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8284 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de la nouvelle convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires (Du 19 juin 1960)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, par le présent message, un projet d'arrêté fédéral approuvant la nouvelle convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires, conclue le 16 décembre 1960.

La Suisse et l'Autriche sont liées depuis le 28 mars 1929 par la convention du 15 mars 1927 relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires (RS 12, 331). Déjà en 1936, dans un «protocole final» annexé à l'ancien accord austro-suisse concernant la circulation automobile (RS 13, 603) -- accord remplacé par celui du 22 octobre 1958 relatif aux transports internationaux par route (RO 1959, 329) --, la Suisse et l'Autriche s'étaient engagées à entamer des pourparlers aux fins de modifier la convention de 1927 «en ce sens que, dans les contestations concernant la réparation de dommages occasionnés par l'emploi d'un automobile, les décisions rendues par les tribunaux de l'un des Etats contractants seront reconnues et exécutoires sur le territoire de l'autre, même lorsque le débiteur avait, au moment où il a été intenté action, son domicile sur le territoire de l'Etat où la décision produit ses effets». Les pourparlers engagés à ce sujet avaient abouti, le 9 février 1938, à la signature d'un accord additionnel à la convention de 1927. Mais en raison des événements politiques

1586 survenus en Autriche en mars 1938, cet accord additionnel ne fut jamais ratifié par la Suisse, ni même soumis à l'approbation parlementaire.

Vers la fin de 1954, l'Autriche prit l'initiative d'une revision proprement dite de la convention de 1927. Elle exprima d'abord le désir de revenir à l'accord additionnel de 1938, en le complétant toutefois par des dispositions «tenant compte des circonstances présentes». Le département de justice et police ayant demandé des précisions aux autorités autrichiennes, celles-ci produisirent en 1956 un projet de nouvelle convention destinée à remplacer celle de 1927. Le département de justice et police se rallia à l'idée de conclure une nouvelle convention, mais jugea indiqué, en 1958, de soumettre encore le projet à l'appréciation du Tribunal fédéral et de la fédération suisse des avocats. A la suite d'un nouvel échange de correspondance, le ministère autrichien de la justice invita les autorités fédérales, en mars 1960, à envoyer une délégation à Vienne en vue d'y terminer les négociations par des pourparlers oraux. Les pourparlers entre délégations suisse et autrichienne eurent lieu du 5 au 8 juillet 1960 et aboutirent au paraphe d'un projet de nouvelle «convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires». Après que les deux gouvernements lui eurent donné leur agrément, la convention fut signée à Berne le 16 décembre 1960.

II

La nouvelle convention constitue une re vision assez restreinte de la convention de 1927. Celle-ci s'étant révélée judicieuse dans ses conceptions générales, il n'eût en effet pas été justifié de la modifier de fond en comble.

Il suffisait au contraire que la nouvelle convention en respectât la structure et la systématique et en adaptât les dispositions aux circonstances actuelles.

C'est d'ailleurs ce qu'entend exprimer le préambule de la nouvelle convention.

En fait, la nouvelle convention, qui compte seize articles, soit trois de plus que la convention en vigueur, en reprend tels quels quatre articles, soit les articles 2, 4 (nouvel art. 6), 7 (nouvel art. 10) et 10 (nouvel art. 13), seul le numéro d'ordre de trois d'entre eux étant changé. Plusieurs autres dispositions reprises de la convention de 1927 ne sont modifiées que très partiellement (nouveaux art. 1er, 5, 7, 9, 11, 12 et 14, qui correspondent aux actuels art. 1er, 3, 5, 6, 8, 9 et 11). Seuls trois articles sont entièrement nouveaux (art. 3, 4 et 8).

La nouvelle convention se distingue néanmoins de l'actuelle, quant au fond, par quelques innovations dont nous relèverons la portée en passant en revue, ci-après, les dispositions nouvelles ou simplement modifiées. Bien entendu, nous renvoyons au message du Conseil fédéral du 21 mars 1927 (FF 1927, I, 385) pour le commentaire des dispositions reprises telles quelles de la convention en vigueur.

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ni 1. L'article premier est modifié par l'adjonction à sa première phrase des mots «y compris celles qui ont été rendues sur des conclusions de droit civil dans un procès pénal». Le champ d'application de la convention est ainsi étendu en ce sens que les décisions prises dans l'un des deux Etats par le juge pénal sur conclusions de partie civile sont assimilées aux autres décisions judiciaires civiles ou commerciales visées par la convention et peuvent par conséquent, aux mêmes conditions que celles-ci, être reconnues dans l'autre Etat. Cette extension, de la convention, proposée par l'Autriche, renverse la solution retenue dans la convention actuelle et va plus loin que ne le prévoyait l'acte additionnel précité de 1938, qui assimilait aux décisions judiciaires au sens de la convention les seuls jugements sur conclusions de partie civile rendus par le juge pénal en matière d'accidents d'automobiles. Nous n'avions aucune raison de nous opposer à la proposition autrichienne, puisque nous avions admis que notre récente convention avec la Belgique (FF 1959, II, 301) s'appliquât également aux décisions prononcées dans un procès pénal sur conclusions de partie civile.

D'ailleurs, la pratique des tribunaux pénaux autrichiens s'inspire, en matière d'action civile en réparation du dommage causé par un acte punissable, de principes analogues à ceux qu'a énoncés le Tribunal fédéral en posant les conditions auxquelles le juge pénal peut, dans les relations intercantonales, connaître.de l'action civile sans violer la garantie constitutionnelle (art. 59 Cst.) du for du domicile du défendeur (identité de l'état de fait à la base des actions civile et pénale; prédominance du procès pénal sur la réclamation civile; nécessité d'une condamnation pénale du prévenu; cf. Burckhardt, Kommentar, p. 549/550). C'était là une raison suffisante, du point de vue suisse, pour déclarer la nouvelle convention applicable aux jugements sur conclusions de partie civile.

2. En prévoyant la reconnaissance des jugements rendus par le juge pénal sur conclusions de partie civile, l'article premier admet implicitement que l'action civile peut être exercée au for du lieu de l'infraction et qu'il n'existe dans aucun des deux Etats de «règles de compétence judiciaire internationale» au sens du chiffre 1 qui excluraient en principe, pour
le jugement de l'action civile, la juridiction de l'Etat où l'infraction a été commise. En Suisse, l'absence de telles règles ressort déjà du fait que le Tribunal fédéral a déclaré la convention franco-suisse de 1869 sur la compétence judiciaire et l'exécution des jugements (RS 12, 315) applicable à l'exécution des jugements sur conclusions de partie civile (ATF 25, I, 494), Le Tribunal fédéral a ainsi admis que l'article 59 de la constitution ne s'oppose pas plus dans nos relations conventionnelles internationales que sur le plan intercantonal à ce que les prétentions civiles pour dommages résultant d'un acte punissable soient aussi jugées par le tribunal pénal compétent pour réprimer l'infraction.

1588 3. S'il était donc superflu de consacrer expressément dans la nouvelle convention le for du lieu de l'infraction aux fins d'assurer la reconnaissance et l'exécution réciproques des jugements sur conclusions de partie civile, il en va autrement si l'on entend appliquer la convention aussi aux jugements rendus par le juge civil du lieu où un acte illicite, punissable ou non, a été commis. En Suisse, en effet, les prétentions civiles dérivant d'un acte illicite étant considérées comme réclamations personnelles au sens de l'article 59 de la constitution, le juge compétent pour en connaître ne peut être en principe que celui du domicile du défendeur. Sans doute, la jurisprudence du Tribunal fédéral a-t-elle autorisé, sous certaines conditions, une dérogation à l'article 59 quand la demande est présentée sous forme d'action civile dans un procès pénal (cf. ci-dessus, ch. 1). Réserve faite de cette dérogation et de certaines exceptions prévues par la législation fédérale, ainsi que des cas de soumission volontaire du défendeur, le lieu où l'acte illicite a été commis ne fonde même pas dans les relations intercantonales un for civil pour le jugement des prétentions dérivant de l'acte illicite. L'article 3 de la nouvelle convention admet le forum delicti commissi au moins dans le domaine particulier des accidents de la circulation routière. Le for du lieu de l'accident étant précisément la principale des exceptions à l'article 59 statuées par la législation fédérale (art. 84 et 85 de la loi du 19 décembre 1958 sur la circulation routière; EO 1959, 705), il n'y avait pas d'inconvénient d'ordre constitutionnel à admettre ce for aussi sur le plan des relations internationales austro-suisses. En raison de l'article 3, 1er alinéa, la garantie constitutionnelle du for du domicile --· l'un des cas principaux visés par l'article premier, chiffre 1 -- ne pourra donc plus être invoquée par le défendeur domicilié en Suisse à l'encontre d'une décision autrichienne le condamnant à la réparation du dommage occasionné par un accident d'automobile survenu en Autriche.

Alors que les intentions primitives visaient les seuls «véhicules automobiles», l'application de l'article 3 a été étendue aux «cycles avec ou sans moteur», par quoi il faut entendre les cycles proprement dits et les cycles équipés d'un moteur auxiliaire. Du
point de vue suisse, cette extension fort utile de l'article 3 pouvait se faire d'autant plus aisément que notre loi sur la circulation routière prévoit le for du lieu de l'accident aussi pour les simples cycles sans moteur (art. 84 et 85).

4. En principe, l'article 3, 1er alinéa, admet le for du lieu de l'accident aussi pour l'action directe du lésé contre l'assureur en responsabilité civile de l'auteur du dommage (v. art. 65 de la loi sur la circulation routière).

Cependant le droit autrichien ne connaît pas encore cette action, bien qu'il soit question de l'y introduire. En attendant que cela soit chose faite, il convenait d'éviter que la Suisse ne fût tenue de reconnaître les décisions de tribunaux autrichiens rendues sur des prétentions élevées, directement contre un assureur suisse, alors que les décisions rendues en Suisse, sur

1589 action directe, contre un assureur autrichien n'eussent pas été reconnues en Autriche. Non seulement pour assurer une stricte réciprocité, mais aussi pour éviter les difficultés ou malentendus pouvant résulter du fait que l'Autriche n'aurait réglé ni l'action directe, ni surtout la question connexe des exceptions et du droit de recours appartenant à l'assureur, il importait donc d'exclure, au moins temporairement, l'application de l'article 3, 1er alinéa, à l'action directe. C'est ce que fait le 2e alinéa de l'article 3.

En vertu de cette disposition, les décisions sur les prétentions du lésé élevées directement contre l'assureur en responsabilité civile de l'auteur du dommage ne pourront être reconnues -- sous réserve bien entendu des autres conditions requises par la convention -- que si la législation des deux Etats contractants confère au lésé une action directe contre l'assureur. Le moment où cette condition sera remplie, c'est-à-dire le jour de l'entrée en vigueur, en Autriche, de la législation introduisant l'action directe, sera constaté par échange de notes entre les deux gouvernements.

5. L'article 3 est actuellement, du point de vue suisse, d'un intérêt pratique assez restreint. En effet, d'après le régime applicable à la réparation des dommages causés par des véhicules automobiles étrangers (art. 39 s.

de l'ordonnance du Conseil fédéral du 20 novembre 1959 sur la responsabilité civile et l'assurance en matière de circulation routière; RO 1959, 1321), les personnes lésées par un véhicule automobile autrichien circulant en Suisse peuvent obtenir réparation du dommage en actionnant non pas le détenteur autrichien, mais une compagnie d'assurance suisse. Ellesmêmes n'ont dès lors pas avantage, du moins en règle générale, à obtenir un jugement susceptible d'être reconnu et exécuté en Autriche. En revanche, dans les cas de réparation subsidiaire au sens de l'article 46 de l'ordonnance précitée du 20 novembre 1959, la compagnie d'assurance chargée de réparer le dommage causé en Suisse par un véhicule automobile autrichien doit pouvoir récupérer en Autriche les indemnités versées aux victimes. Elle a donc intérêt à ce qu'un jugement rendu en Suisse, au for du lieu de l'accident, contre le ou les responsables autrichiens (détenteurs ou assureurs) puisse donner lieu à exécution forcée
en Autriche.

D'ailleurs, il se pourrait que la généralisation de l'assurance-responsabilité civile obligatoire entraîne un jour la suppression des «cartes d'assurance internationales» (dites aussi «cartes vertes») et qu'alors les conventions assurant l'exécution internationale des jugements rendus au for du lieu de l'accident revêtent une importance accrue. Cela suffit à justifier l'existence de l'article 3 de la nouvelle convention.

6. L'une des règles autrichiennes de «compétence judiciaire internationale» qui, au sens de l'article premier, chiffre 1, de la convention, excluent la juridiction suisse, est l'article 81, chiffre 3, du code d'exécution («Exekutionsordnung»). Aux termes de cette disposition, l'exécution d'un jugement étranger est refusée en Autriche si le jugement concerne l'«état»

1590 («Personenstand») d'un ressortissant autrichien et doit être exécuté contre lui. Bien que cette disposition ne paraisse viser que les jugements étrangers prononçant sur le statut personnel de ressortissants autrichiens, les tribunaux autrichiens l'invoquent en particulier, sous le régime de l'actuelle convention, pour refuser l'exécution à tout jugement de paternité suisse rendu contre un ressortissant autrichien, sans distinguer selon que le jugement porte ou non déclaration de paternité avec effets d'état civil. C'est ainsi qu'ils refusent l'exécution à un jugement de paternité rendu en Suisse contre un Autrichien, même s'il porte uniquement condamnation à des prestations pécuniaires et que le défendeur était domicilié en Suisse lors de l'ouverture de l'action.

Sur une suggestion de la fédération suisse des avocats, le département de justice et police demanda aux autorités autrichiennes si elles accepteraient de prévoir dans la nouvelle convention l'exécution en Autriche des jugements de paternité suisses portant condamnations pécuniaires. Les autorités autrichiennes proposèrent une disposition conventionnelle assurant l'exécution réciproque non seulement des jugements de paternité, mais d'une manière générale des obligations alimentaires fondées sur le droit de famille. C'est cette disposition, avantageuse du point de vue suisse, qui est devenue l'article 4, 1er alinéa, de la nouvelle convention.

Comme l'article précédent, l'article 4 vise à faire échec à la juridiction exclusive de l'un des deux Etats, afin d'assurer dans cet Etat l'exécution d'un jugement rendu dans l'autre. A cet effet, l'article 4 admet aussi, implicitement, le for du demandeur (forum actoris, art. 144 et 312 CC), car il suffit, pour établir la compétence juridictionnelle de l'Etat dont émane une décision «sur des prétentions alimentaires en argent fondées sur le droit de famille», que l'ayant droit aux aliments ait eu son domicile «dans cet Etat au moment où il a fait valoir ces prétentions». Le grand avantage du for du demandeur se manifestera, du point de vue suisse, surtout en matière d'action en paternité, en ce sens que le jugement rendu au for du «domicile que la partie demanderesse avait en Suisse au temps de la naissance» (art. 312 CC) ne sera plus considéré comme émanant d'un Etat dont la juridiction est
exclue par les règles autrichiennes de compétence judiciaire internationale et pourra, si les autres conditions posées par la convention sont remplies, être reconnu et exécuté en Autriche, alors même que le défendeur serait un Autrichien qui, déjà lors de l'ouverture de l'action, avait son domicile en Autriche. En pareil cas, les tribunaux autrichiens ne pourraient en effet pas non plus refuser l'exécution en se fondant sur l'article 2,1er alinéa, de la convention, puisque l'article 4 statue précisément une exception à la juridiction exclusive prévue à l'article premier, chiffre 1.

Pour que l'article 4,1er alinéa, soit applicable, il faut qu'il s'agisse d'une décision portant sur des prétentions alimentaires, c'est-à-dire sur des prestations nécessaires à l'entretien d'une personne, et que les aliments alloués

1591 par le juge soient déterminés en argent et dus en vertu du droit de famille.

Il serait donc inapplicable à des créances d'aliments dépourvues de base légale et fondées uniquement sur un acte d'engagement volontaire. D'une manière générale, il vise les aliments dus notamment par l'un des conjoints à l'autre, par les père et mère à leurs eniants légitimes ou par le père ou la mère d'un enfant naturel à celui-ci.

Pour assurer l'exécution réciproque des jugements de paternité, l'article 4 a été complété par un 2e alinéa qui permettra l'exécution non seulement des condamnations concernant les aliments alloués à l'enfant, mais aussi de celles qui concernent certaines prestations légales en faveur de la mère. C'est ainsi que seront également considérées comme prétentions alimentaires fondées sur le droit de famille les prétentions légales pour frais d'entretien et frais de couches que la mère d'un enfant naturel peut élever contre le père de celui-ci. Sans ce second alinéa, les frais de couches n'eussent évidemment pas été inclus dans les «prétentions alimentaires» donnant lieu à exécution; bien plus, ni les frais de couches ni les frais d'entretien de la mère n'eussent été considérés, en droit autrichien, comme relevant du droit de famille.

7. L'article 5, qui correspond à l'article 3 de la convention actuelle, a été complété, dans son 1er alinéa, par les mots «y compris celles qui ont été rendues sur des conclusions de droit civil dans un procès pénal». Réglant l'exécution proprement dite, l'article 5 est ainsi mis en harmonie avec l'article premier, qui traite de la simple reconnaissance des décisions judiciaires.

8. L'article 7, repris de l'actuel article 5, n'en diffère, au 3e alinéa, que sur un point touchant à l'autorité autrichienne compétente pour attester qu'une sentence arbitrale ou une transaction conclue devant des arbitres est passée en force de chose jugée et qu'elle est devenue exécutoire.

9. Contrairement à la convention de 1927, la nouvelle convention règle aussi, à l'article 8, la question de la litispendance, en ce sens que le tribunal saisi d'un litige déjà pendant devant l'un des tribunaux de l'autre Etat devra refuser d'office de l'instruire s'il est probable que la décision du tribunal premier saisi devra être reconnue dans l'Etat du tribunal saisi ultérieurement.
Il n'est pas inutile que sous le régime de la nouvelle convention les tribunaux suisses et autrichiens sachent dans quelles conditions ils auront à tenir compte du fait qu'un litige est déjà pendant dans l'un des deux Etats.

10. L'article 9 mentionne certaines décisions qui ne sont pas considérées comme des décisions judiciaires au sens de la convention. De cette disposition, reprise de l'actuel article 6, il a fallu évidemment éliminer les «décisions rendues sur des conclusions de droit civil dans un procès pénal»,

1592 puisque la nouvelle convention leur sera précisément applicable en vertu des articles premier et 5. Quant aux amendes d'ordre, il ne suffisait plus, dès lors, d'exclure seulement celles qui sont infligées dans un procès civil et de faire abstraction de celles qui le sont dans un procès pénal. Aussi l'article 9 se borne-t-il à parler des «décisions infligeant des amendes d'ordre».

Pour le surplus la rédaction de l'article a dû être remaniée du fait que l'expression allemande «Nachlassvertrag», désignant en droit suisse le concordat en matière de poursuite pour dettes, avait donné lieu en Autriche à des malentendus. En effet, comme l'institution du concordat porte en droit autrichien le nom de «Ausgleichsverfahren» et que cette expression figure avec celle de «Nachlassvertrag» dans le texte allemand de l'actuel article 6, la tendance à voir là deux institutions différentes se comprend d'autant plus aisément que l'expression «Nachlassvertrag», inconnue en Autriche dans le sens de «concordat», pourrait aussi désigner une «convention de partage successoral». Aussi le texte allemand distingue-t-il entre décisions de tribunaux suisses portant homologation d'un «Nachlassvertrag» et décisions de tribunaux autrichiens en matière de «Ausgleichsverfahren», bien qu'il s'agisse, dans l'un et l'autre cas, de décisions concernant la même institution. Le texte français de l'article 9 a été adapté dans une certaine mesure au texte original allemand.

11. L'article 11, qui correspond à l'actuel article 8, ne mentionne plus les dispositions particulières qui régissent, dans chacun des deux Etats, la compétence et la procédure en matièie d'exécution forcée. En proposant cette suppression, l'Autriche a fait valoir que les dispositions applicables chez elle en la matière figurent non plus seulement dans son code d'exécution de 1896, mais encore dans de nombreux autres actes législatifs qu'il serait trop long d'énumérer dans la convention. D'ailleurs, si la convention mentionnait les dispositions particulières de chaque Etat, elle devrait être revisée toutes les fois que leur liste ne correspondrait plus aux modifications intervenues dans le droit interne, outre que logiquement l'un des Etats ne pourrait même pas modifier son droit interne sans l'assentiment de l'autre lorsque cette modification impliquerait une
revision du texte de la convention. Aussi a-t-il paru suflîsant de prévoir dans la nouvelle convention que «la compétence et la procédure en matière d'exécution forcée sont réglées par la législation de l'Etat où l'exécution est requise».

12. L'article 12 diffère de l'actuel article 9 en ce qu'il mentionne, au 2e alinéa, non plus la convention de La Haye du 17 juillet 1905 relative à la procédure civile, mais la nouvelle convention du 1er mars 1954 qui l'a remplacée en 1957 dans les rapports entre la Suisse et l'Autriche (RO 1967, 467).

A la demande des délégués autrichiens, il a été convenu de citer entre parenthèses, dans le texte allemand, l'appellation autrichienne de la convention de La Haye.

1593 13. L'article 14 qui, contrairement à l'actuel article 11, cite d'abord le département fédéral de justice et police, mentionne la nouvelle appellation du ministère autrichien de la justice.

14, Les articles 15 et 16 modifient et complètent le texte des articles 12 et 13 actuels aux fins de régler notamment les rapports de droit transitoire entre la nouvelle convention et celle de 1927.

De l'article 16, 2e alinéa, il ressort en outre que la convention ne fixe pas la durée de sa validité et qu'elle peut être dénoncée en tout temps. L'arrêté fédéral dont nous vous soumettons le projet n'est donc pas soumis au referendum facultatif prévu à l'article 89, 3e alinéa, de la constitution.

La nouvelle convention marque un progrès appréciable dans le développement des relations juridiques entre la Suisse et l'Autriche. Nous vous recommandons donc de l'approuver en adoptant le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 19 juin 1961.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le -président de la Confederatimi., Wahlen 1S5&3

Le chancelier de la Confédération,

Ch. Oser

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(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL approuvant

la nouvelle convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'article 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 19 juin 1961 ; arrête:

Article unique La nouvelle convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnais&ance et à l'exécution de décisions judiciaires, signée le 16 décembre 1960, est approuvée.

Le Conseil fédéral est autorisé à la ratifier.

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Traduction du texte original allemand

CONVENTION entre

la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires

LA CONFÉDÉRATION SUISSE ET

LA RÉPUBLIQUE D'AUTRICHE, animées du désir d'adapter aux circonstances présentes la convention du 15 mars 1927 relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires, ont résolu de conclure à cet effet une nouvelle convention. Ont désigné comme plénipotentiaires : le Conseil fédéral de la, Confédération suisse: Monsieur Max PETITPIERRE, Président de la Confédération, chef du Département politique fédéral;

le Président de la République d'Autriche: Monsieur Johannes CORETH, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Autriche en Suisse ;

lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des dispositions suivantes : Article premier L'autorité des décisions judiciaires rendues en matière civile ou commerciale dans l'un des deux Etats, y compris celles qui ont été rendues sur des conclusions de droit civil dans un procès pénal, sera reconnue dans l'autre Etat si elles remplissent les conditions suivantes : 1. que les règles de compétence judiciaire internationale admises par l'Etat dans lequel la décision est invoquée n'excluent pas la juridiction de l'autre Etat;

1596 2. que la reconnaissance de la décision ne soit pas contraire à l'ordre public de l'Etat où cette décision est invoquée, en particulier que l'exception de chose jugée ne fasse pas obstacle à la reconnaissance d'après la loi de cet Etat; 3. que, d'après la loi de l'Etat où la décision a été rendue, celle-ci soit passée en force de chose jugée ; 4. qu'en cas de jugement par défaut, l'acte ou la citation qui introduisait l'instance ait été remis en temps utile à la partie défaillante en mains propres ou à aon mandataire autorisé à le recevoir. Si la notification devait avoir lieu sur le territoire de l'Etat où la décision est invoquée, il est nécessaire qu'elle ait été faite en la voie de l'assistance judiciaire réciproque.

L'examen par les autorités de l'Etat où la décision est invoquée ne portera que sur les conditions énumérées sous chiffre 1 à 4. Ces autorités devront examiner d'office si lesdites conditions sont remplies.

Art. 2 La juridiction de l'Etat où la décision a été rendue est exclue, au sens de l'article premier, chiffre 1er, notamment à l'égard des réclamations personnelles contre le débiteur solvahle qui avait, lors de l'ouverture de l'action, son domicile dans l'Etat où la décision est invoquée.

Cette disposition n'est cependant pas applicable : 1. lorsque le défendeur s'est soumis, par convention expresse, à la compétence du tribunal qui a statué sur le fond du litige; 2. lorsque le défendeur est entré en matière, sans réserve, sur le fond du litige; 3. lorsqu'il s'agit d'une demande reconventionnelle; 4. lorsque le débiteur a été recherché au lieu de son établissement commercial ou industriel ou de sa succursale pour des réclamations dont la cause remonte à l'exploitation de cet établissement.

Ne seront pas considérées comme réclamations personnelles au sens du présent article les actions fondées sur le droit de la famille et le droit des successions, les droits réels et les créances garanties par gage.

Art. 3 La juridiction de l'Etat où la décision a été rendue n'est pas exclue, au sens de l'article premier, chiffre 1er, lorsqu'il s'agit de décisions concernant la réparation de dommages occasionnés par l'emploi de véhicules automobiles

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ou de cycles avec ou sans moteur et que l'accident s'est produit sur le territoire de cet Etat.

L'alinéa ci-dessus ne sera cependant applicable aux décisions sur les prétentions du lésé élevées directement contre l'assureur en. responsabilité civile de l'auteur du dommage que si la législation des deux Etats contractants confère au lésé une action directe contre l'assureur. Les deux gouvernements constateront par échange de notes la date à laquelle cette condition sera remplie.

Art. 4 La juridiction de l'Etat où la décision a été rendue n'est pas exclue, au sens de l'article premier, chiffre 1er, lorsqu'il s'agit de décisions sur des prétentions alimentaires en argent fondées sur le droit de famille et que l'ayant droit aux aliments avait son domicile dans cet Etat au moment où il a fait valoir ces prétentions.

Sont aussi considérées comme prétentions alimentaires fondées sur le droit de famille au sens de l'alinéa ci-dessus les prétentions légales de la mère d'un enfant naturel contre le père de celui-ci en restitution des frais d'entretien et des frais de couches.

Art. 5 Les décisions judiciaires en matière civile ou commerciale rendues dans l'un des deux Etats, y compris celles qui ont été rendues sur des conclusions de droit civil dans un procès pénal, seront exécutées dans l'autre Etat si elles remplissent les conditions indiquées à l'article premier, chiffres 1 à 4, et si elles sont exécutoires dans l'Etat où elles ont été rendues.

L'examen par les autorités de l'Etat où l'exécution est requise ne portera que sur les exigences indiquées au premier alinéa. Ces autorités devront examiner d'office s'il est satisfait auxdites exigences.

Art. 6 La partie qui invoque la décision ou qui en requiert l'exécution devra produire : 1. une expédition ou copie de la décision; 2. une attestation que la décision est passée en force de chose jugée et, s'il y a lieu, qu'elle est devenue exécutoire. Cette déclaration sera délivrée par l'autorité qui a rendu la décision ou par le greffier du tribunal ; 3. en cas de jugement par défaut, une copie de l'acte ou de la citation qui introduisait l'instance, ainsi qu'une attestation indiquant le mode et la date de notification à la partie défaillante; Feuille fédérale. 113e année. Vol. I.

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1598 4. une copie de l'exposé de demande ou toutes autres pièces appropriées, lorsque l'état des faits à la base de la décision ne ressort pas de celle-ci assez clairement pour permettre l'examen prévu à l'article premier ; 5. le cas échéant, une traduction des pièces indiquées sous chiffres 1 à 4 rédigée dans la langue officielle de l'autorité auprès de laquelle la décision est invoquée ou son exécution requise. Cette traduction sera certifiée conforme d'après la législation de l'un ou de l'autre Etat.

Les dispositions du traité du 21 août 1916 (x) s'appliqueront à la légalisation des pièces mentionnées dans le présent article.

Art. 7 Les sentences arbitrales rendues dans l'un des deux Etats seront reconnues et exécutées dans l'autre Etat si elles satisfont aux prescriptions des articles précédents, en tant que celles-ci sont applicables.

Il en sera de même pour les transactions judiciaires ou pour les transactions conclues devant des arbitres.

L'attestation que la sentahce arbitrale ou la transaction conclue devant des arbitres est passée en force de chose jugée et qu'elle est devenue exécutoire est délivrée en Suisse par l'autorité compétente du canton où la sentence arbitrale a été rendue ou la transaction conclue, en Autriche par le tribunal de district (Bezirksgericht) dans le ressort duquel la sentence arbitrale a été rendue ou la transaction conclue.

Art. 8 Lorsqu'un litige est pendant devant un tribunal de l'uri des deux Etats et que la décision sur le fond de la cause devra probablement être reconnue dans l'autre Etat, un tribunal de cet autre Etat refusera d'instruire un litige porté devant lui ultérieurement et concernant le même objet et les mêmes parties.

Art. 9 Les décisions infligeant des amendes d'ordre, les prononcés rendus dans la procédure de faillite et les jugements des tribunaux suisses et autrichiens en matière de concordat ne seront pas considérés comme des décisions judiciaires au sens de la présente convention.

Art. 10 Les décisions d'autorités non judiciaires chargées d'exercer ïa tutelle ou la curatelle, ainsi que les transactions conclues devant ces autorités, sont assimilées aux décisions et transactions judiciaires au sens de la présente f 1 ) RS12, 370.

1599 convention. Les deux gouvernements se feront connaître réciproquement ces autorités.

L'exécution de décisions ordonnant la remise d'un mineur ou d'une personne mise sous tutelle pourra être ajournée lorsque les autorités compétentes de l'Etat où cette exécution est requise auront pris, pour venir eu aide conformément à leurs obligations, des mesures provisionnelles qui feront obstacle à la remise en raison d'un changement survenu dans la situation personnelle des personnes intéressées. L'ajournement sera porté sans retard à la connaissance tant de l'autorité dont émane la décision à exécuter que de la partie qui a requis l'exécution.

Art. 11 La compétence et la procédure en matière d'exécution forcée sont réglées par la législation de l'Etat où l'exécution est requise.

Art. 12 La présente convention ne touche pas aux dispositions des arrangements internationaux auxquels participent les deux Etats.

Les décisions relatives aux frais et dépens visées à l'article 18, 1er et e 2 alinéas, de la convention du 1er mars 1954 sur la procédure civile (1) et rendues dans l'un des deux Etats, seront exécutées sur le territoire de l'autre Etat à la requête directe de la partie intéressée.

Art, 13 Les dispositions de la présente convention s'appliqueront quelle que soit la nationalité des parties.

Art. 14 Le département fédéral de justice et police et le ministère autrichien de la justice se communiqueront directement, sur requête, des renseignements juridiques concernant les questions que soulèverait l'application de la présente convention. La liberté de décision des tribunaux demeure intacte.

Art. 15 La présente convention s'appliquera aux décisions judiciaires, sentences arbitrales et transactions intervenues après son entrée en vigueur.

La convention entre la Suisse et l'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires, du 15 mars 1927 ( 2 ), restera applif1) RO 1957, 465.

(") KS 12, 331.

1600 cable aux décisions judiciaires, sentences arbitrales et transactions intervenues avant l'entrée en vigueur de la présente convention.

Art. 16 La présente convention sera ratifiée et les instruments de ratification en seront échangés à Vienne.

Cette convention entrera en vigueur deux mois après l'échange des instruments de ratification et produira ses effets encore un an après la.

dénonciation, qui pourra avoir lieu en tout temps. A la date de son entrée en vigueur, la présente convention abrogera, en tant que l'article 15 ci-dessus n'en dispose pas autrement, la convention entre la Suisse et l'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires, du 15 mars 1927.

En foi de quoi, les plénipotentiaires ont signé la présente convention en deux exemplaires.

Fait à Berne le 16 décembre 1960.

Pour la Confédération suisse:

Pour la République d'Autriche:

(signé) Max Petitpicrre

(signé) DT Johannes Coreth

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation de la nouvelle convention entre la Confédération suisse et la République d'Autriche relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires (Du 19 juin 1960)

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