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7994 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la nouvelle loi sur les rapports entre les conseils (Du 25 avril 1960)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre le présent message à l'appui d'un projet concernant une nouvelle loi sur les rapports entre le Conseil national, le Conseil des Etats et le Conseil fédéral, ainsi que sur la forme de la promulgation et de la publication des lois et arrêtés (loi sur les rapports entre les conseils).

A. APERÇU HISTORIQUE La première loi sur les rapports entre les conseils que les chambres se sont donnée après la création de l'Etat fédératif date du 22 décembre 1849 (RO a. s. I 279). Cette loi comptait déjà trois parties: Rapports entre le Conseil national et le Conseil des Etats. Rapports avec le Conseil fédéral.

Forme de la publication et de la promulgation des lois et arrêtés. Elle a subsisté jusqu'à la publication de la loi du 9 octobre 1902 (RS 1, 229), en vigueur aujourd'hui encore.

Après qu'une commission permanente de l'alcool eut été créée dans chacun des conseils en 1891 sous l'empire de l'ancienne loi et que la délégation commune de l'alcool eut été instituée en 1894 pour le contrôle périodique de la gestion de la régie des alcools (Salis, Droit fédéral, I, n° 179), on mit l'accent, dans le projet qui devait devenir la loi de 1902, sur la création des commissions parlementaires des finances et d'une délégation des finances garantissant un contrôle approfondi de la gestion financière du Conseil fédéral et de l'administration par l'Assemblée fédérale. Les autres modifiFeuille fédérale. 112e année. Vol. I.

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1508 cations apportées par la nouvelle loi avaient trait aux dispositions techniques de procédure, en particulier à l'élimination des divergences, à la nouvelle notion de l'interpellation et essentiellement à la publication des lois et arrêtée, très sommairement réglée dans l'ancienne loi.

La loi de 1902, comme celle de 1849, a subsisté pendant plus de cinquante ans. Ce fait, réjouissant en soi, prouve avec quelle réserve les chambres modifient les règles de procédure qui les régissent. La même constatation peut être faite à propos des règlements du Conseil national et du Conseil des Etats, revisés ou remaniés à plusieurs reprises, les modifications se limitant cependant à des corrections d'importance mineure et évitant les innovations considérables ou systématiques. C'est ainsi que la loi en vigueur aura vu deux modifications en 57 ans, une revision totale proposée en 1924 par la commission de gestion du Conseil des Etats n'ayant pas abouti (Burckhardt, Droit fédéral, II, n° 608, IV). Déjà auparavant un postulat du Conseil des Etats du 10 décembre 1918, qui demandait la substitution d'une commission des comptes à la délégation des finances, devait demeurer sans suite (FF 1924,111,849).

Les deux modifications susmentionnées sont les suivantes: La loi du 21 décembre 1928 a créé (v. le 2e al. de l'art. 4) la possibilité de fractionner les longs projets et de les transmettre par parties à l'autre conseil ; la seconde chambre n'a ainsi pas à attendre le vote d'ensemble de la première pour passer à la discussion de détail. C'est le projet du code pénal suisse qui avait suscité cette disposition manifestement exceptionnelle, qui n'a plus été appliquée depuis.

La seconde modification consiste dans l'insertion d'un article T bis, nécessité par l'acceptation, en votation populaire du 22 janvier 1939, d'un nouvel article 89 de la constitution (modifié depuis). Cet article Ibis contient les règles de procédure à appliquer par l'Assemblée fédérale pour déclarer urgents des arrêtés fédéraux de portée générale.

Bien que la loi ait été si peu modifiée, on ne saurait prétendre qu'elle réponde à toutes les questions. Maintes fois, des divergences se produisirent dans les conseils à propos de son interprétation. Le message à l'appui de la loi est certes un de ceux qui dénote le plus de tempérament parmi les
nombreux textes publiés dans la Feuille fédérale, (FF 1899, II, 637), mais il ne dit pas comment résoudre les questions délicates qui se posent. C'est pourquoi la division de la justice fut souvent chargée de donner un avis sur la base duquel on chercha à élucider les points de droit.

Ces derniers temps, l'article premier, 1er alinéa, s'est révélé peu pratique, car il fixe de façon rigide au premier lundi de décembre le début de la session d'hiver, mesurant ainsi aux chambres le temps nécessaire avant Noël pour traiter les affaires dont le nombre ne cesse d'augmenter. Une solution plus souple s'imposait. M. Haberlin, conseiller national, déposa

1509 le 22 décembre 1954 une motion qui fut acceptée le 25 mars 1955 par le Conseil national et le 17 juin 1955 par le Conseu des Etats. Nous donnâmes immédiatement suite à la motion en adressant aux chambres notre message, avec projet, du 4 octobre 1955 relatif au jour d'ouverture des sessions d'hiver et d'été (FF 1955, II, 803).

D'autres points furent soulevés par la commission du Conseil des Etats et le département de justice et police fut chargé de présenter à la commission un rapport sur les lacunes de la loi. Nous aurons l'occasion d'en parler en détail au chapitre C du présent message. Les défauts parurent si nombreux à la commission qu'elle considéra que le moment était venu de reviser entièrement la loi; une motion fut déposée dans ce sens au Conseil des Etats.

Elle fut acceptée par ce conseil le 19 septembre 1956; le Conseil national l'adopta le 4 octobre 1956 sans opposition.

B. LES GRANDES LIGNES DE LA REVISION La motion acceptée par les deux chambres invite le Conseil fédéral à présenter, le plus rapidement possible, un rapport et des propositions tendant à reviser totalement la loi du 9 octobre 1902 sur les rapports entre les conseils. Il va de soi qu'elle vise surtout une revision des règles techniques de procédure qui se sont révélées insuffisantes ou ont donné lieu à des difficultés. Nous avons cherché à éliminer ces difficultés et à faire régner la clarté. Nous ne proposons pas de modifications fondamentales de la procédure actuelle jugées inutiles. Nous nous sommes bornés à formuler clairerement la pratique actuelle et à proposer une solution simple et judicieuse, là où l'usage n'était pas constant. Notre projet ne contient pas de dispositions communes sur les questions de procédure que chaque conseil peut régler souverainement dans son règlement (par exemple le droit de faire des propositions, l'interpellation, la motion, le postulat); toutefois rien ne s'opposerait à l'adoption dans la loi de dispositions de ce genre.

On ne pouvait reviser les règles techniques de la procédure sans revoir la rédaction de la loi entière et l'adapter à la terminologie actuelle. Aussi avons-nous également vu dans la motion une demande d'épuration rédactionnelle de la loi. Le titre de la loi a par exemple été simplifié. Il s'agit en même temps d'élaguer les dispositions qui n'ont plus aucune
valeur pratique (les art. 13 et 30 par exemple), et d'établir une succession claire et logique des matières traitées.

Nous devons toutefois rappeler en outre qu'une série de propositions de réforme et de voeux ont été formulés à l'intention du parlement au cours de ces dernières années. Nous pensons aux délibérations de la société suisse des juristes de 1954, lors desquelles il fut question de la procédure législative et des formes de la législation en Suisse ; le rapporteur de langue allemande proposa d'importantes réformes qui rendraient l'activité législative du parlement plus indépendante du pouvoir exécutif et des associations (v.

Eichenberger, dans la Revue de droit suisse, NS 73, p. 2a et s.).

1510 Nombre de ces propositions appelleraient une revision de la constitution, mais leur approbation par le peuple serait peu probable. Parmi ces propositions, nous mentionnerons celle de confier la fonction législative à des parlementaires professionnels, qui seraient mieux à même d'étudier objectivement les projets de loi ou d'arrêté. On a aussi émis l'avis que le secrétariat de l'Assemblée fédérale devrait être développé et doté d'un important service de documentation et d'une équipe de juristes pour permettre aux parlementaires d'élaborer eux-mêmes des projets de loi. On a aussi déclaré qu'il conviendrait pour le moins de prolonger les sessions si le parlement tient encore à faire oeuvre utile (Eichenberger, op. cit., p. 96«), On a, de même, soutenu que les députés devraient jouir de l'indépendance nécessaire envers les partis, groupes parlementaires et autres puissances «sociologiques» (associations). Pour cela, il faudrait envisager une loi sur les partis et de nouvelles prescriptions sur les incompatibilités, le mandat parlementaire devant être incompatible avec l'exercice d'une activité -- apparente ou camouflée -- dans un groupement d'intérêts. La véritable indépendance ne pourrait être rétablie qu'à ce prix, Nous n'avons pas à nous prononcer ici à ce sujet, mais nous voudrions vous proposer quelques dispositions nouvelles mettant bien en évidence l'autonomie du parlement, sa fonction de représentant du peuple et des cantons et de pouvoir suprême et indépendant.

Dans le dessein de développer nos institutions démocratiques, le projet que nous vous soumettons contient des dispositions tendant à assurer le contrôle préventif de la constitutionnalité des actes législatifs dans la procédure parlementaire (art. 44 et 45). Nous relevons d'ores et déjà qu'il s'agit ici d'une solution partielle d'un vaste problème. Elle n'exclut pas d'autres mesures. Pour des raisons de fond et de technique législative, il nous a paru indiqué d'insérer nos propositions dans le projet de nouvelle loi sur les rapports entre les conseils.

C. LA REVISION DES PRESCRIPTIONS TECHNIQUES Notre projet, contrairement à la loi actuelle, se divise en plusieurs chapitres, ce qui en facilite la lecture. Nous commenterons ci-après ces divers chapitres: I. Réunion et progoration Nous vous avons soumis le 4 octobre 1955 un projet
particulier concernant le jour d'ouverture des sessions. Il figure sur la liste des objets en délibération. Nous pouvons renoncer à faire de nouvelles propositions, mais tenons à préciser ce qui suit : Selon l'article 32 de la loi du 19 juillet 1872 sur les élections et votations fédérales (ES 1, 147), les fonctions du Conseil national expirent chaque fois le dimanche qui précède immédiatement le premier lundi de décembre

1511 de l'année dans laquelle a lieu le renouvellement intégral. L'article 27 de la même loi prescrit que les nouveaux élus doivent, sans autre invitation, se trouver dans la ville fédérale le premier lundi de décembre pour la séance constitutive du Conseil national.

Il est clair que la première session d'une législature doit, dans ces conditions, commencer le premier lundi de décembre; elle ne peut pas être avancée si l'on veut éviter que l'ancien Conseil national ne doive aussi être convoqué pour quelques jours, jusqu'au début de la nouvelle législature.

Le Conseil des Etats n'ayant pas encore pris de décision, nous insérons dans notre projet le texte arrêté par le Conseil national (art. 1er, 1er al.), auquel nous nous sommes ralliés.

Le second alinéa de l'article premier n'est pas modifié. H correspond aux dispositions contenues à l'article 86, 2e alinéa, de la constitution.

Nous avons repris dans l'article, 2 les prescriptions figurant à l'article 18, 1er à 3e alinéas, de la loi actuelle, sous le titre «Rapports avec le Conseil fédéral». La disposition du l«r alinéa, suivant laquelle le Conseil fédéral envoie les lettres de convocation pour chaque session ordinaire ou extraordinaire, ne signifie naturellement pas que la session doit obligatoirement avoir lieu à Berne. L'article 12 de la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération (BS 1, 141) doit être réservé. Selon cet article, le Conseil fédéral a le droit de transporter ses séances dans un autre lieu et d'y convoquer l'Assemblée fédérale lorsque, par suite de troubles, il juge la sûreté des autorités fédérales menacée à leur siège. L'article 13 de la même loi doit aussi être réservé. Aux termes de cet article, le président du Conseil national ou, en cas d'empêchement, le président du Conseil des Etats, est tenu de convoquer immédiatement les conseils législatifs dans n'importe quel canton si, par suite d'une émeute ou de tout autre acte de violence, le Conseil fédéral se trouve hors d'état d'agir. Nous sommes d'avis que la procédure prévue aux articles 12 et 13 devrait s'appliquer également lorsque la sûreté des autorités fédérales ou la liberté d'action du Conseil fédéral est menacée pour d'autres raisons (faits de guerre, occupation, bombardement, etc.). A cet effet, il faut cependant
compléter la loi du 26 mars 1934 sur les garanties par un article ISbis (voir l'art. 58, 2e al., des dispositions finales et transitoires de notre projet).

Nous avons repris en outre, comme article 3 du chapitre I, l'ancien article 16, mais en remplaçant, au deuxième alinéa, les mots «suppression de trois séances» par «suppression des séances pendant trois jours consécutifs» pour faire ressortir que les séances de l'après-midi ne jouent aucun rôle en l'occurrence.

Le 3e alinéa constitue en revanche une innovation. La disposition suivant laquelle la clôture ou la prorogation d'une session ne peut être

1512 décidée par l'un des conseils sans l'assentiment de l'autre est sans doute conforme à l'esprit de notre système bicaméral. Mais on constate depuis plus de cinquante ans que le volume des affaires à traiter par l'une et l'autre chambres est si différent que le Conseil des Etats a de la peine à remplir le temps nécessaire au Conseil national pour ses propres délibérations. Certes les présidents des deux conseils s'efforcent, lors de l'attribution de la priorité de discussion, de tenir compte de cette situation, mais il n'en demeure pas moins que les deux conseils ont à examiner le même nombre de projets. En outre, les interventions personnelles sont beaucoup plus nombreuses au Conseil national du fait de sa structure politique et exigent aussi de ce fait plus de temps qu'au Conseil des Etats. Le Conseil national, avec ses 196 membres, sera ainsi toujours beaucoup plus chargé que le Conseil des Etats, avec ses 44 membres. Cela est inévitable et a toujours été reconnu (cf. Burckhardt, Droit fédéral Lt, n° 601 ; FF 1928, II, 658 s.).

Faisant application de l'article 16, 2e alinéa, de la loi, le Conseil des Etats a cherché à remédier à cette situation en ne reprenant que le mardi ses séances des 2e et 3e semaines, alors que le Conseil national siège le lundi déjà. Les deux conseils doivent pouvoir continuer à user de la faculté de supprimer les séances pendant trois jours en fin de semaine sans que cela soit considéré comme une prorogation (2e al,).

Cette possibilité de renoncer à des séances n'a cependant pas diminué sérieusement le déséquilibre entre le travail qui incombe aux deux conseils.

C'est pourquoi nous proposons d'adopter, au 3e alinéa, une nouvelle disposition qui permettrait au Conseil des Etats de répartir ses travaux de façon rationnelle, sans que le principe du système bicaméral et les rapports entre les conseils en souffrent. Le Conseil des Etats déciderait lui-même de supprimer les séances d'une semaine en totalité ou en partie suivant le volume des affaires à traiter, mais cela ne serait nécessaire que si le Conseil national siège plus de deux semaines. Il ne saurait être question que le Conseil des Etats ne siège pas durant la premièreet la dernière semaines de la session ; Pendant la première semaine, les commissions doivent être nommées et les conseils doivent traiter les
objets pour lesquels ils ont la priorité. Les divergences doivent être éliminées au cours de la dernière semaine de la session et comme la procédure à cet effet exige des décisions se succédant rapidement, la présence du Conseil des Etats est nécessaire. En revanche, le Conseil des Etats devrait pouvoir supprimer les séances de la deuxième semaine des sessions qui durent trois semaines et les séances de la deuxième ou de la troisième semaine des sessions qui se prolongent plus de trois semaines.

Il devra communiquer sa décision au Conseil national pour que celui-ci puisse arrêter son programme en conséquence. L'adhésion du Conseil national n'est toutefois pas nécessaire, cette décision du Conseil des Etats, pour des raisons pratiques, n'étant pas considérée comme une prorogation.

1513 II. Rapports entre le Conseil national et le Conseil des Etats 1. Attribution de la priorité de discussion Les articles 4 et 5 règlent comme jusqu'ici l'attribution de la priorité (art. 2 et 3), en précisant toutefois à l'article 5, 2e alinéa, qu'en cas de désaccord, la procédure ordinaire d'élimination des divergences, avec navette entre les deux chambres et conférence de conciliation, n'est pas applicable.

Il doit être procédé par tirage au sort dès que chaque conseil a confirmé sa décision et manifesté ainsi qu'il entend la maintenir.

2. Première délibération Nous commenterons l'article 6 au chapitre E ci-après (p. 54).

3. Forme des actes législatifs Depuis qu'il existe à la fois des lois et des arrêtés fédéraux de portée générale, on discute la nature de ces arrêtés et en particulier la question de savoir quels sont les arrêtés fédéraux qui sont de portée générale et quels sont ceux qui ne le sont pas. En 1874 déjà, le Conseil fédéral avait refusé de présenter une législation qui aurait défini exactement les différentes sortes d'actes législatifs (FF 1874, I, 926/927; v. aussi Arthur Haefliger, Die staatsrechtliche. Bedeutung des Bundesbeschlusses, thèse Berne 1943, p. 106).

Sont de portée générale par exemple les arrêtés qui créent des règles de droit obligatoires pour les particuliers (v. Burckhardt, Kommentar, p. 706). Selon une autre opinion, les arrêtés de portée générale sont ceux qui ont le plus d'importance et une portée considérable. Cette explication paraît se fonder surtout sur le fait que le texte français de la disposition constitutionnelle rend le terme allgemeinverbindlicher BundesbescMuss par «arrêté fédéral de portée générale».

Dans une consultation du 14 janvier 1937, la division de la justice déclarait que seuls les arrêtés qui n'édictent pas de règle de droit, mais constituent des actes administratifs ou juridictionnels sont des arrêtés simples (v. Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération, 11e fascicule, n° 27).

Dans un postulat de février 1921, le conseiller national Nobs invitait le Conseil fédéral «à examiner s'il n'y avait pas lieu de préciser et d'assurer le droit du peuple au referendum en établissant une distinction nette entre la notion de la loi fédérale d'une part et celle des différentes sortes d'arrêtés fédéraux d'autre part». Le postulat fut adopté en juin 1924 après avoir été quelque peu modifié. Aucune suite ne lui fut donnée (Burckhardt, Drml fédéral suisse II, n° 616).

1514 La pratique est restée flottante, tout particulièrement pour les arrêtés en matière financière. Nous renvoyons au tableau dressé par Burckhardt (Kommentar, p. 709/710) et Walter Sulzer (Der allgemeinverbindliche Bundesbeschluss, thèse Zurich 1932, p. 71 et s.). L'incertitude subsiste actuellement encore (cf. par exemple les délibérations de l'Assemblée fédérale au cours des sessions d'été et d'automne 1959 à propos du renouvellement technique du chemin de fer Stansstad-Engelberg et du parc national suisse).

Or, dans son postulat du 26 juin 1956, M. Dietschi-Soleure a demandé que des critères objectifs soient établis pour distinguer l'arrêté fédéral de portée générale et l'arrêté fédéral simple. Le Conseil national a adopté le postulat le 12 juin 1957. L'élaboration d'une nouvelle loi sur les rapports entre les conseils nous donne l'occasion de répondre au voeu de l'auteur du postulat.

Nous renonçons à étaler dans le présent message des considérations théoriques sur ce qui doit être édicté sous la forme d'une loi, d'un arrêté fédéral de portée générale ou d'un arrêté fédéral simple. La question est exposée de façon très détaillée par W. Kopp : Inhalt und Form der Gesetze, thèse Zurich 1958, volume 2, pages 683 et suivantes.

Comme on ne peut pas simplement abandonner l'expression arrêté fédéral «de portée générale» qui figure dans la constitution (art. 89, 2e al., 896is, 1er al., et 113, 3e al.), nous nous en tenons à la définition généralement admise, selon laquelle sont «de portée générale» les règles de droit générales et abstraites qui prescrivent un comportement ou fixent une procédure.

Abstraction faite de la forme adoptée en matière d'arrêtés fédéraux modifiant ou complétant la constitution (y compris les projets concernant la votation sur les initiatives), forme pour laquelle une réglementation légale paraît superflue, l'article 7 contient la liste exhaustive des actes législatifs que peut édicter l'Assemblée fédérale. D'autres formes d'actes législatifs et la combinaison de ces formes sont illicites.

L'article S indique d'abord quels actes législatifs doivent revêtir la forme d'une loi. Le critère distinctif de la loi par rapport à l'arrêté fédéral de portée générale consiste dans le caractère durable des dispositions (1er al. par opposition au 1er al. de l'art. 9). Pour le surplus,
la loi et l'arrêté de portée générale contiennent les règles de droit générales et abstraites que l'Assemblée fédérale édicté pour prescrire un comportement et fixer une procédure. C'est ainsi que le 2e alinéa définit la notion de la «règle de droit» qui figure au 1er alinéa et à l'article 9, 1er alinéa.

Lorsque la forme de la loi est expressément prévue (par exemple art. 22 bis et 32 Cst.), elle doit être choisie en vertu d'une prescription spéciale. C'est ce que rappelle le 3e alinéa.

1515 Le 4e alinéa précise que la délégation du pouvoir d'édicter des règles de droit de caractère durable n'est pas exclue. Elle peut prévoir soit des arrêtés de l'Assemblée fédérale au sens de l'article 10, soit des ordonnances du Conseil fédéral. La disposition délégatoire peut aussi confier le pouvoir de légiférer à des départements, voire à des divisions (cf. art. 7, 1er al., de la loi du 12 mars 1948 relative à la forme obligatoire du Recueil systématique etc., RO 1949, II, 1627 ss.).

Après ce qui a été dit à propos de l'article 8, il suffit d'ajouter, au sujet de Yartide 9,1er alinéa, que seule la forme de l'arrêté fédéral de portée générale peut être utilisée pour édicter des règles de droit de durée limitée. La durée des lois ne peut pas être limitée.

Quel que soit leur contenu, les arrêtés fédéraux pour lesquels une disposition spéciale prévoit le referendum doivent selon l'alinéa 2 revêtir la forme de l'arrêté fédéral de portée générale (cf. par exemple les art. 32 et 89, 3e al., Cst. pour certains arrêtés fédéraux fondés sur les articles économiques et pour les traités internationaux conclus pour plus de 15 ans, de même que l'art. 2 de la loi du 23 juin 1944 sur les chemins de fer fédéraux [RS 7, 197] lorsque la Confédération entend acquérir de nouveaux chemins de fer ou construire de nouvelles lignes).

Le 3e alinéa mentionne spécialement les arrêtés fédéraux urgents en renvoyant à l'article &9bis, 1er alinéa, de la constitution et en précisant que la mise en vigueur immédiate de ces arrêtés n'est licite que si elle ne souffre aucun retard (le texte allemand de la loi spécifie qu'il s'agit de «zeitliche.» Dringlichkeit).

Enfin, le 4e alinéa renvoie aux dispositions relatives à la procédure à suivre en matière de déclaration d'urgence (art. 33).

"L'article 10 indique quels actes législatifs doivent être désignés comme arrêtés de l'Assemblée fédérale. Ce sont uniquement les actes législatifs posant des règles de droit de portée générale qui reposent sur une autorisation expresse dans la constitution (par exemple art, 37, 2e al., dans la teneur de l'arrêté fédéral du 21 mars 1958 concernant l'initiative populaire pour l'amélioration du réseau routier), une loi (par exemple art. 26 de la loi sur l'agriculture) ou un arrêté fédéral de portée générale.

Les lois et les arrêtés fédéraux
de portée générale issus de ces autorisations doivent mentionner expressément que l'arrêté de l'Assemblée fédérale ne pourra pas être soumis au vote populaire. Ainsi, le citoyen se rendra compte, déjà en votant sur l'acte législatif délégatoire ou en renonçant à demander le referendum, qu'il donne à l'Assemblée fédérale le pouvoir d'édicter des règles de droit pour lesquelles le vote populaire ne pourra pas être demandé.

Relevons expressément que les actes administratifs de l'Assemblée fédérale ne peuvent pas revêtir la forme d'un arrêté de l'Assemblée fédérale (cf. ci-dessous les remarques relatives à l'art. 11).

1516 ii'article 11 concerne l'arrêté fédéral simple. Le 1er alinéa indique -- de façon négative -- quand cette forme doit être choisie pour un acte législatif édicté par l'Assemblée fédérale. C'est le cas toutes les fois que les articles 7 à 10 ne prescrivent pas la forme de la loi, de l'arrêté fédéral de portée générale ou de l'arrêté de l'Assemblée fédérale.

L'Assemblée fédérale n'aura donc plus la faculté de munir de la clause référendaire, pour des motifs politiques ou économiques, des arrêtés fédéraux simples et d'en faire ainsi des arrêtés fédéraux de portée générale.

Cette dernière forme ne peut être utilisée que si les conditions de l'article 9 sont remplies; dans ce cas, l'Assemblée fédérale ne peut inversement pas non plus se contenter d'édicter un arrêté fédéral simple.

Par souci de précision, nous rappelons au 2e alinéa que la votation populaire ne peut pas être demandée poux les arrêtés fédéraux simples.

Conformément à l'article 4, lettre d, de la loi sur la force obligatoire du Recueil systématique (RO 1949, II, 1628), l'Assemblée fédérale désigne les arrêtés fédéraux simples à publier dans le Recueil des lois.

Les actes administratifs ou juridictionnels ressortissant à l'Assemblée fédérale pourront, selon l'usage établi, être pris dans les formes prévues par exemple pour l'acceptation du budget ou des rapports de gestion et pour l'octroi de la garantie fédérale aux constitutions cantonales et, le cas échéant, être publiés dans la Feuille fédérale. Ils pourront aussi être pris sans aucune forme spéciale et être communiqués aux intéressés par le secrétariat de l'Assemblée fédérale, comme les décisions concernant les pétitions et les recours en grâce ou les décisions prises en vertu de la loi sur la responsabilité.

Le Conseil fédéral souhaite que les dispositions qu'il propose serviront à fixer au moins pour l'avenir en quelle forme doivent être édictés les différents actes législatifs qui sont du ressort de l'Assemblée fédérale.

4. Mode de procéder en matière de divergences La procédure d'élimination des divergences n'a jamais donné lieu à des difficultés dans les cas normaux, c'est-à-dire lorsqu'il existe des divergences sur des points matériels déterminés d'un projet. Les décisions prises passent d'un conseil à l'autre jusqu'à ce que les chambres tombent d'accord ou que chacune
d'elle déclare sa décision définitive et que la conférence de conciliation ait été convoquée. Notre projet ne modifie en rien cet ordre de choses.

Tu'article 12 reprend la disposition de l'article 4 actuel, relative à la transmission des décisions d'un conseil à l'autre. Le texte actuel est cependant élargi en ce sens qu'une transmission est prévue non seulement pour les décisions se rapportant à des projets de loi ou d'arrêtés, mais pour toutes les décisions prises «à propos d'affaires qui doivent être traitées par les deux conseils». Ces affaires font actuellement déjà l'objet de transmissions qui sont par exemple aussi nécessaires pour de simples rapports du Conseil

1517 fédéral, car un conseil doit savoir si l'autre a pris acte du rapport avec approbation ou s'il s'est borné à en prendre acte. Le teste de l'article 4, 3e alinéa, de la loi actuelle a en outre été élargi en ce sens que la transmission est prévue non seulement pour les décisions de ne pas entrer en matière, mais aussi pour les décisions équivalentes (2e al.). Il s'agit du cas où un conseil renvoie un projet au Conseil fédéral pour qu'il en présente un nouveau.

Le 4e alinéa consacre enfin la pratique actuelle en précisant que les motions rejetées par le conseil où elles ont été déposées et les décisions relatives aux postulats traités dans un conseil ne sont pas transmises à l'autre.

Dans cet ordre d'idées, on peut se demander si l'approbation des deux chambres est nécessaire pour le classement d'un postulat. La loi actuelle ne dit rien à ce sujet. Elle prévoit seulement, à l'article 14 (lre phrase), que les arrêtés par lesquels l'un des deux conseils invite le Conseil fédéral à présenter un rapport et des propositions --- donc des postulats au sens des règlements-- n'ont pas besoin de l'adhésion de l'autre conseil. On ne trouve pas non plus dans les règlements des deux chambres une prescription qui fasse dépendre le classement d'un postulat de l'accord des deux conseils. Une telle exigence serait d'ailleurs contraire au caractère du postulat dont seul est saisi le conseil dans lequel il a été déposé et qui déploie son plein effet juridique dès que ce conseil l'a accepté. Si cette acceptation n'a pas besoin de l'accord de l'autre conseil, le classement ne doit pas non plus dépendre d'un tel accord (le 5 juin 1958, la commission de gestion du Conseil national s'est exprimée dans le même sens). A notre avis, une disposition dans ce sens n'est pas nécessaire dans la loi. D'ailleurs, lorsque le Conseil fédéral est appelé à répondre à des postulats identiques des deux chambres, ces postulats n'ont formellement aucun rapport entre eux. Si l'un d'eux est classé pour une raison quelconque, le Conseil fédéral n'en reste pas moins invité en vertu de l'autre à présenter un rapport ou des propositions.

Le 2e alinéa de l'article 13 reprend, sans le modifier quant au fond, le 2 alinéa de l'article 4 actuel. La loi ne contient toutefois pas de disposition sur la procédure à suivre lorsque les deux conseils
ne peuvent s'entendre sur le fractionnement d'un long projet et sa transmission par chapitres à l'autre conseil. Comme une divergence pourrait aussi se produire à ce propos et pour dissiper toute incertitude dans ce cas, nous proposons un 3e alinéa nouveau ; de même que pour l'attribution de la priorité, il faut éviter, ici aussi, une navette interminable entre les conseils puisque la divergence ne porte que sur une question de procédure et ne se prête pas à un compromis. Nous recommandons également ici de régler la divergence aussitôt que chaque conseil aura confirmé sa décision lors d'une seconde délibération. Comme la transmission d'un projet fractionné constitue une exception -- cela ressort déjà de la loi actuelle -- nous pensons que le cas doit être résolu de par la loi selon la procédure ordinaire, c'est-à-dire que la transmission du projet n'interviendra qu'après le vote sur l'ensemble. Cette e

1518 solution est conforme à la règle générale suivant laquelle les dispositions exceptionnelles ne doivent pas, être appliquées extensivement. La même procédure s'applique déjà en matière de divergence sur la question de savoir si un arrêté fédéral de portée générale doit être muni de la clause d'urgence (art. Ibis de la loi; art. 33 du projet).

"L'article 14 formule une règle qui ne figure pas dans la loi actuelle, mais qui est consacrée par l'usage. Comme il s'agit d'une exception à la procédure ordinaire d'élimination des divergences qui sera traitée plus loin (art. 16 s.), cette exception doit être réglée d'abord, de même que l'autre cas particulier concernant l'élimination des divergences en matière de désaccord au sujet de motions (art. 15), L'article 57 de la constitution garantit le droit de pétition. Selon la doctrine unanime, la pétition n'est ni un recours, ni un autre moyen de droit qui oblige l'autorité saisie à examiner les faits allégués. Comme le droit de pétition garantit uniquement aux particuliers la faculté d'adresser des critiques ou des propositions aux autorités sans avoir à craindre aucun inconvénient d'ordre juridique de la part de l'Etat, le pétitionnaire ne peut pas exiger que l'autorité se prononce sur le fond de sa requête et lui donne une réponse. Cela vaut également pour les requêtes adressées aux autorités législatives. La pétition n'est pas un droit de présenter des propositions, lequel n'appartient qu'aux deux chambres, à leurs membres et aux cantons (art. 93 Cst.), ainsi qu'au Conseil fédéral (art. 101 Cst.). Une pétition ne peut pas donner lieu à une décision d'ordre législatif. Pour cela, son objet devrait d'abord être repris sous la forme d'une proposition par qui est habilité à le faire (Burckhardt, Kommentar, p. 529; Fleiner/Giacometti, Bundesstaatsïecht, p. 388 s.).

Il ne serait d'ailleurs pas indiqué de traiter une pétition selon la même procédure qu'une proposition au sens de l'article 93 de la constitution.

Comme la pétition n'est pas une proposition de légiférer dont les chambres pourraient être saisies et qu'elle n'implique pas une décision concordante, la procédure d'élimination des divergences n'a pas non plus à être suivie.

Certes elle donne lieu à une décision concordante dans la plupart des cas, mais la pratique a pourtant constaté, lors de
décisions divergentes, que l'accord des deux chambres n'est pas nécessaire (Burckhardt, Droit fédéral II, n° 602, VII). Cette manière de voir fut récemment confirmée plus d'une fois, l'un des conseils ayant décidé simplement de ne pas entrer en matière sur la même pétition plusieurs fois renouvelée, alors que l'autre conseil, perdant plus rapidement patience, décida en outre de ne plus examiner les nouvelles pétitions qui pourraient être présentées sur le même objet. En pareils cas, le secrétariat de l'Assemblée fédérale communique les deux décisions au pétitionnaire.

Les chambres continueront certainement à respecter le droit de pétition garanti par la constitution. Certains pétitionnaires s'étant exprimés

1519 sur des postulats déposés dans l'un des conseils mais non encore développés et ayant présenté des «propositions» à ce sujet, il paraît bon de rappeler qu'un pétitionnaire n'est pas habilité à présenter des propositions (art. 93 et 101, en liaison avec l'art. 102, ch. 4, Cst.) et que les chambres n'ont aucunement l'obligation d'examiner une pétition et de la traiter comme une proposition. Confirmant l'usage actuel, l'article 14 doit dire clairement que le pétitionnaire n'a nullement le droit d'exiger que la procédure d'élimination des divergences soit appliquée à sa requête.

"L'article 15 règle une autre exception à la procédure ordinaire d'élimination des divergences. Il s'agit du cas -- non prévu par la loi -- où des décisions différentes sont prises au sujet de motions. L'article 14 prévoit seulement (à la 2e phrase) qu'une motion votée par l'une des chambres n'a d'effet impératif pour le Conseil fédéral que s'il y a accord de l'autre chambre; cette règle est maintenue telle quelle (1er al.). En revanche, la loi ne dit pas ce qui doit se passer en cas de divergences entre les deux conseils (rejet par le second conseil ou acceptation dans une teneur différente). Le texte de la loi et des règlements des conseils n'exclut pas l'application par analogie de la procédure ordinaire d'élimination des divergences, mais l'usage en a voulu autrement. Une motion a en effet échoué lorsqu'il y a divergence entre les deux conseils et elle est alors biffée de la liste des objets en délibération. Nous proposons de consacrer cette pratique dans la loi (2e al.), en précisant cependant que le conseil qui rejette une motion votée par l'autre doit lui communiquer sa décision. Il est clair que le conseil qui a rejeté une motion de l'autre conseil est libre d'adopter une motion propre, en des termes différents. Pour que cette motion ait un caractère impératif, elle doit, il est vrai, être acceptée aussi par le premier conseil.

Kien ne s'oppose non plus à ce que le conseil qui a voté une motion la transforme en postulat si elle est rejetée par l'autre conseil.

"L'article 16 traite de la procédure ordinaire d'élimination des divergences. Les règles sont empruntées à la loi actuelle (art. 5) ; il est toutefois entendu qu'eUes doivent aussi s'appliquer «dans tous les autres cas» au sujet desquels on ne savait pas
jusqu'ici si la procédure ordinaire est applicable ou pas. Nous examinerons ces cas en détail.

Il y a tout d'abord le cas où les décisions sur l'entrée en matière sont différentes. A ce cas doit être assimilé celui où un conseil décide d'entrer en matière mais rejette ensuite le projet au vote sur l'ensemble; le résultat étant en effet le même que s'il avait décidé de ne pas entrer en matière.

Comme on le sait, la question a souvent donné lieu à controverse. La loi actueUe la laisse ouverte, le message n'en dit rien et la pratique n'est pas uniforme. Au vu de la pratique de ces dernières années, on peut toutefois tenir pour établi qu'un projet n'est pas définitivement écarté du fait que le conseil qui a la priorité décide de ne pas entrer en matière ou de le rejeter. La décision doit être communiquée à l'autre conseil, pour qu'il

1520 se prononce à son tour. Il doit décider en particulier s'il entend entrer en matière ou non. C'est dans ce sens qu'une décision fut prise en 1905 déjà, à propos de l'arrêté sur les indemnités de présence et de déplacement des autorités de la Confédération (Burckhardt, Droit fédéral, II, n° 602, II), puis en 1907 au sujet de la revision de la loi sur l'alcool (Burckhardt, Droit fédéral, II, n° 602,1). Cette manière de voir fut dès lors plusieurs fois confirmée.

Il y a toutefois flottement quant à la question de savoir si la décision du second conseil de ne pas entrer en matière ou de rejeter un projet adopté par le premier conseil doit être traitée comme une décision du premier conseil de ne pas passer à la discussion de détail ou de rejeter un projet.

On a admis cependant, dans la majorité des cas, qu'un vote négatif du second conseil (non-entrée en matière ou rejet au vote sur l'ensemble) produit le même effet qu'un vote négatif du premier conseil. Nous pensons que cette pratique est juste, car il n'y a pas de raisons valables pour traiter différemment les deux cas. Une différence de traitement ne serait d'ailleurs pas compatible avec le principe de l'égalité des deux conseils sur lequel repose le système bicaméral.

Il est en revanche une question à laquelle on n'a jamais répondu clairement. C'est celle de savoir comment procéder lorsque les décisions des deux conseils (entrée en matière ou vote sur l'ensemble) ne concordent pas. Y a-t-il une divergence insurmontable, qui exclut toute procédure ultérieure ?

Convient-il au contraire d'appliquer la procédure ordinaire d'élimination des divergences ? Dans son message du 30 mars 1899 (FF 1899, II, 637), le Conseil fédéral recommandait la seconde solution. Fjlle ne fut cependant pas insérée dans la loi.

La question n'a jamais été résolue depuis. En 1906, le projet d'arrêté concernant les indemnités de présence et de déplacement des autorités fédérales fut radié purement et simplement de la liste avec l'assentiment du Conseil national, après la décision du Conseil des Etats de ne pas passer à là discussion des articles. Il en advint de même en 1921 du projet de nouvel article 77 de la constitution.

En 1907, en revanche, le Conseil national, qui avait décidé de ne pas passer à la discussion d'un projet de loi revisée sur l'alcool, se ravisa
après que le Conseil des Etats eut pris une décision contraire. En 1923, le Conseil des Etats, maintenant sa décision de passer à la discussion des articles, examina le projet de loi relatif au séquestre et aux mesures d'exécution forcée, bien que le Conseil national eût pris une autre décision (Burckhardt, Droit fédéral, II, n° 602, IV). En 1947, le Conseil national, qui avait voté le passage à la discussion des articles d'un projet de loi revisée sur l'utilisation des forces hydrauliques, renonça à examiner ce projet après que le Conseil des Etats eut décidé de ne pas entrer en matière. Le Conseil national avait obéi alors à des considérations de fond. La majorité de sa commission était d'avis qu'au point de vue formel la divergence relative au passage

1521 à la discussion des articles pouvait être éliminée suivant la procédure ordinaire, comme n'importe quelle autre divergence (Buttetin sténographique du Conseil national 1947, p. 320).

Dans tous ces précédents, l'un des conseils, après que l'autre eut décidé de ne pas entrer en matière, s'occupa à nouveau du projet, soit en décidant, lui aussi, de ne pas engager la discussion des articles et de biffer l'objet de la liste, soit en maintenant sa décision d'entrer en matière, ce qui amena l'autre conseil à revenir sur sa décision et à engager la discussion.

Jamais l'un des conseils n'a maintenu ou dû maintenir par deux fois sa décision de ne pas entrer en matière sans que l'autre conseil ait changé d'avis. Est ainsi restée ouverte la question (controversée) de savoir ce qui doit arriver lorsque, après un second débat dans les deux conseils, l'accord ne peut se faire sur l'entrée en matière.

C'est en 1937, lors de la revision partielle de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite, que le conseiller national Hirzel émit pour la première fois l'opinion que l'usage voulait qu'un projet soit abandonné lorsqu'une chambre avait décidé par deux fois de ne pas entrer en matière (Bulletin sténographique du Conseil national 1937, p. 288). Après que le Conseil des Etats eut en effet décidé une seconde fois de ne pas entrer en matière, le conseiller national Rohr déclara au nom de la commission que celle-ci partageait l'avis qu'il s'agissait d'un droit coutumier. La commission et le conseil abandonnèrent alors le projet, considérant que d'autres efforts en vue de poursuivre la discussion et d'amener le Conseil des Etats à changer d'avis seraient vains (Bulletin sténographique du Conseil national 1937, p. 866). On pourrait conclure de ces dernières remarques que si l'un des conseils abandonne un projet après que l'autre a décidé une nouvelle fois de ne pas passer à la discussion, c'est moins pour obéir à un «droit coutumier» qu'au bon sens.

C'est d'ailleurs probablement pour cette raison que le chancelier Bovet, dans son commentaire (non publié) du règlement du Conseil national (1933), estimait «rationnel» que la procédure s'arrête lorsque le conseil qui a décidé de ne pas passer à la discussion maintient sa décision dans une seconde délibération. Le département de justice et police a fait sienne
cette opinion dans un avis du 4 décembre 1936 (Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération, fase. IO, n° 26).

Le projet d'arrêté fédéral du 6 octobre 1953 concernant les services dans le landsturm donna au département de justice et police une nouvelle occasion de s'exprimer sur cette question. Il constata qu'il y a eu entre 1874 et 1952 sept cas dans lesquels des divergences relatives à l'entrée en matière ou au vote sur l'ensemble furent réglées d'une façon positive par la procédure ordinaire d'élimination des divergences, en ce sens que les projets furent en fin de compte adoptés par les deux conseils sans que le recours à une conférence de conciliation ait été nécessaire. Le même résultat

1522 fut encore atteint en 1953 dans trois cas semblables (arrêté fédéral concernant les services dans le landsturm, arrêtée fédéraux concernant l'agrandissement des aérodromes de Sion et des Eplatures). La procédure ordinaire conduisit une seule fois au rejet d'un projet (loi sur la protection des locataires, 1929).

Ce système instauré déjà sous l'empire de la loi de 1849, qui permet de poursuivre la procédure jusqu'à ce qu'un accord intervienne ou jusqu'à ce que les deux conseils déclarent définitive leur décision et que la conférence de conciliation doit être convoquée, a donné satisfaction. Etant donnés ses grands avantages pratiques nous le préférons à la solution qui consiste à interrompre la procédure et à tenir un projet pour abandonné dès qu'un conseil a décidé deux fois de ne pas entrer en matière. Nous vous proposons par conséquent d'ancrer ce système dans la loi.

On pourrait se demander également si le conseil qui a décidé d'entrer en matière ne devrait pas être obligé, par une disposition expresse, de procéder à la discussion des articles avant de retransmettre le projet à l'autre conseil qui a décidé de ne pas entrer en matière. Cela aurait l'avantage que ce conseil serait informé non seulement de la décision d'entrer en matière, mais encore des intentions et résolutions de l'autre conseil. Après la discussion de détail, un projet peut parfois différer sensiblement du texte du Conseil fédéral et tenir compte des objections qui avaient motivé la décision de non-entrée en matière. Le conseil qui avait pris cette décision pourrait ainsi être amené plus aisément à entrer en matière, ce qui faciliterait un accord.

Parmi les huit cas connus dans lesquels le premier conseil refusa et le second décida d'entrer en matière, il y en a sept dans lesquels le second conseil ne transmit le projet au premier qu'après l'avoir discuté en détail; dans un cas seulement, la décision relative à l'entrée en matière fut communiquée immédiatement, la discussion de détail étant alors ajournée. Cette règle sera sans doute appliquée aussi à l'avenir. Mais comme on peut imaginer des cas dans lesquels le conseil qui entre en matière ne voudra pas engager une longue discussion de détail sans être certain que l'autre conseil passera également à la discussion, nous ne pensons pas qu'il faille prévoir une prescription
à ce sujet.

L'article 16 devra s'appliquer également aux décisions divergentes concernant la garantie de constitutions cantonales. Il arrivera rarement qu'on doive se demander si des décisions concordantes des deux conseils sont nécessaires pour l'octroi ou le refus de la garantie fédérale (art. 6 Cst.)

et quelle est la situation lorsque les conseils ont des opinions divergentes.

La question s'est encore posée en 1958 au sujet du refus de la garantie à la constitution yaudoise revisée (création de places d'armes). On prétendit à cette occasion que les décisions divergentes des deux conseils signifiaient le refus de la garantie. Nous ne pouvons nous ranger à cette manière de

1523 voir qui ne trouve pas d'appui dans la loi et est même contraire à l'article 5.

En outre les deux conseils sont saisis en même temps d'une demande de garantie et ils doivent ainsi se prononcer tous les deux. Il serait inconciliable avec le principe de l'égalité des conseils de considérer la garantie comme refusée lorsque l'un d'eux ne l'accorde pas. Si, par exemple, le premier conseil refuse la garantie, le second devrait alors se prononcer pour la forme, mais il pourrait tout aussi bien renoncer à traiter l'objet puisque la décision du premier conseil préjugerait la sienne. Il pourrait fort bien arriver en outre que les deux conseils finissent par s'entendre, soit que l'un se range à l'avis de l'autre, soit qu'une solution intermédiaire (par exemple garantie avec réserve) soit trouvée. Comme dans la plupart des autres cas, la procédure d'élimination des divergences aboutirait à un résultat sans que la conférence de conciliation (art. 17 s.) doive être convoquée.

Mentionnons enfin que la procédure ordinaire d'élimination des divergences s'appliquera aussi quand les deux conseils auront pris des décisions différentes au sujet d'une initiative cantonale (art. 93 Cst.). Les deux chambres en sont saisies en même temps, comme en matière de projet émanant du Conseil fédéral ou de demandes de garantie fédérale. Pour qu'une suite puisse être donnée à une initiative cantonale, il faut des décisions concordantes des deux conseils. Mais s'il n'y a pas accord, l'initiative n'est pas rejetée pour autant; on est alors en présence d'une divergence ordinaire, qui doit être traitée suivant la procédure prévue à l'article 16 du projet. La possibilité d'un accord existe aussi dans le cas d'initiatives cantonales, l'un des conseils pouvant finir par se rallier à la décision de l'autre.

Les articles 17 à 20 règlent la procédure dans la conférence de conciliation qui doit être réunie lorsque les deux conseils déclarent leurs décisions définitives. La solution prévue par la loi actuelle (art. 6 et 7) ayant donné satisfaction, nous l'avons reprise dans le projet.

Le nombre des membres des commissions du Conseil national étant en général assez élevé, on a proposé, il y a quelques années, au sein du Conseil des Etats, de réduire le nombre des membres de la commission la plus forte plutôt que d'augmenter celui des
membres de la commission la plus petite, de façon à éviter un lourd appareil (Bulletin sténographique du Conseil des Etats 1949, p. 170). Comme le Conseil national attache toujours du prix à ce que tous les groupes soient équitablement représentés dans ses commissions, nous n'avons pas jugé opportun de modifier la réglementation actuelle (art. 17, 2e al., du projet).

Quelques précisions nous paraissent toutefois indiquées, vu la grande importance de la conférence de conciliation. Nous prévoyons par exemple que la conférence ne pourra délibérer valablement que si la majorité des membres des deux commissions sont présents. Ce quorum devra être expressément constaté au début de la séance (art. 18, 1er al.). Nous pensons, en Feuille fédérale. 112e année. Vol. I.

103

1524 revanche, qu'il ne convient pas de prévoir un quorum proprement dit pour les décisions à prendre par la conférence, cela afin de ne pas compliquer les choses. Le but de la conférence est de trouver une solution. Elle devra, comme jusqu'ici, prendre ses décisions à la majorité simple des votants.

La présence de la majorité des membres de chacune des deux commissions est expressément requise pour que la conférence puisse délibérer valablement et cela démontre suffisamment le rôle et l'importance de la conférence de conciliation.

Les règlements des deux conseils prévoient que le président vote aussi dans les commissions et départage les voix en cas d'égalité. Cela est sage puisque chaque commission doit prendre une décision et présenter une proposition au conseil dont elle relève. Pour la conférence de conciliation, la situation est un peu différente. La loi actuelle prévoit déjà le cas où la conférence «ne parvient pas à formuler de proposition». Mais cela ne peut arriver que s'il y a égalité des voix. On doit alors raisonnablement admettre qu'aucune proposition de conciliation n'a abouti, aucune proposition n'ayant recueilli la majorité des voix. Ce serait fausser ce résultat négatif que de prévoir que la conciliation peut être obtenue par la voix prépondérante du président. L'égalité des voix signifie clairement au contraire qu'il n'y a pas eu de conciliation.

Pour le reste, la procédure à suivre devant les deux conseils ne différera pas de celle qui est prévue par la loi actuelle (art. 19 et 20).

5. Mode de procéder en matière d'initiatives populaires Les deux initiatives relatives aux concessions pour l'utilisation des forces hydrauliques (initiatives dites de Rheinau) et la première initiative pour une trêve de l'armement, dont l'aboutissement et la validité avaient suscité de vifs débats dans les chambres, donnèrent lieu, par la suite, à diverses interventions parlementaires. Leur but était de faire prendre une décision chargeant le Conseil fédéral de revoir dans leur ensemble les dispositions légales sur l'exercice du droit d'initiative et de proposer des règles claires, ne prêtant plus à discussion. C'est ainsi que le Conseil national nous transmit, le 3 octobre 1956, une motion Ming, transformée en un postulat, nous invitant à examiner si la constitution ne devrait pas être revisée
de façon que des initiatives anticonstitutionnelles puissent être déclarées irrecevables. L'Assemblée fédérale statuerait sur ce point. Le Conseil national adopta le même jour un postulat Alfred Borei nous invitant à présenter un rapport sur les conditions de forme et de fond précises auxquelles l'exercice du droit d'initiative populaire doit être subordonné sans que l'on touche pour autant à un droit fondamental de notre démocratie. Le même jour encore, le Conseil national adopta un postulat Grendelmeier qui critiquait le fait que l'Assemblée fédérale avait outrepassé le délai de trois ans dont elle disposait pour traiter la seconde initiative de Rheinau. Le postulat

1525 demandait que des mesures soient prises pour empêcher à l'avenir de telles «violations» de la loi.

La motion Despland enfin, adoptée au Conseil des Etats le 19 juin 1956 sous forme de postulat, propose un contrôle formel et rédactionnel préalable de toutes les initiatives populaires par la chancellerie fédérale. Le postulat Guisan, adopté par le Conseil national le 8 mars 1958, traite la même question. Mais contrairement au postulat Despland, il entend confier le contrôle préalable au Tribunal fédéral et, en outre, exclure la possibilité de déclarer une initiative nulle pour violation des limites matérielles de la constitution.

Répondant aux trois premiers postulats au Conseil national le 3 octobre 1956, le chef du département de justice et police déclara que la division de la justice, à la suite des discussions auxquelles les initiatives de Rheinau et sur une trêve de l'armement avaient donné lieu, avait entrepris spontanément de revoir les dispositions légales et établi, en juin 1956, un projet de revision de la loi du 27 janvier 1892/5 octobre 1950 concernant le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la révision de la constitution fédérale (loi sur la procédure en matière d'initiatives (RS 1, 158; RO 1951, 17).

Les deux chambres ayant adopté la motion demandant la revision générale de la loi sur les rapports entre les conseils, on se demanda s'il n'y aurait pas lieu, pour des raisons pratiques et de technique législative, d'inclure dans cette loi certaines dispositions de la loi sur la procédure en matière d'initiatives.

Nous avons fait nôtre cette idée en insérant dans le présent projet celles des dispositions de la loi de 1892/1950 qui se rapportent à la procédure devant l'Assemblée fédérale. On peut soutenir en effet que les dispositions relatives au mode de procéder en matière d'initiatives populaires concernent surtout l'Assemblée fédérale et moins les signataires des initiatives. Des prescriptions indiquent à l'Assemblée fédérale la procédure à suivre après le dépôt d'une initiative, ses droits et ses obligations et le délai dans lequel l'initiative devra être traitée. Si la loi sur les rapports entre les conseils doit contenir toutes les dispositions de procédure applicables à l'Assemblée fédérale, elle doit aussi régler la procédure
à suivre en matière d'initiatives.

La loi sera ainsi complète et réunira dans un seul acte législatif toutes les dispositions de procédure intéressant l'Assemblée fédérale. L'incorporation dans le projet de ces dispositions de la loi sur la procédure en matière d'initiatives se justifie donc par des raisons pratiques et de systématique.

C'est pour des motifs semblables que nous avons incorporé dans le projet les dispositions de la loi sur la procédure en matière d'initiatives qui concernent le Conseil fédéral. Bien que les rapports entre l'Assemblée fédérale et le Conseil fédéral soient réglés au chapitre V du projet et que les dispositions en question dussent, systématiquement parlant, figurer dans ce chapitre, des raisons pratiques commandent de les ajouter aux règles de

1526 procédure qui concernent l'Assemblée fédérale, avec lesquelles elles forment un tout. Ainsi se trouvent sauvegardé le rapport intrinsèque entre les diverses dispositions de procédure et la vue d'ensemble facilitée. Le Ve chapitre contient un renvoi aux articles 21 et suivants (cf. art. 52, 3e al.).

Dans la loi sur les initiatives, il ne restera donc que les dispositions qui s'adressent aux citoyens désirant lancer une initiative ou appelés à se prononcer à son sujet et celles qui s'adressent aux autorités communales.

Cette loi devra toutefois renvoyer à la loi sur les rapports entre les conseils et celle-ci renverra à son tour à la première qui règle aussi la procédure à suivre pour la votation populaire. L'unité des deux procédures sera ainsi bien marquée.

Les articles 21 à 28 comprendront par conséquent toutes les dispositions de la loi de 1892/1950 valables pour l'Assemblée fédérale et le Conseil fédéral.

Nous avons examiné les postulats susmentionnés en tant qu'ils se rapportent à ces articles 21 à 27 et à leur incorporation dans la loi sur les rapports entre les conseils. Nos explications relatives aux différents articles constituent par conséquent notre rapport sur les postulats Alfred Borei et Grendelmeier, dans la mesure où ces articles se. rapportent aux deux postulats. Nous traiterons en partie les autres questions dans le projet de revision de la loi de 1892/1950 que nous vous soumettons en même temps que le présent projet.

La doctrine et la jurisprudence distinguent entre les conditions formelles et matérielles d'une initiative. Les conditions formelles concernent la forme (par exemple l'initiative doit être présentée par écrit, appuyée par au moins 50 000 citoyens ayant le droit de vote, constituer une proposition conçue en termes généraux ou un projet rédigé de toutes pièces et tendre à la revision totale ou partielle de la constitution), tandis que les conditions matérielles concernent le contenu de l'initiative (par exemple l'unité de la matière et les limites du droit d'initiative). Lorsque les conditions de forme exigées par la constitution et la loi sur les initiatives sont remplies, l'initiative est formellement recevable et a donc abouti; dans le cas contraire, elle est irrecevable et n'a pas abouti.

Constater qu'une initiative a abouti ne signifie pas se prononcer
sur son contenu. Si l'initiative remplit également les conditions requises quant au contenu, elle est matériellement valable; dans la négative elle est matériellement nulle. Si donc la recevabilité et l'aboutissement d'une initiative se déterminent d'après les conditions de forme, sa validité dépend des conditions matérielles.

Jusqu'ici, les conditions formelles et matérielles n'ont jamais été distinguées clairement. De même, les notions d'«aboutissement» et de «validité» n'ont pas toujours été utilisées dans le sens décrit ci-dessus, ce qui a souvent provoqué des méprises et des confusions. Pour les exclure à l'avenir, il ne faudrait plus parler que de recevabilité formelle et d'aboutissement d'une

1527 part et de la validité matérielle d'autre part. H faudrait éviter des expressions telles que «valablement abouti» ou «formellement valable».

Le droit actuel ne prescrit pas qui doit examiner si les conditions formelles sont remplies. L'article 5 de la loi sur les initiatives prévoit simplement que le Conseil fédéral détermine le nombre des signatures valables dès qu'une initiative a été présentée, qu'il publie le résultat de ce dépouillement dans la Feuilk fédérale, et le soumet, avec le dossier, à l'Assemblée fédérale dans sa prochaine session. Sur la base de ce rapport -- dans lequel le Conseil fédéral s'exprime également à propos des autres conditions formelles -- l'Assemblée fédérale décide s'il y a initiative au sens légal.

La décision des chambres quant à l'aboutissement d'une initiative a parfois été considérée comme une simple formalité, car l'Assemblée fédérale se contente en général -- et très souvent sans discussion -- d'entériner les propositions du Conseil fédéral. C'est pourquoi il a été proposé de décharger les chambres de cette tâche et de la confier au Tribunal fédéral ou à la chancellerie fédérale; les auteurs de ces propositions en attendent une simplification sensible de la procédure.

Le fait que les chambres entérinent en général sans réserve les propositions du Conseil fédéral -- souvent même tacitement -- prouve qu'on peut renoncer à leur soumettre cette question. Cela épargnerait toute la procédure devant les chambres, qui est la même que pour les autres objets de leur compétence. Ce serait indubitablement une simplification importante.

Reste à savoir à qui confier la décision.

Il s'agit essentiellement de constater des faits, ce que l'administration est mieux à même de faire qu'un tribunal. Cela est aussi vrai lorsqu'il s'agit de savoir si une initiative tend à la revision totale ou partielle de la constitution et si elle est présentée sous forme de proposition conçue en termes généraux ou de projet rédigé de toutes pièces. Qu'il faille parfois résoudre aussi des questions de droit n'y change rien. Il n'existe aucune raison d'attribuer cette compétence à un tribunal. H serait inopportun de confier cette décision à la chancellerie fédérale, d'une part en raison de son importance politique et parce qu'elle lierait les chambres, d'autre part, parce qu'une pareille
réglementation ne serait guère conciliable avec la répartition des attributions et des responsabilités. Puisque les propositions du Conseil fédéral ont toujours été déterminantes, il est préférable de confier la décision définitive à ce conseil. C'est dans ce sens que nous vous proposons l'article 21, 1er alinéa.

La décision relative à l'aboutissement d'une initiative ne dépend naturellement pas de la libre appréciation du Conseil fédéral qui devra s'en tenir aux exigences légales. Si celles-ci sont remplies, il devra constater l'aboutissement de l'initiative. Dans l'intérêt de la clarté, il convient de le prescrire expressément.

1528 Comme ce sera désormais le Conseil fédéral et non l'Assemblée fédérale qui constatera qu'une initiative a abouti, il n'aura plus à faire rapport sur le résultat du contrôle des signatures, ainsi que le prévoit l'article 5, 4e alinéa, de la loi actuelle sur les initiatives. Toutefois cela ne signifie pas que le parlement et le public ne seront plus renseignés sur ce point; tous deux ont en effet un intérêt eminent à savoir si une initiative remplit les conditions de forme exigées et a donc abouti. C'est pourquoi nous avons jugé opportun de prescrire que le Conseil fédéral devra publier sa décision avec tous les renseignements nécessaires, dans la Feuille fédérale (2e al.).

Il va de soi que cette publication devra se faire le plus rapidement possible ; il n'est pas nécessaire de le prescrire spécialement.

Actuellement, lorsque l'Assemblée fédérale a constaté l'aboutissement d'une initiative, elle invite régulièrement le Conseil fédéral à faire rapport sur son contenu. L'article 102, chiffre 16, 2e alinéa, de la constitution autorise l'Assemblée fédérale à demander des rapports spéciaux au Conseil fédéral (cf. également à ce propos l'art. 52 du présent projet). D'ailleurs, un postulat Forrer, en vertu duquel le Conseil fédéral doit faire rapport quant au fond sur chaque initiative, a été adopté en 1894 (FF 1894, II, 947 et 948).

D'après notre projet, ce sera non plus l'Assemblée fédérale, mais le Conseil fédéral qui statuera sur l'aboutissement d'une initiative. Aussi peuton se demander s'il ne serait pas préférable de prévoir que le Conseil fédéral devra rapporter quant au fond de son propre chef, sans y être invité par l'Assemblée fédérale. Nous pensons devoir répondre par l'affirmative et vous proposons ainsi l'article 22.

Dans le rapport sur le fonds -- qu'il doit soumettre à l'Assemblée fédérale assez tôt pour qu'elle puisse respecter les délais légaux -- le Conseil fédéral traite non seulement des questions de fait mais encore des questions de droit à examiner souvent aussi du point de vue de la politique législative.

C'est ainsi que le Conseil fédéral peut être amené à examiner si on se trouve en présence d'une initiative valable, respectant par exemple l'unité de la matière. Mais la loi de 1892/1950 sur les initiatives ne dit pas qui statue définitivement sur la validité d'une
initiative. Toutefois, la doctrine et la jurisprudence attribuent cette compétence avec raison à l'Assemblée fédérale.

La compétence de l'Assemblée fédérale ressort d'ailleurs déjà des articles 71 et 84 de la constitution. Il est néanmoins préférable d'introduire une disposition expresse dans la loi (art. 23, 1er al.). Nous reviendrons encore sur la question de la validité des initiatives dans le message qui traitera d'une revision éventuelle de la constitution.

H est possible que les chambres soient une fois d'avis partagé sur la validité d'une initiative. Faut-il alors recourir à la procédure usuelle d'élimination des divergences et même à une conférence de conciliation ? Il nous semble qu'un compromis entre les positions des deux chambres est aussi impossible ici qu'en matière de priorité (art. 5, 2e al., du projet). Une ou

1529 l'autre des opinions doit l'emporter. Le 2e alinéa donne à chaque conseil la possibilité de persister deux fois dans sa décision ou de la modifier. Le litige doit ensuite être vidé. Nous proposons qu'il le soit en faveur de la validité de l'initiative, pour des raisons de démocratie et de respect de la volonté populaire. Les chambres auront encore la possibilité de recommander le rejet de l'initiative reconnue valable.

Nous renvoyons à ce propos à l'article 120,1er alinéa, de la constitution.

Il prescrit que la question de savoir si la constitution doit être revisée totalement est soumise à la votation du peuple lorsqu'une section de l'Assemblée fédérale décrète la revision totale de la constitution et que l'autre n'y consent pas. En se prononçant en faveur de la votation populaire en cas de désaccord entre les deux chambres, notre projet se conforme à l'esprit de cette disposition constitutionnelle.

ij'artide 24 correspond à l'article 6 de la loi actuelle. Dans le cas ici envisagé, on n'attend naturellement pas de rapport matériel du Conseil fédéral selon l'article 22, puisque l'Assemblée fédérale doit soumettre au peuple la question de la revision totale de la constitution sans prendre ellemême position. La collaboration du Conseil fédéral n'a lieu que si le peuple se prononce en faveur de la revision totale dans la votation préliminaire et que s'il s'agit par conséquent d'élaborer un projet de constitution nouvelle.

"L'article. 25 reprend, quant au fond, la réglementation de l'article 7 de la loi actuelle. Le 3e alinéa de l'article 7 actuel est toutefois divisé en deux, le nouvel alinéa 3 réglant le cas où les chambres n'approuvent pas une initiative non formulée et le nouvel alinéa 5 se rapportant au cas où aucune décision concordante n'intervient dans le délai légal. Il est expressément prévu qu'il appartient à l'Assemblée fédérale, lorsqu'elle n'approuve pas une initiative, de la soumettre à la votation populaire, le Conseil fédéral ne pouvant ordonner la votation que si les deux chambres ne sont pas arrivées à s'entendre dans le délai légal. Il est évident que l'Assemblée fédérale a aussi le pouvoir de recommander au peuple le rejet d'une initiative non formulée, si elle ne peut l'approuver. La loi actuelle ne contient pas de disposition à ce sujet, mais cette solution a été admise
en pratique.

Nous avons complété en ce sens le 3e alinéa et prévu un nouvel alinéa 4 qui règle la procédure d'élimination des divergences lorsque les deux conseils ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le point de savoir s'ils entendent approuver ou non une initiative ; une disposition analogue figure à l'article 26, 4e alinéa.

Au 5e alinéa, l'insertion du mot «concordante» signifie que le Conseil fédéral, quand bien même le 1er alinéa fixe un délai de deux ans, ne peut pas ordonner la votation populaire aussi longtemps que les deux chambres n'ont pas examiné le contenu de la demande et pris une décision. L'article 121, 5e et 6e alinéas, de la constitution oblige les deux chambres --- c'est-à-dire l'Assemblée fédérale -- à se prononcer sur le fond de toute initiative. Il ne

1530 serait guère conciliable avec ce principe constitutionnel que le Conseil fédéral, pour respecter le délai légal de deux ans, soumette une initiative à la votation populaire avant que l'Assemblée fédérale se soit préalablement prononcée. De même, il serait contraire au système bicaméral et au principe de l'égalité des deux chambres que le Conseil fédéral, à cause de ce délai, soumette à la votation populaire une initiative sur laquelle seul un des conseil se serait prononcé.

Le 6e alinéa reprend le 4e alinéa de l'article 7 de la loi de 1892/1950.

"L'article. 26, 1er alinéa, correspond à l'article 8 de la loi actuelle (dans la rédaction de 1950), alors que le 2e alinéa correspond au 2e alinéa de l'article 9 et le 3e alinéa à l'article 10. Le 4e alinéa règle la procédure à suivre quand il y a divergence entre les conseils sur la question de savoir s'ils entendent approuver ou non une initiative formulée. Quant au 6e alinéa, il correspond à l'article 9,1er alinéa, de la loi actuelle. Si les deux conseils ne parviennent pas à prendre une décision concordante dans le délai légal, le Conseil fédéral ordonne la votation du peuple et des cantons. C'est le second cas dans lequel la compétence d'ordonner la votation populaire appartient au Conseil fédéral et non à l'Assemblée fédérale. On présuppose ici aussi, comme à l'article 25, 5e alinéa, que les deux conseils se sont prononcés sur l'initiative avant que le Conseil fédéral ordonne la votation.

Le 5e alinéa contient une disposition nouvelle. Comme nous l'avons dit à propos de l'article 23, 2e alinéa, la procédure d'élimination des divergences n'est pas applicable lorsque les avis des deux chambres diffèrent sur la question de la validité d'une initiative. La validité doit être admise si la divergence subsiste après que les deux conseils ont confirmé leur décision.

On peut se demander si, pour l'examen du contenu d'une initiative, la procédure ne devrait pas aussi être abrégée lorsque les premières décisions des deux conseils ne concordent pas. Dans ce cas également il n'y a en effet pas de milieu entre l'approbation d'une initiative et la recommandation de la rejeter. Il y a cependant une troisième solution: recommander le rejet de l'initiative et l'acceptation d'un contre-projet de l'Assemblée fédérale. Avant de décider s'ils entendent recommander
l'acceptation ou le rejet d'une initiative, les membres des conseils attendent souvent de savoir si un contre-projet sera établi et quelle en sera la teneur définitive.

Aussi une chambre n'a-t-elle jamais décidé le rejet d'une initiative et communiqué sa décision à l'autre sans avoir réglé en même temps la question d'un contre-projet. Et quand un contre-projet est décidé, le texte en est immédiatement discuté et établi, le tout étant ensuite transmis à l'autre chambre. Puisqu'il s'agit de se déterminer à l'égard d'un tout (y compris le texte du contre-projet), on peut fort bien concevoir des solutions intermédiaires. C'est pourquoi nous proposons que les divergences auxquelles peut donner lieu la décision à prendre sur le contenu d'une initiative soient

1531 réglées selon la procédure ordinaire (art. 16 à 20), avec, au besoin, une conférence de conciliation.

Une dérogation à la procédure ordinaire est cependant indiquée. Selon l'article 17, 1er alinéa, combiné avec l'article 16, 2e alinéa, du projet, la conférence de conciliation doit s'occuper uniquement des «divergences» et chercher à les concilier. Si elle n'arrive pas à adopter une proposition de conciliation, l'ensemble du projet est réputé n'avoir pas abouti (art. 19).

Si les deux chambres décident de recommander le rejet de l'initiative et de présenter un contre-projet, mais ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le texte du contre-projet, la conférence de conciliation ne pourrait ainsi s'occuper que de la divergence portant sur le contre-projet, puisqu'il y a accord sur la recommandation de rejeter l'initiative et la nécessité d'un contre-projet. Si toutefois la conférence ne trouvait pas de solution pour le texte du contre-projet, il s'ensuivrait -- en vertu de la règle générale -- que tout l'arrêté fédéral, y compris la proposition de rejet, devrait être considéré comme ayant échoué et le Conseil fédéral devrait alors soumettre l'initiative à la votation populaire sans aucune recommandation de l'Assemblée fédérale.

Pour éviter ce résultat -- qui, logiquement, serait contraire à la volonté de l'Assemblée fédérale -- nous proposons, au 5e alinéa, d'autoriser, dans ce cas, la conférence de conciliation à revenir sur un point au sujet duquel il y avait déjà accord, soit sur la décision de principe de présenter un contreprojet.

L'ariicZe 27 règle en détail les délais impartis à l'Assemblée fédérale pour traiter les initiatives, ces délais demeurant fixés -- comme dans la loi modifiée en 1950 -- à deux ans pour les demandes de revision partielle présentées en termes généraux (art. 25, 1er al.), et à trois ans pour les initiatives formulées (art. 26, 1er al.).

Lorsque plusieurs initiatives concernant la même matière constitutionnelle sont déposées les unes après les autres, les 1er et 2e alinéas de l'article 27 précisent que ces délais sont valables pour la première initiative seulement. Cette disposition manque dans la loi actuelle, qui prévoit uniquement, à l'article 15, que les demandes sont traitées par l'Assemblée fédérale et soumises au vote populaire suivant l'ordre dans lequel
elles ont été déposées. Comme les délais de trois et de deux ans ont été fixés sans restriction lors de la revision de 1950, le rapport entre ces deux prescriptions demeurait peu clair. Se prévalant de la loi, l'Assemblée fédérale pouvait fort bien prétendre qu'elle disposait d'un délai de deux ou de trois ans pour la première demande, ce qui entraînait automatiquement une prorogation des délais pour les autres demandes à traiter suivant l'ordre dans lequel elles ont été déposées; or, cette situation pouvait aussi être déclarée contraire à la loi, le délai de deux ou de trois ans ne souffrant pas d'exception.

1532 L'article 27, 1er alinéa, du projet prévoit, pour clarifier les choses, que le délai légal dans lequel l'Assemblée fédérale doit se déterminer est valable pour la première initiative seulement.

Il serait en effet le plus souvent impossible de traiter dans le délai de deux ou de trois ans plusieurs initiatives concernant un même objet. L'article 27, 2e alinéa, prévoit un délai supplémentaire d'une année pour chaque autre initiative concernant la même question. Il y a lieu de se demander si ce délai n'est pas trop court. Un délai de deux ans nous paraîtrait plus approprié. Mais on peut cependant admettre que la discussion des autres initiatives n'exigera pas un temps aussi long, les problèmes fondamentaux ayant été sans doute examinés à l'occasion de la première initiative. De façon générale, un délai d'une année devrait donc suffire. Nous lui donnons la préférence pour que le législateur marque à nouveau sa volonté de ne pas traîner en longueur l'examen des initiatives mais au contraire de se déterminer le plus rapidement possible.

L'Assemblée fédérale pourra-t-elle respecter ces délais ? Cela dépendra en bonne partie du moment où le Conseil fédéral lui soumettra son rapport et ses propositions. C'est pourquoi il est judicieux de rappeler au Conseil fédéral -- au 3e alinéa -- les délais impartis à l'Assemblée fédérale par les articles 25, 1er alinéa, 26, 1er alinéa, et 27, l"r et 2e alinéas. Le Conseil fédéral devra donc déposer son rapport à temps. S'il n'est pas en mesure de la faire (4e al.), il devra justifier le retard et solliciter une prolongation de délai, L'Assemblée fédérale pourra proroger le délai d'une année au plus ou décider de passer à la discussion de l'initiative sans attendre le rapport du Conseil fédéral (5e al.). En prévoyant ce délai maximum d'une année, le législateur manifesterait à nouveau sa volonté de voir les initiatives rapidement traitées.

Nous reparlerons encore en détail du 5e alinéa au chapitre E de notre message (p. 57).

Les délais susmentionnés sont-ils des délais péremptoires ou des délais d'ordre ? La question a été controversée lors des débats sur l'initiative concernant les concessions hydrauliques. Au Conseil des Etats, la majorité était d'avis qu'il s'agissait de simples délais d'ordre que les conseils devaient respecter si possible. Mais on y
prétendit aussi que la loi avait prévu de véritables délais péremptoires à l'expiration desquels l'initiative devait être soumise au vote populaire, sans recommandation de l'Assemblée fédérale au cas où celle-ci ne parviendrait pas à se prononcer en temps utile (cf. Bulletin sténographique du Conseil des Etats 1906, p. 1 s.). La question de la nature des délais est également l'objet du postulat Grendelmeier du 20 mars 1956, qui invite le Conseil fédéral à déposer un rapport disant comment il envisage lui-même la question et quelles mesures il entend prendre pour empêcher, à l'avenir, les dépassements de délai. Le postulat demande à cet effet de modifier et de préciser le texte de la loi.

1533 Lors des débats sur l'initiative concernant les concessions hydrauliques, nous avions exprimé l'avis que les délais de la loi de 1892/1950 étaient de simples délais d'ordre. En les considérant comme péremptoires, on risquerait de porter atteinte au principe constitutionnel des deux chambres en tant que l'un des conseils pourrait, en tardant à se prononcer, empêcher l'autre de prendre une décision à temps. Le Conseil des Etats s'est rallié à cette manière de voir et la question ne fut pas soulevée au Conseil national, qui avait traité l'initiative dans les délais. Dans une séance commune du 14 mars. 1956, le bureau du Conseil national et les présidents des groupes refusèrent d'inviter ce conseil, par motion d'ordre, à dire s'il partageait l'avis du Conseil des Etats.

.Notre projet contient des dispositions précises sur les délais et tient compte également des cas exceptionnels (3e, 4e et 5e al.). Il répond ainsi au voeu exprimé par le postulat Grendelmeier. Nous croyons qu'il sera possible à l'avenir de respecter ces délais et de traiter toutes les initiatives selon les dispositions de la loi.

Nous tenons à rappeler que l'Assemblée fédérale est tenue de se prononcer sur une initiative avant que celle-ci soit soumise à la votation du peuple et des cantons (art. 121, 5e et 6e al., en liaison avec l'art. 85, ch. 14, Cst.). On ne saurait abroger cette obligation constitutionnelle des chambres au moyen d'une loi; pour cela il faudrait reviser la constitution. Si l'on considérait comme péremptoires les délais fixés pour l'examen d'une initiative, cela pourrait parfois conduire à éliminer l'une des chambres, voire les deux, contrairement à ce que prévoit la constitution. Cela indique qu'il s'agit de délais d'ordre. Ils ne sont péremptoires que dans le cas où les deux conseils se prononcent pendant le délai et que leurs décisions divergent.

Le Conseil fédéral doit alors ordonner la votation populaire, sans attendre le résultat de la procédure d'élimination des divergences.

Si, malgré toutes les précautions prévues dans le projet, ces délais ne devaient pas suffire à l'Assemblée fédérale pour traiter une initiative en temps utile, elle aurait toujours la faculté de la soumettre au peuple sans recommandation d'acceptation ou de rejet ou de convoquer une session extraordinaire pour arriver à une
recommandation commune en temps utile. Ce serait là l'ultime moyen qui pourrait se justifier s'il s'agit d'une initiative d'une grande portée politique. Comme les initiatives tendent à la formation du droit constitutionnel, on ne saurait en tout cas parler de disproportion entre cet objet et la convocation d'une session extraordinaire.

"L'article 28 établit la liaison avec la loi sur les initiatives. Lorsque la procédure devant l'Assemblée fédérale est terminée ou que le délai à cet effet est écoulé, les opérations ultérieures sont .réglées par les dispositions de cette loi.

1534 6. Rédaction des lois et arrêtés Les articles 29 à 31 correspondent aux articles 8 à 10 et 12 de la loi actuelle, avec les exceptions suivantes: Les lois et les arrêtés fédéraux de portée générale passaient jusqu'ici automatiquement à la commission de rédaction, sauf lorsque les chambre» renonçaient à les transmettre. Or, l'expérience a montré que les commissions de rédaction devaient siéger en toute hâte peu avant la votation finale.

A notre avis, elles ne devraient être convoquées que si d'importantes modifications sont intervenues pendant la discussion du texte primitif et que des raisons de systématique et de technique législative l'exigent absolument. La commission de rédaction est le mieux à même de juger d'une telle nécessité, de sorte qu'on devrait lui laisser le soin de décider (art. 29, 1" al.).

Feront partie de la commission de rédaction, comme actuellement, les rapporteurs des commissions des deux conseils et des représentants de la chancellerie fédérale, c'est-à-dire selon notre projet soit le chancelier de la Confédération et le vice-chancelier, soit les deux vice-chanceliers. La commission de rédaction pourra continuer à s'adjoindre des experts; ceux-ci n'auront que voix consultative. Ces experts sont les traducteurs et les secrétaires des deux conseils que la loi actuelle mentionne déjà expressément; ilsepourront aussi être choisis parmi les fonctionnaires des départements (2 al.).

L'article 31 concerne la commission de rédaction de langue italienne.

Il consacre l'usage en vigueur. Deux membres de langue italienne de chacun des conseils composent cette commission. Pour éviter tout travail mutile, il devrait être prescrit que la commission de rédaction de langue italienne n'entrera généralement en fonction qu'une fois revus les textes allemand et français d'un projet.

On peut se demander si, pour améliorer et uniformiser la rédaction et la technique législatives, il ne serait pas préférable de créer une commission de rédaction permanente. Le système actuel présente le désavantage qu'à, part les représentants de la chancellerie fédérale, les membres de la commission changent dans chaque cas, de sorte que la continuité dans l'examen des questions rédactionnelles, de technique et de systématique législatives n'a pu être réalisée que partiellement. Une commission permanente,
composée d'experts parlementaires nommés pour une assez longue période et peut-être d'une personnahté choisie en dehors du parlement, renforcée par des représentants de la chancellerie fédérale et les rapporteurs des commissions des deux conseils, permettrait d'obvier dans une large mesure à cet inconvénient. II ne faut toutefois pas oublier que le désir de voir améliorées la langue et la technique de nos lois ne concerne pas que les actes législatifs édictés par l'Assemblée fédérale, mais également ceux du Conseil fédéral, de ses départements et de leurs services, en un mot de tous les

1535 degrés de l'activité législative de la Confédération. Noua avons renoncé à vous soumettre des propositions, mais nous ne voulions pas manquer de signaler ce problème.

7. Votations Ce chapitre groupe les prescriptions éparses dans différents articles actuels (art. Ibis, art. 11).

"L'article, 32 prévoit une votation sur l'ensemble lorsque chaque conseil a achevé la première discussion d'un projet. Comme le sort d'un projet peut dépendre de la votation sur l'ensemble et que le résultat de cette votation a de l'importance pour les rapports ultérieurs entre les deux conseils, la disposition en question doit figurer dans la loi elle-même et pas simplement dans les règlements que se donnent les chambres (art. 78 du règlement du Conseil national et art. 59 du règlement du Conseil des Etats).

"L'article 33 règle le vote des arrêtés fédéraux urgents. La procédure prévue actuellement à l'article Ibis est reprise telle quelle. L'article 33 précise toutefois que le conseil qui avait la priorité pour l'ensemble du projet l'a aussi pour le débat sur l'urgence. Les autres modifications apportées au texte actuel concernent uniquement la rédaction et la systématique.

En revanche le 5e alinéa est nouveau. H entend donner à chaque membre des conseils et au Conseil fédéral le droit de proposer encore avant le vote final le classement d'un arrêté fédéral devenu inopérant du fait du rejet de la clause d'urgence. Nous rappelons à ce propos l'arrêté fédéral du 13 décembre 1957 sur les services d'instruction extraordinaires pour les compagnies territoriales et les gardes locales (FF 1957, II, 1223) que les chambres, contrairement au Conseil fédéral, soumirent au referendum qui fut effectivement demandé et aboutit. Or le temps disponible pour exécuter les cours d'instruction prévus fut alors trop limité, en sorte que le Conseil fédéral dut y renoncer; par la suite les chambres déclarèrent que l'arrêté fédéral n'avait plus d'objet (FF 1958,I, 1247). Certes les cas de ce genre se produiront très rarement, mais il est cependant indiqué de prévoir une réglementation spéciale permettant d'éviter une procédure compliquée.

"L'article, 34 maintient les règles en vigueur pour le vote final. Une innovation consiste cependant en ce que le vote final est aussi prévu pour les arrêtés de l'Assemblée fédérale. Rappelons que
l'arrêté fédéral du 21 décembre 1955 accordant une réduction de l'impôt pour la défense nationale et de l'impôt sur le chiffre d'affaires (RO 1955, 1210) était de portée générale et soustrait au referendum puisqu'il reposait sur l'arrêté fédéral sur le régime financier de 1955 à 1958 (il aurait dû être pris normalement sous la forme d'un arrêté de l'Assemblée fédérale). Comme il n'était pas soumis au referendum, un vote final n'était pas nécessaire, aux termes de la loi actuelle.

De l'avis de nombreux parlementaires un vote final eût été nécessaire. Notre projet tient compte de cette opinion. Comme un arrêté de l'Assemblée fède-

1536 raie contient indiscutablement des prescriptions de portée générale pouvant avoir dans certains cas une grande importance malgré l'exclusion du referendum, une votation finale devra avoir lieu pour permettre aux membres des conseils de se prononcer aussi sur le texte définitif résultant des délibérations. II ne devrait y avoir, à cet égard, pas de différence entre les arrêtés de l'Assemblée fédérale et les lois ou les arrêtés de portée générale.

III. L'Assemblée fédérale (chambres réunies) "L'article 35 reprend la disposition contenue jusqu'ici à l'article 15.

Comme la question de savoir qui convoque et préside l'Assemblée fédérale (chambres réunies) quand le président du Conseil national est empêché n'a jamais été élucidée, nous vous proposons de prévoir que ce sera le président du Conseil des Etats. Certes, l'article 15 de la loi dispose expressément que la procédure à suivre pour les délibérations et élections de l'Assemblée fédérale (chambres réunies) est déterminée par le règlement du Conseil national, de sorte qu'il pourrait paraître aller de soi que le vice-président du Conseil national devrait être désigné. Eu égard au principe constitutionnel de l'égalité des deux chambres, nous estimons toutefois indiqué de prévoir qu'en cas d'empêchement du président du Conseil national, le président du Conseil des Etats convoque et préside l'Assemblée fédérale (chambres réunies). On trouve, du reste, une règle semblable à l'article 13 de la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération (ES 1, 141). Ce n'est qu'au cas où le président du Conseil des Etats serait empêché à son tour qu'il incomberait au vice-président du Conseil national -- ou en cas d'empêchement, au vice-président du Conseil des Etats --· d'exercer la fonction. La disposition de l'article 15 de la loi actuelle a sa place dans le règlement de l'Assemblée fédérale (chambres réunies), où elle figure d'ailleurs déjà (art. 1er). La nouvelle loi ne la contiendra plus, puisqu'il appartient à l'Assemblée fédérale (chambres réunies) de se donner elle-même son règlement dans des délibérations communes et d'y prévoir le nécessaire.

A l'article 2, 3e alinéa, qui a trait à la convocation de l'Assemblée fédérale par le Conseil fédéral, nous avons, par souci de précision, réservé l'article 35 qui
confère expressément au président de l'Assemblée fédérale (chambres réunies) le droit de convoquer cette assemblée.

Nous aimerions aussi consacrer dans la loi la commission des grâces (art. 36). Une disposition concernant cette commission figure déjà, il est vrai, dans le règlement de l'Assemblée fédérale (chambres réunies). Mais la commission n'est pas nommée par cette assemblée et elle est composée de neuf membres désignés par le Conseil national et de quatre membres désignée par le Conseil des Etats, en sorte qu'elle devrait être instituée par la loi sur les rapports entre les conseils, loi qui règle les obligations des deux conseils

1537 en ce qui concerne l'exercice de leurs fonctions et la bonne marche de l'Assemblée fédérale. Le règlement du Conseil national (art. 51) mentionne aussi la commission des grâces parmi les commissions permanentes que ce conseil doit nommer (en tant qu'il s'agit de sa propre représentation). En revanche, les dispositions sur le travail de la commission figurent, à juste titre, dans le règlement de l'Assemblée fédérale (chambres réunies).

Outre les élections et l'exercice du droit de grâce, l'article 92 de la constitution indique, comme troisième attribution de l'Assemblée fédérale (chambres réunies), le droit de se prononcer sur les conflits de compétence entre autorités fédérales. Le cas échéant, il y aura lieu, ici aussi, de nommer une commission pour examiner l'affaire et présenter un rapport. L'article 37 prévoit la même proportion de membres des deux chambres et le même mode de nomination que pour la commission des grâces.

L'adoption des articles 36 et 37 rend superflu l'article 29 de la loi actuelle, qui autorise les bureaux réunis des deux conseils à nommer des commissions «pour les affaires urgentes ou de moindre importance qui concernent l'Assemblée fédérale réunie, notamment pour les recours en grâce». Les dispositions que nous proposons pour la constitution de la commission des grâces et des commissions pour les conflits de compétence assurent l'application des règles ordinaires dans chaque conseil; une disposition particulière peut ainsi être supprimée.

IV. Secrétariat de l'Assemblée fédérale Lors de l'adoption de l'actuelle loi sur les rapports entre les conseils (1902), les affaires de chancellerie de l'Assemblée fédérale étaient exclusivement traitées par la chancellerie fédérale. Il n'existait pas encore de secrétariat permanent. Le secrétariat, en tant que service particulier, ne fut institué que par l'article 6 de la loi du 28 juin 1919 concernant l'organisation de la chancellerie fédérale (RS 1, 316) et par l'article 25 du règlement pour la chancellerie fédérale du 23 juillet 1920 (RS 1,318). Le règlement du Conseil national de 1946 (art. 19 et 27) mentionne les obligations du secrétariat ou du secrétaire de l'Assemblée fédérale, alors que celui du Conseil des Etats, de la même année, confie comme précédemment à la chancellerie fédérale les affaires de chancellerie du
conseil. Bien que prévu par la loi et soumis à l'approbation des conseils, un règlement particulier relatif aux tâches du secrétaire de l'Assemblée fédérale n'a jamais été édicté.

Etant donné que le secrétariat s'occupe des affaires des deux chambres et que la pratique a délimité clairement le cercle de ses tâches, il paraît indiqué d'insérer aujourd'hui les dispositions fondamentales qui le concernent dans la loi sur les rapports entre les conseils (art. 38; cf. p. 75 ciaprès).

Les dispositions relatives au service sténographique et aux procèsverbaux sténographiques doivent aussi figurer dans le présent chapitre.

1538 Les articles 39 et 40 reprennent, pour l'essentiel, le contenu de l'actuel article 17; nous avons cependant tenu compte des changements qui se sont ^produits.

L'article 17 actuel prévoit que «les délibérations sur les lois fédérales et les arrêtés fédéraux d'une portée générale sont sténographiées dans les deux chambres». Or l'usage veut maintenant que tous les débats soient isténographiés. Le premier alinéa de l'article 39 en tient compte. Des essais sont faits également avec dea appareils enregistreurs; au Conseil national, -un de ces appareils enregistre déjà les discours prononcés en italien. Quand bien même l'enregistrement mécanique n'a pas que des avantages, il faudra peut-être y recourir un jour ou l'autre en raison du manque de jeunes sténographes. Le premier alinéa autorise les deux systèmes.

Les règles concernant la publication des délibérations dans le Bulletin sténographique ne doivent pas être modifiées. Mais comme les débats sont sténographiés et enregistrés, il y a lieu d'adapter à cette situation l'appellation «Bulletin sténographique officiel de l'Assemblée fédérale».

Nous proposons comme nouvelle dénomination «Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale». L'article 34 prescrit un vote final aussi pour les arrêtés de l'Assemblée fédérale, de sorte que ces arrêtés doivent être assimilés aux arrêtés de portée générale en ce qui concerne la publication des débats dans le Bulletin officiel (art. 40, 1er al.). Chaque conseil pourra décider, comme jusqu'ici, de la publication d'autres délibérations. Ce qui est nouveau c'est que cette décision devra être communiquée à l'autre conseil, à moins qu'il ne s'agisse d'un objet qui ne le concerne pas (art. 40, 2e al.). Cette communication lui permettra de décider s'il veut aussi faire insérer dans le Bulletin officiel ses délibérations sur le même objet. Le public n'a qu'une idée incomplète des débats sur un objet lorsque le Bulletin officiel reproduit les délibérations d'un seul conseil. Nous ne voudrions pas aller jusqu'à proposer que les délibérations ne soient reproduites au Bulletin qu'avec l'accord des deux conseils. La communication d'une telle décision à l'autre conseil aura cependant pour effet d'amener en général les conseils à prendre la même décision, en tant qu'il s'agit d'objets traités par chacun d'eux.

Y. Rapports avec
le Conseil fédéral Les dispositions de l'article 18 actuel, relatives à la convocation de l'Assemblée fédérale, sont reprises à l'article 2 de notre projet. La règle selon laquelle une liste supplémentaire des affaires nouvelles doit être établie au cours de la session peut être biffée sans inconvénient. On trouvera les nouveaux objets dans le résumé des délibérations de l'Assemblée fédérale que le secrétariat publie après chaque session. La dernière prescription de l'article 18, de même que l'article 19 actuel, figurent à l'article 41 de notre projet. Bien qu'aujourd'hui les objets soient généralement discutés parles

1539 commissions avant le début de la session, il ne suffit plus que les messages soient remis aux membres des conseils huit jours avant la session. A l'avenir, les messages et rapports du Conseil fédéral devront leur être remis au plus tard dix jours avant la séance de la commission du conseil qui a la priorité (1er al.). L'article 45, 3e alinéa, concernant l'expédition du rapport de gestion, du budget et du compte d'Etat demeure réservé.

Un règlement particulier (voir le Manuel des cJiambres, p. 233), approuvé par l'Assemblée fédérale, s'applique à la transmission des autres actes à l'Assemblée fédérale et aux commissions (RS 1, 323). Il devra être adapté à la nouvelle loi (2e al.).

L'article 42 contient une disposition générale sur les rapports entre le Conseil fédéral et les commissions parlementaires. Le 1er alinéa figure actuellement à l'article 20 de la loi; le second consacre une pratique dea commissions. Nous parlerons encore de cette disposition au chapitre E du message (p. 57).

Les articles 43 et 44 seront commentés dans un chapitre spécial (p. 36 s.).

S'inspirant de l'actuel article 23 et de la pratique, Yartide 45 du projet indique quand le Conseil fédéral doit présenter le rapport sur sa gestion, le budget, le compte d'Etat, ainsi que le rapport de gestion, le budget et les comptes des chemins de fer fédéraux (1er al.). Le 2e alinéa apporte une innovation. En vertu des principes généraux régissant le droit fiscal, le budget ne doit contenir aucune dépense ni aucune recette qui n'ait pas de base légale. Le budget devant être soumis aux chambres à la session de décembre, il ne peut y être tenu compte des décisions prises pendant cette session. La conséquence en est que le budget n'est pas complet déjà au moment de sa publication. Nous sommes d'avis qu'il faut obvier par tous les moyens à cette situation peu satisfaisante. Aussi proposons-nous que le budget soit complété après sa mise au net lorsque des décisions prises au cours de la session de décembre entraînent des dépenses pour l'année suivante. Le 3e alinéa contient, pour la remise du rapport de gestion, du budget et du compte d'Etat aux chambres, une disposition qui déroge à celle de l'article 41, 1er alinéa, du projet. D'après la réglementation actuelle (art. 23, 1er al.), ces documents doivent être remis imprimés aux membres
des commissions un mois au plus tard avant le commencement de la session.

Afin de permettre un examen approfondi non seulement aux commissions mais aussi aux chambres, il serait très souhaitable que ces documents volumineux puissent être remis aux chambres en même temps qu'aux commissions. L'administration a dû établir pour la préparation du budget et du compte d'Etat un horaire précis qui est déjà très mesuré et qu'il n'est pas possible de comprimer encore sans que le travail en souffre. Aussi estimons-nous qu'une modification de la réglementation actuelle n'est pas nécessaire. L'administration fera à l'avenir son possible pour adresser aux Feuille fédérale. 112e année. Vol. I.

104

1540 membres des conseils les messages en question environ huit jours plus tôt que jusqu'à présent.

L'article 46, 4e alinéa, sera commenté au chapitre E (p. 58).

La disposition de l'actuel article 24 est reprise à l'article 46, qui prévoit la nomination de commissions permanentes des finances. La nouvelle rédaction diffère de l'actuelle en ceci qu'elle ne prévoit plus que chacun des deux conseils doit nommer lui-même sa commission des finances. Comme le Conseil national a délégué au bureau la compétence de nommer toutes les autres commissions permanentes et que cette délégation a donné de bons résultats, il n'y a pas Heu d'instaurer, par une disposition légale, une exception à cette règle. On ne saurait alléguer une nécessité particulière d'ordre politique pour justifier l'adoption de règles spéciales en ce qui concerne la nomination des membres des commissions des finances. Nous nous en remettons aux deux chambres du soin de décider si les membres des commissions des finances seront nommés par le conseil ou par le bureau.

Le fait que les commissions des finances désignent elles-mêmes leur président constitue une autre exception à la règle établie pour les commissions permanentes. On peut aussi renoncer à cette exception sans inconvénient. Le système de nomination des présidents de commissions est le même dans les deux bureaux, de sorte qu'il y a intérêt à l'appliquer pour la désignation du président des commissions des finances.

Nous parlerons à propos de l'article 51 (p. 58) de la durée du mandat des membres des commissions des finances.

'L'article 47 reprend le contenu de l'actuel article 25. Considérant qu'en 1955 la proposition d'augmenter à quatre le nombre des représentants de chaque conseil dans la délégation des finances demeura sans suite, nous avons maintenu dans le projet le nombre actuel. Il appartiendra aux conseils de décider si ce nombre doit être porté à huit. La délégation étant composée de membres des deux conseils, nos remarques concernant l'article 46 ne peuvent s'appliquer à la nomination du président. La délégation se constituera elle-même, comme actuellement, à l'instar de la commission des grâces et de la délégation de l'alcool.

A l'article 48, nous avons repris, à peu près tel quel, le contenu de l'actuel article 26. Les modifications proposées sont en grande partie
de nature rédactionnelle. Le nombre des affaires ayant fortement augmenté, la règle selon laquelle la délégation se réunit tous les trois mois ne répond plus aux circonstances. Le nouveau texte prévoit une réunion tous les deux mois, ce qui répond d'ailleurs à un usage déjà ancien. Le 3e alinéa se borne à consacrer un état de fait. Déjà dans son rapport du 18 novembre 1924 relatif à la création d'une cour fédérale des comptes, le Conseil fédéral constatait que les prescriptions légales en vigueur confèrent à la délégation le droit de prendre connaissance en tout temps de tous les documents et pièces comptables concernant l'administration fédérale, d'exiger de tous les services les ren-

1541

geignements et éclaircissements voulus (FF 1924, III, 858). Il ne peut évidemment s'agir ici que des pièces ayant un rapport avec la gestion financière.

Aux articles 49 et 50, nous avons adopté pour les commissions de l'alcool des deux chambres et pour la délégation commune de l'alcool la même formule que pour les commissions des finances. L'actuel article 27 contient une réglementation identique.

La disposition de l'article 28 de la loi actuelle est reprise au 1er alinéa de l'article 51, mais on peut se demander si elle est nécessaire. Chaque conseil a le droit, même sans disposition légale, de nommer des commissions permanentes. Il surfit qu'il le prévoie dans son règlement.

Le second alinéa de cet article est en revanche nouveau. Nous le commenterons au chapitre E (p. 58).

IL'artide 52 contient le texte des articles 20 (lre phrase) et 21 de la loi actuelle. La loi sur la responsabilité, du 14 mars 1958 (RO 1958, 1483), est applicable aux actions en responsabilité dirigées contre des membres du Conseil fédéral; il est superflu de faire une réserve à ce sujet dans la loi sur les rapports entre les conseils. En revanche, le 3e alinéa renvoie, pour respecter la systématique du projet, aux rapports entre le Conseil fédéral et l'Assemblée fédérale quant au mode de procéder en matière d'initiatives populaires, les dispositions correspondantes ayant été insérées pour des raisons pratiques dans le chapitre concernant les rapports entre le Conseil national et le Conseil des Etats.

VI. Publication et entrée en vigueur des actes législatifs La loi actuelle contient, aux articles 32 à 36, des dispositions sur la publication des lois et arrêtés dans le Recueil officiel des lois et ordonnances de la Confédération suisse et sur leur entrée en vigueur. Ces dispositions sont reprises dans la nouvelle loi, compte tenu des changements qui se sont produits.

"L'article 53 correspond à l'article 32 actuel. Il reprend aussi l'actuel article 31, suivant lequel le conseil qui avait la priorité doit veiller à ce que l'adoption d'une loi ou d'un arrêté soit communiquée au Conseil fédéral.

L'article 33 actuel prévoit de façon très imprécise que «toutes les lois, les arrêtés et ordonnances d'une importance générale, ainsi que les traités avec les Etats étrangers après l'échange des ratifications seront publiés dans
le Recueil officiel des lois et ordonnances de la Confédération suisse». Mais la loi du 12 mars 1948 relative à la force obligatoire du Recueil systématique des lois et ordonnances de 1848 à 1947 et à la nouvelle série du Becueil des lois (RÖ 1949, 1627) a fixé dès lors ce qui doit ou ne doit pas être publié dans le Recueil des lois. Le nouvel article 54 renvoie simplement à cette disposition. Ce renvoi rend superflu l'article 34, qui prescrit que les arrêtés concernant les concessions de chemins de fer sont publiés dans le Recueil des pièces officielles relatives aux chemins de fer suisses (actuellement Recueil des pièces officielles relatives aux transports suisses, en abrégé Recueil des transports).

1542

Comme ce sont des arrêtés fédéraux simples, ils ne doivent, conformément à l'article 4, lettre d, de la loi susdite du 12 mars 1948, figurer dans le Recueil des lois que si l'Assemblée fédérale le décide. Pour le reste, la publication dans le Recueil officiel des lois et le Recueil des pièces officielles relatives aux transports suisses est réglée par l'ordonnance du 8 novembre 1949 concernant la publication des lois et autres actes législatifs de la Confédération (RO1949, 1631; 1950, 401); la loi sur les rapports entre les conseils peut ainsi régler la question brièvement.

Le Conseil fédéral doit pourvoir à la publication non seulement dans le Recueil des lois, mais aussi dans la Feuille fédérale. La loi du 12 mars 1948 ne dit pas ce qui doit être publié dans la Feuille fédérale, mais on trouve une disposition à ce sujet à l'article 10 de l'ordonnance précitée. Bien qu'il ne soit pas d'usage qu'une loi se réfère à une ordonnance, nous ne pouvons pas renoncer ici à cette référence, si nous voulons que l'article soit complet.

L'article 55 reprend, sans en modifier le fond, les dispositions de l'actuel article 35. Il concerne l'envoi gratuit du Recueil officiel des lois aux offices cantonaux et aux communes.

L'article 06 (art. 36 actuel) fixe la date de l'entrée en vigueur des actes législatifs. Il ne s'applique qu'aux actes législatifs de l'Assemblée fédérale, l'entrée en vigueur des arrêtés et ordonnances du Conseil fédéral étant réglée par l'ordonnance du 8 novembre 1949 (art. 4). Les deux dispositions concordent, de sorte que la même règle vaut pour l'entrée en vigueur de tous les actes législatifs de la Confédération.

Vu. Dispositions finales et transitoires "L'article 57 concerne la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, qui devra être fixée par les chambres elles-mêmes, puisque leurs règlements devront être préalablement adaptés au nouveau régime. L'article 58, 1er alinéa, abroge la loi actuelle sur les rapports entre les conseils et les articles 6 à 10 et 15 de la loi du 27 janvier 1892/5 octobre 1950 concernant le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution, incorporés dans le présent projet, alors que le 2e alinéa de l'article 58 complète la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police
en faveur de la Confédération, comme prévu à l'article 2, 1er alinéa.

L'article 59 énumère les prescriptions qui seront applicables aux initiatives pendantes devant l'Assemblée fédérale au moment de l'entrée en vigueur de la loi; il s'agit exclusivement de prescriptions fixant des délais.

D. LE CONTROLE PRÉVENTIF DE LA CONSTITUTIONNALITÉ I. Notion et but L'idée d'un renforcement du contrôle de la constitutionnalité des actes législatifs en général a retenu depuis longtemps l'attention aussi bien des

1543 chambres fédérales que des citoyens et, en particulier, de la société suisse des juristes.

En 1923, le Conseil national avait rejeté une motion de Rabours qui invitait le Conseil fédéral à présenter un texte modifiant l'article 113, 3e alinéa, de la constitution, en vue de donner au Tribunal fédéral la compétence d'examiner la constitutionnalité des lois fédérales et des arrêtés fédéraux de portée générale. L'année suivante, M. Scherer, député au Conseil des Etats, déposa un postulat invitant le Conseil fédéral à examiner et à faire rapport sur la question de savoir s'il n'y aurait pas lieu d'introduire un recours de droit public pour cause d'inconstitutionnalité des arrêtés fédéraux qui n'ont pas été soumis au referendum et pour cause d'inconstitutionnalité ou d'illégalité des arrêtés du Conseil fédéral, aux fins de faire déclarer nuls, totalement ou partiellement, les actes législatifs argués de nullité. Ce postulat fut également rejeté, conformément aux conclusions du rapport présenté par le Conseil fédéral (FF 1929, I, 1).

En 1934, l'assemblée de la société suisse des juristes, après avoir entendu les exposés de F. Fleiner et de W. Rappard, avait discuté le problème du contrôle de la constitutionnalité des lois par le juge; elle ne prit aucune résolution et se borna à remettre au département de justice et police le texte imprimé des exposés, ainsi que le procès-verbal de la discussion (Revue de droit suisse, nouvelle série, 53, p. la s., 36a s., 257 a s.).

Le comité de la société suisse des juristes continua cependant à s'occuper du problème; en 1948, en effet, il adressa une circulaire aux membres, en les priant de faire des propositions sur les mesures propres à assurer le respect de la constitution. Au cours de l'assemblée de 1949, le président de la société renseigna les participants sur les vingt réponses reçues (Bévue de droit suisse, nouvelle série, 68, p. 318a s.). L'assemblée de 1950 s'occupa du thème suivant: «Pourquoi faut-il et comment pourrait-on assurer en matière fédérale le respect de la constitution par le législateur et le respect de la loi par l'administration ? » Deux exposés furent présentés, l'un par le professeur Nef, l'autre par M. Panchaud, juge fédéral. Fait exceptionnel, les délibérations se poursuivirent pendant deux jours et permirent par conséquent un
copieux échange de vues. Une fois dissipée l'incertitude sur les intentions dominantes des participants, l'assemblée adopta une résolution qui, en matière de contrôle préventif, émettait deux voeux ; elle demandait, d'une part, qu'un organe indépendant fût institué en vue de renforcer le contrôle de la constitutionnalité des textes législatifs des chambres fédérales et du Conseil fédéral, en tout cas au cours de leur élaboration, et, d'autre part, qu'un organe fût chargé d'examiner au cours de leur élaboration tous les textes réglementaires (quelle que soit leur dénomination) tant du point de vue de leur conformité à la constitution et à la loi que de leur rédaction (Bévue de droit suisse, nouvelle série, 69, p. la s., 133» s., 369» s., 443a s.).

Enfin, le 10 juin 1954, le Conseil des Etats adopta un postulat de M. Stussi demandant au Conseil fédéral d'examiner s'il ne serait pas indiqué

1544

de faire appel au concours du département de justice et police lors de l'élaboration de tous les actes législatifs.

Le contrôle de la constitutionnalité des actes législatifs peut être répressif ou préventif.

Le contrôle répressif a pour but l'abrogation après coup de dispositions qui se sont révélées contraires à la constitution. A la demande du département de justice et police, le professeur Nef présenta le 15 janvier 1953 une consultation sur cette question, qui n'est pas traitée ici; un rapport vous sera éventuellement soumis à une date ultérieure.

A côté de ce contrôle répressif peut aussi intervenir un contrôle préventif, donnant la garantie supplémentaire que les questions constitutionnelles seront examinées à temps aussi bien dans la phase de la préparation, des actes législatifs par l'administration qu'au cours des délibérations parlementaires.

Lors de leur élaboration par l'administration, les actes législatifs sont examinés déjà maintenant du point de vue juridique par le département de justice et police (division de la justice) ; cet examen, il est vrai, n'est pas demandé dans tous les cas, mais pourtant de plus en plus souvent. Il ne s'agira par conséquent que de développer une institution existante. D'une part, il faudra saisir l'occasion de la revision de la loi de 1914 sur l'organisation de l'administration fédérale pour prévoir une disposition sur la collaboration du département de justice et police à la préparation des actes législatifs. D'autre part, il s'agira d'étudier si et comment cette collaboration devrait être rendue plus étroite, à quels actes législatifs elle devrait s'étendre et à quel moment elle devrait intervenir. Le contrôle de la constitutionnalité des actes législatifs par l'administration n'est pas traité dans ce message; il sera réglé au moment de la revision de la loi de 1914 sur l'organisation de l'administration fédérale.

Le présent message a uniquement pour objet le contrôle de la consti.

tutionnalité des actes législatifs dans la phase des délibérations parlementaires (1).

(*) Eichenberger K. : Rechtssetzungsverfahren und Rechtssetzungsformen in der Schweiz, rapport présenté à l'assemblée de 1954 de la société suisse dea juristes (Bévue de droit suisse, nouvelle série, 73, p. lo s.).

Fleiner F. : Die Prüfung der Verfassungsmässigkeit der Bundesgesetze
durch den Richter, rapport pour l'assemblée de 1934 de la société suisse des juristes (ibid. 53, p. la s.).

Nef H., prof. : Sinn und Schutz verfassungsmässiger Gesetzgebung und rechtmässiger Verwaltung im Bunde, rapport pour l'assemblée de 1950 de la société suisse des juristes (ibid. 69, p. 133a s.).

Marti H. : Der Schutz der Verfassung. Bévue de la société des juristes bernois, 85 (1949), p. 193s.

Panchaud A. : Les garanties de la constitutionnalité et de la légalité en droit fédéral (Bévue de droit suisse, nouvelle série, 69, p. la s.).

Rappard W. : Le contrôle de la constitutionnalité des lois fédérales par le juge aux Etats-Unis et en Suisse (ibid. 53, p. 36a s.).

1545 Avant d'aborder les questions que pose le contrôle constitutionnel préventif dans la procédure parlementaire et de proposer une solution, il nous paraît indiqué de préciser certaines notions, en nous fondant sur un avis de droit établi le 16 août 1954 par M. Hans Kühn, ancien chef de la division fédérale de la justice.

Le but d'un contrôle préventif est d'empêcher toutes les violations possibles de normes constitutionnelles. Déjà dans là procédure législative préparatoire, les autorités doivent donc se demander si la Confédération a la compétence d'édicter l'acte législatif envisagé et, dans l'affirmative, quelle forme juridique et quelle teneur il faut lui donner pour que son contenu ne viole aucune disposition quelconque de la constitution.

Aujourd'hui déjà, on s'efforce d'assurer dans la législation fédérale le respect de la constitution, à tous les stades de la procédure législative.

Chaque acte émanant d'une autorité appelée à légiférer se fonde directement ou indirectement sur la constitution ; il doit donc être conforme à cette base juridique et n'en pas excéder les limites. Cette règle s'applique en premier lieu aux actes législatifs de l'Assemblée fédérale et d'abord aux lois qui servent généralement à exécuter des principes constitutionnels. Mais la même exigence est valable aussi pour les arrêtés fédéraux -- arrêtés de portée générale ou arrêtés simples --· ainsi que pour les arrêtés de l'Assemblée fédérale. Il se peut, du reste, que l'examen de la constitutionnalité porte justement sur la question de savoir si les dispositions envisagées doivent être édictées sous la forme d'un acte législatif soumis au referendum. Ce sera le cas, par exemple, lorsqu'on peut se demander si elles sont visées par l'article 32, 1er alinéa, 1TM phrase, de la constitution.

Les arrêtés fédéraux urgents méritent une attention spéciale. On a maintes fois prétendu que la clause d'urgence de l'ancien article 89 de la constitution avait été souvent utilisée abusivement pour empêcher un referendum; ces reproches n'ont pas peu contribué au mouvement déclenché en faveur de l'institution d'une juridiction constitutionnelle (voir par exemple Marti, loc. cit. p. 166, pour qui cette juridiction serait non seulement un remède contre l'usage abusif de la clause d'urgence, mais aussi une protection pour les cantons
et les citoyens). Depuis que l'article 896is a institué un nouveau régime de l'«urgence» -- pour user encore de cette expression désormais éliminée de la constitution --, ces craintes ont perdu beaucoup de leur raison d'être. Le recours à un arrêté fédéral urgent ne permet plus d'ignorer le peuple. Par la voie du referendum prévu au 2e alinéa, les citoyens peuvent faire valoir leur opposition s'ils estiment que la mise en vigueur de l'arrêté pourrait être retardée de la durée du délai de referendum (et éventuellement du temps nécessaire pour une votation). Et si l'Assemblée fédérale appliquait à tort le 2e alinéa au lieu du 3e et, par conséquent, invoquait une base constitutionnelle en fait inexistante, les citoyens pourraient encore demander

1546 le referendum, la majorité des cantons ne comptant alors pas pour le résultat de la votation.

Enfin la question du contrôle constitutionnel se pose aussi pour l'activité législative exercée par le Conseil fédéral en vertu d'une délégation de pouvoirs du législateur, c'est-à-dire pour les ordonnances, ainsi que pour les prescriptions qui pourraient encore être édictées par les départements.

Le danger de violation de la constitution est ici moindre; en effet, les ordonnances contiennent des dispositions d'exécution, alors qu'en règle générale c'est dans la loi que se trouvent les dispositions fondamentales établissant la liaison avec la constitution. L'ordonnance doit être conforme à la loi et, de ce fait, indirectement aussi à la constitution.

Le contrôle constitutionnel préventif a pour but d'empêcher, autant que possible, que la législation ne viole la constitution, tandis que le contrôle répressif doit fournir les moyens de réparer les atteintes qui pourraient avoir été portées à la constitution. C'est pourquoi le contrôle préventif doit intervenir au cours de la procédure législative et même dès son début. Il doit avoir lieu déjà lorsque le projet de loi s'élabore, puis au cours de son examen par les autorités appelées à s'occuper de sa préparation et enfin au parlement ; il s'exerce donc quand le texte de la loi n'est pas encore définitivement établi. Le contrôle préventif doit avoir pour but de modifier ou d'éliminer des dispositions anticonstitutionnelles, mais aussi de faire abandonner le projet lui-même s'il est incompatible comme tel avec la constitution (par exemple parce que la Confédération n'est pas compétente pour régler la matière ou que les dispositions contraires à la constitution sont de telle importance que sans elles la loi perd toute raison d'être). Lorsque la procédure législative est terminée, ce qui signifie que le texte de la loi ne peut plus être modifié, le contrôle préventif ne peut encore s'exercer que s'il existe une autorité pouvant empêcher la promulgation de la loi (comme dans la République fédérale d'Allemagne, où le président pourrait refuser son approbation, Ausfertigung).

Dans notre législation fédérale, cette possibilité n'existe pas. Lorsque le Conseil national et le Conseil des Etats ont terminé la discussion d'un projet, s'il y a lieu après
l'élimination des divergences, qu'un accord est ainsi intervenu et que la commission de rédaction généralement instituée a achevé son travail, le texte mis au point est soumis au vote final dans les deux conseils, puis transmis au Conseil fédéral. Ce dernier publie les actes législatifs soumis au referendum, en particulier les lois, dans la Feuille fédérale, les autres étant publiés immédiatement dans le Recueil des lois fédérales, s'ils doivent y figurer (voir les art, 34, 53 et 54 du projet, ainsi que l'art. 4 de la loi du 12 mars 1948 relative à la force obligatoire du Recueil systématique des lois et ordonnances). Aucune autorité ne pourrait, à ce stade, empêcher encore l'adoption d'un acte législatif, même si son inconstitutionnalité devait être constatée. Peu importe à cet égard

1547 qu'un referendum soit lancé ou non, puisque le texte légal ne peut plus être modifié et que le peuple ne peut que l'accepter ou le rejeter tel qu'il est formulé (la prétendue inconstitutionnalité de la loi pouvant, il est vrai, exercer un rôle en cas de referendum).

Suivant notre procédure législative, le dernier moment pour exercer un contrôle préventif est celui du vote final dans le second conseil. Il pourrait en effet arriver que l'un ou l'autre des conseils rejette lors du vote final un projet de loi dont on prétendrait à ce moment qu'il est inconstitutionnel (bien que la discussion ne porte plus sur les questions de fond). Mais lorsque les deux chambres ont adopté une loi en votation finale, cette loi doit être publiée. Le contrôle préventif ne peut donc plus avoir lieu après le vote final du second conseil, à moins que la discussion porte sur un arrêté fédéral simple. Les arrêtés fédéraux simples n'étant pas soumis à un vote final, le contrôle préventif n'est possible que jusqu'au vote d'ensemble du second conseil.

Quelle relation y a-t-il entre le contrôle préventif et le contrôle répressif ?

Tous les deux, par une voie différente, tendent au même but, qui consiste à.

assurer le respect de la constitution au cours de l'activité législative. Ces deux modes de contrôle ne s'excluent pas, mais se complètent mutuellement. Un contrôle répressif ne serait superflu que si un contrôle préventif parfait et absolu pouvait être institué. Mais cela est impossible, pour cette raison déjà qu'il peut arriver que ce soit lors de l'application d'une disposition légale que se révèle son inconstitutionnalité ou que naissent des doutes sur sa constitutionnalité. D'autre part, un contrôle répressif ne rendrait pas superflu un contrôle préventif aussi pour cette raison qu'il est toujours préférable de prévenir une violation de la constitution que de la réparer. Il se justifie par conséquent d'étudier la question d'un contrôle préventif même si un contrôle répressif n'est pas institué simultanément.

II. Réglementations étrangères et solution proposée Le contrôle préventif dans la procédure parlementaire s'étend à la discussion du projet au sein des commissions parlementaires et des deux conseils, y compris la procédure d'aplanissement des divergences, jusqu'au vote sur l'ensemble ou au vote final.
La loi sur les rapports entre les conseils et les règlements des deux conseils fixent la marche des délibérations. Un contrôle constitutionnel préventif doit par conséquent être coordonné avec ces délibérations. Différentes propositions ont déjà été faites à ce sujet; jusqu'à maintenant, les discussions relatives au contrôle préventif se rapportaient plutôt à la procédure parlementaire qu'à la procédure préparatoire.

1. Mentionnons d'abord quelques solutions adoptées à l'étranger. Même si, les conditions étant différentes, elles ne sont pas toutes valables pour nous et ne sauraient en tout cas être simplement copiées, elles sont intéres-

1548 santés déjà parce qu'elles nous montrent que le danger de lois inconstitutionnelles existe ailleurs aussi et comment on a cherché à y parer f 1 ).

C'est en Autriche peut-être que le contrôle préventif est le plus perfectionné grâce à la loi constitutionnelle de 1920/1929 (V. Adamovich, Qrundriss des österreichischen Verfassungsrechts, 4e édition, 1947). La loi place au premier plan la sauvegarde du partage constitutionnel des attributions en matière de législation et d'exécution entre l'Etat fédéral (Bund) et les Länder. Selon l'article 142 de la loi, les organes chargés de promulguer les lois et ceux qui ont pour tâche de les contresigner ne peuvent, sous leur responsabilité, promulguer que des lois édictées par l'autorité constitutionnellement compétente. De plus, le Conseil fédéral (Bundesrat formé des représentants des Länder) a un droit d'opposition absolu ou suspensif envers les lois votées par le Conseil national, opposition qui rend la loi inopérante ou suspend ses effets provisoirement. Il existe en outre une cour constitutionnelle (Verfassungsgerichtshof) qui exerce surtout un contrôle répressif, mais dont la décision peut être requise déjà avant la promulgation d'un acte législatif lorsque des doutes s'élèvent sur la compétence dans un domaine déterminé (art. 138). Le président fédéral atteste par sa signature la constitutionnalité des loia ; par conséquent, il peut et doit refuser sa signature s'il estime qu'une loi est inconstitutionnelle pour des raisons de forme ou de fond (art. 47).

Dans la République fédérale d'Allemagne, la cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgericht) exerce une fonction quelque peu analogue, mais purement consultative (art. 97 de la loi de 1951). Cette cour, elle aussi, a une tâche essentiellement répressive; elle exerce cependant un contrôle préventif en tant que le Bundesrat, le Bundestag et le Bundesregierung peuvent lui demander conjointement son avis sur une question de droit constitutionnel, le même droit appartenant aussi au président fédéral s'il a des doutes sur la constitutionnalité d'une loi soumise à son approbation (2).

Dans les Länder de Bade-Wurtemberg et de Rhénanie-Palatinat, il est de même possible de provoquer avant le vote d'une loi par le Landtag un arrêt de la cour suprême (Staatsgerichtshof) sur la question de la
constitutionnalité.

Certains Etats américains (Colombie, Equateur, Panama) connaissent en outre l'intervention du chef de l'Etat auprès de la cour suprême contre le parlement pour inconstitutionnauté d'une loi (voir Nef, op. cit. p. 245«), (*) Les rapports présentés par MM. Panehaud et Nef pour l'assemblée de 1950 de la société suisse des juristes donnent un aperçu de la situation dans certains Etats (Revue de droit suisse, nouvelle série, 69, p. 27a B., 245a s.). Ces rapports concernent en partie le contrôle répressif.

(2) Kn revanciie le Bundesamt für Verfassìtngsachuts n'a. rion à farro avec le présent objet; cet office veille au maintien de l'ordre constitutionnel, c'est-à-dire à la «protection de l'Etat» au sens que noua donnons à ce terme.

1549 En Belgique, une loi de 1946 a institué un Conseil d'Etat chargé d'une tâche très étendue, mais purement consultative. Les ministères doivent en effet soumettre à la section de législation de cette autorité tous les avantprojets de lois et d'arrêtés d'exécution, et l'avis motivé de la section est annexé à l'exposé des motifs des projets de lois. En outre, les présidents des deux chambres peuvent demander une consultation à la section encore au cours des délibérations parlementaires (voir Panchaud, op. cit. p. 30a).

Le régime institué en France par la constitution de 1946 avait un caractère très particulier, du fait déjà que les dispositions dont il s'agit (art. 91 à 93) se trouvaient dans le titre concernant la revision de la constitution. Un «comité constitutionnel» présidé par le président de la République comprenait en outre les présidents des deux chambres, sept membres élus par l'Assemblée nationale et trois par le Conseil de la République (Sénat), choisis en dehors des députés. Le comité constitutionnel pouvait être convoqué par le président de la République d'entente avec la majorité du Sénat pendant le délai de promulgation de la loi. Il s'efforçait de provoquer un accord entre les deux chambres et, s'il n'y parvenait pas, prenait une décision. S'il déclarait la loi inconstitutionnelle, elle était renvoyée à l'Assemblée nationale pour nouvel examen et si cette assemblée maintenait sa manière de voir, la constitution était revisée en conséquence. Ainsi c'est la constitution qui devait céder devant l'Assemblée nationale et non le contraire, de sorte qu'il s'agissait bien d'éliminer des contradictions, mais non pas de contrôle constitutionnel.

Conformément aux articles 61 et suivants de la nouvelle constitution française du 4 octobre 1958 et à l'ordonnance du 7 novembre 1958, toutes les lois fondamentales votées par le parlement doivent, avant d'être promulguées, être soumises au «Conseil constitutionnel» qui examine leur constitutionnalité. Si le Conseil constitutionnel déclare que la loi ne contient rien de contraire à la constitution, elle peut être promulguée. S'il constate en revanche que la loi contient une disposition contrarre à la constitution et déclare simultanément que cette disposition est inséparable de la loi, celle-ci ne peut pas être promulguée. Mais s'il ne fait pas
cette dernière déclaration, le président de la République peut promulguer la loi sans la disposition incriminée et exiger des chambres une seconde lecture. Pour le surplus, le Conseil constitutionnel statue définitivement; ses décisions lient toutes les autorités administratives et judiciaires.

2. Les propositions pour une solution suisse ne manquent pas. Suivant le but qu'elles se proposent et la méthode qu'elles préconisent, on peut les ranger dans deux catégories; dans la première, le contrôle constitutionnel incombe aux chambres elles-mêmes et à leurs membres; dans la seconde, il est l'affaire d'un organe entièrement ou du moins partiellement distinct du parlement.

1550 a. En instituant un contrôle préventif au sein des conseils législatifs eux-mêmes, on s'écarterait moins du régime actuel; aujourd'hui déjà, en effet, c'est aux chambres qu'incombé l'examen des questions de droit constitutionnel et de toutes les autres questions que pose un projet de loi. Seule serait modifiée la méthode, puisque, si des difficultés d'ordre constitutionnel venaient à se produire, elles seraient aplanies selon une procédure spéciale, ce qui permettrait de distinguer ces questions des autres problèmes et de leur donner plus de poids. C'est dans ce sens que la Vereinigung für Rechtsstaat und Individualrechte a préconisé l'institution d'une commission consultative pour les questions constitutionnelles, composée de membres des deux conseils.

Il faut ranger dans la même catégorie la proposition faite par M. Eichenberger dans son rapport à l'assemblée de la société suisse des juristes de 1954 déjà citée au début de ce message (Revue de droit suisse, nouvelle série, p. 67 a s., 101 a s., thèse 3c, p. 117a). Sans vouloir modifier la marche des délibérations parlementaires selon la loi sur les rapports entre les conseils, il entend cependant faciliter ces délibérations au moyen d'un service parlementaire de documentation et de droit. Ce service serait à la disposition des députés, des commissions parlementaires et des conseils pour leur procurer la documentation nécessaire à la rédaction des lois, à l'examen du problème constitutionnel et de celui de la concordance législative. A cet effet, on pourrait éventuellement réorganiser le secrétariat de l'Assemblée fédérale.

M. Eichenberger attribue beaucoup d'utilité à cette institution, parce qu'il estime l'assemblée plénière des deux conseils peu apte à examiner les questions de droit constitutionnel et croit que ces questions sont facilement négligées, notamment si le message du Conseil fédéral ne les signale pas expressément.

6. Plus nombreuses et variées sont les propositions qui préconisent, pour l'examen des questions de droit constitutionnel, l'institution d'un organe spécial, indépendant du parlement et doté d'attributions formelles.

Le caractère de cet organisme pourrait aussi être différent suivant sa composition, le moment de son intervention, le poids de ses décisions : il pourrait en effet être un tribunal ou une commission,
il pourrait entrer en fonction pendant les délibérations parlementaires ou seulement après l'adoption d'un projet par les conseils (mais avant la promulgation), sur requête ou d'office, et son avis pourrait être purement consultatif ou avoir une portée obligatoire.

Ce dernier critère est sans doute le plus important. H est évident qu'une décision imperative a beaucoup plus d'influence qu'un avis consultatif.

Mais les partisans d'un organe spécial n'entendent pas lui attribuer seulement le pouvoir de présenter un simple avis de droit, de donner un conseil qui peut être suivi ou non. Ils demandent que le vote des chambres soit, sous une forme ou une autre, rendu plus difficile lorsqu'il s'agit d'adopter une

1551 loi dont la constitutionnalité est contestée, surtout si l'organisme envisagé est un tribunal. Telle est la tendance de la proposition faite par le professeur Huber à la suite du questionnaire de 1948 de la société suisse des juristes.

M. Huber recommande une prudente extension de la juridiction constitutionnelle: dès que la constitutionnalité d'un projet de loi est controversée, l'avis de la cour de droit public et administratif du Tribunal fédéral devrait être demandé déjà à la requête d'une minorité déterminée d'un conseil ; même si cet avis n'était pas décisif, il aurait cependant une certaine autorité; les conseils devraient se prononcer à son sujet et s'ils ne l'approuvaient pas, une majorité qualifiée devrait être prévue pour la décision à prendre.

Le professeur Fleiner avait déjà soutenu la même idée dans un rapport préparé pour l'assemblée de la société suisse des juristes de 1934. Il préconisait avant tout un recours constitutionnel au Tribunal fédéral contre la loi définitivement adoptée par les conseils, mais non encore promulguée et recommandait en outre de prévoir la possibilité de demander au Tribunal fédéral pendant les délibérations parlementaires un avis ayant, même à ce stade, un effet obligatoire.

En réponse au questionnaire précité de la société suisse des juristes, M. Im Hof, ancien conseiller d'Etat, a proposé d'instituer une cour spéciale qui serait chargée de trancher la question de la constitutionnalité au cours de la procédure législative sur proposition d'une minorité déterminée d'un des deux conseils, d'un canton ou même d'un nombre déterminé de citoyens. La cour comprendrait neuf membres, dont trois juges fédéraux.

En cas de décision négative, la loi ne pourrait être adoptée qu'avec l'accord du peuple et des cantons.

Cette conséquence mérite de retenir l'attention. Elle part de l'idée que les normes de droit constitutionnel doivent être adoptées par le peuple et les cantons et qu'à cette condition, les violations de la constitution peuvent être considérées comme sanctionnées; l'article 89&is, 3° alinéa, tire la même conséquence. MM, Nef et Pfund (ce dernier dans son mémoire à la société suisse des juristes) préconisent aussi ce principe à titre de contrôle constitutionnel préventif. Cette solution aurait cependant un résultat quelque peu choquant du point de
vue formel puisque des normes contenues dans une loi créeraient pratiquement du droit constitutionnel en modifiant la constitution ou y dérogeant.

Certains auteurs ont proposé que l'examen de la constitutionnalité ait lieu après l'adoption du projet de loi par les conseils. Dans ce cas, l'organe de contrôle serait consulté pendant le délai de referendum et il ne pourrait donc être qu'une cour constitutionnelle ayant pouvoir de décision (par exemple Fleiner et Marti), Comme le texte légal ne pourrait plus être modifié, une décision en contestant la constitutionnalité entraînerait la caducité de la loi, à moins que la constitution elle-même ne soit revisée.

1552 Si, d'après les solutions mentionnées jusqu'ici, la cour constitutionnelle ne devrait pouvoir intervenir qu'à la demande de requérants dûment qualifiés, M. Pfund propose que le Tribunal fédéral examine d'office la constitutionnalité de toute loi adoptée par les chambres et que les lois déclarées inconstitutionnelles soient obligatoirement soumises à la votation du peuple et des cantons. D'après M. Nef, cette solution est au moins concevable.

3. Pour pouvoir se faire une opinion sur la question du contrôle constitutionnel dans la phase parlementaire, il faut résoudre une série de questions interdépendantes. Est-iï nécessaire ou du moins recommandable d'instituer de nouvelles mesures et si oui, sous quelle forme ? On ne peut pas répondre à la première question indépendamment de la seconde; car il ne servirait à rien d'avoir la conviction qu'il faut faire quelque chose s'il n'était pas possible de trouver une solution satisfaisante. Mais nous croyons qu'un certain contrôle constitutionnel peut être inséré dans la procédure parlementaire et répondons par conséquent affirmativement à la question de principe. Il s'agira de trouver une solution qui tienne compte de nos conditions spéciales et dont le résultat corresponde, dans une certaine mesure, aux moyens mis en oeuvre.

III. Création d'une délégation constitutionnelle 1. La situation actuelle pourrait être sensiblement améliorée si l'on adoptait une disposition obligeant les commissions préparatoires à examiner spécialement la constitutionnalité des projets de lois et d'arrêtés présentés par le Conseil fédéral et à faire rapport aux chambres. A vrai dire, les commissions examinent généralement la question et la constitutionnalité, notamment lorsqu'elle est discutable. La disposition prévue doit cependant empêcher que les commissions et les chambres n'acceptent les yeux fermés la manière de voir du Conseil fédéral ; au contraire, elles doivent soulever et examiner d'office, dans chaque cas, la question de la constitutionnalité.

C'est dans ce sens que nous proposons un article 43, qui peut être inséré dans la loi quelle que soit la décision que prendront les conseils quant à la création d'une «délégation constitutionnelle» (art. 44) chargée de donner son avis sur les questions de droit constitutionnel.

2. Une autre solution consiste à créer une
délégation permanente pour l'examen de questions de droit constitutionnel, telle qu'elle a été proposée par M. Alexander, ancien chef de la divistion de la justice, dans un avis de droit du 19 octobre 1954.

a. Cette «délégation constitutionnelle» aurait une fonction purement consultative, c'est-à-dire qu'elle donnerait son avis sur les questions de droit constitutionnel qui lui seraient soumises. En sa qualité de commission parlementaire, elle serait composée exclusivement de membres des deux conseils. Comme elle aurait un rôle purement consultatif et ne pourrait

1553 pa3 faire de propositions aux chambres, la désignation de délégation lui conviendrait cependant mieux que celle de commission.

Nous rejetons ainsi toutes les propositions qui, dictées par une certaine méfiance envers l'Assemblée fédérale, admettent que le parlement a failli à sa tâche de gardien de la constitution et cherchent par conséquent le salut dans l'institution d'un organisme extraparlementaire. Nous repoussons de même les propositions qui tendent à donner à l'organisme envisagé un pouvoir de décision ou à attacher à ses décisions des effets juridiques qui aboutiraient à diminuer la position de l'Assemblée fédérale.

La création d'une délégation consultative permanente des chambres aura pour effet d'instituer un contrôle au sein de l'Assemblée fédérale ellemême. Cette solution contribuera à rehausser le prestige de l'autorité suprême de la Confédération et à renforcer ainsi sa position. Ses attributions resteront intactes, ses tâches et sa responsabilité demeureront inchangées.

En outre, l'institution de cette délégation consultative parlementaire ne demande aucune revision constitutionnelle et peut donc être réalisée rapidement.

Comme nous l'avons dit, la question de la constitutionnalité est généralement examinée d'abord par les commissions parlementaires chargées de l'étude du projet, puis au sein du Conseil national et du Conseil des Etats, parfois sommairement il est vrai (le plus souvent, la question est aussi traitée dans le message du Conseil fédéral). La constitutionnahté d'amendements proposés au cours des délibérations est également discutée si des doutes apparaissent. La création d'une délégation permanente chargée de donner son avis sur les questions de droit constitutionnel permettra d'examiner de façon plus approfondie et objective la constitutionnalité des actes législatifs. On peut admettre que les chambres enverront dans cette délégation des députés spécialement qualifiés pour examiner avec compétence et impartialité les questions de droit constitutionnel. Eu égard à son rôle, la délégation permanente devra garder une certaine distance envers les différents projets et examiner les questions qui lui sont soumises non seulement en fonction du projet en discussion, mais aussi en rapport avec la législation dans son ensemble; cela permettra en outre d'assurer une
certaine continuité et une certaine uniformité dans l'examen des questions de droit constitutionnel. Relevons en passant que l'institution de la délégation permanente aura pour effet d'accentuer l'importance d'un examen consciencieux de la constitutionnalité des projets.

b. H n'est pas question, pour des raisons d'ordre pratique, et il n'est pas non plus nécessaire que la délégation permanente contrôle la constitutionnalité de tous les projets soumis à l'Assemblée fédérale; la constitutionnalité de la plupart des projets est d'emblée établie. En revanche, l'avis de la délégation devra pouvoir être sollicité dès que, pendant les délibérations parlementaires, la constitutionnalité d'un projet ou d'une

1554 proposition est révoquée en doute ou que l'examen de questions de droit constitutionnel est demandé. La délégation permanente aura pour mission de donner son avis sur des questions de droit constitutionnel (on peut aussi les appeler de «droit public») lorsqu'elle en sera requise. Elle n'aura pas à faire de propositions, mais à donner une consultation sur les questions de droit qui lui sont posées. Ses membres auront naturellement la faculté de présenter des propositions dans le conseil auquel ils appartiennent. Mais c'est toujours à la commission spécialement chargée d'examiner un projet qu'il incombera d'en délibérer; cette tâche ne passera pas à la délégation permanente.

L'avis de la délégation pourra être demandé au sujet de questions de droit public qui se posent lors de la délibération parlementaire d'un objet quelconque, c'est-à-dire non seulement sur des projets de lois, d'arrêtés fédéraux de portée générale ou d'arrêtés de l'Assemblée fédérale, mais aussi sur des arrêtés simples ou des rapports du Conseil fédéral. A cet égard, il convient de mentionner spécialement les questions de droit constitutionnel que soulèvent les rapports du Conseil fédéral sur les initiatives (par exemple la question de l'unité de la matière).

En pratique, la question de la constitutionnalité se posera dans trois cas principaux: tm. La compétence de la Confédération pour édicter un acte législatif est contestée f 1 ). C'est alors l'ensemble du projet qui est en cause; la question constitutionnelle préjuge l'entrée ou la non-entrée en matière sur le projet.

bb. La question est de savoir si un projet peut être présenté dans la forme juridique proposée; par exemple, on ne voit pas d'emblée si un arrêté simple suffit ou si une loi ou un arrêté fédéral de portée générale est nécessaire (voir AF simple du 22 juin 1955 concernant la prolongation et le financement du service d'expérimentation de la télévision suisse, FF 1955, I, 1170) ou encore si les conditions d'un arrêté urgent selon le 2e ou le 3e alinéa de l'article BQbis de la constitution sont remplies.

Il s'agit ici de la question préjudicielle de la forme juridique de l'acte (*) Ainsi, lors de la discussion de la loi sur les stupéfiants du 2 octobre 1924, on a contesté énergiquement la compétence de la Confédération; les chambres l'ont admise et le
referendum n'a pas été demandé; lors de la revision totale de cette loi (1951), la compétence du législateur n'a plus été mise en doute. -- La compétence de la Confédération a été également très contestée en matière de transports automobiles; elle a cependant été reconnue par les conseils. L'arrêté sur le statut des transports automobiles de 1938 et sa prorogation jusqu'en 1951 ont fait l'objet d'arrêtés fédéraux urgents, Le peuple a, en 1935, rejeté le projet de loi sur le partage du trafic et, en 1951, le nouveau statut des transports automobiles. Comme exemples de lois que l'Assemblée fédérale s'est refusée à adopter par scrupules constitutionnels, nous pouvons citer: en 1901, le projet de loi sur la subvention aux écoles primaires (sur quoi la cunaLiLuLioii a été révisée); en 1914, le projet de loi sur la caisse d'épargne postale; en 1945, le projet de loi revisant partiellement la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques.

1555 législatif (arrêté avec clause référendaire, arrêté avec clause d'urgence, arrêté fédéral simple; loi fédérale, arrêté fédéral ou arrêté de l'Assemblée fédérale).

ce. La constitutionnalité de certaines dispositions du projet ou de certains amendements est controversée (1). H s'agit alors d'élucider une question qui préjuge la décision à prendre sur les dispositions en cause.

c. L'avis de la délégation constitutionnelle sera demandé pendant que le projet donnant lieu à contestation est devant l'Assemblée fédérale.

Il devra être requis à un moment où le projet peut encore être modifié, c'est-à-dire avant que les deux conseils se soient mis d'accord sur le contenu de l'acte législatif. S'il s'agit de projets soumis au vote final, l'avis de droit devra être demandé au plus tard avant que la commission de rédaction ait été saisie. En matière d'arrêtés fédéraux simples non soumis au vote final, la délégation devrait être consultée, s'il n'y a pas de divergences, avant le vote sur l'ensemble par le second conseil et, s'il y en a, au moins avant leur aplanissement. Il est souhaitable que l'avis de la délégation soit requis tout au début de la procédure parlementaire, par exemple, dans le cas cité sous lettre a, si possible avant que le conseil qui a la priorité ou sa commission ait pris une décision sur l'entrée en matière. Il n'y a pas lieu cependant de prévoir un délai de péremption; si la constitutionnalité d'un projet est contestée seulement au cours des délibérations du conseil saisi en second lieu ou même au cours de la procédure d'aplanissement des divergences, l'avis de la délégation devra encore pouvoir être requis.

d. Qui pourra solliciter l'avis de la délégation constitutionnelle permanente ? Chacun des deux conseils aura ce droit. Il serait utile que la commission spéciale du conseil qui a la priorité, puis la commission de l'autre conseil puissent aussi requérir cet avis. Chaque membre d'un des conseils pourra proposer au conseil de consulter la délégation; les membres des commissions parlementaires pourront aussi le faire déjà au sein de ces commissions. On peut admettre que les conseils ou leurs commissions adopteront, en règle générale, cette proposition si des doutes sérieux sont invoqués sur la constitutionnalité ou si le désir d'obtenir des éclaircissements à ce sujet paraît
fondé. Une minorité déterminée de chaque conseil devrait être nécessaire pour demander l'avis de la délégation. Nous proposons de fixer ce nombre à soixante membres pour le Conseil national et à quatorze pour le Conseil des Etats, ce qui représente à peu près dans les deux chambres un tiers des membres. On peut se demander si le Conseil fédéral devrait pouvoir, lui aussi, proposer (à titre général ou seulement en cas d'amendements soulevant des questions constitutionnelles) que la délégation soit consultée. Le chef du département qui défend le projet pourra, en vertu f 1 ) Exemple: LF du 1er février 1952 concernant l'imposition du tabac; la constitutionnalité des prescriptions sur le contingentement des matières premières était contestée. La loi fut acceptée en votation populaire.

Feuille fédérale. 112<= année. Vol. I.

105

1556 de l'article 101 de la constitution, proposer aux conseils législatifs de consulter la délégation. Le conseil auquel cette proposition est faite pourra toutefois l'accepter ou la rejeter, car le droit des membres du Conseil fédéral de faire des propositions est identique à celui des membres des conseils. Cela étant, il nous paraît justifié d'accorder le droit de consulter la délégation non seulement à chacune des deux chambres, aux commissions et à une minorité déterminée de membres de chaque chambre, mais aussi au Conseil fédéral.

e. Un avis de droit vaut ce que valent les arguments qui l'étayent.

Les avis de la délégation constitutionnelle permanente n'auront de poids que s'ils se fondent sur une argumentation convaincante. Si les chambres envoient dans la délégation des membres spécialement qualifiés pour apprécier les questions de constitutionnalité, la délégation fera du bon travail.

Il ne faut pas compter cependant qu'elle sera toujours unanime. Les problèmes constitutionnels sont parfois tels qu'en toute bonne foi on peut être d'opinion différente à leur sujet. Nous pensons que, s'il y a lieu, l'avis de la délégation mentionnera aussi l'opinion de la minorité.

L'avis de la délégation permanente ne liera pas les chambres. Une fois en possession de cet avis, la commission spéciale du conseil saisi d'un objet arrêtera les propositions qu'elle entend présenter au conseil (par exemple passer ou ne pas passer à la discussion de l'objet; adopter, rejeter ou modifier certaines dispositions du projet). Le conseil se prononcera ensuite sur ces propositions; il le fera compte tenu de l'avis donné par la délégation quant à la question constitutionnelle, qui est une question préjudicielle à régler avant la décision sur le passage à la discussion du projet, ainsi que sur l'adoption ou le rejet de certaines dispositions du projet.

/. Faut-il prévoir une délégation permanente commune aux deux chambres ou chaque conseil aura-t-il sa propre délégation permanente ?

Dans le premier cas, chacune des chambres aurait à désigner la moitié des membres de la délégation commune. La délégation compterait par conséquent des membres en nombre pair. Il arrivera peut-être qu'une moitié des membres de la délégation se prononcent dans un sens et la seconde moitié dans le sens opposé, de sorte qu'il n'y aura que
deux avis de minorités. On pourrait fixer à huit le nombre des membres de la délégation commune (4 pour chaque conseil). Le président serait choisi pour une année parmi les membres appartenant à l'une des chambres et pour l'année suivante parmi ceux qui font partie de l'autre. Relevons encore que quand la délégation commune sera consultée alors qu'un objet est pendant devant le conseil qui a la priorité, ses membres appartenant à l'autre conseil devront aussi collaborer à l'examen de la question constitutionnelle, quand bien même cet autre conseil ne sera saisi de l'objet que plus tard (après la clôture des délibérations du conseil ayant la priorité).

Si chaque conseil instituait sa propre délégation permanente, il va de soi que chacun d'eux (comme aussi ses commissions ou une minorité déter-

1557 minée de ses membres) ne pourrait consulter que sa délégation ; en revanche, le Conseil fédéral devrait avoir le droit de demander l'avis de la délégation dans chacun des deux conseils. Chaque chambre fixerait le nombre des membres de sa délégation permanente, ce nombre devant alors être impair.

H pourrait arriver que l'avis de la délégation du conseil ayant la priorité repose sur des arguments si convaincants qu'il soit ensuite superflu, une fois le second conseil saisi, de consulter encore la délégation de ce conseil.

Souvent cependant, l'avis de la délégation du second conseil serait encore demandé, notamment quand il s'agirait de questions délicates et il pourrait ainsi se produire que les deux délégations parviennent à des conclusions contradictoires. Cet inconvénient est d'un tel poids qu'il est de beaucoup préférable d'instituer une délégation commune des deux conseils et non pas deux délégations distinctes.

Mais la création d'une délégation constitutionnelle commune est-elle compatible avec le système bicaméral (art. 71, 89, 1er al., et 92 Cst.) ?

La constitution exige que chaque conseil délibère «séparément», car elle attend plus de l'examen autonome par deux organismes différents que de l'examen résultant de délibérations communes des mêmes personnes (Burckhardt, Kommentar, p. 717). Aussi la discussion au sein des commissions parlementaires ne peut-elle pas non plus avoir lieu en commun (Burckhardt, loc. cit.; Fleiner/Giacometti, Bundesstaatsrecht, p. 542).

Cette réglementation découle de l'idée que des délibérations séparées aboutissent à un meilleur travail. La discussion successive d'un objet dans deux assemblées différentes garantit mieux un examen complet et approfondi que la délibération en plusieurs lectures dans la même assemblée. Car l'opinion d'une assemblée appelée à se prononcer à plusieurs reprises sur la même question est pourtant moins impartiale que celle d'une assemblée toute différente qui aborde pour la première fois la question (Dubs, Dos öffentliche Recht der Eidgenossenschaft, tome II, p. 45/46; Condrau, Das parlamentarische Zweikammersystem, p. 25 et 45/46). Les délibérations séparées des deux conseils permettent d'éviter des décisions parlementaires hâtives et contribuent à l'équilibre politique ainsi qu'à l'objectivité et au sérieux du travail des chambres
(Ruck, Staatsrecht, p. 79).

Ces considérations sont valables pour les chambres et pour les commissions parlementaires chargées de traiter un objet et de présenter des propositions, mais non pour une délégation dont le rôle se borne à donner son avis sur des questions de droit déterminées. Nous estimons par conséquent que le principe du système bicaméral ne s'oppose pas à l'institution d'une délégation constitutionnelle commune des deux chambres. M. Nef (Revue de droit suisse, nouvelle série, p, 201 a) est d'avis que cette dérogation au système bicaméral peut se justifier.

1558 IV. Questions de procédure II convient d'examiner encore quelques questions de procédure en rapport avec l'activité de la délégation constitutionnelle.

1. La délégation constitutionnelle commune se constituerait ellemême, de la même manière que la commission des grâces, la commission pour les conflits de compétence, la délégation des finances et la délégation de l'alcool (cf. art. 36, 37, 47 et 50, 1er al., du projet).

Il appartiendra aux deux conseils de déterminer, en revisant leur règlement, pour quelle durée leurs membres pourront faire partir sans interruption de la délégation constitutionnelle commune.

2. Si un conseil décide ou un nombre suffisant de ses membres proposent de solliciter l'avis de la délégation permanente sur une question de droit public, le président de ce conseil consultera la délégation. Si la commission parlementaire spéciale a décidé de consulter la délégation, c'est à son président qu'il incombera d'agir (en avisant le président du conseil auquel il appartient). Si c'est le Conseil fédéral qui consulte la délégation constitutionnelle, la requête sera présentée par le chef du département qui défend le projet.

3. La délégation constitutionnelle devra-t-elle faire appel à des experts ?

L'article 104 de la constitution prévoit que le Conseil fédéral et ses départements sont autorisés à appeler des experts pour des objets spéciaux.

Cette disposition, adoptée en 1848, faisait échec à l'ancien système de l'administration de certains services par des commissions de la Diète ; on voulut exclure de telles commissions administratives de l'Assemblée fédérale, mais non les commissions subordonnées au Conseil fédéral (Burckhardt, Kommentar, p. 744). L'article 104 n'interdit pas à l'Assemblée fédérale de faire appel à des experts (ayant un rôle purement consultatif). Aux termes de l'article 48, 5e alinéa, du projet, la délégation des finances peut «demander l'avis d'experts pour l'éclaircissement de points qui exigent des connaissances techniques spéciales» (cf. aussi l'art. 3, 3e al., du règlement de la commission de gestion du Conseil national). On admet que les autres commissions parlementaires peuvent aussi s'adjoindre des experts; ces cas cependant sont rares (Claus Burkhard, Die parlamentarische Kommissionen der schweizerischen Bundesversammlung, thèse Zurich 1952,
p. 135 et 139; Hefti, Vollmachtenkommissionen, p. 93). La constitution ne s'oppose donc pas à ce que la délégation constitutionnelle fasse appel à des experts.

Il n'y a cependant pas heu d'édicter une disposition prévoyant expressément que la délégation pourra faire appel à des experts. Souvent de savants légistes auront donné des consultations -- contradictoires -- avant déjà que l'avis clé la délégation soit demandé; ces consultations a/liront Jenr titilité pour renseigner sur les différentes opinions. Mais la délégation sera en mesure de se prononcer même sans le concours d'experts.

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1559

4. L'examen d'un projet devra-t-il être suspendu lorsque l'avis de la délégation sera requis ? Si la question de droit à élucider préjuge la décision sur l'entrée ou la non-entrée en matière, il se justifiera d'attendre l'avis de la délégation avant de poursuivre l'examen du projet. En revanche, si la question de droit controversée ne concerne que des dispositions isolées, il sera opportun, suivant les circonstances, de renvoyer l'examen de ces dispositions et de poursuivre l'étude du reste du projet. A notre avis, il n'y a pas lieu d'établir des règles strictes. Mieux vaut laisser au conseil (ou à sa commission) le soin de décider si la discussion du projet devra être suspendue ou s'il suffira d'ajourner l'examen de certaines dispositions.

Cette méthode permettra d'adopter dans chaque cas la solution la mieux appropriée aux circonstances.

5. La consultation de la délégation aura-t-elle pour effet de retarder sérieusement la marche des affaires ? La délégation devra donner son avis aussi rapidement que possible, tout en examinant à fond la question qui lui est soumise ; elle devra disposer à cet effet du temps nécessaire. Si la question controversée lui est posée au sujet d'un arrêté fédéral urgent, il pourra arriver --· même si la délégation donne son avis sans délai -- que l'examen du projet subisse un retard lourd de conséquences puisque l'urgence signifie précisément que l'entrée en vigueur de l'arrêté ne supporte aucun retard.

Mais il ne convient pas de fixer à la délégation un délai pour la remise de son avis, ni d'interdire qu'elle soit consultée sur des questions en rapport avec des projets d'arrêtés fédéraux urgents.

V. Insertion dans la loi sur les rapports entre les conseils Pour instituer une délégation constitutionnelle commune aux deux chambres, il est nécessaire de compléter la loi sur les rapports entre les conseils. Nous proposons d'ajouter un article 44 à la loi revisée.

S'il fallait créer deux délégations constitutionnelles distinctes, il ne serait pas indispensable de reviser la loi (cf. art. 51, 1er al., du projet).

Chaque conseil est en effet déjà autorisé à créer une nouvelle commission permanente par l'article 51, 2e alinéa, du règlement du Conseil national ou par l'article 42, 2e alinéa, du règlement du Conseil des Etats. Pour asseoir l'institution sur une base plus
solide, il faudrait compléter au moins ces règlements. La délégation serait mentionnée à l'article 51 du règlement du Conseil national sous un chiffre 12 nouveau et à l'article 42 du règlement du Conseil des Etats sous un chiffre 9 nouveau. En outre, la tâche de ces délégations devrait être définie au moins dans un nouvel article des règlements des conseils (art. 51 bis dans le règlement du Conseil national et 42 bis ou 4AUs dans celui du Conseil des Etats).

Même si des délégations distinctes étaient créées, il serait indiqué de compléter la loi sur les rapports entre les conseils pour donner à cette institution une base dans la loi elle-même.

1560 E. LES INNOVATIONS TENDANT A RENFORCER LA POSITION DU PARLEMENT Ainsi que nous l'avons dit au chapitre B (p. 4 ci-devant), on prétend de plus en plus souvent ces dernières années que le parlement accéderait trop facilement aux désirs du Conseil fédéral et de son administration et qu'il ne serait plus qu'une autorité appelée à entériner les propositions et projets du Conseil fédéral.

Ce reproche n'est pas fondé. Les faits montrent que le parlement continue d'examiner en toute indépendance les propositions du Conseil fédéral et de les modifier suivant sa propre appréciation. C'est ainsi qu'entre les sessions d'hiver de 1951 et de 1954, sur 233 lois et arrêtés fédéraux traités par les chambres, 136 seulement furent adoptés conformément aux projets du Conseil fédéral. Les chambres en ont modifié 97, abstraction faite des modifications purement rédactionnelles. Parmi les projets adoptés tels quels, il y a de nombreux arrêtés approuvant des conventions internationales, pour lesquels la constitution limite les possibilités de modification par l'Assemblée fédérale. La proportion des projets modifiés par les chambres apparaît ainsi encore beaucoup plus forte. Ajoutons que l'Assemblée fédérale n'approuve pour ainsi dire jamais telles quelles l'ensemble des propositions du Conseil fédéral concernant les recours en grâce, mais qu'elle use largement de son pouvoir d'appréciation. Très souvent aussi les lois et arrêtés proposés par le Conseil fédéral ne sont acceptés qu'après des débats animés, ce qui est une preuve de plus que le parlement décide en toute liberté. Nous rappelons par exemple l'arrêté fédéral du 21 mars 1956 par lequel les chambres augmentèrent de neuf pour cent les traitements des fonctionnaires, en dépit d'une résistance opiniâtre du Conseil fédéral. Mentionnons également la loi du 28 septembre 1956 sur la force obligatoire des conventions collectives de travail qui ne fut adoptée qu'après de longues discussions et avec des dispositions différant fortement du projet du Conseil fédéral. On peut en outre se référer aux résultats très instructifs de l'enquête faite par Robert Briner, Der tatsächliche Einfluss der Bundesversammlung auf die Verfassungsgesetzgebung, thèse Zurich 1958, qui prouvent aussi l'indépendance du parlement envers les projets du Conseil fédéral.

D'autre part, ce n'est
pas le rôle de l'Assemblée fédérale de rejeter à tout prix les propositions du Conseil fédéral. Ce serait un mauvais signe pour le Conseil fédéral et l'administration si leurs projets étaient toujours répoussés ou modifiés. Cela serait un piètre témoignage du sens politique du Conseil fédéral et de la capacité de l'administration et deviendrait à la longue intolérable. Si de nombreux projets du Conseil fédéral sont adoptés tels quels, on ne peut pas en conclure que le parlement néglige sa tâche constitutionnelle de législateur et l'abandonne au Conseil fédéral ; il faudrait au contraire en déduire en premier heu que l'administration a bien fait son

1561 travail préparatoire et que le projet du Conseil fédéral répond aux circonstances politiques.

Mais il ne faut cependant pas se dissimuler que l'activité législative est très différente de ce qu'elle était naguère. Elle est devenue économique et sociale, alors que précédemment elle avait une plus grande portée politique et de principe. Les tâches du législateur d'aujourd'hui sont si diverses et exigent de telles connaissances que leur réalisation est davantage l'affaire des autorités administratives que d'une autorité politique. Les membres de l'Assemblée fédérale sont en outre si occupés qu'il est impossible à chacun d'eux de s'intéresser, avec l'attention désirable, à chaque problème de détail. Ils doivent souvent s'en remettre aux connaissances et à la probité des spécialistes et de l'administration ou de collègues versés en la matière. Le citoyen se sent dans la même situation lorsqu'il est appelé aux urnes pour se prononcer sur certaines questions.

Il y a là une certaine menace pour le pouvoir de libre décision, toujours aussi nécessaire, de l'Assemblée fédérale. Ce danger indirect existe, quand bien même l'Assemblée fédérale a jusqu'ici toujours su faire usage de ses prérogatives. Il faut cependant éviter tout ce qui pourrait donner l'impression que cette évolution serait acceptée tacitement et que le parlement abandonnerait ses prérogatives sans résistance. C'est pourquoi nous proposons d'insérer dans la loi quelques nouvelles dispositions appelées à mieux marquer la position constitutionnelle du parlement. Nous croyons que la liberté d'action du parlement pourrait être ainsi mieux assurée.

Nous vous proposons, à l'article 38, comme première mesure, de consacrer dans la loi l'existence du secrétariat de l'Assemblée fédérale. Comme nous l'avons dit au chapitre C, chiffre IV (p. 31), la loi actuelle partait de l'idée que les affaires de chancellerie de l'Assemblée fédérale seraient traitées en quelque sorte «accessoirement» par la chancellerie fédérale. Cette solution était conforme à l'usage suivi dans les cantons qui confient le secrétariat du Grand conseil à leur chancellerie d'Etat et à la tendance générale de l'Etat fédératif d'avoir une administration aussi simple que possible.

Mais les sessions parlementaires étant plus nombreuses et plus longues, le nombre des affaires et des
commissions ayant augmenté, les tâches du secrétariat ont tellement augmenté que la chancellerie fédérale ne peut plus s'en charger accessoirement; à eux seuls la préparation des sessions et les travaux à accomplir durant les sessions suffisent à occuper un secrétariat permanent.

La mention du secrétariat dans la loi signifiera que l'Assemblée fédérale dispose de son propre appareil administratif et qu'elle ne dépend ainsi à cet égard ni du Conseil fédéral ni de son administration. Administrativement rien ne sera changé puisque le secrétariat restera attaché à la chancellerie fédérale, qui continuera de le surveiller comme le prescrit l'article 105

1562 de la constitution. Dans chaque cas, le secrétaire de l'Assemblée fédérale recevra ses instructions des présidents des chambres.

Cette subordination, directe aux présidents des chambres, que du reste tous les Etats modernes connaissent et qui aussi d'après Burckhardt (Kommentar, p. 745) répond à l'esprit de la constitution, est conforme au principe de la séparation des pouvoirs et permet à l'Assemblée fédérale de disposer d'un secrétariat qui réponde à ses seuls intérêts.

Nous avons prévu dans notre projet (art. 2) que le Conseil fédéral convoque les députés aux sessions de l'Assemblée fédérale, comme c'est le cas actuellement. En revanche, la convocation à une séance de l'Assemblée fédérale (chambres réunies) doit être l'affaire exclusive du président du Conseil national ou, s'il est empêché, du président du Conseil des Etats.

Nous avons fait ressortir cette prérogative par une réserve à l'article 2, 3e alinéa.

La position du parlement par rapport au Conseil fédéral peut aussi être marquée par une disposition sur le dépôt des messages. Si le Conseil fédéral (sauf pour l'exécution de motions) est libre de décider quels projets et messages il entend adresser à l'Assemblée fédérale (art. 102, ch, 4, Cst.), certaines règles légales sont cependant utiles.

La loi actuelle (art. 18, 4e al.) prévoit que les messages importants sont autant que possible remis aux membres des chambres huit jours avant le commencement de la session. Cette disposition s'est révélée insuffisante, ces dernières années en particulier, car le Conseil fédéral a souvent dû adresser à l'Assemblée fédérale, pour les délibérations d'une même session, simultanément plusieurs messages très importants. Lorsque l'échange de corapports au sein de l'administration donne lieu à des divergences entre les départements et que le Conseil fédéral doit consacrer des séances supplémentaires à la discussion du projet, il peut arriver que les commissions ne reçoivent le message que peu de temps avant leur séance. Les milieux parlementaires, comme d'autres aussi, ont ainsi pu avoir parfois l'impression que tout examen approfondi d'un projet par les commissions était dès lors impossible. Comme la date de la séance de la commission est, pour l'étude d'un projet, tout aussi importante que celle de l'ouverture de la session des chambres, nous
proposons de prévoir, à l'article 41, lel alinéa, que les messages doivent être expédiés aux députés dix jours au plus tard avant la séance de .la commission qui traite l'affaire en premier heu.

"L'article 6 contient une disposition qui doit aussi permettre aux chambres de préparer les textes législatifs avec tout le soin voulu. Précédemment, une règle presque toujours observée voulait que les objets importants fussent traités dans une session par le premier conseil et dans une seconde session par l'autre conseil. Cela permettait souvent d'élucider entretemps les questions nouvelles qui pouvaient surgir et mettait la commis-

1563 sion du second conseil en mesure de prendre ses décisions en connaissant exactement l'avis du premier conseil. Cette règle a subi maintes dérogations pendant la guerre. Bien que cette règle puisse parfois causer des difficultés au Conseil fédéral par le retard qu'elle provoque,.nous sommes d'avis que les avantages d'une législation établie avec soin par les chambres l'emportent. Nous ne nous opposons donc pas à ce que l'on insère dans la loi une disposition confirmant l'ancienne pratique. Certains projets doivent cependant pouvoir être traités par les deux conseils pendant la même session. Une réserve doit être prévue dans ce sens (2e al.).

L'article 27, Je alinéa, vise le même but. Certes, le Conseil fédéral a régulièrement fait rapport à l'Assemblée fédérale, à sa demande, sur le contenu d'une initiative qui avait abouti; à l'avenir, il présentera un tel rapport sans y être invité (art. 22 du projet). De par la constitution, il incombe néanmoins à l'Assemblée fédérale d'examiner les initiatives qui ont abouti et de se déterminer à leur égard (art. 121, 5e et 6e al., Cst.).

L'accomplissement de cette tâche ne doit pas dépendre en dernière instance du Conseil fédéral, mais doit demeurer en première ligne l'affaire des chambres, qui en portent la responsabilité. Il importe par conséquent de leur donner la possibilité de s'acquitter de leur tâche, même lorsque le Conseil fédéral est en retard pour présenter sur rapport.

C'est pourquoi l'article 27, 5e alinéa, du projet prévoit que l'Assemblée fédérale peut, le cas échéant, passer à la discussion d'une initiative sans attendre le rapport du Conseil fédéral. L'indépendance de cette assemblée sera ainsi renforcée sur un point essentiel. La disposition fait ressortir qu'il incombe non pas en premier lieu à l'administration et au Conseil fédéral mais bien -- selon la constitution -- à l'Assemblée fédérale de prendre une décision concordante sur le contenu des initiatives. Lorsque le Conseil fédéral et ses services n'arrivent pas à se déterminer en temps utile, les chambres pourront d'elles-mêmes engager la procédure, puisque ce sont elles, et non le Conseil fédéral, qui assument la responsabilité suprême de ce qu'il faut recommander aux citoyens. La disposition aura sans doute aussi un effet salutaire sur les travaux préparatoires de l'administration.
Cette disposition exigera, il est vrai, une modification des règlements des conseils qui devront prévoir que les délibérations pourront aussi être introduites par une initiative populaire au sens des articles 121 et suivants de la constitution (art. 37 du règlement du Conseil national et art. 34 du règlement du Conseil des Etats). Actuellement, les deux conseils ne peuvent traiter une initiative que sur la base d'un rapport du Conseil fédéral.

L'article 42, 2^ alinéa, contient également une disposition nouvelle.

Il confère aux commissions le droit -- déjà exercé dans la pratique -- d'exiger du Conseil fédéral des messages et rapports complémentaires sur les projets dont elles sont saisies. On peut renvoyer ici à l'article 42, 1er alinéa.

Bien que d'après cet alinéa les commissions aient le droit mais non l'obli-

1564 gation d'inviter à leurs séances des membres du Conseil fédéral, celui-ci devrait avoir la possibilité de défendre son point de vue déjà au stade des délibérations préliminaires.

Toujours dans l'idée de renforcer la position du parlement à l'égard du Conseil fédéral, nous vous proposons, à l'article 45, 4e alinéa, une autre innovation suggérée déjà deux fois par la commission de gestion du Conseil national (sessions d'été 1955 et 1956). Cette disposition prévoit que le Conseil fédéral doit indiquer dans le rapport de gestion quelle suite il a donné aux motions des chambres. Nous avons d'ailleurs déjà tenu compte de la recommandation de la commission de gestion du Conseil national dans le rapport sur la gestion en 1956. A vrai dire, la commission désirait un rapport aussi sur les postulats. Après avoir pris l'avis de la commission de gestion du Conseil des Etats, nous n'avons pas jugé nécessaire de donner suite à ce désir.

Une autre disposition que nous proposons vise moins à renforcer la position du parlement qu'à assurer l'indépendance et l'autonomie de ses membres.

Suivant Y article 51, 2e alinéa, du projet, les membres d'une commission permanente dont le mandat est échu par l'effet des dispositions du règlement ou pour d'autres raisons ne seront pas rééligibles dans la même commission avant quatre ans. Cette disposition ne figure pas actuellement dans la loi. Le règlement du Conseil national prévoit bien (art, 51, 3e al.)

qu'aucun député ne peut faire partie plus de quatre ans d'une même commission. De son côté, le règlement du Conseil des Etats (art. 42, 3e al.)

autorise un député à faire partie d'une même commission pendant six ans.

Notre projet laisse, comme jusqu'ici, à chaque conseil le soin de prescrire la durée du mandat au sein d'une commission. Ces dispositions ont cependant été interprétées en ce sens qu'un membre d'une commission peut être réélu après une courte interruption. Nous estimons que cette interprétation n'est pas conforme à l'esprit des dispositions, qui tendent certainement à empêcher les inconvénients d'une trop longue participation aux délibérations d'une même commission. L'alinéa que nous proposons devrait permettre d'écarter ces difficultés. L'indépendance du parlement gagnerait sans doute à un renouvellement régulier des commissions permanentes.

Enfin,
il y a lieu d'examiner encore la question du vote au bulletin secret.

La loi actuelle ne contient pas de disposition relative aux votations dans les deux conseils. En revanche, l'article 83 du règlement du Conseil national prescrit qu'aucun député n'est obligé de voter. L'article 84 prévoit que le vote a lieu par assis et levé ou par appel nominal. L'article 67 du règlement du Conseil des Etats déclare également que le vote n'est pas obligatoire. Dans ce conseil, il a lieu à mains levées (art. 68). L'article 70 prévoit aussi le vote à l'appel nominal.

1565 Dans les deux modes de scrutin, le vote est public et peut ainsi être contrôlé. L'appel nominal a précisément pour but de permettre au public de mieux contrôler le vote de chaque député. La portée politique du vote public pour les députés comme pour les électeurs a gardé toute sa valeur.

Une motion Grendelmeier déposée au Conseil national le 27 juin 1956 critique «ce mode de voter», qui «garantit toutefois insuffisamment l'observation de la disposition constitutionnelle selon laquelle les membres des chambres votent sans instructions». Le motionnaire se réfère au vote secret prescrit pour les élections et estime qu'on devrait appliquer cette forme aux lois et arrêtés puisqu'il s'agit de protéger les mêmes intérêts que lors des élections. La motion a été classée entretemps en vertu de l'article 41 du règlement du Conseil national, parce que, bien qu'elle ait été traitée par le bureau, le conseil n'avait pas pu la traiter dans le délai de deux ans.

A notre avis on peut soutenir les deux thèses. Il appartiendra au parlement de peser, du point de vue politique, le pour et le contre des deux systèmes de vote et de décider selon son appréciation. H y a lieu d'examiner également les avantages techniques énumérés par la motion Grendelmeier (sécurité absolue du système de dépouillement; pas d'incertitude en cas de faible écart entre les voix). L'institution d'un système mécanique de dépouillement tel que le propose M. Grendehneier serait certainement possible. Il en existe déjà dans d'autres parlements. La liberté de vote et l'indépendance de chaque député seraient ainsi plus grandes.

Nous avons cependant renoncé à insérer une telle disposition dans le projet, dans l'idée qu'il appartient aux deux conseils de décider s'ils veulent ou non prévoir ce mode de scrutin dans leurs règlements. Le cas échéant, chaque conseil pourrait prévoir le vote secret -- comme pour les élections -- avec dépouillement par le bureau ou au moyen d'une machine à calculer et de fixer les conditions requises pour le vote secret. De telles dispositions figurent déjà dans les deux règlements pour le vote à l'appel nominal.

Nous ne prétendons pas avoir épuisé toutes les possibilités d'accroître l'indépendance du parlement. Seules les dispositions concernant les rapports entre les deux conseils doivent toutefois figurer dans
la loi. Une foia la loi revisée, les règlements des deux conseils devront être remaniés. Chaque conseil aura ainsi l'occasion d'examiner quelles autres innovations il entend insérer dans son règlement.

Nous vous remettons notre message et notre projet de loi en sachant qu'il appartiendra en définitive au parlement d'élaborer la loi et d'y insérer les dispositions qui lui paraissent indiquées dans l'intérêt de la bonne marche de ses travaux. Le parlement a beaucoup plus d'expérience en la matière et le Conseil fédéral n'a élaboré un projet que parce que les conseils l'en ont chargé en adoptant une motion, n appartiendra au parlement de décider.

1566 Le présent message entend précisément indiquer comment le Conseil fédéral conçoit ses rapports avec le parlement.

Enfin, nous vous proposons de classer la motion numéro 6951 de la commission du Conseil des Etats chargée d'examiner le projet de loi concernant le jour d'ouverture des sessions d'hiver et d'été, motion adoptée les 19 septembre et 4 octobre 1956, ainsi que les postulats du Conseil national numéro 7217 (Dietschi-Soleure) du 12 juin 1957 et numéro 7123 (Grendelmeier) du 3 octobre 1956; le postulat numéro 7037 du Conseil national (Alfred Borei) du 3 octobre 1956 ne pourra être classé que lorsque les questions de droit constitutionnel qu'il soulève auront aussi été traitées.

Nous saisissons cette occasion, Monsieur le Président et Messieurs, pour vous assurer de notre haute considération.

Berne, le 25 avril 1960.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max Petitpierre 13004

Le chancelier delà Confédération, Ch. Oser

1567 (Projet)

LOI FÉDÉRALE sur

la procédure de l'Assemblée fédérale, ainsi que sur la publication et l'entrée eu vigueur des actes législatifs (Loi sur les rapports entre les conseils)

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'article 85, chiffre 1, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 25 avril 1960, arrête:

I. Réunion et prorogation Article premier Le Conseil national et le Conseil des Etats se réunissent, en règle générale, pour les sessions ordinaires de l'Assemblée fédérale le premier lundi de décembre, de mars et de juin et le lundi suivant le Jeûne fédéral.

2 Ils sont convoqués par extraordinaire lorsque le Conseil fédéral le décide ou lors qu'un quart des membres du Conseil national ou cinq cantons le demandent.

Art. 2 1 Le Conseil fédéral adresse la convocation pour chaque session ordinaire et extraordinaire. Sont réservés les articles 12, 13 et 13 bis de la loi fédérale du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération.

!

La lettre de convocation indique l'ordre du jour établi par les présidents des deux conseils pour la première séance. Il y est joint une liste des objets en délibération devant l'Assemblée fédérale avec les indications nécessaires sur l'état des travaux, de même que la liste des projets, motions, postulats et interpellations à traiter durant la session.

s La convocation à une séance de l'Assemblée fédérale (chambres réunies) est réservée (art. 35).

1

1568 Art. 3 La clôture ou la prorogation d'une session ne peut pas être décidée par l'un des conseils sans l'assentiment de l'autre, 2 La suppression des séances pendant trois jours consécutifs ne constitue pas une prorogation.

3 Ne constitue pas non plus une prorogation le fait pour le Conseil des Etats de renoncer, en raison de son ordre du jour peu chargé, à tenir tout ou partie de ses séances dans la deuxième semaine d'une session dont la durée a été fixée à plus de deux semaines, ou dans la deuxième ou la troisième semaine d'une session dont la durée a été fixée à plus de trois semaines. Cette décision doit être communiquée au Conseil national.

1

II. Rapports entre le Conseil national et le Conseil des Etats 1. Attribution de la priorité de discussion Art. 4 1 La priorité de discussion pour les affaires qui doivent être traitées séparément par les deux conseils est attribuée à l'un ou à l'autre des conseils.

8 Les présidents des deux conseils se concertent pour cette attribution, sous réserve de l'approbation des deux conseils.

3 Lorsque le Conseil fédéral annonce un objet particulièrement urgent avant la réunion des deux conseils, les présidents des deux conseils tranchent définitivement la question de la priorité de discussion. Dans ce cas, les bureaux nomment au besoin les commissions avant le début de la session.

Art. 5 1 Si les conseils ou, dans le cas prévu à l'article 4, 3e alinéa, les présidents ne peuvent se mettre d'accord sur la question de priorité, les présidents la tranchent par tirage au sort.

2 II est procédé à ce tirage au sort après que les deux conseils ou, dans le cas prévu à l'article 4, 3e alinéa, les deux présidents ont confirmé leurs décisions divergentes.

2. Première délibération Art. 6 1 La première délibération d'articles constitutionnels, de lois, d'arrêtés fédéraux de portée générale non urgents et d'arrêtés de l'Assemblés fédérale ne doit, en règle générale, pas avoir lieu dans les deux conseils pendant la même session, 8 Si le Conseil fédéral désire que la discussion ait lien dans les deinr conseils pendant la même session, il doit motiver sa proposition; l'article 4, 3e alinéa, est applicable par analogie.

1569

3. Forme des actes législatifs édictés par l'Assemblée fédérale

Art. 7 Les actes législatifs de l'Assemblée fédérale doivent revêtir une des formes suivantes: a. Loi fédérale; ô. Arrêté fédéral de portée générale; c. Arrêté de l'Assemblée fédérale ; d. Arrêté fédéral simple.

Art. 8 1 Les actes législatifs qui posent des règles de droit de caractère durable doivent être édictés sous forme de loi.

2 Sont des règles de droit toutes les règles générales et abstraites qui prescrivent un comportement et fixent une procédure.

3 La forme de la loi doit aussi être observée lorsqu'elle est prescrite par d'autres dispositions.

4 Sont réservés les cas de délégation du pouvoir d'édicter des règles de droit de caractère durable (arrêtés de l'Assemblée fédérale et ordonnances du Conseil fédéral).

Art. 9 1 Doivent être édictées sous forme d'arrêtés fédéraux de portée générale les règles de droit au sens de l'article 8 qui n'ont paa un caractère durable.

2 Doivent également être édictés sous cette forme les actes législatifs sujets au vote du peuple en vertu de la constitution et pour lesquels la forme de la loi n'est pas prévue.

3 Les arrêtés fédéraux de portée générale peuvent être déclarés urgents et mis en vigueur immédiatement si leur entrée en vigueur ne souffre aucun retard (art. SQbis, 1« al., Cst.).

1 L'article 33 est applicable à la procédure à suivre en matière de déclaration d'urgence.

Art. 10 1 Doivent être désignés arrêtés de l'Assemblée fédérale les actes législatifs posant des règles de droit de portée générale que l'Assemblée fédérale édicté en vertu d'une autorisation spéciale de la constitution, d'une loi ou d'un arrêté de portée générale et pour lesquels le referendum ne peut pas être demandé.

2 Une telle autorisation ne peut être déduite d'une loi ou d'un arrêté fédéral de portée générale que si elle y est expressément prévue avec la mention que le referendum ne peut pas être demandé.

3 Les arrêtés de l'Assemblée fédérale édictés en vertu d'une telle autorisation doivent aussi mentionner que le vote ne peut pas être demandé.

1570 Art. 11 Doivent être édictés sous forme d'arrêtés fédéraux simples tous les actes législatifs de l'Assemblée fédérale pour lesquels n'est pas prescrite la forme de la loi, de l'arrêté fédéral de portée générale ou de l'arrêté de l'Assemblée fédérale.

2 Le vote du peuple ne peut pas être demandé pour ces arrêtés.

1

4. Mode de procéder en matière de divergences Art. 12 1 Toutes les décisions prises par l'un des conseils à propos d'affaires qui doivent être traitées par les deux conseils sont signées par le président et le secrétaire et transmises à l'autre conseil avec une lettre d'envoi, en règle générale dans les deux jours.

2 II en va de même lorsque l'un des conseils décide de ne pas entrer en matière sur un projet provenant du Conseil fédéral ou de l'autre conseil ou qu'il prend une décision équivalente.

3 La même règle s'applique aux motions votées par l'un des conseils.

4 En revanche, les motions déposées par des membres d'un conseil et rejetées par ce dernier, de même que les décisions relatives à des postulats, ne sont pas transmises à l'autre conseil.

Art. 13 Pour les projets de lois et d'arrêtés, la transmission a lieu après le vote sur l'ensemble (art. 32).

2 A titre exceptionnel et quand il s'agit d'un projet de loi ou d'arrêté se prêtant, en raison de son ampleur, à être discuté par parties, chacun des conseils peut, avec l'assentiment de l'autre, fractionner le projet et le transmettre à l'autre par chapitres avant le vote sur l'ensemble. Dans ce cas, les membres des deux conseils ont le droit de déposer des propositions de nouvel examen pour l'ensemble du projet jusqu'au vote sur l'ensemble.

3 Si les décisions des deux conseils divergent quant au fractionnement d'un projet et si le conseil qui a refusé le fractionnement confirme sa décision, le projet ne sera transmis à l'autre conseil qu'après le vote sur l'ensemble.

1

Art. 14 Une décision concordante des deux conseils n'est pas nécessaire pour les pétitions.

Art. 15 1 Pour qu'une motion votée par un conseil oblige le Conseil fédéral, elle doit avoir aussi été adoptée par l'autre conseil.

1571 a

Lorsqu'un conseil rejette une motion votée par l'autre et lui a donné connaissance de sa décision, la motion est considérée comme rejetée.

Art. 16 Dans tous les autres cas, les décisions non "concordantes de l'un des conseils sont renvoyées- à l'autre pour qu'il délibère sur les divergences jusqu'à ce qu'un accord s'établisse entre eux.

2 La nouvelle délibération est circonscrite aux questions sin- lesquelles l'accord n'a pu s'établir.

s Une délibération ne peut avoir lieu sur d'autres questions que si elle est rendue nécessaire par les nouvelles décisions ou si les commissions des deux conseils en font la proposition d'un commun accord.

1

Art. 17 Si les deux conseils décident de persister dans leurs résolutions, les divergences sont soumises à la conférence de conciliation qui se compose des membres des commissions des deux conseils et doit chercher à amener une entente.

2 Si la commission de l'un des conseils est moins nombreuse que celle de l'autre, elle doit être complétée jusqu'à égalité.

8 La conférence est présidée par le président du conseil qui avait la priorité dans l'examen du projet.

1

Art. 18 La conférence de conciliation délibère valablement lorsque la majorité des membres de chacune des deux commissions est présente. Ce quorum doit être expressément constaté.

2 Si la majorité des membres votants de la conférence adopte une proposition, cette dernière constitue la proposition de conciliation de la conférence.

* Le président vote. Il ne départage pas les voix.

1

Art. 19 Si aucune conciliation n'intervient, chaque commission présente un rapport à son conseil. Il n'y a pas de votation. L'ensemble du projet est réputé n'avoir pas abouti et il est rayé de la liste des objets à traiter.

Art. 20 Lorsqu'une conciliation intervient, la proposition de conciliation est communiquée en premier lieu au conseil qui avait la priorité de discussion, puis, celui-ci ayant pris sa décision, à l'autre conseil.

1

Feuille fédérale. 112« année. Vol. I.

106

1572 a

Le rapport de la commission et la discussion qui suit sont circonscrits à la proposition de conciliation. Chaque conseil ne peut prendre qu'une seule décision.

s Si la proposition de conciliation est rejetée par un conseil ou par les deux, l'ensemble du projet est réputé n'avoir pas abouti et il est radié de la liste des objets à traiter.

5. Mode de procéder en matière d'initiatives populaires

Art. 21 Le Conseil fédéral constate si les conditions posées par la constitution et la loi concernant le mode de procéder pour les initiatives populaires relatives à la revision de la constitution sont remplies et si l'initiative a abouti.

2 II publie sa décision dans la Feuille fédérale.

1

Art. 22 Lorsque le Conseil fédéral a constaté qu'une initiative a abouti, il présente à l'Assemblée fédérale un rapport sur son contenu.

Art. 23 L'Assemblée fédérale décide de la validité d'une initiative.

2 Si les décisions des deux conseils divergent quant à la validité d'une initiative et si le conseil qui a constaté la validité maintient sa décision, l'initiative est considérée comme valable.

1

Art. 24 Si l'initiative dont l'aboutissement a été constaté réclame la revision totale de la constitution, l'Assemblée fédérale soumet à la votation populaire, sans prendre position, la question de savoir si cette revision doit avoir lieu.

2 Si la majorité des citoyens suisses prenant part à la votation se prononcent par l'affirmative, les deux conseils seront renouvelés pour travailler à la revision (art. 120 Cst.).

1

Art. 25 Lorsque l'initiative dont l'aboutissement a été constaté réclame l'adoption, l'abrogation ou la modification d'articles déterminés de la constitution ot qu'elle est présentée sous la forme d'un voeu exprimé en termes généraux, l'Assemblée fédérale décide dans le délai de deux ans à compter du jour où l'initiative a été déposée si elle l'approuve ou non.

1

1573 2

Si elle approuve l'initiative, elle y donne suite conformément à l'article 121, 5e alinea, de la constitution.

a Si elle n'approuve pas l'initiative, elle la soumet à la votation populaire, avec ou sans recommandation de rejet.

4 Si les deux conseils ne parviennent pas à prendre une décision concordante, les articles 16 à 20 sont applicables.

s Lorsqu'une décision concordante des deux conseils n'aboutit pas dans le délai légal, le Conseil fédéral ordonne la votation populaire.

6 Si la majorité des citoyens prenant part à la votation se prononcent par l'affirmative, l'Assemblée fédérale procède sans retard à la revision en se conformant à la décision populaire et soumet au vote du peuple et des cantons le résultat de ses délibérations (art. 121, 5e al., Cst.).

Art. 26 Lorsque la demande de revision partielle est présentée sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces, l'Assemblée fédérale décide, dans le délai de trois ans à compter du jour où l'initiative a été déposée, si elle approuve ou non l'initiative telle qu'elle est formulée.

2 Si elle approuve l'initiative, elle la soumet au vote du peuple et des cantons, avec ou sans recommandation d'acceptation.

3 Si elle n'approuve pas l'initiative, elle la soumet également au vote du peuple et des cantons, avec ou sans recommandation de rejet. Elle peut, en même temps, soumettre au vote du peuple et des cantons un projet élaboré par elle et portant sur la même matière constitutionnelle.

4 Si les deux conseils ne parviennent pas à prendre une décision concordante, les articles 16 à 20 sont applicables.

6 Si les deux conseils n'ont pas pu s'entendre au sujet du texte d'un contre-projet, la conférence de conciliation pourra aussi proposer, contrairement à l'article 17, 1er alinéa, de revenir sur la décision commune d'élaborer un contre-projet et de recommander le rejet de l'initiative sans contreprojet.

6 Si les deux conseils ne parviennent pas à prendre une décision concordante dans le délai légal, le Conseil fédéral ordonne la votation du peuple et des cantons.

Art. 27 1 Si plusieurs initiatives concernant la même question constitutionnelle sont déposées auprès du Conseil fédéral, l'initiative déposée en premier lieu est traitée dans le délai prescrit aux articles 25 et 26, puis soumise à la votation populaire.

2 Les autres initiatives sont traitées par l'Assemblée fédérale dans l'ordre où elles ont été déposées, mais chaque fois dans le délai d'une année à partir de la votation populaire sur la dernière initiative traitée.

1

1574 3

Le Conseil fédéral est tenu de présenter ses propositions à l'Assemblée fédérale suffisamment tôt pour que les deux conseils puissent se prononcer sur le contenu des demandes de revision partielle dans le délai prévu par les articles 25, l«r alinéa, 26, 1er alinéa, et 27, 1er et 2« alinéas.

4 Si le Conseil fédéral, en raison de circonstances particulières, n'est pas en mesure de présenter à temps ses propositions, il doit soumettre à l'Assemblée fédérale un rapport motivé avant l'expiration du délai.

5 L'Assemblée fédérale peut, dans ce cas, prolonger le délai d'une année au plus ou passer à la discussion de l'initiative sans attendre le rapport du Conseil fédéral.

Art. 28 La votation populaire sur les initiatives est fixée, après l'expiration des délais impartis ci-dessus à l'Assemblée fédérale pour prendre une décision, conformément à la loi concernant le mode de procéder pour les initiatives populaires relatives à la revision de la constitution.

6. Rédaction des lois et arrêtés

Art. 29 Lorsque les délibérations sont terminées dans les deux conseils, les lois, les arrêtés de portée générale et les arrêtés de l'Assemblée fédérale sont transmis à la commission de rédaction si celle-ci le demande.

2 La commission de rédaction est composée des rapporteurs des commissions des deux conseils, ainsi que du chancelier de la Confédération et du vice-chancelier ou des deux vice-chanceliers. Si elle fait appel à des experts, ceux-ci n'ont que voix consultative.

3 Elle est convoquée et présidée par le rapporteur de la commission appartenant au conseil qui a eu la priorité dans l'examen du projet.

1

Art. 30 La commission de rédaction est chargée d'arrêter définitivement les textes allemand et français, d'assurer leur concordance et d'éliminer les contradictions de pure forme.

a Elle n'a pas la compétence de modifier le fond des décisions prises par les conseils.

Art. 31 1 Le texte italien du projet est également arrêté par une commission qui siège, en règle générale, après que la commission de rédaction a mis au point les textes allemand et français.

a Cette commission est composée de deux membres du Conseil national et de deux membres du Conseil des Etats de langue italienne, ainsi que du 1

1575 chef du secrétariat de langue italienne de la chancellerie fédérale; elle est présidée par le membre le plus ancien du conseil qui avait la priorité dans l'examen du projet.

3

Les présidents des deux conseils désignent pour la durée d'une législature les membres de leur conseil qui font partie de cette commission.

7. Votations

Art. 32 Le vote sur l'ensemble a lieu dans chaque conseil une fois que la première discussion d'un projet est close.

Art. 33 Pour les projets d'arrêtés fédéraux de portée générale munis de la clause d'urgence, cette dernière est soustraite au vote sur l'ensemble.

1

2

L'urgence n'est examinée et votée qu'une fois achevée la discussion des divergences; la priorité de discussion appartient de nouveau au conseil qui avait la priorité pour l'ensemble du projet. Le vote relatif à la clause d'urgence doit être expressément prévu à l'ordre du jour.

8

L'urgence ne peut être votée qu'à la majorité de tous les membres de chacun des conseils, la voix du président comptant comme celle des autres membres.

4 Si les décisions.des deux conseils diffèrent quant à l'adjonction de la clause d'urgence et si le conseil qui a rejeté l'urgence maintient sa décision, celle-ci est définitive et la clause référendaire prend la place de la clause d'urgence.

5 Lorsque le rejet de la clause d'urgence rend un arrêté fédéral inopérant, chaque membre des conseils et le Conseil fédéral ont le droit de proposer jusqu'au vote final (art. 34) de le radier de la liste des objets à traiter.

Art. 34 1

Lorsqu'un projet soumis au referendum obligatoire ou facultatif a été entièrement discuté par les deux conseils et que le texte que pourrait avoir établi la commission de rédaction a été approuvé, un vote final doit intervenir dans chaque conseil.

2

Un vote final intervient également pour les arrêtés de l'Assemblée fédérale.

3 Si le projet est rejeté par un ou par les deux conseils, il est réputé n'avoir pas abouti et il est biffé de la liste des objets à traiter.

1576 III. L'Assemblèe federale (chambres réunies)

Art. 35 Si les deux chambres doivent se réunir pour délibérer en commun (art. 92 Cst.), elles sont convoquées par écrit par le président du Conseil national ou, s'il est empêché, par le président du Conseil des Etats.

2 Le président du Conseil national ou, s'il est empêché, le président du Conseil des Etats dirige les délibérations.

'L'Assemblée fédérale (chambres réunies) se donne elle-même son règlement.

Art. 36 Une commission est constituée pour. la durée d'une législature afin d'examiner les recours en grâce soumis à l'Assemblée fédérale, chambres réunies; elle se compose de neuf membres du Conseil national et de quatre membres du Conseil des Etats; elle se constitue elle-même.

1

Art. 37 Une commission est nommée chaque fois qu'il y a lieu de préparer les décisions à rendre dans des conflits de compétence. Elle compte la même proportion de membres que la commission des grâces.

IV. Secrétariat de l'Assemblée fédérale

Art. 38 Les affaires de chancellerie des deux chambres et de l'Assemblée fédérale (chambres réunies) sont assurées par le secrétariat de l'Assemblée fédérale, qui est un service de la chancellerie fédérale (art. 105 Cst.) subordonné au secrétaire de l'Assemblée fédérale.

2 Dans chaque cas, le secrétaire de l'Assemblée fédérale reçoit ses instructions des présidents des deux conseils.

1

Art. 39 Les débats des deux conseils sont enregistrés littéralement.

2 Le Stenogramme est remis à chaque orateur pour qu'il puisse y apporter des améliorations rédactionnelles ; celles-ci ne doivent toutefois pas modifier le sens du discours.

3 Les divergences concernant l'exactitude de la rédaction sténographique sont tranchées par le bureau du conseil.

1

Art. 40 Les débats sur des projets soumis au referendum obligatoire ou facultatif, ainsi que sur des arrêtés de l'Assemblée fédérale sont publiés dans le Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale.

1

1577 2

Chaque conseil peut aussi décider la publication des délibérations sur d'autres objets. Il doit informer l'autre conseil de cette décision, à moins qu'il s'agisse d'objets qui ne le concernent pas.

Y. Rapports avec le Conseil fédéral Art. 41 1 Les messages et rapports du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sont remis au secrétariat de l'Assemblée fédérale assez tôt pour qu'il puisse les expédier aux membres des conseils dix jours au plus tard avant la séance de la commission qui traite l'affaire en premier lieu. L'article 45, 3e alinéa, est réservé.

2 Pour le surplus, la circulation des dossiers entre le Conseil fédéral, l'Assemblée fédérale et ses commissions est régie par un règlement particulier du Conseil fédéral, soumis à l'approbation des conseils.

Art. 42 Toutes les commissions des deux conseils sont autorisées à inviter à leurs séances les membres du Conseil fédéral pour en recevoir des renseignements.

2 Elles peuvent en outre demander au Conseil fédéral des messages et des rapports complémentaires sur des projets qu'elles sont chargées d'examiner.

Art. 43 1 Les commissions chargées de l'examen préliminaire des projets de lois et d'arrêtés sont tenues de vérifier expressément la constitutionnalité des projets et d'exprimer leur avis par une votation particulière.

2 Dans chaque cas, un rapport doit être présenté au conseil au sujet de la discussion et du résultat de la votation au sein de la commission.

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Art. 44 En outre, une délégation commune nommée pour la durée d'une législature, dans laquelle chacun des deux conseils élit quatre de ses membres et qui se constitue elle-même, est chargée de donner son avis sur les questions de droit constitutionnel qui se posent lors de la délibération d'un objet de l'Assemblée fédérale.

2 Cette délégation est consultée si l'un des deux conseils ou sa commission appelée à examiner l'objet le décide ou lorsque soixante membres du Conseil national ou quatorze membres du Conseil des Etats ou le Conseil fédéral le demandent.

3 Le conseil ou la commission spéciale qui consulte la délégation commune décide s'il y a lieu de surseoir à la délibération de l'objet ou seulement de propositions déterminées jusqu'à ce que la délégation ait donné son avis.

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1578 Art. 45 A la session de juin, le Conseil fédéral présente à l'Assemblée fédérale les rapports sur sa gestion et le compte d'Etat, ainsi que le rapport de gestion et les comptes des chemins de fer fédéraux de l'exercice précédent; à la session de décembre, il présente le budget de la Confédération et des chemins de fer fédéraux pour l'année suivante.

2 Si des dépenses pour l'année suivante résultent de décisions prises pendant la session de décembre, le budget est complété encore après avoir été mis au net.

3 Le rapport de gestion du Conseil fédéral, le compte d'Etat et le budget de la Confédération doivent être remis aux membres des commissions au plus tard un mois avant le commencement de la session.

4 Le rapport de gestion doit indiquer brièvement le point où en est l'examen des motions transmises au Conseil fédéral.

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Art. 46 Chaque conseil nomme pour la durée d'une législature une commission des finances qui examine le budget de la Confédération, les demandes de crédits supplémentaires, les reports de crédits et le compte d'Etat.

Art. 47 Les commissions des finances des deux conseils élisent, parmi leurs membres et pour une législature, une délégation dans laquelle chaque commission délègue trois de ses membres et qui se constitue elle-même.

Art. 48 La délégation des finances est chargée d'examiner et de contrôler l'ensemble de la gestion financière.

2 Elle se réunit au moins une fois tous les deux mois et en outre chaque fois que cela est nécessaire.

8 Dans la mesure où la délégation des finances le juge nécessaire pour accomplir sa tâche, elle a le droit absolu de prendre connaissance en tout temps des pièces en rapport avec la gestion financière et d'exiger les renseignements utiles de tous les services.

4 Le contrôle des finances, en particulier, est tenu de lui donner régulièrement tous les renseignements voulus et de mettre à cette fin à sa disposition tous les rapports de revision, les procès-verbaux et toutes les correspondances entre le département des finances et des douanes et les autres départements, la chancellerie fédérale et les tribunaux fédéraux, ainsi que tous les arrêtés du Conseil fédéral qui se rapportent à la surveillance des crédits budgétaires et, en général, à la gestion financière de la Confédération.

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Le personnel nécessaire est mis à la disposition de la délégation pour des vérifications et recherches spéciales; elle peut en outre demander l'avis d'experts pour éclaircir des points qui exigent des connaissances techniques particulières.

Art. 49 1 A la session de décembre, le Conseil fédéral présente à l'Assemblée fédérale le rapport sur la gestion et les comptes de la régie des alcools de l'exercice précédent, et à la session de juin le budget pour l'exercice suivant.

2 Chaque conseil nomme, pour la durée d'une législature, une commission de l'acool chargée d'examiner la gestion, les comptes et le budget de la régie des alcools.

Art. 50 1 Les commissions de l'alcool des deux conseils nomment chacune pour la durée d'une législature une délégation pour laquelle chaque commission désigne trois membres et qui se constitue elle-même.

* La régie des alcools soumet à la délégation des rapports trimestriels écrits sur l'ensemble de sa gestion.

Art. 51 Les chambres ont la faculté de désigner encore d'autres commissions permanentes pour toute la durée d'une législature.

a Les membres d'une commission permanente dont le mandat est échu en raison des dispositions du règlement ou pour d'autres raisons ne sont pas rééligibles dans la même commission avant quatre ans.

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Art. 52 Les chambres peuvent renvoyer tout objet de délibération au Conseil fédéral pour préavis.

2 Les réclamations contre des mesures ou décisions prises par le Conseil fédéral doivent lui être communiquées pour rapport avant d'être mises en délibération.

3 Les articles 21 et suivants sont applicables aux rapports entre le Conseil fédéral et l'Assemblée fédérale quant au mode de procéder en matière d'initiatives populaires.

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VI. Publication et entrée en vigueur des actes législatifs

Art. 53 Après qu'une loi ou un arrêté a été adopté par les deux conseils, le secrétariat de l'Assemblée fédérale établit un exemplaire original allemand et français, signé par les présidents et les secrétaires dés deux conseils et

1580 muni de la date de l'adoption ; le conseil qui avait la priorité de discussion les communique au Conseil fédéral pour qu'il assure la publication et, le cas échéant, l'exécution de l'acte législatif.

Art. 54 1

Le Conseil fédéral veille à la publication dans le Recueil des loia fédérales, conformément aux articles 4 à 9 de la loi du 12 mars 1948 relative à la force obligatoire du Recueil systématique des lois et ordonnances de 18dS à 1947 et à la nouvelle série du Recueil des lois, et dans la Feuille fédérale, conformément à l'article 10 de l'ordonnance du 8 novembre 1949 concernant la publication des lois et autres actes législatifs de la Confédération.

2 Les prescriptions de la loi du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux sont réservées pour les actes législatifs soumis au referendum.

Art. 55 Le Recueil officiel des lois et ordonnances est, autant que possible, publié simultanément dans les trois langues officielles.

2 II est envoyé gratuitement, en un exemplaire, aux gouvernements cantonaux, à leurs départements ou directions, aux préfectures ou autorités de district, aux tribunaux cantonaux et aux communes politiques.

s Les autorités cantonales sont tenues de le conserver relié.

* Les citoyens ont le droit de le consulter dans les bureaux de la commune.

Art. 56 1 Si la date de l'entrée en vigueur d'une loi ou d'un arrêté n'a pas été indiquée par les conseils, elle est fixée par le Conseil fédéral et publiée en même temps que la loi ou l'arrêté.

* En règle générale, cette date ne doit pas être antérieure au cinquième jour qui suit la publication.

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Si la date de l'entrée en vigueur n'a pas été fixée, l'acte législatif entre en vigueur cinq jours après sa publication. Si les textes des trois recueils ne sont pas publiés simultanément, le délai de cinq jours court à partir de la dernière publication, VII. Dispositions finales et transitoires

Art. 57 La présente loi entre en vigueur le

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1581 Art. 58 Sont abrogés à cette date: a. La loi du 9 octobre 1902 sur les rapports entre le Conseil national, le Conseil des Etats et le Conseil fédéral, ainsi que sur la forme de la promulgation et de la publication des lois et arrêtés (l) ; b. Les articles 6 à 10 et 15 de la loi du 27 janvier 1892/5 octobre 1950 concernant le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution fédérale (s).

2 A la même date, la loi du 26 mars 1934 sur les garanties politiques et de police en faveur de la Confédération (3) sera complétée comme suit: 1

Art. 13bis Les articles 12 et 13 sont également applicables lorsque la sûreté des autorités fédérales ou la liberté d'action du Conseil fédéral est menacée pour d'autres raisons.

Art. 59 Les délais prévus aux articles 25, 1er alinéa, 26, 1er alinéa, et 27, sont également applicables aux initiatives pendantes lors de l'entrée en vigueur de la présente loi.

( l ) BS 1, 229.

(') KS 1, 158; BO 1961, 17.

(») ES 1, 141.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la nouvelle loi sur les rapports entre les conseils (Du 25 avril 1960)

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05.05.1960

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