01.036 Message concernant l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile» du 15 juin 2001

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons ci-joint, accompagné du présent message, le projet d'arrêté fédéral concernant l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile», en vous demandant de l'approuver.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 juin 2001

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2001-0150

4511

Condensé Le 13 novembre 2000, l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile» a été déposée sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces. L'initiative vise à compléter l'art. 121, al. 1, de la Constitution (Cst.) par un nouvel al. 1a. La Confédération respecte ainsi dans le domaine du droit d'asile et sous réserve des obligations découlant du droit international public, outre les principes de la procédure, les principes du droit pénal et du droit de l'assistance, censés rendre la Suisse moins attrayante comme terre d'asile. L'ajout d'un nouveau motif de non-entrée en matière (let. a) a pour objet de réduire la durée de la procédure pour les requérants d'asile entrés illégalement et le séjour effectif des personnes frappées d'une décision de renvoi, en désignant des Etats tiers réputés sûrs (let. b), dès lors que les intéressés avaient, ou auraient pu y déposer une demande d'asile. L'initiative prévoit, par ailleurs, de responsabiliser, par l'introduction de sanctions, les compagnies aériennes titulaires d'une concession pour le transport réguliers de passagers qui ne contrôlent pas, ou pas suffisamment, le respect par leurs passagers des conditions d'entrée en Suisse (let. c). S'agissant de l'assistance accordée aux requérants séjournant en Suisse le temps de la procédure d'asile, les auteurs de l'initiative demandent que les prestations soient, d'une part, fournies en nature et, d'autre part, réduites et réglementées de façon uniforme pour l'ensemble de la Suisse (let. d). Ils proposent ensuite que les requérants d'asile, les personnes admises à titre provisoire et les personnes dépendantes de l'assistance ne puissent plus choisir librement les fournisseurs de soins médicaux et dentaires et que les cantons désignent ces prestataires (let. e). Ils prévoient, en outre, de diminuer les prestations d'assistance publique servies aux requérants d'asile dont la décision de renvoi est exécutoire ainsi qu'aux personnes admises à titre provisoire ayant violé leurs obligations de collaborer, en les limitant à un logement et une nourriture simples, tandis que les soins médicaux seraient exclusivement limités aux traite-ments d'urgence. Enfin, ces personnes ne pourraient exercer une activité lucrative que dans le cadre d'un programme d'occupation public (let. f).

En vertu des dispositions
transitoires proposées dans le cadre d'un nouvel art. 197, les mesures d'application nécessaires devraient être adoptées par le Conseil fédéral par voie d'ordonnance avant d'être remplacées par la législation ordinaire, les dispositions de l'art. 121, al. 1a, entrant en vigueur trois mois après l'acceptation de l'initiative.

La validité de l'initiative ayant été constatée, elle doit être soumise au peuple et aux cantons dans le cadre d'une votation. S'agissant du domaine de l'assistance, les objectifs visés par les auteurs de l'initiative sont largement atteints, étant donné qu'ils font, au niveau de la procédure, l'objet des révisions, actuellement en cours, de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et de la loi sur l'asile. En revanche, la mise en oeuvre des propositions visant à réduire les prestations médicales pour certaines catégories de personnes devrait s'avérer délicate au vu de la portée des questions d'éthique liées à une telle restriction. Par ailleurs, la réglementation extrêmement restrictive applicable à ces personnes en matière d'accès au marché suisse du travail entraînerait un surcroît de frais considérable.

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Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral propose au Parlement de rejeter l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile» , sans présenter de contre-projet.

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Message 1

Partie générale

1.1

Aspects formels

Le 13 novembre 2000, l'Union Démocratique du Centre (UDC) a déposé l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile», sous forme d'un projet rédigé de toutes pièces.

1.1.1

Texte de l'initiative

L'initiative a la teneur suivante: I La Constitution fédérale du 18 avril 1999 est complétée comme suit : Art. 121, al. 1a (nouveau) 1a

Pour empêcher le recours abusif au droit d'asile, la Confédération observe notamment les principes suivants, sous réserve des obligations découlant du droit international public: a.

l'autorité n'entre pas en matière sur une demande d'asile présentée par une personne entrée en Suisse au départ d'un Etat tiers réputé sûr, lorsque cette personne a déposé ou aurait pu déposer une demande dans cet Etat;

b.

le Conseil fédéral dresse une liste des Etats tiers réputés sûrs qui respectent l'accord sur le statut juridique des réfugiés et la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

c.

les compagnies d'aviation concessionnaires pour le transport de ligne, qui desservent la Suisse sans respecter les prescriptions réglant leur participation au contrôle de l'immigration, sont sanctionnées. La loi fixe les modalités;

d.

les prestations d'assistance accordées aux requérants d'asile sont réglées de manière uniforme pour l'ensemble de la Suisse et en dérogation aux normes générales. Elles sont en principe fournies en nature;

e.

les cantons désignent les dispensateurs de soins médicaux et dentaires aux requérants d'asile;

f.

les requérants d'asile dont la demande a été refusée ou sur la demande desquels l'autorité n'est pas entrée en matière, et dont le renvoi est possible, admissible et acceptable, ainsi que les requérants accueillis provisoirement qui ont gravement violé leurs obligations de collaborer, reçoivent jusqu'à leur départ de Suisse des prestations d'assistance publique limitées à un logement et une nourriture simples et aux soins médicaux et dentaires d'urgence. Ils ne peuvent exercer une activité lucrative que dans le cadre d'un programme d'occupation public.

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II Les dispositions transitoires de la Constitution sont complétées comme suit : Art. 197 (nouveau) 1. Disposition transitoire ad art. 121 al. 1a (droit d'asile) (nouvelle) Les dispositions de l'art. 121, al. 1a, entrent en vigueur trois mois après leur acceptation par le peuple et les cantons. Le Conseil fédéral édicte les dispositions d'exécution par voie d'ordonnance jusqu'à l'entrée en vigueur de la législation ordinaire.

1.1.2

Aboutissement

La Chancellerie fédérale a constaté, par décision du 4 décembre 2000, que l'initiative déposée le 13 novembre 2000 avait formellement abouti, 107 438 signatures valables ayant été recueillies(FF 2000 5805).

1.1.3

Délai de traitement

En vertu de l'art. 29, al. 1, de la loi fédérale sur la procédure de l'Assemblée fédérale (LREC; RS 171.1), le message du Conseil fédéral relatif à l'initiative doit être soumis à l'Assemblée fédérale au plus tard dans les douze mois suivant le dépôt de l'initiative, soit le 13 novembre 2001 au plus tard. Si le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale un acte législatif en rapport étroit avec l'initiative populaire, ce délai est porté à 18 mois, en vertu de l'art. 29, al. 2, de la loi relative à la procédure de l'Assemblée fédérale (LREC; RS 171.1).

La décision de l'Assemblée fédérale portant approbation ou rejet de l'initiative, sous la forme proposée, doit intervenir au plus tard 30 mois après la date de dépôt de l'initiative, soit au plus tard le 13 mai 2003. Si au moins un Conseiller estime qu'il y a lieu de soumettre un contre-projet direct ou indirect, l'Assemblée fédérale peut prolonger ce délai d'un an.

En date du 30 mai 2001, le Conseil fédéral a décidé de proposer à l'Assemblée fédérale de rejeter l'initiative populaire et, eu égard aux révisions en cours de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et de la loi sur l'asile, de renoncer à présenter un contre-projet direct.

1.2

Validité de l'initiative

1.2.1

Unité de la forme

Le principe d'unité de la forme, inscrit à dans la constitution, stipule qu'une initiative populaire soit formulée sous la forme soit d'une proposition conçue en termes généraux, soit de projet rédigé de toutes pièces; les formes mixtes ne sont pas autorisées (cf. art. 75, al. 3, de la loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques

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(LDP; RS 161.1). La présente initiative se présente sous forme d'un projet rédigé; l'unité de la forme est donc respectée.

1.2.2

Unité de la matière

Le principe d'unité de la matière (art. 139, al. 3, Cst.) vise à garantir que ne soient pas soumises au vote des demandes d'initiative comportant plusieurs objets non cohérents sur le fond, l'hétérogénéité étant préjudiciable à une bonne information et empêchant la libre formation des citoyens et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. L'unité de la matière est respectée s'il existe un rapport intrinsèque entre les différentes parties de l'initiative (art. 75, al. 2, LDP). La présente initiative « contre les abus dans le droit d'asile » entend limiter, par différentes mesures, les abus du droit d'asile suisse et à réduire ainsi l'attrait de la Suisse comme terre d'asile. Elle prévoit, d'une part, de durcir les conditions d'application de la procédure d'asile (introduction de motifs supplémentaires de non-entrée en matière, en l'espèce du principe de l'Etat tiers sûr) et de diminuer, par diverses mesures en matière d'assistance, la durée du séjour en Suisse. Par ailleurs, les nouvelles dispositions pénales proposées visent à inciter les compagnies aériennes titulaires d'une concession pour le transport régulier des passagers à garantir le respect par leurs passagers des conditions d'entrée en Suisse (carrier sanctions). Ces diverses mesures répondant à un souci d'homogénéité dans leur présentations, l'unité de la matière est par conséquent respectée.

1.2.3

Autre condition de validité

Outre l'unité de forme et de matière, la Constitution exige le respect des règles contraignantes en matière de droit international public.

En vertu tant de la pratique actuelle des autorités fédérales que de la doctrine pertinente, les règles contraignantes du droit international constituent des normes matérielles et absolues auxquelles le droit constitutionnel ne peut déroger (ce sont p. ex.

l'interdiction de la torture, du crime de génocide, de l'esclavage ou encore du refoulement). Dans la mesure où il s'agit de normes de droit coutumier international, un Etat ne saurait s'y soustraire, même en révoquant des conventions de droit international (cf. message du Conseil fédéral relatif à la révision totale de la Constitution fédérale; FF 1997 I 449). Dans ces conditions, une réserve générale en matière de droit international, comme celle que prévoit l'initiative «contre les abus dans le droit d'asile», ne revêt qu'un caractère déclaratoire, étant donné que la primauté du droit international sur le droit interne est un principe reconnu en droit suisse (cf. message du Conseil fédéral du 22 juin 1994; FF 1994 III 1465 et 1466). En l'occurrence, l'examen de l'initiative n'a mis au jour aucune disposition violant les règles de droit international. Par conséquent, les mesures proposées ne portent pas atteinte aux dispositions de l'art. 194, al. 2, Cst.

4516

1.2.4

Applicabilité

Pour les autorités fédérales et cantonales impliquées ainsi que pour les fournisseurs de prestations médicales concernés, la mise en oeuvre des dispositions proposées pourrait s'avérer extrêmement difficile.

Car l'application du principe de l'Etat tiers sûr présuppose que l'Etat en question soit disposé à réadmettre les personnes ayant transité par son territoire avant d'entrer en Suisse. A cet égard, la proposition des auteurs de l'initiative s'avère inefficace si le retour des intéressés dans cet Etat tiers n'est pas garanti ou s'il n'est pas possible de les renvoyer dans leur Etat d'origine ou de provenance, puisque, dans cette hypothèse, les intéressés finiraient par rester en Suisse.

Les compagnies aériennes titulaires d'une concession pour le transport régulier de passagers qui ne respectent pas l'obligation de contrôle leur incombant feront l'objet de sanctions. La preuve attestant qu'une personne est entrée en Suisse avec telle compagnie aérienne serait soumise à des conditions plus strictes.

Les soins de santé fournis aux requérants d'asile déboutés et à certaines catégories de personnes admises à titre provisoire pose aux fournisseurs de prestations un problème délicat car ils continueraient de décider du type et de l'importance des soins à dispenser au cas par cas, compte tenu du statut de l'intéressé au regard du droit des étrangers et de l'état d'avancement de la procédure engagée.

Selon la doctrine juridique (cf. en particulier Pierre Tschannen, "Droit de vote et information politique", Berne 1995, p. 79 ss et autres commentaires) et la pratique, ce type de problèmes d'application ne saurait justifier une déclaration de nullité, puisque seules les initiatives posant un problème majeur de mise en oeuvre peuvent être déclarées nulles. Or, s'agissant de la présente initiative, ce n'est pas le cas.

2

Objectif et teneur de l'initiative

L'initiative «contre les abus dans le domaine du droit d'asile suisse» demande l'introduction d'un train de mesures visant à réduire l'attrait de la Suisse comme terre d'asile. Les auteurs de l'initiative proposent notamment qu'on entre plus en matière sur les demandes d'asile émanant de personnes entrées en Suisse via un Etat tiers réputé sûr. Pendant la durée de leur séjour en Suisse et à condition que leur renvoi soit possible, admissible et raisonnablement exigible, ces personnes ne bénéficieraient que de prestations d'assistance publique limitées à un logement et une nourriture simples ainsi qu'à des soins médicaux et dentaires d'urgence. En outre, elles ne seraient autorisées à exercer une activité lucrative que dans le cadre d'un programme d'occupation public. Ces dispositions s'appliqueraient également aux personnes admises à titre provisoire ayant violé gravement leur obligation de collaborer.

Pour le reste des personnes relevant du droit d'asile, dont la procédure d'asile est en cours ou a connu une issue négative devrait être inférieur à celui pratiqué par l'assistance publique le même dans toute la Suisse. Ces prestations seraient, en règle générale, fournies sous la forme de prestations en nature. Pour ces personnes, les prestations de santé consistant en soins médicaux ou dentaires seraient exclusivement dispensées par des praticiens spécialement désignés.

4517

3

Partie spéciale

3.1

Motif de l'initiative populaire

Le nombre croissant des cas en suspens, l'explosion des coûts et les carences au niveau de l'exécution des décisions de renvoi résultent, selon les auteurs de l'initiative, de l'abus du droit d'asile suisse. Ils proposent donc des mesures. Etant donné que le droit d'asile suisse ne s'est pas, ou alors tardivement, aligné sur la législation des Etats européens limitrophes, les requérants d'asile pourraient exploiter à leur avantage les lacunes existant encore entre les systèmes juridiques suisse et des Etats européens limitrophes. La Suisse deviendrait ainsi un important pôle d'attraction pour les migrants. N'ayant pu obtenir devant le Parlement les résultats escomptés malgré les efforts déployés, les représentants de l'UDC ont déposé la présente initiative populaire.

3.2

Législation en vigueur

La législation suisse a déjà intégré le principe de l'Etat tiers sûr: d'une part, le requérant d'asile peut être renvoyé à titre préventif dans un Etat tiers lorsque la poursuite de son voyage dans cet Etat tiers est possible, licite et qu'elle peut raisonnablement être exigée (cf. art. 23 et 42 de la loi du 26 juin 1998 sur l'asile; RS 142.31 [LAsi]).

D'autre part, il n'est pas entré en matière sur la demande d'asile d'un requérant pouvant se rendre dans un pays dans lequel il fait déjà l'objet d'une demande d'asile en cours d'examen (cf. art. 32, al. 2, let. d, LAsi).

La définition et l'octroi des prestations d'assistance aux requérants d'asile, aux personnes à protéger sans autorisation de séjour et aux personnes admises à titre provisoire sont aujourd'hui régis par le droit cantonal, conformément à la répartition des compétences, prévue par l'art. 82, al. 1, LAsi. La Confédération rembourse aux cantons les frais afférents, en principe sur la base de taux valables pour l'ensemble de la Suisse. Les différences d'un canton à l'autre ne sont prises en considération que pour ce qui concerne le niveau des loyers et les cotisations d'assurance-maladie.

Les montants forfaitaires remboursés sont le résultat de mesures d'économie ( cf.

art. 89, al. 1, LAsi) et sont déjà inférieurs de 20 %, aux montants versés ordinairement au titre de l'assistance publique. De plus, le principe consistant à fournir des prestations en nature (cf. art. 82, al. 2, LAsi) et à désigner un dentiste-conseil par canton (cf. art. 28, al. 4, de l'ordonnance 2 sur l'asile du 11 août 1999 relative au financement, RS 142.312 [OA 2]) est depuis longtemps appliqué dans le cadre du système de l'assistance des requérants d'asile. A cet égard, l'Office fédéral des réfugiés a défini des normes applicables en matière de traitements dentaires, notamment sur la conservation dentaire et sur les traitements anti-douleur.

Il convient en outre de relever que les cantons sont déjà contraints, dans le domaine des soins médicaux, de restreindre, pour les requérants d'asile, le libre choix de l'assureur et du fournisseur de prestations. (art. 26, al. 4, OA 2).

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3.3

Initiatives et interventions déposées à ce jour

3.3.1

Initiative «contre l'immigration clandestine»

L'initiative «contre l'immigration clandestine», datée du 18 octobre 1993, demandait déjà, sous réserve de l'interdiction de refoulement, qu'on n'entre notamment en matière sur les demandes d'asile émanant de personnes entrées illégalement. De plus elle prévoyait expressément l'interdiction du refoulement alors que l'initiative «contre l'immigration clandestine» l'initiative «contre les abus dans le droit d'asile» ne se limite qu'à prévoir d'une manière générale le respect des obligations découlant du droit international.

Elle a été rejetée par 1 138 301 voix contre 982 867 le 1er décembre 1996.

3.3.2

Initiative «pour une réglementation de l'immigration»

L'initiative «pour une réglementation de l'immigration», datée du 15 février 1994, proposait entre autres de prendre des mesures incitatives pour que le séjour des requérants d'asile en Suisse ne présente pour eux aucun attrait financier. Ces revendications étaient largement satisfaites en ce qui concernait l'assistance et l'emploi, étant donné la réduction des prestations d'assistance et l'introduction d'une interdiction de travail limitée dans le temps.

Elle a été rejetée par 1 364 751 voix contre 636 848 le 24 septembre 2000.

4

Appréciation de l'initiative

4.1

En général

L'initiative «contre les abus dans le droit d'asile» a été lancée à une époque où la Suisse comptait, suite à la guerre du Kosovo, un nombre important de requérants d'asile et de personnes admises à titre provisoire dont la présence entraînait des frais élevés. Dans l'intervalle, plus de 32 000 personnes sont retournées dans leur pays dans le cadre du programme d'aide au retour au Kosovo. Parallèlement, le nombre des nouvelles demandes d'asile déposées en Suisse n'a cessé de reculer pour atteindre aujourd'hui des chiffres antérieurs à la guerre de Bosnie. Les auteurs de l'initiative invoquent à tort les conséquences financières d'une situation migratoire extraordinaire et dramatique pour les personnes en fuite pour justifier des mesures visant à modifier fondamentalement le droit d'asile suisse à leurs dépens.

Si elle appliquait la disposition prévoyant l'application du «principe de l'Etat tiers sûr» la Suisse devrait renoncer à sa tradition humanitaire. L'introduction du refus d'entrée en matière aurait pour conséquence de restreindre de façon excessive l'accès à la procédure d'asile ordinaire, privant ainsi un grand nombre de personnes en fuite d'une protection efficace et d'un statut adéquat pendant la durée de leur séjour en Suisse. Par ailleurs, ce refus pourrait certes entraîner un raccourcissement de la procédure, mais pas un raccourcissement notable de la durée du séjour en Suisse. En effet, pouvoir procéder à l'exécution d'une décision de renvoi dans un Etat tiers réputé sûr que l'intéressé aurait traversé au cours de sa fuite, présuppose que ce même Etat est disposé à le réadmettre. Or, le plus souvent, et malgré les 4519

accords internationaux existants, il n'est pas certain que la demande de réadmission aboutisse et il est impossible de contraindre le pays tiers concerné à l'approuver.

L'introduction des dispositions pénales à l'encontre des entreprises de transport ne respectant pas leurs obligations en vue de garantir le respect, par les personnes transportées, de la réglementation suisse en matière d'entrée sur le territoire, fait l'objet d'un examen approfondi dans le cadre de la révision totale de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers.

En matière d'assistance, les préoccupations des auteurs de l'initiative sont dans une large mesure satisfaites. En effet, les prestations d'assistance sont déjà, dans la mesure du possible, allouées sous la forme de prestations en nature et sont, de fait, uniformes dans toute la Suisse. Elles sont également inférieures aux prestations accordées d'ordinaire. S'agissant de l'accès des requérants d'asile et des personnes admises à titre provisoire au système suisse de santé, il est réglementé par les cantons, qui ont, d'une part, restreint la liberté du choix du fournisseur de prestations (notamment par le système du médecin de famille ou le modèle HMO) et, d'autre part, désigné un ou plusieurs médecins-conseils ou dentistes-conseils.

Dans le cadre de la révision actuelle de la loi sur l'asile, le Conseil fédéral proposera, par ailleurs, un certain nombre de mesures s'inscrivant dans le cadre du mandat confié à la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats (CIP-E), (cf.

motion 99.3567). En effet, il est chargé de présenter une solution uniforme pour la prise en charge des frais de santé occasionnés par les requérants d'asile et les personnes admises à titre provisoire, tributaires de l'assistance sociale. Il prévoit d'en présenter une qui tienne compte des intérêts à la fois des personnes concernées, des assureurs-maladie, des cantons et de la Confédération, ainsi que des impératifs de simplification administrative. A cet égard, le Conseil fédéral est convaincu que les mesures proposées auront un impact suffisant sur les frais de santé occasionnés par les requérants d'asile et les personnes admises à titre provisoire.

Pour ce qui est de la mesure visant à exclure certaines catégories de personnes du marché du travail, elle n'est pas pertinente en raison du surcroît de frais supplémentaires à la charge de la Confédération.

4.2

En particulier

4.2.1

Principe de l'Etat tiers sûr (let. a et b de l'initiative populaire)

Les auteurs de l'initiative préconisent la non-entrée en matière sur les demandes émanant de requérants d'asile entrés en Suisse en provenance d'un Etat tiers réputé sûr, lorsque le requérant a déposé, ou aurait pu déposer, une demande d'asile dans cet Etat tiers. De plus, le Conseil fédéral devra, selon eux, établir une liste d'Etats tiers réputés sûrs, dans lesquels l'application de la Convention relative au statut des réfugiés et de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est garantie.

Un examen des législations étrangères en matière d'asile met en évidence qu'il n'existe pas de définition homogène du «principe de l'Etat tiers sûr». Le plus petit dénominateur commun entre les réglementations existantes prévoit que les requérants d'asile peuvent, dans le cadre d'une procédure accélérée, être renvoyés dans un

4520

Etat qui n'est certes pas l'Etat persécuteur prétendu, mais avec lequel le requérant entretient une certaine relation et dans lequel le principe du non-refoulement est observé.

La présente proposition visant à inscrire le principe de l'Etat tiers sûr dans la législation se fonde sur les résultats d'une analyse de la définition et de l'impact de la «notion d'Etat tiers sûr», appliquée dans cinq Etats membres de l'Union Européenne (cf. Kay Hailbronner «Kompatibilität des Schweizer Asylverfahrens mit Harmonisierungsbestrebungen im Asylrecht in der Europäischen Union», 1999). Cette analyse conclut que la portée des réglementations existantes est plutôt limitée dans l'ensemble, même si un effet préventif ne peut pas être exclu dans le cas de l'Allemagne.

Introduire une norme analogue dans sa législation signifierait que la Suisse ne pourrait plus entrer en matière sur la plupart des demandes d'asiles déposées. Par expérience on sait que seul un très faible pourcentage de requérants d'asile déposent une demande d'asile à l'aéroport (environ 600 demandes en 2000), auprès d'une représentation diplomatique suisse à l'étranger ou à la frontière. Quiconque gagne la Suisse par voie terrestre doit nécessairement traverser l'un des pays limitrophes, à savoir la France, l'Italie, l'Autriche ou l'Allemagne. Ces pays sont justement réputés être des Etats tiers sûrs. La grande majorité (environ 95 %) des requérants d'asile entrent clandestinement en Suisse et déposent une demande d'asile auprès d'un centre d'enregistrement. En appliquant la réglementation de l'Etat tiers sûr, les autorités chargées de l'asile n'auraient plus qu'à constater qu'un requérant d'asile est entré clandestinement en Suisse par voie terrestre et qu'il a donc forcément traversé un Etat tiers réputé sûr, où il aurait pu demander l'asile. Concrètement, la Suisse se déchargerait de son obligation de procéder à un examen quant au fond de la persécution invoquée.

Jusqu'à présent, une proportion constante de personnes entrées illégalement en Suisse obtient le statut de réfugié reconnu ainsi que l'asile (environ 10 % ces dernières années). L'application de la réglementation proposée ne permettrait plus d'accorder l'asile à ces personnes puisque le droit constitutionnel n'autoriserait plus l'entrée en matière sur de telles demandes. Dans le cadre
d'une procédure de renvoi, les intéressés seraient renvoyés dans l'Etat tiers par lequel ils ont transité avant d'entrer en Suisse, pour autant que cet Etat soit déterminé et qu'il soit disposé à les réadmettre. Dans les faits, il y aurait lieu de se conformer à la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme en la matière (T.I. c/United Kingdom, n°43844/98 du 7 mars 2000), à savoir de s'assurer que le renvoi dans un Etat tiers ne peut être exécuté qu'à la seule condition que ledit Etat respecte dans tous les cas le principe de non-refoulement, de même que les droits prévus aux art. 2 (droit à la vie), 3 (protection contre la torture et les traitements inhumains ou dégradants) et 13 (droit à un recours effectif) de la CEDH. Dans le cas contraire, il faudrait examiner si les intéressés peuvent être renvoyés vers leur pays d'origine ou de provenance.

Quant aux personnes remplissant les conditions nécessaires à la reconnaissance de la qualité de réfugié, mais dont la demande ne pourrait plus faire l'objet d'un examen en vertu des dispositions proposées par les auteurs de l'initiative, il faudrait, en application du principe de non-refoulement, les admettre à titre provisoire.

L'admission provisoire n'est pas un statut juridiquement adéquat pour les personnes remplissant fondamentalement les conditions de la qualité de réfugié. En effet, la Convention relative au statut des réfugiés prévoit que les Etats Contractants accordent aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire le même traitement en 4521

matière d'assistance qu'à leurs nationaux (cf. art. 23); et le traitement le plus favorable accordé, dans les mêmes circonstances, aux ressortissants d'un pays étranger en ce qui concerne l'exercice d'une activité professionnelle salariés (cf. art. 17) et les droits d'association (cf. art. 15). Bien loin de satisfaire les exigences de ladite Convention, l'institution de l'admission provisoire fait, en outre, obstacle à l'intégration rapide et efficace des réfugiés reconnus. Il en irait de même des membres de la famille d'un réfugié reconnu, qui ne pourraient plus espérer obtenir l'asile si le principe de l'Etat tiers sûr devait être appliqué. Ils ne bénéficieraient que d'une admission provisoire, alors qu'ils sont victimes, au même titre que le principal intéressé, des persécutions perpétrées à l'encontre d'un de leurs parents (persécutions indirectes). Un tel résultat va par conséquent à l'encontre des objectifs visés par les auteurs de l'initiative, d'après lesquels les personnes effectivement persécutées doivent trouver asile en Suisse et non pas bénéficier provisoirement d'une quelconque autorisation de séjour.

Poursuivant depuis toujours une longue tradition humanitaire., la Suisse ne saurait rompre avec celle-ci. Or, l'application de la réglementation proposée en matière d'Etat tiers sûr en serait, outre les conséquences susmentionnées, l'y contraindrait.

Les auteurs de l'initiative estiment abusif qu'une personne persécutée, en fuite, ne demande pas l'asile dans le premier Etat possible, hors de l'Etat persécuteur. Ils entendent donc lutter contre cet abus par une procédure accélérée, censée, également, faciliter l'exécution des renvois. Néanmoins, comme nous le démontrerons ciaprès, l'initiative ne peut justement pas garantir cet effet.

L'exécution d'un renvoi dans un Etat tiers n'est possible que l'on sait dans quel Etat elle aura lieu. Or, la disposition proposée incite justement les requérants d'asile à dissimuler l'itinéraire qu'ils ont emprunté, rendant ainsi impossible toute procédure de réadmission. Par ailleurs, il est illusoire de penser qu'un Etat tiers sera disposé à réadmettre un requérant d'asile en vertu d'une telle réglementation, en l'absence d'indications précises sur un séjour antérieur effectué sur son territoire ou sur la base d'une simple déclaration.

En résumé,
la réglementation proposée par les auteurs de l'initiative va trop loin.

D'une part, elle limiterait la procédure d'asile aux personnes admises par la Suisse dans le cadre de contingents, ne laissant guère d'espoir aux personnes ayant gagné la Suisse par leurs propres moyens d'engager une procédure matérielle d'asile. Il en résulterait que la Suisse refuserait d'accorder un statut adéquat et une protection efficace contre les persécutions à des personnes dont le statut de réfugié devrait être effectivement reconnu, renonçant par là même à sa tradition humanitaire.

Le Conseil fédéral s'attache à compléter les dispositions de la loi sur l'asile ayant trait au principe de l'Etat tiers sûr dans le cadre de la révision partielle en cours. Il est notamment prévu d'assouplir les dispositions relatives à la preuve que les autorités concernées doivent fournir sur le séjour antérieur d'un requérant dans un Etat tiers. Des mesures visant à accélérer l'exécution des renvois sont également à l'étude.

4522

4.2.2

Sanctions à l'encontre des compagnies aériennes (Carrier sanctions; let. c de l'initiative populaire)

L'initiative préconise l'adoption de sanctions à l'encontre des compagnies aériennes titulaires d'une concession pour le transport réguliers de passagers vers la Suisse qui ne respectent pas la réglementation en vigueur leur faisant obligation de participer au contrôle de l'immigration. Les détails y afférents devraient selon les auteurs être réglementés par la voie législative.

En vertu des dispositions pertinentes de l'annexe 9 de la Convention du 7 décembre 1944 relative à l'aviation civile internationale, les compagnies aériennes sont tenues de contrôler, avant l'embarquement, que les passagers transportés disposent des documents de voyage requis pour le transit ou l'entrée dans le pays de destination.

Elles ne doivent pas transporter les passagers ne remplissant pas les conditions d'entrée. Les compagnies aériennes sont en outre tenues, de ramener au point d'embarquement sans délai les personnes refouleées à la frontière par les autorités compétentes ou de les transporter dans un autre pays dont elles rempliront les conditions d'entrée. A défaut de documents de voyage valables, il est délivré à ces personnes un document de remplacement spécial, conformément aux dispositions de l'annexe 9 de ladite convention. Les autorités de l'aéroport d'embarquement sont tenues de les réadmettre.

Les compagnies aériennes prennent en charge tous les frais non couverts occasionnés par la présence d'un passager muni de documents non conformes, y compris, le cas échéant, les frais découlant de l'exécution d'un renvoi sous escorte policière. A l'heure actuelle, leur responsabilité cesse lorsque les personnes concernées quittent le territoire ou que cette sortie s'avère impossible, inadmissible ou ne peut être raisonnablement exigible et que les intéressés obtiennent une autorisation d'entrée.

Ces dernières années, les compagnies aériennes ont déployé, d'entente avec les autorités de contrôle compétentes, des efforts importants pour exclure les passagers dépourvus de papiers en règle. Toutefois, les contrôles exercés par elles ne peuvent être que sporadiques étant donné que le trafic aérien doit répondre à un impératif d'efficacité. De plus, les éventuelles falsifications de papiers d'identité et de visas son la plupart du temps difficilement détecables. A cela s'ajoutent des événements imprévisibles ne pouvant
être imputés ni à la compagnie aérienne ni aux passagers, tels qu'un changement d'itinéraire intervenant pour des raisons techniques ou le vol d'un document de voyage au cours du voyage.

Les passagers clandestins dissimulent ou détruisent souvent leurs documents de voyage valides après être montés dans l'avion ou avant d'arriver au contrôle de l'immigration du pays de destination. Par ailleurs, il est de plus en plus fréquent que de faux passeports ou des visas plus sophistiqués ne puissent être détectés par les compagnies aériennes avec les moyens de contrôle dont elles disposent. De plus, ces compagnies n'ont pas accès aux systèmes nationaux de recherche et d'information dont disposent les postes de contrôle aux frontières des divers pays de transit et de destination.

La pression économique grandissante et les techniques de plus en plus sophistiquées que nécessite le contrôle des documents de voyage peuvent amener certaines compagnies aériennes à négliger leur devoir de vigilance à cet égard. L'effet des sanctions instaurées par certains Etats, depuis le milieu des années 80, en vue d'accroître l'efficacité des contrôles est d'ailleurs controversé. Face à l'importance du trafic 4523

d'êtres humains organisé à l'échelle internationale, l'effet des contrôles exercés par les compagnies aériennes avant l'embarquement des passagers n'est que très limité.

Il peut ainsi arriver, selon les circonstances, que la perspective d'une amende paraisse économiquement plus avantageuse à une compagnie aérienne que des mesures préventives coûteuses qui, de surcroît, sont impopulaires auprès des passagers.

Il paraît néanmoins judicieux d'une part d'exiger des compagnies aériennes (et des entreprises de transport de personnes en général) qu'elles contrôlent les documents de voyage des passagers et qu'elles s'assurent qu'ils sont en possession des documents requis par le pays de destination ou de transit et, d'autre part, d'assortir cette obligation de sanctions. Ce principe est largement admis. De telles sanctions ne figurent pas dans les dispositions et recommandations de l'annexe 9. En effet, cette dernière ne contraint pas les Etats membres à prononcer une amende à l'encontre des compagnies aériennes qui peuvent apporter la preuve qu'il n'y a pas eu négligence ou manquement de leur part dans l'exécution de leur obligation de vigilance. L'art.

26 de l'accord de Schengen et l'art. 11 du Protocole des Nations Unies contre le trafic d'êtres humains, le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, contraignent les Etats signataires à prévoir des sanctions à leur égard, dont les modalités relèvent du droit national (la Suisse n'a signé aucun de ces textes, mais une adhésion au Protocole contre la traite des personnes est prévue. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil fédéral a prévu, dans le cadre de la révision totale de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE)1, d'introduire des sanctions à l'encontre des entreprises de transport qui ne respecteraient pas leurs obligations relativement au contrôle des documents de voyage. Une proposition à ce sujet a déjà été mise en consultation, rencontrant un accueil plus que favorable. Comme prévu, le texte sera présenté au Parlement dans le courant du 2e semestre 2001, parallèlement au message relatif à la nouvelle loi sur les étrangers.

Sur ce point, l'initiative déposée par l'UDC ne fait guère qu'enfoncer des portes ouvertes. Par ailleurs, si l'initiative prévoit d'introduire des sanctions à l'encontre compagnies
aériennes titulaires d'une concession de transport régulier de passagers, les compagnies charter elle en dispense implicitement. Une telle inégalité de traitement paraît difficile à justifier. De plus, elle va à l'encontre du but et de l'objet des mesures prévues par le Conseil fédéral. La compagnie aérienne s'acquitte-t-elle ou non de ses obligations, indépendamment du type de vol opéré, demeure en fin de compte le seul critère décisif.

4.2.3

Normes en matière d'assistance applicables à l'échelle nationale. Prestations en nature (let. d de l'initiative)

L'initiative vise à introduire, en dérogation aux dispositions prévues en matière d'assistance publique, des normes et standards uniformes, spécifiquement applicables aux requérants d'asile séjournant en Suisse. Elle prévoit par ailleurs de fournir aux intéressés des prestations d'assistance servies, en principe, sous la forme de prestations en nature.

En vertu de la législation en vigueur, la définition et l'octroi des prestations d'assistance incombent aux cantons, le montant des prestations allouées étant régi 1

RS 142.20

4524

par le droit cantonal. Les cantons sont dédommagés par des montants forfaitaires pour les frais encourus à ce titre et ce, de façon uniforme (exception faite des frais de logement et d'assurance-maladie). Au niveau national, les prestations d'assistance versées par les cantons divergent très peu. En comparaison internationale , le niveau des prestations suisses et celui prévu par d'autres pays européens ne diffèrent pas sensiblement ­ compte tenu du pouvoir d'achat ­, comme en attestent plusieurs études (cf. «Comparaison intercantonale des prestations d'assistance aux requérants d'asile», 1999, Université de Genève; et «Sozialhilfe für Asylsuchende im europäischen Vergleich», 1999 Forum Suisse pour l'étude des migrations (SFM)).

La définition, à l'échelle nationale, de normes uniformes réglementant l'assistance garantie aux requérants d'asile s'avère donc inutile, étant donné que cette uniformisation a déjà été réalisée. L'harmonisation formelle des bases légales ­ qui pourrait s'opérer soit par la conclusion d'un concordat, soit par l'harmonisation des lois cantonales sur l'assistance, soit encore par l'adoption d'une norme fédérale y afférente ­ ne permettrait finalement pas de les uniformiser davantage. Par ailleurs, l'introduction d'une norme fédérale ne pourrait passer outre les différences cantonales en matière de loyers et de cotisations d'assurance-maladie.

Le domaine de l'assistance a toujours été de la compétence des cantons et l'est encore. Dans l'hypothèse où la Confédération fixerait des normes en matière d'assistance, cette démarche serait perçue par les cantons comme une ingérence dans leur souveraineté, ce qui serait à leurs yeux inacceptable.

Les prestations d'assistance à verser aux requérants d'asile, aux personnes admises et à verser à l'avenir à titre provisoire et, à l'avenir, aux personnes à protéger sans autorisation de séjour, il y a lieu de préciser que ces prestations sont depuis longtemps inférieures, à raison de 20 %, à celles allouées au reste de la population résidente et qu'elles doivent, autant que possible, être versées sous la forme de prestations en nature (cf. art. 82, al. 2, LAsi).

Les objectifs visés par les auteurs de l'initiative concernant l'uniformisation, l'étendue, le montant et la forme des prestations d'assistance étant déjà atteint, il n'y a donc pas lieu d'inscrire cette norme dans la Constitution, dès lors elle n'apporterait aucun changement à la situation actuelle.

4.2.4

Restriction de l'accès aux soins médicaux et dentaires (let. e de l'initiative)

Les auteurs de l'initiative demandent que les cantons désignent les fournisseurs de soins médicaux et dentaires auxquels les requérants d'asile pourront s'adresser.

Dans le domaine des soins médicaux, les cantons sont déjà tenus de restreindre la liberté des requérants d'asile de choisir leur assureur et leur fournisseur de prestations (cf. art. 26, al. 4, OA 2). Les cantons appliquent cette prescription en fonction de leurs spécificités cantonales, soit en créant des centres médicaux spécialement à l'attention des requérants d'asile où ils seront, au besoin, aiguillés vers un médecin , soit en désignant des praticiens auxquels les requérants d'asile et les personnes admises à titre provisoire peuvent s'adresser (système du médecin de famille).

S'agissant des soins dentaires garantis aux requérants d'asile et aux personnes admises à titre provisoire, la Confédération a, depuis longtemps déjà, désigné au moins un dentiste-conseil par canton, chargé d'évaluer la nécessité et l'opportunité des 4525

soins dentaires requis, sachant que les traitements garantis sont les traitements antidouleur et ceux permettant la conservation des éléments dentaires. (cf. art. 28, al. 4 et 5, OA2).

La législation en vigueur répond donc, depuis longtemps, aux objectifs visés par les auteurs de l'initiative dans le domaine des soins médicaux et dentaires. Dans ces conditions, il apparaît superflu de vouloir réglementer la question au niveau constitutionnel.

4.2.5

Garantie d'un minimum vital aux requérants d'asile déboutés et aux personnes admises à titre provisoire, ayant manqué à leur obligation de collaborer (let. f de l'initiative)

L'initiative exige que les requérants frappés d'une décision de renvoi exécutoire et les personnes admises à titre provisoire ayant manqué à leur obligation de collaborer ne perçoivent plus que des prestations d'assistance minimales, que les soins médicaux et dentaires soient limités à un strict service d'urgence, et que tout exercice d'une activité lucrative leur soient interdit.

La proposition tendant à réduire au minimum les prestations d'aide sociale allouées aux requérants déboutés dont la décision de renvoi est exécutoire a également été présentée par le groupe de travail paritaire «Financement de l'asile» dans son rapport final du 9 mars 2000. Elle a toutefois été rejetée par une majorité de cantons dans le cadre de la procédure de consultation sur le rapport final, eu égard notamment à la souveraineté cantonale en matière d'octroi de l'assistance et au motif que le niveau d'aide sociale garanti aux requérants d'asile était déjà relativement bas, donc que cette mesure incitative individuelle ne pourrait avoir qu'un impact limité.

La recommandation du groupe de travail a fait l'objet d'un examen approfondi dans le cadre de l'actuelle révision de la loi sur l'asile. Suite à cet examen, le Conseil fédéral a renoncé, pour les raisons énoncées ci-après, à introduire au niveau fédéral, en vue d'encourager les requérants à coopérer avec les autorités dans le cadre de la procédure d'asile, une mesure incitative à caractère négatif, visant à minimaliser les prestations. Par principe, l'octroi des prestations d'assistance est de la compétence des cantons. Il leur incombe donc si nécessaire de créer les conditions de fait et de droit rendant possible une réduction des prestations d'assistance pendant la phase d'exécution du renvoi. Tant en vertu du droit fédéral (cf. art. 83 LAsi, art. 14c, al. 4, LSEE, en corrélation avec l'art. 83 LAsi) qu'en vertu de divers actes législatifs cantonaux, il est déjà possible, dans le respect du droit constitutionnel en matière de garantie du minimum vital, de restreindre ou de supprimer les prestations d'assistance prévues pour les personnes relevant du droit d'asile, lorsque elles ont manqué à leur obligation de collaborer. Une législation fédérale plus contraignante n'est donc ni justifiée, ni nécessaire. Il s'agit, en revanche, de mieux utiliser les instruments
disponibles pour influer sur le comportement des intéressés.

Le Conseil fédéral rejette la proposition visant à limiter les soins médicaux à un strict service d'urgence. Sur ce point, une solution s'est dessinée au cours des travaux préparatoires relatifs à la révision partielle de la loi sur l'asile, permettant de maîtriser, dans le cadre de l'assurance de base obligatoire, les frais de santé supérieurs à la moyenne occasionnés par les personnes relevant du domaine de l'asile.

Compte tenu de la facilité d'accéder à l'offre de soins médicaux et de la structure 4526

des risques atypique de cette catégorie d'assurés (composée majoritairement d'hommes certes jeunes mais malades, ou blessés), il faut créer les bases légales d'un système de «gate-keeping» à l'intention des requérants d'asile et des personnes admises à titre provisoire, dépendantes de l'assistance. De plus cette catégorie de personnes doit être exclue de l'effectif des assurés déterminant pour la compensation des risques. Quant aux soins dentaires garantis, ils ne concernent, comme déjà actuellement que les traitements de conservation dentaire et les traitements antidouleur (cf. Ch. 4.2.4).

Une limitation générale des soins, notamment une limitation des soins médicaux à un strict traitement d'urgence, doit être rejetée.

Quant à l'accès au marché du travail, la législation actuelle prévoit déjà de le limiter pour les requérants déboutés dont le renvoi est exécutoire (art. 43 LAsi). En effet, lorsque la procédure d'asile débouche sur une décision négative, l'autorisation d'exercer une activité lucrative cesse à l'expiration du délai de départ imparti, même si l'intéressé a fait usage d'une voie de droit extraordinaire ou d'un moyen de recours et que l'exécution du renvoi ait été suspendue. En outre, aucun nouvel emploi ne peut être exercé une fois que le renvoi a été prononcé.

Les auteurs de l'initiative exigent que l'exercice d'une activité lucrative soit interdit aux requérants d'asile et aux personnes admises à titre provisoire ayant gravement violé leur obligation de collaborer. Le groupe de travail «Financement de l'asile» a examiné dans le détail les répercussions financières et le coût social de la mesure préconisée. Une restriction de l'accès au marché du travail, telle qu'elle est proposée, empêcherait environ deux tiers des requérants d'asile et des personnes admises à titre provisoire qui séjournent en Suisse et sont en âge de travailler d'accéder au marché de l'emploi. Or sachant que le taux d'emploi des requérants d'asile et des personnes admises à titre provisoire se situe à l'heure actuelle autour de 40 %, la restriction souhaité par les auteurs de l'initiative se traduirait par une augmentation proportionnelle des frais d'assistance, qui pourrait porter sur plusieurs dizaines de millions de francs. Le Conseil fédéral envisage néanmoins d'introduire une réglementation de l'accès au
marché du travail différenciée selon la catégorie de personnes concernées. Les possibilités d'accès devraient ainsi être fonction du statut de l'intéressé, selon que sa demande d'asile est en cours d'examen, qu'il a été admis à titre provisoire ou qu'il a reçu une réponse négative sur laquelle figure un délai de départ.

Une étude du Forum suisse pour l'étude des migrations (FSM) à Neuchâtel («Asyldestination Europa, Eine Geographie der Asylmigrationen oder Determinanten der Verteilung von Asylgesuchen», 2000), a mis en évidence que les requérants d'asile choisissent leur pays de destination ­ pour autant que ce facteur soit pris en considération ­ moins en fonction des possibilités juridiques d'exercer une activité lucrative qu'en fonction de la prospérité et des possibilités réelles de travailler dans ce pays.

L'interdiction de travail préconisée par les auteurs de l'initiative à l'égard des personnes admises à titre provisoire et ayant manqué à leur obligation de collaborer risque de poser problème au niveau de l'encadrement des intéressés, malgré la possibilité qui leur est offerte de participer à des programmes d'occupation. Etant donné qu'il est difficile de prévoir la date du renvoi des personnes admises à titre provisoire et donc de déterminer la durée de leur séjour en Suisse, il n'est pas possible de chiffrer les frais que leur présence occasionne non seulement dans le domaine de l'asile mais aussi dans d'autres secteurs (cf. ch. 6.3). Par conséquent, il y a lieu de rejeter la proposition formulée par les auteurs de l'initiative.

4527

4.2.6

Date d'entrée en vigueur (disposition transitoire de l'initiative)

La disposition transitoire proposée exige l'art. 121, al. 1a, Cst. devrait entrer en vigueur trois mois après son acceptation par le peuple et les cantons et d'après laquelle les mesures d'application nécessaires soient introduites par voie d'ordonnance par le Conseil fédéral avant l'entrée en vigueur de la législation ordinaire.

Cette exigence pose des problèmes de mise en oeuvre d'une part et elle est problématique l'Etat de droit d'autre part.

En outre, le délai transitoire de trois mois s'avère extrêmement court. En effet la mise en oeuvre de ces mesures nécessiterait l'organisation d'une vaste campagne d'information quant à l'étendue des prestations à accorder, qui devrait être menée auprès des administrations communales et cantonales chargées de l'assistance, mais aussi auprès des fournisseurs de prestations de santé et des assureurs maladie désignés par les cantons. D'autres acteurs dans le domaine de la santé, notamment les hôpitaux et les médecins exerçant en clientèle privée, devraient également être informés et ce programme est par trop ambitieux pour pouvoir être réalisé en trois mois.

Il serait en outre problématique, pour un Etat de droit, de réformer et de réorganiser complètement un système faisant intervenir des attributions et des compétences aussi différentes, en l'espace de trois mois.

5

Nécessité d'un contre-projet

Au vu de ce qui précède, le Conseil fédéral vous propose de rejeter l'initiative populaire «contre les abus dans le droit d'asile», sans présenter de contre-projet direct.

Le Conseil fédéral rappelle toutefois que les demandes ayant trait notamment au principe de l'Etat tiers sûr et aux sanctions proposées à l'encontre des compagnies aériennes sont à l'étude dans le cadre des révisions de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et de la loi sur l'asile.

6

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

6.1

Pour la Confédération

L'introduction d'un nouveau motif de non-entrée en matière n'a pas d'incidence sur l'état du personnel, la procédure de non-entrée en matière devant également respecter le principe de droit coutumier international du non-refoulement, qui interdit le rapatriement sous contrainte d'une personne dans un pays potentiellement persécuteur. Sur le plan financier, la réglementation proposée ne se traduirait pas non plus par des économies substantielles, puisque la décision de non-entrée en matière ne résout pas la question de l'exécution du renvoi (cf. ch. 4.2.1).

S'agissant des conséquences financières et des effets sur l'état du personnel liés à l'introduction, dans le cadre du droit commun applicable aux étrangers, de sanctions à l'encontre des compagnies aériennes, il n'est pas possible de les évaluer compte

4528

tenu de l'imprécision des auteurs de l'initiative sur le nombre et la nature des éléments constitutifs de l'infraction.

Quant aux modifications proposées en matière d'assistance et d'emploi, à savoir la désignation de fournisseurs de prestations dentaires et médicales, l'uniformisation des prestations d'assistance, leur octroi sous forme de prestations en nature et la restriction des soins dentaires garantis aux stricts traitements d'urgence et antidouleur, elles n'auraient, pour la Confédération, aucune conséquence financière ni aucun effet sur l'état du personnel, les revendications des auteurs de l'initiative étant déjà satisfaites dans ces domaines.

La minimalisation des prestations ne permettrait toutefois pas de réaliser des économies substantielles, car les prestations remboursées par la Confédération au titre de l'assistance des requérants d'asile sont déjà inférieures, à raison de 20 % environ, aux prestations versées d'ordinaire. Les économies potentiellement réalisables à ce titre sont d'autant plus difficiles à chiffrer qu'il n'a pas été possible, même dans le cadre du groupe de travail «Financement de l'asile», de définir précisément les modalités et l'étendue des prestations à fournir et à rembourser, en ne prenant en charge que les soins d'urgence (cf. rapport final de ce groupe de travail du 9 mars 2000). Par ailleurs ,la mise en place d'un système de médecins-conseil, par lesquels passeraient les demandes de remboursement des traitements à administrer aux requérants d'asile déboutés et aux personnes admises à titre provisoire, entraînerait également un surcroît de frais.

De plus, le retrait systématique du permis de travail aux personnes ayant obtenu une telle autorisation au cours de la procédure d'asile et dont la demande d'asile a été rejetée entraînerait une importante surcharge administrative, qui serait difficile à justifier d'autant plus que l'autorisation de travail expire à l'échéance du délai de départ (cf. ch. 4.2.5). Cette mesure multiplierait le nombre des personnes tributaires de l'assistance, entraînant, pour la seule catégorie des personnes admises à titre provisoire ayant violé leur obligation de collaborer, des coûts supplémentaires se chiffrant à plusieurs millions de francs. S'y ajouteraient un surcoût d'au moins 5,4 millions de francs à prévoir pour financer
des programmes d'occupation publics d'une envergure suffisante pour contrer les effets du chômage. Aujourd'hui, ces programmes d'occupation sont financés par la Confédération à hauteur d'environ 17 millions de francs par an. Quant au problème de l'efficacité dans l'exécution des décisions de renvoi passées en force, qui sous-tend sur ce point la proposition des auteurs de l'initiative, le Conseil fédéral proposera, dans le cadre de la révision partielle de la loi sur l'asile, un modèle de financement assorti d'incitations financières, qui devrait encourager la coopération entre la Confédération et les cantons.

6.2

Pour les cantons et les communes

Compte tenu des difficultés évoquées quant à l'exécution des décisions de renvoi dans le pays d'origine ou de provenance des intéressés ou dans un pays tiers ­ difficultés que ne résout pas la réglementation proposée ­, les autorités concernées auraient la possibilité, dans la plupart des cas, de recourir à une procédure accélérée menée au niveau fédéral. Il n'en demeure pas moins que les personnes dont l'exécution du renvoi pose problème resteraient à la charge de leur canton d'attribution jusqu'à leur départ.

4529

De même, les mesures proposées dans le domaine de l'assistance, notamment dentaire, et de l'emploi n'auraient, pour les cantons et les communes, pas de répercussions financières, ni d'effets sur l'état du personnel, puisque les objectifs des auteurs de l'initiative sont déjà atteints sur ces points et que ces mesures sont déjà appliquées.

Les propositions visant à minimaliser les prestations d'assistance, à restreindre les soins médicaux aux seuls traitements d'urgence et à exclure du marché du travail les requérants frappés d'une décision de renvoi et certaines catégories de personnes admises à titre provisoire n'auraient aucune répercussion financière directe pour les cantons, en admettant que les forfaits soient corrigés en conséquence (pour les répercussions indirectes, cf. ch. 6.3 «Autres conséquences»). En effet, le surcroît de frais ainsi occasionnés serait remboursé aux cantons par la Confédération et les économies seraient portées à son crédit. En matière de personnel, la minimalisation des prestations d'assistance se traduirait par une réduction du personnel d'encadrement. Les économies ainsi réalisées se répercuteraient cependant sur d'autres domaines de la vie sociale par des dépenses au moins aussi importantes (cf.

ch. 6.3).

6.3

Autres conséquences

Sur le fond, la proposition visant à minimaliser les frais d'assistance et à limiter aux seuls soins d'urgence les prestations de santé garantis aux requérants frappés d'une décision de renvoi et aux personnes admises à titre provisoire, serait de nature à réduire l'attrait de la Suisse comme terre d'asile. Toutefois, la décision d'émigrer vers un pays donné est moins conditionnée par les modalités et l'importance de l'aide sociale que par l'existence, dans ce pays, d'un réseau de relations sociales (cf.

à ce sujet l'étude du Forum suisse pour l'études des migrations (SFM), «Asyldestination Europa, Eine Geographie der Asylmigrationen oder Determinanten der Verteilung von Asylgesuchen», juin 2000). La minimalisation des prestations d'assistance et l'exclusion du marché du travail pourraient, en outre, entraîner une augmentation de la petite criminalité, et donc un surcroît de frais dans le domaine de la police et de la justice, situation difficile à éviter compte tenu des catégories de personnes concernées, même en organisant des programmes d'occupation publics de plus grande envergure.

7

Relation avec le droit européen

Afin d'éviter que les demandeurs d'asile ne soient renvoyés successivement d'un Etat à un autre sans qu'aucun pays n'examine leur requête, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a estimé, dans une Recommandation N° R (97) 22 du 25 novembre 1997 énonçant des lignes directrices sur l'application du principe de l'Etat tiers sûr, que les Etats tiers devaient, pour être qualifiés de sûrs, respecter les principes internationaux régissant la protection des réfugiés et les droits de l'homme, en particulier en ce qui concerne l'interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Dans ce contexte, il est entendu qu'un accent tout particulier doit être porté sur l'assurance donnée par le pays tiers sûr que le requé-

4530

rant pourra y chercher asile et bénéficier d'une protection effective contre le refoulement.

La Convention de Dublin du 15 juin 1990 détermine l'Etat signataire responsable de l'examen d'une demande d'asile introduite en Europe, à l'exception des demandes présentées en Suisse, laquelle n'est pas partie à ladite Convention. Le requérant ne peut être renvoyé successivement d'un Etat signataire à un autre sans qu'aucun de ces Etats ne se reconnaisse compétent. Il a donc la garantie que sa demande sera examinée conformément aux normes du droit international.

Les dispositions prévues par l'initiative ne contreviennent pas aux normes applicables en droit européen et ne portent pas atteinte, sur le fond, au principe du nonrefoulement. Par ailleurs, dans son projet de directive du 20 septembre 2000 (COM (2000) 578, fin), la Commission européenne prévoit que seuls les pays observant les droits de l'homme et les dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés puissent être qualifiés de pays tiers sûrs. La Commission propose aux Etats membres d'adopter des normes communes pour l'application de certaines notions ou pratiques, notamment la notion de «pays tiers sûr», tout en les laissant libres de les appliquer ou non. S'ils décident de les appliquer, les dispositions édictées en droit interne devront être conformes au cadre commun défini pour tous les Etats membres. Quant à la compatibilité des normes suisses avec la future législation de l'Union européenne en matière d'Etat tiers sûr, il n'est pas possible de régler ce point en l'absence de normes communautaires définitives. En effet, les questions particulières relatives à la répartition des demandes d'asile entre les pays européens ont déjà donné lieu à diverses interventions sur notre continent, notamment au regard du principe du pays tiers sûr.

8

Conclusions

Les objectifs visés par les auteurs de l'initiative sont en grande partie atteints par la législation en vigueur. S'agissant des propositions visant à appliquer le principe de l'Etat tiers sûr et à introduire des sanctions à l'encontre des compagnies aériennes, des réglementations complètes et efficaces sont en cours d'élaboration dans le cadre des révisions de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et de la loi sur l'asile. Quant aux mesures concernant d'une part la minimalisation des prestations d'assistance et des soins de santé garantis aux requérants d'asile renvoyés et aux personnes admises à titre provisoire et ayant manqué à leur obligation de collaborer et, d'autre part, l'exclusion du marché du travail, elles sont à la fois disproportionnées et extrêmement difficiles à mettre en oeuvre. N'étant pas de nature à réduire l'attrait de la Suisse comme terre d'asile, elles ne permettraient pas de réaliser des économies substantielles. Elles entraîneraient bien plus de dépenses supplémentaires d'une part parce que les requérants d'asile et les personnes admises à titre provisoire seraient totalement dépendantes de l'assistance suite à leur exclusion du marché de l'emploi suisse et, d'autre part, parce qu'il faudrait opérer des investissements supplémentaires dans les programmes d'occupation.

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