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FEUILLE FÉDÉRALE 111e année

Berne, le 22 octobre 1959

Volume II

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 30 franca par an; 16 franca pour sis mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou aon espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des Hoirs C.-J.Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'institution du vote anticipé en matière fédérale (Du 8 octobre 1959) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet de loi instituant le vote anticipé en matière fédérale.

I. Introduction L'article 9 de la loi du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux prévoit que les votations fédérales doivent avoir lieu le même jour pour toute l'étendue de la Confédération et que ce jour est déterminé par le Conseil fédéral. Cette disposition, instituée pour les votations sur les actes législatifs soumis au referendum facultatif, vaut aussi pour les votations sur la revision de la constitution par l'effet d'un renvoi à la loi de 1874 qui figure à l'article 16 de la loi du 27 janvier 1892 concernant le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution fédérale.

Jusque vers la fin du siècle dernier, cette limitation de la votation à un seul jour -- le dimanche -- ne semble pas avoir gêné beaucoup les citoyens.

Dans les années «90» se manifesta cependant le désir de voir faciliter l'exercice du droit de vote, notamment par l'institution du scrutin du samedi.

Le Conseil fédéral consulta les gouvernements cantonaux, qui se montrèrent en majorité favorables à cette mesure, soit sans réserve, soit avec des restrictions (ouverture facultative du scrutin, limitation à certaines catégories de citoyens, etc.). Six cantons et trois demi-cantons répondirent négativement.

Se fondant sur ces préavis en majorité favorables, le Conseil fédéral déposa devant les chambres le 18 mai 1899 un projet de loi autorisant les cantons à ouvrir le scrutin dès la veille (Vorabend) du jour fixé pour l'élecFeuille fédérale. llle année. Vol. II.

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tion et les votations. Une disposition du projet prévoyait que cette facilité pouvait être accordée «pour tout le territoire du canton ou pour une partie de ce territoire seulement, à tous les électeurs ou à certaines catégories d'entre eux». L'Assemblée fédérale adopta ce projet après avoir supprimé le membre de phrase concernant la possibilité de limiter la facilité à certaines catégories d'électeurs et inséré quelques dispositions complémentaires. On eut ainsi la loi du 30 mars 1900 «facilitant l'exercice du droit de voter et simplifiant les opérations électorales».

Soucieux de donner suite aux voeux tendant à une extension de cette possibilité de voter le samedi soir, le Conseil fédéral déclara dans une circulaire du 16 mars 1925 (FF 1925, I, 839), qu'on n'agirait certainement pas contre l'esprit de la loi de 1900 en faisant commencer le samedi à midi «la veille du jour fixé pour l'élection et la votation». Le 3 avril de la même année, il adressa aux cantons une nouvelle circulaire (FF 1925, II, 149) dans laquelle il constatait que le mot allemand Vorabend était rendu en français par la «veille» et en italien par la vigilia, et en tirait la conclusion qu'on pouvait interpréter la pensée du législateur en ce sens que la facilité prévue devait s'étendre à la veille entière.

Le Conseil fédéral recommanda en même temps aux cantons de pourvoir a ce que, dans les communes où le scrutin n'est ouvert la veille que vers le soir ou n'est pas ouvert du tout, l'électeur empêché pour une raison plausible de se rendre aux urnes durant les heures d'ouverture puisse remettre son bulletin de vote sous pli fermé à un fonctionnaire communal dès le samedi matin.

Les choses en restèrent là jusqu'il y a une dizaine d'années, c'est-à-dire jusqu'au moment où les chambres discutèrent un projet de loi tendant à faciliter l'exercice du droit de vote lors des élections et votations fédérales.

Il s'agissait d'un projet de loi que la commission du Conseil national (qui avait voulu soumettre à ce Conseil un projet foncièrement différent de celui du Conseil fédéral (1) avait établi elle-même, avec l'aide de la chancellerie fédérale, pour régler la question du vote anticipé et du vote des citoyens empêchés de se rendre au bureau de vote de leur commune de domicile.

Les dispositions sur le vote anticipé ne donnèrent pas
lieu à de longs débats au Conseil national, ni plus tard au Conseil des Etats. Notons toutefois que dans la phase initiale de la procédure, le Conseil national ne les adopta que par 46 voix contre 26. Ces 26 voix négatives furent recueillies par une proposition de rejet déposée par un député de Genève, M. de Senarclens, qui craignait que les communes, surtout les communes rurales, n'aient de la peine à trouver le nombre nécessaire de citoyens pour le service des urnes.

Le projet de loi ayant été rejeté par le Conseil des Eta,ts en votation finale -- évidemment en raison de l'opposition suscitée par les articles sur (*) Message du 20 août 1947 concernant un projet de loi relatif à l'exercice du droit de vote par les citoyens absents de leur domicile (FF I, 147; II, 764).

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le vote par la poste -- les dispositions sur le vote anticipé demeurèrent lettre morte.

Le principe des mesures à prendre pour permettre aux citoyens de voter déjà avant le samedi ayant été accepté par les conseils législatifs, sans avoir été très sérieusement combattu, il était naturel que les dispositions sur le vote anticipé aient figuré dans les avant-projets de loi établis dans la suite par la chancellerie fédérale au sujet des mesures à prendre pour faciliter l'exercice du droit de vote en matière fédérale. Invités à donner leur avis, les gouvernements cantonaux se déclarèrent en général favorables, tout en faisant, ici et là, des réserves sur les modalités d'application. Plusieurs cantons connaissent d'ailleurs ces mesures depuis des années en matière cantonale, tandis que d'autres les ont instituées plus récemment. Actuellement, la possibilité de voter avant le samedi -- soit dans un bureau de vote, soit par la remise du bulletin à un fonctionnaire -- existe dans les cantons suivants, soit pour tout le territoire cantonal, soit pour certaines communes : Cantons

Possibilité de voter

Forme

Zurich

Cas ordinaires : dès vendredi Cas d'empêchement : dès le jeudi

Zoug

Dès le vendredi

Bureau de vote Remise du bulletin à un fonctionnaire Bureau de vote

Baie-Campagne Dès la veille de l'ouverture du bureau Remise à un fonctionnaire Saint-Gali Dès le jeudi Remise à un fonctionnaire Argovie Dès la veille de l'ouverture du bureau Remise à un fonctionnaire Thurgovie Dès le vendredi Remise à un fonctionnaire Vaud Dès le vendredi Bureau de vote Dès le 10e jour avant le scrutin Remise à un fonctionnaire Nëuchâtel Dès le jeudi Remise à un fonctionnaire Genève Dès le vendredi Bureau de vote Berne, Lucerne et Glaris

ont prévu le vote anticipé en vue du jour où la Confédération l'aura institué à son tour.

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II. Convietit-il d'instituer le vote anticipé en matière fédérale ?

Le désir de voir la Confédération adapter les possibilités de vote aux conditions de vie actuelles, qui sont profondément modifiées depuis la fin du siècle dernier, s'est exprimé récemment dans un postulat déposé au Conseil national par M. Freimüller le 3 juin 1958 et par une lettre du Conseil d'Etat du canton de Berne à la chancellerie fédérale du 30 septembre de la même année.

Le postulat Freimüller, qui n'a pas encore été développé, est rédigé comme suit: Le Conseil fédéral est invité à examiner si, eu égard à l'institution partielle de la semaine de cinq jours, le scrutin ne pourrait pas être ouvert déjà le vendredi avant le dimanche fixé pour la votation et à présenter un projet de modification des dispositions légales.

La lettre adressée par le Conseil d'Etat à la chancellerie expose ce qui suit: De grandes communes industrielles demandent, ces derniers temps, au Conseil d'Etat, l'autorisation d'ouvrir le scrutin le vendredi qui précède le jour de la votation.

Nos dispositions cantonales obligent les communes à ouvrir le scrutin au moins une heure la veille du jour de la votation et les autorise à étendre ce temps d'ouverture à la journée entière. C'est ainsi que Bienne ouvre, la veille, deux urnes à la gare et a la Burg, de 7 à 20 heures. Lors de la revision de notre décret sur les votations, le 26 novembre 1958, nous aurions voulu pouvoir permettre aux communes d'ouvrir le scrutin le vendredi. La chancellerie fédérale estimant ne pouvoir donner l'autorisation dans ce sens pour les élections et votations fédérales, nous avons dû y renoncer. On n'eût fait que mécontenter les citoyens en leur permettant de voter le vendredi eu matière cantonale et en les empêchant de le faire en matière fédérale. Nous avons cependant inséré dans notre décret révisé une disposition autorisant le Conseil d'Etat à instituer des facilités, notamment le scrutin depuis le vendredi, en matière cantonale pour le cas où les dispositions fédérales autoriseraient les cantons à prévoir le scrutin du vendredi.

Le système de la semaine de cinq jours étant de plus en plus appliqué dans les fabriques, nous comprenons le voeu de nos communes industrielles. Dans le canton de Berne, le pour-cent des ouvriers qui travaillent cinq jours par semaine est le suivant: Arts graphiques Machines, appareils, instruments .

Habillement et lingerie Industrie des métaux Industrie des textiles Alimentation Instruments de musique . . . .

% 65,3 64,4 61,2 65,7 49,5 47,8 46,3

Horlogerie et bijouterie Industrie chimique Industrie du bois Industrie du cuir et caoutchouc .

Industrie du papier Industrie de l'équipement . . . .

Pierre et terre Moyenne

% 43,2 36,9 29,0 23,1 21,7 1.9,4 11,9 48,7

Le passage à la semaine de cinq jours dans les fabriques est un mouvement qui continue. Nous reconnaissons cependant que l'ouverture obligatoire du scrutin le vendredi ne peut pas entrer en considération pour les petites communes, celles-ci constatant déjà que les citoyens ne font pas usage de voter le samedi.

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II serait donc indiqué que l'ouverture du scrutin le vendredi puisse être prévue à titre facultatif dans le canton de Berne aussi pour les élections et votations fédérales.

C'est pourquoi nous prions les autorités compétentes de proposer le plus rapidement possible l'institution facultative du vote du vendredi sans attendre la fin des études concernant les autres facilités.

Il y a lieu de signaler ici que les autorités genevoises ont fait en juillet 1958 une enquête auprès des électeurs du canton pour établir quelles innovations sont jugées désirables en matière de votations et d'élections et que 13 582 citoyens ont répondu «oui» à la question de savoir s'il était indiqué d'ouvrir à l'hôtel de ville un bureau de vote durant toute la journée pendant la semaine précédant le scrutin. Il n'y a eu que 5796 non.

Nous ne sommes pas certains que l'institution du vote anticipé accroîtrait beaucoup la participation au scrutin. Les faibles pour-cent enregistrés ça et là dans les votations cantonales (ici 3 pour cent des votants, là moins de 1 pour cent, etc.) n'incitent pas à se bercer de grandes illusions sur les effets de l'innovation. Les pouvoirs publics doivent toutefois tendre à ce que le plus grand nombre possible de citoyens soient mis en mesure d'exercer leur droit de vote, de façon que le résultat de l'élection ou de la votation manifeste avec un maximum de fidélité la volonté populaire. C'est pourquoi nous sommes d'avis qu'il faut chercher à faciliter dans une mesure raisonnable l'exercice des droits civiques. L'institution du vote anticipé en est un moyen.

La requête du gouvernement bernois, qui décrit des conditions qui sont pareilles dans la plupart des cantons, porte à conclure, que, par suite des circonstances nouvelles --- notamment du fait de l'institution toujours plus généralisée de la semaine de cinq jours -- il y a un peu partout, mais surtout dans les régions industrielles, un nombre croissant de citoyens qui quittent leur commune avant le samedi et auxquels il faudrait donner la possibilité de voter puisque cela peut se faire (comme nous le verrons plus loin) sans mise sur pied d'un appareil hors de proportion avec le rendement escomptable.

III. Faut-il instituer le vote anticipé à titre obligatoire ou facultatif pour les cantons ?

Comme il s'agit d'une facilité destinée aux citoyens désirant participer à des votations fédérales, on doit se demander si le vote anticipé ne devrait pas être institué obligatoirement pour tout le territoire suisse, par n n p. disposition fédérale prescrivant que les locaux de vote seront ouverts tels jours avant le dimanche de la votation. Une telle uniformité ne serait cependant pas désirable, car, comme l'indique la
lettre du Conseil d'Etat du canton de Berne, les besoins des citoyens et les possibilités des autorités diffèrent par trop d'un heu à l'autre. On ne saurait en effet exiger des pouvoirs publics qu'ils mettent sur pied, pour les élections et votations, un appareil sans rapport avec les besoins réels.

738 Si l'institution du vote anticipé doit dépendre largement des besoins des citoyens dans tel ou tel lieu et des dispositions que les autorités sont à même de prendre pour assurer l'exercice du droit de vote sous cette forme, il importe cependant que la possibilité de voter avant le samedi ou le dimanche ne dépende pas de la seule législation cantonale et que le droit fédéral assure un minimum d'uniformité. Nous croyons donc que la solution consiste à instaurer le vote anticipé d'une manière obligatoire mais quand même assez souple pour tenir compte des conditions particulières. On appliquerait ainsi le principe selon lequel les élections et votations fédérales ont lieu d'après les prescriptions des lois cantonales, mais sous réserve des dispositions du droit fédéral (voir l'art. 1er de la loi de 1872).

IV. Faut-il instituer le vote anticipe par la voie législative ?

Interprétant à la lettre, peut-être trop à la lettre, la disposition qui prescrit que les votations ont lieu «le même jour pour toute l'étendue de la Confédération» (art. 9 de la loi de 1874), la pratique a toujours considéré que cette disposition signifie non seulement que la votation ne peut pas avoir lieu à des dates différentes dans les cantons mais encore que les bureaux de vote ne peuvent pas être ouverts deux jours de suite. Dans un rapport destiné à la société suisse des juristes (fascicule 3, 1959, p. 457»), M. Usteri, avocat à Zurich, soutient que le Conseil fédéral pourrait fort bien instituer lui-même le vote anticipé, l'article 9 susmentionné ne s'y opposant aucunement. Nous ne croyons pas que cette façon de procéder soit licite, étant donné qu'il y a lieu d'observer non seulement l'article 9 de la loi de 1874 mais aussi l'article premier de la loi du 30 mars 1900 facilitant l'exercice du droit de voter et simplifiant les opérations électorales, lequel article premier autorise les cantons «à ouvrir le scrutin dès la veille du jour fixé pour l'élection ou la votation» et signifie a contrario qu'il est interdit de l'ouvrir avant. L'institution du vote anticipé en matière fédérale est de nature à exercer sur le droit cantonal une influence telle qu'il paraît d'ailleurs préférable de procéder par la voie législative, même si la voie de l'ordonnance ou de la circulaire était ouverte.

V. Le contenu de notre projet de loi
A in ai que nous l'avons rappelé, le projet de loi rejeté par le Conseil des Etats en 1952 prévoyait à la fois l'institution du vote anticipé et du vote par la poste, ce qui était fort naturel, étant donné qu'il s'agissait de deux facilités de même ordre. Les délibérations des chambres sur ce projet de loi et les enquêtes faites dans la suite auprès des cantons au sujet d'une autre forme de vote a instituer pour assurer le vote des malades et des absents (ou de certains absents) ont révélé qu'il s'agit là d'une question extrêmement complexe et délicate, sur laquelle les avis peuvent diverger considérablement.

739 Les travaux qu'exigé la mise au point du message et des dispositions concernant le vote des malades et des absents ne sont pas encore achevés. Une fois saisies d'un projet, les chambres n'adopteront peut-être pas très rapidement les dispositions proposées. C'est pourquoi nous tenons pour indiqué de dissocier cette question de celle -- beaucoup plus simple -- du vote anticipé, que certains cantons sont pressés de voir régler sui' le plan fédéral. Aucun canton n'a élevé d'objections contre ce traitement séparé des deux questions.

L'un d'entre eux a même trouvé l'idée particulièrement heureuse.

L'inconvénient de faire deux lois au lieu d'une seule dans un domaine oii il existe déjà un assez grand nombre de lois (lois de 1872, 1874,1892, 1900 et 1919) ne doit pas peser plus que l'intérêt qu'il y a à régler rapidement la question du vote des citoyens -- toujours plus nombreux --- qui quittent leur domicile en fin de semaine. L'adoption d'une loi spéciale sur le vote anticipé n'augmentera d'ailleurs pas le nombre des lois en vigueur puisqu'elle entraînera l'abrogation de la loi du 30 mars 1900 autorisant le vote du samedi.

VI. Les deux formes de vote anticipé Pour le vote dans les formes ordinaires, la loi --· c'est-à-dire les lois, décrets et règlements cantonaux -- prévoit diverses mesures aux fins d'assurer la sécurité du scrutin. On exige par exemple que le citoyen puisse remplir son bulletin à l'abri de tout regard indiscret et de toute pression et que l'introduction du bulletin dans l'urne soit rigoureusement contrôlée par un ou plusieurs membres du bureau. Ici et là, l'usage d'un isoloir est même prescrit. Tant que l'institution du vote anticipé consiste dans l'ouverture avancée du scrutin, sans dérogation appréciable aux dispositions valables pour le scrutin, du dimanche ou du samedi, elle ne peut guère soulever d'objections en ce qui concerne la sécurité du vote. L'ouverture de bureaux de vote fonctionnant dans les formes ordinaires peut cependant constituer, nous l'avons dit, une charge par trop lourde pour les communes, notamment pour les communes rurales, qui auraient de la peine à mettre sur pied un bureau de vote apte à fonctionner avant le samedi. C'est pourquoi nous pensons que la loi doit, comme le projet rejeté en 1952, prévoir non seulement l'ouverture avancée du scrutin, mais
aussi la remise du bulletin à un fonctionnaire de la commune, selon la procédure adoptée par la plupart des cantons qui ont institué le vote anticipé en matière cantonale.

Certes, la remise anticipée du bulletin est loin d'offrir les garanties de sécurité qu'offre le vote dans un bureau de vote, même si le fonctionnaire qui reçoit le bulletin est tenu de l'introduire immédiatement dans une urne.

Cette forme de vote doit cependant être considérée comme acceptable pour les trois raisons que voici:

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-- Le Conseil fédéral l'a déjà autorisée dans sa circulaire du 3 avril 1925 (il est vrai pour le samedi seulement et pour les citoyens empêchés «pour une raison plausible» de se rendre aux urnes durant les heures d'ouverture).

-- Les militaires qui entrent au service quelques jours avant les votations remettent déjà leur bulletin en mains d'autorités communales.

-- Une demi-douzaine de cantons connaissent déjà cette forme de vote en matière cantonale et paraissent s'en être bien trouvés, encore qu'il faille constater --· comme nous l'avons fait plus haut -- que le nombre des citoyens recourant à cette forme de vote n'est pas considérable et ne dépasse pas un tout petit pour-cent.

VII. Les mesures prévues par le projet Partant du principe qu'il faut éviter de mettre sur pied, en matière d'élections et de votations, un appareil qui dépasse nettement les besoins du corps électoral, l'article 1er, j?er alinéa, autorise et n'oblige pas les cantons à instaurer le scrutin anticipé. Il leur laisse en outre le soin de fixer l'ouverture de ce vote dans la limite des quatre jours précédant le dimanche de la votation. Ils peuvent aussi déterminer la partie du territoire cantonal où l'on pourra user de cette facilité et limiter ainsi le vote anticipé aux communes populeuses, où un nombre appréciable de citoyens useront vraisemblement de la facilité et où la réception des bulletins ne créera pas de trop grandes difficultés. Cet alinéa, nous venons de le dire, permet aux cantons d'ouvrir le vote anticipé quatre jours avant le dimanche de la votation. Lors d'une conférence réunissant les représentants des cantons pour traiter ces questions de facilités en matière de votations, le représentant du canton de Vaud a exprimé l'avis qu'il conviendrait de laisser aux cantons une marge de dix jours, ainsi que le prévoit la loi vaudoise qui a institué cette forme de vote pour les élections et votations cantonales. Le souci d'harmoniser le droit fédéral à créer avec le droit cantonal préexistant -- pour qu'un canton ne soit pas contraint d'appliquer des règles différentes en matière fédérale et cantonale s'il ne veut pas adapter son droit à celui de la Confédération -- inciterait à proposer une marge de dix jours. Mais il y a là une question d'égalité de traitement. Bien que les votations fédérales aient lieu en principe
d'après les prescriptions cantonales (voir l'article 1er de la loi de 1872), que notre projet s'efforce de créer un régime extrêmement souple et qu'il n'y ait pas restriction en ce qui concerne le jour à partir duquel les militaires qui entrent au service peuvent remettre leur bulletin à l'autorité de leur commune de domicile, une certaine uniformité nous paraît s'imposer quant au nombre de jours durant lesquels les cantons pourront ouvrir le scrutin anticipé pour les civils. Il nous paraît difficilement acceptable qu'on puisse, en matière fédérale, voter dans un

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canton dix jours avant le dimanche de la votation alors que dans tel autre on ne le pourrait qu'un, deux ou trois jours d'avance, et encore pas dans toutes les communes.

L'article 1er, 2e alinéa, contient une règle qui va presque de soi, à savoir que là où le vote anticipé est prévu pour les votations cantonales, il doit être institué pour les votations fédérales dans une mesure semblable, mais seulement dans la limite des quatre jours précédant le dimanche de la votation. La loi de 1900 qui a institué le vote du samedi contient une disposition analogue.

Si le projet de loi s'efforce de laisser un maximum de liberté aux cantons, de façon qu'ils puissent tenir largement compte des possibilités et besoins locaux, l'article 1er, 3e alinéa, apporte un tempérament à ce principe en prévoyant que le vote anticipé doit être instauré pour le samedi et le vendredi dans les communes d'une certaine importance, c'est-à-dire les communes comptant plus de 500 citoyens actifs, et dans les autres communes où il est demandé par au moins trente citoyens quatorze jours avant la votation.

Un avant-projet de la chancellerie fédérale portait les chiffres de 150 et 15.

Pour tenir compte des voeux exprimés par les représentants de certains cantons lors de la conférence qui eut lieu au début de 1959, nous avons remplacé ces chiffres par ceux de 500 et 30, estimant que le droit fédéral ne doit pas obliger les communes de prendre des dispositions pour le vote anticipé lorsqu'il est à prévoir que seul un très petit nombre de citoyens feraient usage de cette facilité.

L'article 2 est la disposition qui laisse aux cantons le choix entre le vote anticipé dans un bureau de vote et la procédure, déjà plusieurs fois mentionnée, qui consiste dans la remise du bulletin à un fonctionnaire. Il n'appelle pas de remarque spéciale, si ce n'est qu'il nous paraît nécessaire d'autoriser aussi cette seconde forme de vote, qui est la forme courante dans les cantons qui connaissent le vote anticipé. Nous nous sommes demandé s'il fallait prévoir dans la loi que le bulletin du citoyen qui vote avant l'ouverture générale du scrutin doit être introduit dans une urne non seulement lorsque fonctionne un bureau de vote ad hoc mais aussi lorsqu'il y a simple remise du bulletin à un fonctionnaire. Bien qu'il nous paraisse de toute importance qu'il
y ait toujours une urne, nous avons renoncé à insérer dans le projet une disposition la prescrivant expressément, ceci pour tenir compte du principe selon lequel les votations ont lieu, d'une façon générale, selon les prescriptions du droit cantonal.

L'article 3, qui prévoit simplement que les cantons édictent les dispositions nécessaires pour empêcher les abus, n'appelle pas de remarques particulières.

Pour les motifs susindiqués, nous vous recommandons d'adopter le projet de loi ci-annexé.

742 Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre considération distinguée.

Berne, le 8 octobre 1959.

Au nom du Conseil fédéral suisse: 12731

.

Le président de la Confédération, P. Chaudet Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

LOI FÉDÉRALE instituant

le vote anticipé en matière fédérale

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu les articles 73, 90 et 122 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 8 octobre 1959, arrête:

Article premier 1

Les cantons sont autorisés à instituer en matière fédérale le scrutin anticipé pour un ou plusieurs des quatre jours précédant le dimanche de la votation, soit pour tout le territoire cantonal soit pour certaines communes.

2

Là où le vote anticipé est prévu pour les votations cantonales, il doit être institué pour les votations fédérales dans une mesure semblable, mais seulement dans la limite des quatre jours précédant le dimanche de la votation.

3 Pour les votations fédérales, le vote anticipé doit, dans tous les cas, être institué pour au moins deux des jours précédant le dimanche de la votation dans les communes comptant plus de 500 citoyens actifs et dans les autres communes où cette facilité est demandée au plus tard quatorze jours avant la votation par au moins 30 citoyens actifs.

Art. 2 Pour le scrutin anticipé, le droit cantonal peut prévoir que les urnes seront en tout ou partie ouvertes pendant un certain temps ou que le citoyen remettra personnellement son bulletin, dans une enveloppe fermée, à une autorité.

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Art. 3 Les cantons édictent les dispositions nécessaires pour empêcher les abus.

Art. 4 Le Conseil fédéral fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Est abrogée à cette date la loi du 30 mars 1900 facilitant l'exercice du droit de voter et simplifiant les opérations électorales.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'institution du vote anticipé en matière fédérale (Du 8 octobre 1959)

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