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Second rapport du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur l'initiative populaire tendant à soumettre au referendum certains traités internationaux.

(Du 9 mai 1919.)

I.

Le Conseil fédéral a adressé à l'Assemblée fédérale, le 29 mai 1914, un rapport sur l'initiative populaire tendant à soumettre au referendum certains traités internationaux; le rapport concluait au rejet de l'initiative.

Les- Chambres fédérales ont différé de traiter cette affaire, en raison de la situation extérieure et intérieure créée par la guerre mondiale. Plus de quatre années s'étant écoulées depuis le dépôt du premier rapport -- années qui n'ont pas laissé d'exercer une influence profonde sur la vie publique de notre pays --, le Conseil fédéral a jugé de son devoir de soumettre à un nouvel examen l'attitude qu'il a prise alors. Après que le département politique, celui de justice et police et celui de l'économie publique eurent donné leur avis dans des rapports spéciaux, le Conseil fédéral a décidé de revenir sur ses conclusions du 29 mai 1914 et de proposer à l'Assemblée fédérale, au lieu du rejet de l'initiative populaire, l'adoption d'un contre-projet correspondant en principe aux intentions de celle-ci.

Ce contre-projet, rédigé comme alinéas 3 et 4 de l'article 89 de la constitution fédérale, a la teneur suivante : « Tous les traités de la Confédération avec l'étranger, conclus pour une durée illimitée ou supérieure à quinze années et qui ne peuvent être dénoncés avant ce terme, ainsi que les alliances, sans égard à leur durée, sont également soumis à la votation du peuple, si la demande en est faite

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par 30.000 citoyens suisses ayant le droit de vote ou par huit cantons. En temps de guerre ou de menace de guerre, l'Assemblée fédérale peut déclarer urgent l'arrêté concernant la ratification d'un traité international. En ce cas, la votation du peuple ne peut être demandée. » Ce contre-projet est, dans les points essentiels, conforme a l'initiative. Toutefois, outre quelques modifications de rédaction qui ont paru nécessaires pour la clarté du texte, il ·en diffère sur deux points : D'abord le referendum est admis pour tout traité d'alliance, sans égard à sa durée. Ensuite notre projet fournit à / l'Assemblée fédérale, en temps de .guerre déclarée ou menaçante, la possibilité d'exclure le referendum par une déclaration d'urgence. Tandis1 que la déclaration d'urgence représente une limitation du champ d'application du referendum, tel qu'il est défini dans l'initiative, l'autre modification proposée représente une extension des droits du peuple. Dans les deux cas, il s'agit de dispositions applicables à des circonstances exceptionnelles et destinées à se produire rarement; mais cela ne diminue en rien leur haute portée politique.

II.

Avant de motiver le contre-projet, en tant qu'il diffère -de l'initiative, nous devons exposer pourquoi le Conseil fédéral a changé dfattitude.

Les; arguments qui ont été formulés contre l'initiative, «dans le rapport de 1914, sont restés exacts et ont conservé leur importance; mais ce sont essentiellement des arguments ·d'opportunité, opposés au principe de la démocratie directe.

Que les traités par lesquels l'Etat se lie pour une longue durée envers l'étranger, soient soumis à l'acceptation du peuple, souverain détenteur de la puissance politique, c'est un postulat qui rentre incontestablement dans le développement logique du droit public démocratique. Déjà so^ls le régime de l'ancienne Confédération, non seulement dans les cantons campagnards mais aussi parfois dans les cantons urbains, les alliances et d'autres traités importants étaient soumis au vote de la bourgeoisie et de la population rurale.

Plusieurs des constitutions cantonales actuelles prévoient le referendum soit pour tous les traités d'Etat^ soit pour certaines catégories de traités importants. Mais il ne faut pas oublier que cette application du referendum n'a pas dans les cantons la même importance politique que dans le doPeuille fédérale suisse. 71e année. Vol. II.

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maine fédéral, la Confédération étant seule à conclure des traités avec l'étranger.

Les puissantes réactions que la guerre a exercées sur la mentalité des peuples, au point de vue politique et social, se manifestent en ce que les principes s'affirment plus fortement par rapport aux considérations de simple opportunité et notamment en ce que l'application rigoureuse du principe démocratique est réclamée dans le domaine de la politiquesociale et extérieure. C'est à ce point de vue que l'initiative doit être appréciée maintenant.

Une attitude absolument négative à l'égard du postulat tendant à ce que certains traités, puissent être soumis au vote du peuple, ne s'imposerait que si la réalisation de ce postulat devait entraîner des dangers dont la gravité l'emporterait sur toutes autres considérations, ï^ais la simple', éventualité qu'à une époque future le principe formulé dans l'initiative puisse être étendu dans un sens nuisible aux intérêts du pays, ne permet pas de s'opposer à une revendication, justifiée en soi, de la démocratie.

Pour apprécier les arguments qu'on a opposés à l'initiative, il faut d'abord considérer qu'en limitant l'application du referendum aux traités liant la Confédération pour plus de 15 ans, l'initiative ne soumet au referendum qu'un nombre restreint de traités. Comme l'initiative parle de traités. « conclus pour une durée indéterminée », on a fait figurer dans la liste des traités jointe au rapport du 29 mai 1914, comme tombant sous le coup de l'initiative, de nombreuses conventions dont la durée n'est, il est vrai, pas déterminée, mais qui peuvent être dénoncées, en tout temps ou avant le terme de 15 ans. Or ces conventions ne sont pas visées par l'initiative, puisque le critère adopté par celle-ci est la durée minimum de 15 ans, durant laquelle la Confédération serait liée envers, un Etat étranger.

L'adoption de ce critère de la durée a pour conséquence que, le cas échéant, des traités très importants ne pourraient être soumis au peuple, tandis que des rectifications' de frontière iSans importance, des conventions pour le raccordement de lignes de chemins de fer etc., tomberaient sous le coup de la nouvelle disposition constitutionnelle. Néanmoins,.

c'est avec raison que l'initiative a admis ce critère. D'une part celui-ci constitue un indice facilement et clairement déterminable, et d'autre part, pour juger de la portée politique d'un traité, il est essentiel de considérer si l'Etat recouvrera,

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dans un délai relativement court, sa liberté d'action envers l'étranger, ou s'il .restera lié pour de nombreuses' années, peut-être pour plusieurs générations. En vertu de ses droits constitutionnels^ le peuple a la faculté de s'affranchir en tout temps de tous décrets de droit intérieur, tandis .que, souverain législateur, il ne peut se délier dfun traité. Les Chambre^s fédérales, qui ne sont que Les mandataires du peuple, peuvent par des traités', limiter indirectement la liberté de décision de celui-ci, en matière législative. C'est donc u-ne revendication démocratique bien naturelle que le peuple ne veuille pas se laisser lier par ses mandataires pour un temps indéfini, mais se réserve au moins la faculté, d'opposer son veto à. un engagement pris pour lui.

·Le fait que le critère de la durée, admis par l'initiative, est logiquement justifié', permet précisément d'espérer qu'on s'en tiendra là et qu'on ne voudra pas en définitive soumettre tous les traités sans distinction à la votation populaire. Si tel devait être le cas, en effet, le régime de nos relations conventionnelles s'en trouverait considérablement alourdi et peut-être influencé de façon nuisible. Pour parer d'emblée à une objection qui se présente à l'esprit contre l'application exclusive du critère die la durée, le contre-projet admet en tout état die cause le referendtim pour le cas -- exceptionnel à la vérité <-- d'une alliance. Les alliances, conclues pour n'importe quelle durée, sont de nature à placer l'Etat dans des situations dont les conséquences sont incalculables et inextricables. Tout autre traité, quelle que soit son importance économique, conclu pour moins de 15 ans, ne saurait guère influer de façon durable sur les destinées du pays.

Poux le cas où il y aurait lieu de s'y attendre, le contreprojet donne à l'Assemblée fédérale le droit de soumettre au peuple un 'traité quelconque.

Comme, tant d'après l'initiative qu'aux ternies du contreprojet, le referendum ne sera applicable qu'à un nombre restreint de traités, il n'est pas à craindre que la capacité de traiter du pays* soit notablement diminuée par cette institution. Même dans les cas où une votation populaire pourra être demandée, le gouvernement fédéral ne ,sera pas ou du moins pas considérablement gêné dans sa capacité de traiter. La question du secret ne peut
entrer en ligne de compte; les traités secrets sont déjà impossibles d'après le droit constitutionnel suisse en vigueur, et les aspirations modernes tendent à les faire disparaître partout. Même, sous le régime actuel, avec la discussion parlementaire des

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traités, il est impossible de taire les motifs essentiels de leur conclusion, comme pourraient parfois l'exiger des considérations d'ordre international; l'exclusion de la publicité, lors de la discussion d'un traité aux Chambres, n'aboutirait qu'à éveiller le,s plus véhémentes suspicions. Ainsi, en ce qui concerne le secret ou la publicité de la conclusion des traités, l'application du referendum n'apporte rien de nouveau, par conséquent par de nouvelles difficultés.

· On a entrevu une autre diminution de notre capacité de traiter dans le fait que la ratification d'un traité signé par le gouvernement est d'autant moins assurée qu'il y a plus d'instances appelées à le ratifier, et que le résultat d'une votation populaire est particulièrement difficile à prévoir.

Il est certain que la possibilité du referendum retarde le moment où le Conseil fédéral peut ratifier un traité de la durée du délai référendaire,
En ce qui concerne l'insécurité de la conclusion, due au referendum, elle ne serait guère plus grande et plutôt moindre que par exemple dans les Etats à régime parlementaire, où un déplacement de la majorité du corps législatif entraîne généralement un changement d'orientation de la politique gouvernementale. Toute forme de gouvernement, celle de la démocratie comme les autres, a en propre certaines difficultés, mais celles afférentes au régime démocratique pour la conclusion des traités ne doivent pas être exagérées. En tout cas, qu'un gouvernement vienne à être désavoué par une votation populaire, c'est un moindre mal que si la politique intérieure et extérieure du pays- doit porter le fardeau d'.un traité de longue durée ou même perpétuel, contre lequel s'insurge une opposition qui croit représenter la majorité du peuple et qui, faute de referendum, n'a pas été appelée à se prononcer directement.

Les désavantages que la réalisation de la demande d'initiaitive entraînerait au point de vue de
nos relations internationales, ne paraissent dont pas être assez grands pour justifier le rejet d'une revendication de principe de la démo.cratie, ou bien ils ne sont pas attachés en propre à l'innovation proposée. Ceci toutefois sous une réserve : II peut se

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présenter, en 'temps de guerre déclarée ou menaçante, .des situations dans> lesquelles les délais que réclame l'exercice du referendum rendraient impossible la conclusion d'un traité en temps utile. C'est en prévisiçn de pareilles situations que le contre-projet réserve les décisions d'urgence, mais seulement en temps de guerre ou de danger de guerre.

III.

Le contre-projet du Conseil fédéral diffère de la demande' d'initiative sur les points suivants : a. Du fait que la constitution fédérale, aux articles 8 et 85, chiffres 5 et 6, mentionne conjointement les « alliances » et « les traités », ou les « traités avec les Etats étrangers » et « la conclusion de la paix », on pourrait déduire (cfr. rapport du 29 mai 1914, p. 28), que l'initiative, qui ne parle que de « traités internationaux » ne comprend pas les alliances et les traités de paix. Cette interprétation serait contraire au sens et à l'esprit de la demande d'initiative et devrait être par conséquent repoussée. Du moment que le contre-projet soumet sans réserve les alliances au referendum, aucun doute ne peut subsister à cet égard. Les traités de paix, qui de leur nature sont des traités non dénonçables, mais qui peuvent contenir aussi des clauses de durée limitée, doivent aussi être compris de façon non équivoque dans la notion des « traités internationaux ». C'est pourquoi le contre-projet parle de « tous les traités avec l'étranger ».

b. Le contre-projet ajoute après « traités », les mots « de la Confédération », pour indiquer clairement que les traités des cantons avec l'étranger, qui sont portés à l'Assemblée fédérale ensuite de réclamation, conformément à l'article 85, chiffre 5, ne sont pas soumis au referendum.

c. L'initative parle de traités « conclus pour une durée indéterminée ou pour plus de 15 ans ». Le contre-projet donne ]a préférence à une formule qui exprime la même idée un peu plus clairement.

Un traité de durée indéterminée est un traité ne fixant pas de terme auquel il devient caduc de plein droit ou peut être résolu, par la volonté d'une des parties. Les traités de ce genre sont assez, nombreux; niais comme ils sont très variés dans leur teneur, la signification de l'absence d'un terme de validité est aussi très variable. Les traités qui fondent une possession durable, comme par exemple les ree-

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tifications de frontières, isont de leur nature non dénonçables et ne cessent pas non plus de déployer leurs effets à une époque déterminée. Par contre, s'ils obligent lès parties à des prestations continues ou réitérées, on ne peut présumer qu'un Etat ait voulu se lier de la sorte pour un temps illimité. La question de savoir si la Volonté dés parties était de contracter une obligation illimitée ou dénonçable est une question d'interprétation. Il n'y aurait aucun intérêt à examiner l'application de ce principe à des cas déterminés, puisque les traités déjà ratifiés ne sont pas soumis au referendum.

A l'avenir, si la demande d'initiative ou le contre-projet est adopté, on devrait 'tendre, conformément à la pratique moderne en matière de traités, à régler dans chaque convention la question de la dénonciation, du moins dans le cas où il ne ressort pas nettement dé la nature même de là convention que celle-ci est indéhonçable.

Lorsqu'un traité de durée illimitée admet expressément la dénonciation par chaque partie, par exemple au terme d'une année, il est évident qu'il ne tombe pas sous le coup du referendum. Ceci s'applique entr'autres à une série de traités d'extradition qui ont été mentionnés dans l'a liste jointe au rapport de 1914 comme conclus pour une durée indéterminée et par conséquent soumis au referendum, aux termes de la demande d'initiative.

Le point déterminant est celui de savoir si, après 15 ans au plus, la Confédération peut ou non se libérer unilatéralement d'une convention, sans autres conditions contractuelles.

A cet égard il est indifférent que la libération s'effectue de plein droit, par l'expiration de la durée du traité, ou par dénonciation. Pour exprimer cette idée, le contre-projet parle de traités « conclus pour une durée illimitée ou supérieure à quinze années, et qui ne peuvent être dénoncés avant ce terme ».

d. En extension de la doctrine représentée par la demande d'initiative, le contre-projet veut admettre le referendum pour les alliances, sans égard à leur durée. Comme nous l'avons fait remarquer plus haut, cette disposition se justifie par l'extrême importance politique des alliances qui, notamment pour un Etat à neutralité permanente, sont une chose exceptionnelle et ne peuvent pas se comparer à d'autres traités internationaux.

La notion générale d'« alliance » doit comprendre tous

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les accords internationaux à buts politiques. Il faut faire rentrer dans ces accords une Ligue des nations ayant pour "tâche ·'d'assurer par des mesures communes l'ordre pacifique ·établi par elle et, s'il est troublé, de le défendre et de le rétablir.

Des accords internationaux à buts politiques autres que ceux qui servent au maintien de-la^paix et qui sont ouverts cen principe à tous les Etats intéressés, n'entreront pas en ligne de compte pour la Suisse, qui pratique depuis> des ·siècles une politique "de paix et de neutralité. Cela bien en.tendu sous réserve de son droit de conclure au besoin des ·alliances défensives, en cas 'd'agression contre son territoire et son indépendance.

Pour la conclusion d'alliances, on pourrait le cas éché^ant se demander si la ratification du traité ne devrait pas avoir lieu par voie de revision constitutionnelle soumise à la votation du peuple et des cantons. Tel serait le cas si un traité conclu par la Confédération comportait une modifi·cation de la constitution fédérale ou des principes essentiels sur lesquels elle repose. On peut s'abstenir d'insérer dans le contre-projet une disposition spéciale à cet égard, car il va de soi que, lorsqu'il s'agit d'une dérogation réelle à la constitution, elle ne peut avoir lieu que par voie de revision constitutionnelle. Mais il faut faire remarquer qu'il y a des ·dispositions de la constitution qui visent avant tout le ré: girne de droit du pays lui-même et n'empêchent pas l'établissement par une convention internationale d'un régime ·différent en ce qui concerne les relations de la Suisse avec l'étranger. Des dispositions contractuelles internationales de ·cette nature n'exigent pas une revision de la constitution.

e. La demande d'initiative veut admettre sans réserves le referendum pour les traités qui, par leur durée, remplissent les conditions prévues. Mal® comme on ne peut prévoir les circonstances dans lesquelles la conclusion d'un traité doit s'effectuer, il ne paraît pas ;sans dlanger de se lier en toute éventualité à la procédure du referendum, rendant impossible une conclusion rapide. Le contre-projet admet par conséquent la possibilité de soustraire au referendum un traité, c'est-à-dire l'arrêté fédéral concernant sa ratification, par une déclaration d'urgence. Mais cette possibilité n'est prévue que pour le temps de guerre déclarée ou menaçante. C'est à l'Assemblée fédérale qu'il appartiendrait de décider s'il y a urgence et danger de guerre.

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Si la constitution fédérale, à l'article 89, admet la clause d'urgence pour les arrêtés fédéraux, parce qu'elle est nécessaire, il faut bien admettre aussi la possibilité de conclure, dans l'intérêt du pays, un traité avec entrée en vigueur immédiate et sans consultation populaire. Mais cette limitation des droits populaires, en matière de traités internationaux, ne peut aller plus loin que ne l'exigent absolument le,s intérêts du pays, car un traité international crée -une dépendance d'une certaine durée, tandis qu'un arrêté fédéral déclaré urgent peut être modifié en tout temps et au besoin abrogé ensuite dfune initiative populaire. C'est pourquoi la clause d'urgence ne doit être appliquée qu'en temps de guerreou de danger de guerre, car c'est seulement en des temps pareils qu'il y a probabilité que l'intérêt du pays exige la conclusion immédiate de traités. Mais alors, la possibilité d'exclure le referendum peut être une exigence impérieuse de la politique nationale, une nécessité vitale. En vertu du régime de la neutralité, la Confédération, en temps de paix, ne conclut pas d'alliances au sens étroit du mot, mais en temps de guerre, si elle est assaillie ou menacée, elle peut être forcée d'en conclure. Alors il s'agira peut-être d'une décision à prendre du jour au lendemain, et qui ne souffrirait absolument pas les retards inséparables de la procédtire de referendum. D'ailleurs, des traités autres que des alliances peuvent en temps de guerre exiger une conclusion immédiate. Il n'est toutefois pas probable qu'en temps de guerre, des traités 'Soient conclus pour une durée de plus de 15 ans.

Mais ce sont les situations extraordinaires qu'on peut le moins prévoir. Il serait donc dangereux de s'interdire la conclusion rapide d'un traité de nature quelconque.

L'urgence .signifie la pénurie de temps, c'est-à-dire qu'il faut des circonstances dans lesquelles l'observation des délais exigés par le referendum paraîtrait incompatible avecdés intérêts capitaux du pays. Le seul désir de soustraire aux risques de la votation populaire un traité considéré par les Chambres comme absolument nécessaire, ne suffirait pas à justifier une déclaration d'urgence.

On pourrait aussi songer à instituer pour les traités la même distinction que pour les arrêtés fédéraux, et à prévoir le referendum seulement pour ceux
qui sont « d'une portée générale ». Mais on ne saurait préconiser l'extension de la notion très incertaine de la « portée générale » aux traités, où son interprétation serait aussi peu sûre que pour les arrêtés fédéraux. Ce qui fait l'importance d'un traité inter-

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national, ce n'est pas dans la règle le fait qu'il statue, comineune loi, des règles de droit généralement applicables, mais sa portée politique et économique. La convention du Gothard, par exemple, ne serait pas d'une portée générale (allgemein verbindlich), au sens d'un arrêté fédéral, mais elle a bien une importance générale par la durée et l'étendlue des stipulations qu'elle contient.

Comme la disposition concernant l'urgence constitue une dérogation au principe constitutionnel, elle doit êtreinterprêtée restrictivement. Ceci a notamment pour conséquence qu'en tant que possible, on ne doit pas conclure sons la protection de la clause d'urgence des traités dont la durée dépasse celle des circonstances spéciales qui'ont justifié la déclaration dfurgence. Mais on ne saurait recommander de formuler une disposition en ce sens, car le cas échéant celle-ci pourrait rendre impassible la conclusion d'un traité nécessaire, ou en aggraver sérieusement les conditions..

'Nous avons l'honneur de formuler la proposition suivante : « L'Assemblée fédérale, en application des articles 8 et suivante de la loi fédérale du 27 janvier 1892 sur le mode de procéder pour les demandes d'initiative populaire et les votations relatives à la revision de la constitution fédérale; Concernant la revision de la constitution, décide : 1. De rejeter l'initiative tendant à compléter l'article 89 de la constituition fédérale (referendum facultatif pour les traités internationaux), et de la soumettre à la votation du peuple et des cantons en leur proposant le rejet; 2. De soumettre en même temps à la votation du peuple et des cantons un contre-projet de l'Assemblée fédérale, avec proposition de l'accepter. Le contre-projet a la teneur suivante : L'article 89 de la constitution fédérale est complété parles alinéas 3 et 4 ci-après : Tous les traité® de la Confédération avec l'étranger, conclu® pour une dtarée illimitée ou supérieure à quinze années et qui ne peuvent être dénoncés avant ce terme, ainsi que les alliances, sans égard à leur durée, sont également soumis, à la votation du peuple, si la demande en est faite par30.000 citoyens suisses ayant le droit de vote ou par huit cantons. »

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En temps de guerre ou de menace de guerre, l'Assemblée fédérale peut déclarer urgent l'arrêté concernant la ratification d'un traité international. En ce cas, la votation populaire ne peut être demandée.

Veuillez agréer, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

Berne, le 9 mai 1919.

Au nom du Conseil fédéral suisse : Le préaident de la Confédération, ADOR.

Le chancelier de la Confédération, STEIGER.

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