00.092 Message relatif à l'accord entre la Suisse et la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine concernant l'entraide judiciaire en matière pénale du 22 novembre 2000

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous avons l'honneur de vous soumettre, en vous proposant de l'adopter, un projet d'arrêté fédéral relatif à l'accord signé le 15 mars 1999 entre la Suisse et la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine concernant l'entraide judiciaire en matière pénale.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

22 novembre 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2000-2357

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Condensé Hong Kong, ancienne colonie de la Couronne britannique, a été restituée à la République populaire de Chine le 1er juillet 1997. Depuis cette date, Hong Kong est instituée Région administrative spéciale de la République populaire de Chine («Special Administrative Region», SAR Hong Kong) pour les cinquante prochaines années et dotée de sa propre loi fondamentale («Basic Law»). Durant cette période, la SAR Hong Kong jouit de pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires autonomes.

Sur le plan international, la SAR Hong Kong peut conclure, notamment en matière d'entraide judiciaire, des accords avec des Etats étrangers, toutefois toujours sous réserve d'approbation par la République populaire de Chine. De ce fait, la latitude dont elle jouit dans le cadre des négociations est quelque peu restreinte.

Les négociations du présent accord ont commencé avant la restitution de la colonie de la Couronne britannique de Hong Kong à la République populaire de Chine.

Tant la SAR Hong Kong que la Suisse sont des places financière importantes. Aussi l'accord qui fait l'objet du présent message revêt-il une grande importance pour les deux Parties. Il est impérieux de disposer d'instruments efficaces de coopération internationale en matière pénale si l'on veut pouvoir lutter en particulier contre le crime organisé et le blanchiment d'argent. La République populaire de Chine a appuyé les négociations parce qu'elle a aussi intérêt à ce que l'économie de la SAR Hong Kong continue de prospérer, d'où la nécessité de prévenir l'accroissement de la criminalité, et en particulier le développement de la corruption.

Au surplus, l'accord a une grande importance politique pour la SAR Hong Kong.

Chaque accord bilatéral qu'elle conclut contribue à renforcer son autonomie et lui confère une protection internationale contre les immixtions de la République populaire de Chine et les violations par celle-ci des droits garantis par la loi fondamentale. C'est pourquoi la SAR Hong Kong a également mené des négociations dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale avec divers Etats, entre autres les USA, la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle Zélande, la France, la GrandeBretagne et l'Italie. Certains de ces accords sont déjà en vigueur.

Le présent accord constitue la base juridique permettant de procéder
à l'identification de personnes recherchées et à la communication du lieu où elles se trouvent, à la remise de documents, à l'audition de témoins et d'experts sur le territoire de l'autre Partie, à la remise de détenus aux fins d'interrogatoire, à l'obtention de moyens de preuve tels que des actes judiciaires et des documents officiels. L'accord réglemente en outre la perquisition, la fouille et la saisie et régit la possibilité de remettre à l'autre Partie des biens et des valeurs saisis résultant d'infractions, en vue de leur restitution aux ayants droit; de même, il réglemente le dépistage, le blocage et la confiscation des biens et valeurs provenant d'infractions. Il favorise également de manière générale l'échange d'informations.

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Dans ses grandes lignes, le texte de l'accord correspond à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1) et est en harmonie avec la loi sur l'entraide pénale internationale (EIMP; RS 351.1). Il contient également des dispositions qui s'inspirent de la Convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime (RS 0.311.53).

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Message 1

Partie générale

1.1

Situation initiale

En avril 1995, lors d'une visite de travail du conseiller fédéral Flavio Cotti, les autorités de Hong Kong ont manifesté de l'intérêt à la conclusion avec la Suisse d'un accord d'extradition, la raison étant qu'après la restitution de la colonie de la Couronne britannique à la République populaire de Chine, l'accord d'extradition du 26 novembre 1880 conclu par la Grande-Bretagne ne serait plus applicable à la SAR Hong Kong nouvellement créée, d'où un risque de vide juridique en matière d'extradition.

Simultanément, les autorités de Hong Kong ont suggéré l'engagement de négociations relatives à un accord d'entraide judiciaire en matière pénale. Hong Kong entendait, d'une part, renforcer sa position par rapport à la République populaire de Chine une fois qu'elle aurait réintégré son giron, en concluant dans ce domaine des accords bilatéraux avec le plus grand nombre d'Etats possible et en entamant les négociations y relatives avant la restitution à la Chine. D'autre part, étant donné l'importance des places financières que sont Hong Kong et la Suisse, un accord d'entraide judiciaire en matière pénale présentait un intérêt notable pour les deux Parties. Sachant que l'accord avec la Suisse ne pourrait pas entrer en vigueur avant la restitution de Hong Kong à la République populaire de Chine, l'ancienne colonie de la Couronne britannique a soumis à la Chine, préalablement aux négociations, un projet d'accord-type pour le domaine de l'entraide judiciaire. La République populaire de Chine a approuvé ledit projet, ayant, elle aussi, un intérêt vital à ce que cette importante métropole financière continue de prospérer. A cet égard, il s'agissait principalement de prévenir l'accroissement de la criminalité et, en particulier, le développement de la corruption.

1.2

Déroulement des négociations

Les délégations des deux Parties se sont rencontrées à Berne en octobre 1995 déjà.

Deux points figuraient à l'ordre du jour: la coopération en matière d'extradition et d'entraide judiciaire.

En matière d'extradition, les pourparlers ont été suspendus, aucun compromis ne pouvant être trouvé sur des questions de principe essentielles. D'une manière générale, la Suisse a pour habitude de ne conclure plus que des accords d'extradition qui se révèlent efficaces dans la pratique. Hong Kong, cependant, n'a pas pu se résoudre à renoncer aux dispositions usuelles en droit anglo-saxon ­ notamment à l'exigence d'un dossier de preuves ­ ni aux listes d'infractions, toutes dispositions qui sont aujourd'hui désuètes en droit européen. Il est notoire, par exemple, que c'est en raison des prescriptions touffues et tatillonnes concernant l'exigence d'un dossier de preuves que les procédures ont traîné en longueur dans les cas Rey et Krüger. A noter également que dans des cas de moindre importance, la Suisse a, pour des motifs de proportionnalité, régulièrement renoncé à l'exécution d'une procédure d'extradition. Etant donné que, le 1er juillet 1997, une loi est entrée en vigueur à

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Hong Kong qui ­ à l'instar de la loi suisse du 20 mars 1981 sur l'entraide pénale internationale (EIMP)1 ­ permet l'extradition dans des cas particuliers et sur la base d'assurances relatives à la réciprocité, on a considéré que cette loi comblait largement le vide juridique causé par la caducité de l'accord d'extradition valable à l'époque où Hong Kong était colonie britannique.

Dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale, les deux Parties ont pu élaborer en commun un premier projet sur la base du texte-type proposé par Hong Kong et du modèle d'accord présenté par la Suisse (ce modèle s'inspirait du texte de l'accord du 7 octobre 1993 concernant l'entraide judiciaire en matière pénale conclu entre la Suisse et le Canada2). Différents points ont donné lieu à des divergences de vues qu'il n'a, toutefois, pas été possible d'éliminer au cours de la première phase des négociations.

La deuxième phase des pourparlers s'est ouverte à Hong Kong en octobre 1996. Elle a permis de trouver des compromis s'agissant des points controversés et de mettre au point le libellé du texte qui, finalement, a été paraphé par les deux Parties.

Le 1er juillet 1997, Hong Kong a été restituée à la République populaire de Chine.

Hong Kong fut instituée «Région administrative spéciale» (Special administrative Region, SAR) pour les cinquante prochaines années et dotée de sa propre loi fondamentale, qui fixe son statut de région autonome et délimite ses compétences. Cette loi confère à la SAR un haut degré d'autonomie. Hong Kong jouit de compétences exécutives, législatives et judiciaires étendues. Sur le plan international, la SAR Hong Kong ­ en vertu du pouvoir qui lui est délégué par le gouvernement de la République populaire de Chine ­ peut conclure de manière autonome, notamment en matière d'entraide judiciaire, des accords avec des Etats étrangers (art. 96 de la loi fondamentale), toutefois toujours sous réserve d'approbation par la République populaire de Chine.

Dans la perspective de négociations relatives à des accords d'entraide judiciaire en matière pénale, la République populaire de Chine avait préalablement approuvé un projet d'accord-type. Les difficultés rencontrées par la délégation de Hong Kong au cours des négociations provenaient du fait qu'elle était tenue de bien motiver visà-vis de la
République populaire de Chine tout écart par rapport au projet d'accordtype. En dépit de cette contrainte, la Suisse est parvenue à faire admettre à sa partenaire qu'il fallait aboutir à un accord dont la teneur serait proche de celle de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (CEEJ)3. Il convient de mentionner que la délégation de Hong Kong a accepté de renoncer à intégrer dans l'accord des dispositions formelles usuelles en droit anglosaxon. La Suisse a également obtenu que diverses dispositions soient reprises de la Convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime4 (ci-après «Convention relative au blanchiment d'argent»). Les nombreux compromis en faveur de la Suisse ne purent être obtenus que du fait que Hong Kong avait un intérêt important à la conclusion d'un tel accord.

Afin de ménager la susceptibilité de la République populaire de Chine, très sensible dès que l'on semble toucher à sa souveraineté, les deux partenaires se sont attachés à 1 2 3 4

RS 351.1 RS 0.351.923.2 RS 0.351.1 RS 0.311.53

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adopter une terminologie tenant compte de certaines nuances (c'est ainsi qu'à la notion de «droit national» on a préféré celle de droit «interne», à l'expression «Etats» celle de «Parties», enfin au terme «Traité» celui d'«accord»).

L'accord concernant l'entraide judiciaire en matière pénale a été signé à Hong Kong le 15 mars 1999.

2

Partie spéciale

2.1

Commentaire de l'accord

L'accord est progressiste et répond aux exigences de la pratique actuelle puisqu'il ne se borne pas à reprendre les bases juridiques qui ont donné satisfaction dans le domaine de l'entraide judiciaire, mais les complète par des dispositions modernes et novatrices. Son application pratique est au surplus notablement facilitée par sa systématique claire. Celle-ci, de même que la teneur de l'accord, s'inspirent fortement de la CEEJ. De plus, l'accord est en harmonie avec la loi fédérale révisée sur l'entraide pénale internationale (EIMP).

Les dispositions de procédure nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord figurent dans la première et la troisième parties de l'EIMP. Dans la mesure où elles ne sont pas contraires à l'accord, ces dispositions s'appliquent à titre complémentaire.

2.2

Commentaire des diverses dispositions de l'accord

2.2.1

Chapitre I

Art. 1

Dispositions générales

Obligation d'accorder l'entraide judiciaire

Le par. 1 institue entre les Parties l'obligation de droit international public de s'accorder réciproquement l'entraide judiciaire la plus large possible. Celle-ci peut ou doit, cependant, être refusée pour l'un des motifs énumérés à l'art. 3. Elle peut également être différée dans certaines conditions. Tout refus ou ajournement de l'entraide judiciaire doit toujours être motivé.

Le par. 2 contient une liste non exhaustive des principales mesures d'entraide pouvant être demandées en vertu de l'accord. Celles-ci sont toutefois énumérées de manière plus détaillée que d'ordinaire, ce qui se justifie étant donné que la SAR Hong Kong et la République populaire de Chine ont un système juridique différent du nôtre.

Art. 2

Inapplicabilité de l'accord

L'accord ne s'applique pas à l'extradition, ni à l'exécution de jugements pénaux5, ni à la répression d'infractions au sens de la législation militaire. On trouve une teneur similaire à l'art. 1, par. 2, CEEJ.

5

138

La remise de biens et valeurs en vue de confiscation ou de restitution qui, au sens de l'art. 74a EIMP intervient en règle générale sur décision, ne représente pas un cas d'application du présent article (cf. art. 12 et les explications y relatives).

Art. 3

Motifs de refus ou d'ajournement de l'entraide judiciaire

Cet article énumère les motifs de refus de l'entraide judiciaire et prévoit deux catégories: les motifs impératifs (par. 1) et les motifs facultatifs (par. 2). Cette subdivision est plutôt atypique pour des accords bilatéraux en matière d'entraide judiciaire, ceux-ci se limitant généralement à statuer des motifs facultatifs de refus (clauses potestatives). La réglementation adoptée ici constitue un compromis car, initialement, Hong Kong voulait rendre impératifs tous les motifs de refus. L'art. 3 prévoit, en outre, la possibilité de différer l'entraide judiciaire (par. 3) et de soumettre l'octroi de celle-ci à des conditions (par. 4, let. b, et par. 5).

Le par. 1 comporte une liste des motifs impératifs de refus. Ils correspondent à ceux qui sont énumérés aux art. 1a, 2, 3, 5 et 64 EIMP ainsi qu'aux art. 2 et 5 CEEJ (y compris les réserves formulées par la Suisse à l'égard de ces deux derniers articles).

Concrètement, l'entraide judiciaire demandée ne doit pas porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public6 de la Suisse ni, s'agissant de Hong Kong, porter atteinte à la République populaire de Chine (let. a). La Partie requise (la Suisse ou la SAR Hong Kong) doit refuser l'entraide judiciaire si elle estime que le fait de l'accorder pourrait porter atteinte de manière prépondérante à ses intérêts essentiels (let. b). Elle doit aussi refuser l'entraide si la demande concerne une infraction fiscale, à moins qu'il ne s'agisse d'une escroquerie en la matière7 (let. d).

L'entraide doit également être refusée lorsqu'elle vise une infraction à caractère politique (let. c) ou encore lorsque des motifs sérieux semblent indiquer que l'exécution de la demande portera préjudice à une personne en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques (let. e). La demande d'entraide est également refusée lorsqu'elle se rapporte à la poursuite d'une personne en raison d'une infraction pour laquelle elle a été condamnée ou acquittée ou encore a bénéficié d'une mesure de grâce dans la Partie requise (principe «ne bis in idem», let. f). Enfin, si la demande implique des mesures de contrainte et vise des actes ou des omissions qui n'auraient pas été punissables selon le droit de la Partie requise, celle-ci refuse l'entraide judiciaire (let. g; cf. les explications
relatives à l'art. 5).

Le par. 2 régit les motifs facultatifs de refus. La partie requise peut refuser d'accorder l'entraide pour cause de prescription (let. a) ou parce que la Partie requérante ne donne pas suite aux conditions relatives à la confidentialité (let. b). La lettre c permet, quant à elle, de ne pas donner suite à une demande qui concerne une infraction punissable de la peine de mort. En pareille occurrence, la Partie requise peut, toutefois, accorder l'entraide à condition que la Partie requérante lui fournisse des assurances suffisantes comme quoi la peine de mort ne sera pas prononcée ou, si elle l'est, ne sera pas exécutée. Le motif établi à la lettre c constitue une innovation dans le domaine des accords bilatéraux d'entraide judiciaire. Cette disposition a été expressément demandée par la SAR Hong Kong. A noter que celle-ci a aboli récemment la peine de mort.

6

7

La notion d'«ordre public» inclut le respect des droits fondamentaux de la personne humaine, notamment le droit à la vie, l'interdiction de la torture ou d'autres traitements inhumains ou dégradants, l'interdiction de la peine de mort et les garanties fondamentales de procédure.

Une escroquerie fiscale est par exemple réalisée lorsque les autorités fiscales sont trompées par des indications fausses, falsifiées ou matériellement inexactes ou par toute autre tromperie astucieuse; cf. p. ex. ATF 125 II 250.

139

Le par. 3 confère à la Partie requise la faculté de différer l'entraide judiciaire si l'exécution de la demande devait avoir pour effet de compromettre une enquête ou une poursuite pénale en cours sur son territoire.

Avant de refuser ou de différer l'entraide judiciaire, la Partie requise doit se mettre en relations avec la Partie requérante. Elle est tenue, d'une part, de l'informer des motifs pour lesquels elle envisage de refuser ou de différer l'entraide (par. 4, let. a).

D'autre part, elle a l'obligation de consulter la Partie requérante aux fins de déterminer si l'entraide ne pourrait pas néanmoins être accordée à des conditions bien précises (par. 4, let. b). Si la Partie requérante accepte ces conditions, elle est tenue de les respecter (par. 5).

Art. 4

Droit applicable

Cette disposition reprend le principe usuel en matière d'entraide judiciaire internationale selon lequel la demande est exécutée conformément au droit de l'Etat requis.

En Suisse elle l'est selon l'EIMP ainsi que selon les codes de procédure pénale des cantons et de la Confédération. Hong Kong dispose également depuis peu d'une loi d'entraide judiciaire.

Ce principe est concrétisé par les dispositions énumérées ci-après: tout d'abord, la demande est exécutée conformément aux instructions qu'elle contient à condition quelles ne violent pas le droit de la Partie requise (art. 28, par. 4). Si la Partie requérante exige la certification de moyens de preuve, la Partie requise doit s'exécuter (art. 31, par. 2). A la demande expresse de la Partie requérante, la partie requise procède à la remise de documents dans les formes souhaitées pour autant que cela soit compatible avec son droit interne (art.17, par. 2). Enfin, toute personne appelée à témoigner dans la Partie requise peut refuser de déposer en se prévalant du fait que le droit de la Partie requérante lui accorderait cette faculté (art. 10, par. 1, let. b).

Art. 5 en liaison avec art. 3, par. 1, let. g

Mesures de contrainte

Afin que la Partie requise puisse prendre les mesures de contrainte ­ telles que perquisition et fouille, audition de témoins, saisie d'instruments ayant servi à commettre l'infraction ou encore levée de secrets protégés par la loi ­ nécessaires à l'exécution de la demande d'entraide, il faut, conformément à l'art. 3, par. 1, let. g, que l'infraction pour laquelle des poursuites pénales ont été engagées soit punissable tant dans la Partie requérante que dans la Partie requise (principe de la double incrimination). Si cette condition n'est pas remplie, aucune mesure de contrainte ne peut être ordonnée.

La condition de la double incrimination à laquelle sont subordonnées les mesures de contrainte figure également à l'art. 64, al. 1, EIMP ainsi que dans la réserve formulée par la Suisse à l'égard de l'art. 5, par. 1, let. a, CEEJ.

L'art. 5 stipule que les mesures requises ne peuvent être remplacées par d'autres mesures que si la Partie requérante y consent préalablement. Cette clause doit permettre d'éviter, par exemple, qu'un simple interrogatoire de police soit substitué à l'audition formelle de témoins demandée.

140

2.2.2 Art. 6

Chapitre II

Obtention de moyens de preuve

Principes généraux

Cet article établit deux principes généraux régissant l'obtention de preuves.

D'abord, en vertu du par. 1, lorsqu'une demande est déposée en vue de l'obtention de preuves dans le cadre de la poursuite d'une infraction qui relève de la compétence juridictionnelle de la Partie requérante, la Partie requise est tenue de réunir ces preuves.

Le par. 2 énumère les actes qui entrent dans la récolte des preuves, à savoir la remise à la Partie requérante de documents, de dossiers, de moyens de preuves ou d'objets.

Art. 7

Utilisation restreinte

Cet article régit la règle de la spécialité. La Suisse attache une grande importance à la règle de la spécialité, laquelle se trouve également dans l'EIMP (art. 67) et dans la réserve formulée par la Suisse à l'art. 2 CEEJ.

Le libellé retenu est un peu plus restrictif et représente un compromis qui correspond à celui de l'accord-type soumis par Hong Kong préalablement aux négociations. Il est en harmonie avec la réglementation correspondante de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988 8.

L'art. 7 prévoit que la Partie requérante ne peut utiliser ni transmettre les informations ou les moyens de preuve obtenus à d'autres fins que celles mentionnées dans la demande, à moins que la Partie requise y ait préalablement consenti.

Art. 8

Perquisition, fouille et saisie

Cet article règle de manière étendue la perquisition, la fouille et la saisie de même que la remise de moyens de preuve. Il constitue une disposition moderne qui revêtira une importance déterminante, en particulier dans le domaine financier lors de la production des documents bancaires. La mesure d'entraide correspondante est prévue à l'art. 63 EIMP.

Le par. 1 fait obligation à la Partie requise d'exécuter les demandes de perquisition, de fouille et de saisie ainsi que de remise de toutes preuves qui sont déterminantes pour une enquête ou une procédure pénale ouverte par la Parie requérante.

En vertu du par. 2, la Partie requise fournit à la Partie requérante ­ si elle le demande ­ les informations concernant le résultat des perquisitions et fouilles, le lieu et les circonstances de la saisie ainsi que la détention des biens et valeurs saisis.

Si, d'une part, la Partie requise est tenue de remettre les biens et valeurs saisis à la Partie requérante, celle-ci est tenue, d'autre part, de respecter les conditions fixées par la Partie requise s'agissant de ces biens et valeurs (par. 3).

8

FF 1996 I 557, art. 7, ch. 13

141

Art. 9

Présence de personnes

Cet article donne la possibilité aux autorités et personnes impliquées dans la procédure pénale ainsi qu'à leurs représentants juridiques d'être présents lors de l'exécution de la demande d'entraide, la condition étant que la Partie requise y consente.

En général, cette présence contribue à améliorer et à rendre plus efficace le déroulement de la procédure d'entraide, en particulier dans le cas de procédures complexes. Ainsi, il peut être dans l'intérêt du juge requis de bénéficier du soutien de l'autorité étrangère qui a ouvert l'instruction et connaît bien l'affaire. Cette disposition correspond à l'art. 4 CEEJ. De même, l'EIMP permet aux personnes qui participent à la procédure à l'étranger d'assister aux actes d'entraide, lorsque l'Etat requérant le demande en vertu de son droit interne ou que cette présence permet de faciliter considérablement l'exécution de la demande ou la procédure pénale étrangère (art. 65a EIMP).

Art. 10

Réception de témoignages ou d'autres déclarations

Toute personne appelée à témoigner dans la Partie requise, conformément à une demande d'entraide, peut refuser sa déposition lorsque le droit de l'une ou l'autre des deux Parties lui accorde cette faculté (par. 1). Si elle se prévaut de cette faculté en vertu du droit de la Partie requérante, la Partie requise demande à cet égard une confirmation par l'autorité centrale de la Partie requérante (par. 2).

Les par. 3 et 4 traitent des questions devant être posées à la personne appelée à déposer. Celles-ci doivent être indiquées dans la demande. L'autorité compétente de la Partie requise peut également poser des questions complémentaires.

Art. 11

Remise d'objets, de documents, de dossiers et de moyens de preuve

Cet article dispose que, nonobstant les droits que peuvent faire valoir des tiers sur des objets, des documents, des dossiers ou d'autres moyens de preuve, la Partie requise peut les remettre à la Partie requérante. Toutefois, à moins qu'il n'en soit convenu autrement, celle-ci restitue ce qui lui a été remis au plus tard à la clôture de la procédure.

Art. 12

Restitution des biens et valeurs

Les biens et valeurs obtenus par la commission d'une infraction qui sont saisis par la Partie requise peuvent être remis à la Partie requérante en vue de restitution aux ayants droit. Toutefois, les droits que les personnes ont acquis de bonne foi sur ces biens sont réservés. Ces droits doivent être satisfaits en priorité.

La remise des biens obtenus par la commission d'infractions, en vue de leur restitution aux ayants droit, complète l'art. 11, qui règle la remise de moyens de preuve.

Une réglementation analogue figure à l'art. 74a révisé de l'EIMP. Elle répond aux impératifs de la pratique.

Art. 13

Documents accessibles au public et documents officiels

La Partie requise est tenue de fournir à l'autre Partie des copies des documents accessibles au public, par exemple des coupures de presse, des publications diverses, des jugements publiés ou encore des extraits de registres de l'état civil, du commerce, des poursuites ainsi que du registre foncier.

142

La Partie requise peut également fournir à l'autre Partie des copies de documents officiels (documents dits «administratifs») dans la même mesure et aux mêmes conditions que pour des documents mis à la disposition de ses propres autorités judiciaires et autorités appliquant la loi.

Art. 14

Dossiers judiciaires

La Partie requise doit mettre à la disposition de la Partie requérante ses dossiers judiciaires, là encore, aux mêmes conditions et dans la même mesure qu'à l'égard de ses propres autorités.

Art. 15

Echange d'informations relatives à des dossiers pénaux

La Suisse informe la SAR Hong Kong des peines privatives de liberté auxquelles sont condamnés, sur son territoire, des résidents permanents de Hong Kong. De son côté, la SAR Hong Kong fournit à la Suisse les mêmes informations se rapportant à des nationaux suisses. Les Parties se transmettent spontanément ces informations au moins une fois par année. En fait, il s'agit de s'informer mutuellement des jugements pénaux impliquant une peine privative de liberté qui ont été inscrits au casier judiciaire depuis la dernière communication. Cette manière de procéder permet aux Parties de tenir à jour leurs casiers judiciaires. La CEEJ contient une disposition similaire, quoique libellée en termes plus généraux (art. 22).

Art. 16

Communication d'informations en vue de poursuites pénales

Cette disposition permet à chaque Partie, sans en être requise préalablement, de transmettre à l'autre Partie, par l'intermédiaire des autorités centrales, des informations ou des moyens de preuve en vue de poursuites pénales. Cette réglementation s'appliquera notamment lorsque des personnes poursuivies dans une Partie s'enfuient sur le territoire de l'autre Partie d'où elles ne peuvent être extradées parce qu'elles sont, par exemple, ressortissantes de cette Partie. Si la Partie à laquelle les informations ou moyens de preuve ont été transmis engage des poursuites pénales, elle est tenue de communiquer à l'autre Partie toute mesure prise et de lui remettre une copie de toute décision rendue à cet égard. Cette disposition s'inspire de l'art.

21 CEEJ.

2.2.3

Art. 17

Chapitre III Remise de documents - Comparution de personnes Remise de documents

Cette disposition reprend la réglementation prévue à l'art. 7 CEEJ.

Art. 18

Comparution de témoins ou d'experts dans la Partie requérante

Les par. 1 et 2 traitent de la comparution de témoins ou d'experts dans la Partie requérante. Si la personne citée à comparaître ne donne pas suite à la citation, la réglementation prévue à l'art. 20 est applicable.

Le par. 3 stipule que les indemnités et débours à verser aux personnes susmentionnées sont à la charge de la Partie requérante.

143

Art. 19

Remise de personnes détenues

Lorsque la Partie requérante demande la comparution d'une personne détenue dans la Partie requise, cette personne sera transférée sur le territoire de la Partie requérante, à condition que cette dernière ait garanti le maintien de la personne en détention et son renvoi dans la Partie requise dès que la mesure d'entraide aura été exécutée (par. 1).

Le par. 2 énumère les motifs que peut invoquer la Partie requise pour refuser la remise. Ceux-ci visent, en particulier, à assurer la protection de la personne détenue.

Elle pourra, toutefois, aussi être remise sans son consentement, par exemple pour des confrontations. Cependant si la personne détenue est citée à comparaître comme témoin, sa remise contre son gré n'aura guère de sens.

Le par. 3 stipule, une fois de plus, expressément que la personne remise doit rester en détention dans la Partie requérante, à moins que la Partie requise ne demande sa mise en liberté. Si la personne remise a fini de purger sa peine pendant qu'elle se trouve sur le territoire de la Partie requérante, la Partie requise doit l'en aviser. Dans ce cas, la Partie requérante ordonne la mise en liberté de la personne détenue (par. 4).

Art. 20

Défaut de comparution

Lorsqu'une personne ne donne pas suite à une citation à comparaître, alors même que cette citation contiendrait un avis comminatoire, elle ne peut être soumise à aucune sanction ni mesure de contrainte. Cette règle ne s'applique pas si la personne en question se rend par la suite de son plein gré sur le territoire de la Partie requérante et qu'elle y est citée à nouveau en bonne et due forme.

Art. 21

Sauf-conduit

Cette disposition reprend, grosso modo, les garanties statuées à l'art. 12 CEEJ, en les complétant aux par. 2 et 3. La réglementation prévue concerne des personnes qui participent à des actes d'instruction ou à une procédure dans la Partie requérante.

Le par. 1 garantit aux personnes qui sont citées à comparaître en qualité de témoin ou d'expert devant les autorités judiciaires de la Partie requérante qu'elles ne seront ni poursuivies, ni détenues, pas plus qu'elles ne seront soumises à une restriction de leur liberté personnelle, ni à une action civile pour des actes ou omissions datant d'avant leur départ de la Partie requise. Le par. 4 règle la protection des personnes inculpées. Celles-ci ne peuvent être ni poursuivies, ni détenues, ni soumises à une restriction de leur liberté personnelle pour des actes commis ou omis antérieurement à leur départ de la Partie requise et non visés par la citation à comparaître.

Les garanties deviennent caduques lorsque la personne ­ ayant eu la possibilité de quitter la Partie requérante sans aucune entrave de la part de ses autorités ­ y est demeurée à l'expiration d'une période de trente jours après avoir été informée que sa présence n'était plus requise. La protection est également levée lorsque la personne est retournée sur le territoire de la Partie requérante après l'avoir quitté (par. 5).

Le par. 2 stipule que les personnes qui consentent à comparaître dans la Partie requérante conformément aux art. 18 et 19 ne peuvent faire l'objet d'une poursuite pénale en raison de leurs déclarations, à moins qu'elles n'aient fait une fausse dépo-

144

sition sous serment. En outre, conformément au par. 3, ces personnes ne peuvent être tenues de déposer dans une procédure autre que celle visée par la demande.

2.2.4

Chapitre IV

Produits des infractions pénales

L'intégration, dans un accord d'entraide judiciaire, des dispositions commentées ciaprès revêt de l'importance avant tout en matière de lutte contre le crime organisé et le blanchiment d'argent. Il convient en particulier de souligner que, telle qu'elle est réglée, la saisie conservatoire constitue un progrès important dans le domaine de la coopération internationale en matière pénale.

Art. 22

Dépistage des produits ou instruments d'infractions pénales

Cette disposition vise à permettre aux deux Parties de se prêter mutuellement assistance dans le dépistage de produits issus d'infractions ou d'instruments ayant servi à commettre celles-ci. Sur demande, la Partie requise enquête aux fins de déterminer si de tels produits ou instruments qui lui ont été signalés par la Partie requérante se trouvent effectivement sur son territoire. Elle communique le résultat de ses recherches à la Partie requérante.

Cette réglementation de coopération dans la recherche de produits ou d'instruments issus d'infractions pénales s'inspire des art. 8 et 9 de la Convention relative au blanchiment d'argent ratifiée par la Suisse en 1993.

Art. 23

Mesures provisoires

Lorsque, en exécution d'une demande au sens de l'art. 22, la Partie requise dépiste les produits et instruments en question, elle prend les mesures admises par son droit interne aux fins d'empêcher le commerce, l'aliénation ou le transfert de ces produits ou instruments jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été rendue par la Partie requérante. En pareille occurrence, il n'est pas nécessaire que la Partie requérante présente une demande spéciale pour que de telles mesures soient prises. Il s'agira le plus souvent du gel d'avoirs ou de la saisie des produits et instruments concernés.

L'adoption de mesures provisoires s'agissant de produits issus d'infractions ou d'instruments ayant servi à les commettre est également réglée dans la Convention relative au blanchiment d'argent (art. 11 et 12).

Outre l'EIMP (art.18), certains accords bilatéraux d'entraide judiciaire conclus par la Suisse, par exemple, l'accord avec les Etats-Unis9, avec l'Australie10 ainsi qu'avec le Pérou11 et l'Equateur12, confèrent la faculté d'ordonner des mesures provisoires. Toutefois, ni l'EIMP, ni les accords avec les Etats-Unis, le Pérou et l'Equateur ne permettent de prendre de telles mesures à titre préventif. Elles ne peuvent être ordonnées qu'au moment de l'exécution d'une demande d'entraide. A noter, cependant, que les mesures provisoires prévues dans ces instruments ne portent pas seulement sur les produits ou instruments issus d'infractions, mais sur tout moyen de preuve.

9 10 11 12

RS 0.351.933.6, art. 31 RS 0.351.915.8, art. 16 RS 0.351.964.1 (RO 2000 828), art. 7 RS 0.351.932.7 (RO 2000 818), art. 6

145

Art. 24

Confiscation

La teneur de cette disposition s'inspire des art. 13 et suivants de la Convention relative au blanchiment d'argent.

L'article vise la confiscation de produits et d'instruments provenant d'infractions pénales. Il fait obligation aux Parties, si l'une le demande, de s'accorder l'entraide judiciaire la plus large possible de manière à assurer la confiscation de produits issus d'infractions pénales ou d'instruments ayant servi à les commettre. L'entraide peut consister soit en l'exécution d'une décision de confiscation émanant d'une autorité judiciaire de la Partie requérante, soit en l'ouverture d'une procédure de confiscation qui concerne les produits et instruments d'infractions pénales visés par la demande, soit encore en des mesures d'appui à une telle procédure (par. 1).

Les produits ou les instruments confisqués peuvent, sauf convention contraire, être conservés par la Partie requise (par. 2).

Art. 25

Transmission spontanée d'informations

L'échange rapide d'informations constitue une arme essentielle dans la lutte contre la criminalité internationale et, plus particulièrement, contre le crime organisé et le blanchiment d'argent. La présente disposition permet aux Parties de se transmettre spontanément ­ c'est-à-dire sans en être requises ­ des informations sur les produits et instruments issus d'infractions pénales. En règle générale, cette transmission ­ qui est facultative ­ a lieu par le canal des autorités centrales.

Pour qu'ait lieu la transmission spontanée d'informations, il faut, d'une part, que la Partie qui entend les communiquer estime que cette initiative pourrait aider la Partie destinataire dans ses investigations ou ses procédures ou l'inciter à déposer une demande d'entraide. Il faut, d'autre part, que la transmission des informations en vertu de cet article n'entrave pas les investigations ou procédures menées par la Partie émettrice.

A la différence du cas visé à l'art. 16, les informations transmises au titre de l'art. 25 ne doivent pas nécessairement être en rapport avec une procédure précise et ne portent que sur les produits issus d'infractions pénales ou sur des instruments ayant servi à les commettre.

Il s'agit d'une disposition moderne qui, au surplus, innove dans le domaine de l'entraide judiciaire. Elle correspond à l'art. 10 de la Convention relative au blanchiment d'argent. L'instrument que représente la transmission spontanée d'informations n'a été introduit dans l'EIMP (art. 67a) que lors de sa révision. Elle figure, également, dans l'accord additionnel à la CEEJ conclu entre la Suisse et l'Italie en 199813; toutefois contrairement à ce qui est le cas dans l'accord avec Hong Kong, il n'est, dans ces textes, pas limité aux seuls produits et instruments provenant d'infractions pénales.

2.2.5

Chapitre V

Procédure

Les dispositions commentées ci-après régissent la procédure à suivre par les Parties lorsqu'elles s'adressent des demandes d'entraide judiciaire.

13

146

FF 1999 1311, art. XXVIII

Art. 26

Autorité centrale

Cette disposition prévoit que chaque Partie désigne une autorité centrale (par. 1 et 2). Les demandes doivent être présentées exclusivement par le canal de ces autorités centrales (par. 3). De même la correspondance doit, en général, être échangée par l'intermédiaire desdites autorités. Celles-ci communiquent directement entre elles (par. 4); elles peuvent également transmettre leurs demandes par l'intermédiaire d'Interpol, notamment lorsqu'il y a urgence (par. 5).

La désignation d'autorités centrales est une mesure très utile, en particulier dans les rapports avec les Etats qui ont une tradition juridique différente de la nôtre. Chacune des Parties a, ainsi, dans l'autre un interlocuteur clairement défini qui est chargé de réceptionner les demandes d'entraide. Cette manière de régler les relations permet aux spécialistes des deux Parties d'établir des contacts personnels et directs, ce qui devrait contribuer à prévenir les malentendus et à améliorer la coopération. C'est en 1973, dans le cadre de l'accord d'entraide judiciaire conclu avec les Etats-Unis que la Suisse a, pour la première fois, institué une autorité centrale.

Art. 27

Contenu des demandes

Cet article énumère, à la façon d'une liste de contrôle habituelle, les indications que doivent contenir les demandes d'entraide pour pouvoir être exécutées. Si une demande est incomplète ou n'est pas conforme aux dispositions de l'accord pour toute autre raison, la Partie requise en informe la Partie requérante de telle sorte que cette dernière puisse compléter ou modifier la demande, conformément à l'art. 28, par. 3.

Le par. 3 de la présente disposition exclut expressément que la Partie requise puisse exiger que la demande soit accompagnée de moyens de preuve.

Art. 28

Exécution des demandes

Le par. 1 stipule que les demandes doivent être exécutées immédiatement soit par les autorités centrales, soit par les autorités compétentes. En l'occurrence, le droit applicable est celui de la Partie requise. Pour la Suisse, il s'agit de l'EIMP ainsi que des codes de procédure pénale des cantons et de la Confédération. Toutefois, la Partie requise devrait respecter également les instructions figurant dans la demande, pour autant qu'elles ne violent pas son droit interne (par. 4). Ces instructions peuvent, par exemple, avoir trait à la légalisation de documents servant de preuve ou encore à la déposition sous serment de témoins ou d'inculpés lors de leur interrogatoire.

En cas d'urgence, l'autorité centrale doit, dans la mesure du possible, prendre des mesures sans attendre d'être en possession de tous les documents (par. 2)14.

Le par. 3 offre la possibilité de modifier une demande qui n'est pas conforme à l'accord ou de compléter celle qui est lacunaire. Une disposition analogue figure à l'art. 28, al. 6, EIMP.

Lorsqu'il est prévisible que l'exécution de la demande subira un retard considérable, la Partie requise doit en informer la Partie requérante (par. 5).

Après l'exécution de l'entraide, l'autorité compétente transmet à l'autorité centrale de la Partie requise l'original de la demande, ainsi que les renseignements et moyens 14

Une réglementation similaire figure à l'art. 18 EIMP.

147

de preuve obtenus. Celle-ci s'assure que la demande a été correctement exécutée et, au besoin, renvoie le dossier à l'autorité d'exécution. A l'issue de la procédure, elle en communique les résultats à l'autorité centrale de la Partie requérante (par. 6).

Art. 29

Confidentialité

La Partie requise est tenue de traiter la demande et les informations qu'elle contient de manière confidentielle, à moins que la Partie requérante ne l'ait déliée de cette obligation. Les dispositions du droit interne sont réservées.

Art. 30

Obligation d'informer en cas de refus

Cet article confirme explicitement la réglementation prévue à l'art. 3, par. 4. Il stipule expressément qu'au cas où la Partie requise refuse d'exécuter tout ou partie de la demande, elle doit en informer immédiatement la Partie requérante en lui indiquant les motifs de sa décision.

Art. 31

Exigences de forme

Le par. 1 établit le principe selon lequel, dans le cadre d'une procédure d'entraide, ni l'une ni l'autre des Parties ne peut exiger de légalisation sous quelque forme que ce soit. Le même principe figure à l'art. 17 CEEJ. D'habitude, les Etats qui ont adopté le droit anglo-saxon attachent une grande importance à de telles formalités.

Dans ces Etats, en effet, tous les documents servant de preuve, y compris leur traduction doivent en général être scellés et munis de déclarations légalisées tenant lieu de serment. Dans ces conditions, le fait que l'on a pu exclure de l'accord des clauses imposant des légalisations peut être considéré comme un succès.

Le par. 2 permet à la Partie requérante d'exiger formellement que la Partie requise certifie les documents avant de les lui transmettre. Il s'agit uniquement d'apposer un simple tampon «certifié conforme à l'original» et non d'entamer une procédure de légalisation longue et dispendieuse. La certification peut être assurée par l'autorité centrale de la Partie requise.

Le par. 3 réitère expressément la règle selon laquelle les Parties ne peuvent exiger que les documents et autres moyens de preuve soient légalisés (certifiés ou authentifiés) par voie diplomatique.

Cet article, qui fixe l'exclusion, dans une large mesure, des exigences de forme vise à éviter les procédures longues et dispendieuses et, partant, à simplifier et à accélérer l'exécution des demandes d'entraide judiciaire.

Art. 32

Langue

Cet article stipule que la Partie requérante doit joindre à sa demande ainsi qu'aux pièces qui l'accompagnent une traduction dans une langue officielle de la Partie requise, celle-ci pouvant indiquer la langue officielle désirée dans le cas d'espèce.

Concrètement, il résulte de cette disposition que les demandes devront, selon les cas, être traduites dans l'une des langues contractuelles, soit l'anglais, l'allemand ou le chinois, ou dans une langue officielle de la Suisse.

148

Art. 33

Représentation et frais

Aux termes du par. 1, la Partie requise est tenue de mettre tout en oeuvre pour que la Partie requérante soit représentée dans toutes les procédures qui sont en relation avec une demande d'entraide. S'il est impossible de trouver un mandataire, elle défend elle-même les intérêts de la Partie requérante.

Les par. 2 et 3 règlent la prise en charge des frais. En règle générale, la Partie requise supporte les frais ordinaires d'exécution d'une demande d'entraide sur son territoire. Font, toutefois, exception les honoraires d'avocat et d'experts, les frais de traduction et d'interprétation ainsi que les frais de voyages et les indemnités (par.

2). Si au cours de l'exécution de la demande, il appert que celle-ci risque d'entraîner des frais extraordinaires, les deux Parties se consultent sur la manière de poursuivre l'exécution de la demande (par. 3).

2.2.6 Art. 34

Chapitre VI

Autres formes de coopération

Coopération policière

En vertu des art. 351ter à 351septies CPS15, de l'art. 75a EIMP et de l'art. 35 OEIMP, la Suisse peut d'ores déjà collaborer unilatéralement avec les autorités de police d'autres Etats. Toutefois, à la différence de l'entraide judiciaire proprement dite, cette coopération policière n'est admissible que pour autant qu'il ne s'agisse pas d'actes de procédure impliquant des mesures de contrainte. Les communications faites dans ce cadre peuvent, par exemple, porter sur l'identité de personnes, y compris les empreintes digitales, sur des documents d'enquête policière, des abonnés au téléphone ou des détenteurs de véhicule ou encore sur des informations relatives à des infractions commises par des personnes qui font l'objet d'une enquête de police criminelle. En revanche, il ne peut être demandé aucune audition de témoins, aucune écoute téléphonique, aucune perquisition, aucune saisie ni aucune remise de documents qui relèvent du secret d'affaires ou du secret bancaire.

La présente disposition règle la collaboration entre les autorités de police des deux Parties sur le plan bilatéral. Toutefois, il est fixé expressément que cette collaboration ne peut intervenir qu'à condition qu'aucune mesure de contrainte ne soit exigée.

Dans le cadre de cette coopération policière, les communications s'effectuent normalement par le canal d'Interpol et non par l'entremise des autorités centrales.

Art. 35

Autres bases de coopération

Cet article stipule que les Parties peuvent coopérer non seulement sur la base de l'accord, mais encore en vertu d'autres traités ou arrangements ainsi que de leur droit interne, à condition toutefois que cette coopération soit conforme à l'accord.

15

Code pénal suisse, RS 311.0

149

2.2.7 Art. 36 et 37

Chapitre VII Dispositions finales Echanges de vues et Règlement des différends

Ces deux articles ­ qui vont de pair ­ représentent un compromis puisque la SAR Hong Kong n'a pas voulu souscrire à la proposition de la Suisse de soumettre les différends entre les Parties à la Cour internationale de justice: Lorsque l'application ou l'exécution de l'accord soulève des questions ou donne lieu à des difficultés ­ que ce soit de manière générale ou dans un cas d'espèce ­ les autorités centrales des deux Parties peuvent se mettre en rapport et procéder par écrit ou verbalement à des échanges de vue, ou encore se rencontrer aux fins de confronter leurs points de vue (art. 36).

Lorsque l'interprétation, l'application ou l'exécution de l'accord donne lieu à des différends, les autorités centrales s'efforcent de les aplanir elles-mêmes. Si elles n'y parviennent pas, le règlement se fera par la voie diplomatique (art. 37).

2.3

Appréciation globale de l'accord

L'accord passé avec la SAR Hong Kong est un instrument moderne qui facilitera et renforcera la coopération entre les autorités de poursuite pénale des deux Parties, contribuant ainsi notablement à la lutte contre la criminalité internationale. Il s'agitlà du premier accord d'entraide judiciaire que la Suisse a conclu avec un Etat d'Asie. C'est dire qu'il aura valeur de modèle lors de la négociation d'accords en la même matière avec d'autres Etats d'Asie.

La teneur du présent accord s'inspire des dispositions de la CEEJ, de la Convention relative au blanchiment d'argent, de l'EIMP ainsi que de divers accords bilatéraux conclus par la Suisse en matière d'entraide judiciaire, et plus particulièrement avec le Canada et l'Australie.

L'accord prend en compte les impératifs de la pratique. Il est doté d'une systématique claire. Les exigences de formes posées habituellement par les Etats ayant adopté le droit anglo-saxon ont été notablement réduites. Enfin, dans le but de faciliter la procédure, la désignation d'une autorité centrale dans chaque Partie a été prévue; ces interlocutrices privilégiées communiquent directement entre elles.

Les dispositions du chapitre IV, qui portent notamment sur le dépistage et la confiscation de produits d'infractions, sont les premières à figurer de manière aussi détaillée dans un accord bilatéral conclu par la Suisse en matière d'entraide judiciaire.

Ces dispositions sont indispensables si l'on veut mener une lutte efficace, notamment contre le crime organisé et le blanchiment d'argent. Elles revêtent une portée certaine dans les relations avec Hong Kong, importante place bancaire. Quant à leur teneur, elles s'inspirent, dans les grandes lignes, de la Convention relative au blanchiment d'argent.

Sur le plan des droits de l'homme, il convient de relever que la SAR Hong Kong ne connaît plus la peine de mort. Si elle ne l'a abolie que récemment, elle ne l'appliquait toutefois plus depuis la Seconde Guerre mondiale. La «Basic Law» continue de garantir l'indépendance de la justice et de l'exécution des peines. Néanmoins, par mesure de précaution, les deux Parties ont prévu la possibilité de refuser l'entraide demandée lorsqu'une sentence de mort risque d'être prononcée. Il convient à cet 150

égard de relever que, depuis lors, plusieurs Etats dont les Etats-Unis, la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle Zélande, la France, l'Angleterre et l'Italie ont négocié des accords bilatéraux en matière d'entraide judiciaire avec la SAR Hong Kong, certains de ces accords étant déjà en vigueur. Enfin, il convient de mentionner que Hong Kong est Partie à une multitude de conventions multilatérales dont le but est la protection des droits de l'homme 16.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel; incidences pour l'économie

3.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel sur le plan de la Confédération

La conclusion de l'accord a pour conséquence de nouvelles obligations pour la Suisse. En particulier, le fait que tous les échanges d'informations et de correspondance (à l'exception des demandes d'entraide adressées par l'entremise d'Interpol) ait lieu par le canal des autorités centrales se traduira par un surcroît de travail pour l'Office fédéral de la justice (OFJ). La quantité de travail dépendra du nombre de demandes d'entraide judiciaire et de la complexité des cas.

3.2

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel sur le plan des cantons

L'accord n'entraînera pas de tâches ­ ni, partant, de charges ­ supplémentaires pour les cantons.

3.3

Incidences sur l'économie

L'accord n'aura pas de conséquences sur l'économie suisse.

4

Programme de la législature

L'accord est inscrit dans le Programme de la législature 1999­2003 (FF 2000 2223).

16

Hong Kong est entre autres membre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (RS 0.103.1), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (RS 0.103.2), de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (RS 0.105), de la Convention relative aux droits de l'enfant (RS 0.107), de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (SR 0.108), des Conventions relatives à la répréssion de la traite des blanches (RS 0.311.31 und 0.311.32), et pour la suppression de la traite des femmes et des enfants (RS 0.311.33) ainsi que des Conventions relatives à l'esclavage (RS 0.311.37 et 0.311.371).

151

5

Relation avec le droit européen

En matière d'entraide judiciaire, les rapports entre la Suisse et les autres Etats membres du Conseil de l'Europe sont généralement régis par la CEEJ. La Suisse a conclu avec ses Etats voisins des accords bilatéraux complémentaires à ladite Convention17.

En outre, dans leurs relations, la Suisse et nombreux Etats membres du Conseil de l'Europe appliquent la Convention relative au blanchiment d'argent.

L'accord d'entraide judiciaire en matière pénale conclu entre la Suisse et la SAR Hong Kong s'inspire fortement de la CEEJ et en reprend les principes essentiels.

Aussi est-il compatible avec le droit européen.

6

Constitutionnalité

En vertu de l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.), les affaires étrangères, dont la conclusion d'accords bilatéraux fait partie, relèvent de la compétence de la Confédération. Conformément à l'art. 166, al. 2, Cst., il incombe à l'Assemblée fédérale d'approuver les traités internationaux.

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, les traités internationaux sont sujets au référendum facultatif lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et ne peuvent être dénoncés, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou entraînent une unification multilatérale du droit. L'accord d'entraide judiciaire conclu avec la SAR Hong Kong ne remplit aucune de ces conditions: d'abord, même s'il a été conclu pour une durée indéterminée, il peut être dénoncé en tout temps par chacune des Parties.

Ensuite, il ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale, ni n'entraîne une unification multilatérale du droit. Pour ces raisons, l'arrêté de l'Assemblée fédérale portant approbation de l'accord n'est pas sujet au référendum facultatif au sens de l'art. 141, al. 1, Cst.

17

152

RS 0.351.913.61 (avec l'Allemagne), 0.351.916.32 (avec l'Autriche), 0.351.934.92 (RO 2000 2242; avec la France), FF 1999 1311 (avec l'Italie).