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FEUILLE FÉDÉRALE 112e année

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8055

Berne, le 23 juin 1960

Volume II

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le maintien temporaire des dispositions relatives à l'importation de filins cinématographiques (Du 17 juin 1960) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous adresser ci-après un message, avec projet d'arrêté, concernant le maintien temporaire des dispositions relatives à l'importation de films cinématographiques.

I

Dès que le peuple eut adopté, le 6 juillet 1958, le nouvel article constitutionnel sur le cinéma (art. 27ter), le département fédéral de l'intérieur entreprit les travaux préparatoires d'une législation sur le cinéma. La procédure de consultation des milieux culturels intéressés et des organisations de l'économie cinématographique se prolongea jusqu'en été 1959. Un premier texte de loi, résultat de ces pourparlers, fut soumis en automne 1959 aux trois commissions permanentes (culturelle, juridique et économique) de la chambre suisse du cinéma, puis à l'assemblée plénière de cette institution. Tenant compte des avis exprimés, le département de l'intérieur modifia certains points de son projet. Le texte ainsi remanié fut alors remis, vers la fin de l'année, aux autres départements.

Des modifications importantes furent proposées par plusieurs départements. De nouvelles suggestions, pour une part intéressantes, furent également présentées entre-temps par diverses organisations du cinéma. Elles doivent encore être examinées. Le projet mis au point devra, conformément au deuxième alinéa de l'article 27 ter de la constitution, être soumis aux cantons et aux associations culturelles et économiques compétentes.

Cette procédure et l'examen des propositions qui résulteront de ces consulFeuille fédérale. 112e année. Vol. II.

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tations exigeront de nouveau un certain temps. La législation sur le cinéma est un terrain vierge pour la Suisse. Elle doit régler certains problèmes très discutés. Il nous est, par conséquent, impossible de soumettre aux chambres le projet de loi assez tôt pour qu'il puisse encore être traité par elles au cours de cette année. La loi sur le cinéma ne pourra donc pas être mise en vigueur le 1er janvier 1961, comme on l'avait tout d'abord envisagé.

Les dispositions réglant l'importation de films cinématographiques cesseront d'être valables à la fin de 1960 sans qu'il soit possible d'y substituer dès le début de l'année suivante une loi générale sur le cinéma. Pour les raisons que nous exposerons au chiffre II, il ne saurait d'autre part être question de renoncer, fût-ce momentanément, aux mesures en vigueur dans le domaine de l'importation de films. Leur maintien temporaire est donc indispensable. Elles pourront ainsi être reprises sans difficulté dans la nouvelle loi.

H s'agit de proroger l'arrêté du Conseil fédéral n° 54, du 26 septembre 1938, relatif à la limitation des importations (ES 4, 248), édicté en vertu de l'arrêté fédéral du 14 octobre 1933 concernant les mesures de défense économique contre l'étranger. Cet arrêté du Conseil fédéral et les ordonnances d'exécution édictées par le département de l'intérieur soumettent l'importation de films cinématographiques au régime du permis et l'importation de films dits spectaculaires à un système de contingentement. La validité de ces mesures a toutefois été limitée au 31 décembre 1960 par l'article 11, 2e alinéa, du nouvel arrêté fédéral du 28 septembre 1956 concernant les mesures de défense économique envers l'étranger (RO 1956, 1655). Ainsi donc, seul un nouvel arrêté fédéral permettra de maintenir le régime actuel au-delà de 1960. Cet arrêté, fondé sur le nouvel article 27'ter de la constitution, devra nécessairement être soumis au referendum facultatif. C'est pourquoi nous vous proposons de maintenir la réglementation actuelle pour deux ans (1961 et 1962) au moyen d'un arrêté fédéral de portée générale.

Avant d'aborder le projet d'arrêté que nous vous proposons, nous tenons à rappeler brièvement l'origine de l'actuelle réglementation, à en exposer les effets et à montrer pourquoi on ne saurait y renoncer, même temporairement.

II

Dans la période initiale du cinéma, vers 1900, les films étaient livrés directement aux théâtres par les producteurs, contre paiement d'une indemnité. Le développement très rapide du cinéma exigea bientôt qu'un intermédiaire, le distributeur de films, vînt prendre place entre le producteur et les exploitants, toujours plus nombreux, de salles de cinéma. Le rôle du distributeur consiste à négocier avec le producteur le droit de distribution, c'est-à-dire celui qui consiste à donner aux propriétaires de salles de son pays ou de plusieurs pays l'autorisation de projeter les films réalisés par le producteur. L'exploitant paie le prix convenu -- soit un pour cent déter-

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miné des recettes, soit une somme forfaitaire par programme et par semaine -- au distributeur, qui, à son tour, verse au producteur, suisse ou étranger, la part qui lui revient selon le contrat établi. Rien n'a changé jusqu'à nos jours dans cette répartition de l'activité cinématographique entre producteurs, distributeurs et exploitants de cinémas.

On voit par là que le distributeur occupe, du point de vue économique et culturel, une position-clé, surtout dans un pays comme le nôtre, où la production nationale de films de long métrage est extrêmement faible.

Aussi la position occupée chez nous par la distribution de films ne sauraitelle, dans l'intérêt général, nous être indifférente.

Dans les années «trente», la pléthore de films dont souffrait le marché suisse favorisa une tendance toujours plus forte à concentrer notre économie cinématographique et notamment le secteur de la distribution entre les mains de sociétés étrangères. On risquait de voir l'étranger prendre une position prédominante dans cette branche, ce qui aurait été déplorable tant du point de vue politique que culturel et économique. Cela aurait en outre impliqué un approvisionnement unilatéral et une baisse de la qualité des films projetés. C'est pour parer à cette évolution que fut adopté le 26 septembre 1938 l'arrêté du Conseil fédéral n° 54 relatif à la limitation des importations, sur lequel est fondée l'actuelle réglementation des importations de films. Ses effets ont été en tout point excellents. La fixation de contingents attribués individuellement pour l'importation des filma dits spectaculaires, de même que l'institution du régime du permis pour toutes les autres catégories de films, visaient en particulier à abaisser le nombre beaucoup trop élevé des films importés chaque année. Ce résultat fut atteint.

Mais ces mesures ont surtout permis de protéger le distributeur suisse indépendant du producteur étranger, et qui travaille avec des capitaux suisses et à ses propres risques. Enfin, notre pays disposa, grâce à l'institution du contrôle des importations de films, de renseignements statistiques exacts concernant notamment la provenance des films, le rapport entre films de long et de court métrage, ainsi que le nombre de copies importées. Cette documentation est également importante pour notre politique commerciale en
matière de films.

Les chiffres ci-après permettront de mieux apprécier les effets favorables de l'arrêté du 26 septembre 1938.

De 1934 à 1938, le nombre de films spectaculaires importés (sujets) avait augmenté de façon exceptionnelle, passant de 015 à 710 unités.

L'institution du contingentement à l'importation des films de long métrage marqua le début d'un mouvement inverse. Voici quelles ont été, depuis 1950, les importations de films de cette catégorie:

164 Année

1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959

.

Sujets

Cùprea

507 455 450 527 438 513 454 557 519 495

1085 1024 1062 1096 1052 1145 1097 1155 1132 1175

Ces chiffres montrent que, du point de vue quantitatif, les mesures de restriction, sans être appliquées de façon rigoureuse, ont néanmoins permis d'obtenir une certaine réduction du nombre de films lancés chaque année sur notre marché. Du point de vue culturel, le système des contingents individuels revêt une grande importance en ce sens qu'il oblige le distributeur à procéder à une certaine sélection des films qu'il importe, ce qui améliore la qualité des films choisis. Le distributeur préférera en effet choisir un film de bonne qualité artistique plutôt qu'une production insignifiante, qu'il risquerait de ne pouvoir placer facilement dans les cinémas. Le contingentement de l'importation de films entrave par la force des choses aussi jusqu'à un certain point les locations en bloc.

La statistique suivante met en évidence la protection ainsi assurée aux maisons de ditribution indépendantes : Part prise par les agences de maisons étrangères et par les maisons suisses indépendantes à l'importation des films de long métrage Année

1939 1945 1950 . . . . . . . .

1957 1958 1959

Part des agences étrangères (en pour cent)

Fart des maisons indépendantes (en pour'cent)

43 42 31 27 26 22

57 58 69 73 74 78

Ces chiffres montrent que les distributeurs suisses indépendants ont pu, grâce au système de contingentement adopté, améliorer chaque année leur quote-part.

Le système a ceci de bon que de nouvelles agences d'entreprises étrangères ne peuvent aujourd'hui être créées en Suisse. Tout changement important d'ordre personnel ou financier qui se produit dans une maison de distribution doit être annoncé d'office à la section du cinéma du départe-

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ment de l'intérieur, qui examine dans chaque cas à quel point l'indépendance de l'entreprise s'en trouve modifiée.

La forme juridique de la maison importe moins que le contrat de distribution passé par elle avec le ou les producteurs. En effet, ce contrat permet de se rendre compte si le distributeur est encore indépendant ou s'il risque de tomber sous la dépendance économique, indésirable, d'un ou de plusieurs producteurs.

Le danger d'une mainmise de l'étranger a persisté jusqu'à ces tous derniers temps encore pour nombre de maisons suisses indépendantes. Seules les mesures légales ont permis, par la menace d'un retrait du contingent, de protéger efficacement les distributeurs.

Nous espérons avoir démontré combien il est important de maintenir les dispositions en vigueur dans le domaine de l'importation des films, jusqu'au moment où il sera possible de les reprendre dans la loi sur le cinéma.

Leur suppression, fût-ce pour un an, aurait certainement pour conséquence l'intervention immédiate de producteurs étrangers, qui, pour des motifs d'ordre politique ou commercial, chercheraient à mettre la main sur la distribution des films en Suisse. Toute la structure cinématographique suisse en serait anéantie, et il serait impossible de faire ensuite marche arrière lorsque la loi sur le cinéma entrerait en vigueur.

III

Le projet d'arrêté ci-après prévoit le maintien de la réglementation en vigueur jusqu'au 31 décembre 1962. Compte tenu de toutes les circonstances, ce délai nous paraît nécessaire. Nous ne saurions envisager une durée plus courte, vu les aléas résultant de la discussion d'un projet aussi complexe que la loi sur le cinéma.

Comme la réglementation des importations de films a donné entière satisfaction et que son maintien n'est proposé que jusqu'à l'entrée en vigueur de la future loi, il nous a paru indiqué de la maintenir sans modifications quant au fond (chiffre I du projet). Aussi les changements proposés au chiffre II ne touchent-ils pas au fond des dispositions de l'arrêté du Conseil fédéral du 26 septembre 1938. Us ne tendent qu'à adapter à la situation actuelle un texte datant de plus de 20 ans.

C'est ainsi que nous avons jugé .indiqué de faire figurer à l'article premier, 1er alinéa de l'arrêté, dans rémunération des positions douanières relatives à l'importation des films cinématographiques, les numéros du nouveau tarif douanier adopté en 1959 et d'adapter le texte à celui de ce nouveau tarif. Le 2e alinéa de l'article premier mentionne expressément, parmi les films qui peuvent être exemptés du régime du permis par le département de l'intérieur, en plus des films d'amateurs, tous les films dont le format est inférieur à 16 mm. Cette mesure d'exception, appliquée d'ail-

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leurs aujourd'hui déjà, est justifiée. Il s'agit en effet ici de films uniquement propres à l'usage privé et dont l'exploitation commerciale n'entre pas en considération. La nouvelle rédaction de l'article 4 tient compte de la modification du règlement de la chambre suisse du cinéma par l'arrêté du Conseil fédéral du 18 août 1955 (RO 1955, 796). Cet arrêté a notamment confié le secrétariat de la chambre suisse du cinéma au secrétariat du département de l'intérieur, qui en a chargé à son tour sa section du cinéma. Au premier alinéa de l'actuel article 5 figure une réserve en faveur de la convention du 11 octobre 1933 conclue sous les auspices de la Société des Nations en vue de faciliter la circulation internationale des filma ayant un caractère éducatif. Cette convention ayant cessé d'exister depuis la dissolution des institutions internationales appelées à y collaborer, nous l'avons remplacée dans le nouveau texte par l'accord du 22 novembre 1950 relatif à l'importation d'objets de caractère éducatif, scientifique ou culturel (RO 1953, 463), signé sous l'égide de l'Unesco et que l'arrêté fédéral du 25 septembre 1952 (RO 1953, 461) nous a autorisés à ratifier. Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 6, le passage «et de l'emprisonnement pour trois mois au plus» doit être remplacé, conformément à l'article 333, 2e alinéa du code pénal suisse, par les mots «ou des arrêts».

Article 6, 3e alinéa: au lieu des dispositions de la première partie du code pénal fédéral du 4 février 1853, ce sont maintenant celles du code pénal suisse qui sont applicables. Enfin, à l'article 8, c'est l'ordonnance du Conseil fédéral du 17 décembre 1956 concernant le trafic des marchandises avec l'étranger (RO 1956, 1661) qu'il y a lieu de citer, dont les dispositions sont subsidiairement applicables.

Vu ce qui précède, nous vous recommandons d'adopter le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 17 juin 1960.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Max Petitpierre i»ii4

Le vice-chancelier, F. Weber

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(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant

le maintien temporaire des dispositions relatives à l'importation de films cinématographiques

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'article 27fer de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 17 juin 1960, arrête:

L'importation de films cinématographiques impressionnés est réglée selon les dispositions de l'arrêté du Conseil fédéral n° 54 du 26 septembre 1938 f1) relatif à la limitation des importations.

II Les articles premier, 4, 5 , 1 alinéa, 6, 1er alinéa lle phrase, 6, 3e alinéa et 8 de l'arrêté du Conseil fédéral cité au chiffre I sont modifiés comme il suit : Article premier L'importation de films cinématographiques impressionnés et développés (positifs ou négatifs) n° 3706.01 et 3707.10/22 du tarif douanier, est subordonnée à la délivrance d'un permis d'importation du département de l'intérieur.

Le département de l'intérieur peut, par une mesure générale, excepter de cette règle a. Les films dont le format est inférieur à 16 mm; 6. Les films d'amateurs.

e

(!) RS 4, 248.

er

168

Art. 4 Le département de l'intérieur est autorisé à déléguer à la section du cinéma du secrétariat du département ses pouvoirs pour accorder les permis d'importation (art. 1er, 1er al.) et procéder à des enquêtes (art. 3).

Art. 5, lerai.

Les permis d'importation sont délivrés contre paiement d'une taxe dont le taux est fixé par le département de l'intérieur. Ce dernier fixe également les cas où le permis est accordé gratuitement et ceux où la taxe est remboursée en tout ou en partie. Sont réservées les dispositions de l'accord du 22 novembre 1950 (l) relatif à l'importation d'objets de caractère educatif, scientifique ou culturel.

Art. 6, l«r al., Ire phrase Les mots «et de l'emprisonnement pour trois mois au plus» sont remplacés par les termes «ou des arrêts».

Art. 6, 3e al.

Sont applicables les dispositions générales du code pénal suisse du 21 décembre 1937/5 octobre 1950.

Art. 8 Sauf disposition contraire du présent arrêté, l'ordonnance du Conseil fédéral du 17 décembre 1956 (a) relative au trafic des marchandises avec l'étranger est également applicable.

III

Le présent arrêté entre en vigueur le 1er janvier 1961 et demeure valable jusqu'au 31 décembre 1962.

Le Conseil fédéral est chargé de l'exécuter.

IV

Le Conseil fédéral est chargé de publier cet arrêté conformément à l'article 3 de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux.

(i) RO 1958, 463.

(s) BO 1956, 1661.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant le maintien temporaire des dispositions relatives à l'importation de films cinématographiques (Du 17 juin 1960)

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