12.090 Message concernant l'approbation d'une convention entre la Suisse et le Pérou en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 21 novembre 2012

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, le projet d'arrêté fédéral portant approbation de la convention du 21 septembre 2012 entre la Confédération suisse et la République du Pérou en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

21 novembre 2012

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Eveline Widmer-Schlumpf La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

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Condensé La convention avec le Pérou en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune a été signée le 21 septembre 2012.

Cette convention contribuera au bon développement des relations économiques bilatérales. Elle prévoit, il est vrai, des taux d'imposition résiduels relativement élevés (10 % sur les dividendes à partir d'un seuil de participation de 10 % et 15 % en général, 10 % sur les intérêts de prêts bancaires et 15 % en général, 15 % sur les redevances). Toutefois, une clause de la nation la plus favorisée d'application automatique a pu être convenue pour le cas où le Pérou accorderait des taux résiduels inférieurs à un autre Etat. Ainsi, la convention contribuera à maintenir et à promouvoir les investissements suisses au Pérou sans risquer une éventuelle discrimination des investisseurs résidents de Suisse par rapport à ceux d'autres Etats.

Pour l'essentiel, la convention suit le modèle de convention fiscale élaboré par l'Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques (OCDE) ainsi que la pratique suisse en la matière.

Les cantons et les milieux économiques intéressés ont approuvé la conclusion de cette convention.

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Message 1

Considérations générales sur l'évolution de la politique conventionnelle contre les doubles impositions

Les conventions contre les doubles impositions (CDI) constituent un élément essentiel de la politique fiscale. De bons accords dans ce domaine facilitent les activités de l'économie suisse d'exportation, favorisent l'investissement étranger en Suisse et contribuent par là-même à la prospérité de la Suisse et de ses pays partenaires.

La politique conventionnelle de la Suisse en la matière est guidée depuis toujours par la norme de l'OCDE, la mieux à même de nous permettre d'atteindre la prospérité. Elle vise principalement à une répartition claire des compétences en matière d'imposition des personnes physiques et morales, à un impôt résiduel aussi bas que possible sur les intérêts, les dividendes et les redevances, et de manière générale, à prévenir tout conflit fiscal qui serait préjudiciable aux contribuables exerçant une activité internationale. De tout temps, la Suisse a dû manier le compromis pour pouvoir à la fois maintenir chez elle des conditions fiscales avantageuses et faire accepter son système fiscal par ses partenaires internationaux. En effet, en l'absence d'une légitimité internationale, la meilleure des fiscalités perdrait tout intérêt.

Le 13 mars 2009, le Conseil fédéral a décidé que la Suisse reprendrait la norme internationale développée par l'OCDE en matière d'échange de renseignements à des fins fiscales.

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Contexte, déroulement et résultat des négociations

En janvier 2004, des négociations ont eu lieu à Lima en vue de la conclusion d'une convention contre les doubles impositions entre la Suisse et le Pérou. Ces négociations ont permis l'élaboration d'un projet conjoint où un certain nombre de points sont demeurés ouverts et devaient encore être discutés dans le cadre d'une seconde ronde de négociations. Ces négociations n'ont pu reprendre qu'en mai 2011 et ont abouti le 13 mai 2011 à l'apposition des paraphes sur un projet de convention. La convention a été signée à Lima le 21 septembre 2012.

Le Pérou a bénéficié d'une bonne croissance économique, qui lui a permis de figurer parmi les économies dynamiques à l'échelle mondiale. De nombreux investissements, nécessaires au développement de l'infrastructure (par ex. routes, voies ferrées, ports maritimes et aéroports) du pays, jouent un rôle important et permettent de dynamiser notamment tout le Sud du pays sur le plan commercial, touristique et économique en ouvrant des voies d'accès sur un nouveau marché, le Brésil. Disposant d'un vaste secteur énergétique et minier, le Pérou est le troisième pays au monde en réserves d'or, d'argent, de cuivre et de zinc alors que seulement 20 % du territoire à potentiel minier a été exploré à ce jour.

L'accord entre la Suisse et le Pérou concernant la promotion et la protection réciproque des investissements est entré en vigueur le 23 novembre 1993 (RS 0.975.264.1). L'accord de libre échange entre les Etats membres de l'AELE et le Pérou a été ratifié par les deux Chambres du Parlement suisse et par le gouver369

nement péruvien. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2011 (RS 0.632.316.411). La Suisse se trouvait en 2011 au 2e rang (derrière la Chine et devant les Etats-Unis) des exportations totales péruviennes et au 32e rang des importations. En matière d'investissements directs étrangers, la Suisse se situe en 8e position.

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Appréciation

La convention avec le Pérou correspond dans une large mesure au Modèle de convention de l'OCDE (ci-après «Modèle OCDE») et à la pratique conventionnelle suisse en la matière. Les solutions convenues ont dû tenir compte, notamment s'agissant de l'imposition résiduelle des dividendes, intérêts et redevances dans l'Etat de la source, de la politique conventionnelle péruvienne rigide en la matière.

Toutefois, la Suisse a obtenu des clauses de la nation la plus favorisée, donnant ainsi un résultat globalement favorable. Ces règles permettent de développer les relations économiques bilatérales avec un pays qui occupe une position intéressante sur le plan régional, à proximité du grand marché brésilien. Une signature et une entrée en vigueur dans les meilleurs délais possibles sont donc souhaitables du point de vue suisse. Cette convention permettra de placer les entreprises suisses dans une position favorable en terme de compétitivité par rapport aux autres entreprises étrangères présentes au Pérou. Cette convention contribue en outre à l'extension du réseau suisse de conventions contre les doubles impositions en Amérique du Sud.

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Commentaire des dispositions de la convention

La convention suit en grande partie, tant sur le plan formel que matériel, le Modèle OCDE ainsi que la pratique suisse en la matière. Les commentaires qui suivent se limitent aux principales particularités de la convention.

Art. 2

Impôts visés

Le champ d'application matériel de la convention couvre les impôts sur le revenu et la fortune.

Au Pérou, les impôts relèvent avant tout du gouvernement central et sont votés au niveau national. Compte tenu de la sensibilité du Parlement péruvien sur cette question, il n'était pas envisageable du côté péruvien de mentionner dans une convention, en particulier au par. 1 de l'art. 2, une autorité de perception autre que celle de l'Etat. En conséquence, il est précisé dans une disposition du protocole que s'agissant de la Suisse, les impôts perçus par les subdivisions politiques et collectivités locales sont couverts par la convention.

L'impôt anticipé suisse sur les gains de loterie est exclu du champ d'application matériel conformément à la pratique suisse en l'absence de disposition sur les «autres revenus» (cf. ci-après). Dès lors, seul le droit interne de chaque Etat contractant sera applicable dans ces cas.

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Art. 4

Résidence

Le critère du rattachement au lieu de la direction effective pour imposition n'est pas connu en droit interne péruvien. Pour cette raison, pour trancher les cas de double résidence des sociétés, une solution plus souple a été adoptée au par. 3, qui figure déjà dans certaines conventions conclues par la Suisse (avec la Grande-Bretagne et le Mexique, par ex.). Désormais, les cas de double domicile de sociétés seront réglés par la voie de la procédure amiable en se référant notamment aux critères de la direction effective, du lieu d'enregistrement ou de constitution pour attribuer la résidence en recourant aux faits et circonstances pertinents (cf. ch. 4 du protocole).

Tant que l'accord amiable n'est pas intervenu, la société n'a pas le droit de faire valoir les avantages conventionnels à l'exception des articles sur la nondiscrimination et sur la procédure amiable.

Art. 5

Etablissement stable

La convention prévoit une période de six mois dans le cas des chantiers et des activités de surveillance y relatives, et de neuf mois pour les services rendus localement.

Dans l'hypothèse où le Pérou conviendrait d'une durée supérieure à six mois pour la reconnaissance d'un établissement stable (ou d'une base fixe s'agissant d'une profession indépendante) avec un autre Etat membre de l'OCDE, cette disposition s'appliquerait directement à la Suisse en vertu de la clause de la nation la plus favorisée (ch. 6 du protocole). Par ailleurs, comme dans la CDI entre la Suisse et le Chili, une disposition du protocole de la convention (ch. 5), qui vise à éviter des abus, prévoit que la période au cours de laquelle des activités sont exercées dans un Etat contractant par une entreprise associée à une autre entreprise (n'étant pas une entreprise de cet Etat contractant) peut être additionnée à celle de l'entreprise associée pour le calcul de ces périodes de six ou neuf mois pour autant que ces activités soient liées, étant précisé que toute période au cours de laquelle deux ou plusieurs entreprises associées ont réalisé des activités de manière simultanée n'est prise en compte qu'une seule fois.

Art. 7

Bénéfices d'entreprises

Cet article suit les solutions préconisées par le Modèle OCDE, qui avaient été reprises par les négociateurs en 2004. Le Pérou n'est pas encore prêt à suivre la nouvelle version OCDE de l'art. 7 introduite en juillet 2010. Il a toutefois accepté de prévoir au ch. 7 du protocole, une disposition similaire à celle retenue entre la Suisse et le Chili selon laquelle l'imposition des bénéfices d'un établissement stable ne peut porter que sur les bénéfices qui lui sont imputables en se fondant sur le rôle économique effectivement joué par celui-ci. Le ch. 15 du protocole renvoie à la législation péruvienne qui permet à un investisseur d'être imposé à un taux fixe pendant une certaine période conformément à un contrat dit de stabilisation. Cette méthode est optionnelle et peut être dénoncée chaque année. Une disposition comparable figure déjà dans la convention avec le Chili.

Art. 8

Navigation maritime et aérienne

A la demande du Pérou, une définition conventionnelle suffisamment explicite a été insérée dans le protocole (ch. 9) en ce qui concerne les bénéfices des entreprises maritimes et aériennes, ainsi que certaines de leurs activités accessoires pouvant être 371

couvertes par les principes d'imposition applicables à l'activité principale. Cette clarification est conforme au commentaire du Modèle OCDE.

Art. 9

Entreprises associées

Conformément à la politique conventionnelle suisse en la matière, le libellé du par. 2 de l'art. 9 du Modèle OCDE a été repris, en précisant expressément que le second Etat ne procède à des ajustements corrélatifs du bénéfice que s'il reconnaît le bienfondé du redressement opéré par le premier Etat.

Art. 10

Dividendes

La politique suivie par le Pérou est très rigide dans le domaine des taux d'impôts résiduels revenant conventionnellement à l'Etat de la source. La seule marge de manoeuvre réside dans le seuil de participation. La solution retenue prévoit un taux de 10 % pour des participations de 10 % (capital et droits de vote) et de 15 % dans les autres cas. Une clause de la nation la plus favorisée universelle (non limitée aux Etats tiers membres de l'OCDE) garantit automatiquement à la Suisse un traitement plus favorable que le Pérou accorderait dans ce domaine à n'importe quel Etat tiers (ch. 10, let. a du protocole). Les bénéfices d'un établissement stable péruvien attribuables à une société suisse peuvent être soumis au Pérou à un impôt supplémentaire («branch profits tax») limité toutefois au taux de 10 % conformément aux politiques souvent suivies par des pays aux économies émergentes.

Une disposition anti-abus correspondant à la politique suisse a été insérée dans le protocole (ch. 10, let. b) et règle ainsi de manière acceptable pour la Suisse l'approche plus restrictive préconisée initialement par le Pérou. En effet pour ce pays, le simple fait qu'un contribuable mette en place une structure qui permette de jouir des avantages de la convention justifiait une exclusion de ces avantages. Sur proposition suisse, et comme dans la convention entre la Suisse et le Chili, les dispositions des art. 10, 11 et 12 concernant les dividendes, intérêts et redevances ne sont pas applicables en présence d'un système de relais («conduit arrangement») mis en place par un résident d'Etat tiers dans le but principal d'obtenir les avantages découlant de la convention. On a affaire à un système de relais lorsqu'un résident d'un Etat contractant organise une opération commerciale dans le but principal d'obtenir des avantages fiscaux auxquels il ne pourrait prétendre en relation avec une convention en vue d'éviter les doubles impositions. Cette solution s'inscrit dans le développement de la politique et de la pratique conventionnelles de la Suisse contre l'utilisation abusive des conventions contre les double impositions. Elle vise à empêcher qu'un résident d'un Etat tiers non contractant puisse bénéficier des avantages d'une convention de double imposition en utilisant une personne (le plus souvent une société) résidente d'un Etat contractant comme relais, précisément dans l'intention de bénéficier des avantages fiscaux prévus par cette convention.

Art. 11

Intérêts

En dépit des pressions suisses visant à obtenir des exonérations pour certaines catégories (contre un taux général de 10 %), la rigidité de la politique péruvienne implique de retenir un taux général de 15 % assorti d'exceptions au taux de 10 % dans le cas des intérêts en liaison avec la vente à crédit d'équipements industriel, commercial ou scientifique ou des intérêts de prêts bancaires. Ici également, une 372

clause de la nation la plus favorisée universelle (non limitée aux Etats tiers membres de l'OCDE) et d'application automatique a pu être obtenue. Une disposition du protocole (ch. 11) prévoit que les différences entre le prix de vente et le prix de rachat dans le cas de transactions Repo ou de prêts garantis par des titres peuvent être traitées comme des intérêts.

Une disposition anti-abus correspondant à la politique suisse figure aussi dans le protocole (cf. les explications ci-devant concernant les dividendes).

Art. 12

Redevances

Comme pour les dividendes et les intérêts, la question du taux ne fait l'objet d'aucune flexibilité de la part du Pérou. Un taux de 15 % a été retenu. Toutefois, le leasing est exclu de ce champ et tombe ainsi sous le coup de l'art. 7 (ch. 8 du protocole). La définition des redevances couvre l'imposition des services numériques fournis par Internet et l'assistance technique. La rémunération de ces services est en revanche soumise à un taux de 10 %.

S'agissant de la relation entre cette imposition à la source des services numériques et d'assistance technique avec l'imposition des services rendus localement pendant plus de 9 mois prévue à l'art. 5, par. 3, let. b), il est clair que l'art. 12 sera applicable tant qu'un établissement stable n'aura pas été constitué. Dès qu'un tel établissement stable au titre de services rendus localement pendant plus de neuf mois aura été reconnu, le régime préconisé par les art. 7 et 5 prévaudra sur celui fixé à l'art. 12, par. 3. En d'autres termes, l'impôt à la source de 10 % ne pourra pas être prélevé sur les rémunérations de services en plus de l'imposition des bénéfices de cet établissement stable au titre de services rendus localement.

Comme pour les dividendes et les intérêts, une clause de la nation la plus favorisée universelle (non limitée aux Etats tiers membres de l'OCDE) et d'application automatique est également insérée.

Une disposition anti-abus correspondant à la politique suisse est contenue dans le protocole (cf. ci-devant les explications concernant les dividendes).

Art. 13

Gains en capital

Le par. 4 de cet article prévoit, à l'instar d'autres conventions suisses contre les doubles impositions, que les gains provenant de l'aliénation d'actions ou d'autres droits analogues dans une société dont la fortune est, directement ou indirectement, composée pour plus de 50 % de biens immobiliers situés dans un Etat contractant sont imposables dans cet Etat. Du côté suisse, il a été fixé dans l'article sur les méthodes pour éliminer les doubles impositions (art. 22, par. 2, let. a) que la Suisse ne doit exonérer de tels gains qu'après justification de l'imposition au Pérou.

La demande péruvienne d'introduire un droit illimité en faveur de l'Etat de la source en vue de l'imposition des actions des autres sociétés péruviennes a été réduite par une clause (par. 5) limitée aux actions traitées sur le marché boursier péruvien (2,5 % du montant net) ou dont la transaction est effectuée au Pérou (8 % du montant net) et aux autres actions péruviennes (15 % du montant net), qu'elles soient détenues directement ou indirectement.

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Art. 14

Professions indépendantes

Comme dans d'autres CDI conclues par la Suisse, en sus du critère de la base fixe, un critère de rattachement supplémentaire pour imposition est prévu en faveur de l'Etat du lieu d'activité par la let. b) du par. 1 en cas de séjour d'au moins 183 jours.

Comme indiqué dans les commentaires concernant l'art. 5, cette période a fait l'objet d'une clause de la nation la plus favorisée par rapport à d'autres solutions plus favorables que le Pérou conviendrait avec un Etat tiers membre de l'OCDE (ch. 6 du protocole).

Art. 18

Pensions

Comme le Pérou n'impose pas les pensions de source étrangère, une disposition du protocole (ch. 12, let. b) a été insérée à la demande de la Suisse. Cette clause permet à la Suisse de conserver le droit d'imposer, tant que les pensions ne subissent pas une imposition effective au Pérou. Cette solution permet ainsi d'éviter des doubles exonérations de pensions ou prestations en capital provenant de la prévoyance professionnelle dont les cotisations ont été déduites en Suisse.

Autres revenus Le Pérou ne pouvait admettre que le principe de la source en ce qui concerne l'imposition des autres revenus. Une disposition prévoyant ­ de manière générale ­ une imposition dans l'Etat de la source du revenu aurait été désavantageuse pour la Suisse qui aurait dû renoncer, à défaut de base légale interne, à exercer un droit d'imposition sur certaines catégories de revenus (s'agissant, par ex., des versements de pensions alimentaires d'un résident de Suisse à un résident du Pérou). Les deux parties sont donc convenues de régler cette question, de portée relativement mineure, en ne maintenant pas de clause «autres revenus» dans la convention. Ce cas de figure s'est présenté dans d'autres conventions conclues par la Suisse (comme avec le Chili, par ex.). Le ch. 1 du protocole précise que les revenus non expressément mentionnés (comme les gains en loterie) sont imposés conformément au droit interne de chaque Etat contractant.

Art. 22

Elimination des doubles impositions

Le Pérou applique la méthode de l'imputation, assortie de la méthode de l'exonération. Il accorde également une imputation de l'impôt sur les sociétés sous-jacent.

La Suisse pratique sa méthode habituelle de l'exonération sous réserve de progressivité. Conformément à sa politique, la Suisse conserve cependant la possibilité d'imposer les gains en capital provenant de la vente des titres de sociétés immobilières si ces gains n'ont pas été effectivement imposés au Pérou. L'imputation forfaitaire est prévue pour les dividendes, intérêts et redevances.

Art. 24

Procédure amiable

La proposition suisse d'introduire une clause d'arbitrage ne correspond pas à la politique péruvienne, pas plus que celle d'insérer une clause de la nation la plus favorisée prévoyant l'application automatique de la clause au cas où le Pérou concèderait l'arbitrage dans un accord avec un Etat tiers. La Suisse a pu toutefois obtenir

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un engagement à ouvrir le cas échéant des négociations (ch. 13 du protocole) en vue d'introduire une telle clause si la politique du Pérou évolue dans ce domaine.

Art. 25

Echange de renseignements

Dans un contexte de globalisation des marchés financiers et surtout de crise financière, la coopération internationale en matière fiscale revêt une importance accrue.

La Suisse soutient les efforts déployés dans ce domaine. En retirant sa réserve à l'art. 26 du Modèle OCDE, la Suisse s'est engagée politiquement à reprendre la norme internationale dans ce domaine.

La disposition paraphée reprend, pour l'essentiel, le texte de l'art. 26 du Modèle OCDE. Quelques modifications lui ont été apportées pour limiter le champ d'application matériel aux impôts visés par la convention et pour donner expressément aux Etats contractants le droit d'appliquer les mesures de contrainte nécessaires à l'exécution des demandes de renseignements envers une banque, un autre établissement financier, un mandataire ou une personne agissant en tant qu'agent fiduciaire et à la détermination des rapports de participation. Ces modifications sont compatibles avec la norme internationale en matière d'assistance administrative.

Le par. 1 pose le principe de l'échange de renseignements. Il prévoit l'échange des renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la convention ou pour l'administration ou l'application de la législation interne relative aux impôts visés par la convention. La limitation aux renseignements qui sont vraisemblablement pertinents exclut la pêche aux renseignements. En outre, l'Etat requérant est tenu de recourir à tous ses moyens d'enquête avant de présenter une demande de renseignements à l'autre Etat. Pour l'échange de renseignements, il n'est pas nécessaire que le contribuable concerné soit un résident de Suisse ou du Pérou. Il suffit qu'il y ait un rattachement économique avec l'un des Etats contractants.

Le par. 2 est consacré au principe de confidentialité. Cette disposition prévoit que les renseignements obtenus ne peuvent être communiqués qu'aux personnes ou autorités concernées par l'établissement et le recouvrement des impôts couverts par la convention, par les procédures et poursuites concernant ces impôts, ou par les décisions sur les recours relatifs à ces impôts. Ces renseignements peuvent donc être communiqués aussi au contribuable ou à son représentant. Pour limiter le cercle des personnes ayant accès aux renseignements transmis et ainsi réduire le risque
d'abus, la Suisse s'efforce d'exclure la transmission des renseignements aux organismes de contrôle. Cette dérogation a été admise par le Pérou.

Ce paragraphe prévoit en outre que les renseignements reçus peuvent être utilisés à d'autres fins que des fins fiscales si cette possibilité est prévue par les lois des deux Etats contractants et si l'Etat qui fournit les renseignements donne son consentement à cette utilisation. Cette disposition permet par exemple d'utiliser les renseignements obtenus dans le cadre d'une autre procédure pénale, sans retirer à la personne concernée ses droits de procédure distincts en Suisse. Cette disposition permet d'éviter d'avoir à rechercher et à transmettre plusieurs fois les mêmes informations à des fins différentes. Dans tous les cas, le consentement de l'Etat qui fournit les renseignements est requis.

Le par. 3 contient certaines limitations à l'échange de renseignements en faveur de l'Etat requis. Il est prévu que celui-ci n'est tenu ni de prendre des mesures adminis375

tratives allant au-delà des limites prescrites par sa propre législation ou par sa pratique administrative, ni de prendre des mesures administratives qui ne seraient pas autorisées par la législation ou par la pratique administrative de l'Etat requérant.

Pour la Suisse, cela implique notamment que le droit d'être entendues des personnes concernées ainsi que les droits de recours sont protégés. En outre, l'Etat requis n'est pas obligé de fournir des renseignements qui ne peuvent être obtenus selon sa propre législation ou sa propre pratique administrative ou qui ne peuvent être obtenus selon la législation ou la pratique administrative de l'Etat requérant. Enfin, l'Etat requis peut refuser de communiquer des renseignements qui révéleraient un secret commercial ou qui seraient contraires à l'ordre public, ce qui pourrait être le cas lorsque les renseignements transmis ne sont pas suffisamment tenus secrets.

Le par. 4 prévoit que l'Etat requis a l'obligation de déterminer et de communiquer les renseignements demandés même lorsqu'il n'en a pas besoin à ses propres fins fiscales. L'échange de renseignements n'est donc pas limité aux seuls renseignements qui présentent aussi un intérêt pour les autorités fiscales de l'Etat requis.

Le par. 5 contient des dispositions particulières concernant les renseignements qui sont détenus par des banques ou d'autres intermédiaires, ou qui concernent les droits de propriété d'une personne. De tels renseignements doivent être échangés nonobstant les limitations prévues au par. 3. L'Etat requis doit également pouvoir obtenir et transmettre les renseignements demandés même lorsque ces renseignements ne seraient pas disponibles en vertu de sa propre législation ou de sa pratique administrative. Par conséquent, la Suisse ne peut refuser de communiquer des renseignements en invoquant uniquement le secret bancaire suisse.

En cas de fraude fiscale, la Suisse dispose, avec la procédure pénale prévue par son droit interne, des moyens nécessaires pour se faire remettre les renseignements visés au par. 5. L'échange de renseignements prévu par la convention ne présuppose toutefois plus l'existence d'une fraude fiscale. Afin de permettre aux Etats contractants d'assurer la mise en oeuvre des nouvelles obligations conventionnelles, la dernière phrase du par. 5 constitue la base
légale nécessaire pour leur donner les pouvoirs dont ils ont besoin pour obtenir les renseignements demandés.

S'agissant de la hiérarchie des normes, selon les conceptions péruvienne et suisse, le droit international public prévaut sur le droit interne. En ce qui concerne le par. 5, une proposition péruvienne du protocole (ch. 14, let. f) a donc été admise selon laquelle les Etats contractants tiennent compte des restrictions constitutionnelles pertinentes, des procédures légales et du traitement de réciprocité. Il convient de relever que le Pérou connaît un secret bancaire protégé constitutionnellement. Les données de dépôts bancaires ne sont accessibles qu'à l'administration fiscale, à la justice et au parlement péruvien. L'administration fiscale peut demander ces informations bancaires par voie judiciaire. Selon le système péruvien, les délais sont courts: le juge dispose de trois jours pour décider et requérir l'information, la banque dispose quant à elle de dix à quinze jours pour donner l'information. Par conséquent, l'assistance administrative avec la Suisse ne sera pas entravée.

Le protocole mentionne expressément les principes de la subsidiarité et de l'interdiction de la pêche aux renseignements (ch. 14, let. a et c).

De plus, il prévoit les informations qui doivent figurer dans une demande de renseignements (ch. 14, let. b). L'identité du contribuable concerné ainsi que, dans la mesure où ils sont connus, les noms et adresse de la personne (par ex. une banque)

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présumée être en possession des renseignements demandés sont notamment nécessaires.

Jusqu'il y a peu, selon la norme internationale en matière de demandes de renseignements, l'échange de renseignements était limité à des demandes concrètes dans des cas précis. Cependant, à l'échelle internationale, des discussions ont abouti en juillet 2012 à l'OCDE pour étendre cette norme et admettre les demandes concrètes également lorsque celles-ci portent sur un groupe clairement défini de contribuables, dont il faut supposer, en raison de nombreux indices, qu'ils n'ont pas satisfait à leurs obligations fiscales dans l'Etat requérant. La Suisse ne répondra à des demandes en ce sens qu'à partir de l'entrée en vigueur de la loi du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative fiscale (FF 2012 7623). La convention correspond à ce standard étendu.

L'obligation d'un Etat contractant d'échanger des renseignements spontanément ou automatiquement est expressément exclue; néanmoins, la possibilité pour ces Etats de procéder à un échange spontané ou automatique de renseignements en matière d'assistance administrative internationale demeure si leur droit national le prévoit (ch. 14, let. d).

Enfin, les droits de procédure des contribuables sont garantis (ch. 14, let. e).

Dans le procès-verbal de négociations, il a pu être fixé qu'aucune suite ne serait donnée à une demande d'assistance présentée sur la base de données (bancaires) volées.

Art. 27

Entrée en vigueur

La convention entrera en vigueur à la date de réception de la dernière des notifications concernant l'achèvement des procédures internes requises en vue de son entrée en vigueur. Ses dispositions seront applicables aux périodes fiscales commençant dès le 1er janvier, ou après cette date, suivant l'entrée en vigueur.

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Conséquences financières

Dans toute CDI, les deux Etats contractants renoncent à certaines recettes fiscales.

Pour la Suisse, les pertes qui découlent de la présente convention résultent du remboursement partiel de l'impôt anticipé sur les dividendes et les intérêts, ainsi que de l'imputation de l'impôt à la source péruvien prélevé sur les dividendes, les intérêts et les redevances. Ces pertes, qui ne peuvent être chiffrées par manque d'instruments adéquats, seront partiellement compensées du fait que ces mesures augmenteront l'attrait de la place économique suisse, ce qui devrait se traduire par un apport de recettes supplémentaires dans le cadre des impôts directs.

Les cantons et les milieux économiques intéressés ont approuvé la convention. Dans l'ensemble, elle contribuera au maintien et au développement des relations économiques bilatérales, ce qui s'inscrit dans le cadre des buts principaux de la politique suisse en matière de commerce extérieur.

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Constitutionnalité

La présente convention est fondée sur l'art. 54 de la Constitution (Cst.; RS 101) qui attribue à la Confédération la compétence en matière d'affaires étrangères. En vertu de l'art. 166, al. 2, Cst., l'Assemblée fédérale est compétente pour approuver la convention. Conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités d'une durée indéterminée qui ne sont pas dénonçables, qui prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou qui contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre nécessite l'adoption de lois fédérales sont sujets au référendum en matière de traités internationaux. Conclue pour une durée indéterminée, la présente convention peut être dénoncée en tout temps pour la fin d'une année civile moyennant un préavis de six mois. Elle n'implique pas d'adhésion à une organisation internationale. Conformément à l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (RS 171.10), sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences.

L'assistance administrative est accordée de manière étendue, conformément au standard international en la matière, ce qui correspond à la politique conventionnelle suisse récente dans ce domaine. La convention contient donc un nouvel engagement important pour la Suisse. En conséquence, l'arrêté fédéral portant approbation de la convention en vue d'éviter les doubles impositions entre la Suisse et le Pérou est sujet au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

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