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FEUILLE FÉDÉRALE 113° année

Berne, le 26 octobre 1961

Volume II

Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 30 francs par an; 16 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement Avis: 50 centimes la ligne ou son espace; doivent être adressés franco à l'imprimerie des Hoirs C.-J. Wyss, société anonyme, à Berne

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur un projet de loi concernant l'allocation de subventions pour la lutte contre les maladies rhumatismales (Du 10 octobre 1961) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet de loi concernant l'allocation de subventions pour la lutte contre les maladies rhumatismales.

I. INTRODUCTION Avant d'examiner le projet de loi, nous tenons à donner quelques indications d'ordre médical et économique pour rendre plus compréhensibles le projet et les questions qui s'y rattachent. Pour traiter les choses d'une façon tant soit peu complète et donner une vue d'ensemble, nous parlerons aussi des formes de la maladie, de certains faits, institutions et mesures qui, sans être directement touchés par le projet de loi, ne sont pas moins en rapport avec lui.

1. Le caractère, les causes, les différentes formes et l'évolution du rhumatisme Par le terme général «rhumatisme», on entend de multiples maladies inflammatoires ou dégénératives d'origine non spécifique des organes internes (dit rhumatisme viscéral) et plus particulièrement du système moteur (dit rhumatisme périphérique). En sont exclus les symptômes semblables à ceux du rhumatisme, qui doivent être attribués à une maladie infectieuse, à une maladie déterminée des tissus ou du métabolisme. Aux maladies rhumatismales du système moteur sont souvent liées des douleurs se déplaçant par bonds dans les divers muscles et articulations. Cette Feuille fédérale. 113e année. Vol. II.

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«douleur vive», ce «tiraillement» dans les membres sont du reste à l'origine du terme grec de ces symptômes, soit «rheuma» (= courant, flot).

Les maladies rhumatismales se divisent en deux catégories principales, suivant les causes probables et le processus de la maladie, à savoir le rhumatisme inflammatoire et le rhumatisme dégénératif.

La cause fondamentale des formes inflammatoires n'est en quelque sorte établie que pour le rhumatisme articulaire aigu, tandis que pour le rhumatisme articulaire chronique et la maladie de Bechterew, l'infection locale ou focale, admise dans le passé, est aujourd'hui contestée par la majeure partie des chercheurs. Dans le rhumatisme articulaire aigu, les infections bactériennes (streptocoques) jouent un grand rôle, ce qui est important du point de vue prophylactique. Dans les autres formes de rhumatisme inflammatoire, les agents pathogènes, bactéries ou virus, ne sont pas en cause dans une mesure déterminante. Le rhumatisme articulaire inflammatoire chronique présente une image extrêmement complexe, où vont de pair, avec les modifications du tissu conjonctif, des troubles du métabolisme et des modifications de la sécrétion hormonale. La cause de ces affections n'est probablement pas uniforme. Certains facteurs ne sont pas moins connus, qui jouent un rôle dans le déclenchement de l'affection. Ainsi, une partie du corps exposée au froid ou à l'humidité (courant d'air, sol et planchers froids, chaussures et vêtements mouillés, locaux et ateliers humides, vêtements inappropriés lors de changements rapides de température, etc.), et, dans certains cas, également le surmenage physique suffisent souvent pour que se manifestent les premiers symptômes d'une des formes du rhumatisme inflammatoire.

Le rhumatisme inflammatoire périphérique atteint dans la plupart des cas les articulations des extrémités (rhumatisme articulaire aigu, polyarthrite chronique inflammatoire), plus rarement la colonne vertébrale (maladie de Bechterew ou de Pierre-Marie) et, parfois seulement, les parties extra-articulaires (rhumatisme des muscles, névrite, tendinite). Le rhumatisme articulaire aigu se présente sous la forme d'une maladie générale aiguë fébrile, progressant souvent par poussées, apparaissant de préférence chez les enfants et les adolescents et caractérisée par des symptômes
inflammatoires douloureux qui se manifestent à plusieurs articulations. En outre, dans les deux tiers des cas, le coeur est aussi atteint (rhumatisme viscéral) ; il s'ensuit alors une inflammation de la membrane du coeur (endocardite) ou une inflammation du muscle du coeur (myocardite) qui, plus tard, à la suite d'une cicatrisation et d'un rétrécissement du tissu, peuvent entraîner des insuffisances valvulaires ou des lésions du myocarde (muscle du coeur) irréversibles. La polyarthrite chronique inflammatoire est une maladie générale évolutive, qui dure souvent pendant des décennies, atteint trois fois plus de femmeB que d'hommes et se distingue tout spécialement par une inflammation par poussées très douloureuses des articulations avec

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tendance à l'ankylose progressive. La maladie de Bechterew (spondylarthrite ankylosante), processila inflammatoire évolutif chronique des articulations de la colonne vertébrale, se termine, au cours des années, par une ossification de ces articulations et des ligaments longitudinaux de la colonne vertébrale et, enfin, par une ankylose douloureuse du dos, de la nuque et de la cage thoracique. Cette forme de maladie se rencontre presque uniquement chez les hommes de 20 à 40 ans.

Le rhumatisme viscéral, à la suite de rhumatisme articulaire aigu ou -- même si cela est moins fréquent -- d'une autre forme de rhumatisme inflammatoire périphérique, atteint non seulement le coeur, mais souvent aussi le système vasculaire et provoque des modifications inflammatoires typiques des parois des vaisseaux, qui entraînent la plupart du temps des troubles durables de la circulation. Tous les autres organes internes du corps humain peuvent également en être atteints, bien que beaucoup plus rarement.

En général, le rhumatisme inflammatoire entraîne, dans son stade final, des modifications cicatricielles, déformantes et irréparables du tissu atteint, aussi bien aux articulations et à la colonne vertébrale qu'au coeur et à d'autres organes internes.

L'autre catégorie importante, le rhumatisme dégénératif, se présente comme une modification non inflammatoire des tissus conjonctifs, sous forme d'une régression. Les lésions qui en résultent sont suivies de processus réactifs et réparateurs et de troubles fonctionnels, notamment aux articulations (arthrose) et à la colonne vertébrale (spondylose), souvent aussi à des parties extra-articulaires. Les processus d'usure sont favorisés dans une large mesure et souvent de façon décisive par des facteurs antérieurs, tels que troubles de la sécrétion hormonale, du métabolisme et de la circulation locale du sang, le surmenage professionnel, dus à des mouvements répétés trop uniformes (certains travaux d'ouvriers de fabrique ou d'ouvriers exécutant des travaux lourds), des lésions renouvelées sans cesse, mais anodines en soi (microtraumatismes), une statique défavorable des articulations, des déformations articulaires héréditaires et précoces, des cicatrisations d'affections inflammatoires dans les articulations blessées de l'extérieur, le fait de soulever ou de porter des poids
trop lourds, une position défectueuse ou encore une trop forte mise à contribution due à des causes accumulées, anodines en elles-mêmes. Les troubles sont déclenchés et aggravés la plupart du temps par des causes mécaniques, tels que mouvements brusques, station debout prolongée, effort pour soulever une charge, blessures, alitement prolongé, ainsi que par le froid, l'humidité, les courants d'air et également par de simples refroidissements. Bon nombre de ces causes conjugent leur action souvent pendant des années jusqu'à ce que des troubles plus graves se manifestent finalement et révèlent le mal. Aucune de ces causes n'est un élément nécessaire. Le concours d'un grand nombre

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d'entre elles engendre la maladie. La dernière en date n'est pas la seule à provoquer la maladie, elle la déclenche simplement.

Les formes les plus importantes du rhumatisme dégénératif sont les arthroses, les spondyloses et leurs suites (hernie discale, lumbago, seiatique), ainsi que certaines formes du rhumatisme extra-articulaire.

L'arthrose, maladie évolutive chronique, non inflammatoire, d'une ou de plusieurs articulations, est caractérisée par la dégénérescence des cartilages, suivie de modifications réactionnelles dans les articulations, qui entravent douloureusement et progressivement les mouvements, mais n'aboutit que rarement à une ankylose complète. Elle apparaît le plus souvent après l'âge de 40 ans.

La Spondylose et la spondylarthrose sont des affections très répandues de la colonne vertébrale, non inflammatoires, à action degenerative croissant avec l'âge, accompagnées de modifications des dispues intervertébraux et des vertèbres (spondylose) ou des petites articulations intervertébrales (spondylarthrose). Elles provoquent des douleurs et de la gêne dans les mouvements, mais n'aboutissent pas à une ankylose durable et complète comme la maladie de Bechterew. Les symptômes qualifiés «symptômes à distance» de la spondylose et de la spondylarthrose sont souvent, du point de vue subjectif, plus pénibles que les symptômes constatés directement à la colonne vertébrale. Les plus importants de ces symptômes à distance sont les suivants: migraine cervicale, névralgie du bras, accompagnée de douleurs au niveau de la nuque et de l'omoplate, lumbago, ainsi que sciatique.

La sciatique peut aussi se déclarer à la suite du rhumatisme extra-articulaire. Il se produit fréquemment aussi en relation avec des modifications spondylotiques de la colonne vertébrale, une hernie dite discale, le prolapsus d'un disque intervertébral. Les disques intervertébraux forment, avec leur noyau gélatineux et le liquide qu'il contient, en quelque sorte un amortisseur, qui, normalement très élastique, assure une parfaite mobilité do la colonne vertébrale, et sa capacité de supporter des charges. Si le tissu du disque intervertébral subit des modifications dégénératives et perd ainsi son élasticité, ces disques ou certaines de leurs parties effilochées, ou même leur noyau entier, peuvent faire un prolapsus ; c'est une
hernie discale. La pression exercée sur certains nerfs par le prolapsus du disque intervertébral provoque de vives douleurs.

On appelle rhumatisme extra-articulaire les affections douloureuses, de caractère plus souvent dégénératif qu'inflammatoire, se localisant particulièrement dans les tissus extra-articulaires, conjonctifs, adipeux, musculaires et nerveux. Mentionnons avant tout le rhumatisme très répandu des tissus para-articulaires, des tendons ou du périoste. Mais dans la plupart des cas, les douleurs musculaires et nerveuses du rhumatisme sont des réflexes et des symptômes à distance de modifications dégénératives aux articulations et à la colonne vertébrale.

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Les maladies rhumatismales, aussi bien inflammatoires que dégénératives, se distinguent fréquemment par leur évolution chronique s'étendant souvent sur des années et même des décennies, progressant par poussées ou de façon continue, la plupart du temps extrêmement douloureuses, par leur tendance aux rechutes et une gêne croissante, ainsi qu'une diminution de la capacité de mou.vem.ent entraînant une invalidité partielle ou totale.

Pour le malade, l'affection se traduit par des douleurs, une incapacité de travail prolongée, une perte de gain, souvent par un appauvrissement et enfin -- le cas n'est pas rare -- par une invalidité complète. Seul le rhumatisme articulaire aigu a une évolution plus rapide ; il entraîne cependant des lésions souvent durables et graves, non pas du système moteur, mais du coeur et du système circulatoire. Ces formes viscérales du rhumatisme ont fréquemment une issue mortelle, ce qui est très rare pour les maladies rhumatismales du système moteur.

2. La fréquence et les conséquences économiques du rhumatisme à l'étranger et en Suisse Les chiffres ci-dessous renseignent sur la fréquence du rhumatisme (morbidité), sur l'incapacité de travailler due à cette maladie et sur les dommages économiques qu'il cause à l'étranger et en Suisse.

Aux Etats-Unis d'Amérique du USTord, en 1937, le rhumatisme tenait de loin la tête des maladies chroniques, avec 6,85 millions de cas devant les affections cardiaques, d'artériosclérose, etc. Au cours de la même année, il a causé à l'économie américaine une perte globale de 97,2 millions de journées de travail, oorrepondant à 15 pour cent en chiffre rond de la perte totale des journées de travail due aux maladies chroniques.

L'enquête menée a ce sujet en 1951 arrive aux mêmes conclusions.

En Angleterre, dans l'industrie, la perte d'heures de travail due au rhumatisme est plus importante que la perte causée par n'importe quelle autre maladie.

En Suède, la morbidité par rhumatisme est de 7,9 pour 100 habitants. On évalue à 30 000 le nombre des personnes devenues invalides par rhumatisme et qui reçoivent une pension; la perte de travail est évaluée à 5 millions de jours par année. 25 pour cent de tous les cas d'incapacité de travail durable sont dus au rhumatisme. Le dommage ainsi causé à l'économie est estimé ù 150 millions de couronnes par an.
Au Danemark, dans les années 1946/1947, la morbidité par rhumatisme était de 16 pour cent de la morbidité totale. Parmi les 570 000 rhumatisants observée pendant cette période, 12 000 étaient hospitalisés et 3800 des invalides permanents. La perte causée à l'économie danoise par le rhumatisme s'élève à 125 millions de couronnes annuellement.

Aux Pays-Bas, dans les provinces du nord, le rhumatisme représente 14 pour cent environ, du total de toutes les maladies. On compte en moyenne quelque 30 journées de maladie par rhumatisant. 20 pour cent des dépenses des caisses-maladie leur sont consacrés.

D'après la statistique de l'ensemble des causses-maladie, le rhumatisme périphérique représentait en Allemagne, en 1949, 7,5 pour cent du total des cas de maladie.

En Autriche, la statistique de l'assurance-maladie accuse en 1954 176 385 ça« de rhumatisme (15%% de tous les cas de maladie), la durée de la maladie représentant

794 au total 4 217 791 jours (17% de tous les jours de maladie). La même année, 7310 cas seulement concernent la tuberculose (0,6% de tous les cas de maladie), L'office des pensions des ouvriers en versa en 1954 prématurément à 26 213 rentiers, seulement pour maladies rhumatismales (24,4% de tous les cas d'invalidité prématurée). Cette annéelà, 7390 assurés furent reconnus invalides avant l'âge pour cause de tuberculose (6,7% de tous les cas d'invalidité prématurée). La perte du revenu national due au rhumatisme (calculée d'après la somme des dépenses pour rentes annuelles, mesures thérapeutiques et assurance-maladie, ainsi que pour perte de salaire pour cause de rhumatisme) se monte dans ce pays à 2 milliards de schillings en 1954 en chiffre rond.

En France, enfin, les frais de traitement du rhumatisme auraient atteint, à eux seuls, 6,75 milliards de francs français pour l'année 1949, non compris les frais résultant de l'incapacité de travail par suite de maladie et d'invalidité. Les dépenses totales consacrées par la France à la lutte contre les maladies rhumatismales durant l'année 1949 se seraient élevées à 38 milliards de francs en chiffre rond; la morbidité dans ce pays a été estimée à 10 pour cent environ.

Comme le rhumatisme n'est pas une maladie transmissible soumise à la déclaration obligatoire, il n'existe pas en Suisse une statistique centrale, qui puisse fournir des indications précises sur la morbidité, la mortalité et l'invalidité. L'ampleur prise par le rhumatisme dans notre pays et les dommages qui en résultent pour l'économie publique ont été révélés par le Dr Max Brück, médecin et économiste, dans son ouvrage .très approfondi, publié en 1939, intitulé: Bedeutung des Rheumatismus für Volksgesundheit und -Wirtschaft auf Qrund schweizerischen statistischen Materials. L'auteur appliqua à ses recherches la méthode dite représentative, qui consiste à déterminer sous forme de statistique, dans certains groupes de la population considérés comme représentant typiquement l'ensemble de la population, l'importance du problème du rhumatisme sous ses différents aspects. A cet effet, il se fonde surtout sur la documentation fournie tant par les chemins de fer fédéraux, qui disposent d'une statistique exemplaire sur la morbidité, l'invalidité et la mortalité, que sur celle fournie par l'assurance
militaire fédérale, les services de recrutement pour l'armée, les caisses-maladie de Saint-Gali, la caisse-maladie chrétienne sociale et la caisse-maladie des arts et métiers, à Zurich.

Le personnel des chemins de fer fédéraux se prête tout particulièrement bien à une enquête de ce genre parce qu'il se compose d'éléments appartenant à tous les milieux professionnels et se répartit assez également entre la ville et la campagne et sur presque toutes les régions du pays. Après des enquêtes très poussées, Brück arrive aux conclusions suivantes, qui se rapportent uniquement au rhumatisme périphérique: De 1926 à 1935, quelque 17 500 cas de maladie furent enregistrés en moyenne chaque année (sans les accidents ni les absences de courte durée) parmi les 33 000 agents des chemins de fer fédéraux, ce qui représente environ 436 000 jours de maladie. Sur ce total, 3700 cas en chiffre rond avec 91 400 jours de maladie l'an étaient dus à des affections rhumatismales. Mentionnons, à titre de comparaison, que, pendant ces dix ans, 104 cas seulement de tuberculose ont été annoncés, représentant 20 600 jours de maladie au total. La morbidité par rhumatisme parmi le personnel des chemins de fer fédéraux était, pendant cette période, de 11,2 pour cent, la durée moyenne du traitement d'une poussée rhumatismale de 24,6 jours. Un rhumatisant subit, dans l'espace de dix ans, trois poussées en moyenne, durant lesquelles il dut interrompre son travail. En revanche, la morbidité par tuberculose était de 0,31 pour cent seulement, mais la durée moyenne d'un cas de tuberculose, de 199 jours. Le rhumatisme entrait donc pour 21 pour cent dans la morbidité totale et la durée du traitement, tandis que la tuberculose ne représentait que 0,59 pour cent quant aux cas, et 4,7 pour cent quant à la durée du traitement. Le rapport entre la tuberculose, plus fréquente autrefois qu'aujourd'hui, et le rhumatisme est ainsi de 1:36 pour les cas, de 1:4,5 pour la durée de la maladie.

En d'autres termes, le rhumatisme comptait pour un cinquième dans la morbidité totale et la durée totale du traitement ; il était 36 fois plus fréquent quant aux cas et a exigé un traitement 4,5 fois plus long que la tuberculose; on sait pourtant que tout cas

795 de tuberculose nécessite, jusqu'à la reprise.du travail, un traitement beaucoup plus long que s'il s'agit du rhumatisme. Cette proportion se précise encore lorsqu'on considère le nombre des personnes mises à la retraite pour cause de rhumatisme. En 1934 et 1935, les chemins de fer fédéraux ont mis à la retraite prématurée, pour cause de rhumatsùne, un nombre d'agents représentant 19,3 pour cent du chiffre total des cas de mise à la retraite. Pendant la même période, les mises à la retraite pour cause de tuberculose s'élevaient à 2,77 pour cent seulement, soit le septième des retraites pour cause de rhumatisme. En 1934 et 1935, ces dernières ont été prononcées en moyenne huit ans avant la limite d'âge de 65 ans. En 1934/1935, sur 100 journées de travail, on comptait 3,6 jours d'invalidité pour cause de rhumatisme et seulement 0,07 jours pour cause de tuberculose. Sur 100 jours d'invalidité pour cause de rhumatisme, on comptait donc seulement 2 jours d'invalidité pour cause de tuberculose et seulement 31,9 jours de maladie pour le rhumatisme. En revanche, on comptait 205 jours de maladie pour cause de tuberculose sur 100 jours d'invalidité pour cette même maladie. En résunxé, il s'ensuit que l'invalidité pour cause de rhumatisme parmi le personnel des chemins de fer fédéraux était, au cours des années 1934/1935, 51 fois supérieure à celle due à la tuberculose.

Par ce parallèle entre le rhumatisme et la tuberculose, il ne s'agit pas de minimiser l'importance de cette dernière maladie. La lutte contre la tuberculose, maladie toujours grave et encore répandue, doit être poursuivie par tous les moyens, comme le prévoit la législation sur la matière.

Les chiffres susmentionnés révèlent que les chemina de fer fédéraux et leur personnel ont supporté approximativement, pendant les années 1934/1935, les charges annuelles moyennes suivantes pour le seul rhumatisme: Fr.

Frais de traitement Incapacité de travail causée par a. La maladie b. L'invalidité

199 000

Total

1 240 000 3^38000^ 5 077 000

Les chemins de fer fédéraux et leurs 33 000 agents ont donc subi un dommage annuel moyen de 5 millions de francs environ dû au seul rhumatisme. Relevons à ce propos que le revenu moyen de ce personnel est sensiblement supérieur à celui du reste de la population. En ce qui concerne l'incapacité de travail causée par la maladie, il faut comparer le revenu annuel moyen du personnel, estimé à 4500 francs, au revenu de 3750 francs par tête de la population au travail; quant à l'incapacité de travail causée par l'invalidité, il faut comparer le revenu annuel des retraités de 3500 francs par tête, à un revenu annuel moyen de 3000 francs, des salariés. Ce fait est important, vu que, d'après les constatations faites e» d'autres pays, les cas de rhumatisme sont beaucoup plus fréquents dans les classes de la population moins aisées. C'est la raison pour laquelle on peut admettre avec certitude que la morbidité par rhumatisme n'est en tout cas pas plus faible dans le reste de la population de notre pays que parmi le personnel des chemins de fer fédéraux. Il ne faut pas oublier non plus que, lors de leur engagement, les employés des chemins de fer fédéraux sont soumis à un examen médical approfondi, dont dépend leur engagement. D'où l'on peut conclure que ce personnel jouit d'une meilleure santé que la moyenne de la population tout entière et que, par conséquent, le tableau statistique de la morbidité et de l'invalidité dues au rhumatisme parmi le personnel est certainement moins chargé que celui de la moyenne de la population.

Si l'on transpose sur la population suisse de 15 à 16 ans les résultats des calculs faits pour les chemins de fer fédéraux, en partant de l'idée que la morbidité et l'invalidité dues au rhumatisme dans cette partie de la population sont à peu près les mêmes que pour l'ensemble du personnel des chemins de fer fédéraux, on constate que les maladies rhumatismales qui attaquent cette partie de la population représentent pour notre économie publique approximativement les charges suivantes :

796 Frais de traitement Incapacité de travail pour cause de a. Maladie , 6. Invalidité

Environ 18 millions de francs

Environ 66 millions de francs Environ 155 millions do franca Au total Environ 239 millions de francs Pour les années 1934/1935, qui ont servi de base au calcul, les revenus aussi bien que les frais de traitement ont subi une majoration sensible par suite du renchérissement du coût de la vie pendant la guerre et l'après-guerre ; aussi faut-il estimer actuellement la perte totale à plus de 400 millions de francs par année.

Brück a fait d'intéressantes constatations au sujet de l'influence, sur la morbidité, du lieu de travail, du genre d'activité et de l'âge. Elle était cinq fois plus élevée chez les ouvriers travaillant en plein air que pour le personnel de bureau. Cette différence doit être attribuée au fait que le personnel travaillant en plein air est très exposé aux influences météorologiques. Dans les ateliers également, le rhumatisme est quatre fois plus fréquent que dans les bureaux. Ici, l'usure corporelle semble avoir une importance déterminante, en plus du danger de refroidissement (transpiration, courant d'air).

Alors que la morbidité par rhumatisme était de 2,09 pour cent pour les classes d'âge de 15 à 19 ans, elle augmentait régulièrement avec l'âge pour atteindre son point culminant, de 16,28 pour cent, dans les classes d'âge de 85 à 59 ans; elle se maintenait au même niveau pour les classes d'âge de 60 à 64 ans, et ne redescendait qu'après à 13,76 pour cent. La morbidité par rhumatisme était donc presque huit fois plus élevée dans les groupes de personnes âgées de 55 à 64 ans que dans le groupes des personnes de 15 à 19 ans.

Dans son ouvrage paru en 1949 sur: «Les maladies rhumatismales panni le personnel des chemins de fer fédéraux au cours de l'année 1948», le Dr von Beust, qui en était alors le médecin en chef, a compulsé le matériel statistique du service médical des chemins de fer fédéraux pour l'année 1948. Il a abouti, dans l'essentiel, aux mêmes résultats et conclusions que Brück, quand bien même le matériel utilisé ne concernait pas la même période.

Le tableau suivant donne un aperçu de la morbidité causée parmi le personnel des chemins de fer fédéraux dans les années 1948 à 1960 par suite de rhumatisme articulaire et musculaire, comme aussi par suite de lumbago et de sciatique :

1 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957

1958 1959 1960

Maladies rhumatismales

Tontes les maladies, jours de maladie par homme (sans ICH courtes absences)

en tout

2

3

12,02 12,60 11,22 12,35 11,12 11,79 10,97 11,93

3097 3112 3052 2979 2972 2944 2947 3017 3104 3089 3032 2975 2897

11,92 12,50 11,06 11,37 10,86

Jours do maladie

Caa

sur 100 hommes 4,

Pourcentage

en tûut

par cas

par homme

les cas de maladie

5

6

7

8

8,77

80847

8,69 8,65 8,50 8,37 8,25

87757 77351 76036 76 858 76638 73984 78487 80 104 82672 78053 82 609 77 392

26,10 28,20 25,34 25,52 25,86 26,03

2,28 2,45 2,19 2,16 2,15 2,14 2,07 2,17 2,19 2,21 2,06 2,16 2,02

19,0 19,4 19,5 17,5 19,3

8,24 8,39 8,51 8,27 7,98 7,79 7,59

25,10 26,01 25,81 20,76 25,74 27,77 26,71

18,2 18,9

18,2 18,4 17,7 18,6 19,0 18,6

797 II ne faut sans doute pas interpréter les chiffres indiqués à ce tableau comme étant dee données absolues de tous les maux rhumatismaux. Mais, malgré cela, elles permettent de tirer de précieuses conclusions. Il en résulte aussi que la part que prend le rhumatisme à l'ensemble de la morbidité du personnel des chemins de fer fédéraux et la durée de la maladie du cas individuel, sont restées constantes d'une façon surprenante au coure des années, quoique le personnel des chemins de fer fédéraux soit, quant au traitement, dans une situation privilégiée grâce aux excellentes prestations dea caisses-maladie, auxquelles il est affilié, comme aussi grâce aux prestations de l'administration en cas de maladie et à la pratique empressée qui accorde des congés dans le but de faire des cures balnéaires. Il faut avant tout attribuer cette constance au fait que forcément des limites restreintes s'imposent, précisément chez les cheminots, quand il s'agit -- chose souhaitable -- d'adapter le travail à l'homme.

Les chiffres sur la morbidité et l'invalidité dues au rhumatisme obtenus sur la base de la statistique des chemins de fer fédéraux ont été confirmés par ceux que fournit la documentation des caisses-maladie et de l'armée.

Parmi les membres de la caisse-maladie de Saint-GaU et de celle des arts et métiers de Zurich, on constate aussi, malgré la composition toute différente de cette partie de la population comparée à celle du personnel des chemins de fer fédéraux, que les maladies rhumatismales l'emportent de beaucoup sur la tuberculose. L'importance spéciale que revêt le rhumatisme du point de vue économique ressort du fait que la place qu'il occupe dans la morbidité totale entre 40 et 49 ans, c'est-à-dire durant la période la plus productive de la vie, est 30 fois plus élevée qu'au cours de l'enfance, entre 0 et 14 ans. Malgré la durée plus longue de la tuberculose et les frais plus élevés qu'entraîné chaque cas, le rhumatisme se traduit, pour la caisse-maladie des arts et métiers de Zurich, à cause du nombre élevé des cas, par un nombre sensiblement plus élevé de jours de maladie et par des frais de traitement trois fois plus élevés que pour la tuberculose. Pour les membres de la caisse-maladie chrétienne sociale et de la caissemaladie de Saint-Gall, âgés de 15 à 64 ans, on obtient les chiffres suivants
relatifs à la morbidité par rhumatisme chez les hommes des différentes professions (en prenant comme standard la répartition par âge des membres travaillant dans les bureaux): teinturiers et apprêteurs 8,1; ouvriers de l'expédition 7,9; bouchers 6,3; chauffeurs et charretiers 5,8; agriculteurs 4,4; ouvriers du bâtiment 4,1; personnes occupées à des travaux de bureau 2,8. En ce qui concerne les femmes (la répartition par âge des ménagères ayant été prise comme. base), les lessiveuses et les femmes de ménage viennent en premier avec 8. Viennent ensuite les femmes occupées dans l'agriculture et le jardinage avec 5,9, les repasseuses avec 4,8, les employées de bureau avec 4,6, les ménagères avec 4,2, etc. Chaque profession est donc fort différemment touchée. Ici aussi, ressort toute l'nnportance des facteurs du milieu, tels que le froid, l'humidité et la fatigue professionnelle. Ces différences sont encore plus accentuées pour la caissemaladie des arts et métiers de Zurich. Les ouvriers occupés à la construction des routes et les terrassiers sont en tête de la morbidité totale avec une part de morbidité par rhumatisme de 24,5 pour cent. Viennent ensuite les ouvriers du bâtiment avec 17 pour cent, tandis que la part des personnes occupées dans les bureaux est de 1,4 pour cent seulement. Pa.rmi les lessiveuses la morbidité par rhumatisme est de 14,3 pour cent de la morbidité totale.

Selon Brück, 7 pour cent des malades annoncés à l'assurance militaire fédérale souffrent de rhumatisme. Relevons qu'il ne s'agit que de cas en rapport avec le service militaire et que les hommes représentent, du point de vue de la santé, une élite qui ne comprend pas les anciennes classes d'âge. Mais, ici aussi, le rhumatisme est deux fois plus fréquent que la tuberculose. Les journées de maladie dues au rhumatisme s'élèvent à 7,5 pour cent en chiffre rond du total de ces journées et les frais atteignent à peu près 8 pour cent des frais totaux. Tandis que pour la tuberculose, les rechutes sont, dans l'ensemble, de moins longue durée et entraînent moins de frais que les primo-infections, c'est le contraire pour le rhumatisme. En effet, les rechutes du rhumatisme sont de

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plus longue durée et entraînent dans leur ensemble des frais plus élevés que celles de la tuberculose.

Enfin, signalons que le Dr Belart, spécialiste zuricois du rhumatisme, est arrivé en 1952 à des conclusions semblables à celles de Brück et de von Beust, après les enquêtes qu'il a faites auprès du personnel des transports publics de la ville de Zurich sur la morbidité par rhumatisme. C'est ainsi que 16 pour cent de tous les cas de maladie et 20 pour cent de toutes les journées de maladie sont dus au rhumatisme. Un cas de rhumatisme a une durée de 33 pour cent plus longue qu'une autre maladie. Ce qui frappe dans le rhumatisme, c'est avant tout sa grande fréquence, celle de l'invalidité qu'il entraîne et la longue durée de la maladie. C'est vers la 45e année, c'est-à-dire au moment où l'homme est dans la force de l'âge, que le rhumatisme apparaît le plus souvent et sous ses formes les plus graves. D'après les calculs de Belart, une journée de maladie due au rhumatisme coûte 25 francs en chiffre rond, soit 5 francs pour les soins et 20 francs pour compenser la perte de salaire, qui doivent être supportés par les caissesmaladie et l'Etat. Calculés sur l'ensemble des assurés, les frais ainsi causés au personnel des tramways zuricois se montent à 70 francs par personne et par an.

Les considérations ci-dessus montrent que le rhumatisme est une maladie extrêmement répandue, non seulement à l'étranger, mais aussi en Suisse, et qu'il représente au moins 20 pour cent de la morbidité totale. Cet état de choses est tout particulièrement grave parce que la maladie, généralement chronique, entraîne presque toujours, tôt ou tard, une incapacité de travail temporaire ou durable, ou encore partielle ou totale. Très souvent, le rhumatisant a besoin d'être constamment entouré et tombe pendant des années à la charge de sa famille ou de la communauté. En outre, la maladie l'atteint fréquemment à un âge où un homme déploie normalement l'activité professionnelle la plus intense et où il dispose encore de toutes ses forces.

De nombreux rhumatisants économiquement faibles ne sont affiliés à aucune caisse-maladie. Avec le temps, ils tombent à la charge de l'assistance ou de la charité publiques. Les périodes de maladie prolongées et souvent répétées, comme aussi l'invalidité aux degrés les plus divers pendant des années, avec leurs conséquences graves pour la famille et l'activité professionnelle, finissent par frapper aussi durement celui dont la situation est aisée. Pour toute ces raisons, le rhumatisme est une maladie qui ne concerne pas seulement celui qui en est atteint, mais qui pose un problème social et économique dont doit se préoccuper la communauté, c'est-à-dire les autorités.

Avec Brück et von Beust, nous constatons que, considéré du point de vue social et économique, le rhumatisme est certainement la maladie la plus grave, et qu'il est, de ce point de vue, beaucoup plus important que la tuberculose.

,, .

3. La lutte contre le rhumatisme a. En Suisse La nécessité d'intensifier la lutte contre le rhumatisme par tous les moyens ressort de ce qui précède.

Où en sommes-nous en Suisse ? On ne saurait nier que, chez nous, la communauté et les particuliers considéraient ce problème avec une certaine

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indifférence, il en était en tous cas ainsi il y a peu de temps encore. Ni les médecins, ni la population ne lui ont accordé l'attention qu'il mérite. Cela provient de ce que le rhumatisme n'est pas transmissible, qu'il revêt rarement une forme alarmante pouvant mettre la vie du malade en danger et que les troubles qu'il cause sont considérés, la plupart du temps, comme un coup du sort, sans doute parce que la science médicale n'est pas encore parvenue à découvrir une arme spécifique, un moyen absolument efficace contre certaines formes fréquentes du rhumatisme. C'est ainsi que l'on se trouve, pour ce qui est de la lutte contre le rhumatisme, dans la même situation qu'au début de la lutte contre la tuberculose, avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale, bien que le rôle que jouent sur le plan économique les maladies rhumatismales dépasse de loin celui de la tuberculose. Dans la lutte contre la tuberculose, on est parvenu à mobiliser largement et à organiser toutes les forces nécessaires pour enrayer le mal. De même, dans la lutte contre les maladies rhumatismales, un résultat ne pourra être obtenu que si l'on parvient à mettre sur pied toutes les forces défensives nécessaires et à coordonner les mesures qui s'imposent.

Mener énergiquement la lutte contre les maladies rhumatismales est une nécessité non seulement en vue de réduire les dommages causés, année après année, à notre économie publique, mais aussi pour atténuer les souffrances physiques et morales infligées sous toutes sortes de formes à notre prochain par ce fléau social. Si le dommage causé à l'économie publique peut être évalué approximativement, il ne saurait en être de même de la somme des douleurs et des peines morales des malades, ainsi que des chagrins et des soucis de leurs proches.

Les mesures nécessaires pour lutter contre le rhumatisme comprennent : 1. L'appui et l'encouragement des recherches scientifiques; 2. L'information de la population; 3. L'information du corps médical; 4. La prophylaxie, non pas tant dans le sens de la prévention de la maladie proprement dite que de la prévention des progrès de la maladie, une fois déclarée, et de la prévention des rechutes ; 5. Le traitement; 6. L'assistance aux victimes de la maladie.

1. L'appui et l'encouragement des recherches scientifiques constituent le point de départ d'une
lutte efficace ; les résultats ainsi obtenus formeront la base de toutes les autres mesures indispensables. La science médicale présente aujourd'hui encore des lacunes sensibles en ce qui concerne l'origine, l'apparition, l'évolution et surtout le traitement efficace des maladies rhumatismales, bien que de grands progrès aient été faits dans ce domaine, ces derniers temps précisément.

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II existe actuellement en Suisse plusieurs centres spécialisés de recherches, l'institut de physiothérapie de l'université de Zurich, en liaison avec la clinique pour rhumatisants de l'hôpital cantonal de Zurich, l'institut de physiatrie de l'hôpital cantonal de Genève et le «Centre d'étude des maladies rhumatismales de la policlinique universitaire de médecine de Genève», lequel dispose, à côté d'une section clinique, d'une division spéciale de recherches. D'autres cliniques universitaires encore (Baie, Berne), ainsi que des instituts d'anatomie pathologique (notamment à Genève et à Zurich), se livrent à des travaux scientifiques précieux sur le rhumatisme. Dans l'intérêt d'une recherche féconde, il serait souhaitable que ces instituts puissent disposer de moyens financiers supplémentaires, afin que les facultés de médecine des universités de notre pays soient en mesure de créer d'autres centres de recherches, ainsi que des chaires de rhumatologie et de physiothérapie.

2. L'opinion par trop répandue selon laquelle le rhumatisme serait une maladie inévitable doit être combattue par le moyen d'une information systématique de la population. La passivité, l'idée tendant à croire que le rhumatisme est le fait du destin, est une conception qui nuit à la lutte contre le rhumatisme et en retarde la guérison. La population doit donc être suffisamment renseignée au moyen de brochures, d'instructions, de films, de conférences, etc., sur la nature de Ja maladie, son apparition, son évolution, les dangers qu'elle présente, la prévention et le traitement des différentes formes de rhumatisme, afin d'amener ceux qui en sont atteints à en avoir une plus juste conception et à être bien décidés à la lutte, et aussi pour attirer l'attention des personnes non atteintes sur les dangers menaçants et les mesures de prophylaxie. Certaines mesures destinées à renseigner la population ont, il est vrai, déjà été prises. Elles sont cependant encore insuffisantes et devraient être considérablement intensifiées.

3. Il importe de renseigner non seulement la population, mais aussi le corps médical. Les futurs médecins doivent avoir, dans toutes les universités, l'occasion d'acquérir des connaissances approfondies sur la nature, l'origine, le diagnostic et le traitement des différentes formes du rhumatisme. Les possibilités de
formation des étudiants en médecine doivent être considérablement améliorées dans cette voie. En général, les maladies rhumatismales sont traitées par le médecin praticien, médecin de famille. Il s'agit donc avant tout de développer et de parfaire la formation des médecins ayant une pratique générale. Les médecins spécialistes, ainsi que les cliniques où sont traitées les maladies rhumatismales, ne doivent être consultés que dans les cas où le diagnostic est difficile à poser et la thérapeutique difficile à appliquer. Le rhumatisme est une maladie beaucoup trop répandue pour que celui qui en est menacé ou atteint puisse se confier aux soins d'un spécialiste ou d'une division hospitalière. Le praticien devrait, lui aussi, bénéficier d'une formation qui le mette en mesure de poser le diagnostic

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au premier stade de la maladie et de s'appliquer de façon méthodique à conseiller et traiter ces malades selon un plan à longue échéance. Enfin, il faut également faire en sorte que de jeunes médecins aient de plus en plus la possibilité de recevoir une formation de spécialiste des maladies rhumatismales dans les cliniques des universités et les divisions hospitalières.

Seules les villes de Zurich et de Genève offrent cette possibilité dans une mesure suffisante.

4. Les causes d'une maladie en déterminent la prévention. Pour être efficaces, les mesures de prophylaxie doivent tendre à les éliminer autant que possible. La prévention du rhumatisme inflammatoire est extrêmement difficile, ses causes ne peuvent souvent pas être combattues (infection, troubles de la sécrétion hormonale ou du métabolisme). Les influences physiques, telles que rhumidité et le froid, et même le surmenage, qui peuvent déclencher un rhumatisme inflammatoire, doivent être évitées autant que possible par les personnes prédisposées à ce rhumatisme. Celles qui en sont atteintes devraient consulter un médecin le plus tôt possible, c'est-à-dire dans la première phase de la maladie, au lieu de se soigner elles-mêmes. Des conseils et un traitement judicieux atténueront le mal dans la plupart des cas et pourront même contribuer à la guérison complète.

Cette manière de procéder est la meilleure prophylaxie contre l'invalidité.

La prophylaxie joue un rôle beaucoup plus grand dans les différentes formes de rhumatisme dégénératif que dans le rhumatisme inflammatoire.

Il est indiqué avant tout de déceler le plus tôt possible les déformations des articulations, congénitales ou acquises, qui provoquent une usure accrue du tissu. Plus le poids du corps est élevé et plus l'articulation est mise à contribution par l'activité professionnelle, plus tôt apparaît cette usure. II faut donc, dans ce cas, vouer un soin tout particulier à diminuer son poids par une nourriture appropriée et ménager les articulations menacées. A toutes les personnes souffrant de déformations articulaires ou ayant une constitution les prédisposant au rhumatisme, on déconseillera assez tôt toute une série de métiers qui les exposeraient au danger de traumatismes mécaniques (travail lourd, travail provoquant de violentes secousses ou exigeant une même position du corps
constamment défectueuse, d'où une trop grande charge à supporter pour le corps, etc.). Si le malade exerce déjà un métier qui présente un tel danger, une réadaptation et un changement de métier sont souvent indiqués lorsque les mesures d'hygiène du travail introduites dans l'entreprise ne peuvent apporter aucune amélioration. La prophylaxie précoce devrait être déjà appliquée chez les enfants et les adolescents par les médecins qui décèlent des affections déformantes des articulations.

Ils devraient immédiatement attirer leur attention et celle des parents sur les dangers, les suites possibles, et leurs conséquences sur le plan professionnel, qui peuvent en résulter. Ue n'est, aujourd'hui encore, hélas, que très rarement le cas. La plupart du temps, il s'agira de déceler le plus tôt possible

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les atteintes portées sans trêve au corps par l'activité professionnelle, d'éliminer par des mesures d'hygiène appropriées tout facteur nuisible ou d'éloigner l'ouvrier du milieu malsain. Après quoi, le diagnostic posé, on entreprendra un traitement précoce, afin d'éviter, avec les meilleures perspectives de succès, l'invalidité menaçante. Il arrive fréquemment qu'à ce stade initial de la maladie le patient néglige de consulter le médecin par crainte des frais de traitement élevés ou par insouciance et passivité, justement parce que ses douleurs ne sont souvent que passagères. C'est ici qu'il faudrait bien renseigner la population, afin de la familiariser à l'idée de la nécessité des mesures prophylactiques.

Dans la prophylaxie, il faut tenir compte également des autres facteurs déclenchant le rhumatisme. Par des mesures appropriées (fourniture de vêtements et salopettes, etc.) on protégera autant que possible les ouvriers qui travaillent dans les chantiers et les entreprises industrielles contre le froid, l'humidité, les courants d'air (surtout après transpiration) et contre les sautes brusques de la température. H importe aussi d'éviter de travailler ou d'habiter dans des locaux humides, et de se vêtir de façon peu pratique.

Enfin, les personnes exposées au rhumatisme doivent consacrer leurs loisirs aux sports dits de compensation ou à une gymnastique appropriée, faire en sorte d'activer leur circulation sanguine et s'entraîner avec méthode à une certaine endurance. La nourriture ne joue pas, dans la prophylaxie, un rôle aussi exclusif qu'on le croyait autrefois. L'opinion selon laquelle la goutte, provoquée par une forte augmentation d'acide urique dans le sang, serait étroitement apparentée aux maladies rhumatismales, est erronée. La goutte qu'engendré l'acide urique est plutôt un trouble du métabolisme d'un caractère spécial, très rare de nos jours et sans aucun rapport avec le rhumatisme.

5. Pour ceux qui sont atteints de rhumatisme, la mesure la plus importante est un traitement approprié. La thérapeutique à appliquer varie, d'un cas à l'autre, suivant la forme et les causes du mal, ainsi que suivant son évolution. Il incombe au médecin traitant d'en décider. Même si la science médicale n'a pas trouvé jusqu'ici le remède efficace pour tous les cas de rhumatisme et si les recherches doivent
encore être fortement poussées dans ce domaine, on doit reconnaître que le diagnostic et la thérapeutique ont atteint aujourd'hui déjà un degré élevé et qu'ils vont se développant en fonction des progrès des recherches. Il est dans l'intérêt du rhumatisant de consulter un médecin dès que possible, attendu que les maladies rhumatismales, sous diverses formes, peuvent être guéries beaucoup plus rapidement et plus sûrement à leur début qu'à un stade avancé.

Dans le traitement du rhumatisme inflammatoire, la thérapeutique médicamenteuse jouera un rôle important, la lutte contre la douleur venant en première ligne. Dans les cas de polyarthrite inflammatoire chronique, la chrysothérapie et, ces derniers temps aussi, le traitement aux hormones

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stéroïdes (cortisone, ACTH), appliqués dans les cas de rhumatisme articulaire aigu, ont donné d'excellents résultats. Les formes dégénératives du rhumatisme réagissent généralement assez bien aux produits à base de soufre, ainsi que, dans certains cas, aux injections d'hormones stéroïdes (hydrocortisones). II est entendu que ces différents remèdes, qui ne sont pas toujours sans danger, ne doivent être administrés que sous contrôle médical · et seulement dans les cas qui s'y prêtent, si on veut qu'ils soient vraiment efficaces. Le marché des médicaments est malheureusement inondé d'un nombre incalculable de prétendues spécialités contre le rhumatisme, de valeur douteuse ou qui ont tout au plus pour effet de calmer la douleur. Ces produits sont recommandés aux profanes, incapables de juger par euxmêmes, comme médicaments infaillibles, au moyen d'une réclame tapageuse dont l'acheteur fait finalement les frais. D'autres médicaments, dits naturistes, encore moins efficaces, sont également lancés et vendus par des charlatans. Il arrive fréquemment que des rhumatisants, au début de la maladie, achètent à un prix élevé de tels produits qui, s'ils calment en partie leurs douleurs, n'ont cependant aucune influence sur l'origine du mal. Et, après des mois et même des années, lorsqu'ils reconnaissent enfin que l'effet désiré n'est pas obtenu, il est souvent trop tard pour pouvoir combattre la maladie avec succès. A cela s'ajoute que ces malades n'ont alors plus les moyens financiers nécessaires pour suivre un traitement ordonné par un spécialiste, parce qu'ils ont souvent consacré toutes leurs économies à l'achat de ces médicaments, si ce n'est encore à des cures coûteuses, recommandées par des personnes incompétentes.

Des méthodes chirurgicales et orthopédiques sont parfois nécessaires pour traiter, dans certains cas, les lésions rhumatismales tardives. C'est ainsi que l'on pratique des opérations, souvent plastiques, des articulations, des muscles et des tendons, afin de rendre aussi supportables que possible les lésions permanentes et de limiter leurs effets autant que faire se peut.

La guérison s'obtient souvent par élimination d'un foyer d'infection (amygdales, appendice, vésicule biliaire, etc.). Dans le cas de la hernie discale, l'intervention neurochirurgicale peut sauver le malade d'une invalidité
permanente ; elle apporte souvent la guérison complète. Le traitement orthopédique, par exemple la pose d'attelles aux jambes, est souvent appliqué avec succès pour prévenir des débuts de luxation de l'articulation, ainsi que des rétrécissements et des raccourcissements de muscles ou de tendons et, par là, enrayer les progrès de la gêne des mouvements des articulations.

Dans bien des cas, l'alimentation joue un certain rôle dans le traitement du rhumatisme.

La méthode de traitement des maladies rhumatismales la plus importante, éprouvée depuis longtemps, est bien la physiothérapie, de l'avis même de spécialistes éminents de Suisse et de l'étranger. Cet avis a été

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confirmé au dernier congrès international du rhumatisme (1957). La méthode comprend avant tout les différentes sortes de massage, l'application de chaleur sèche ou humide, le traitement par les bains ou les rayons, ainsi que la thérapeutique fonctionnelle et la gymnastique médicale/Contrairement à la chimiothérapie, l'action curative des méthodes physiothérapeutiques s'explique par une réaction de l'organisme à l'irritation physique.

Seul le rhumatisme articulaire aigu ne se prête pas à la physiothérapie parce que le processus inflammatoire serait aggravé par toute irritation de l'organisme. Dans la polyarthrite inflammatoire chronique, les mesures de thérapeutique physique doivent toujours être appliquées avec prudence, à cause du danger d'avivage. Les mouvements actifs et passifs, le massage des muscles, les cures balnéaires (bains d'eaux-mères), ainsi que les applications de chaleur, locales ou générales, auront la première place. La maladie de Bechterew doit être traitée, dans son stade initial, par la radiothérapie profonde, dans son stade final, par la gymnastique respiratoire appropriée, des exercices mécaniques, des applications de chaleur et des cures balnéaires thermales et sulfureuses.

Le principal champ d'application de la physiothérapie s'étend aux différentes formes du rhumatisme dégénératif, qui constituent de loin la majeure partie des maladies rhumatismales. Au premier plan se trouvent les diverses méthodes d'application locale de chaleur (enveloppements de boue, ondes courtes et micro-ondes), les massages destinés à relâcher la musculature, les irradiations aux rayons X pour calmer la douleur, les ultrasons et, avant tout, les cures de bains (eaux-mères, eaux sulfureuses ou thermales).

La balnéothérapie n'est pas seulement la plus ancienne parmi les différentes sortes de traitement physique du rhumatisme, mais aussi celle qui est appliquée avec le plus grand succès. Des expériences de plusieurs centaines d'années l'ont montré et les recherches modernes en matière de rhumatisme l'ont abondamment prouvé. Contrairement à ce que l'on supposait jadis, la cure de bains n'est pas indiquée pour chaque cas de rhumatisme; elle ne l'est pas non plus à n'importe quel moment de la maladie.

Dans les cas de rhumatisme inflammatoire aigu ou subaigu, la cure de bains est nuisible et même
dangereuse. La cure de bains ne doit également être appliquée qu'avec prudence lors de processus inflammatoires chroniques, à cause du danger d'avivage. En revanche, elle constitue le traitement de choix dans presque tous les cas de rhumatisme dégénératif, si fréquents.

Les facteurs efficaces de la balnéothérapie peuvent être résumés comme suit: L'effet de la chaleur a une importance toute particulière. La plupart des maladies rhumatismales sont très douloureuses. Les douleurs sont souvent dues à une mauvaise circulation du sang dans les tissus à la suite de spasmes des vaisseaux. Les douleurs, de leur côté, accentuent ces spasmes.

En revanche, la chaleur a une action spasmolytique, dilate les vaisseaux

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et facilite dès lors une meilleure circulation, qui calme les douleurs. En outre, les facteurs mécaniques de l'eau jouent dans bien des cas graves un rôle qu'il ne faut pas sousestimer. La force de poussée de l'eau permet aux membres douloureux et gênés dans leurs fonctions de se mouvoir beaucoup plus facilement que dans l'air. Des raideurs peuvent être relâchées et l'atrophie musculaire, qui apparaît régulièrement dans les lésions des articulations, peut de nouveau rétrograder par l'effet d'exercices appropriés. En outre, la perméabilité de la peau, accrue sous l'influence de l'eau, peut jouer un rôle, étant donné que les substances minérales contenues dans l'eau curative peuvent être résorbées et qu'un échange important de ions est rendu possible, échange qui ne reste pas sans influence sur certaines fonctions de sécrétions internes et hormonales. Quelques oligo-éléments contenus dans l'eau curative, parmi lesquels on trouve des substances telles que le cuivre, l'iode, le cobalt, le manganèse, etc., acquièrent ainsi une plus grande importance.

Outre le fait qu'ils amènent un changement dans la disposition du malade, divers principes actifs ont un effet spécifique limité. C'est ainsi que les bains sulfureux par exemple ont une vertu normalisante sur le métabolisme sulfureux perturbé de nombreux rhumatisants. Le concours de ces différents facteurs provoque un changement important dans les réactions du malade, la modification recherchée de l'organisme. Les résultats les plus fréquents des recherches ont montré que l'apparition et l'évolution des maladies rhumatismales sont influencées, en de nombreux cas, par certains processus de direction du système nerveux végétatif et de la régulation des fonctions hormonales qui y est coordonnée (glande pituitaire, écorce du corps surrénal).

Dans la plupart des lésions rhumatismales, la circulation sanguine dans les tissus, dite circulation sanguine périphérique, subit aussi des dérangements.

L'influence de la cure de bains n'est pas essentiellement spécifique. Aucun agent pathogène n'est détruit par un médicament chimique spécifique et aucune hormone manquant à l'organisme n'est remplacée; les processus de régulation végétatifs et hormonaux, dont le concours a un effet décisif sur l'évolution de la maladie sont simplement stimulés et accélérés. L'organisme
malade doit réagir au traitement stimulant par la cure de bains. Dans la plupart des cas, cette réaction contribuera fortement à la guérison. Outre ces facteurs curatifs de la cure de bains agissant directement sur le corps malade, l'effet psychique du changement de milieu, le repos physique et mental, une vie réglée, l'alimentation appropriée, le cadre varié, ainsi que tous les avantages accessoires qu'offre un séjour de cure, sont très importants.

Si la maladie est dans un stade avancé, il importe d'en compléter le traitement, dans certains cas, par une thérapeutique appropriée du travail.

On entend par là toute forme d'activité judicieusement ordonnée par le médecin et dirigée par des spécialistes, pour améliorer l'état du malade ou guérir le mal, l'élément essentiel étant alors, non le produit du travail, mais le travail lui-même.

Feuille fédérale. 113e année. Vol. II.

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Tout cela fait ressortir l'importance extraordinaire des stations balnéaires suisses pour une lutte énergique et systématique contre le rhumatistisme, s'inspirant du fait que cette maladie et ses suites causent à notre économie générale un dommage de plusieurs centaines de millions de francs chaque année. On sait quelles conséquences le rhumatisme a pour la santé et les lourds sacrifices qu'il impose à ceux qui en sont atteints. On sait aussi qu'il est largement répandu dans toute les couches de la population, notamment parmi les ouvriers, dans l'agriculture et dans l'économie domestique (ménagères). Or, il s'est avéré que la cure balnéaire, pratiquée dès le début, empêche souvent les récidives et constitue, dans de très nombreux cas, une méthode de choix ne pouvant être remplacée par aucune autre thérapeutique. Dès lors, non seulement les couches aisées de la population, mais également les économiquement faibles doivent pouvoir en bénéficier. Il est donc urgent d'avoir un nombre suffisant d'établissements populaires de balnéothérapie pour malades ne disposant que de peu de moyens.

Pour que les classes peu aisées de la population puissent aussi bénéficier des bienfaits des sources thermales suisses, les malades admis dans un établissement thermal populaire doivent remplir certaines conditions, d'ordre médical et économique. La nature du mal doit correspondre aux «indications» de l'établissement. Comme les bains populaires ne doivent servir qu'aux personnes dont les conditions de fortune et de revenu ·-- compte tenu des charges de famille -- ne dépassent pas certaines limites, le malade joindra à sa demande un certificat médical avec diagnostic exact et une attestation d'impôt.

Il ne faut pas oublier les personnes appartenant à la classe moyenne, dont le revenu, s'il dépasse la limite permettant d'entrer dans un établissement populaire, ne suffit toutefois pas à payer les prix usuels des autres établissements de cure. Pour cette catégorie de malades aussi, qui sont souvent dans une situation difficile, il faudra trouver une solution qui leur permette de faire une cure sans trop d'appréhension.

Le succès peut être d'autant plus rapide et complet si le malade bénéficie de toutes les possibilités thérapeutiques et des traitements spéciaux les plus modernes de la science médicale. A cet effet, les
établissements populaires doivent disposer de toutes les installations diagnostiques et thérapeutiques les plus récentes, ainsi que de laboratoires, et être dirigés par des médecins spécialistes de la même manière que les hôpitaux et les sanatoriums.

Huit établissements à caractère populaire proprement dit sont actuellement exploités en Suisse. Ils laissent à désirer sur bien des points. Cela s'explique par les conditions fort primitives dans lesquelles ils ont été créés et exploités à l'origine (bains des pauvres des temps anciens), et par le manque de moyens financiers nécessaires pour en assurer l'entretien rationnel et les moderniser conformément aux données les plus récentes

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de la science. La capacité de ces établissements est totalement insuffisante, eu égard au très grand nombre des rhumatisants, qui devraient pouvoir suivre une cure de bains sous surveillance médicale et pratiquée dans toutes les règles de l'art. En 1948, 5461 malades au total, représentant 131 865 jours de pension, ont été soignés dans 7 établissements populaires de balnéothérapie. Ce sont là des chiffres éloquents, montrant bien quelle fut la contribution, sans subventions, de l'économie balnéaire suisse à la lutte contre le rhumatisme. Pourtant, ces établissements sont absolument insuffisants si l'on considère les 85 290 journées de maladie dues au rhumatisme du personnel des chemins de fer fédéraux en 1948 et si l'on retient que ce groupe d'agents ne représente qu'une infime partie de l'ensemble de la population. Si l'on compare le chiffre vraiment modeste de 701 lits à la disposition de la lutte contre le rhumatisme avec les 6000 lits des sanatoriums populaires pour tuberculeux et si l'on songe qu'on doit attribuer au rhumatisme une importance économique beaucoup plus considérable qu'à la tuberculose, on ne peut s'empêcher d'en déduire qu'il est urgent de moderniser les établissements populaires suisses de balnéothérapie dans l'intérêt de la lutte rationnelle et efficace contre le rhumatisme. Fait incontestable, aujourd'hui encore, beaucoup trop de rhumatisants économiquement faibles n'ont pas la possibilité de suivre assez tôt une cure sous surveillance médicale dans les établissements populaires entrant en considération, aucun lit n'y étant libre avant des mois.

Le moyen de combler provisoirement cette lacune serait de multiplier dans une mesure appropriée le nombre de lits et d'agrandir les bâtiments.

Mais il faudra envisager aussi la construction, selon un plan à longue échéance, de nouveaux établissements populaires de balnéothérapie. Le nombre, si nécessaire soit-il, ne doit toutefois pas faire négliger la qualité, c'est-à-dire la nécessité qu'il y a d'améliorer et de compléter les installations médicales et de développer les mesures d'ordre social. La situation est telle que les gouvernements cantonaux qui exercent la surveillance, ainsi que les médecins et les administrateurs des établissements, ne croient souvent plus pouvoir assumer la responsabilité d'attendre plus longtemps. Les
immeubles actuels sont en partie inappropriés, vétustés et délabrés. Les installations de bains sont souvent désuètes et primitives, les locaux de séjour parcimonieusement meublés et insalubres. Le malade économiquement faible a droit, lui aussi, à des cabines saines, claires, confortables et bien installées, ainsi qu'à des locaux et chambres bien aérés, répondant à tous les principes d'une bonne hygiène.

Du point de vue médical, il y a aussi lieu d'exiger bien des améliorations.

C'est ainsi que les établissements populaires de bahiéothérapie devront si possible être aménagés de façon à pouvoir rester ouverts toute l'année sans danger pour les malades. Ils devront être exploités de la même manière que les hôpitaux et les sanatoriums, une certaine discipline de traitement

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devant y être observée. Les installations pour le diagnostic et la thérapeutique doivent être adaptées aux dernières découvertes de la science et les malades être soumis à une observation clinique et scientifique approfondie, identique à celle des cliniques universitaires. En outre, la possibilité doit être donnée aux futurs médecins spécialistes de parfaire dans ces établissments populaires et hôpitaux balnéaires leur formation pratique, comme assistants et volontaires, dans le domaine de la rhumatologie, de la physiothérapie et en particulier de la balnéologie. Le personnel technique (masseurs, moniteurs de gymnastique médicale, etc.) doit, lui aussi, avoir la possibilité de parfaire sa formation. Toutefois, les centres d'enseignement et de perfectionnement proprement dits des médecins spécialistes, des masseurs et des moniteurs de gymnastique médicale, des physiothérapeutes et de tout autre personnel technique auxiliaire sont toujours les instituts universitaires de physiothérapie, tels que ceux de Zurich, Genève et Baie, ainsi que les policliniques et les divisions d'hôpital qui leur sont rattachées. Les établissements populaires de balnéothérapie doivent garder un contact étroit et collaborer scientifiquement avec ces instituts. H doit aussi être possible à tout établissement populaire de balnéothérapie moderne installé et exploité comme hôpital balnéaire, de procéder à certains travaux de recherches dans le domaine de la balnéothérapie. La station alpine de recherches scientifiques du Jungfraujoch et l'institut de climatologie d'altitude de Davos ont été créés aux fins d'étudier l'effet du climat d'altitude sur l'organisme humain.

Les hôpitaux balnéaires devraient, pour ce qui est de l'effet d'une cure thermale, jouer un rôle identique à celui de ces centres en ce qui concerne l'influence du climat sur la cure. Ces recherches devraient être effectuées sur place parce que les propriétés chimiques et physiques d'un grand nombre d'eaux curatives se modifient pendant le transport. Ces recherches devraient être effectuées en collaboration avec les instituts universitaires de physiothérapie, qui élucideraient en particulier le's questions théoriques.

Pour cela, il faut avoir, d'une part, des établissements populaires de balnéothérapie installés comme hôpitaux balnéaires et dirigés par un médecin-chef
s'intéressant activement à la science, d'autre part, des instituts universitaires de physiothérapie disposant de laboratoires spéciaux de recherches en matière de balnéologie, ainsi que du personnel nécessaire. Tout ce qu'on apprendrait ainsi de nouveau au sujet de l'effet d'une cure de bains sur l'organisme malade constituerait un enrichissement considérable, au grand profit des malades eux-mêmes. Il serait également très utile, pour l'enseignement, comme pour la formation des futurs médecins de stations balnéaires, que l'observation clinique soit intimement liée à la recherche scientifique expérimentale.

Lors de la mise au point des établissements populaires de balnéothérapie, il faudra veiller à ce que la liste des «indications» de chacun d'eux soit plus précise quant à ces «indications» et complétée par les «contre indications». Les établissements populaires de balnéothérapie devraient

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en outre tenir une statistique des résultats obtenus, afin de corroborer l'exactitude des «indications» et prouver les succès auxquels les traitements auront abouti. De telles statistiques ne sont établies actuellement qu'à certains endroits. En outre, les malades ne doivent être admis dans les établissements populaires de balnéothérapie que si la cure est vraiment indiquée, au moment donné, d'après le certificat du médecin traitant et les constatations du médecin de la station balnéaire.

Dans la question des améliorations à apporter aux établissements populaires de balnéothérapie, il restera à examiner si les «fonds pour indigents» (Freibettenfonds) -- généralement institués grâce à des dons privés et alimentés aussi par des particuliers -- qui existent dans la plupart de ces établissements en faveur des malades complètement indigents et non assurés contre la maladie, ne devraient pas être pourvus de moyens plus considérables pour permettre à ces malades de suivre la cure en plus grand nombre.

S'ils étaient transformés conformément à l'exposé ci-dessus, les établissements populaires pourraient recevoir au moins 50 pour cent de malades en plus et, contribuer ainsi à faire progresser considérablement la lutte contre le rhumatisme en Suisse.

Kappelons à ce propos le postulat Schirmer, déposé au Conseil national le 20 juin 1944. Ce postulat invitait le Conseil fédéral -- en liaison avec le postulat Frei du 8 juin 1944 concernant l'aménagement des stations de cure et de repos -- à examiner comment les efforts de l'association suisse des stations balnéaires, en vue de développer les stations thermales populaires, pourraient être soutenus financièrement par les mesures prises conjointement par l'initiative privée, la Confédération et les cantons, indépendamment des crédits prévus pour la création de possibilités de travail. Dans sa réponse audit postulat, le chef du département des postes et chemins de fer reconnut que nos stations thermales sont loin de satisfaire aux exigences de l'hygiène et qu'il reste encore beaucoup à faire dans le domaine de la cure balnéaire. II ajouta que, même au cas où il n'y aurait pas de crise économique et, partant, pas de chômage, le Conseil fédéral avait l'intention de développer ces établissements par l'octroi des subventions nécessaires.

Le postulat Schirmer a été
accepté pour examen, mais l'allocation de subventions à cette oeuvre, pourtant si urgente, n'est pas encore décidée.

Il existe, depuis 1945/1947 déjà, des plans et devis pour la transformation et l'agrandissement de divers établissements populaires, aux fins d'augmenter le nombre des lits et d'adapter les installations aux dernières exigences de la médecine. Ces plans ont été approuvés par la fiduciaire de la société suisse des hôteliers et la centrale fédérale des possibilités de travail.

Pour réaliser ces projets, il faudrait prévoir, d'une façon générale, un crédit de construction global de quelque 25 millions de francs, compte tenu

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du renchérissement du coût de la vie et du développement de la construction d'hôpitaux en général.

A Loèche-les-Bains, la construction d'un établissement populaire de balnéothérapie alpestre a été terminée cet été. L'établissement comprend tout d'abord 105 lits de malades (plus tard 180), ainsi que des installations répondant à toutes les exigences de la médecine, tel que le veulent l'exploitation d'un véritable hôpital moderne, le traitement clinique, les soins aux malades et les recherches. Le coût de la construction est estimé à l l millions de francs. Quelques cantons et communes ont accordé sur cette somme des prêts sans intérêt de 5,5 millions de francs au total. Sur la demande qui lui avait été faite le 4 septembre 1957, la Confédération accordait à l'association «RheumaVolksheilstätte Leukerbad», société responsable de la construction, conformément à l'arrêté du 13 mars 1958 (FF 1958,1, 702), un prêt sans intérêt de 2 750 000 francs qui a été versé suivant le degré d'avancement des travaux. Ce prêt est remboursable au plus tard au terme d'un délai de 5 ans, courant dès le moment où le dernier acompte aura été versé. Il correspond à 25 pour cent des frais totaux de construction.

Il existe à Zurzach un projet de construction d'un établissement de balnéothérapie pour paralysés et autres personnes souffrant d'infirmité motrice. On y a dégagé à nouveau une source thermale découverte il y a plus de dix ans, disparue ensuite sous des éboulis. A l'inverse de l'établissement populaire de balnéothérapie de Loèche-les-Bains, la station de Zurzach ne doit pas être aménagée en hôpital et exploitée comme tel; elle ne reçoit pas les personnes ayant besoin de soins, d'uno surveillance ou d'un traitement médical. Des problèmes de diagnostic n'y sont probablement plus qu'à peine posés.

Seules doivent être admises les personnes qui ont besoin d'un traitement consécutif à la maladie, par la gymnastique médicale (gymnastique subaquatique) ou d'une autre physiothérapie. La gymnastique et la thérapeutique par le travail, c'est-à-dire la gymnastique appliquée qui fait faire aux malades certains mouvements qui leur sont thérapeutiquement utiles, y figureront au premier plan comme méthode do traitement.

L'établissement de balnéothérapie qu'on envisage doit être, pour les handicapés physiques, une école d'entraînement
en vue de leur réadaptation professionnelle et leur réintégration future dans la vie sociale, en quelque aorte l'étape intermédiaire entre la clinique et l'établissement de réadaptation professionnelle. La phase de la maladie, qui requiert un traitement clinique proprement dit, devrait être passée dans un hôpital ou un hôpital thermal (Loèches-les-Bains), mais pas à Zurzach. Ainsi, cet établissement n'occuperait que peu d'infirmières, mais un nombre d'autant plus élevé de monitrices de gymnastique médicale spécialement formées à cette fin. Les rhumatisants et les poliomyélitiques, les victimes d'accidents, les amputés et autres handicapés physiques poursuivraient un traitement utilisant la gymnastique sous l'eau et la thérapeutique par le travail, afin de supprimer, sinon une invalidité déjà d.éclarée et l'obligation d'entourer l'infirme de soins, mais tout au moins d'empêcher l'aggravation du cas.

La réalisation de ce projet, y compris la construction de l'établissement populaire de balnéothérapie tel qu'il est prévu, coûterait environ 6 millions de francs. Nul doute qu'une telle école d'entraînement serait des plus utiles et répondrait à un besoin ; dans la lutte contre les séquelles du rhumatisme et contre l'invalidité, elle rendrait de précieux services comme intermédiaire, ainsi que nous l'avons dit, entre la clinique ou l'établissement populaire de balnéothérapie, exploité comme clinique, et les établissements de réadaptation professionnelle.

6, La dernière, mais non la moins importante, des mesures à prendre pour lutter contre le rhumatisme est l'assistance des victimes de la maladie.

Prise dans son sens le plus large, l'assistance comprend les conseils à donner aux malades au début de l'infection (prophylaxie) et l'assistance au sens propre du terme de ceux dont la santé et la situation économique sont déjà

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gravement compromises par la maladie, des invalides ou des malades menacés d'invalidité. Des mesures prophylactiques doivent être prises dans les cas où les facteurs du milieu, tels que l'humidité, le froid, les courants d'air, les lésions corporelles causées par le travail (charges trop lourdes, positions vicieuses, maintien défectueux provenant d'une activité professionnelle spéciale), etc., se révèlent comme causes primaires d'une maladie encore à ses débuts ou comme pouvant avoir une influence défavorable sur son évolution. Par des mesures d'hygiène du travail ordonnées par l'entreprise, on s'efforcera d'éliminer les influences nuisibles ou d'engager le malade à changer de lieu de travail, ce qui signifiera souvent pour lui un changement de métier. Cela ne sera souvent possible qu'après qu'il aura réappris un métier. Dans tous ces cas, les malades doivent naturellement être aussi soumis à une thérapeutique rationnelle du rhumatisme. Les mesures de prophylaxie doivent être appliquées d'entente avec le médecin traitant et le malade. Pour ce qui concerne en particulier les ménagères atteintes de rhumatisme, la question d'un changement de domicile devrait être étudiée lorsque des logements malsains, p. ex. des appartements humides, mal chauffés, rez-de-chaussée sans soleil, peuvent être considérés comme la cause de l'affection, ou que ces circonstances font obstacle à une amélioration.

Il faut s'efforcer de décharger la maîtresse de maison des travaux les plus pénibles ou lui donner la possibilité de faire une cure de bains ou simplement de repos. Ces mesures thérapeutiques (bains, traitement hospitalier) ou sociales (changement de profession et de domicile, arrêt du travail, engagement d'une aide de ménage) coûtent souvent cher, et fréquemment une aide financière doit être accordée aux malades économiquement faibles. Il ne fait pas de doute que très souvent l'incapacité de travail, l'infirmité et l'invalidité, provoquées par le rhumatisme, et toute la misère morale et les soucis financiers qui en résultent pour le malade et sa famille, ainsi que les pertes qu'il cause à l'économie du pays, pourraient être évités si les malades étaient renseignés dès le début de leur affection, conseillés par des spécialistes et confiés immédiatement aux mains d'un médecin, et si les facteurs nuisibles du milieu
pouvaient être éliminés par des mesures d'hygiène du travail, par le changement du lieu de travail ou, au besoin, par un changement de profession et, pour les ménagères, par l'abandon d'un appartement malsain ou le repos après un surmenage prolongé.

Les tâches de l'assistance en matière de rhumatisme, dans le cadre de la prophylaxie, dont nous venons de démontrer la portée et le but, doivent être confiées de préférence à des institutions privées, c'est-à-dire aux dispensaires des ligues contre le rhumatisme. Relevons, à ce propos, que la lutte contre la tuberculose, elle aussi, était menée à l'origine exclusivement par des institutions privées. Une période transitoire suivit pendant laquelle la Confédération les soutint financièrement sans base juridique particulière.

Vint pour finn- la loi, qui put s'appuyer largement sur le régime ainsi créé.

Dans la lutte contre la tuberculose, une telle marche a donné de très bons

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résultats. Aussi, apparaît-il désirable que, dans celle contre les maladies rhumatismales, le mouvement vienne d'en bas, c'est-à-dire des oeuvres d'assistance privées. L'élan devra être donné par les organismes régionaux privés ou les ligues cantonales, dans lesquels tous les milieux intéressés seront représentés : hommes de science, médecins, directeurs d'établissements populaires de balnéothérapie, représentants de caisses d'assurance-maladie et d'autorités, patrons et employés, ménagères, etc.

Les ligues cantonales ont été jusqu'ici constituées camme associations au sens des articles 60 et suivants du code civil, dans les cantons de Genève (1949), Baie (1949), Zurich (1951), et Vaud (1955). Alors que celle de Genève se préoccupe surtout de parfaire la formation des médecins et d'assurer la marche de la policlinique de rhumatologie, celles de Zurich et de Baie mettent l'assistance au premier plan. Une année déjà après sa fondation, la ligue zuricoise était en mesure d'engager une assistante formée et d'organiser un service d'assistance et de consultations, dirigé par un médecin, qui exerce son activité à Zurich, ainsi qu'à Winterthour depuis 1954, service qui ne cesse de se développer, de sorte qu'une deuxième assistante sociale a dû être engagée dans l'intervalle. Au début de l'année 1955, la ligue des deux Baie a engagé une assistante sociale commune pour la policlinique, qui dispose d'un office de consultations et pour la ligue elle-même, ce qui lui permit de mettre également sur pied un service d'assistance, qui gagne de plus en plus la faveur du public. La ligue vaudoise a aussi un but social (consultations gratuites pour les indigents) et s'efforce, comme toutes les autres ligues, de renseigner la population sur la lutte contre le rhumatisme, le danger que présente la négligence et l'importance que revêtent un diagnostic sérieux et un traitement approprié. D'autres cantons également (Saint-Qall, Tessin. et Argovie par exemple) se préoccupent de créer des ligues contre le rhumatisme, ce qui ne va toutefois pas, semble-t-il, ici et là sans difficultés. En 1953, la société des médecins du canton de Berne et ses associations de district ont créé une commission, qui a pour tâche de conseiller les malades annoncés par les médecins. Depuis l'automne 1956, la société bernoise d'assistance dee
invalides assume, tâche nouvelle, l'assistance sociale des rhumatisants du canton.

Les efforts faits sur tout le territoire de la Confédération par la « communauté de travail des organisations pour la lutte contre le rhumatisme», fondée en mai 1955, en vue de créer une association contre le rhumatisme, sur le modèle de l'association suisse contre la tuberculose, au titre d'organisation faîtière des ligues cantonales contre le rhumatisme, ont abouti à la création, en avril 1958, d'une ligue suisse contre le rhumatisme. La ligue a pour but de lutter contre le rhumatisme dans tout le pays par l'information de la population et du corps médical (cours de perfectionnement), ainsi que de mesures en faveur de la prophylaxie (examens en séries dans les écoles, les écoles de recrues, examen des apprentis, hygiène des logements et du travail) et de l'assistance (préparation et distribution d'appareils auxiliaires, formation de médecins de dispensaires et d'assistantes sociales, etc.). Dans ce cadre, elle s'occupe de coordonner l'activité des ligues cantonales, comme aussi d'organiser des campagnes communes. Enfin, elle encourage la création de nouvelles ligues régionales et cantonales.

Si le malade ne peut plus gagner sa vie ou s'il est menacé d'en arriver là dans l'immédiat, des mesures particulières d'intégration peuvent s'imposer. Ces mesures relèvent de l'assurance-invalidité. Par souci de précision, nous devons cependant poser brièvement ces questions. A ce stade de la maladie également, conseil et appui financier revêtent une toute grande importance pour le malade. Il s'agit notamment de l'orientation professionnelle, de l'apprentissage d'un métier, voire d'une réadaptation professionnelle, du placement, ainsi que de mesures spéciales d'ordre médical.

813 Une série d'institutions privées, d'utilité publique, s'occupent de l'assistance des invalides. Suivant leur sphère d'activité, elles assistent aussi les malades invalides pour cause de rhumatisme. Mentionnons également les institutions spécialisées dans l'application de mesures de réadaptation déterminées et qui en font aussi bénéficier largement les malades atteints de rhumatisme, comme c'est par exemple le cas à Baie, Appisberg et Morges.

6) A l'étranger

Comparés avec les efforts déployés dans divers autres pays pour lutter contre le rhumatisme, les nôtres, dans ce domaine, doivent être considérés comme encore très modestes dans leur ensemble.

En 1927 fut fondée la «Ligue internationnale contre le rhumatisme». C'est grâce à son activité et aux éclaircissements fournis par elle que l'attitude envers les maladies rhumatismales s'est modifiée ces dernières décennies dans la plupart des pays et que la passivité observée autrefois, fit peu à peu place à la ferme volonté de lutter méthodiquement par tous les moyens contre le rhumatisme. Presque tous les pays instituèrent des ligues, qui s'affilièrent à la ligue internationale. En 1947 fut créée entre autres une « Ligue européenne contre le rhumatisme », comme section de la ligue internationnale.

Notre pays y est représenté par la société suisse de médecine physique et do rhumatologie.

Les mesures prises en Angleterre pour soigner lea rhumatisants dans les cliniques, hôpitaux balnéaires et établissements populaires de balnéothérapie, ainsi que les installations de physio- et balnéothérapie, peuvent servir de modèles.

Aux Etats-Unis d'Amérique, un institut particulier se consacre aux recherches sur le rhumatisme et le métabolisme. On y soigne et entretient gratuitement des malades choisis uniquement sur la base de données scientifiques. Son entretien coûte à l'Etat environ 1 million et demi de dollars chaque année. Le gouvernement consacre une même somme à l'agrandissement des divisions hospitalières de physiothérapie et de réadaptation, ainsi que pour soutenir les hommes de science qui se livrent à des recherches en cette matière.

L'«American Rhumatism Association» ou société médicale de rhumatologie s'occupe très activement de la lutte contre le rhumatisme en ce sens qu'elle mène des enquêtes sur l'état des recherches et sur leurs sujets, ainsi que sur le traitement clinique et sur les problèmes sociaux que soulève cette maladie. Le résultat de ces enquêtes s'est traduit par l'élaboration d'un programme de lutte de longue durée. L'«American Rhumatism and Arthritis Foundation», organisation nationale, doit, pour réaliser ce programme, se procurer annuellement 2 millions de dollars, en majeure partie consacrés aux recherches. Les sous-sections de cette fondation correspondent à peu près à nos ligues
cantonales contre le rhumatisme. Elles s'occupent de l'information et de la propagande sur une large échelle, recueillent l'argent nécessaire et accordent des bourses à des médecins, qui ont ainsi la possibilité de parfaire leur formation, pendant 3 à 12 mois, dans des cliniques. Une grande attention est vouée à la formation complète d'assistantes sociales, de monitrices de gymnastique médicale et de personnel infirmier, dont les cliniques ont besoin. Des sommes importantes sont également consacrées à l'aménagement de divisions de physiothérapie et de réadaptation, à l'acquisition d'installations et d'appareils spéciaux, ainsi que de médicaments trop coûteux pour les indigents. Le développement et l'organisation du service d'assistance sont exemplaires.

C'est ainsi qu'il existe, par exemple, des équipes volantes, composées d'un médecin, d'une infirmière et d'un spécialiste en physiothérapie, qui visitent et soignent les invalides à domicile.

En Hollande aussi, la lutte contre le rhumatisme est bien organisée. C'est dans ce pays que fut ouvert le premier dispensaire du monde. Aujourd'hui on y trouve des centres antirhumatismaux répartis dans tout le pays. 11 s'agit de dispensaires dirigés par des médecins, souvent rattachés à des cliniques. Ici aussi des équipes mobiles vont

814 soigner les infirmes à domicile. Les centres se consacrent également aux travaux scientifiques. Il existe en outre des centres de recherches spéciaux. L'organisation hollandaise pour la lutte contre le rhumatisme s'occupe chaque année d'au moins 20 000 nouveaux malades et assiste en outre 70 000 personnes, malades déjà depuis plus d'une année. Les heureux résultats obtenus sont partout reconnus. Les dispensaires antirhumatismaux travaillent gratuitement. Il n'en coûte rien a.u malade. Toutes cea institutions ont un caractère privé. L'aide qu'apporté l'Etat se traduit essentiellement par la coordination des efforts, l'octroi de subventions et le contrôle de leur emploi judicieux. Il y a une étroite collaboration entre l'administration officielle de la santé publique et les différentes institutions privées, qui participent à la lutte contre le rhumatisme.

En Suède, au contraire, la lutte contre le rhumatisme est organisée et menée surtout par les services officiels de la santé publique. Comme la Suède connaît, depuis 1913 déjà, non seulement une assurance-vieillesse et survivants, mais encore une assurance-invalidité, l'office des assurances de l'Etat s'intéresse tout particulièrement à la lutte contre le rhumatisme, notamment comme cause d'invalidité. Cet office a donc fait construire des cliniques spéciales pour les rhumatisants et fait ouvrir des divisions pour rhumatisants dans les hôpitaux. Des dispensaires antirhumatismaux ont aussi été rattachés aux cliniques. Une société nationale pour la lutte contre les maladies rhumatismales a été fondée en 1945 et, on 1948, la société suédoise de rhumatologie, qui compte parmi ses membres des médecins et des savants. Les recherches ne sont pas non plus négligées en Suède, encouragées qu'elles sont par le versement de subsides substantiels provenant d'une fondation. Il y a aussi dans ce pays un institut de recherches doté des installations les plus perfectionnées avec une clinique pour le rhumatisme, abondamment pourvue de laboratoires et de toutes les installations modernes et disposant d'un dispensaire. Aux Pays-Bas comme en Suède, le chef d'une clinique pour le rhumatisme est en même temps chef de la division de physiothérapie de l'hôpital comme du dispensaire. La physiothérapie, en particulier Ja gymnastique médicale, constituent ici aussi la
méthode de traitement la plus importante.

II. LA GENÈSE DU PROJET DE LOI L'arrêté du Conseil fédéral du 29 juillet 1942 réglant la création de possibilités de travail pendant la crise consécutive à la guerre prévoyait déjà l'octroi de subventions de 40 pour cent en vue du renouvellement des bains. Ainsi le Conseil fédéral reconnaissait-il déjà à l'époque la nécessité de moderniser les stations balnéaires et d'allouer une aide appropriée, A vrai dire, cet arrêté répondait bien plus à des considérations économiques et de tourisme, que d'hygiène et de politique sociale.

Ainsi que nous l'avons relevé, M. Schirmer, conseiller national, déposa deux ans plus tard, le 20 juin 1944, un postulat invitant le Conseil fédéral -- en liaison avec le postulat Frei du 8 juin 1944 concernant l'amélioration des stations thermales et de repos -- à examiner comment les efforts de l'association suisse des stations balnéaires visant à développer les stations thermales populaires pourraient être soutenus financièrement par les mesures prises conjointement par l'initiative privée, la Confédération et les cantons, indépendamment des crédits prévus pour la création de possibilités de travail. En développant son postulat, M. Schirmer insistait sur les dommages considérables causés chaque année à l'économie suisse par le rhumatisme et sur l'importance accrue du traitement des séquelles de

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la poliomyélite par suite de l'accroissement constant du nombre des cas de maladie. Le postulat Schirmer fut accepté par le Conseil fédéral le 28 décembre 1944 pour examen.

Le 9 octobre 1946, M. le conseiller national Oldani déposa le postulat suivant : Le Conseil fédéral est invité à étudier si, en s'appuyant sur l'article 69 de la constitution, il ne devrait pas soumettre aux chambres un projet de loi pour la lutte contre le rhumatisme.

Cette loi devrait créer les bases pour protéger davantage la santé publique et pour augmenter les possibilités de guérison. Elle devru.it permettre de prendre toutes les mesures propres à diminuer les dépenses considérables et les pertes de revenu du travail causées par cette maladie.

M. Oldani, développant son postulat, insista lui aussi essentiellement sur le dommage considérable causé année après année à l'économie suisse par le rhumatisme et ses conséquences (frais de traitement et incapacité de travail par suite de maladie et d'infirmité). Il se fondait notamment sur l'ouvrage de Brück, dont nous avons déjà parlé. Dans sa réponse, le Chef du département de l'intérieur reconnut qu'il y avait possibilité de légiférer en vertu de l'article 69 de la constitution. II ne se prononça toutefois pas définitivement sur la question de savoir si des considérations de politique en matière de santé publique justifient ou même rendent désirable que, pour lutter contre le rhumatisme, la Confédération fasse usage du droit de légiférer que lui confère ledit article 69. Il releva que l'élaboration d'une loi sur la lutte contre le rhumatisme présenterait de sérieuses difficultés du fait de la complexité des questions d'ordre médical et social qu'elle soulève, comme aussi en raison du point de départ. Cette tâche, en effet, ne pourra être accomplie, déclara-t-il, qu'après une étude approfondie du vaste problème de la lutte contre le rhumatisme. Il y aurait lieu d'instituer une commission qui serait composée de manière à assurer l'examen approfondi de toutes les questions et de la charger d'examiner les possibilités d'élaborer une loi. C'est dans ce sens que fut accepté pour examen, le3 décembre 1946, le postulat déposé par M. Oldani.

Le 20 février 1948, le Conseil fédéral décida, sur la proposition du département de l'intérieur, d'instituer une commission pour la lutte contre le rhumatisme et de l'attacher comme commission consultative audit département, l'une de ses tâches devant consister précisément à étudier les possibilités de légiférer. D'entente avec le chef du département de l'intérieur, la commission élabora un projet de loi qu'elle soumit à ce département en février 1955.

Il fallut attendre ensuite l'introduction de la loi sur l'assurance-invalidité, ainsi que le résultat des études préliminaires entreprises en vue de la revision de la loi sur l'assurance-maladie et accidents. Pour éviter dans la mesure du possible un chevauchement de ces trois lois, le projet que la commission fédérale pour la lutte contre les maladies rhumatismales avait soumis au département de l'intérieur fut modifié sur quelques points essentiels.

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III. REMARQUES GÉNÉRALES CONCERNANT LE PROJET DE LOI Notre projet de loi doit permettre de prévenir autant que possible les maladies rhumatismales par des mesures appropriées ou tout au moins de les déceler à temps, de les soigner selon les méthodes scientifiques et, de cette manière, de mener emcacement la lutte contre le rhumatisme et même de l'intensifier. Pour y arriver, il s'agit premièrement de soutenir financièrement les recherches scientifiques, l'information de la population, la formation plus approfondie du corps médical, la construction de nouveaux centres de traitement, la transformation et la modernisation des établissements existants, de même que les consultations et l'aide aux malades.

Le but final est ainsi de prévenir, dans la mesure du possible, la maladie ou à protéger le plus grand nombre de malades contre la menace de l'invalidité et de l'incapacité de travail.

Le projet de loi est fondé sur l'article 69 de la constitution, qui autorise la Confédération à prendre, par voie législative, des mesures destinées à la lutte contre les maladies transmissibles, les maladies très répandues et les maladies particulièrement dangereuses de l'homme et des animaux. La Confédération ne peut légiférer dans ce domaine que si l'une de ces maladies présente au moins un de ces trois caractères. Les maladies rhumatismales -- nous l'avons vu -- ne sont pas transmissibles, mais elles sont extrêmement répandues. Ce fait d'abord, puis les considérations d'ordre économique qui en dépendent justifient l'adoption de la loi. Bien que le rhumatisme périphérique lui-même et, avant tout, ses formes dégénératives particulièrement fréquentes ne présentent pas un caractère menaçant pour la vie, et que l'on ne puisse parler de «danger» au sens spécifiquement médical, certaines formes de la maladie (telles la polyarthrite chronique, la coxarthose, etc.) peuvent en tout cas aussi être considérées comme «particulièrement dangereuses» au sens de l'article 69 de la constitution. D'après le langage courant, déterminant pour l'interprétation de cette disposition constitutionnelle, doivent être considérées comme «particulièrement dangereuses» non seulement les maladies pouvant mettre la vie en danger, mais encore d'autres maladies redoutables qui peuvent provoquer des infirmités chroniques ou l'invalidité, ce qui peut
avoir des conséquences graves et durables pour l'existence et la profession des personnes atteintes (limitation de la capacité de mouvement, de travail et de gain, indigence). On ne saurait ainsi nier leur caractère dangereux. Une intervention de l'État pour lutter contre ce vrai fléau est donc justifiée, non seulement en raison de son extension, mais aussi de son caractère dangereux.

On pourrait se demander pourquoi seules les maladies rhumatismales vont faire l'objet d'une réglementation fédérale et pourquoi il ne faudrait pas, on vertu du principe de l'égalité juridique des malades, instituer par une loi plus large des mesures contre d'autres maladies chroniques parti-

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culièrement dangereuses et très répandues, telles que le cancer, les affections cardio-vasculaires, la sclérose en plaques, les maladies mentales, etc. Les raisons qui justifient et imposent même une réglementation spéciale créant l'apparence d'un régime de faveur pour les rhumatisants -- sont de nature médico-sociale, mais aussi et surtout économique. La loi projetée tend non seulement à affermir la santé de la population mais aussi à réduire les pertes considérables causées chaque année à notre économie par l'incapacité de travail et l'invalidité dues aux maladies rhumatismales. Ce but répond d'ailleurs à l'idée même du postulat Oldani, qui est à la base du présent projet. Il n'y a pas d'autres maladies chroniques dont les dommages, souvent irréparables, soient si fréquents, qui soient aussi répandues que le rhumatisme et entraînent de telles pertes pour la société, n ne faut pas oublier non plus que le traitement du rhumatisme est le plus souvent fort cher, parce que la physiothérapie a besoin d'installations compliquées et coûteuses et qu'elle ne peut être appliquée que par un personnel parfaitement qualifié.

Il s'ensuit que, faute de ressources, nombre de patients ne se font pas ou pas suffisamment soigner. Enfin, le traitement dispendieux dure, à part quelques interruptions périodiques, souvent des années. Dans bien des cas aussi, il n'y a pas possibilité d'appliquer une thérapeutique appropriée, non seulement à cause des frais élevés, mais aussi parce que trop peu nombreux sont les établissements de balnéothérapie qui disposent des installations et du personnel qualifié indispensables. Nulle comparaison n'est ici possible avec d'autres maladies chroniques très répandues.

Dans ses études en vue de l'élaboration d'une loi sur le rhumatisme, la sous-commission créée au sein de la commission fédérale des maladies rhumatismales pour étudier les questions d'assurance et de législation, s'est inspirée de la loi sur la lutte contre la tuberculose. Aussi les premiers projets tendaient-ils à imposer certaines tâches de droit fédéral aux cantons.

Vu le désir exprimé par le comité de la conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires, on renonça cependant dans la suite, à imposer aux cantons des prestations ou des mesures de caractère obligatoire. Cette solution tient compte du fait que
les cantons sont en principe souverains en matière de législation sanitaire. La Confédération ne doit par conséquent s'immiscer dans les tâches et attributions des cantons qu'autant que cela est nécessaire. Pour prévenir la propagation de la tuberculose, maladie transmissible, ce droit fédéral devait imposer aux cantons l'obligation de prendre certaines mesures. S'agissant de la lutte contre le rhumatisme, il n'y a, en revanche, aucune raison majeure d'introduire dans la loi des prescriptions de caractère obligatoire. Aussi le présent projet prévoit-il simplement l'allocation de subventions aux cantons qui prennent d'euxmêmes les mesures indiquées par la loi. Les mesures et les institutions qui servent à la lutte contre le rhumatisme et sont propres à l'intensifier considérablement, bénéficieront de subventions, à condition que les cantons fassent, eux aussi, un effort financier. Les cantons, les communes et les

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institutions privées d'utilité publique se verront ainsi encouragés à prendre librement les mesures que commande une lutte efficace, le projet de loi a pris de ce fait le caractère d'une loi de subvention.

La commission fédérale des maladies rhumatismales avait également envisagé dans son projet l'octroi de subventions fédérales aux caissesmaladie reconnues qui prévoient dans leurs statuts, pour le traitement et les soins de personnes atteintes de rhumatisme, des prestations dépassant, par leur nature et leur durée, celles qui sont imposées par la loi fédérale du 13 juin 1911 sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents. La disposition insérée à ce sujet dans le projet devait avoir effet jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi sur l'assurance-maladie. Nous avons cependant renoncé à prévoir cette disposition dans notre projet.

La loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents ne fait en principe aucune différence entre les diverses maladies en ce qui concerne les subventions versées aux caisses. Les subventions fédérales sont allouées sous forme de subventions fixées par assuré et par an. Ce système de subventionnement a l'avantage d'être uniforme ; il est simple à appliquer et permet un contrôle aisé. C'est-à-dire qu'il ne crée aucune difficulté d'ordre administratif. En outre, il empêche que certaines maladies ne soient l'objet d'un régime de faveur par rapport à d'autres qui, tout aussi coûteuses, constituent une charge tout aussi lourde pour les assurés ; ceux-ci sont tous mis sur le même pied. Ces avantages disparaîtraient peu à peu si l'on adoptait pour diverses maladies des régimes spéciaux quant aux prestations et aux subventions fédérales.

Certes, un régime spécial de ce genre existe déjà sous la forme de l'assurance-tuberculose fondée sur la loi fédérale du 13 juin 1928 sur la lutte contre la tuberculose. Mais il serait faux de s'y référer car il s'agit d'un cas spécial, la communauté étant, en raison du caractère contagieux de la tuberculose, particulièrement intéressée à la lutte contre cette maladie et à son traitement.

Il y a lieu de noter aussi qu'il est relativement facile de distinguer la tuberculose des autres maladies et que les cas de tuberculose sont peu nombreux en comparaison des cas de rhumatisme. C'est pourquoi le contrôle des subventions fédérales peut
se faire de manière efficace sans trop de complications administratives. Il est, en revanche, beaucoup plus difficile de distinguer entre le rhumatisme et d'autres maladies, et les cas de rhumatisme sont bien plus nombreux que ceux de la tuberculose. On peut donc se demander s'il serait possible de contrôler de manière efficace l'allocation des subventions fédérales. De toute façon, une extension de l'appareil administratif serait inévitable.

Enfin, relevons que les travaux préparatoires de la revision de l'assurance-maladie sont en cours. Par suite de l'augmentation envisagée des prestations des caisses-maladie reconnues, les rhumatisants seront, eux aussi, plus largement protégés par l'assurance. Le surcroît de charges ainsi imposé à ces caisses doit être partiellement supporté par la Confédération,

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qui adaptera à cette fin ses prestations actuelles. La prolongation générale de la durée minimum légale des prestations pour les soins médicaux et l'indemnité journalière s'étendra également au traitement des rhumatisants.

La physiothérapie, si importante pour les rhumatisants, doit être déclarée en principe prestation obligatoire. Les rhumatisants bénéficieront ainsi en matière d'assurance-maladie de prestations considérablement accrues.

L'extension des prestations de l'assurance-maladie, prévue notamment pour les maladies de longue durée, s'appliquera d'une façon générale à toutes les maladies afin d'éviter l'inégalité de traitement que provoque entre assurés l'existence de régimes spéciaux. Il ne se justifierait pas de mettre au bénéfice de prestations étendues certains groupes seulement de personnes atteintes de maladies de longue durée, tandis que d'autres assurés souffrant d'une même maladie n'auraient droit qu'à des prestations de moindre durée ou réduites. Aussi n'est-il pas indiqué d'introduire dans l'assurance-maladie une réglementation spéciale pour les rhumatisants.

La loi d'assurance-maladie devra en principe régler les prestations pour les maladies rhumatismales dans le cadre de l'augmentation des prestations minimums pour maladies de longue durée.

Pour ces motifs, nous avons renoncé à prévoir dans notre projet des subventions fédérales spéciales pour les prestations des caisses-maladie en cas de rhumatisme.

Il fallait aussi examiner dans quelle mesure des chevauchements pourraient se produire avec la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959. Outre les prestations individuelles (mesures de réadaptation, rentes, allocations pour impotents), l'assuranee-invalidité accorde des subventions pour la construction et l'exploitation d'établissements et ateliers pour invalides, IJUe alloue en outre aux institutions d'aide privée des subventions pour couvrir les frais résultant de certaines activités en faveur des invalides (conseils et aides aux invalides, conseils à leurs proches, cours pour développer l'habileté des invalides, formation et perfectionnement du personnel enseignant et spécialisé dans l'assistance, formation et réadaptation professionnelle des invalides).

En ce qui concerne les prestations individuelles de l'assurance-invalidité, aucune possibilité de conflit
n'existe avec la loi sur le rhumatisme, celle-ci ne prévoyant pas d'allocations directes aux rhumatisants.

Des chevauchements sont cependant possibles en ce qui a trait aux subventions pour la construction et l'exploitation des établissements.

L'article 73 de la loi sur l'assurance-invalidité prévoit des subventions pour la construction, l'agrandissement et la rénovation d'établissements et d'ateliers publics ou reconnus d'utilité publique qui appliquent des mesures de réadaptation dans une proportion importante. Au sujet des conflits qui pourraient se produire avec le projet de loi sur le rhumatisme, la question est tout d'abord de savoir jusqu'à quel point les rhumatisants peuvent

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revendiquer des mesures de réadaptation de la part de l'asaurance-invalidité.

Suivant l'article 12 de la loi sur l'assurance-invalidité, l'assuré a droit aux mesures médicales qui sont nécessaires à la réadaptation professionnelle, mais n'ont pas pour objet le traitement de l'affection comme telle, et sont de nature à améliorer de façon durable et importante la capacité de gain ou à la préserver d'une diminution notable. Abstraction faite de certaines dispositions à prendre en cas de suites tardives de maladies rhumatismales (par exemple opération), les mesures médicales propres à lutter contre le rhumatisme ont généralement pour objet le traitement de l'affection comme telle. Aussi n'ont-elles aucun rapport avec les prestations de l'assuranceinvalidité. En revanche, des mesures d'ordre professionnel (orientation, reclassement, placement) s'imposeront plus fréquemment dans le cadre de l'assurance-invalidité, un changement de la place de travail ou de la profession se révélant souvent nécessaire pour maintenir ou améliorer la capacité de gain. Ces mesures toutefois ne relèvent pas en général des centres thérapeutiques spécifiques de la lutte contre le rhumatisme, mais reesortissent à l'économie privée ou aux centres de réadaptation. Comme on ne tient compte, pour déterminer les subventions de construction et d'exploitation, que des dépenses de réadaptation de l'assurance-invalidité, et seulement lorsqu'elles sont considérées comme importantes relativement à la sphère d'activité de l'institution, les chevauchements avec la loi sur le rhumatisme seront minimes.

En outre, l'article 74 de la loi sur l'assurance-invalidité dispose que des subventions peuvent être allouées aux oeuvres d'assistance aux rhumatisants, notamment pour aider les invalides et conseiller leurs proches.

Les malades qui remplissent les conditions posées en matière de réadaptation ou de rentes de l'assurance-invalidité ne représentent qu'un petit groupe comparativement à l'ensemble des rhumatisants à conseiller. C'est pourquoi il n'y aura pas lieu de s'attendre à des conflits importants entre l'assurance-invalidité et la loi sur le rhumatisme.

Pour conclure, disons qu'il n'existe que peu de chevauchements, et de peu d'importance encore, entre la loi sur l'assurance-invalidité et la loi sur le rhumatisme. On doit se demander
toutefois si, pour les éviter, il convient d'insérer une disposition spéciale dans celle-ci. La question doit être résolue par la négative. Aux ternies de l'article 75, 2e alinéa, de la loi sur l'assurance-invalidité, les subventions de l'assurance ne sont allouées que dans la mesures où les dépenses prévues aux articles 72 à 74 ne sont pas l'objet de subventions accordées en vertu d'autres lois fédérales. Cette disposition assure ainsi la coordination nécessaire.

La lutte contre le rhumatisme ne saurait en aucun cas être l'affaire exclusive de l'Etat. Elle doit être la tâche commune de la Confédération, des cantons, des communes et des oeuvres privées d'utilité publique. Ici aussi, un rôle important sera attribué à l'initiative privée, aux organisations d'utilité

821 publique. Les autorités publiques doivent soutenir leur activité au moyen de subventions. En 1946, au moment où M. le conseiller national Oldani déposait son postulat, aucune ligue cantonale contre le rhumatisme n'avait encore été créée, fait qu'avait signalé le chef du département de l'intérieur.

Depuis lors, les choses se sont développées, en ce sens que les milieux privés s'occupèrent de plus en plus du problème et c'est ainsi que furent instituées diverses ligues cantonales (Genève, Baie, Zurich, Vaud et dans un certain sens Berne). D'autres sont en voie de constitution. Une «ligue suisse contre le rhumatisme» a été fondée au titre d'organisation faîtière. Ces organisations toutes jeunes encore ont un urgent besoin d'appui financier pour pouvoir mener la lutte avec toute l'énergie et l'efficacité nécessaires.

IV. REMARQUES CONCERNANT LES DIVERS DISPOSITIONS DU PROJET Le présent projet de loi appelle les observations que voici : Titre Le titre de la loi tient compte du fait qu'elle ne prescrit pas de mesures déterminées pour la lutte contre les maladies rhumatismales, mais qu'elle prévoit simplement l'allocation de subsides fédéraux.

Préambule Ainsi que nous l'avons relevé dans le précédent chapitre, la base juridique de la loi est fournie par l'article 69 de la constitution et, pour les dispositions pénales, par l'article Gibis.

Article premier Cet article indique, sous la forme d'un principe, le but de la loi, savoir l'encouragement, par la Confédération, de la lutte contre le rhumatisme.

Les dispositions suivantes montrent comment et dans quelle mesure la Confédération interviendra. Celle-ci ne doit pas encourager n'importe quel genre de «lutte contre le rhumatisme». Elle n'encouragera que les mesures qui se sont révélées efficaces de l'avis dominant des spécialistes.

La loi concerne donc la lutte contre le rhumatisme et non pas la physiothérapie en général, ainsi que nous le verrons encore au sujet de l'article 4, 1er alinéa.

Art. 2 et 3 Ces deux articles règlent le champ d'application de la loi. Une distinction est faite entre la recherche scientifique d'une part, et toutes les autres mesures, d'autre part, lesquelles sont indiquées dans les dispositions suiFeuille fédérale. 113e année. Vol. II.

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vantes. Alors que toutes ces autres mesures ne seront encouragées qu'en tant qu'elles se rapportent aux formes de maladies rhumatismales mentionnées à l'article 3, l'activité scientifique sera encouragée dans tout le domaine de la rhumatologie sans limitations à certaines formes particulières. La lutte contre le rhumatisme doit être renforcée à sa base, au sens le plus large, au moyen de subventions pour travaux de recherche. Après un examen approfondi de l'ensemble du problème, la sous-commission médicale de la commission fédérale des maladies rhumatismales est arrivée à la conclusion qu'en l'état actuel de la science médicale il n'est pas possible de définir d'une manière scientifiquement précise, complète et incontestable le «rhumatisme». Rentre ainsi dans l'activité scientifique à subventionner en vertu de l'article 2 toute maladie qui, selon la doctrine, est apparentée par ses formes au rhumatisme au sens le plus large. Nous l'avons déjà dit, la recherche scientifique constitue la base de toute lutte efîicace, ses résultats déterminant toutes les autres mesures à prendre. Il se justifie donc entièrement de favoriser dans ce sens la recherche, qui est certainement le plus important des moyens de lutte. Au surplus, il serait à peu près impossible dans bien des cas de limiter les subventions aux recherches portant sur des maladies rhumatismales déterminées. Les problèmes qui se posent et les résultats obtenus en suite de nombreux travaux scientifiques s'étendent à divers domaines des maladies rhumatismales, ce qui rend difficile, sinon impossible, toute délimitation.

L'article 2 prévoit donc des subventions pour les travaux scientifiques ressortissant spécialement du domaine général de la rhumatologie (dépenses pour le personnel, achat de matériel), de même que pour la diffusion des connaissances ainsi acquises (frais d'impression). Peut en principe recevoir une subvention tout homme de science, Suisse ou étranger, domicilié en Suisse (art. 23 OC), qui a publié un travail, qu'il ait travaillé dans un institut spécialisé dans la recherche en matière de rhumatologie, dans une université suisse ou à titre privé. Il s'agira là soutout de recherches médicales.

Mais rien n'empêche que des subventions soient accordées aussi pour des travaux de chimie, d'économie publique, de statistique et de politique
sociale dans le domaine de la rhumatologie.

Relevons que la recherche générale dans les instituts de physiothérapie des universités du pays, ainsi que l'équipement y relatif (art. 2), ne donnent droit à la subvention que si l'activité est consacrée directement aux recherches sur le rhumatisme et son traitement.

Pour juger les travaux qui sont l'objet d'une demande de subvention, le département de l'intérieur (service de l'hygiène publique) pourra faire appel, comme organe consultatif, à la commission fédérale des maladies rhumatismales. Selon l'article 2, alinéa 2, il n'est pas accordé de subventions aux travaux scientifiques dus à des organes ou à des employés d'entreprises à but lucratif et à la diffusion des connaissances ainsi acquises.

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Le 1er alinéa de l'article 3 définit la notion des maladies rhumatismales, telle que la conçoivent les dispositions qui suivent. Les mesures pour la lutte, la recherche exceptée, ne seront ainsi subventionnées que si elles sont dirigées contre des formes de rhumatisme qui, par leur fréquence, leur évolution et leur tendance à aboutir à l'infirmité, entraînent pour l'économie publique des dommages aussi considérables que continus. Les maladies rhumatismales au sens des dispositions légales suivantes (notion juridique) ne doivent donc pas comprendre toutes les maladies appartenant au groupe du rhumatisme (notion médicale), il ne s'agit que de celles qui touchent le système moteur (rhumatisme périphérique) et qui sont, de plus, énumérées expressément à l'article 3, 1er alinéa, du projet de loi.

C'est ainsi qu'aucune des formes de rhumatisme viscéral -- les maladies rhumatismales des organes internes, en particulier des vaisseaux et du coeur -- n'est visée par les articles 4 et suivants de la loi. Ces formes ont été éliminées pour plusieurs raisons. Il est souvent très difficile, sinon impossible, de savoir si une affection cardiaque ou vasculaire est vraiment de nature rhumatismale. Les cures de bains et les différentes méthodes de physiothérapie ne sont pas appliquées dans le traitement des formes viscérales du rhumatisme. Les malades ne doivent donc pas, dans ce cas, se rendre dans certains établissements spéciaux (établissements populaires de balnéothérapie, instituts de physiothérapie, cliniques pour rhumatisants). Leur traitement est beaucoup moins compliqué. Contrairement à la thérapeutique, appliquée au rhumatisme périphérique, il n'exige pas d'installations coûteuses de bahiéo- et de physiothérapie. Il peut être suivi soit à domicile, soit dans des divisions d'hôpitaux ou des cliniques de médecine interne. On dispose d'un nombre suffisant d'installations et de moyens de combattre le rhumatisme viscéral et des mesures spéciales ne s'imposent pas en l'occurrence. Ces formes de rhumatisme ont bien moins d'importance économique que le rhumatisme périphérique.

Certaines formes de rhumatisme périphérique ne sont pas non plus visées par des dispositions qui suivent l'article 3. C'est ainsi que le rhumatisme articulaire aigu est une forme inflammatoire du rhumatisme périphérique, mais non pas une
maladie rhumatismale au sens de la loi, attendu qu'il est devenu rare, qu'il frappe surtout les jeunes gens, qu'il n'est pas chronique et que la physiothérapie ne joue pas de rôle dans son traitement.

Aussi cause-t-il des dommages d'ordre économique bien moins considérables que d'autres formes qui se manifestent dans la force de l'âge, exigent des soins longs et coûteux et entraînent souvent l'invalidité. Le rhumatisme du tissu adipeux et conjonctif sous-cutané, le rhumatisme musculaire et celui du tissu nerveux, le plus souvent formes dégénératives du rhumatisme extra-articulaire, ne sont, eux non plus, pas visés par l'article 3 ; il s'agit en effet, le plus souvent, d'aflecLiuns sans gravité exceptionnelle, qui réagissent favorablement à la thérapeutique et qui n'entraînent que très rarement des

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complications et de la gêne dans les mouvements, ne causent pas de trop longues incapacités de travail, ni d'invalidité. Ces maladies relativement bénignes ne revêtent pas non plus une importance particulière du point de vue économique, de sorte que, pour les combattre, pas n'est besoin de mesures extraordinaires à encourager par l'allocation de subsides fédéraux.

Pour ce qui concerne le caractère et les particularités des formes de maladie qui sont considérées comme rhumatismales au sens de l'article 3, 1er alinéa, de la loi, nous renvoyons à l'exposé introductif.

Il se peut qu'avec le temps, la nécessité s'imposera d'ajouter, sur la base de nouvelles connaissances scientifiques, d'autres formes de maladies rhumatismales à celles que visent les articles 4 et suivants de la loi. Pour éviter une revision par trop compliquée, il est prévu que la liste de l'article 3, 2e alinéa, pourra être complétée par le Conseil fédéral. Pour le cas où cette délégation de compétence susciterait des objections, relevons que ce n'est pas non plus, par exemple, le législateur qui décida, dans la loi sur la tuberculose, ce qu'il faut entendre par «tuberculose» et «tuberculeux», mais bien le Conseil fédéral, à l'article 1er de l'ordonnance d'exécution. La loi sur les épidémies (art. 1er, 2e al.), elle aussi, autorise le Conseil fédéral à appliquer cette loi également à d'autres maladies transmissibles particulièrement dangereuses, qu'il désigne lui-même.

Art. 4 Cet article constitue, avec l'article 2, qui concerne également les subventions, l'ossature proprement dite du projet de loi. La Confédération doit soutenir financièrement tous les efforts, toutes les mesures et institutions dont nous avons relevé, dans l'introduction, l'importance qu'ils revêtent dans une lutte efficace contre le rhumatisme. Il n'est toutefois pas question de contribuer aux frais de traitement du malade. C'est, comme jusqu'ici, à l'assurance-maladie et aux oeuvres sociales qu'il incombe d'y participer.

Pour le départ à faire entre les prestations prévues dans le présent projet et celles de la loi sur l'assurance-invalidité, nous renvoyons aux explications contenues dans le chapitre III.

L'article 4, 1er alinéa, dispose qu'en principe la Confédération ne verse des subsides qu'après avoir entendu les autorités cantonales et seulement aux conditions fixées aux alinéas suivants de cet article.

Seront ainsi seuls bénéficiaires des subventions prévues à l'article 4, 2e alinéa, les établissements créés par les cantons, par les communes, par les caisses-maladie reconnues ou leurs associations ou par les oeuvres d'assistance privée et exploitées selon le principe de l'utilité publique. Par «reconnues», on entend les caisses-maladie reconnues en vertu de la loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents et qui sont subventionnées par la Confédération. Les cantons, les communes, les caisses-maladie reconnues,

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etc., peuvent, eux aussi, être subventionnés s'ils prennent d'eux-mêmes certaines mesures conformément à l'article 4, 1er alinéa, lettre a. La réglementation prévue à l'article 4, 2e alinéa, correspond dans une large mesure à celle qui est établie par l'article 14, 2e alinéa, de la loi sur la lutte contre la tuberculose. Elle prévoit expressément que les établissements doivent être exploités selon le principe de l'utilité publique s'ils revendiquent des subventions fédérales. Aussi les personnes ou les sociétés privées qui construisent et exploitent un établissement à des fins lucratives n'ont-elles pas droit aux subventions.

Selon l'article 4, 3e alinéa, l'octroi de subventions fédérales aux communes, caisses-maladie reconnues ou à leurs associations,, ou aux oeuvres d'assistance privée d'utilité publique suppose, en règle générale, que les cantons versent des prestations au moins équivalentes. Les cantons qui doivent participer financièrement sont ceux qui sont intéressés à une institution. Si l'on exigeait en toute circonstance des cantons une participation financière égale à la subvention de la Confédération, il s'ensuivrait que, conformément à l'article 5, lettres b et c, les cantons financièrement faibles recevraient, une subvention plus élevée, de 25 à 12 pour cent, mais devraient verser des subventions proportionnellement plus considérables.

Quant aux cantons financièrement forts, ils recevraient de la Confédération des subventions moins élevées, mais ne participeraient que dans une plus faible mesure aux frais de construction et d'exploitation. Le principe de l'échelonnement des subventions fédérales d'après la capacité financière des cantons (article 5, lettres o et c) serait ainsi lettre morte. C'est pourquoi le projet prévoit la possibilité de réduire la subvention du canton dans une mesure tenant compte de sa capacité financière. Les cantons financièrement faibles recevraient ainsi de la Confédération des subventions de 12 et 25 pour cent sans avoir à en accorder eux-mêmes d'aussi élevées. Il appartiendra au Conseil fédéral de régler plus en détail ces conditions par voie d'ordonnance (art. 8).

A la dernière phrase du 3e alinéa, l'application du principe de l'octroi de subventions cantonales équivalentes est encore restreinte du fait que la Confédération peut, exceptionnellement,
imputer entièrement ou partiellement sur les subventions cantonales, ou même considérer qu'elles en tiennent Heu, les contributions versées par des tiers, c'est-à-dire des personnes physiques et morales de droit privé et public. Les communes sont également considérées comme «tiers» au sens de l'article 4, 3e alinéa. Cette disposition a été introduite pour éviter qu'un établissement hospitalier utile pour lutter contre le rhumatisme et, par conséquent, souhaitable, pour lequel des tiers auraient assuré des fonds importants, ne puisse, faute de ressources suffisantes, être construit et exploité, simplement parce que le canton ne verserait pas de subventions ot qu'ainsi la Confédération ne pourrait pas non plus en accorder. L'autorité qui accorde la subvention

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décidera dans chaque cas dans quelle mesure des contributions versées par des tiers peuvent être imputées sur celles du canton ou en tenir lieu. Si l'imputation était obligatoirement prescrite, il serait à craindre que les contributions des tiers n'aient pour résultat de rendre insuffisantes les prestations des cantons. C'est ce qu'il importe d'éviter. En versant des subventions, la Confédération entend précisément inciter les cantons à faire aussi des efforts financiers à cette fin. Pour être efficace, la lutte contre le rhumatisme exige une coopération étroite entre la Confédération, les cantons et les communes, ainsi que les organisations privées, et un effort commun. Il y a aussi possibilité que plusieurs cantons se groupent et versent en commun la contribution cantonale prévue par la loi, pour les institutions et les établissements ou pour les mesures dont il s'agit.

Une autre restriction apportée au principe établi par le 3e alinéa découle du 4e alinéa, d'après lequel les organisations qui luttent contre le rhumatisme et dont l'activité s'étend, conformément à leurs statuts, à l'ensemble du pays, peuvent recevoir des subventions également lorsque l'aide financière des cantons ou des tiers, au sens du 3e alinéa, est insuffisante ou fait défaut. Ainsi, pour obtenir une subvention, il ne suffit pas que cette activité s'étende en fait plus ou moins à l'ensemble du pays ; il faut encore qu'elle soit déclarée obligatoire par les statuts. Cette dérogation s'appliquera en premier lieu à la ligue suisse contre le rhumatisme dont l'importance sur le plan suisse ressort du but qu'elle s'est assigné et des tâches qui lui incombent, et dont nous avons déjà parlé. Il importe donc tout particulièrement de lui allouer des subventions dans l'intérêt d'une lutte efficace.

Cette réglementation particulière ne doit toutefois pas être appliquée aux établissements intercantonaux, s'est-à-dire à ceux qui sont situés dans un cantons autre que celui du siège du propriétaire. Pour tous ces établissements, les conditions fixées à l'article 4, 3e alinéa, seront probablement remplies.

En règle générale, le canton sur le territoire duquel l'organisation à laquelle l'établissement appartient a son siège accordera les subventions nécessaires.

Dans les rares cas où il n'en sera pas ainsi, elle pourra compter sur l'aide
de tiers (caisses-maladie, etc.). De toute façon, étendre aux établissements intercantonaux le régime spécial établi pour les organisations couvrant l'ensemble du pays aboutirait à favoriser injustement les cantons intéressés à ces établissements.

Informer la population au sujet des maladies rhumatismales, conseiller et aider les personnes qui en sont frappées, comme c'est prévu à l'article 4, 1er alinéa, lettre a, ce sont là les tâches essentielles des ligues contre le rhumatisme et de leurs dispensaires, qui seront pour cela subventionnés en principe par la Confédération, à condition que les cantons en fassent de même. L'aide au sens de cette disposition se traduira non par des conseils, mais des actes (interventions, notamment auprès des autorités, des employeurs, secours en cas de besoin, soins passagers, etc.). Il n'est toutefois

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pas question d'aide financière aux malades et à leurs proches, afin d'éviter le danger d'une atteinte portée à l'idée de l'assurance. Il appartiendra à l'assurance-maladie, à l'assurance-invalidité si les conditions sont remplies, ainsi qu'à l'assistance sociale, d'intervenir dans ces cas et de prêter aide.

L'expression «institutions» indique que les subventions sont accordées non seulement pour les dépenses d'exploitation des ligues, mais aussi pour la construction, l'agrandissement et l'aménagement d'institutions comme cela est prévu pour les dispensaires à l'article 13 de l'ordonnance du 11 janvier 1955/13 décembre 1957/5 juin 1959 concernant les subventions fédérales pour la lutte contre la tuberculose C 1 ). Ne sont toutefois pas visés par le projet de loi les organisations et centres qui se consacrent exclusivement à la réintégration des invalides.

La construction et l'exploitation de sanatoriums et de cliniques pour rhumatisants, etc. (art. 4, al. 1er lettre 6) ne bénéficieront de subventions que dans la mesure où ces établissements seront effectivement au service des rhumatisants. Cela signifie que la part des dépenses annuelles d'exploitation causées par le traitement d'autres patients ne donnera pas droit à une subvention. Cela veut aussi dire que, s'agissant d'une subvention accordée pour la construction, à la condition que l'établissement projeté n'accueille que des rhumatisants, il faudra, le cas échéant, rembourser un montant calculé proportionnellement à la fraction représentée par les autres malades.

La coordination indispensable entre la loi sur le rhumatisme et celle sur l'assurance-invalidité prendra une importance particulière précisément en ce qui concerne l'application de l'article 4,1er alinéa.lettres & et c, du projet, en ce que les établissements énumérés peuvent accorder leurs soins non seulement aux rhumatisants, mais aussi à différents groupes d'invalides (poliomyélite, invalides par suite d'accident notamment). Ils devront naturellement être à la disposition d'autres malades dans la mesure où ils ne seront pas occupés par des rhumatisants. Les subventions prévues dans le projet en faveur de ces établissements et institutions profiteront indirectement aussi à la lutte contre les autres maladies et séquelles d'accidents, lorsque l'application de méthodes physiothérapeutiques
aux personnes qui en sont atteintes est indiquée du point de vue médical.

Auront droit à des subventions, non pas tous les hôpitaux recevant des rhumatisants, mais seulement ceux qui ont des divisions spéciales pour ces malades. On entend par «divisions d'hôpital spéciales pour rhumatisants», au sens de l'article 4, 1er alinéa, lettre o, une division d'hôpital, de certaines dimensions, réservée en majeure partie au traitement des rhumatisants, dirigée par un médecin spécialiste en rhumatologie et disposant d'un personnel qualifié, ainsi que des installations de physiothérapie indispensables.

L'ordonnance d'exécution précisera ces exigences, qui représentent un minimum.

(!) RO 1955, 37; 1057, 1014; 1959, 549.

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Pour éviter toute équivoque, répétons à ce propos que la loi projetée a uniquement pour but la lutte contre les maladies rhumatismales et qu'elle ne vise pas à encourager la physiothérapie comme telle. Aucune disposition constitutionnelle ne le permettrait d'ailleurs. Toutefois, cette méthode de traitement est utile précisément pour lutter contre la plupart des maladies rhumatismales. Aussi convient-il de l'encourager par l'allocation des subventions que prévoit l'article 4, 1er alinéa, du projet. Ce moyen --- qui est un des plus importants pour atteindre le but proprement dit de la loi -- doit être encouragé dans la mesure de son efficacité. Nous avons déjà relevé que les établissements et installations ainsi soutenus sont également à la disposition d'autres malades.

Art. 5 Les taux de subvention fixés dans cet article pour l'information, ainsi que la construction et l'exploitation d'établissements conformément à l'article 4, 1er alinéa, lettres a à c, correspondent à ceux qui sont prévus dans la loi sur la lutte contre la tuberculose (art. 14, 1er et 2e al,, lettres a et b).

Us sont moins élevés que ceux de cette loi lorsqu'il s'agit d'oeuvres d'assistance (art. 14, 2e al., lettre c, de la loi susrappelée). Cette dernière loi permet d'allouer, pour les oeuvres d'assistance, des subventions pouvant s'élever à 33 pour cent au plus des dépenses nettes.

Comme l'aide financière accordée pour les recherches scientifiques est à la base même d'une lutte efficace contre le rhumatisme, l'article 5 prévoit un taux légal, allant jusqu'à 50 pour cent. On a renoncé à poser aux cantons la condition de verser des subventions correspondantes. Le taux de la subvention à appliquer dans chaque cas est déterminé uniquement par l'importance du travail scientifique.

Pour les organismes dont l'activité s'étend à l'ensemble du pays (art. 4, 4e al.), les subventions seront de 25 pour cent des dépenses y donnant droit.

Les dépenses donnant droit aux subventions allouées en vertu de l'article 5, lettres a, b, et d, doivent être dûment prouvées et avoir été faites dans l'intérêt de la lutte contre le rhumatisme.

A la différence des lettres a, b et d de l'article 5, où il est question des «dépenses dûment prouvées et reconnues», la lettre c parle de «dépenses nettes ». Le Conseil fédéral devra définir ces deux notions dans son ordonnance d'exécution (art. 8). Ici aussi, une réglementation telle que celle qui est prévue dans la législation fédérale sur la lutte contre la tuberculose (art. 14, 2e al., lettre 6, de la loi, et, en particulier, article 12 de l'ordonnance précitée du 11 janvier 1955/13 décembre 1957/5 juin 1959) sera la plus indiquée. Pour déterminer les «dépenses nettes», il y aura lieu par conséquent de déduire de certaines dépenses entrant en considération les recettes

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parallèles (à l'exclusion des sommes versées pour la pension dea malades par ces derniers ou par des tiers). Pour calculer la subvention, fédérale allouée pour les dépenses d'exploitation entrant en ligne de compte, il conviendra de faire la différence entre les établissements qui hospitalisent des malades et ceux qui appliquent uniquement les traitements ambulatoires. Pour la première catégorie, la subvention sera calculée sur la base des frais des jours de maladie déterminants, pour la seconde, sur la base des frais d'exploitation causés par les rhumatisants.

Art. 6 Le 1er alinéa de cet article prévoit la possibilité de la répétition des subventions de la Confédération allouées à tort.

La restitution partielle prévue au 2e alinéa correspond en revanche à la règle établie par l'article 11, 1er alinéa de l'ordonnance, concernant les subventions fédérales pour la lutte contre la tuberculose, des 11 janvier 1955/ 13 décembre11957/5 juin 1959. L'ampleur de la restitution est déterminée par la durée de l'exploitation réglementaire de l'établissement.

Art. 7 Cet article règle la prescription de l'action en restitution selon l'article 6, ainsi que son interruption et sa suspension. Les délais de prescription correspondent à ceux qui sont prévus à l'article 57, 1er alinéa, de la loi du 29 mars 1959 sur le blé.

Art. 8 L'article donne au Conseil fédéral la compétence de fixer par voie d'ordonnance les conditions auxquelles les subventions sont versées, le mode de calcul, la définition des dépenses nettes et des dépenses dûment prouvées et reconnues au sens de l'article 5, ainsi que le montant des sommes a restituer lorsqu'elles ont été perçues à tort ou qu'un établissement ou institution est soustrait complètement ou partiellement à sa destination première. Pour les «dépenses nettes», nous renvoyons au commentaires de l'article 5 (p. 49 s.). On sait que la loi sur la tuberculose accorde la même compétence au Conseil fédéral et que l'ordonnance y relative concernant les subventions a fait, des décennies durant, ses preuves. Aussi sera-t-il indiqué de s'en tenir d'une façon générale au régime établi par la législation sur la tuberculose et à la pratique suivie en matière de subventions. Les expériences faites à ce sujet sont garantes qu'il s'agira de dispositions bien adaptées à leur but.

Art. 9 Cet article contient les dispositions pénales. Du point de vue subjectif, le fait punissable visé par le 1er alinéa n'est pas identique au délit d'escro-

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querie, prévu à l'article 148, 1er alinéa, du code pénal, délit qui n'est consommé que lorsque le coupable a agi astucieusement et dans le dessein de se procurer un enrichissement. Le délit d'escroquerie, selon l'article prérappelé, n'est ainsi pas réalisé dans tous les cas où la subvention fédérale aurait été obtenue à tort. Il faut toutefois pouvoir réprimer également les actes où la qualification d'escroquerie fait partiellement défaut.

Vu la possibilité d'appliquer des dispositions pénales plus sévères en cas d'escroquerie (art. 148 CP), il se justifie de prévoir, dans les cas de l'article 9, simplement l'amende, dont le maximum est fixé à 2000 francs par l'article 106,1er alinéa, du code pénal. Si le délinquant a agi par cupidité, le juge n'est pas lié par ce maximum, selon le 2e alinéa dudit article.

Art. 10 er

Aux termes du 1 alinéa de cet article, le Conseil fédéral est chargé d'appliquer la loi et de fixer la date de son entrée en vigueur.

Le 2e alinéa contient une disposition transitoire qui appelle un commentaire.

Donner à une loi un effet rétroactif est exceptionnel. Dans sa réponse à la question Stoffel du 7 décembre 1955, le Conseil fédéral a effectivement déclaré qu'il ne serait pas indiqué d'appliquer le principe de la rétroactivité à la loi sur le rhumatisme d'une manière générale, dans le sens désiré par l'auteur de la question, en accordant des subventions également aux sanatoriums pour rhumatisants qui seraient construits avant l'entrée en vigueur de la loi.

Eu égard à la situation de l'établissement populaire de balnéothérapie de Loèche-les-Bains, nous estimons aujourd'hui qu'on pourrait mettre la loi en vigueur avec un effet rétrocatif réduit, délimité de façon précise.

La «Rheuma-Volksheilstätte Leukerbad» est une oeuvre d'utilité publique, fondée et financée par plusieurs cantons, communes et organisations, et à laquelle un prêt de 25 pour cent des frais de construction, selon devis, a été alloué par arrêté fédéral du 13 mars 1958 (1). Le message du 20 décembre 1957 ( 2 ) relève qu'après l'entrée en vigueur d'une future loi fédérale sur le rhumatisme, il conviendra d'examiner si les subventions auxquelles aura droit cet établissement sur la base de cette loi pourront être compensées par les revendications de la Confédération. On n'a pas voulu préjuger, par ledit arrêté fédéral, la question de la rétroactivité d'une future loi sur le rhumatisme. Dans la séance du Conseil national du 13 mars 1958, M. Schirmer, président et rapporteur de la commission chargée d'examiner le projet d'arrêté fédéral, a invité le Conseil fédéral, au nom de (») FF 1958, I, V02.

(2) FF 1957, II, 1181.

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la commission, à mettre la loi sur le rhumatisme en vigueur avec effet rétroactif. Le Conseil national adopta l'arrêté sans opposition et aucune voix ne s'éleva contre le voeu de la commission. Il a été tenu compte de ce voeu, maintenant concrétisé à l'article 10, 2e alinéa du projet.

La rétroactivité n'est prévue dans la loi qu'en ce qui concerne les subventions de construction selon l'article 4,1er alinéa, lettre 6, et l'article 5, lettre b, et seulement dans les cas où sont remplies les conditions de l'article 4, 1er alinéa (consultation des autorités cantonales), 2e et 3e alinéas (participation financière correspondante des cantons intéressés). Autres conditions, le département fédéral de l'intérieur doit avoir approuvé les plans et devis avant le commencement des travaux et approuvé le compte final après leur exécution. Il ne s'agit pas là simplement d'une prescription d'ordre ; elle a un caractère obligatoire. Ledit département n'approuvera les plans et devis que lorsque le service fédéral de l'hygiène publique les aura examinés du point de vue médical, la direction des constructions fédérales, du point de vue technique.

Pas n'est besoin de fixer un délai pour l'effet rétroactif, attendu qu'avant le prêt accordé à la société «Rheuma-Volksheilstätte Leukerbad», le département de l'intérieur n'avait approuvé aucun plan de construction et devis pour les établissements prévus à l'article 4, 1er alinéa, lettre 6.

V. LES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES DE LA LOI Afin de se faire une idée relativement claire des conséquences financières qu'entraîneraient l'application de la loi, on essayera ci-après de calculer le montant probable des diverses catégories de subventions fédérales qui seront versées annuellement pour les dépenses occasionnées par les mesures, institutions et établissements (art. 2 et 4, 1er alinéa, du projet), dépenses qui devront être subventionnées au titre de la loi. Pour cela, il faut se fonder sur l'état de l'ensemble des différentes institutions déjà existantes (en premier lieu les dispensaires et les établissements au sens de l'article 4, 1er alinéa, lettres a et 6) et tenir compte de l'effort plus grand qui sera fait au cours des prochaines années, comme le législateur le désire et y encourage, dans tous les domaines que la loi touchera.

1. Recherches scientifiques et diffusion des connaissances ainsi acquises Si l'on considère les travaux exécutés au cours des dernières années dans le domaine de la recherche scientifique en matière de rhumatisme, il y a lieu de constater qu'une moyenne de 87 000 francs en chiffre rond a été consacrée chaque année à des recherches scientifiques par l'institut univer-

832

sitaire de physiothérapie de Zurich et l'institut de physiatrie de l'hôpital cantonal de Genève (52 000 francs à Zurich et 35 000 francs à Genève). D'importants travaux de recherche sont également exécutés depuis des années à la policlinique médicale et à l'institut pathologique de l'université de Genève. Les dépenses annuelles consécutives aux recherches sur le rhumatisme entreprises dans les universités de Baie, Berne et Lausanne peuvent être estimées à 20 000 francs environ pour chacune d'elles. Ces sommes comprennent les frais de publication. Calculée sur la somme globale de 150 000 francs en chiffre rond, la subvention fédérale (jusqu'à 50 pour cent) s'élèverait à une somme de 50 000 à 75 000 francs. Les subventions envisagées ne doivent pas avoir pour conséquence de réduire les dépenses des cantons, mais de faciliter la mise en train de recherches de plus grande envergure, qui n'ont pas été entreprises jusqu'ici faute de ressources suffisantes. Il est également prévu d'installer un centre de recherches dans l'établissement populaire de balnéothérapie de Loèche-les-Bains, dont la construction touche à sa fin. Sans tenir compte de ce centre, on peut admettre que les dépenses générales consacrées à la recherches seront dans un avenir prochain de 210 000 à 250 000 francs, ce qui augmentera d'autant les prestations de la Confédération (70 000 à 125 000 francs).

2. Information de la population sur le rhumatisme

Cette information est assurée, dans l'essentiel, par les ligues cantonales.

Les dépenses qu'elle leur occasionne figurent par conséquent dans leurs comptes (voir chiffre 3). Dans la mesure où d'autres institutions (sociétés de samaritains, caisses-maladie, etc.) s'en sont occupées, les frais n'ont pas dû excéder 2000 francs par année. Il s'agit en particulier de dépenses pour conférences, brochures ou autres écrits et films.

3. Conseils et aide aux malades

Cette tâche incombe aux ligues cantonales, qui s'occupent également de l'information du public (voir chiffre 2). Leurs dépenses donnent droit à subvention, à l'exclusion de celles qui résultent des secours financiers accordés aux malades (contribution aux frais de cure) et à leurs familles, pour lesquels la Confédération n'alloue pas de subvention. Les dépenses des ligues zuricoise, bâloise, genevoise et vaudoise, de la société bernoise d'assistance des invalides, qui s'est consacrée depuis 1956 à une nouvelle tâche, l'assistance des rhumatisants dans le canton, ainsi que celles de la ligue suisse contre le rhumatisme, se sont élevées à 130 000 francs en chiffre rond en 1959, dans la mesure où elles donneraient droit à une subvention d'après le projet de loi. Ces dépenses iront probablement chaque année en augmentant. A vrai dire, d'autres institutions, telles que le service ortho-

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pédique de l'établissement de Balgrist, «Pro Infirmis», etc., prodiguent aussi occasionnellement des conseils aux rhumatisants et les aident. Les dépenses y relatives, donnant droit à une subvention d'après le présent projet, ne sont que de peu d'importance, attendu que ces institutions se bornent dans la majeure partie des cas à conseiller des rhumatisants déjà invalides et s'intéressent avant tout à des poliomyélitiques et à un grand nombre d'autres handicapés. L'assurance-invalidité contribuera aux frais en question. En outre, ces institutions prennent des mesures allant plus loin que l'aide ou de simples conseils (réintégration). Là où il s'agit de mesures de réintégration de l'assurance-invalidité, les dites institutions verront en principe leurs dépenses intégralement remboursées par l'assurance.

Les dépenses que les organisations d'assistance consacrent chaque année à l'information, à l'aide et aux conseils, qui se sont élevées à quelque 130 000 francs en 1959, auraient entraîné une contribution de la Confédération de 30 000 francs (20 à 25 pour cent conformément à l'article 5, lettres 5 et d, du projet). Ici aussi, il faut prévoir, au cours de prochaines années, une augmentation considérable des dépenses, premièrement parce que les institutions intensifieront certainement leurs efforts dès qu'elles verront la possibilité de disposer des ressources qui leur manquent aujourd'hui, secondement, parce qu'il faudra, dès l'entrée en vigueur de la loi, s'attendre à la création d'un certain nombre de nouvelles ligues et dispensoires cantonaux, évolution qui serait très souhaitable dans l'intérêt d'une lutte efficace contre le rhumatisme. H est donc probable que, dans un temps plus ou moins rapproché, les dépenses donnant droit à une subvention doubleront.

4. Transformation d'établissements existants et construction do nouveaux établissements Ainsi que nous l'avons exposé, les frais présumés d'agrandissement et de transformation des établissement populaires de balnéothérapie sont de l'ordre de 25 millions de francs. Il en coûtera 17 pour construire les établissements projetés de Loèches-le-Bains et Zurzach (p. 26 s). La contribution de la Confédération serait par conséquent de 8,5 à 10,5 millions de francs (20 à 25 %), somme qui serait toutefois répartie sur une période de 5 ans environ, nécessitant
ainsi ces prochaines années un subside de construction de 2 millions en moyenne annuellement. A noter encore que la construction et la transformation ne feront l'objet d'un subside que dans la mesure où les établissements se consacrent effectivement au traitement des rhumatisants. La plupart des établissements populaires de balnéothérapie reçoivent cependant, outre les rhumatisants, d'autres malades (séquelles de la poliomyélite, maladies de la peau, suites d'accidents, etc.). Les subsides de construction seront donc réduits en conséquence. L'établissement

834

projeté de Zurzach devant servir avant tout d'école préparatoire à la réadaptation professionnelle et sociale, il se peut que les mesures d'ordre médical qui y seront appliquées soient mises en compte, partiellement du moins, de l'assurance-invalidité ; il n'y aura ainsi pas de subsides ou que des subsides relativement peu élevés, alloués en vertu de la loi sur le rhumatisme. Compte tenu de toutes ces données, nous arrivons à un total de 36 millions de francs au plus à prévoir pour la construction et la transformation, de sorte que la subvention de la Confédération ne dépassera pas 8 millions de francs en chiffre rond (1 600 000 francs annuellement, les travaux étant répartis sur 5 ans).

Une fois réalisé le programme actuel de construction, l'allégement sera considérable ; il n'y aura en effet plus lieu de s'attendre à la construction d'autres établissements semblables dans les temps immédiats. En revanche, il faudra prévoir l'amménagement d'instituts de physiothérapie et de cliniques pour rhumatisants sur le modèle de ceux de l'hôpital cantonal de Zurich. Il n'est pas possible de fournir aujourd'hui déjà des précisions à ce sujet. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que le canton de Genève fera construire ces prochaines années un hôpital spécial pour le traitement des personnes atteintes de maladies chroniques. Ledit hôpital comprendra un nouvel institut de physiothérapie, dont le coût est estimé à 960 000 francs, sur lesquels 648 000 francs, correspondant à la population de malades atteints de rhumatisme qui y seront probablement traités, entreront en considération pour une subvention fédérale (130000 fr. en chiffre rond).

5. Frais d'exploitation des établissements mentionnés à l'article 4, l«r alinéa, lettre b En 1955, les établissements populaires suisses de balnéothérapie, les instituts de physiothérapie de Genève et de Zurich (y compris la clinique pour rhumatisants), ainsi que les établissements orthopédiques de Balgrist et Lausanne, ont consacré 1 750 000 francs de leurs frais d'exploitation au traitement des rhumatisants. Sur cette somme globale, la Confédération devrait verser une subvention de 10 à 12 pour cent, c'est-à-dire de 175 000 à 210 000 francs au total. La modernisation des établissements et la construction de nouveaux établissements entraîneront, bien entendu, une augmentation des frais d'exploitation correspondants.

6. Conclusion D'après ce que nous venons d'exposer sous chiffres 1 à 5 et compte tenu des circonstances présentes, les prestations annuelles moyennes de la Confédération seront probablement les suivantes :

835 Fr.

Tt.

Recherche scientifique

environ

65 000.-- plus tard 70.000 à 125.000.--

Information de la population, conseils et aide

environ

30 000.-- plus tard 60 000.-

Contribution aux frais de construction et de transformation

environ

Contribution aux frais d'exploitation

environ

Charge de la Confédération, tout d'abord annuelle

environ

1 600 000.-- pendant 5 ans, puis réduction considérable 200 000.-- 1 895 000.-

Pour apprécier les dépenses, plus élevées, auxquelles on doit s'attendre pour les années à venir, il faut considérer que l'engagement de moyens financiers nouveaux et accrus -- à longue échéance --- devrait se traduire en fin de compte par une diminution, des maladies rhumatismales et, partant, des charges imposées à la Confédération par des suvbentions et des dommages d'ordre économique.

Nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet de loi ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 10 octobre 1961.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Wahlen 13721

Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

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(Projet)

LOI FÉDÉRALE concernant

l'allocation de subventions pour la lutte contre les maladies rhumatismales

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu les articles 69 et 64ois de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 10 octobre 1961, arrête:

Principe

Champ d'application 1. Recherche

2. Autres mesures

Article premier La Confédération encourage la lutte contre le rhumatisme.

Art. 2 La Confédération subventionne les travaux scientifiques dans tout le domaine de la rhumatologie et la diffusion des connaissances ainsi acquises.

2 II n'est pas accordé de subventions aux entreprises à but lucratif.

1

Art. 3 Sont réputées maladies rhumatismales au sens des dispositions ci-après : a. La polyarthrite chronique; 6. La spondylarthrite ankylosante ; c. L'arthrose et la polyarthrose ; d. La Spondylose et la spondylarthrose ; e. La périarthrite, la périarthrose ; /. La tendopériostite, la tendinose.

1

2 Le Conseil fédéral est autorisé à compléter cette liste, en se fondant sur de nouvelles connaissances scientifiques, par l'adjonction d'autres maladies appartenant au groupe du rhumatisme, pour autant qu'elles concernent le système moteur.

837

Art. 4 Après avoir entendu les autorités cantonales compétentes, la Confédération alloue, aux conditions énumérées ci-après, des sub·v entions a. Pour les mesures et institutions dont le but est d'éclairer la population au sujet des maladies rhumatismales, de leur caractère, des dangers qu'elles présentent et de leur prévention, ainsi que de conseiller et d'aider les personnes atteintes d'une de ces maladies; 6. Pour la construction, la transformation et l'aménagement d'établissements pour rhumatisants, de cliniques et de divisions d'hôpitaux spéciales de même nature, de policliniques et d'instituts de physiothérapie, ainsi que d'établissements populaires de balnéothérapie, dans la mesure où ils consacrent leur activité au traitement des personnes atteintes de maladies rhumatismales ; c. Pour les dépenses annuelles d'exploitation des établissements et des instituts énumérés sous lettre b, dans la mesure où ils consacrent leur activité au traitement des personnes atteintes d'une maladie rhumatismale.

2 Les subventions fédérales ne sont versées qu'aux établissements créés par les cantons, les communes, les caisses-maladie reconnues ou leurs associations, ou par les oeuvres d'assistance privées, et exploités selon le principe de l'utilité publique. La même règle est applicable pour les mesures et institutions visées par la lettre a.

3 L'octroi de subventions fédérales aux communes, caissesmaladie reconnues ou à leurs associations, ou aux oeuvres d'assistance privée suppose, en règle générale, que les cantons versent des contributions au moins équivalentes. Ces contributions peuvent exceptionnellement être réduites suivant la capacité financière des cantons.

Si des raisons spéciales le justifient, les contributions versées par les tiers pourront être imputées entièrement ou partiellement sur les prestations des cantons ou les remplacer.

4 La Confédération peut allouer des subventions aux organismes qui luttent contre le rhumatisme, sans prestations correspondantes des cantons ou de tiers, si, conformément à leurs statuts, leur activité s'étend à l'ensemble du pays.

1

Art. 5 La Confédération alloue les subventions suivantes: a. Pour les travaux scientifiques et la diffusion des connaissances ainsi acquises, prévus à l'article 2, jusqu'à 50 pour cent des dépenses dûment prouvées et reconnues; Feuille fédérale. 113« année. Vol. II.

58

Subventions fédérales

Taux dea subventions

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6. Pour les mesures, les institutions et les établissements prévus par l'article 4,1er alinéa, lettres a et 6,20 à 25 pour cent des dépenses dûment prouvées et reconnues; c. Pour les dépenses d'exploitation annuelles prévues par l'article 4, 1er alinéa, lettre c, 10 à 12 pour cent des dépenses nettes ; d. Aux organisations prévues par l'article 4, 4e alinéa, 25 pour cent des dépenses dûment prouvées et reconnues.

Restitution

Prescription

Dispositions d'exécution

Disposition pénale

Art. 6 La restitution d'allocations peut être requise si elles ont été accordées à tort.

a Si un établissement, au sens de l'article 4,1er alinéa, lettre b, est soustrait à sa destination avant un délai de vingt ans à compter du moment où il a été subventionné par la Confédération, une partie de la subvention devra être restituée.

1

Art. 7 L'action en restitution prévue par l'article 6, 1er et 2e alinéas, se prescrit par cinq ans à compter du jour où les organes compétents ont eu connaissance de leur droit de l'exercer et par dix ans au plus tard dès la naissance de ce droit. Si la revendication dérive d'un acte délictueux pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, c'est ce dernier qui est applicable.

z Tout acte de recouvrement interrompt la prescription ; elle est suspendue tant que le débiteur ne peut pas être poursuivi en Suisse.

1

Art. 8 Le Conseil fédéral règle par voie d'ordonnance les conditions auxquelles le versement des subventions fédérales est subordonné, et leur calcul, ce qu'il faut entendre par dépenses nettes et par dépenses reconnues au sens de l'article 5, ainsi que le calcul des sommes à restituer.

Art. 9 Celui qui obtient ou tente d'obtenir une subvention fédérale pour lui-même ou pour des tiers, en donnant de fausses indications ou en celant des faits, sera puni de l'amende.

2 La poursuite pénale fondée sur les dispositions spéciales du code pénal est réservée dans tous les cas.

3 La poursuite pénale et le jugement incombent aux cantons.

1

839

Art. 10 Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution de la présente loi. H fixe la date de son entrée en vigueur.

2 La subvention prévue par l'article 5, lettre b, peut être versée aux établissements visés par l'article 4, 1er alinéa, lettre 6, dont la construction, la transformation ou l'aménagement aura été entrepris avant l'entrée en vigueur de la présente loi, si les conditions de l'article 4 sont remplies, et si le département fédéral de l'intérieur a approuvé les plans et devis avant le début des travaux, ainsi que le décompte final.

1

13721

Dispositions flaales

ot transitoire B

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur un projet de loi concernant l'allocation de subventions pour la lutte contre les maladies rhumatismales (Du 10 octobre 1961)

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