Rapport du Conseil fédéral concernant l'appréciation de la menace et les activités des organes de sûreté de la Confédération en 2007 du 2 avril 2008

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre le présent rapport, conformément à l'art. 27, al. 1, de la loi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure, et vous prions d'en prendre connaissance.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

2 avril 2008

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2008-0095

2441

Condensé En application de l'art. 27, al. 1, de la loi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure (LMSI), le Conseil fédéral renseigne, annuellement ou selon les besoins, les Chambres fédérales, les cantons et le public sur son appréciation de la menace et sur les activités des organes de sûreté de la Confédération.

Au printemps 2007, la Délégation des commissions de gestion (DélCdG) a demandé au Conseil fédéral de vérifier la pratique actuelle en matière de publication, par l'Office fédéral de la police (fedpol), du rapport annuel sur la sécurité intérieure de la Suisse, et de voir notamment comment il serait possible d'établir un compte rendu plus étoffé incluant une analyse politique, qui présenterait également une vue complète des activités des organes fédéraux chargés de la sécurité intérieure.

Le 27 juin 2007, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police (DFJP) de soumettre une proposition relative à l'application future de l'art. 27, al. 1, LMSI. Le 14 novembre 2007, le Conseil fédéral a décidé que ce rapport annuel, portant sur l'année précédente, serait publié dans le cadre de son rapport de gestion mais que, pour la première parution en 2008, il serait publié sous la forme d'un rapport spécial.

Le Conseil fédéral constate que la menace s'est progressivement aggravée depuis les attentats du 11 septembre 2001, en particulier du fait du djihadisme. En Suisse, le djihadisme se limite principalement à des activités liées à la propagande, à la logistique et au financement en faveur de groupes actifs dans certaines zones sensibles telles que l'Irak. Les possibilités offertes par Internet au niveau de la communication, de la propagande, du recrutement et de la formation sont de plus en plus utilisées. Certains groupes motivés par l'idéologie islamiste accentuent leur présence sur la scène internationale grâce à l'influence croissante d'Al-Qaïda.

Il est probable que l'extrémisme politique violent d'origine étrangère continue de se limiter à la propagande, à la logistique et au financement en faveur d'organisations actives dans le pays d'origine. Il recèle toujours un potentiel de violence élevé, mais le passage à l'acte en Suisse reste lié aux événements dramatiques susceptibles de se produire dans le pays d'origine.
En Suisse, l'extrémisme de gauche et de droite représente une menace locale et ponctuelle pour la sécurité intérieure. La menace s'est en revanche accentuée pour les magistrats, même si elle n'est pas forcément liée à l'extrémisme politique violent.

L'an dernier, les menaces visant des magistrats et des parlementaires se sont multipliées. Pour les personnes jouissant d'une protection en vertu du droit international public, la menace est restée stable, de même que la menace pesant sur les bâtiments diplomatiques.

En ce qui concerne la prolifération, le service de renseignements prohibé, le crime organisé et la violence lors de manifestations sportives, la situation n'a, en 2007, pratiquement pas changé par rapport aux années précédentes. S'agissant de la prolifération, un intérêt croissant pour les technologies nucléaires a été constaté ces

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dernières années dans de nombreuses parties du monde, ce qui allongera sensiblement, ces prochaines années, la liste des Etats souhaitant maîtriser la technologie nucléaire, avec les conséquences qui en découlent pour les organes de contrôle suisses. Dans le domaine de la cybercriminalité, il faut compter avec des formes de menaces évoluant rapidement au gré des innovations techniques.

Conformément à la LMSI, le Service d'analyse et de prévention (SAP) et le Service fédéral de sécurité (SFS) de fedpol sont chargés de l'exécution des mesures, pour autant que les cantons ou d'autres services fédéraux ne soient pas compétents. Dans l'accomplissement de leurs tâches, le SAP et le SFS collaborent étroitement avec les cantons et d'autres organes suisses et étrangers.

Les organes de sûreté de la Confédération s'acquittent de leurs tâches avec succès.

Cependant, force est de constater que, depuis longtemps, les renseignements qu'il est possible de collecter ne permettent plus l'appréciation de la situation et la prise de décisions, ni d'ailleurs de reconnaître à temps les dangers cachés, et ne correspondent plus aux normes européennes. C'est pourquoi, le 15 juin 2007, le Conseil fédéral a présenté aux Chambres fédérales son message relatif à la modification de la LMSI (moyens spéciaux de recherche d'informations).

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Rapport 1

Introduction

Par le présent rapport, le Conseil fédéral renseigne les Chambres fédérales, les cantons et le public sur son appréciation de la menace et sur les activités des organes de sûreté de la Confédération en 2007, conformément à l'art. 27, al. 1, de la loi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure (LMSI)1. Les thèmes abordés dans le présent rapport se réfèrent aux champs d'application de la LMSI. Dans ce contexte, la notion d'«appréciation de la menace» se rapporte à des thèmes relevant de la sûreté intérieure (et, par conséquent, aussi extérieure) dans le domaine civil, mais pas à d'autres formes de menaces, par exemple de type militaire. Le terme d'«organes de sûreté de la Confédération» désigne, dans le présent rapport, les organes fédéraux chargés de l'exécution de la LMSI, à savoir principalement le Service d'analyse et de prévention (SAP) et le Service fédéral de sécurité (SFS) de l'Office fédéral de la police (fedpol). Dès 2008, le Conseil fédéral intégrera ce rapport dans son rapport de gestion annuel ordinaire (décision du Conseil fédéral du 14 novembre 2007). Il se réfère en même temps à l'analyse détaillée de la situation effectuée chaque année par fedpol dans son Rapport sur la sécurité intérieure de la Suisse ainsi qu'au rapport d'activité de fedpol, qui sera publié pour la première fois en 2008.

2

Appréciation de la menace

2.1

Menace terroriste

Le djihadisme est le courant islamiste proche d'Al-Qaïda dont l'on constate la présence dans le monde entier. La Suisse est située dans la zone exposée au risque djihadiste constituée par l'Europe occidentale, mais n'est cependant pas une cible première du terrorisme islamiste, même si des djhadistes la considèrent comme un «Etat de croisés».

En Grande-Bretagne, au Danemark et en Allemagne notamment, la mise au jour de cellules opérationnelles au cours de l'année sous revue a permis de constater que le phénomène du terrorisme islamiste endogène («homegrown») existait en Europe dans le domaine du djihadisme et de cerner le genre de menace qui en émane. Jusqu'à présent, rien ne permet de prouver avec certitude que des préparatifs concrets en vue d'un attentat aient eu lieu en Suisse.

La menace émanant du terrorisme politique d'origine européenne a diminué durant ces dernières années.

1

RS 120

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2.2

Menace émanant de l'extrémisme violent

Le nombre de personnes appartenant aux milieux d'extrême droite et leurs activités restent stables. D'une manière générale, on constate qu'en 2007 les extrémistes de droite se sont montrés plus agressifs envers les autorités chargées de la sécurité et qu'ils ont de plus en plus souvent organisé leurs activités en toute discrétion.

Les milieux d'extrême gauche se sont concentrés sur ce que l'on appelle l'antifascisme (ce qui signifie pour eux la lutte contre le système capitaliste et l'ordre étatique démocratique), ainsi que sur des actions de solidarité en faveur de personnes emprisonnées, idéologiquement proches ou qu'il est possible d'instrumentaliser aux fins de propagande.

Les groupes extrémistes violents étrangers agissant pour des raisons politiques, notamment les groupes kurdes et tamouls, ainsi que les groupes d'Europe du Sud-est se concentrent principalement en Suisse sur la propagande, la logistique et le financement des activités dans leur pays d'origine. Leur potentiel de violence demeure élevé.

2.3

Appréciation de la menace terroriste et de la menace émanant de l'extrémisme violent

Le djihadisme constitue à l'heure actuelle la principale menace terroriste pesant sur la sécurité intérieure des pays occidentaux. Les groupes extrémistes violents agissant pour des motifs politiques, qu'ils soient d'origine suisse ou étrangère, représentent actuellement une menace minime pour la sécurité intérieure de la Suisse, même s'ils disposent d'un potentiel non négligeable.

En Suisse, le djihadisme se concentre principalement sur la propagande, la logistique et le financement en faveur de groupes actifs dans certaines zones sensibles, comme l'Irak. Les possibilités offertes par Internet au niveau de la communication, de la propagande, du recrutement et de la formation sont de plus en plus utilisées. On a par ailleurs constaté l'an dernier que des groupes islamistes, tels que le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), qui est devenu Al-Qaïda au Maghreb islamique et qui était actif sur le plan national, utilisaient une rhétorique toujours plus internationaliste inspirée de celle d'Al-Qaïda. Il n'est pas encore possible de savoir si cela, ajouté aux nombreux attentats commis contre des cibles étrangères dans le pays d'origine, renforcera la collaboration avec des cellules locales en Europe.

La situation des groupes extrémistes violents étrangers agissant pour des raisons politiques, notamment les groupes kurdes et tamouls, ainsi que les groupes d'Europe du Sud-est demeure calme, mais tendue. L'émergence d'actes de violence en Suisse reste liée à d'éventuels événements dramatiques dans le pays d'origine.

En Suisse, l'extrémisme de gauche et de droite représente une menace locale et ponctuelle pour la sécurité intérieure.

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2.4

Menaces à l'encontre de magistrats et de personnes jouissant d'une protection en vertu du droit international public; protection des biens immobiliers

La menace visant des magistrats a changé de façon notable en 2007. Des actions perturbatrices ont été menées lors de journées fortes en symboles telles que le 1er Mai ou le 1er Août ainsi qu'à l'occasion d'autres événements officiels et non officiels impliquant des conseillers fédéraux. Les menaces visant des magistrats et des parlementaires se sont multipliées durant la période sous revue, entraînant pour le Service fédéral de sécurité (SFS) un redoublement et un approfondissement des investigations et des analyses. Pour les personnes jouissant d'une protection en vertu du droit international public, la menace est généralement restée stable. Des actions de protestation et des perturbations ont régulièrement eu lieu en réaction à des événements de grande envergure et à des conflits régionaux. Le degré de la menace pesant sur les bâtiments diplomatiques est resté quant à lui élevé. La guerre en Irak et la lutte menée par les Etats-Unis contre le terrorisme n'ont pas impliqué de grands changements quant aux mesures de sécurité appliquées. S'agissant des bâtiments de la Confédération, les actions de protestation et les dommages matériels causés en rapport avec des thèmes politiques et des décisions sensibles sont restés semblables aux années précédentes. La menace pesant sur l'aviation civile, émanant de cellules terroristes, montre que les avions de ligne peuvent toujours être utilisés pour commettre des actes terroristes.

2.5

Menace émanant des substances de combat non conventionnelles et de la prolifération

Selon des informations des services de renseignements, les groupes terroristes islamistes s'intéressent à la possibilité d'utiliser des «bombes sales», en répandant dans l'environnement des matériaux radioactifs au moyen d'explosifs conventionnels.

Bien qu'aucun attentat de ce type n'ait été encore commis, la menace doit, au vu des conséquences prévisibles graves, être prise au sérieux. C'est pourquoi la Confédération dispose d'un plan d'action adéquat, même si la Suisse n'est pas non plus dans ce domaine une cible première des terroristes.

Les Etats oeuvrant à la prolifération s'intéressent notamment à la qualité suisse et particulièrement à un certain nombre d'entreprises actives dans des domaines de la haute technologie. La vigilance en matière de contrôle à l'exportation concerne surtout les biens dits à double usage, qui tombent sous le coup de la loi sur le contrôle des biens. En automne 2004, le SAP a lancé le programme de prévention et de recherches Prophylax. Les mesures de sensibilisation et de prévention ciblées proposées par ce programme destiné aux entreprises et aux centres de formation et de recherche potentiellement concernés s'avèrent positives. L'intérêt croissant pour les technologies nucléaires constaté ces dernières années dans de nombreuses parties du monde allongera sensiblement, ces prochaines années, la liste des Etats souhaitant maîtriser la technologie nucléaire, avec les conséquences qui en découlent pour les organes de contrôle suisses.

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2.6

Menace émanant du crime organisé

Certaines formes du crime organisé continuent de représenter une menace pour la sécurité intérieure de la Suisse. Les organisations criminelles originaires de la Communauté des Etats indépendants (CEI) et des pays d'Europe du Sud-est notamment contribuent à cette menace. Par ailleurs, la Suisse est également touchée par le crime organisé d'Italie, de Chine et d'Afrique de l'Ouest.

Le crime organisé de la CEI est ressenti comme un danger dans de nombreux pays européens. Des investisseurs puissants, dont l'implication dans le crime organisé ou l'appartenance à des organisations criminelles est floue et difficile à prouver, restent toujours très actifs et étendent leur rayon d'action à différentes branches de l'économie. Des formes de collaboration ont été constatées entre certaines de ces organisations criminelles et des services de renseignements de la CEI. Le danger particulier de ces structures repose sur l'amalgame entre la puissance financière ­ et par conséquent l'influence sur la politique et l'économie ­ et les liens avec des services de renseignements étrangers.

Le crime organisé d'Europe du Sud-est est un facteur déterminant pour le développement de la criminalité dans toute l'Europe. Des groupes criminels d'Europe du Sud-est semblent intensifier leurs activités dans certains pays européens. Les structures du crime organisé d'Europe du Sud-est reposent sur des réseaux transnationaux et sont impliquées principalement dans le trafic de stupéfiants et d'armes, de même que dans la traite des êtres humains. Dans les pays d'origine, ces structures entretiennent de très bons contacts avec la politique et la société. Des éléments indiquent qu'elles essaient également d'influencer la société et l'économie dans les pays où elles développent leurs activités criminelles. En Suisse, le marché de l'héroïne est dominé par les groupes criminels d'Europe du Sud-est, notamment par des groupes de souche albanaise.

2.7

Menace émanant du service de renseignements prohibé

L'espionnage a repris de l'ampleur au cours des dernières années. En Suisse, ce phénomène est en partie dû au fait que de nombreuses institutions internationales ont leur siège sur le territoire helvétique. Certaines communautés d'étrangers sont la cible de recherches menées par leur pays d'origine. En tant que place économique et plate-forme de recherche, la Suisse est attrayante pour l'espionnage économique, qui est également le fait d'acteurs étatiques agissant avec des moyens électroniques.

Ainsi, en 2007, les réseaux d'autorités suisses, d'entreprises d'armement ou de sociétés en charge de mandats étatiques ont été attaqués, mais généralement en vain.

2.8

Menace émanant de la cybercriminalité

Dans le domaine de la cybercriminalité, l'espionnage industriel étatique ou privé ciblé, le djihadisme sur Internet et les activités relevant de la criminalité économique ont occupé, en 2007, le devant de la scène. Il en va de même de la diffusion de matériel de pornographie enfantine sur Internet.

2447

On constate de plus en plus que les acteurs sont organisés de façon structurée et agissent de manière professionnelle. L'utilisation de réseaux de zombies (ordinateurs privés infectés par des maliciels commandés à distance par des tiers) est l'instrument principal des acteurs de la criminalité économique.

2.9

Menace lors de manifestations sportives

Le nombre d'auteurs d'actes de violence lors de manifestations sportives reste constant. Dans la ligue de football supérieure, les matches de la plupart des équipes sont suivis par des supporters enclins à la violence. En Suisse, on estime toujours qu'il y a entre 1500 et 2000 supporters enclins à la violence et que 200 à 300 d'entre eux sont des hooligans au sens classique du terme, particulièrement enclins à la violence. Ce noyau dur est bien organisé et cherche principalement la confrontation avec d'autres groupes de hooligans. Ainsi, il est frappant de constater que les événements sportifs sont de plus en plus fréquemment détournés à des fins non sportives.

3

Activités des organes de sûreté de la Confédération

3.1

Structure, activités et collaboration

3.1.1

Structure du SAP

Fedpol assure les mesures visant au maintien de la sûreté intérieure, pour autant que ces tâches doivent être exercées par la Confédération et qu'elles ne soient pas attribuées à d'autres organes. Au sein de fedpol, le SAP, avec ses quelque 140 postes, accomplit les tâches de l'office (art. 2, al. 1 et 2, de l'ordonnance du 27 juin 2001 sur les mesures visant au maintien de la sûreté intérieure, OMSI)2. En tant que service de renseignements intérieur de la Suisse, le SAP réunit des informations dans les domaines du terrorisme, de l'extrémisme violent, du service de renseignements prohibé et de la prolifération et les évalue. La recherche d'informations définie à l'art. 14 LMSI relève de la Division Opérations, l'examen et la distribution des informations, de la Division Gestion des informations et cybercriminalité, qui comprend notamment le Service de coordination de la lutte contre la criminalité sur Internet (SCOCI) et la partie opérationnelle, de la Centrale d'enregistrement et d'analyse pour la sûreté de l'information (MELANI). L'évaluation des informations est du ressort de la Division Analyse. Les offices centraux chargés des explosifs et de la pyrotechnie, des armes et de la non-prolifération ainsi que le Bureau des liaisons, le Service des étrangers, le Centre fédéral de situation (CFS) et le domaine spécialisé dans les contrôles de sécurité relatifs aux personnes, lequel effectue des investigations sur mandat de la Division de la protection des informations et des objets du DDPS, sont également rattachés au SAP.

La Confédération et les cantons pourvoient à la sécurité du pays et à la protection de la population dans les limites de leurs compétences respectives. Ils coordonnent leurs efforts en matière de sécurité intérieure (art. 57, al. 1 et 2, Cst.)3. Pour la pé2 3

RS 120.2 RS 101

2448

riode sous revue, la Confédération a soutenu les activités des cantons visant au maintien de la sécurité intérieure à hauteur de 8,4 millions de francs, ce qui représente 84 postes assignés à des tâches de protection de l'Etat dans les cantons.

Schéma des services du SAP Service des étrangers 5% Offices centraux 10 %

Etat-major 5%

Direction 6%

Opérations 18 %

Relations internationales 4%

Centre fédéral de situation 7% Analyse 18 %

3.1.2

Gestion des informations Cybercriminalité 27 %

Activités du SAP

Les postes du SAP liés aux tâches découlant de la LMSI ont été répartis comme suit durée l'année sous revue: 45 % pour le terrorisme, 30 % pour l'extrémisme violent (hooliganisme inclus), 15 % pour la prolifération et 10 % pour le service de renseignements prohibé.

Près de 40 % des communications et informations liées à la LMSI concernaient le terrorisme, 33 % l'extrémisme violent, 17 % la prolifération et 10 % le service de renseignements prohibé. Les événements liés à la propagande violente et au hooliganisme enregistrés dans le système de traitement des données relatives à la protection de l'Etat ISIS ne représentaient, à eux deux, pas même 0,5 %. A la même période, près de 260 personnes étaient enregistrées dans la banque de données Hoogan, mise en place durant l'année sous revue, pour avoir commis des actes de violence lors de manifestations sportives. Les recherches menées par le SCOCI ont conduit à la transmission de près de 700 cas suspects aux autorités de poursuite pénale compétentes.

Le SAP ordonne des mesures d'éloignement pour des motifs sécuritaires et les exécute (art. 2, al. 2, OMSI). En 2007, sur les 165 interdictions d'entrée prononcées, 85 % étaient liées à l'extrémisme violent. 17 interdictions d'entrée ont été prononcées contre des membres de groupes skinhead étrangers et 117 étaient en lien avec le Forum économique de Davos.

En application des art. 19 à 21 LMSI, le service spécialisé chargé des contrôles de sécurité relatifs aux personnes au DDPS (domaine départemental Défense, Etat-major du CdA, Division de la protection des informations et des objets) procède aux contrôles de sécurité en collaboration avec le SAP, lequel est notamment chargé de collecter des données. En 2007, le service spécialisé a procédé à près de 36 000 contrôles de sécurité relatifs aux personnes auprès des employés de la Confé-

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dération, des militaires, des employés des cantons ou de tiers. Près de la moitié d'entre eux ont été transmis au SAP pour un examen approfondi.

Outre les décideurs politiques de la Confédération et des cantons et les autorités de poursuite pénale, fedpol a, depuis 2002, aussi informé le public par le biais du «Rapport sur la sécurité intérieure de la Suisse», publié annuellement. Une demi-douzaine de rapports relevant de tous les domaines de la LMSI ont été transmis aux décideurs politiques de la Confédération et des cantons ainsi qu'aux autorités de poursuite pénale. En 2007, le CFS a apporté son soutien aux cantons lors du Forum économique mondial, de la Fête du travail, du Sommet du G8 à Heiligendamm/D et de la fête du 1er Août, en mettant à disposition un réseau national de renseignements et une présentation électronique de la situation. Il a établi chaque jour ouvrable un rapport de situation destiné aux cantons et à l'administration fédérale et chaque semaine des rapports de situation présentant des analyses et des commentaires destinés à l'ensemble du Conseil fédéral, au chef du DFJP, aux cantons et à l'administration fédérale.

Chaque année, l'inspectorat du DFJP contrôle, sur le plan interne, la légalité, l'opportunité et l'efficacité des activités du SAP. En 2007, le contrôle a porté sur l'application de la directive du 26 août 2004 «Berichterstattung betreffend die Tätigkeiten zur Wahrung der inneren Sicherheit gemäss BWIS» (disponible uniquement en allemand), sur l'appréciation générale de la liste des organisations à observer conformément à l'art. 17, al. 3, OMSI, et sur le traitement des données dans le nouveau système électronique d'informations Hoogan. Comme chaque année, les programmes de recherches et les opérations ont été contrôlés. La DélCdG a été informée régulièrement des activités du SAP et de l'appréciation générale de la situation. Le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT) a été tenu au courant du développement de la banque de données Hoogan et a traité plusieurs demandes de consultation dans ISIS. Dans plusieurs cas, le Tribunal administratif fédéral a examiné la communication que le PFPDT avait adressée à la personne qui a demandé la consultation dans ISIS, conformément à l'art. 18, al. 2, LMSI.

3.1.3

Collaborations du SAP

Le SAP collabore avec des partenaires suisses et étrangers. En Suisse, il s'agit notamment des cantons, de la Police judiciaire fédérale (PJF) et du SFS de fedpol, du Service de renseignement stratégique (SRS) et du Renseignement militaire (RM) du DDPS, du Corps des gardes-frontière (Cgfr), rattaché au Département fédéral des finances (DFI), de la Direction politique au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO), au Département fédéral de l'économie (DFE). Le SAP apporte sa contribution à l'appréciation de la situation et à la détection précoce au sein des organes chargés de la conduite de la politique de sécurité du Conseil fédéral (Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité, Etatmajor de la Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité, Organe de direction pour la sécurité).

2450

3.1.3.1

Service de renseignements intérieur et poursuite pénale

Le maintien de la sécurité de la Suisse nécessite la prévention par le renseignement et la répression par la poursuite pénale.

La fonction du SAP consiste à informer rapidement les organes dirigeants de l'Etat et les organes policiers de la Confédération, mais aussi des cantons, des menaces qui pèsent sur la sûreté intérieure, afin que des mesures préventives puissent être prises en temps utile.

Les autorités de poursuite pénale de la Confédération sont la PJF et le Ministère public de la Confédération. La poursuite pénale vise à clarifier une présomption d'infraction et la question de la faute individuelle sur le plan judiciaire. Contrairement au SAP, les autorités de poursuite pénale peuvent recourir, au cours de leurs enquêtes relevant du droit pénal, à des mesures de contrainte prévues par la procédure.

Dans sa fonction d'office central de police criminelle, la PJF assure la détection précoce dans le domaine répressif. A ce titre, il lui incombe de découvrir et de combattre les phénomènes complexes et transfrontaliers liés à la grande criminalité lorsque, conformément à l'art. 337 CP, ils relèvent de la juridiction fédérale.

Le SAP et la PJF sont tenus de se transmettre mutuellement et immédiatement toutes les informations dans le champ de compétences de l'autre organe, tel que défini par la loi, à l'exception des cas où ils doivent refuser ou restreindre la transmission d'informations en raison d'intérêts publics prépondérants ou d'autres motifs liés par exemple à la protection des données.

3.1.3.2

Collaboration avec le service de renseignements extérieur

Suite à la décision du Conseil fédéral du 22 juin 2005, le SAP et le SRS collaborent depuis 2006, dans les domaines du terrorisme, du crime organisé et de la nonprolifération, dans le cadre de trois plates-formes communes d'évaluation et d'analyse. Les plates-formes traitent d'importants projets d'analyse communs et établissent chaque mois des contributions pour la présentation de la situation, établies de façon commune ou après consultation mutuelle, à l'intention de l'Organe de direction pour la sécurité et de la Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité. Les demandes émanant de partenaires communs sont comparées, coordonnées et traitées ponctuellement de manière commune. La plate-forme d'analyse «Prolifération» mène essentiellement des investigations spécifiques en faveur du groupe de travail interdépartemental permanent chargé du contrôle des exportations et en faveur des services partenaires.

3.1.3.3

Collaboration avec l'étranger

En application des art. 8 et 17, al. 3, LMSI et de l'art. 6 OMSI, le SAP collabore étroitement avec les autorités étrangères qui accomplissent des tâches en faveur de la sécurité intérieure et représente la Suisse au sein de comités internationaux.

2451

L'échange d'informations dans le domaine de la sécurité est développé et intensifié depuis de nombreuses années, sur une base tant bilatérale que multilatérale. Le SAP veille à un échange continu d'informations avec les services partenaires de différents Etats ou organisations étrangères telles que l'ONU et l'UE. Il est également membre de quatre comités multilatéraux informels, à savoir: ­

le Club de Berne, qui réunit des services de renseignements intérieurs et des services de sécurité européens;

­

la Middle European Conference (MEC), qui permet de coopérer avec les principaux services de renseignements civils d'Europe du Sud-est;

­

le Groupe antiterroriste (GAT), composé d'un service de chaque Etat de l'UE ainsi que de la Norvège et de la Suisse;

­

le Police Working Group on Terrorism (PWGT), qui rassemble les unités antiterroristes de 28 pays.

Le PWGT se réunit deux fois, le GAT six fois et ses sous-groupes plusieurs fois par an. La participation du SAP à ces comités internationaux permet à la Suisse d'obtenir des informations indispensables à sa sécurité. Cela permet également d'échanger des informations importantes dans le domaine de la prévention et d'évaluer rapidement la situation après des événements importants et des attentats.

3.2

Protection des personnes et des biens immobiliers au SFS

Le SFS assure, en collaboration avec les autorités cantonales, la protection des autorités et des bâtiments de la Confédération ainsi que celle des personnes et des bâtiments dont la Confédération doit garantir la sécurité en vertu du droit international public (art. 22, al. 1, LMSI). Au registre des personnes, il s'agit de celles devant être protégées en vertu du droit international public, des magistrats de la Confédération, des agents de la Confédération particulièrement exposés à des risques ainsi que des parlementaires fédéraux dans l'exercice de leur mandat (art. 6, al. 1, de l'ordonnance du 27 juin 2001 sur la sécurité relevant de la compétence fédérale, OSF)4. En tout, douze collaborateurs du domaine de la protection des dignitaires sont chargés d'évaluer la situation et d'ordonner les mesures de protection que les corps de police compétents appliqueront en faveur des personnes précitées. Le domaine des gardes de sûreté dans l'aviation est chargé du recrutement, de la formation et de l'engagement d'agents à bord des aéronefs suisses dans le trafic aérien international.

Ces tâches sont confiées à cinq collaborateurs. De par ses tâches d'information et d'analyse, le Service des informations et des évaluations en matière de protection et de sécurité (SIEPS) fournit les bases de l'ensemble des mesures et décisions du SFS.

Quatre collaborateurs sont affectés à ces tâches. Enfin, près de 120 collaborateurs (collaborateurs du service de garde et des loges et collaborateurs à temps partiel inclus) travaillent dans le domaine de la sécurité architectonique et opérationnelle des bâtiments de la Confédération, tant en Suisse qu'à l'étranger.

4

RS 120.72

2452

L'indemnisation des cantons pour l'exécution des mesures de sécurité visées à l'art. 28, al. 2, LMSI s'est montée, pour l'année 2007, à 22 millions de francs et restera élevée durant ces prochaines années. En 2008, la rubrique budgétaire de fedpol relative aux tâches extraordinaires de protection incombant aux cantons et aux villes a été réduite de 10 millions de francs, pour atteindre 13,6 millions de francs. Il ne s'agit cependant pas d'une économie, car le Conseil fédéral a, le 30 mai 2007, transféré au DDPS la compétence financière pour le soutien apporté aux autorités civiles dans la protection des représentations étrangères et a, par conséquent, transféré la future indemnisation de 10 millions de francs du DFJP au DDPS.

4

Appréciation

Il convient de retenir que la menace pesant sur la sécurité intérieure de la Suisse depuis les attentats du 11 septembre 2001, en particulier du fait du djihadisme, s'est renforcée. Rien n'a changé en 2007. Les organes de sûreté de la Confédération s'acquittent de leurs tâches avec succès. Cependant, force est de constater que, depuis longtemps, les renseignements qu'il est possible de collecter ne permettent plus l'appréciation de la situation et la prise de décisions, ni d'ailleurs de reconnaître à temps les dangers cachés, et ne correspondent plus aux normes européennes. C'est pourquoi, le 15 juin 2007, le Conseil fédéral a présenté aux Chambres fédérales son message relatif à la modification de la LMSI (moyens spéciaux de recherche d'informations) (FF 2007 4773).

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