1334

# S T #

8257

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi concernant la protection des noms et emblèmes de l'Organisation des Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales (Du 5 juin 1961)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet de loi concernant la protection des noms et emblèmes de l'Organisation des Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales.

I. REMARQUES GÉNÉRALES A la suite de la création de l'Organisation des Nations Unies, un office européen fut institué en 1946, avec siège à Genève. Dans le courant de 1957, le directeur de l'office européen a demandé au département politique fédéral que le gouvernement suisse veuille bien étudier les mesures qu'il pourrait prendre pour assurer la protection nécessaire à l'emblème, au nom et aux initiales de cette institution. Il jugeait souhaitable que la protection sollicitée soit semblable à celle dont le nom et l'emblème de l'Organisation mondiale de la santé bénéficient actuellement en vertu de la loi fédérale du 25 mars 1954 (RO 1954, 1323). Sa requête était fondée sur l'importance croissante que présentent en Suisse les activités de l'office et aussi sur l'intérêt toujours plus grand que le public porte à l'Organisation, parfois à des fins commerciales.

L'assemblée générale des Nations Unies a adopté le 7 décembre 1946 la résolution 92 (1) qui a trait à la protection de l'emblème, du nom, du sceau officiel et des initiales des Nations Unies. La Suisse ne faisant pas partie de l'Organisation des Nations Unies, cette résolution n'a aucune force obligatoire pour notre pays,

1335 En consentant à accueillir le siège européen de cette organisation, la Suisse a cependant accepté implicitement de prendre toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement de l'institution sur son territoire. Au nombre des obligations découlant pour la Suisse de la présence chez elle de l'office européen, on peut, semble-t-il, compter celle de protéger expressément le nom et l'emblème de l'Organisation des Nations Unies contre leur emploi par des tiers non autorisés.

Outre l'Organisation des Nations Unies, d'autres organisations intergouvemementales nous ont déjà saisis d'une requête tendant à obtenir en Suisse la protection de leurs attributs personnels; ce sont l'Organisation internationale du travail, qui a son siège à Genève et dont notre pays fait partie depuis qu'il est devenu membre de la Société des Nations, soit depuis le 16 mai 1920, et l'agence internationale de l'énergie atomique, dont le siège est à Vienne.

La convention d'Union de Paris pour la protection de la propriété industrielle a été revisée à Lisbonne en 1958. Nous vous demandons par un message distinct d'approuver ce nouveau texte qui contient, en particulier, au 1er alinéa de son article 6ter, une nouvelle lettre b de cette teneur: Les dispositions figurant sous la lettre a ci-dessus s'appliquent également aux armoiries, drapeaux et autres emblèmes, sigles ou dénominations des organisations internationales intergouvernementales dont un ou plusieurs pays de l'Union sont membres, à l'exception des armoiries, drapeaux et autres emblèmes, sigles ou dénominations qui ont déjà fait l'objet d'accords internationaux en vigueur destinés à assurer leur protection.

!>'autre part, l'article 17 revisé à Lisbonne est rédigé comme suit: Tout pays partio à la présente convention s'engage à adopter, conformément à sa constitution, les mesures nécessaires pour assurer l'application de cette convention.

Il est entendu qu'au moment du dépôt d'un instrument de ratification ou d'adhésion au nom d'un pays, ce pays sera en mesure, conformément à sa législation interne, de donner effet aux dispositions de cette convention.

La ratification du texte conventionnel revisé exige par conséquent que notre législation soit dotée des dispositions nécessaires à l'exécution de l'article Qter, 1er alinéa, lettre b, cité plus haut. Nous proposons que la protection des noms et emblèmes de toutes les organisations intergouvernementales visées par la disposition conventionnelle soit réglée dans un acte législatif unique. Une autre solution consisterait à prévoir une loi distincte pour chaque organisation sollicitant la protection de ses noms et emblèmes.

Cependant, la solution préconisée présente des avantages certains. L'appareil législatif n'est mis en mouvement qu'une seule fois ; on évite ainsi une prolifération indésirable de textes légaux concernant une même matière et leur dispersion dans le Recueil des lois. Le nombre des organisations en droit de solliciter la protection conventionnelle de leurs signes est considérable, puisqu'il comprend toutes les organisations «dont un ou plusieurs pays de

1336 l'Union sont membres». En vertu de l'article 17 de la convention, nous n'avons cependant pas la faculté de circonscrire la protection aux organisations de notre choix, par exemple à celles dont la Suisse est membre. Ce nombre se trouve néanmoins limité à certains égards, en ce sens que les organisations internationales à caractère privé et les organisations intergouvernementales dont aucun pays unioniste n'est membre ne rentrent pas dans le champ d'application de l'article 6 ter.

Notre projet de loi vise donc toutes les organisations intergouvernementales qui peuvent s'autoriser du texte revisé de la convention pour faire protéger leurs signes dans les pays de l'Union. Nous avons toutefois réparti ces organisations en trois catégories distinctes. Nous avons jugé opportun de donner une priorité de rang à l'Organisation des Nations Unies en lui consacrant nommément l'article premier. La prééminence accordée aux Nations Unies nous a paru justifier de disjoindre des autres organisations intergouvernementales celles qui lui sont liées organiquement en vertu de l'article 57 de la charte de San Francisco, sous le nom d'« institutions spécialisées des Nations Unies », ainsi que les autres organisations qui leur sont assimilées. L'article 2 leur est réservé. Enfin, l'article 3 concerne toutes les autres organisations intergouvemementales dont «un ou plusieurs pays de l'Union sont membre».

A son 4e alinéa, l'article 6ter de la convention de Paris revisée à Londres -- qui était jusqu'ici le texte en vigueur pour la Suisse --- offre la faculté aux Etats de formuler des «objections» éventuelles à l'encontre de signes que d'autres Etats de l'Union de Paris entendent faire protéger au titre d'armoirie, drapeau ou autre emblème d'Etat. Dans le passé, l'administration fédérale, plus précisément le bureau de la propriété intellectuelle, a fait plusieurs fois usage de cette possibilité d'exclure des signes de la protection en Suisse, par exemple parce qu'ils étaient constitués par de simples figures géométriques ou par les armoiries personnelles de familles régnantes. Lors de la r e vision de Lisbonne, la faculté de présenter des «objections» a été étendue aux signes des organisations intergouvernementales. Nous nous sommes demandé s'il conviendrait d'introduire dans le présent projet de loi un article qui
désigne l'autorité habilitée à présenter les «objections» et qui fixe la procédure à suivre dans ce cas. Or, depuis que cette faculté existe, soit depuis que la convention de Paris a été revisée à La Haye en 1925, l'absence d'une disposition de cette nature dans la législation suisse n'a jamais été ressentie comme une lacune qu'il faudrait combler à la première occasion. Nous ne pensons dès lors pas qu'il soit nécessaire d'insérer dans notre projet de loi une prescription spéciale sanctionnant une pratique déjà ancienne et qui n'a jamais soulevé de problèmes.

Nous devons faire ici une observation qui touche à la fois les articles 1er, 2 et 3. Il s'agit de la protection accordée contre les imitations aux aignee des trois catégories d'organisations. Alors que l'article 6 ter, 1er alinéa, de la

1337 convention de Paria, qui est le point de départ du présent projet de loi, interdit la reproduction telle quelle des attributs des organisations ainsi que les imitations «au point de vue héraldique» (la lettre a de la disposition étant déclarée applicable également à ces organisations), la loi projetée prohibe toutes imitations des signes protégés. Lors de la conférence de Lisbonne, la proposition avait été faite de biffer la restriction «au point de vue héraldique» qui enlève à l'interdiction frappant les imitations une bonne partie de son. efficacité. Par suite de l'opposition d'un seul Etat, cette proposition n'aboutit pas; le résultat du vote montre toutefois que cette limitation est jugée inopportune par la plus grande partie des Etats unionistes et qu'ils ne la considèrent pas comme imperative. En interdisant toute imitation, qu'elle soit ou non «héraldique», nous avons voulu prévenir les manoeuvres de ceux qui se borneraient à apporter aux signes protégés une modification insignifiante mais néanmoins suffisante pour qu'il n'y ait pas d'imitation «au point de vue héraldique». C'est aux autorités judiciaires compétentes pour poursuivre les infractions à la présente loi qu'il incombera de décider, dans chaque cas particulier, s'il y a ou non imitation. L'interdiction d'imiter les signes légalement protégés se retrouve dans les autres lois de même nature, notamment dans la loi du 26 septembre 1890 sur les marques de fabrique et de commerce (art. 24, lettre a), la loi du 5 juin 1931 concernant la protection des armoiries publiques et d'autres signes publics (art. 1er, 2, 4, 5, 6, 10, 11), la loi du 25 mars 1954 concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé (art. 5) et la loi du 25 mars 1954 concernant la protection de l'emblème et du nom de la Croix-Rouge (art. 8).

Au sujet de la terminologie adoptée dans notre projet, il y a lieu de relever ce qui suit: Aux articles 1er, 2, 3, 7, 10 et 11, le terme général «signe» se rapporte aussi bien aux noms et sigles des organisations (ce sont d'habitude leurs initiales) qu'à leurs «armoiries, drapeaux, et autres emblèmes» (cette énumération figure à l'article 6ter de la convention revisée) ; ce terme est employé pour éviter une répétition trop fréquente de cette énumération.

II. REMARQUES CONCERNANT LES
DIFFÉRENTES DISPOSITIONS Préambule, -- Le préambule du projet de loi contient une référence aux articles 64 et 64ôi« de la constitution. S'agissant avant tout d'une loi pénale, le renvoi à l'article 64 bis se justifie sans autre commentaire. Quant à l'article 64, il y figure parce que l'interdiction d'emploi des signes des organisations visées par les articles 1er, 2 et 3, de même que l'interdiction de les inscrire au registre du commerce, de les déposer comme marques de fabrique ou de commerce et de les enregistrer comme dessins et modèles industriels (art. 6) ont des répercussions dans le domaine du droit civil.

Feuille fédérale. 113e année. Vol. I.

95

1338 Article premier. -- Comme nous l'avons dit plus haut, la présente loi reconnaît à l'Organisation des Nations Unies, par rapport aux autres organisations intéressées, une situation quelque peu privilégiée. D'une part, la protection prendra effet pour elle dès l'entrée en vigueur de la loi. A la même date, ses signes seront publiés dans la Feuille fédérale conformément à l'article 4 du projet. D'autre part, l'organisation n'aura pas besoin de transmettre la liste des signes à protéger aux autorités suisses par le truchement du bureau international, comme le prescrit l'article 6ter, 3e alinéa, lettre b de la convention revisée, mais elle pourra nous la communiquer directement.

Toujours à cause de la prééminence accordée à cette organisation, l'interdiction d'utiliser son nom en toutes lettres s'étend à l'emploi dans n'importe quelle langue, alors que pour les noms des autres organisations intergouvernementales la protection est limitée à leur emploi dans les langues officielles suisses et en anglais. Pour les sigles, l'interdiction d'emploi est limitée aux langues officielles et anglaise, c'est-à-dire aux langues dans lesquelles les sigles de l'organisation sont le plus souvent utilisés. Il n'existe actuellement pas de sigle en langue allemande.

La résolution 92 (1) adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies le 7 décembre 1946 prévoit que le secrétaire général de l'Organisation a la compétence d'autoriser l'emploi de l'emblème, du sceau officiel, du nom et des initiales de celle-ci. L'autorisation est accordée, selon le directeur de l'office européen, seulement lorsque les demandes sont faites en vue de favoriser la réalisation des fins et idéaux des Nations Unies ou lorsqu'il s'agit de réunions tenues on l'honneur des Nations Uniee par des groupements religieux, culturels ou d'éducation.

Article 2. -- La disposition s'applique aux organisations intergouvernementales qui ont reçu le statut d'institutions spécialisées des Nations Unies et celles qui, sans porter cette appellation, sont reliées organiquement aus Nations Unies.

Appartiennent actuellement aux institutions spécialisées: -- l'Organisation internationale du travail; ·-- l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture; -- l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture; --
l'Organisation de l'aviation civile internationale ; -- la banque internationale pour la reconstruction et le développement; -- le Fonds monétaire international; -- l'Union poetale universelle ; -- l'Organisation mondiale de la eanté;

-- l'Union internationale des télécommunications;

1339 -- l'Organisation météorologique mondiale; l'Organisation intergouvemementale consultative de 1» navigation maritime; -- la société financière internationale.

La Suisse est membre de ces institutions, sauf de la banque internationale pour la reconstruction et le développement, du Fonds monétaire international et de la société financière internationale. Fait pour le moment partie des «autres organisations intergouvernementales reliées aux Nations Unies» l'agence internationale de l'énergie atomique, assimilée aux institutions spécialisées des Nations Unies en vertu de l'accord conclu avec ces dernières et de l'article XVI de ses statuts. La Suisse en est également membre.

A l'exception de l'Organisation mondiale de la santé, qui se trouve dans une situation particulière parce qu'elle est déjà protégée dans son emblème et son nom par une loi fédérale de 1954 (voir art. 11 du projet), les institutions rattachées aux Nations Unies ne seront pas protégées globalement dès l'entrée en vigueur de la loi. La protection débutera pour chacune d'elles séparément, lorsque deux conditions auront été remplies: D'abord, l'organisation devra, conformément à l'article Qter, 3e alinéa, lettre b, de la convention de Paris revisée à Lisbonne, communiquer à la Suisse en tant que pays unioniste, par l'intermédiaire du bureau de l'Union internationale pour la protection de la propriété industrielle, la liste des noms, sigles et emblèmes qu'elle entend faire protéger dans les pays unionistes. Ensuite, cette liste devra, pour chaque organisation, être publiée dans la, Feuille fédérale, comme le prévoit l'article 4 du projet de loi. C'est à partir du jour de cette publication que seront protégés les noms, sigles et emblèmes de l'organisation intéressée. Les noms et sigles de ces organisations, comme de celles qui sont visées par l'article 3, seront protégés contre leur emploi par les tiers dans les langues officielles suisses et en anglais. Nous avons renoncé à une interdiction d'emploi dans d'autres langues qu'il aurait été difficile de déterminer sans tomber dans l'arbitraire. Il nous a paru d'ailleurs peu probable que les noms de ces organisations, utilisés en une autre langue, soient compris dans notre pays et qu'un risque de confusion au préjudice de l'organisation s'y produise.

Article 3. -- La disposition vise
la troisième catégorie d'organisations intergouvemementales, c'est-à-dire les organisations dont il suffit qu'un pays de l'Union de Paris soit membre, mais qui ne sont pas rattachées aux Nations Unies. Bien que constituant dans notre projet de loi un groupe distinct d'organisations, elles obtiendront une protection de même intensité que les organisations définies à l'article 2 et subordonnée aux mêmes conditions de forme. Etant donné le nombre élevé des organisations intergouvernemen-

1340 taies qui rentrent dans le champ d'application de cette disposition, nous nous bornons à en enumerar quelques-unes : l'Organisation européenne de coopération économique, l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire, l'agence européenne pour l'énergie nucléaire, l'Association européenne de libre-échange, le bureau de l'Union internationale pour la protection de la propriété industrielle, le bureau de l'Union internationale pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques, l'office central des transports internationaux par chemins de fer, le bureau international d'éducation et l'institut international des brevets. La Suisse fait partie de ces organisations. Parmi les organisations dont la Suisse n'est pas membre, citons le Conseil de l'Europe, la Communauté économique européenne, la Communauté européenne du charbon et de l'acier et la Communauté européenne de l'énergie atomique.

Article 4. -- La disposition règle la question de la communication au public des noms, sigles et emblèmes protégés. H était exclu d'incorporer dans la loi elle-même la liste complète des noms et sigles -- dans les langues officielles et en anglais -- ainsi que la reproduction des emblèmes de chaque organisation intergouvernementale. On ignore actuellement quelles organisations réclameront cette protection et lesquelles ne s'y intéresseront pas.

Cette nomenclature risque de ne plus être à jour avant longtemps par suite des modifications que les organisations pourront apporter à leurs signes. Il est cependant indispensable d'offrir aux tiers la possibilité de connaître avec précision les signes qu'il leur sera interdit d'utiliser, faute de quoi les justiciables pourront e-jtciper de leur ignorance pour échapper à toute sanction et la loi restera sans efficacité. Le moyen le mieux approprié d'assurer une publicité suffisante nous a paru être la publication des noms, sigles et emblèmes dans la Feuille fédérak. Nous renonçons à proposer le Recueil des lois fédérales pour ces publications, afin de ne pas le surcharger encore davantage. Le renvoi à la Feuille fédérale figure à l'article 4 du projet de loi.

Les justiciables sont ainsi suffisamment renseignés sur la publication qui contiendra les noms, sigles et emblèmes protégés en vertu de la loi. Les noms et sigles y paraîtront dans les langues officielles
suisses et en anglais. Les emblèmes et autres signes figuratifs y seront reproduits graphiquement à l'échelle convenable, en noir et blanc, et non avec leurs couleurs propres.

Ces emblèmes seront par conséquent protégés indépendamment des couleurs dans lesquelles ils sont exécutés en fait. Uno protection sans limitation de couleurs était déjà accordée par la loi du 25 mars 1954 pour l'emblème de l'Organisation mondiale de la santé ; elle répond aussi au désir exprimé par le directeur de l'office européen des Nations Unies. Les modifications et adjonctions que les organisations communiqueront ultérieurement aux Etats unionistes seront également publiées en temps voulu. Seront exclus de la protection les signes modifiés ou nouveaux que les organisations auront omis de communiquer.

1341 II est prévu (art. 4, 2e al.) que la protection se déclenchera pour chaque organisation le jour de la publication de ses signes dans la Feuitte fédérale.

Afin que la protection puisse commencer, pour l'Organisation des Nations Unies (art. 1er) et pour l'Organisation mondiale de la santé (art. 11), à la date d'entrée en vigueur de la loi, il faudra procéder aux publications de leurs signes à cette même date. Quant aux publications relatives aux autres organisations intergouvernementales, elles seront faites après que le bureau international aura porté à notre connaissance les signes que les organisations lui auront communiqués.

Article 5. --- Jusqu'à présent, la Suisse ne s'est pas engagée, sauf envers l'Organisation mondiale de la santé (voir le message relatif à la loi du 25 mars 1954, ad art. 4, FF 1953, III, 128), à prendre des mesures spéciales pour protéger sur son territoire les attributs d'organisations intergouvernementales visées par la présente loi. Il n'y a donc pas de raison, semble-t-il, de s'écarter du principe selon lequel les droits acquis de bonne foi par les tiers avant la date de l'entrée en vigueur d'une loi nouvelle doivent être respectés aussi après cette date. Dans un cas toutefois les droits acquis pourront être mis à néant par le juge : s'ils portent préjudice à une des organisations protégées, par exemple lorsqu'un signe est employé par un particulier dans le même domaine que celui de l'organisation à qui le signe appartient et qu'un danger de confusion avec cette organisation en résulte.

La publication dans la Feuille fédérale, prévue par l'article 4, aura pour conséquence que le bénéfice des droits acquis sera refusé à quiconque aura commencé d'utiliser un signe d'organisation intergouvernementale après la date de sa publication, parce qu'à partir de cette date nul ne sera plus censé ignorer que ce signe est protégé. Le cas particulier de l'Organisation mondiale de la santé est réglé par l'article 11, auquel nous renvoyons.

Article 6. -- La législation actuelle (art. 14, 1er al., chiffre 2, de la loi sur les marques de fabrique et de commerce et art. 17, 2e al., de la loi sur les dessins et modèles industriels) prévoit déjà le refus de l'enregistrement ou du dépôt des marques de fabrique ou de commerce et des dessins ou modèles industriels contraires à des
dispositions de la législation fédérale. Le présent article 6 n'est donc pas indispensable. Nous avons cependant jugé utile de reprendre cette disposition dans le projet pour des raisons d'ordre pratique, notamment pour permettre au lecteur de se renseigner immédiatement et aussi complètement que possible sur la portée de l'interdiction prononcée par la loi.

Article 7. -- Avec quelques modifications rédactionnelles, cette disposition est reprise de l'article 5 de la loi concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé. La modification principale consiste dans le remplacement des mots «pouvant prêter à confusion» par l'expression «qui en constituent des imitations». La modification est

1342 due au fait qu'aux articles premier, 2 et 3 du projet l'interdiction s'applique également aux «imitations» des signes protégés.

Article 8. --· Ce texte, qui diffère de la disposition correspondante (art. 6) de la loi du 25 mars 1954 concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé, figure dans les actes législatifs édictés au cours de ces dernières années, notamment dans la loi fédérale du 30 septembre 1955 sur la préparation de la défense nationale économique (KO 1956, 89 s., art. 39), la loi fédérale du 26 septembre 1958 sur la garantie contre les risques à l'exportation (RO 1969, 459 s., art. 16,4eal.) et la loi fédérale du 23 décembre 1959 sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique et la protection contre les radiations (RO 1960, 585 s., art. 35, 2e al.).

Les personnes solidairement responsables ayant les mêmes droits que les inculpés, elles ont la faculté de déférer le jugement, de leur propre chef, jusqu'à la cour de cassation du Tribunal fédéral.

Article 10. -- Des dispositions analogues sont contenues dans la loi sur les brevets d'invention (art. 69 et 77), sur les marques de fabrique et de commerce (art. 31 et 32), sur les dessins et modèles industriels (art. 28 et 29), ainsi que dans la loi pour la protection des armoiries publiques et d'autres signes publics (art. 16).

Le 2e alinéa s'inspire de l'article 58 du code pénal. Il prescrit au juge d'ordonner la suppression des signes illégaux ou, si cela n'est matériellement pas possible -- parce que le signe fait corps avec le produit d'une manière telle qu'il ne peut être supprimé -- de prononcer la confiscation des marchandises et emballages marqués contrairement à la présente loi. La disposition oblige en outre le juge à faire confisquer les instruments et appareils servant exclusivement à l'apposition des signes protégés.

Le 3e alinéa correspond aux articles 16, 3e alinéa, de la loi concernant les armoiries publiques et 8, 3e alinéa, de la loi de 1954 concernant l'Organi, sation mondiale de la santé. Lorsque la confiscation doit être prononcée, c'est aux cantons qu'il appartiendra de fixer le sort des objets confisqués, conformément à l'article 381 du code pénal.

Article 11. -- Dans cette disposition est réglé le cas particulier de l'Organisation mondiale de la santé, dont le nom,
le sigle et l'emblème sont déjà protégés en vertu de la loi du 25 mars 1954. Cette organisation compte parmi les institutions spécialisées des Nations Unies auxquelles est consacré l'article 2. Rien n'empêcherait de maintenir telle quelle la loi du 25 mars 1954, qui ne présente aucune incompatibilité avec la loi projetée. Nous proposons cependant de l'abroger, car il nous paraît plus rationnel de faire de la présente loi la base unique de la protection des signes de toutes les organisations intergouvernementales pouvant un jour ou l'autre obtenir la sauvegarde de leurs attributs dans notre pays. Sauf sur un point secondaire, l'Organisation mondiale de la santé jouira d'une protection de même intensité que sous l'empire de la loi de 1954. Ce point concerne les langues dans

1343 lesquelles l'emploi du nom de l'Organisation par les tiers est illicite: alors que la loi de 1954 prévoit l'interdiction dans toutes les langues, la loi projetée la limite à l'eiiiploi du nom dans les langues officielles suisses et en anglais. Il nous a paru équitable d'accorder dorénavant en tous points à cette organisation une protection qui ne soit pas supérieure à celle des autres institutions spécialisées des Nations Unies.

La publication des signes de l'Organisation mondiale de la santé dans la Feuille fédérale sera, comme pour toutes les autres organisations intergouvernementales, la condition de la protection accordée par la loi projetée.

Afin d'assurer à cette organisation la continuité de sa protection actuelle, c'est le jour de la publication à la Feuille fédérale que la loi de 1954 sera abrogée. Il est prévu de faire coïncider cette publication avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, comme pour les signes de l'Organisation des Nations Unies.

Il a paru indiqué de préciser aussi que la publication dans la Feuille fédérale aura pour objet les signes (noms, sigles et emblèmes) déjà protégés en vertu de la loi de 1954. Si des modifications venaient à être apportées ultérieurement à ceux-ci, l'organisation devra, comme les autres organisations intergouvernementales, les communiquer aux autorités suisses par l'intermédiaire du bureau international.

Pour tous les faits qui se sont passés sous l'empire do la loi de 1954, il est prévu que cette dernière reste applicable, même si les faits incriminés sont découverts après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. C'est également la loi de 1954 qui est décisive en ce qui concerne les droits qui pourraient avoir été acquis de bonne foi par les tiers. Par conséquent, le bénéfice des droits acquis ne pourra être reconnu à celui qui utilise un signe dont l'Organisation mondiale de la santé a demandé la protection que si cet emploi a commencé en fait avant le 17 juillet 1948. Il nous a paru nécessaire de préciser à nouveau cette date au 2e alinéa, en reprenant tel quel l'article 4 de la loi de 1954.

in

Nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet de loi ci-annexé et saisissons cette occasion pour vous assurer, Monsieur le Président et Messieurs, de notre haute eonaidération.

Berne, le 5 juin 1961.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le président de la Confédération, Wahlen 18S 7

°

Le chancelier de la Confédération,

Ch. Oser

1344

(Projet)

LOI FEDERALE concernant

la protection des noms et emblèmes de l'Organisation des Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales

L'Assemblée fédérale, de la Confédération suisse, vu les articles 64 et 64èia de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 6 juin 1961, arrête:

Article premier 1

II est interdit, sauf autorisation expresse du secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, d'utiliser les signes suivants, appartenant à ladite organisation et dont la Suisse aura reçu communication : a. Le nom de l'organisation (en toute langue).

6. Ses sigles (dans les langues officielles suisses et en anglais).

c. Ses armoiries, drapeaux et autres emblèmes.

2

L'interdiction s'applique également aux imitations des signes visés par le 1er alinéa.

Art. 2 II est interdit d'utiliser les signes suivants, communiqués à la Suisse par l'intermédiaire du bureau international pour la protection de la propriété industrielle et appartenant aux institutions spécialisées des Nations Unies ou à d'autres organisations intergouvernementales reliées aux Nations Unies: a. Le nom de ces organisations (dans les langues officielles suisses et en anglais).

6. Leurs sigles (dans les langues officielles suisses et en anglais).

1

1345 c. Leurs armoiries, drapeaux et autres emblèmes.

8 L'interdiction s'applique également aux imitations des signes visés par le 1er alinéa.

Art. 3 1 II est interdit d'utiliser les signes suivants, communiqués à la Suisse par l'intermédiaire du bureau international et appartenant à d'autres organisations intergouvernementales dont sont membres un ou plusieurs pays de l'Union de Paris pour la protection de la propriété industrielle : a. Le nom de ces organisations (dans les langues officielles suisses et en anglais).

b. Leurs sigles (dans les langues officielles suisses et en anglais).

c. Leurs armoiries, drapeaux et autres emblèmes.

2 L'interdiction s'applique également aux imitations des signes visés par le 1er alinéa.

Art. 4 1 Seront publiés dans la Feuille, fédérale les noms, les sigles et une reproduction des armoiries, drapeaux et autres emblèmes des organisations intergouvernementales visées par les articles premier, 2 et 3, qui sont mises au bénéfice de la protection prévue par la présente loi.

2

Pour chaque organisation, la protection prendra effet au jour de la publication qui la concerne.

Art. 5 Celui qui, avant la publication prévue à l'article 4, aura commencé à faire, de bonne foi, usage des noms, sigles, armoiries, drapeaux et autres emblèmes protégés, pourra continuer à en faire le même usage s'il n'en résulte aucun préjudice pour l'organisation intergouvernementale intéressée. L'article 11 est réservé.

Art. 6 Les raisons de commerce dont l'usage est interdit aux termes de la présente loi ne pourront pas être inscrites au registre du commerce.

1

2

De même, seront exclus du dépôt les marques de fabrique et de commerce et les dessins et modèles industriels contraires à la présente loi.

Art. 7 Celui qui, intentionnellement et contrairement aux dispositions de la présente loi, aura fait usage des noms, sigles, armoiries, drapeaux et autres emblèmes d'organisations intergouvernementales visées par les articles premier, 2 et 3, ou de tous autres signes qui en constituent des imitations, 1

1346 celui notamment qui les aura fait figurer sur des enseignes, des annonces, des prospectus ou des papiers de commerce, ou les aura apposés sur des marchandises ou sur leur emballage, ou aura vendu, mis en vente ou mis en circulation d'une autre manière des marchandises ainsi marquées, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende jusqu'à dix mille francs; dans les cas de peu de gravité, ou si l'auteur a agi par négligence, le juge prononcera les arrêts ou l'amende jusqu'à, mille francs.

2

Les dispositions générales du code pénal sont applicables aux infractions prévues par la présente loi; sont d'autre part réservées les dispositions plus rigoureuses de la partie spéciale dudit code.

Art. 8 1

Si l'une des infractions prévues à l'article 7 a été commise dans la gestion d'une personne morale, d'une société en nom collectif ou eu commandite, ou d'une entreprise individuelle, les dispositions sont applicables aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir en leur nom ; la personne morale, la société ou le propriétaire de l'entreprise individuelle répondent toutefois solidairement du paiement de l'amende et des frais, à moins que la direction responsable ne prouve qu'elle n'a rien négligé pour que les personnes en cause observent les prescriptions; 2

Les personnes solidairement responsables ont les mêmes droits que les inculpés.

1

Art. 9 La poursuite et le jugement des infractions incombent aux cantons.

2

Les jugements, prononcés administratifs ayant un caractère pénal et ordonnances de non-lieu doivent être communiqués immédiatement et sans frais en expédition complète au ministère public de la Confédération à l'intention du Conseil fédéral.

Art. 10 L'autorité compétente prend les mesures conservatoires nécessaires ; elle peut en particulier ordonner lo sequestro dea marchandises et emballages marqués contrairement à la présente loi.

1

2

Alors même qu'aucune personne déterminée ne peut être poursuivie ou condamnée, le juge ordonnera la suppression des signes illégaux ou, si cela n'est pas possible, la confiscation des objets marqués contrairement à la présente loi; il prononcera en outre la confiscation des instruments et appareils servant exclusivement à l'apposition des signes.

1347 3

Si le juge ordonne la suppression des signes illégaux, les objets seront restitués à leur propriétaire après la suppression, contre paiement de l'amende éventuelle et des frais.

Art. 11 1

La loi fédérale du 25 mars 1954 (*) concernant la protection de l'emblème et du nom de l'Organisation mondiale de la santé cessera ses effets le jour où les signes antérieurement protégés en Vertu de ladite loi auront été publiés conformément à l'article 4 de la présente loi.

2

Celui qui, depuis une date antérieure au 17 juillet 1948, aura fait usage des signes protégés pourra continuer à en faire le même usage s'il n'en résulte aucun préjudice pour l'Organisation mondiale de la santé.

Art. 12 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

(i) RO 1954, 1323.

13567

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet de loi concernant la protection des noms et emblèmes de l'Organisation des Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales (Du 5 juin 1961)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1961

Année Anno Band

1

Volume Volume Heft

24

Cahier Numero Geschäftsnummer

8257

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

15.06.1961

Date Data Seite

1334-1347

Page Pagina Ref. No

10 096 183

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.