant est qu'il en existe une, ne se composera toujours que d'appartements neufs et chers.

C'est pourquoi le défaut de concurrence qui se fait sentir pour les appartements anciens
amène les propriétaires à négliger leur entretien. Cela est particulièrement le cas des propriétaires qui ont acquis leur immeuble à un prix élevé par suite de mutation ou qui ont absolument besoin du rendement de leur propriété immobilière pour vivre. Ces économies sur l'entretien représentent pour eux le seul moyen d'améliorer le rendement.

La démolition d'anciens immeubles encore fort bien utilisables tels quels, démolition dont on parle beaucoup, paraît avoir des causes en grande partie étrangères au contrôle des loyers et résidant avant tout dans l'a pénurie croissante de terrains, dans la tendance naturelle à former des centres commerciaux dans les villes, dans la situation économique favorable et dans les besoins accrus de locaux commerciaux et de petits a.ppa.rtements. Il est toutefois fort possible que les avantages de la liberté en matière de loyers incitent également des propriétaires à détruire pour reconstruire,

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notamment ceux qui après avoir acheté leur immeuble récemment à un prix élevé doivent se contenter d'un rendement brut insuffisant.

Indépendamment de ces effets nuisibles qu'exercé le contrôle des loyers pour les locataires comine pour les bailleurs, il convient de ne pas cacher les aspects négatifs de ce contrôle sur le plan de l'économie dans son ensemble. Si l'on peut alléguer que le contrôle des loyers a eu l'avantage de maintenir sensiblement plus bas le niveau général des pris que ce n'aurait été le cas si l'on avait laissé libre cours à l'évolution des loyers, il n'est pas moins vrai qu'en accroissant la demande de logements, il a probablement contribué à enfler l'activité de construction et par conséquent soutenu la tendance à la hausse des prix du terrain et de la construction.

En maintenant les loyers des logements anciens au-dessous du niveau général et en assurant ainsi aux locataires la libre disposition d'une part de leur revenu, le contrôle des loyers a peut être eu aussi pour effet d'accroître la demande et par conséquent de soutenir les prix des marchandises qui ne sont pas absolument indispensables. Il y a Heu de mentionner en outre, comme conséquence du contrôle des loyers, une certaine rigidité dans le marché du logement. La diminution du nombre des changements de domicile en ce qui a trait aux anciens appartements montre à quel point les baux sont devenus durables, en particulier dans les bâtiments d'avant-guerre.

Il en résulte aussi une entrave à la mobilité de la main-d'oeuvre d'une localité à l'autre.

Nous mentionnons enfin les effets psychologiques néfastes que le contrôle des loyers exerce à longue échéance, us se manifestent dans le fait qu'une grande partie de la population entretient des idées erronées ou tout au moins dépassées sur la notion de loyers normaux, conformes à un marché équilibré et correspondant au niveau général des prix. Le maintien artificiel des loyers des anciens logements à un niveau bas entretient l'illusion que les loyers des anciens logements sont conformes à la réalité économique "bien qu'ils ne correspondent pas du tout au niveau actuel des prix et des revenus. Toutes ces manifestations accessoires qui ne résultent peut-être pas directement du contrôle des loyers mais que celui-ci favorise en tout cas sont regrettables et malsaines, tant du
point de vue de la politique sociale que de celui de la politique économique et du droit. Elles doivent être considérées comme un symptôme du fait que le contrôle des loyers, institution judicieuse et conforme aux circonstances pendant les années de guerre, se révèle de plus en plus dépassé par l'évolution à mesure qu'on s'éloigne de l'année 1939, point de départ du blocage des loyers. La disparité existant entre les loyers des logements anciens et nouveaux, de même qu'entre les loyers des logements anciens et le niveau des autres prix, aboutit nécessairement, à la longue, à une rupture de plus en plus marquée de l'équilibre dea prix et à des tensions. De tels phénomènes ne sont supportables que passagèrement, pendant une période de transition. On ne peut en prendre son parti que momentanément. Il faut même les accepter Feuille fédérale. 111e année. Vol. IL

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lorsque dans la marche vers une démobilisation rapide des mesures de contrôle, ils contribuent au rétablissement progressif d'une pleine liberté.

Pour normaliser le marché du logement, il faudra ramener l'écart anormal entre les loyers des appartements anciens et nouveaux à la mesure donnée par la différence à laquelle serait évaluée leur valeur d'usage respective sur un marché équilibré. Même s'il pouvait se produire une certaine réduction des frais de construction qui permettrait de ramener les loyers des logements nouveaux à un niveau un peu inférieur à celui d'aujourd'hui, de manière à freiner également l'adaptation des loyers des appartements anciens, l'écart existant entre les loyers des appartements anciens et nouveaux est si grand qu'il ne pourra être réduit, exclusivement ou en majeure partie, que par une majoration des loyers des anciens appartements.

Ainsi que nous l'avons montré, l'écart entre les loyers des logements anciens et nouveaux ne s'est que faiblement réduit depuis qu'a été adopté l'additif constitutionnel sur le contrôle des prix. Partout où la situation du marché du logement est tendue, il s'est même produit ces derniers temps (voir chiure 1er), plutôt une aggravation, due avant tout à la hausse des intérêts hypothécaires et au renchérissement constant des prix du terrain et de la construction. Si donc on entend rétablir dans une mesure satisfaisante la liberté sur le marché d'ici au terme de prorogation des dispositions sur le contrôle des loyers, c'est-à-dire jusqu'à la fin de 1964, pour pouvoir supprimer alors les dernières prescriptions en vigueur sans qu'il en résulte de graves répercussions^ il ne peut être question de se contenter d'une prolongation du statu quo. Il faut, bien au contraire, procéder avec plus de décision à la démobilisation du contrôle.

Le problème principal de cette démobilisation consiste à rapprocher les loyers des logements anciens d'un prix conforme aux lois du marché et correspondant au niveau général des prix. La différence entre les loyers des logements anciens et nouveaux est cependant si considérable dans les villes et les centres industriels qu'on ne pourra pour des raisons de politique économique et sociale la supprimer que peu à peu. Si l'on doit arriver à supprimer le contrôle d'ici à la fin de 1964, il n'est pas possible d'attendre
plus longtemps pour faire progresser la démobilisation. En dépit de l'argument des adversaires de la suppression, selon lequel il faut tout d'abord faire en sorte qu'il y ait suffisamment de logements, une adaptation des loyers des anciens appartements est nécessaire. L'écart entre les loyers ne sera en effet pas réduit par une accélération de la construction de logements, à moins que n'intervienne une baisse considérable du coût de la construction et des prix des terrains (on ne peut cependant pas compter sur une baisse assez forte pour compenser l'écart) ou que l'on n'abaisse les loyers des logements neufs au moyen des ressources publiques.

La démobilisation du contrôle pourra s'opérer par une hausse progressive des anciens loyers et par la supression du contrôle dans les communes

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et régions qui peuvent s'en passer sans dommages. Il y aura en outre lieu de poursuivre l'examen des possibilités de supprimer le contrôle pour les catégories de choses louées qui ne peuvent être jugées dignes do cette protection et de combiner de la façon la plus judicieuse les diverses mesures de démobilisation. Dans son expertise, le professeur Sieber propose le plan de démobilisation suivant: a. Suppression du contrôle des loyers par communes ou par régions selon les propositions qu'il faudra demander aux gouvernements des cantons; 6. Suppression du contrôle pour les bâtiments construits depuis le début de la guerre et ceci en doux étapes: la première pour les logements construits de 1942 à 1946 la seconde, deux ans plus tard, pour les logements construits en 1940 et 1941.

c. Majoration des loyers encore soumis au contrôle, pour commencer de 15 pour cent de leur niveau actuel, puis, deux ans plus tard, de 10 pour cent du niveau qu'ils atteindront alors, et enfin, suppression complète du contrôle après une nouvelle période de deux ans.

Pourraient entrer en ligne de compte comme variantes, avec une réduction correspondante des délais, trois majorations successives de 10 pour cent du niveau du moment, ou deux majorations de 10 pour cent et une de 5 pour cent, dans les deux cas avec suppression consécutive du contrôle.

Parallèlement à la suppression du contrôle selon les lettres a et 6, il conviendrait de supprimer également la limitation du droit de résiliation et de la remplacer par une prolongation de six mois des baux en vigueur a ce moment.

En revanche, le professeur Sieber ne considère pas comme judicieuse une libération des locaux commerciaux et des logements chers, car il y aurait lieu de craindre que ces libérations ne soient étendues d'une manière arbitraire, soit par la location de pièces habitables comme locaux commerciaux soit par la transformation d'appartements bon marché en logements chers.

On oppose à cette proposition le fait qu'elle aurait l'inconvénient suivant: il faudrait autoriser des hausses successives et fixées en pourcent pour les loyers restés soumis au contrôle. De nombreux propriétaires qui sans cela n'en auraient pas eu l'idée pourraient ainsi être amenés à appliquer la hausse. Par suite du vieillissement des anciens appartements, nombre de propriétaires ne pourraient en effet prétendre à aucune hausse ou du moins qu'à une hausse beaucoup plus faible de leurs loyers le jour où la liberté du marché serait rétablie, s'ils voulaient conserver leurs locataires en dépit de la concurrence exercée par la qualité supérieure des nouveaux logements. D'autre part, il y aurait en tout cas des différences très sensibles quant aux possibilités de renchérissement entre la ville et la campagne, entre les diverses catégories d'anciens logements, entre les diverses situations par rapport aux communications dans une même localité et entre les différents usagers des bâtiments. Toutes ces circonstances ne pourraient être prises en considération par des autorisations générales d'augmentation. Bien qu'on puisse aussi faire valoir que tous les propriétaires n'ont pas saisi l'occasion qui s'offrait lors des précédentes autorisations générales de hausse, on ne saurait nier que de telles autorisations pourraient inciter certains propriétaires à augmenter leurs loyers.

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Une autre proposition, présentée il y a quelques années déjà et reprise récemment par le président de la commission fédérale du contrôle des prix, le professeur E. Böhler, de l'école polytechnique fédérale à Zurich, tend à remplacer la méthode du contrôle et du blocage des loyers par un système plus souple de surveillance. Il s'agit là d'un procédé qui permettrait d'une part d'établir expérimentalement et par là de déterminer individuellement la valeur de chaque logement selon les lois du marché et qui empêcherait d'autre part que les hausses de loyers ne prennent des proportions indésirables pour l'économie dans son ensemble. Ce système permettrait d'atteindre trois buts : établir par approximation des loyers individuels conformes aux lois du marché et s'en rapprocher, répartir dans le temps les majorations supportables et empêcher une éventuelle hausse excessive du niveau général par une lutte efficace contre les augmentations excessives. A cet effet, il y aurait lieu de rétablir le principe de la liberté contractuelle en matière de loyers, tout en veillant, par des mesures préventives tant générales que de nature institutionnelles, à empêcher d'éventuels abus de cette liberté.

Une répartition dans le temps des hausses supportables et une lutte efficace contre les majorations excessives s'imposent non seulement pour des raisons d'ordre économique, mais aussi pour des raisons de politique sociale, dans l'intérêt des locataires dont les revenus sont modestes.

Selon cette proposition, la surveillance des loyers se ferait de la manière suivante : En principe, la liberté contractuelle serait rétablie dans le domaine des loyers.

Mais pour mettre le preneur à l'abri des prétentions exagérées, la loi donnerait au preneur un droit do recours contre les augmentations. On pourrait ainsi s'attendre que la plupart des adaptations se feraient sans difficultés, par entente entre les parties, le marché pouvant de nouveau jouer librement dans certaines limites et les abus patents étant empêchés. L'intervention de l'Etat pourrait être réduite aux cas dans lesquels les preneurs se verraient obligés de requérir protection contre des prétentions abusives.

Une solution de ce genre aurait aussi l'avantage que l'on pourrait renoncer à fixer officiellement des hausses générales. Il n'y aurait ainsi pas à craindre
l'effet suggestif qu'une approbation officielle donnée à certaines prétentions pourrait exercer sur les propriétaires qui seraient à même de se contenter d'une hausse plus faible. Les organes de surveillance des loyers auraient pour première obligation de tendre à une conciliation entre les parties. Une fixation officielle des loyers n'interviendrait que dans les cas où cette tentative de conciliation n'aurait pas abouti. Comme organes de surveillance, il y aurait Heu d'instituer des commissions paritaires cantonales, composées do représentants des propriétaires et des locataires, d'experts neutres et d'un fonctionnaire des autorités actuelles du contrôle des prix. Ces commissions devraient examiner les recours des locataires et, le cas échéant, fixer les loyers selon leur libre appréciation, Pour cela, elles appliqueraient cependant certains critères, qui devraient être établis d'une manière très générale, afin de laisser aux influences du marché la possibilité d'agir, le marché du logement étant, par nature, un marché différencié. En principe, il ne pourrait pas s'agir d'un ajustement au niveau des loyers des logements nouveaux, ce niveau ne pouvant pas être considéré comme définitif. Ce serait plutôt un rapprochement du loyer individuel au niveau du marché, c'est à dire au niveau qui pourrait être atteint pour la qualité particulière de la demeure en question, entretenue normalement, si la concurrence jouait sur un marché équilibré. Le prix du marché ne devrait d'ailleurs pas nécessairement couvrir les frais d'investissement si l'habitation ne

481 répondait plus aux tendances de la demande ou si son entretien avait été négligé.

Ainsi, en partant d'une base générale, il y aurait lieu d'établir une différenciation individuelle vers le bas ou vers le haut, pour arriver à un chiffre se rapprochant le plus possible du loyer qui pourrait être obtenu si le marché était normal et équilibré.

Afin d'assurer un bon fonctionnement de ce système de surveillance, Ü serait indispensable de protéger efficacement les locataires contre les dénonciations de bail injustifiées.

On a proposé, d'autre part, de soumettre au système de la surveillance également les immeubles exclus du contrôle depuis 1954, afin de parer à une majoration des loyers des logements neufs et par là à une aggravation possible de l'écart existant entre les loyers des logements anciens et nouveaux. Il ne serait toutefois pas possible d'adopter une telle proposition, parce que la révocation d'une libération prononcée il y a des années serait contraire à l'idée de la démobilisation du contrôle, qui doit trouver son expression dans l'article constitutionnel. De plus, à remettre les bâtiments neufs sous surveillance, on courrait le risque de freiner la construction.

Les avis sont d'ailleurs très divisés sur l'ampleur probable du mouvement de hausse qu'il y a lieu de craindre en ce qui concerne les loyers de logements neufs.

L'idée d'une surveillance des loyers dans le sens indiqué a été présentée le 23 juin 1959 à la commission fédérale du contrôle des prix. Les représentants des locataires et des consommateurs ont déclaré préférer que l'on s'en tienne au système du contrôle tel qu'il a été appliqué jusqu'ici. Dans le cas où il ne serait pas possible de conserver cette méthode, ils se rallieraient toutefois à l'opinion unanime des autres membres de la commission, selon laquelle le système de la surveillance serait préférable à celui des autorisations de hausses générales que nous avons exposé en premier lieu.

L'inconvénient du système de la surveillance des loyers réside dans le fait qu'il mettrait davantage à contribution les autorités et qu'il entraînerait probablement une extension du travail administratif, la procédure étant plus compliquée que l'ancienne. Mais il faut reconnaître qu'on ne peut avec cette dernière résoudre les problèmes compliqués qui se posent sur le marché du logement. Au surplus, il s'agit d'apporter une solution à un problème transitoire et non pas d'instituer une procédure permanente. On peut donc accepter le supplément de travail administratif, d'autant plus qu'il s'agit d'offrir une garantie contre les exigences excessives en matière de loyers et de trouver la solution raisonnable d'un problème qui, autrement, resterait posé pendant des années.

La forme à donner au système de surveillance esquissé, les modalités de la procédure de recours ainsi que la rédaction des critères
à adopter pour la fixation des loyers litigieux doivent encore être l'objet d'un examen détaillé, afin de pouvoir être précisés. Il ne sera possible de se prononcer définitivement que lorsqu'on aura établi avec précision toutes les modalités du système prévu pour protéger les locataires et empêcher une hausse excessive et incontrôlée des loyers. Cette étude se fera au moment de la

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préparation des dispositions d'exécution. Il est donc nécessaire de rédiger le texte du nouvel additif constitutionnel de manière qu'il puisse convenir tant pour des assouplissements selon le système pratiqué jusqu'ici que pour une surveillance selon la méthode esquissée ou une méthode modifiée. Le texte de l'additif constitutionnel en vigueur suffirait déjà, mais le texte proposé pour le nouvel additif est plus explicite.

Vu la nécessité d'observer une cadence accélérée pour la démobilisation, nous sommes d'avis qu'il convient de prévoir clairement l'obligation de procéder à une réduction rapide des mesures de contrôle. Afin de donner plus de poids à cette obligation, il faut au surplus l'inscrire, non pas seulement à l'échelon législatif mais déjà, tout au moins en principe, dans l'additif constitutionnel lui-même, malgré l'avis contraire exprimé par la majorité des cantons.

L'additif constitutionnel en vigueur prévoit déjà une délégation d'attributions aux cantons. Afin d'assurer une démobilisation du contrôle qui tienne compte de l'ensemble de l'économie nationale, la Confédération ne pourra, il est vrai, pas renoncer à ses attributions fondamentales. Avec la majorité des cantons et un certain nombre d'associations économiques, nous sommes cependant d'avis qu'il conviendra de faire appel dans une plus large mesure à la collaboration des cantons en matière de démobilisation.

Il appartiendra à l'arrêté fédéral d'application de fixer les modalités de cette collaboration.

Noua sommes conscients du fait que la suppression du contrôle des loyers ne saurait résoudre tous les problèmes de politique sociale en matière de logement. Dans notre message du 8 mai 1956 concernant l'application du contrôle des prix (FF 1956, I, 1053), nous relevions qu'il importait d'encourager la construction d'appartements bon marché et faisions valoir qu'il s'agissait là d'une «solution constructive, orientée vers l'avenir», «au lieu de la méthode purement conservatrice et liée au passé du contrôle actuel des loyers». Dans notre message du 28 juin 1957 concernant les mesures destinées à encourager la construction de logements économiques (FF 1957, II, 132), nous ajoutions: II semble bien en effet que pour normaliser le marché des logements il faille, d'une part, augmenter par tous les moyens l'offre d'appartements à
bon marché en stimulant et en encourageant systématiquement la construction de tele appartements et, d'autre part, assouplir progressivement le contrôle des loyers. L'on agirait ainsi sur l'une et l'autre cause de la tension du marché.

Depuis lors, l'arrêté fédéral du 31 janvier 1958 concernant l'encouragement à la construction de logements à caractère social est entré en vigueur; il prévoit une aide de la Confédération pour la construction de 10 000 appartements bon marché. Indépendamment de cette aide directe, il doit -- dans l'idée du législateur -- stimuler avant tout l'édification par des particuliers de logements avantageux. C'est pourquoi le Conseil fédéral, se fondant sur

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l'article 2 de cet arrêté, a institué une commission consultative pour la construction de logements. Sa tâche consiste à favoriser et à coordonner les efforts des particuliers et des communautés publiques en vue de la construction de logements bon marché. De tels efforts constituent une contribution à la solution des problèmes sociaux en matière de logement. Il n'est pas encore possible de formuler un jugement définitif sur les effets de cet arrêté fédéral puisque les initiatives en question sont encore au stade initial. L'expérience seule dira si les mesures prévues suffisent, ou s'il convient de les modifier ou de les étendre.

Y. La limitation du droit de résiliation Les gouvernements de la plupart des cantons sont d'avis, aujourd'hui comme hier, que l'on ne saurait renoncer à une limitation du droit de résiliation. Ils confirment l'opinion que nous avons toujours exprimée et selon laquelle le contrôle des loyers, pour être efficace, doit être complété par la protection des locataires. Le Conseil d'Etat du canton de Vaud s'est exprimé d'une manière particulièrement nette à cet égard, faisant valoir entre autres dans son préavis que: ... dans les localités où l'on a renoncé à cette protection on bien lorsqu'on la limite à certaines catégories de logements, le contrôle des prix est devenu illusoire, parce que les propriétaires résilient les banx des locataires qui n'acceptent pas des prix de loyers illicites.

Le Conseil d'Etat du canton de Zurich fait valoir des arguments analogues: La pratique prouve qu'un contrôle des loyers sans protection contre les résiliations injustifiées est inopérant. Les expériences faites récemment dans la ville de Zurich en matière de location de chambres meublées ont montré une fois de plus avec toute la clarté voulue à quel point il est facile de tourner les dispositions du contrôle des loyers lorsqu'elles ne sont pas accompagnées d'une limitation du droit de résiliation et combien elles sont fréquemment inapplicables de ce fait. Au surplus, on n'oubliera pas que l'existence même d'une protection des locataires exerce jusqu'à un certain point un effet préventif d'une façon générale, en ce sens que de nombreux bailleurs renoncent à prononcer des résiliations injustifiées compte tenu de la possibilité qu'ont les locataires de recourir aux autorités. Tels sont les motifs pour lesquels la protection des locataires devrait être maintenue.

Le professeur Sieber adopte la même attitude dans le bulletin d'information du délégué aux possibilités de travail, cahier 2, juillet 1948, page 34, et dans son expertise du 31 mars 1959.

Le défaut de protection des locataires a dans bien des cas pour conséquence que les preneurs n'osent pas, de crainte de recevoir leur congé, faire sentir aux bailleurs ce que leurs exigences ont d'inadmissible, ni attirer l'attention des autorités de contrôle sur des hausses de loyer illicites. C'est pourquoi une limitation du droit de résiliation est indispensable lorsque la pénurie de logements est très marquée, si l'on veut assurer au contrôle des loyers le degré d'efficacité nécessaire.

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II y a toutefois lieu de souligner que différents cantons ont déjà fortement restreint le champ d'application des dispositions sur la protection des locataires, alors que celles qui se rapportent aux loyers valent encore pour tout le territoire de ces cantons. Cette suppression de la protection des locataires s'applique principalement aux communes rurales, dans lesquelles le pourcentage des appartements locatifs, par rapport à l'ensemble des logements, est bien inférieur à ce qu'il est en moyenne du pays, et qui n'ont jamais eu à pâtir d'une véritable pénurie de logements. C'est pourquoi le contrôle des loyers n'a presque jamais revêtu une bien grande importance dans ces communes rurales. On examine d'ailleurs en ce moment s'il ne serait pas possible de supprimer simplement ce contrôle dans les petites communes.

C'est ainsi qu'au 1er janvier 1958, 110 seulement des 492 communes bernoises étaient encore soumises aux dispositions sur la limitation du droit de résiliation. Dans le canton de Lucerne, 30 communes campagnardes, soit un tiers de l'ensemble, ne connaissent plus, depuis des années, la limitation du droit de résiliation, sans qu'il en soit résulté, selon les indications du gouvernement cantonal, de difficultés particulières. La protection des locataires ne subsiste plus que dans 17 des 74 communes de Baie-Campagne et dans une seule commune thurgovienne (Arbon).

Cet état de choses permet de conclure que les conditions sont très différentes en ville et à la campagne. Ce n'est pas par hasard que tous les cantons ayant des villes d'une certaine importance sont d'avis qu'il n'est pas possible de renoncer à la faculté qu'a la Confédération d'édicter des dispositions sur la protection des locataires. Même Berne est de cet avis, en dépit du fait que la limitation du droit de résiliation n'est plus en vigueur dans un bon nombre de ses communes rurales.

Quelques associations économiques estiment que la possibilité de prolonger les délais de résiliation devrait suffire, en tant que forme la plus modérée de la protection des locataires.

Selon les dispositions en vigueur, ce sont déjà les gouvernements des cantons qui décident si et jusqu'à quel point les prescriptions au sujet de la limitation du droit de résiliation sont applicables sur le territoire cantonal (article 6 de l'arrêté fédéral instituant
les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit, du 28 septembre 1956; article 28 de l'ordonnance concernant le contrôle des loyers et la limitation du droit de résiliation, du 28 décembre 1956). Il n'est pas prévu de modifier ces dispositions à l'avenir. Les cantons pourront donc toujours déterminer pour leur territoire le champ d'application de la protection des locataires et le limiter peu à peu, le cas échéant, jusqu'à n'en maintenir qu'une simple possibilité de prolonger les délais de résiliation.

Une réserve s'impose toutefois pour le cas où la méthode appliquée jusqu'ici en matière de contrôle des loyers devrait être remplacée par le

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système de surveillance esquissé plus haut. Etant donné qu'un tel système ne pourrait fonctionner de manière satisfaisante qu'en relation avec une protection efficace des locataires contre des résiliations injustifiées, des dispositions uniformes seraient alors probablement nécessaires au sujet de la limitation du droit de résiliation.

Comme cela avait été le cas dans l'arrêté fédéral instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit, du 28 septembre 1956 (article 20), il faudra, cette fois-ci également, prolonger la durée de validité de l'arrêté fédéral du 20 mars 1953 concernant l'ajournement des termes de déménagement, sans lequel certains cantons ne sont par moment pas en mesure de se tirer d'affaire.

La constitution n'accordant à la Confédération aucune compétence pour prendre des mesures touchant à la protection des locataires, il est nécessaire de fonder une fois de plus ce droit sur une norme expresse de l'additif constitutionnel.

VI. Caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers 1. Activité déployée jusqu'ici par la caisse et mode de financement La caisse de compensation des pris du lait et des produits laitiers a été créée en 1942 à titre de mesure d'économie de guerre fondée sur les pouvoirs extraordinaires (ordonnance n° 17 du département fédéral de l'économie publique concernant le coût de la vie et les mesures destinées à protéger le marché) afin de maintenir bas le pris du lait dans les centres de consommation et dans les régions dont la production ne couvre pas les besoins. A cet effet, la caisse prenait en principe à sa charge les renchérissements du ramassage, du transport, des manutentions et de la vente au détail du lait de consommation et versait en particulier aux laiteries et aux commerces du lait ce qu'il est convenu d'appeler des suppléments de marge. Ces frais étaient couverts, pour l'essentiel, par la taxe sur le lait de consommation, précédemment dénommée centime de crise, par la taxe sur la crème de consommation, créée pendant la période de guerre, et par le produit du droit supplémentaire sur le beurre importé. Les excédents de dépenses étaient couverts par les ressources générales de la Confédération.

Lorsque le régime des pouvoirs extraordinaires fut aboli, ces mesures de compensation des prix furent maintenues
en vertu de l'additif constitutionnel du 26 septembre 1952/22 décembre 1955 sur le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit, sans que le but ni le financement de la caisse soient modifiés. Les dispositions d'exécution (arrêtés fédéraux des 10 juin 1953 et 28 septembre 1956 instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit) prescrivirent cependant que la caisse devrait autant que possible subvenir elle-même à ses frais et dimi-

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nuer progressivement les subsides qu'elle accorde pour réduire le pris du lait de consommation.

Jusqu'en 1951, les consommateurs de la plupart des localités n'ont eu à supporter, grâce à la caisse de compensation, aucun renchérissement résultant de l'acquisition et de la distribution du lait de consommation.

Le 1er mai 1951, le prix de détail du lait a été majoré de 1 centime par litre pour la première fois aussi en vue de réduire les prestations de la caisse.

Voici quels ont été les bilans de la caisse au cours des six dernières années : Année laitière (se terminant le 30 avril)

1952/1953 .

1953/1954 .

1954/1955.

1955/1956 .

1956/1957 , 1957/1958.

.

.

.

.

.

.

Recettes

^Dépenses

13 708 744.10 12 372 765.49 14 030 341.18 12 857 818.31 12 849 037,29 10 055 295.77

13 717 588.92 12 522 225.15 13 328 889.26 13 368 400.56 13 691 818.82 13 122 771.10

Exoédcnt de dépenses ou de recettes

--

8 844.82

-- 149 459.66 + 701 451.92 -- 489 582.25 -- 842 781.53 -- 3 067 475.33

L'excédent de dépenses d'un peu plus de 3 millions de francs pour l'année laitière 1957/1958 provient en premier lieu de l'amélioration de la marge accordée au commerce de détail du lait à partir du 1er mai 1956.

Le prix de base à la production avait été majoré à ce moment-là de 2 centimes. Afin que les consommateurs n'eussent pas à supporter un troisième centime de hausse, l'amélioration de la marge du commerce du lait avait été réalisée, en tant que mesure transitoire, par une libération partielle ou totale de la taxe sur le lait de consommation. Les recettes de la caisse s'en sont trouvées réduites d'autant.

Les taxes sur le lait de consommation ont cependant pu être rétablies dans une large mesure en tant que recettes de la caisse à partir du 1" novembre ou du 1er décembre 1958. En effet, le prix de détail du lait livré à domicile a généralement été majoré de 1 centime par litre à partir de l'une ou l'autre de ces deux dates, en particulier afin d'améliorer la marge du commerce du lait. Le commerce du lait a donc bénéficié d'une part de ce centime, alors que le reste servait à rétablir dans une large mesure la taxe sur le lait de consommation, dont la libération avait été temporaire^ ment accordée à partir du 1er mai 1956 pour améliorer la marge. Et pourtant, le déficit pour l'année laitière 1938/1959 doit actuellement être évalué à environ 4,5 millions de francs. Cela provient notamment d'une forte réduction du produit des droits supplémentaires sur le beurre, puisque ce n'est

487

qu'au début de cette année qu'il a été possible de reprendre des importations de beurre d'une certaine importance.

2. Maintien de la caisse de compensation Puisqu'il est question ici de la situation financière de la caisse, il sied de souligner que les recettes que sont les taxes sur le lait et la crème de consommation, ainsi qu'une charge plus élevée grevant le beurre importé dans une mesure correspondant aux droits supplémentaires qui le frappent, devraient, au sens de l'article 26 de la loi sur l'agriculture et de l'article 26 de l'arrêté sur le statut du lait, servir à développer l'écoulement des produits laitiers indigènes et non pas à abaisser le prix du lait de consommation.

Tant que la caisse aura besoin de ces ressources et dans la mesure où elle en fera usage, elles ne seront pas consacrées au but agricole prévu à l'origine. En revanche, l'article 19 de l'arrêté fédéral du 28 septembre 1956 instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit affecte aux mesures prises au sens de l'article 26 de la loi sur l'agriculture ·-- en remplacement et jusqu'à concurrence des ressources détournées de leur destination première -- le rendement des suppléments de prix perçus sur les matières fourragères. Si ce rendement ne suffit pas, les subsides seront prélevés sur les ressources générales de la Confédération.

Cette réglementation a également été adoptée, dans l'article 1er, 2e alinéa, de l'arrêté fédéral sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière (FF 1959, I, 1571) qui, entré en vigueur, remplacera l'article 19.

Il n'y a pas d'autre mode de péréquation possible pour assurer le financement de la caisse de compensation, c'est-à-dire pas d'autres ressources au sens d'une véritable compensation des prix.

La caisse fournit, en vue d'abaisser le prix de détail du lait, des contributions se montant, par litre, de 3 à plus de 4 centimes dans la plupart des villes et de 1 à 3 centimes dans les localités moins importantes. Si l'on supprimait ces prestations, le prix de détail monterait d'autant, ce qui se traduirait par une hausse de l'indice des prix à la consommation de 0,6 point ou 0,3 pour cent (état à fin 1958). Pour un couple ayant trois enfants, cela représenterait, si l'on se fonde sur les comptes de ménage de
l'office de l'industrie, des arts et métiers et du travail, un supplément de dépenses de 20 à 25 francs par an.

Compte tenu de cette situation, la question se pose donc de savoir s'il est possible de supprimer la caisse d'ici à la fin de 1960 ou si elle doit une fois de plus être maintenue temporairement. Suivant en cela l'opinion de la grande majorité des cantons ainsi que de nombreuses organisations, nous sommes d'avis que la caisse devrait être maintenue après 1960, étant donné qu'une suppression soudaine de l'ensemble de l'abaissement des prix

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qu'elle supporte entraînerait un renchérissement sensible du lait de consommation, surtout dans les villes.

En principe, nous pensons toutefois que -- sauf pour ce qui est desmesures d'abaissement des prix destinées à favoriser l'écoulement -- la réduction des prix des denrées alimentaires n'est justifiée qu'en des temps extraordinaires, en des périodes de difficultés générales ou du moins touchant d'importantes parties de la population, et non pas dans la situation économique qui est la nôtre actuellement. C'est pourquoi la caisse de compensation ne saurait être maintenue en tant qu'institution durable de la Confédération. Son maintien temporaire ne devrait servir, dèe le début, qu'à éviter les répercussions fâcheuses qu'aurait une suppression subite. A l'égard des propositions tendant à maintenir la caisse de compensation en tant qu'institution durable, comme par exemple en vue de compenser les frais de transport ou d'amortir les hausses momentanées des frais d'acquisition ou de répartition, il convient de relever que le prix du lait de consommation doit correspondre aux frais réels, tout en restant le plus bas possible. Ce prix permettant de couvrir par lui-même les frais doit être atteint par le moyen d'une fixation adéquate de la marge existant entre le prix à la production et le prix de détail et par d'éventuelles économies.

Dans notre message du 6 février 1959 concernant les mesures complémentaires d'ordre économique et financier à prendre dans le secteur laitier (FF 1959,1, 308), nous avons montré qu'un abaissement général du prix de détail du lait en vue d'en développer le débit, contrairement à ce qui est le cas d'une réduction des prix des produits laitiers, ne serait pas un moyen qui pourrait contribuer à faciliter l'obtention de prix couvrant pour l'agriculture les frais de production. Contrairement à un avis exprimé par des représentants des consommateurs, il ne serait par conséquent pas possible non plus de maintenir un abaissement durable du prix du lait de consommation en en faisant une mesure de politique agricole fondée sur l'article Slbia, 3e alinéa,, lettre Ô, de la constitution. Ainsi que nous l'avons déjà relevé, on ne peut parler de mesures de compensation des prix que si les recettes et les frais s'équilibrent. Or la caisse dépasse actuellement les limites d'une simple
compensation des prix, ceci notamment par suite du recul sensible des recettes du supplément de droit sur le beurre. Pas plus qu'un abaissement durable des prix, et pour les mêmes raisons, on ne saurait prévoir une réduction de prix du lait de consommation allant au delà des possibilités de la caisse de compensation et mettant à contribution des moyens qui lui sont étrangers, c'est-à-dire les ressources générales de la Confédération. Il est vrai que les milieux agricoles demandent que la caisse ne soit financée que par ces ressources générales et que l'on ne prive pas plus longtemps l'agriculture du produit des taxes sur le lait et la crème de consommation et d'une charge plus élevée grevant le beurre importé dans une mesure correspondant aux droits supplémentaires qui le frappent. Si fondées que puissent être ces requêtes du point de vue de l'agriculture, il

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n'en apparaît pas moins plus judicieux de se conformer -- au moment où l'on maintient une caisse destinée à être bientôt supprimée définitivement -- à la pratique suivie jusqu'ici en matière de compensation des prix et de financement.

Les cantons et les organisations économiques se prononçant contre une limitation des prestations de la caisse dans l'additif constitutionnel craignent principalement qu'une telle réglementation soit trop rigide et ne puisse répondre à des situations exceptionnelles qui pourraient se produire à l'avenir, par exemple si, faute de recettes provenant des importations de beurre, on devait avoir de nouveaux déficits. Les importations de beurre et notamment les besoins en lait provenant de contrées éloignées, qu'ont les grands centres de consommation et les régions où la production est insuffisante, varient selon l'abondance de la production laitière. C'est pourquoi les recettes et les dépenses de la caisse de compensation ne se couvrent, à vrai dire, pas exactement pour chaque exercice comptable. Il se produit des déficits ou des excédents, qui peuvent toutefois être reportés et compensés d'une année à l'autre.

Selon les expériences faites jusqu'ici, il semble que la caisse ne pourra être supprimée que lorsqu'elle sera arrivée tout d'abord à supporter ellemême les frais qu'elle entraîne. Cela implique cependant que ses prestations futures ne dépassent en tout cas pas le niveau atteint jusqu'ici et qu'elle n'assume aucune charge nouvelle. Jusqu'au moment de la mise en vigueur du nouvel additif constitutionnel, il faudra en outre alléger les prestations de la caisse de 1 centime par litre de lait, le cas échéant, par une majoration correspondante du prix de détail.

Contrairement à de nombreux cantons et associations, nous considérons qu'il est nécessaire de définir nettement dans le nouvel additif luimême la compétence accordée à la Confédération de maintenir la caisse de compensation et de la limiter en vue de l'abolition à laquelle on doit viser.

Point n'est besoin à cet effet de dispositions constitutionnelles très détaillées.

Il suffit de limiter le financement et les prestations de la caisse en disant: «... peut-être poursuivie, mais sans subsides provenant des ressources générales de la Confédération et tout au plus dans les limites des prestations accordées
jusqu'ici...» On assurerait ainsi la démobilisation. La partie de phrase «... qu'il faudra tendre à supprimer» montre bien que le maintien de ces mesures n'est qu'un dernier prolongement avant une suppression définitive et fait ressortir leur caractère provisoire.

Tout comme la plupart des cantons et des organisations économiques de faîte, nous sommes d'avis que la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers devrait être maintenue en activité pour quatre ans.

Une durée plus courte enlèverait aux autorités la liberté de mouvement dont elles ont besoin. Si la caisse peut faire face elle-même à ses frais à partir de 1961 au plus tard, le délai fixé devrait suffire pour les autres mesures

490

de démobilisation. Une période plus longue éveillerait des doutes quant à la volonté de supprimer la caisse. Cette limite de quatre ans ne veut cependant pas dire que la caisse devra être maintenue pendant tout ce laps de temps ; elle pourra et devra être supprimée dès que les circonstances le permettront.

L'expérience a prouvé que le maintien des prix de détail à un niveau bas par le moyen d'allocations ne peut être assuré efficacement -- surtout lorsque la tendance générale est aux hausses des frais et des prix -- que par des prescriptions simultanées au sujet des prix maximums et des marges.

C'est pourquoi la compétence d'édicter de telles prescriptions est implicitement comprise dans la faculté d'abaisser les prix par des mesures de compensation.

VU. Le contrôle des prix des marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur Selon l'additif constitutionnel actuel, le Conseil fédéral est autorisé à mettre lui-même immédiatement en vigueur les prescriptions qu'il propose à l'Assemblée fédérale d'édicter sur les prix maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur. Ces prescriptions cesseront toutefois de porter effet si, au cours de la session qui suit leur entrée en vigueur, elles ne sont pas approuvées par l'Assemblée fédérale.

Cela revient à dire que le Conseil fédéral ne peut édicter de telles prescriptions que lorsqu'elles sont manifestement urgentes et dans l'intérêt du pays.

C'est depuis 1953 que le Conseil fédéral a, en vertu de l'article 2 de l'arrêté fédéral du 26 septembre 1952 sur le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit, la compétence d'agir ainsi immédiatement en cas de besoin, en se fondant sur une disposition constitutionnelle. Cette compétence a été prorogée de quatre ans, jusqu'à la fin de 1960 par l'arrêté fédéral portant le même titre, du 22 décembre 1955. La situation internationale, la guerre froide, les conflits locaux et les menaces qui pouvaient en résulter pour nos importations, de même que les hausses de prix de marchandises de première nécessité, faisaient apparaître judicieuses certaines mesures de précaution en matière de contrôle des prix. Les circonstances qui avaient motivé ces précautions ne se sont pas modifiées jusqu'à ce jour, et il convient de faire preuve de prudence dans les jugements que l'on
porte sur les conditions qui seront celles du proche avenir.

La plupart des cantons et des associations économiques ont approuvé la prorogation de la disposition constitutionnelle en vigueur aujourd'hui (voir chapitre II, B, chiffre 4=), L'idée exprimée dans certains préavis et selon laquelle l'article 2 de l'actuel additif constitutionnel devrait figurer, en tant que disposition adoptée par précaution, dans le droit constitutionnel permanent, peut se défendre. Cependant, afin de ne pas devoir proposer

491 aux chambres fédérales un projet spécial à ce sujet, nous préférons, pour cette fois, englober ces dispositions dans l'additif constitutionnel d'une durée limitée.

Il ne fait pas de doute que notre approvisionnement est actuellement normal, mais cela ne constitue pas une garantie pour l'avenir, même à brève échéance. Nous avons vu, ces dernières années, à quel point la situation peut se modifier rapidement et quels dangers un tel revirement peut comporter pour notre économie.

La loi fédérale du 30 septembre 1955 sur la préparation de la défense nationale économique ne permet d'édicter des prescriptions sur les prix de marchandises indispensables que lorsque l'importation en est sérieusement entravée ou en cas de danger de guerre imminent. Une autre condition mise à l'adoption de ces prescriptions est que les marchandises en question fassent l'objet d'une réglementation portant sur leur production, leur vente ou leur achat. La loi sur la préparation de la défense nationale économique ne se rapporte donc pas à tous les troubles graves qui pourraient se manifester sur le marché et ne peut par conséquent pas remplacer les attributions qu'a le Conseil fédéral selon les dispositions actuellement en vigueur de l'article susmentionné.

L'assertion selon laquelle cet article prévoit une compétence «en réserve» ou plus exactement «à titre de précaution» est fondée. Cela répond entièrement au caractère de cette faculté et de ce qu'elle doit permettre d'atteindre. Le Conseil fédéral ne doit effectivement pouvoir agir que lorsque cela est indispensable dans l'intérêt général. Mais alors, il doit pouvoir le faire immédiatement et non pas attendre que les prix aient monté. La disposition selon laquelle ces prescriptions mises en vigueur par le Conseil fédéral doivent être approuvées par l'Assemblée fédérale lors de sa prochaine session, faute de quoi elles cessent de porter effet, de même que le fait que le Conseil fédéral n'a encore jamais fait usage de sa compétence en cette matière, garantissent suffisamment qu'il ne sera usé de cette faculté que dans des cas extraordinaires et avec la plus grande retenue.

VIII. Commentaire des diverses dispositions du projet d'additif constitutionnel Les diverses dispositions du projet appellent les remarques suivantes: Titre, En intitulant le nouvel additif constitutionnel
«Arrêté fédéral sur le maintien de mesures temporaires en matière de contrôle des prix», nous indiquons qu'il ne se rapporte plus qu'à une partie des matières contenues dans le précédent additif, savoir celles qui ne doivent pas constituer des

492

tâches durables de la Confédération et qui ne sont pas fondées sur le droit constitutionnel permanent.

Préambule

Nous reprenons de l'arrêté fédéral (additif constitutionnel) sur le maintien temporaire d'un contrôle des prix réduit, du 26 septembre 1952, en l'adaptant à la situation actuelle mais sans en modifier le sens, la formule: «pour éviter que l'abrogation de certaines mesures du contrôle des prix n'entraîne de fâcheuses répercussions d'ordre économique ou social.» Nous exprimons par là que les mesures en question doivent être maintenues pour éviter les répercussions probables mentionnées.

Article, premier;

_7er alinéa. Cet alinéa concorde presque mot pour mot avec la première phrase de l'article 1er, 1er alinéa, de l'additif constitutionnel en vigueur.

La seule différence consiste dans l'adjonction des termes «non agricoles» après «fermages». Ce complément exprime deux choses. D'une part, il indique que le nouvel additif ne doit pas servir de fondement au contrôle des fermages agricoles. On ne peut cependant supprimer purement et simplement le terme «fermages». Il convient au contraire d'indiquer expressément dans l'additif lui-même que la Confédération peut édicter des dispositions au sujet des fermages non agricoles. On ne crée pas ainsi le fondement d'un nouveau genre d'intervention, mais on indique seulement de façon claire que le contrôle des loyers peut tout d'abord être maintenu comme jusqu'ici. Le droit en vigueur connaît un contrôle des fermages non agricoles puisqu'ils sont textuellement assimilés aux loyers selon l'article 1er, 2e alinéa, de l'ordonnance du 28 décembre 1956 concernant le contrôle des loyers et la limitation du droit de résiliation. Bien qu'il puisse exister encore d'autres formes de fermages non agricoles, le contrôle se limite aux cas dans lesquels la cession porte simultanément sur l'exploitation d'une entreprise (par exemple auberge, restaurant) et sur l'usage d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble. S'il n'englobait pas le contrôle des fermages non agricoles, le contrôle des loyers serait incomplet, notamment en ce qui concerne les choses cédées pour une exploitation artisanale ou industrielle.

2e alinéa. L'importance de cet alinéa réside avant tout dans le fait que, en acceptant le présent additif constitutionnel, le peuple et les cantons chargeraient l'Assemblée fédérale et le Conseil fédéral du mandat exprès de procéder à la démobilisation du contrôle des loyers, alors que l'additif en vigueur actuellement ne contient pas pareil mandat. Cependant, la démobilisation devra se faire prugressiveineiiL, aûn de répartir dans le temps les hausses de loyers qui en résulteront. Etant donnée l'incertitude de l'évolution, il faudra, le cas échéant, prendre garde aux répercussions

493

graves qui pourraient se produire et toucher l'économie tout entière. C'est ce qui nous a engagés à ajouter à l'obligation de démobiliser progressivement le contrôle la réserve: «dans la mesure où cela est faisable sans qu'il en résulte de troubles pour l'économie dans son ensemble». Ainsi, même après l'adoption du nouvel additif constitutionnel, il conviendra d'étudier et de supputer avec soin les objections pouvant être invoquées contre les mesures d'assouplissement envisagées. Des répercussions fâcheuses portant sur un cas particulier ou se limitant à certains milieux de la population ou branches de l'économie, ou encore la conséquence inévitable d'une augmentation supportable de l'indice des prix à la consommation, ne pourront, cependant, être considérées comme «troubles pour l'économie dans son ensemble». Pour admettre l'existence de tels troubles, il faudrait que les conséquences de l'assouplissement aient une certaine importance affectant l'économie dans son ensemble, qu'elles causent préjudice, par exemple à notre commerce d'exportation en général. Sans exclure une démobilisation selon le système (adopté jusqu'ici) d'autorisations générales et successives de hausses des loyers et de libérations du contrôle portant sur certaines localités et régions ou certaines catégories de choses louées, le texte mentionne expressément la possibilité de remplacer le contrôle par une surveillance des loyers telle qu'elle a été exposée au chapitre IV, chiffre 4, du présent message. Cette surveillance rétablirait en principe la liberté en ce qui concerne la formation des loyers, tout en empêchant une majoration excessive et incontrôlée de ceux-ci, dans l'intérêt des locataires et de l'économie dans son ensemble. Ainsi sont maintenues les deux possibilités de démobilisation progressive. Pour ce qui est de la forme à donner à la surveillance des loyers, le futur arrêté fédéral sur l'application du contrôle des prix pourra prévoir -- en se fondant sur l'article premier, 2e alinéa, de l'additif constitutionnel que nous vous proposons ·-- le droit de recours des locataires ou d'autres mesures destinées à empêcher des majorations excessives, ainsi que la protection nécessaire contre les résiliations injustifiées selon le premier alinéa du même article. En revanche, il ne sera pas possible de soumettre à la
surveillance des loyers les bâtiments construits depuis 1947, parce que cela serait contraire à la volonté -- clairement exprimée dans l'additif constitutionnel -- de démobiliser le contrôle des loyers. D'autre part, il serait en principe loisible d'étendre la protection en matière de résiliation ou de la réappliquer à tous les immeubles qui ne sont pas exempts du contrôle.

3e alinéa. Cet alinéa correspond à la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 1er de l'additif constitutionnel en vigueur. A considérer les choses du point de vue strictement juridique, cette disposition serait en fait superflue puisque le législateur fédéral passe pour être fondé, même sans autorisation constitutionnelle expresse, à déléguer ses attributions aux cantons (cf. Fleiner/Giacometti, Schweizerisches Bundesstaatsrecht, pages 123/124). Il n'en apparaît pas moins judicieux, en l'occurrence, de signaler Feuille fédérale. 111e année. Vol. II.

35

494 expressément cette possibilité qu'a la Confédération de déléguer ses attributions aux cantons. Bien entendu, le législateur fédéral peut, en se fondant sur cette disposition, non seulement autoriser mais encore obliger les cantons à prendre des dispositions complémentaires. Nous pensons par exemple au cas où il ne serait pas possible ou opportun de définir en droit fédéral une catégorie de choses louées à libérer du contrôle (par exemple «logements chers))) de façon assez précise pour que la prescription à ce sujet puisse être directement applicable. Il pourrait alors être indiqué de laisser au droit cantonal le soin d'établir les précisions nécessaires en tenant compte des conditions locales.

Article 2 On entend, par cette disposition, montrer clairement que la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers doit faire face ellemême à ses frais et qu'il y a lieu de tendre à son abolition. L'additif constitutionnel en vigueur a déjà été édicté en vue de permettre une démobilisation progressive. C'est pourquoi on s'est refusé d'une manière conséquente à augmenter les prestations de la caisse. Il faut entendre par subsides provenant des ressources générales de la Confédération au sens de cet article les subventions de la Confédération à la caisse qui ne proviennent pas de ressources attribuées à des fins déterminées, telles qu'elles sont mentionnées à l'article 11, 3e alinéa, de l'arrêté fédéral du 28 septembre 1956 instituant les dispositions applicables au maintien d'un contrôle des prix réduit, dont la teneur est la suivante : Pendant la durée de validité du présent arrêté et en dérogation à l'article 26 de la loi sur l'agriculture, la caisse de compensation tirera, dans la mesure nécessaire, ses ressources du produit des taxes sur le lait de consommation (redevance de crise) et la crème de consommation, ainsi que du produit du droit de douane supplémentaire sur le beurre. La caisse sera organisée de manière à se suffire BÌ possible à elle-même,

A cet égard, on se référera à l'article 19 du même arrêté fédéral, qui doit être considéré comme déterminant également pour la réglementation à l'avenir. Il est conçu en ces termes : En tant que les mesures prévues à l'article 26, I6r alinéa, lettre b, de la loi sur l'agriculture subiront une restriction du fait que le rendement des taxes perçues sur le lait et la crème de consommation ainsi que du droit supplémentaire sur les importations de beurre est afîecté à la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers, l'application de ces mesures sera l'objet de subsides annuels ne dépassant pas le dit rendement. Ces prestations seront couvertes par le rendement des suppléments de prix perçus sur les matières fourragères en tant que les fins prescrites dans la loi sur l'agriculture peuvent être atteintes sans ce rendement. Si ce rendement ne suffit pas, les subsides seront prélevés sur les ressources générales de la Confédération.

La disposition de l'article 1er, 2e alinéa, de l'arrêté fédéral sur les mesures complémentaires d'ordre économique et financier applicables à l'économie laitière, qui, entré en vigueur, remplacera l'article 19, correspond à cette réglementation (FF 1959, I, 1571).

495 Par les mots «prestations accordées jusqu'ici», nous entendons les taux locaux et régionaux des différentes prestations accordées, telles que suppléments de marge aux laiteries et au commerce du lait, frais supplémentaires pour lait de secours et lait de renfort, indemnités de charroi et suppléments de frais de transport pour le lait de consommation du rayon normal d'approvisionnement. Le maintien de l'activité «dans les limites des prestations accordées jusqu'ici» veut dire qu'il sera en principe exclu d'élargir ces prestations ou d'en majorer le taux. Les hausses de frais ne pourront par conséquent être couvertes que par une majoration du prix de détau du lait.

Article 3 Cet article est mot pour mot le même que l'article 2 de l'additif en vigueur. On s'est demandé à plusieurs reprises si ces dispositions répondaient à un besoin puisqu'il existe celles de l'article 18, lettres a et b, de la loi fédérale du 30 septembre 1955, sur la préparation de la défense nationale économique dont la teneur est la suivante : Lorsque l'importation de marchandises indispensables est sérieusement entravée ou eu cas de danger de guerre imminent, le Conseil fédéral peut, pour une durée limitée : a. Edicter des prescriptions sur la production, 1» transformation, l'emploi, la vente et l'achat de marchandises déterminées; 6. Edicter pour ces marchandises, en tant qu'elles sont destinées à la consommation intérieure, des prescriptions sur les prix maximums et prendre des mesures de compensation des prix.

La comparaison montre immédiatement que l'article 18, lettre 6, a un champ d'application beaucoup plus restreint, en fait, que l'article 2 de l'additif constitutionnel en vigueur. Selon l'article 18, lettre b, de ladite loi, le Conseil fédéral ne peut édicter des prescriptions sur les prix maximums et prendre des mesures de compensation des prix que pour des marchandises dont la production, la transformation, l'emploi, la vente et l'achat font déjà l'objet d'une réglementation. Cette loi n'accorde d'ailleurs la compétence en question que lorsque l'importation de marchandises indispensables est sérieusement entravée ou en cas de danger de guerre imminent.

Le champ d'application de l'article 3 de l'additif constitutionnel joint à ce message s'étend en revanche à toutes les marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur, qui ne sont pas protégées par des interventions fondées sur l'article 31 bis, 3e alinéa, lettres a ou b, de la constitution, et pour lesquelles la Confédération peut édicter des prescriptions sur les prix en vertu de la compétence implicite dont il a été question au chapitre I, chiffre 3, lettre a, de ce message. Pour ces marchandises de première nécessité, le Conseil fédéral peut prescrire provisoirement des prix maximums, sous réserve de les faire approuver ensuite par l'Assemblée fédérale.

496

IX. Conclusion La suppression du contrôle des loyers et de la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers d'ici à la fin de 1960 entraînerait des hausses sensibles des loyers et des prix. Celles-ci pourraient déclencher des majorations de salaires, une hausse des prix des denrées alimentaires et, de ce fait, un accroissement général du niveau des prix et des frais. Il pourrait en résulter une réduction sensible de la capacité de concurrence de notre économie et une baisse du pouvoir d'achat de la monnaie, si ce mouvement ascensionnel n'était pas retardé et réparti sur plusieurs années. Il convient donc de proroger pour une durée limitée la validité de ces mesures de contrôle des prix issues de l'économie de guerre, afin d'éviter des répercussions auxquelles il y a lieu de s'attendre. C'est pourquoi il est nécessaire de mettre sur pied un additif constitutionnel dont la durée sera limitée à quatre ans.

L'application du contrôle des loyers entraîne toutefois des conséquences fâcheuses telles que des distorsions en matière de prix, des déplacements dans les revenus et des inégalités qui sont à la longue néfastes. Il importe de corriger peu à peu ces conséquences indésirables. A cet effet, on devrait réduire graduellement le contrôle des loyers au cours de ce nouveau délai de quatre ans. Il conviendrait d'accélérer le rétablissement de la liberté sur le marché du logement en passant au système, déjà exposé, de la surveillance des loyers ou en réduisant de manière appropriée l'écart existant entre les loyers des anciens et des nouveaux logements par le moyen des autorisations générales de hausses ainsi que par d'autres mesures d'assouplissement, compte tenu de la diversité des conditions selon les régions, La caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers devra également être organisée, de telle façon qu'elle puisse supporter elle-même les frais qu'elle entraînera à partir du 1er janvier 1961, puis être peu à peu supprimée.

Quatorze ans après la fin de la guerre, il est absolument nécessaire de faire une distinction entre les tâches du contrôle des prix qui sont permanentes et celles qui doivent être limitées dans le temps. Le contrôle des prix des marchandises protégées, la caisse de compensation des prix des oeufs et des produits à base d'oeufs ainsi que le
contrôle des fermages représentent pour la Confédération des tâches permanentes que nul ne conteste. Elles peuvent être maintenues dans les mêmes limites que jusqu'ici et faire l'objet d'arrêtés à l'échelon législatif fondés sur l'article 316is, 3e alinéa, lettres a et 6, de la constitution. Nous vous soumettrons en temps voulu et séparément des messages et des propositions à ce sujet.

En revanche, la constitution ne contient aucune disposition qui pourrait servir de base au maintien des tâches transitoires du contrôle des prix, telles que le contrôle des loyers, la protection des locataires (limitation du droit de résiliation), la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers et la faculté d'édicter des prescriptions sur les pris de marchandises

497

de première nécessité destinées au marché intérieur. C'est pourquoi il est nécessaire de permettre leur maintien temporaire en insérant les dispositions correspondantes dans un additif constitutionnel.

Nous fondant sur ce qui précède, nous vous proposons d'adopter le projet d'arrêté fédéral (additif constitutionnel) ci-joint sur le maintien de mesures temporaires en matière de contrôle des prix.

Nous vous proposons en même temps de classer le postulat du Conseil des Etats n° 7087 et celui du Conseil national n° 7238 auxquels il a été donné suite par le présent message.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 25 août 1959.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de, la Confédération, P. Chaudet 12698

Le. chancelier de la Confédération, Ch. Oser

(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL BUT

le maintien de mesures temporaires en matière

de contrôle des prix L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les article 83, chiffres 14, 118 et 121, 1er alinéa, delà constitution; vu le message du Conseil fédéral du 25 août 1959, pour éviter que l'abrogation de certaines mesures du contrôle des prix n'entraîne de fâcheuses répercussions d'ordre économique ou social, arrête: I

La constitution fédérale du 29 mai 1874 est complétée par les dispositions suivantes :

498

Article premier 1

La Confédération peut édieter des prescriptions sur les loyers et les fermages non agricoles ainsi que sur la protection des locataires.

2 Le contrôle des loyers sera réduit graduellement, dans la mesure où cela est faisable sans qu'il en résulte de troubles pour l'économie dans son ensemble. Il pourra être remplacé par une surveillance qui permette en principe une libre formation des loyers tout en empêchant qu'ils ne subissent une hausse démesurée.

3 La Confédération peut déléguer ses attributions aux cantons.

Art. 2 L'activité de la caisse de compensation des prix du lait et des produits laitiers peut être poursuivie, mais sans subsides provenant des ressources générales de la Confédération et tout au plus dans les limites des prestations accordées jusqu'ici, qu'il faudra tendre à supprimer.

Art. 3 Si le Conseil fédéral propose à l'Assemblée fédérale d'édicter des prescriptions sur les pris maximums de marchandises de première nécessité destinées au marché intérieur, il est autorisé à mettre lui-même ces prescriptions immédiatement en vigueur.

2 Ces prescriptions cesseront de porter effet si, au cours de la session qui suit leur entrée en vigueur, l'Assemblée fédérale ne les approuve pas par un arrêté fédéral soumis au referendum.

1

II 1 2

Le présent arrêté est valable du 1er janvier 1961 au 31 décembre 1964.

II sera soumis à la votation du peuple et des cantons.

12896

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien du contrôle des prix (Du 25 août 1959)

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03.09.1959

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