13.027 Message concernant le déplafonnement du pour-cent de solidarité dans l'assurance-chômage du 27 février 2013

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de l'art. 90c et des dispositions transitoires de la loi sur l'assurance-chômage (LACI), en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2012

M 11.3755

Assainissement de l'assurance-chômage (N 13.3.12, Commission de l'économie et des redevances CN; E 25.9.12)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

27 février 2013

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2013-0199

1715

Condensé Il faut déplafonner le pour-cent de solidarité afin de désendetter plus rapidement le fonds de compensation de l'assurance-chômage.

Contexte Le montant des dettes de l'assurance-chômage (AC) est élevé: il atteint aujourd'hui 5 milliards de francs1. Dans le cadre de la quatrième révision partielle de la loi sur l'assurance-chômage (LACI), le législateur a introduit au 1er janvier 2011 une cotisation de solidarité de 1 % sur la tranche de salaires non assurés située entre 126 000 et 315 000 francs. Cette cotisation de solidarité est payée pour moitié par le travailleur et pour moitié par l'employeur. Le 5 juillet 2011, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national a déposé une motion visant à déplafonner le pour-cent de solidarité afin d'accélérer le désendettement de l'assurance-chômage. Le Conseil fédéral et une grande majorité du Parlement ont soutenu cette motion.

Contenu du projet Le projet propose de modifier dans la LACI les dispositions transitoires et l'art. 90c, de façon à ce qu'une cotisation de solidarité de 1 % puisse être prélevée sur les salaires soumis à l'AVS à partir du montant maximum du gain assuré, actuellement fixé à 126 000 francs. Cette cotisation de solidarité sera prélevée jusqu'à la fin de l'année au cours de laquelle le capital propre du fonds de compensation, sous déduction des fonds de roulement nécessaires à l'exploitation, aura atteint ou dépassera 0,5 milliard de francs.

Le déplafonnement grève temporairement et dans une mesure supportable les tranches de salaires supérieures à 315 000 francs. Les recettes supplémentaires ainsi obtenues permettront d'accélérer le désendettement de l'AC, diminuant de ce fait d'un quart la période durant laquelle les tranches de salaires supérieures à 126 000 francs seront soumises à cotisation (15 ans au lieu de 20); ce pour autant que le taux de chômage moyen durant la période de désendettement se monte à 3,2 %.

1

Situation au 31 décembre 2012.

1716

Message 1

Présentation du projet

Dans le domaine de l'assurance-chômage (AC), les salaires soumis à l'AVS sont assurés jusqu'à 126 000 francs par an. Par conséquent, les cotisations ordinaires, actuellement fixées à 2,2 %, ne sont prélevées que sur cette tranche de salaires.

Depuis le 1er janvier 2011, un pour-cent de solidarité est perçu sur la tranche de salaires non assurés entre 126 000 et 315 000 francs. Cette cotisation fait ainsi participer au désendettement les salaires élevés. Lors de sa session d'automne 2012, le Parlement a demandé au Conseil fédéral de préparer un projet de déplafonnement de la cotisation de solidarité pour que toutes les tranches de salaires supérieures à 126 000 francs contribuent au désendettement.

Par le passé, une cotisation de solidarité de 1 % avait déjà été prélevée entre 1999 et 2003 pour désendetter l'AC. A cette époque, la Constitution fédérale (Cst.) imposait de fixer un plafond pour les salaires soumis à cotisation. Ce n'est plus le cas avec la Constitution actuelle. Lors de la révision de 2003, un plafond a toutefois été fixé pour le pour-cent de solidarité, car un déplafonnement du pour-cent de solidarité et les 40 millions de francs qu'il aurait permis d'engranger ne représentaient pas, proportionnellement, un supplément suffisant en termes de recettes. Depuis lors, la situation a changé: les hauts salaires ont littéralement explosé, si bien qu'un déplafonnement représenterait annuellement pour l'AC environ 100 millions de francs de rentrées supplémentaires. Ces nouvelles cotisations sont supportables du point de vue sociopolitique, car elles chargent proportionnellement de la même manière les hauts et les moyens salaires.

1.1

Débats parlementaires

Le 5 juillet 2011, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-CN) s'est penchée sur l'initiative parlementaire 10.491 «Modification de la loi sur l'assurance-chômage. Appliquer le même taux de cotisation à tous les revenus», déposée le 1er octobre 2010 par la conseillère nationale Prelicz-Huber.

Cette initiative parlementaire demandait que le taux de cotisation ordinaire de 2,2 % soit appliqué à toutes les tranches de salaires. Après avoir recommandé le rejet de l'initiative, la CER-CN a déposé de son côté la motion 11.3755, intitulée «Assainissement de l'assurance-chômage». La motion chargeait le Conseil fédéral de soumettre aux chambres une modification de la loi sur l'assurance-chômage (LACI) afin qu'une cotisation de solidarité de 1 % puisse être prélevée aussi sur les tranches de salaires supérieures à 315 000 francs de façon à accélérer le désendettement de l'assurance-chômage.

Le 16 septembre 2011, le Conseil fédéral proposait d'accepter la motion 11.3755, intitulée «Assainissement de l'assurance-chômage».

Le 13 mars 2012, le Conseil national donnait suite à la recommandation de la CER-CN en acceptant la motion 11.3755 par 106 voix contre 65.

1717

Le 19 juin 2012, la Commission de la sécurité sociale et de la santé du Conseil des Etats (CSSS-CE) acceptait la motion par 10 voix contre 2. Le 25 septembre 2012, le Conseil des Etats suivait la recommandation de la CSSS-CE sans contre-projet.

1.2

Appréciation du dispositif proposé

Lors de la quatrième révision partielle de la LACI, le législateur a introduit au 1er janvier 2011 une cotisation de solidarité temporaire dans le but de désendetter l'AC. Cette cotisation de 1 % est prélevée sur les tranches de salaire non assurées situées entre le gain maximum assuré et deux fois et demie ce montant; soit actuellement entre 126 0000 et 315 000 francs. Afin d'accélérer l'amortissement de la dette, la cotisation de solidarité doit être déplafonnée et prélevée désormais sur toutes les tranches de salaires dès 126 000 francs. Le Conseil national et le Conseil des Etats soutiennent la motion dans une large majorité.

Avec un taux de chômage moyen de 3,2 %, l'AC peut amortir avec le plafonnement actuel environ 300 millions de francs par an sur sa dette. Ce montant se compose de la cotisation de solidarité et d'un excédent sur l'exercice en cours2. Avec un taux de chômage moyen de 3,2 %, le déplafonnement permettrait de générer annuellement environ 100 millions de francs supplémentaires grâce à la cotisation de solidarité.

Dans ces conditions, le montant total destiné au désendettement passerait de 300 à 400 millions de francs environ. Conformément à la disposition transitoire entrée en vigueur lors de la dernière révision de la LACI, la cotisation de solidarité sera prélevée jusqu'à la fin de l'année au cours de laquelle le capital propre du fonds de compensation, sous déduction des fonds de roulement nécessaires à l'exploitation, aura atteint ou dépassera 0,5 milliard de francs.

Déplafonner la cotisation de solidarité permettrait de faire aussi participer au désendettement les salaires supérieurs à 315 000 francs de manière proportionnelle. La suppression du plafond garantirait ainsi un traitement égal de tous les salaires supérieurs à 126 000 francs en termes de pourcentage. Sans compter qu'un déplafonnement contribuerait aussi à prélever moins longtemps le pour-cent de solidarité sur les tranches de salaires entre 126 000 et 315 000 francs.

1.3

Procédure de consultation

La procédure de consultation s'est déroulée entre le 14 novembre 2012 et le 31 janvier 2013. Une grande majorité des milieux consultés voient dans le déplafonnement du pour-cent de solidarité une mesure appropriée pour accélérer le désendettement de l'AC. Ils estiment que la charge supplémentaire temporaire qu'il impose aux employeurs et aux travailleurs est supportable et qu'elle n'aura aucune conséquence économique significative. Selon eux, l'extension de cette cotisation de solidarité aux tranches de salaires supérieures à 315 000 francs se justifie au nom de l'égalité de traitement, ainsi qu'en termes de politique sociale. Ils sont favorables au déplafonnement du pour-cent de solidarité à partir du 1er janvier 2014.

2

Avec un taux de chômage de 3,2 %, les recettes des cotisations ordinaires fixées à 2,2 % moins les dépenses pour l'AC donnent un excédent comptable.

1718

1.4

Mise en oeuvre

Le Parlement souhaite que le déplafonnement entre en vigueur aussi rapidement que possible. La modification des cotisations doit impérativement avoir lieu au début d'une année. Modifier le taux de cotisation en cours d'année entraînerait une charge administrative et financière importante, principalement pour les entreprises mais aussi pour l'AC. Par ailleurs, les modifications doivent être annoncées plusieurs mois à l'avance, afin que les employeurs puissent planifier et entreprendre correctement les adaptations à apporter au versement des salaires. Les caisses de compensation de l'AC doivent, elles aussi, adapter leurs programmes et leurs formulaires, communiquer les informations nécessaires et effectuer davantage de contrôles. Par conséquent, une mise en oeuvre ne serait possible qu'à partir du 1er janvier 2014 au plus tôt.

1.5

Classement d'interventions parlementaires

Les modifications proposées dans le présent message mettent en oeuvre la motion 11.3755, intitulée «Assainissement de l'assurance-chômage» (CER-CN; acceptée: le 13 mars 2012 par le CN; le 25 septembre 2012 par le CE).

2

Commentaire des dispositions

Lors de la troisième révision partielle de la LACI en 2003, le législateur avait introduit l'art. 90c, veillant ainsi à ce que le Conseil fédéral doive lancer une révision de la loi au cas où la dette du fonds de l'AC atteindrait 2,5 % de la somme des salaires soumis à cotisation (soit 7,1 milliards de francs en 2013). Le Conseil fédéral doit augmenter au préalable le taux de cotisation de 0,3 % au maximum et prélever désormais une cotisation de 1 % sur toutes les tranches des salaires supérieures au gain maximum assuré. La réglementation relative à la précédente augmentation de la cotisation met fin au processus d'endettement de l'AC durant les travaux de révision.

La cotisation ordinaire de 2,2 % qui est en vigueur sert à équilibrer l'exercice en cours. Une cotisation de solidarité de 1 % est prélevée depuis le 1er janvier 2011 pour l'amortissement de la dette. Désormais, cette cotisation doit s'appliquer à toutes les tranches de salaires supérieures au gain assuré.

Suite aux modifications de l'art. 90c, al. 1, LACI et de la disposition transitoire, le pour-cent de solidarité ne sera plus exclusivement prélevé sur la tranche de salaires entre le gain assuré maximum et deux fois et demie ce montant (126 000 et 315 000 francs). Les modifications suppriment le plafond pour les tranches de salaires sur lesquelles le pour-cent de solidarité est perçu.

1719

3

Conséquences

3.1

Conséquences économiques

Avant la quatrième révision partielle de la LACI, les finances de l'AC, qui reste par ailleurs lourdement endettée, n'étaient plus équilibrées. La quatrième révision partielle a permis de restaurer l'équilibre financier entre dépenses et recettes, et parallèlement de commencer à amortir la dette (situation au 31 décembre 2012: 5 milliards de francs).

Les charges supplémentaires liées à un déplafonnement concernent les tranches de salaires supérieures à 315 000 francs. En 2010, à peine 1 % des travailleurs gagnait plus que 315 000 francs. Ils ont, dans la même année, versé en cotisation à l'AC en moyenne 0,80 % de la somme totale de leurs salaires. Avec le déplafonnement du pour-cent de solidarité, ces cotisations à l'AC auraient atteint 1,26 %. Les charges salariales accessoires des personnes au salaire supérieur à 315 000 francs augmentent ainsi de 0,46 point de pourcentage payé pour moitié par le travailleur et pour moitié par l'employeur.

Concrètement, le déplafonnement du pour-cent de solidarité correspond, pour un salaire annuel de 400 000 francs, à une charge supplémentaire mensuelle de 35 francs tant pour les employeurs que pour les travailleurs. Dans le cas d'un salaire annuel s'élevant à un million de francs, il correspond à une charge supplémentaire de 285 francs pour chacune des parties. Le déplafonnement n'entraîne aucune charge supplémentaire pour les tranches de salaires jusqu'à 315 000 francs.

Ainsi, la charge supplémentaire pesant sur le facteur de production travail dans cette classe de salaires n'est donc pas négligeable en soi mais trop faible pour avoir des effets négatifs perceptibles tels que la délocalisation de places de travail. En outre, un déplafonnement contribue à ce que le pour-cent de solidarité soit aboli plus rapidement. Plus l'AC sera désendettée rapidement, plus vite les tranches de salaires supérieures à 126 000 francs pourront être déchargées. A long terme, le déplafonnement décharge les travailleurs dont le salaire se situe entre 126 000 et 315 000 francs.

Tableau des salaires soumis à l'AVS en 2010 (arrondis, sans les indemnités journalières de l'AC) Tranches de salaires annuels en francs

Masse salariale en millions de francs

Taux de cotisation à l'AC

Cotisations à l'AC en millions de francs

Jusqu'à 126 000 De 126 001 à 315 000 Plus de 315 000

260 173 22 926 9 526

2,2 % 1,0 % 1,0 %

5 724 229 95

Total

292 625

6 048

Source: OFAS (situation en janvier 2013)

Afin d'estimer les recettes supplémentaires générées par le déplafonnement du pourcent de solidarité, les cotisations à l'AC ont été calculées sur la base des salaires soumis à l'AVS en 2010.

1720

3.2

Conséquences pour l'assurance-chômage

La cotisation de solidarité est prélevée jusqu'à la fin de l'année au cours de laquelle le capital propre du fonds de compensation, sous déduction d'un fonds de roulement nécessaire à l'exploitation de 2 milliards de francs, atteint ou dépasse 0,5 milliard de francs. Depuis l'introduction du pour-cent de solidarité, l'AC a pu amortir sa dette.

Les prévisions pour l'année 2013 tablent sur un taux de chômage moyen de 3,3 %3 et un amortissement de 100 millions de francs.

Avec un taux de chômage moyen de 3,2 % sur un cycle conjoncturel entier4, le déplafonnement permettrait de faire passer l'amortissement de 300 à environ 400 millions de francs, réduisant ainsi la durée nécessaire au désendettement par rapport au statu quo et diminuant d'un quart (15 ans au lieu de 20) la période durant laquelle les tranches de salaires supérieures à 126 000 francs seront soumises à cotisation.

3.3

Conséquences pour la Confédération et les cantons

Pour l'employeur qu'est la Confédération, le déplafonnement du pour-cent de solidarité entraînera dès 2014 des cotisations à l'AC supplémentaires de l'ordre de 60 000 à 70 000 francs par an pour les salaires du personnel de la Confédération.

En leur qualité d'employeurs, les cantons doivent également compter avec une augmentation des cotisations à l'AC.

4

Aspects juridiques

4.1

Constitutionnalité et légalité

L'art. 114 Cst. habilite le Conseil fédéral à légiférer dans le domaine de l'assurancechômage. La modification de la loi est conforme à cet article et donc à la Constitution.

4.2

Compatibilité avec les obligations internationales

Le présent projet de révision est compatible avec les règles de coordination du droit européen et ne crée pas de divergences à cet égard.

4.3

Forme de l'acte à adopter

En vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. Le présent projet de modification de la LACI suit en conséquence la procédure applicable aux lois fédérales.

3 4

Prévisions conjoncturelles du groupe d'experts de la Confédération de l'hiver 2012/2013.

Période comprenant un ralentissement et une reprise conjoncturels.

1721

5

Liens avec le programme de la législature

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 20155 ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de la législature 2011 à 20156.

5 6

FF 2012 349 FF 2012 6667

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