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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant une aide en faveur des entreprises privées de chemin de fer et de navigation dont l'exploitation est compromise par la crise.

(Du 29 juin 1937.)

Monsieur le Président et Messieurs, L'arrêté fédéral du 13 avril 1933 instituant une aide en faveur des entreprises privées de chemin de fer et de navigation dont l'exploitation est compromise par la crise cessera d'exercer son effet à la fin de cette année.

Il convient, selon nous, d'en prolonger la validité.

Sans doute la période de secours financier allant de 1933 à 1937 se termine-t-elle à une époque où la reprise du trafic laisse entrevoir déjà une certaine amélioration de la situation. Toutefois on ne peut dire avec certitude si ce mouvement se poursuivra et dans quelle mesure il permettra aux entreprises de transport privées de se maintenir par leurs propres forces; pour certaines d'entre elles il semble même, au vu des résultats d'exploitation, que la crise n'ait pas encore atteint son point culminant. Nous gardant donc d'envisager l'avenir avec optimisme, nous ne pouvons vous proposer de renoncer, au terme de cette année déjà, à une oeuvre dont les effets sont si bienfaisants. Dès le début, nous avions prévu une telle éventualité en attribuant au Conseil fédéral, dans notre projet d'arrêté de 1933, le droit de prolonger de cinq ans la durée de validité de ce dernier, si les circonstances l'exigeaient. Notre proposition ayant été rejetée, il ne nous reste plus aujourd'hui qu'à vous soumettre un nouveau projet.

Voici tout d'abord un aperçu des allocations octroyées jusqu'à ce jour.

6 entreprises ont bénéficié de notre appui, soit 5 chemins de fer et 1 entreprise de navigation. Au total, les sommes allouées se sont élevées à 283 100 francs, soit 260 000 francs sous forme de prêts portant intérêt à un taux de 0 à 2 pour cent et 23 100 francs au titre de versements à fonds perdu.

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Une aide de 220 000 francs (prêts avec ou sans intérêt) sera accordée très prochainement à 4 autres entreprises (3 chemins de fer et une entreprise de navigation). Les demandes de 4 compagnies de chemins de fer, portant sur un montant de 255 000 francs, sont actuellement à l'étude. -- Les prêts accordés grèvent le compte capital de la Confédération, tandis que les subventions à fonds perdu sont prélevées sur le fonds constitué en vertu de l'article 10 de l'arrêté fédéral. Ce fonds couvre également les pertes que subit la Confédération du fait de la différence entre le taux de ses propres emprunts et celui des prêts qu'elle accorde. Fin 1936, il s'élevait encore à 265 000 francs en chiffre rond. Mais les prélèvements effectués ne concernent qu'une année ou deux. D'autres suivront jusqu'au remboursement total des prêts octroyés.

L'aide de crise, telle que la prévoit l'arrêté fédéral de 1933, et sa prolongation ne seront-elles pas superflues si le projet d'« assainissement des chemins de fer privés » qui vous a été soumis est définitivement adopté ?

Nous devons répondre à la question par la négative. Ledit projet doit permettre un redressement efficace des entreprises obérées de façon durable, aussi en ce qui concerne leurs finances. Le secours de crise, lui, ne vise qu'au maintien, durant la crise actuelle, de l'exploitation d'entreprises saines et viables devenues déficitaires par suite des circonstances exceptionnelles que nous traversons; il ne tend pas à une reconstitution financière; son but est plus limité. En outre, seuls les chemins de fer les plus importants du point de vue économique et stratégique profiteront de l'assainissement envisagé, tandis que l'appui dont il est question ici s'étendra à des lignes dont le rôle est plus modeste. Il faut considérer encore que l'oeuvre de secours devra continuer de produire ses effets dès le début de l'an prochain ; l'assainissement des chemins de fer privés ne pourra être opéré aussi tôt, même si les délibérations portant sur la loi et l'adoption de cette dernière devaient intervenir rapidement.

Le système de l'appui financier adopté par l'arrêté fédéral de 1933 a donné satisfaction à tous égards; il en avait été de même sous l'empire de l'arrêté de 1918. La chose a d'ailleurs été reconnue par les milieux compétents, même en dehors de l'administration. De
plus, l'union d'entreprises suisses de transport, l'association des chemins de fer funiculaires suisses, ainsi que l'association d'entreprises suisses de navigation à vapeur, d'une part, et la fédération suisse des cheminots de l'autre, se sont prononcées en faveur de la prolongation de l'oeuvre de secours dans le sens de la réglementation actuelle. Partant, il nous paraît indiqué de continuer à prêter notre concours financier de la même manière que jusqu'ici. Il sera question plus bas des légères modifications que nous avons apportées à l'arrêté.

Il s'agit donc avant tout de proroger l'arrêté de 1933. Comme nous l'avons déjà dit, sa durée de validité, en vertu de l'article 12, expire le 31 décembre 1937. Nous vous proposons une prolongation de deux années. Un

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délai plus court ne paraît pas indiqué; un plus long ne sera probablement pas nécessaire, à moins que la situation économique et les transports ne soient à nouveau bouleversés.

A cette occasion, il convient, nous semble-t-il, de procéder à quelques remaniements. Nous désirons tout d'abord compléter la procédure d'opposition de l'article 4 en ajoutant, au premier alinéa, que seules les demandes de prêts doivent être publiées. Les créanciers ayant le droit de former opposition en vertu du 3e alinéa n'ont aucun intérêt à faire obstacle à l'octroi d'allocations à fonds perdu, car leurs droits ne subissent aucun préjudice de ce fait. C'est d'ailleurs toujours dans ce sens que l'article 4 a été interprété. Au 4e alinéa, nous prévoyons, dans l'intérêt du créancier comme du débiteur, que la faculté de former opposition sera liée dorénavant, dans les emprunts par obligations, à une décision constatée par acte authentique ; relevons que le Tribunal fédéral n'aura pas à s'occuper de cette procédure. Il nous paraît préférable de fixer dans l'arrêté la majorité à laquelle sera subordonnée la validité des décisions. Autre innovation: le débiteur sera tenu de convoquer l'assemblée des créanciers sur la demande du représentant de la communauté; il aura en revanche le droit de la réunir de son propre chef.

A l'article 9, nous précisons la période durant laquelle l'entreprise secourue sera protégée contre la liquidation forcée. La disposition d'après laquelle la liquidation ne peut avoir lieu, « pendant la durée de l'arrangement », qu'avec l'assentiment du Conseil fédéral peut prêter à diverses interprétations. C'est la raison pour laquelle nous préférons dire plus expressément que la protection sera accordée dès l'instant où une demande de secours aura été présentée au Conseil fédéral ou au département des postes et des chemins de fer jusqu'à l'expiration d'une durée de cinq années à compter de l'octroi du dernier prêt ou de la dernière subvention. Le projet de loi sur la participation de la Confédération au redressement financier des entreprises obérées de-chemins de fer privés qui vous a été soumis contient, en son article 11, une disposition semblable. Si la demande est repoussée par le Conseil fédéral, tout obstacle à la liquidation disparaît évidemment dès le rejet. L'article 9 ainsi modifié s'appliquera
également aux entreprises dont les demandes de secours auront été réglées encore sous l'empire de l'arrêté de 1933.

A propos de l'article 10, nous nous sommes demandé si le fonds de secours devait encore être alimenté. Cela nous paraît nécessaire. Il faut se rappeler que, l'oeuvre de secours achevée, à côté des besoins financiers qui devront être couverts au cours de cette année et de la nouvelle période, le fonds sera mis à contribution par les différences d'intérêts jusqu'au moment où tous les prêts auront été remboursés, ce qui peut durer bien des années encore. En outre, on peut prévoir aujourd'hui déjà que l'une ou l'autre des entreprises secourues ne sera pas eh mesure de payer les

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intérêts qu'elle doit ou de rembourser les prêts qui lui ont été accordés.

Le fonds qui est destiné, entre autres, à supporter des pertes de ce genre, sera donc absorbé très rapidement. A notre avis, une somme de 50 000 francs au minimum devrait y être versée annuellement, durant la nouvelle période de 2 ans.

Les articles 1, 2, 3, 4 (2e et 3e alinéas), 5, 6, 7, 8 et 11 de l'arrêté fédéral de 1933 sont repris textuellement.

Les articles 12 et 13 ne donnent lieu à aucune observation.

Ces quelques explications fournies, nous vous prions de vouloir bien approuver le projet d'arrêté ci-joint. Ajoutons que si nous croyons pouvoir renoncer cette fois-ci à la clause d'urgence, c'est dans le ferme espoir que le projet sera l'objet d'une décision des chambres au plus tard dans la session d'automne.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 29 juin 1937.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, MOTTA.

Le chancelier de la Confédération, G. BOVET.

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(Projet.)

Arrêté fédéral instituant

une aide en faveur des entreprises privées de chemin de fer et de navigation dont l'exploitation est compromise par la crise.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

CONFÉDÉRATION SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 29 juin 1937, arrête :

Article premier.

Le Conseil fédéral est autorisé à accorder, en collaboration avec les cantons, aux entreprises privées de chemin de fer et de navigation tenant une place importante dans l'économie nationale et capables en temps normal de se suffire d'une manière durable une aide leur permettant de maintenir l'exploitation lorsque, par suite de la crise, les recettes ne couvrent pas les dépenses d'exploitation (art. 3).

Les entreprises qui ne servent essentiellement qu'au trafic local et à l'industrie hôtelière ne peuvent prétendre à ce secours.

Art. 2.

L'aide sera accordée sous forme de prêts à intérêts réduits ou sans intérêt, exceptionnellement de versements à fonds perdu.

Elle est subordonnée à la condition que les cantons intéressés assument, le cas échéant avec le concours des communes, une charge au moins égale.

Lorsque plusieurs cantons sont intéressés, la participation de chacun d'eux sera proportionnelle à la longueur du tronçon exploité sur leur territoire, ainsi qu'au nombre et à l'importance des stations. Si des communes participent également à l'aide, leur contribution sera mesurée à l'importance des diverses stations. A défaut d'entente entre les cantons (ou communes), le département fédéral des postes et des chemins de fer statue

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définitivement sur la répartition de la charge qui leur incombe aux termes du 2e alinéa.

Art. 3.

La demande de secours doit être présentée par l'administration de l'entreprise en difficulté. Celle-ci établira que les recettes, y compris les autres ressources disponibles et, cas échéant, les subventions promises, ne couvrent pas les dépenses d'exploitation.

Ces dernières comprennent notamment les frais généraux d'administration, les intérêts d'avances pour l'exploitation, les frais de renouvellement effectifs et les autres frais en rapport étroit avec l'exploitation, mais non les intérêts des emprunts et des dettes flottantes, les amortissements et dépréciations, les versements à des fonds quelconques, les tantièmes et les dividendes.

L'entreprise ne pourra engager des dépenses d'exploitation d'un caractère nouveau qu'avec l'autorisation du département des postes et des chemins de fer.

Art. 4.

En cas d'avis favorable, la requête est l'objet d'une publication officielle invitant les opposants à s'annoncer dans un délai péremptoire.

Si l'opposition est valable, aucune suite n'est donnée à la requête.

Sont autorisés à faire opposition les créanciers gagistes et les créanciers jouissant d'un droit de priorité aux termes de l'article 7 de la loi fédérale du 25 septembre 1917 concernant la constitution de gages sur les entreprises de chemin de fer et de navigation et la liquidation forcée de ces entreprises.

Dans les emprunts par obligations, il ne peut être formé opposition sans une décision de l'assemblée des créanciers constatée par acte authentique. L'opposition est valable lorsqu'elle réunit les deux tiers du capitalobligations représenté à l'assemblée. Le débiteur peut convoquer celle-ci de son chef. Il est tenu de la convoquer lorsque, durant le délai d'opposition, des créanciers représentant au total 20 pour cent au moins du capital non remboursé d'un emprunt en font la demande ou se prononcent contre l'octroi de l'aide; il en est de même lorsque la convocation est exigée par le représentant de la communauté. Les requêtes doivent être faites par écrit. Pour le surplus, la législation fédérale relative à la communauté des créanciers est applicable par analogie, en tant que ses dispositions ne sont pas contraires à celles du présent arrêté.

Art. 5.

Le Conseil fédéral statue définitivement sur les demandes de secours; il peut imposer dans chaque cas des conditions particulières.

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Art. 6, La Confédération et les cantons intéressés accordent l'aide ensemble, ceux-ci étant autorisés à appeler des communes à prêter leur concours ou à prendre leur place.

L'aide à accorder fera, dans chaque cas, l'objet d'un arrangement entre la Confédération et les cantons d'une part et l'entreprise d'autre part.

Art. 7.

Les excédents de recettes (art. 3) de chaque année devront servir en premier lieu au remboursement des prêts susmentionnés -- le cas échéant avec les intérêts, l'arriéré compris -- au prorata de la participation des créanciers.

Art. 8.

En cas de faillite de l'entreprise, le produit des enchères sera employé d'abord à l'extinction des dettes mentionnées aux chiffres 1 à 4 de l'article 40 de la loi fédérale concernant la constitution de gages sur les entreprises de chemin de fer et de navigation et la liquidation forcée de ces entreprises, puis, avant le règlement de toutes créances privilégiées ou autres, au paiement du montant non remboursé des prêts susmentionnés, y compris les intérêts courants ou arriérés.

Art. 9.

Entre le dépôt d'une demande de secours auprès des autorités fédérales et la décision du Conseil fédéral, ou, lorsque l'aide est accordée, entre cette décision et le terme d'un délai de cinq ans à compter du dernier prêt ou de la dernière subvention à fonds perdu, la liquidation de l'entreprise ne peut être ordonnée qu'à la demande du Conseil fédéral ou, si elle est requise par d'autres intéressés, avec son assentiment.

Art. 10.

Il est ouvert au Conseil fédéral un crédit de quatre cent mille francs, comprenant les trois cent mille francs déjà alloués, en vue de la constitution d'un fonds destiné à l'octroi des subventions à fonds perdu, ainsi qu'à couvrir les différences d'intérêts (art. 2, 1er al.). Les prélèvements annuels ne devront pas s'élever, en règle générale, à plus de cent mille francs par an.

Le Conseil fédéral pourra, dans les limites fixées à l'alinéa premier, disposer de ce fonds même après l'expiration de la durée de validité du présent arrêté.

Art. 11.

Le département des postes et des chemins de fer peut accorder aux entreprises de chemin de fer et de navigation au bénéfice d'une concession,

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en lieu et place de l'aide financière ou à côté de celle-ci, des facilités pour l'exécution des obligations qui leur sont imposées par la loi ou les concessions.

De telles facilités peuvent également être accordées aux entreprises qui n'ont pas droit à l'aide financière.

Art. 12.

Le présent arrêté entre en vigueur le 1er janvier 1938.

Il est aussi applicable aux requêtes qui, à cette date, n'auront pas encore été liquidées; l'article 9 s'applique en outre aux secours qui auront été octroyés avant l'entrée en vigueur du présent arrêté.

Art. 13.

Le présent arrêté cessera d'exercer son effet le 31 décembre 1939; son application, après cette date, aux requêtes qui n'auront pas encore été liquidées à fin 1939 demeure réservée.

Les articles 7 et 8 sont applicables aux créances nées sous l'empire du présent arrêté ou de l'arrêté fédéral du 13 avril 1933, jusqu'à l'extinction de ces dernières.

Les créances nées sous l'empire de l'arrêté fédéral du 18 décembre 1918 concernant le secours aux entreprises de transport en souffrance restent soumises, jusqu'à leur extinction, aux articles 9 et 11 de cet arrêté.

Art. 14.

Le Conseil fédéral est chargé de publier le présent arrêté en vertu de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et les arrêtés fédéraux.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant une aide en faveur des entreprises privées de chemin de fer et de navigation dont l'exploitation est compromise par la crise. (Du 29 juin 1937.)

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07.07.1937

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