08.077 Message concernant un train de mesures destinées à renforcer le système financier suisse du 5 novembre 2008

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons le message concernant un train de mesures destinées à renforcer le système financier suisse et, en vous proposant de l'adopter, le projet d'arrêté fédéral concernant un crédit pour la recapitalisation de l'UBS SA.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

5 novembre 2008

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2008-2598

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Condensé Le 15 octobre 2008, le Conseil fédéral, la Banque nationale suisse (BNS) et la Commission fédérale des banques (CFB) ont arrêté un train de mesures destinées à stabiliser le système financier suisse et à renforcer durablement la confiance à l'égard du marché financier suisse.

Ces mesures sont devenues nécessaires car la crise financière qui a éclaté sur le marché immobilier américain à la fin de l'été 2007 s'est fortement aggravée dans la seconde moitié du mois de septembre 2008 et a commencé à s'étendre à des pays dont le marché immobilier ne présentait alors aucun signe de surchauffe. A l'instar du gouvernement des Etats-Unis ­ où la crise est née ­, les autorités de pratiquement tous les pays européens ainsi que d'autres pays industrialisés d'un certain poids économique se sont vues contraintes de réagir et ont annoncé des trains de mesures d'aide étatique sans précédent afin de stabiliser le système financier et de sauver certains établissements financiers. Depuis le début de cette crise, les principales banques centrales de la planète ont en outre dû prendre des mesures concertées sur le plan international pour assurer l'approvisionnement en liquidités du système financier, car la défiance des opérateurs a entraîné un assèchement du marché monétaire interbancaire.

En Suisse, les turbulences des marchés financiers mondiaux ont frappé de plein fouet les deux grandes banques, qui sont très engagées sur le marché américain. Les autres banques du pays sont nettement moins affectées par cette crise, et uniquement par le biais de canaux indirects. Des deux grandes banques suisses, l'UBS SA et Credit Suisse, la première est de loin celle qui a été le plus touchée, malgré sa capitalisation supérieure à la moyenne internationale. La vulnérabilité de l'UBS SA s'est déclarée au grand jour vers la fin du troisième trimestre 2008: dégradation de la trésorerie, forte augmentation des retraits de fonds de la clientèle, évolution toujours insatisfaisante des résultats et enfin, d'importantes positions d'actifs illiquides posant toujours problème malgré les mesures d'assainissement prises précédemment. Vu cette accumulation de difficultés, il n'était pas exclu que la banque doive affronter une crise de confiance encore plus grave dans l'hypothèse où la détérioration des marchés se poursuivrait. Cela
aurait eu des conséquences massives pour le système financier suisse et pour toute l'économie du pays.

Les grandes banques jouent un rôle systémique important pour l'économie suisse.

Ensemble, elles détiennent 35 % du marché du crédit à l'échelle nationale. Sur le marché des dépôts, la situation est comparable. Par ailleurs, les transactions avec l'UBS SA représentent un tiers des transactions sur le marché suisse des crédits interbancaires. En cas de défaut d'une grande banque, les ménages et les entreprises ne seraient plus en mesure d'effectuer leurs dépenses courantes et leurs investissements, puisque leurs comptes seraient bloqués et leurs crédits suspendus. La garantie des dépôts n'atténuerait qu'en partie les effets négatifs d'une défaillance de l'UBS SA, dans la mesure où le plafond de 4 milliards de francs prévu par la loi ne couvre qu'une petite partie des dépôts privilégiés détenus auprès de l'UBS SA. La défaillance d'une grande banque se traduirait donc, du moins à court terme, par un

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blocage de l'approvisionnement en liquidités et par une déstabilisation du système de paiements de la Suisse. D'autres banques suisses subiraient en outre d'importantes pertes par le biais de leurs créances interbancaires envers l'UBS SA. Les conséquences seraient donc dramatiques pour l'ensemble de l'économie. Selon des études internationales, en cas de défaut d'une banque de la taille de l'UBS SA il faudrait tabler sur un coût économique de l'ordre de 15 à 30 % du PIB (75 à 150 milliards de francs) à court terme. A long terme, la perte en termes de croissance est même estimée entre 60 et 300 % du PIB (300 à 1500 milliards de francs).

Face à cette situation, le Conseil fédéral, la BNS et la CFB ont élaboré un train de mesures dont le coeur est la stabilisation de l'UBS SA. Le but de cette intervention est de garantir durablement le bon fonctionnement de l'ensemble du système financier du pays. Parallèlement, le Conseil fédéral a adopté des mesures pour renforcer immédiatement la protection des déposants. Ces décisions s'accompagnent de mesures de régulation et de surveillance supplémentaires: les systèmes de rémunération feront l'objet d'un complément dans le projet de révision du droit de la société anonyme en cours d'examen et la CFB prendra des mesures spécifiques pour le secteur financier en général, et plus particulièrement pour l'UBS SA. Par ailleurs, la CFB édictera en novembre 2008 déjà de nouvelles exigences de fonds propres plus strictes pour les deux grandes banques. Le Conseil fédéral veut aussi proposer une réforme complète du système de garantie des dépôts au Parlement dès le printemps 2009. Enfin, il s'est déclaré prêt ­ au besoin ­ à garantir les nouveaux emprunts à moyen terme des banques suisses sur le marché des capitaux.

Le train de mesures de la Suisse intervient donc là où ont été identifiés les principaux problèmes du système financier national. Il correspond aussi aux points essentiels du plan d'action des pays du G7: les mesures servent à soutenir un établissement qui revêt une fonction systémique importante et à rétablir la confiance dans l'établissement en question par le biais d'un renforcement de sa base de fonds propres et d'un assainissement de son bilan. Simultanément, la protection des déposants de toutes les banques de Suisse est améliorée. En fin de compte,
les mesures prises réduisent les risques pour les contribuables.

Le volet qui concerne l'UBS SA comporte deux mesures coordonnées entre elles.

La première est du ressort de la BNS. Il s'agit de transférer les actifs illiquides de l'UBS SA dans une société à but spécial à concurrence de 60 milliards de dollars US au maximum. De cette manière, la banque obtiendra des liquidités supplémentaires tout en se déchargeant de certains risques. La BNS est dans une meilleure position pour supporter ces risques dans la mesure où son horizon opérationnel est plus long, ce qui lui donne la possibilité d'attendre une reprise des marchés avant de réaliser ces actifs. Cette mesure de soutien est liée à diverses conditions, parmi lesquelles la dotation de la société à but spécial d'un capital propre de 6 milliards de dollars US au plus par l'UBS SA.

La deuxième mesure a pour but de renforcer la base de fonds propres de l'UBS SA et consiste pour la Confédération à souscrire un emprunt à conversion obligatoire de l'UBS SA de 6 milliards de francs. Cette recapitalisation est directement liée à

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l'allégement du bilan de l'UBS SA des actifs illiquides, ce qui lui permettra de doter la société à but spécial du capital propre requis sans que l'amortissement qui en découlera ne réduise sa propre base de capital. Malgré des efforts soutenus, l'UBS SA n'est pas parvenue à lever les capitaux nécessaires sur le marché. Pour la Confédération, l'emprunt à conversion obligatoire présente un double avantage: elle bénéficie d'une rémunération équitable et sûre pour son engagement (coupon annuel de 12,5 %) et elle ne devient pas copropriétaire de la banque, du moins pas dans l'immédiat. Le statut de copropriétaire d'une grande banque obligerait la Confédération à assumer de plus grands risques, mais il serait aussi difficilement acceptable, notamment sous l'angle de la politique de la concurrence, et créerait des conflits avec le mandat imparti à la Confédération de créer les meilleures conditions possibles pour l'ensemble de la place financière et d'exercer une surveillance efficace du marché. C'est pourquoi le Conseil fédéral veut que la participation de la Confédération soit limitée dans le temps. Cela implique la définition d'une stratégie de désengagement qui comprend notamment la possibilité de se départir du contrat pendant la durée de vie de l'emprunt déjà.

La convention passée avec l'UBS SA énonce toute une série de droits pour la Confédération, la CFB et la BNS et d'obligations pour l'UBS SA. Il convient notamment de signaler les entretiens réguliers entre la banque et ses investisseurs et le droit conféré à la BNS de procéder à des inspections de la gestion du risque au sein de la banque en tout temps, tant que la Confédération détiendra une participation dans l'UBS SA. Par ailleurs, l'UBS SA sera tenue de réaménager ses systèmes de rémunération d'entente avec la CFB.

Le renforcement de la base de fonds propres de l'UBS SA est légitimé par une ordonnance édictée par le Conseil fédéral en vertu des art. 184, al. 3, et 185, al. 3 de la Constitution. Le gouvernement a agi de la sorte en raison du caractère urgent de l'augmentation de capital, dans un contexte défavorable sur les marchés financiers. Le crédit nécessaire a été ouvert à charge du second supplément au budget 2008 avec le consentement de la Délégation des finances. Il est soumis après coup à l'approbation des Chambres fédérales
par le biais du présent message.

Une troisième mesure impliquant une révision du régime de protection des déposants s'est imposée au vu du relèvement des garanties des dépôts bancaires un peu partout dans le monde. Une augmentation des valeurs inscrites dans la loi sur les banques pour les dépôts garantis et de la limite supérieure du système peut être mise en oeuvre rapidement et c'est pourquoi le Conseil fédéral présente un message relatif à une modification de la loi sur les banques parallèlement au présent message.

Le train de mesures adopté comporte sans conteste certains risques pour la BNS, la Confédération, les cantons et l'économie suisse. Mais vu les garanties intégrées dans le dispositif et compte tenu des risques bien supérieurs qu'encourrait le pays en cas d'absence de mesures de renforcement du système de financier, le Conseil fédéral considère que ces risques sont acceptables.

Pour ce qui est de la BNS, il est encore difficile d'estimer l'évolution future de la valeur des actifs qui seront repris à l'UBS SA. Il faut toutefois relever qu'ils ont déjà

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fait l'objet d'amortissements massifs. De plus, l'UBS SA apporte 6 milliards de dollars US dans la société à but spécial et elle doit verser un intérêt (taux du marché monétaire plus une prime de risque de 250 points de base) qui devrait se situer en dessus des coûts de refinancement de la BNS. Si la société réalise un bénéfice, la BNS recevra le premier milliard et seul le bénéfice résiduel sera partagé avec l'UBS SA. Si, au contraire, elle enregistre des pertes, jusqu'à 100 millions d'actions UBS seront remises à la BNS en dédommagement.

D'éventuelles dépréciations de ces actifs dépassant 10 % entraîneraient une réduction de la réserve pour distributions futures de la BNS, qui s'élevait à environ 23 milliards de francs au début de l'exercice 2008. En vertu d'une convention conclue le 14 mars 2008 entre le DFF et la BNS, un montant de 2,5 milliards de francs est prélevé sur cette réserve chaque année pour être distribué à la Confédération (1/3) et aux cantons (2/3). Vu le niveau élevé de la réserve et la politique de couverture des risques de la BNS, il n'y a pas lieu de craindre actuellement une réduction ni une suspension de la distribution annuelle des bénéfices de la BNS. Si, contre toute attente, ce cas de figure devait néanmoins se présenter, le Conseil fédéral chercherait, d'entente avec les cantons, une solution permettant de répartir les charges de façon aussi équitable que possible.

La souscription de l'emprunt à conversion obligatoire de l'UBS SA entraîne l'inscription d'une dépense de 6 milliards de francs au budget de la Confédération.

Cette crise financière présentant les caractéristiques d'un événement exceptionnel sur lequel la Confédération n'a aucune emprise, le Conseil fédéral propose de qualifier ce besoin financier d'extraordinaire. Dès lors, l'accomplissement des tâches de la Confédération n'aura pas en souffrir, du moins à court terme. Cette dépense ne devrait pas non plus entraîner une hausse durable de la dette fédérale puisque la Confédération encaissera un produit net des intérêts de 600 millions de francs par an (pendant 2,5 ans) et, à terme, le produit de la vente des obligations convertibles ou des actions. S'il apparaît, au plus tôt en 2011, que les produits des intérêts et de la vente ne suffiront pas à refinancer la dépense d'investissement initiale, le solde résiduel devra être compensé par des excédents structurels du compte financier ordinaire.

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Table des matières Condensé

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1 Contexte 1.1 Situation des marchés financiers et des banques 1.1.1 Situation actuelle sur les marchés financiers 1.1.2 Mesures prises par d'autres Etats 1.1.2.1 Forum sur la stabilité financière 1.1.2.2 Plan d'action du G7 1.1.2.3 Train de mesures dans la zone euro 1.1.2.4 Train de mesures des Etats-Unis d'Amérique (plan Paulson) 1.1.2.5 Mesures des banques centrales 1.1.2.6 Initiatives de l'industrie privée 1.1.3 Situation des grandes banques suisses 1.1.3.1 UBS SA 1.1.3.2 Credit Suisse 1.1.4 Situation des autres banques suisses 1.2 Importance des grandes banques 1.3 Arrêtés du Conseil fédéral

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2 Mesures en faveur de l'UBS SA 2.1 Vue d'ensemble 2.2 Allégement du bilan de l'UBS SA d'actifs illiquides par la BNS 2.3 Renforcement de la base de fonds propres de l'UBS SA par un emprunt à conversion obligatoire 2.3.1 Du choix de l'instrument 2.3.2 Montant et modalités de l'emprunt à conversion obligatoire 2.3.3 Suivi de la gestion des risques par la BNS 2.3.4 Entretiens d'investisseurs 2.3.5 Gestion de l'emprunt à conversion obligatoire 2.3.6 Base légale et ouverture du crédit 2.3.6.1 Contexte 2.3.6.2 Ordonnance selon les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, Cst.

2.3.6.3 Autorisation de crédit

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3 Autres mesures et affaires en suspens 3.1 Réglementation des systèmes d'indemnisation 3.1.1 Fausses incitations à prendre des risques accrus 3.1.2 Question internationale 3.1.3 Systèmes d'indemnisation en tant qu'élément de la révision en cours du droit de la société anonyme 3.1.4 Standards minimaux de la Commission fédérale des banques (CFB) applicables à la branche financière 3.1.5 Injonctions à l'UBS SA et contrôle par la CFB 3.2 Durcissement des exigences de fonds propres pour les grandes banques

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3.3 Renforcement de la protection des déposants 3.4 Garantie des engagements des banques sur le marché des capitaux

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4 Contenu de l'arrêté financier

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5 Conséquences 5.1 Conséquences pour le bilan de la BNS et pour le potentiel de distribution de son bénéfice 5.2 Conséquences pour la Confédération et les cantons 5.2.1 Conséquences de la souscription de l'emprunt à conversion obligatoire pour les finances de la Confédération 5.2.2 Distribution du bénéfice de la BNS à la Confédération et aux cantons 5.3 Conséquences économiques du train de mesures

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6 Liens avec le programme de législature

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7 Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité et conformité aux lois 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.2.1 Obligations envers l'UE 7.2.2 Liens avec le droit européen 7.2.3 Liens avec la législation de l'OMC et avec les accords de libreéchange hors d'Europe 7.2.4 Compatibilité avec les pratiques internationales 7.3 Forme de l'acte 7.4 Assujettissement au frein aux dépenses 7.5 Compatibilité avec la loi sur les subventions 7.6 Délégation de compétences législatives 7.7 Considérations juridiques sur la reprise des actifs illiquides de l'UBS SA par la BNS 7.8 Responsabilités patrimoniales

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Arrêté fédéral relatif à un crédit pour la recapitalisation de l'UBS SA (Projet)

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8033

Message 1

Contexte

1.1

Situation des marchés financiers et des banques

1.1.1

Situation actuelle sur les marchés financiers

La situation sur les marchés financiers reste marquée par une grande nervosité. Le marché des actions est très volatil. Les indicateurs du marché, qui reflètent la confiance dont jouissent les banques, se sont toutefois améliorés durant la première quinzaine d'octobre, suite à l'annonce d'importantes mesures étatiques. La décision du Conseil fédéral d'appliquer un train de mesures visant le renforcement du système financier suisse a eu pour effet que la confiance des marchés vis-à-vis de l'UBS SA a permis également un retour de la confiance dans le reste du secteur bancaire. L'un des buts de la stabilisation a ainsi été atteint.

Toutefois, les primes de risque pour les créances interbancaires non garanties restent à un niveau sans précédent. Les prêts sont consentis à très court terme, généralement jusqu'au lendemain. Malgré l'assurance donnée par de nombreux gouvernements de garantir les nouveaux engagements bancaires, le marché à plus long terme est toujours aussi asséché.

Le fait que les bourses ne se remettent pas malgré l'atténuation du risque d'insolvabilité des banques témoigne non seulement des incertitudes sur le marché monétaire et le marché des capitaux, mais également des mauvaises perspectives conjoncturelles à l'échelle mondiale et du recadrage continuel du marché immobilier américain.

On craint également que la crise immobilière touche davantage l'Europe qu'elle ne le fait actuellement. Ces perspectives incertaines ont incité nombre de banques centrales à baisser les taux directeurs. Les devises sont également très volatiles, et depuis la mi-octobre, l'euro affiche ses plus bas niveaux depuis cinq ans face au franc suisse.

1.1.2

Mesures prises par d'autres Etats

1.1.2.1

Forum sur la stabilité financière

Le Forum sur la stabilité financière (FSF) joue un rôle essentiel dans le système institutionnel, au sein duquel les autorités recherchent des solutions globales visant à renforcer le système financier. Il est devenu le moteur de la coopération informelle entre les instances nationales, les organisations internationales et les organes de régulation, et a prouvé son efficacité. En octobre 2007, au vu des réactions négatives sur les marchés financiers, les ministres des finances et les banques centrales du G7 ont donné mandat au FSF de formuler des recommandations pour des mesures concrètes visant à juguler la crise financière qui se dessinait. En avril 2008, le FSF a publié son rapport final1, à l'élaboration duquel la Suisse a participé. Le rapport contient un catalogue de recommandations approuvées par consensus et destinées 1

Forum sur la stabilité financière, Report of the FSF on Enhancing Market and Institutional Resilience, avril 2008 (www.fsforum.org).

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aux autorités nationales, aux organes de surveillance des banques et aux acteurs du marché, qui couvrent tous les secteurs concernés par le bon fonctionnement du système financier.

En ce qui concerne la surveillance des banques, le FSF juge particulièrement important que non seulement les nouvelles directives concernant la réglementation des fonds propres (Bâle II) soient appliquées rapidement, mais qu'elles soient également adaptées à l'évolution du marché. Il préconise par exemple une revalorisation comptable des risques liés à des instruments financiers structurés complexes et à des événements (risque de fluctuations de cours massives et soudaines). Le FSF demande aussi une amélioration, quantitative et qualitative, du niveau de liquidités et propose à cet égard plusieurs adaptations de la réglementation et de la surveillance des liquidités. De plus, le FSF recommande de surveiller plus étroitement la gestion des risques par les banques, notamment les tests de stress. Enfin, il demande que toutes les positions à risque hors bilan soient prises en compte dans les rapports de risques.

1.1.2.2

Plan d'action du G7

En raison de la gravité de la situation, et compte tenu du fait que les multiples mesures de sauvetage n'ont pas enrayé la tendance à la baisse, les ministres des finances et directeurs des banques centrales des sept pays les plus industrialisés (G7) ont décidé le 10 octobre 2008 un plan d'action contre la crise, dont le point essentiel est une étroite coordination entre les pays quant à leurs efforts de sauvetage. Seule une action internationale coordonnée est à même de stabiliser les marchés financiers globaux, de rétablir les flux de crédits et de soutenir l'économie mondiale.

Le plan d'action du G7 se présente en cinq points. Concrètement, les pays du G7 veulent: ­

agir avec détermination et recourir à tous les moyens disponibles pour soutenir d'importants instituts financiers et éviter leur faillite;

­

entreprendre tout ce qui est nécessaire pour rétablir les flux de crédits et réanimer le marché monétaire, et pour garantir que les banques et les autres instituts financiers aient accès aux liquidités et au refinancement;

­

garantir que des sources publiques et privées fournissent aux banques et à d'autres instituts financiers suffisamment de capitaux frais, de manière à rétablir la confiance et à leur permettre de continuer à octroyer des crédits aux particuliers et aux entreprises;

­

faire en sorte que les programmes de garantie des dépôts d'épargne soient robustes et consistants, de sorte que les petits épargnants gardent confiance quant à la sécurité de leurs dépôts;

­

prendre si nécessaire des mesures pour relancer le marché des prêts hypothécaires. A cet égard, des évaluations précises, une information transparente sur ces actifs et le respect de normes comptables sévères s'imposent.

Ces mesures devront être conçues de manière à protéger les contribuables et à éviter des effets dommageables pour d'autres Etats.

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Le plan d'action du G7 a reçu un large soutien. Le 11 octobre 2008, les 185 pays membres du Fonds monétaire international (FMI) et le Groupe des 20 pays émergents ont adhéré au plan d'action du G7. Le G7, le FMI et les membres du Comité monétaire et financier international (CMFI) ont reconnu la nécessité d'une action globale, rapide et coordonnée en vue d'éviter l'effondrement du système financier.

De l'avis de ses membres, le FMI doit jouer à cet égard un rôle essentiel.

1.1.2.3

Train de mesures dans la zone euro

En raison de l'aggravation de la crise financière en Europe, le conseil des ministres de l'économie et des finances de l'UE (Ecofin) a affirmé le 7 octobre 2008 à Luxembourg, dans une déclaration écrite, que les gouvernements de l'UE prendront toutes les mesures nécessaires pour garantir la stabilité financière. Parmi elles figurent également des interventions directes de l'Etat pour empêcher la faillite d'instituts financiers d'importance systémique.

Les interventions étatiques devront être décidées en temps utile et conserver un caractère temporaire. Les actionnaires actuels, en tant que propriétaires de l'entreprise, devront dûment tirer les conséquences de leurs erreurs. L'Etat intervenant devra de plus être à même d'influer sur la composition des organes de direction. Les intérêts légitimes des concurrents devront être préservés ­ notamment par le biais des règles de l'UE concernant les aides publiques ­, de même que ceux des contribuables. L'expérience ayant montré que certaines des interventions nationales précédentes avaient manqué leur objectif de stabilisation et semblaient même avoir amplifié l'incertitude, l'Ecofin a souligné l'importance d'une action coordonnée.

Le 12 octobre 2008, les pays de la zone euro ont décidé un train de mesures qui prévoit de garantir les engagements interbancaires à une échéance de cinq ans au plus. Par ailleurs, les Etats de la zone euro dégageront des moyens publics en vue de la recapitalisation du système bancaire. Enfin, les Etats ont convenu d'une garantie minimale de 50 000 euros pour les dépôts, limite qui pourrait encore être augmentée dans un an. Dans le sillage des ces décisions, de nombreux pays ont mis sur pied un plan d'action national: une vue d'ensemble de ces plans nationaux figure à l'annexe 1.

1.1.2.4

Train de mesures des Etats-Unis d'Amérique (plan Paulson)

L'injection massive de liquidités par les banques centrales en vue du refinancement des banques a permis d'éviter pendant plus d'un an l'effondrement du système financier, sans pour autant rétablir la confiance dans le marché. A la mi-septembre 2008, le ministre des finances américain Paulson a proposé de s'attaquer aux causes de cette crise de confiance entre les banques. Ces dernières doivent être débarrassées de leurs importants avoirs en produits structurés pour lesquels le marché s'est effondré en raison de la chute des prix de l'immobilier.

L'Emergency Economic Stabilization Act of 2008, qui prévoit notamment le rachat par le gouvernement fédéral américain d'actifs illiquides pour un montant de 700 milliards de dollars US, a été adopté par le Congrès le 3 octobre 2008. Cette décision n'a calmé les marchés que pour une courte durée, car de nombreuses ban8036

ques se trouvaient déjà sous-capitalisées en raison de la crise. C'est pourquoi le ministère des finances américain a annoncé, le 14 octobre 2008, que les banques disposeraient d'une partie des fonds attribués au programme de stabilisation, soit 250 milliards de dollars US, pour leur permettre d'augmenter leur base de fonds propres. Les autorités américaines se sont ainsi alignées sur la pratique suivie par de nombreux pays européens sur la base du plan d'action du G7.

1.1.2.5

Mesures des banques centrales

Depuis l'éclatement de la crise, les banques centrales ont pris diverses mesures pour détendre les marchés monétaires et ceux des crédits. Les mesures peuvent être classées en cinq catégories: ­

premièrement, certaines banques centrales ont étendu le cercle des garanties qu'elles acceptaient en couverture des crédits octroyés;

­

deuxièmement, elles ont multiplié les opérations à long terme sur plusieurs mois;

­

troisièmement, on relèvera la mise à disposition de liquidités en dollars américains par la Banque centrale européenne (BCE), la Bank of England et la Banque nationale suisse (BNS), en coordination avec le Federal Reserve System. A intervalles réguliers, plusieurs ventes aux enchères de ce type ont été organisées depuis décembre 2007. Par ailleurs, dans le cadre d'un accord avec la BNS, la Banque centrale européenne met des francs suisses à la disposition de ses contreparties par le biais de swaps euros/francs;

­

quatrièmement, quelques banques centrales ont aménagé une facilité qui permet aux banques d'échanger des titres peu liquides contre des titres étatiques liquides;

­

cinquièmement, les banques centrales les plus importantes, dont la BNS, ont baissé simultanément leurs taux directeurs le 8 octobre 2008.

Deux autres mesures de soutien de la Federal Reserve Bank of New York méritent d'être citées dans ce contexte. En mars 2008, elle a financé la reprise de la banque d'investissement Bear Stearns par JP Morgan pour l'équivalent de 29 milliards de dollars US en acceptant en gage les garanties correspondantes de Bear Stearns. A la fin du mois de septembre 2008, avec le soutien du ministère des finances, elle a octroyé un prêt à la compagnie d'assurances AIG dont le montant a atteint entretemps 123 milliards de dollars US; le prêt est garanti par des actions et d'autres actifs de filiales d'AIG.

1.1.2.6

Initiatives de l'industrie privée

L'industrie privée discute également du renforcement du système financier, notamment au sein de l'Institute of International Finance (IIF). L'IIF est le regroupement global des banques commerciales et entretient des contacts étroits avec, entre autres, le FSF. En juillet 2008, l'«IIF Committee on Market Best Practices» a publié son

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rapport final2. Ce dernier contient des recommandations pour la gestion des banques, élaborées à la lumière de la crise financière.

Le rapport final couvre pour l'essentiel les thèmes suivants: ­

notation: l'IIF exige un réexamen des pratiques de notation et la définition de nouvelles normes en la matière. Il évoque la possibilité de créer une organisation d'autorégulation, à même de garantir une gestion des affaires fidèle aux principes et de garder le contact avec les instances internationales de régulation;

­

approvisionnement en liquidités: dans son analyse, l'IIF parvient à la conclusion que les banques centrales devraient, en règle générale, accepter un plus large éventail de titre en garantie de leurs crédits;

­

critères d'évaluation: l'évaluation des actifs est un thème important pour lequel l'industrie réclame des améliorations rapides. La crise a montré que les principes du «fair value accounting», selon lesquels les titres sont portés au bilan à leur valeur actuelle de marché, se révèlent problématiques en période troublée et peuvent précipiter une crise;

­

systèmes incitatifs internes aux entreprises: l'IIF juge nécessaire de réexaminer les pratiques suivies dans l'octroi d'indemnités et de bonus. Il faudra s'assurer que ces pratiques servent les intérêts à long terme des entreprises.

1.1.3

Situation des grandes banques suisses

1.1.3.1

UBS SA

La faillite de la banque américaine d'investissement Lehman Brothers le 15 septembre a encore dégradé la situation déjà tendue qui régnait sur les marchés financiers internationaux. Il en est résulté pour les établissements financiers une baisse du cours de leurs actions, un renchérissement des primes de risque et une aggravation marquée des conditions de refinancement pour la plupart des instituts financiers. En ce qui concerne les nouveaux engagements bancaires (engagements interbancaires), le marché s'est totalement asséché.

Pour ce qui est de la base de fonds propres, la situation de l'UBS SA se présentait mieux que la moyenne internationale, mais cette évolution globale ne l'a pas épargnée pour autant et l'a placée dans un état de vulnérabilité croissante. En outre, plusieurs facteurs ont entamé la confiance dont l'UBS SA jouissait sur les marchés: ­

2

en premier lieu, la banque restait exposée dans les segments du marché financier au coeur de la crise. Certes, de nombreuses positions à risques liées au marché immobilier américain avaient été réduites durant les mois précédents; mais elles n'ont pas toutes disparu. Il reste notamment dans la comptabilité de l'UBS SA des instruments financiers liés à des hypothèques ou à des garanties de prêts à des étudiants, des postes risqués ou illiquides dans des segments du marché financier tels les rachats d'entreprises financés par des fonds de tiers (leveraged finance) ou les obligations à enchères (auction Institute of International Finance, IIF Final Report of the Committee on Market Best Practices, «Principles of Conduct and Best Practice Recommendations», juin 2008 (www.iif.com).

8038

rate securities). Sans détente sur les marchés financiers, il fallait compter avec des pertes supplémentaires; ­

en deuxième lieu, les perspectives d'une évolution de la situation des fonds propres de la banque demeuraient incertaines. Certes, la part des fonds propres était encore, au 30 septembre 2008, bien supérieure au minimum réglementaire exigé et à la dotation en fonds propres d'établissements financiers étrangers comparables. Il en est résulté un ratio BRI de capital total de 14,8 % et un ratio BRI de capital propre (premier pilier) de quelque 10,8 % (estimations pour la mi-octobre), contre 15,7 %, respectivement 11,6 %, à fin juin. On ne pouvait dès lors plus exclure que, en raison de pertes supplémentaires d'ici à la fin de l'année, la banque présente un taux de couverture excédentaire inférieur à celui qui est exigé par le «Swiss finish» et se rapproche du minimum réglementaire. L'UBS SA avait déjà levé des capitaux à deux reprises, et les nouveaux actionnaires ont dû assumer depuis de lourdes pertes en bourse. En comparaison internationale, l'UBS SA affichait un taux d'endettement supérieur à la moyenne;

­

en troisième lieu, d'autres facteurs ont entravé la restauration de la confiance. En particulier, la position extrêmement forte de l'UBS SA dans la gestion de fortune s'est trouvée affaiblie. Les causes en sont notamment les craintes d'une moindre solvabilité et la perte de réputation consécutive aux pertes encourues. Ces circonstances ont notablement contribué à l'évolution négative des apports nets de fonds. La banque a enregistré au troisième trimestre des retraits pour 83,6 milliards de francs, dont 49,3 milliards pour le seul secteur du Global Wealth Management & Business Banking. Les retraits ont été opérés pour une grande part durant les dernières semaines du trimestre. Pour comparaison, on rapellera que l'UBS SA a, durant les sept années écoulées, enregistré chaque trimestre des apports de fonds nets, totalisant ainsi quelque 100 milliards de francs par année.

Cette évolution est à l'origine d'une détérioration au troisième trimestre de la situation des liquidités de la banque. La levée de fonds à terme, comme pour bien d'autres acteurs du marché, était devenue pratiquement impossible, ce qui a conduit à un raccourcissement structurel des échéances. L'UBS SA s'est vue contrainte de refinancer d'importantes sommes sur le marché limité à un jour (overnight).

Les résultats attendus pour le troisième trimestre ne promettaient pas non plus un renversement de tendance. L'UBS SA a enregistré un bénéfice net de 296 millions de francs au troisième trimestre, qui n'est toutefois dû qu'à des facteurs particuliers.

Les amortissements et pertes sur les positions à risque de la banque d'investissement ont de nouveau atteint un niveau imposant de 4,4 milliards de dollars US, compensé par deux particularités de la comptabilisation à la valeur actuelle (fair value). D'une part, durant le troisième trimestre, le renchérissement persistant des primes de risque pour les engagements propres auprès de la banque d'investissement a généré un gain de 2,2 milliards de francs (own credit). Mais si les suppléments de primes se réduisaient, ce gain se transformerait en perte. Il n'est donc pas inscrit au titre de fonds propre réglementaire. D'autre part, les résultats du groupe incluaient, comme les trimestres précédents, un avoir fiscal (deferred tax assets), qui s'élevait au troisième trimestre à 912 millions de francs.

Au moment où les mesures ont été prises, l'existence de l'UBS SA n'était pas immédiatement menacée. Toutefois, étant donné sa vulnérabilité et un environne8039

ment toujours aussi tendu, on ne pouvait exclure une aggravation de la crise de confiance, qui aurait pesé lourdement sur le système financier et eu des conséquences négatives pour l'ensemble de l'économie suisse (cf. ch. 1.2).

Depuis la mise en place des mesures, on constate que l'UBS SA bénéficie d'une réduction des suppléments de primes de risque et d'une légère amélioration dans le secteur du refinancement. Si la situation devait évoluer de façon particulière après l'application des mesures, les commissions parlementaires en seraient dûment informées.

1.1.3.2

Credit Suisse

Comparé à l'UBS SA et aux concurrents internationaux les plus importants, Credit Suisse (CS) est actuellement moins vulnérable. La banque n'a pour l'heure pas besoin d'un soutien étatique. La confiance des marchés vis-à-vis de CS est relativement intacte: premièrement, la banque a pu jusqu'ici défendre son statut de refuge; deuxièmement, en comparaison sectorielle, le cours de l'action a moins baissé; troisièmement, la prime de risque que paie la banque sur ses dettes est nettement inférieure à celle dont s'acquittent ses concurrents internationaux. Compte tenu de la conjoncture défavorable qui caractérise le marché, la situation des liquidités est solide. Les possibilités de refinancement sont actuellement plutôt limitées au court terme: la levée de fonds à terme reste encore possible, mais les financements au jour le jour gagnent en importance. On ne signale pour l'heure aucun exode massif de fonds.

Pour l'essentiel, le CS est exposé dans les segments du marché financier qui ne sont devenus problématiques qu'à la faveur de la crise. Il détient des positions à risque notamment dans des segments à haut risque tels le rachat d'entreprises financé par des fonds de tiers (leveraged finance) et le financement d'immeubles commerciaux.

En particulier, le marché européen de l'immobilier commercial est totalement paralysé.

Après l'augmentation de capital annoncée le 16 octobre 2008, la situation des fonds propres sera très bonne. Les estimations concernant le troisième trimestre tablent sur le fait que la levée de capitaux pour un montant de quelque 10 milliards de francs augmentera le ratio de capital propre à 13,7 % (10,4 % sans levée de capitaux) et que les fonds propres imputables dépasseront de plus de 100 % les exigences minimales de la CFB (de plus de 50 % sans augmentation de capital). A l'annonce de l'augmentation de capital, la banque a dépassé l'objectif de fonds propres fixé par la CFB pour 2013, de même que le niveau minimum du ratio d'endettement (leverage ratio). Toutefois, au niveau consolidé, le leverage ratio du CS se situait encore largement au dessous de la valeur-cible en période favorable attendue par la CFB pour 2013.

Depuis le début de la crise, la confiance du marché vis-à-vis du CS est toujours restée forte, ce qui s'est traduit entre autres par un important afflux d'avoirs. Durant
le troisième trimestre, on a observé un fléchissement de cette tendance. L'afflux d'argent frais a été de 14,5 milliards de francs dans le secteur private banking, partiellement compensé toutefois par un exode vers d'autres secteurs de sorte que l'afflux net est de 1,5 milliard de francs. Si le CS a profité jusqu'à présent de la crise qui a frappé d'autres banques en recueillant des avoirs de leur clientèle, les garanties 8040

étatiques illimitées et les dépôts maximaux garantis par certains Etats européens pourraient conduire à un exode de fonds de la clientèle. Une telle tendance n'est pourtant pas observable à ce jour.

Pour le troisième trimestre, le CS affiche une perte nette de quelque 1,3 milliard de francs. Ce résultat tient compte d'une perte avant impôts de la banque d'investissement de 3,2 milliards de francs, due en particulier à la forte et inhabituelle volatilité du marché, à des pertes sur les opérations de négoce dans un environnement de marché exceptionnellement imprévisible et à des dépréciations de positions à risque dans le secteur des achats d'entreprises financés par des fonds de tiers et dans le secteur des produits structurés (pour un montant de 2,4 milliards de francs). Le résultat tient compte d'un avoir fiscal de 420 millions de francs (deferred tax assets) et d'un bénéfice de 1,8 milliard de francs issu de la revalorisation de crédits propres (own credit), les suppléments de primes de risque ayant encore augmenté. Si ces suppléments se réduisaient, le gain pourrait se transformer en perte.

1.1.4

Situation des autres banques suisses

A la différence des grandes banques, les autres banques en Suisse n'ont investi que de manière insignifiante dans des actifs directement touchés par la crise financière internationale, notamment sur le marché immobilier américain ou dans le secteur des rachats d'entreprises financés par des fonds de tiers (leveraged finance). Elles ressentent toutefois les contrecoups de l'effondrement des cours sur le marché des actions, avant tout sous la forme d'un recul des recettes tirées de la gestion de fortune et du négoce. Ce recul n'est pas dramatique pour 2008, mais il gagnera vraisemblablement en importance en 2009. La dotation en fonds propres des banques suisses est excellente. Abstraction faite des grandes banques, elle dépasse en moyenne les exigences minimales de plus de 90 %, même si l'on exclut le rabais de garantie de l'Etat pour les banques cantonales ou l'obligation de versement supplémentaire faite aux coopérateurs de Raiffeisen.

La crise de confiance sur le marché interbancaire a des répercussions négatives sur toutes les banques. Toutefois, de façon globale, la perte de confiance vis-à-vis des grandes banques a provoqué un afflux massif de fonds de la clientèle vers les autres banques. Les bénéficiaires principales de ce mouvement sont notamment les banques cantonales, PostFinance et les caisses Raiffeisen. La discussion sur les limites de la protection des déposants en Suisse, qui s'est intensifiée durant les semaines écoulées, mène actuellement à davantage de dispersion et à une redistribution des dépôts du public. Toutefois, aucun problème sérieux de liquidités ne s'est posé pour l'instant.

La faillite de la banque américaine d'investissement Lehman Brothers a occasionné en Suisse des pertes aux clients qui avaient acquis des produits structurés émis par Lehman, et dans une mesure supportable, à quelques banques au titre de transactions sur des produits dérivés et de placements en obligations ou en actions. La succursale du négociant en titres anglais du groupe Lehman placée sous gérance par la CFB n'opérait qu'en qualité d'intermédiaire et ne tenait pas elle-même de comptes de clients. De même, la filiale de la maison mère américaine également placée sous gérance par la CFB n'était qu'un partenaire interne au groupe et n'entretenait pas de relations directes avec la clientèle. En revanche, la succursale de la filiale luxembourgeoise de la banque islandaise nationalisée Kaupthing, placée sous gérance 8041

le 9 octobre 2008 (prorogation des échéances et désignation de chargés d'enquête) par la CFB, accueillait des dépôts du public.

1.2

Importance des grandes banques

En comparaison internationale, l'économie suisse se caractérise par un secteur bancaire relativement important. A la fin de l'année 2007, les actifs du secteur bancaire totalisaient plus de 4700 milliards de francs, soit plus de neuf fois le produit intérieur brut de la Suisse. Parmi les pays du G10, cette proportion est de loin la plus forte. Le secteur financier est à l'origine de 12 % environ de la création de valeur et emploie quelque 6 % des travailleurs en Suisse. En comparaison historique également, le secteur bancaire suisse est aujourd'hui important. Sa croissance continue et rapide est due presque exclusivement aux activités des deux grandes banques à l'étranger.

La concentration du secteur bancaire suisse est plus forte que la moyenne internationale. Sous l'angle du total des actifs, les deux grandes banques dominent le marché suisse avec une part de 76 %. Elles détiennent une part de 35 % du marché des crédits, et une part semblable du marché des dépôts. De plus, un tiers des engagements interbancaires internes sont le fait de l'UBS SA. Les deux grandes banques sont d'une importance particulière pour le système financier suisse, en raison non seulement de leur taille, mais également de leur forte implication au plan international. Au regard de ces chiffres, on doit craindre que la faillite d'une grande banque ait des conséquences catastrophiques pour l'économie suisse.

Si une grande banque n'était plus à même de conserver le rôle vital qu'elle joue sur les marchés suisses des dépôts et des crédits, les ménages et les entreprises ne seraient plus en mesure d'assurer les paiements et les investissements courants en raison du blocage de leurs comptes et de l'interruption de leurs relations de crédit, ce qui provoquerait la paralysie du système des paiements. Pour ce qui est de l'UBS SA, quelque 128 000 relations bancaires avec des PME seraient touchées, et bien plus de trois millions de comptes si l'on inclut les particuliers. Le paiement du salaire d'un quart environ des employés serait bloqué. La garantie des dépôts ne pourrait guère juguler les effets négatifs, car la limite maximale de 4 milliards de francs fixée dans la loi ne couvre qu'une faible partie des dépôts privilégiés auprès de l'UBS SA. La faillite d'une grande banque déclencherait une véritable réaction en chaîne et
déstabiliserait, au moins à court terme, l'approvisionnement en liquidités et le système des paiements en Suisse.

Une faillite de l'UBS SA causerait également un tort considérable au reste du secteur bancaire. Sur le marché interbancaire, les autres banques suisses encourraient directement des pertes substantielles sur leurs créances vis-à-vis de l'UBS SA. La réputation de la place financière en souffrirait durablement et une crise générale de confiance ne pourrait être exclue. Les conséquences seraient particulièrement douloureuses au vu de l'orientation internationale de la place financière suisse et de la concentration sur la gestion de fortune. En outre, l'UBS SA emploie 27 000 collaboratrices et collaborateurs en Suisse.

Les répercussions macroéconomiques de la faillite d'une grande banque ne peuvent a priori être quantifiées. Sur la base d'études portant sur des crises bancaires à

8042

l'étranger3, les coûts pour l'économie suisse pourraient s'élever durant la crise à quelque 15 % à 30 % du PIB, ce qui correspond à un montant compris entre 75 et 150 milliards de francs. La perte estimée de croissance à long terme s'inscrit selon ces études dans une fourchette de 60 % à 300 % du PIB (entre 300 et 1500 milliards de francs). L'importance des écarts dans les estimations des coûts économiques reflète l'hétérogénéité des scénarios de crise et les incertitudes dans la définition de ces coûts. Dans la plupart des scénarios, le PIB resterait encore inférieur au niveau qu'il affichait lors de l'éclatement de la crise quinze ans après. Cela montre qu'une crise bancaire peut affecter durablement la croissance d'une économie.

Vu la persistance de la crise financière, la perte de confiance et les graves conséquences économiques, le train de mesures destinées à renforcer durablement le système financier suisse semble justifié. La stabilisation qui en découle sert le développement économique en Suisse et les intérêts du pays.

1.3

Arrêtés du Conseil fédéral

L'arrêté du Conseil fédéral du 15 octobre 2008 englobe les mesures destinées au renforcement du bilan de l'UBS SA et celles visant la protection des déposants.

En ce qui concerne le renforcement du bilan de l'UBS SA, la Confédération et la BNS appliqueront deux mesures coordonnées: ­

la Confédération renforce la base de fonds propres de l'UBS SA en souscrivant un emprunt à conversion obligatoire d'un montant de 6 milliards de francs. La Délégation des finances des Chambres fédérales a approuvé le crédit nécessaire. Aux fins de libération de l'emprunt à conversion obligatoire (avant la fin de l'année), un crédit supplémentaire de 6 milliards de francs sera ouvert à la charge du supplément II au budget 2008 et soumis après coup à l'approbation de l'Assemblée fédérale;

­

les mesures prises par la BNS en vue de restaurer la confiance des marchés vis-à-vis de l'UBS SA seront soutenues, notamment celle qui prévoit un transfert des actifs illiquides à une société à but spécial aux fins d'une liquidation ordonnée.

En ce qui concerne la protection des déposants, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral des finances DFF de lui soumettre, pour la session d'hiver des Chambres fédérales, un message visant un renforcement immédiat de la protection. De plus, le DFF soumettra au Conseil fédéral, jusqu'à fin mars 2009, un projet de révision en profondeur du système de garantie des dépôts.

3

«Costs of banking system instability: some empirical evidence», Bank of England, Financial Stability Review, juin 2001; «The Real Output Losses Associated with Modern Banking Crises», Boyd, J. H., Kwak, S., Smith, B., 2005 Journal of Money, Credit, and Banking, décembre 2005.

8043

2

Mesures en faveur de l'UBS SA

2.1

Vue d'ensemble

A la différence de nombreux Etats, la Confédération et la BNS concentrent leurs mesures de soutien sur un établissement unique mais d'importance systémique, l'UBS SA. La deuxième grande banque, Credit Suisse, a été informée des mesures en faveur de l'UBS SA mais s'en est distanciée, ne souhaitant pas avoir recours à des mesures similaires. Avec l'annonce en date du 16 octobre 2008 d'une augmentation de son capital, Credit Suisse renforce, par ses propres moyens, notablement ses fonds propres. Comme exposé au ch. 1.1.4, la situation du reste du secteur bancaire peut être jugée solide.

Bien que les mesures élaborées par le Conseil fédéral, la BNS et la CFB se concentrent en priorité sur l'UBS SA, elles ont pour seul objectif de préserver le système financier suisse d'un effondrement. Si l'UBS SA n'était plus en mesure de jouer le rôle essentiel qu'elle tient sur les marchés suisses des dépôts et des crédits, de même que dans le trafic des paiements et les opérations interbancaires, il en résulterait des conséquences graves et vraisemblablement durables pour l'ensemble de l'économie suisse: dans l'intérêt de la prospérité du pays, il convient d'éviter absolument de telles répercussions (cf. ch. 1.2).

Le train de mesures de la Suisse se focalise sur les problèmes principaux dont souffre le système financier suisse, mais il correspond pour l'essentiel au plan d'action du G7 (cf. ch. 1.1.2.2): ­

les mesures visent à soutenir une grande institution d'importance systémique;

­

elles ont pour objectif de restaurer la confiance vis-à-vis de l'institution en renforçant ses fonds propres et en assainissant son bilan;

­

simultanément, on renforce la protection des déposants pour que les épargnants gardent globalement confiance en la sécurité de leurs dépôts;

­

pour garantir que les banques et les autres instituts financiers aient largement accès aux liquidités et au refinancement, le Conseil fédéral est également prêt, en cas de nécessité, à garantir de nouveaux engagements interbancaires à moyen terme, de même que des opérations sur les marchés monétaires;

­

enfin, les mesures atténuent les risques pour les contribuables.

Les mesures en faveur de l'UBS SA comportent deux volets coordonnés. Le présent message porte sur la mesure décidée par la Confédération. Toutefois, pour une meilleure compréhension, la mesure de la BNS est également détaillée ci-après: ­

8044

La première mesure, qui est de la compétence de la BNS, est de transférer des actifs illiquides de l'UBS SA à une société à but spécial, pour un montant maximum de 60 milliards de dollars US. L'UBS SA bénéficie ainsi de liquidités supplémentaires. Elle se voit simultanément déchargée de certains risques, que la BNS est mieux à même de supporter, notamment parce que ses perspectives sont à plus long terme et qu'elle peut attendre que les marchés se ressaisissent avant de réaliser ces actifs. Cette mesure de soutien est assortie de diverses conditions, dont la dotation de la société à but spécial d'un capital propre de 6 milliards de dollars US au plus, fourni par l'UBS SA (cf. les détails au ch. 2.2).

­

2.2

La seconde mesure est de renforcer la base de fonds propres de l'UBS SA: à cette fin, la Confédération souscrit un emprunt à conversion obligatoire de 6 milliards de francs. Cette recapitalisation est directement liée à l'allégement du bilan de l'UBS SA d'actifs illiquides, ce qui permettra à la banque de doter la société à but spécial du capital propre nécessaire sans devoir grever sa propre base de capital de l'amortissement correspondant4.

Malgré des efforts soutenus, l'UBS SA n'a pas été en mesure de réaliser la recapitalisation nécessaire sur le marché. Pour la Confédération, l'emprunt à conversion obligatoire présente l'avantage que son engagement sera indemnisé de manière équitable et en toute sécurité (coupons de 12,5 %) et qu'elle ne devient pas copropriétaire de la banque (du moins pas dans un premier temps). En effet, cela aurait pour conséquences que la Confédération assumerait de plus grands risques. En outre, sous l'angle de la politique économique et de la concurrence, son statut de copropriétaire serait difficilement acceptable car il entrerait en conflit avec le mandat qui lui est imparti de créer les meilleures conditions possibles pour l'ensemble de la place financière et d'exercer une surveillance efficace du marché (pour plus de détails, cf. ch. 2.3).

Allégement du bilan de l'UBS SA d'actifs illiquides par la BNS

La mesure de soutien clé est le transfert d'actifs illiquides de l'UBS SA à une société à but spécial, pour un montant maximal de 60 milliards de dollars US. Par cette transaction, l'UBS SA bénéficie d'un double soutien. L'UBS SA est ainsi déchargée des risques liés aux actifs illiquides, qui sont au coeur de la crise actuelle. Cela contribuera à renforcer la stabilité de l'UBS SA et la confiance vis-à-vis de la banque. De plus, la mesure aura un effet positif sur les liquidités de l'UBS SA.

Du point de vue de la BNS, les actifs que la société à but spécial acquerra ont une valeur. Contrairement à l'UBS SA, qui est sans relâche soumise aux pressions du marché, la BNS a une perspective à plus long terme. Elle est ainsi en mesure de résister à l'environnement actuel, incertain et agité, et d'attendre un rattrapage des prix durant les années à venir. Cet horizon à long terme permet une liquidation ordonnée des actifs illiquides. On pourra ainsi éviter les fortes pertes de valeur qu'engendrerait une vente à court terme sur un marché à la baisse.

Pour l'UBS SA, les mesures de soutien ne sont pas gratuites et de plus, elles sont soumises à diverses conditions. Les caractéristiques principales de la transaction ont été négociées avec les dirigeants de l'UBS SA sur la base des conditions fixées par la BNS. Les modalités de la transaction se présentent comme suit: ­

4

l'UBS SA dote la société à but spécial d'un capital propre de 6 milliards de dollars US au maximum. La Banque nationale finance l'achat des actifs par un prêt garanti de 54 milliards de dollars US au plus. En contrepartie, elle obtient le contrôle de la société à but spécial et la plus grande part des gains éventuels à la liquidation de ladite société. De plus, la BNS se voit accorder Un amortissement est nécessaire en raison de la vente à la BNS, pour un prix symbolique de 1 dollar US, de la part de capital de 6 milliards de dollars US au plus détenue par l'UBS SA dans la société à but spécial.

8045

une option sur un maximum de 100 millions d'actions UBS SA si d'aventure elle essuyait une perte suite à la transaction; ­

le crédit de la Banque nationale, de 54 milliards de dollars US au plus, est garanti par la mise en gage de tous les actifs de la société à but spécial. Il est rémunéré au taux Libor à un mois augmenté de 250 points de base. Les revenus de la société à but spécial issus de paiements d'intérêts, d'amortissements et de ventes d'actifs sont utilisés chaque mois en priorité au remboursement du crédit, après déduction des charges d'exploitation. La Banque nationale met le crédit à disposition en dollars américains, car les actifs sont pour la plupart libellés en cette devise. Elle se procurera les devises nécessaires d'abord auprès de la réserve fédérale américaine, puis sur le marché; l'engagement de réserves monétaires n'est pas envisagé. Le financement par la réserve fédérale américaine a été réglé dans le cadre de l'accord swap existant.

Les actifs que la société à but spécial acquerra sont notamment des prêts garantis par des hypothèques immobilières et commerciales américaines et européennes ou par d'autres valeurs patrimoniales.

Le prix de reprise sera déterminé par la valeur comptable actuelle des actifs telle qu'elle ressort du bilan de l'UBS SA au 30 septembre 2008 et par une expertise indépendante. La société à but spécial paiera à chaque fois le moins élevé des deux prix.

­

La société à but spécial sera dotée par l'UBS SA d'un capital propre de 6 milliards de dollars US au plus, qui servira de garantie contre des pertes éventuelles. Avant le versement du prêt, l'UBS SA transférera à la BNS la propriété de la société à but spécial pour le prix symbolique d'un dollar US.

Dans le même temps, la Banque nationale ménagera à l'UBS SA une option de rachat, qu'elle pourra faire valoir après le remboursement intégral du prêt.

Un bénéfice éventuel après liquidation totale des actifs reviendra à la BNS jusqu'à concurrence d'un milliard de dollars US; le solde sera partagé par moitié entre la BNS et l'UBS SA: l'intérêt de l'UBS SA pour une liquidation rentable des actifs se trouve ainsi garanti. Le transfert des actifs à la société à but spécial de même que leur gestion et leur liquidation seront surveillés par la BNS. Les tâches administratives seront assumées par l'UBS SA, mais la BNS pourra les confier en tout temps à une société tierce.

­

Si l'UBS SA passe sous le contrôle d'un autre investisseur, la BNS peut exiger le remboursement immédiat du prêt.

La forme juridique et le siège de la société à but spécial ne sont pas encore définitivement fixés. La BNS examine attentivement la possibilité de créer une société qui aurait son siège en Suisse. Cette solution emporterait sa préférence pour autant que la transaction puisse se dérouler de façon adéquate.

8046

2.3

Renforcement de la base de fonds propres de l'UBS SA par un emprunt à conversion obligatoire

2.3.1

Du choix de l'instrument

L'emprunt à conversion obligatoire est une forme particulière de l'emprunt obligataire. Les obligations d'emprunt sont des créances nées d'un prêt et garanties par des papiers-valeurs. Le souscripteur de l'obligation a droit à des intérêts et au remboursement du capital mis à disposition (Forstmoser/Meier-Hayoz/Nobel, Aktienrecht, Berne 1996, § 48, N 23). L'obligation convertible donne en outre au créancier le droit de troquer son statut de créancier contre celui d'actionnaire, à certaines conditions et dans un délai donné. Lorsqu'il exerce son droit de conversion, les droits de créancier se transforment en droits de participation (loc. cit., § 48, N 28). Contrairement à l'emprunt convertible, l'emprunt à conversion obligatoire non seulement donne au créancier un droit de conversion mais l'oblige à la conversion.

Dans la perspective du renforcement de la base de fonds propres de l'UBS SA par la Confédération, l'instrument de l'emprunt à conversion obligatoire a paru le plus judicieux pour les raisons suivantes5: ­

la transaction offre un haut degré de sécurité: la seule incertitude concerne l'approbation de l'assemblée générale extraordinaire de l'UBS SA pour la création du capital nécessaire (à l'ordre du jour d'une assemblée générale ordinaire du 27 novembre 2008);

­

la Confédération ne devient pas immédiatement copropriétaire de la banque: elle a au contraire la possibilité de se retirer totalement ou partiellement de son engagement pendant la durée de l'emprunt déjà;

­

l'indemnisation est équitable et sûre: pendant la durée de l'emprunt, la Confédération reçoit en contrepartie de son engagement un coupon de 12,5 % par an;

­

la mesure a l'effet escompté auprès de l'UBS SA: la conversion obligatoire en actions permet à la banque de traiter le prêt dès sa libération (prévue pour le 4 décembre 2008) comme du capital propre dans le cadre des prescriptions sur les fonds propres (plus précisément comme fonds propres de base).

2.3.2

Montant et modalités de l'emprunt à conversion obligatoire

La dotation de la société à but spécial de capitaux propres à hauteur de 6 milliards de dollars US au maximum et le transfert consécutif de sa propriété à la BNS à un prix symbolique exige un amortissement au bilan de l'UBS SA. Cet amortissement doit être compensé par un renforcement des fonds propres de base. Les besoins supplémentaires en fonds propres de base ont été estimés par la CFB à 6 milliards de francs.

5

Les options étudiées et rejetées ont porté sur une participation dans le cadre d'une augmentation ordinaire de capital ou d'une prise ferme, par le biais d'actions privilégiées, par des bons de participation ou par un prêt en deuxième rang.

8047

Dans la conception de l'emprunt à conversion obligatoire, on a tenu compte des critères suivants: ­

pour ce qui est des conditions, l'emprunt à conversion obligatoire doit être conçu de manière telle que l'investissement initial de 6 milliards de francs puisse, avec une probabilité suffisante, être refinancé par le produit des intérêts et le produit généré par le transfert de l'emprunt ou la vente des actions.

On évitera dans la mesure du possible de grever le budget ordinaire;

­

l'engagement doit se limiter au montant nécessaire. La participation de la Confédération doit si possible compléter les apports d'autres investisseurs et non les remplacer;

­

la participation est temporaire. En tenant compte des conditions du marché, la Confédération la revendra aussi rapidement que possible à des investisseurs privés. Pour ce faire, elle se laissera guider par des critères commerciaux;

­

la Confédération doit être équitablement rétribuée pour le risque qu'elle encourt. Il ne sera pas possible d'éviter un effet de dilution pour l'actionnariat actuel. Les conditions posées à la Confédération correspondent au moins à celles dont bénéficient d'autres investisseurs potentiels;

­

l'objectif premier de la participation de la Confédération n'est pas d'obtenir un droit de vote. Il convient dans tous les cas d'éviter une ingérence de la politique dans la conduite des affaires. Aucun représentant de l'Etat ne devrait siéger au conseil d'administration;

­

en ce qui concerne la politique de compensation (bonus, indemnités de départ), la participation de la Confédération doit être assortie de charges;

­

pendant la durée de la participation de la Confédération, des entretiens d'investisseurs seront régulièrement organisés avec la Confédération et la BNS examinera la gestion des risques pratiquée par l'UBS SA.

Les conditions de l'emprunt à conversion obligatoire se résument comme suit (cf. la présentation détaillée à l'annexe 2): ­

la Confédération souscrit 60 titres d'emprunt d'une valeur nominale de 100 millions de francs chacun;

­

la durée de l'emprunt est de 30 mois au taux d'intérêt annuel de 12,5 %. A certaines conditions, les intérêts seront versés sous forme d'actions;

­

le prix d'achat des actions dépend de plusieurs paramètres, notamment d'un prix de référence à la conclusion du contrat et de son évolution dans les jours précédant l'assemblée générale extraordinaire qui devra décider le 27 novembre 2008 de l'augmentation de capital;

­

malgré une période de blocage (lockup) de six mois après l'émission de l'emprunt, la Confédération peut en tout temps vendre l'emprunt pour autant que l'acheteur se soumette à son tour à la période de blocage.

Outre les conditions proprement dites de l'emprunt à conversion obligatoire, la convention avec l'UBS SA détaille une série d'autres droits de la Confédération et de la BNS et d'obligations de l'UBS SA, notamment:

8048

­

l'organisation à intervalles réguliers d'entretiens d'investisseurs avec le président du conseil d'administration et le directeur général du groupe UBS SA (cf. ch. 2.3.4);

­

le droit de la BNS de procéder en tout temps à des examens au sein de la banque, portant notamment sur la gestion des risques (cf. ch. 2.3.3);

­

l'aménagement du système d'indemnisation des membres du conseil d'administration et de la direction en accord avec la CFB et en conformité avec les règles internationales en élaboration, notamment celles du FSF (cf. ch. 3.1).

2.3.3

Suivi de la gestion des risques par la BNS

Aussi longtemps que la Confédération détiendra 3 % du capital-actions de l'UBS SA (directement ou indirectement par le truchement de l'emprunt à conversion obligatoire), la BNS procédera sur mandat du DFF à des examens de la gestion des risques par l'UBS SA. Les points essentiels des ces examens feront l'objet d'une concertation avec le DFF. Dans la mesure du possible, la BNS coordonnera les examens avec la CFB, et cette dernière y sera associée si nécessaire.

Cette disposition ne se substitue pas à la surveillance de l'UBS SA par la CFB telle qu'elle est définie dans la loi du 8 novembre 1934 sur les banques (LB; RS 952.0) et les réglementations qui en découlent. Elle ne remplace pas non plus le contrôle de l'UBS SA qui incombe à la BNS au titre de son mandat de veiller à la stabilité financière.

Les examens de la BNS pourront notamment prendre les formes suivantes: ­

participation à des réunions internes à tous les niveaux hiérarchiques lorsqu'elles portent sur la gestion des risques et le contrôle des risques;

­

demandes d'informations par questionnaires;

­

entretiens avec les responsables de la gestion et du contrôle des risques;

­

accès à des données et documents internes se rapportant à la gestion et au contrôle des risques. La BNS pourra procéder aux examens à l'improviste.

La BNS communiquera les résultats de ses examens au DFF et à la CFB. Si besoin est, le DFF discutera des résultats avec l'UBS SA. Le DFF pourra associer la CFB à l'exécution des mesures correctrices qui s'imposeraient.

2.3.4

Entretiens d'investisseurs

Par l'acquisition de l'emprunt à conversion obligatoire, la Confédération a, dans le cadre des relations ordinaires avec les investisseurs et des prescriptions régulatrices en vigueur, le même accès aux informations et à la direction de l'entreprise que d'autres gros actionnaires de l'UBS SA, et ce aussi longtemps qu'elle détient une part d'au moins 3 % des actions ou des droits de conversion pour le même montant.

Cela signifie notamment que la Confédération peut exiger des entretiens directs avec le président du conseil d'administration, le directeur général, le chef des finances, le chef de la gestion des risques, le conseil général du groupe ou avec tout autre cadre 8049

de la banque. Elle peut se faire accompagner par des membres de la Banque nationale suisse ou se faire représenter par eux. En cas de nécessité, la Confédération peut se faire conseiller par des experts externes pour la préparation de ces entretiens.

2.3.5

Gestion de l'emprunt à conversion obligatoire

Dans la gestion de l'emprunt à conversion obligatoire, on évitera de provoquer des distorsions de concurrence. De plus, le Conseil fédéral considère que son engagement est temporaire et il y mettra fin de manière appropriée. Il s'assurera donc que l'application de la mesure n'a aucune incidence sur la situation de concurrence et que tout retrait s'effectue de manière non discriminatoire.

La Confédération s'est engagée à hauteur de 6 milliards de francs en souscrivant l'emprunt à conversion obligatoire. Les actions sous-jacentes représentent un peu moins de 10 % du capital-actions de l'UBS SA. L'emprunt durera au maximum 30 mois (c'est-à-dire jusqu'au milieu de l'année 2011 environ). L'engagement financier de la Confédération doit toutefois rester temporaire. Il est prévu que la Confédération se retire avant l'échéance par le biais d'un transfert partiel ou total de l'emprunt ou d'une conversion précoce et d'une vente des actions, tout en préservant ses intérêts économiques.

Une vente n'est en principe prévue qu'après un délai de six mois, sauf si les acheteurs se soumettent également à la période de blocage.

La Confédération suisse renonce à siéger au conseil d'administration de l'UBS SA et à influencer directement la stratégie de l'entreprise. En tant qu'investisseur, le Conseil fédéral attend toutefois de l'UBS SA qu'elle prenne toutes les mesures entrepreneuriales susceptibles de garantir le succès économique de l'opération et d'affirmer sa place sur le marché financier. A moyen terme, la banque devra consolider, voire augmenter la valeur de l'entreprise, ce qui devra également se refléter dans le cours de l'action. L'heure d'un retrait total ou partiel de la Confédération sera alors venue. De la sorte, un retrait n'interviendra pas à un moment inopportun et ne sera envisagé que lorsque la situation sur les marchés financiers et la situation économique de l'UBS SA se seront suffisamment consolidées. Le Conseil fédéral souligne toutefois son intention de réduire ou de supprimer la participation de la Confédération au capital-actions de l'UBS SA dès que les conditions du marché le permettront.

En détenant au maximum un peu moins de 10 % du capital-actions de l'UBS SA après la conversion ou l'échéance de l'emprunt, la Confédération n'est pas en mesure de définir une stratégie de propriétaire
comme elle pourrait le faire si elle était actionnaire majoritaire. Si elle procédait néanmoins à la conversion de l'emprunt sans être en mesure de vendre les actions, elle devrait défendre ses intérêts par le biais des droits d'actionnaire que lui confère le code des obligations (CO; RS 220) et exercer son droit de regard contractuel.

Pour se défaire de ses participations, la Confédération peut choisir entre plusieurs procédures de vente. En cas de vente, les considérations commerciales domineront, mais des contraintes annexes importantes pèseront sur la transaction, à savoir la responsabilité de l'Etat vis-à-vis de l'économie et l'intérêt à garantir le bon fonctionnement de la place financière. De plus, il faut éviter dans la mesure du possible qu'une vente éventuelle mène le marché à une volatilité indésirable. Il conviendra 8050

donc de choisir une procédure sans effets dommageables sur les cours. Pour atteindre ces objectifs, la Confédération devra se ménager toutes les options possibles pour un replacement ou une vente, tant sous l'angle de l'échelonnement que sous celui de la procédure. Les volumes du portefeuille à vendre (emprunt à conversion obligatoire en tranches de 100 millions de francs ou actions nominatives) joueront à cet égard un rôle important dans le choix de la procédure.

2.3.6

Base légale et ouverture du crédit

2.3.6.1

Contexte

En vue du renforcement de la base de fonds propres de l'UBS SA, la Confédération a souscrit un emprunt à conversion obligatoire de 6 milliards de francs. Comme exposé au ch. 2.3.1, et contrairement à l'emprunt convertible ordinaire, l'emprunt à conversion obligatoire ne donne pas seulement un droit de conversion à l'acquéreur, mais lui impose de convertir l'emprunt. Sous l'angle de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances de la Confédération (LFC; RS 611.0), il correspond quant au résultat à un placement direct en actions. Aux termes de l'art. 62, al. 2, LFC, la Confédération ne peut acquérir des parts du capital d'entreprises à but lucratif à des fins de placement. Le renforcement de la base de fonds propres envisagé poursuit toutefois un tout autre but: il s'agit de permettre à l'UBS SA de poursuivre l'activité qu'elle a librement choisi d'exercer, en lui octroyant dans l'intérêt public une aide fédérale adaptée à la situation. La recapitalisation est par conséquent une aide financière au sens de l'art. 3, al. 1, de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu; RS 616.1). A cet égard, il convient de rappeler que la LSu connaît une notion large de la subvention, qui ne se limite pas à des prestations à fonds perdus. Les versements liés aux aides financières ne sont pas des opérations de trésorerie: elles entraînent au contraire des dépenses qui ont une incidence sur la comptabilité et les crédits. Pour qu'elle puisse accorder des aides financières, la Confédération doit donc disposer d'une base légale solide (cf. ch. 2.3.6.2) et du crédit nécessaire (cf.

ch. 2.3.6.3).

2.3.6.2

Ordonnance selon les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, Cst.

Généralités La base légale de la capitalisation de Swiss (augmentation du capital de Crossair) dans les années 2001/2002 était l'art. 102 de la loi fédérale du 21 décembre 1948 sur l'aviation (LA; RS 748.0), qui dispose que la Confédération peut participer à des entreprises exploitant des aérodromes et à des entreprises de transport aérien lorsque l'intérêt général (public) le justifie. Or, contrairement à la LA, la loi sur les banques ne connaît pas de norme équivalente, si bien qu'il était indispensable de créer une base légale. En effet, même s'il est approuvé selon la procédure d'urgence, le crédit reste bloqué de par la loi jusqu'à l'entrée en vigueur de la disposition légale requise (art. 32, al. 2, LFC). Deux moyens s'offraient pour disposer rapidement de cette base légale:

8051

­

le recours à la législation d'urgence au sens de l'art. 165 de la Constitution (Cst.; RS 101);

­

l'adoption par le Conseil fédéral d'une ordonnance selon les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, Cst.

Dans le cas présent, le Conseil fédéral se devait d'agir dans les plus brefs délais, afin d'éviter que l'économie du pays ne soit gravement perturbée. Or, la procédure législative d'urgence ne lui aurait pas permis de le faire.

La Constitution donne au Conseil fédéral le droit d'édicter directement des ordonnances autonomes aux fins suivantes: ­

sauvegarder les intérêts du pays dans les relations avec l'étranger (art. 184, al. 3, Cst.),et

­

parer à des troubles existants ou imminents menaçant gravement l'ordre public, la sécurité extérieure ou la sécurité intérieure (art. 185, al. 3 Cst.).

Dans la doctrine, ce droit est parfois désigné par le terme de «pouvoirs spéciaux», à distinguer des pleins pouvoirs (extraconstitutionnels). Lorsqu'il édicte des ordonnances en s'appuyant sur les dispositions précitées, le Conseil fédéral ne fait qu'exercer une compétence constitutionnelle (cf. à ce sujet le message relatif à une nouvelle Constitution fédérale, FF 1997 I 1 ss., p. 427).

La sauvegarde des intérêts du pays dans les relations avec l'étranger (art. 184, al. 3, Cst.) incombe exclusivement au Conseil fédéral (cf. St. Galler Kommentar, 2e éd. 2008, ch. 18, ad art. 184 Cst.). Concernant l'UBS SA, ce dernier se devait d'assurer cette sauvegarde, car une attitude passive ou simplement hésitante de sa part aurait porté durablement atteinte à la réputation de la place financière suisse à l'étranger. Or, eu égard à la vocation internationale de cette place financière et à la concentration de ses activités sur la gestion de fortune, la perte de confiance qui en résulterait aurait de graves conséquences pour l'économie suisse.

L'art. 185, al. 3, Cst. donne au Conseil fédéral les moyens de faire face à des situations d'exception. Il peut s'agir par exemple de désordres graves, de menaces militaires, de catastrophes naturelles ou d'épidémies. Or, la crise financière actuelle recèle un potentiel de troubles et de dommages au moins équivalent à celui de tels événements. Comme K. Eichenberger l'a montré dans son commentaire de l'ancienne Constitution fédérale (ch. 153 et 169, ad art. 102, ch. 10, aCst.), la compétence du Conseil fédéral en matière de prévention des dangers ne se limite pas à la protection de la vie et de l'intégrité physique de la population, mais s'étend à l'adoption des mesures propres à écarter les dangers menaçant l'Etat et la société lorque des événements catastrophiques et imprévisibles surviennent. Pour ce qui est des conséquences graves qu'aurait la défaillance d'une grande banque pour l'économie suisse, nous renvoyons aux explications du ch. 1.2. Il en ressort que lors de sa prise de décision, le Conseil fédéral a dû tenir compte d'une situation d'exception tendant manifestement à s'aggraver.

Lorsqu'il édicte une ordonnance en vertu des art. 184 et 185 Cst., le Conseil fédéral reste lié par la Constitution fédérale. De plus, selon certains textes de doctrine, cette
compétence législative doit s'exercer uniquement praeter legem et en aucun cas contra legem. Il s'ensuit qu'une telle ordonnance peut remplacer ou compléter des lois fédérales, mais non les enfreindre. De plus, elle doit être indispensable, dictée par des impératifs de temps, justifiée par des intérêts publics prépondérants et proportionnée aux circonstances. Enfin, la Constitution précise qu'elle doit être limitée 8052

dans le temps. L'ordonnance du Conseil fédéral du 15 octobre 2008 respecte toutes ces conditions.

L'art. 94, al. 1, Cst. dispose que la Confédération et les cantons doivent respecter le principe de la liberté économique. La constitution pose ainsi le fondement politique d'une économie de marché reposant sur le secteur privé. De plus, l'art. 27, al. 1, Cst., garantit le droit fondamental de la liberté économique. Il en résulte notamment que toute mesure économique prise par l'Etat doit être neutre du point de vue de la concurrence. En particulier, les concurrents directs peuvent se prévaloir du droit à l'égalité de traitement. Or, les mesures destinées à renforcer le système financier suisse arrêtées dans l'ordonnance du 15 octobre 2008 favorisent indirectement la position concurrentielle de l'UBS SA. Dès lors, si une autre grande banque devait se trouver dans une situation semblable à celle de l'UBS SA, elle bénéficierait d'un soutien comparable au nom du principe de l'égalité de traitement.

Commentaire de l'ordonnance (cf. annexe 3) Préambule ­ Comme indiqué ci-dessus, les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, Cst. accordent au Conseil fédéral le droit d'édicter des ordonnances autonomes fondées directement sur la Constitution pour sauvegarder les intérêts du pays dans les relations avec l'étranger et pour faire face à des situations d'exception.

Art. 1 ­ Cette disposition énonce le principe de l'ordonnance. Elle autorise la Confédération à participer à la recapitalisation de l'UBS SA et fixe un plafond à cette participation (al. 1). Elle définit en outre l'instrument de la participation, à savoir un emprunt à convertir obligatoirement en actions (al. 2). L'emprunt doit être émis soit par l'UBS SA soit par une filiale de l'UBS SA, avec la garantie de cette dernière.

Art. 2 ­ L'aide accordée est soumise à plusieurs conditions cumulatives définies à l'art. 2. Ainsi, les let. a et b disposent de la subsidiarité de l'aide de la Confédération, tandis que la let. c précise que cette dernière n'est disposée à fournir son aide qu'à la condition de participer de manière appropriée à tout regain de valeur futur de la banque. Enfin, la let. d permet au Conseil fédéral d'imposer certaines injonctions à l'UBS SA en matière de gouvernement d'entreprise.

Art. 3 ­ En vertu de cette disposition, l'administration
de l'emprunt (let. a) et celle des actions obtenues à la suite de la conversion obligatoire de ce dernier (let. b) sont confiées au DFF. L'administration inclut en particulier la vente ultérieure des actions, qui devra naturellement servir au mieux les intérêts financiers et autres intérêts de la Confédération.

Art. 4 ­ Cet article dispose que les décisions en matière de crédits doivent être prises en suivant une procédure d'urgence conforme à la LFC. Il a une valeur purement déclarative.

Art. 5 ­ Compte tenu de l'urgence de la situation, l'ordonnance devait entrer en vigueur le jour même de son adoption (al. 1). Il était en outre nécessaire d'en limiter la durée de validité, comme l'exige la Constitution (al. 2). L'ordonnance s'appliquera donc jusqu'à son éventuel remplacement par une loi fédérale ou, à défaut, jusqu'au moment où les transactions qu'elle prévoit auront été entièrement exécutées. Or, le Conseil fédéral présume que la situation d'exception qui l'a amené à édicter l'ordonnance est provisoire et qu'il n'y a donc pas de raison de donner une base légale durable aux présentes mesures de recapitalisation de l'UBS SA. Il renonce par conséquent à proposer au Parlement de légiférer en la matière.

8053

Satisfaction des conditions de l'art. 2 de l'ordonnance Au moment où il édictait l'ordonnance du 15 octobre 2008 relative à la recapitalisation de l'UBS SA, le Conseil fédéral constatait que les conditions de la participation de la Confédération à la recapitalisation, fixées de manière générale et abstraite à l'art. 2, étaient remplies dans les faits. En effet, les efforts entrepris par le secteur privé pour recapitaliser la banque avaient définitivement échoué peu avant qu'il prenne sa décision (let. a). De plus, il était établi depuis longtemps que la BNS contribuerait de manière déterminante aux éventuelles mesures de soutien (let. b). Le Conseil fédéral était donc amené à recourir à l'ultima ratio et accorder l'aide de l'Etat. L'instrument de l'emprunt à conversion obligatoire et sa conception particulière garantissent une participation appropriée de la Confédération quand la banque aura recouvré sa santé économique et regagné de la valeur sur le marché (let. c).

Enfin, les modalités de la souscription de l'emprunt entre la Confédération et l'UBS SA ont été réglées dans une convention particulière (cf. ch. 2.3.2 pour les détails), qui impose notamment différentes injonctions à la banque en matière de gouvernement d'entreprise (let. d) (cf. ch. 2.3.2 à 2.3.4 et 3.1).

2.3.6.3

Autorisation de crédit

En souscrivant l'emprunt à conversion obligatoire de 6 milliards de francs, la Confédération s'est engagée à le libérer intégralement avant la fin de 2008. Pour les finances de la Confédération, cette libération est une dépense. Or, une dépense ne peut être opérée que sur la base d'un crédit budgétaire (complété au besoin par un crédit supplémentaire) dûment autorisé. En revanche, étant donné que la libération ne constitue pas un engagement allant au-delà de l'exercice budgétaire en cours, il n'est pas nécessaire d'approuver également un crédit d'engagement (cf. art. 21, al. 1, LFC).

Les crédits budgétaires sont autorisés avec le budget et ses suppléments (art. 30, al. 2, let. a, et art. 33 LFC). Si une charge ou une dépense d'investissement ne peut être ajournée, le Conseil fédéral peut appliquer la procédure d'urgence prévue à l'art. 34 LFC. Il prend sa décision seul (crédit provisoire urgent) ou avec l'assentiment de la Délégation des finances (crédit provisoire ordinaire). Dans les deux cas, il soumet l'affaire après coup à l'approbation de l'Assemblée fédérale.

Aux termes de l'art. 25, al. 2, de l'ordonnance du 5 avril 2006 sur les finances de la Confédération (OFC; RS 611.01), il n'est ouvert de crédits provisoires urgents que si la décision concernant des charges ou des dépenses d'investissement ne peut être ajournée jusqu'à la décision de la Délégation des finances. Dans le cas présent, celle-ci a pu être rapidement convoquée, tenant une réunion au terme de laquelle elle a approuvé, après une longue discussion, l'arrêté ouvrant le crédit. C'est donc sur un crédit provisoire ordinaire que l'Assemblée fédérale doit se prononcer après coup.

8054

3

Autres mesures et affaires en suspens

3.1

Réglementation des systèmes d'indemnisation

3.1.1

Fausses incitations à prendre des risques accrus

Dans le débat en cours sur les problèmes du système financier et sur les différentes interventions de l'Etat, la question de la rémunération du personnel de rang supérieur et des dirigeants des banques a acquis une dimension particulière. La plupart des trains de mesures concernant le système bancaire adoptés à l'étranger prévoient de soumettre les systèmes d'indemnisation à certaines obligations ou même de fixer un plafond à l'indemnisation de la haute direction. Dans la branche financière comme au sein des autorités de surveillance et des banques centrales, on s'accorde à dire que des systèmes et mécanismes d'indemnisation inappropriés, en corrélation avec d'autres facteurs, ont incité les acteurs du marché à prendre des risques exagérés et contribué ainsi au déclenchement de la crise actuelle.

Le débat en cours a mis en évidence plusieurs points faibles affectant certains modèles d'indemnisation appliqués en particulier dans les domaines de la banque d'investissement et de la gestion de fortune. Ainsi, la performance des employés et des cadres était mesurée exclusivement à l'aune du volume des affaires qu'ils concluaient. Souvent, les systèmes de bonus ne tenaient aucun compte des risques à moyen et à long terme auxquels s'exposaient la banque elle-même ou ses clients.

Certains collaborateurs et leur unité d'organisation étaient indemnisés simplement sur la base de leur chiffre d'affaires. Les modèles d'indemnisation reposaient sur des objectifs à court terme purement financiers, récompensant les bénéfices immédiats et ignorant les risques de pertes à long terme, et finissaient par avoir des effets incitatifs pervers. Enfin, outre qu'ils péchaient par manque de transparence, ces modèles n'ont jamais été remis en question et n'ont donc pas été corrigés à temps.

3.1.2

Question internationale

Au plan international, ces problèmes touchant les systèmes d'indemnisation sont traités par des organisations privées, comme l'IIF (cf. ch. 1.1.2.6), et par des organismes inter-étatiques, comme le FSF (cf. ch. 1.1.2.1). Au plan national, cette tâche incombe aux autorités de régulation et autres autorités compétentes du pays, comme la Financial Services Authority (FSA) en Grande-Bretagne, le Bundesministerium der Finanzen en Allemagne et le Department of the Treasury aux Etats-Unis.

Dans son rapport, l'IIF formule sept principes et montre, à l'aide d'exemples concrets, comment les appliquer et vérifier qu'ils sont effectivement appliqués.

L'IIF renonce sciemment à faire des recommandations immédiatement applicables, laissant aux banques le soin de concevoir elles-mêmes leurs systèmes d'indemnisation dans la pratique. Le rapport du FSF se limite lui aussi à édicter des règles de principe.

En Grande-Bretagne, dans une lettre datée du 13 octobre 2008, la FSA a invité les dirigeants des groupes bancaires de la City, à Londres, à examiner leurs systèmes d'indemnisation et à y apporter les modifications nécessaires. Elle va les rencontrer au cours du quatrième trimestre 2008 et publier en janvier 2009 un rapport présentant des critères d'identification des bonnes et des mauvaises pratiques. De plus, les banques dont les fonds propres sont consolidés par un apport de l'Etat se voient 8055

imposer, outre un gel de la distribution de dividendes, l'interdiction de verser des bonus aux membres du conseil d'administration. La FSA ne prévoit toutefois pas d'émettre des directives formelles.

Aux Etats-Unis, le département du Trésor a émis, dans le cadre de l'Emergency Economic Stabilization Act du 14 octobre 2008, des normes régissant l'indemnisation des hauts dirigeants des établissements bancaires bénéficiant des programmes de soutien gouvernemental6. Premièrement, les indemnités versées aux hauts dirigeants doivent être limitées de façon à ne pas les inciter à prendre des risques inutiles ou exagérés menaçant la valeur de la banque. Deuxièmement, les hauts dirigeants doivent dorénavant rembourser les bonus variables reçus sur la base d'indications de recettes ou de bénéfices ou d'autres critères se révélant ultérieurement inexacts.

Enfin, il est interdit aux banques soutenues par le gouvernement de verser des indemnités de départ disproportionnées (parachutes dorés).

En Allemagne, les banques bénéficiant du fonds de stabilisation du marché financier sont tenues de vérifier leurs systèmes d'indemnisation sous l'angle de leurs effets incitatifs pervers et de leur pertinence7 et d'inscrire la rémunération des hauts dirigeants dans des limites appropriées8. Le fonds de stabilisation doit notamment faire pression pour que cette rémunération n'excède pas 500 000 euros. De plus, tant qu'elles bénéficient du fonds, les banques ne doivent verser aucune indemnité non imposée par une obligation juridique, ni aucun bonus ou dividende.

3.1.3

Systèmes d'indemnisation en tant qu'élément de la révision en cours du droit de la société anonyme

Politique de rémunération selon le droit de la société anonyme en vigueur Une société anonyme peut rémunérer les membres de son conseil d'administration sous forme de tantièmes ou d'indemnités9.

Les tantièmes sont réglés par l'art. 677 du CO, aux termes duquel des parts de bénéfice ne peuvent être attribuées aux membres du conseil d'administration que si elles sont prélevées sur le bénéfice résultant du bilan, après les affectations à la réserve légale et la répartition d'un dividende de 5 % ou d'un taux supérieur prévu par les statuts.

Contrairement aux tantièmes, les indemnités peuvent quant à elles être comptabilisées avec effet sur le résultat en tant que charges. Elles sont donc plus intéressantes du point de vue fiscal et, partant, beaucoup plus répandues. Les indemnités des membres du conseil d'administration ne sont toutefois pas expressément réglées dans le code des obligations. Elles se fondent généralement sur une disposition statutaire, ou alors sur un contrat de travail ou un mandat de la société concernée.

Depuis le 1er janvier 2007, les sociétés dont les actions sont cotées en bourse ont l'obligation d'observer des règles spéciales en matière de transparence. Selon l'art. 663bbis CO, ces sociétés sont tenues d'indiquer dans l'annexe du bilan toutes

6 7 8 9

Sec. 111 Emergency Economic Stabilization Act of 2008.

§ 5 Abs. 3 Finanzmarktstabilisierungsfonds-Verordnung ­ FMStFV.

§ 5 Abs. 4 FMStFV.

Cf. Peter Böckli, Schweizer Aktienrecht, 3e éd, Zurich 2004, § 13 N 237 ss.

8056

les indemnités qu'elles ont versées directement ou indirectement aux membres du conseil d'administration, de la direction et du conseil consultatif.

Politique de rémunération selon le projet de révision du droit de la société anonyme Le projet du Conseil fédéral du 21 décembre 200710 de révision du code des obligations (droit de la société anonyme et droit comptable; adaptation des droits de la société en nom collectif, de la société en commandite, de la société à responsabilité limitée, de la société coopérative, du registre du commerce et des raisons de commerce) vise notamment à garantir un bon équilibre fonctionnel entre les différents organes de la société et à mieux protéger la substance du droit de propriété des actionnaires. En ce qui concerne l'indemnisation des membres du conseil d'administration de sociétés dont les actions sont cotées en bourse, le projet prévoit les nouveautés ci-après: ­

Election annuelle et individuelle des membres du conseil d'administration: l'art. 710, al. 1, P-CO prévoit que l'assemblée générale élit les membres du conseil d'administration tous les ans, chaque membre étant élu individuellement. Les actionnaires ont ainsi la possibilité d'«évaluer» annuellement la prestation individuelle de chaque membre du conseil d'administration. En particulier, cela leur permet de s'exprimer indirectement sur le montant des indemnités versées aux membres du conseil d'administration et de la direction.

­

Compétence statutaire de l'assemblée générale en matière de politique de rémunération: selon l'art. 627, ch. 4, P-CO, les statuts peuvent prévoir que l'assemblée générale est compétente en matière de fixation des indemnités des membres du conseil d'administration et des personnes qui leur sont proches ainsi qu'en matière d'octroi d'actions et d'options aux collaborateurs.

­

Action en restitution de prestations indues: l'art. 678 P-CO dispose qu'outre les membres du conseil d'administration, ceux de la direction sont aussi tenus à restituer les prestations versées par la société (p. ex. indemnités), dans la mesure où ces prestations sont en disproportion manifeste avec la contre-prestation effectuée et les résultats de la société.

­

Interdiction de la participation croisée aux comités de rémunération d'entreprises cotées: enfin, l'art. 717b P-CO interdit que, dans une société dont les actions sont cotées en bourse, des membres du conseil d'administration ou de la direction siégeant également au conseil d'administration ou à la direction d'une autre société puissent influencer réciproquement le montant de leurs indemnités.

Compléments à la politique de rémunération selon le droit de la société anonyme Eu égard à la gravité de la crise financière et à la nécessité d'adopter des mesures destinées à renforcer le système financier suisse, le Conseil fédéral a décidé, le 22 octobre 2008, d'étayer encore plus solidement, par les éléments ci-après, les droits des actionnaires résultant du projet de révision du droit de la société anonyme: ­

10

Politique de rémunération du conseil d'administration de sociétés cotées: d'une part, les statuts de sociétés dont les actions sont cotées en bourse doivent impérativement régler les grands principes de la rémunération du FF 2008 1571 ss

8057

conseil d'administration, qui a en outre l'attribution intransmissible et inaliénable d'édicter un règlement régissant ses propres indemnités. D'autre part, il incombe impérativement à l'assemblée générale de ces sociétés de valider ledit règlement et d'approuver annuellement le montant total des indemnités versées aux membres du conseil d'administration.

­

Action en restitution de prestations indues: le projet prévoyait jusqu'ici l'obligation de restituer les prestations reçues dans la mesure où celles-ci sont en disproportion manifeste avec la contre-prestation effectuée et les résultats de la société. Dans la nouvelle version, les résultats de la société ne sont plus déterminants: il suffit qu'il y ait disproportion ­ même non manifeste ­ entre la prestation et la contre-prestation. De plus, le renvoi à l'art. 64 CO, qui protège celui qui a reçu une prestation indue de bonne foi et n'est plus enrichi lors de la demande de restitution, est supprimé. Enfin, le cercle des personnes habilitées à agir en restitution est élargi. Dorénavant, les créanciers possèderont aussi la légitimation active.

Se fondant sur les éléments ci-dessus, le Conseil fédéral va prochainement formuler définitivement les compléments de la révision du droit de la société anonyme et les soumettre au Parlement.

Amendé par ces nouvelles dispositions sur la politique de rémunération et sur l'action en restitution, le projet de révision du droit de la société anonyme couvre l'essentiel des exigences formulées dans l'initiative populaire fédérale «contre les rémunérations abusives»11.

3.1.4

Standards minimaux de la Commission fédérale des banques (CFB) applicables à la branche financière

La CFB prépare actuellement, à l'intention de la branche financière, une circulaire contenant des directives générales sur les systèmes de rémunération. En effet, des systèmes de rémunération appropriés sont à la fois un élément et une condition essentiels de la bonne organisation d'une banque. La CFB va donc présenter la manière dont elle applique les exigences propres à l'organisation d'une banque par voie de circulaire (art. 3, al. 2, let. a, LB; art. 7, al. 1, let. b, LFINMA). A l'avenir, le respect des dispositions de cette circulaire fera partie intégrante du processus de surveillance de la branche et la CFB, de même que les sociétés d'audit, vérifiera si ces règles sont appliquées et observées par les établissements. La CFB va élaborer ces règles en suivant son processus de régulation ordinaire, largement éprouvé, mais va également faire appel à la collaboration de spécialistes externes, du DFF et de la BNS. Une consultation publique devrait avoir lieu au premier trimestre 2009.

La nouvelle réglementation définira les objectifs d'un système de rémunération approprié. Ses prescriptions régiront les systèmes de rémunération non seulement des hauts dirigeants, mais encore des cadres dirigeants et des collaborateurs pouvant exposer l'établissement à des risques importants ou chargés de gérer de tels risques.

Pour la CFB, les composantes variables de la rémunération peuvent aussi être judicieuses, dans la mesure où elles permettent à l'entreprise d'adapter ses charges 11

L'initiative populaire fédérale «contre les rémunérations abusives» a été déposée le 26 février 2008 avec le nombre de signatures requis. Dans sa décision du 2 avril 2008, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait valablement abouti.

8058

salariales à la conjoncture en toute flexibilité. Les systèmes de rémunération ne doivent toutefois pas inciter à prendre des risques inappropriés. Il s'agit notamment, lors de la détermination du montant de la rémunération, de tenir compte des risques encourus au moyen de systèmes de bonus/malus ou du blocage à long terme des gratifications et de rendre ainsi les positions de risques trop agressives totalement inintéressantes. De plus, les systèmes de rémunération doivent aussi être axés sur les résultats à long terme de l'ensemble de l'entreprise, de l'unité d'organisation et du collaborateur. De fait, la rémunération individuelle doit déboucher sur une création de valeur durable pour l'entreprise et ne pas être dissociée de son résultat d'ensemble. On attend en outre des systèmes de rémunération qu'ils intègrent aussi des objectifs non financiers. Des critères tels que le respect des prescriptions en matière de conformité (compliance) ou l'attitude vis-à-vis des collègues et des clients doivent avoir un impact réel sur l'évaluation et la rémunération du collaborateur et non plus figurer uniquement sur le papier. Enfin, il faut que les systèmes de rémunération soient transparents, compréhensibles et vérifiables, faute de quoi l'effet recherché ne sera pas obtenu. Des organes de contrôle internes appropriés et l'autorité de contrôle en surveilleront régulièrement la mise en oeuvre et l'efficacité, toute irrégularité devant être détectée en temps utile et rapidement éliminée.

La CFB doit élaborer ces nouvelles règles en concertation avec les principales autorités de surveillance étrangères, compte tenu des réformes envisagées au niveau international ­ auxquelles elle prend d'ailleurs une part active. A défaut, les établissements financiers suisses exerçant une activité sur le plan international pourraient souffrir d'un grave désavantage concurrentiel dans leurs activités à l'étranger. Pour la même raison, ces règles doivent valoir non seulement pour l'UBS SA, mais encore pour tous les autres établissements financiers suisses, qui devront les appliquer opportunément en fonction de leur taille, de leur activité et de leur stratégie d'affaires. Il s'agit en outre de veiller à ce que le secteur soumis à surveillance ne soit pas désavantagé par rapport à d'autres acteurs du marché actuellement non
surveillés, comme les gérants de fortune. Enfin, il faudra déterminer si les nouvelles règles s'appliquent à toute la branche financière ou uniquement à certains de ses secteurs (p. ex. les banques) ou de ses entreprises (p. ex. les établissements exerçant une activité sur le plan international).

3.1.5

Injonctions à l'UBS SA et contrôle par la CFB

Dans les conventions signées avec la Confédération et la BNS, l'UBS SA s'est engagée à observer les prescriptions relatives aux systèmes de rémunération correspondant aux pratiques d'excellence et aux standards internationaux élaborés avec le concours de la CFB et actuellement examinées par un groupe de travail du Financial Stability Forum, auquel participe un représentant de la BNS. D'après la convention conclue avec la Confédération, ces injonctions concernent également l'indemnisation des membres du conseil d'administration.

Comme le montre une enquête de la CFB engagée l'été dernier, un peu plus de la moitié des indemnités versées par l'UBS SA en 2007 l'ont été à titre d' «indemnités variables liées à la performance». Plus de 98 % de ces indemnités variables, soit plus de dix milliards de francs, ont été payées à des collaborateurs et à des cadres dirigeants des niveaux inférieurs à la direction du groupe et au conseil d'administration.

En raison des mauvais résultats de l'exercice, les membres à plein temps du conseil 8059

d'administration n'ont pas reçu d'indemnité liée à la performance en 2007. Quant aux membres à temps partiel, ils perçoivent des honoraires fixes indépendants des résultats du groupe.

La proportion et le montant de la part variable du salaire diffèrent considérablement selon le domaine d'activité, la fonction et la position hiérarchique du collaborateur.

Pour ceux qui ne font pas partie des cadres de direction, la part variable équivaut généralement à un ou deux mois de salaire, jouant pour ainsi dire, du point de vue de la rémunération globale, un rôle secondaire. Plus la position est élevée dans la hiérarchie, plus la part variable est importante par rapport à la rémunération globale.

Souvent, la composante variable sert donc davantage à différencier les salaires plutôt qu'à rémunérer la performance ou les résultats. On utilise ainsi la marge de manoeuvre qu'offre la part variable du salaire pour proposer des conditions d'engagement compétitives et adapter la rémunération globale de chaque collaborateur à sa fonction et à ses compétences, tout en bénéficiant d'une certaine flexibilité en matière de coûts. Cette approche est celle de pratiquement toutes les divisions de la banque.

Toutefois, dans les marchés de première importance que sont la banque d'investissement et la gestion de fortune, les indemnités variables ont pris plus d'importance et atteint des montants beaucoup plus élevés. Une tendance semblable est observée dans la gestion de patrimoine depuis quelques années, surtout en ce qui concerne les conseillers à la clientèle. Dans ces domaines d'activité, la rémunération variable dépend pour l'essentiel du chiffre d'affaires et d'autres critères de prestation, qui ne tiennent guère compte des risques encourus ni de la nécessité d'assurer durablement le succès de l'entreprise. Aux Etats-Unis, dans le domaine de la gestion de patrimoine (PaineWebber), une part significative de la masse salariale variable est versée à quelque 8000 courtiers, qui perçoivent des commissions convenues contractuellement en sus d'un salaire de base comparativement modeste. Dans la banque d'investissement et la gestion de fortune, où les salaires fixes sont également assez moyens, la méthode appliquée pour calculer la rémunération variable peut conduire à des situations où la composante variable du salaire
représente un multiple du salaire de base et doit être versée même si le collaborateur ou son unité ont enregistré des pertes. En particulier en 2007, les indemnités variables payées dans ces deux domaines d'activité n'étaient guère en rapport avec la situation économique de la banque, ni avec les responsabilités en matière de pertes. Ainsi, les 21 000 collaborateurs de la banque d'investissement, dont une unité avait à répondre des pertes subies par le groupe UBS en 2007, se sont partagés 6,6 milliards de francs de rémunération variable, dont 4 milliards en espèces. Ces chiffres tenaient toutefois compte du fait que les autres unités de la banque d'investissement avaient réalisé de très bons résultats. Dans le domaine d'activité Global Wealth Management and Business Banking (y c. la gestion de patrimoine aux Etats-Unis), qui avait aussi réalisé de très bons résultats durant la même période, les indemnités variables versées aux 48 000 collaborateurs se sont élevées à 2,1 milliards de francs.

Parallèlement à l'élaboration de standards minimaux applicables à l'ensemble de la branche financière, la CFB suit de près, en vue de l'application des prescriptions du train de mesures, le processus d'adaptation du système de rémunération de l'UBS SA en cours au sein de la banque. Indépendamment du champ d'application des nouvelles directives, l'UBS SA devra, à la fin de 2008 déjà, faire évaluer son système de rémunération à la lumière du projet de nouvelle réglementation. Pour certains points, les injonctions imposées à l'UBS SA pourront aller au-delà des standards minimaux généraux. Il s'agit toutefois d'éviter que la banque ne soit 8060

gravement désavantagée par rapport à ses concurrents lors du recrutement de collaborateurs de valeur, que ce soit en Suisse ou à l'étranger. Si elle l'était, cela nuirait à sa future capacité bénéficiaire et mettrait en péril le succès du train de mesures, d'autant plus qu'UBS SA doit aujourd'hui déjà pouvoir compter sur du personnel hautement qualifié et expérimenté.

Néanmoins, eu égard au soutien qu'il lui apporte, l'Etat attend de l'UBS SA qu'elle fasse spontanément preuve de la retenue qui s'impose au vu des circonstances et qu'elle réduise la composante variable des salaires au strict minimum requis par sa politique d'entreprise. L'UBS SA va donc procéder à un remaniement complet de son système de rémunération. De plus, elle va fixer le montant total, la composition et la répartition des indemnités liées à la performance versées dans l'ensemble du groupe pour 2008 en concertation avec la CFB, qui devra en outre les approuver formellement. L'UBS SA communiquera toutes les informations utiles à cet effet à la CFB, sans restrictions, et le Conseil fédéral sera informé par cette dernière de façon appropriée. Par ailleurs, la banque examinera s'il existe une base légale lui permettant d'exiger la restitution des bonus versés aux hauts dirigeants ces dernières années. Enfin, l'UBS SA a constitué un groupe de travail chargé d'inciter les personnes concernées à restituer spontanément ces bonus.

Ces prochaines semaines, la CFB va examiner en détail les changements en profondeur que l'UBS prévoit d'apporter à son système de rémunération, en faisant appel, au besoin, à des experts externes. Elle va aussi exiger, si possible en concertation avec des autorités de surveillance étrangères, que les systèmes d'incitation contraires au principe de durabilité en vigueur surtout dans le domaine de la banque d'investissement soient modifiés. La responsabilité de la politique de rémunération et de la fixation des indemnités individuelles des membres de la haute direction reste néanmoins au conseil d'administration. Elle ne passe pas à la CFB, car celle-ci n'est pas responsable devant les actionnaires.

3.2

Durcissement des exigences de fonds propres pour les grandes banques

En comparaison internationale, la CFB, soucieuse de la «qualité suisse», a toujours eu vis-à-vis des établissements placés sous sa surveillance des exigences minimales plus sévères qu'à l'étranger en matière de fonds propres (premier pilier). Cette application relativement conservatrice des prescriptions régissant les fonds propres s'est poursuivie même après le passage à Bâle II (2007/2008). De plus, la CFB exige aussi que toutes les banques se dotent, en guise de coussin amortisseur, de fonds propres additionnels excédant de 20 % (valeur cible) les exigences minimales, afin de couvrir les risques non pris en compte par ces dernières et d'en garantir le respect même dans des circonstances défavorables (deuxième pilier).

En août 2007, tirant les premières leçons de la crise financière, la CFB avait déjà modérément augmenté la valeur cible de ces capitaux additionnels pour les grandes banques, en raison de l'importance systémique de ces dernières.

Entre-temps, la crise s'est encore aggravée, de sorte que les positions de marché les plus risquées n'ont pas résisté, provoquant des pertes dépassant les pires conjectures.

En particulier, les pertes des banques d'investissement ­ principalement de l'UBS SA, mais aussi, dans une moindre mesure, de Credit Suisse ­ ont atteint une 8061

ampleur telle que même le régime des fonds propres de «qualité suisse» de la CFB, pourtant réputé conservateur, est soudainement apparu comme insuffisant. Or, il faut partir de l'idée que d'autres crises se produiront à l'avenir. Certes, les matelas de fonds propres, aussi épais soient-ils, n'empêcheront pas qu'elles ne surviennent, mais ils augmentent la capacité de résistance du système financier en jouant le rôle d'amortisseur et en empêchant que les acteurs du marché ne subissent des pertes fatales. La crise actuelle a dramatiquement mis en évidence que les deux grandes banques suisses, eu égard à leur énorme importance pour le système financier suisse, doivent impérativement disposer d'un bouclier de sécurité nettement plus solide, afin d'éviter de mettre en difficulté non seulement leurs créanciers, mais encore toute l'économie du pays. La défaillance d'une grande banque ne peut être supportée par le fonds alimenté par les autres banques.

C'est pourquoi, afin de garantir que les exigences minimales de fonds propres soient respectées même en temps de crise, la CFB exige que la dotation en fonds propres soit sensiblement renforcée à l'avenir. En étroite collaboration avec la BNS, elle a déjà mis en oeuvre les mesures nécessaires auprès des grandes banques suisses. Deux instruments se complétant mutuellement sont au coeur de cette démarche: un supplément de fonds propres pondérés en fonction du risque et une limitation du taux d'endettement indépendante du risque (levier financier).

L'exigence relative aux fonds propres additionnels pondérés en fonction du risque s'applique au moyen d'un renforcement à hauteur de 100 % des fonds propres constitués au titre du deuxième pilier et s'exprime par une valeur cible de fonds propres de 200 %. Les valeurs cibles fixées au titre du deuxième pilier permettent d'agir avec davantage de flexibilité que si l'on décidait d'augmenter de façon contraignante les exigences minimales du premier pilier. Cette flexibilité est indispensable si l'on veut profiter de l'effet anticyclique stabilisateur escompté, consistant à utiliser les fonds propres supplémentaires constitués pendant les périodes favorables pour limiter les pertes subies pendant les périodes de crise. La CFB a fixé une valeur cible de fonds propres de 150 % comme limite inférieure de la marge de
manoeuvre anticyclique.

La crise financière a également mis en évidence des points faibles manifestes dans les grandeurs de mesure servant à fixer les exigences de fonds propres. En particulier les modèles de couverture des risques de marché dans le portefeuille de négoce se sont révélés inutiles en termes de prévention, dans la mesure où, en période favorable, ils prescrivent des fonds propres totalement insuffisants. Ils tendent en particulier à avoir un effet procyclique et présentent une forte dépendance unilatérale vis-à-vis de modèles quantitatifs axés sur des événements passés et ne garantissant pas par conséquent une protection efficace et en temps utile des fonds propres contre les chutes soudaines et abruptes de valeur et de liquidité. L'exigence de fonds propres en fonction du risque sera donc complétée à l'avenir par un plafonnement indépendant du risque de la part du bilan financée par des capitaux étrangers. Correspondant au rapport entre les fonds propres de base et le total du bilan, le levier financier doit être au moins de 3 % au niveau du groupe et de 4 % au niveau de chaque établissement, étant entendu qu'en période favorable, les valeurs cibles se situent nettement au-dessus de ces minima. Afin de ne pas entraver les affaires de crédit domestiques des deux grandes banques, essentielles pour l'économie nationale, les crédits octroyés en Suisse ne sont pas pris en considération dans le levier financier, ce qui signifie qu'ils sont déduits du total du bilan avant le calcul du taux d'endettement.

8062

Valables sur le plan international, les directives de Bâle II et leur concept des deux piliers prévoient que les banques, pour être à même de remplir les exigences minimales de fonds propres même lorsque les conditions sont défavorables ou que des risques n'ont pas été pris en compte, doivent disposer de fonds propres additionnels ou que d'autres mesures particulières soient prises. En Suisse, la base légale de l'application de ces mesures est constituée par l'art. 4, al. 3, LB et par l'art. 34, al. 3, de l'ordonnance du 29 septembre 2006 sur les fonds propres (OFR; RS 952.03), qui habilitent la CFB à renforcer les exigences minimales de fonds propres dans des cas particuliers. Fin novembre 2008, la CFB fixera les nouvelles exigences minimales de fonds propres posées aux deux grandes banques suisses par voie de décision. Ces exigences devront être remplies d'ici à 2013, en fonction de l'évolution des résultats des deux établissements. Un accord sur les valeurs clés de la décision a déjà été trouvé avec Credit Suisse. Il en sera prochainement de même avec l'UBS SA.

3.3

Renforcement de la protection des déposants

Compte tenu du relèvement de la garantie des dépôts bancaires décidée par de nombreux Etats dans le monde entier ainsi que des points faibles reconnus de la protection des déposants dans notre pays, il est indispensable de prendre des mesures dans ce domaine également. Le Conseil fédéral a donc chargé le DFF d'améliorer le système suisse de protection des déposants en deux étapes. Premièrement, à titre de mesure immédiate, le Conseil fédéral entend soumettre aux Chambres fédérales, durant la session d'hiver et en même temps que le présent message, un message portant sur une modification de la loi sur les banques (renforcement de la protection des déposants). Ce message prévoit notamment un relèvement significatif des dépôts protégés ainsi qu'une adaptation de la limite supérieure du système. Conjointement avec l'exigence plus stricte posée aux banques de disposer d'une couverture pour les dépôts privilégiés, ces mesures renforcent sensiblement la protection des dépôts, y compris dans les grandes banques. Si une banque suisse importante pour le système financier devait néanmoins connaître de sérieuses difficultés, d'autres mesures de soutien plus étendues seraient examinées dans le cas particulier.

Dans la seconde étape, il s'agira de réviser en profondeur le système de garantie des dépôts. Le Conseil fédéral attend du DFF qu'il lui soumette un projet de réforme d'ici au printemps 2009.

3.4

Garantie des engagements des banques sur le marché des capitaux

Les mesures prises par les autorités étrangères pour garantir les engagements des banques sur les marchés monétaire, des capitaux et interbancaire ont des effets contradictoires dans notre pays. D'un côté, elles stabilisent l'environnement dans lequel opèrent également nos banques. De l'autre, elles peuvent discriminer ces dernières sur les marchés précités, où elles sont en concurrence directe avec les banques étrangères bénéficiant de la garantie de leur pays. Selon les circonstances, il pourrait en résulter des difficultés de refinancement pour nos banques.

Lors de ses délibérations sur les mesures destinées à stabiliser le système financier, le Conseil fédéral s'est donc également penché sur cette question. Ainsi, si les ban8063

ques suisses devaient avoir des problèmes de refinancement sur les marchés monétaire, des capitaux et interbancaire, le Conseil fédéral est disposé, si nécessaire, à garantir les nouveaux engagements des banques suisses, pris par exemple sous la forme de reconnaissances de dette à moyen terme. La somme de garantie mise à disposition dépendrait des besoins concrets du système bancaire. Le but d'une telle mesure serait de faciliter le refinancement des banques et d'en augmenter la stabilité par la prolongation des échéances de leurs passifs. Le cas échéant, les modalités détaillées en seraient rapidement fixées et communiquées.

4

Contenu de l'arrêté financier

Le projet d'arrêté fédéral concernant un crédit pour la recapitalisation de l'UBS SA est un arrêté financier non sujet au référendum (pour la forme de l'acte, cf. ch. 7.3).

Il comprend les deux éléments ci-dessous.

D'une part, il s'agit d'approuver après-coup le crédit provisoire ordinaire décidé par le Conseil fédéral avec l'assentiment de la Délégation des finances, afin de libérer l'emprunt à conversion obligatoire (art. 1 du projet). Le crédit doit être autorisé en tant que crédit supplémentaire imputé au supplément II du budget 2008. Le versement prévu en faveur de l'UBS SA est une contribution fédérale à caractère d'investissement. En vertu de l'art. 20, al. 1, let. b, de OFC, il y a donc lieu d'adopter un crédit d'investissement sous la désignation d'«emprunt à conversion obligatoire de l'UBS». Etant donné qu'elle ne poursuit pas des fins de placement, la contribution fédérale doit être portée à l'actif du patrimoine administratif, conformément à l'art. 3, al. 1, let. b, LFC.

En vertu de l'art. 25, al. 3, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl; RS 171.10), l'Assemblée fédérale peut en outre définir dans les décisions de crédit les conditions-cadres de l'utilisation du crédit et le compte-rendu du Conseil fédéral.

Sur la base de cette disposition, l'art. 2 du projet confirme le devoir de l'UBS SA de respecter les injonctions du Conseil fédéral en matière de gouvernement d'entreprise (cf. ch. 2.3.3, 2.3.4 et 3.1 du présent message). Un poids accru est ainsi donné à l'art. 2, let. d, de l'ordonnance du 15 octobre 2008 relative à la recapitalisation de l'UBS SA (cf. ch. 2.3.2).

Dans l'art. 3 du projet d'arrêté fédéral, il est en outre proposé à l'Assemblée fédérale de relever de 6 milliards de francs le plafond des dépenses totales pour 2008 en raison du besoin financier exceptionnel (cf. ch. 5.2.1).

5

Conséquences

5.1

Conséquences pour le bilan de la BNS et pour le potentiel de distribution de son bénéfice

La BNS finance le prêt octroyé à la société à but spécial non pas en recourant à ses propres actifs ou aux réserves monétaires, mais en empruntant des dollars US soit directement auprès de la Réserve fédérale américaine (Fed), soit sur le marché. Les valeurs patrimoniales ainsi acquises sont portées à l'actif de son bilan.

Le prêt accordé est garanti par la valeur totale des actifs de la société à but spécial.

Les pertes jusqu'à 10 % du total des placements de la société sont couvertes par les 8064

fonds propres de cette dernière. Au-delà, les pertes entraînent un amortissement du prêt et, par conséquent, une perte de valeur des actifs de la BNS. De façon générale, les risques liés aux placements (futures variations de valeur) dépendent fortement de l'évolution des marchés sous-jacents, en particulier du marché immobilier aux EtatsUnis et en Europe, et sont donc actuellement difficiles à estimer.

Le prêt est rémunéré au taux du marché monétaire à court terme, augmenté d'une prime de risque de 250 points de base. Or, étant donné que la BNS devrait pouvoir emprunter les fonds de tiers nécessaires à des taux nettement inférieurs, la marge d'intérêts qui en résultera l'indemnisera des risques encourus. Si, comme prévu, l'emprunt contracté et le prêt octroyé par la BNS sont libellés en dollars US, tout risque de change est exclu.

L'influence des mesures adoptées sur le potentiel de distribution du bénéfice de la BNS dépend essentiellement de l'évolution à long terme de la valeur de la société à but spécial. En cas de faible variation de valeur, la marge d'intérêts assurera des recettes supplémentaires à la BNS, qui verra ainsi son potentiel de distribution du bénéfice provisoirement amélioré. Toutefois, si elles excèdent 10 %, les pertes de valeur se traduiront par une diminution de la réserve pour distributions futures et, dans le pire des cas, par une suspension temporaire de la distribution du bénéfice de la BNS à la Confédération et aux cantons. En revanche, si la valeur de la société à but spécial évolue positivement, la BNS encaissera, lors de la dissolution de la société, dans tous les cas le premier milliard de francs de fortune nette résiduelle de la société, plus la moitié de la fortune nette excédant ce montant, ce qui entraînera une amélioration temporaire de son potentiel de distribution du bénéfice.

5.2

Conséquences pour la Confédération et les cantons

5.2.1

Conséquences de la souscription de l'emprunt à conversion obligatoire pour les finances de la Confédération

Pour la Confédération, la souscription de l'emprunt à conversion obligatoire de l'UBS se traduit par une dépense de 6 milliards de francs imputée au supplément II du budget 2008. La crise financière et les problèmes qui en découlent pour l'UBS SA sont des événements extraordinaires échappant au contrôle de la Confédération au sens de l'art. 15, al. 1, let. a, LFC. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose que les besoins financiers liés à la souscription de l'emprunt à conversion obligatoire soient reconnus comme exceptionnels au sens du frein à l'endettement.

Conformément à l'art. 159, al. 3, let. c, Cst., l'augmentation requise du plafond de dépenses totales doit être adoptée par l'Assemblée fédérale à la majorité qualifiée (adoption à la majorité des membres de chaque conseil).

Cette dépense extraordinaire ne devrait toutefois pas entraîner une augmentation durable de la dette de la Confédération, car elle sera compensée par le produit net des intérêts ­ les prévisions sont d'environ 600 millions de francs par année pendant deux ans et demi, en espèces ou en actions ­ et par celui de la vente ultérieure de l'emprunt ou des actions. Résultant directement de l'engagement exceptionnel de la Confédération, ces recettes doivent aussi être considérées comme extraordinaires, conformément à l'art. 13, al. 2, LFC.

8065

Afin de stabiliser la dette nominale de la Confédération, le Conseil fédéral et le Parlement ont choisi jusqu'ici de compenser les déficits du budget extraordinaire par les excédents structurels du budget ordinaire. Dans ce contexte, le Conseil fédéral a soumis au Parlement, le 19 septembre 2008, un projet de révision de la LFC visant à institutionnaliser cette pratique (message sur la règle complétant le frein à l'endettement; FF 2008 7693). Il propose de créer un compte, appelé compte d'amortissement, et de porter les dépenses extraordinaires au débit et les recettes extraordinaires au crédit de ce compte. Si le solde du compte d'amortissement est négatif, le Conseil fédéral et le Parlement sont tenus d'éliminer le découvert dans les six ans par des excédents structurels du budget ordinaire. Le Conseil fédéral prévoit de mettre en vigueur cette règle complémentaire le 1er janvier 2010.

La modification prévue de la loi n'ayant pas d'effet anticipé, l'imputation de l'emprunt à conversion obligatoire de l'UBS au budget extraordinaire ne tombe pas encore sous le coup de la règle complétant le frein à l'endettement. En d'autres termes, ni la dépense extraordinaire de 6 milliards de francs, ni les recettes extraordinaires escomptées ne doivent être portées respectivement au débit et au crédit du compte d'amortissement.

Au demeurant, la non-imputation au compte d'amortissement s'impose aussi en vertu de l'application par analogie de la règle complétant le frein à l'endettement.

Dans le projet de loi, le Conseil fédéral propose en effet que les recettes extraordinaires affectées en vertu de la loi ne soient pas inscrites dans le compte d'amortissement. A contrario, les dépenses extraordinaires couvertes par ces recettes ne doivent pas y figurer non plus (cf. art. 17a, al. 2, P-LFC; FF 2008 7743). Cette disposition vise à éviter que les dépenses et les recettes extraordinaires entre lesquelles existe un lien de connexité clairement établi par la loi ne faussent l'état du compte d'amortissement, amenant à prendre des décisions inutiles ou erronées en matière de politique budgétaire. Or, ce lien de connexité existe aussi entre les dépenses extraordinaires liées à l'emprunt à conversion obligatoire et les recettes provenant des intérêts et de la cession de titres, même s'il n'y a pas ici d'affectation en
vertu de la loi à proprement parler.

S'il apparaît au plus tôt dès 2011 que les recettes provenant des intérêts et de la cession de titres ne suffisent pas à refinancer la dépense d'investissement initiale occasionnée par l'emprunt à conversion obligatoire, l'écart résiduel pourra être compensé par des excédents structurels du compte de financement ordinaire. Le Conseil fédéral informera régulièrement le Parlement, dans le message concernant le compte d'Etat, de l'état de l'amortissement des dépenses liées à l'emprunt à conversion obligatoire de l'UBS.

5.2.2

Distribution du bénéfice de la BNS à la Confédération et aux cantons

L'élimination des actifs illiquides du bilan de l'UBS SA par la BNS (cf. ch. 5.1) peut avoir des conséquences sur la distribution du bénéfice de cette dernière et, partant, sur les finances de la Confédération et des cantons. En vertu des art. 99 Cst.

et 31 de la loi du 3 octobre 2003 sur la Banque nationale (LBN; RS 951.11), la part du bénéfice annuel de la BNS restant après le versement du dividende revient pour un tiers à la Confédération et pour deux tiers aux cantons.

8066

Le bénéfice annuel de la BNS pouvant être versé est déterminé comme suit: la BNS constitue, par prélèvement sur le résultat de l'exercice, des provisions suffisantes pour maintenir les réserves monétaires au niveau requis par la politique monétaire; la part du bénéfice annuel restant après l'attribution aux réserves du montant fixé par la BNS représente le bénéfice pouvant être distribué (art. 30 LBN).

La convention du 14 mars 2008 conclue entre le DFF et la BNS afin d'assurer la constance à moyen terme de la distribution du bénéfice prévoit que la BNS distribue, au titre des exercices 2008 à 2017, un montant annuel de 2,5 milliards de francs. La part du bénéfice annuel excédant ce montant alimente la réserve pour distributions futures, qui joue le rôle d'amortisseur: soit le bénéfice annuel non distribué lui est attribué, soit le montant manquant pour la distribution en est prélevé. La convention doit faire l'objet d'un réexamen si, lors d'un exercice, la réserve devient négative après affectation du bénéfice. En pareil cas, la distribution est réduite si, après affectation du bénéfice, la réserve pour distributions futures devait passer au-dessous de moins 5 milliards de francs. Elle est totalement suspendue si, après affectation du bénéfice, la réserve passe au-dessous de moins 5 milliards de francs, même sans distribution. Au reste, la convention doit faire l'objet d'un réexamen au plus tard en vue de la distribution au titre de l'exercice 2013.

Après l'attribution au titre de l'exercice 2007, autrement dit après affectation du bénéfice, la réserve pour distributions futures s'élevait à 22,9 milliards de francs. Au vu de l'évolution de la situation en 2008, il y a lieu de prévoir qu'elle diminuera.

La Confédération et les cantons ne subiront de perte de recettes que si, en raison de l'évolution du marché ou d'une perte de valeur extrême de la société à but spécial, la réserve pour distributions futures diminue au point que la distribution doive être réduite ou totalement suspendue, comme décrit plus haut. La Confédération et les cantons inscrivent dans leurs budgets annuels et leur planification financière, au titre de la distribution du bénéfice de la BNS, des montants de respectivement 833 et 1167 millions de francs. Ces montants correspondent donc au risque maximal de perte de recettes
auquel ils sont exposés. Si ce risque se réalisait, la Confédération réduirait d'autant le plafond des dépenses autorisé par le mécanisme du frein à l'endettement, car les distributions de bénéfice de la BNS sont réputées être des recettes ordinaires. Toutefois, eu égard au solde élevé que présente actuellement la réserve pour distributions futures, il est improbable que le train de mesures entraîne la réduction ou la suspension des distributions annuelles de bénéfice dans un proche avenir. Si, contre toute attente, cela devait néanmoins être le cas, le Conseil fédéral, en concertation avec les cantons, élaborerait des solutions visant à répartir les charges équitablement.

5.3

Conséquences économiques du train de mesures

En cette période de grande incertitude et de perte de confiance entre banques, le train de mesures vise à renforcer durablement le système financier suisse. Favorisant le développement global de notre économie, la stabilisation qui en résultera est indubitablement dans l'intérêt du pays. C'est d'autant plus vrai qu'en comparaison internationale, l'économie suisse dépend plus fortement du secteur bancaire que la moyenne des autres pays et que les deux principales banques suisses jouent un rôle extraordinairement important dans la performance économique du pays. Au vu de

8067

l'ordre de grandeur du coût économique qu'aurait une défaillance de l'UBS SA (cf. ch. 1.2), le présent train de mesures est incontournable.

Le train de mesures n'aura pas d'effet significatif sur les conditions monétaires. Pour ce qui est du prêt de la BNS à la société à but spécial, il faut rappeler que l'opération se fait exclusivement en dollars US. Initialement, la BNS se procurera elle-même les dollars par un swap auprès de la Réserve fédérale américaine. Plus tard, elle refinancera le prêt sur le marché. Comme l'opération ne fait intervenir que des dollars US, elle ne devrait avoir aucun effet sur les taux d'intérêt, sur la base monétaire, sur le taux de change, sur le niveau des prix ou encore sur le taux d'inflation en Suisse.

Tous les actifs de la société à but spécial étant libellés en monnaies étrangères (principalement en dollars US), leur liquidation progressive se fera contre des devises étrangères, donc également sans impact sur le marché monétaire suisse. A long terme, si l'opération devait se solder par un résultat non nul pour la BNS (perte ou participation au bénéfice), la réserve pour distributions futures s'en trouverait influencée. Le résultat en question sera bien sûr converti en francs suisses dans un lointain avenir, mais comme on ne peut prédire s'il sera positif ou négatif, il est impossible aujourd'hui d'en prévoir l'impact monétaire.

Quant à l'emprunt à conversion obligatoire, le montant de 6 milliards de francs est certes considérable, mais il ne représente qu'une fraction de la dette publique existante. En outre, la Confédération entend revendre sa participation à moyen terme, si bien qu'il n'y aura pas d'augmentation durable de sa dette. On peut dès lors admettre que l'effet du train de mesures sur le rendement attendu des obligations de la Confédération sera négligeable. Pour ce qui est de l'UBS SA, on peut partir de l'idée qu'une partie au moins de l'emprunt sera converti en dollars, mais comme les sommes en jeu sont relativement modestes par rapport à la taille du marché des changes, l'effet sur le taux de change peut lui aussi être qualifié d'insignifiant. Il n'y a pas lieu de penser non plus que cette opération aurait le moindre effet sur la base monétaire. Dans tous les cas, la BNS dispose des moyens pour neutraliser toute augmentation non désirée des giros
bancaires.

En résumé, on peut s'attendre à ce que l'impact direct des mesures prises en faveur de l'UBS SA sur les conditions monétaires soit inexistant, ou du moins insignifiant.

En particulier, il n'y a pas lieu de penser que ces opérations puissent avoir un effet inflationniste. Cela est d'ailleurs aussi vrai pour les autres mesures récemment prises par la BNS en vue de relancer le fonctionnement des marchés financiers, même si elles s'accompagnent d'une augmentation de la base monétaire. En effet, les liquidités nouvellement créées répondent à une augmentation de la demande de monnaie due à des réallocations de portefeuille, tant de la part des investisseurs privés que des investisseurs publics. En revanche, si les mesures prises rencontrent le succès escompté et si la confiance en l'UBS SA et dans le système bancaire est rétablie, on est en droit de s'attendre à une détente sur les marchés monétaires et financiers. Une baisse des primes de risque et la reprise des opérations interbancaires seraient à même de soutenir la conjoncture, écartant du même coup la menace d'une politique restrictive dans l'octroi des crédits bancaires. On assisterait certes à un recul moins rapide de l'inflation que si la crise devait perdurer, mais si aucune mesure n'était prise pour renforcer le système financier, les conséquences pour les conditions monétaires en Suisse pourraient être dramatiques.

Enfin, on ne peut ignorer le risque d'aléa moral (moral hazard) qui découle du train de mesures. On entend par là le fait que les acteurs économiques, sachant que l'Etat volera à leur secours en cas de difficultés, peuvent être tentés de prendre davantage 8068

de risques. La conception du train de mesures, en particulier les injonctions imposées à l'UBS SA, tient compte de ce danger. Le durcissement prévu des prescriptions en matière de fonds propres et de liquidités est également de nature à limiter le risque d'aléa moral.

6

Liens avec le programme de législature

Le projet n'est pas annoncé dans le message sur le programme de législature 2007 à 2011. En particulier, il ne figure pas dans le programme législatif du Conseil fédéral12. Toutefois, dans la situation de crise actuelle, il crée de meilleures conditionscadre pour le secteur financier et correspond par conséquent à la mesure mentionnée à l'art. 2, ch. 11, de l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de législature 2007 à 2011 (FF 2008 7745).

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

Le projet repose sur l'art. 167 Cst. selon lequel l'Assemblée fédérale vote les dépenses de la Confédération, établit le budget et approuve le compte d'Etat. Dans le cas présent, il s'agit d'approuver après-coup un crédit supplémentaire décidé par le Conseil fédéral selon la procédure d'urgence prévue à l'art. 34 LFC.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

7.2.1

Obligations envers l'UE

La Suisse n'a pas conclu d'accord général sur les services avec l'Union européenne (UE). Les dispositions sur l'aide publique de l'art. 23, al. 1 iii, de l'accord sur le libre-échange conclu le 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne (RS 0.632.401) ne s'appliquent qu'aux échanges de marchandises. Ceux-ci n'étant pas touchés, aucune obligation de droit international envers l'UE n'est concernée par le train de mesures de la Confédération.

7.2.2

Liens avec le droit européen

Etant donné que les banques suisses opèrent sur le marché européen et, inversement, les banques européennes sur le marché suisse, la compatibilité des mesures adoptées avec le droit européen présente une certaine importance politique.

Le 7 octobre 2008, le Conseil ECOFIN a décidé de prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir la confiance dans le secteur financier et pour renforcer la stabilité du système bancaire. Il a également fixé les principes opérationnels régissant ces mesures. Ceux-ci stipulent notamment que les interventions doivent être 12

FF 2008 639, notamment 705 ss.

8069

réalisées en temps opportun, que le soutien apporté doit être temporaire et qu'il y a lieu d'être attentif aux intérêts des contribuables.

Ces principes opérationnels sont complétés par les dispositions relatives aux aides d'Etat du traité CE, juridiquement contraignantes.

Le contrôle communautaire des aides d'Etat se fonde sur une procédure d'autorisation préalable: les Etats membres de l'UE sont tenus d'informer la Commission européenne de tout projet tendant à instituer ou à modifier une aide d'Etat («notification ex ante») et ne sont pas autorisés à mettre en exécution cette aide avant d'y avoir été autorisé par la Commission («clause de suspension»)13. Ne sont toutefois interdites que les aides d'Etat favorisant de façon sélective certains groupes ou entreprises.

Dans sa communication du 13 octobre 2008 sur l'application des dispositions régissant les aides d'Etat aux mesures adoptées en faveur des établissements financiers touchés par la crise financière internationale («Communication from the Commission ­ The application of State aid rules to measures taken in relation to financial institutions in the context of the current global financial crisis»), la Commission fait aux Etats membres des recommandations sur la manière d'intervenir en faveur des établissements financiers sans enfreindre les règles en vigueur en matière d'aides d'Etat. Elle y confirme que les aides sont appréciées conformément à l'art. 87, par. 3, points b) et c) du traité CE. En vertu de cette base légale, les aides d'Etat sont autorisées lorsqu'elles sont destinées à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un Etat membre. La Commission a prévu une procédure d'urgence qui lui permet de vérifier rapidement (en moins de 24 heures) si les mesures d'aide prévues sont conformes à ses recommandations. Celles-ci ­ adaptées à la crise financière ­ reposent sur les principes suivants: ­

Les mesures doivent être appliquées de façon non discriminatoire et sur la base de critères objectifs (non selon la nationalité).

­

L'autorisation de l'Etat doit être limitée.

­

L'étendue du soutien de l'Etat doit être clairement définie et ne pas aller audelà de ce qui est nécessaire pour surmonter la phase aiguë de la crise. Les actionnaires ou les établissements financiers ne doivent en aucun cas tirer un profit injustifié des aides d'Etat au détriment des contribuables.

­

Le secteur privé doit contribuer de manière appropriée à l'effort public et verser une contrepartie adéquate pour les mesures générales de soutien mises en oeuvre. De plus, il doit dans tous les cas assumer une part importante des coûts occasionnés par le soutien accordé.

­

Les mesures doivent prévoir un code de conduite destiné à leurs bénéficiaires, de manière à exclure toute utilisation abusive du soutien de l'Etat.

­

Les mesures d'aide doivent être suivies de mesures de restructuration du secteur financier dans son ensemble ainsi que de certains établissements destinataires du soutien de l'Etat.

Un examen sommaire a montré qu'il y a conformité entre le train de mesures prévu en Suisse et les principes opérationnels fixés par le Conseil ECOFIN ainsi que la législation européenne sur les aides étatiques.

13

Cf. Vade-mecum sur les règles communautaires applicables aux aides d'Etat, p. 7.

8070

7.2.3

Liens avec la législation de l'OMC et avec les accords de libre-échange hors d'Europe

En ce qui concerne la législation de l'OMC, le train de mesures suisse entre dans le champ d'application de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS).

Aux termes du ch. 2, let. a, de l'Annexe sur les services financiers «un Membre ne sera pas empêché de prendre des mesures pour des raisons prudentielles, y compris [...] pour assurer l'intégrité et la stabilité du système financier». Les mesures concernant l'UBS SA, dont la fonction systémique est cruciale pour la place financière suisse, entrent dans la catégorie de ces mesures propres à assurer l'intégrité et la stabilité du système financier. Le train de mesures est donc compatible avec l'AGCS, pour autant que les banques étrangères domiciliées en Suisse bénéficient du même traitement si elles revêtent une fonction systémique comparable pour la place financière helvétique. Une clause analogue au ch. 2, let. a, de l'Annexe sur les services financiers de l'AGCS figure aussi dans les accords de libre-échange qui comportent des dispositions particulières concernant le commerce des services financiers.

7.2.4

Compatibilité avec les pratiques internationales

Le train de mesures proposé est compatible avec les initiatives internationales en cours ainsi qu'avec les recommandations des organismes internationaux (cf. ch. 1.1.2). Avec ce train de mesures, qui s'ajoute aux interventions coordonnées de la BNS avec ses homologues internationaux, la Suisse fournit un effort supplémentaire important pour renforcer le système financier international.

7.3

Forme de l'acte

En vertu de l'art. 25, al. 1 de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl; RS 171.10), les Chambres fédérales arrêtent les charges et les dépenses d'investissement au moyen du budget et de ses suppléments. Elles prennent les décisions en question sous la forme d'arrêtés fédéraux simples (al. 2). L'approbation d'un crédit a posteriori est également une décision financière qui doit revêtir la forme d'un arrêté fédéral simple, qui n'est donc pas sujet au référendum.

7.4

Assujettissement au frein aux dépenses

Selon l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., les dispositions relatives aux subventions, ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs (frein aux dépenses).

Dans le présent message, le Conseil fédéral sollicite l'approbation a posteriori d'un crédit d'investissement ayant des incidences sur les dépenses. Il ne s'agit donc ni d'une subvention ni de l'octroi d'un crédit d'engagement ou de l'ouverture d'un

8071

plafond de dépenses. Indépendamment des seuils fixés dans la Constitution, le projet n'est donc pas soumis au mécanisme du frein aux dépenses.

En revanche, l'art. 2 de l'arrêté fédéral soumis au Parlement prévoit un relèvement du plafond des dépenses totales conformément au mécanisme du frein à l'endettement inscrit à l'art. 126, al. 3, Cst. et précisé à l'art. 15 LFC (pour plus détails, cf. ch. 5.2.1). En vertu de l'art. 159, al. 3, let. c, Cst., cette disposition nécessite donc une décision prise à la majorité des membres de chaque conseil.

7.5

Compatibilité avec la loi sur les subventions

Le crédit dont l'approbation est sollicitée repose sur l'ordonnance du 15 octobre 2008 relative à la recapitalisation de l'UBS SA (RS 611.055). Aux termes de l'art. 2 de cette ordonnance, l'engagement de la Confédération est subordonné à certaines conditions, parmi lesquelles figure le principe de subsidiarité. Le Conseil fédéral a aussi tenu compte des principes de l'intérêt public, de la rationalité, de l'efficacité et de la limitation dans le temps. Les exigences posées aux art. 6 et 7 de la LSu en matière d'octroi d'aides financières sont donc satisfaites.

7.6

Délégation de compétences législatives

Pour édicter l'ordonnance relative à la recapitalisation de l'UBS SA, le Conseil fédéral s'est appuyé directement sur la Constitution. L'ordonnance elle-même ne comporte toutefois aucune délégation de compétence législative.

7.7

Considérations juridiques sur la reprise des actifs illiquides de l'UBS SA par la BNS

Pour réaliser cette transaction, la BNS s'est fondée sur les art. 5, al. 2, let. e, et 9, al. 1, let. e, LBN. Conformément à l'art. 5, al. 2, let. e, LBN, la BNS a pour tâche de contribuer à la stabilité du système financier. Cette disposition fonde le droit de la Banque nationale d'injecter des liquidités dans une banque à titre exceptionnel lorsque celle-ci ne peut plus se refinancer sur le marché. A noter toutefois que la banque centrale peut uniquement octroyer des aides sous forme de liquidités mais en aucun cas pour lutter contre un risque d'insolvabilité. Pour accorder une aide contre le risque d'insolvabilité, le Conseil fédéral s'est appuyé sur les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, Cst. (cf. ch. 2.3.6.2). La transaction entre la BNS et l'UBS SA n'est certes pas une injection de liquidités à proprement parler dans la mesure où elle implique le transfert définitif des risques à la BNS. Sa composante de trésorerie n'en est pas moins prédominante puisqu'aux termes de la transaction l'UBS SA pourra échanger des actifs illiquides d'une valeur approximative de 60 milliards de dollars US contre des actifs liquides. La recapitalisation de l'UBS SA, qui était l'une des conditions posées par la BNS pour conclure la transaction, est quant à elle prise en charge par la Confédération. La transaction est donc conforme au mandat de stabilisation du système financier suisse que la loi confère à la BNS.

Pour permettre à la Banque nationale d'accomplir son mandat légal (art. 5, al. 1 et 2 LBN), l'art. 9, al. 1, let. e, LBN autorise l'institut d'émission à effectuer des opéra8072

tions de crédit avec des banques et d'autres intervenants sur les marchés financiers, pour autant que les prêts soient assortis de garanties suffisantes. Conformément aux Directives de la BNS sur les instruments de politique monétaire, la BNS peut fournir une aide extraordinaire sous forme de liquidités en se fondant sur l'art. 9, al. 1, let. e, LBN. Ces directives, de même que la Note sur les titres admis par la BNS dans ses pensions, définissent les critères qui permettent de déterminer quelles garanties sont «suffisantes» dans le cadre des opérations ordinaires de politique monétaire. Seuls les instruments financiers négociables et très liquides remplissent les exigences requises. Il n'existe cependant pas de règle générale pour déterminer quelles garanties pourraient être considérées comme suffisantes dans le cadre d'une aide extraordinaire sous forme de liquidités.

Selon sa pratique, dans le cadre d'une aide extraordinaire sous forme de liquidités la BNS peut aussi accepter des garanties qui ne présentent pas le même degré de liquidité que celui requis pour les opérations ordinaires de politique monétaire. En revanche, aucune concession n'est admise en ce qui concerne la valeur des garanties. La motivation et la justification des exigences concernant les garanties à fournir ne sont pas les mêmes pour les opérations ordinaires de politique monétaire que pour les aides extraordinaires sous forme de liquidités. Si, pour garantir une aide extraordinaire sous forme de liquidités, la BNS n'acceptait que des sûretés présentant les mêmes caractéristiques que celles requises pour les instruments ordinaires de politique monétaire, sa fonction incontestée de prêteur ultime resterait lettre morte. En effet, les garanties acceptées par la BNS dans ses pensions permettent normalement à une banque de se refinancer sur le marché. Lors de la révision de la loi sur la Banque nationale, le législateur a d'ailleurs élargi la marge discrétionnaire de la BNS pour qu'elle puisse définir les critères de qualité des garanties.

Le prêt de 54 milliards de dollars US au plus octroyé par la BNS à la société à but spécial est assorti des garanties suivantes: ­

constitution d'un droit de gage de la BNS sur tous les actifs de la société à but spécial;

­

dotation du capital de la société à but spécial par l'UBS SA à hauteur de 10 % de la valeur totale des actifs, soit 6 milliards de dollars US au maximum. Ces fonds propres feront office de première couverture contre les pertes;

­

option d'achat de la BNS portant sur 100 millions d'actions UBS SA au maximum, au cas où la Banque nationale subirait une perte dans le cadre de la transaction;

­

détermination du prix de transfert des actifs sur la base de la valeur comptable calculée par l'UBS SA et d'une expertise indépendante; la société à but spécial paiera le prix le plus bas;

­

affectation prioritaire des flux de paiement provenant des titres transférés au règlement des intérêts et à l'amortissement du prêt de la BNS, après acquittement des frais généraux.

Il est difficile de dire si la BNS est bien protégée par cette première ligne de défense.

Les marchés de la plupart des actifs qui seront transférés dans la société à but spécial sont gelés ou très illiquides depuis que la crise financière a éclaté, rendant la fixation d'un prix fiable presque impossible. Mais si l'on tient compte des autres éléments qui constituent le système de garanties de cette transaction et de l'horizon opération8073

nel assez éloigné de la BNS, on peut admettre que le risque auquel elle s'expose reste acceptable. Les différents éléments du système de garanties constituent donc une «garantie suffisante» au sens de l'art. 9, al. 1, let. e, LBN.

La participation de la BNS à la transaction se fonde sur les attributions de la BNS en matière de politique monétaire et par conséquent, cette décision relève de la compétence de la direction générale (art. 46 LBN). En application de l'art. 7, al. 1, LBN, celle-ci a préalablement informé le Conseil fédéral de son intention. Dans l'accomplissement de ses tâches de politique monétaires, la direction générale n'a en effet pas à solliciter ni à accepter d'instructions du Conseil fédéral ou de l'Assemblée fédérale (art. 6 LBN). Elle doit rendre des comptes aux Chambres fédérales, mais pas au Conseil fédéral (art. 7, al. 2, LBN). La BNS remplit cette obligation de rendre des comptes par le biais d'un rapport qu'elle soumet annuellement aux Chambres et en venant commenter régulièrement la situation économique ainsi que les politiques monétaire et de change devant les commissions compétentes du Parlement. Quant au conseil de banque de la BNS, il surveille uniquement la gestion de la banque et non la façon dont la direction générale s'acquitte de ses attributions en matière de politique monétaire.

7.8

Responsabilités patrimoniales

L'UBS SA a dû procéder à des dépréciations d'actifs totalisant 42 milliards de dollars sur des crédits hypothécaires américains dits «pourris» (subprime mortgages). Dans son rapport d'enquête publié le 16 octobre 2008, la CFB parvient aux conclusions suivantes: Jusqu'à début août 2007, la banque n'avait pas connaissance de la nature et de l'ampleur des risques encourus sur le marché américain des hypothèques subprime et dans les domaines connexes. Il lui a donc été impossible de prendre des contremesures appropriées à temps. La sous-estimation massive de ces risques est due à des défaillances organisationnelles, qui ont eu des conséquences dévastatrices dans un contexte de marché exceptionnel. L'attention insuffisante portée aux risques liés à la croissance du bilan et la confiance excessive, dépourvue d'esprit critique, envers les mécanismes d'identification des risques mis en place ont été qualifiées de manquement grave de la banque à ses obligations prudentielles. L'enquête de la CFB n'a cependant mis en évidence aucun élément qui permettrait de conclure que les organes actuels de la banque ne présentent pas toutes les garanties d'une activité irréprochable. Par ailleurs l'instance de surveillance n'a identifié aucune intention de nuire à la banque de la part de ses organes ou de collaborateurs.

On peut se demander si les résultats de l'enquête de la CFB ou des investigations internes de l'UBS SA (cf. Shareholder Report on UBS's Write-Downs du 18 avril 2008) fournissent des éléments pour ouvrir une action en responsabilité et, le cas échéant, qui pourrait faire valoir des prétentions en dédommagement. Cette appréciation doit se faire sur la base des dispositions du CO: ­

8074

Selon l'art. 678 CO (restitution de prestations), les actionnaires et les membres du conseil d'administration qui ont perçu indûment et de mauvaise foi des dividendes, des tantièmes, ou d'autres prestations sont tenus de les restituer (al. 1 et 2). L'action en restitution appartient uniquement à la société et à l'actionnaire, ce dernier devant par ailleurs agir en paiement à la société

(al. 3). A l'avenir, cette disposition du droit de la société anonyme devrait se durcir, mais il va de soi qu'une application rétroactive est exclue (cf. ch. 3.1.3).

­

Par ailleurs, aux termes de l'art. 754, al. 1, CO (responsabilité des organes), les membres du conseil d'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion répondent à l'égard de la société et envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu'ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs. Outre la société ellemême, tout actionnaire peut intenter une action pour le dommage causé à la société, mais il doit ici aussi agir en paiement à la société (art. 756, al. 1, CO). Enfin, en cas de faillite les créanciers sociaux ont aussi le droit d'ester (art. 757, al. 1, CO).

La société lésée et ses actionnaires sont donc les premiers légitimés à agir en restitution et en dédommagement. Il appartient donc aux organes de la société qui en ont la tâche d'apprécier les chances de succès d'un procès et, le cas échéant, d'ouvrir une action civile. En revanche, ni la CFB, en sa qualité d'autorité de surveillance, ni la Confédération, en sa qualité de créancier obligataire, n'a le droit ou la possibilité d'intenter ce type d'action.

8075

Annexe 1

Mesures prises par d'autres Etats La liste suivante donne un aperçu des mesures de soutien prises dans d'autres pays, par type d'intervention (situation le 22 octobre 2008).

1. Recapitalisation ciblée d'établissements et plans de recapitalisation globaux Benelux Recapitalisations ciblées: le 28 septembre 2008, les gouvernements belge, luxembourgeois et néerlandais ont annoncé la mise à disposition de 11,2 milliards d'euros pour soutenir le groupe financier Fortis. Le 30 septembre 2008, le gouvernement belge est intervenu, avec l'aide du Luxembourg et de la France, pour empêcher le naufrage de Dexia en injectant 6,4 milliards d'euros dans une augmentation de capital. Le 3 octobre 2008, les Pays-Bas ont entièrement nationalisé les activités de banque et d'assurance de Fortis sur leur territoire, y compris la part d'ABN Amro, après avoir constaté que de nombreux clients importants continuaient à retirer leurs fonds malgré les premières mesures de sauvetage. Cette opération a coûté 16,8 milliards d'euros. Le groupe français BNP Paribas a acquis 75 % du groupe belgo-luxembourgeois Fortis le 6 octobre 2008 pour un montant de 14,5 milliards d'euros.

Allemagne Plan global: le 17 octobre 2008, le Bundestag a décidé de débloquer 80 milliards d'euros pour soutenir des banques en difficulté, dans le cadre d'un plan de stabilisation du marché financier d'un volume global de 500 milliards d'euros.

Recours aux ressources du plan global: il est probable que certaines banques régionales demanderont une injection de capital à l'Etat, en particulier la Bayern LB.

Grande-Bretagne Recapitalisations ciblées: le 17 février 2008, le chancelier de l'Echiquier a fait savoir que la banque Northern Rock serait nationalisée à titre provisoire, l'établissement rencontrant des difficultés de refinancement depuis l'éclatement de la crise des subprimes en 2007.

Le 29 septembre 2008, il a annoncé la nationalisation de certains secteurs de la banque Bradford & Bingley, tandis que les secteurs rentables étaient vendus au groupe espagnol Santander pour 612 millions de livres sterling. Pour le moment, les guichets de Bradford & Bingley sont ouverts normalement. La haute direction n'a pas été remplacée, contrairement à l'intention exprimée dans la déclaration UE du 7 octobre 2008. Vingt-quatre heures ont suffi à la Commission
européenne pour autoriser ce plan de sauvetage, ce qui est un record. Elle a toutefois jugé que, sous certains aspects, ce plan s'apparentait à des aides d'Etat posant problème. La Commission a donné au gouvernement britannique jusqu'au 29 mars 2008 pour présenter un plan de restructuration corrigeant les défauts signalés.

Plan global: le 8 octobre 2008, le gouvernement a annoncé un plan de sauvetage de 400 milliards de livres sterling comprenant une enveloppe de 50 milliards pour 8076

recapitaliser huit banques britanniques. La moitié de ce montant, soit 25 milliards de livres, devait être utilisée pour augmenter le capital de catégorie 1 (tier 1 capital propre permanent) afin d'atténuer les effets d'autres dépréciations d'actifs, l'autre moitié restant à disposition comme réserve. La recapitalisation doit se faire sous forme d'achat d'actions privilégiées ou d'acquisition de participations dans le cadre d'une augmentation ordinaire du capital.

Recours aux ressources du plan global: le 13 octobre 2008, le Trésor britannique a fait savoir qu'il affectait 37 milliards de livres, sur les 50 de l'enveloppe, à la recapitalisation de Royal Bank of Scotland (RBS), HBOS et Lloyds TSB. Dès lors, l'Etat détient 60 % de RBS et 40 % de HBOS/Lloyds TSB, dont les négociations de fusion sont déjà avancées. Les participations acquises par l'Etat comprennent dans les trois cas environ un quart d'actions privilégiées et trois quarts d'actions ordinaires.

France Plan global: le 8 octobre 2008 le Premier ministre a annoncé la création d'une structure juridique détenue par l'Etat, permettant à ce dernier d'acquérir rapidement des parts de capital dans des banques fragilisées. De son côté, le ministre de l'Economie a déclaré que le gouvernement présenterait prochainement un projet de loi visant à garantir le financement de ces interventions. Le 13 octobre 2008, le gouvernement a libéré 40 milliards d'euros à cette fin. Concrètement, il est prévu de constituer une sorte de société d'assainissement pour banques en difficultés, la Société de Prises de Participation de l'Etat (SPPE), qui agira comme bras séculier de l'Etat et qui aura la faculté de prendre des participations dans des banques pour son compte, de recevoir des actions privilégiées en échange et de procéder ainsi à des nationalisations partielles. La SPPE jouera également un rôle actif dans la reprise de 5,7 % du capital de Dexia.

Islande Recapitalisations ciblées: à fin septembre 2008, le gouvernement a décidé de procéder à la nationalisation partielle de Glitnir, la troisième banque du pays. Il a acquis 75 % du capital pour l'équivalent de 600 millions d'euros.

Le 6 octobre 2008, le Premier ministre a proclamé une loi d'urgence prévoyant la nationalisation totale des trois plus grandes banques islandaises. L'opération a été finalisée
les 7 et 9 octobre 2008. Cette mesure avait pour objectif de conjurer un effondrement du système économique. Au début du mois d'octobre, la monnaie islandaise avait perdu environ un quart de sa valeur contre l'euro en une seule semaine. Depuis octobre 2007, le taux de change contre l'euro a plongé de 70 %.

Italie Plan global: lors d'une séance extraordinaire qui a eu lieu le 8 octobre 2008, le gouvernement ­ de concert avec la Banque d'Italie et l'autorité de surveillance des banques ­ a promulgué un décret urgent, valable pendant trois ans, qui institue une vaste garantie d'Etat pour les établissements qui revêtent une fonction systémique importante. L'Etat a ainsi la possibilité d'utiliser, au besoin, des fonds publics pour recapitaliser des banques en difficulté, qui ne peuvent plus lever de fonds sur les marchés. Il s'agit donc à tous les effets d'une garantie d'Etat du système financier italien, mais qui ne doit être utilisée que «cas par cas». Le cas échéant, l'Etat souscrira des actions privilégiées sans droit de vote et sans but de nationalisation à moyen terme.

8077

Pays-Bas Plan global: le 9 octobre 2008, le ministère des Finances et la banque centrale ont dévoilé un plan de soutien de la place financière visant à garantir la solvabilité d'établissements fondamentalement sains. Les banques peuvent ainsi bénéficier d'une recapitalisation grâce à laquelle elles auront de nouveau la base de fonds propres requise par la loi. Une recapitalisation doit être accompagnée de mesures visant à prévenir les distorsions de la concurrence et à garantir la pérennité de l'établissement. Le gouvernement n'a pas fixé de montant maximal afin de pouvoir réagir avec souplesse en cas d'évolution rapide de la situation. Néanmoins 20 milliards d'euros ont déjà été mis à disposition. Cette mesure restera valable jusqu'au 10 octobre 2009.

Pour assurer la solvabilité des banques, jusqu'au 20 janvier 2009 la banque centrale mettra à leur disposition les ressources financières qu'elles requerront sur une base hebdomadaire à un tarif fixe.

Recours aux ressources du plan global: le 20 octobre 2008, le ministre des Finances a déclaré que le plus grand conglomérat financier batave, ING Groep, recevrait une injection de capital de l'Etat à hauteur de 10 milliards d'euros.

Autriche Plan global: le 20 octobre 2008, lors d'une séance spéciale, le Conseil national a adopté une loi (Bundesgesetz über Massnahmen zur Sicherung der Stabilität des Finanzmarktes) qui prévoit un vaste train de mesures pour assurer la stabilité du marché financier. Le gouvernement autrichien va notamment soutenir les banques du pays avec une enveloppe de 100 milliards d'euros au maximum, dont 15 milliards seront affectés à des mesures de recapitalisation.

Suède Plan global: le 20 octobre 2008, le gouvernement a annoncé qu'un fonds de stabilité doté de l'équivalent de 1,5 milliards d'euros serait créé pour aider les banques qui risquent de se retrouver en situation d'insolvabilité.

Etats-Unis Recapitalisations ciblées: le 7 septembre 2008, le Secrétaire au Trésor a annoncé la nationalisation des établissements hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac. Le montant maximum qui pourra être affecté à l'assainissement de ces deux instituts en faillite est de 200 milliards de dollars US. Théoriquement, les injections du Département du Trésor sont illimitées, pour autant que l'endettement global de l'Etat fédéral ne dépasse
pas la limite prescrite par la loi. Cela fait de cette action de sauvetage la plus vaste de l'histoire économique. Le Secrétaire au Trésor avait déjà fait créer la base légale de cette mesure d'urgence plusieurs semaines auparavant.

Mi-septembre 2008, le gouvernement américain a acquis 80 % des actions du conglomérat d'assurances AIG, reprenant de fait le contrôle opérationnel du groupe.

La transaction a été financée par un crédit de la Réserve fédérale d'environ 123 milliards de dollars.

Plan global: lors de sa conférence de presse du 8 octobre 2008, le Secrétaire au Trésor a exprimé son intention d'injecter des capitaux dans d'autres banques, au besoin. Le 14 octobre, le gouvernement a annoncé que 250 milliards de dollars du plan Paulson, du nom du Secrétaire au Trésor, seraient affectés à la recapitalisation 8078

du secteur bancaire. Ces injections devaient revêtir la forme d'achats d'actions privilégiées sans droit de vote et de certificats d'option sur actions (warrants), afin de pouvoir participer aux bénéfices futurs des établissements concernés. Le 20 octobre, les modalités du processus de capitalisation ont été dévoilées. Les banques doivent solliciter l'aide formellement jusqu'au 14 novembre 2008.

Recours aux ressources du plan global: outre neuf établissements ayant déjà manifesté leur intérêt, parmi lesquels Citigroup, Bank of America, Wells Fargo, JP Morgan Chase, Goldman Sachs et Morgan Stanley, de nombreuses banques ont fait part de leur intention de profiter de ce programme.

2. Rachat d'actifs problématiques Australie Le 26 septembre 2008, le ministre des Finances a annoncé le rachat de titres adossés à des emprunts hypothécaires (residential mortgage-backed securities) émis par des établissements non bancaires à hauteur de 4 milliards de dollars australiens, ces titres ne pouvant pas bénéficier de la même garantie que celle promulguée au même moment pour les engagements bancaires. Depuis, cette somme à doublé pour atteindre 8 milliards de dollars australiens, soit l'équivalent de 6,3 milliards de francs.

Allemagne Les crédits «pourris» de West LB ont été transférés dans une société de valorisation, opération que la Commission européenne a autorisée en juillet 2008 mais en posant certaines conditions en rapport avec la politique de la concurrence. Globalement, le gouvernement allemand a débloqué 10 milliards d'euros pour le rachat d'actifs illiquides.

Espagne Le 10 octobre 2008, le gouvernement a annoncé la création d'un fonds de 30 milliards d'euros, qui pourra être relevé ultérieurement jusqu'à 50 milliards. Ce fonds devra racheter les actifs douteux des établissements financiers espagnols afin de stabiliser les banques et d'asseoir leur crédibilité.

Etats-Unis Mi-septembre 2008, le Secrétaire au Trésor a proposé de traiter le mal à la racine et de racheter des actifs «toxiques» (titres illiquides) pour un montant de 700 milliards de dollars US aux banques dans le cadre d'un plan intitulé Troubled Assets Relief Program (TARP). Ce plan doit décharger les banques d'un poids et leur permettre de créer un nouveau marché pour ces titres. L'objectif du plan Paulson est de rétablir la confiance
dans les banques et, par ce moyen, de garantir le fonctionnement des marchés financiers.

3. Garantie d'Etat sur les emprunts bancaires et les crédits Belgique La Belgique a l'intention de garantir toutes les dettes des banques pendant un an.

Les détails de ce projet ne sont toutefois pas encore connus.

8079

Allemagne La crise des subprimes et l'illiquidité soudaine du marché ­ jusque-là très vigoureux ­ des créances titrisées ont mis en péril deux banques allemandes propriétés des pouvoirs publics, à savoir IKB Deutsche Industriebank et Sachsen LB. Celles-ci ne parvenaient plus à refinancer sur le marché monétaire les créances qu'elles avaient achetées. Les banques Bayern LB et West LB ont également dû procéder à des amortissements par milliards. Pour survivre, ces quatre établissements étatiques ont bénéficié d'aides publiques dès le printemps 2008, en partie sous forme de prêts.

Fin septembre 2008, le gouvernement allemand a lancé un plan de sauvetage pour la banque Hypo Real Estate, dont la filiale irlandaise Depfa ne parvenait plus à refinancer ses passifs à court terme en raison de la perte de confiance des marchés.

Avant la crise, Depfa finançait régulièrement ses dettes à long terme à l'aide de crédits à court terme sur le marché monétaire. Un consortium bancaire a d'abord fourni un cautionnement de 35 milliards d'euros, dont l'Etat fédéral a ensuite repris 26,5 milliards. Par la suite, les besoins ont bondi à 50 milliards d'euros. Le 8 octobre 2008, 35 milliards d'euros étaient prêts à être injectés.

Le 13 octobre 2008, le gouvernement a annoncé qu'il garantirait des dettes interbancaires à hauteur de 400 milliards d'euros. Le service de presse du Président allemand a annoncé l'entrée en vigueur de la loi au 18 octobre 2008.

Grande-Bretagne Dans son plan de sauvetage de 400 milliards de livres sterling dévoilé le 8 octobre 2008, le gouvernement britannique a inclus une garantie de 250 milliards de livres pour des instruments monétaires et des emprunts bancaires à court et moyen termes.

Les banques peuvent ainsi contracter des dettes sans garantie pour une durée de 36 mois au plus. Cela leur permet de se financer selon des modalités qui ne leur ont jamais été offertes jusqu'à présent.

Irlande Le 17 octobre 2008, les deux chambres du Parlement irlandais ont accepté à une écrasante majorité les dispositions d'exécution du plan de soutien aux banques (Credit Institutions Financial Support Scheme 2008) annoncé par le gouvernement.

Ce plan garantit notamment toutes les dettes bancaires jusqu'en 2010 pour un montant global de 400 milliards d'euros au maximum. Pour bénéficier de cette protection
étatique pendant les deux ans que durera le programme, les banques devront anticiper à l'Etat une somme globale de 1 milliard d'euros par trimestre. Le ministre des Finances a indiqué que le montant des émoluments dépendrait de la notation de crédit à long terme de la banque et du profil de risque de ses dettes.

Italie Le décret voté par le Parlement le 8 octobre 2008 prévoit entre autres une garantie de l'Etat pour toutes les dettes des banques envers la banque centrale. En outre, un fonds doté de 40 milliards d'euros a été créé pour permettre aux banques d'échanger provisoirement leurs actifs mal notés contre des titres d'Etat de premier ordre, moyennant le paiement d'une commission de 1 %. Cette mesure facilite le refinancement des banques.

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France Le 13 octobre 2008, le gouvernement a décidé de garantir les dettes interbancaires d'une durée jusqu'à cinq ans au plus, à concurrence de 320 milliards d'euros.

Pays-Bas Le 14 octobre 2008, le Premier ministre a déclaré que le gouvernement allait garantir les dettes interbancaires et les crédits des investisseurs institutionnels jusqu'à concurrence de 200 milliards d'euros. Cette mesure est destinée à relancer les mouvements de capitaux entre les établissements financiers.

Norvège Le 17 octobre 2008, le Parlement a autorisé une facilité de trésorerie et de garantie du gouvernement. Dans ce contexte, des obligations d'Etat totalisant l'équivalent de 60 milliards de francs environ seront émises pour être mises à la disposition des banques contre le dépôt de titres à leur valeur de marché.

Suède Le 20 octobre 2008, le gouvernement a fait savoir qu'il assumerait des cautionnements pour l'octroi de crédits jusqu'à concurrence de l'équivalent de 152 milliards d'euros environ. Le but de cette mesure est de faciliter le financement des banques et d'abaisser les coûts du crédit.

Espagne Le 13 octobre 2008, le Premier ministre a annoncé que d'ici fin 2008, jusqu'à 100 milliards d'euros seraient débloqués pour garantir les créances interbancaires et les crédits bancaires à l'économie réelle. Une tranche supplémentaire, d'un montant encore inconnu, a été annoncée pour 2009.

Autriche Le 20 octobre 2008, lors d'une séance spéciale, le Conseil national a adopté une loi sur la stabilisation du marché financier (Bundesgesetz über Massnahmen zur Sicherung der Stabilität des Finanzmarktes). Une partie de ce train de mesures qui totalise 100 milliards d'euros consiste en une garantie de responsabilité de 85 milliards d'euros pour les passifs bancaires.

Portugal Le 12 octobre 2008, le ministre des Finances a annoncé une garantie d'Etat de 20 milliards d'euros pour les banques dont le siège principal est au Portugal et qui sont fragilisées par la crise financière. Cette mesure a pour but de garantir la poursuite des opérations financières de toutes les banques importantes du pays.

Etats-Unis Lors de sa conférence de presse du 8 octobre 2008, le Secrétaire au Trésor a exprimé son intention d'offrir, au besoin, une garantie d'Etat sur les nouvelles émissions d'emprunts bancaires. Les détails de ce plan sont maintenant connus. La garantie pourra notamment être accordée pour les emprunts privilégiés que les banques émettront au cours des trois prochaines années.

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4. Autres mesures D'autres mesures sont prises un peu partout dans le monde. Les pays d'Asie ont notamment commencé à étendre leurs garanties d'Etat pour rester concurrentiels. La crise génère en effet une forte aversion au risque qui se traduit par un désengagement des investisseurs sur les marchés émergents.

Au niveau de la politique monétaire, les mesures coordonnées des banques centrales continuent. Il faudra toutefois patienter pour voir si une nouvelle baisse coordonnée des taux d'intérêts, comme celle du 8 octobre 2008, s'impose. Les réserves des banques centrales sont amplement suffisantes pour procéder à de nouvelles injections de liquidités.

Les gouvernements examinent l'opportunité de mesures plus drastiques dans les domaines de l'évaluation des actifs ou du négoce de titres. Les mesures les plus avancées sont les nouvelles restrictions en matière de ventes à découvert, qui sont également appliquées par la Suisse.

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Annexe 2

Conditions de l'emprunt à conversion obligatoire La Confédération souscrit un emprunt de 6 milliards de francs émis par l'UBS SA, ce qui revient à octroyer un prêt à concurrence de ce montant à l'UBS SA. Il s'agit d'un emprunt convertible comportant une clause de conversion obligatoire.

La particularité de cette transaction est donc que le prêt devra obligatoirement être converti en actions, ce qui permet de le comptabiliser dans le capital propre de la banque aux fins des exigences prudentielles en matière de fonds propres.

L'UBS SA doit disposer des actions nécessaires pour la conversion. Elle va créer du capital-actions dans le cadre d'une augmentation conditionnelle du capital qui devrait être décidée par une assemblée générale extraordinaire convoquée pour le 27 novembre 2008. Ce capital conditionnel sera créé spécifiquement dans ce but et ne pourra pas être utilisé à d'autres fins.

La durée de l'emprunt à conversion obligatoire est de 30 mois.

Le coupon annuel est de 12,5 %. Une conversion anticipée est possible, mais l'intérêt prévu reste payable jusqu'à l'échéance initiale. Sous certaines conditions, la rémunération pourra intervenir sous forme d'actions.

Le prix de conversion des actions est déterminé à l'aide des paramètres suivants: ­

Un prix de référence sera fixé à la conclusion du contrat. Il correspondra à la valeur la plus basse des deux suivantes: i) cours moyen de l'action pondéré du marché le jour de négoce précédant l'annonce de la transaction (20,2359 francs le 15.10.2008) ou ii) la moyenne des cours moyens journaliers pondérés du marché des trois jours de négoce précédant l'assemblée générale extraordinaire. Le prix de référence ne sera cependant pas inférieur à 18,21 francs par action UBS, soit 90 % du cours moyen pondéré du marché avant l'annonce de la transaction.

­

Le prix de référence s'entend comme un prix de conversion minimum. Si le cours de l'action UBS est inférieur à ce prix minimum le jour de la conversion, la Confédération recevra un paquet d'actions UBS dont la valeur de marché sera inférieure à 6 milliards de francs (risque de perte pour la Confédération).

­

Si, lors de la conversion, le cours de l'action UBS se situe entre 100 et 117 % du prix de référence, la Confédération recevra un paquet d'actions UBS dont la valeur de marché sera de 6 milliards de francs exactement.

­

Si, lors de la conversion, le cours de l'action UBS se situe à plus de 117 % du prix de référence, la Confédération recevra un paquet d'actions UBS dont la valeur de marché sera supérieure à 6 milliards de francs (bénéfice potentiel pour la Confédération).

Le contrat prévoit une protection étendue contre la dilution (p. ex. en cas d'émission d'actions nouvelles en dessous du cours boursier, de versement du dividende, etc.).

Les obligations convertibles pourront être cédées au plus tôt après six mois (lockup).

La Confédération a toutefois la possibilité de les vendre immédiatement (par tran-

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ches de 100 millions de francs au minimum) si elle transfère cette clause de blocage à l'acquéreur.

La Confédération jouit des mêmes droits à l'information que les actionnaires importants tant qu'elle détient au moins 3 % des actions de l'UBS SA ou des droits de conversion à concurrence de ce taux de participation. A cette fin, elle peut se faire accompagner ou se faire représenter par la BNS. En contrepartie, la Confédération s'astreint à un éventuel devoir de discrétion et doit respecter des restrictions de négoce.

La Confédération ne cherche pas à exercer une quelconque influence sur la direction ni à se faire représenter au sein du conseil d'administration.

Contrôles: ­

La CFB exerce la surveillance conformément à la LB.

­

La BNS a le droit de procéder à des inspections au sein de la banque afin de surveiller la gestion et le contrôle des risques tant que la Confédération détient au moins 3 % des actions de l'UBS SA ou des droits de conversion à concurrence de ce taux de participation.

Les systèmes de rémunération du conseil d'administration et de la direction de l'UBS SA sont aménagés d'entente avec la CFB et en conformité avec les règles internationales en élaboration, notamment celles du FSF (cf. ch. 3.1).

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Ordonnance relative à la recapitalisation de l'UBS SA

Annexe 3

du 15 octobre 2008

Le Conseil fédéral suisse, vu les art. 184, al. 3, et 185, al. 3, de la Constitution1, arrête: Art. 1

Principe

La Confédération participe jusqu'à un montant maximal de 6 milliards de francs à la recapitalisation de l'UBS SA.

1

A cet effet, elle souscrit et libère un emprunt de l'UBS SA à convertir obligatoirement en actions.

2

Art. 2

Conditions

La participation de la Confédération est soumise aux conditions suivantes: a.

les mesures privées de recapitalisation échouent ou s'avèrent insuffisantes;

b.

la Banque nationale suisse accorde une aide complémentaire pour le maintien de la liquidité;

c.

une participation appropriée de la Confédération est prévue si la valeur de l'UBS SA s'apprécie sur le marché, et

d.

l'UBS SA s'engage à respecter les injonctions du Conseil fédéral en matière de gouvernement d'entreprise.

Art. 3

Administration

Le Département fédéral des finances administre: a.

après la souscription: l'emprunt;

b.

après la conversion: les actions.

Art. 4

Autorisation de crédit

Le Conseil fédéral décide des crédits d'engagement et des crédits budgétaires par le biais d'une procédure d'urgence au sens des art. 28 et 34 de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances2.

RS 611.055 1 RS 101 2 RS 611.0

8085

Recapitalisation de l'UBS SA

Art. 5 1

RO 2008

Entrée en vigueur et durée de validité

La présente ordonnance entre en vigueur le 15 octobre 2008 à 18 heures.3

Elle a effet jusqu'à son remplacement par une loi fédérale, mais au plus tard jusqu'à l'exécution complète des transactions prévues à l'art. 1, al. 2.

2

15 octobre 2008

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

3

La présente ordonnance a été publiée le 16 octobre 2008 selon la procédure extraordinaire (art. 7, al. 3, LPubl; RS 170.512).

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