Examen du fonctionnement des autorités de poursuite pénale de la Confédération Rapport du 5 septembre 2007 de la Commission de gestion du Conseil national Avis du Conseil fédéral du 28 novembre 2007

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 158 de la loi sur le Parlement (LParl), nous vous communiquons ci-après notre avis sur le rapport de la Commission de gestion du Conseil national du 5 septembre 2007 concernant l'examen du fonctionnement des autorités de poursuite pénale de la Confédération.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

28 novembre 2007

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Micheline Calmy-Rey La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2007-2925

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Avis Le Conseil fédéral remercie la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) de l'examen détaillé et approfondi des quatre rapports d'enquête sur le Ministère public de la Confédération (MPC) et les autres autorités de poursuite pénale de la Confédération.

Le Conseil fédéral reconnaît le travail accompli mais ne saurait faire siennes sur tous les points les constatations et les conclusions de la CdG-N.

Le Conseil fédéral constate donc qu'il est pour l'essentiel d'accord avec les recommandations de la commission et que ces recommandations soit ont déjà été mises en oeuvre, soit sont en passe de l'être.

Dans une première partie, le Conseil fédéral se penche sur les questions soulevées par la CdG-N concernant la violation du principe de la séparation des pouvoirs, le non-respect de l'indépendance du procureur général, l'abus de compétences et le non respect des règles de procédure par le DFJP. Cette analyse se fonde sur les faits présentés dans le rapport. Dans une deuxième partie, le Conseil fédéral traite des recommandations que lui adresse la CdG-N. Enfin dans une troisième partie, le Conseil fédéral s'exprime sur les conclusions relatives à la surveillance du MPC.

1

Au sujet des questions soulevées

1.1

Questions concernant la violation du principe de la séparation des pouvoirs

Le MPC est un organe de l'administration et ne ressortit pas au pouvoir judiciaire, comme on le prétend souvent à tort. Le Conseil fédéral et le MPC appartiennent donc au même pouvoir.

Le MPC et le procureur général ont cependant un statut particulier, en raison de la nature des tâches qui leur incombent. Le procureur général dirige les enquêtes visant à élucider certaines infractions et représente l'accusation devant le tribunal. Il a donc un statut de partie. Pour l'exercice de ces tâches, le procureur n'est pas soumis aux instructions du Conseil fédéral ou du DFJP. Il jouit ainsi au sein de l'exécutif d'une indépendance atypique pour une autorité administrative. L'objectif est d'éviter les abus de pouvoir ­ c'est-à-dire l'exercice d'une influence politique sur un cas donné ou l'instrumentalisation de la poursuite pénale. En outre, le procureur général et les autres procureurs fédéraux, à la différence du reste du personnel de la Confédération, sont engagés pour une durée de fonction de quatre ans. Bien que le MPC ne soit que partiellement soumis à des instructions émanant du pouvoir auquel il appartient, ce statut n'est pas comparable à l'indépendance judiciaire (à ce sujet cf. les explications relatives à la recommandation 5).

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1.2

Question du non-respect de l'indépendance du MPC

Au ch. 3.2 d), le rapport constate que lors de l'affaire Achraf, les intérêts politiques du ministre de la Justice qui, parce qu'il l'avait promis à son homologue espagnol, voulait extrader Mohammed Achraf, soupçonné de terrorisme, le plus rapidement possible vers l'Espagne, sont entrés en conflit avec l'ouverture d'une procédure d'enquête par le MPC, procédure qui aurait été susceptible de retarder l'extradition.

Cette constatation repose sur de fausses prémisses. Le Conseil fédéral regrette que la sous-commission ait négligé d'entendre l'Office fédéral de la justice (OFJ) sur ce point.

Au DFJP, il était clair dès le départ que dans l'affaire Achraf, un transfert aux autorités de poursuite pénale espagnoles ne serait possible que sur la base d'une demande d'extradition présentée par l'Espagne conformément à la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 (RS 0.353.1). Il était également clair qu'Achraf aurait pu recourir devant le Tribunal fédéral, qui tranche en dernière instance, contre une décision d'extradition de l'OFJ.

La répartition des compétences présentée dans la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP; RS 351.1) suffit à démontrer que, en l'espèce, le chef du DFJP n'était pas en mesure de promettre une extradition. Par la suite, le 21 octobre 2004, l'Espagne a présenté une demande d'arrestation en vue d'une extradition. La demande formelle d'extradition a suivi, le 27 octobre 2004.

Le 21 octobre 2004 déjà, le MPC a informé l'OFJ qu'il avait ouvert sa propre procédure pénale contre Achraf pour déterminer si ce dernier avait aussi commis des actes punissables en Suisse. L'OFJ avait alors attiré l'attention sur le fait que cette procédure pénale pourrait empêcher l'extradition d'Achraf ­ en raison de la priorité accordée à la juridiction suisse (cf. art. 35, al. 1, let. b, EIMP). Le 22 octobre 2004, l'OFJ en a informé le Secrétariat général du DFJP (SG-DFJP).

Le soir du 2 novembre 2004, une longue séance dirigée par le chef du DFJP et à laquelle ont participé, outre le procureur général suppléant, le chef suppléant du Service d'analyse et de prévention (SAP), le responsable de la Division de l'entraide judiciaire internationale de l'OFJ et le chef du Service d'information du DFJP, a servi principalement à coordonner les informations parfois
contradictoires fournies aux médias par le MPC et par fedpol. A cette fin, on décida que dans l'affaire Achraf, la responsabilité de l'information serait sans délai confiée au Service d'information du DFJP. Par ailleurs, les options pour la suite de la procédure dans l'affaire elle-même ont été présentées et discutées.

A la fin de la séance, compte tenu du fait qu'à ce moment là, aucune indication concrète ne permettait de penser qu'Achraf avait commis des actes délictueux en Suisse, les participants ont décidé d'un commun accord que, jusqu'à plus ample informé, l'option de l'extradition devait être considérée en priorité. Dans le cas où l'enquête aurait apporté de nouveaux éléments sur des activités terroristes concrètes d'Achraf en Suisse, l'exécution de l'extradition, si elle avait entretemps été autorisée, aurait dû être différée au profit de la procédure du MPC (art. 58, al. 1, EIMP).

Le cas échéant, la possibilité d'une remise temporaire aurait également pu entrer en ligne de compte (art. 58, al. 2, EIMP).

1891

Au cours de cette séance, aucune instruction n'a été donnée au MPC pour qu'il renoncer à enquêter lui-même. Comme il était possible de mener en parallèle une procédure d'extradition et une procédure d'enquête, il n'y avait d'ailleurs objectivement pas de nécessité de donner pareille instruction.

Finalement, les participants ont retenu, dans un consensus explicite, que l'option de l'extradition devait être privilégiée. Dans le même temps, les représentants du MPC et de l'OFJ ont décidé de s'informer régulièrement du déroulement des procédures et de décider ultérieurement de la procédure définitive à retenir (procédure pénale avec acte d'accusation en Suisse ou extradition et demande de délégation de la poursuite pénale par l'Espagne).

Le jour suivant, le 3 novembre 2004, le chef du DFJP a personnellement informé les médias sur l'affaire Achraf, en expliquant que l'extradition était envisagée en priorité.

La déclaration faite par le porte-parole du MPC le 4 novembre 2004, selon laquelle une extradition n'était pas la première option envisagée pour le MPC, était en contradiction avec l'information convenue à l'unanimité deux jours auparavant et communiquée au public par le chef du DFJP le 3 novembre 2004.

Après plusieurs séances de coordination entre l'OFJ et le MPC, ce dernier, dans une lettre du 24 décembre 2004, est arrivé de lui-même à la conclusion qu'il fallait accorder la priorité à la procédure espagnole, et donc à l'extradition, notamment pour permettre à la justice de procéder à une appréciation globale de l'ensemble des faits et de juger tous les prévenus au cours de la même procédure.

Après que le Tribunal fédéral, par son arrêt du 5 avril 2005, a rejeté le recours formé par Achraf contre la décision d'extradition prise par l'OFJ le 27 janvier 2005, Achraf a été remis aux autorités espagnoles le 22 avril 2005.

A la demande du MPC, l'OFJ a confirmé aux autorités espagnoles, via l'Ambassade suisse à Madrid, la délégation de la poursuite pénale.

On constate ainsi que ce n'est pas la coordination entre la procédure d'extradition et la procédure pénale suisse qui a posé des problèmes. Les difficultés sont venues bien davantage du fait que le procureur général, en dépit de l'accord qui avait été conclu, voulait tenir une conférence de presse sans qu'il n'y ait objectivement aucune raison,
et encore moins une nécessité, de procéder de la sorte.

Lorsqu'il n'y a pas de coordination de l'information entre les offices fédéraux concernés et le MPC ou ­ comme dans le cas présent ­ lorsque le procureur général refuse de respecter l'arrangement conclu, la question se pose de savoir si le chef du DFJP a la compétence, dans le cadre de la surveillance administrative qu'il exerce sur le MPC, de contraindre ce dernier à fournir une information donnée au public ou de le lui interdire.

Le DFJP considère que l'information du public par le MPC ressortit en principe, c'est-à-dire dans la mesure où cette information concerne une enquête en cours, à la surveillance matérielle; dans certaines rares circonstances, lorsque des intérêts politiques supérieurs sont en jeu qui nécessitent une coordination entre plusieurs offices fédéraux impliqués, l'information relève de l'administratif. C'est la raison pour laquelle des instructions du chef du département concernant l'information diffusée par du MPC sont licites, en particulier lorsqu'il s'agit de faire prévaloir des intérêts politiques supérieurs.

1892

Le jurisconsulte nommé par le Conseil fédéral, le professeur Georg Müller, estime en revanche que l'information fait partie de l'accomplissement des tâches et que le législateur a exclu la possibilité pour l'exécutif d'exercer une influence sur la manière dont le MPC s'acquitte de ses tâches (art. 14 et 16, al. 4, première phrase, de la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale [PPF], RS 312.0). Le prof.

Müller considère que seul le Tribunal pénal fédéral, en sa qualité d'instance chargée de la surveillance matérielle, est habilité à donner des ordres sur l'information du public.

La délimitation entre surveillance administrative et surveillance matérielle est à l'évidence difficile. Le Conseil fédéral considère que la situation juridique actuelle n'est pas satisfaisante. C'est pourquoi il propose, dans l'avant-projet de loi sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), de confier à l'avenir au Conseil fédéral la surveillance tant administrative que matérielle. Sous le nouveau droit, le Conseil fédéral aura la compétence de donner au MPC des instructions générales sur l'information du public. Il faudra cependant créer les conditions institutionnelles permettant au Conseil fédéral d'exercer ce droit.

1.3

Questions de l'abus de compétences et du non-respect des règles de procédure

Le MPC est soumis à une surveillance exercée par l'autorité de tutelle. En revanche, en raison de son statut particulier, le MPC n'a pas au-dessus de lui d'instance supérieure au sens habituel du terme, c'est-à-dire une autorité qui aurait le pouvoir de lui donner des instructions dans tous les domaines. Les deux autorités de surveillance ­ le Conseil fédéral (DFJP) pour la surveillance administrative et le Tribunal pénal fédéral (Cour des plaintes) pour la surveillance matérielle ­ n'ont chacune que des possibilités d'intervention limitées.

Depuis sa création en 1889 et jusqu'à l'entrée en vigueur du projet dit d'efficacité, le 1er janvier 2002, le Ministère public a été soumis à la surveillance du Conseil fédéral, exercée par le DFJP. Depuis des décennies, le Conseil fédéral faisait cependant preuve d'une grande retenue dans l'exercice de cette surveillance et se limitait à une surveillance juridique, plus tard à une surveillance administrative. Lorsque l'art. 11 de la PPF a été modifié par le projet d'efficacité, le MPC a été soumis, à partir du 1.1.2002, à la surveillance matérielle de la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral (cf. le message du Conseil fédéral, FF 1998 1253). En vertu de l'art. 14, al. 1, PPF, la surveillance administrative sur le procureur général de la Confédération continuait cependant de ressortir au Conseil fédéral, qui déléguait cette tâche au DFJP (cf. notamment art. 27 [orgDFJP]; RS 172.213.1). La motivation avancée pour cette partition de la surveillance était double: d'une part, permettre au ministère public de fonctionner sans être lié par des instructions, tout en étant soumis à un contrôle judiciaire et, d'autre part, laisser au Conseil fédéral, l'autorité de nomination, certaines attributions en matière de surveillance, nécessaire en vue du renouvellement des nominations et d'éventuelles sanctions disciplinaires, mais aussi pour la gestion du personnel et des comptes (Felix Bänziger/Luc Leimgruber, Das neue Engagement des Bundes in der Strafverfolgung ­ Kurzkommentar zur «Effizienzvorlage», Berne 2001, n. 171).

1893

Le 1er avril 2004, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral à Bellinzone a repris les attributions de l'ancienne Chambre d'accusation du Tribunal fédéral (message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4162). En vertu de l'art. 28, al. 1, let. a, de la loi fédérale sur le Tribunal pénal fédéral, (LTPF; RS 173.71) la Cour des plaintes statue entre autres sur des plaintes dirigées contre des opérations ou des omissions du procureur général de la Confédération. Selon l'art. 28, al. 2, LTPF, elle «exerce la surveillance sur les recherches de la police judiciaire et sur l'instruction préparatoire dans les affaires pénales relevant de la juridiction fédérale». Le message décrit cette activité de surveillance de la manière suivante: «... Ce pouvoir de surveillance lui donnera notamment le pouvoir de se faire produire n'importe quel dossier en tout temps et de vérifier ainsi la façon dont l'enquête est menée. Si elle soupçonne des manquements, elle procédera aux contrôles nécessaires et ordonnera d'office toutes mesures utiles.» (FF 2001 4162). La réglementation concernant la surveillance administrative exercée par le Conseil fédéral, et sa délégation au DFJP, est restée inchangée.

Outre sa fonction d'autorité de recours contre les décisions du MPC, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral doit aussi pouvoir exiger des rapports sur la gestion des affaires et, le cas échéant, donner des instructions de portée générale. Or il s'est révélé que, dans les faits, les possibilités de surveillance de la Cour des plaintes sont limitées, en raison de sa fonction judiciaire. L'exercice d'une surveillance complète nécessite d'autres ressources que ne l'exige la fonction judiciaire. La Cour des plaintes a certes des droits étendus en matière de consultation des dossiers, mais elle n'a pas la possibilité, si elle constate des lacunes, d'ordonner des mesures organisationnelles ou disciplinaires, puisque la surveillance administrative ressortit au Conseil fédéral.

Pour sa part, le DFJP, qui exerce la surveillance administrative sur mandat du Conseil fédéral, ne dispose que de possibilités limitées de contrôler, à la faveur des affaires traitées par le MPC, l'adéquation des ressources dont celui-ci a besoin, qu'il s'agisse de moyens financiers, de personnel ou de biens
d'équipement.

Au vu de cette situation, la CdG-N elle-même arrive à la conclusion qu'une surveillance partagée exige une délimitation claire et une coordination. Cette coordination nécessite des contacts oraux et écrits réguliers entre les autorités de surveillance.

Une surveillance claire et unifiée, telle que le Conseil fédéral l'a à plusieurs reprises demandée et qu'il a décidée doit être instituée dans les meilleurs délais, afin d'éviter tout soupçon d'abus de compétence. Seule une surveillance réunie entre les mains d'une seule autorité, au sens classique d'une surveillance hiérarchique, offre les outils nécessaires pour éviter les conflits de compétences. Elle doit être complétée par une réglementation claire des limites à poser au pouvoir de l'autorité de surveillance en matière d'instructions. Le parlement aura l'occasion, lors de l'examen de la future LOAP, actuellement en consultation, de trouver une solution adéquate permettant de remédier aux défauts de l'actuel régime de surveillance du MPC (à ce sujet, cf. les explications au ch. 3).

Les ententes critiquées par la CdG-N entre la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral et le DFJP confirment que, dans la pratique, en présence d'affaires particulièrement délicates, l'actuelle partition de la surveillance, qui distingue les aspects administratifs des aspects matériels, et l'attribution de ces domaines à deux autorités différentes, n'est guère applicable. Les conflits de compétence et les problèmes de délimitation qui en résultent ne permettent pas l'exercice d'une surveillance responsable et efficace du MPC, ce qui ne répond pas à l'objectif de la nouvelle réglemen1894

tation de la surveillance adoptée dans le cadre du projet d'efficacité. Lorsqu'il y a un conflit de compétence, positif ou négatif, une entente sur la répartition des compétences est indispensable. En revanche, des ententes sur d'autres points ne sont pas admissibles et il n'y en a d'ailleurs jamais eu.

C'est également dans ce sens que doit être vu l'échange de courriels entre le président de la Cour de plaintes et le secrétaire général du DFJP. Ce dernier ­ gardant à l'esprit le principe de la séparation des pouvoirs ­ a simplement fait part de son intérêt concernant l'issue d'investigations auxquelles la Cour des plaintes entendait procéder. Compte tenu de la réglementation actuelle en matière de surveillance, il était nécessaire et utile qu'il soit au courant, dans les grandes lignes, de la manière dont le président de la Cour des plaintes entendait procéder. Dans l'optique de la surveillance administrative, l'intérêt du secrétaire général du DFJP pour le résultat de ces investigations était non seulement légitime et légal, il était aussi indispensable pour l'exercice de cette surveillance administrative. Vouloir déduire de cet échange l'existence d'une «relation de mandataire à mandant», quelle qu'en soit la nature, n'est pas compréhensible.

Par ailleurs, sur le plan du droit du personnel, la situation concernant le procureur général et son suppléant, de même que les procureurs fédéraux et leurs suppléants, est claire. La caractéristique principale des dispositions en question est l'engagment pour une durée de fonction. En vertu de l'art. 9, al. 5, de la loi sur le personnel de la Confédération (LPers; RS 172.220.1), le Conseil fédéral peut disposer, par voie d'ordonnance, que d'autres personnes tenues d'être indépendantes de l'organe chargé de l'engagement sont nommées pour une durée de fonction. Le Conseil fédéral a eu recours à cette compétence de délégation dans l'art. 32 de l'ordonnance sur le personnel de la Confédération (OPers; RS 172.220.111.3), qui prévoit que les rapports de travail du procureur général de la Confédération et des procureurs généraux suppléants, mais aussi des procureurs fédéraux et des procureurs fédéraux suppléants sont conclus pour une durée de quatre ans (cf. art. 32, al. 1, let. b et c OPers). Pendant cette période, une résiliation des rapports de travail par
la Confédération suisse est pratiquement impossible. Une résiliation avant la fin de la période de fonction n'est possible qu'en présence d'un motif de résiliation immédiate (cf.

art. 32, al. 3, let. a, Opers). Une résiliation ordinaire n'est possible qu'au terme de la période de fonction, en présence d'un motif de résiliation défini à l'art. 12, al. 6, LPers et dans le respect d'un délai de résiliation de trois, quatre ou six mois, en fonction de la durée des rapports de travail (cf. art. 32, al. 3, let. b, Opers). En d'autres termes, si l'autorité de nomination n'intervient pas avant la fin de la période de fonction et n'avance pas un motif de résiliation ordinaire, les rapports de travail de cette catégorie de personnel sont automatiquement reconduit pour une nouvelle période de quatre ans.

Le Conseil fédéral a donc clairement précisé au niveau de l'ordonnance combien il attachait d'importance au statut indépendant du procureur général de la Confédération en matière de droit du personnel. Le cas de Valentin Roschacher montre précisément que les dispositions actuelles suffisent. Malgré les conditions incontestablement difficiles que présentaient la personne de Valentin Roschacher, ni le chef du DFJP, ni le Conseil fédéral n'auraient été habilités à le relever de ses fonctions unilatéralement, tant qu'il n'existait pas de motifs de résiliation extraordinaire.

Valentin Roschacher a cependant démissionné de son propre chef le 5 juillet 2006. Il s'agissait d'une résiliation unilatérale des rapports de travail, ressortissant exclusivement de sa volonté. Il n'apparaît pas que cet acte ait pu porter atteinte à son indé1895

pendance garantie par le droit du personnel. La convention conclue le même jour ne change rien sur ce point. Même si l'on considérait, sur la base de cette convention, que la résiliation était un acte juridique bilatéral, elle ne saurait avoir porté atteinte à l'indépendance du procureur général, garantie par le droit du personnel, car cet acte n'aurait pas pu être conclu sans son accord.

Le DFJP, l'OFJ et l'Office fédéral du personnel étaient d'avis que le Conseil fédéral n'avait pas à approuver la résiliation des rapports de travail, puisque le procureur général avait démissionné. Le Conseil fédéral a exprimé le même point de vue dans les avis qu'il a communiqués à la Délégation des finances et dans ses réponses à des interventions parlementaires. Le jurisconsulte du Conseil fédéral estime en revanche qu'un rapport de travail conclu pour une durée de fonction ne peut être résilié que par une décision de révocation suite à une demande de l'intéressé.

La question peut rester ouverte. Le Conseil fédéral a été informé de la démission du procureur général lors de sa séance du 5 juillet 2006. Il n'a pas soulevé d'objections, approuvant ainsi tacitement la résiliation des rapports de travail. Il n'a certes pas décidé formellement de la révocation du procureur général, c'est-à-dire qu'il n'a pas arrêté une décision d'approbation de la convention de résiliation, comme cela aurait été nécessaire pour mettre un terme à des rapports de travail qui, par décision, sont conclus pour une durée de fonction. Toujours est-il qu'en fin de compte, le Conseil fédéral a approuvé la façon de procéder du chef du DFJP.

Il est exact que la relation de confiance entre le chef du DFJP et le procureur général s'était dégradée. Les blâmes et les réprimandes émis par le chef du DFJP ne résultaient pas uniquement de divergences d'opinion et de tensions mais étaient, au moins en partie, matériellement fondés. Les blâmes qui devraient précéder un licenciement ne sont pas des décisions administratives et ne relèvent donc pas de la procédure visée par la loi fédérale sur la procédure administrative (PA). Cette loi ne s'appliquerait que dans le cas d'un non-renouvellement de la nomination par le Conseil fédéral: il faudrait alors examiner si les reproches à l'origine des blâmes et réprimandes du chef du DFJP sont fondés, dans une procédure conforme à la PA, en assurant notamment au procureur général le droit d'être entendu.

1.4

Question de l'indemnité de départ versée au procureur général

La question de savoir si l'indemnité de départ versée à Valentin Roschacher reposait sur une base légale suffisante est controversée.

Le DFJP et le Conseil fédéral étaient d'avis qu'il était possible d'appliquer par analogie l'art. 26, al. 1, en corrélation avec l'art. 79, al. 2, OPers, une solution que la DélFin a elle aussi estimé défendable. Selon ces dispositions le contrat de travail conclu avec certains fonctionnaires supérieurs prévoit que la cessation de toute collaboration fructueuse avec le chef de département constitue un motif de résiliation ordinaire du contrat par l'employeur en vertu de l'art. 12, al. 6, let. f, LPers.

Lorsqu'un fonctionnaire supérieur est révoqué pour cette raison, le montant de l'indemnité qui lui est versé représente un an de salaire.

Sur la base de l'analyse qu'il a effectué, le jurisconsulte du Conseil fédéral arrive à la conclusion qu'il n'est pas possible d'appliquer par analogie l'art. 26, al. 1 en corrélation avec l'art. 79, al. 2, OPers. La réglementation de la résiliation des rap1896

ports de travail du procureur général, nommé par le Conseil fédéral pour une durée de fonction, ne comporte pas de lacune. Pour garantir l'indépendance du procureur, cette réglementation est ainsi faite que pendant la durée de fonction, les rapports de travail ne peuvent être résiliés qu'en présence d'un motif important au sens de l'art. 12, al. 7, Lpers ou si le procureur général donne son congé dans le respect des délais de congé prévu par la loi. En outre, les rapports de travail peuvent être résiliés à l'issue de la durée de fonction de quatre ans, en présence d'un des motifs décrits à l'art. 12, al. 6, LPers. En tant que responsable d'une unité administrative décentralisée qui n'est subordonnée au DFJP que sur le plan administratif, le procureur général n'est pas dans une relation si étroite avec le chef du département que la cessation de toute collaboration fructueuse avec ce dernier puisse être considérée comme un motif de congé, comme dans le cas d'un directeur d'office. Si les prescriptions sur la résiliation des rapports de travail conclus pour une durée de fonction ne présentent pas de lacune, c'est-à-dire qu'elles ne traduisent pas incomplètement l'intention du législateur, il ne saurait être question d'appliquer par analogie l'art. 26, al. 1, en corrélation avec l'art. 79, al. 2, OPers.

L'art. 19, al. 5, LPers ne constitue pas non plus une base légale permettant de verser une indemnité de départ au procureur général. Cette disposition prévoit des mesures en cas de résiliation du contrat de travail sans qu'il y ait faute de l'employé. Elle n'est en principe pas applicable dans le cas d'une démission de l'employé. En vertu de l'art. 19, al. 5, LPers, le Conseil fédéral peut définir les conditions de versement des indemnités de départ éventuellement accordées en cas de résiliation d'un commun accord des rapports de travail selon l'art. 10, al. 1, LPers. Il n'a toutefois pas fait usage de cette compétence. Le procureur général de la Confédération ne fait pas non plus partie des catégories de personnel mentionnées à l'art. 78, al. 2, Opers auxquelles des indemnités de départ peuvent être versées.

Le jurisconsulte du Conseil fédéral estime donc que le DFJP n'avait pas la compétence de garantir au procureur, dans la convention conclue sur la résiliation de ses rapports de travail, une
indemnité de départ représentant un an de salaire. Il ajoute cependant que le DFJP s'est fondé, pour procéder de la sorte, sur des renseignements fournis par l'Office fédéral du personnel. Il estime de plus que l'absence de base légale pour le versement de l'indemnité de départ n'était pas un défaut facilement identifiable. Le DFJP avait cependant éclairci ce point. Ce défaut n'a pas remis en cause la validité de la convention conclue avec le procureur général.

Le Conseil fédéral reconnaît qu'une solution doit être trouvée. La problématique devra être examinée soigneusement et résolue dans le cadre de la révision de la LPers. Les travaux législatifs sont déjà en cours. Il est prévu de réglementer les rapports de travail fondés sur une durée de fonction non plus dans la LPers, mais dans une loi spéciale. Dans le cas du procureur général de la Confédération, les dispositions nécessaires seront intégrées dans la loi sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération.

1897

2

Au sujet des recommandations Recommandation 1

Créer une base légale régissant l'engagement de personnes de confiance

La CdG-N demande au Conseil fédéral de veiller à la création d'une base légale régissant l'engagement de personnes de confiance dans le cadre de la poursuite pénale.

Le Conseil fédéral est prêt à examiner la recommandation 1 et à la réaliser si elle s'avère opportune.

Dans la pratique, les policiers distinguent trois sortes de personnes leur fournissant une assistance: les simples informateurs, les personnes de confiance et les agents infiltrés. La notion d'agent infiltré est définie dans la loi fédérale du 20 juin 2003 sur l'investigation secrète (LFIS; RS 312.8).

Il ressort du message et des procès-verbaux de séances de commission que la LFIS n'exclue pas le recours à des personnes de confiance.

Contrairement à l'agent infiltré, la personne de confiance ne cache pas son identité et elle n'infiltre pas préalablement le milieu criminel. Elle accède à des informations en utilisant ses contacts existants avec la personne qui est cible de l'enquête ou en se trouvant dans le milieu criminel.

Dans l'ensemble, l'utilisation de personnes de confiance ne représente pas une atteinte aussi importante aux droits de la personnalité des personnes visées. Créer une base légale formelle n'est donc pas nécessaire. Les dispositions habilitant la police à enquêter de manière générale suffisent.

Le rapport de mise en oeuvre «La poursuite pénale au niveau fédéral (ProjEff 2)», dont le Conseil fédéral a pris acte le 4 juillet 2007, conclut lui aussi à l'inutilité d'une base légale formelle, mais recommande d'examiner ce point pour des motifs de sécurité du droit.

Le Conseil fédéral estime que la création d'une base légale formelle pour le recours à des personnes de confiance ne s'impose pas, mais qu'elle serait utile.

Comme il l'a exposé dans sa réponse à l'interpellation Banga du 21 juin 2006, il a entrepris de rénover par étapes le droit fédéral régissant la police. Il a présenté dans un premier temps aux Chambres fédérales les messages concernant la loi fédérale sur les systèmes d'information de police de la Confédération (LSIP) et la loi sur l'usage de la contrainte (LUsC). Dans un deuxième temps, le chef du DFJP a chargé fedpol d'élaborer des propositions en vue de la création d'une loi fédérale sur la police. Il examinera la question d'une règlementation légale du recours à des personnes de confiance à cette occasion.

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Recommandation 2

Accorder une priorité élevée à la réduction des affaires en suspens auprès de l'OJI

Le Tribunal pénal fédéral doit accorder une priorité élevée à la réduction des affaires en suspens auprès de l'Office fédéral des juges d'instruction (OJI) et prendre toute mesure utile ­ en collaboration avec les autres autorités de poursuite pénale de la Confédération ­ afin d'éviter la prescription de procédures.

Le Conseil fédéral ne se prononce pas quant à la recommandation 2, qui est de la compétence du Tribunal pénal fédéral.

Il faut néanmoins noter ceci: l'AP-LOAP, envoyé en consultation le 21 septembre 2007, a un haut degré de priorité. Il prévoit une absorption de l'OJI par le MPC. A l'entrée en vigueur de cette loi, l'OJI sera donc supprimé. Les ressources investies aujourd'hui dans les enquêtes préliminaires resteront consacrées à la poursuite pénale, qui en sera renforcée. Le Conseil fédéral préconise que cette loi entre en vigueur dès le 1er janvier 2009. Elle permettrait en effet d'accélérer fortement les procédures.

Recommandation 3

Respecter les exigences découlant des compétences obligatoires de la Confédération

La CdG-N demande au Conseil fédéral de veiller, lors de la mise en oeuvre du projet d'efficacité, et en particulier lors de l'affectation des ressources, à ce que les autorités de poursuite pénale soient en mesure de remplir leur mission avec la diligence nécessaire dans les domaines soumis à la compétence obligatoire de la Confédération.

Le Conseil fédéral accepte la recommandation 3, qui est déjà largement réalisée.

Se basant sur une proposition du DFJP, le Conseil fédéral a décidé, le 4 juillet 2007, de mettre en oeuvre le modèle «concentration des forces» (principes, pôles prioritaires en matière d'infractions, actualisation des priorités). On se réfèrera à l'ensemble du rapport de mise en oeuvre «La poursuite pénale au niveau fédéral (ProjEff 2)» du 16 avril 2007. A partir du 1er janvier 2008, les autorités de poursuite pénale de la Confédération suivront exclusivement la nouvelle orientation adoptée.

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Au vu des expériences faites et de la situation actuelle (analyse de la menace), on a défini l'ordre de priorité et les pôles prioritaires en matière d'infractions ci-dessous: Terrorisme, financement du terrorisme Crime organisé en lien avec la traite d'êtres humains et le trafic de migrants, les stupéfiants et des cas mixtes de blanchiment d'argent, de corruption, etc.

Criminalité économique en tant que partie des compétences obligatoires (blanchiment d'argent, corruption) et au sens des compétences fédérales facultatives Entraide judiciaire passive et les procédures pénales qui en résultent dans la compétence fédérale Prolifération/Explosifs/Armes/Loi sur le contrôle des biens

Priorité

Blanchiment d'argent suite à des annonces MROS Corruption en Suisse Accidents d'aéronefs Violations du secret de fonction

L'ordre de priorité des domaines d'infractions peut être modifié en raison d'événements actuels ou d'un changement brutal de la situation de la menace. Une grande souplesse (priorisation en fonction de l'actualité) est donc nécessaire dans le domaine de la poursuite pénale.

En résumé, le Conseil fédéral constate que les autorités de poursuite pénale de la Confédération orienteront leur activité en fonction de la stratégie arrêtée, dans les limites du droit en vigueur et sans déroger à l'ordre des compétences fixé par le droit. Celui-ci autorise cependant une certaine marge de manoeuvre. Par exemple, le MPC peut déléguer la poursuite d'affaires de droit pénal relevant de son domaine de compétence classique (art. 336, ch. 1 et 3, CP) aux autorités cantonales, conformément à l'art. 18 PPF. Dans son nouveau domaine de compétence (art. 337 et 336, al. 2, CP), il ne peut par contre leur déléguer que les cas simples (art. 18bis PPF). Un changement de pratique en matière de délégation permettrait aux autorités de poursuite pénale de la Confédération de focaliser les ressources en fonction de la nouvelle stratégie. Comme leurs ressources demeureront en principe les mêmes, elles devront nécessairement évaluer de manière plus restrictive leur activité dans leur domaine de compétence obligatoire pour mener davantage de procédures dans le domaine de la criminalité économique (domaine de compétence facultatif), procédures qui demandent beaucoup de moyens.

Un changement de pratique en matière de délégation aura des conséquences directes sur la charge de travail des autorités de poursuite pénale des cantons. Il requerra une étroite collaboration avec ces derniers, collaboration que la Confédération entend d'ailleurs renforcer. Le comité de la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) a donné un avis positif sur la nouvelle orientation le 21 juin 2007, l'approuvant sur le principe.

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L'instruction préparatoire disparaîtra à l'entrée en vigueur du CPP. Les dossiers d'instruction ne changeront donc plus deux fois de mains, ce qui simplifiera la procédure. Autre conséquence: les moyens affectés aujourd'hui à l'OJI (finances et personnel) seront intégrés au MPC.

Fin juin 2008, le DFJP présentera au Conseil fédéral un rapport sur l'application du nouveau modèle au cours du 1er semestre 2008, l'évolution du nombre de cas traités et la coordination avec les cantons. Sur cette base, le Conseil fédéral décidera à quel moment ou à quel rythme il faudra l'informer de l'évolution des pôles prioritaires et des ressources nécessaires. Cette façon de faire garantit que toute l'attention nécessaire sera apportée à la problématique des compétences obligatoires de la Confédération.

Recommandation 4

Définir, à l'échelon du Conseil fédéral, une stratégie supérieure en matière de lutte contre la criminalité

La CdG-N demande au Conseil fédéral de définir, dans le cadre de la réorientation du projet d'efficacité, une stratégie supérieure en matière de lutte contre la criminalité qui bénéficie du soutien du Parlement ou de ses organes compétents en la matière et de veiller à sa mise en oeuvre.

Le Conseil fédéral accepte la recommandation 4 et constate qu'elle est déjà réalisée en grande partie.

Comme on l'a exposé à propos de la recommandation 3, le Conseil fédéral a approuvé la stratégie générale proposée par le DFJP en matière de politique de lutte contre le crime, dans une décision du 4 juillet 2007.

Conformément à la proposition du DFJP du 2 juillet 2007, il est prévu que les pôles prioritaires fixés soient régulièrement examinés (par ex. tous les 4 ans, au rythme des législatures) et, si nécessaire, adaptés en fonction de l'analyse de la menace. Des adaptations extraordinaires suite à des événements extraordinaires ou à une modification radicale de la situation de la menace seront toujours possibles.

Lorsqu'il prendra acte du rapport d'évaluation fin juin 2008, le Conseil fédéral chargera le DFJP de soumettre à nouveau la stratégie à son approbation fin 2011 et de veiller à ce qu'elle reçoive préalablement l'appui soit du Parlement soit de l'instance parlementaire idoine.

Recommandation 5

Garantir l'indépendance du Ministère public de la Confédération

La CdG-N demande au Conseil fédéral de se pencher sans délai sur le dossier du Ministère public de la Confédération et de prendre des mesures garantissant son indépendance et celle des magistrats qui le composent.

Le Conseil fédéral accepte la recommandation 5.

De manière générale, on constate que le Conseil fédéral, dans le cadre de son activité, s'est penché à plusieurs reprises sur des questions liées au MPC et qu'il n'a pas négligé ses tâches de direction. Le chef du DFJP l'a régulièrement informé, à partir 1901

de 2004, sur le dossier «Ministère public de la Confédération». C'est à cette période que le Conseil fédéral a commencé à s'intéresser à la problématique de la surveillance. Rien qu'en 2006, il a été informé sept fois sur ce dossier.

Le Conseil fédéral constate par ailleurs qu'il s'est saisi sans délai du dossier«Ministère public de la Confédération» en ayant recours à des experts indépendants pour évaluer le rapport de la CdG-N. Il a en outre approuvé l'ouverture, par le DFJP, d'une procédure de consultation sur l'avant-projet de LOAP, qui propose une nouvelle réglementation concernant la surveillance du MPC, mais demande aussi aux milieux consultés de prendre position sur d'autres modèles de surveillance.

Pour le reste, on peut se reporter au ch. 1.3.

Recommandation 6

Garantir la liberté d'informer du Ministère public de la Confédération

La CdG-N demande au Conseil fédéral de veiller à clarifier la délimitation entre la liberté d'informer du Ministère public de la Confédération et l'activité d'information de son autorité de tutelle administrative (DFJP).

Le Conseil fédéral est prêt à accepter la recommandation 6. Il estime qu'elle est en voie de réalisation, par le biais du CPP et de l'AP-LOAP, qui se trouve en consultation.

Le Conseil fédéral considère que la réglementation découlant du droit actuel n'est pas satisfaisante. C'est la raison pour laquelle il propose, dans l'avant-projet de LOAP, de confier à l'avenir au Conseil fédéral tant la surveillance administrative que la surveillance matérielle. Selon le nouveau droit, le Conseil fédéral aura la compétence de donner au MPC des instructions générales sur l'information du public. Il examinera de quelle manière il exercera cette surveillance.

3

Au sujet des conclusions relatives à la surveillance du MPC

Comme l'affirme la CdG-N, la règlementation actuelle de la surveillance est lacunaire et peu claire. Le Conseil fédéral partage cet avis et tiendra compte de cet aspect dans le cadre de la consultation sur l'AP-LOAP.

Il est clairement apparu que la bipartition de la surveillance du MPC, qui entraîne un partage de responsabilités infrangibles, présente un défaut intrinsèque. Ainsi, au vu des conflits de compétence qui se sont fait jour après l'entrée en vigueur du projet «efficacité», le Conseil fédéral s'est rapidement prononcé pour une concentration de la surveillance auprès de l'exécutif, opinion qu'il a réitérée par la suite.

Le jurisconsulte du Conseil fédéral et l'expert auquel ce dernier a recouru en matière de procédure pénale, le prof. Niklaus Schmid, défendent également l'idée d'une surveillance confiée à une seule autorité. De leur point de vue, la nomination et la compétence de surveillance devraient être confiées au Conseil fédéral, afin d'éviter les conflits de compétence. Ils considèrent que le Conseil fédéral est mieux à même d'exercer cette tâche qu'un organe du pouvoir législatif ou judiciaire, car il dispose de compétences matérielles plus étendues et qu'il a la possibilité d'assurer la coordi1902

nation nécessaire avec d'autres tâches (en particulier l'entraide judiciaire). Ils relèvent qu'une surveillance par le Tribunal fédéral serait certes la meilleure manière d'assurer l'indépendance du MPC et qu'une surveillance assurée par un organe du pouvoir législatif ou du pouvoir exécutif présente davantage de risques à cet égard.

Selon eux, ces risques pourraient néanmoins être réduits par un aménagement approprié du statut du procureur général dans le droit du personnel et en fixant des limites légales au droit de surveillance.

Le prof. Niklaus Schmid partage le point de vue exprimé par le Conseil fédéral jusqu'ici. Il considère que la subordination du MPC à la surveillance du Conseil fédéral ou du DFJP (option proposée à l'art. 20, al. 1, AP-LOAP) est une solution appropriée en tous points. Il juge envisageables plusieurs types de surveillance mixte. Il relève à cet égard le passage du rapport explicatif du 22 août 2007 relatif à l'AP-LOAP où l'on évoque la possibilité de confier la surveillance au pouvoir exécutif mais de la déléguer à des experts externes, en se fondant sur l'art. 57, al. 1, LOGA. Ces experts exerceraient de facto la surveillance selon les instructions du DFJP ou du Conseil fédéral et sous sa responsabilité. Cette solution, selon le prof.

Schmid, présenterait plusieurs avantages (par ex., elle ne nécessiterait ni modification de loi ni création d'une autorité; les spécialistes pourraient être engagés de manière flexible, en fonction des besoins de la surveillance; ils pourraient être rattachés étroitement à la structure de surveillance du DFJP; etc.).

Le jurisconsulte du Conseil fédéral, quant à lui, propose la création d'une institution et la mise en place d'une procédure garantissant que le Conseil fédéral, autorité de nomination et de surveillance, puisse arrêter lui-même les instructions nécessaires. Il préconise de ne pas confier la surveillance effective à un département mais à un organe composé de spécialistes de divers départements et d'experts externes. Ce comité de surveillance aurait pour tâche la surveillance permanente du MPC mais devrait faire une proposition au Conseil fédéral pour ce qui est des instructions générales et des instructions dans des cas d'espèce données au MPC. Il serait ainsi possible d'éviter les conflits entre le chef du DFJP et le
procureur général de la Confédération tels qu'on a pu en observer dans le cas de Valentin Roschacher et à d'autres occasions précédemment. Le Conseil fédéral serait assisté par un conseil de surveillance indépendant du département.

Le Conseil fédéral a pris acte le 21 septembre 2007 de l'AP-LOAP et du rapport explicatif élaboré par le DFJP, autorisant celui-ci à consulter les cantons, les partis politiques, les associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne qui oeuvrent au niveau national, les associations faîtières de l'économie qui oeuvrent au niveau national et les autres milieux concernés. La consultation durera jusqu'au 31 décembre 2007.

Les destinataires de la consultation ont été priés de prendre position sur l'éventualité d'une surveillance du MPC par le Tribunal fédéral ou toute autre forme de surveillance (compétence du Tribunal pénal fédéral, d'un organe parlementaire, d'un organe spécial mixte ou surveillance partagée entre plusieurs autorités comme aujourd'hui).

Le DFJP s'est déclaré prêt à élaborer et à évaluer l'option «surveillance par le Tribunal fédéral» d'ici à la fin de la consultation.

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Le Conseil fédéral reconsidèrera la question lors de l'évaluation des résultats de la consultation relative à l'AP-LOAP. Il tiendra compte des deux avis de droit et des considérations sur ce sujet exposées dans le rapport de la CdG-N du 5 septembre 2007.

Annexes1: Stellungnahme Prof. Dr. iur. Georg Müller Stellungnahme Dr. iur. LL.M. Niklaus Schmid, em. Professor der Universität Zürich

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Die Stellungnahmen in deutscher Sprache können eingesehen werden unter: http://www.bk.admin.ch/dokumentation/02574/index.html?lang=de

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