13.104 Message relatif à l'arrêté fédéral portant prolongation de la participation de la Suisse à la Kosovo Force multinationale (KFOR) du 29 novembre 2013

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral simple portant prolongation de la participation de la Suisse à la Force multinationale du Kosovo (Kosovo Force, KFOR), en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

29 novembre 2013

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2013-2326

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Condensé Le présent arrêté fédéral simple doit permettre de prolonger jusqu'au 31 décembre 2017 l'engagement de la «Swiss Company» (Swisscoy) dans la Force multinationale du Kosovo (Kosovo Force, KFOR); cet engagement, qui avait été décidé le 8 juin 2011 par l'Assemblée fédérale, devait prendre fin le 31 décembre 2014. Il est prévu de porter à 235 militaires l'effectif maximal du contingent, qui est actuellement de 220. En contrepartie, le renforcement maximal possible sera limité en temps et en hommes: en lieu et place d'un renforcement de 80 militaires pendant douze mois, le Conseil fédéral sera en effet autorisé désormais à augmenter le contingent actuel de 60 militaires supplémentaires au maximum pour une durée de quatre mois au plus.

Quatorze ans après l'intervention militaire de la KFOR et cinq ans après sa déclaration unilatérale d'indépendance, le Kosovo, en dépit d'un engagement important de la communauté internationale en termes de finances et de personnel, a encore besoin de soutien pour ce qui est de l'instauration de structures propres à un Etat de droit et de l'accomplissement de ses tâches sur l'ensemble de son territoire. Depuis la proclamation de son indépendance, plus de 100 Etats membres des Nations Unies ont reconnu le Kosovo, consacrant ainsi le droit à l'existence du pays. Néanmoins, l'économie ne se développe que très lentement. La perspective d'un progrès économique au Kosovo s'amenuise encore en raison de la crise financière et économique qui sévit actuellement en Europe. Sur le plan international, le Kosovo devra donc encore être soutenu par des moyens conséquents en termes de finances et de ressources humaines pour pouvoir relever les défis qui se présentent à lui dans les domaines de la sécurité, de l'Etat de droit, de la démocratie et des droits de l'homme.

Suite à la signature, en avril 2013, de l'accord de normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo, la stabilité de la région dépend essentiellement de la base de confiance que le Kosovo développe envers les Serbes sur son territoire, en particulier dans le nord du pays. Après que Belgrade a montré sa volonté de renoncer à soutenir les Serbes du Kosovo pour poursuivre sa volonté d'intégration dans l'Union européenne (UE), Pristina doit encore démontrer que les droits de l'homme et les revendications
légitimes de ce groupe de population sont réellement pris au sérieux. La stabilité au Kosovo dépend toutefois aussi, et dans une large mesure, de la disposition des Serbes du Kosovo présents dans le nord du pays à coopérer avec le gouvernement central.

L'accord entre Belgrade et Pristina représente une percée, et la situation en matière de sécurité s'est améliorée ces dernières années. Tandis que le sud est demeuré, dans une large mesure, calme et stable depuis la déclaration d'indépendance, le nord reste instable. Cela vaut en particulier pour les quatre communes majoritairement peuplées de Serbes du Kosovo. On estime généralement que si les incidents violents ont été pratiquement inexistants depuis 2011, c'est en raison de l'ouverture des discussions entre les gouvernements de Belgrade et de Pristina. Avec la mise en oeuvre de l'accord signé en avril 2013 à Bruxelles, il faut s'attendre à un risque

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accru d'aggravation ponctuelle de la situation à court ou à moyen terme. En matière de sécurité, la suppression des structures parallèles serbes correspondantes en particulier, peut, à moyen terme, conduire à un vide dans ce domaine au nord du pays et à une augmentation des épisodes de violence. D'une façon générale, il faudra vraisemblablement attendre encore plusieurs années avant que les forces de sécurité kosovares parviennent à assurer par elles-mêmes la sécurité au nord du pays.

La mission de la KFOR, qui consiste à garantir un environnement sûr, ne peut toujours pas être assumée intégralement par des acteurs locaux, ce qui fait que la présence d'une force militaire internationale sur place demeure pour l'instant nécessaire. Depuis 1999, cette présence est assurée par l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan). Toutefois, diverses réflexions portant sur la possibilité de transférer la responsabilité de l'engagement à l'UE ont lieu périodiquement. Une démarche de ce type, analogue à celle par laquelle la Force multinationale de l'Union européenne (EUFOR ALTHEA) en Bosnie et Herzégovine a repris le mandat de stabilisation de la SFOR de l'Otan (Stabilization Force, SFOR), est tout à fait concevable. Reste à déterminer si elle est réalisable au Kosovo. De l'avis du Conseil fédéral, un engagement militaire de la Suisse dans ce pays sous la conduite de l'UE serait également envisageable. On sait que la Suisse participe à la mission de stabilisation EUFOR ALTHEA sous l'égide de l'UE. Mais sa participation à une mission EUFOR au Kosovo supposerait qu'elle soit investie d'un mandat exécutif des Nations Unies.

La KFOR en est à la deuxième étape (appelée «Gate 2») de la réduction de ses effectifs, dans le cadre du passage à une force de dissuasion («Deterrent Presence»). Les prochaines étapes sont d'ores et déjà fixées. Il est prévu de poursuivre ce processus de réduction avec «Gate 3». Dans cette optique, il est impératif de poursuivre la pacification et la stabilisation de la situation en matière de sécurité au Kosovo. La transition devra se faire une fois que les critères déterminants auront été remplis. Actuellement, l'Otan considère qu'elle n'aura pas lieu avant 2015. La KFOR comptera alors encore quelque 2500 militaires engagés sur place. La possibilité d'une augmentation rapide des
troupes présentes au Kosovo par des réserves clairement définies est maintenue. La réduction prévue des troupes sur place se traduira une nouvelle réduction des contingents d'infanterie, la structure de commandement actuelle sera encore simplifiée et les prestations logistiques, aujourd'hui encore fournies partiellement au niveau national, seront centralisées à l'échelon de la KFOR. La recherche et l'évaluation de renseignements et d'informations ne connaîtraient pour leur part que des changements mineurs.

La Swisscoy a continuellement adapté son profil de prestations depuis le début de l'engagement. Les modifications répondaient toujours aux besoins de la KFOR et donnaient à l'Armée suisse la possibilité de mettre en avant ses points forts. Ainsi, les différentes adaptations effectuées au niveau opérationnel et sur le plan des effectifs de la KFOR ont eu, depuis le printemps 2010, des conséquences sur la structure de la Swisscoy. Les prestations fournies par l'Armée suisse demeureront nécessaires ­ au moins lors de la prochaine étape de réduction ­ car il s'agit de prestations dites de soutien. Les étapes de réduction ultérieures, c'est-à-dire celles

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qui vont au-delà de «Gate 3», devraient avoir des conséquences pour le profil et l'effectif du contingent suisse.

A l'heure actuelle, la Swisscoy exploite quatre équipes de liaison et de surveillance (Liaison and Monitoring Teams, LMT), soit deux au sud et deux au nord du Kosovo.

Depuis janvier 2012, la Suisse assure, en outre, le commandement du détachement régional interarmées (Joint Regional Detachment, JRD) pour les six LMT engagées au nord du Kosovo. Avec les deux hélicoptères stationnés sur place, la Suisse met à la disposition de la KFOR la plus importante capacité de transport aérien. Sur la base des besoins effectifs sur place, l'Armée suisse se tient en outre prête, depuis septembre 2013, à mettre à la disposition de la KFOR une équipe et un hélicoptère supplémentaires pour une durée maximale de deux mois. De plus, ces dernières années, la Swisscoy s'est affirmée dans les domaines du génie et de la logistique comme un partenaire fiable de la KFOR et des Etats engagés militairement. Elle comprend par ailleurs une équipe chargée de l'élimination des munitions non explosées et un détachement de la police militaire.

Le maintien de la stabilité dans les Balkans demeure une tâche centrale des Etats européens et va clairement dans le sens des intérêts de la Suisse. Comme en atteste le passé, la Suisse est directement concernée par les événements survenant dans le sud-est des Balkans. Près de dix pour cent de tous les Kosovars vivent en Suisse, et si le Kosovo devait connaître une nouvelle agitation, cette proportion pourrait à nouveau augmenter. L'engagement de la Swisscoy au sein de la KFOR sert donc la sécurité nationale de la Suisse.

La Suisse a été l'un des premiers Etats à reconnaître le Kosovo. Elle entretient un dialogue politique intense avec Pristina et Belgrade et s'investit dans leur coopération. La Swisscoy est un élément essentiel de cet engagement extérieur qui a débuté il y a plusieurs années. Elle contribue directement au maintien de la sécurité au Kosovo et est aussi un garant de la stabilité régionale pour les pays voisins, en particulier la Serbie. Elle contribue ainsi également à la sécurité de la Suisse. La participation à la KFOR a notamment pour effet que la Suisse est perçue, tant par les Etats européens et l'Otan que par les Etats des Balkans occidentaux, comme un
partenaire fiable et engagé.

Ne pas prolonger l'engagement porterait atteinte à notre politique extérieure dans la mesure où elle remettrait en cause la fiabilité de la Suisse, du moins aux yeux de nos partenaires européens, en particulier limitrophes, et des populations des Balkans occidentaux. A cela s'ajoute que la Suisse assumera la présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 2014: c'est peu dire qu'il serait malvenu qu'elle annonçât précisément pendant cette présidence vouloir renoncer à prolonger l'engagement de la Swisscoy, alors même que le Kosovo constitue pour l'OSCE une priorité.

L'engagement au Kosovo est la pièce maîtresse de l'engagement de la Suisse dans la promotion militaire de la paix, sans laquelle, à l'heure actuelle, les autres composantes de l'engagement ne pourraient déployer pleinement leurs effets. Sans la Swisscoy, la promotion de la paix par l'armée se réduirait à environ 70 militaires.

Le Conseil fédéral a décidé, dans le rapport sur la politique de sécurité 2010

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(FF 2010 4681) et dans le rapport sur l'armée 2010 (FF 2010 8109) d'étendre cet engagement en doublant les effectifs dévolus à la promotion militaire de la paix, avec l'aval du Parlement.

La planification financière actuelle pour les années 2015 à 2017 prévoit des coûts annuels de 42,6 millions de francs pour l'engagement de la Swisscoy. Le budget prévu pour une Swisscoy forte de 235 militaires s'élève à 44,2 millions de francs. Le surcoût par rapport à la planification financière actuelle n'entraîne pas un relèvement du plafond des dépenses de l'armée. Il en va de même de l'augmentation temporaire de 60 personnes au plus pendant quatre mois. Le budget de 5,9 millions de francs au maximum prévu à cet effet peut donc s'inscrire dans le plafond des dépenses de l'armée.

Le 31 décembre de chaque année, le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports remet un rapport intermédiaire sur l'engagement de la Swisscoy aux Commissions de politique extérieure et aux Commissions de la politique de sécurité du Conseil national et du Conseil des Etats.

Toutes les indications contenues dans le présent message se réfèrent à la situation qui prévaut au début de novembre 2013. A l'heure actuelle, rien ne permet de prédire comment la situation politique évoluera. Les Chambres fédérales seront cependant informées, lorsqu'elles examineront le message, des résultats et des conséquences des élections de novembre 2013, ainsi que des résultats rencontrés dans la mise en application de l'accord conclu en avril 2013 entre Belgrade et Pristina.

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Message 1

Evaluation de la situation au Kosovo

1.1

Contexte

Depuis octobre 1999, l'Armée suisse participe à la Kosovo Force (KFOR) en fournissant un contingent (Swiss Company, Swisscoy). La KFOR a été instaurée par la résolution 1244 des Nations Unies du 10 juin 19991. La décision quant à la participation militaire de la Suisse a été prise par le Conseil fédéral le 23 juin 1999. Par arrêté fédéral du 12 septembre 20012, l'Assemblée fédérale a approuvé la participation de la Suisse à la KFOR, puis la prolongation de cette participation jusqu'à fin 2014 dans le cadre d'autres arrêtés fédéraux. La Swisscoy se compose actuellement d'un effectif maximal de 220 militaires volontaires, armés pour assurer leur propre protection et pour accomplir leur mission. De plus, le Conseil fédéral peut autoriser une augmentation temporaire de l'effectif de 80 personnes pour une durée maximale d'un an.

Avec l'amélioration et la stabilisation, au cours de ces douze dernières années, de la situation qui prévaut en matière de sécurité, l'effectif de la troupe de la KFOR a pu être réduit. Dès 2009, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan) a introduit le concept de présence dissuasive («Deterrent Presence») visant une réduction progressive des troupes engagées dans la KFOR. Avec la décision de l'Otan du 29 octobre 2010 de poursuivre le processus de réduction des troupes de la KFOR, l'effectif total a été ramené à environ 5500 militaires en mars 2011. A l'heure actuelle, 31 Etats mettent encore à la disposition de la KFOR quelque 5000 personnes au total. Le processus de diminution n'est pas encore achevé. La prochaine étape, pour laquelle l'Otan a fait part de son intérêt à ce que la contribution de la Swisscoy soit prolongée, n'interviendra pas avant 2015.

La mission de la KFOR consistant à garantir un environnement sûr ne peut toujours pas être assumée intégralement par des acteurs locaux. C'est pourquoi une présence militaire internationale sur place demeure nécessaire pour l'instant. Depuis 1999, cette présence est assurée par l'Otan. La possibilité de transférer la responsabilité de l'engagement à l'Union européenne (UE) est toutefois périodiquement envisagée.

Une démarche de ce type, analogue à celle par laquelle la Force multinationale de stabilisation de l'Union européenne en Bosnie et Herzégovine (EUFOR ALTHEA) a repris le mandat de stabilisation de l'Otan
(Stabilization Force, SFOR) en 2004, est tout à fait concevable. Reste à déterminer si elle est réalisable dans la situation dans laquelle se trouve le Kosovo. De l'avis du Conseil fédéral, un engagement militaire de la Suisse dans ce pays sous la conduite de l'UE serait également envisageable.

Chacun sait que la Suisse participe également à la mission de stabilisation EUFOR ALTHEA dirigée par l'UE. La seule condition préalable à la participation à une mission EUFOR au Kosovo serait l'émission d'un mandat exécutif par les Nations Unies et une décision en ce sens du Conseil fédéral et du Parlement.

1

2

Les textes de la résolution 1244 des Nations Unies peuvent être consultés sur Internet à l'adresse suivante: www.un.org > Paix et sécurité > Conseil de sécurité > Résolutions > 1999.

FF 2001 6203

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1.2

La situation politique au Kosovo

Quatorze ans après l'intervention militaire de la KFOR et cinq ans après sa déclaration unilatérale d'indépendance, le Kosovo, en dépit d'un engagement important en termes de finances et de personnel de la part de la communauté internationale, a encore besoin de soutien pour ce qui est de l'instauration de structures propres à un Etat de droit ou pour assurer la cohésion sur l'ensemble de son territoire. En février 2013, le Kosovo a fêté le cinquième anniversaire de sa proclamation d'indépendance. Entre-temps, plus de 100 Etats membres des Nations Unies l'ont reconnu, consacrant par là même son droit à exister. Il n'en reste pas moins qu'un grand nombre d'Etats, dont cinq sont membres de l'UE (Chypre, Espagne, Grèce, Roumanie, Slovaquie) refusent une telle reconnaissance. Le gouvernement du Kosovo est, de ce fait, en quête d'une considération accrue sur la scène politique internationale.

Le pays lutte pour être admis dans les instances internationales, en y arrivant parfois, comme en témoigne son adhésion aux institutions de Bretton Woods, à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et à la Banque de développement du Conseil de l'Europe. Les responsables politiques du Kosovo aspirent, à terme, à faire entrer leur pays au Conseil de l'Europe, à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ainsi qu'aux Nations Unies ­ l'objectif visé étant notamment d'accéder à la reconnaissance internationale.

La croissance économique est toujours au point mort. La crise économique et financière qui sévit actuellement en Europe éloigne encore la perspective d'un progrès économique au Kosovo. Même si les Etats d'Europe centrale et du sud-est connaissent un léger redressement conjoncturel, la tendance à la hausse est moindre, faute de véritable moteur. Le développement des exportations stagne le plus souvent en raison de la fragilité des débouchés européens. Les investisseurs privés font, eux aussi, preuve de peu de dynamisme, tandis que les investissements publics sont en recul dans la plupart des pays à cause des caisses vides de l'Etat. Aussi le Kosovo dépendra-t-il encore longtemps de l'aide internationale et des fonds envoyés par les membres de sa diaspora.

Ces cinq dernières années, l'Etat kosovar a été étendu et consolidé, à tel point que la communauté
internationale a décidé, en septembre 2012, de mettre fin à la surveillance internationale permanente du Kosovo (International Civilian Office, ICO), en vigueur depuis 2008. Le Kosovo continue toutefois à dépendre du soutien international pour assurer ses missions régaliennes. Outre les nombreux donateurs bilatéraux (notamment l'Allemagne, les Etats-Unis, le Luxembourg, la Norvège, la Suède et la Suisse), différentes organisations internationales sont actives dans le pays: la mission des Nations Unies au Kosovo (MUNIK), qui assure la mise en oeuvre de la résolution 1244 de l'ONU, l'OSCE, la KFOR et la mission de l'UE de promotion de l'Etat de droit au Kosovo (EULEX), dont le mandat s'achèvera en juin 2014. Sur le plan international, le Kosovo devra donc encore être soutenu par des moyens conséquents en termes de finances et de personnel pour pouvoir relever les défis qui se présentent dans les domaines de la sécurité, de l'Etat de droit, de la démocratie et des droits de l'homme. La poursuite de l'engagement de la communauté internationale demeure essentielle pour sa consolidation politique et sa stabilité.

L'élément crucial pour asseoir le statut international du Kosovo et pour stabiliser la région est actuellement l'amélioration progressive de ses relations avec la Serbie.

Après des décennies de conflits, des représentants de la Serbie et du Kosovo ont 8623

commencé, en mars 2011, à se rencontrer à Bruxelles, sous l'égide de l'UE, lors de négociations menées dans le cadre du dialogue entre Pristina et Belgrade. En contrepartie de l'intégration dans l'UE voulue de part et d'autre, Bruxelles a exigé une «normalisation des relations» entre les deux pays. Au départ, les entretiens portaient sur des questions purement techniques, telles que le trafic transfrontalier, le versement de taxes douanières à la frontière, la transmission de registres civils ou la reconnaissance réciproque des diplômes universitaires. A partir d'octobre 2012, le dialogue a été officiellement porté à un échelon politique, à l'initiative du président serbe nouvellement élu Tomislav Nikolic et des premiers ministres Hashim Thaçi et Ivica Daci, sous la direction de Catherine Ashton, haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères.

Dix cycles de négociations ont permis d'aboutir à une percée qu'on peut qualifier d'historique: le Kosovo et la Serbie ont conclu, le 19 avril 2013, un accord en quinze points qui doit contribuer à la normalisation de leurs relations. Le futur statut du nord du Kosovo, notamment, habité majoritairement par des Serbo-Kosovars, a été âprement débattu. Ces populations ont, jusqu'à présent, rejeté l'autorité de Pristina et, même après la déclaration d'indépendance du Kosovo, ont de facto été placées sous l'administration de Belgrade. En vertu de l'accord, les Serbes doivent se retirer du financement et de l'administration des autorités locales, telles que la police et la justice. Il est prévu que les Serbes vivant au nord du Kosovo reçoivent un certain degré d'auto-détermination par la création d'une association des communes serbes du Kosovo. La mise en oeuvre exacte est encore en cours de négociation et de nombreuses incertitudes subsistent.

Contrairement aux communes du sud du pays habitées par des Serbes du Kosovo, qui se sont largement intégrées dans le système politique kosovar et coopèrent avec le gouvernement central, les communes serbo-kosovares situées au nord sont opposées à Pristina. Elles rejettent pour la plupart d'entre elles l'accord, notamment parce qu'elles craignent pour leurs postes de travail dans l'administration, leurs retraites et leurs caisses maladie, financés par la Serbie. Selon des estimations, quelque 21 000
emplois dans les institutions administrées par Belgrade dans le nord du Kosovo sont concernés, y compris des emplois qui n'existent plus, mais pour lesquels les anciens titulaires continuent de percevoir un salaire de la Serbie. Ni Belgrade, ni Pristina ne se sont exprimés pour l'heure sur la question de la rémunération et sur les nombreuses autres questions pourtant légitimes (p. ex. validité des diplômes, permis de conduire). Il y a deux raisons à cela: d'une part, les décisions n'ont pas encore été prises; d'autre part, on veut éviter d'annoncer de mauvaises nouvelles à la veille d'élections. La capacité à convaincre les Serbes du nord du Kosovo que l'accord est conforme à leurs intérêts sera toutefois décisive.

La Serbie a déjà fait des concessions en ce qui concerne le nord du Kosovo et a dissous ses autorités policières, lesquelles doivent à présent être intégrées dans la police kosovare. En contrepartie, Pristina a adopté une loi d'amnistie controversée, qui garantit une impunité rétroactive aux Serbes du Kosovo notamment. L'accord prévoit par ailleurs que le Kosovo et la Serbie ne doivent pas se faire mutuellement obstacle sur le chemin conduisant à l'UE. Même si le rapprochement entre les deux Etats est remarquable au vu du contexte historique récent et du peu de temps écoulé depuis la partition, il n'existe toujours pas de relations officielles entre eux. Ils disposent uniquement de ce que l'on appelle des officiers de liaison, dont la Serbie s'est empressée de dire que leur envoi ne saurait être assimilé à une reconnaissance diplomatique.

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L'UE a été largement dédommagée des efforts qu'elle a consentis en faveur de l'unification des deux pays : en raison des résultats du dialogue, la Serbie s'est vu accorder le statut de candidat et la promesse de l'ouverture, en janvier 2014, de négociations en vue de son adhésion. Le Kosovo, après une feuille de route en vue de la libéralisation du régime des visas, a reçu l'assurance qu'un accord de stabilisation et d'association avec l'UE verrait le jour.

Le 3 novembre 2013, et pour la première fois depuis l'indépendance, des élections locales ont eu lieu sur l'ensemble du territoire kosovar. Dans le nord du pays, l'OSCE a appuyé la commission électorale dans l'organisation d'élections conformes à la législation kosovare. Pour les Serbes du Kosovo qui y vivent, la participation aux élections les a confrontés à un choix difficile: si une participation garantirait leur représentation politique; beaucoup considèrent que cela équivaudrait à reconnaître implicitement l'indépendance de Pristina, ce qu'ils rejettent. Le taux de participation des électeurs du nord du Kosovo était donc inférieur à la moyenne et des débordements violents se sont même produits dans trois bureaux de vote des quartiers nord de Mitrovica. Dans le sud du pays, les Serbo-Kosovars ont déjà participé avec succès à des élections organisées par le passé par Pristina, leur participation dépassant même la moyenne nationale. La Serbie adopte désormais une attitude positive face à la tenue d'élections locales au Kosovo, contrairement à 2009 où elle appelait encore au boycott des urnes.

La stabilité dans la région dépendra, dans une large mesure, de la capacité des institutions kosovares à gagner la confiance des Serbes vivant dans le pays, en particulier dans le nord. Maintenant que la Serbie semble disposée à renoncer à soutenir les Serbes du Kosovo dans le cadre de son intégration dans l'UE, Pristina doit encore démontrer que l'intégration de ce groupe de population est réellement prise au sérieux. La stabilité au Kosovo dépend grandement de la disposition des Serbes du Kosovo résidant dans le nord du pays à coopérer avec le gouvernement central de Pristina.

1.3

La situation en matière de sécurité

La situation en matière de sécurité au Kosovo, à l'exception des quatre communes habitées majoritairement par des Serbes, peut être qualifiée de calme et stable. Cette évolution positive de la situation a permis le transfert de nombreuses tâches liées à la sécurité de la KFOR à la police kosovare dans le sud du Kosovo. A l'exception du monastère orthodoxe serbe de Visoki Decani, la KFOR lui a entre-temps confié la surveillance de l'ensemble des installations sensibles et des biens culturels.

La situation dans le nord, de tout temps moins stable, reste tendue depuis qu'une unité spéciale de la police kosovare a échoué, en été 2011, dans sa tentative d'occuper les deux points de franchissement de la frontière avec la Serbie au nord du Kosovo. Les tensions ethniques ont été exacerbées. En témoigne en particulier la mise en place de barrages routiers. Toutefois, il n'y a guère eu d'actions violentes entre les deux groupes de population. Il est cependant arrivé que des unités de la KFOR essuient des tirs en tentant de lever des barrages routiers.

Pour l'heure, aucun autre épisode de violence n'a été recensé, notamment en raison de l'ouverture de discussions directes entre les gouvernements de Belgrade et de Pristina, sous les auspices de l'UE. Avec la mise en oeuvre de l'accord signé le 8625

19 avril 2013, à Bruxelles, il faut cependant s'attendre à un risque accru d'aggravation ponctuelle de la situation à court ou à moyen terme. Sur le plan de la sécurité, la suppression des structures parallèles serbes, en particulier, peut, sur le moyen terme, conduire à un vide dans ce domaine au nord du pays et à une augmentation des incidents violents dus à des groupuscules criminels ou à motivation politique. Cette situation est illustrée l'attentat qui a tué un policier d'EULEX le 19 septembre 2013, et qui a probablement été commis par des extrémistes serbes du Kosovo, ainsi que par les irrégularités et les violences commises dans le nord du Kosovo ­ région définie comme serbe ­ lors des élections du 3 novembre 2013. La stabilisation politique de cette région n'est donc pas encore pour demain.

D'une façon générale, il est probable qu'il faudra encore plusieurs années pour que les forces de sécurité kosovares parviennent à assurer la sécurité dans le nord de leur pays. Jusqu'à la mise en oeuvre des réformes structurelles convenues, la situation en matière de sécurité au nord devrait rester calme, mais néanmoins tendue. Dans les quartiers de Mitrovica abritant différentes communautés ethniques, notamment, les violences d'origine criminelle (explosions de grenades à main et coups de feu) ne devraient pas disparaître de sitôt.

Dans tout le pays, l'évolution de la situation en matière de sécurité demeure étroitement liée au contexte socio-économique. Le Kosovo affiche, par exemple, un taux de chômage très élevé de 35 pour cent, et ne peut offrir que peu de perspectives professionnelles à la population en âge de travailler, composée essentiellement de gens jeunes. Ces dysfonctionnements n'ont guère suscité à ce jour d'actions de protestation dirigées contre le gouvernement. Sur le long terme, on ne saurait toutefois exclure l'apparition de mouvements sociaux au sein des jeunes kosovars.

L'absence de perspectives économiques se reflète davantage sur le niveau de la petite délinquance armée, qui reste un phénomène majeur dans la vie quotidienne au Kosovo. Outre cette petite délinquance, le crime organisé continue à représenter un problème durable et une menace pour la région. Le Kosovo est ainsi considéré comme une plaque tournante importante pour des activités illégales comme la traite des êtres
humains, le trafic d'armes et de drogues, ainsi que la prostitution.

Le danger couru par la partie du contingent suisse engagée dans le sud du pays peut actuellement être qualifié de faible. Les principaux risques sont dus à l'état précaire des routes et aux dangers de la circulation routière, ainsi qu'à la présence de mines et de munitions non explosées. Pour les éléments engagés au nord du Kosovo (LMT, génie et Super Puma), le potentiel de danger est plus marqué, en particulier si la KFOR devait mener de nouvelles actions contre des groupuscules serbes radicaux (par exemple pour lever des barrages routiers). Le risque lié à un engagement de ce type est toutefois réduit par le fait que les LMT évitent les régions où la menace est accrue. Les moyens suisses du génie ne sont, quant à eux, engagés que dans les régions qui ont préalablement été sécurisées par des troupes d'infanterie de la KFOR.

1.4

Le rôle de la communauté internationale au Kosovo

La communauté internationale soutient activement le processus de stabilisation au Kosovo. La stabilisation du pays est dans l'intérêt de la Suisse sur les plans de la politique extérieure et de la politique de sécurité, raison pour laquelle elle participe 8626

aux efforts internationaux en plus de son engagement bilatéral. La KFOR n'est d'ailleurs qu'une composante d'un engagement à plusieurs niveaux.

MUNIK Le mandat de la MUNIK, qui comprenait à l'origine des pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires étendus, a considérablement changé depuis la déclaration d'indépendance du Kosovo. Le mandat de cette mission n'a jamais pu être formellement modifié et continue à reposer sur la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui date de 1999. Dans la réalité, le mandat de la MUNIK consistant à assurer l'administration civile du Kosovo s'est transformé en une tâche restreinte de coordination et d'encadrement de la présence internationale dans le pays. La MUNIK s'efforce toutefois également de jouer un rôle de médiateur dans la résolution du conflit qui oppose Pristina et Belgrade. La Suisse a soutenu la MUNIK par le passé en mettant des spécialistes civils à sa disposition.

EULEX Depuis fin 2008, EULEX a successivement repris les tâches assumées jusqu'alors par la MUNIK dans la reconstruction des systèmes judiciaire, policier, douanier et de surveillance des frontières. Elle accomplit sa mission en restant neutre quant au statut du Kosovo, comme le faisait la MUNIK dans le cadre de la résolution 1244 de l'ONU. Elle contribue au renforcement de l'Etat de droit au Kosovo dans les domaines précités par l'observation, l'accompagnement et le conseil. De plus, elle remplit un mandat exécutif en poursuivant les atteintes graves aux droits de l'homme et les crimes de guerre, et en luttant contre le crime organisé et la corruption. Dès le début, EULEX a dû lutter contre l'héritage de la MUNIK et la mauvaise réputation de celle-ci au sein de la population kosovare. Des résultats insuffisants dans la poursuite d'infractions pénales, en particulier dans les affaires relevant du crime organisé, ainsi que des erreurs de gestion et de communication, ont suscité, à juste titre, un certain nombre de questions. Néanmoins, EULEX joue un rôle important pour la sécurité et pour la mise en place de structures relevant de l'Etat de droit au Kosovo.

Dans le nord du pays en particulier, où se concentrent de plus en plus les activités internationales de stabilisation, la collaboration entre EULEX et la KFOR, en tant qu'acteurs du secteur de la sécurité, demeure
indispensable. EULEX soutient la concrétisation des résultats du dialogue politique établi entre Pristina et Belgrade, essentielle pour la poursuite du développement de la région. En juin 2012, le mandat d'EULEX a été prolongé de deux ans, jusqu'au 14 juin 2014. En ce moment a lieu un examen stratégique de la mission. Il est probable que son mandat sera prolongé de un à deux ans supplémentaires, avec le maintien de ses fonctions exécutives.

La Suisse met à la disposition d'EULEX une expertise civile dans les domaines de la migration, de la poursuite des crimes de guerre et de la criminalité organisée, de la protection des témoins et des droits de l'homme. Six personnes sont actuellement engagées.

Mission de l'OSCE au Kosovo Le mandat de l'OSCE au Kosovo résulte également et explicitement de la résolution de l'ONU de 1999 et recouvre des compétences dans les domaines de la protection des droits de l'homme, de l'instauration de la démocratie et de la décentralisation, de la protection des biens culturels et des questions liées aux deux sexes et à la jeunesse, ainsi qu'aux médias. L'OSCE adopte également une position neutre quant au 8627

statut du Kosovo, ce qui offre des débouchés, en particulier pour le travail dans les régions dominées par les Serbes du Kosovo. Etant donné que l'OSCE est présente depuis longtemps déjà au niveau communal notamment, la mission dispose d'un réseau de contacts très étoffé à tous les niveaux. L'OSCE joue un rôle important dans la préparation des élections, notamment en vue des élections communales qui se tiendront en novembre 2013 dans le nord du Kosovo. Une autre priorité de l'OSCE est d'appuyer le retour des personnes déplacées et des réfugiés. Sur ce point également, la collaboration avec la KFOR est importante pour assurer la sécurité des populations qui reviennent. L'OSCE ­ tout comme la KFOR ­ continue de jouir d'une grande popularité et d'une excellente réputation.

La Suisse a apporté un large soutien à la mission de l'OSCE au Kosovo par le passé, occupant même le poste de chef de mission de 2007 à 2008. A l'heure actuelle, elle met à disposition une personne au titre de la mission consistant à établir la démocratie et la décentralisation. D'autres personnes sont en cours de recrutement.

2

Le rôle de la KFOR

La légitimité de la présence de la KFOR au Kosovo découle de la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'ONU. Après la déclaration d'indépendance du Kosovo, le 17 février 2008, le gouvernement kosovar a expressément donné son aval à la poursuite du stationnement sur place de la KFOR. La résolution définit aujourd'hui encore le mandat de celle-ci. Elle prévoit que la KFOR doit, jusqu'à nouvel avis, remplir les trois missions fondamentales suivantes: ­

mettre en place et maintenir un environnement sûr et stable (y compris en garantissant une totale liberté de déplacement);

­

mettre en oeuvre et surveiller l'accord prévoyant le retrait des forces serbes du Kosovo et le désarmement de l'Armée de libération du Kosovo;

­

assister la mission civile de l'ONU au Kosovo MUNIK et à son successeur EULEX, ainsi qu'à d'autres partenaires civils internationaux.

Dans le cadre de son mandat de base, la KFOR collabore étroitement avec la MUNIK et EULEX au Kosovo.

2.1

La situation actuelle de la KFOR

Depuis son envoi en 1999, la KFOR a pu remplir ses missions. La KFOR a ainsi continuellement adapté sa présence et son action aux circonstances et s'est efforcée, sur le moyen terme, de rendre superflue la présence de troupes internationales de maintien de la paix au Kosovo. En ce sens, la KFOR a régulièrement adapté sa taille, sa structure et son orientation aux développements constatés sur place. L'effectif de ses troupes en est la preuve: la présence de la KFOR a été ramenée, en plusieurs étapes, de plus de 50 000 militaires au départ à 5000 hommes environ, actuellement stationnés au Kosovo. A l'heure actuelle, 31 Etats (dont 23 membres de l'Otan) participent encore à la KFOR. Cette diminution progressive de la présence des troupes de la KFOR est mise en oeuvre uniquement lorsque les critères définis en matière de stabilité sont remplis. La poursuite de la présence de la KFOR sur place ne dépend donc pas d'un calendrier prédéfini, mais de l'évolution de la situation 8628

réelle. Au fil du temps, la KFOR a également modifié foncièrement son orientation: depuis 2009, l'accent est mis non plus sur une présence couvrant l'ensemble du territoire, mais sur la recherche d'informations et de renseignements.

Pour la réduction des effectifs, l'Otan a défini trois étapes (appelées «Gates») qui doivent permettre à la KFOR d'évoluer en fonction de la situation. Dans le cadre de «Gate 1», en janvier 2010, les effectifs ont été ramenés à environ 10 000 militaires.

Avec «Gate 2», un effectif de troupes de quelque 5000 militaires a été atteint au printemps 2011. Lors de cette étape, les effectifs de l'infanterie sur place ont été revus à la baisse, les structures de commandement, allégées, et les structures de recherche d'informations et de renseignements, considérablement renforcées. Un réseau de LMT a été créé pour permettre la collecte d'informations et de renseignements. Ces équipes ont pour mission de contribuer, par une présence manifeste et des contacts directs, à dresser un tableau général de la situation, afin de détecter à un stade précoce les éventuelles tendances et évolutions négatives. Pour ce faire, les LMT sont en contact avec les autorités locales, avec la population indigène ainsi qu'avec des représentants de l'ONU, de l'UE, d'organisations non gouvernementales et de la société civile. Les LMT sont regroupées en cinq régions au sein de détachements régionaux interarmées (JRD) dont le commandement est assuré, dans chaque cas, par une nation distincte. Au sud, le JRD est dirigé par la Turquie, à l'est par les Etats-Unis, à l'ouest par l'Italie, au centre par la Suède et au nord par la Suisse.

Pour pouvoir continuer à garantir un environnement sûr en cas de menace accrue, l'Otan a la possibilité de détacher des troupes supplémentaires au Kosovo dans un délai très bref. Ces bataillons de réserve (force de réserve opérationnelle, FRO) sont placés en disponibilité accrue dans leurs pays d'origine: une compagnie de réserve peut être détachée immédiatement, tandis que les autres éléments sont prêts à intervenir sur place dans les deux semaines. Depuis le passage à «Gate 2», ces renforcements de troupes ont dû être déclenchés à plusieurs reprises. Ainsi, la situation au Kosovo a rendu nécessaire l'engagement permanent sur place du bataillon de réserve germano-autrichien
entre août 2011 et mars 2012, ainsi qu'entre mai 2012 et fin 2012. Entre avril 2012 et septembre 2012 a en outre été détaché au Kosovo le bataillon de réserve italien. Ces renforts étaient nécessaires en raison notamment de la situation qui prévalait dans le nord du Kosovo.

Parallèlement à la KFOR, l'Otan a entamé d'autres activités en 2008 dans ce pays.

Au coeur de celles-ci se trouve la mise en place d'une composante de sécurité armée, la Force de sécurité du Kosovo (FSK). Cette activité complémentaire de la KFOR se déroule en dehors du mandat de l'ONU et de la KFOR et la Suisse n'y participe pas.

2.2

Prochaines étapes de développement de la KFOR

La condition requise pour passer à «Gate 3» est une poursuite de la pacification et de la stabilisation de la situation en matière de sécurité au Kosovo. La transition n'aura lieu qu'une fois remplis les critères pertinents. Cette démarche est impulsée par la KFOR et la décision est prise par l'organe de décision politique de l'Otan, à savoir le Conseil de l'Atlantique Nord. Actuellement, l'Otan estime que le passage à «Gate 3» ne pourra pas se faire avant 2015. La KFOR devra alors compter encore 2500 militaires environ sur place. La possibilité d'une augmentation rapide des troupes présentes au Kosovo par des réserves clairement définies est maintenue.

8629

Avec la réduction du contingent sur place prévue dans le cadre de «Gate 3», les troupes d'infanterie seraient à nouveau réduites, la structure de commandement actuelle encore simplifiée et les prestations logistiques, aujourd'hui encore fournies partiellement au niveau national, concentrées et exécutées de manière centralisée à l'échelon de la KFOR. Quant à la recherche de renseignements et d'informations et à leur évaluation, elles ne feraient l'objet que de quelques changements mineurs.

3

Structure actuelle et tâches de la Swisscoy

La Swisscoy fournit des prestations dans plusieurs domaines. Les adaptations de la KFOR décrites préalablement, induites par la mise en oeuvre de «Gate 1» puis de «Gate 2», ont naturellement eu des répercussions sur la nature des prestations fournies par la Swisscoy. Dans ce contexte, on relèvera en particulier la fermeture du camp Casablanca sis près de Suva Reka, à l'été 2012. Ce camp, géré conjointement avec l'Autriche, constituait la base d'attache pour de nombreux éléments de la Swisscoy depuis le début de son engagement. Les changements qui ont affecté et la mission et la situation ont toutefois rendu ce site inadapté.

3.1

Domaines d'activité de la Swisscoy

La Swisscoy a continuellement adapté son profil de prestations depuis le début de l'engagement. Les modifications répondaient toujours aux besoins de la KFOR et donnaient à l'Armée suisse la possibilité de mettre en avant ses points forts. Ainsi, les différentes adaptations apportées au niveau opérationnel et concernant les effectifs de la KFOR ont eu, depuis le printemps 2010, des conséquences sur la structure de la Swisscoy. A l'heure actuelle, cette dernière fournit des prestations dans les domaines ci-après: Equipes de liaison et de surveillance (Liaison and Monitoring Teams, LMT). La Swisscoy exploite quatre LMT, soit deux au sud (à Malishevo et à Prizren) et deux au nord (à Mitrovica et à Zubin Potok). Les LMT doivent surveiller les lieux potentiellement sensibles. Cette activité doit permettre à la KFOR d'identifier suffisamment tôt de nouveaux risques ou des situations critiques et de prendre les mesures qui s'imposent. La mise en place et l'entretien d'un réseau actualisé sont donc essentiels. L'expérience des dernières années a montré que la population du Kosovo a désormais confiance dans les LMT et est disposée à faire usage de cet instrument, autrement dit à communiquer aux LMT ses véritables perceptions et préoccupations.

Les expériences faites attestent encore de la pertinence de l'engagement de militaires pour cette tâche. Le port de l'uniforme permet, d'une part, de marquer la présence d'une force militaire. D'autre part, les LMT peuvent encore intervenir en cas d'aggravation de la situation. Les expériences faites montrent clairement que les militaires suisses se sont révélés particulièrement utiles pour ce genre de tâches; dans le cadre de cette activité, ils peuvent en effet mettre à profit la formation et les compétences qu'ils acquises dans les domaines tant civil que militaire.

Conduite du détachement régional interarmées au nord (JRD-North). Depuis janvier 2012, la Suisse assure aussi le commandement du JRD pour les six LMT engagées au nord du Kosovo. Concrètement, le commandant suisse du JRD-North gère, avec son état-major, trois LMT slovènes, une LMT grecque et deux LMT suisses. Le 8630

commandant du JRD-North a un accès direct au commandement de la KFOR. En reprenant cette tâche délicate et grâce aux résultats obtenus jusqu'à présent, la Suisse a encore gagné en respect et en estime. Toutes les parties s'accordent sur le caractère avisé de la gestion de la Suisse, celle-ci étant vue comme un intermédiaire intègre dépourvu d'arrière-pensées.

Transport aérien. Avec les deux hélicoptères stationnés sur place, la Suisse met à la disposition de la KFOR la plus importante capacité de transport aérien. De la capacité à déplacer rapidement des troupes par voie aérienne au Kosovo en cas de besoin dépend la mission, d'autant que les hélicoptères exploités par la Suisse sont également équipés pour le vol de nuit. En outre, en fonction des besoins effectifs sur place, l'Armée suisse se tient prête depuis septembre 2013 à mettre à la disposition de la KFOR un équipage et un hélicoptère supplémentaires pour une durée maximale de deux mois, ce qui accroît temporairement d'autant la capacité de transport aérien. Des mesures appropriées permettent enfin de garantir que la taille maximale autorisée du contingent de la Swisscoy ne sera pas dépassée par ce renforcement limité dans le temps.

Prestations dans le domaine de la logistique et du génie. Depuis août 2011, des troupes du génie et du transport de la Swisscoy apportent une contribution notable à la mobilité et à la liberté de circulation de la KFOR, au moyen notamment du déplacement et de l'élimination d'obstacles et de barrages par les éléments techniques du génie. Par ailleurs, la Swisscoy prend des mesures de protection (p. ex. création de voies d'évacuation dans le bâtiment abritant les tribunaux de Mitrovica ou mesures de prévention des inondations dans les camps de la KFOR) et assure des transports et des approvisionnements. Ces dernières années, la Swisscoy s'est établie comme un partenaire extrêmement fiable dans ces domaines d'activité, à la fois pour la KFOR et pour les Etats militairement impliqués.

Parmi les autres éléments fournis par la Swisscoy, on citera une équipe chargée de l'élimination des munitions non explosées, un détachement de la police militaire, du personnel médical et une cellule de renseignement qui lui est propre.

3.2

Sites de la Swisscoy

Désormais, la Swisscoy fournit ses prestations à partir des quatre sites ci-après.

­

L'état-major, les officiers d'état-major suisses au QG de la KFOR, la police militaire, l'équipe EOD, la cellule suisse du renseignement (Swiss Intelligence Cell/SWIC), ainsi que plusieurs parties des éléments des transmissions et de l'équipe médicale se trouvent au quartier général de la KFOR, à Pristina.

­

La compagnie de support, la section de transport, la section du génie, ainsi que des parties des éléments des transmissions et de l'équipe médicale sont stationnées dans le camp de Prizren.

­

Le détachement du transport aérien opère depuis le camp de Bondsteel, situé à l'est de Ferizaj.

­

Le JRD-North remplit sa mission depuis le camp Novo Selo, situé au sud de Mitrovica.

8631

De plus, la Swisscoy gère un bâtiment LMT dans les localités de Malishevo, de Prizren, de Mitrovica et de Zubin Potok.

3.3

Domaines d'activité prévus pour la Swisscoy après 2014

Dans sa composition actuelle, la Swisscoy est en mesure de fournir des prestations importantes et nécessaires au profit de la KFOR, y compris en cas de prolongation du mandat.

Comme évoqué précédemment, le réseau des LMT demeurera une composante importante de l'activité de la KFOR pendant «Gate 3». Tout laisse à penser que le besoin en troupes internationales connaîtra, au Kosovo, un développement similaire à celui qui a prévalu en Bosnie et Herzégovine: tandis que les troupes d'infanterie peuvent être réduites en cas d'évolution positive de la situation, le besoin en LMT reste stable. En raison des prestations positives fournies jusqu'à présent, la KFOR a en outre demandé à la Suisse de continuer de diriger le JRD-North. Le fait que la Suisse soit acceptée par tous les parties et groupes au nord du Kosovo revêt une importance cruciale car c'est là une condition essentielle pour que la mission puisse réussir. En outre, avec la poursuite de la réduction de la présence des troupes sur place prévue dans le cadre de «Gate 3», la capacité à déplacer rapidement des troupes en cas de besoin gagne encore en importance. Les hélicoptères suisses représentent donc un facteur de réussite décisif pour l'ensemble de la KFOR. Il est également prévu de continuer à proposer la possibilité d'un renforcement temporaire dans le domaine du transport aérien. En outre, dans le cadre de «Gate 3», il est prévu qu'en plus de la réduction des troupes, les prestations de la logistique et du génie ne soient plus assurées que de manière centralisée par la KFOR. Du fait de son activité menée jusqu'à présent dans ce champ d'action, la Swisscoy jouit d'une excellente réputation, tant auprès de la KFOR qu'auprès des Etats engagés militairement. De par son équipement aussi bien que de par son effectif, elle serait naturellement prédestinée à reprendre ces tâches pour l'ensemble de la KFOR dans le cadre de «Gate 3». Dans ce domaine d'activité, l'armée de milice de la Suisse possède en outre un avantage majeur : le professionnalisme et le savoir-faire pluridisciplinaire des membres de la Swisscoy leur permettent de venir à bout de tâches complexes et de créer des synergies. Le fait que les membres de la logistique et du génie sachent se servir de plusieurs véhicules différents représente à lui seul un atout majeur par rapport aux
autres forces armées.

La KFOR et les partenaires sur les sites maintiennent les autres domaines d'activité en fonction de l'évolution des besoins. L'équipe médicale, le détachement de sécurité militaire et les éléments du service de renseignement doivent dans tous les cas être conservés. L'orientation suivie jusqu'à présent par la Swisscoy montre clairement que la Suisse a fourni de plus en plus de prestations dites de soutien au cours des dernières années. De ce fait, les prestations de la Swisscoy ne seront pas réduites ­ ou ne le seront que dans une moindre mesure ­ en cas de passage à «Gate 3». Dans différents domaines, en particulier dans la logistique et le transport, il faut même s'attendre à une augmentation des besoins en prestations parce que la Swisscoy deviendrait le principal fournisseur de prestations logistiques pour la KFOR dans le cadre de «Gate 3».

8632

Une poursuite de la contribution de la Swisscoy est donc souhaitable pour la KFOR.

Le profil des prestations futures de la Swisscoy serait par ailleurs conçu de manière à s'aligner sur les priorités définies par le Conseil fédéral dans le rapport à l'Assemblée fédérale sur la politique de sécurité de la Suisse (rapport du 23 juin 2010 sur la politique de sécurité 2010)3 et dans le rapport du 1er octobre 2010 sur l'armée 20104. Il couvrirait les domaines dans lesquels l'Armée suisse, en raison de son système fondé sur la milice, possède des atouts de taille et peut apporter des contributions significatives. Le recrutement des volontaires requis ne semble pas non plus poser de problèmes majeurs. Il existe certes une certaine pénurie dans les fonctions dites de conduite, en particulier au niveau des capitaines et des majors, ainsi que dans les fonctions de spécialistes, comme les automobilistes. Toujours est-il que le nombre de militaires intéressés par les engagements dans la promotion de la paix dépasse dans l'ensemble le nombre des postes à pourvoir.

3.4

Taille du contingent et possibilité d'augmentation temporaire

Par arrêté fédéral du 8 juin 20115, le Parlement a autorisé le Conseil fédéral à augmenter, pour un délai maximal de douze mois, l'effectif du contingent au-delà de la limite des 220 militaires en engageant, au maximum, 80 personnes de plus. Les motifs définis pour une augmentation de ce type sont la maintenance de l'infrastructure nécessaire à la Swisscoy, le renforcement de la sûreté en cas de menace accrue et la couverture d'un besoin accru en personnel d'état-major par l'occupation d'une fonction supérieure de commandement ou dans un état-major. Depuis 2012, le Conseil fédéral a fait usage de cette compétence à trois reprises: il a approuvé l'engagement de 40 personnes supplémentaires pour une durée de quatre mois pour les travaux de fermeture du camp Casablanca et pour le déménagement du gros de la Swisscoy au cours de l'année 2012. Il a, en outre, approuvé l'envoi de quinze personnes pour reprendre la fonction du commandant du JRD-North pour 2012 et, suite à une nouvelle demande de la KFOR, pour 2013.

Le commandement suisse du JRD-North a fait ses preuves et l'Otan souhaite qu'il soit maintenu à l'avenir. C'est pourquoi il est prévu de transférer les quinze postes nécessaires dans le contingent normal, dont l'effectif serait adapté en conséquence.

Cette démarche permettrait également de reprendre d'autres fonctions supérieures d'état-major ou de commandement sans devoir recourir à du personnel supplémentaire. La nouvelle taille du contingent de la Swisscoy serait donc de 235 personnes.

Etant donné qu'on ne peut pas exclure que la KFOR revoie ses effectifs à la baisse et que le profil de prestations demandé à la Swisscoy doive être adapté en conséquence, le Conseil fédéral doit pouvoir décider de réduire à tout moment l'effectif du contingent.

Au vu des changements à venir au sein de la KFOR et étant donné qu'on ne saurait exclure l'hypothèse d'une aggravation de la situation, les augmentations temporaires de l'effectif doivent toutefois demeurer possibles. Celles-ci doivent permettre soit de gérer des tâches plus étendues dans le domaine de la maintenance, soit de renforcer 3 4 5

FF 2010 4681 FF 2010 8109 FF 2011 5143 s.

8633

les effectifs des éléments de sûreté en cas de menace accrue. Les expériences faites à ce jour montrent qu'une augmentation de 40 personnes au maximum pour la maintenance et de 20 personnes pour le renforcement du niveau de sécurité sur place suffit, la durée étant limitée à quatre mois dans les deux cas. C'est pourquoi le Conseil fédéral doit être habilité à augmenter temporairement le contingent de 60 personnes supplémentaires au maximum pour une durée maximale de quatre mois par année civile.

3.5

Intérêt national à poursuivre l'engagement

La Swisscoy demeure, et de loin, l'engagement le plus important que la Suisse effectue dans le domaine de la promotion militaire de la paix. Les considérations ci-après plaident, parmi d'autres, en faveur de la poursuite de cette contribution majeure au maintien de la paix au niveau international.

­

Le maintien de la stabilité dans les Balkans demeure une tâche centrale des Etats européens et va clairement dans le sens des intérêts de la Suisse.

Comme en atteste le passé, la Suisse est directement concernée par les événements survenant dans le sud-est des Balkans. Près de dix pour cent de tous les Kosovars vivent en Suisse et cette proportion pourrait augmenter rapidement si le Kosovo devait connaître de nouveaux troubles. L'engagement de la Swisscoy est un des piliers de la défense de nos intérêts nationaux en matière de politique étrangère et de politique de sécurité.

­

La Suisse a reconnu à un stade précoce l'indépendance de la République du Kosovo. Elle entretient un dialogue politique intense avec elle et s'investit dans cette coopération. La Swisscoy est un élément essentiel de cet engagement durable dans le domaine de la politique étrangère. L'accord entre Belgrade et Pristina représente une avancée et la situation s'est améliorée ces dernières années au niveau de la sécurité. Elle demeure toutefois volatile, comme en attestent les augmentations récurrentes de troupes de la KFOR.

La mission de la KFOR consistant à garantir un environnement sûr ne peut toujours pas être assumée intégralement par les acteurs locaux. C'est pourquoi une présence militaire internationale sur place demeure nécessaire pour l'instant.

­

Les prestations de la Swisscoy sont considérées comme très précieuses et sont désormais au coeur des activités de la KFOR. Si l'engagement ne devait pas être prolongé, la KFOR se retrouverait dans une situation difficile.

­

La présence de la KFOR au Kosovo est indispensable, en particulier pour la mise en oeuvre de l'accord entre Belgrade et Pristina. Pour le camp serbe, une condition essentielle était que la sécurité des Serbes du Kosovo devait, dans un premier temps, être assurée par la KFOR. La stabilisation de la situation assurée par la KFOR au Kosovo renforce la stabilité politique établie par l'accord. Les développements dans le nord du Kosovo revêtiront une importance centrale pour la suite des événements au Kosovo et dans toute la région. Dans cette région en particulier, qui est âprement disputée, la Suisse a su gagner respect et estime au niveau international par son commandement du JRD-Nord. Dans un même temps, il est clair que, à ce jour du moins, seule la KFOR est acceptée par tous les parties et groupes dans son rôle de

8634

garant de la stabilité, en particulier au nord du Kosovo, tant qu'EULEX et la police ne peuvent assumer pleinement leurs tâches.

­

Concernant les nouvelles réductions prévues après «Gate 3» et leurs répercussions sur le profil des prestations futures et sur l'effectif engagé, l'une des préoccupations principales de la KFOR est que les Etats engagés militairement ne retirent pas leurs troupes unilatéralement. La Suisse partage ce point de vue.

­

De par sa contribution à la KFOR, la Suisse est perçue par les Etats européens et par l'Otan comme un partenaire fiable et engagé.

­

L'engagement au Kosovo est la pièce maîtresse de l'engagement de la Suisse dans la promotion militaire de la paix. Sans la Swisscoy, la promotion de la paix par l'armée se réduirait à l'activité de 70 militaires environ. Le Conseil fédéral a décidé, dans le rapport sur la politique de sécurité 2010 et dans le rapport sur l'armée 2010, d'étendre l'engagement en doublant les efforts consacrés à la promotion militaire de la paix, avec l'aval du Parlement.

­

En 2014, la Suisse assumera la présidence de l'OSCE. Une des priorités de la présidence suisse est la réconciliation et la coopération dans les Balkans occidentaux. La KFOR est un facteur important de stabilité régionale et revêt donc une importance cruciale pour les objectifs de l'OSCE. Un représentant spécial de la présidence suisse soutient la coopération régionale dans les Balkans occidentaux et la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina. La Suisse soutiendra la mission de l'OSCE au Kosovo en contribuant, à la lumière de son mandat, de son rôle et de son expérience, à la mise en oeuvre de l'accord entre les parties. La Suisse soutient le dialogue entre tous les groupes ethniques au Kosovo car il est décisif pour la réussite de la mise en oeuvre de l'accord actuel par Belgrade et Pristina, comme des accords à venir. En 2014, des élections nationales, régionales ou communales se dérouleront dans différents pays d'Europe du sud-est. La Suisse soutient les opérations de l'OSCE sur le terrain et les institutions dans leur engagement visant à créer les conditions nécessaires à la tenue d'élections libres et équitables, en vue d'asseoir durablement la stabilité dans la région. Ne pas prolonger la mission de la Swisscoy ne serait pas cohérent avec cet engagement et porterait atteinte à la crédibilité de la présidence suisse.

3.6

Durée de l'engagement et pronostics possibles

Dans sa résolution 1244, le Conseil de sécurité de l'ONU a décidé que l'engagement de la KFOR serait prolongé «tant que le Conseil de sécurité n'en aura pas décidé autrement». Selon les estimations actuelles, la présence de la KFOR demeurera indispensable pendant quelques années encore.

Il est donc proposé de prolonger l'engagement de la Swisscoy de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2017. Le Conseil fédéral peut décider, à tout moment, de mettre fin à l'engagement avant cette échéance. Le Conseil fédéral en informe en ce cas les Commissions de politique extérieure et les Commissions de la politique de

8635

sécurité des deux Conseils, conformément à l'art. 152, al. 2, de la loi sur le Parlement du 13 décembre 20026.

3.7

Avantages retirés par l'armée

L'Armée suisse tire aujourd'hui encore un certain nombre d'enseignements de l'engagement de la Swisscoy. La possibilité de tester ses propres procédures dans le cadre de l'engagement et de mener à bien des comparaisons avec d'autres armées revêt une importance particulière. Cela comprend des procédures appliquées depuis l'échelon du groupe jusqu'à celui du corps de troupe dans différents domaines. On mentionnera les exemples suivants: ­

gestion de procédures d'engagement et de centrales de conduite de l'engagement à différents échelons pendant des périodes prolongées;

­

intervention de moyens du génie (p. ex. levée d'obstacles, élimination de mines et de pièges explosifs);

­

fourniture d'un soutien sanitaire pendant l'engagement;

­

engagement et conduite dans le cadre du service d'information et de renseignement (LMT, JRD-North).

L'engagement permet également de tirer des expériences sur une période prolongée en ce qui concerne les aptitudes, les performances ou les besoins en termes de maintenance, notamment pour le matériel utilisé. Dans ce domaine également, de nombreuses leçons ont pu être tirées et bénéficient à l'armée tout entière.

Parmi les aspects qui ont donné lieu à des enseignements précieux en matière de conduite, on peut citer une gestion de la disponibilité et une conduite de l'action pendant l'engagement à assurer 24 heures sur 24, et la conduite de l'action pendant l'engagement, ainsi qu'un maintien et une application de la discipline à assurer dans un environnement dépourvu de possibilités de compensation et marqué par des phases successives de stress et de désoeuvrement.

4

Conséquences financières et sur l'état du personnel

La planification financière actuelle pour les années 2015 à 2017 prévoit des coûts annuels de 42,6 millions de francs pour l'engagement de la Swisscoy. Le surcoût par rapport à la planification financière actuelle n'entraînerait pas de relèvement du plafond des dépenses de l'armée.

4.1

Conséquences financières

Les conséquences sur le plan financier pour le contingent de la Swisscoy implanté durablement au Kosovo avec un effectif réglementaire maximal de 235 militaires se présentent comme suit:

6

RS 171.10

8636

Budget actuel 2013

Budget prévu 2015­2017

Frais d'exploitation, subsistance, carburants, communication Dépenses de base, matériel, ravitaillement et évacuation, maintenance, recrutement Location de prestations aériennes Dépenses de personnel

9 400 000

7 900 000

800 000 4 000 000 28 400 000

1 200 000 4 200 000 30 900 000

Coût annuel total

42 600 000

44 200 000

Les modifications dans les deux premières rubriques résultent des transferts effectués suite aux expériences faites lors de l'engagement. Les dépenses accrues de personnel proviennent de ce que le budget prévu repose sur un effectif de la Swisscoy de 235 militaires, et non plus de 220. Les quinze postes supplémentaires proviennent de l'intégration du JRD-North, pour lequel des exigences particulières devront être remplies. Il a également été tenu compte de l'affectation au Centre de compétences SWISSINT du maximum autorisé de trois postes supplémentaires (voir au ch. 4.3).

4.2

Conséquences financières d'une augmentation temporaire

L'envoi, pour une durée limitée, d'éléments supplémentaires en vue de mener à bien des travaux de maintenance ou d'accroître le degré de protection, aurait les conséquences financières suivantes:

Durée supposée de l'engagement sur place Effectif supposé du détachement Dépenses d'exploitation, subsistance, carburants, communication Dépenses de base, matériel, ravitaillement et évacuation, maintenance, recrutement Dépenses de personnel Frais supplémentaires par engagement pour détachement spécial

Augmentation pour le changement de site ou le démantèlement d'un site

Augmentation pour le renforcement des éléments de sécurité

4 mois max. 40 personnes

2 à 4 mois env. 20 personnes

650 000

140 000

3 500 000 1 000 000

50 000 550 000

5 150 000

740 000

Dans l'éventualité d'un changement ou d'un démantèlement de site, il reste à définir ce qu'il adviendrait de l'infrastructure existante. A part le démontage du camp et son rapatriement en Suisse, d'autres options peuvent être imaginées, comme sa remise à 8637

l'ONU ou à l'UE par exemple. De toute manière, les installations sensibles ou réutilisables (p. ex. appareils radio et moyens de communication) seront démontées et réexpédiées en Suisse ou transportées sur le nouvel emplacement. Ces travaux devront se faire avec le soutien d'un détachement spécial. Contrairement aux chiffres mentionnés au ch. 4.1, les coûts indiqués ici prennent effet uniquement si le Conseil fédéral approuve l'envoi d'un détachement correspondant.

Etant donné que les coûts du personnel chargé toute l'année d'encadrer l'engagement au SWISSINT sont intégrés à ce cadre financier, ces chiffres approchent les coûts totaux. Ne sont pas prises en compte les charges de personnel et d'exploitation qui sont imputées deux fois par an à l'instruction du contingent sur la place d'armes cantonale de Stans-Oberdorf. Les données comptables relatives à l'instruction des contingents de la Swisscoy sont donc comparables à celles d'un cours de répétition normal effectué en Suisse.

4.3

Conséquences sur l'état du personnel

Depuis le début de l'engagement de la Swisscoy, en 1999, le nombre approuvé de collaborateurs affectés au projet est resté stable, avec un effectif de 25 postes au SWISSINT à Stans. Les modifications apportées au profil des prestations de la Swisscoy, ainsi que les développements qui dans un avenir prévisible affecteront la KFOR, requièrent un investissement accru sur le plan de la planification et de la conduite au SWISSINT. Il y a trois raisons à cela. La première: la gestion des sites actuels occasionnée par la fermeture du camp Casablanca entraînera des charges supplémentaires. Aujourd'hui, le besoin de coordination est revu à la hausse, aussi bien pour les sites autogérés (p. ex. bâtiments LMT) que pour les camps exploités avec les Etats partenaires et dans lesquels la Swisscoy est stationnée. La deuxième: le recrutement de personnel, en particulier pour les LMT et le JRD-North, coûte plus cher, car ce personnel doit répondre à des profils d'exigences spécifiques. La troisième: en raison des changements au sein de la KFOR, le profil des prestations fournies par la Suissedevra être réamégané. Dans ce contexte, il est indispensable de créer trois nouveaux postes affectés au projet. Le catalogue plus complexe des tâches de la Swisscoy, notamment dans le domaine de la recherche d'informations et de renseignements (LMT et JRD-North), implique une instruction spécifique axée sur l'engagement au centre d'instruction de Stans. C'est pourquoi le renforcement est poursuivi avec neuf cadres contractuels engagés dans le cadre du projet au centre d'instruction.

Tous les postes affectés au projet sont inclus dans la rubrique correspondante du tableau du ch. 4.1. Ces postes sont liés à l'engagement de la Swisscoy et seront supprimés au terme de celui-ci.

5

Conséquences pour l'économie et les cantons

La poursuite de l'engagement de la Swisscoy a des répercussions limitées sur le canton de Nidwald, qui abrite le centre de compétences SWISSINT. Aucune autre conséquence en termes économiques n'est à relever.

8638

6

Relation avec le programme de la législature

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 20157 ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 20128. La présente décision correspond à l'objectif 13 du message sur le programme de la législature 2011 à 2015, intitulé «Les instruments de détection précoce et de lutte contre les risques et les menaces relevant de la politique de sécurité sont efficacement mis en oeuvre», où est affirmée la nécessité de «contribuer à la stabilité et à la paix en dehors de nos frontières». L'arrêté fédéral proposé doit permettre de prolonger jusqu'au 31 décembre 2017 l'engagement de la Swisscoy au sein de la KFOR, tout en laissant à la Suisse la possibilité d'y mettre fin à tout moment.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

L'art. 58, al. 2, de la Constitution (Cst.)9 définit ainsi la mission de l'armée: «L'armée contribue à prévenir la guerre et à maintenir la paix; elle assure la défense du pays et de sa population. Elle apporte son soutien aux autorités civiles lorsqu'elles doivent faire face à une grave menace pesant sur la sécurité intérieure ou à d'autres situations d'exception. La loi peut prévoir d'autres tâches». L'art. 1, al. 4, de la loi fédérale du 3 février 1995 sur l'armée et l'administration militaire (LAAM)10 précise à cet égard que l'armée contribue à la promotion de la paix sur le plan international.

La constitutionnalité du service de promotion de la paix a été examinée à plusieurs reprises: elle a confirmée à chaque fois, sous réserve que les engagements reposent sur une base volontaire (cf. notamment le message du 8 septembre 1993 relatif à la loi sur l'armée et l'administration militaire et l'arrêté fédéral sur l'organisation de l'armée, FF 1993 IV 1, ch. 61; H. Meyer, St. Galler Kommentar zu Art. 58 BV, Rz 12). La question des mesures prises pour assurer la protection des personnes et des troupes ainsi que l'exécution de la mission, comme la question de l'armement, est ici sans importance. Cela n'empêche pas que le Conseil fédéral doive vérifier, pour chaque engagement, sa compatibilité avec les principes de la politique extérieure, de la politique de sécurité et de la politique de neutralité, ainsi qu'avec le droit de la neutralité.

7.2

Conformité avec la répartition des compétences

Le Conseil fédéral, qui est responsable de la conduite de la politique extérieure et de la politique de sécurité, peut, quand il le souhaite, ordonner des engagements de promotion de la paix et définir l'équipement et l'armement nécessaires ainsi que d'autres mesures. Les compétences du Parlement demeurent toutefois garanties pour ce qui est des questions essentielles. Selon l'art. 66b de la LAAM, le Conseil fédéral 7 8 9 10

FF 2012 349 FF 2012 6667 RS 101 RS 510.10

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est, pour tout engagement armé, tenu de consulter au préalable les Commissions de politique extérieure et les Commissions de la politique de sécurité des deux Conseils. Lorsque l'effectif d'un engagement armé dépasse 100 militaires ou que celui-ci dure plus de trois semaines, l'engagement est soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale (art. 66b, al. 4, LAAM). La prolongation de l'engagement de la Swisscoy, tel qu'elle est proposée par le présent message, remplit ces conditions.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Le présent arrêté fédéral constitue un acte individuel et concret de l'Assemblée fédérale, expressément prévu dans la législation fédérale (art. 173, al. 1, let. h, Cst.).

Comme il ne fixe pas de règles de droit, il revêt la forme d'un arrêté fédéral simple (art. 163, al. 2, Cst.) et n'est donc pas sujet au référendum.

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