13.059 Message concernant la modification de la loi fédérale sur la protection des eaux (Financer l'élimination des composés traces organiques des eaux usées conformément au principe du pollueur-payeur) du 26 juin 2013

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet de modification de la loi fédérale sur la protection des eaux, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2011 M 10.3635

Substances en traces dans les eaux usées. Financement de leur élimination selon le principe du pollueur-payeur (E 28.9.10, CEATE-E; N 15.3.11)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 juin 2013

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2012-0375

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Condensé Modifier la loi sur la protection des eaux permet de créer un financement spécial à affectation déterminée pour aménager certaines stations d'épuration des eaux usées de façon à réduire l'apport de micropolluants dans les eaux.

Contexte Les concentrations de certains composés traces organiques (micropolluants) nuisent à la santé des poissons, compromettent leur reproduction et peuvent porter atteinte à d'autres organismes aquatiques. Des mesures appliquées dans certaines stations d'épuration des eaux usées (STEP) doivent donc réduire l'apport de micropolluants dans les eaux afin de protéger la flore et la faune aquatiques et les ressources en eau potable. Comme il faut inscrire ces mesures dans la législation, le DETEC a mené une audition de fin 2009 à fin avril 2010 sur une modification idoine de l'ordonnance sur la protection des eaux (OEaux, RS 814.201). Plus de 80 % des organismes ayant donné leur avis reconnaissent la nécessité de résoudre le problème des composés traces organiques en équipant certaines STEP d'une étape de traitement supplémentaire. La principale exigence des cantons et d'autres milieux intéressés est que l'on trouve un financement qui soit autant que possible d'envergure nationale et conforme au principe du pollueur-payeur. La CEATE-E a donc décidé en août 2010 de déposer la motion 10.3635 («Substances en traces dans les eaux usées. Financement de leur élimination selon le principe du pollueur-payeur»).

Cette motion exige la création des bases légales permettant de financer l'élimination des micropolluants présents dans les eaux usées, en veillant à ce que le financement respecte au plus près le principe du pollueur-payeur. Le Conseil fédéral a recommandé d'accepter la motion, qui a été transmise par les deux Chambres (CE: session d'automne 2010; CN: session de printemps 2011).

Contenu du projet de modification Comme les mesures se limitent à certaines grandes STEP et à celles situées sur des rivières avec une forte proportion d'eaux usées traitées, seules sont concernées certaines régions densément peuplées de Suisse. Les coûts supplémentaires générés par ces mesures seraient dès lors imputables aux STEP concernées de ces régions.

D'après le droit en vigueur, c'est la population de ces régions qui devrait finalement payer ces mesures, alors que tous les habitants
de Suisse sont responsables de la pollution engendrée par les composés traces organiques. Pour éviter une telle injustice et respecter le principe du pollueur-payeur, il faut prélever une taxe suisse sur les eaux usées afin de financer les mesures à prendre au niveau des STEP pour éliminer les composés traces organiques. Le présent projet crée les bases légales requises à cet effet.

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La taxe vise exclusivement à cofinancer l'optimisation ciblée des STEP pour éliminer les composés traces organiques. Elle alimentera un financement spécial avec affectation déterminée, grâce auquel la Confédération allouera des indemnités à hauteur de 75 % des frais de mise en place des installations et des équipements servant à éliminer les composés traces organiques dans les STEP. Le financement nécessitera en moyenne 45 millions de francs par an. Il faut donc percevoir auprès de toutes les STEP de Suisse une taxe annuelle moyenne de 8 francs par habitant raccordé.

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Message 1

Présentation du projet

1.1

Contexte

Les composés traces organiques (micropolluants) sont des substances telles que des médicaments, des hormones, des biocides, etc. Ils ne sont éliminés que partiellement, voire pas du tout, dans les stations d'épuration des eaux usées (STEP) et parviennent dans les eaux avec les eaux usées ayant subi un traitement biologique.

Dans les cours d'eau contenant plus de 10 % d'eaux traitées, les composés traces organiques atteignent des concentrations qui nuisent à la reproduction et au développement des plantes, des animaux et des microorganismes particulièrement sensibles.

Il suffit de citer comme exemple la féminisation des poissons mâles victimes de perturbateurs endocriniens. Cette charge polluante est particulièrement élevée dans les régions densément peuplées et fortement exploitées du Plateau suisse, où l'on totalise 1400 kilomètres de cours d'eau dont le débit est constitué à plus de 10 % d'eaux traitées biologiquement. On observe aussi la présence de micropolluants dans des captages souterrains d'eau potable alimentés par des cours d'eau à proximité contenant une forte proportion d'eaux traitées. Bien que la population ne coure pour l'heure aucun risque, des mesures de protection s'imposent au nom du principe de précaution. Pour protéger la faune et la flore aquatiques et les ressources en eau potable, il importe dès lors d'appliquer au niveau des STEP des mesures à même de réduire les apports de composés traces organiques. Ce problème n'est pas propre à la Suisse, mais reconnu à l'échelon international.

L'art. 9 de la loi du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (LEaux; RS 814.20) confie au Conseil fédéral le soin de fixer les exigences de qualité de l'eau et d'édicter des prescriptions sur le déversement des eaux à évacuer. L'ordonnance d'application du 28 octobre 1998 (OEaux; RS 814.201) ne contient aucune exigence de portée générale applicable aux composés traces organiques pour ce qui est de la qualité de l'eau ou du déversement d'eaux usées communales dans les eaux. Afin d'adopter de telles exigences, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) a ouvert, le 27 novembre 2009, l'audition sur une modification de l'OEaux et l'a close le 30 avril 2010, après réception de 82 avis. Le DETEC pense que les STEP ne devront pas toutes
être dotées d'installations et d'équipements pour éliminer les composés traces organiques. Le train de mesures comprend plutôt l'optimisation ciblée d'environ 100 des 700 STEP existantes. Ces mesures protégeront au mieux la faune et la flore aquatique ainsi que les ressources en eau potable, et la Suisse assumera sa responsabilité de riverain amont. Si l'on sait de plus que l'apport de composés traces organiques dans les eaux sera ainsi diminué de moitié, les mesures prévues correspondent à une utilisation optimale des coûts consentis. Le projet envoyé en audition prévoyait que le financement se fasse par les STEP concernées.

Plus de 80 % des organismes ayant donné leur avis ont reconnu la nécessité de résoudre le problème des micropolluants. L'idée d'axer les mesures sur le problème et de n'optimiser que certaines STEP a également été largement approuvée.

Les cantons et plusieurs partis politiques et groupes d'intérêts ont principalement demandé que le financement des optimisations prévues soit réglé au niveau national.

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De plus, nombre d'avis ont préconisé une coordination fédérale de la planification de ces équipements. Enfin, dernière exigence: mener d'autres essais pour tester les nouvelles technologies avant d'en équiper un grand nombre de STEP.

La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des Etats (CEATE-E) a été informée en détail des résultats de l'audition.

Elle a approuvé le concept proposé, pris acte du problème de financement et décidé à l'unanimité de déposer la motion 10.3635 «Substances en traces dans les eaux usées. Financement de leur élimination selon le principe du pollueur-payeur». Celleci demande au Conseil fédéral de créer les bases légales requises afin de financer l'élimination des composés traces présents dans les eaux usées en respectant au mieux le principe du pollueur-payeur.

Le Conseil fédéral a proposé l'adoption de la motion, le Conseil des Etats l'a approuvée le 28 septembre 2010 et le Conseil national l'a adoptée à son tour, en qualité de deuxième Chambre, le 15 mars 2011 par 116 voix contre 44.

Outre des réponses à la motion (solution de financement), on s'attachera également à rechercher des solutions aux autres points particulièrement critiqués lors de l'audition. La coordination fédérale de la planification sera assurée au moyen du financement (voir à ce sujet le ch. 1.7 Mise en oeuvre). S'agissant de l'exigence de soumettre les nouvelles technologies à d'autres essais, un groupe de travail («Techniques de traitement des micropolluants») au sein de l'Association suisse des professionnels de la protection des eaux (VSA) a déjà entamé des travaux allant dans ce sens.

1.2

Financement de l'élimination des composés traces présents dans les eaux usées

Les mesures prévues ne visant que les grandes STEP et les STEP situées sur des rivières à forte proportion d'eaux traitées, seules certaines régions fortement urbanisées de Suisse sont concernées. Les coûts supplémentaires générés par les mesures seraient par conséquent à la charge des seules STEP concernées de ces régions. Dans l'état actuel du droit, c'est la population des régions concernées qui devrait assumer l'effort d'optimisation, alors que tous les habitants de Suisse sont responsables de la pollution due aux composés traces organiques. Pour éviter une telle inégalité de traitement et appliquer au mieux le principe du pollueur-payeur, il faut régler le financement à l'échelle nationale, ce qui nécessite de modifier la LEaux.

1.3

Dispositif proposé

Afin de financer la réalisation des mesures prévues au niveau des STEP pour éliminer les composés traces organiques, il convient d'instaurer une taxe nationale sur les eaux usées. Le présent projet crée la base légale nécessaire à cette fin.

La Confédération est habilitée à prélever une taxe auprès de tous les détenteurs de STEP. Cette taxe sera prélevée sur la base du nombre d'habitants raccordés à la STEP. La majeure partie (environ 97 %) des 8 millions d'habitants de Suisse est raccordée à une STEP. L'introduction de mesures visant à éliminer les micropolluants entraînant une augmentation des frais d'exploitation, les STEP concernées 4973

sont exemptées de la taxe à titre compensatoire dès l'année qui suit le dépôt du décompte final. Une participation financière de la population selon le principe du pollueur-payeur est ainsi réalisée à l'échelle nationale.

Selon les calculs actuels, l'optimisation ciblée d'une centaine de STEP engendrerait des coûts d'investissement se chiffrant à 1,2 milliard de francs. A titre de comparaison, la valeur de remplacement de l'infrastructure publique d'assainissement se monte aujourd'hui à 80 milliards de francs. Si les mesures sont réalisées sur 20 ans, l'investissement annuel se montera à près de 60 millions de francs et les frais d'exploitation supplémentaires, après optimisation, sont estimés à 75 millions de francs par an. Une fois les mesures achevées, les frais supplémentaires totaliseront environ 130 millions de francs par an (exploitation, maintenance, capital imputable), soit près de 6 % du total des coûts actuels de l'assainissement (2,2 milliards de francs par an).

La taxe servira exclusivement à cofinancer l'optimisation ciblée des STEP pour éliminer les composés traces organiques. A cette fin, un financement spécial à affectation déterminée est créé. Grâce à ce financement spécial, la Confédération accorde des indemnités de 75 % aux frais de mise en place d'installations et d'équipements destinés à éliminer les composés traces organiques dans les STEP.

Comme les STEP visées par une optimisation ciblée, et qui devront donc assumer tout d'abord des coûts d'investissement puis des frais d'exploitation supplémentaires, sont peu nombreuses, il est justifié d'indemniser une part importante des coûts d'investissement. C'est d'ailleurs ce que les cantons ont demandé au cours de la procédure d'audition. Il est en revanche inapproprié d'indemniser en plus les frais d'exploitation et de maintenance, car l'exécution est nettement plus coûteuse que dans le cas où l'indemnisation se limite aux investissements de départ. A cela s'ajoute que les frais supplémentaires sont en partie compensés par l'utilité écologique et économique sur place.

Le financement de 75 % des investissements initiaux représente 45 millions de francs par an. Pour les réunir, il faut prélever auprès de toutes les STEP de Suisse une taxe annuelle de 8 francs en moyenne par habitant raccordé. Les frais étant difficiles à estimer
avec précision, la taxe maximale est fixée à 9 francs par an et par habitant raccordé.

Les indemnités ne seront allouées que si la solution proposée s'appuie sur une planification utile, garantit une protection adéquate des eaux, correspond aux techniques actuelles et est économique. Les grandes lignes d'application du dispositif proposé sont présentées au ch. 1.7 (Mise en oeuvre) et précisées dans l'ordonnance.

1.4

Motivation du nouveau dispositif

Tous les habitants raccordés à une STEP sont responsables de l'apport de micropolluants dans les eaux. S'ils participent tous financièrement à l'optimisation ciblée des STEP en s'acquittant d'une taxe sur les eaux usées, le principe du pollueur-payeur est largement respecté. C'est aussi une solution simple et pragmatique pour financer l'exécution.

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Autres solutions nationales sur la base du principe du pollueur-payeur soumises à évaluation: ­

En théorie, une taxe sur les produits qui contiennent des substances problématiques pourrait très bien répondre au principe du pollueur-payeur. A y regarder de plus près, il s'avère néanmoins que même dans le cas d'une prise en considération approximative de la multitude de produits potentiellement concernés et de leurs composants problématiques, la réalisation prendrait des dimensions tout à fait disproportionnées par rapport au besoin financier. Des considérations relevant plus particulièrement du commerce extérieur parlent aussi clairement en défaveur d'une telle taxe. Elle a de ce fait été rejetée.

­

Un financement par les impôts est tout à fait envisageable, mais n'a aucun lien direct avec le déversement de composés traces organiques. Il suit plutôt le principe de la responsabilité collective et non pas celui du pollueurpayeur. Il constituerait en outre une charge supplémentaire pour les finances fédérales. A considérer les montants requis pour l'exécution, un impôt spécial (tel un demi pour-mille de la taxe sur la valeur ajoutée) ne serait guère judicieux non plus.

1.5

Résultats de la consultation

Lancée le 25 avril 2012, la procédure de consultation de la présente modification de la LEaux a duré jusqu'au 31 août 2012. 147 prises de position ont été retournées.

Le projet est approuvé par la grande majorité des participants. Seulement 17 d'entre eux le rejette clairement (dont le canton du Jura, l'Union démocratique du centre et les associations du milieu de l'industrie). L'idée de financer les mesures au moyen d'une taxe fédérale sur les eaux usées est favorablement reçue. Les rares opposants à cette mesure demandent de renforcer le principe du pollueur-payeur en introduisant une taxe sur les produits ou une taxe d'incitation.

La principale critique porte sur la charge financière subie par les STEP qui introduisent une étape de traitement supplémentaire pour éliminer les micropolluants. En effet, ces installations ainsi que les habitants qui y sont raccordés sont désavantagés malgré le financement prévu puisque les frais d'exploitation supplémentaires qui ne donnent pas droit à des subventions entraînent une augmentation des frais globaux, ce que les STEP non optimisées ne connaissent pas. Par ailleurs, cette situation n'incite pas à prendre des mesures à un stade précoce. Pour ces raisons, une amélioration de la situation financière des STEP dont les installations seront optimisées est demandée. Les mesures suivantes sont proposées: ­

Cinq cantons (Bâle-Campagne, Obwald, Soleure, Schwyz, Zoug), plusieurs associations (infrastructure communale, Association des communes, Union de villes, Association suisse des professionnels de la protection des eaux, Groupement Romand des Exploitants de Stations d'épuration), la Chambre de commerce des deux Bâle, la Communauté d'intérêt dans le domaine des eaux usées ERFA Klärweke Grossstädte Schweiz, et 35 associations du secteur des eaux usées, de villes et de communes demandent d'exonérer totalement ou partiellement de la taxe les STEP qui introduisent des mesures supplémentaires pour éliminer les micropolluants.

4975

­

Six cantons (Fribourg, Jura, Schaffhouse, Thurgovie, Uri, Vaud), la Conférence Suisse des chefs de service et offices cantonaux de protection de l'environnement (CCE) et l'Association romande pour la protection des eaux et de l'air (ARPEA) demandent une augmentation de la subvention au titre des investissements initiaux.

­

Quatre cantons (Bâle-Campagne, Fribourg, Jura, Tessin) et la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de l'environnement (DTAP) demandent des subventions pour les frais d'exploitation supplémentaires des STEP qui optimisent leurs installations. La majorité d'entre eux considèrent que des subventions pour une durée limitée suffisent.

Les remarques suivantes ont été faites à propos de la planification et du financement des mesures: ­

Douze cantons (Bâle-Campagne, Fribourg, Neuchâtel, Obwald, Schaffhouse, Schwyz, Thurgovie, Uri, Vaud, Zoug, Zurich, Saint-Gall), la DTAP et deux autres participants à la procédure (ARPEA et Lab'Eaux) demandent que les frais d'exécution des cantons soient également couverts par le financement spécial.

­

Plusieurs observations ont été faites concernant la planification du bassin versant. On attend de la Confédération qu'elle joue un rôle de coordination.

­

Le choix des STEP dont les installations doivent faire l'objet d'une optimisation doit s'accompagner d'un critère de «protection des ressources en eau potable» (Berne, Neuchâtel, Obwald, Saint-Gall, Uri, CCE, DTAP).

Les participants à la procédure formulent des demandes ou souhaitent des précisions sur plusieurs sujets. Ils demandent notamment de répercuter la taxe sur les eaux usées sur les pollueurs ou souhaitent un complément d'information quant aux indemnisations pour les canalisations et le droit à des subventions pour d'autres équipements et installations, p. ex des installations de nitrification ou de filtrage.

Plusieurs demandes concernent les ordonnances ou d'éventuelles aides à l'exécution.

Au vu des résultats de la consultation, les demandes suivantes ont en particulier été reprises dans le projet: ­

Les STEP dont les installations ont été optimisées sont exemptées de la taxe sur les eaux usées. L'exonération débute à partir de l'année qui suit la remise du décompte final. Le meilleur équilibre financier entre les STEP à optimiser et les autres souhaité par plusieurs cantons et la DTAP via des contributions (de durée limitée) aux frais d'exploitation est ainsi réalisé.

­

D'autres requêtes, comme une meilleure protection de l'eau potable sont mises en oeuvre par voie d'ordonnance.

4976

1.6

Comparaison avec le droit européen

Le droit international ne contient aucune obligation pour la Suisse qui soit incompatible avec les modifications proposées de la loi.

Depuis 2000, l'Union européenne (UE) applique la Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau (directive-cadre sur l'eau, DCE).

Cette directive définit un cadre pour une politique globale communautaire dans le domaine de l'eau. Elle est l'élément majeur de la réglementation européenne concernant la protection globale des ressources en eaux intérieures et superficielles, ainsi quesouterraines, de transition et côtières. Elle n'est pas contraignante pour la Suisse, qui n'en retient donc aucune obligation directe. La DCE engage toutefois les Etats à mettre sur pied des programmes d'amélioration des eaux en mauvais état. La modification proposée va dans le même sens.

La Confédération coopère avec plusieurs Etats européens en participant aux travaux de commissions internationales sur la protection des eaux et sur les eaux frontières, notamment la Commission internationale pour la protection du Rhin (CIPR), la Commission internationale pour la protection des eaux du lac de Constance (IGKB) et la Commission internationale pour la protection des eaux du lac Léman (CIPEL).

Divers pays d'Europe où l'urbanisation est aussi dense qu'en Suisse élaborent des solutions techniques afin d'appliquer des mesures concrètes visant à réduire les apports de composés traces organiques par le biais des réseaux d'assainissement.

C'est notamment le cas de la Hollande et de l'Allemagne. Le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-du-Nord-Westphalie sont ainsi les deux premiers Länder allemands à avoir mis en service en 2010 des stations d'épuration communales dotées d'une étape de traitement supplémentaire pour éliminer les composés traces organiques.

D'ici à 2022, le Bade-Wurtemberg prévoit notamment de soumettre à un traitement supplémentaire environ 20 % des eaux usées communales.

1.7

Mise en oeuvre

Perception de la taxe La Confédération perçoit une taxe qui est déterminée par le nombre des habitants raccordés résidant en permanence dans le bassin versant de la STEP. Ce nombre est connu de la STEP et il est relevé périodiquement à l'échelle nationale par les cantons en collaboration avec les associations spécialisées. Les relevés et les contrôles des données sont relativement simples. L'obligation de déclarer le nombre des habitants raccordés sera introduite dans l'ordonnance. La charge que représente la perception de la taxe est donc relativement faible.

Les mesures entraînent des frais supplémentaires pour les STEP dont les installations ont été optimisées. Dans un souci d'égalité de traitement, ces installations sont exemptées de la taxe à partir de l'année qui suit la remise du décompte final.

Planification et mise en oeuvre des mesures En introduisant dans l'OEaux des conditions pour déverser des eaux traitées communales dans les eaux, la Confédération oblige certaines STEP à optimiser leur équipement. Il s'agit des stations suivantes: 4977

­

STEP comptant plus de 80 000 habitants raccordés;

­

STEP comptant plus de 24 000 habitants raccordés dans le bassin versant de lacs. Dans des cas exceptionnels dûment fondés, les cantons peuvent renoncer à équiper la STEP si l'utilité pour les écosystèmes et l'alimentation en eau potable est négligeable;

­

cours d'eau avec plus de 10 % d'eaux traitées dont les composés traces organiques n'ont pas été éliminés: les cantons déterminent dans le cadre d'une planification par bassin versant quelles STEP doivent être optimisées.

Sont concernées, pour des raisons de proportionnalité, uniquement les STEP comptant plus de 8000 habitants raccordés;

­

dans des cas exceptionnels dûment motivés, les cantons peuvent demander l'optimisation des équipements de STEP comptant plus de 1000 habitants raccordés ­ situées dans des zones écologiquement sensibles, ou ­ situées près de réserves d'eaux importantes pour l'approvisionnement en eau potable.

Les critères de sélection permettent de garantir que les eaux en question sont épurées et que le coût global des mesures ne dépasse pas les coûts estimés.

Par ailleurs, l'OEaux précisera que les mesures nécessaires doivent être mises en oeuvre dans les vingt ans qui suivent l'entrée en vigueur de la modification, et au plus tard dans les cinq ans suivant l'octroi des indemnités.

Les critères de sélection permettent à la fois d'améliorer la qualité de l'eau et la protection des ressources en eau potable. L'amélioration doit être contrôlée après une première phase de mise en oeuvre, p. ex. après dix ans. Le cas échéant, l'OEaux doit être modifiée.

Les cantons procèdent à une planification sommaire des mesures nécessaires pour éliminer les composés traces organiques dans les eaux usées. Cette planification tient compte des éventuelles évolutions à venir. Les cantons fixent aussi un calendrier de mise en oeuvre échelonnée des mesures. Dans le cas de bassins versants à cheval sur plusieurs cantons, la planification est coordonnée par le canton qui comprend la plus grande surface du bassin versant.

L'OEaux ne fixe pas d'exigences supplémentaires pour ce qui est du déversement d'eaux industrielles dans les eaux ou dans le réseau public de canalisations, car elle exige déjà que les mesures nécessaires et conformes aux techniques actuelles soient prises pour éviter qu'elles polluent les eaux. Les principes en vigueur sont donc suffisants pour assurer une protection efficace des eaux. En outre, la Confédération participe déjà à la mise au point de procédés novateurs destinés à éliminer les micropolluants provenant des eaux usées industrielles et artisanales. Les mesures prises dans les STEP afin de réduire les composés traces organiques des eaux usées industrielles et artisanales doivent être harmonisées avec les mesures concernant le déversement des eaux industrielles dans les eaux ou dans les égouts publics.

Indemnisation des mesures Aux STEP tenues d'optimiser leur équipement afin de se conformer aux nouvelles exigences de l'OEaux régissant le déversement des eaux traitées communales dans les eaux, la Confédération octroie, au cas par cas, une indemnisation à hauteur de 4978

75 % de l'investissement initial destiné à l'installation de procédés techniques d'élimination des micropolluants.

En lieu et place d'installations et d'équipements destinés à éliminer les micropolluants, la Confédération pourra, si la STEP concernée est désaffectée, indemniser la pose de conduites de raccordement à une STEP proche (STEP cible), si celle-ci remplit, après raccordement, les exigences en matière d'élimination des composés traces organiques (voir «Planification et mise en oeuvre des mesures»). La STEP cible ne doit prendre des mesures que si elle remplit les critères de sélection. 75 % des frais d'investissement sont alors imputables, mais au maximum la même somme que celle qui correspondrait à l'optimisation ciblée de la STEP en question.

En cofinançant l'équipement des STEP concernées, la Confédération assume la coordination des optimisations prévues et offre son aide aux cantons pour la mise en oeuvre. Cette manière de faire répond aux exigences formulées dans la plupart des avis émis au cours de l'audition de 2009 sur la modification de l'OEaux. Les mesures seront ainsi appliquées de façon uniforme, efficace, efficiente et proportionnée.

1.8

Classement d'interventions parlementaires

L'adoption du présent message et de la modification de la loi permet de classer l'intervention parlementaire suivante: 2011 M 10.3635

Substances en traces dans les eaux usées. Financement de leur élimination selon le principe du pollueur-payeur (E 28.9.10, CEATE-E; N 15.3.11)

2

Commentaire des dispositions

2.1

Modification de la loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (LEaux)

Art. 60a

Titre

Dans le chap. 3 «Financement» de la LEaux, le projet ajoute ­ après l'actuel art. 60a, qui traite des taxes sur les eaux usées, dont les cantons veillent à la mise en oeuvre ­ une nouvelle disposition régissant la taxe sur les eaux usées, prélevée par la Confédération, destinée à financer les mesures que doivent prendre les STEP pour éliminer les composés traces organiques. C'est pourquoi l'actuel art. 60a LEaux reçoit le titre de «Taxes cantonales sur les eaux usées».

Art. 60b

Taxe fédérale sur les eaux usées

L'al. 1 régit l'obligation qu'ont les STEP de verser une taxe sur les eaux usées à la Confédération. Le produit de cette taxe doit servir uniquement à financer les installations et équipements destinés à éliminer les composés traces organiques dans les STEP, la pose de conduites de raccordement à une STEP proche qui remplira, après raccordement, les exigences en matière d'élimination des composés traces organiques et les charges d'exécution qui incombent à la Confédération (cf. ch. 3.1).

4979

L'al. 2 exonère de la taxe les STEP qui ont pris des mesures pour éliminer les composés traces organiques. Cette exonération se justifie en application du principe du pollueur-payeur, car les STEP qui optimisent leur équipement, et, partant, les habitants raccordés (par le biais du report au moyen de taxes sur les eaux usées), doivent supporter des coûts supplémentaires en termes d'exploitation, d'entretien et de capital; leur imposer une taxe fédérale supplémentaire les désavantagerait nettement par rapport aux STEP qui n'optimisent par leur équipement. L'exonération est effective pour le début d'une année civile; elle intervient pour la première fois l'année qui suit la présentation du décompte final si celui-ci est remis pour le 30 septembre.

L'al. 3 précise que le montant de la taxe est déterminé par le nombre d'habitants raccordés à la STEP. Ce nombre sera périodiquement relevé par les cantons et annoncé à la Confédération. L'obligation de déclarer le nombre des habitants raccordés devra être introduite dans l'OEaux. Il n'est pas possible d'inclure l'industrie et l'artisanat dans le calcul de l'assiette au prorata de leur responsabilité, car la provenance de la plupart des micropolluants est inconnue.

L'al. 4 oblige le Conseil fédéral à fixer le taux de la taxe selon les frais prévisibles et donc à édicter l'ordonnance d'application. Comme les mesures dont la réalisation n'aura pas débuté dans un délai de 20 ans après l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions ne seront pas indemnisées, aucun frais ne sera plus généré après le financement des dernières mesures, de sorte que l'on pourra cesser de prélever la taxe. Ce moment interviendra au plus tard en 2040. Le Conseil fédéral est par ailleurs chargé d'édicter des dispositions d'exécution concernant les modalités de perception de la taxe. Dans ce cadre, il peut confier la perception de la taxe aux cantons, en particulier à ceux qui prélèvent déjà une taxe sur les eaux usées.

L'al. 5 oblige les STEP soumises à la taxe à la répercuter sur les pollueurs. La Confédération recommande d'appliquer pour ce faire les modèles de taxes des STEP existantes.

Art. 61

Titre

Le titre de l'actuel art. 61 LEaux est précisé parce que la Confédération apporte un soutien financier non seulement à l'élimination de l'azote mais aussi à l'élimination des composés traces organiques dans les STEP.

Art. 61a

Elimination des composés traces organiques dans les installations d'évacuation et d'épuration des eaux

L'al. 1 précise que la Confédération accorde des indemnités aux cantons pour les mesures nécessitées par les exigences de l'OEaux destinées à éliminer les composés traces organiques dans les installations d'évacuation et d'épuration des eaux.

Conformément à l'art. 63 LEaux, l'octroi des indemnités obéit à des conditions générales, à savoir que les mesures envisagées reposent sur une planification adéquate, assurent une protection efficace des eaux et sont conformes à l'état de la technique et économiques.

Selon l'al. 2, l'indemnisation des mesures nécessaires est en outre subordonnée à la condition selon laquelle la réalisation des mesures commence dans les 20 ans qui suivent l'entrée en vigueur de la disposition. Peuvent également être indemnisées

4980

avec effet rétroactif les mesures déjà réalisées à partir du 1er janvier 2012 dans la mesure où elles sont nécessaires selon les nouvelles exigences de l'OEaux.

L'al. 3 précise que 75 % des coûts imputables sont indemnisés. Seuls sont imputables, selon l'art. 58 OEaux, les coûts effectifs et directement nécessaires à l'accomplissement approprié de la tâche subventionnée. En font aussi partie les traitements a posteriori, p. ex. procédés de séparation de matières solides ou traitements prévoyant une activité biologique. S'agissant de la pose de conduites de raccordement, 75 % des frais d'investissement sont imputables, mais au maximum les frais qui seraient générés si des mesures étaient prises dans la STEP même. Ne sont en particulier pas imputables les émoluments et les impôts. Les mesures d'épuration biologique des eaux usées (nitrification) ne donnent pas lieu à des subventions étant donné qu'elles correspondent à l'état de la technique et qu'elles ont été subventionnées dans l'ensemble de la Suisse à hauteur de 20 à 40 % jusqu'en 1997.

La procédure d'octroi des indemnités est régie par la procédure déjà prévue aux art. 61c ss OEaux pour l'octroi des indemnités au cas par cas.

Art. 84 L'actuel art. 84, al. 1, LEaux et le droit fédéral sur les subventions contiennent le principe de non-indemnisation pour les projets commencés avant la modification de la loi qui ne deviennent subventionnables qu'après son entrée en vigueur. Selon l'art 61a, al. 2, LEaux, une dérogation s'impose toutefois pour les mesures destinées à éliminer les composés traces organiques dans les STEP. L'art. 84 LEaux est abrogé pour cette raison.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

Au cours de la consultation de 2009 sur la modification de l'OEaux, les cantons (notamment la DTAP) se sont exprimés en faveur des mesures matérielles prévues, préconisant néanmoins non seulement le cofinancement par toute la Suisse, mais aussi un suivi technique et une coordination serrée par la Confédération. Ces demandes entraînent des frais d'exécution et englobent le suivi continu des divers progrès techniques (0,2 poste), le transfert de ce savoir aux cantons, aux exploitants des installations et aux bureaux d'ingénieurs (0,4 poste), la garantie d'un échange d'expériences aux plan national et international (0,2 poste) et les conseils et contrôles des cantons pour planifier les mesures (0,4 poste), afin que l'équipement des STEP se fasse de manière efficace et économe. Le besoin équivaut à 1,2 poste.

Le prélèvement de la taxe (0,1 poste), la vérification des dossiers de projet (0,2 poste) et l'examen des décomptes (0,2 poste) nécessitent au total 0,5 poste.

Le contrôle des résultats, dont la mesure de la qualité chimique de l'eau et le suivi de l'amélioration de la flore et de la faune, nécessite 0,8 poste au total.

Un montant de 200 000 francs au maximum par an est également nécessaire pour des expertises et des études d'intérêt national pour le contrôle des résultats et les développements techniques.

4981

Les 2,5 postes que ce travail représente, les 200 000 francs prévus au maximum tout comme l'optimisation ciblée des STEP seront financés par la taxe et n'engendreront pas de surcoûts pour la Confédération. La modification de la loi n'a donc pas de conséquences financières directes pour la Confédération.

Une estimation des conséquences financières du financement spécial est présentée dans le tableau ci-après. Le calendrier prévisible des recettes tirées de la taxe sur les eaux usées, des dépenses pour indemniser des premiers investissements et de la situation patrimoniale du financement spécial sont indiqués également dans ce tableau. L'estimation des recettes prévisionnelles annuelles de la taxe par le financement spécial tient compte de l'exemption de la taxe. L'exemption des STEP qui ont pris des mesures pour éliminer les éléments traces organiques se traduit par une diminution des recettes prévisionnelles et une prolongation de la durée du prélèvement de la taxe. Le financement spécial proposé ne prévoit pas de rémunération du capital. Dans l'état actuel des connaissances, deux STEP au moins seront déjà optimisées au moment où débutera le prélèvement de la taxe en 2016. Le montant de la taxe a été fixé de telle manière que la situation patrimoniale du financement spécial sera égale à zéro une fois les STEP optimisées. De ce que l'on sait aujourd'hui, il sera nécessaire de prélever au début la taxe maximale de 9 francs. Le montant pourra être réduit par la suite, p. ex. à 6 francs à partir de 2029, et à 4 francs à partir de 2033. Une fois l'aménagement des STEP terminé, il n'y aura plus de prélèvement de taxe.

Estimation des conséquences financières du financement spécial Année

2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 2031 2032 2033 2034 2035

4982

Recettes prévisionnelles

Dépenses prévisionnelles pour indemnisation

Situation patrimoniale du financement spécial

en millions de francs

en millions de francs

en millions de francs

70 69 68 67 65 63 60 58 55 51 48 45 43 27 25 23 22 14 13 13

20 20 30 40 50 50 60 60 70 70 60 60 60 50 50 50 30 30 20 20

50 99 138 165 180 192 193 190 175 157 145 130 113 89 64 38 30 13 7 0

3.2

Conséquences pour les cantons

Les conséquences en termes de personnel sont estimées à 0,5 poste supplémentaire dans les cantons principalement concernés, en particulier pour la planification et la mise en oeuvre des mesures et les conseils aux détenteurs de STEP. Ces frais d'exécution à la charge des cantons ne sont pas couverts par le financement spécial mais par les cantons, comme cela est généralement le cas pour ce type de frais. Il n'y a pas lieu de modifier quoi que ce soit à ce système.

3.3

Conséquences économiques

Les conséquences économiques sont relativement minimes. Seuls les frais d'équipement et d'exploitation de l'étape de traitement supplémentaire viennent grever le budget. Ces coûts supplémentaires correspondent en gros aux différences entre les taxes existante des STEP dues à des caractéristiques locales (p. ex. procédure choisie). Les coûts des installations concernées par les mesures sont en partie compensés par les indemnités prévues. En outre, ces installations sont exonérées de la taxe.

Comme la taxe sur les eaux usées obéit au principe du pollueur-payeur et internalise donc des frais externes, la mesure doit être évaluée positivement en termes économiques.

3.4

Conséquences sociales

Toutes les STEP s'acquitteront de la taxe sur les eaux usées par habitant raccordé.

Ces frais seront répercutés sur les utilisateurs des STEP via la clé de répartition des frais des STEP. L'introduction de la taxe sur les eaux usées a en outre pour effet d'alléger la charge polluante transmise aux générations futures.

3.5

Conséquences environnementales

Les conséquences sur la diversité naturelle seront positives. Dans près de la moitié des eaux à forte teneur en eaux traitées, qui totalisent 1400 kilomètres, on peut escompter une amélioration très nette de la qualité de l'eau et donc des habitats des organismes aquatiques sensibles, d'où une amélioration notable de la biodiversité.

De même, la protection des ressources en eau potable sera sensiblement accrue. Les mesures prévues permettront de réduire de moitié les apports de composés traces organiques dans les eaux. La Suisse contribuera ainsi à réduire les apports de polluants dans les eaux frontières internationales et assumera sa responsabilité de riverain amont.

La consommation d'électricité des STEP optimisées augmentera de 5 à 25 % (par STEP), ce qui correspond à une hausse de 0,1 % de la consommation nationale.

Cette hausse sera dans la mesure du possible compensée par une amélioration de l'efficacité énergétique et par la production énergétique des STEP.

4983

4

Relation avec le programme de la législature

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 20151 ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de législature 2011 à 20152. Le Parlement a chargé le Conseil fédéral de modifier la LEaux en transmettant la motion 10.3635 «Substances en traces dans les eaux usées.

Financement de leur élimination selon le principe du pollueur-payeur»3.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et légalité

La modification de loi proposée s'appuie sur l'art. 76, al. 3, de la Constitution (Cst.)4, qui donne à la Confédération notamment la compétence de légiférer sur la protection des eaux. La taxe prévue pour financer l'élimination des composés traces organiques (taxe selon l'art. 60b LEaux sous considération des taxes selon l'art. 60a LEaux dans la mesure où elle sert également au financement des installations supplémentaires) est une taxe avec équivalence de groupe qualifiée, car il y a congruence entre le cercle des débiteurs de la taxe (il s'agit, via les exploitants des STEP, de l'ensemble des utilisateurs sur qui la taxe est répercutée) et le cercle des personnes qui bénéficient du produit de la taxe (les utilisateurs des STEP profitent des eaux traitées). Selon la pratique suivie par l'Office fédéral de la justice, une telle taxe n'a besoin que d'une base constitutionnelle de par la connexité matérielle, telle qu'elle existe à l'art. 76, al. 3, Cst.

5.2

Forme de l'acte à adopter

Comme expliqué sous ch. 5.1, la présente modification se fonde sur les dispositions constitutionnelles existantes. Il n'est donc pas nécessaire de modifier la Constitution.

Aux termes de l'art. 22, al. 1, de la loi fédérale du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale5, l'Assemblée fédérale édicte sous la forme d'une loi fédérale toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit. Dans le cas des taxes publiques, le texte doit en outre décrire le groupe des débiteurs de la taxe, l'objet de la taxe et sa base de calcul.

5.3

Frein aux dépenses

Aux termes de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., doivent être adoptées à la majorité des membres de chaque conseil les dispositions relatives aux subventions, ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs. Cette disposition prévaut, que les nouvelles 1 2 3 4 5

FF 2012 349 FF 2012 6667 BO 2011 N 398 s.

RS 101 RS 171.10

4984

dépenses soient financées par les fonds fédéraux généraux ou par des recettes à affectation déterminée. L'art. 61a est donc à soumettre au frein aux dépenses.

5.4

Conformité à la loi sur les subventions

Les soutiens financiers prévus pour les mesures destinées à éliminer les composés traces organiques des eaux usées sont des indemnités selon la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)6. La disposition répond aux conditions et aux principes particuliers d'octroi des indemnités fixés au chap. 2 de la LSu.

Importance de la subvention dans l'optique des buts visés par la Confédération L'élimination des micropolluants nocifs par l'introduction de dispositifs techniques au niveau des STEP vise la protection de la faune et de la flore aquatiques et des ressources en eau potable (voir ch. 1.1, 1.2 et 1.4). Les cantons réglementent la manière de financer la création et l'exploitation économique des STEP. Une solution fédérale est toutefois nécessaire du fait du principe du pollueur-payeur. La pollution par des composés traces organiques est imputable à l'ensemble des habitants du pays. Les coûts supplémentaires liés à leur élimination et à l'optimisation ciblée de certaines STEP ne concernent cependant que les régions dans lesquelles se trouvent de nombreux cours d'eau dont les eaux usées sont en majeure partie traitées. Sans subventions fédérales, les habitants de ces régions devraient supporter les coûts occasionnés par des pollueurs domiciliés hors des zones considérées. Les investissements initiaux d'optimisation ciblée des quelque 100 STEP sont estimés approximativement à 1,2 milliard de francs. Ces frais se répartissent sur une période de vingt ans. Avec un taux de subventionnement des investissements initiaux de 75 %, la subvention fédérale s'élève à environ 45 millions de francs par an. Le volume total de la subvention s'élève donc à 900 millions de francs. L'indemnisation porte uniquement sur l'investissement initial. Les frais d'exploitation supplémentaires après optimisation sont à la charge des détenteurs, ce qui justifie le subventionnement relativement élevé de 75 % des investissements initiaux. Les indemnisations sont financées par une taxe fédérale sur les eaux usées de 9 francs au maximum par habitant raccordé à une STEP (voir ch. 1.3).

Procédure et pilotage de la subvention L'optimisation des STEP concernées et donc ayant droit à subvention est pilotée par la Confédération par voie d'ordonnance. Les cantons désignent quelles installations doivent prendre des mesures sur la base
des exigences fédérales. Ils estiment les investissements initiaux nécessaires et déterminent un calendrier approximatif pour la réalisation des mesures. Toutes les STEP concernées par une optimisation peuvent présenter au canton une demande de subvention fédérale à hauteur de 75 % de leurs frais d'investissement initiaux. Les coûts probablement imputables sont fixés (pourcentage) avant le début des travaux d'optimisation, sur la base d'un devis, à l'aide d'une directive fédérale. Le canton vérifie la demande et la transmet à la Confédération. Les indemnités peuvent être versées au fur et à mesure de l'avancement des travaux, p. ex. versement partiel dès qu'une partie des prestations est réalisée. Un paiement (partiel) est subordonné à l'existence d'un décompte de frais dûment 6

RS 616.1

4985

contrôlé par l'administration fédérale. Une documentation concernant l'ouvrage réalisé doit être présentée au moment du versement final.

Une subvention globale dans le cadre de conventions-programmes n'est pas judicieuse en l'occurrence, car les avantages d'un tel subventionnement sont relativement limités puisque seules quelque 100 STEP sont visées dans toute la Suisse et que les consignes sont relativement claires pour ce qui des installations à mettre en place. Par conséquent, les indemnités sont octroyées au cas par cas. Ne seront subventionnées que les mesures qui s'appuient sur une planification cantonale adéquate et sont économiques.

Subventionnement de durée limitée Comme les mesures doivent être réalisées dans un délai de 20 ans, le subventionnement est lui aussi limité dans le temps. Etant donné que les mesures d'optimisation concernent un nombre limité de STEP, une durée limitée se justifie.

5.5

Délégation de compétences législatives

La modification de la loi sur la protection des eaux habilite le Conseil fédéral à fixer le montant de la taxe dans une ordonnance. Il s'agit d'une norme de délégation pour édicter des ordonnances de substitution. La base de calcul est toutefois déjà réglée au niveau de la loi. La délégation se justifie par le fait que le montant de la taxe doit être fonction des frais prévisionnels des mesures qui seront ainsi financées et donc doit pouvoir être adaptée sans qu'il soit nécessaire de modifier la loi.

4986