05.463 Initiative parlementaire Empêcher les mariages fictifs Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 31 janvier 2008

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification du Code civil, de la loi sur le partenariat du 18 juin 2004 et de la loi fédérale du 20 juin 2003 sur le système d'information commun aux domaines des étrangers et de l'asile, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

31 janvier 2008

Pour la commission: Le président, Gerhard Pfister

2008-0478

2247

Condensé Actuellement, les autorités de l'état civil ne savent pas exactement comment procéder lorsque l'un des futurs conjoints, ou les deux, réside illégalement en Suisse durant la procédure préparatoire. La pratique à cet égard diffère partiellement selon les cantons et les communes.

Avec le présent projet d'acte, la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national souhaite introduire deux nouvelles dispositions visant à clarifier la question du titre de séjour des fiancés durant la procédure préparatoire. D'une part, une révision partielle du Code civil suisse imposera aux fiancés étrangers d'établir qu'ils résident légalement en Suisse. D'autre part, les officiers de l'état civil auront l'obligation de communiquer aux autorités compétentes en matière d'étrangers l'identité des candidats au mariage qui n'ont pas établi la légalité de leur séjour en suisse. Ces dispositions devront être reprises par analogie dans la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, puisque les effets juridiques de cette nouvelle institution sont similaires à ceux du mariage.

Ces deux nouvelles dispositions visent à garantir qu'un mariage ou un partenariat enregistré n'ait lieu que si les deux personnes résident légalement en Suisse. En particulier, les requérants d'asile définitivement déboutés et les étrangers en séjour illégal qui doivent quitter le territoire suisse ne doivent plus pouvoir s'y soustraire en entamant une procédure préparatoire, comme c'est souvent le cas.

Pour remplir cette nouvelle mission, les autorités de l'état civil doivent disposer d'un accès plus étendu au système d'information central sur la migration (SYMIC).

Elles doivent notamment pouvoir y consulter les données relatives à la réglementation du séjour en Suisse des étrangers et aux décisions de renvoi. La loi fédérale sur le système d'information commun aux domaines des étrangers et de l'asile (LDEA) devra être adaptée en conséquence.

Le projet de loi de la commission entend combler une lacune existante, que la nouvelle loi sur les étrangers n'a pas éliminée. Les autorités de l'état civil et les autorités compétentes en matière d'étrangers agiront ainsi de manière coordonnée et la cohérence de l'activité étatique s'en trouvera renforcée. Enfin, des règles claires en matière de droit des étrangers peuvent contribuer à la réduction des mariages fictifs.

2248

Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Initiative parlementaire Brunner Toni du 16 décembre 2005

L'initiative parlementaire déposée par le Conseiller national Toni Brunner le 16 décembre 2005 vise à modifier l'art. 98 du Code civil (CC) du 10 décembre 19071 de façon que les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses soient en possession d'une autorisation de séjour ou d'un visa valables à l'ouverture de la procédure préparatoire. Ainsi, les requérants d'asile définitivement déboutés et les personnes séjournant illégalement en Suisse ne pourront se soustraire à l'obligation de quitter le pays grâce à une procédure préparatoire de mariage.

L'auteur de l'initiative estime que la révision partielle du CC découlant de la nouvelle loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr)2 ne permet pas d'empêcher à coup sûr les mariages fictifs. Elle laisse en effet aux services de l'état civil une certaine marge d'appréciation, puisqu'elle ne définit pas les cas concrets permettant de conclure à un mariage fictif ni les critères fondant le refus d'entamer une procédure préparatoire. L'initiative parlementaire a pour objet de préciser ces critères en introduisant le principe du séjour légal dans le CC.

1.2

Examen préalable par la Commission des institutions politiques

Le 4 juillet 2006, la Commission des institutions politiques du Conseil national (CIP) a donné suite à l'initiative parlementaire par 13 voix contre 7, et 1 abstention.

Le 30 octobre 2006, son homologue du Conseil des Etats a approuvé cette décision par 6 voix contre 4.

Les commissions ont estimé qu'une modification du CC permettrait de prévenir les mariages fictifs impliquant un ou deux conjoints étrangers, et qu'elle apporterait une aide pratique aux autorités de l'état civil et aux autorités compétentes en matière d'étrangers. Selon les CIP, cette révision partielle permettra également de réduire le nombre de mariages conclus dans le seul but d'éluder le droit des étrangers, ce qui représente entre 500 et 1 000 mariages par an selon les estimations publiées par l'Office fédéral de l'état civil en 20043.

1 2 3

RS 210 RS 142.20 IMES, ODR, fedpol et Corps des garde-frontière (AFD), rapport du 23 juin 2004 sur la migration illégale, ch. 1.2.2; l'Office fédéral des migrations (ODM) estime le nombre de ces mariages à 3000 à 5000.

2249

1.3

Mise en oeuvre par la CIP du Conseil national

Réunie le 19 avril 2007 en présence de l'auteur de l'initiative, la CIP s'est penchée sur un document préparé par l'Administration; ce document analysait le fond de l'initiative et proposait différents moyens de la mettre en oeuvre.

La commission a constaté que selon la formulation de l'initiative, même les personnes non soumises à l'obligation de visa (en particulier les ressortissants des pays de l'UE et de l'AELE) et sans permis de séjour ne pouvaient pas se marier en Suisse.

Ainsi, une interprétation littérale du texte ne permettrait plus à une Suissesse d'épouser un Allemand vivant en Allemagne. De même, les touristes non soumis à l'obligation de visa ne pourraient plus se marier en Suisse (cf. art. 43 al. 2 de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé, LDIP4). La commission et l'auteur de l'initiative se sont donc accordés à dire que la formulation devait être revue.

La CIP a retenu une formulation selon laquelle les fiancés étrangers doivent apporter la preuve, au cours de la procédure préparatoire, qu'ils ont le droit de séjourner dans notre pays, et ce jusqu'à la date prévue du mariage. Afin de renforcer l'efficacité de cette disposition, la commission en a également prévu une autre, selon laquelle les officiers de l'état civil sont tenus d'informer les autorités compétentes en matière d'étrangers si une personne désirant se marier séjourne illégalement en Suisse.

Enfin, par souci de cohérence, la CIP a décidé que ces dispositions viendraient compléter les dispositions du CC relatives à la procédure préparatoire, ainsi que celles de la loi fédérale du 18 juin 2004 sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe (LPart)5 relatives à la procédure préliminaire.

Lors de sa séance du 28 juin 2007, la commission a mis ce projet en consultation.

Elle l'a adopté à l'attention de sa chambre, en date du 31 janvier 2008, par 15 voix contre 8 et 1 abstention. La minorité de la commission propose de ne pas entrer en matière sur le projet, considérant que les modifications envisagées ne permettraient d'empêcher qu'un nombre limité de mariages fictifs et qu'elles seraient donc, en réalité, d'une efficacité très relative, à quoi s'ajoute le fait que les dispositions contre les mariages fictifs qui sont intégrées au CC par le biais de la nouvelle loi sur les
étrangers offrent déjà aux officiers de l'état civil des possibilités de sanction en nombre suffisant: plutôt que de renforcer ce dispositif, il vaut mieux dans un premier temps attendre qu'il ait déployé ses effets et en faire le bilan.

1.4

Le droit en vigueur

La célébration du mariage civil constitue une prestation étatique, qui en tant qu'acte formateur, modifie l'état des personnes et déploie d'autres effets en droit privé ainsi qu'en droit public, notamment dans le domaine du droit des étrangers, en tant qu'il confère à l'époux étranger d'une personne suisse ou bénéficiant d'une autorisation de séjour ou d'établissement le droit de demeurer en Suisse auprès du conjoint.

L'enregistrement de partenariats entre personnes de même sexe est réglé de manière analogue.

4 5

RS 291 RS 211.231

2250

A l'heure actuelle, aucune obligation légale n'impose à l'officier de l'état civil qui dirige la procédure préparatoire du mariage de se préoccuper du statut des fiancés en matière de droit des étrangers. Est réservé le cas des mariages manifestement contractés non pas pour fonder une communauté conjugale mais pour éluder les règles sur l'admission et le séjour des étrangers6. L'illégalité du séjour peut en effet constituer un indice d'abus qui avec d'autres éléments (contreprestation financière versée en vue du mariage, remise de stupéfiants, etc.) est susceptible d'amener l'officier de l'état civil à refuser la célébration.

Dans le cadre de la préparation du mariage, l'officier de l'état civil a pour mission de vérifier l'identité et la capacité matrimoniale des fiancés (art. 94, 98 s. CC) et l'absence d'empêchements au mariage (art. 95 s. CC). Le fonctionnaire doit également s'assurer qu'il est compétent pour mener la procédure. Sur le plan international, les autorités de l'état civil suisses sont compétentes pour célébrer le mariage si l'un des fiancés est domicilié en Suisse ou a la nationalité suisse (art. 43, al. 1 LDIP). Sur le plan interne, cette compétence est donnée à l'office de l'état civil du lieu de domicile de l'un des fiancés (cf. art. 98, al. 1 CC). A noter que notre ordre juridique, contrairement à d'autres systèmes qui réservent le mariage à leurs nationaux et résidents, permet en outre à des fiancés étrangers domiciliés à l'étranger de contracter mariage en Suisse. La conclusion de tels mariages dits touristiques ne constitue toutefois pas un droit absolu et nécessite d'être préalablement autorisée par l'autorité cantonale de surveillance de l'état civil. A noter enfin que la conclusion de «partenariats touristiques» en Suisse, soit ceux qui seraient contractés entre deux partenaires étrangers, dont aucun n'est domicilié en Suisse, est par contre exclue (cf.

art. 43, al. 2 et 65a LDIP, 73 de l'ordonnance sur l'état civil; OEC7).

Comme les conditions du mariage, le domicile doit être attesté par un document (cf.

art. 98 CC et 64 OEC). Le type de documents à fournir par les fiancés dans le cas concret est laissé à l'appréciation de l'officier de l'état civil. S'agissant de fiancés étrangers, il est usuel d'exiger la présentation d'un livret d'étranger valable qui constitue
une pièce reconnue, permettant à la fois de vérifier l'identité et le domicile des personnes concernées. Alors que certains offices de l'état civil se contentent de la preuve du domicile suisse d'un seul fiancé, d'autres services exigent que les deux fiancés produisent un certificat relatif à leur domicile actuel, ce qui conduit à refuser de célébrer le mariage de fiancés étrangers qui ne sont pas au bénéfice d'une autorisation de séjour valable en Suisse. La pratique peut ainsi varier d'un canton à l'autre8.

1.5

Résultats de la procédure de consultation

Les propositions de modifications du Code civil et de la LPart ont été approuvées par une grande majorité des participants à la consultation. Des vingt-six cantons et demi-cantons, vingt-et-un les ont acceptées. Seuls cinq cantons (BE, GE, NE, SH et VD) se sont opposés au projet. Des sept partis s'étant prononcés, cinq (PDC, PEV,

6 7 8

Cet abus lié à la législation sur les étrangers est visé par l'art. 97a CC, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2008 au même temps que la nouvelle loi sur les étrangers.

RS 211.112.2 Voir l'interpellation Menétrey-Savary Anne-Catherine 06.3341 «Les mariages binationaux à l'ère du soupçon» et la réponse du Conseil fédéral.

2251

PRD, PLS et UDC) sont favorables au projet, tandis que deux (PSS et PES) l'ont rejeté.

Le projet de loi a également été approuvé par la Conférence des autorités cantonales de surveillance de l'état civil (CEC), l'Association suisse des officiers de l'état civil et l'Association des Communes Suisses. La majorité des autres associations et syndicats d'envergure nationale l'ont refusé. En outre, treize associations ­ qui n'avaient toutefois pas été officiellement invitées à participer à la consultation ­ ont rejeté l'intégralité de ce projet de loi.

Plusieurs cantons (SG, SO, SZ, TG, UR et ZH) auraient souhaité simplifier le contrôle de la réglementation du séjour en Suisse des fiancés étrangers en permettant aux autorités de surveillance de l'état civil de bénéficier d'un accès plus étendu au système d'information central sur la migration (SYMIC).

2

Grandes lignes du projet

2.1

Preuve du séjour légal durant la procédure préparatoire

Si l'officier de l'état civil ne contrôle pas le statut des fiancés en matière du droit des étrangers, les personnes en séjour illégal régularisent de facto leur situation de manière indirecte en déposant leur demande de mariage, du moins pour la durée de la procédure de mariage. Le présent projet de loi entend mettre un terme à cet automatisme et clarifier la situation en matière de statut des étrangers.

Le CC doit déterminer si et à quelles conditions les ressortissants étrangers peuvent solliciter le concours de l'autorité pour contracter mariage en Suisse. La CIP propose donc d'introduire dans le CC (art. 98, al. 4) le principe selon lequel les fiancés étrangers doivent prouver qu'ils séjournent légalement en Suisse.

Les mêmes règles doivent être transposées dans la LPart (art. 5, al. 4). Cela se justifie du fait que cette nouvelle institution constitue le pendant du mariage pour les couples du même sexe et qu'elle entraîne pour l'essentiel des effets similaires à ceux du mariage.

Avec l'obligation pour les officiers de l'état civil de vérifier le statut des fiancés, les décisions des autorités de l'état civil et des autorités compétentes en matière d'étrangers seront désormais harmonisées.

Le souhait, émis lors de la procédure de consultation, d'accorder aux autorités de l'état civil un accès plus étendu au système d'information central sur la migration (SYMIC) a été pris en compte. Les offices de l'état civil et leurs autorités de surveillance devraient notamment pouvoir consulter les données relatives à la réglementation du séjour en Suisse des étrangers et, le cas échéant, aux décisions de renvoi.

Cela devrait faciliter considérablement l'exécution des nouvelles tâches des autorités de l'état civil liées à la procédure de mariage. En conséquence, une adaptation de la loi fédérale sur le système d'information commun aux domaines des étrangers et de l'asile (LDEA) est proposée.

2252

2.2

Obligation de communiquer pour les offices de l'état civil

Une deuxième disposition (nouvel art. 99, al. 4 CC) impose aux offices de l'état civil de communiquer sans délai aux autorités compétentes l'illégalité du séjour de l'un ou des deux fiancés si elle est constatée. Cette disposition vise avant tout à renforcer la collaboration entre les autorités de l'état civil et les autorités compétentes en matières d'étrangers. Elle devra également être introduite dans la LPart (art. 6, al. 4) pour les raisons évoquées plus haut.

3

Commentaire par article

3.1

Code civil

Art. 98, al. 4 (nouveau) Le titre marginal tout comme les al. 1 à 3 sont inchangés. Comme jusqu'ici, l'art. 98 définit la règle de compétence interne s'agissant de la procédure préparatoire du mariage, confiée à l'office de l'état civil du lieu de domicile de l'un des fiancés (al. 1), consacre par ailleurs le principe de la comparution personnelle des fiancés à l'office de l'état civil, eu égard à l'importance du mariage (al. 2), et leur impose d'établir leur identité en même temps qu'elle les oblige à déclarer qu'ils remplissent les conditions du mariage (al. 3).

Le nouvel al. 4, impose aux fiancés étrangers d'établir la légalité de leur séjour en Suisse. Cette preuve doit être apportée au cours de la procédure préparatoire. A noter que la légalité du séjour doit également être donnée au moment prévisible de la célébration. Les documents à présenter seront définis plus précisément dans l'ordonnance sur l'état civil qui devra être complétée à cet égard (cf. art. 64 OEC).

En fonction des besoins et d'entente avec l'Office fédéral des migrations, l'Office fédéral de l'état civil pourra édicter des directives d'application à l'intention des praticiens (cf. art. 84, al. 3, let. a OEC).

Le séjour est légal lorsque le droit en matière d'étrangers et d'asile est respecté. Le séjour est partant conforme à la loi: ­

lorsqu'un ressortissant étranger, non soumis à l'obligation de visa, séjourne en Suisse dans le délai où il est en droit de rester en Suisse sans solliciter une autorisation de séjour (c'est-à-dire jusqu'à 3 mois sans exercer d'activité lucrative). Ce sont avant tout les ressortissants de l'UE et de l'AELE qui ne sont pas assujettis à l'obligation du visa;

­

dès lors que l'étranger dispose du visa nécessaire et séjourne en Suisse dans le délai où il lui est permis d'y demeurer sans autorisation de séjour (c'est-àdire jusqu'à 3 mois sans exercer d'activité lucrative);

­

si l'intéressé est au bénéfice d'une autorisation de séjour ordinaire, d'une autorisation de courte durée ou d'une autorisation d'établissement (permis L, B et C);

­

dans l'hypothèse où le fiancé séjourne en Suisse dans le cadre d'une demande d'asile ou d'une admission provisoire (permis N et F);

2253

­

lorsqu'une personne qui a reçu l'ordre de quitter la Suisse (par exemple un requérant d'asile débouté) s'y trouve encore dans le délai de départ fixé.

Les personnes de nationalité étrangère qui résident à l'étranger et qui souhaitent se marier en Suisse ont la faculté de déposer une demande de visa pour ce faire (pour autant qu'elles soient assujetties à l'obligation de détenir un visa). Un visa est délivré pour la durée de la procédure préparatoire du mariage. Si celle-ci n'est pas achevée au bout de trois mois, une autorisation de séjour de courte durée est accordée après l'entrée en Suisse. Il n'y a pas de droit à l'obtention d'un visa ou d'une autorisation de séjour de courte durée. Toutefois, en rendant leur décision, les autorités doivent tenir compte du droit constitutionnel au mariage (art. 14 de la Constitution; Cst.9) et du droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 de la Convention européenne des droits de l'homme; CEDH10).

Les ressortissants des Etats de l'UE et de l'AELE, à qui l'Accord sur la libre circulation des personnes est applicable, peuvent également s'en prévaloir au cours de la procédure préparatoire du mariage lorsqu'ils exercent une activité lucrative en Suisse ou disposent de moyens financiers suffisants pour leur permettre un séjour sans activité lucrative.

Les personnes qui séjournent en Suisse de manière illégale et qui souhaitent se marier doivent préalablement demander à régulariser leur séjour. Ces personnes doivent en principe séjourner à l'étranger durant le traitement de leur requête. Des exceptions sont toutefois possibles si les conditions d'admission après le mariage sont manifestement remplies et qu'il n'y a aucun indice que l'étranger entend invoquer abusivement les règles sur le regroupement familial (cf. art. 17 LEtr, par analogie). Afin de respecter le principe de la proportionnalité et d'éviter tout formalisme excessif, les autorités pourront fixer un délai de départ à l'étranger, délai dans lequel le mariage devra cas échéant être célébré et le séjour en Suisse réglé. Ici aussi, les autorités doivent prendre en compte le droit constitutionnel au mariage (art. 14 Cst.)

et le droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH).

Conformément aux principes généraux (cf. art. 1 s. Tit. fin. CC), la nouvelle réglementation sera immédiatement applicable aux procédures de préparation de mariage pendantes. Il suit de ce qui précède que les fiancés devront établir la légalité de leur
séjour et l'officier de l'état civil communiquer à l'autorité compétente l'identité des fiancés qui n'auront pas établi la légalité de leur séjour, pour toutes les procédures qui n'auront pas encore été formellement closes au sens de l'art. 99, al. 2 CC.

Art. 99, al. 4 (nouveau) Le titre marginal ainsi que les al. 1 à 3 sont ici aussi inchangés. L'art. 99 définit donc les vérifications auxquelles doit procéder l'office de l'état civil (al. 1). Celui-ci communique ensuite aux fiancés la clôture de la procédure préparatoire et les délais légaux pour la célébration du mariage (al. 2) et fixe d'entente avec eux le moment de la célébration ou leur délivre une autorisation de célébrer le mariage dans un autre arrondissement de l'état civil (al. 3).

9 10

RS 101 RS 0.101

2254

Un nouvel al. 4 doit dorénavant imposer à l'office de l'état civil de communiquer à l'autorité compétente l'identité des fiancés qui n'ont pas établi la légalité de leur séjour en Suisse. Cette norme renforcera le devoir de collaborer entre autorités compétentes en matière d'étrangers et d'état civil, ces dernières étant déjà tenues de communiquer la célébration des mariages et leur refus, conformément à l'art. 97, al. 3, let. c LEtr et les dispositions d'exécutions prévues. La nouvelle prescription a pour effet que le simple dépôt d'une demande en vue de mariage par un fiancé en situation irrégulière doit être communiqué aux autorités en matière d'étrangers. La cohérence de l'activité étatique s'en trouve accentuée.

En ce qui concerne l'application de la disposition pour les procédures de préparation de mariage pendantes, l'on renvoie aux considérations ci-dessus relatives à l'art. 98, al. 4 CC.

3.2

Modification du droit en vigueur

Loi fédérale du 20 juin 2003 sur le système d'information commun aux domaines des étrangers et de l'asile (LDEA)11 Le système d'information central sur la migration (SYMIC), qui sera vraisemblablement introduit en mars 2008, remplacera les banques de données actuellement en vigueur dans le domaine migratoire.

Sur la base des art. 9 et 10 de l'ordonnance SYMIC12, les autorités de l'état civil ne disposent que d'un accès limité aux données de base des étrangers (essentiellement noms et prénoms, date de naissance, nationalité, état civil et numéro personnel).

Pour accorder aux offices de l'état civil et à leurs autorités de surveillance un accès plus étendu, notamment aux données relatives à la réglementation du séjour en Suisse des étrangers et aux décisions de renvoi, une base légale doit figurer dans la LDEA. L'ordonnance SYMIC devra fixer précisément les droits d'accès accordés aux autorités de l'état civil.

Loi fédérale du 18 juin 2004 sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe (LPart)13 Art. 5, al. 4 Le titre marginal et les al. 1 à 3 sont inchangés. L'art. 5 LPart, qui est le pendant de l'art. 98 CC, doit également être complété par un nouvel al. 4, prévoyant désormais que les partenaires étrangers sont tenus d'établir la légalité de leur séjour en Suisse au cours de la procédure préliminaire. Ici aussi, les documents exigés seront précisés dans les dispositions d'exécution, soit dans l'ordonnance sur l'état civil ou, le cas échéant, les directives de l'Office fédéral de l'état civil (cf. supra ch. 3.1).

Art. 6, al. 4 Le titre marginal et les al. 1 à 3 sont inchangés. Un nouvel al. 4 reprend mutatis mutandis le contenu de l'al. 4 de l'art. 99 CC (cf. supra ch. 3.1).

11 12 13

RS 142.51 RS 142.513 RS 211.231

2255

4

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

La révision ne devrait guère entraîner de conséquences financières ou sur l'état du personnel. Elle nécessitera quelques modifications ponctuelles de l'ordonnance sur l'état civil ainsi que, le cas échéant, l'adoption de directives d'application (cf. supra ch. 3.1); ces travaux pourront toutefois être absorbés par les effectifs du Département fédéral de justice et police.

L'élargissement de l'accès des autorités de l'état civil au système d'information central sur la migration (SYMIC) peut également être mis en oeuvre au moyen des ressources à disposition.

5

Relation avec le droit européen

Au plan européen, quatre Etats ont adopté des dispositions analogues à celles envisagées. Il s'agit du Danemark, de la Norvège, des Pays-Bas et du Royaume-Uni.

Danemark: Conformément à l'art. 11a de la loi danoise sur le mariage du 15 janvier 2007, le mariage ne peut être célébré au Danemark que si les fiancés sont citoyens danois ou au bénéfice d'un titre de séjour valable, tel que mentionné dans les dispositions topiques de la loi danoise sur les étrangers. S'il existe des doutes sur la conformité du séjour d'un fiancé, des informations peuvent être demandées au Service de l'immigration.

Norvège: En vertu des art. 5a et 7 de la loi norvégienne sur le mariage, dans sa teneur du 24 juin 1994, les ressortissants étrangers doivent avoir un séjour légal en Norvège pour pouvoir s'y marier; la régularité du séjour doit être établie par pièces par les fiancés à l'instar des autres conditions du mariage.

Pays-Bas: L'art. 44 du Livre premier du Code civil néerlandais prévoit, en cas de mariage ou d'enregistrement d'un partenariat avec un étranger, l'obligation de présenter à l'officier de l'état civil une déclaration du chef de l'autorité compétente en matière d'étrangers sur la régularité du séjour du futur époux ou partenaire. Cette déclaration n'est pas requise lorsque les futurs époux ou partenaires auront leur résidence à l'étranger après la célébration du mariage ou l'enregistrement du partenariat. Elle n'est pas non plus requise pour les futurs époux ou partenaires qui proviennent d'un pays membre de l'UE ou de l'AELE.

La régularité du séjour est vérifiée par l'autorité compétente en matière d'étrangers.

Les autres documents présentés pour la conclusion d'un mariage ou pour l'enregistrement d'un partenariat aux Pays-Bas sont vérifiés par l'officier de l'état civil.

Royaume-Uni: Aux termes de l'art. 19 de la loi britannique de 2004 sur l'asile et l'immigration (Asylum and Immigration Act 2004), un ressortissant issu d'un pays situé en dehors de l'Espace Economique Européen doit être titulaire d'un «visa pour mariage» ou d'un «visa de fiancé(e)» ou bien encore être détenteur d'une autorisation de mariage appelée «certificate of approval» délivrée par le Home Office avant de pouvoir effectuer une déclaration de mariage au Royaume-Uni. En outre, la déclaration doit être faite auprès d'un bureau de l'état civil désigné à cette fin.

2256

En Angleterre et dans le Pays de Galles, ces dispositions ne sont pas applicables aux mariages qui sont célébrés selon les rites de l'Eglise d'Angleterre ou de l'Eglise du Pays de Galles et qui sont précédés de la publication des bans.

6

Constitutionnalité et légalité

Le présent projet s'appuie sur l'art. 122, al. 1 Cst. L'obligation pour les offices de l'état civil de communiquer à l'autorité compétente l'identité des fiancés qui séjournent illégalement en Suisse se fonde également sur l'art. 121, al. 1 Cst.

En tant qu'elle instaure une formalité supplémentaire, la mesure proposée constitue une restriction au droit au mariage garanti par l'art. 14 Cst. Sa constitutionnalité est donc subordonnée au respect des exigences de l'art. 36 Cst. Le texte de la disposition proposée est conforme à la Constitution. Toutefois, pour respecter les exigences qui découlent, en particulier, du principe de la proportionnalité, il s'agira de veiller aussi à ce que cette disposition soit mise en oeuvre de manière conforme à la garantie constitutionnelle du droit au mariage.

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