ad 10.511/10.517 Initiatives parlementaires Anciens conseillers fédéraux. Pas de pantouflage avant un certain délai/Anciens conseillers fédéraux.

Délai d'attente avant de pantoufler Rapport du 3 mai 2013 de la Commission des institutions politiques du Conseil national Avis du Conseil fédéral du 3 juillet 2013

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Conformément à l'art. 112, al. 3, de la loi sur le Parlement, nous nous prononçons comme suit sur le rapport du 3 mai 2013 de la Commission des institutions politiques du Conseil national1 consacré au projet de loi introduisant un délai de carence applicable aux conseillers fédéraux sortants et aux cadres du plus haut niveau hiérarchique de la Confédération qui quittent leurs fonctions.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

3 juillet 2013

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

1

FF 2013 4653

2013-1684

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Condensé Le régime suisse de gouvernance est fondé sur le système de milice dont l'originalité réside dans le fait que les conseillers fédéraux ont exercé, en général, une profession avant d'accéder à la magistrature et qu'ils sont en droit de reprendre une activité après avoir quitté leurs fonctions. La vaste expérience professionnelle représentée au sommet de l'Etat et au plus haut niveau de l'administration est un fait reconnu, qui constitue un atout clef pour une bonne gestion des affaires.

La transparence au niveau de l'exécutif n'est pas un vain mot. Elle est appliquée systématiquement dans les faits sachant que les décisions prises peuvent être expliquées en tout temps parce qu'elles ont été préparées suivant des procédures précises et réglementées qui sont constamment revues. En outre, les décisions édictées dans les domaines de la surveillance, de la taxation ou de l'adjudication, spécifiées dans le projet modifiant la loi sur le personnel de la Confédération sont sujettes à recours et soumises au contrôle judiciaire. Il n'est donc guère possible de privilégier par ce biais des intérêts économiques particuliers ou de favoriser indûment des entreprises.

Il est de tradition que les membres du Conseil fédéral qui quittent leurs fonctions se mettent au service d'une entreprise ou d'une cause sociale, à fortiori s'ils sont encore relativement jeunes. L'expérience et le réseau dont ils peuvent faire profiter l'économie privée comme les organisations d'intérêt général sont des avantages non négligeables.

Il est vrai que des conseillers fédéraux et des cadres supérieurs de l'administration ont fait parler d'eux ces dernières années par les mandats qu'ils ont acceptés après avoir quitté leurs fonctions. Quelques cas ne sauraient cependant appeler à une révision de la loi tant il est vrai que ni la morale ni les principes éthiques ne peuvent être codifiés, et que, par ailleurs, les autorités fédérales continuent de bénéficier d'une confiance élevée. Partant de ce constat, le Conseil fédéral propose de ne pas entrer en matière sur cet objet ou, le cas échéant, de le rejeter.

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Avis 1

Contexte

Suivant une longue tradition, les conseillers fédéraux qui quittent leurs fonctions mettent leur expérience au service d'entreprises ou d'oeuvres d'intérêt général, ou encore exercent des fonctions dans des organes dirigeants. Ces dernières années, certains mandats confiés par des entreprises ont suscité des interrogations dans la population. Ils ont donné naissance à deux initiatives parlementaires: celle du conseiller national Max Binder, du 2 décembre 2010, 10.511 «Anciens conseillers fédéraux. Pas de pantouflage avant un certain délai» et celle de la conseillère nationale Suzanne Leutenegger Oberholzer, du 9 décembre 2010, 10.517 «Anciens conseillers fédéraux. Délai d'attente avant de pantoufler». Toutes deux demandent que les conseillers fédéraux sortants respectent un délai d'attente avant d'accepter des mandats ou des fonctions rémunérés.

Les commissions des institutions politiques du Conseil national (CIP-N) et du Conseil des Etats (CIP-E) ont donné suite aux deux initiatives, respectivement les 31 mars et 27 juin 2011, et chargé le secrétariat compétent d'élaborer un projet de loi. La CIP-N a examiné un avant-projet lors des séances des 16 novembre 2012 et 17 janvier 2013. Le 3 mai 2013, elle a adopté un projet de loi tenant compte des avis des associations du personnel, à l'intention du Conseil national et du Conseil fédéral qui est appelé à prendre position.

2

Avis du Conseil fédéral

2.1

Remarques liminaires

2.1.1

But du projet

Pour la majorité de la CIP-N, les nouvelles dispositions ont pour but de préserver l'image du Conseil fédéral en tant qu'institution. A cet effet, elle veut prévenir toute impression donnant à penser que des conseillers fédéraux en fonctions pourraient privilégier les intérêts économiques de certaines entreprises. En d'autres termes, la CIP-N laisse entendre que des conseillers fédéraux pourraient faire passer leurs propres intérêts avant ceux du pays.

Le Conseil fédéral ne peut que s'insurger contre une telle insinuation: il rejette fermement toute allusion qui laisserait entendre que les anciens conseillers fédéraux qui ont soulevé le débat par les activités controversées qu'ils ont acceptées ont préparé le terrain alors qu'ils étaient encore en fonctions. Il réaffirme que les conseillers fédéraux en question ont été sollicités pour exercer ces activités en raison de leurs compétences.

Il partage l'avis de la minorité de la commission selon lequel la législation proposée exprime une méfiance générale envers les autorités et ne fait qu'exposer le gouvernement et ses membres à une suspicion généralisée. Subséquemment, il propose de ne pas entrer en matière sur cet objet.

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2.1.2

Eviter d'instaurer une législation lacunaire qui ne vise que des cas particuliers

Le législateur ne doit pas s'attacher à régler des cas particuliers et à réglementer par anticipation faute de quoi il risque d'affaiblir le système juridique dans son ensemble. Les lois difficilement applicables ­ comme les dispositions en question ­ restent souvent lettre morte et plus l'Etat édicte ce genre de lois plus la méfiance du citoyen à l'égard du système s'accroît, ce qui érode du même coup sa confiance dans les institutions et dans les autorités ainsi que l'image qu'il s'en fait. Ces risques n'ont pas échappé à la minorité de la commission.

Par ailleurs, les textes proposés laissent ouvertes des questions non négligeables sur le plan de l'exécution. Nombreuses seront en effet les situations qui conduiront à s'interroger sur l'applicabilité des dispositions proposées par la CIP-N. Il se pourra même que des conseillers fédéraux sortants renoncent à des mandats alors même que ceux-ci n'auraient suscité aucune opposition.

2.2

Mesures actuelles encourageant la transparence

2.2.1

Code de conduite du Conseil fédéral

Dans le contexte du débat sur le sujet en question, le Conseil fédéral a complété, en décembre 2011 déjà, l'aide mémoire destiné aux membres du Conseil fédéral et au chancelier de la Confédération par une disposition réglant l'acceptation d'un mandat après cessation des fonctions. Aux termes de cette disposition les conseillers fédéraux désireux d'exercer une activité lucrative devront prendre les précautions nécessaires lors de toute proposition et y renoncer s'il se révèle que celle-ci pourrait susciter des conflits d'intérêts en raison de la charge qu'ils ont exercée précédemment2.

2.2.2

Transparence dans les domaines exposés de l'administration

Le projet de la CIP-N vise les membres du Conseil fédéral en tant que chefs d'un département et les cadres du plus haut niveau de la Confédération. Au niveau de l'administration, les comportements susceptibles de poser des problèmes (acceptation de cadeaux, avantages offerts «pour entretenir les relations», favoritisme) sont réglés sans ambiguité par un vaste dispositif visant à prévenir de tels écarts: des consignes de service et des instructions internes3 désignent précisément les comportements à proscrire. Dans les domaines particulièrement exposés, les processus de décision sont en outre conçus de sorte qu'aucune personne ne puisse prendre de décision qui favorise ses propres intérêts.

2 3

Aide-mémoire, annexe 2, ch.10.

Code de comportement de l'administration fédérale du 15 août 2012, FF 2012 7307

5898

Décisions dans le domaine de la surveillance Les commissions à pouvoir décisionnel dans le domaine de la surveillance4 sont soumises aux dispositions légales en matière de révision et de contrôle.5 Les commissions officielles de surveillance, elles, doivent rendre compte de façon détaillée de leurs activités dans leur rapport annuel qui peut être consulté par le public6. Les décisions rendues par les premières sont sujettes à recours devant les autorités compétentes, qui sont indépendantes. Dans ce contexte, les possibilités de prendre une décision susceptible de favoriser des intérêts économiques particuliers sont pour ainsi dire nulles. De plus, les membres des commissions de surveillance sont tenus à des consignes internes sévères pour prévenir les conflits d'intérêts7 et les délits d'initié. Les collaborateurs de ces commissions sont liés par le secret de fonction même après leur départ8.

Décisions dans le domaine de la taxation Les décisions en matière de taxation, qu'elles soient édictées par l'autorité fiscale ou par l'administration des douanes, sont toujours sujettes à recours devant les autorités compétentes, qui sont indépendantes. Les décisions sont prises selon des procédures claires et précises et sur la base des données fournies par le contribuable ou par l'entreprise assujettie9. Ici aussi la transparence administrative et les barèmes d'imposition, connus du public, n'offrent aucune possibilité de privilégier quelque intérêt particulier.

Décisions dans le domaine des adjudications Les décideurs et collaborateurs des services d'achat centraux de la Confédération10, sont appelés à suivre régulièrement des cours et rendus attentifs aux instructions pertinentes et aux conséquences d'une non observation de ces instructions. Dans le domaine des marchés publics le principe du double contrôle, appuyé par des moyens techniques auxiliaires, revêt une importance toute particulière11.

Les procédures décisionnelles sont réglementées et revues périodiquement12. Les décisions d'adjudication sont notifiées aux soumissionnaires et sont sujettes à recours devant le Tribunal administratif fédéral13.

4 5 6 7 8 9 10 11

12 13

P. ex. la FINMA, la COMCO, la ComCom, la ElCom, etc.

P. ex. art. 12 LFINMA, RS 956.1; art. 26 LParl, RS 171.10 P. ex. les rapports et les documents émanant de la COMCO à l'adresse www.comco.admin.ch > documentation Cf. objectifs de la FINMA: www.finma.ch > A propos de la FINMA > objectifs ou page d'accueil de la COMCO: www.comco.admin.ch > la COMCO > code conduite P. ex. art. 14 LFINMA, RS 956.1 P. ex. LTVA, RS 641.20 Art. 9 Org-OMP, RS 172.056.15 Cf. déclarations d'impartialité sous www.bbl.admin.ch/bkb/02617/02668/index.html?lang=fr > conférence des achats de la Confédération CA > moyens auxiliaires > déclaration d'impartialité LMP, RS 172.056.1; OMP, RS 172.056.11 Art. 26 ss. LMP, RS 172.056.1

5899

Surveillance interne et haute surveillance des autorités politiques Le Contrôle fédéral des finances procède aux révisions dans les domaines exposés précités14. Il est l'organe de surveillance suprême de la Confédération en matière de surveillance financière. Dans l'exercice de ses fonctions de contrôle, il est soumis uniquement à la Constitution et à la loi. Il assiste l'Assemblée fédérale et le Conseil fédéral dans l'exercice de leur surveillance de l'administration fédérale15. La haute surveillance16 est exercée par les commissions de gestion de l'Assemblée fédérale17, qui contrôlent les actes et les mesures de l'administration fédérale sous l'angle de la légalité, de la régularité, de l'opportunité, de l'efficacité et de l'efficience économique18.

2.2.3

Nécessité de légiférer?

Le Conseil fédéral jouit d'une confiance élevée au sein de la population19 tant il est vrai que ses recommandations ont été suivies lors de plus de 70 % des votations.

En ce qui concerne l'administration, on peut certes se demander si le système de surveillance en vigueur ne présente pas des faiblesses. Le Conseil fédéral juge que ce n'est pas le cas parce que toutes les mesures ont déjà été prises pour assurer la transparence dans les procédures décisionnelles.

Les décisions du Conseil fédéral sont soigneusement préparées et examinées par les offices, qui travaillent en étroite collaboration. Les contrôles matériels et formels font l'objet d'une procédure tant verticale, entre les hiérarchies au sein des offices et au niveau des secrétariats généraux, qu'horizontale entre les offices des départements et la Chancellerie fédérale20. Chaque étape fait l'objet de procédures précisément réglementées et constamment revues21. Le double contrôle est ainsi assuré.

Le respect de ces procédures est contrôlé par divers organes selon une procédure également réglementée22.

Enfin, les irrégularités et les comportements déplacés peuvent en tout temps être signalés au Contrôle fédéral des finances sans risque de subir des conséquences indésirables (lanceurs d'alerte). Les employés de la Confédération sont en outre tenus de dénoncer les comportements relevant du droit pénal aux autorités compétentes23.

En conclusion, il faut souligner que dans le cadre du régime en vigueur, aucun conseiller fédéral ni cadre du plus haut niveau de l'administration ne pourrait, par une décision individuelle, désavantager ou favoriser une branche économique ou une

14 15 16 17 18 19 20 21 22 23

P. ex. art. 12 LFINMA, RS 956.1 Art. 1 LCF, RS 614.0 Art. 169 Cst., RS 101 Art. 26 s, art. 52 s LParl, RS 171.10 Art. 26, al. 3, LParl et art. 170 Cst., RS 101 Selon une enquête réalisée en 2010; Markus Freitag, Den Institutionen vertrauen, NZZ du 27 mai 2013, p. 14.

Consultation des offices (art. 4 OLOGA, RS 172.010.1) et procédure de co-rapport (art. 5 OLOGA) Cf. Directives sur les affaires du Conseil fédéral (classeur rouge) Cf. ch. 2.2.2, dernier paragraphe Art. 22a LPers, RS 172.220.1

5900

entreprise, ou en tirer personnellement profit, que ce soit durant l'exercice de ses fonctions ou après les avoir quittées.

2.3

Remarques concernant le projet de loi

2.3.1

Article 61a P-LOGA Délai de carence après démission

Violation des droits constitutionnels L'inscription de l'art. 61a dans la loi sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA)24 empêcherait de fait les conseillers fédéraux sortants d'exercer une nouvelle activité correspondant à leurs capacités parce qu'ils seraient soumis à une interdiction d'exercer durant deux ans. Or une telle interdiction constituerait une atteinte considérable à la liberté économique25, qui est un droit constitutionnel fondamental, et notamment au droit de choisir librement sa profession et d'avoir un libre accès à une activité lucrative privée.

Activités postgouvernementales Jusqu'à présent les anciens conseillers fédéraux ont continué d'exercer une activité que ce soit comme administrateur ou conseil d'entreprise, comme président d'une organisation d'intérêt public, ou une activité sur le plan international ou dans le monde scientifique. Les conseillers fédéraux sortants ont acquis durant leur mandat de vastes connaissances, des contacts dans le monde entier et une expérience non moins large, sans parler des capacités pointues de gestionnaire qu'ils ont dû montrer dans l'exercice de leurs fonctions au sommet de l'Etat. Si, à l'avenir, ils devaient se voir interdire, pendant deux ans, d'exercer une activité rémunérée pour le compte d'une entreprise ou d'une organisation soutenue par la Confédération, cela constituerait une atteinte profonde au droit fondamental de choisir librement sa profession. Or ce droit est ouvert à tous les citoyens.

Délimitation imprécise du champ d'application Comme cette disposition porte atteinte à des droits fondamentaux, faudrait-il au moins qu'elle soit clairement formulée et qu'elle décrive tout aussi clairement les activités qui ne pourront être exercées. Or ce n'est pas le cas. Tels qu'ils sont décrits, les mandats et les contrats fondant un rapport de travail qui ne peuvent être acceptés pourraient empêcher un conseiller fédéral sortant de prendre des tâches de gestion stratégiques dans l'économie ou dans des organisations d'intérêt général.

Par ailleurs, l'expression «société comparable» élargit considérablement le cercle des mandats et des contrats fondant un rapport de travail susceptibles de ne pas être acceptés. Elle n'est pas suffisamment explicite et laisse la porte ouverte à une large interprétation. Il n'est
pas dit qui aura la compétence d'interpréter la disposition. De plus, l'al. 2 restreint fortement les possibilités d'exercer une activité pour le compte d'organisations non gouvernementales ou d'intérêt général. Or pour celles-ci il est essentiel d'être représentées par une personnalité connue et les anciens conseillers

24 25

RS 172.010 art. 27 Cst., RS 101

5901

fédéraux sont tout désignés pour occuper ces fonctions compte tenu de leurs carnets d'adresses et de leur expérience.

Désavantages financiers La rémunération actuelle des conseillers fédéraux n'est pas excessive notamment si on la considère au regard de leur exposition, de leurs responsabilités et de leur taux d'occupation. A comparaison égale, les rémunérations versées dans l'économie sont sensiblement plus élevées. Une restriction des possibilités de gain après avoir quitté le gouvernement aggraverait la situation des conseillers fédéraux sur ce plan. Implicitement, notre système de milice suppose qu'ils puissent exercer une activité lucrative une fois qu'ils ont abandonné leur charge. L'ordonnance concernant les traitements et la prévoyance professionnelle des magistrats26 fixe le montant auquel ils ont droit une fois à la retraite. Ils sont parfaitement autorisés à exercer une activité lucrative ou de percevoir un revenu, auquel cas leur retraite est réduite conformément à l'art. 5 de l'ordonnance27. Or tel qu'il est prévu, le délai de carence rendrait difficile voire empêcherait l'acquisition d'un revenu, ce d'autant plus que les propositions de mandat sont en général présentées lorsque le magistrat quitte ses fonctions. Les retraites devront donc être versées entièrement.

2.3.2

Art. 14a P-LPers Délai de carence applicable aux cadres du plus haut niveau hiérarchique après cessation des rapports de travail

Détérioration des conditions d'engagement Les réserves émises quant aux atteintes portées aux droits constitutionnels, à l'imprécision du champ d'application et aux désavantages financiers s'appliquent également au nouvel art. 14a P-LPers de la loi sur le personnel (LPers)28. Le délai de carence obligatoire proposé pour les cadres du plus haut niveau hiérarchique aurait pour effet de détériorer considérablement leurs conditions d'engagement. Il constituerait de plus une restriction objectivement injustifiable de la liberté économique et un obstacle considérable à la mobilité professionnelle des personnes concernées sans parler des difficultés financières qu'il pourrait leur occasionner. De tels préjudices ne sont pas acceptables ni nécessaires. Au contraire, il faut se demander quelles conséquences ce délai de carence aura-t-il pour un directeur ou un secrétaire général qui doit quitter ses fonctions en vertu de l'art. 26 de l'ordonnance sur le personnel (OPers)29 pour cause de changement à la tête du département et qui ne pourra de ce fait exercer, pendant deux ans, aucune activité répondant à ses capacités. Ajoutons que le délai de carence vaudra également pour toute personne désireuse d'entrer au service de la Poste ou des CFF, ce qui n'est certainement pas le but visé par le Conseil fédéral et le Parlement. Il nécessitera en outre la révision après-coup de centaines de contrats de travail, ce qui ne manquera pas de soulever des difficultés.

26 27 28 29

RS 172.121.1 RS 172.121.1 RS 172.220 RS 172.220.111.3

5902

Au surplus, il aurait fallu motiver en détail dans le rapport explicatif le but visé par ce délai de carence (p. ex. risque de perte d'indépendance durant l'exercice du mandat; prévention de conflits d'intérêts, risque de favoritisme30 dont pourraient profiter des entreprises par les informations confidentielles détenues par d'anciens responsables).

Difficultés de recrutement Enfin, eu égard aux rémunérations versées dans l'économie privée, il faut savoir que le délai de carence pourrait créer de grosses difficultés de recrutement à l'échelon des cadres supérieurs de l'administration et une tendance à une augmentation des salaires au niveau de ceux octroyés dans le secteur privé. On ne pourra pas faire non plus l'économie d'un débat sur l'octroi d'une indemnité compensatoire du délai de carence. C'est à ce prix qu'il sera encore possible de recruter des cadres disposés à accepter de telles restrictions professionnelles. Si un délai de carence devait être institué, la définition du champ d'application et le cercle des personnes visées devraient être fortement restreints.

Pour toutes ces raisons, le Conseil fédéral rejette l'art. 14a P-LPers.

Champ d'application: délai de carence selon l'art. 14a LPers applicable aux unités de l'administration centrale et décentralisée au sens de l'annexe 1 de l'OLOGA Selon les explications figurant dans le rapport, la commission part du principe que le délai de carence s'appliquera à toutes les unités de l'administration centrale et de l'administration décentralisée selon l'annexe 1 de l'ordonnance sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA)31. Or tel n'est pas le cas parce que l'art. 14a LPers ne vise que les employeurs régis par la LPers.

D'importantes unités de l'administration décentralisée selon l'annexe précitée échapperaient en effet à cette nouvelle disposition: 1.

la FINMA, Swissmedic, l'IPI et l'IFSN, qui offrent certes des contrats de travail de droit public mais ne sont pas soumis à la LPers.

2.

la SIFEM SA, l'ASR, la SERV, Pro Helvetia, Suisse Tourisme et la Société Suisse de Crédit Hôtelier, qui elles sont soumises aux dispositions du code des obligations régissant les rapports de travail (CO)32.

Par ailleurs, la réglementation découlant de l'art. 14a P-LPers que le Conseil fédéral devra inscrire dans l'OPers ne s'appliquera qu'aux domaines des unités administratives citées dans l'annexe 1 de l'OLOGA qui sont soumis à l'OPers. Outre l'administration centrale, seront visées les unités suivantes: le CDF, la RFA, le Ministère public de la Confédération (non compris le procureur et ses suppléants), l'ISDC, le PFPDT, le Service SCPT et la Commission nationale de prévention de la torture.

30

31 32

Dans le sens utilisé de manière générale dans le domaine de l'anticorruption; le terme ne doit pas être compris ici comme une infraction au sens de l'art. 305 du code pénal, RS 311.0.

RS 172.010.1 RS 220

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Unités administratives non soumises à la LPers L'art. 14a proposé ne résout par le problème de la soumission au délai de carence des unités de l'administration décentralisée qui ne sont pas régies par la LPers. Pour celles d'entre elles qui sont soumises au CO (la SIFEM SA, l'ASR, la SERV, Pro Helvetia, Suisse Tourisme et la Société Suisse de Crédit Hôtelier), il serait possible, en vertu de l'art. 340 CO, d'insérer dans le contrat de travail une clause potestative interdisant de faire concurrence.

En revanche, les unités de l'administration décentralisée qui sont régies selon des rapports de travail de droit public mais pas soumises à la LPers (FINMA, Swissmedic, IPI, IFSN) échapperaient au champ d'application du délai de carence et à l'interdiction de droit privé de faire concurrence au sens de l'art. 340 CO. Une application aussi large que possible des exigences posées par l'art. 14a P-LPers nécessiterait donc une révision des lois spéciales pertinentes. Or comme ce sont précisément ces domaines qui ont besoin de spécialistes avec une expérience acquise dans le secteur privé, on voit toute l'acuité du problème que pose la disposition en question.

La détérioration des conditions d'engagement résultant de la modification de la LPers aggraverait encore les difficultés de recrutement actuelles.

Propositions du Conseil fédéral

2.4

Non entrée en matière

Vu ce qui précède, le Conseil fédéral propose de ne pas entrer en matière sur cet objet.

2.5

Proposition subsidiaire

2.5.1

Rejet en bloc

Si l'Assemblée fédérale décide d'entrer en matière sur l'objet, le Conseil fédéral propose ce qui suit: Art. 61a P-LOGA

Délai de carence après démission

Biffer Art. 14a P-LPers Biffer

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Délai de carence applicable aux cadres du plus haut niveau hiérarchique après cessation des rapports de travail