Rapport du Conseil fédéral sur le vote électronique Evaluation de la mise en place du vote électronique (2006­2012) et bases de développement du 14 juin 2013

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Nous vous présentons le 3e rapport sur le vote électronique en vous proposant d'en prendre acte.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

14 juin 2013

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2013-0545

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Management Summary Le vote électronique s'inscrit dans un projet commun de la Confédération et des cantons, qui adapte aux techniques du XXIe siècle la culture et les traditions suisses en matière de droits politiques. Les instruments de la démocratie se sont développés au fil du temps pour intégrer notamment l'augmentation du besoin de mobilité. Le vote électronique permet aux citoyens de participer aux élections et aux votations sans contraintes de temps ni de lieu. Son instauration découle très logiquement de l'évolution qu'a connue la société au cours des dernières décennies en matière de communication et d'exécution de certaines opérations (transactions bancaires ou déclaration fiscale, par exemple).

Le projet Vote électronique est un investissement de la Confédération et des cantons au service des électeurs. Il entraîne de nombreuses améliorations: il simplifie la procédure de vote, rend impossible le dépôt de votes non valides et permet aux groupes cibles présentant des besoins particuliers comme les électeurs handicapés (en particulier de la vue) ou les citoyens suisses résidant à l'étranger d'exercer plus facilement leurs droits politiques.

A) Retour sur la phase d'essai 2006­2012 En 2002, le Conseil fédéral publie un premier rapport sur la faisabilité, les avantages et les risques du vote électronique. Trois cantons pilotes (Zurich, Neuchâtel et Genève) se lancent alors dans l'expérimentation de ce nouveau canal de vote, chacun ayant développé son propre système. Dans un second rapport publié en 2006, ces premières tentatives (2004­2005) sont jugées positivement. Le Conseil fédéral et le Parlement décident donc de l'extension progressive et contrôlée du vote électronique. Cette décision va dans le sens de la stratégie nationale de cyberadministration adoptée par le Conseil fédéral en 2007, qui doit permettre à l'économie et à la population de régler par Internet leurs affaires importantes avec les autorités, et dont le vote électronique est un projet prioritaire.

Les modifications législatives adoptées par le Parlement le 23 mars 2007 et approuvées par le Conseil fédéral le 21 septembre 2007 entrent en vigueur le 1er janvier 2008. Ainsi commence la phase d'essai élargie, toujours en cours. Ces modifications, qui concernent la loi fédérale sur les droits politiques (LDP), la loi fédérale
sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (LDPSE) et l'ordonnance sur les droits politiques (ODP) permettent l'extension progressive et contrôlée des essais à de nouveaux cantons et créent les conditions nécessaires à l'extension du vote électronique aux électeurs suisses de l'étranger. Elles fixent par ailleurs le principe selon lequel les systèmes doivent être adaptés aux besoins des handicapés de la vue, pour autant que la sécurité n'en pâtisse pas. Conformément à l'ODP, 10 % maximum des électeurs suisses sont actuellement admis à voter par voie électronique.

Pour les votations portant sur des projets requérant la majorité des cantons, le plafond est fixé à 30 % des électeurs cantonaux.

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La phase d'essai est focalisée sur les Suisses de l'étranger et sur les citoyens handicapés (de la vue). En 2009, le nombre de cantons impliqués passe de trois à treize, ce qui représente un canton sur deux. Concrètement, les cantons pilotes mettent leur système à la disposition des autres. Sur la carte ci-contre, le bleu désigne les cantons qui utilisent une copie du système zurichois, le rouge ceux qui sont hébergés par le système genevois, et le vert le canton de Neuchâtel, dont le système est intégré au Guichet unique.

Depuis 2011, l'extension suit une stratégie définie en commun par la Confédération et les cantons dans un document appelé «Feuille de route du vote électronique». Ce document, rédigé par la Chancellerie fédérale, décrit la stratégie de développement du vote électronique décidée par le Parlement en mars 2007. Il a été conçu comme un instrument de référence pour la définition des objectifs et des étapes à franchir, dans le but d'optimiser la concertation entre Confédération et cantons. En plus de fournir un échéancier, il identifie cinq domaines essentiels pour l'instauration et l'extension du vote électronique: stratégie commune Confédération/cantons, sécurité, élargissement, transparence et coûts.

Responsabilités. Rôle de la Confédération et des cantons (ch. 1.7) Au niveau de la Confédération, le projet Vote électronique est géré par la Chancellerie fédérale. Mais les véritables chefs du projet sont les cantons, puisqu'ils sont responsables de l'organisation et de l'exécution des scrutins, y compris fédéraux. La structure actuelle du projet, qui repose sur une équipe spéciale à la Chancellerie fédérale et sur plusieurs organes politiques ou opérationnels réunissant des représentants de la Confédération et des cantons (comité de pilotage, groupe de travail et groupe d'accompagnement) de même que la collaboration intercantonale ont fait leurs preuves.

Utilisation du vote électronique lors de votations et d'élections (ch. 2.4) Rien qu'au niveau de la Confédération, le vote électronique a fait l'objet d'une centaine d'essais lors de votations depuis le lancement du projet, les voix exprimées par ce canal ayant la même valeur qu'un bulletin glissé dans une urne. De plus, quatre cantons (BS, GR, AG, SG) l'ont expérimenté au niveau fédéral lors des

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élections de 2011 du Conseil national. Tous les essais ont réussi et se sont déroulés conformément aux exigences de la Confédération exposées dans l'ODP. Seuls quelques incidents mineurs relevant de l'organisation et de l'exploitation ont été signalés. Dans le canton de Lucerne, par exemple, un électeur a involontairement voté deux fois lors de la votation populaire du 11 mars 2012. Ces incidents ne remettent nullement en cause la réussite du scrutin concerné, d'autant que le secret du vote et l'exactitude du résultat ont été garantis.

A ces essais s'ajoutent de nombreux autres réalisés aux niveaux cantonal et communal.

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a suivi de près les essais de vote électronique réalisés lors des élections 2011 du Conseil national.

Elle a ensuite publié un rapport dans lequel elle souligne des points positifs tout en pointant un certain nombre d'insuffisances, lesquelles font l'objet de 13 recommandations. Parmi les critiques formulées, aucune n'a vraiment surpris ni la Confédération ni les cantons, qui envisageait déjà, à l'époque, des mesures rectificatives.

Evaluation des essais par les cantons (ch. 7) Les cantons qui ont expérimenté le vote électronique en sont satisfaits. Certains d'entre eux, qui s'étaient focalisés jusque-là sur les Suisses de l'étranger, prévoient d'intégrer à leurs prochains essais des électeurs résidant en Suisse (AG, SG et SO notamment). De nouveaux cantons envisagent de tenter l'expérience. Quant à Zurich, qui a suspendu ses essais fin 2011, il entend examiner la réinstauration du vote électronique dès que les mesures définies par le Conseil d'Etat seront mises en place.

Cohérence du vote électronique (ch. 4) Les systèmes utilisés lors des essais font l'objet d'améliorations continuelles, au point de vue de la sécurité en particulier. Les cantons, qui sont responsables de leur bon fonctionnement, les assortissent de nombreuses mesures techniques et pratiques pour les protéger des menaces internes et externes. En cas de modification importante, la Confédération charge un groupe dit d'accompagnement de contrôler le système concerné. Les groupes d'accompagnement sont des organismes externes reconnus par la Chancellerie fédérale, constitués de représentants d'autres cantons et de la Confédération essentiellement
compétents dans les domaines des droits politiques et de la gestion de systèmes de vote électronique, qui assurent une sorte d'«examen par des pairs» lors de la conception d'un système et de ses modifications ultérieures.

Au regard des bonnes pratiques reconnues à l'échelle internationale, les systèmes actuels pèchent par manque de transparence. Il est par exemple impossible de vérifier par des moyens indépendants que les voix ont été transmises, déposées et comptées correctement. Or la transparence des systèmes en ce qui concerne leur fonctionnement et leur exploitation est un facteur décisif de la confiance accordée au nouveau canal de vote.

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Groupes cibles prioritaires (ch. 2.2) Conformément aux objectifs fixés en 2006 par le Conseil fédéral et le Parlement, les premiers essais de vote électronique ont eu pour groupe cible prioritaire les Suisses de l'étranger ayant le droit de vote. La moitié environ de nos expatriés inscrits sur un registre électoral ont désormais accès au vote électronique. Les électeurs handicapés, notamment de la vue, bénéficient eux aussi d'un traitement prioritaire. Les cantons proposant le vote électronique ont déjà mis en oeuvre différentes meures visant à faciliter l'accès de ces personnes à leur système, en s'efforçant de respecter les normes internationales en la matière. La phase en cours du projet étant cependant limitée à quelques communes, seule une part réduite de ces citoyens a actuellement accès au vote électronique. On peut donc considérer que la Confédération a atteint son objectif pour la phase d'essai 2006­2012 en ce qui concerne les Suisses de l'étranger, mais qu'elle peut mieux faire à l'égard des électeurs malvoyants, aussi la Chancellerie fédérale a-t-elle chargé un groupe d'experts de formuler des recommandations à cet effet.

Cadre réglementaire et jurisprudence (ch. 1.4 et 1.5) Les bases légales du vote électronique établies à l'origine du projet ont subi au cours de la phase d'essai 2006­2012 un certain nombre d'ajustements pour répondre à des besoins concrets ­ on a par exemple porté de 20 à 30 % la part de l'électorat admis (en 2012) ­ mais elles n'ont pas été modifiées sur le fond.

Le nouveau canal de vote n'est pas encore très présent dans la jurisprudence. Les instances cantonales de Genève ont été pratiquement les seules à être saisies de recours. Jusqu'à présent, les tribunaux ont systématiquement jugé légale l'utilisation du vote électronique, pour autant qu'ils aient pu entrer en matière sur les plaintes correspondantes. Il est important de noter que le vote électronique n'a dans aucun cas conduit à l'annulation, même partielle, du résultat d'un scrutin.

Acceptation du vote électronique dans la société (ch. 3.7) L'expérimentation du vote électronique a suscité le débat. Plusieurs interventions ont été déposées sur le sujet au niveau tant de la Confédération que des cantons, avec des motivations divergentes: alors que les unes souhaitaient voire s'accélérer l'instauration du
vote électronique, d'autres plaidaient pour davantage de prudence, d'autres encore pour une interdiction pure et simple.

Le vote électronique jouit dans la société d'une acceptation relativement forte. Si certains le critiquent ou le rejettent, des études (telles celles réalisées par la direction opérationnelle E-Government Suisse) ont révélé que la grande majorité des électeurs y sont favorables.

Cette acceptation se reflète dans le taux de participation aux scrutins par voie électronique, très élevé, surtout chez les Suisses de l'étranger (souvent supérieur à 50 %), ce qui prouve l'intérêt très fort de ce groupe pour le nouveau canal de vote.

Chez les électeurs résidant en Suisse, le taux de participation est plus modeste (20 % environ), ce qui n'a rien d'étonnant compte tenu de la faible diffusion du vote électronique et du bon fonctionnement du vote par correspondance.

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L'avis des milieux technico-scientifiques (ch. 8) Dans les milieux technico-scientifiques, les avis au sujet du vote électronique sont partagés. De manière générale, il faut retenir qu'il existe en Suisse un dialogue constructif entre les scientifiques et les autorités. La Chancellerie fédérale a par exemple confié à deux établissements de recherche l'élaboration d'études sur le vote électronique.

B) Evaluation de la phase d'essai 2006­2012 et mesures qui s'imposent (ch. 3) Le Conseil fédéral a une opinion globalement positive de la seconde phase d'essai 2006­2012 du projet, qu'il considère comme une étape importante de l'instauration du vote électronique. Aussi propose-t-il d'étendre l'expérience à l'ensemble des électeurs, selon la méthode progressive appliquée jusqu'à présent, en précisant qu'en tout état de cause, «la sécurité prime la vitesse.» et qu'une extension du vote électronique est subordonnée au respect de certaines conditions.

Parmi les faiblesses identifiées figurent les exigences posées aux systèmes, et par extension leurs bases légales. Les exigences en matière de sécurité énoncées dans l'ODP ont une portée générale et nécessitent un travail d'interprétation. Il convient de préciser leur contenu, surtout en ce qui concerne la protection de données essentielles comme le secret du vote ou l'exactitude du résultat d'un scrutin. L'instauration d'exigences plus concrètes présente un double avantage: elle obligera les systèmes de vote électronique à se conformer aux normes de sécurité élevées qui sont préconisées, et elle facilitera le contrôle des propriétés des systèmes en matière de sécurité.

A chaque modification importante d'un système, la Chancellerie fédérale effectue des contrôles avec les groupes d'accompagnement évoqués plus haut. En cas de généralisation du vote électronique, il faudra accroître le professionnalisme et l'indépendance de ces contrôles.

A la lumière de l'expérience acquise et des derniers progrès de la technique notamment, il est indispensable d'adapter et de compléter le cadre réglementaire du vote électronique. On y intégrera avec profit les pratiques exemplaires et le fruit de l'expérience des cantons, sans oublier les recommandations internationales en la matière.

Compte tenu du rôle prépondérant du droit fédéral sur le terrain des droits politiques,
les modifications qui le concernent («normes minimales») doivent être apportées en priorité pour ouvrir la voie au développement ultérieur du vote électronique au niveau cantonal. Les bases légales du vote électronique doivent décrire de façon plus précise le socle commun des exigences posées à tous les systèmes. Il faut adapter l'ODP en conséquence et la compléter par un règlement technique ajustable rapidement.

Le nombre et la complexité des coopérations intercantonales ajoutés à la fréquence et à la complexité des scrutins plaident pour une simplification des procédures. Il faut remanier la procédure d'autorisation pour réduire la charge administrative.

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C) Développement du vote électronique (ch. 11) La prochaine phase du projet a pour but l'instauration du vote électronique comme troisième canal de vote. Dans cette perspective, la Chancellerie fédérale s'est fixé trois objectifs: ­

objectif à court terme: ouvrir le vote électronique à la majorité des électeurs suisses de l'étranger d'ici à 2012;

­

objectif à moyen terme: ouvrir le vote électronique à la grande majorité des électeurs suisses de l'étranger pour les élections du Conseil national de 2015;

­

objectif à long terme: ouvrir le troisième canal de vote à l'ensemble des électeurs.

L'objectif à court terme peut être considéré comme atteint. En ce qui concerne le développement du vote électronique, le Conseil fédéral prévoit des modifications dans les domaines suivants: I.

Groupes cibles prioritaires

II.

Relèvement des plafonds lors de la mise en oeuvre des nouvelles exigences de sécurité consignées dans le règlement technique

III. Procédure d'autorisation IV. Bases légales I) Groupes cibles prioritaires (ch. 11.4) Trois groupes cibles présentant des besoins spécifiques et des degrés de priorité différents ont été définis dans la perspective de la mise en place du vote électronique: les électeurs suisses de l'étranger, les électeurs handicapés (de la vue) et les électeurs résidant en Suisse. Les paragraphes qui suivent envisagent le développement du vote électronique en fonction des besoins de chacun de ces groupes cibles.

Electeurs suisses de l'étranger (ch. 11.4.1) Le Conseil fédéral n'a pour l'instant permis d'inclure dans les essais de vote électronique que les Suisses de l'étranger domiciliés dans un pays de l'Union européenne ou dans un pays signataire de l'arrangement de Wassenaar. Les autres sont donc exclus d'office, même si le canton dans lequel ils sont immatriculés leur donne théoriquement accès au vote électronique. Cette restriction tient au fait que la transmission de données cryptées n'est pas autorisée dans tous les pays. Or il n'est pas question, pour des raisons politiques évidentes, d'établir une liste des pays dans lesquels le vote électronique est autorisé ou interdit.

Cette restriction a été régulièrement critiquée par les Suisses de l'étranger euxmêmes et par l'Organisation des Suisses de l'étranger (OSE), qui défend leurs intérêts. En effet, les pays non signataires de l'arrangement de Wassenaar présentent fréquemment l'inconvénient supplémentaire que leurs services postaux fonctionnent mal, ce qui rend quasiment impossible le vote par correspondance des

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Suisses qui y sont établis. Dans ces conditions, faut-il ou non maintenir cette restriction?

L'analyse du pour, du contre et des implications techniques justifie que l'on supprime la restriction aux pays signataires de l'arrangement de Wassenaar. Il convient par contre de sensibiliser les électeurs domiciliés dans un pays où l'utilisation de procédés de cryptage est interdite aux risques attachés à l'expression de leur suffrage par Internet. Pour ce faire, les cantons devront à l'avenir exposer ces différents problèmes et leurs conséquences potentielles dans les documents de vote (en y ajoutant par exemple un mémento) et sur leur site Internet. C'est ensuite à l'électeur concerné qu'il appartiendra de décider s'il prend le risque de voter par voie électronique de son pays de résidence.

Electeurs handicapés de la vue (ch. 11.4.2) Les cantons ont d'ores et déjà mis en oeuvre différentes mesures visant à faciliter l'accès des handicapés (de la vue) à leur système. Mais comme nous l'avons vu, la phase en cours du projet concerne très peu de citoyens suisses résidant en Suisse. Le vote électronique n'est donc proposé qu'à une part infirme des électeurs handicapés de la vue. Deux explications à cela: d'une part, contrairement aux Suisses de l'étranger, les électeurs handicapés (de la vue) ne figurent pas sur un registre électoral distinct et ne constituent donc pas un groupe clairement identifiable (ce qui pose d'ailleurs la question de savoir à partir de quand une personne est considérée comme handicapée et a par conséquent le droit de voter par voie électronique); d'autre part, les cantons sont tenus de respecter les plafonds actuellement en vigueur quant au nombre de citoyens autorisés à voter par voie électronique sur le territoire suisse, or, contrairement aux Suisses de l'étranger, les électeurs handicapés ne sont pas exonérés de ces plafonds. Face à cette situation, les associations d'handicapés se sont faites plus insistantes ces derniers mois. Plusieurs d'entre elles ont sommé la Confédération de traiter selon leur ordre de priorité non seulement les Suisses de l'étranger, mais aussi les personnes handicapées de la vue. Les cantons sont conscients du problème et cherchent les moyens de le résoudre. Le Conseil fédéral prend lui aussi très au sérieux les revendications des associations
d'handicapés. Dans la perspective de l'adaptation des bases juridiques du vote électronique et de la mise en oeuvre des nouvelles exigences posées aux systèmes, la Chancellerie fédérale a créé un groupe de travail composé de représentants de la Confédération, des cantons et des groupes d'intérêts, en le chargeant de faire le point sur les principaux aspects techniques et politiques du problème.

Electeurs suisses résidant en Suisse (ch. 11.4.3) Alors que les essais initiaux (2002­2006) effectués dans les trois cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève étaient focalisés sur les électeurs résidant en Suisse, les cantons qui ont adopté un des trois systèmes existants se sont concentrés sur les électeurs suisses de l'étranger, conformément à la stratégie de la Confédération.

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A long terme toutefois, la Confédération comme les cantons visent l'extension du vote électronique à tous les électeurs suisses par un relèvement progressif des plafonds. Ils entendent en effet établir le vote électronique comme le troisième canal de vote officiel. Le caractère prioritaire des électeurs suisses de l'étranger ne vaut que pour la première phase du projet, dont les conclusions serviront à généraliser le système à l'électorat tout entier. Les cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève ont d'ores et déjà effectué des essais impliquant des résidents suisses au niveau fédéral.

Plusieurs cantons prévoient d'élargir à moyen terme leurs essais à leurs électeurs résidents, ou du moins à une part plus large d'entre eux. La Confédération y est résolument favorable. Cela suppose toutefois la mise en place préalable des systèmes de deuxième génération, qui intègrent les normes de sécurité définies conjointement par la Confédération et les cantons. Conformément au principe du fédéralisme, le Confédération laisse les cantons libres d'établir leur feuille de route quant à la mise en oeuvre de ces normes et à l'intégration d'un électorat plus large.

II) Relèvement des plafonds (ch. 11.2) lors de la mise en oeuvre des nouvelles exigences de sécurité (ch. 12) Relèvement des plafonds (ch. 11.2) En 2012, un groupe de travail technique réunissant des représentants de la Confédération et des cantons, des experts du secteur privé et des scientifiques a conclu que les systèmes actuels sont conformes aux exigences de sécurité définies dans l'ODP sous réserve que les plafonds en vigueur soient maintenus. Autrement dit, tout relèvement de ces plafonds implique la mise en oeuvre préalable des nouvelles mesures de sécurité définies précisément par le groupe de travail technique, mais le maintien en l'état des systèmes de première génération reste possible à condition de conserver le plafond de 30 % de l'électorat cantonal, en plus des Suisses de l'étranger.

Les cantons suivent d'ores et déjà des feuilles de route différentes quant à la mise en oeuvre du vote électronique. En effet, plusieurs d'entre eux prévoient d'étendre leur système à leurs électeurs résidents (Soleure, Saint-Gall et Argovie, p. ex.) ou d'impliquer dans leurs essais une part plus large de leur électorat résidant en Suisse (Genève et
Neuchâtel). L'une et l'autre de ces démarches nécessitent un relèvement des plafonds en vigueur. Pour offrir aux cantons une souplesse maximale dans le développement du nouveau canal de vote, il est question de mettre à leur disposition plusieurs plafonds différents en fonction de leur degré d'avancement, ce qui représente un véritable changement de paradigme par rapport à aujourd'hui, où les mêmes plafonds s'appliquent à tous.

Il est question de relever l'actuel plafond cantonal de 30 % (hors électeurs suisses de l'étranger) en deux fois, en fonction de l'avancement de la mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité:

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Mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité

Plafond cantonal

Statu quo

Pas de mise en oeuvre

30 % (plus électeurs suisses résidant à l'étranger)

1re étape

Mise en oeuvre partielle

50 %

Mise en oeuvre intégrale (système de deuxième génération)

100 %

2e

étape

Les plafonds s'entendent évidemment comme des limites supérieures. Il se peut qu'un canton, alors qu'il satisfait aux exigences posées, ne souhaite pas, pour des raisons politiques par exemple, utiliser la totalité du quota auquel il a droit.

La mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité permet l'intégration d'un électorat plus large, ce qui constitue un avantage certain. Les cantons pressés de généraliser le vote électronique auront ainsi la possibilité d'avancer sans être freinés par ceux qui mettront plus de temps à adopter les nouvelles normes de sécurité (cf. ch. 3.3.1), et sans non plus exercer sur ceux-là de contrainte particulière.

Le relèvement des plafonds cantonaux rend nécessaire celui du plafond fédéral, de 10 % actuellement. Là aussi, les deux étapes de mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité devront être respectées.

Dans un premier temps, la part des électeurs admis au vote électronique sera portée à 30 %. Le nombre total d'électeurs étant de 5,1 millions, cela signifie que dans les cantons proposant le vote électronique, ce canal sera accessible à guère plus de 1,5 million de personnes. Le faible niveau de ce plafond est délibéré et vise à minimiser les risques. En revanche, une fois les systèmes de deuxième génération instaurés, il n'est pas prévu de minimiser ultérieurement les risques en limitant le nombre des électeurs admissibles.

Le tableau ci-dessous indique le relèvement du plafond fédéral en fonction de l'avancement du projet dans les cantons.

Plafond cantonal

Plafond fédéral

Electorat des cantons qui n'ont pas encore mis en oeuvre les nouvelles normes de sécurité (30 %) ou ne les ont mis en oeuvre qu'en partie ((première étape: jusqu'à 50 %)

30 %

Electorat des cantons qui ont intégralement mis en oeuvre les nouvelles normes de sécurité (2e étape: 100 %)

illimité

Caractère volontaire de la mise en place (ch. 11.3) Conformément à la répartition des compétences en matière de droits politiques, les cantons sont libres d'adopter ou non le vote électronique, au moment qu'ils jugent opportun. Ils sont en effet responsables de l'organisation, de l'exécution et du financement des scrutins électoraux, y compris fédéraux. Le système fédéraliste de la Suisse veut que cette liberté de choix soit maintenue. Le Conseil fédéral l'a d'ailleurs

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confirmé dans son avis du 9 novembre 2011 concernant la motion Fässler «Introduction du vote électronique pour tous le Suisses de l'étranger d'ici à 2015» (11.3879).

Cette motion entend contraindre par voie légale les cantons à donner à tous les électeurs suisses de l'étranger la possibilité de voter par voie électronique d'ici aux élections fédérales de 2015. Le Conseil fédéral estime que les pratiques actuelles en la matière, fondées sur le partenariat, ont fait leurs preuves: la collaboration entre la Chancellerie fédérale et les cantons d'une part et entre les cantons entre eux d'autre part fonctionne parfaitement bien. Compte tenu du fait que l'attitude des cantons visà-vis du vote électronique et leur degré d'avancement dans sa mise en place sont très variables, toute contrainte exercée par la Confédération dans ce domaine ferait voler en éclat ces mécanismes bien rodés. Sans compter que la liberté de choix des cantons en ce qui concerne le vote électronique est quasiment garantie par leurs spécificités en matière de droits politiques. La mise en place du troisième canal de vote est une procédure complexe, que chaque canton doit pouvoir exécuter à son rythme.

Nouvelles exigences de sécurité (ch. 12) Les exigences de sécurité sont focalisées sur la vérifiabilité. Celle-ci permet d'identifier les dysfonctionnements dans le déroulement du vote quelle qu'en soit l'origine (erreur logicielle, erreur humaine ou tentative de manipulation intentionnelle), tout en préservant le secret du vote. Fondée sur des bases scientifiques et explicables au grand public par analogie avec les canaux de vote conventionnels, la vérifiabilité est un paramètre capital de la cohérence et de la fiabilité des scrutins et un facteur de confiance. Elle s'est d'ailleurs établie dans la littérature scientifique.

Un système vérifiable a été utilisé en Norvège en 2011 lors d'élections politiques.

En ce qui concerne la première étape de développement des systèmes de deuxième génération, le groupe de travail chargé d'étudier la sécurité des systèmes propose un modèle de vérifiabilité réduit.

Une partie des exigences de sécurité définies en plus de la vérifiabilité reposent directement sur les mesures existantes en la matière, telles qu'elles sont déjà appliquées par les cantons ou par l'exploitant de leur système. Les autres
sont inspirées d'une norme internationale reconnue.

Le contrôle des nouvelles exigences de sécurité fera lui aussi l'objet de modifications. Concrètement, il sera confié à des services spécialisés externes accrédités par la Confédération. Sur la base des rapports de contrôle (certificats), la Chancellerie fédérale délivrera un agrément, sans être elle-même impliquée dans les contrôles.

Cette procédure correspond à une certification des systèmes de vote électronique.

III) Procédure d'autorisation (ch. 14) Conformément à l'art. 8a LDP, tout canton qui souhaite expérimenter le vote électronique dans le cadre d'un scrutin fédéral doit en demander l'autorisation au Conseil fédéral. S'il n'est pas question de modifier cette obligation, la procédure d'autorisation en vigueur est incontestablement fastidieuse. Quelques améliorations ont certes été apportées çà et là, mais dans la perspective du développement futur, il est indispensable de refondre complètement la procédure pour la rendre plus efficace.

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Les deux principales modifications à apporter sont les suivantes: ­

possibilité pour le Conseil fédéral d'accorder des autorisations générales;

­

procédure d'agrément de la Chancellerie fédérale.

Jusqu'à présent, les cantons devaient déposer pour chaque scrutin une demande distincte, que le Conseil fédéral traitait au cas par cas. Il faut que le Conseil fédéral puisse accorder une autorisation générale pour les essais de longue durée. Le droit en vigueur le lui permet déjà, sous réserve que le canton puisse prouver qu'il a réalisé plusieurs essais sans panne. Cette innovation déchargera considérablement les autorités concernées, cantonales surtout.

A titre de compensation et conformément aux normes de sécurité définies conjointement par la Confédération et les cantons, il y aura désormais une procédure d'agrément, dont la responsabilité incombera à la Chancellerie fédérale, laquelle devra, avant chaque scrutin, vérifier que les cantons candidats au vote électronique satisfont (toujours) bien aux exigences, sur la base des certificats qui lui auront été remis.

Cette nouvelle procédure consiste en deux étapes dont voici la représentation schématique:

IV) Bases juridiques (ch. 16) Les modifications proposées ci-dessus devront être retranscrites dans le droit.

Le vote électronique est régi, à l'échelon de la Confédération, par LDP, qui autorise l'expérimentation du vote électronique, et par l'ODP, qui en fixe les conditions concrètes dans 19 dispositions. Il est également mentionné dans d'autres actes, qui y renvoient ou l'affectent.

Les dispositions en vigueur ont été élaborées alors que le vote électronique n'avait encore fait l'objet d'aucun essai en Suisse, ni à proprement parler dans le reste du monde, et donc d'aucun acte normatif sur lequel la Suisse eût pu s'appuyer. Les dispositions de l'ODP ont certes été légèrement adaptées au fur et à mesure de l'avancement du projet, mais aujourd'hui, dix ans après, un remaniement radical de l'appareil législatif s'impose.

De manière générale, il est temps de définir pour les systèmes de vote électronique des critères juridiques plus précis et plus en phase avec l'évolution technologique, de façon notamment à garantir le caractère professionnel et indépendant de leur contrôle. L'OSCE a précisément formulé des recommandations dans ce sens à l'issue de son observation des élections 2011 du Conseil national.

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Le remaniement des bases juridiques du vote électronique devra respecter la démarche progressive qui a fait ses preuves jusqu'ici. Chaque canton devra toutefois avoir la possibilité, contrairement à l'usage en vigueur, d'appliquer le plafond correspondant à son état d'avancement.

Les cantons qui ont participé aux essais ont eux-mêmes édicté des bases juridiques concernant le vote électronique. Il convient de préciser que les règles fédérales en la matière s'appliquent exclusivement aux scrutins fédéraux. Les scrutins cantonaux et communaux sont régis par des règles cantonales et communales, le cas échéant.

D) Coûts (ch. 17) I) Nouvelles procédures (ch. 17.1) Les procédures actuelles en rapport avec le vote électronique, en particulier la procédure d'autorisation, font l'objet d'importantes modifications. La Confédération estime que les nouvelles procédures entraîneront, à moyen et à long terme, une diminution des ressources nécessaires.

Si les cantons estiment aussi que les nouvelles procédures afférentes à l'autorisation se traduiront par une baisse des coûts, ils s'attendent par contre à ce que les procédures afférentes à la mise en oeuvre des nouvelle exigences en matière de sécurité entraînent des coûts supplémentaires.

II) Coûts du développement et des contrôles (ch. 17.1.3) Le développement des systèmes et les contrôles portant sur la mise en oeuvre des nouvelles exigences du droit fédéral entraînent aussi des coûts non négligeables, que les cantons n'ont pour l'instant pu qu'estimer grossièrement. Les estimations divergent car les données de chaque canton se rapportent uniquement au développement et à la vérification de son propre système. L'estimation la plus haute des coûts de développement liés à la première étape s'élève à 1 700 000 francs. Pour arriver aux systèmes de deuxième génération, les coûts supplémentaires ne devraient pas excéder 3 900 000 francs. Le coût des contrôles à effectuer en vue de l'agrément d'un système de vote électronique de la première étape est estimé à 550 000 francs au maximum; pour les systèmes de deuxième génération, l'estimation passe à 700 000 francs. Il faut y ajouter des frais récurrents estimés à env.

44 000 francs par an.

III) Répartition des charges entre Confédération et cantons (ch. 17.2) Les estimations des coûts montrent que le développement
des systèmes et les contrôles externes réguliers impliquent des coûts non négligeables. Du fait de l'actuelle répartition des compétences dans le domaine des droits politiques, les cantons devraient en principe prendre en charge ces coûts. Mais comme le vote électronique est un projet commun de la Confédération et des cantons et que la Confédération s'est fixé pour objectif, dans le cadre de la stratégie suisse de cyberadministration, de mettre en place le nouveau canal de vote au plan national, les cantons ont adressé la demande suivante à la Chancellerie fédérale: que la Confédération participe aux coûts. Les cantons continueront bien évidemment de prendre en charge les coûts d'exploitation des systèmes.

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Sur proposition de la Chancellerie fédérale, les cantons seront soutenus en 2013 par l'intermédiaire de ressources du «Plan d'action» d'E-Government Suisse à hauteur de 100 000 francs par système, soit 300 000 francs au total. La Confédération est prête à soutenir les cantons en 2014 à concurrence de la même somme, issue du budget de la Chancellerie fédérale. Elle a par ailleurs promis aux cantons de les soutenir financièrement lors des premiers audits des systèmes développés; les moyens proviendront également du budget ordinaire de la Chancellerie fédérale.

Sur proposition de celle-ci et d'entente avec les cantons, le Conseil fédéral examinera en 2013 l'opportunité d'une participation (unique) de la Confédération au-delà de ce cadre à partir de 2015.

E) Suite des opérations (ch. 18) L'entrée en vigueur, prévue le 1er janvier 2014, des nouvelles bases juridiques remaniées selon les propositions du présent rapport modifiera les conditions d'expérimentation du vote électronique. Certains cantons en profiteront pour porter de 30 à 50 % la part de leurs électeurs admis à voter par voie électronique. Nul doute que si leurs essais sont concluants, ils feront des émules.

Les cantons seront libres de passer directement à la deuxième étape, qui leur permettra d'intégrer 100 % de leur électorat dans leurs essais. Certains ont déjà annoncé ne pas l'envisager avant 2016/17.

Le vote électronique doit aussi faire l'objet de nouveaux essais lors d'élections, à l'échelon communal et cantonal tout d'abord. Plusieurs cantons y songent déjà.

L'idée, c'est que la grande majorité des Suisses de l'étranger et, dans l'idéal, la majorité des cantons puissent expérimenter le vote électronique lors des prochaines élections fédérales, en 2015. La Confédération encourage par ailleurs les cantons à offrir dès 2015 à certains de leurs électeurs résidant en Suisse la possibilité de voter par voie électronique.

Pour que les objectifs décrits ici puissent être atteints, il est indispensable que nouveaux cantons adoptent le vote électronique. Ils peuvent compter sur le soutien ferme de la Chancellerie fédérale et des cantons dotés d'un système propre, qui à plusieurs reprises se sont déclarés prêts à partager leur système.

F) Perspectives Le Conseil fédéral devrait publier son quatrième et a priori dernier rapport sur le
vote électronique en 2017/18. Il y évaluera les expérimentations réalisées dans les nouvelles conditions. Si le résultat est positif, le troisième canal de vote pourrait être instauré définitivement, les cantons restant libres de le proposer ou non, dans un cadre légal fédéral explicite et éprouvé. Il est encore trop tôt pour dire si le principe de l'autorisation devra être maintenu, et si oui sous quelle forme. En tout état de cause, l'instauration ferme du troisième canal de vote entraînerait la dissolution de la structure actuellement en place au niveau fédéral.

4532

Table des matières Management Summary

4520

Avant-propos

4537

Structure du rapport

4537

Partie I: Développement du vote électronique 2006­2012

4539

1 Cadre général 1.1 Définition et spécificités 1.2 Stratégie suisse de cyberadministration 1.3 Mandat 1.4 Cadre réglementaire 1.4.1 Réglementation fédérale 1.4.2 Réglementations cantonales. Evolution depuis 2006 1.4.3 Accords de collaboration 1.4.4 La clause «Wassenaar» 1.4.5 Autres normes 1.5 Jurisprudence 1.6 Impulsions politiques 1.6.1 Interventions parlementaires fédérales 1.6.2 Impulsions politiques dans les cantons 1.7 Les acteurs du vote électronique 1.7.1 Instances fédérales 1.7.2 Instances cantonales 1.7.3 Instances communales 1.7.4 Cantons partenaires 1.7.5 Autres partenaires publics et privés 1.8 Cadre international 1.8.1 Les organisations internationales et leurs recommandations 1.8.2 Développements dans d'autres pays et organisations

4539 4539 4540 4541 4541 4541 4544 4547 4549 4550 4551 4552 4552 4553 4554 4554 4555 4557 4558 4559 4560 4560 4563

2 Extension du vote électronique 2006­2012 2.1 Stratégies fédérale et cantonales 2.1.1 Stratégie fédérale 2.1.2 Stratégies cantonales 2.2 Priorité aux Suisses de l'étranger 2.3 Choix du système 2.4 Utilisation du vote électronique 2.4.1 Votations fédérales 2.4.2 Elections fédérales 2.4.3 Scrutins cantonaux et communaux 2.4.4 Evolution des systèmes 2.5 Défis 2.5.1 Point de vue de la Confédération 2.5.2 Point de vue des cantons

4565 4565 4565 4566 4567 4569 4570 4571 4573 4574 4575 4576 4576 4577

4533

3 Evaluation de l'extension du vote électronique 2006­2012 3.1 Suisses de l'étranger 3.2 Electeurs malvoyants 3.3 Plurilinguisme 3.4 Optimisation des procédures 3.5 Election avec vote électronique 3.6 Evolution de la participation aux élections et aux votations avec le vote électronique 3.7 Acceptation du vote électronique dans la société et dans les milieux politiques 3.7.1 Partisans d'une généralisation rapide 3.7.2 Opposants à une généralisation rapide

4578 4578 4578 4579 4580 4580

4 Mise en oeuvre des exigences de sécurité 4.1 Protection du secret du vote 4.2 Protection contre les manipulations 4.3 Gestion des risques 4.3.1 Plate-forme client 4.3.2 Canal de transmission (Internet) 4.3.3 Infrastructure du vote électronique 4.4 Contrôles externes 4.4.1 Exigences en matière de contrôle 4.4.2 Groupes d'accompagnement 4.4.3 Procédure d'autorisation par le Conseil fédéral 4.4.4 Recommandations internationales

4586 4586 4588 4590 4591 4591 4591 4592 4592 4592 4593 4594

5 Fiabilité, transparence et observabilité du vote électronique 5.1 Rôle de la confiance 5.2 Exigences de transparence 5.3 Exigences d'observation 5.4 Mesures liées à la transparence et à l'observation 5.4.1 Protection des données 5.4.2 Information des électeurs 5.4.3 Formation des collaborateurs 5.4.4 Rôle de la commission électorale 5.5 Vérification du résultat

4595 4595 4596 4597 4598 4598 4599 4599 4600 4600

6 Aspects financiers 6.1 Bases communes de calcul des coûts 6.2 Coûts du vote électronique 6.3 Economies 6.4 Soutien financier de la Confédération

4602 4602 4602 4603 4603

4534

4581 4584 4585 4585

7 Evaluations des cantons 7.1 Zurich 7.2 Neuchâtel 7.3 Genève

4605 4605 4605 4605

8 Evaluations scientifiques 8.1 Séminaires e-voting suisses 8.2 Etude de la HESB 8.3 Autres études et évaluations 8.3.1 Recherche de l'EPFZ 8.3.2 Etude «E-democracy in Switzerland» 8.3.3 Etude «Three Case Studies from Switzerland: E-Voting» 8.3.4 Etude «Swiss Democracy on the web 2010»

4607 4607 4607 4608 4608 4609 4609 4609

9 Observation internationale 9.1 Aspects positifs 9.2 Aspects critiques

4610 4610 4610

Partie II: Perspectives

4612

10 Structure de la deuxième partie

4612

11 Développement du vote électronique 11.1 Buts du développement 11.2 Relèvement des plafonds 11.2.1 Relèvement du plafond cantonal 11.2.2 Relèvement du plafond fédéral 11.3 Caractère volontaire de la mise en place 11.4 Groupes cibles 11.4.1 Electeurs suisses de l'étranger 11.4.2 Electeurs handicapés (de la vue) 11.4.3 Electeurs suisses de l'intérieur 11.5 Structure du projet 11.6 Remaniement des bases juridiques

4612 4612 4613 4614 4614 4615 4615 4615 4618 4619 4619 4620

12 Bases techniques 12.1 Sécurité 12.1.1 Des exigences de sécurité communes focalisées sur la vérifiabilité 12.1.2 Exigences communes posées aux contrôles de système 12.1.3 Moment de la clôture de l'urne électronique 12.1.4 Moment du décryptage de l'urne électronique 12.2 Fonctionnalité

4622 4622

13 Gestion des risques

4629

4622 4627 4628 4628 4629

4535

14 Procédures mises en place par les autorités pour développer le vote électronique 14.1 Autorisation accordée par le Conseil fédéral 14.1.1 Cantons novices 14.1.2 Cantons expérimentés 14.2 Agrément de la Chancellerie fédérale 14.2.1 Procédure ordinaire 14.2.2 Procédure en cas de non-agrément 14.3 Contenu des demandes 14.3.1 Demande au Conseil fédéral 14.3.2 Demande à la Chancellerie fédérale

4630 4631 4633 4633 4634 4634 4634 4635 4635 4635

15 Communication 15.1 Objet et buts de la communication 15.2 Coordination entre la Confédération et les cantons 15.3 Groupes cibles 15.4 Publication de documents

4637 4637 4637 4637 4637

16 Bases juridiques 16.1 Loi fédérale sur les droits politiques 16.2 Ordonnance sur les droits politiques 16.3 Règlement technique du vote électronique 16.4 Loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger 16.5 Bases juridiques cantonales 16.6 Normes internationales 16.6.1 Recommandations du Conseil de l'Europe 16.6.2 Recommandations de l'OSCE/BIDDH

4638 4638 4639 4640 4641 4641 4642 4642 4643

17 Conséquences financières 17.1 Nouvelles procédures 17.1.1 Estimation de la Confédération 17.1.2 Estimations des cantons 17.1.3 Coût du développement du vote électronique 17.2 Répartition des charges entre Confédération et cantons

4644 4644 4644 4645 4645 4646

18 Suite des opérations

4646

Documentation complémentaire

4649

Liste des abréviations

4650

4536

Rapport Avant-propos Le vote électronique s'inscrit dans un projet commun de la Confédération et des cantons, qui adapte aux technologies du XXIe siècle la culture et les traditions suisses en matière de droits politiques. Les instruments de la démocratie se sont développés au fil du temps pour intégrer notamment l'augmentation du besoin de mobilité. Le vote électronique permet aux citoyens de participer aux élections et aux votations sans contraintes de temps ni de lieu. Son instauration découle très logiquement de l'évolution qu'a connue la société au cours des dernières décennies en matière de communication et d'exécution de certaines opérations (transactions bancaires ou déclaration fiscale, p. ex.).

Le projet Vote électronique est un investissement de la Confédération et des cantons au service des électeurs. Il entraîne de nombreuses améliorations: il simplifie la procédure de vote, rend impossible le dépôt de votes non valides et permet aux groupes cibles présentant des besoins particuliers comme les électeurs handicapés (en particulier de la vue) ou les électeurs suisses résidant à l'étranger d'exercer plus facilement leurs droits politiques.

En 2007, l'Assemblée fédérale a chargé le Conseil fédéral de mettre en place progressivement le vote électronique, se fondant sur le deuxième rapport du Conseil fédéral sur le sujet, daté du 31 mai 20061, dans lequel il évaluait très favorablement les essais réalisés jusque-là dans les trois cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève. Le Conseil fédéral a délégué le mandat du Parlement à la Chancellerie fédérale, garante des droits politiques au niveau de la Confédération.

Le projet Vote électronique a pour but l'instauration du vote par Internet comme troisième canal de vote et constitue un axe prioritaire de la stratégie suisse de cyberadministration.

En 2011, le Conseil fédéral a intégré le vote électronique dans le programme de la législature 2011 à 20152 comme objet des grandes lignes et s'est fixé pour objectif d'élaborer un troisième rapport sur le sujet en 2013. Dans le présent rapport, il évalue la phase d'essai 2006­2012 et expose les étapes nécessaires au développement du vote électronique.

Structure du rapport La première partie du rapport dresse une évaluation de la phase d'essai 2006­2012, dont l'enjeu principal était l'extension du vote électronique aux Suisses de l'étranger et à de nouveaux cantons. Elle traite des aspects suivants: évolution du cadre général (ch. 1), évaluation de l'extension (ch. 2 et 3), mise en oeuvre des exigences de sécurité (ch. 4), acceptation, fiabilité et observabilité (ch. 5), conséquences financières (ch. 6), point de vue des cantons (ch. 7), évaluations scientifiques (ch. 8) et observation internationale (ch. 9).

1 2

FF 2006 5205 FF 2012 349

4537

La deuxième partie esquisse les perspectives d'évolution du projet. La prochaine phase sera focalisée sur l'extension du vote électronique aux électeurs résidant en Suisse. Dans cette perspective, le rapport fait le point sur le relèvement des plafonds (ch. 11) et sur les nouvelles exigences de sécurité qu'il implique (ch. 12). Il expose aussi les modifications à apporter aux bases juridiques (ch. 16) et aux procédures (ch. 14). Il soulève enfin la question de la gestion des risques (ch. 13), de la communication (ch. 15) et des conséquences financières de l'extension (ch. 14 et 17). Pour terminer, il esquisse la suite des opérations (ch. 18).

4538

Partie I: Développement du vote électronique 2006­2012 1

Cadre général

1.1

Définition et spécificités

En Suisse, le terme «vote électronique» indique le vote à distance émis électroniquement. Actuellement les trois systèmes de vote électronique développés par les cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève3 offrent uniquement le vote par Internet. Vote électronique et vote par Internet sont donc utilisés comme synonymes dans le présent document.

La publication du deuxième rapport sur le vote électronique et l'adoption par le Parlement le 23 mars 20074 des modifications de la législation l'accompagnant marquent la conclusion de la phase d'essais pilote (2004­2007) et l'entrée dans une nouvelle phase d'essais élargis. Le vote électronique est un canal additionnel de vote dont les résultats ont des effets juridiques liant les autorités.

Le recours au vote électronique lors de scrutins fédéraux se fait sur la base d'une autorisation préalable du Conseil fédéral5, l'autorité compétente pour approuver le résultat des votations fédérales6. A ce titre, le Conseil fédéral a la compétence de limiter ratio materiae, loci, temporae, voire de suspendre le vote électronique si nécessaire7. Le vote électronique n'est autorisé que s'il est proposé dans les régions prévues pour tous les scrutins ayant lieu à la même date8.

La conclusion de la phase pilote a ouvert une nouvelle phase d'essais élargis pendant laquelle le vote électronique s'étend à de nouveaux cantons. Cette extension se fait de manière échelonnée, compte tenu des risques et en tirant les leçons du passé.

En 2006, le Conseil fédéral avait identifié quatre étapes pour l'introduction échelonnée du vote électronique:

3 4

5 6 7 8

1.

vote électronique lors de votations,

2.

vote électronique lors d'élections,

3.

signature, par voie électronique, de demandes de référendum et d'initiatives populaires («e-collecting»),

4.

signature, par voie électronique, de listes de candidats au Conseil national.

Après une période d'essais, le vote par SMS proposé par le système zurichois a été définitivement rejeté avant la phase de tests 2008­2011.

Le Conseil National et le Conseil des Etats ont pris acte, respectivement le 19 décembre 2006 et le 19 mars 2007, du rapport du Conseil fédéral du 31 mai 2006 sur les projets pilotes en matière de vote électronique, et approuvé les modifications de la législation fédérale sur les droits politiques. Les procès-verbaux des deux séances se trouvent aux adresses suivantes: www.parlament.ch/ab/frameset/d/n/4715/236210/d_n_4715_236210_236330.htm (Conseil National) et www.parlament.ch/ab/frameset/d/s/4716/241444/d_s_4716_241444_241572.htm (Conseil des Etats).

Art. 8a de la loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP; RS 161.1), art. 27a de l'ordonnance du 24 mai 1978 sur les droits politiques (ODP; RS 161.11).

Art. 15, al. 1, LDP.

Art 8a, al. 1, LDP, art. 27c, al. 1, ODP.

Art. 27a, al. 2, ODP.

4539

Tous les cantons ont la possibilité d'instaurer le vote électronique en franchissant l'une après l'autre les étapes ci-dessus, d'abord lors de votations puis lors d'élections. Les deux dernières étapes n'ont pas été testées à ce jour.

Dans une première phase, le vote électronique est avant tout destiné à deux groupes cibles identifiés comme prioritaires: les Suisses de l'étranger et les personnes handicapées de la vue, pour lesquels ses avantages sont le plus évidents.

Le projet reflète la répartition fédéraliste des compétences en matière de droits politiques. L'instauration et l'exploitation des systèmes de vote électronique relèvent des compétences des cantons, qui sont responsables de l'organisation et de l'exécution des scrutins, y compris fédéraux. La Confédération édicte les exigences applicables aux scrutins fédéraux, vérifie leur application dans le cadre d'une procédure d'autorisation et coordonne les projets cantonaux.

1.2

Stratégie suisse de cyberadministration

Le 24 janvier 2007, le Conseil fédéral a adopté la stratégie suisse de cyberadministration9, élaborée sous la houlette de l'Unité de stratégie informatique de la Confédération (USIC) en collaboration avec les cantons et les communes. Cette stratégie constitue le fondement permettant à la Confédération, aux cantons et aux communes d'orienter leurs efforts vers des objectifs communs, et définit des principes et des procédures ainsi que les instruments nécessaires à leur mise en oeuvre.

La stratégie vise à donner à l'économie et à la population la possibilité d'effectuer les transactions administratives et de régler les affaires importantes avec les autorités par voie électronique. Les autorités doivent à cette fin moderniser leurs processus et communiquer entre elles par voie électronique.

La stratégie est mise en oeuvre de manière décentralisée mais coordonnée sous la conduite d'un comité de pilotage et d'un organe de direction opérationnelle, qui bénéficient du soutien d'un conseil d'experts. Ce dernier apporte également son soutien aux organisations qui assument la responsabilité d'un projet de mise en oeuvre. L'organisation de ces organes de coordination est réglée dans une convention-cadre10.

Le vote électronique est un projet prioritaire de la stratégie suisse de cyberadministration, dont la mise en oeuvre incombe à la Chancellerie fédérale. Les projets prioritaires doivent être mis en oeuvre de manière coordonnée. Le comité de pilotage évalue régulièrement le catalogue des projets prioritaires11 et la mise en oeuvre de ces derniers, et procède au besoin aux ajustements nécessaires.

La stratégie suisse de cyberadministration découle de la stratégie pour une société de l'information approuvée par le Conseil fédéral en 1998, dont l'un des buts était de déterminer dans quelle mesure les procédures de décision démocratiques pouvaient recourir aux nouvelles techniques d'information.

9 10 11

Cf. www.egovernment.ch > Documents de base > Stratégie.

Cf. www.egovernment.ch > Documents de base > Convention-cadre.

Cf. www.egovernment.ch > Mise en oeuvre > Catalogue des objets prioritaires.

4540

1.3

Mandat

Suite à une première phase, au cours de laquelle les cantons de Genève, Neuchâtel et Zurich ont procédé à des essais pilotes en étroite collaboration avec la Confédération, le Conseil fédéral s'est prononcé dans son rapport du 31 mai 2006, en faveur de l'introduction par étapes du vote électronique.

La première étape des essais contrôlés de vote électronique devait être étendue de manière à permettre de tirer des enseignements supplémentaires. Les trois cantons qui avaient introduit le vote électronique et procédé avec le soutien de la Confédération à d'importants investissements devaient en particulier pouvoir poursuivre leurs projets pilotes. Enfin, d'autres cantons intéressés devaient pouvoir prendre part aux essais, sans toutefois bénéficier d'un cofinancement de la Confédération.

Le Conseil national a pris acte du rapport du Conseil fédéral le 19 décembre 2006, le Conseil des Etats le 19 mars 200712.

La phase d'essai étendue a débuté avec l'entrée en vigueur des modifications de la loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP)13 et de l'ordonnance du 24 mai 1978 sur les droits politiques le 1er janvier 2008 (ODP)14.

1.4

Cadre réglementaire

1.4.1

Réglementation fédérale

Le vote électronique est régi par les normes suivantes: 1.

Art. 34 de la Constitution (Cst.)15

2.

Art. 8a et 12, 38, 49 LDP

3.

Art. 1 et 5b de la loi fédérale du 19 décembre 1975 sur les droits politiques des Suisses de l'étranger16

4.

Art. 27a à 27q ODP.

Selon la LDP et la LDPSE, le Conseil fédéral peut, en accord avec les cantons et les communes intéressés, autoriser l'expérimentation du vote électronique en la limitant à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets. Il émet une autorisation spéciale en ce sens pour chaque scrutin, à la demande du canton.

L'ODP fixe les conditions techniques, juridiques et pratiques de l'exécution de ces essais, de même que la part de l'électorat admise à y participer, qui est actuellement de 10 % pour l'électorat fédéral et de 30 % pour l'électorat cantonal.

12

13 14 15 16

Les procès-verbaux des deux séances se trouvent aux adresses suivantes: www.parlament.ch/ab/frameset/f/n/4715/236210/f_n_4715_236210_236662.htm (Conseil national) et www.parlament.ch/ab/frameset/f/s/4716/241444/f_s_4716_241444_241683.htm (Conseil des Etats).

RS 161.1 RS 161.11 RS 101 RS 161.5; LDPSE dans le présent rapport.

4541

Les documents suivants complètent la réglementation: 1.

circulaire du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux du 20 septembre 2002 relative à la révision partielle de l'ordonnance sur les droits politiques (conditions de l'octroi de l'autorisation de procéder à des essais pilotes sur le vote électronique)17,

2.

message du 31 mai 2006 concernant l'introduction de l'initiative populaire générale et d'autres modifications de la législation fédérale sur les droits politiques18,

3.

circulaire de la Chancellerie fédérale sur les travaux eCH concernant l'harmonisation des registres électoraux.

Bases juridiques des droits politiques et évolution de ces bases depuis 2006 L'entrée en vigueur, le premier janvier 2008, des modifications législatives adoptées par le Parlement le 23 mars 2007 et approuvées par le Conseil fédéral le 21 septembre 200719 marque le début de la phase d'essais élargis qui se poursuit actuellement.

Les modifications des bases juridiques ont permis l'introduction échelonnée du vote électronique dans les cantons. Des procédures de contrôle, dont la coordination incombe à la Confédération, ont également été prévues.

Les modifications de la législation entrées en vigueur début 2008 concernaient à la foi la LDP, la LDPSE et l'ODP. Elles ont rendu possible l'extension contrôlée des essais à de nouveaux cantons20 et créé les conditions préalables à l'extension du vote électronique aux électeurs suisses de l'étranger21. Elles imposaient aussi la mise en conformité des systèmes avec les besoins des électeurs handicapés (notamment de la vue), dans le respect des exigences de sécurité22. Selon la législation actuelle, la part de l'électorat pouvant recourir au vote électronique s'étend désormais à 10 % au plus du corps électoral suisse et à 30 %23 au plus de l'électorat cantonal en cas de vote sur des objets où la majorité des cantons est également requise24. Les nouvelles bases juridiques permettent au Conseil fédéral d'autoriser les cantons qui effectuent des essais depuis un certain temps à les poursuivre pendant une période déterminée si le système ne change pas25. C'est le Conseil fédéral qui fixe la longueur de la période et les conditions au cas par cas. Il peut à tout moment limiter ou retirer l'autorisation de recourir au vote électronique. Etant donné l'évolution rapide du vote électronique et des systèmes ces dernières années, cette possibilité n'a pas encore été utilisée, mais elle existe bel et bien. Autrement dit, le Conseil fédéral a jusqu'ici émis une autorisation spéciale pour chaque scrutin, mais cette procédure va être simplifiée26.

17 18 19 20 21 22 23 24

25 26

FF 2002 6141 FF 2006 5001 RO 2007 4639 RO 2007 4639 Art. 5b LDPSE.

Art. 27ebis ODP.

La limite était initialement de 20 %. A la demande des cantons de Neuchâtel et de Genève, le Conseil fédéral a décidé, le 4 avril 2012, de la relever à 30 % au 1er juin 2012.

Art. 27c ODP. Selon le message du 31 mai 2006 concernant l'introduction de l'initiative populaire générale et d'autres modifications de la législation fédérale sur les droits politiques du 31 mai 2006 les limitations du vote électronique à 10 ou 20 % de l'électorat devaient être valables durant toute la législature 2005­2011 (FF 2006 5001 5042).

Art. 8a, al. 1bis, LDP et 27c, al. 3, ODP.

Cf. ch. 14.1.

4542

Les modifications des bases légales étaient sujettes au référendum. Aucune demande de référendum n'ayant été déposée à l'expiration du délai fixé au 12 juillet 2007, le Conseil fédéral a fixé l'entrée en vigueur des modifications au 1er janvier 2008.

Les modifications suivantes ont été introduites entre 2009 et 2012 afin de tenir compte de l'évolution des projets: 1.

les Suisses de l'étranger ayant le droit de vote ont été exclus dès septembre 2009 du calcul de la limite cantonale27;

2.

une disposition spécifique aux échanges de données en cas d'hébergement a été introduite28;

3.

la limite des 20 % a été portée à 30 % de l'électorat cantonal29; cette modification est entrée en vigueur le 1er juin 2012.

Lois sur la protection des données et sur la transparence Le vote électronique relève également de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans)30 et de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)31.

La LPD contient des dispositions sur le traitement des données personnelles. Le traitement de données par les administrations cantonales et communales est régi par le droit cantonal. Ces lois s'appliquent donc, de même que les ordonnances qui s'y rattachent, au vote électronique, qui implique l'utilisation de données personnelles.

La LTrans et son ordonnance du 24 mai 2006 (OTrans)32 prévoient le principe d'accès aux documents de l'administration fédérale. Le principe du secret est abandonné au profit du principe de transparence. Compte tenu de l'importance capitale du projet pour la démocratie directe, on a vu fleurir ces dernières années les demandes d'accès aux documents traitant du vote électronique.

Au niveau fédéral, le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT) est l'interlocuteur de référence pour les questions relatives à la protection des données et au principe de la transparence.

Le PFPDT a émis dans ses rapports d'activités33 des avis se référant au vote électronique:

27 28 29 30 31 32 33

­

Dans son 19e rapport (période 2011­2012), il informe sur son rôle de médiateur concernant les demandes d'accès à la documentation sur le vote électronique adressées à la Chancellerie fédérale en vertu de la loi sur la transparence.

­

Dans son 17e rapport (période 2009­2010), il conclut que l'utilisation du nouveau numéro AVS pour les normes eCH susceptibles d'être applicables au vote électronique (eCH-0045) ne peut se faire en l'absence de base légale, et ce pour des raisons évidentes de protection des données.

Art. 27c, al. 2, ODP.

Art. 27kbis, ODP.

Art. 27c, al. 2, ODP.

RS 152.3 RS 235.1 RS 152.31 Les rapports d'activité annuels sont téléchargeables sur www.edoeb.admin.ch > Documentation > Rapports d'activités.

4543

­

Le 14e rapport (période 2006­2007) traite quant à lui de la traçabilité du vote par Internet et se prononce sur le «paper-trail» (tirage papier des voix électroniques).

1.4.2

Réglementations cantonales. Evolution depuis 2006

La législation fédérale constitue un socle commun d'exigences. Pour le reste, le vote électronique est soumis à la législation cantonale34. En cas de contradiction entre la législation cantonale et la législation fédérale, le droit fédéral prime35. En matière de droits politiques, de telles contradictions sont a priori exclues dans la mesure où le Conseil fédéral contrôle par l'intermédiaire de la Chancellerie fédérale toute modification de la législation cantonale sur les droits politiques36. L'approbation fédérale est une condition de validité de la législation cantonale sur les droits politiques.

Pour pouvoir introduire le vote électronique, un canton doit au préalable adopter les bases légales nécessaires, et notamment adapter sa législation sur les droits politiques. Le cas échéant, les normes cantonales sur la sécurité informatique, sur la protection des données, sur la publicité des données et sur l'observation entrent également en ligne de compte.

L'annexe 1 «Bases légales du vote électronique» offre une vue d'ensemble des dispositions cantonales pertinentes.

Principales caractéristiques des dispositions cantonales sur le vote électronique: ­

34 35 36

37

La réglementation du vote électronique des cantons pilotes (Zurich, Neuchâtel, Genève) est restée pour l'essentiel telle qu'elle avait été introduite au début des années 2000: loi et ordonnance sur les droits politiques à Zurich, décret sur l'introduction à titre expérimental des moyens électroniques facilitant l'exercice des droits politiques et articles pertinents de la loi sur le Guichet unique à Neuchâtel. A Genève, ce sont principalement la loi sur l'exercice des droits politiques (LEDP) et son règlement d'application qui régissent le vote électronique37. Neuchâtel a prolongé indéfiniment le décret du Conseil d'Etat autorisant le vote électronique. Zurich a décidé fin 2011 de suspendre les essais en attendant les décisions fédérales d'extension du vote électronique et la réalisation de l'harmonisation ou de la centralisation cantonale des registres électoraux. La base légale n'a quant à elle pas été modifiée: le vote électronique est donc toujours possible dans le canton de Zurich.

Art. 39 Cst.

Art. 49 Cst.

Art. 51 ss Cst., 91, al. 2, LDP et 61b, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA; RS 172.010) et art. 27k de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA; RS 172.010.1).

RSG A 5 05 et A 5 05.1. Le 8 février 2009, les citoyens genevois ont accepté par 70 % des voix un nouvel article constitutionnel (art. 48) qui introduit le principe du vote électronique dans la constitution cantonale, ce qui est une première, et créé une commission électorale centrale dont les membres sont désignés pour une législature. La nouvelle constitution cantonale adoptée le 14 octobre 2012 ne fait plus référence aux différents canaux de vote, pas plus au vote électronique qu'aux autres.

4544

38 39

40 41

­

En ce qui concerne l'extension du vote électronique ratio materiae et son utilisation lors d'élections, la législation zurichoise a prévu d'emblée la possibilité d'autoriser le vote électronique lors d'élections cantonales et communales. A Genève, la possibilité d'utiliser le vote électronique lors d'élections est prévue à titre exceptionnel dans les dispositions transitoires de la LEDP38. Cette disposition n'était pas encore en vigueur lorsque le canton a envisagé de proposer le vote électronique lors des élections fédérales de 201139. Le décret neuchâtelois sur le vote électronique prévoit quant à lui l'utilisation du vote électronique pour tous les «événements» relevant des droits politiques (votations, élections, signature de référendums et initiatives).

­

Depuis janvier 2008, les cantons ont modifié leur législation afin d'y inscrire l'exigence de centralisation ou d'harmonisation des registres des Suisses de l'étranger40. La condition préalable à l'introduction du vote électronique pour les Suisses de l'étranger est ainsi remplie d'un point de vue législatif.

La mise en oeuvre concrète de la centralisation ou de l'harmonisation des registres n'est pas encore achevée dans tous les cantons.

­

La législation d'introduction du vote électronique des dix cantons sans système propre introduite après 2008 reprend pour l'essentiel les dispositions de la LDP et de l'ODP41.

­

Les lois cantonales sur les droits politiques de Berne, de Lucerne, de Soleure, de Bâle-Ville, de Schaffhouse et de Thurgovie, permettent, comme principe général, le recours au vote électronique sous réserve que les conditions techniques et organisationnelles soient remplies et que les principes fondamentaux régissant l'exercice des droits politiques soient respectés. Le gouvernement cantonal est habilité à décider de son utilisation concrète. Dans le canton de Fribourg, la possibilité de recourir au vote électronique est prévue dans les dispositions transitoires de la loi, en tant que dérogation aux dispositions sur les méthodes d'exercice des droits politiques.

­

Les gouvernements cantonaux des cantons de Berne, de Lucerne, de BâleVille, de Soleure, de Schaffhouse et de Thurgovie ont chacun adopté une ordonnance consacrée aux essais de vote électronique pour les Suisses de l'étranger. L'intention est d'inclure les dispositions sur le vote électronique dans l'ordonnance sur les droits politiques dès la fin de la période d'essais.

­

Dans les cantons de Saint-Gall, des Grisons et d'Argovie, les questions spécifiques au vote électronique sont traitées dans les ordonnances sur les droits politiques.

­

Les ordonnances des cantons de Berne et de Lucerne réglementent les essais de vote électronique lors de votations uniquement. L'extension du principe aux élections implique une adaptation de l'ordonnance. Les ordonnances de Soleure, de Bâle-Ville, de Schaffhouse, de Saint-Gall, des Grisons, d'ArgoArt. 188 LEDP.

A la suite d'une interpellation parlementaire, le Conseil d'Etat a décidé fin 2010 que le vote électronique ne serra pas autorisé lors d'élections avant l'adoption d'une base légale explicite. Cette restriction ne concerne cependant que l'électorat genevois. Ce service reste offert aux cantons hébergés.

Art. 5b LDPSE.

Notamment les art. 8a, al. 1, 2 et 4, LDP et 27a, al. 3, ODP.

4545

vie et de Thurgovie et la loi cantonale de Fribourg prévoient l'utilisation du vote électronique pour les Suisses de l'étranger, y compris lors d'élections.

42 43 44

45

­

Le vote électronique relève notamment de la législation cantonale sur la sécurité informatique. En cas d'hébergement, si les législations de deux cantons entrent en ligne de compte, la question est traitée dans le contrat correspondant. La solution retenue est la suivante: le canton hébergeur est responsable vis-à-vis du canton hébergé du respect des dispositions de ce dernier sur la sécurité informatique. L'hébergé est tenu à son tour d'annoncer suffisamment tôt tout projet de modification et toute modification de ses propres dispositions sur la sécurité informatique, pour que les adaptations nécessaires puissent être effectuées à temps.

­

Les bases légales fédérales et cantonales sur les droits politiques et sur le vote électronique contiennent aussi des dispositions sur la protection des données. Lorsque deux cantons collaborent, c'est le canton hébergé qui est responsable vis-à-vis de ses propres votants du respect de toutes les normes découlant de sa loi cantonale sur la protection des données. Le contrat d'hébergement prévoit que le canton hébergé engage le canton hébergeur à respecter les dispositions cantonales du canton hébergé sur la protection des données.

­

La transparence et l'observation du vote électronique sont dans une certaine mesure réglées dans la législation sur les droits politiques. D'autres normes non spécifiques aux droits politiques, notamment la législation cantonale sur la transparence, entrent également en ligne de compte42. L'ODP prévoit la participation de représentants des électeurs au dépouillement du vote électronique43. Les réglementations cantonales traitent quant à elles cette question de différentes façons: la plupart des cantons proposant le vote électronique ne l'ont pas réglée expressément. D'autres ont étendu les compétences du bureau de vote au canal électronique44. A Neuchâtel, une pratique établie implique la commission électorale ­ instance composée de représentants des forces politiques au Grand Conseil et de l'administration cantonale ­ dans le fonctionnement du vote électronique. La Commission électorale détient une partie des clés de l'urne. Sa présence est indispensable au fonctionnement du vote électronique dans la mesure où elle participe au cryptage et au décryptage de l'urne (début et fin du vote électronique) et que le système connaît le cryptage des votes de bout en bout. Tout décryptage est donc impossible en l'absence de la commission. Le canton de Genève a quant à lui «formalisé» le rôle de la commission électorale en adoptant plusieurs dispositions à ce sujet45. Cette instance est composée de représentants des forces politiques au Grand Conseil désignés pour une législature et pouvant s'entourer de spécialistes. Elle a plusieurs compétences en matière de contrôle du vote électronique, entre autres un droit de regard sur toute la documentation du vote élec-

Annexe 1.

Art. 27m ODP.

Cf. les dispositions correspondantes du canton de Thurgovie (§ 30b et 30d de l'ordonnance du 25 août 2003 du Conseil d'Etat relative à la loi sur le droit électoral, RB 161.11).

Art. 48 de la Constitution du canton de Genève du 24 mai 1847 et art. 67, 75A et 75B LEDP.

4546

tronique et le pouvoir d'ordonner des audits. Elle participe au cryptage et au décryptage de l'urne électronique.

1.4.3

Accords de collaboration

La centralisation ou l'harmonisation cantonale des registres électoraux des Suisses de l'étranger visait clairement à créer les conditions qui permettent de proposer le vote électronique à cette partie de l'électorat. La question s'est donc rapidement posée de savoir comment les 23 cantons ne disposant pas de système de vote électronique allaient s'y prendre pour proposer le vote électronique, une fois les registres centralisés ou harmonisés.

Le 2e rapport sur le vote électronique du 31 mai 2006 était déjà formel sur ce point: la mise en place de 26 systèmes de vote électronique n'est pas une option viable d'un point de vue économique. A cela s'ajoute le fait que la plupart des cantons disposent d'une communauté réduite de Suisses de l'étranger inscrits et que le vote électronique ne remplace pas les autres canaux de vote mais les complète.

Les accords signés entre la Confédération et les trois cantons pilotes au début des années 2000 prévoyaient que les résultats et les enseignements de l'expérience seraient mis gracieusement à la disposition des autres cantons. Par ailleurs, chacun des systèmes de vote électronique développés à Zurich, à Neuchâtel et à Genève est la propriété intellectuelle du canton concerné, indépendamment de ses spécificités.

A partir de ces principes, les cantons pilotes ont présenté des offres de collaboration aux cantons intéressés. Ce travail a eu lieu parallèlement à la centralisation et à l'harmonisation des registres des Suisses de l'étranger, dès 2008. Deux modèles de collaboration ont vu le jour: ­

hébergement des Suisses de l'étranger d'un canton par le système de vote électronique genevois46,

­

reprise du code source du système de Zurich et utilisation de celui-ci par les sept cantons du consortium par l'entremise d'une entreprise privée dès 201047.

Dans le deuxième cas, c'est le canton de Zurich qui héberge les serveurs du vote électronique de tous les cantons du consortium (hosting).

Hébergement par le système genevois des Suisses de l'étranger d'autres cantons Tout hébergement fait l'objet d'un contrat entre le canton hébergé, le canton de Genève et la Chancellerie fédérale. Le terme hébergement désigne ici le processus par lequel le système genevois offre la possibilité aux votants d'un autre canton de voter par Internet. Les contrats en vigueur prévoient l'hébergement des Suisses de l'étranger lors de scrutins fédéraux (votation ou élection) mais également lors d'autres scrutins auxquels les Suisses de l'étranger peuvent participer conformément à la législation cantonale)48.

46 47 48

BS dès 2009, LU dès 2010 et BE dès 2011.

FR, SO, SH, SG, GR, AG et TG.

Par exemple, le droit de vote au niveau cantonal des Suisses de l'étranger du canton de Berne.

4547

Le contrat signé par les responsables politiques des trois partenaires traite de toutes les questions importantes: ­

coordination des procédures de demande d'autorisation au Conseil fédéral,

­

établissement et transfert des registres,

­

établissement, impression et envoi du matériel de vote,

­

contrôle de l'utilisation du droit de vote,

­

fonctionnement de l'assistance technique aux utilisateurs (permanence),

­

gestion des crises et procédures en cas de problème,

­

déroulement du vote électronique et établissement, transmission et publication des résultats,

­

répartition des coûts.

Des dispositions sur le calendrier et la répartition des coûts complètent le contrat.

Le contrat fait l'objet d'une évaluation après les trois premiers essais et subit, au besoin, des modifications. Les annexes sont adaptées plus fréquemment en fonction de l'évolution des essais et de la technique et à la lumière de l'expérience acquise.

Le contrat se prolonge d'année en année: il peut être résilié chaque année par le canton hébergé ou le canton hébergeur.

Reprise du code source du système zurichois Les cantons du consortium ont repris une copie (clone) du système de vote électronique zurichois. Ils ont confié la gestion du système à une entreprise privée, qui veille au fonctionnement du canal de vote électronique pour leurs citoyens établis à l'étranger. Cette collaboration est régie par quatre instruments: ­

un contrat de consortium entre les sept cantons et la Chancellerie fédérale en qualité de coordinatrice, sur la création d'un consortium visant à concrétiser l'hébergement des électeurs suisses de l'étranger des cantons concernés sur le système de l'entreprise générale (partenaire privé) lors de scrutins fédéraux,

­

un contrat de licence sur l'attribution du droit d'utilisation du logiciel «Vote électronique» entre le canton de Zurich, détenteur de la propriété intellectuelle du système (donneur de licence), le consortium des sept cantons et la Chancellerie fédérale en tant que coordinatrice,

­

un contrat-cadre e-Voting pour les Suisses de l'étranger entre la Chancellerie fédérale en tant que coordinatrice du consortium et l'entreprise privée;

­

une convention de prestations relative à l'hébergement de l'infrastructure d'e-Voting pour les Suisses de l'étranger du consortium, entre l'exploitant du système et le canton de Zurich (contrat d'hébergement).

Le contrat de consortium prévoit l'utilisation d'une version remaniée du système de vote électronique du canton de Zurich développée par le partenaire privé pour héberger les Suisses de l'étranger des cantons participants. Au sens de ce contrat, le terme hébergement signifie que le partenaire privé aide les cantons participants à offrir à leurs électeurs qui vivent à l'étranger possibilité de voter ou d'élire par

4548

Internet lors de scrutins fédéraux49. Ce contrat reprend pour l'essentiel les termes du contrat d'hébergement du système genevois décrit plus haut. Il était valable jusqu'au 31 décembre 2012. A partir de cette date, les cantons peuvent le résilier individuellement moyennant un préavis d'un an. La sortie d'un canton ne provoque pas la dissolution du consortium. Toute modification du contrat se fait à l'unanimité.

Le contrat de licence prévoit que le canton de Zurich, détenteur de la propriété intellectuelle du logiciel, confère aux cantons du consortium ou au consortium luimême le droit non exclusif, non transférable, limité à la durée du contrat, d'utiliser le logiciel pour leurs propres projets de vote électronique pour les électeurs Suisses de l'étranger. Le transfert initial est gratuit. Les opérations annexes (installation, fonctionnement, maintenance, etc.) ne font pas partie du contrat et incombent, sous l'angle opérationnel et financier, aux cantons participants. Le donneur de licence est exonéré de toute responsabilité. Tout développement ou extension du logiciel nécessite l'accord préalable du canton de Zurich. La propriété intellectuelle sur les modifications ou extensions va au canton de Zurich. Le contrat devait initialement échoir le 31 décembre 2012. Sa validité est illimitée depuis cette date et les cantons peuvent le résilier individuellement, moyennant un préavis d'un an50.

Le contrat-cadre entre la Chancellerie fédérale en tant que représentante des cantons du consortium et l'entreprise privé fixe les détails de la collaboration entre les cantons du consortium et l'entreprise privée chargée de l'exploitation.

Le contrat d'hébergement fixe les modalités selon lesquelles les cantons du consortium peuvent entreposer leur matériel informatique dans les locaux de haute sécurité du canton de Zurich.

1.4.4

La clause «Wassenaar»

Depuis le premier essai effectué avec des Suisses de l'étranger en 2008, le Conseil fédéral autorise à voter par voie électronique les Suisses de l'étranger domiciliés dans l'un des Etats parties à l'Arrangement de Wassenaar du 19 décembre 1995/12 mai 199651, dans l'un des Etats membres de l'Union européenne ou à Andorre, au Liechtenstein, à Monaco, à Saint-Marin, à la Cité du Vatican et à Chypre du Nord52.

Les pays autorisés permettent à leurs résidents de recevoir et d'envoyer des données chiffrées telles que celles utilisées lors du vote électronique. Environ 90 % des Suisses de l'étranger inscrits sont domiciliés dans un des pays autorisés.

Cette restriction a été régulièrement critiquée par les Suisses de l'étranger euxmêmes, par l'Organisation des Suisses de l'étranger (OSE), qui défend leurs intérêts et par les instances chargées de l'exécution du vote électronique, pour lesquelles l'obligation de faire une distinction entre Suisses de l'étranger admis et non admis représente un surcroît de travail. Faut-il dès lors maintenir ce critère?

49

50 51 52

Les cantons dont la législation autorise les Suisses de l'étranger à voter aussi à l'échelon cantonal et communal négocient directement avec l'entreprise privée cette partie de l'offre de vote électronique.

Il convient de préciser que les négociations entre les cantons du consortium et le canton de Zurich quant à l'avenir des droits de licence sont en cours.

Wassenaar Arrangement on Export Controls for Conventional Arms and Dual-Use Goods and Technologies www.wassenaar.org > Participating States/Links.

Cf. p. ex. l'arrêté du Conseil fédéral du 27 juin 2012 sur la votation fédérale du 23 septembre 2012 (FF 2012 6423).

4549

Il existe d'autres solutions. L'exemple le plus récent vient de la France, qui, à l'occasion des élections législatives de mai et juin 2012, a sensibilisé ses électeurs résidant à l'étranger au fait que dans certains pays, le vote électronique est assorti d'un risque de censure, quand il n'est pas tout simplement impossible.

La seconde partie du présent rapport expose comment la Suisse traitera cette question à l'avenir53.

1.4.5

Autres normes

Les collaborations intercantonales liées au vote électronique et les effets de la centralisation virtuelle requise pour pouvoir proposer le vote électronique ont rendu indispensable l'élaboration de normes techniques communes afin de faciliter les échanges et d'améliorer la qualité.

Des travaux de normalisation ont été réalisés à trois niveaux: ­

la Chancellerie fédérale, en collaboration avec le groupe de travail fédéral sur le vote électronique54,

­

les systèmes (normalisation de documents et de procédures internes)55,

­

eCH56, l'instance suisse d'élaboration de standards pour la cyberadministration57.

Les normes mentionnées ont leurs spécificités: celles qui sont élaborées par la Chancellerie fédérale en collaboration avec les cantons et d'autres instances concernées tirent leur force des exigences de la LDP et de l'ODP, dont elles constituent la concrétisation.

Les normes internes aux systèmes sont convenues par les différents partenaires. Une fois adoptées, elles sont respectées à titre d'obligations contractuelles.

Les normes eCH n'ont aucun caractère obligatoire, leur application relève du volontariat.

D'autres normes techniques concernent directement ou indirectement le vote électronique, notamment celles de l'Office fédéral de la statistique en matière de tenue de registres, les travaux actuels du Département fédéral des affaires étrangères sur le registre des Suisses de l'étranger (VERA) et les travaux de l'Office fédéral de la justice sur la future eID ou SuisseID58, etc.

53 54 55 56 57

58

Cf. ch. 11.4.1.

Les catalogues d'exigences en matière de votations et d'élections fédérales et en matière d'impression des cartes d'électeur électronique.

Par exemple dans le cadre de l'hébergement par Genève ou dans le cadre du consortium de cantons.

Pour plus de détails, consulter www.ech.ch.

Exemples: norme eCH-0045 sur les registres électoraux et normes sur la famille, composées des quatre normes suivantes: eCH-0155, norme de données sur les droits politiques et normes dérivées sur la transmission d'affaires lors d'une votation (eCH-0159), sur des candidats aux élections (eCH-0157) et sur les résultats (eCH-0110). Ces normes on été finalisées en décembre 2012.

Elle sera utilisée pour le vote électronique dans le canton de Neuchâtel dès 2013.

4550

1.5

Jurisprudence

A ce jour, des scrutins cantonaux ou fédéraux pour lesquels le vote électronique était disponible n'ont fait l'objet de recours qu'à Genève.

Il est important de noter, qu'aucun de ces recours ne contient de griefs concrets à l'encontre du déroulement des opérations de vote ou de la constatation des résultats.

Dans cinq recours, tous déposés en 2011 par une seule et même personne contre deux votations cantonales59, le recourant reprend essentiellement la même argumentation et se contente de remettre en cause le système institué dans son ensemble. Il ne formule aucun grief quant au dépouillement de l'urne électronique ou quant à la constatation proprement dite des résultats. Il n'allègue pas non plus l'existence d'une influence illicite de tiers qui auraient tenté de capter, de modifier ou de détourner des votes. Il n'y a jamais eu de recomptage de l'urne électronique60 ni de demande en ce sens dans le cadre d'un recours contre un scrutin cantonal61.

En 2009, dans le cadre d'un scrutin fédéral pour lequel le vote électronique avait été autorisé dans plusieurs communes, le Tribunal fédéral a rejeté le recours d'un électeur genevois prétendant que le vote électronique à Genève serait trop facilement falsifiable. Le Tribunal fédéral a jugé que ces allégations étaient en l'occurrence dénuées de fondement62.

De manière générale, pour que le résultat d'un scrutin soit annulé, il n'est pas nécessaire de prouver qu'un vice de procédure a effectivement influencé le résultat de façon décisive. Une telle preuve serait en effet difficile, sinon impossible à fournir.

Il suffit qu'une telle influence soit plausible, qu'un vice de procédure ait pu influencer le résultat63. En revanche, l'annulation d'un scrutin en vertu de l'art. 34 Cst.

nécessite l'existence d'une irrégularité concrète. A cet égard, un risque abstrait et théorique n'est pas suffisant.

59

60 61 62 63

Les trois premiers concernaient la votation du 15 mai 2011. Ils ont tous été rejetés par la Chambre administrative de la Cour de Justice de Genève (ci-après: CACJ); l'une de ces décisions ayant de plus été confirmée par le Tribunal fédéral (TF) sur recours du recourant. Le premier recours du 12 mai 2011 (ATA/303/2011 du 17.05.2011 dans la cause A/1407/2011) était formellement dirigé contre le matériel de vote. Le deuxième recours du 24 mai 2011 (ATA/414/2011 du 28.06.2011 dans la cause A/1527/2011; confirmé par l'ATF 1C_329/2011 du 22.12.2011), qui était formellement dirigé contre l'arrêté du Conseil d'Etat du 18 mai 11 constatant les résultats, portait en réalité sur le principe et les modalités du vote par Internet, le recourant alléguant des violations de la procédure des opérations électorales. Le troisième recours du 2 août 2011 (ATA/536/2011 du 30.08.2011 dans la cause A/2298/2011) était dirigé contre la lettre du Conseil d'Etat du 27 juillet 2011 répondant aux courriers du recourant et refusant de suspendre l'exercice du droit de vote électronique. Les deux derniers recours des 2 et 21 novembre 2011 concernant la votation du 27 novembre 2011 ont été rejetés par la CACJ (ATA/533/2012 du 21 août 2012 dans la cause A/3506/2011). Le TF a annulé cette décision et envoyé la cause à la CACJ (IC_477/2012 du 27 mars 2013).

Cf. art. 74 LEDP.

Cf. art. 181 LEDP.

TF C_257/2009 du 1er octobre 2009, consid. 3.

ATF 112 Ia 129 = JT 1988 I 109; Auer/Malinverni/Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. I, 2e éd., 2006, p. 304, no 886.

4551

Exemple de Genève64: S'agissant des recours en matière de scrutins cantonaux et communaux, le recours à la chambre administrative de la Cour de justice est ouvert contre les violations de la procédure des opérations électorales indépendamment de l'existence d'une décision65 (art. 180 LEDP).

En matière de votations et d'élections, le délai de recours est de 6 jours66. Les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l'événement qui les déclenche67. Selon la jurisprudence, le délai de 6 jours court à partir du moment où l'intéressé a eu connaissance de l'acte qu'il considère comme une atteinte à ses droits politiques68.

Enfin, si l'examen du recours nécessite un nouveau dépouillement, il est procédé à un nouveau décompte des bulletins électroniques conformément à l'art. 74 LEDP69 (art. 181 LEDP.

1.6

Impulsions politiques

1.6.1

Interventions parlementaires fédérales

Seize interventions parlementaires au total sur le vote électronique ont été déposées pendant la période 2006­201270, représentant tout l'éventail des points de vue possibles sur la question. Les parlementaires demandent ainsi tour à tour: ­

l'extension rapide du vote électronique,

­

le développement de l'«e-collecting» (troisième étape du projet),

­

l'adoption obligatoire du vote électronique par les cantons lors des élections de 2015,

­

le renforcement de la sécurité et des précautions pour continuer les essais limités,

­

l'inscription dans la Constitution de principes de transparence,

­

la publication des codes sources,

­

le recours à de nouveaux systèmes libres.

Certains vont jusqu'à remettre en cause la légitimité et la fiabilité du vote à distance sous tous sous aspects, tant électronique que par correspondance.

Les partis politiques sont divisés sur la question du vote électronique. Si tous reconnaissent qu'il facilite l'exercice du droit de vote des Suisses de l'étranger (pratiquement tous les partis ont considéré très favorablement l'offre de vote électronique aux Suisses de l'étranger lors des élections fédérales 2011), sa mise en oeuvre est loin de 64 65 66 67 68 69 70

L'exemple de la législation genevoise est représentatif pour les autres cantons également.

Art 180 LEDP.

Art. 62, al. 1, let. c, de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA; E 5 10).

Art. 17, al. 1, LPA.

ATA/180/2011 du 17 mars 2011, consid. 3; ATA/454/2009 du 15 septembre 2009, consid. 1b.

Art. 181 LEDP.

Annexe 3: vue d'ensemble des interventions parlementaires fédérales concernant le vote électronique.

4552

faire l'unanimité. Les positions des uns et des autres semblent avant tout dictées par le savoir technique de chacun.

Ainsi les représentants du PS, qui ont déposé le plus d'interventions sur le vote électronique, plaident majoritairement pour une extension, voire une généralisation rapide du système. Mais certains d'entre eux, sceptiques ou critiques, plaident pour de nouvelles approches (logiciels libres, p. ex.) ou attirent l'attention sur les risques de fraude accrus qui accompagnent le vote à distance.

Le PLR et le PDC semblent convaincus de l'introduction du vote électronique et demandent à ce que cela se fasse de manière coordonnée entre Confédération et cantons afin d'éviter les redondances.

Une intervention de l'UDC attire l'attention sur les risques de fraude qui entourent le vote à distance et remet en question sa légitimité et sa fiabilité. Lors de la campagne précédant l'élection du Conseil national 2011, l'UDC International a cependant plaidé en faveur d'une introduction rapide du nouveau canal de vote.

Les verts sont unanimes et estiment que la conception actuelle du vote électronique ne tient pas assez compte des risques encourus. Ils demandent plus d'efforts en matière de sécurité.

En dehors de l'Assemblée fédérale, on peut noter que le Parti Pirate s'est positionné sur le vote électronique. Sans être fondamentalement opposé à ce canal, il critique les solutions actuelles.

La session des jeunes a quant à elle plébiscité le nouveau canal: une pétition a été adressée au Conseil fédéral demandant sa généralisation rapide71.

1.6.2

Impulsions politiques dans les cantons

Dans les cantons aussi, les interventions au sujet du vote électronique se sont multipliées. Leur liste détaillée figure en annexe 3 du présent rapport.

Leurs revendications vont de l'interdiction du vote électronique à l'accélération de sa mise en place. L'une d'elles exige la suspension d'un projet au niveau cantonal le temps que la Confédération définisse clairement ses nouvelles exigences. Une autre exige des vérifications préalables supplémentaires sur le plan de la sécurité. D'autres encore souhaitent l'instauration simultanée du vote électronique et de la carte d'identité électronique, ou s'interrogent sur le coût et sur l'utilité du troisième canal de vote. La poursuite du projet au niveau cantonal est également évoquée.

Signalons que certains partis cantonaux défendent une ligne différente de celle défendue par les partis nationaux. On constate aussi des divergences intercantonales.

71

Cf. www.parlament.ch/f/suche/pages/geschaefte.aspx?gesch_id=20102008.

4553

1.7

Les acteurs du vote électronique

1.7.1

Instances fédérales

Le projet émane, comme on l'a vu, du Conseil fédéral, que le Parlement a chargé d'instaurer progressivement le vote électronique. Le Conseil fédéral a confié cette mission à la Chancellerie fédérale, qui a attelé à la tâche sa section des droits politiques. Une équipe de quatre personnes subordonnée au chef de projet est chargée de la direction opérationnelle et technique. La Chancellerie fédérale est responsable de la procédure d'autorisation dans le cadre de scrutins fédéraux et de la coordination des projets cantonaux.

Un comité de pilotage Vote électronique a été créé en 2011 suite à l'élaboration conjointe, par la Confédération et les cantons, de la Feuille de route du vote électronique72. Il évalue les résultats obtenus au fur et à mesure et consolide les propositions stratégiques de la Chancellerie fédérale concernant le projet avant leur présentation au Conseil fédéral et au Parlement. Placé sous la direction de la chancelière de la Confédération, il se compose de quatre représentants de la Confédération et de cinq représentants des cantons (membres de la Conférence des chanceliers d'Etat).

Le groupe de suivi Vote électronique se compose de représentants de la Confédération et des cantons triés sur le volet. Il conseille la direction du projet Vote électronique sur les questions opérationnelles et techniques.

Le groupe de travail Vote électronique a pour mission la définition de «bonnes pratiques» et l'échange d'informations entre la Chancellerie fédérale, les autres organes fédéraux concernés et les cantons. Il peut déléguer certaines tâches à des sous-groupes de travail.

Autorité de validation du résultat d'une votation fédérale73, le Conseil fédéral a la compétence d'autoriser le vote électronique en le limitant ratio temporae, materiae, loci. Il peut retirer l'autorisation si nécessaire ou l'octroyer pour plusieurs essais consécutifs74.

La Chancellerie fédérale a deux missions: d'un côté elle supervise les projets et réceptionne les déclarations des cantons sur la conformité des systèmes et des procédures avec les exigences fédérales (supervision). De l'autre elle gère le projet fédéral de vote électronique et accompagne les cantons lors de l'introduction du vote électronique (coordination).

Voici un bref aperçu des tâches de la Chancellerie fédérale:

72 73 74

­

expliciter et communiquer les exigences fédérales,

­

réceptionner les demandes des cantons désirant effectuer un essai de vote électronique, évaluer les demandes et émettre une recommandation à l'attention du Conseil fédéral,

­

organiser la procédure de consultation des offices ouvrant la voie à la décision du Conseil fédéral d'autoriser les essais,

Cf. www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > Aperçu et ch. 2.1.1.

Art. 15, al. 1, LDP.

Art. 8a, al. 1 et 1bis,LDP et 27a, al. 1, et 27c, al. 2 et 3, ODP.

4554

­

communiquer la décision du Conseil fédéral relative à aux demandes aux cantons demandeurs, la publier dans la Feuille fédérale et dans la presse,

­

organiser et diriger le groupe d'accompagnement75 de chaque système;

­

participer à la cellule de crise mise en place systématiquement par système pour le cas où il y aurait des problèmes,

­

réceptionner les résultats de vote électronique et d'autres données statistiques,

­

publier un communiqué relatif aux résultats du vote électronique le jour du scrutin,

­

présider et animer le comité de pilotage Vote électronique, le groupe de travail vote électronique ainsi que le groupe de suivi Vote électronique.

D'autres instances fédérales sont impliquées dans le développement du vote électronique, plus particulièrement les suivants: ­

Département fédéral des affaires étrangères (DFAE)

­

Office fédéral de la justice (OFJ)

­

Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT)

­

Unité de pilotage informatique de la Confédération (UPIC)

­

Bureau fédéral de l'égalité pour les personnes handicapées

Ces instances sont aussi représentées dans le groupe de travail Vote électronique et sont régulièrement consultées sur l'évolution du vote électronique dans le cadre de la procédure de consultation des offices. L'OFJ et l'UPIC sont également représentés dans le comité de pilotage Vote électronique.

1.7.2

Instances cantonales

Instances responsables des droits politiques Les cantons sont responsables de la mise en oeuvre des droits politiques: ils organisent les scrutins fédéraux, et c'est par conséquent à eux qu'incombe l'instauration du vote électronique.

Dans tous les cantons, les autorités chargées du vote électronique sont les responsables cantonaux des droits politiques. Dans la plupart des cantons cette tâche est assumée par la Chancellerie d'Etat, parfois par le département de l'intérieur (un des offices) ou par une autre instance. Les responsables des droits politiques délèguent plusieurs tâches, notamment celles liées aux nouvelles technologies. L'exploitation des systèmes est confiée à d'autres instances cantonales compétentes ou à des partenaires privés.

75

Cf. ch. 4.4.2.

4555

En ce qui concerne le vote électronique, les responsables cantonaux des droits politiques accomplissent notamment les tâches suivantes: ­

demande d'autorisation au Conseil fédéral;

­

coordination, planification, préparation et réalisation du scrutin avec vote électronique, y compris l'impression du matériel de vote;

­

information des électeurs avant le vote électronique et mise en place d'une permanence pendant la durée du vote électronique;

­

organisation d'une cellule de crise et préparation conformément à des conventions de crise;

­

communication sur le déroulement du vote électronique pour ses propres électeurs.

Cette centralisation des compétences au niveau cantonal est optimale pour fournir aux électeurs un service rapide et de qualité.

Les étapes de développement du vote électronique et la mise en place de collaborations intercantonales ont été autant d'occasions d'optimiser et de formaliser les procédures.

Excursus: Pour répondre au mieux aux exigences de pilotage du système genevois, trois comités ont été créés à Genève: Plénum votation: il sert à la préparation de chaque opération et regroupe les responsables de tous les services impliqués (service des votations, logistique, communication, infrastructure informatique, etc.).

Comité opérationnel: il contrôle la mise en oeuvre des orientations fixées et en assure le suivi financier.

Comité stratégique: il fixe les orientations et les lignes directrices à suivre pour l'avenir du SIDP (système d'information des droits politiques) en fonction des exigences fédérales, cantonales et communales.

A Neuchâtel c'est la Chancellerie d'Etat qui est maître d'ouvrage pour le Guichet unique et le vote électronique. En collaboration avec le service informatique, elle propose les évolutions à la commission Guichet unique qui réunit notamment des représentants des Villes de Neuchâtel et de La Chaux-de-Fonds. Cette commission valide les choix proposés.

Instances cantonales de surveillance A ce jour, deux cantons ont confié à un organe distinct la charge de contrôler et de superviser le vote électronique: à Genève, cet organe aux pouvoirs étendus est désigné pour la durée d'une législature, à Neuchâtel il est désigné pour des périodes de deux ans.

Dans le canton de Genève, la loi cantonale d'exécution des droits politiques définit la forme de la commission électorale centrale (CEC), son fonctionnement et ses pouvoirs en matière de contrôle de tous les canaux de vote, y compris le vote électronique76. Elle est notamment chargée du contrôle des procédures et de la documentation du système, du cryptage et du décryptage de l'urne et de la supervision des procédures; elle a par ailleurs la possibilité de demander des audits. Ses rapports 76

Art. 75A et 75B LEDP.

4556

sont publiés77. En outre, et afin de contrôler le vote électronique, la commission, composée de représentants de tous les partis actifs au Grand Conseil et d'experts, a créé une sous-commission technique. Les cantons hébergés par Genève peuvent faire intervenir leurs propres représentants lors du cryptage et du décryptage de l'urne électronique. Ils ont délégué le contrôle général du vote électronique à la CEC genevoise. Les réunions, auxquelles participe la CEC, sont retransmises en direct sur Internet et suivies par les partenaires dans les cantons hébergés et par la Chancellerie fédérale.

Dans le canton de Saint-Gall, on met en place un bureau de vote cantonal pour les élections du Conseil national et du Grand Conseil. Pour chaque votation et élection fédérale, on met en place une commission pour le vote des Suisses de l'étranger, qui se compose d'au moins cinq membres désignés par le gouvernement, chaque groupe parlementaire représenté au Grand Conseil fournissant un membre. Ces personnes observent aussi les procédures liées au vote électronique.

Différents cantons prévoient un bureau électoral pour les Suisses de l'étranger.

Celui-ci supervise le déroulement du vote électronique, le décryptage de l'urne électronique et l'établissement du résultat du vote électronique78.

1.7.3

Instances communales

Les instances communales ne participent pas directement au vote électronique, qui est centralisé au niveau cantonal. Elles ont cependant un rôle important surtout dans les cantons décentralisés, où ce sont elles qui gèrent les registres électoraux, y compris celui des Suisses de l'étranger.

L'interaction avec les communes était par ailleurs un des traits distinctifs des trois systèmes développés par les cantons pilotes. Ainsi on avait d'un côté le système «Mandantenfähig» de Zurich, qui tenait compte des compétences poussées des communes en matière d'organisation des scrutins, et de l'autre le système genevois, calqué sur les procédures d'un canton fortement centralisé. Le système de Neuchâtel, canton également décentralisé mais présentant une harmonisation et une interopérabilité fortes, se situait entre les deux. Les systèmes ont par la suite évolué: le système zurichois a centralisé une partie des compétences au niveau cantonal, et le système genevois s'est adapté pour pouvoir accueillir des cantons décentralisés.

Aujourd'hui les trois systèmes couvrent les deux cas de figure: canton centralisé et canton décentralisé.

Dans les cantons décentralisés en particulier, les communes ont des pouvoirs étendus en matière de droits politiques. Elles sont chargées des tâches suivantes:

77 78

­

tenue des registres électoraux (dérivés des registres des habitants tenus également par elles),

­

transmission des données des registres au canton (centralisation virtuelle nécessaire pour offrir le vote électronique),

­

présentation des cartes d'électeur, Cf. www.ge.ch/codof/doc/commission_electorale_centrale.pdf.

Dans le canton de TG, p. ex., cf. § 30d de l'ordonnance cantonale relative à la loi du 25 août 2003 sur le droit de vote (RB 161.11).

4557

­

communication avec leurs électeurs,

­

en partie envoi du matériel de vote,

­

instruction des membres du bureau de vote notamment en matière de contrôles et de prévention du double vote (particulièrement pour les cartes avec vote électronique),

­

consolidation des résultats.

Dans les grands cantons décentralisés, ou lors de scrutins «parapolitiques» tels que les élections au sein des écoles ou de l'Eglise, ou encore lorsque la circonscription regroupe plusieurs communes, des instances intermédiaires (entre commune et canton) existent.

Les communes et les villes sont impliquées dans le projet, d'abord par les cantons.

L'Association des Communes Suisses et l'Union des Villes Suisses ont aussi la possibilité de s'impliquer au niveau de la Confédération par l'intermédiaire du groupe de travail Vote électronique.

Exemple: L'introduction du vote électronique dans le canton de Berne implique une étroite collaboration entre des instances situées à trois niveaux différents: les communes, les préfectures et la Chancellerie cantonale. Le rôle de l'instance intermédiaire (préfecture) est représentatif pour d'autres grands cantons décentralisés également.

Compte tenu du grand nombre de communes que compte le canton, les préfectures se révèlent d'une grande utilité en matière de communication. Elles assurent la transmission d'informations entre la Chancellerie d'Etat et les communes et interviennent auprès des communes, dont elles connaissent généralement très bien la structure et le personnel, lorsqu'une tâche a été omise. Elles ont aussi assuré l'essentiel de la communication relative à l'instauration du vote électronique, servant d'interlocuteur aux communes pour les questions simples. Elles se chargent en outre de rappeler à l'ordre les communes dont le registre électoral est erroné ou inexistant. Enfin, ce sont elles qui informent les communes en cas d'urgence ou de panne liée à l'exploitation du vote électronique.

Même dans les cantons centralisés, les communes sont régulièrement impliquées.

Par exemple à Genève, l'exécutif communal est consulté par la Chancellerie d'Etat lorsqu'il s'agit d'ajouter une commune à la liste de celles autorisées à voter par Internet.

1.7.4

Cantons partenaires

La collaboration intercantonale en matière de vote électronique est réglée dans les différents contrats79. L'exploitation et le développement des systèmes est dès lors le fruit de décisions prises en commun par les cantons partenaires. La Chancellerie fédérale, en tant que partie aux différents contrats, participe également à la prise de décisions.

La reprise du code source est réglée par le contrat de licence entre Zurich et les cantons partenaires; celui-ci règle également le développement du code source du système zurichois par le consortium. Le contrat de consortium règle la collaboration 79

Cf. ch. 1.4.3.

4558

des cantons partenaires entre eux et avec la Chancellerie fédérale, laquelle assume un rôle de coordination tandis que le canton d'Argovie assure la direction, avec le soutien des cantons de Saint-Gall et des Grisons.

La collaboration entre Genève et ses cantons partenaires est principalement réglée dans le contrat d'hébergement qui règle entre autres la transmission du registre électoral et celle des résultats. Le groupe des utilisateurs, composé de représentants de tous les cantons qui utilisent le système genevois, se réunit en outre régulièrement.

Les questions relatives au développement du système et à la gestion de crises éventuelles sont traitées conformément aux règles fixées dans les différents contrats par les groupes chargés de la direction du projet, c'est-à-dire le groupe des utilisateurs pour les cantons hébergés par Genève et le consortium pour ceux utilisant une copie du système zurichois.

1.7.5

Autres partenaires publics et privés

Des partenaires publics ou privés disposant des compétences techniques nécessaires participent à l'exécution des tâches notamment liées aux nouvelles technologies.

La collaboration avec les entreprises privées a pris différentes formes. Pour le vote électronique, les aspects suivants sont a priori particulièrement importants: ­

le contrôle des logiciels,

­

le contrôle des serveurs,

­

la maîtrise des opérations,

­

la supervision.

Il n'existe pas de modèle unique de collaboration avec les partenaires privés. La question n'étant pas réglée dans la législation fédérale, les cantons ont librement choisi le type de collaboration le plus adapté: la voie contractuelle a été retenue80.

Les collaborations avec les entreprises privées établies pour d'autres aspects des droits politiques servent de modèle (systèmes de gestion d'une opération [votation ou élection], logiciels de dépouillement, logiciels de consolidation et de publication des résultats, etc.).

Le développement initial des logiciels de vote électronique a été effectué par des entreprises privées choisies par les cantons81. La maintenance est également déléguée à des entreprises privées, à une exception près: le canton de Genève a repris en main le développement et la maintenance du système en 2005.

La gestion des opérations est quant à elle assurée par les services informatiques cantonaux dans les cantons de Neuchâtel et de Genève82: Les cantons du consortium ont transféré la gestion des opérations à une entreprise privée, le canton de Zurich aussi mais jusqu'à la fin 2011 seulement.

80 81 82

Cf. ch. 1.4.3.

Cf. ch. 2.1.2.

Le Centre des technologies et de l'information (CTI) à Genève et le Service informatique de l'entité neuchâteloise (SIEN) à Neuchâtel.

4559

Quant aux serveurs et à l'infrastructure du vote électronique en général, ils sont totalement gérés par les cantons. Zurich assure ce service pour le consortium et Genève pour les cantons hébergés.

L'imprimerie est un partenaire incontournable. La plupart des cantons font imprimer le matériel de vote par des entreprises privées, sauf Neuchâtel et quelques cantons du consortium, où cette tâche est assurée par une imprimerie de l'Etat83. Etant donné le rôle particulièrement important de l'imprimerie en ce qui concerne le secret associé aux codes du vote électronique et la diversité des pratiques cantonales en matière de certification des imprimeries, la Chancellerie fédérale a adopté, en collaboration avec les cantons, un catalogue de critères obligatoire pour l'impression des cartes d'électeur pour le vote électronique. Ce catalogue traduit en exigences spécifiquement applicables aux imprimeries les exigences générales de l'ODP.

La responsabilité des autres instances cantonales impliquées est réglée dans la réglementation cantonale84.

1.8

Cadre international

1.8.1

Les organisations internationales et leurs recommandations

Conseil de l'Europe Le Conseil de l'Europe a élaboré l'unique instrument juridique international existant à ce jour sur le vote électronique: la Recommandation (2004) 1185 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les normes juridiques, opérationnelles et techniques relatives au vote électronique86.

Ce texte contient une clause de suivi, qui implique qu'il doit être examiné périodiquement après son adoption pour évaluer l'impact qu'il aura eu dans les Etats membres, et envisager une mise à jour éventuelle. Trois réunions de suivi ont eu lieu entre 2006 et 2010.

La certification des systèmes de vote électronique et la transparence des élections par voie électronique vont faire l'objet de recherches plus approfondies. Des lignes directrices ont été élaborées par le secrétariat et un groupe d'experts comprenant des représentants des pays:

83 84

85 86

Exemples: l'office des impôts de la ville de Zurich et le centre de recherches administratives de Saint-Gall (VRSG).

Cf., p. ex., l'ordonnance du 17 décembre 1997 sur la sécurité informatique (170.8) à Zurich, la loi du 28 septembre 2004 sur le Guichet sécurisé unique (150.40) à Neuchâtel, de même que le règlement du 22 décembre 2004 du centre des technologies de l'information (RCTI, B 4 22.03) et le règlement du 6 avril 2011 sur l'organisation de la gestion des systèmes d'information (ROGSI, B 4 23.03) à Genève.

Cf. https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=778189 (version anglaise).

D'autres instruments pertinents élaborés par le Conseil de l'Europe sont: la Recommandation 2004(15) sur la gouvernance électronique (e-Gouvernance) et la Recommandation 2009(1) sur la démocratie électronique (e-Democracy).

4560

­

lignes directrices sur la certification des systèmes de vote électronique87,

­

lignes directrices relatives à la transparence des élections par voie électronique88.

Elles ont été examinées et approuvées lors de la troisième réunion biennale intergouvernementale, qui s'est tenue à Strasbourg en novembre 2010.

Lors d'une quatrième réunion de suivi en juillet 2012, il a été décidé de mettre à jour la Recommandation (2004) 11 à la lumière de l'expérience acquise depuis son adoption en 2004.

La mise en place du vote électronique en Suisse a suivi, outre les réglementations fédérales et cantonales, la recommandation du Conseil de l'Europe, dont la considération principale est la suivante: le vote électronique doit respecter tous les principes des élections démocratiques et doit être aussi fiable, transparent et sûr que les élections non électroniques. La recommandation attache une importance toute particulière à un niveau de sécurité élevé, à la caractéristique du vote électronique en tant que variante supplémentaire de l'exercice du droit de vote et à la neutralité des technologies.

La Suisse partage entièrement ces points de vue fondamentaux. La Recommandation (2004) 11 et les art. 27a à 27q ODP présentent d'ailleurs beaucoup d'éléments communs ou très semblables. Le Conseil de l'Europe et plus particulièrement la Commission européenne pour la démocratie par le droit, plus connue sous le nom de Commission de Venise (organe consultatif du Conseil de l'Europe sur les questions constitutionnelles), sont très attachés à la possibilité, pour les expatriés, d'exercer leur droit de vote. Ils préconisent également une approche prudente et graduelle du vote électronique. En ce sens, l'approche suisse est considérée comme un bon exemple89.

OSCE/BIDDH L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme (BIDDH) sont les chefs de file de l'observation et de l'évaluation électorale dans les 56 pays membres. Ces dernières années, l'OSCE/BIDDH a été invitée à observer et à évaluer à plusieurs reprises le recours au vote par Internet lors d'élections. Tel a été le cas récemment en Estonie lors des élections parlementaires de mars 201190, en Norvège lors des élections municipales de septembre 201191 ainsi qu'en Suisse, lors des élections fédérales d'octobre 201192. Le rapport sur l'évaluation des législatives françaises de juin 2012

87 88 89

90 91 92

Cf. www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques >Vote électronique > International.

Cf. www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques >Vote électronique > International.

Cf. Report on the compatibility of remote voting and electronic with the standards of the Council of Europe www.venice.coe.int/docs/2004/CDL-AD(2004)012-f.asp et Recommendation 2004 Council of Europe www.coe.int/t/dgap/democracy/activities/GGIS/ Evoting/Key_Documents/Rec(2004)11_Eng_Evoting_and_Expl_Memo_en.pdf.

Cf. www.osce. > Office for Democratic Institutions and Human Rights > Elections > Estonia.

Cf. www.osce.org > Office for Democratic Institutions and Human Rights > Elections > Norway.

Cf. www.osce.org > Office for Democratic Institutions and Human Rights > Elections > Switzerland.

4561

et la première utilisation du vote par Internet par les Français de l'étranger a paru en septembre 201293.

Selon l'OSCE/BIDDH, le vote électronique doit respecter les principes fondateurs de l'organisation et les autres normes internationales en matière d'élections démocratiques. Il doit présenter les mêmes garanties en matière de transparence, de responsabilité et de confiance du public que les méthodes de vote traditionnelles94.

Conformément aux obligations politiques découlant du document de Copenhague de 199095 et de la Charte d'Istanbul pour la sécurité en Europe de 1999, le Conseil fédéral informe régulièrement l'OSCE/BIDDH de la tenue d'élections fédérales et l'invite à les observer. Les élections fédérales de 2011 ont ainsi permis à cette organisation d'observer de près l'organisation et le déroulement du vote par Internet dans les quatre cantons qui ont offert ce canal à leurs citoyens établis à l'étranger96. Une équipe d'experts s'est rendue en Suisse du 10 au 28 octobre 2011. L'expert de l'OSCE/BIDDH pour les nouvelles technologies a également participé à plusieurs séances de préparation des deux systèmes de vote électronique (système du consortium et système de Genève) en septembre 2011. Le rapport publié le 30 janvier 201297 reflète l'importance donnée à l'observation du vote électronique pendant la mission d'évaluation d'octobre 2011. En fait, des 23 recommandations formulées dans ce rapport, 13 concernent directement le vote électronique98.

Les tendances suivantes se dégagent des récents rapports de l'OSCE/BIDDH sur le vote électronique en Suisse, en Norvège, en Estonie et en France:

93 94 95 96 97 98

­

Il est recommandé que les bases légales prenne en compte de façon détaillée toutes les étapes du vote par Internet.

­

La compétence pour certifier les systèmes, signer numériquement la version finale du logiciel et publier un rapport d'évaluation doit être accordée à une instance publique indépendante. Les critères de certification doivent être clairs, consignés par écrit, et testables. Ils couvrent les aspects suivants: sécurité, transparence, robustesse, convivialité, protection du secret du vote.

­

Les instances responsables de l'organisation des élections doivent renforcer leurs compétences internes dans ce domaine afin de mieux pouvoir superviser le vote électronique.

­

Les rapports sur les tests des systèmes doivent être publiés sur Internet dans le but d'accroître la transparence et la vérification des processus.

­

Il convient d'envisager un système permettant au votant de détecter si son vote a été modifié par un maliciel.

Cf. www.osce.org > Office for Democratic Institutions and Human Rights > Elections > France.

Cf. Election Observation Handbook: sixth edition, ch. 7.9, www.osce.org/odihr/elections/68439.

Cf. www.osce.org/odihr/elections/14304.

SG, GR, AG (copie du système zurichois) et BS en collaboration avec le canton de Genève.

Cf. www.osce.org/odihr/elections/87442.

Cf. annexe 4.

4562

1.8.2

Développements dans d'autres pays et organisations

De nombreux pays se posent la question du vote électronique. S'il est largement pratiqué dans certaines organisations et dans le secteur privé, il n'en va pas de même pour les élections et les référendums nationaux. Les pays qui ont lancé des projets de vote électronique ont emprunté des voies différentes: ­

dans certains pays, le vote électronique est autorisé pour les élections ou les référendums politiques, avec des résultats contraignants (Estonie, France, Norvège et Suisse),

­

dans d'autres, il est question de l'expérimenter pour les élections ou les référendums non politiques (Allemagne, Autriche),

­

dans d'autres encore, l'expérimentation du système est autorisée lors d'élections et de référendums politiques, mais les résultats ne sont pas contraignants pour les autorités (Danemark, Espagne),

­

enfin, certains pays ont décidé de suspendre les essais de vote par Internet (Royaume-Uni, Pays-Bas).

L'Estonie demeure le seul pays de l'OSCE à avoir utilisé le vote par Internet lors d'élections législatives. Après une première expérience réalisée lors des élections locales de 2005, le vote par Internet a été utilisé comme canal complémentaire et non obligatoire lors des élections du Rigikogu (Parlement estonien) de mars 2007 et de mars 2011, du 6e au 4e jour précédant le jour du scrutin. Les opposants au vote par Internet, notamment le parti de la minorité russe (Center Party) reprochent au système de ne pas être disponible en langue russe.

La Norvège a introduit le vote électronique dans 11 municipalités lors des élections municipales de septembre 2011. L'évaluation de l'essai99 est positive et a montré un haut degré de confiance dans ce projet pilote100. Ainsi 72,4 % des personnes ayant voté avant le jour du scrutin (vote anticipé) l'ont fait par Internet au lieu du vote par correspondance. Le vote par Internet n'était pas possible le jour du scrutin. Un des objectifs du projet était d'augmenter l'accessibilité pour tous les votants.

En France, ce sont les expatriés qui ont été les premiers à expérimenter le vote électronique dans 11 circonscriptions électorales, pour élire l'Assemblée des Français de l'étranger, qui les représente, en 2011. Cette première tentative appliquée à des élections politiques a parfaitement réussi selon les ministères concernés. Elle a cependant fait l'objet de nombreux recours pointant les problèmes supposés du système utilisé. On ne sait pas encore si la France compte réitérer l'expérience.

Après l'échec du projet SERVE au début des années 2000, le vote par Internet redevient actuel aux Etats-Unis dans le cadre des projets visant à faciliter le vote des citoyens américains, notamment des militaires, résidant à l'étranger101.

99

Cf. www.regjeringen.no/en/dep/krd/prosjekter/e-vote-2011-project/evaluations-of-the-evoting-trials/evaluation-of-the-e-voting-trials-in-201.html?id=684642 et les rapports IFES d'Eivind Smith, professeur de droit public à l'université d'Oslo.

100 Cf. www.regjeringen.no/en/dep/krd/press/press-releases/2012/ e-vote-project-evaluation-is-ready.html?id=685023.

101 Cf. www.eac.gov > Voting System Testing & Certification > Military and Overseas Voting Projects.

4563

En Allemagne, une décision de la Cour constitutionnelle du 3 mars 2009102 estimant que lors du vote électronique (en l'occurrence sur machine à voter), tout citoyen ne disposant pas de connaissances techniques particulières doit pouvoir s'assurer que l'élection s'est déroulée correctement, a été abondamment commentée et ses effets sur le vote par Internet (en tout cas en Allemagne) discutés.

En Autriche, les élections des instances dirigeantes du Conseil des étudiants103 qui ont eu lieu en mai 2010 étaient considérées comme un test important pouvant ouvrir la voie à l'introduction du canal électronique pour les expatriés. Le recours au vote électronique a cependant rencontré de fortes résistances, tout d'abord au sein de l'association d'étudiants. L'opposition s'est cristallisée dans un recours devant la Cour constitutionnelle du pays104. La Cour a pour l'essentiel donné raison aux opposants du vote électronique et subordonné la reprise des essais à une adaptation de la Constitution.

Le Royaume-Uni a expérimenté le vote électronique à l'occasion de plusieurs scrutins locaux. Le dernier essai en date a eu lieu lors des élections locales de mai 2007.

A cette occasion, la Commission électorale et certains groupes de pression opposés à l'introduction du vote électronique se sont exprimés de manière très critique sur ce canal. Les essais ont été suspendus en attendant l'adhésion d'un public plus large.

Aux Pays-Bas la polémique concernant les radiations électromagnétiques des machines à voter née lors de l'élection de mars 2007 a fini par gagner le vote par Internet105 des expatriés, qui a été suspendu depuis. Les Pays Bas ont effectué un revirement radical dans la mesure où les 98 % des communes du pays qui pratiquaient le vote sur machines à voter depuis des décennies ont subitement dû renoncer à ce canal et (ré)introduire les bulletins papier comme seule possibilité de vote.

Le vote par Internet, qui avait été utilisé par les expatriés à titre expérimental aux élections au parlement européen de juin 2004 et lors des élections législatives de novembre 2006, doit désormais offrir des garanties plus grandes en matière de transparence et de vérifiabilité. Le gouvernement reste favorable au vote par Internet, pour cette catégorie d'électeurs, mais aucune expérience de vote par Internet n'est prévue
prochainement.

Au niveau de l'Union européenne, l'initiative citoyenne européenne permet à un million de citoyens de l'Union de participer directement à l'élaboration des politiques européennes, en invitant la Commission européenne à présenter une proposition législative. Il ne s'agit pas de vote par Internet, ni d'ailleurs d'une initiative au sens suisse du terme dans la mesure où elle aboutit simplement à une invitation adressée à la Commission à présenter une proposition législative. Cependant la collecte de signatures pouvant se faire par voie électronique, le système doit respecter certaines exigences en matière de sécurité et de certification. La mise en oeuvre concrète de la «certification» du système de collecte en ligne par l'autorité nationale compétente est suivie avec intérêt également par les observateurs du vote électronique. Pour la Suisse, cela présente surtout un intérêt en prévision du lancement de la troisième phase du projet (introduction de l'«e-collecting»).

102

Cour constitutionnelle fédérale, jugement du 3 mars 2009 ­ 2 BvC 3/07, 2 BvC 4/07 (www.bundesverfassungsgericht.de/entscheidungen/cs20090303_2bvc000307.html).

103 Österreichische Hochschülerschafts-Wahl.

104 VerfGH, Entscheidung vom 13. Dezember 2011 ­ V85/11 u.a., http://ftp.freenet.at/beh/vfgh_v85_11.pdf.

105 Cf. http://ec.europa.eu/citizens-initiative/public/welcome.

4564

2

Extension du vote électronique 2006­2012

2.1

Stratégies fédérale et cantonales

2.1.1

Stratégie fédérale

Dans un premier temps après la phase pilote (2008­2009), la Chancellerie fédérale a soutenu ­ à leur demande ­ les cantons pour la transposition dans le droit cantonal du nouvel art. 5b LDPSE sur la centralisation ou l'harmonisation des registres électoraux des Suisses de l'étranger. Elle les a également conseillés pour la mise en oeuvre concrète de la centralisation ou de l'harmonisation. Elle s'est en outre impliquée dans les travaux de normalisation menés au sein d'eCH106.

Depuis 2008, toujours à la demande des intéressés, la Chancellerie fédérale conseille les cantons qui planifient l'introduction du vote électronique pour les Suisses de l'étranger. Elle participe directement aux travaux et aux contrats d'hébergement et de reprise du code source dans le cadre du consortium107. La Chancellerie fédérale joue ainsi le rôle d'une instance de coordination.

En avril 2011, la Conférence des chanceliers cantonaux a pris connaissance de la Feuille de route du vote électronique. Ce document, établi par la Chancellerie fédérale, détaille la stratégie de développement du vote électronique décidée par le Parlement en mars 2007. Les étapes et le calendrier de l'extension du vote électronique font partie de ce document, qui est conçu comme un outil de référence pour la définition des objectifs et des jalons communs. Objectif: favoriser une coordination optimale entre cantons et Confédération.

La feuille de route identifie cinq domaines particulièrement importants pour la mise en place et l'élargissement du vote électronique: ­

adoption d'une stratégie commune Confédération-cantons,

­

sécurité,

­

élargissement,

­

transparence, et

­

coûts.

Des mesures sont identifiées dans chacun des domaines: elles permettent de faire avancer le vote électronique tout en offrant aux cantons la visibilité nécessaire pour planifier leurs travaux futurs. Ces derniers ont également défini leurs propres stratégies en la matière.

Comme on l'a vu au ch. 1.2, l'instauration du vote électronique fait partie intégrante de la Stratégie pour une société de l'information en Suisse108, dont le deuxième champ d'action prévoit, sous le titre «Cyberdémocratie et cyberadministration», la possibilité d'exercer ses droits politiques par voie électronique. Le vote électronique y est présenté comme un axe prioritaire de la Confédération.

106 107 108

Cf. ch. 1.4.5.

Au sujet de la collaboration intercantonale, cf. ch. 1.4.3 Cf. www.bakom.admin.ch > Thèmes > Société de l'information > Stratégie du Conseil fédéral.

4565

2.1.2

Stratégies cantonales

Les raisons ayant poussé les cantons à développer l'offre de vote électronique sont multiples.

Parmi celles qui sont le plus fréquemment citées figurent la nécessité, évoquée par la Confédération, d'introduire le vote électronique pour les Suisses de l'étranger, les impulsions politiques internes (interventions aux parlements cantonaux) et le développement de l'administration cantonale en ligne.

A Zurich, la première phase de mise en place du système (2001­2004), fut suivie par une phase test limitée à trois communes pilotes. Le vote électronique fut ensuite étendu à 13 communes et à une partie des Suisses de l'étranger109 (2008­2011) avant d'être suspendu fin 2011 dans l'attente d'une harmonisation plus poussée des registres tenus par les communes et des décisions fédérales d'élargissement de l'électorat110.

A Neuchâtel, c'est le développement du portail en ligne, le Guichet unique, qui donne la cadence: le vote électronique n'est qu'une des prestations que les électeurs enregistrés au Guichet unique peuvent effectuer en ligne. De 3800 électeurs inscrits en juin 2007, le Guichet unique en compte aujourd'hui 21 200, habilités à voter aux niveaux fédéral, cantonal et communal. Le nombre de prestations est passé de 40 à 200. Une campagne d'information et de publicité sur le Guichet unique s'est déroulée en 2010. Neuchâtel a été le premier à offrir le vote électronique à ses Suisses de l'étranger (dès juin 2008). Ces derniers disposent aussi de droits politiques aux niveaux cantonal et communal. Les Suisses de l'étranger doivent également s'inscrire au Guichet unique. La procédure est unique et elle peut s'effectuer auprès d'une représentation suisse à l'étranger. Le nombre de Suisses de l'étranger inscrits au Guichet unique est de 217, soit 5,4 % des 4012 Suisses de l'étranger inscrits auprès des communes neuchâteloises. La SuisseID ­ carte d'identification numérique ­ sera instaurée en 2013. La première utilisation du vote électronique lors d'élections cantonales est prévue pour le printemps 2013.

Le projet genevois de vote par Internet s'inscrit dans une réflexion sur l'administration en ligne. L'attitude genevoise, d'emblée favorable au vote électronique, s'appuie à la fois sur le fait que le canton disposait déjà d'un registre centralisé des électeurs et sur l'expérience heureuse du vote par
correspondance. Genève a été l'un des premiers cantons à généraliser le vote par correspondance en 1995. De 65 % en 1995, la part des votes postaux est montée à 95 % en 2001. Ce chiffre est resté stable si l'on considère l'ensemble des votes à distance (vote par correspondance ou électroniques). En outre, la participation moyenne aux votations a progressé de 20 points après l'introduction du vote par correspondance, passant de quelque 30 % en 1995 à 50 % aujourd'hui. Enfin, l'écart entre la participation moyenne genevoise et la participation moyenne fédérale a changé de signe, passant de ­4 % en moyenne dans les années 1990 à +4 % en moyenne dans les années 2000.

Le système de vote électronique est passé graduellement d'une solution privée à une solution entièrement gérée par l'Etat, qui en a la propriété intellectuelle (tel est le cas à Neuchâtel et Zurich également). Développement, exploitation et maintenance sont 109

Cf. les décisions du Conseil d'Etat du 27 août 2003 «Pilotprojekt E-Voting im Kanton Zurich (Vergabeentscheid und Zusatzkredit)» et du 28 novembre 2007 «E-Voting (Ausbau 2008­2011)».

110 Décision du Conseil d'Etat du 16 novembre 2011, RRB 1391 2011.

4566

effectués par le centre cantonal des technologies (CTI). Des collaborations externes sont organisées régulièrement, notamment pour tester la sécurité du système.

Après avoir servi pour des élections fédérales avec vote électronique pour les ressortissants de Bâle-Ville à l'étranger (2011), le système a été utilisé pour la première fois lors d'élections politiques à l'échelle cantonale en novembre 2012. En vertu des limitations fédérales, l'électorat pouvant recourir au vote électronique est plafonné à quelque 70 000 électeurs résidents: cette limite est appliquée à Genève en sélectionnant 17 communes dont l'électorat cumulé atteint ce plafond. En 2011, lors des quatre scrutins strictement cantonaux, tous les électeurs genevois ont eu accès au vote en ligne. Le canton plaide pour une extension rapide du vote électronique à l'ensemble de l'électorat.

Le débat qui a agité le Grand Conseil bernois fin mars 2009111 résume bien les stratégies cantonales en matière de vote électronique. Le canton doit adopter les mesures qui permettront à ses citoyens de l'étranger de recourir au vote électronique.

A terme, le vote électronique sera proposé à tout l'électorat. La collaboration avec d'autres cantons est retenue entre autres pour ses avantages en termes de coûts. La sécurité est prioritaire. Les expériences réalisées avec les Suisses de l'étranger seront prises en compte en vue de l'extension du vote électronique au reste de l'électorat.

Le gouvernement examine la possibilité de valider initiatives et référendums par une signature électronique.

Les sept cantons du consortium ayant repris une copie du système zurichois ont quant à eux profité de la spécificité «Mandantenfähigkeit» du système pour l'utiliser selon leurs propres besoins. Les cantons dont le registre des Suisses de l'étranger est centralisé (SG, AG, TG) et ceux dont les registres sont gérés par les communes (FR, SO, SH, GR) ont utilisé le système non seulement lors de votations fédérales mais aussi, conformément à leurs besoins et à leur politique d'avancement du vote électronique, lors d'élections, cantonales112 et fédérales113.

L'extension du vote électronique aux électeurs résidents et l'utilisation du vote électronique lors des élections 2015 du Conseil national sont considérées comme les prochaines étapes à franchir dans les dix
cantons sans système propre. Le canton de Bâle-Ville a identifié les électeurs souffrant d'un handicap, notamment de la vue, comme le public cible de cette prochaine étape114.

2.2

Priorité aux Suisses de l'étranger

En 2011, le nombre de Suisses enregistrés à l'étranger a pour la première fois dépassé les 700 000. Environ 10 % des citoyens suisses vivent dans un autre pays. Comme l'indique la statistique 2011 des Suisses de l'étranger, la grande majorité (61,85 %, ou 435 203 personnes) réside en Europe, dans des pays de l'Union européenne pour 96,67 % d'entre eux (420 653 personnes).

111 112 113 114

Cf. www.gr.be.ch > Tagblätter > Tagblattarchiv 2000­2009 > Tagblätter 2009.

Ce qui fut le cas une fois dans les Grisons et une fois à Fribourg en 2012.

Cf. ch. 2.4.2.

Décision du Conseil d'Etat du 14 février 2011.

4567

Les Suisses de l'étranger qui souhaitent continuer à exercer leurs droits politiques doivent s'inscrire au préalable115. Ils choisissent comme commune politique une de leurs communes d'origine ou une des communes de domicile antérieur en Suisse116.

Le nombre des Suisses de l'étranger inscrits pour exercer leurs droits politiques a lui aussi évolué passant de 116 452 en 2009 (cf. votation de septembre) à 129 644 en 2012 (cf. votation de juin117).

Les Suisses de l'étranger inscrits peuvent depuis 1992 voter par correspondance lors des scrutins fédéraux.

Tous les Suisses de l'étranger inscrits pour exercer leurs droits politiques ont le droit de vote et d'éligibilité actif et passif au niveau fédéral. Ils en jouissent aussi au niveau cantonal dans certains cantons118. Les cantons de Neuchâtel et de BâleCampagne leur accordent les mêmes droits qu'aux résidents, y compris au niveau communal. Dans les Grisons, cette option est de la compétence des communes . Le canton du Tessin accorde à ses Suisses de l'étranger le droit de vote à tous les niveaux. Ceux-ci ne peuvent toutefois pas voter par correspondance au niveau communal.

Les Suisses de l'étranger ne disposant pas de sièges réservés dans les parlements, il leur est difficile de se faire élire: à ce jour, malgré les efforts des partis dans ce sens, aucun Suisse de l'étranger n'a été élu aux Chambres fédérales.

Le vote électronique est proposé aux Suisses de l'étranger depuis 2002119. Dans son deuxième rapport sur le vote électronique du 31 mai 2006120, le Conseil fédéral, suivi par le Parlement, identifie les Suisses de l'étranger comme un groupe prioritaire qui aurait beaucoup à gagner de l'introduction du vote électronique. De fait, malgré les droits étendus dont ils jouissent et la libéralisation du vote par correspondance, les Suisses de l'étranger sont régulièrement dans l'incapacité d'exprimer leur vote pour cause de retards postaux à l'étranger. L'OSE a inscrit l'introduction du vote électronique dans la liste de ses priorités et plaide depuis le début du projet fédéral pour son extension. Dernier exemple en date, la pétition signée par 15 000 personnes, principalement à l'étranger (pas seulement par des Suisses de l'étranger).

Dans leur rapport d'évaluation des élections fédérales de 2007, l'OSCE et le BIDDH recommandent à la Confédération
d'envisager l'introduction du vote électronique afin de faciliter l'exercice du droit de vote des Suisses de l'étranger121.

La centralisation et l'harmonisation des registres rendent possible l'extension du vote électronique à tous les cantons. Ceux qui l'avaient introduit dès le début des années 2000 dans le but d'en étudier la faisabilité l'avaient testé initialement avec leurs résidents. Les cantons qui les ont rejoints depuis 2009 (dix à ce jour) ont quant à eux commencé par introduire le vote électronique pour les Suisses de l'étranger.

115 116 117 118

Art. 5a LDPSE.

Art. 5 LDPSE.

Situation: votation populaire du 25 novembre 2012.

Dans le canton de Zurich, ce droit est limité à l'élection du Conseil des Etats, à l'exclusion donc de tout autre scrutin cantonal.

119 Art. 1 LDPSE.

120 FF 2006 5205.

121 Cf. www.osce.org/odihr/elections/switzerland/federal_2007.

4568

Lors des élections du 23 octobre 2011 du Conseil national, les Suisses de l'étranger de quatre cantons ont bénéficié d'un traitement prioritaire: ils ont pu, pour la première fois, exprimer leur vote par Internet122. Il serait souhaitable que la grande majorité d'entre eux puissent recourir à ce canal lors des élections fédérales de 2015.

D'autres mesures de facilitation du vote par correspondance ont par ailleurs été prises123.

Excursus: Avec la mobilité croissante de la population, les Suisses de l'étranger revendiquent de plus en plus le droit de participer activement à la vie politique du pays.

Au niveau fédéral, les tentatives de reconnaître aux Suisses de l'étranger une circonscription (virtuelle) afin de leur garantir une représentation aux Chambres fédérales ont cependant échoué. L'exemple le plus récent date de 2008124. La nouvelle loi sur les Suisses de l'étranger, en préparation suite à une initiative parlementaire125 n'en prévoit pas non plus.

Au niveau cantonal, les tentatives d'étendre les droits politiques communaux aux Suisses de l'étranger dans les cantons qui donnent cette possibilité aux communes n'ont pas rencontré beaucoup de succès. Certaines communes, du canton de Neuchâtel par exemple, octroient désormais aux expatriés le droit de vote communal. Les communes bernoises ont rejeté cette possibilité récemment. Les efforts des groupes de pression des Suisses de l'étranger se concentrent principalement sur l'octroi aux Suisses de l'étranger du droit de participer à l'élection du Conseil des Etats (élection cantonale).

2.3

Choix du système

Le choix du système s'est fait de manière différente entre les cantons pilotes d'un côté et, de l'autre, les cantons ayant commencé les essais dès 2009 avec un des systèmes existants.

Ainsi, les trois cantons pilotes ont chacun mis en place un système propre de vote électronique, dès le début des années 2000. Ils ont choisi des partenaires privés pour développer une partie, voire l'intégralité du système. Le choix s'est effectué dans le cadre de procédures conformes aux réglementations cantonales sur les marchés publics. Les critères étaient, entre autres, le respect par le système des exigences prévues dans les législations fédérale et cantonales. A Zurich, la réalisation du système de vote électronique a été attribuée à une entreprise privée dans le cadre d'une procédure de soumission publique en 2003. Le mandant portait sur le développement du vote par Internet et du vote par SMS. En 2007, le gouvernement, dans sa décision de développement du vote électronique pour la période 2008­2011126, a confié son exploitation à la même entreprise. A Genève, la réalisation initiale du système de vote par Internet a également été confiée à un consortium d'entreprises privées à l'issue d'un appel d'offres. Le cahier des charges, publié le 20 novembre 2000, décrit précisément l'architecture du système et rappelle les contraintes légales 122 123

Cf. ch. 2.4.2.

Cf. p.ex. Circulaire du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux à l'attention des communes politiques du 20 août 2008 relative à la garantie du droit de vote des Suisses de l'étranger (FF 2008 6851).

124 Cf. www.parlament.ch/F/Medienmitteilungen/Pages/mm-spk-n-2008-02-22.aspx.

125 Initiative parlementaire Lombardi «Pour une loi sur les Suisses de l'étranger» (11.446) du 15 juin 2011.

126 RRB 1770/2007 du 28 novembre 2007, E-Voting Ausbau 2008­2011.

4569

s'appliquant aux scrutins en droit suisse et genevois. Depuis 2005, le système est entièrement aux mains de l'Etat, y compris son développement et sa maintenance. A Neuchâtel c'est la réalisation d'une partie des modules du vote par Internet qui a été confiée à deux entreprises privées suite à un appel d'offres. La Confédération a financé jusqu'à 80 % des frais de développement des systèmes et ce jusqu'en 2005.

De leur côté, les cantons ne disposant pas de système propre ont bénéficié des clauses des contrats signés entre la Confédération et les cantons pilotes sur le financement des systèmes, clauses qui prévoient que les systèmes développés en grande partie grâce à l'argent fédéral doivent être mis gratuitement à la disposition de la Confédération et des cantons intéressés. La mise en pratique de cette solution a abouti aux solutions d'hébergement et de reprise du code source mises en place autour des systèmes genevois et zurichois. Neuchâtel a présenté des solutions de collaboration semblables. Cependant le fait qu'il ne s'agisse pas d'un système indépendant de vote électronique mais d'une prestation offerte par le Guichet unique cantonal a finalement dissuadé d'autres cantons de se joindre à Neuchâtel.

Initialement, le choix du système «hébergeur» a également été influencé par l'organisation des droits politiques dans les cantons. Ainsi les cantons où les registres des Suisses de l'étranger étaient centralisés ont eu tendance à se rapprocher de Genève, et ceux avec une gestion décentralisée de Zurich. Au fil du temps les systèmes se sont développés et couvrent actuellement les deux cas de figure. Ainsi le système genevois héberge également des cantons très décentralisés tels que Berne, et le système du consortium concerne également des cantons ayant une gestion centralisée du registre des Suisses de l'étranger, tels que Saint-Gall ou Argovie.

Parmi les critères ayant influencé le choix des systèmes figurent aussi: ­

l'expérience des systèmes en matière de vote électronique,

­

leur bon fonctionnement et leur rodage,

­

le fait que les cantons pilotes soient propriétaires et contrôlent le système,

­

les coûts moins élevés qu'en cas d'achat ou de développement d'un nouveau système,

­

la proximité et le contexte (p. ex. utilisation également commune d'autres systèmes liés au vote électronique et aux droits politiques).

2.4

Utilisation du vote électronique

Depuis 2000, le vote électronique a fait l'objet de plus de 100 essais au niveau fédéral. Tous ont réussi et satisfait aux exigences de la Confédération. Les chapitres qui suivent font le point sur les essais réalisés dans le cadre de votations fédérales (1re phase du projet), puis sur ceux réalisés dans le cadre d'élections fédérales (2e phase).

4570

2.4.1

Votations fédérales

Zurich Au cours de la phase de développement 2008­2011, le nombre des électeurs autorisés à voter par voie électronique dans le canton de Zurich127 est passé de 18 000 à quelque 100 000, soit 12,5 % de l'ensemble du corps électoral. Environ 11,4 % des 820 000 électeurs suisses de l'intérieur ont été autorisés à utiliser le vote électronique, pour près de 60 % des 18 000 électeurs suisses de l'étranger. Pour créer des conditions favorables à la prise en compte des Suisses de l'étranger, on a inclus les arrondissements 1 et 2 de la ville de Zurich et l'arrondissement de la vieille ville de Winterthour. Les autres communes ont été choisies en accord avec l'Interessensgemeinschaft EDV (IG-EDV), le Verein Zürcherischer Gemeindeschreiber und Verwaltungsfachleute (VZGV) et le Verband der Gemeindepräsidenten des Kantons Zürich (GPV). Différents critères ont été considérés: la présence de plusieurs fournisseurs de logiciels, la répartition régionale et la taille des communes, sans oublier l'inclusion de communes issues dans la mesure du possible de tous les districts du canton.

Neuchâtel A Neuchâtel, le vote électronique est possible non pas dans des communes spécifiques mais pour tous les électeurs inscrits au Guichet unique. Le renforcement de l'offre du Guichet unique et les campagnes de sensibilisation menées par le Conseil d'Etat ont déterminé l'évolution du nombre d'électeurs inscrits. Depuis 2008, les Suisses de l'étranger s'inscrivent au Guichet unique, principalement attirés par la prestation du vote électronique. Leur nombre se situe aujourd'hui à 288. Les représentations suisses à l'étranger ont été instruites par le Département fédéral des affaires étrangères afin de pouvoir conclure des contrats Guichet unique. Toutefois, seules les ambassades peuvent offrir cette prestation. Depuis 2005, le vote électronique est proposé régulièrement à chaque scrutin fédéral. Le nombre d'électeurs pouvant y recourir est ainsi passé de quelque 6000 en 2006 à plus de 20 000 en juin 2012. Une simple élection majoritaire de remplacement a été organisée avec vote électronique en 2012. Les étrangers établis inscrits utilisent le vote électronique lors de scrutins cantonaux et communaux.

Genève Le canton de Genève a atteint les 20 % d'électorat dès les votations fédérales de 2004. Pour les scrutins fédéraux,
l'électorat pouvant recourir au vote électronique n'a donc pas pu évoluer avant juin 2012, date de l'extension du vote électronique à 30 % de l'électorat de chaque canton. La totalité du corps électoral genevois a cependant pu voter en ligne lors de scrutins cantonaux organisés après que le vote électronique a été inscrit dans la constitution cantonale (février 2009). Il est en effet possible depuis lors de l'offrir à l'ensemble de l'électorat lors de votations cantonales et communales. Le système a également été utilisé lors des élections du Conseil de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES SO) en 2006, des représentants du personnel des bibliothèques municipales en 2011 et du Conseil de l'Université en 2011. Du fait que, à Genève, les étrangers jouissent du droit de vote commu-

127

RRB 2811 2007

4571

nal, le vote électronique leur a été offert à chaque fois qu'il était mis en oeuvre dans un scrutin communal.

Cantons sans système propre Dans les dix cantons sans système propre, le vote électronique est utilisé depuis 2009 à Bâle-Ville et depuis 2010 dans les autres, à l'occasion de votations fédérales et, jusqu'ici, uniquement pour les Suisses de l'étranger.

Incidents enregistrés lors de l'utilisation du vote électronique pour des votations En près de dix ans d'utilisation, le vote électronique n'a généré qu'un nombre limité d'incidents ou de problèmes. En voici quelques exemples: ­

Le 11 mars 2012, un électeur du canton de Lucerne (utilisant le système genevois) a involontairement voté deux fois128. Cette anomalie a été détectée immédiatement par le système de surveillance et corrigée dans les règles de l'art. Elle a permis de vérifier en situation réelle le bon fonctionnement de la surveillance du système et les procédures d'urgence, communication comprise. L'équipe genevoise chargée de l'exploitation du vote électronique a pu prouver qu'il s'agissait d'un problème exceptionnel et en exposer les causes techniques de même que les circonstances particulières dans lesquelles il s'était produit. Elle a corrigé l'erreur sans nuire au secret du vote et pris les mesures qui s'imposaient. L'exactitude du résultat n'a été menacée à aucun moment.

­

Lors du scrutin fédéral du 23 septembre 2012, les cantons de Soleure et des Grisons, qui utilisent une copie du système zurichois, ont signalé à la Chancellerie fédérale un problème technique qui a touché une commune de chacun d'eux. Les données d'accès de 18 électeurs de l'étranger (16 dans un cas, 2 dans l'autre) ne figuraient pas dans la base de données électorale avant l'ouverture de l'urne électronique. Conséquence: ces 18 électeurs n'ont pas pu voter par Internet. La cause de cette erreur technique, qui ne s'est présentée nulle part ailleurs, a été identifiée et éliminée aussitôt. Le vote électronique a pu fonctionner normalement pour le scrutin fédéral fédéral du 25 novembre 2012.

­

Dans le canton de Zurich, il y a eu lors de quelques rares scrutins des problèmes d'impression des cartes d'électeur pour le vote électronique (concernant le champ Hydalam, qui recouvre le code PIN). Conséquence: plusieurs électeurs ont dû renoncer à voter par Internet faute de pouvoir lire le code correspondant. Il leur était bien entendu toujours possible de voter de manière traditionnelle ou par correspondance.

­

Il est arrivé que des objets ou des candidats soient mal enregistrés dans le système. Conséquence: l'essai de vote électronique, quoique dûment autorisé, a dû être annulé.

Ces cas montrent clairement que la plupart des problèmes ne sont pas liés aux systèmes de vote électronique mais à leur utilisation ou à l'organisation des essais.

128

Cf. www.ge.ch/evoting/scrutin_20120311.asp.

4572

2.4.2

Elections fédérales

Les quatre cantons de Bâle-Ville, de Saint-Gall, des Grisons et d'Argovie ont offert le vote électronique à leurs Suisses de l'étranger pour les élections fédérales du 23 octobre 2011. Les cantons en question et les groupes d'accompagnement des systèmes du consortium et de Genève ont travaillé d'arrache-pied à la préparation des essais. La première utilisation du vote électronique pendant des élections nationales s'est déroulée avec succès.

Les cantons dotés de leur propre système ont, pour des raisons diverses, pour l'instant renoncé à proposer le vote électronique pour des élections: ­

à Genève, les bases légales spécifiques n'étaient pas prêtes à temps,

­

à Zurich, les problèmes rencontrés antérieurement avec le système de dépouillement cantonal, auquel le système de vote électronique est relié par une interface, ont conduit les autorités à renoncer au vote électronique pour les élections,

­

à Neuchâtel, le système n'a pas encore été en mesure de traiter une élection.

Un module approprié sera mis en service en 2013.

L'élection du Conseil des Etats est quant à elle une élection cantonale qui obéit à la réglementation cantonale.

La prise en compte de ces différences par rapport aux votations et les adaptations nécessaires des systèmes pour assurer ces élections ont été autant de défis que les systèmes de vote électronique ont relevé avec succès.

Incidents enregistrés lors de l'utilisation du vote électronique pour des élections Les procédures applicables aux élections du Conseil national sont plus complexes que celles des votations et variables d'un canton à l'autre129.

Les premiers essais de vote électronique réalisés lors d'élections fédérales n'ont donné lieu à aucun incident grave. On n'a recensé que quelques problèmes de faible envergure, dont voici deux exemples: ­

l'un des systèmes utilisés n'a pas reconnu tous les caractères spéciaux utilisés pour les noms propres (patronymes de candidats originaires des pays de l'Est, p. ex.),

­

un canton a été obligé de compléter les bulletins de vote électroniques juste avant l'ouverture de l'urne, car le lieu de résidence des candidats n'avait pas été enregistré.

Là aussi, il apparaît clairement que les problèmes ne sont pas liés au vote électronique mais aux travaux préparatoires.

129

Cf. ch. 3.5.

4573

2.4.3

Scrutins cantonaux et communaux

Lorsque le vote électronique est utilisé à l'occasion d'un scrutin fédéral, il doit porter sur toute autre votation ou élection ayant lieu le même jour sur les territoires désignés130. En dehors d'une date de scrutin fédéral, les cantons sont libres d'utiliser le vote électronique comme bon leur semble. Cependant dans la pratique, les votations cantonales et communales sont dans la mesure du possible organisées aux mêmes dates que les scrutins fédéraux, ne serait-ce que pour des raisons de coût.

Le canton de Genève a proposé le vote électronique à tous ses électeurs cantonaux à quatre reprises depuis mai 2011.

Le système zurichois a été utilisé pour différents types d'élections. Un essai de scrutin proportionnel électronique, qui s'est déroulé sans problèmes, a ainsi eu lieu en décembre 2006 à l'occasion de l'élection du conseil des étudiants de l'Université de Zurich131. Le système a aussi été utilisé avec succès le 2 avril 2006 dans la ville de Bülach pour des votations et élections communales selon le système majoritaire132.

Le système de Neuchâtel est régulièrement utilisé lors de votations cantonales ou communales.

Les cantons de Berne, de Fribourg, de Soleure et des Grisons proposent aussi le vote électronique à leurs électeurs de l'étranger lors des votations cantonales. Fribourg et les Grisons l'ont même déjà fait pour une élection cantonale.

L'utilisation plus étendue du vote électronique au niveau cantonal et local lorsque cela est possible, présente l'avantage de pouvoir tester l'acceptabilité sociale et politique de ce canal dans une plus grande partie de l'électorat cantonal. Par contre, l'absence de régularité dans l'offre et le fait de revenir aux restrictions fédérales lors d'un scrutin suivant peuvent être mal perçus par les électeurs.

Excursus: L'évolution du vote électronique s'inscrit dans un contexte d'évolution constante des procédures des droits politiques conformément à l'évolution des modes de vie: introduction du vote à l'urne, du dépouillement professionnel et du vote par correspondance, prolongation de la durée de la votation, extension des droits de vote des Suisses de l'étranger et des étrangers établis, introduction du vote par Internet, etc.

Ces évolutions sont introduites tout d'abord au niveau communal et cantonal avant d'être généralisées à l'échelle
fédérale. Exemples récents: extension du droit de vote des Suisses de l'étranger aux élections cantonales pour le Conseil des Etats, procédure de répartition des sièges lors d'élections à la proportionnelle.

130 131

Art. 27a, al. 2, ODP.

Deux autres élections du même type avaient eu lieu en décembre 2004 et 2005, RRB 2811 2007.

132 RRB 2811 2007.

4574

2.4.4

Evolution des systèmes

Systèmes zurichois et du consortium A la fin de l'année 2007, le canton de Zurich a transféré son système de Berne à Zurich, dans les locaux de la Section informatique de la Direction de la justice et de l'intérieur. Les raisons principales étaient la nécessité de remplacer une partie du matériel informatique vétuste, l'arrivée à échéance des contrats d'entretien pour le site bernois du système, ainsi que la simplification de l'exploitation et la réduction des coûts résultant de l'utilisation du système dans l'environnement informatique zurichois. Ces aspects étaient particulièrement importants en prévision du développement du vote électronique dans le canton de Zurich à partir de 2008. A l'occasion du transfert du système à Zurich, on a notamment renoncé à la possibilité du vote par SMS, ce qui, avec quelques autres modifications techniques, a augmenté la convivialité et la sécurité du système133.

Une description des évolutions récentes se trouve dans la décision du Conseil d'Etat du 16 novembre 2011134.

Le système a été «cloné» en 2010. Depuis, les cantons du consortium utilisent le clone, autrement dit une copie du système, sans aucune modification majeure hormis l'introduction du plurilinguisme et quelques ajustements du module Elections en prévision des élections 2011 du Conseil national.

Système neuchâtelois La ferme volonté politique de développer le Guichet unique s'est traduite par la mise à disposition des fonds nécessaires. La promotion du vote électronique est réalisée indirectement par les campagnes de promotion du Guichet unique menées dans les centres commerciaux, les communes, les services qui offrent des prestations, les cinémas et la presse de même que sur le site de l'Etat. De nouvelles prestations phares, tel le dépôt de la déclaration fiscale sur Internet via le Guiche unique, devraient générer une augmentation sensible du nombre de «votants électroniques», ce qui risque de poser problème compte tenu du plafonnement de cet électorat imposé par le Conseil fédéral. Le relèvement du plafond cantonal de 20 à 30 % en juin 2012 a permis de régler la question à court terme.

Développements récents méritant d'être soulignés: ­

instauration d'un nouveau module pour les élections (tous types d'élections politiques organisées dans le canton)135,

­

instauration d'un nouveau mode d'identification par l'utilisation du code SMS ou de la SuisseID (dès 2013).

Au niveau de l'ordinateur de l'électeur, il est prévu de renforcer la complexité des applications utilisateur, et notamment d'utiliser une application différente pour chaque électeur, afin de rendre toujours plus difficile leur manipulation et d'éviter les attaques de masse.

133 134 135

RRB 2811 2007.

RRB 1391 2011.

Les premières élections concerneront les élections du Conseil d'Etat et du Grand Conseil au printemps 2013.

4575

Système genevois Le système de vote par Internet n'a pas cessé d'évoluer depuis sa création en 2003.

Les décisions relatives à son développement sont prises en commun par les cantons qui l'utilisent, dans le cadre du groupe d'utilisateurs. Elles sont dictées à la fois par la fréquence et la complexité des scrutins prévus (initiative avec contre-projet et question subsidiaire, votation et élection un même jour, etc.), par l'évolution des techniques et des menaces et par les demandes des cantons partenaires. Un module spécial élections a été ajouté au système pour les élections 2011 du Conseil national.

De façon générale, les développements ont porté sur la convivialité d'une part (adaptation aux normes garantissant l'accessibilité des sites Internet aux électeurs malvoyants, organisation simultanée de plusieurs scrutins, etc.) et sur la sécurité d'autre part. En 2006, une appliquette java a été ajoutée, afin de sur-encrypter les données circulant sur Internet et de permettre d'authentifier l'électeur sur la base d'une dérivation de son numéro de carte d'électeur. Un contrôle de cohérence des votes à leur arrivée dans l'urne électronique a également été ajouté, afin d'éviter qu'un code exécutable ou des votes illisibles n'entrent dans l'urne et en altèrent le contenu. Le cas échéant, un message apparaîtrait sur l'écran de l'électeur et l'inviterait à voter par un autre canal afin de protéger son droit de vote pour le scrutin en cours. Tous les codes et identifiants utilisés dans le système sont générés de manière totalement aléatoire par un générateur quantique de nombre, ce qui complique les attaques par force brute. Enfin, la surveillance du système est en mesure de détecter les éventuelles interventions internes illicites sur le système. Les détails du fonctionnement du système genevois sont publiés en français et en allemand sur le site Internet du vote électronique genevois136.

La loi cantonale sur les droits politiques permet aux citoyens genevois l'accès au code source de l'application pour autant qu'ils justifient «d'un intérêt scientifique et purement idéal». Le Conseil d'Etat a donné à deux reprises son aval à un tel accès, à des représentants du Parti Pirate genevois, d'une part, et, à un étudiant et à un collaborateur de la Haute école spécialisée bernoise, d'autre part. Ces derniers ont obtenu cet accès au même titre que les citoyens genevois, puisque les électeurs bernois sont hébergés par le système genevois de vote électronique.

2.5

Défis

2.5.1

Point de vue de la Confédération

Etant donné son expertise et son rôle en matière de droits politiques, la Chancellerie fédérale a assumé jusqu'ici deux tâches qui dans l'idéal devraient être exercées par deux instances différentes, en raison d'un conflit d'intérêts potentiel: d'une part le soutien aux cantons pour l'introduction du vote électronique et la participation, à ce titre, aux différents contrats intercantonaux (coordination des projets cantonaux). De l'autre, la surveillance des systèmes et l'examen des demandes d'autorisation adressées par les cantons au Conseil fédéral. Il y a lieu de réfléchir à la séparation de ces deux mandats et à la mise en place d'une instance de contrôle des systèmes, indépendante de la Chancellerie fédérale et disposant des compétences techniques nécessaires. Des exemples existent et ils pourraient servir de modèle au vote électroni136

Cf. www.ge.ch/evoting/a_coeur_ouvert_a.asp.

4576

que137. Le processus d'autorisation devrait en outre être organisé de manière plus efficace.

2.5.2

Point de vue des cantons

Quoique satisfaits du soutien offert par la Chancellerie fédérale dans l'élargissement du vote électronique ­ soutien qui leur permet d'obtenir une bonne appréciation de la conformité de leurs solutions avec les dispositions fédérales ­, les cantons considèrent que les contraintes qui accompagnent actuellement le vote électronique pourraient être réduites. De leur point de vue, il convient de simplifier d'abord la procédure d'autorisation du Conseil fédéral (présentation d'une demande pour chaque votation, autorisation séparée pour chaque votation, etc.).

Les quelques difficultés techniques qui ont accompagné l'extension du vote électronique ces dernières années sont liées principalement à la complexité des procédures liées aux droits politiques et aux efforts de coordination138.

En matière de fonctionnement du système, le vote par SMS testé à Zurich s'est révélé insatisfaisant et a été supprimé en 2007139.

L'expérience en particulier des cantons sans système propre démontre, à leur sens, que les plus grands défis de la mise en place et de l'extension du vote électronique sont notamment ceux liés aux aspects organisationnels et à l'harmonisation préalable nécessaire des données et des procédures (surtout dans les cantons décentralisés). La complexité des procédures liées aux droits politiques, notamment en matière d'élections cantonales et communales, est un paramètre déterminant.

Les investissements initiaux requis posent problème, surtout en temps de restrictions budgétaires. La marge de manoeuvre plus ou moins large dont dispose le gouvernement cantonal a un impact important.

La clarification des perspectives d'extension, notamment à l'attention des Suisses résidents et des communes qui ne participent pas encore au vote électronique, est souhaitée par l'ensemble des partenaires cantonaux.

Un canton mentionne la question des recours réguliers contre l'organisation des scrutins, qui affectent également le vote électronique140.

Tout en plaidant pour le maintien de hautes exigences de sécurité en matière de vote électronique en vue notamment de son extension future, le Conseil fédéral comprend la position des autorités cantonales compétentes et opte pour des simplifications procédurales141.

137 138

Cf. www.seco.admin.ch > Thèmes > Service d'accréditation suisse SAS.

Cf., p. ex. Giampiero Beroggi/Peter Moser/Daniel Bierer, Evaluation der E-Voting Testphase im Kanton Zürich 2008­2011, annexe 7, p. 73 s.

(http://data.rrb.zh.ch/appl/rrbzhch.nsf/0/C12574C2002FAA1FC1257942004EB439/$file/ Evaluation_E-Voting_Zürich.pdf).

139 Giampiero Beroggi/Peter Moser/Daniel Bierer, Evaluation der E-Voting Testphase im Kanton Zürich 2008­2011, p. 24.

(http://data.rrb.zh.ch/appl/rrbzhch.nsf/0/C12574C2002FAA1FC1257942004EB439/$file/ Evaluation_E-Voting_Zürich.pdf).

140 Cf. ch. 1.5.

141 Cf. ch. 14.

4577

3

Evaluation de l'extension du vote électronique 2006­2012

3.1

Suisses de l'étranger

La Confédération et les cantons se sont associés pour coordonner les travaux législatifs préparatoires en vue de l'application au niveau cantonal du nouvel art. 5b LDPSE (centralisation ou harmonisation cantonale des registres électoraux des Suisses de l'étranger) et pour mettre en place le vote électronique et l'étendre aux cantons sans système propre. Les dix cantons sans système propre ont proposé initialement le vote électronique à leurs Suisses de l'étranger. Ils répondaient ainsi à un besoin. De plus cela leur a permis de se familiariser graduellement avec ce nouveau canal de vote et d'envisager, dans un deuxième temps et en connaissance de cause, une éventuelle extension du vote électronique aux résidents.

Les Suisses de l'étranger ont pour la première fois pu voter par Internet à Neuchâtel, lors de la votation fédérale du 1er juin 2008. Sur les 152 Suisses de l'étranger pouvant recourir au vote électronique, 57 l'ont effectivement utilisé pour voter. La participation générale à Neuchâtel était de 48,3 % à cette occasion. 33,9 % des ayants droit, soit 1593 voix, se sont exprimés par voie électronique142.

Depuis, les Suisses de l'étranger des douze autres cantons, du moins une partie d'entre eux, les ont rejoints. Quelque 22 000 électeurs résidant à l'étranger ont pu voter par voie électronique lors des élections fédérales de 2011.

D'ici à la fin 2012, la moitié environ des Suisses de l'étranger devraient pouvoir recourir au vote électronique. La Confédération et les cantons souhaitent par ailleurs qu'une grande majorité d'entre eux puissent le faire lors des prochaines élections fédérales, en 2015. En tout état de cause, l'objectif que le Conseil fédéral s'était fixé dans le rapport de 2006 peut être considéré comme atteint.

La Confédération et les cantons ont également pris des mesures visant à améliorer le vote par correspondance143.

3.2

Electeurs malvoyants

Les handicapés et avant tout les handicapés de la vue constituent en plus des Suisses de l'étranger l'autre groupe d'électeurs identifié comme groupe cible dans le rapport du Conseil fédéral de 2006. Leur handicap les oblige à demander l'aide d'un tiers pour voter, et donc à renoncer au secret du vote. Le vote électronique leur permettrait de donner leur suffrage en toute autonomie.

Il est difficile à l'échelle suisse de savoir quel est le nombre exact de personnes «handicapées de la vue». Le Guide de l'Office fédéral de la statistique «Visages du handicap ­ Personnes pouvant être considérées comme handicapées selon différentes

142

Cf. www.news.admin.ch/dokumentation/00002/00015/index.html?lang=fr&msgid=19093.

143 Circulaire du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux à l'attention des communes politiques du 20 août 2008 relative à la garantie du droit de vote des Suisses de l'étranger (FF 2008 6851).

4578

définitions» de 2009144 donne quelques chiffres. Elles seraient aussi nombreuses que les Suisses de l'étranger inscrits pour exercer leurs droits politiques, c'est-à-dire environ 135 000. Si on y ajoute les personnes souffrant de problèmes de vue associés à l'âge, on peut supposer qu'il s'agit d'un groupe important, pour lequel le vote électronique constitue un avantage décisif.

Depuis l'entrée en vigueur de l'art. 27ebis ODP en janvier 2008, les cantons sont incités à tenir compte des besoins spécifiques des handicapés de la vue et à leur offrir un canal de vote qui respecte leur droit au secret du vote tout en maintenant les niveaux de sécurité nécessaires dans les systèmes.

Les systèmes de vote électronique de Genève et Neuchâtel collaborent depuis longtemps avec des handicapés de la vue afin d'étudier des solutions qui leur conviendraient. Le résultat est déjà très satisfaisant car un malvoyant peut d'ores et déjà participer seul à un scrutin s'il dispose d'un équipement suffisant (PC, ligne braille, synthétiseur vocal et scanner). Le gouvernement de Bâle-Ville souhaite, pour la deuxième phase d'extension du vote électronique, se concentrer sur les besoins spécifiques de cette catégorie d'électeurs.

Cela pose un certain nombre de difficultés techniques, certes, mais aussi pratiques, car contrairement aux Suisses de l'étranger qui sont regroupés dans un registre électoral, les besoins spéciaux de ce groupe d'électeurs en matière d'expression du vote ne sont reflétés dans aucun registre. Un système d'annonce préalable pourrait par exemple être envisagé qui permettrait de les cerner et de traiter leurs besoins de manière ciblée.

Au niveau fédéral, l'expérience de ces dernières années doit servir de base à de futurs travaux consacrés au traitement prioritaire des besoins des handicapés de la vue et à la mise en oeuvre de l'art. 27ebis ODP, p. ex. dans le cadre d'un sous-groupe de travail ad hoc sous la direction de la Chancellerie fédérale145.

3.3

Plurilinguisme

Conformément à la liberté de la langue et à la garantie des droits politiques inscrites dans la Constitution, tout électeur doit pouvoir voter et élire dans sa langue146. Les systèmes de vote électronique fonctionnent donc dans les quatre langues nationales depuis 2009. Cela dit, le plurilinguisme n'est pas seulement un droit inscrit dans la Constitution, il est aussi une condition à la collaboration intercantonale dans ce domaine.

Les systèmes ont été traduits dans les quatre langues nationales dans le cadre de l'extension du vote électronique. L'électeur peut voter dans la langue de son choix.

Les cantons se sont chargés de la programmation nécessaire au plurilinguisme et la Chancellerie fédérale a fourni les traductions.

144

Cf. www.bfs.admin.ch > Thèmes > Situation économique et sociale de la population > A consulter > Publications.

145 Cf. ch. 11.4.2.

146 Art. 18 et 34, al. 2, Cst.

4579

En ce qui concerne les canaux de vote traditionnels (urne, correspondance), les cantons proposent le matériel de vote dans leur(s) langue(s) officielle(s). Tout électeur qui en fait la demande peut aussi l'obtenir dans n'importe laquelle des autres langues nationales.

3.4

Optimisation des procédures

L'introduction et l'élargissement graduel du vote électronique ont offert l'occasion de repenser les procédures dans le domaine des droits politiques dans le but des les optimiser. Bien entendu la plupart d'entre elles étant fixées par la loi et l'ordonnance sur les droits politiques, des modifications sont nécessaires également à ce niveau-là.

Les procédures de préparation à une éventuelle crise constituent un exemple d'optimisation réalisée à l'occasion de l'introduction du vote électronique, notamment la formalisation des réponses à donner à différents problèmes éventuels et de la communication en cas de crise147.

Autre exemple: la mise en place de collaborations novatrices entre cantons et entre les cantons et la Confédération148. Cela a permis de formaliser, de normaliser et d'optimiser les données et les procédures. Ce travail est nécessaire pour assurer le succès du vote électronique dans le respect du système actuel des droits politiques, qui se base sur une décentralisation poussée.

Tout cela confirme la justesse de l'approche proposée par le Conseil fédéral en 2006: développer le vote électronique pas à pas et profiter des connaissances engrangées pour pouvoir avancer. Plusieurs améliorations et développements ont en effet été réalisés depuis le début du projet dans le but de répondre à l'évolution et à la complexité des droits politiques suisses. L'instauration du vote électronique a souvent fait apparaître la nécessité de mesures, sans pour autant en être la cause.

3.5

Election avec vote électronique

Les élections 2011 du Conseil national ont donné lieu, comme on l'a vu, aux premiers essais de vote électronique dans les cantons de Bâle-Ville, de Saint-Gall, des Grisons et d'Argovie. Tous ont réussi. Les cantons ont relevé les défis techniques et logistiques qui se posaient à eux sans incident notable. Tous les quatre avaient pu acquérir une première expérience dans ce domaine en testant avec succès le vote électronique à l'occasion de votations fédérales.

En prévision de ce scrutin, les systèmes de vote électronique qui n'avaient servi jusque-là que pour des votations ont été adaptés aux dispositions particulières du droit fédéral en matière d'élections, certains même complétés par un module spécial élections. Tous ont été testés et approuvés par la Chancellerie fédérale et les groupes d'accompagnement ad hoc149 dans le cadre d'élections cantonales ou communales factices ou réelles. Ces travaux préparatoires impliquant les quatre cantons et les exploitants des systèmes ont débuté en 2009.

147 148 149

Cf. ch. 2.4.1 et ch. 15.

Cf. ch. 1.4.3.

Cf. ch. 4.4.2.

4580

Les premiers essais de vote électronique à l'occasion d'élections fédérales étaient limités aux électeurs de l'étranger des cantons concernés, et plus exactement à 22 000 d'entre eux, ce qui correspond à environ 0,4 % de l'électorat total (5 090 000 personnes). 3562 Suisses de l'étranger ont finalement voté par Internet, soit une proportion atteignant dans certains des cantons 53,1 % de l'électorat admis.

L'extension des essais de vote électronique à des élections a fait passer les cantons concernés à la deuxième phase du projet150.

3.6

Evolution de la participation aux élections et aux votations avec le vote électronique

Grâce à l'extension du vote électronique et à l'inclusion de nouveaux cantons, quelque 150 000 électeurs ont pu participer en moyenne aux essais de vote électronique depuis 2009. En 2012, quelque 90 000 électeurs domiciliés dans les cantons de Neuchâtel et de Genève ainsi que 65 000 électeurs suisses de l'étranger des cantons de Berne, de Lucerne, de Fribourg, de Soleure, de Bâle-Ville, de Schaffhouse, de Saint-Gall, des Grisons, d'Argovie, de Thurgovie, de Neuchâtel et de Genève ont été autorisés à participer aux essais.

Certains émettent l'espoir de voir la participation augmenter grâce au vote électronique. Le Conseil fédéral reste pour sa part prudent sur cette question. Il n'existe actuellement pas d'étude de grande ampleur sur l'influence à long terme de l'introduction du vote électronique sur la participation aux élections et aux votations.

Le vote électronique est un projet axé sur l'avenir, mais il ne faut pas pour autant perdre de vue l'évolution historique des canaux de vote: il y 150 ans, la Landsgemeinde était encore la forme de décision démocratique par excellence. C'est à la scolarisation des masses que l'on doit de pouvoir voter. Suite à l'accroissement de la mobilité de la population il y a une cinquantaine d'années, l'abstentionnisme a fortement augmenté. Le vote par correspondance a permis d'inverser cette tendance au milieu des années 90. Si, après la libéralisation de ce canal de vote, les électeurs ont dans un premier temps fait preuve d'une certaine retenue, ils sont aujourd'hui plus de 90 % à voter par correspondance. Les Suisses semblent donc faire preuve 150

Au sujet des quatre phases du projet, cf. ch. 1.1.

4581

d'une réserve initiale en réaction à l'introduction de nouveaux modes de participation aux élections et aux votations.

S'agissant des perspectives d'avenir, il est envisageable que la demande en rapport avec le nouveau canal de vote électronique augmente au cours des prochaines années en raison de la numérisation croissante de divers processus et de l'accroissement encore plus marqué de la mobilité des électeurs. C'est ici qu'intervient le vote électronique, afin d'empêcher un nouveau recul de la participation. Pour qu'un projet aussi complexe que le vote électronique soit prêt et que les autorités soient préparées, il importe de commencer les travaux dès aujourd'hui. Ce n'est qu'ainsi qu'on disposera de suffisamment de temps pour maîtriser les défis qui se poseront dans le contexte de l'introduction du vote électronique.

Depuis la réalisation du premier essai pilote, la participation au moyen du vote électronique montre clairement une tendance à la hausse (nombre des électeurs utilisant le vote électronique par rapport à l'électorat autorisé à voter). Lors des premiers essais, la participation a varié très fortement, avant de se stabiliser aux alentours de 20 %.

Notons qu'il existe une corrélation évidente entre la participation au moyen du vote électronique et la participation générale. Plus la participation générale est élevée, plus la participation au moyen du vote électronique augmente également.

4582

L'analyse de la part des électeurs qui utilisent le vote électronique permet d'obtenir des informations plus fines et plus précises sur la participation au moyen de ce canal de vote.

Lors de la votation du 17 juin 2012 par exemple, jusqu'à 64 % des électeurs autorisés à voter l'ont fait par voie électronique. C'est dans les cantons qui proposent le vote électronique aux seuls électeurs suisses de l'étranger que les taux de participation sont aussi élevés. La participation au moyen du vote électronique est nettement plus faible (17 %) dans les cantons qui permettent également aux électeurs suisses de l'intérieur de participer aux essais.

Les explications suivantes peuvent être avancées quant aux différences observées entre les Suisses de l'intérieur et les Suisses de l'étranger en matière d'utilisation du vote électronique: ­

L'introduction du vote électronique répond aux besoins des électeurs suisses de l'étranger. Ces derniers sont en effet souvent désavantagés dans l'exercice de leurs droits politiques du fait des problèmes liés à la livraison du matériel de vote par courrier postal.

­

Les limites fixées au plan fédéral compliquent l'utilisation du vote électronique à deux égards. Il n'y a d'une part pas de continuité pour les électeurs suisses de l'intérieur, qui peuvent en partie voter par voie électronique lors de scrutins cantonaux, mais ne le peuvent pas lors des scrutins fédéraux en raison des limites susmentionnées. Cette discontinuité peut troubler les électeurs concernés, et il se peut qu'ils renoncent pour cette raison à voter par voie électronique. Il se pourrait d'autre part que les électeurs prennent les limites pour un indice de non-fiabilité des systèmes.

L'évolution de la participation dans les cantons à système propre correspond à la tendance générale. Mentionnons notamment l'évolution dans le canton de Neuchâtel, où le vote électronique fait partie intégrante du Guichet unique. Pour profiter des prestations de celui-ci, les électeurs doivent passer un contrat avec le canton. Au moment de l'introduction du Guichet unique, le vote électronique était l'une des quelques fonctions proposées. Il est fort probable que les électeurs ont passé un contrat pour le Guichet unique précisément pour pouvoir utiliser le vote électronique lors des scrutins, ce qui dénote une certaine motivation. La participation était par conséquent élevée. Avec le temps, la palette des fonctions du Guichet unique a été étendue, si bien que le vote électronique n'est plus le projet principal de la numérisation de la communication avec les autorités du canton de Neuchâtel; la participation au moyen du vote électronique s'en est ressentie et a reculé.

4583

Il n'est pas possible de représenter de manière homogène l'évolution de la participation au moyen du vote électronique dans les cantons sans système propre. La tendance est positive dans les cantons de Fribourg, de Saint-Gall et des Grisons mais n'est pas mesurable dans les autres cantons.

La participation des électeurs suisses de l'étranger aux élections 2011 du Conseil national s'est révélée plus faible que la participation habituelle de ce groupe cible lors de votations, mais la part des votants par Internet était élevée, dépassant parfois les 50 %.

3.7

Acceptation du vote électronique dans la société et dans les milieux politiques

Le projet Vote électronique divise l'opinion. Tous les milieux ­ électeurs, scientifiques, politiques ­ y sont globalement favorables, mais dans des proportions variables. Or l'acceptation et la confiance du public sont des paramètres essentiels à la réussite du projet.

4584

L'annexe 3 fournit un récapitulatif des interventions déposées au niveau fédéral et dans les parlements cantonaux, qui permet de se faire une idée de l'acceptation politique du vote électronique dans les cantons.

3.7.1

Partisans d'une généralisation rapide

Plusieurs études réalisées notamment par E-Government Suisse montrent que le vote électronique est largement accepté par les électeurs. Les personnes interrogées lui font confiance et considèrent sa mise en oeuvre comme prioritaire.

Des études réalisées à l'issue d'une votation (Genève et Bâle) ou d'une élection (Etudes électorales suisses concernant les élections au Conseil national de 2011) sont arrivées aux mêmes conclusions. Les électeurs interrogés font majoritairement confiance au nouveau canal de vote et sont prêts à l'utiliser lors d'un prochain scrutin (votation ou élection).

Plusieurs initiatives visant à promouvoir le vote électronique méritent d'être soulignées: ­

En 2012, deux pétitions de soutien à l'instauration du vote électronique ont été lancées, l'une par le projet «easyvote» de l'association faîtière des Parlements des Jeunes, qui voit dans le vote électronique un moyen d'encourager le participation des jeunes générations, l'autre par les JDC et les sections internationales du PS, du PLR et de l'UDC.

­

En août 2012, l'Organisation des Suisses de l'étranger (OSE) a remis au Conseil fédéral une pétition intitulée «Le vote électronique pour tous», qui avait recueilli près de 15 000 signatures. Objectif: accélérer la généralisation du vote électronique pour tous les électeurs, et en tout cas permettre à tous les Suisses de l'étranger de voter par Internet aux élections fédérales de 2015.

3.7.2

Opposants à une généralisation rapide

Les acteurs politiques sceptiques quant au vote électronique sont recensés au ch. 1.6.

Il convient à cet égard de souligner la position du Parti Pirate, qui critique ouvertement le 3e canal de vote depuis 2012, alors qu'il n'est pas foncièrement opposé à son instauration. Ce qu'il met en doute, c'est l'extension des systèmes existants. La section genevoise du parti a déposé au Conseil d'Etat du canton une demande d'accès au code source, demande qui a été acceptée151.

Des associations privées («direktedemokratie.com», p. ex.) ont également critiqué le manque de transparence des systèmes de vote électronique, revendiquant un accès à la documentation qui s'y réfère.

151

Cf. www.ge.ch/chancellerie/communiques/2012/20120911.asp.

4585

4

Mise en oeuvre des exigences de sécurité

4.1

Protection du secret du vote

La garantie des droits politiques152 protège la liberté de vote, c'est-à-dire la libre formation de l'opinion de l'électeur et l'expression fidèle et sûre de sa volonté. Cette disposition assure à chaque citoyen le droit d'exiger qu'aucun résultat de votation ou d'élection ne soit reconnu s'il ne traduit pas d'une manière fidèle et sûre la volonté librement exprimée du corps électoral153, et confère à l'électeur le droit de voter dans le secret et à l'abri de toute influence extérieure conformément à sa volonté154.

Le droit au secret du vote oblige les autorités à créer les conditions nécessaires à sa protection155.

Les cantons sont libres en principe en ce qui concerne l'organisation des votations et des élections cantonales, à condition de respecter les règles générales du droit constitutionnel fédéral (notamment la garantie des droits politiques, qui protège le secret du vote)156. Il est à noter que pour ce qui concerne la protection du secret du vote lors du vote par correspondance (donc en dehors des locaux de vote), on fait appel à la responsabilité individuelle et à la confiance. Ceci est valable également vis-à-vis de la poste, canal de transmission du vote par correspondance. La confiance s'applique d'ailleurs à tous les services postaux (vote des Suisses de l'étranger) mais les autorités sont conscientes des limites du canal, notamment à l'étranger.

Les exigences en matière de secret du vote posées aux trois systèmes de vote par Internet sont analogues à celles posées au vote par correspondance. Des mesures techniques et organisationnelles ont été prises dans ce sens. Les votes se transmettent sous forme cryptée, l'utilisation du droit de vote et le vote lui-même sont enregistrés dans des structures de données séparées. Après impression des cartes d'électeur, le registre utilisé pour contrôler l'utilisation du droit de vote par Internet est anonymisé ­ c'est-à-dire que les données personnelles (nom, prénom, adresse) sont effacées. Des mesures organisationnelles assurent la protection des données et leur destruction au moment voulu et excluent l'accès non autorisé à l'urne électronique et au registre d'utilisation du droit de vote: l'accès n'est autorisé que dans des cas précis, selon des règles précises (une autorisation préalable est nécessaire, le principe des quatre yeux s'applique,
un système de surveillance est mis en place) et par des personnes bien précises (règles sur l'engagement du personnel qui travaille dans les infrastructures sensibles de l'Etat, engagement de ces dernières à respecter des accords spécifiques à ce sujet, etc.). Pour ce qui concerne les prestataires privés du vote électronique, ils sont également censés appliquer les règles qui découlent des engagements contractuels qu'ils ont signés avec les cantons et la Confédération. Les électeurs sont informés des mesures à prendre pour sauvegarder le secret du vote (comme p. ex nettoyer le cache du navigateur).

152 153 154 155

Art. 34, al. 2, Cst., 5 LDP 27d, al. 1, let. d, 27f, al. 1, 27g et 27h ODP.

Cf., p. ex., ATF 123 I 71.

ATF 90 I 2.

Piermarco Zen-Ruffinen, L'expression fidèle et sûre de la volonté du corps électoral, in: Daniel Thürer/Jean-François Aubert/Jörg Paul Müller (Hrsg.), Verfassungsrecht der Schweiz, Zürich 2001, § 21, Nr. 2, 3, 35 und 37.

156 Pascal Mahon, La citoyenneté active en droit public suisse, in: Daniel Thürer/JeanFrançois Aubert/Jörg Paul Müller (éd.), Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, § 20, no 41.

4586

Dans le système neuchâtelois, le contenu du bulletin électronique n'est visible qu'au moment du décryptage de l'urne, le dimanche. En cas d'erreur de formatage du bulletin, il est trop tard pour avertir le votant. L'expérience neuchâteloise a montré jusqu'ici que la réception d'un vote non conforme est un fait rarissime: jusqu'à présent, sur une centaine d'essais, on recense un seul et unique échec de décryptage d'une voix. Les autres systèmes ont opté pour un contrôle de conformité du bulletin qui leur permet de détecter et de refuser tout bulletin qui ne correspond pas au format requis. Le cas échéant, le système informe immédiatement le votant pendant la session du vote. Selon cette approche, le bulletin électronique ne doit contenir que les choix possibles autorisés pour le scrutin en question.

La Chancellerie fédérale estime que les trois systèmes respectent l'exigence fédérale de secret du vote. Les différences dans les solutions adoptées relèvent de la marge d'appréciation des cantons en matière de définition des causes de nullité du bulletin157.

La question du moment du décryptage de l'urne électronique a été traitée sous l'angle du secret du vote. Ce dernier protège également contre toute révélation anticipée des résultats du scrutin, même partiels, du vote158 qui pourrait conduire à une mobilisation de dernière minute dans le but d'influencer l'issue du scrutin.

Lorsqu'il donne son autorisation, le Conseil fédéral détermine également le moment à partir duquel l'urne peut être décryptée et rappelle que toute divulgation de résultats, mêmes partiels, avant midi le dimanche de scrutin est interdite. Les cantons quant à eux connaissent le dépouillement anticipé notamment dans le cadre du vote par correspondance (dépouillement manuel), ce qui leur permet de publier les résultats rapidement après la fermeture des urnes. Ils adoptent des mesures organisationnelles afin d'empêcher toute publication de résultat avant terme. Lors des dernières élections fédérales, certains cantons ont souhaité et obtenu la possibilité de décrypter l'urne électronique le samedi après-midi précédant le jour du scrutin, car dans le cas d'une élection, la procédure de décryptage dure plus longtemps que dans le cas des votations. Les communes ont ainsi pu recevoir les résultats à temps pour procéder aux consolidations
avec les autres canaux. L'OSCE/BIDDH, qui a observé les élections 2011159, a conclu que cette pratique implique un risque de divulgation anticipée du résultat et que, dans l'optique de la protection du secret du vote, l'urne électronique devrait être décryptée au tout dernier moment possible, c'est-à-dire au moment du début du dépouillement160.Cette question va être traitée dans la deuxième partie du rapport161.

L'introduction de la réinscription facilitée pour les Suisses de l'étranger162 et la mise en place de permanences help-desks pendant la durée du vote électronique ont également suscité des réflexions en lien avec le secret du vote. Le Tribunal fédéral et la doctrine soutiennent que la publication des noms des citoyens n'ayant pas voté n'est pas admissible, le secret du vote restant garanti après le scrutin163. Cela étant, 157 158 159 160

Cf. art. 12, al. 2 et 3, 38, al. 4 et 5, et 49, al. 2 et 3, LDP.

Cf. art. 7, al. 4, LDP.

Cf. ch. 1.8.1 et ch. 9.

«A greater measure of security would be achieved if electronic ballot boxes were not decrypted until the start of the vote count.» (annexe 4).

161 Cf. ch. 12.1.4.

162 Cf. ch. 11.4.1.

163 Piermarco Zen-Ruffinen, L'expression fidèle et sûre de la volonté du corps électoral, in: Daniel Thürer/Jean-François Aubert/Jörg Paul Müller (éd.), Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, § 21, no 37.

4587

la nécessité de vérifier la régularité du scrutin peut entraîner certaines restrictions du secret du vote164. La protection du secret est dès lors assurée par la non-publication des listes de votants/non-votants mais n'entraîne pas la non-connaissance de ce fait par les autorités. D'ailleurs ceci serait impensable dans les cantons qui connaissent l'obligation de voter et qui verbalisent les électeurs n'ayant pas voté (SH). Dès lors les permanences doivent être autorisées à avoir accès à la base de données d'utilisation du droit de vote, voire à rétablir le lien entre l'identité de l'électeur et son numéro d'électeur afin de répondre à des questions telles que: est-ce que mon vote par Internet a été enregistré?

La question se pose en termes similaires en matière de résultats. Le vote électronique étant limité aux Suisses de l'étranger dans la plupart des cantons et le nombres des Suisses de l'étranger dans certaines petites communes étant très restreint, le Conseil fédéral interdit la publication séparée des résultats du vote électronique au niveau communal au motif qu'elle pourrait constituer une violation du secret du vote. Par analogie avec le raisonnement sur la (non-)participation au vote, la connaissance par les autorités des résultats du canal de vote électronique n'est quant à elle pas interdite ­ elle est d'ailleurs nécessaire lorsque le résultat du scrutin est établi au niveau communal avant d'être consolidé à l'échelle cantonale.

Conformément à la procédure prévue par la Feuille de route du vote électronique, un groupe de travail technique composé de représentants de la Confédération et des cantons a été chargé en 2011/2012 de déterminer les normes de sécurité minimales applicables à l'extension du vote électronique. Ses travaux ont démontré que certaines mesures organisationnelles assurant la protection du secret du vote peuvent désormais être complétées par des méthodes de cryptage165.

4.2

Protection contre les manipulations

La Commission des institutions politiques du Conseil national recommandait en 2006 que le vote électronique soit aussi sûr que le vote par correspondance. Cette comparaison est souvent faite lorsqu'il s'agit d'évaluer la sécurité du canal. Elle a cependant ses limites: il est communément admis qu'une éventuelle fraude dans le contexte du vote par correspondance sera limitée alors qu'une éventuelle fraude dans le vote par Internet peut affecter l'ensemble de l'urne électronique à cause de la centralisation du système.

En même temps, le traitement électronique des voix par un système fonctionnant correctement est considéré comme beaucoup plus sûr et fiable que le traitement manuel, notoirement imprécis et au sujet duquel la seule certitude qu'on puisse avoir semble être qu'en réitérant un dépouillement manuel on n'obtient pas deux fois le même résultat.

Une des constantes des droits politiques, également valable pour le vote électronique, est que la gestion des risques est premièrement une tâche cantonale. Lorsque deux cantons sont impliqués (canton hébergé et hébergeur par exemple), c'est le canton qui organise le vote électronique et présente la demande au Conseil fédéral qui assume le risque. Il le répercute en partie, par voie contractuelle, sur le canton 164 165

ATF 121 I 187.

Cf. ch. 12.1.1.

4588

qui gère le système. Il en va de même lorsque le système est géré par un privé. Mais le canton qui utilise le vote électronique sur son territoire est et reste responsable envers la Confédération.

Dans leur demande d'essai adressée au Conseil fédéral, les cantons exposent les moyens par lesquels leur système ferait face à toute une série de risques potentiels166. Il s'agit là, pour le moment, de déclarations dont la justesse est contrôlée au niveau cantonal seulement (au moyen d'audits, p. ex.). Les capacités de contrôle des instances fédérales sont limitées: la Chancellerie fédérale contrôle les aspects juridiques, les différentes procédures et effectue une évaluation prima facie des mesures techniques introduites par les cantons167. La Confédération n'a quant à elle plus mené d'audit depuis 2005. Au-delà d'un examen initial payé par la Confédération pour chaque système, l'organisation des audits est devenue une compétence cantonale. En revanche, des groupes d'accompagnement ont été chargés d'observer et d'évaluer les modifications des systèmes pour le compte de la Chancellerie fédérale168.

Il est communément admis que le risque zéro n'existe pas. Les bases juridiques en vigueur imposent toutefois l'exclusion de toute fraude ciblée ou systématique169. Ce principe s'inspire du vote traditionnel, qui tolère des irrégularités isolées mais permet d'identifier avec une forte probabilité les cas de fraude systématique. Le but, en fin de compte, est d'éviter d'avoir à réitérer un scrutin, dans le cas du vote électronique également.

Si malgré les mesures prises (architecture du système, utilisation de techniques cryptographiques actuelles, séparation logique et organisationnelle des parties sensibles du système, interventions sur autorisation et contrôlées, etc.), un problème est détecté (grâce notamment à la surveillance permanente du système), la tolérance zéro est appliquée, ce qui veut dire que tout problème, aussi minime soit-il, doit pouvoir être expliqué et la fraude exclue. A défaut, le résultat du vote électronique n'est pas pris en compte et les mesures nécessaires sont engagées. Il faut dans ce cas évaluer si les résultats du vote électronique sont susceptibles de modifier l'issue du scrutin, auquel cas il faudrait renouveler le scrutin, ce que le Conseil fédéral souhaite éviter à tout
prix. C'est la principale raison pour laquelle le vote électronique était jusqu'à présent soumis à des limitations rendant la fraude inintéressante170, en attendant des avancées techniques dans ce domaine. On estime que l'introduction de la vérifiabilité et la formalisation des contrôles permettront d'étendre, voire de généraliser le vote électronique sans pour autant accroître les risques171.

166 167 168 169 170 171

Cf. art. 27b ODP, qui prévoit que le canton doit apporter la preuve que l'essai est mené conformément aux prescriptions fédérales.

Au sujet de la procédure d'autorisation, cf. ch. 4.4.3.

Cf. ch. 4.4.2.

Art. 27d, al. 1, let. f, ODP.

10 % de l'électorat fédéral, 30 % de l'électorat cantonal.

Cf. ch. 12.1.1 et ch. 12.1.2

4589

4.3

Gestion des risques

Les risques techniques du vote par Internet sont largement évoqués dans la littérature scientifique172. Dans le cadre de la procédure d'autorisation par le Conseil fédéral du vote électronique lors de scrutins fédéraux, le canton doit démontrer comment lui-même et son système remplissent les exigences, notamment de protection contre les risques identifiés173. Si, malgré les mesures prises, le dommage se produit, les mesures à prendre et la communication sont définies en accord avec la Confédération174.

Dans son rapport sur les risques rédigé en 2011, la Chancellerie fédérale expose différents risques liés au vote électronique. Ces risques sont de trois ordres: ­

risques administratifs (exemple: dépôt d'une plainte contre les autorités par suite d'un incident);

­

risques techniques (exemple: modification de voix par un virus passée inaperçue);

­

risques politiques et publics (exemple: campagne de dénigrement en réaction à des informations contradictoires, confuses ou incomplètes).

Dans la deuxième version du rapport, publiée en 2012, la Chancellerie fédérale évalue les risques identifiés. Elle en conclut que ceux qui pèsent sur les systèmes actuels sont acceptables, compte tenu des plafonds en vigueur, mais que tout élargissement de l'électorat admis nécessite l'adoption de mesures de sécurité supplémentaires175.

Les cantons ont de leur coté également mené des analyses de risques176.

En ce qui concerne les différents paramètres du vote par Internet, on distingue les risques affectant: ­

la plate-forme client (ch. 4.3.1);

­

le canal de transmission (Internet) (ch. 4.3.2);

­

l'infrastructure du vote électronique (ch. 4.3.3).

En ce qui concerne l'origine des risques techniques, on fait une distinction entre le risque interne, qui concerne plus particulièrement l'infrastructure du vote électronique, et le risque externe, plus marqué pour la plate-forme client et le canal de transmission.

172

173

174 175 176

Cf. «Ein solches Szenario macht mir Angst» ­ Interview mit Prof. Anton Gunziger, Sonntag, 30.Mai 2010; Schryen, G et Rich, E., Security in Large-Scale Internet Elections: A Retroscpective Analysis of Elections in Estonia, The Netherlands and Switzerland, 2009.

En guise d'exemple, cf. annexe 6 «Beilage zum Gesuch des Kt. Zurich an den Bundesrat» du rapport «Evaluation der E-Voting Testphase im Kanton Zürich 2008­2011», http://data.rrb.zh.ch/appl/rrbzhch.nsf/0/C12574C2002FAA1FC1257942004EB439/$file/ Evaluation_E-Voting_Z%C3%BCrich.pdf.

Cf. ch. 1.4.3.

Cf. ch. 11.2.

Cf. www.geneve.ch/evoting/securite.asp («La sécurité du vote par Internet» ou les «11 commandements du vote par Internet») et Giampiero Beroggi/Peter Moser/Daniel Bierer, Evaluation der E-Voting Testphase im Kanton Zürich 2008­2011, p. 23 ss.

4590

4.3.1

Plate-forme client

L'ordinateur privé est considéré comme le talon d'Achille du vote électronique177. Il échappe au contrôle des autorités et on considère que la plupart des électeurs n'ont a priori pas les connaissances techniques nécessaires pour le sécuriser de manière adéquate.

La littérature scientifique propose un certain nombre de solutions178. La plupart sont malheureusement peu conviviales et difficiles à mettre en oeuvre de façon efficace.

Les solutions proposées dans le cadre de l'instauration de la vérifiabilité tiennent compte à la fois de ces problèmes179 et de l'acceptation publique.

La Chancellerie fédérale a par ailleurs commandé à l'EPF de Zurich un travail de recherche visant à explorer les réponses possibles au problème que présente la sécurité du poste privé, dans le but notamment d'améliorer encore la sécurité des systèmes. Les résultats sont attendus en 2013.

4.3.2

Canal de transmission (Internet)

Pour sécuriser la transmission d'informations confidentielles, on emploie couramment le standard SSL. C'est le cas des systèmes suisses de vote électronique. Or la fiabilité de SSL ne dépend pas uniquement des acteurs impliqués au moment du vote, mais aussi de la sécurité de la plate-forme client. Aussi les systèmes de vote électronique indiquent-ils aux utilisateurs qui viennent de voter un code qui confirme que leur bulletin virtuel a bien été déposé dans l'urne électronique. Cette précaution rend plus difficile encore l'exécution invisible de certains types d'attaques. Les solutions proposées dans le cadre de l'instauration de la vérifiabilité rendront visible pour le votant toute manipulation de sa voix pendant sa transmission (et sur la plate-forme client).

4.3.3

Infrastructure du vote électronique

Les infrastructures du vote électronique sont dotées de différents mécanismes de protection contre les agressions internes et externes. Par exemple, seuls les collaborateurs dûment autorisés ont accès aux centres de traitement des données et aux composants des systèmes. L'accès aux infrastructures des imprimeries est lui aussi contrôlé. La Chancellerie fédérale a même dressé un catalogue d'exigences pour protéger les données confidentielles traitées dans les imprimeries. Les cantons doivent lui prouver que ces exigences sont respectées.

177

Oppliger Rolf, Der Client als Achillesferse beim Remote Internet Voting, Vortrag am Swiss E-Voting Workshop, 5. Juni 2009, Münchenwiler, https://www.e-voting-cc.ch/ images/sevot09/slides/06_oppliger.pdf consulté le 26.08.2012.

178 Cf. Rolf Oppliger, E-Voting auf unsicheren Plattformen, DIGMA Zeitschrift für Datenrecht und Informationssicherheit, Zürich 2008. Eric Dubuis et al., Konzept und Implikationen eines verifizierbaren Vote Electronique Systems, Biel 2012 (www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > Rapports et études).

179 Cf. ch. 12.1.1.

4591

Il faut aussi protéger les centres de traitement des données contre les cyber-attaques.

Or pendant un scrutin, il est impossible de les déconnecter complètement d'Internet.

On met donc en oeuvre différents mécanismes tels que pare-feu, surveillance des accès et du trafic Internet, alarmes et cloisonnement des composants du vote électronique, afin d'éviter les attaques extérieures, ou du moins de les identifier à temps. La Confédération et les cantons ont par ailleurs élaboré des scénarios de crise à appliquer en cas de tentative d'agression.

Contre les agressions internes (actes de malveillance de la part du personnel, p. ex.), on emploie des mesures éprouvés telles que la répartition des responsabilités, et donc des informations sensibles et des accès, le contrôle des accès et la consignation de toutes les opérations sensibles en termes de sécurité. Certaines des informations sensibles susceptibles de favoriser les abus sont conservées dans des systèmes partiels indépendants, voire en dehors de l'infrastructure du vote électronique. La multiplication des obstacles, jointe à la limitation actuelle du nombre de votants, a un effet dissuasif certain.

4.4

Contrôles externes

4.4.1

Exigences en matière de contrôle

Conformément à l'art. 27l, al. 2, ODP, avant sa mise en fonction ou en cas de modification, le système doit être contrôlé et sa conformité avec les exigences de l'ODP confirmée par une instance externe, approuvée par la Chancellerie fédérale. Il découle du sens de cette norme, sinon du texte, que cette instance doit avoir les compétences nécessaires pour mener un tel travail.

Après des audits ordonnés et payés par la Chancellerie fédérale dans les années 2004­2005, dans le cadre de la mise en fonctionnement des systèmes, la Confédération n'a en effet plus effectué de tels audits. Depuis 2006 ces contrôles relèvent plutôt de la compétence des cantons comme propriétaires des systèmes; ils sont assumés financièrement et pratiquement par eux. La question est réglée de manière sensiblement différente d'un canton à l'autre. Les législations cantonales couvrent à des degrés très différents la question des audits externes.

Le groupe de travail technique formé en 2011 a réexaminé la question des contrôles externes et défini des critères uniformes à leur sujet dans la perspective de l'extension du vote électronique. Ces critères sont présentés dans la deuxième partie du présent rapport180.

4.4.2

Groupes d'accompagnement

Les groupes d'accompagnement ont été mis en place pour chaque système dès l'origine. Composés de représentants d'autres cantons et de la Confédération essentiellement compétents dans les domaines des droits politiques et de la gestion de systèmes de vote électronique, ils assurent une sorte d'«examen par des pairs» lors de la conception d'un système et de ses modifications ultérieures.

180

Cf. ch. 12.1.2.

4592

Les groupes d'accompagnement fonctionnent actuellement en tant qu'instance externe reconnue par la Chancellerie fédérale, qui évalue les modifications de système. Mais faute des ressources nécessaires à un examen approfondi, leur contrôle n'équivaut pas à un audit externe au sens de l'art. 27l, al. 2, ODP. Il faudrait donc recourir en plus à des institutions spécialisées dans l'audit des systèmes informatiques.

Les groupes d'accompagnement se réunissent périodiquement sur demande de la Chancellerie fédérale, qui les coordonne et les dirige. La plupart du temps, ils prennent connaissance des modifications intervenues dans le système ou le projet concerné lors d'une réunion d'une journée. Ils obtiennent également, à condition de signer une convention de non-divulgation, la documentation nécessaire pour comprendre et évaluer la modification. Ils ont ensuite la possibilité de donner leur avis sur la base d'un rapport d'évaluation des modifications.

Le rapport final contenant les recommandations du groupe d'accompagnement est inclus dans le dossier de demande du canton au Conseil fédéral. La Chancellerie fédérale transmet les recommandations concernant le système. La recommandation de la Chancellerie fédérale quant à l'autorisation du Conseil fédéral s'appuie sur le rapport du groupe d'accompagnement. Quand la Chancellerie fédérale s'écarte de la recommandation du groupe d'accompagnement, elle doit le justifier dans sa proposition.

4.4.3

Procédure d'autorisation par le Conseil fédéral

Conformément à l'art. 8a LDP, le Conseil fédéral peut autoriser des essais de vote électronique en les limitant à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets pour minimiser les risques. Il doit déterminer les communes ou la partie de l'électorat pour lesquelles les résultats auront des effets juridiques liant les autorités181 et pour quels scrutins le vote électronique est autorisé182. Les conditions fixées dans l'ODP doivent toutes être remplies.

Les demandes d'autorisation établies par les cantons doivent notamment contenir une documentation technique détaillée. L'autorisation du Conseil fédéral est octroyée à chaque canton pour lui-même et non pas à un système pour tous les cantons hébergés par lui.

L'ODP prévoit des prescriptions techniques et juridiques qui doivent toutes être remplies pour que le Conseil fédéral puisse autoriser le vote électronique. Ces prescriptions comprennent les exigences de sécurité évoquées au ch. 4.3. En cas de modification du système, il faut s'assurer que la sécurité de celui-ci n'a pas baissé et que les prescriptions de l'ODP sont toujours respectées. Pour ce faire, le Conseil fédéral doit disposer d'informations détaillées et complètes sur la modification en question. S'ensuit une évaluation prima facie des modifications techniques par les experts de la Chancellerie fédérale et, selon l'ampleur des changements, du groupe d'accompagnement du système concerné, laquelle comprend une évaluation des procédures et de l'organisation. Pour le reste, la Chancellerie fédérale se contente de vérifier que les cantons répondent à toutes les questions, sans pouvoir vérifier la 181 182

Art. 27c, let. c, ODP.

Art. 27c, let. a, ODP.

4593

justesse de leurs déclarations. On considère donc que les déclarations de conformité sont des auto-déclarations dont le contrôle est effectué au niveau cantonal.

Une des difficultés actuelles consiste à reconnaître de manière univoque une modification de système. A partir de quel point une modification est-elle suffisamment importante pour justifier un contrôle externe comme l'exige l'art. 27l, al. 2, ODP? A l'heure actuelle, les cantons signalent régulièrement les modifications prévues et la Chancellerie fédérale décide au cas par cas s'il y a lieu de convoquer le groupe d'accompagnement. A l'avenir, il est prévu de formaliser la notion de modification de système et de soumettre les modifications importantes à un audit externe183.

4.4.4

Recommandations internationales

La question des contrôles externes est traitée dans les lignes directrices sur les contrôles et la certification184 du Conseil de l'Europe. Cet instrument se veut un complément à la recommandation (2004) 11 sur le vote électronique. Il se base sur les réflexions d'un groupe d'experts185 qui s'est réuni entre 2010 et 2011.

La définition suivante de la certification de systèmes a été retenue: ­

La certification d'un système informatique est faite par un organisme accrédité qui certifie que le système informatique en question respecte certaines exigences préalablement définies.

­

Le système informatique est testé pour savoir s'il remplit ces exigences. Les tests, ou l'évaluation du système sont effectués par des instances compétentes: l'organisme accrédité ou (mieux) un sous-traitant reconnu par l'organisme accrédité et sous la surveillance de ce dernier.

­

A l'issue du processus d'évaluation et sur la base des rapports d'évaluation, l'organisme de certification certifie que le système en question remplit les conditions préalablement définies.

­

La certification doit être renouvelée à chaque changement de système.

Cette définition de la certification paraît conforme au système suisse d'accréditation des organismes d'évaluation de la conformité, d'enregistrement et d'homologation qui procèdent à des essais ou à des évaluations de la conformité de produits ou qui

183 184 185

Ch. 12.1.2.

Cf. ch. 1.8.1.

Voir en particulier les travaux de Melanie Volkamer et al., Elektronische Wahlen: Verifizierung vs. Zertifizierung (www-users.rwth-aachen.de/guido.schryen/publications/ Volkamer et al ­ GI 2009 ­ Elektronische Wahlen.pdf): «Das Zertifikat enthält das Merkmal zur eindeutigen Identifikation des Systems, die Anforderungen gegen die geprüft wurde, das Vertrauens- bzw. Angreifermodell auf dessen Basis evaluiert wurde und die Prüftiefe (d.h. wie umfangreich geprüft wurde ­ angefangen mit einer High-Level Sichtung der Architektur über verschiedene Tests, einer Source Code Analyse bis hin zu einem formalen Beweis, dass das System, die geforderten Eigenschaften erfüllt). Das Zertifikat gilt genau für diese Zusammensetzung. Mit der erfolgreichen Zertifizierung weist der Hersteller eines IT-Systems nach, dass sein Produkt die erforderlichen Sicherheitsanforderungen erfüllt. Das Produkt wird damit für den Benutzer vertrauenswürdig, da er weiß, dass es von einer qualifizierten und unabhängigen Stelle überprüft und für sicher befunden wurde. Idealerweise wird die Evaluation und die Zertifizierung von zwei unterschiedlichen und unabhängigen Instanzen durchgeführt.»

4594

exercent des activités analogues à l'égard de personnes, de services ou en matière de procédures186.

L'approche genevoise visant à reprendre la norme ISO 27001 en matière de sécurité technique et organisationnelle du vote par Internet a été présentée au groupe d'experts du Conseil de l'Europe.

La question de savoir si le Conseil de l'Europe pourrait devenir instance de certification, offrant ainsi aux fournisseurs de systèmes la possibilité d'obtenir une (seule) certification de conformité aux exigences de la recommandation (2004) 11, a été posée mais pas résolue.

Le groupe de travail technique a défini, on l'a vu, des exigences en matière de contrôle externe dans la perspective de l'extension du vote électronique. Ces exigences tiennent compte du système suisse de l'accréditation tout en garantissant une certification au sens de la définition ci-dessus.

5

Fiabilité, transparence et observabilité du vote électronique

L'expérience montre qu'en matière de vote électronique, la confiance et la transparence (y compris l'observabilité du vote) sont étroitement liées. Le public, du moins en Suisse, dans sa grande majorité fait totalement confiance aux autorités responsables des votations et des élections, indépendamment du canal de vote. Il n'en demeure pas moins que les sceptiques et les esprits critiques accordent une grande importance à la transparence: la possibilité d'accéder au code source des applications ou la publication de celui-ci, la publication des rapports d'audit ou encore la possibilité d'observer le paramétrage des urnes, le fonctionnement du système ou le dépouillement des votes sont autant de facteurs qui déterminent le degré de confiance que ces électeurs accordent aux systèmes.

5.1

Rôle de la confiance

La confiance occupe une place importante dans le fonctionnement des droits politiques en Suisse. La confiance est bidirectionnelle: les autorités font confiance aux électeurs lors de du vote et les électeurs font confiance aux autorités pour ce qui concerne l'organisation des scrutins. Les deux rapports de l'OSCE/BIDDH sur l'évaluation des élections fédérales de 2007 et de 2011 soulignent ce fait.

Le principe de confiance s'applique également dans le vote électronique, comme le constate également le rapport de l'OSCE187. Cela peut expliquer le fait que la remise en question du nouveau canal en Suisse est un phénomène marginal (la plupart des critiques émanent de spécialistes de l'informatique). En même temps, en cas de problème technique, les dommages sont potentiellement considérables, surtout pour ce qui est de la confiance.

186 187

Ordonnance du 17 juin 1996 sur l'accréditation et la désignation (RS 946.512).

Cf. ch. 1.8.1, ch. 9 et annexe 4.

4595

De l'avis du Conseil fédéral et des cantons concernés, le succès du vote électronique notamment auprès des Suisses de l'étranger, la satisfaction qu'enregistrent les permanences, l'écho positif dans la presse, la motivation des communes à introduire le vote électronique et les critiques assez rares montrent que le nouveau canal jouit d'une grande confiance dans le public.

Exemples: Le canton de Lucerne a observé que les électeurs suisses de l'étranger placent une confiance élevée dans le vote électronique. On peut le déduire du fait que, lors des votations menées à ce jour, environ 45 % des participants, soit une part importante de l'électorat, ont fait usage du vote électronique. Les questions adressées au service d'assistance étaient au nombre de dix environ par votation et étaient majoritairement de nature technique.

Le canton de Schaffhouse constate que la possibilité de voter par voie électronique suscite une large adhésion. Le public et les électeurs font confiance à la solution informatique et croient au traitement correct des suffrages. A ce jour, aucun électeur n'a émis de doutes quant à la justesse des suffrages.

5.2

Exigences de transparence

Pour générer et préserver la confiance dans le nouveau canal de vote, il faut pour le moins garantir la plus grande transparence possible.

La législation fédérale sur les droits politiques ne contient pas de règles sur la transparence de la documentation et des procédures du vote électronique. Ces aspects sont réglés dans le droit cantonal.

La loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans)188 s'applique à tous les documents en possession de la Confédération. En ce qui concerne les documents établis par les cantons et les systèmes, la Chancellerie fédérale ne peut pas se permettre de publier de tels documents sans l'accord des cantons, car cela risquerait de compromettre les relations entre la Confédération et les cantons ou les relations entre cantons189. D'autres motifs peuvent s'opposer à la publication de documents relatifs au vote électronique190. Il faut les examiner au cas par cas.

Les cantons connaissent également des normes sur la transparence de l'activité des autorités en général. Dans un canton, la loi sur l'exécution des droits politiques prévoit que la législation cantonale sur la transparence ne s'applique pas à certains documents sensibles concernant la sécurité du système et son code source; une consultation limitée du code source est néanmoins prévue191. Les autres cantons, qui connaissent le principe de la transparence, n'ont pas adopté de dispositions spécifiques mais des pratiques similaires qui excluent la publication des informations sensibles concernant la sécurité des systèmes.

La Chancellerie fédérale a élaboré un guide sur la transparence du vote électronique, approuvé par le groupe de travail fédéral sur le vote électronique en mai 2012.

L'objectif est d'arriver à une unité de doctrine et d'assurer une plus grande transpa188 189 190 191

Cf. ch. 1.4.1.

Art. 7, let. e, LTrans.

Art. 7 LTrans.

Il s'agit du canton de Genève (cf. art. 60, al. 6 à 8, LEDP).

4596

rence en publiant un maximum de documents. Les cantons envisagent à leur tour d'accroître la transparence.

La question de la consultation du code source fait régulièrement débat. Elle est gérée différemment selon le système. Le traitement du code source dépend des liens contractuels et des bases juridiques du canton, ce qui rend difficile toute unification dans ce domaine. Mais là aussi, l'objectif à moyen ou à long terme, selon la feuille de route dressée en commun par la Confédération et les cantons, est de parvenir à une transparence maximale sans enfreindre de dispositions juridiques ni contractuelles. Dans le cas du système genevois, qui est totalement géré par le canton, tout électeur d'un canton utilisant le système peut, en dehors de tout intérêt commercial, consulter le code source à l'autorité compétente après avoir signé une clause de confidentialité. Avec les systèmes zurichois et neuchâtelois, qui impliquent des entreprises privées, la question est plus complexe. En revanche, les cantons révèlent leur code source aux observateurs électoraux internationaux, tels ceux de l'OSCE en 2011, à leur demande et contre l'engagement de respecter la clause de confidentialité.

5.3

Exigences d'observation

Les experts externes ne peuvent observer les systèmes qu'à condition que ceux-ci soient transparents. La question de l'observation est par conséquent étroitement liée à celle de la transparence.

L'observation, qu'elle soit partisane ou non partisane, interne ou internationale, n'est pas explicitement prévue en droit fédéral mais elle n'est pas non plus exclue192.

Selon l'art. 27g, al. 3, ODP par exemple, toute intervention sur le système ou sur l'un de ses composants pendant l'ouverture de l'urne électronique doit être effectuée par au moins deux personnes, faire l'objet d'un procès-verbal et pouvoir être contrôlée par des représentants de l'autorité compétente.

L'observation partisane, c'est-à-dire la présence des observateurs des partis, est la plupart du temps réglée en droit cantonal, voire communal.

Dans une étude réalisée en 2001 sur demande de la Chancellerie d'Etat de Genève et portant sur la légitimité du vote par Internet193, Andreas Auer et Nicolas von Arx arrivent à la conclusion suivante: «Pour compenser l'absence de contrôle direct des citoyens et des partis sur le décompte et la constatation officielle du résultat, il conviendrait de prévoir l'accès le plus large possible d'experts aux sources même du système d'exploitation. Ces experts ne devraient pas seulement être mandatés par l'Etat ou commandités par l'entreprise elle-même mandatée, mais être à disposition des principaux partis politiques, voire des milieux scientifiques indépendants. Le juge aussi, saisi sur recours d'un citoyen, doit impérativement avoir accès aux bulletins électroniques et être en mesure de contrôler, 192

Dans sa réponse à l'interpellation Hearing du 16 décembre 2005 (05.3875 «Observation des élections en Suisse»), le Conseil fédéral dit: «La législation fédérale ne contient aucune disposition qui exclurait la participation d'observateurs étrangers aux scrutins suisses.» 193 Andreas Auer/Nicolas von Arx, «La légitimité des procédures de vote: les défis du e-voting», Genève 2001 (www.geneve.ch/evoting/doc/rapports/legitimite_e-vote.pdf).

4597

au besoin par le biais de ses propres experts, le fonctionnement régulier du mécanisme [...]».

L'observation du vote électronique appelle notamment les questions suivantes: comment observer les systèmes, quels aspects observer, comment évaluer les réponses et comment déterminer le benchmarking technique?

Les recommandations internationales194 esquissent des réponses. La recommandation (2004) 11 ne mentionne pas explicitement l'observation mais place l'idée centrale de l'observation ­ la transparence comme moyen de contrôle de l'intégrité de l'élection ­ au centre du vote électronique195. Une transparence maximale est l'objectif à atteindre. En ce qui concerne l'observation internationale, l'OSCE explique que, si elle était historiquement focalisée sur les pays en transition, elle est de plus en plus fréquente dans les démocraties établies, et plus particulièrement dans les pays membres du Conseil de l'Europe et de l'OSCE. Cela prouve que les normes et les engagements en matière électorale s'appliquent de manière égale dans tous les pays. Nonobstant les mécanismes de contrôle des élections mis en place par l'Etat lui-même, l'observation sérieuse des élections donne la possibilité de vérifier de manière indépendante que les autorités en général et les autorités électorales en particulier respectent la loi ou les normes internationales, et que leurs affirmations sont vraies. L'observation des élections est dès lors une application pratique du principe de transparence tel qu'il est prévu dans la conduite des élections démocratiques.

5.4

Mesures liées à la transparence et à l'observation

5.4.1

Protection des données

L'ODP196 introduit des exigences minimum en matière d'échange de données (registres, résultats) entre les cantons hébergés et le canton hébergeur. Les données doivent être cryptées et signées selon les exigences de la signature électronique qualifiée prévues dans la loi du 19 décembre 2003 sur la signature électronique197.

Il est nécessaire de préciser ces exigences également par rapport aux échanges des données avec les entreprises privées. Dans la pratique il s'agit essentiellement des gestionnaires de systèmes privés et des imprimeurs.

Les législations de la Confédération et des cantons sur la protection des données sont déterminantes par ailleurs198.

194

195

196 197 198

Cf. notamment le manuel de l'OSCE/BIDDH sur l'observation des élections, les différents rapports d'observation du vote par Internet (mentionnés à la ch. 1.8.1) et le guide sur l'observation que le Conseil de l'Europe a établi en collaboration avec l'OSCE et un groupe d'experts nationaux ­ workshop Oslo, mars 2010.

«those e-voting systems which are secure, reliable, efficient, technically robust, open to independent verification and easily accessible to voters will build the public confidence which is a pre-requisite for holding e-voting ...».

Art. 27kbis ODP.

RS 943.03.

Cf. ch. 1.4.1.

4598

5.4.2

Information des électeurs

L'information des électeurs a été introduite dès le début des projets et renforcée dans le cadre de l'extension du vote électronique aux Suisses de l'étranger199.

Initialement, les cantons joignaient une fiche d'information sur le vote électronique au matériel de vote envoyé aux électeurs pour chaque votation. Depuis quelque temps, ils publient ces informations sur leurs sites Internet. Elles portent sur l'organisation et le déroulement du vote électronique, sur ses spécificités et sur la manière d'en faire usage mais aussi sur ses risques et sur des problèmes susceptibles de se produire. Ces informations sont disponibles dans les trois langues officielles.

L'information des électeurs passe aussi par des communiqués de presse, des publications officielles (publications dans la Feuille fédérale, brochure «Vote électronique, un projet commun de la Confédération et des cantons» de la Chancellerie fédérale, etc.), des informations des cantons et des communes (aide-mémoire, p. ex.), et des services d'assistance dédiés au vote électronique.

Exemple: Le canton de Neuchâtel a mené une campagne active d'information sur le Guichet unique dans les centres commerciaux, les communes, les services qui offrent des prestations, les cinémas, la presse et sur le site de l'Etat. A Genève, la brochure officielle envoyée aux électeurs contient deux pages de mode d'emploi du vote électronique. Ces deux pages sont complétées par une Foire aux questions (FAQ) très complète, disponible en français, en allemand et en anglais sur le site Internet de l'Etat. Cette FAQ est accessible directement depuis le site de vote, en cliquant sur un lien. Par ailleurs, une permanence accessible par téléphone et par courriel fonctionne durant les scrutins. Il y a en moyenne un appel à la permanence pour 50 à 70 suffrages électroniques. La proportion varie fortement.200 La plupart des questions portent sinon sur le «s» contenu dans l'adresse du site de vote (https://www.evote-ch.ch), lequel est souvent oublié, et sur la commune d'origine qui est utilisée à Genève comme identifiant lors de la session de vote électronique. L'expérience a montré que l'ajout de nouvelles communes dans le groupe des municipalités autorisées à voter en ligne ne provoque pas d'augmentation du taux d'utilisation de la permanence.

Genève en tire la conclusion que le système est simple est largement compatible avec la plupart des configurations OS/navigateur utilisées par les électeurs.

5.4.3

Formation des collaborateurs

La formation des intervenants, c'est-à-dire le personnel (employés ou volontaires) qui s'occupe à un stade ou à un autre de vote électronique ou d'interfaces liées au vote électronique, est réglée de manière différente d'un canton à l'autre.

Dans le canton de Zurich et les cantons du consortium, l'entreprise générale a formé les responsables du vote électronique dans les cantons. Ces dernières ont instruit à leur tour les responsables des communes participant au vote électronique. Les responsables de projet instruisent et accompagnent également leurs propres collaborateurs. Il s'agit de personnes soumises au secret professionnel.

199 200

Cf. art. 27d, al. 3, ODP.

Selon que Microsoft, Apple ou Oracle (java) ont publié de nouvelles versions de leur système d'exploitation, de leur navigateur ou de java après que l'application de vote a été verrouillée pour un scrutin donné.

4599

A Neuchâtel, les intervenants sont des spécialistes techniques. L'ensemble des opérations de vote électronique sont réalisées par les administrateurs du système (service informatique) en présence de la commission électorale. Tous les collaborateurs autorisés à intervenir dans l'environnement du Guichet unique et du vote électronique sont assermentés conformément à l'arrêté du Conseil d'Etat du 13 octobre 2010201.

A Genève, une équipe de trois personnes rattachée à la Chancellerie d'Etat assure la bonne marche et le suivi de chaque opération. Elle assure la conduite du projet, valide les modifications apportées à la plate-forme «eVoting», maintient la cartographie des processus, analyse les nouveaux besoins et suit la mise en oeuvre des nouvelles mesures. Afin de garantir les suppléances et le transfert de connaissances pour assurer la continuité des activités, une formation continue interne est organisée et concerne tant l'équipe elle-même que des suppléants au sein du centre informatique ou de la chancellerie. L'équipe assure aussi la formation des cantons hébergés par le canton de Genève.

5.4.4

Rôle de la commission électorale

La commission électorale telle qu'elle existe dans deux cantons (Neuchâtel et Genève) a été identifiée comme une pratique exemplaire par la Confédération et les cantons dans la feuille de route de même que par les observateurs de l'OSCE dans leur rapport de janvier 2012.

Il s'agit d'une instance de supervision des opérations qui détient une partie des clés du système, a accès à la documentation sur le système et dispose de pouvoirs de contrôle étendus dans un canton202. La commission électorale permet une observation significative du vote par Internet.

Une de ses tâches est d'émettre des voix dans une urne de contrôle203, de consigner les résultats entrés et de les comparer à la fin du processus avec les résultats retrouvés dans l'urne. L'urne de contrôle n'est pas détectable en tant que telle. Une éventuelle modification des résultats dans l'urne de contrôle est un fort indice d'intrusion dans le système et de manipulation des résultats.

5.5

Vérification du résultat

L'ODP204 introduit l'exigence de rendre plausible le résultat en cas de problème.

Dans son rapport d'activité 2006­2007, le Préposé fédéral à la protection des données s'est intéressé à la question du «paper trail», soit la preuve par le vote papier, y compris dans le vote électronique. Force est de constater que le «paper trail» n'apporte strictement rien au vote par Internet. D'autres procédures de vérification des résultats ont dû être envisagées. Selon l'ODP les mesures suivantes devraient être introduites:

201 202 203 204

Cf. http://rsn.ne.ch/ajour/dati/f/pdf/15040.pdf.

Cf. ch. 1.7.2.

Cf. ch. 5.5.

Art. 27nbis ODP.

4600

­

l'urne de contrôle;

­

la comparaison avec les réponses des autres canaux (pourcentage oui ou non par canal);

­

la comparaison avec les fichiers log.

Ces mesures sont prévues par les trois systèmes.

Les cantons de Zurich, d'Argovie et de Genève recourent également à des méthodes statistiques afin de mener des «contrôles de plausibilité»205. Des bases de données assez complètes portant sur les résultats des cantons sur différents types de questions pendant une période relativement longue permettent de «prévoir» ou de «contrôler» les résultats sur un objet déterminé. Genève effectue depuis 2010 systématiquement de tels contrôles qui sont remis à la Commission électorale cantonale, et publie par ailleurs sur Internet un tableau des résultats par canal de vote au niveau cantonal.

Deux remarques s'imposent au sujet des méthodes statistiques: premièrement, malgré l'intérêt qu'elles présentent, elles ne sont pas utilisables actuellement pour le vote électronique car la base de données nécessaire pour une plausibilisation est insuffisante. Deuxièmement, les réponses obtenues grâces à des méthodes statistiques n'ont qu'une valeur indicative: aucun effet légal ne leur est reconnu. En fin de compte, la plausibilisation n'est pas un contrôle au sens strict du terme et ne remplace pas un éventuel recomptage.

Le recomptage dans le vote électronique n'a pas la même importance que dans le dépouillement manuel, où les risques d'erreurs sont beaucoup plus importants. Un programme fonctionnant correctement donnera toujours le même résultat et sera confirmé par un deuxième programme fonctionnant également correctement. Dès lors la vérification des résultats n'est plus tellement liée à la phase de dépouillement et aux éventuelles erreurs de décompte comme dans le vote papier, mais s'étend plutôt sur les précédents segments du vote électronique. Elle vise à avoir la confirmation que le vote n'a pas été modifié sur le poste privé, ni sur le canal de transmission, ni dans les serveurs du vote électronique.

Un deuxième décompte, y compris du vote électronique, est toujours possible. Si une irrégularité viciant le résultat général d'une opération électorale est constatée et reconnue fondée par le gouvernement cantonal, celui-ci doit en principe ordonner un nouveau scrutin dans le ou les arrondissements électoraux intéressés. A ce jour aucun recomptage n'a été nécessaire.

De nouvelles méthodes de vérifiabilité proposées dans la littérature scientifique permettent à
tout électeur ou à son représentant de s'assurer que le vote reçu et dépouillé est conforme à son choix. C'est pourquoi le besoin de plausibilité diminue.

La vérifiabilité sera évoquée dans la deuxième partie du rapport206.

205

P. ex. analyse des résultats selon la loi «de Benford» ou loi de répartition des nombres d'une série basée sur le premier chiffre, et modèle de régression binomial soit la comparaison entre le «comportement politique usuel» d'une commune et le résultat d'un vote.

206 Cf. ch. 12.1.1.

4601

6

Aspects financiers

6.1

Bases communes de calcul des coûts

En 2011, la Confédération et les cantons ont indiqué dans la Feuille de route du vote électronique que les coûts du développement et de l'exploitation des systèmes de vote électronique devaient être présentés de manière plus transparente. Il s'agit en premier lieu de poursuivre les deux objectifs ci-après: ­

il faut d'une part disposer de chiffres concrets quant aux coûts liés à l'introduction, à l'exploitation et au développement des systèmes de vote électronique,

­

ces chiffres devant d'autre part pouvoir être comparés, les cantons ont convenu d'utiliser les mêmes postes comptables.

En février 2011, la Confédération et les cantons sont parvenus à s'entendre sur une base de calcul commune pour déterminer les coûts du vote électronique207. Les cantons ont ensuite reporté leurs coûts de projet dans le tableau prévu à cet effet. La Chancellerie fédérale a analysé et résumé les données. Les résultats de cette analyse sont présentés de manière sommaire dans les paragraphes suivants.

Mais avant de présenter les coûts, plusieurs précisions s'imposent. Pour commencer, les postes relatifs à l'introduction du vote électronique et à l'exploitation des systèmes diffèrent parfois fortement d'un canton à l'autre, ce qui s'explique notamment par les raisons suivantes: ­

développement du système (en interne par l'administration, ou par une société externe),

­

exploitation du système (interne ou externalisée),

­

organisation du projet à l'échelon cantonal (structure autonome avec un responsable cantonal du projet ou intégration du vote électronique dans les structures existantes sans responsable spécifique),

­

procédures (présentation et fabrication de la carte d'électeur, p. ex.),

­

information des électeurs.

Il n'existe actuellement pas de données consolidées concernant les coûts des canaux de vote traditionnels. Or ce n'est qu'à condition de tenir compte de ces coûts qu'il sera possible de replacer ceux du vote électronique dans leur juste contexte et de les analyser.

Signalons aussi que les cantons décident en toute liberté des montants qu'ils souhaitent investir dans le projet. Les coûts du vote électronique varient en conséquence.

La Confédération émet uniquement des normes minimales à respecter par les cantons.

6.2

Coûts du vote électronique

De 2008 à 2012, les cantons à système propre ont, selon leurs propres dires, investi chacun quelque 2,5 millions de francs dans le développement des systèmes.

207

Cf. annexe 5.

4602

Les cantons qui, depuis 2009, ont introduit le vote électronique moyennant l'un des systèmes existants ont procédé à des investissements de l'ordre de 40 000 à 110 000 francs pour les licences, le matériel informatique et les logiciels nécessaires, ainsi que pour la participation au développement des systèmes. Les différences de montant s'expliquent avant tout par la répartition des coûts (réglée par voie contractuelle) entre les cantons membres du consortium et les cantons hébergés par le système genevois, qui dépend aussi du nombre d'électeurs de l'étranger d'un canton.

S'y ajoutent, dans certains cantons, les investissements nécessaires pour l'harmonisation et la centralisation des registres des électeurs ainsi que pour l'adaptation des interfaces nécessaires. Ces investissements ont été amortis par les cantons.

Aux coûts pour le matériel informatique et les logiciels s'ajoutent les frais d'exploitation annuels récurrents. Pour un nombre hypothétique de quatre scrutins par an, l'exploitation du vote électronique coûte entre 11 fr. 80 et 22 fr. 80 par électeur autorisé à voter. Les différences s'expliquent ici aussi par les facteurs susmentionnés.

6.3

Economies

Le vote électronique est un projet coûteux, du moins au cours de la phase initiale.

L'introduction du vote électronique amène cependant des avantages qualitatifs et quantitatifs, qui permettent de réaliser des économies à moyen ou à long terme.

Ainsi, les dépenses liées au contrôle des suffrages ainsi qu'à la réception et au dépouillement des suffrages donnés reculent, tandis que les frais de port pour les enveloppes-réponses du vote par correspondance, qui sont en partie pris en charge par les communes, tombent. Grâce au vote électronique, le dépouillement des suffrages prend nettement moins de temps. De même, les statistiques relatives aux résultats des scrutins peuvent être établies très rapidement. Cette possibilité est d'autant plus précieuse s'agissant des élections, où ces tâches sont effectuées manuellement et prennent beaucoup de temps.

Le vote électronique rend impossible l'envoi de bulletins nuls, et permet de mieux guider les électeurs au long du processus d'élection et de votation.

La démocratie directe a son prix, elle n'est pas gratuite. Cela vaut pour les trois canaux de vote. Le vote électronique doit être considéré comme un investissement dans l'intérêt des électeurs.

6.4

Soutien financier de la Confédération

La Confédération a participé aux coûts de développement des trois systèmes de vote électronique au début du projet208. Les cantons pilotes ont été soutenus jusqu'à hauteur de 80 % pour les coûts supplémentaires engendrés par les essais pilotes par rapport à des scrutins normaux. Il a également été convenu par contrat que les résultats des projets pilotes seraient mis à la disposition de tous les cantons intéressés à titre gracieux.

208

Cf. FF 2006 5266 ss.

4603

A la fin de l'année 2005, la Confédération avait, dans le cadre de ses obligations contractuelles, participé aux coûts de développement et aux dépenses liées aux projets pilotes cantonaux en rapport direct avec les essais pilotes à hauteur de 5,96 millions de francs209.

La Chancellerie fédérale a supporté au total les coûts suivants entre 2001 et 2005: Coûts

Montant (en francs suisses)

Participation aux coûts de développement des systèmes

5 960 000

Frais de personnel et frais pour les groupes de travail et de suivi

1 135 000

Versements faits en faveur de projets de tiers (p. ex. identifiant personnel, identité numérique)

277 700

Frais encourus en amont des essais pilotes

153 000

Frais pour des expertises de sécurité et pour les enquêtes réalisées dans le cadre du suivi scientifique Total

51 502 7 577 571

Entre 2006 et 2012, la Confédération n'a pas participé directement aux coûts de développement des systèmes de vote électronique ou à l'implantation du vote électronique dans d'autres cantons, mais elle a financé une équipe de projet chargée de coordonner les projets cantonaux. Elle a en outre pris en charge les coûts liés à la traduction des plates-formes de vote électronique et a financé différentes études dans le domaine du vote électronique. Enfin, elle a supporté les coûts liés à différents mandats de conseil et s'est chargée de la communication en rapport avec le vote électronique au plan national. Concrètement, les essais de vote électronique ont entraîné les coûts suivants pour la Confédération entre 2006 et 2012: Coûts

Montant (en francs suisses)

Frais de personnel

1 713 969

Etudes commandées, mandats (experts externes) et autres dépenses

620 404

Frais de traduction

200 000

Frais de communication Total

209

35 000 2 569 373

Canton de Genève: 1 410 000 francs; canton de Neuchâtel: 2 227 000 francs; canton de Zurich: 2 323 000 francs (FF 2006 5268).

4604

7

Evaluations des cantons

7.1

Zurich

Malgré une évaluation positive, des difficultés notamment en matière d'impression ou découlant de la décentralisation poussée à Zurich, ont incité le gouvernement à interrompre les essais et à lancer quelques chantiers (notamment la centralisation des registres électoraux) avant d'envisager d'élargir le vote électronique.

Dans son rapport de 2011, le gouvernement cantonal zurichois arrive à la conclusion que le vote électronique pendant la phase 2008­2011 n'a pas eu d'influence sur la participation au vote. Ceux qui ont fait usage du vote électronique étaient pour la plupart d'anciens votants par correspondance.

7.2

Neuchâtel

Etant donné la complexité du vote électronique, la solution neuchâteloise s'appuie sur les compétences et l'expérience d'une société externe, qui participe à de très nombreux projets dans le monde et notamment en Norvège où, pour la première fois, de nouveaux outils de transparence et de traçabilité ont été utilisés. Ceux-ci répondent aux critères préconisés pour les systèmes de deuxième génération210.

Le vote électronique étant ici conçu comme une prestation du Guichet unique, il ne sera pas possible d'atteindre 100 % des électeurs sans un déploiement généralisé d'un moyen d'authentification tel que la SuisseID. Neuchâtel souhaite néanmoins poursuivre le développement du vote électronique en intégrant la transparence et la vérifiabilité à moyen terme. Ces changements nécessitent des investissements très importants que Neuchâtel ne pourra pas assumer seul. Il faudra donc trouver une solution de financement.

7.3

Genève

La Chancellerie d'Etat genevoise a conduit en 2011/2012 une réflexion sur l'avenir de son système de vote électronique. Cette réflexion a débouché sur un rapport qui définit les principaux axes d'évolution du système lui-même, mais aussi de son environnement légal et social. Il s'agit notamment:

210

­

d'améliorer la transparence du système en le certifiant,

­

d'offrir des fonctions de vérifiabilité sur le plan tant individuel que collectif,

­

de pouvoir gérer plusieurs scrutins en parallèle, de supporter une charge plus importante et de pouvoir la répartir,

­

d'intégrer autant que possible l'ordinateur de l'électeur dans le périmètre sécurisé tout en étant compatible avec un maximum de configurations navigateurs/système d'exploitation,

­

d'améliorer la sécurité par une protection en profondeur, un contrôle de l'utilisation, des mesures anti-intrusion et anti-sabotage et une protection renforcée contre le risque d'attaques internes.

Cf. ch. 12.1.1.

4605

Au final, ce rapport énumère 34 mesures réparties selon les têtes de chapitre211, qui seront progressivement mises en oeuvre à Genève selon trois degrés de priorité. La vérifiabilité individuelle de même que l'extension au vote en ligne des contrôles aléatoires opérés sur le vote par correspondance figurent en première priorité, avec une certification ISO 9000 du système et la levée des restrictions sur l'accès au code source, qui n'est aujourd'hui ouvert qu'aux électeurs genevois.

Exemple d'évaluation des expériences d'hébergement par un canton sans système propre (Berne): Sur la base de l'arrêté du Conseil-exécutif bernois du 12 janvier 2011212, la Chancellerie d'Etat a procédé à un premier essai pilote de vote électronique à l'occasion de la votation cantonale du 15 mai 2011. Etaient admis à voter les électeurs de l'étranger des communes de Berne, de Bienne, de Bolligen, de Langenthal et de Muri. La possibilité de voter par correspondance ou à l'urne demeurait.

Sur les 3098 électeurs suisses de l'étranger des cinq communes pilotes, 2569 (soit 83 %) étaient autorisés à voter par voie électronique. 529 personnes n'ont pas pu voter par voie électronique en raison de directives du droit fédéral («clause de Wassenaar»).

La participation générale a atteint 28,2 % (200 843 électeurs sur 712 298 personnes autorisées à voter). La participation des personnes autorisées à utiliser le vote électronique dépassait ainsi de 2,7 points la participation générale.

Le taux d'utilisation de 61,9 % est un très bon résultat, même en comparaison avec d'autres applications de cyberadministration. Le taux d'utilisation de «TaxMe», une application fiscale en ligne du canton de Berne, n'était par exemple que de 29,4 % en 2010213.

Lors de l'essai pilote du 15 mai 2011, la Chancellerie d'Etat a procédé à une enquête auprès des Suisses de l'étranger des cinq communes pilotes. L'enquête portait sur les points suivants: ­ Evaluation et utilisation future du vote électronique ­ Compréhensibilité de la plate-forme de vote en ligne et du nouveau matériel de vote ­ Evaluation des prestations de la permanence L'enquête a produit les résultats suivants: ­ 98 % des électeurs qui ont voté par voie électronique se disent prêts à recourir à nouveau au vote électronique en lieu et place du vote par correspondance (89 %: toujours;
9 %: plutôt le vote électronique que le vote par correspondance) ­ 91 % de toutes les personnes interrogées sont d'avis que le vote électronique leur apporte un avantage en termes de participation aux élections et votations. 96 % des personnes qui ont voté par voie électronique sont de cet avis contre seulement 42 % des personnes qui ont voté par correspondance.

­ Pour 93 % de toutes les personnes interrogées, les avantages du vote électronique priment ceux du vote par correspondance. 98 % des personnes qui ont voté par voie électronique le pensent, contre 40 % des personnes qui ont voté par correspondance.

­ Le nouveau matériel de vote est jugé compréhensible, voire très compréhensible tant par les électeurs francophones que par les électeurs germanophones.

­ 86 % des personnes qui ont contacté la permanence ont reçu l'aide qu'elles attendaient.

211

«Transparence» (10 mesures), «Aspects légaux» (6), «Aspects formels» (8) et «Aspects fonctionnels» (10).

212 Décision du Conseil-exécutif bernois du 12 janvier 2011, ACE 0003/2011.

213 CD TaxMe: 26,5 %, autre CD: 14,0 %, papier 30,1 %.

4606

8

Evaluations scientifiques

8.1

Séminaires e-voting suisses

Depuis 2009, le Centre suisse de compétences e-voting214 et la Chancellerie fédérale ont organisé ensemble trois ateliers sur le vote électronique: ­

Le premier atelier, organisé en 2009, a mis l'accent sur la transparence des systèmes de vote électronique215.

­

Le deuxième atelier, organisé en 2010, a mis l'accent sur les aspects techniques des systèmes216.

­

Le troisième atelier, organisé en septembre 2012217, a porté sur les défis juridiques, politiques et techniques du projet. Il avait pour but de jeter des passerelles entre les différents acteurs impliqués dans l'introduction du vote électronique.

L'évaluation des ateliers a montré que ces manifestations avaient été appréciées de toutes les parties (milieux politiques, administration, scientifiques et experts).

8.2

Etude de la HESB

En février 2011, la Chancellerie fédérale a chargé la Haute école spécialisée bernoise (HESB) d'examiner la possibilité de réaliser un système de vote électronique vérifiable218 en vue des élections et des votations.

En août 2011, un groupe de chercheurs de la HESB a remis à la Chancellerie fédérale l'étude «Konzept und Implikationen eines verifizierbaren Vote électroniqueSystems» (Système de vote électronique vérifiable: projet et implications)219. La HESB a présenté un projet exhaustif de système de vote électronique sûr et vérifiable. Le projet s'articule autour d'un protocole de vote cryptographique conçu de manière à satisfaire aux exigences élevées en matière de sécurité et à permettre la vérifiabilité tout en préservant le secret du vote.

Le projet prévoit la publication de l'ensemble des données issues du processus de vote et de dépouillement. Le but est de permettre à tout un chacun de retracer les différentes étapes à des fins de vérification. Pour préserver le secret du vote, le système prévoit des personnes de confiance (institutions ou particuliers), dont la tâche consistera à assurer la confidentialité des données secrètes de telle sorte que les suffrages ne pourront être déchiffrés qu'au prix d'une collaboration active de toutes les personnes de confiance.

214 215 216 217 218 219

Voir https://www.e-voting-cc.ch/ Documentation relative à l'atelier organisé en 2009: https://www.e-voting-cc.ch > Workshops > Workshop 09 > Slides.

Documentation relative à l'atelier organisé en 2010: https://www.e-voting-cc.ch > Workshops > Workshop 10 > Slides.

Documentation relative à l'atelier organisé en 2012: https://www.e-voting-cc.ch > Workshops > Workshop 12 > Slides.

Cf. définition de la vérifiabilité au ch. 12.1.1.

www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > Rapports et études

4607

Selon le projet de la HESB, l'utilisation d'une plate-forme sûre constitue la condition sine qua non à l'introduction de la vérifiabilité. Or les plates-formes les plus fréquemment utilisées (ordinateurs personnels, téléphones multimédias, etc.) sont aussi les moins sûres. L'utilisation d'un appareil de vote fiable, au moyen duquel le suffrage sera donné, permettrait de résoudre ce problème. De l'avis de la HESB, la sécurité des élections et des votations s'en trouverait renforcée.

La Chancellerie fédérale a procédé à une évaluation des résultats de l'étude avant d'organiser une consultation des cantons qui participent aux essais de vote électronique en cours. Elle est parvenue aux conclusions suivantes: ­

Les propositions de la HESB s'inscrivent dans une perspective à long terme.

­

Pour diverses raisons, il n'est actuellement pas possible d'introduire un appareil de vote fiable à brève ou à moyenne échéance. D'une part, l'introduction d'un tel appareil pose de grands défis logistiques et organisationnels, notamment en termes de diffusion. D'autre part, l'acceptation de la population pour un tel appareil ne peut pas encore être considérée comme acquise.

­

L'étude est cependant utile pour le développement actuel du vote électronique: elle peut servir de référence lors de l'élaboration de nouveaux projets afférents à la mise en oeuvre de la vérifiabilité dans le cadre des systèmes existants220.

Les chercheurs de la HESB qui ont élaboré le projet ont aussi participé aux travaux du groupe de travail technique dirigé par la Chancellerie fédérale et qui a défini des propositions en vue du développement des systèmes actuels221. Il a ainsi été possible de garantir que le savoir qu'ils avaient acquis dans le cadre de l'étude entrerait dans l'élaboration des nouvelles normes de sécurité.

8.3

Autres études et évaluations

8.3.1

Recherche de l'EPFZ

Les plates-formes clients (qui sont globalement les ordinateurs des votants) se trouvent en dehors du domaine sur lequel les autorités peuvent exercer un contrôle. Ils sont actuellement le talon d'Achille du vote électronique. Il faut donc trouver des mécanismes qui permettent de sécuriser le vote, même si l'ordinateur employé est infesté par un maliciel. La littérature spécialisée propose depuis longtemps des solutions très sûres mais peu conviviales. C'est pourquoi la Chancellerie fédérale a commandé en 2009 à l'EPF de Zurich un travail de recherche visant à trouver des solutions applicables au problème de la faillibilité des plates-formes. Les résultats sont attendus pour la fin 2013.

Entre-temps, un groupe de travail technique créé par la Confédération et les cantons a défini la vérifiabilité comme une exigence de sécurité future222 qui, sans empêcher la manipulation des plates-formes, permet au moins de l'identifier. La Chancellerie fédérale espère que le travail de recherche commandé à l'EPF permettra d'aller plus loin, et notamment d'évaluer la mise en oeuvre concrète de la vérifiabilité. Elle 220 221 222

Cf. ch. 12.1.1.

Cf. ch. 12.1.

Cf. ch. 12.1.1.

4608

escompte également des solutions ou des propositions visant à résoudre le problème de la sécurité des plates-formes.

8.3.2

Etude «E-democracy in Switzerland»

En 2010, les chercheurs Urs Gasser, Jan Gerlach, Richard Stauber et James Thurman ont publié une étude sur la cyberdémocratie en Suisse223. Ils y décrivent et y évaluent les implications de l'utilisation d'Internet pour les processus démocratiques en Suisse.

Les auteurs sont d'avis que l'introduction d'Internet créera de nouvelles opportunités pour la démocratie directe.

8.3.3

Etude «Three Case Studies from Switzerland: E-Voting»

En 2009, les chercheurs Urs Gasser et Jan Gerlach ont publié, pour le compte de l'Université de Harvard, une étude de cas sur les expériences faites en Suisse avec le vote électronique224. L'étude porte sur les essais de vote électronique menés dans les cantons de Zurich et Genève.

Selon cette étude, l'introduction du vote électronique a des effets positifs sur la participation aux élections et aux votations et sur la qualité des suffrages, et elle aide à concrétiser les droits politiques.

L'étude évalue aussi les risques liés au vote électronique et constate que les inquiétudes quant à l'intégrité du processus d'élection et de votation en Suisse ne sont pas matérialisées. L'étude aborde également la question de la fracture numérique et de l'accès aux nouvelles technologies. Les auteurs de l'étude sont d'avis que le gouvernement devrait aussi se pencher sur ces questions.

8.3.4

Etude «Swiss Democracy on the web 2010»

Une équipe de chercheurs dirigée par Ana Maria Moreira a évalué les effets des nouvelles technologies et des nouveaux moyens de communication en ligne sur notre démocratie et ses institutions225. L'étude analyse d'une part l'évolution de notre société sous l'effet de la diffusion d'Internet et dresse d'autre part un état des lieux quant à la manière dont Internet est utilisé en Suisse et à l'étranger pour favoriser la participation politique. Elle analyse aussi l'introduction du vote électronique.

223

Gasser, Urs; Gerlach, Jan; Stauber, Richard; Thurman, James (2010). E-democracy in Switzerland. Practice and Perspectives, Dike, Zurich.

224 A télécharger sur http://cyber.law.harvard.edu/sites/cyber.law.harvard.edu/files/ Gerlach-Gasser_SwissCases_Evoting.pdf.

225 Maria Moreira Ana et al. (2010), étude Swiss Democracy on the web 2010, cahier IDHEAP 259/2010.

4609

9

Observation internationale

Les experts de l'OSCE/BIDDH ont observé les élections fédérales du 23 octobre 2011226. Dans leur rapport du 30 janvier 2012, ils constatent que la Suisse est une démocratie aux racines profondes et au fonctionnement bien rodé. Les spécificités cantonales et les différents niveaux (fédéral, cantonal, communal) de réglementation des droits politiques compliquent considérablement la tâche des observateurs externes.

Le vote électronique était ­ comme un des éléments nouveaux ­ au coeur des travaux des observateurs. Le rapport en témoigne: sur 23 recommandations, 13 concernent directement le nouveau canal de vote, et trois le concernent indirectement227.

9.1

Aspects positifs

Les experts de l'OSCE/BIDDH louent la Suisse pour son approche prudente du vote électronique et soulignent l'importance d'une introduction graduelle pour créer la confiance nécessaire en ce nouveau canal de vote.

Ils constatent que le vote électronique jouit d'un haut niveau d'acceptation dans la population, et que comme pour les autres canaux, les électeurs font hautement confiance aux autorités chargées de la gestion du nouveau canal.

L'OSCE/BIDDH note également que l'introduction du vote électronique répond à une revendication des Suisses de l'étranger et fait partie du train de mesures adopté pour mettre en oeuvre les recommandations émises par l'OSCE/BIDDH dans son rapport d'évaluation des élections fédérales de 2007.

L'organisation et les mesures (gestion de crise) prévues en cas de problème sont jugées exemplaires.

9.2

Aspects critiques

L'OSCE/BIDDH estime que certains aspects du vote électronique, notamment liés aux procédures de contrôle et au partage des responsabilités entre les différents acteurs impliqués, méritent d'être prévus ou précisés dans les bases juridiques.

Les capacités et les compétences cantonales, en particulier dans les cantons qui soustraitent une partie du vote électronique, méritent d'être renforcées.

Le rapport souligne la nécessité d'adopter une base légale sur l'observation non partisane, interne et internationale, y compris du canal vote électronique228. Il précise par ailleurs que l'OSCE/BIDDH n'a rencontré aucun problème ou difficulté d'accès.

Des améliorations procédurales et techniques doivent être envisagées.

226 227 228

Cf. ch. 1.8.1.

Ces recommandations se trouvent dans l'annexe 4.

Cette recommandation était également présente dans le rapport sur les élections de 2007.

4610

Une autre recommandation préconisant d'«institutionnaliser» l'échange de bonnes pratiques entre cantons a été suivie dès le début du projet Vote électronique, notamment au sein du groupe de travail Vote électronique dont la principale mission consiste, par des échanges réguliers, à identifier et à promouvoir les bonnes pratiques cantonales.

Il est à noter qu'une bonne partie des recommandations étaient déjà en cours de mise en oeuvre lorsque l'observation a eu lieu229.

229

Cf. les mesures contenues dans la Feuille de route du vote électronique discutée par la Conférence des chanceliers d'Etat au printemps 2011, www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > Aperçu.

4611

Partie II: Perspectives 10

Structure de la deuxième partie

La deuxième partie du présent rapport s'appuie sur l'évaluation des essais réalisés entre 2006 et 2012 (partie I) pour esquisser les perspectives qui s'offrent au vote électronique.

Elle s'attache à définir les conditions nécessaires au développement du vote électronique, et notamment la levée des restrictions en vigueur. Le ch. 11 expose les buts de ce développement avant de traiter plus en détail les aspects suivants: relèvement des plafonds (ch. 11.2), caractère volontaire de la mise en place (ch. 11.3), groupes cibles (ch. 11.4), structure du projet (ch. 11.5), remaniement des bases juridiques (ch. 11.6).

Le ch. 12 expose les bases techniques du développement de deux points de vue: la sécurité (ch. 12.1) et la fonctionnalité (ch. 12.2).

Le ch. 13 fait le point sur la nouvelle procédure de gestion des risques, qui reste à définir.

Le ch. 14 traite des procédures mises en place par les autorités pour développer le vote électronique selon les suggestions exposées dans les chapitres précédents. Il détaille les nouvelles procédures d'autorisation et de gestion des risques.

Le ch. 15 expose la stratégie de communication au sujet du vote électronique.

Le ch. 16 est consacré aux bases juridiques du vote électronique. Il expose les modifications à apporter à la LDP (ch. 16.1) et à l'ODP (ch. 16.2), les principes du futur règlement technique Vote électronique (ch. 16.3) et d'autres actes fédéraux (ch. 16.4) et cantonaux (ch. 16.5) se rapportant au sujet. Il fait aussi le point sur les normes internationales (non contraignantes) qui existent en la matière (ch. 16.6).

Le ch. 17 examine les conséquences financières des modifications proposées.

Le ch. 18 esquisse la suite des opérations.

11

Développement du vote électronique

11.1

Buts du développement

En 2007, l'Assemblée fédérale a chargé le Conseil fédéral de mettre en place progressivement le vote électronique, se fondant sur le deuxième rapport du Conseil fédéral sur le sujet, daté du 31 mai 2006, dans lequel il évaluait très favorablement les essais réalisés jusque-là dans les trois cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève. Le Conseil fédéral a délégué le mandat du Parlement à la Chancellerie fédérale, garante des droits politiques au niveau de la Confédération, qui s'est fixé en la matière trois objectifs: ­

4612

objectif à court terme: ouvrir le vote électronique à la majorité des électeurs suisses de l'étranger d'ici à 2012;

­

objectif à moyen terme: ouvrir le vote électronique à la grande majorité des électeurs suisses de l'étranger pour les élections du Conseil national de 2015;

­

objectif à long terme: ouvrir le troisième canal de vote à l'ensemble des électeurs.

Pour atteindre ces objectifs, la Chancellerie fédérale a élaboré en 2011 la Feuille de route du vote électronique, où sont définis les défis à relever dans cinq domaines, les mesures à prendre dans ce sens et l'échéancier correspondant230. Ce document a fait l'objet d'une concertation avec les cantons dans le cadre de la Conférence des chanceliers d'Etat. La Chancellerie fédérale et les cantons sont d'accord sur le fait que le relèvement ou la suppression des plafonds actuellement en vigueur implique nécessairement un renforcement de la sécurité des systèmes dits de première génération employés lors de la première phase d'essai. Priorité a donc été donnée à la définition de normes communes en matière de sécurité dans la perspective de l'extension du vote électronique. Les instances fédérales et cantonales responsables du vote électronique estimaient que la mise en place progressive du nouveau canal, qui a également fait ses preuves dans d'autres pays, devait être poursuivie selon le mot d'ordre «La sécurité prime la vitesse.» Les explications qui suivent vont précisément dans ce sens.

11.2

Relèvement des plafonds

En 2012, le groupe de travail technique réunissant des représentants de la Confédération et des cantons, des experts du secteur privé et des scientifiques a conclu que les systèmes actuels sont conformes aux exigences de sécurité définies dans l'ODP sous réserve que les plafonds en vigueur soient maintenus. Autrement dit, tout relèvement de ces plafonds implique la mise en oeuvre préalable des nouvelles mesures de sécurité définies précisément par le groupe de travail technique.

Le maintien en l'état des systèmes de première génération reste possible à condition de conserver le plafond de 30 % de l'électorat cantonal, en plus des Suisses de l'étranger.

Plusieurs cantons, prévoient d'étendre leur système à leurs électeurs résidant en Suisse (SO, SG et AG, p. ex.) ou d'impliquer dans leurs essais une part plus large de leur électorat résidant en Suisse (Genève et Neuchâtel). L'une et l'autre de ces démarches nécessitent un relèvement des plafonds en vigueur actuellement. Pour offrir aux cantons une souplesse maximale dans le développement du nouveau canal de vote, il est question de mettre à leur disposition plusieurs plafonds différents par système ou par canton, ce qui représente un véritable changement de paradigme par rapport à aujourd'hui, où les mêmes plafonds s'appliquent à tous.

230

Cf. ch. 2.1.1.

4613

11.2.1

Relèvement du plafond cantonal

Il est question de relever l'actuel plafond cantonal de 30 % (hors électeurs suisses de l'étranger) en deux fois, en fonction de l'avancement de la mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité (ch. 12.1.1): Mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité

Plafond (cantonal)

Statu quo

Pas de mise en oeuvre

30 % (plus électeurs suisses résidant à l'étranger)

1re étape

Mise en oeuvre partielle231

50 %

2e étape

Mise en oeuvre intégrale232

100 %

Il se peut qu'un canton, alors qu'il satisfait aux exigences posées, ne souhaite pas, pour des raisons politiques par exemple, utiliser la totalité du quota auquel il a droit.

Cela ne pose aucun problème. En revanche, la mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité (cf. ch. 12.1.1) permet l'intégration d'un électorat plus large, ce qui constitue un avantage certain. Les cantons pressés de généraliser le vote électronique auront ainsi la possibilité d'avancer sans être freinés par ceux qui mettront plus de temps à adopter les nouvelles normes de sécurité, et sans non plus exercer sur ceuxlà de contrainte particulière.

11.2.2

Relèvement du plafond fédéral

Le relèvement des plafonds cantonaux rend nécessaire celui du plafond fédéral, de 10 % actuellement. Là aussi, les deux étapes de mise en oeuvre des nouvelles normes de sécurité devront être respectées.

Dans un premier temps, la part des électeurs admis au vote électronique sera portée à 30 %. Le nombre total d'électeurs étant de 5,1 millions, cela signifie que dans les cantons proposant le vote électronique, ce canal sera accessible à guère plus de 1,5 million de personnes. Le faible niveau de ce plafond est délibéré et vise à minimiser les risques. En revanche, une fois les systèmes de deuxième génération instaurés, le nombre des électeurs admissibles ne sera plus limité.

Le tableau ci-dessous indique le relèvement du plafond fédéral en fonction de l'avancement du projet dans les cantons.

Plafond cantonal

Plafond fédéral

30 % (statu quo: le canton n'a pas encore mis en oeuvre les nouvelles normes de sécurité) ou 50 % (1re étape: le canton a mis en oeuvre une partie des nouvelles normes de sécurité)

30 %

100 % (2e étape: le canton a mis en oeuvre l'intégralité des nouvelles normes de sécurité)

illimité

231 232

Cf. ch. 12.1.1.

Cf. ch. 12.1.1.

4614

Le plafond fédéral ne sera supprimé que lorsque les innovations proposées ci-après auront fait leurs preuves.

11.3

Caractère volontaire de la mise en place

Conformément à la répartition des compétences en matière de droits politiques, les cantons sont libres d'adopter ou non le vote électronique, au moment qu'ils jugent opportun. Ils sont en effet responsables de l'organisation, de l'exécution et du financement des scrutins électoraux, y compris fédéraux. Le système spécifique de la Suisse veut que cette liberté de choix soit maintenue. Le Conseil fédéral l'a d'ailleurs confirmé dans sa réponse du 9 novembre 2011 à la motion Fässler «Introduction du vote électronique pour tous le Suisses de l'étranger d'ici à 2015» (11.3879). Cette motion entend contraindre par voie légale les cantons à donner à tous les électeurs suisses de l'étranger la possibilité de voter par voie électronique d'ici aux élections fédérales de 2015. Le Conseil fédéral estime que les pratiques actuelles en la matière, fondées sur le partenariat, ont fait leurs preuves: la collaboration entre la Chancellerie fédérale et les cantons d'une part et entre les cantons entre eux d'autre part fonctionne parfaitement bien. Compte tenu du fait que l'attitude des cantons vis-à-vis du vote électronique et leur degré d'avancement dans sa mise en place sont très variables, toute contrainte exercée par la Confédération dans ce domaine ferait voler en éclat ces mécanismes bien rodés. Sans compter que la liberté de choix des cantons en ce qui concerne le vote électronique est quasiment garantie par leurs spécificités en matière de droits politiques. La mise en place du troisième canal de vote est une procédure complexe, que chaque canton doit pouvoir exécuter à son rythme.

11.4

Groupes cibles

Trois groupes cibles présentant des besoins spécifiques et des degrés de priorité différents ont été définis dans la perspective de la mise en place du vote électronique: ­

électeurs suisses de l'étranger (ch. 11.4.1);

­

électeurs handicapés (de la vue) (ch. 11.4.2);

­

électeurs résidant en Suisse (ch. 11.4.3).

Les paragraphes qui suivent envisagent le développement du vote électronique en fonction des besoins de chacun de ces groupes cibles.

11.4.1

Electeurs suisses de l'étranger

Les électeurs suisses de l'étranger ont jusqu'à présent bénéficié d'un traitement prioritaire pour les raisons exposées dans la partie I233. Ainsi, depuis 2008, tous les cantons proposant le vote électronique ont impliqué leurs électeurs de l'étranger dans leurs essais. Les cantons n'ayant pas développé leur propre système ont même 233

Cf. ch. 2.2.

4615

limité le vote électronique à ce groupe cible-là, suivant en cela la stratégie nationale en matière de cyberadministration élaborée en 2007, dans laquelle le vote électronique est déclaré projet prioritaire234.

La Confédération recommande aux cantons qui souhaitent mettre en place le vote électronique d'axer eux aussi leurs premiers essais sur leurs électeurs de l'étranger, car non seulement c'est à eux que le nouveau canal profite le plus, mais ils constituent un groupe clairement délimité, idéal pour une phase de test. Cela permet d'expérimenter le système à petite échelle et de lui apporter les ajustements nécessaires avant de l'étendre à une part plus large de l'électorat. Les objectifs de la Confédération235 se concentrent d'ailleurs sur les électeurs suisses de l'étranger d'ici aux élections fédérales de 2015, ce qui correspond au mandat de la stratégie suisse en matière de cyberadministration236. La centralisation ou l'harmonisation des registres électoraux des électeurs suisses de l'étranger237, devenue obligatoire en 2009, a créé les conditions nécessaires.

Restriction aux pays signataires de l'arrangement de Wassenaar Comme nous l'expliquons dans la partie I238, le Conseil fédéral n'a pour l'instant permis d'inclure dans les essais de vote électronique que les Suisses de l'étranger domiciliés dans un pays de l'Union européenne ou dans un pays signataire de l'arrangement de Wassenaar239. Les autres sont donc exclus d'office, même si le canton dans lequel ils sont inscrits leur donne théoriquement accès au vote électronique. Cette restriction tient au fait que la transmission de données cryptées n'est pas autorisée dans tous les pays. Or s'il n'est pas question, pour des raisons politiques évidentes, d'établir une liste des pays desquels le vote électronique est autorisé ou interdit, du moins les pays signataires de l'arrangement de Wassenaar autorisent-ils expressément la cybertransmission de donnés cryptées.

Cette restriction a été régulièrement critiquée par les Suisses de l'étranger euxmêmes et par l'Organisation des Suisses de l'étranger (OSE), qui défend leurs intérêts. En effet, les pays non signataires de l'arrangement de Wassenaar présentent fréquemment l'inconvénient supplémentaire que leurs services postaux fonctionnent mal, ce qui rend quasiment impossible le vote par
correspondance des Suisses qui y sont établis. Dans ces conditions, faut-il maintenir cette restriction ou peut-on envisager des solutions de remplacement?

Les Suisses de l'étranger ont droit comme les autres au secret du vote, qu'ils s'expriment par voie électronique ou postale. En matière de vote électronique, c'est le cryptage des données qui garantit ce secret.

234

235 236 237 238 239

Cf. www.egovernment.ch/ > Mise en oeuvre > Catalogue des projets prioritaires.

L'objectif «vote électronique» (A 1.13) y est décrit de la façon suivante: «Outre le vote personnel, l'élection aux urnes et le vote par correspondance, il s'agit de fournir une possibilité de vote par des moyens électroniques. La première étape consisterait à permettre à tous les Suisses de l'étranger de voter par voie électronique (eVoting). Ces solutions constituent la base d'un élargissement de cette possibilité à l'ensemble du territoire et des citoyens.» Cf. ch. 2.1.

Cf. ch. 1.2.

Art. 5b LDPSA, cf. ch. 1.4.1.

Cf. ch. 1.4.4.

Arrangement de Wassenaar du 19 décembre 1995/12 mai 1996 sur le contrôle des exportations d'armes conventionnelles et de biens et technologies à double usage, cf. www.wassenaar.org.

4616

Dès lors qu'un électeur parvient à lancer la procédure de vote en saisissant les paramètres secrets de sa carte d'électeur, il a l'assurance que le procédé de cryptage est en place et qu'il fonctionne. C'est probablement le cas dans la plupart des pays, Wassenaar ou pas.

Il est à noter que le critère de Wassenaar n'est pas infaillible techniquement: les électeurs suisses établis dans un pays signataire peuvent très bien exprimer leur suffrage de n'importe quel autre pays du moment que l'accès à Internet n'y est pas limité. Par conséquent, pour protéger le secret de leur vote, les électeurs doivent systématiquement s'assurer que leur ordinateur est sûr et protégé.

Cela dit, si un problème de ce genre devait se poser, ses conséquences sur le résultat d'un scrutin ont toutes les chances d'être minimes car les Suisses établis dans un pays non signataire de l'arrangement de Wassenaar sont très peu nombreux, et de plus ils ne résident pas tous dans le même pays.

Toutes les raisons que nous venons d'énoncer justifient que l'on supprime la restriction aux pays signataires de l'arrangement de Wassenaar. Il convient par contre de sensibiliser les électeurs domiciliés dans un pays sensible (où l'utilisation de procédés de cryptage est impossible ou interdite, ou dans lequel le vote électronique doit être considéré comme hasardeux pour quelque raison que ce soit) aux risques attachés à l'expression de leur suffrage par Internet. Pour ce faire, les cantons devront à l'avenir joindre aux documents de vote une note d'information, qui sera également publiée sur leur site, exposant ces différents problèmes et leurs conséquences potentielles. C'est ensuite à l'électeur concerné qu'il appartiendra de décider de voter par voie électronique de son pays de résidence.

On obtiendra ainsi une égalité de traitement avec le vote par correspondance, qui est lui aussi autorisé de n'importe quel pays, que le secret de la correspondance y soit ou non respecté.

Réinscription électronique simplifiée Tout électeur suisse de l'étranger est tenu de s'inscrire à la représentation suisse de son lieu de résidence et de renouveler cette inscription tous les quatre ans s'il souhaite continuer de recevoir ses documents de vote. Par suite de l'initiative parlementaire 08.522 «Exercice actif des droits politiques facilité pour les
Suisses de l'étranger», la LDPSE a été adaptée, de sorte que l'exercice du droit de vote équivaudra à une réinscription automatique.

Le Parlement considère que cette réinscription automatique doit également pouvoir se faire en cas de vote électronique. Les cantons proposant ce canal ont donc soumis à la Chancellerie fédérale, qui les a trouvés satisfaisants, des concepts de mise en oeuvre de cette nouvelle exigence respectant strictement le secret du vote. Dès que la nouvelle disposition sera entrée en vigueur, les cantons à vote électronique proposeront la réinscription par voie électronique dans le délai requis (18 mois). L'entrée en vigueur de la modification de la loi sur les droits politiques n'est pas encore fixée, car elle est liée au sort de la future loi sur les Suisses de l'étranger240, qui devrait intégrer la LDPSE.

240

Initiative parlementaire Lombardi «Pour une loi sur les Suisses de l'étranger» (11.446) du 15 juin 2011.

4617

11.4.2

Electeurs handicapés (de la vue)

Le rapport 2006 du Conseil fédéral sur le vote électronique accordait le deuxième rang de priorité aux électeurs handicapés, et en particulier aux handicapés de la vue, qui devaient ainsi obtenir la possibilité inédite de voter sans aide extérieure, ce qui garantit le secret de leur vote. Le 1er janvier 2008 est ainsi entrée en vigueur une disposition selon laquelle la mise en oeuvre du vote électronique sur le plan technique doit tenir compte des besoins des électeurs handicapés, notamment de la vue, pour autant que cela ne porte atteinte ni à la sécurité ni au secret du vote241 de manière disproportionnée. A cet égard, il convient aussi de mentionner la loi du 13 décembre 2012 sur l'égalité pour les handicapés242, et plus particulièrement son art. 14, al. 2, qui prévoit que dans la mesure où les autorités offrent leurs prestations sur Internet, l'accès à ces prestations ne doit pas être rendu difficile aux handicapés de la vue.

Les cantons dotés de leur propre système de vote électronique ont d'ores et déjà mis en oeuvre différentes mesures, élaborées en partie en concertation avec les principaux intéressés et respectant les normes internationales, visant à faciliter l'accès des handicapés (de la vue) à leur système.

A ce stade du projet, le vote électronique n'est disponible que dans un nombre réduit de communes, ce qui fait que seule une part infime de la population concernée y a accès. Deux explications à cela: d'une part, contrairement aux Suisses de l'étranger, les électeurs handicapés (de la vue) ne figurent pas sur un registre électoral distinct et ne constituent donc pas un groupe clairement identifiable (ce qui pose d'ailleurs la question de savoir à partir de quand une personne est considérée comme handicapée et a par conséquent le droit de voter par voie électronique); d'autre part, les cantons sont tenus de respecter les plafonds en vigueur quant au nombre d'électeurs autorisés à voter par voie électronique sur le territoire suisse, or, contrairement là encore aux Suisses de l'étranger, les électeurs handicapés ne sont pas exonérés de ces plafonds.

Face à cette situation, les associations d'handicapés se sont faites plus insistantes ces derniers mois. Plusieurs d'entre elles ont sommé la Confédération de traiter selon leur ordre de priorité non seulement les électeurs suisses de
l'étranger, mais aussi les électeurs handicapés. A titre d'exemple, l'organisation «Egalité Handicap» a adressé en 2011 un courrier à la Chancellerie fédérale pour lui exposer ses revendications quant au développement des systèmes de vote électronique. En 2012, la fondation «Zugang für Alle» a testé la version de démonstration du système de Zurich et mis en ligne la vidéo de cette expérience.

Si les systèmes électroniques constituent d'ores et déjà un avantage considérable pour les personnes affectées par un handicap moteur, puisqu'ils leur évitent d'avoir à se déplacer jusqu'à leur bureau de vote ou jusqu'à la poste pour déposer leur bulletin, il reste quelques obstacles techniques à surmonter avant de pouvoir considérer ces systèmes comme totalement compatibles avec un handicap visuel243. Les cantons sont conscients du problème et cherchent les moyens de le résoudre. Le Conseil fédéral prend lui aussi très au sérieux les revendications des associations d'handicapés. Dans la perspective de l'adaptation des bases juridiques du vote électronique 241 242 243

Art. 27ebis ODP.

RS 151.3 Cf. ch. 3.2.

4618

et de la mise en oeuvre des nouvelles exigences posées aux systèmes, la Chancellerie fédérale a créé un groupe de travail composé de représentants de la Confédération, des cantons et des groupes d'intérêts, en le chargeant de faire le point sur les principaux aspects techniques et politiques du problème. Le groupe s'est réuni une première fois en janvier 2013 pour définir son mandat et ses objectifs.

Le Conseil fédéral espère que la procédure adoptée permettra l'établissement d'un dialogue régulier et d'une collaboration renforcée avec les personnes concernées, y compris à l'échelon de la Confédération. Tout doit être fait pour que le développement des dispositifs vers les systèmes de deuxième génération tienne compte le mieux possible des besoins des électeurs handicapés (de la vue).

11.4.3

Electeurs suisses de l'intérieur

La phase d'essai en cours porte, comme nous l'avons vu, sur une partie de l'électorat plafonnée à 10 % à l'échelle fédérale et à 30 % à l'échelle cantonale. Les électeurs suisses de l'étranger, considérés comme prioritaires, ne sont pas concernés par le plafond cantonal.

Alors que les essais initiaux effectués dans les trois cantons de Zurich, de Neuchâtel et de Genève étaient focalisés sur les électeurs résidant en Suisse, les cantons qui ont adopté un des trois systèmes existants se sont concentrés sur les électeurs suisses de l'étranger, conformément à la stratégie de la Confédération.

A long terme toutefois, la Confédération comme les cantons visent l'extension du vote électronique à tous les électeurs suisses par un relèvement progressif des plafonds. Ils entendent en effet établir le vote électronique comme le troisième canal de vote officiel. Le caractère prioritaire des électeurs suisses de l'étranger ne vaut que pour la première phase du projet, dont les conclusions serviront à généraliser le système à l'électorat tout entier.

Plusieurs cantons prévoient d'élargir à moyen terme leurs essais à leurs électeurs résidant en Suisse, ou du moins à une part plus large d'entre eux. La Confédération y est résolument favorable. Cela suppose toutefois la mise en place préalable des systèmes de deuxième génération244, qui intègrent les normes de sécurité définies conjointement par la Confédération et les cantons. Conformément au principe du fédéralisme, le Confédération laisse les cantons libres d'établir leur feuille de route quant à la mise en oeuvre de ces normes et à l'intégration d'un électorat plus large.

11.5

Structure du projet

L'adoption de relations fondées sur le partenariat s'est révélée l'approche la plus constructive dans un Etat fédéral comme la Suisse, où les droits politiques revêtent des formes aussi variées. La collaboration entre la Confédération et les cantons dans le cadre des organes existants (comité de pilotage, groupe de suivi et groupe de travail Vote électronique) a fait ses preuves. De plus, le dialogue permanent qui s'est noué entre les partenaires impliqués dans le cadre de rencontres institutionnalisées garantit l'identification et la diffusion de pratiques exemplaires et la transmission 244

Cf. ch. 12.1.1.

4619

régulière d'informations importantes sur le projet. Cela correspond notamment à l'une des recommandations formulées par l'OSCE/BIDDH dans son rapport sur les élections de 2011245.

Les formes de collaboration, en partie nouvelles, entre cantons (hébergement et autres) et entre cantons et prestataires privés ont elles aussi été couronnées de succès246. Les cantons envisagent par conséquent de les maintenir, et dans ce domaine, la Confédération leur laisse clairement la bride sur le cou.

La restructuration du projet entamée en 2011 à la Chancellerie fédérale et l'accroissement des ressources affectées au vote électronique par la Confédération qui s'est ensuivi ayant porté leurs fruits, il n'est pas question pour l'heure de modifier les structures du projet, du moins à l'échelon de la Confédération.

La coopération internationale en matière de vote électronique fondée sur le concept développé par la Chancellerie fédérale247 a elle aussi très bien fonctionné et ne nécessite par conséquent aucun changement.

La question du nombre de systèmes a été posée à maintes reprises. Si l'adoption d'un système unique peut paraître souhaitable du point de vue financier, la coexistence de trois systèmes ne présente pas que des inconvénients. La Confédération n'entend donner aucune consigne à cet égard aux cantons, qui assurent seuls le financement du vote électronique. Le comité de pilotage Vote électronique, qui a planché sur le sujet, a constaté qu'à l'heure actuelle, les cantons ne souhaitent pas réduire le nombre de systèmes. Mais il n'exclut pas qu'ils finissent par l'envisager.

Ce qui est sûr par contre, c'est qu'en l'état actuel du droit et de la répartition des compétences, ni l'exploitation ni le financement d'un système propre de la Confédération ne sont à l'ordre du jour.

On peut d'ailleurs toujours envisager la mise en place de nouveaux systèmes ou de nouveaux modèles de collaboration, pour autant que les cantons le souhaitent et que les dispositions fédérales en matière de scrutins soient respectées.

11.6

Remaniement des bases juridiques

Comme on l'a vu dans la première partie du présent rapport, le vote électronique est régi, à l'échelon de la Confédération, par la LDP, qui autorise l'expérimentation du vote électronique, et par l'ODP, qui en fixe les conditions concrètes dans 19 articles.

Il est également évoqué dans d'autres actes.

Les dispositions en vigueur ont été élaborées alors que le vote électronique n'avait encore fait l'objet d'aucun essai en Suisse, ni à proprement parler dans le reste du monde, et donc d'aucun acte normatif sur lequel la Suisse eût pu s'appuyer. Les dispositions de l'ODP ont certes été légèrement adaptées au fur et à mesure de l'avancement du projet, mais aujourd'hui, dix ans après, un remaniement radical s'impose.

245 246 247

Cf. Annexe 4.

Cf. ch. 1.4.3.

www.bk.admin.ch > Thème > Vote électronique > International.

4620

Ce remaniement doit se faire en fonction de trois objectifs: ­

mise à jour des dispositions à la lumière des normes (internationales) développées depuis 2000 et des travaux scientifiques réalisés sur le vote électronique,

­

mise en pratique des leçons de plusieurs années d'expérience,

­

réévaluation du niveau normatif des dispositions actuelles.

De manière générale, il est temps de définir pour les systèmes de vote électronique des critères juridiques plus précis et plus modernes, de façon notamment à garantir le caractère professionnel et indépendant de leur contrôle. L'OSCE/BIDDH a précisément formulé des recommandations dans ce sens à l'issue de son observation des élections 2011 du Conseil national.

C'est délibérément qu'il a été décidé d'expérimenter le vote électronique dans des cantons pilotes, afin d'acquérir un début d'expérience pratique. Ces essais n'étaient pas encadrés par des règles trop strictes pour permettre le développement de solutions appropriées, qui puissent se généraliser ensuite sous la forme de pratiques exemplaires. Cette approche était totalement justifiée compte tenu des plafonds de 10 et 20 % (30 % depuis mai 2012). La démarche progressive et contrôlée adoptée par la Suisse a d'ailleurs été saluée à diverses reprises sur la scène internationale.

Dans la perspective d'un relèvement échelonné des plafonds jusqu'à leur suppression, il convient à présent de tirer les leçons de l'expérience acquise telle qu'elle est décrite dans le présent rapport pour les intégrer dans les bases juridiques. Un ajustement technique est lui aussi nécessaire pour faire évoluer les systèmes vers la deuxième génération248. En outre, certaines normes se sont révélées à l'usage trop restrictives ou trop laxistes, voire inapplicables.

Pour le remaniement des bases juridiques du vote électronique, il convient d'appliquer la démarche progressive qui a fait ses preuves jusqu'ici. Chaque canton devra toutefois avoir la possibilité, contrairement à l'usage en vigueur, d'appliquer par système ou par canton, le plafond correspondant à son état d'avancement249.

Les cantons qui ont participés aux essais ont eux-mêmes édicté des bases juridiques concernant le vote électronique. Il convient de préciser que les directives fédérales en la matière s'appliquent exclusivement aux scrutins fédéraux. Les scrutins cantonaux et communaux sont régis par des directives cantonales et communales, le cas échéant.

En plus des bases juridiques fédérales et cantonales, le vote électronique fait l'objet de normes internationales, à commencer par les recommandations et les directives du Conseil de l'Europe. L'OSCE/BIDDH a par ailleurs formulé 13 recommandations
à son sujet après avoir observé les élections 2011 du Conseil national, premières élections fédérales ayant donné lieu à des essais de vote électronique. Ces règles non contraignantes devront également être prises en compte dans la mesures du possible lors du remaniement des bases juridiques.

248 249

Cf. ch. 12.1.1.

Cf. ch. 11.2.1.

4621

12

Bases techniques

Le plafonnement de l'électorat admis à voter par Internet sert avant tout à minimiser les risques. Avant de relever les plafonds en place, il faut s'assurer que les risques identifiés restent acceptables. C'est pourquoi la feuille de route subordonne toute extension du vote électronique à la mise en oeuvre de mesures de sécurité élargies.

Le thème de la sécurité est traité au ch. 12.1.

Pour favoriser l'acceptation des systèmes de vote électronique par la population, il faut les doter de caractéristiques de fonctionnement appropriées. L'évolution de la fonctionnalité des systèmes de vote électronique est traitée au ch. 12.2.

12.1

Sécurité

Après en avoir débattu avec les cantons et des experts issus des milieux industriel et scientifique, le groupe de travail technique placé sous la direction de la Chancellerie fédérale a formulé des exigences concrètes visant à atteindre un niveau de sécurité suffisant au fur et à mesure de l'extension du vote électronique à 100 % de l'électorat suisse: en matière de sécurité d'abord (ch. 12.1.1) et de contrôle ensuite (ch. 12.1.2). Nous appellerons systèmes de deuxième génération ceux qui satisfont à ces exigences. L'extension se fera en deux étapes: d'abord 50 % de l'électorat, puis 100.

La ch. 12.1.3 traite la question de savoir s'il faut continuer de clore les urnes électroniques le samedi, veille d'un dimanche de scrutin.

La ch. 12.1.4 se penche sur le moment du décryptage de l'urne électronique. Certains cantons souhaitent pouvoir y procéder le samedi, veille du scrutin, par crainte de manquer de temps le dimanche.

12.1.1

Des exigences de sécurité communes focalisées sur la vérifiabilité

En matière de vote électronique, la sécurité prime la vitesse. Les méthodes de vérification évoquées ici reposent sur des techniques modernes et éprouvées, développées spécialement pour le vote électronique.

Les exigences de sécurité sont focalisées sur la vérifiabilité. C'est elle en effet qui permet d'identifier les dysfonctionnements dans le déroulement du vote quelle qu'en soit l'origine (erreur logicielle, erreur humaine ou tentative de manipulation intentionnelle), tout en préservant le secret du vote. Fondée sur des bases scientifiques et explicables au grand public par analogie avec les canaux de vote conventionnels, la vérifiabilité est un paramètre capital de la cohérence et de la fiabilité des scrutins et partant un facteur de confiance.

Les cantons doivent rester le plus libres possible quant au développement de leur système. Les caractéristiques de sécurité obéiront cependant aux meilleures normes et pratiques en vigueur. En matière de vérifiabilité, critère de sécurité capital, les exigences sont formulées de manière très concrète, à défaut d'une norme reconnue.

C'est le seul moyen d'assurer à cet égard une communication homogène et profita-

4622

ble. Il importe toutefois que les cantons soient le plus libre possible quant à la mise en oeuvre de la vérifiabilité (cf. ch. 12.1.1).

Une partie des exigences de sécurité définies en plus de la vérifiabilité reposent directement sur les mesures existantes en la matière, telles qu'elles sont déjà appliquées par les cantons ou par l'exploitant de leur système. Les autres sont reprises d'une norme internationale250 reconnue.

L'importance accordée à la vérifiabilité tient aux conséquences considérables qu'elle a sur l'évolution des systèmes de vote électronique existants (financement, organisation, logistique et confiance du public). En ce qui concerne la première étape de développement des systèmes de deuxième génération (résolution du «problème de la sécurité des plates-formes»251), on propose un modèle de vérifiabilité réduit (cf.

ch. 12.1.1).

Vérifiabilité et partie fiable d'un système Conformément aux exigences du Conseil fédéral et du Parlement, la sécurité des systèmes de vote électronique doit suivre les paramètres applicables au vote par correspondance. Ce canal n'est pas exempt d'imprécisions, mais il est difficile d'en falsifier significativement les résultats. Dans le cas du vote électronique, par contre, il est théoriquement possible de manipuler un grand nombre de voix, voire toutes. Il faut donc particulièrement veiller à éviter les abus systématiques.

La vérifiabilité permet d'identifier les manipulations systématiques à temps ­ en tout cas avant la publication des résultats du scrutin ­ avec une plausibilité suffisante et en préservant le secret du vote.

Elle s'est établie dans la littérature scientifique ces dernières années. Un système vérifiable a été utilisé en Norvège en 2011 lors d'élections politiques. Mais aucune définition à valeur universelle du terme n'a encore réussi à s'imposer.

Quels que soient les contrôles de sécurité employés, une chose est sûre: il faut que les électeurs aient fondamentalement confiance dans les différentes procédures du système de vote (notamment dans les instruments utilisés pour le contrôle). Nous appelons l'ensemble de ces procédures sensibles «partie fiable» d'un système de vote quel qu'il soit: à l'urne, par correspondance ou électronique. Sans cette partie, il ne peut pas y avoir vérifiabilité.

Dans le cas du vote électronique, la
partie fiable est réduite à des techniques sûres et notoires et à des procédures cohérentes et est clairement identifiable. C'est elle qui permet d'exclure définitivement toute manipulation à l'issue d'un contrôle positif.

Le contrôle repose notamment sur des données cryptographiques spéciales qui, jointes aux propriétés de sécurité de la partie fiable, permettent de plausibiliser le résultat d'un scrutin.

250 251

«Protection profile» du ministère allemand de la sécurité informatique.

On entend par plate-forme l'appareil utilisé par un électeur pour voter. Il s'agit généralement d'un ordinateur. Le «problème de la sécurité des plates-formes» est un terme couramment employé dans la littérature spécialisée pour décrire le fait qu'on ne peut pas partir du principe que les plates-formes des utilisateurs sont sûres.

4623

Exigences posées à la partie fiable d'un système Eléments à retenir: ­

Pour être ouvert à l'ensemble de l'électorat, un système doit être vérifiable.

­

La Confédération n'a émis aucune consigne de mise en oeuvre. Celle-ci relève des compétences et de la responsabilité des cantons. Cela dit, la Confédération, conformément à la recommandation du groupe de travail technique se prononce en faveur de consignes restrictives en ce qui concerne les caractéristiques de sécurité de la partie fiable. C'est le seul moyen de communiquer l'intérêt de la vérifiabilité d'une manière homogène et profitable.

Mais comment définir la «partie fiable»? Quelles conditions faut-il remplir pour générer la confiance? Il y a deux approches possibles: Opérer au niveau des électeurs La première approche consiste à placer la partie fiable chez les électeurs (côté clients). Les ordinateurs privés n'étant pas a priori dignes de confiance, il faut fournir aux électeurs un appareil spécial qui leur donne la certitude que leur voix sera respectée. La fiabilité de ces appareils pourra être vérifiée par des votes tests.

Inconvénient: cette solution est condamnée à moyen terme pour des raisons logistiques et financières.

Opérer au niveau des exploitants de système La seconde consiste à la placer chez les exploitants de système (côté serveur). Plusieurs «composants de contrôle» entrent en jeu ici, dont le nombre dépend de leurs caractéristiques techniques: ­

Supposons que les composants de contrôle soient des ordinateurs sans protection particulière. La vérifiabilité dépendra du bon fonctionnement d'au moins un composant de contrôle sur quatre. Autrement dit, si dans le pire des cas trois de ces ordinateurs sont défaillants par suite d'une erreur humaine ou d'une manipulation frauduleuse, le quatrième permettra toujours de constater une manipulation. Cela suppose en tout cas que ces composants de contrôle soient soumis à une surveillance spéciale pendant toute la durée du scrutin.

­

On peut envisager d'autres moyens techniques, comme les systèmes employés dans les secteurs hautement sécurisés des banques: les deux modules de sécurité matériel (hardware security modules, HSM) certifiés de différents fabricants permettent de réduire à deux le nombre des composants de contrôle. Ils doivent être configurés de manière à ce qu'au terme d'un scrutin, les vérificateurs puissent constater s'il y a eu des accès non autorisés de la part de collaborateurs.

Pour offrir une souplesse maximale, on peut répartir la partie fiable sur plusieurs groupes de composants de contrôle différents.

Intégrer l'imprimerie et la poste à la partie fiable Les exigences de sécurité permettent d'intégrer à la partie fiable la procédure d'impression, qui implique le traitement de données de sécurité confidentielles. La vérifiabilité dépend donc aussi de la fiabilité des données transmises aux électeurs par voie postale. La procédure d'impression est fiable en ce qu'elle est désormais 4624

observable et détachée de tout réseau informatique. Elle fait d'ailleurs l'objet d'un catalogue d'exigences distinct. Tout comme pour le vote par correspondance, la fiabilité de la poste est considérée comme acquise.

Organe vérificateur La littérature technique classe souvent la vérifiabilité en fonction des trois questions suivantes: ­

Le vote a-t-il été émis conformément à l'intention du votant («cast-asintended»)?

­

Le vote a-t-il été enregistré tel qu'il a été déposé («recorded-as-cast»)?

­

Le vote a-t-il été comptabilisé tel qu'il a été enregistré («counted-as-recorded»)?

Le vote a-t-il été émis conformément à l'intention du votant? («cast-as-intended») Le secret du vote implique que seul l'électeur concerné peut répondre à cette question. Le système vérifiable doit donc impérativement lui donner la possibilité ­ facultative ­ de procéder lui-même à la vérification. En supposant qu'un nombre suffisant de votants en useront, il sera possible de découvrir les manipulations systématiques.

Le vote a-t-il été enregistré tel qu'il a été déposé?(«recorded-as-cast») Le vote a-t-il été comptabilisé tel qu'il a été enregistré? («counted-as-recorded») La littérature spécialisée décrit souvent des systèmes où ce sont aussi les votants qui répondent à ces deux questions (surtout dans les cas où les procédures des bureaux de vote sont jugées peu fiables).

En Suisse, les autorités et les employés des bureaux de vote jouissant d'une confiance importante, ces deux vérifications peuvent être confiées à des tiers dignes de confiance (appelés vérificateurs). La désignation de ces tiers (commission électorale, observateurs électoraux ou volontaires, p. ex.) dépend des bases juridiques, du contexte politique et des besoins de la société. Les données nécessaires aux vérificateurs pour répondre aux questions 2 et 3 peuvent aussi être publiées si nécessaire. Le cas échéant, la décision en appartient au canton.

Vérifiabilité et secret du vote Vouloir instaurer la vérifiabilité tout en garantissant le secret du vote (jusqu'au dépouillement) peut paraître contradictoire à première vue. La pratique montre que ça ne l'est pas. L'une et l'autre dépendent du bon fonctionnement de la partie fiable252, ce qui implique que le décryptage n'est autorisé à aucun moment jusqu'au dépouillement (cryptage de bout en bout). Il y a toutefois une différence en ce qui concerne les éléments de la partie fiable: le respect du secret du vote dépend aussi de la fiabilité de la plate-forme client, qui appartient à la partie fiable, avec les composants de contrôle et les autres éléments évoqués ci-dessus. Les tentatives de violer le secret du vote sur la plate-forme client n'échoueront donc que si cette plate-forme est suffisamment protégée et indemne de toute attaque de maliciel.

252

Cf. ch. 12.1.1.

4625

Cette approche peut paraître surprenante étant donné que les ordinateurs courants des électeurs sont considérés comme non sûrs. On part toutefois du principe que les attaques systématiques, donc complexes, de plates-formes dans le but d'anticiper un résultat ou de déterminer qui a voté quoi sont peu probables. Dans ce domaine, il appartient à chaque électeur de juger si sa plate-forme est suffisamment fiable ou non. La non-falsification du vote individuel concerne par contre l'électorat tout entier; elle est donc plus complexe en termes de vérifiabilité.

Instauration progressive de la vérifiabilité Le passage de la première à la deuxième génération de systèmes de vote électronique (afin d'intégrer 100 % de l'électorat) a un coût financier, pratique et logistique non négligeable. C'est pourquoi les cantons, attachés à une instauration progressive du vote électronique, ont souhaité définir des normes de sécurité communes pour une première étape. Ils pourront ainsi mettre en oeuvre des solutions moins coûteuses, qui permettront d'élargir d'abord la part de l'électorat admis à 50 %.

Pour cette première étape, le groupe de travail technique propose l'instauration d'une forme de vérifiabilité réduite: ­

la garantie de pouvoir vérifier que le vote a été déposé conformément à l'intention du votant253;

­

dans ce cas, la vérifiabilité ne doit pas dépendre de la fiabilité de composants de contrôle: le système de vote électronique est intégré à la partie fiable dans sa totalité. Sa fiabilité repose d'une part sur le plafonnement toujours en place des électeurs admis et de l'autre sur les exigences de sécurité supplémentaires à mettre en oeuvre au cours de la première étape;

­

l'instauration d'une vérifiabilité réduite résout dans une large mesure le «problème de la sécurité des plates-formes»: les ordinateurs des électeurs ne peuvent pas manipuler des voix de façon autonome sans que cela se voie. Ce problème monopolisant l'attention et le nombre des électeurs admis étant toujours limité, le relèvement du plafond cantonal de 30 à 50 % paraît acceptable.

Mise en oeuvre possible de la vérifiabilité Cette section expose de manière très simplifiée une proposition de mise en oeuvre de la vérifiabilité. Cette proposition n'a rien de contraignant: les cantons sont libres de procéder à leur guise, du moment qu'ils respectent les exigences de sécurité exposées plus haut. Elle a toutefois été jugée pertinente par le groupe de travail technique en ce qui concerne le déroulement du vote.

Les électeurs reçoivent avec leur carte d'électeur une liste de codes leur permettant de vérifier que leur vote crypté a atteint le système de vote et les composants de contrôle tel qu'il a été émis. La liste contient:

253

­

un identifiant chiffré;

­

un code de contrôle par candidat ou par réponse possible. ; l'ordre des codes est aléatoire (variable pour chaque liste ou modèle) ;il pourrait aussi s'agir d'images dont l'ordre serait différent sur chaque liste;

Cf. ch. 12.1.1.

4626

­

un code de confirmation;

­

un code de finalisation.

Dans cet exemple, on n'utilise qu'un seul groupe de composants de contrôle, composé de deux HSM.

Après le dépouillement, les composants de contrôle traiteront les donnés enregistrées de telle manière que si un vote valide n'avait pas été enregistré, ou pas tel qu'il a été déposé, ou que si plusieurs votes avaient été comptabilisés pour une seule carte d'électeur, ou qu'un vote ne correspondait à aucune carte d'électeur valide, un éventuel vérificateur le remarquerait forcément (avec un ordinateur indépendant du système de vote).

Du point de vue des électeurs, la procédure de vote diffère à peine des systèmes actuels. La nouveauté, c'est qu'il faut commencer par saisir l'identifiant de la liste de codes et qu'ensuite, pour chaque candidat (ou réponse possible dans le cas d'une votation) s'affichera un code que le votant pourra vérifier s'il le désire. Les systèmes affichent d'ores et déjà des codes correspondant au code de confirmation et au code de finalisation.

L'annexe 7 fournit une représentation détaillée de la mise en oeuvre possible.

12.1.2

Exigences communes posées aux contrôles de système

Le vote électronique est actuellement proposé en Suisse à titre expérimental, ce qui permet de faire évoluer la fonctionnalité des systèmes au fur et à mesure que des faiblesses sont constatées. De par sa nature politique, le projet est par ailleurs appelé à s'adapter à l'évolution des exigences.

Conformément à l'art. 27l, al. 2, ODP, un service externe indépendant, reconnu par la Chancellerie fédérale, doit confirmer que les systèmes satisfont aux exigences en matière de sécurité et de fonctionnement. Des audits ­ longs et coûteux ­ dans ce sens ont été réalisés par le passé, mais il n'était pas possible d'y procéder à chaque modification d'un système.

On a donc plutôt fait appel à des groupes d'accompagnement composés de représentants de la Confédération et de différents cantons254. Après avoir examiné les modifications apportées aux systèmes, ces groupes ont formulé leurs conclusions dans un rapport. L'extension du vote électronique nécessite une professionnalisation des contrôles.

Au sein du groupe de travail technique, la Confédération, les cantons et des experts issus de l'économie privée et du monde scientifique ont élaboré des exigences communes sur la nature et la fréquence des contrôles de système quant aux exigences de sécurité qu'ils ont eux-mêmes formulées.

A une exception près, les contrôles sont pratiqués sous la forme d'audits par un organisme agréé par le Service d'accréditation suisse (SAS), et validés par un certificat, que le canton doit joindre à sa demande d'autorisation d'essais de vote électronique255.

254 255

Cf. ch. 4.4.2.

Cf. ch. 14.

4627

Outre les audits décrits à l'annexe 6, les exploitants de système doivent procéder avant chaque scrutin à un test de fonctionnement pour écarter tout risque de panne.

12.1.3

Moment de la clôture de l'urne électronique

Jusqu'à présent, le Conseil fédéral exigeait que la clôture de l'urne électronique ait lieu le samedi, veille du scrutin, à midi. Cela permet aux électeurs ayant échoué à voter par Internet d'aller voter au bureau de vote et aux autorités de vérifier plus facilement si un électeur présent dans la bureau de vote n'a pas déjà voté par Internet, précaution indispensable pour éviter les votes doubles. Il n'y a donc pas lieu de modifier le moment de la clôture de l'urne.

12.1.4

Moment du décryptage de l'urne électronique

La clôture de l'urne électronique ayant lieu le samedi, veille du scrutin, quand faut-il la décrypter?

La Suisse, comme de nombreux autres pays, refuse par principe de publier des résultats anticipés partiels sur la base des votes déposés. Cantons et communes ont toutefois à coeur de publier les résultats d'un scrutin le plus rapidement possible, ce qui implique que le dépouillement commence le plus tôt possible. Les cantons fixent donc, avec l'accord de la Confédération, à quel moment et selon quelles restrictions le dépouillement des votes papier peut commencer. Le décryptage des votes électroniques prend lui aussi un certain temps. Certains cantons dotés d'une organisation décentralisée et d'un grand nombre de communes craignent de ne pas disposer du résultat du vote électronique au moment prévu. Il faut donc déterminer le meilleur moment pour commencer le décryptage.

Pour garder secrets des votes papier, il faut les conserver sous clé, par exemple dans l'urne scellée du bureau de vote. Les votes par correspondance sont eux aussi conservés sous clé ou du moins sous surveillance, protégés par une enveloppe.

Quant aux votes électroniques, le meilleur moyen de préserver leur secret est de les laisser cryptés. Des travaux préparatoires, comme la séparation des cartes d'électeur des enveloppes scellées contenant le vote dans le cas du vote par correspondance, sont bien entendu autorisés, mais ils ne peuvent pas inclure le décryptage. Ces travaux préparatoires ne doivent pas favoriser les tentatives visant à décrypter les votes avant l'heure.

Le moment du décryptage doit être déterminé en fonction du début du dépouillement des votes papier. Vu l'importance des votes électroniques par rapport à l'ensemble des voix exprimées ­ surtout du point de vue de l'extension du troisième canal de vote ­, leur divulgation permettrait d'établir des pronostics beaucoup plus fiables que les résultats des votes papier enregistrés dans un bureau de vote. Cela tient au fait que leur décompte est assuré de manière centralisée par le système dans lequel ils sont exprimés. Autre élément à prendre en compte: le vote par correspondance et les procédures qui s'y rattachent jouissent globalement de la confiance de la population. Vu la nouveauté et la confidentialité relatives du vote électronique, il est essentiel de souligner le respect des principes démocratiques fondamentaux en privilégiant les pratiques qui ont fait leurs preuves.

4628

Pour toutes les raisons que nous venons d'évoquer et dans la perspective du relèvement des plafonds il ne paraît pas opportun de commencer le décryptage de l'urne électronique avant le dimanche du scrutin.

12.2

Fonctionnalité

Le vote électronique présente des avantages décisifs: il permet notamment d'éviter qu'un vote doive être déclaré nul pour cause de vices de forme ou de problèmes de compréhension. Son acception par la population dépend aussi des facilités qu'il offre par rapport aux canaux de vote traditionnels.

Il faut que son fonctionnement soit facile à comprendre pour tous les électeurs, sans nuire à la solennité du scrutin ni influencer le choix des votants.

La convivialité des systèmes est déterminante, surtout pour les électeurs handicapés (de la vue), dont les associations de défense revendiquent une meilleure prise en compte de leurs besoins spécifiques256. L'intérêt du vote électronique pour les handicapés de la vue dans l'exercice de leurs droits politiques est exposé au ch. 11.4.2.

A l'heure actuelle, les électeurs reçoivent avec leur matériel de vote des codes personnels, dont certains sont obligatoires pour pouvoir voter. Ces documents leur sont envoyés avant chaque scrutin par voie postale. Un envoi par courriel a été envisagé: il faciliterait la procédure de vote et augmenterait les chances des électeurs de l'étranger de voter à temps.

Les nouvelles exigences de sécurité n'excluent pas a priori l'envoi de tous les documents par courriel. Elles supposent toutefois, eu égard à la vérifiabilité, que les électeurs puissent utiliser des «appareils spéciaux fiables» (cf. ch. 12.1.1). La vérifiabilité consiste en effet à s'assurer que l'ordinateur sur lequel on vote n'a pas été manipulé. Or les ordinateurs personnels ne sont pas suffisamment fiables pour cela.

En même temps, la mise à disposition d'appareils fiables n'est pas réaliste à moyen terme. Le moyen le plus sûr reste donc d'employer un canal de transmission indépendant de l'ordinateur: la poste.

13

Gestion des risques

La gestion de tout projet cantonal de vote électronique est une tâche considérable du fait de son évidente complexité. Outre la collaboration avec les communes, les prestataires informatiques et les organes politiques, le dialogue avec les acteurs concernés (y compris les électeurs), l'orientation stratégique en vue de l'extension du vote électronique à l'ensemble du territoire, la gestion des risques en constitue un aspect absolument central compte tenu de l'importance des droits politiques pour l'Etat et pour le public. Il paraît donc indispensable d'adopter un instrument permettant d'identifier, d'évaluer et de traiter correctement les risques.

Jusqu'ici, la Confédération et les cantons ont pratiqué pour l'essentiel une gestion des risques séparée. Ils ont certes échangé des informations importantes par l'intermédiaire de la Chancellerie fédérale, mais sans mode opératoire précis.

256

Cf. ch. 3.2 et 11.4.2.

4629

Le groupe de travail technique257 s'est longuement penché sur les risques techniques tels que les menaces pensant sur le déroulement d'un scrutin. Il en a déduit des mesures visant à minimiser ces risques, comme des normes de sécurité applicables au développement du vote électronique. Il n'existe cependant encore aucune procédure prévoyant une réévaluation systématique des risques, un élargissement des critères d'évaluation ou l'identification de nouveaux risques.

Au cours des années qui viennent, il faudra définir à l'échelon de la Confédération une procédure de gestion des risques visant à offrir: 1.

à la Chancellerie fédérale et aux cantons un instrument leur permettant d'identifier les risques et de les contrer efficacement;

2.

à la Chancellerie fédérale un instrument lui permettant de vérifier la conformité des systèmes258;

3.

à la Chancellerie fédérale et aux cantons une marche à suivre en cas de dysfonctionnement.

La Chancellerie fédérale veille, dans le cadre du groupe de travail Vote électronique, à ce que les besoins des cantons soient pris en compte et à ce que les interfaces permettant l'échange d'informations soient mises en place. Parmi les interlocuteurs possibles figurent la Centrale d'enregistrement et d'analyse pour la sûreté de l'information de la Confédération (MELANI), d'autres pays recourant au vote électronique et d'autres acteurs restant à définir, par exemple dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie nationale de protection de la Suisse contre les cyberrisques.

Elle veille aussi à ce que les instruments existants conservent toute leur pertinence au fil du processus. Le rapport sur les risques, par exemple, que la Chancellerie fédérale a élaboré en 2011 en collaboration avec les cantons. Il énumère les principaux risques qui pèsent sur le vote électronique du point de vue de la Confédération et des cantons et s'adresse essentiellement aux décideurs politiques. Ce document doit être mis à jour périodiquement dans le cadre de la gestion des risques, qui doit par ailleurs tenir compte des scénarios de crise intégrés aux conventions de crise passées entre la Confédération et les cantons.

14

Procédures mises en place par les autorités pour développer le vote électronique

Conformément à l'art. 8a LDP, tout canton qui souhaite expérimenter le vote électronique dans le cadre d'un scrutin fédéral doit en demander l'autorisation au Conseil fédéral. S'il n'est pas question de modifier cette obligation, nous avons vu dans la partie I259 que la procédure d'autorisation en vigueur était fastidieuse. Quelques améliorations ont certes été apportées çà et là, mais dans la perspective du développement futur, il est indispensable de refondre complètement la procédure pour la rendre plus efficace.

257 258 259

Cf. ch. 12.1.

Cf. ch. 14.2.

Cf. ch. 2.5.1.

4630

Les deux principales modifications à apporter sont les suivantes: ­

possibilité d'accorder des autorisations générales (cf. ch. 14.1),

­

procédure d'agrément de la Chancellerie fédérale (cf. ch. 14.2).

Jusqu'à présent, les cantons devaient déposer pour chaque scrutin une demande distincte, que le Conseil fédéral traitait au cas par cas. Il faut que le Conseil fédéral puisse accorder une autorisation générale pour les essais de longue durée. Le droit en vigueur le lui permet déjà, sous réserve que le canton puisse prouver qu'il a réalisé plusieurs essais sans panne260. Cette innovation déchargera considérablement les autorités concernées, cantonales surtout.

A titre de compensation et conformément aux normes de sécurité définies conjointement par la Confédération et les cantons, il y aura désormais une procédure d'agrément, dont la responsabilité incombera à la Chancellerie fédérale, laquelle devra, avant chaque scrutin, vérifier que les cantons candidats au vote électronique satisfont (toujours) bien aux exigences. Cette nouvelle procédure est décrite en détail ci-après.

Elle consiste en deux étapes dont voici la représentation schématique:

14.1

Autorisation accordée par le Conseil fédéral

Tout canton souhaitant expérimenter le vote électronique à l'occasion d'un scrutin fédéral (votation ou élection) doit en demander l'autorisation au Conseil fédéral, instance responsable des résultats de ces scrutins, comme le prévoit la LDP.

La Chancellerie fédérale, instance responsable du vote électronique au niveau de la Confédération, continuera de diriger la procédure d'autorisation à l'avenir. Elle vérifie les documents transmis par les cantons, évalue leur conformité avec le droit fédéral et fait une proposition au Conseil fédéral sur la base de sa propre évaluation, en respectant les procédures habituelles de l'administration fédérale (consultation des offices, co-rapport, etc.).

Les autorisations générales du Conseil fédéral portent uniquement sur l'utilisation du vote électronique pour des votations populaires fédérales. Lors d'élections nationales (du Conseil national), il convient de déposer une demande distincte fournissant les informations spécifiques à ce type de scrutin. Les conditions ne sont pas du tout les mêmes pour une votation que pour une élection, où elles sont beaucoup plus complexes. Comme les élections nationales n'ont lieu qu'une fois tous les quatre 260

Art. 8a, al. 1bis, LDP.

4631

ans, cette complexité est gérable. Par ailleurs, un canton qui souhaite proposer le vote électronique lors d'une élection fédérale doit prouver, et ce fut déjà le cas en 2011, que le système retenu a déjà été expérimenté avec succès lors d'un scrutin d'une complexité comparable. Si cet essai n'a pas été réalisé dans le canton en question, ce dernier doit organiser un test, suivi par la Chancellerie fédérale, qui fixe conditions de l'opération261. Il est encore trop tôt pour dire si la distinction entre élection et votation pourra être supprimée. Avant de trancher, il faudra avoir évalué l'utilisation des systèmes lors des élections de 2015.

Le Conseil fédéral peut toujours assortir son autorisation de conditions et de charges.

Il peut aussi, après coup, limiter, suspendre ou retirer totalement une autorisation pour motif grave (apparition d'un nouveau risque, p. ex.). Dans la mesure du possible, il consultera au préalable les cantons dotés d'un système propre, en leur qualité de responsables du projet. S'il y a lieu de limiter, de retirer ou de suspendre une autorisation accordée par le Conseil fédéral, la Chancellerie fédérale doit en faire la proposition au Conseil fédéral. La décision finale appartient à l'autorité politique qui a accordé l'autorisation. Au vu de ce que l'on sait aujourd'hui, la question peut se poser dans deux cas au moins: ­

apparition d'un nouveau risque (dépassant un système donné);

­

rejet des certificats fournis par le canton.

S'il n'est pas possible de réduire suffisamment les risques dans un délai court, le Conseil fédéral doit statuer sur le recours au vote électronique. Le cas échéant, la Chancellerie fédérale propose au Conseil fédéral la suspension jusqu'à nouvel ordre des autorisations concernées, en s'appuyant sur une évaluation écrite des risques incluant, si possible, l'avis des cantons dotés de leur propre système262. Elle lui en proposera la réactivation dès que le risque sera considéré comme levé263.

Autre scénario possible: le canton a produit tous les certificats exigés264 pour son système, mais la Chancellerie fédérale les considère comme insuffisants (p. ex.

parce que l'un d'eux repose sur un audit manifestement médiocre). Elle tente alors de trouver une solution avec le canton concerné. En cas d'échec, elle doit proposer au Conseil fédéral de suspendre ou de limiter l'autorisation accordée jusqu'à la résolution du problème.

Il est à retenir que lorsque la Chancellerie fédérale envisage de proposer au Conseil fédéral le retrait, la limitation ou la suspension d'une autorisation d'expérimenter le vote électronique, elle commence toujours par consulter le canton concerné et qu'elle expose l'avis de celui-ci dans sa proposition au Conseil fédéral. La décision du Conseil fédéral doit être motivée et communiquée au canton sans délai.

Pour simplifier la tâche du Conseil fédéral, qui a eu jusqu'à présent à traiter des demandes d'expérimentation à chaque scrutin ou presque, les cantons pourront désormais déposer une demande en vue d'une votation de printemps ou d'automne.

261

Cf. le cahier des charges de la Chancellerie fédérale relatif à l'utilisation du vote électronique lors d'élections (2011).

262 En pratique, les cantons disposent d'un délai très court pour se prononcer puisqu'il s'agit souvent de questions urgentes, compte tenu de la cadence soutenue des scrutins en Suisse.

La Chancellerie fédérale tiendra compte des avis formulés dans ce délai.

263 A propos de la gestion des risques, cf. aussi ch. 13.

264 Y compris l'attestation de réussite de l'examen du procès-verbal cryptographique (cf. ch. 12.1.2).

4632

Les délais exacts seront fixés par la Chancellerie fédérale et communiqués aux cantons en temps utile.

Les décisions du Conseil fédéral quant aux autorisations d'expérimenter le vote électronique continueront à l'avenir d'être publiées dans la Feuille fédérale. Etant donné la mise en place d'autorisations générales pour une période prolongée, ces publications seront toutefois moins fréquentes.

Au moment de fixer les conditions d'octroi d'une autorisation générale, il faudra faire la distinction entre les cantons novices en matière de vote électronique (cf. ch. 14.1.1), et ceux qui ont expérimenté l'un des systèmes (cf. ch. 14.1.2).

Si l'utilisation d'un nouveau système de vote électronique est envisagée, il faudra apporter d'éventuels ajustements aux conditions formulées ici, en concertation avec la Chancellerie fédérale.

14.1.1

Cantons novices

Si un canton souhaite expérimenter le vote électronique pour la première fois à l'occasion d'un scrutin fédéral, l'essai en question ne peut pas porter d'emblée sur son électorat tout entier. Lors des cinq premiers essais265 organisés en vertu d'une autorisation dite de démarrage, ne pourront participer, comme c'est le cas actuellement, que 30 % maximum des électeurs du canton domiciliés en Suisse, plus les Suisses de l'étranger enregistrés dans le canton.

Tout canton ayant obtenu du Conseil fédéral une telle autorisation de démarrage devra, à l'issue du premier essai, adresser à la Chancellerie fédérale un rapport intermédiaire sur le déroulement de l'expérience. Si le résultat est positif, la Chancellerie fédérale autorisera quatre essais supplémentaires266. Tout problème devra être réglé en concertation avec la Chancellerie fédérale et, au besoin, avec le canton émetteur du système, avant tout nouvel essai.

A l'issue du cinquième essai, le canton remettra à la Chancellerie fédérale un rapport final sur la première phase d'essai. Si tout s'est bien passé, il pourra dès lors solliciter une autorisation générale pour les essais suivants et ainsi bénéficier du relèvement des plafonds à 50 %, voire à 100 %, selon le degré de sécurité offert par le système adopté.

14.1.2

Cantons expérimentés

À tout canton qui pourra attester avoir réalisé au moins cinq essais sans panne dans le cadre d'une étape donnée, le Conseil fédéral accordera à l'avenir, s'il en fait la demande en bonne et due forme, l'autorisation de recourir au vote électronique lors de votations fédérales pour une période maximale de deux ans. Dans la phase actuelle du projet, qui implique des modifications de grande ampleur, il vaut mieux que le Conseil fédéral évalue la situation dans sa globalité au bout d'un certain temps et qu'il accorde de nouvelles autorisations en fonction des résultats constatés. Lorsque les adaptations proposées dans le présent rapport auront été évaluées, la durée 265 266

Cf. art. 27b, al. 2, ODP.

Cf. ch. 14.2.

4633

maximale pourra être allongée sous réserve que la nouvelle procédure ait fait ses preuves.

Selon le modèle séquentiel267, le Conseil fédéral permet que l'expérimentation englobe 30 % (statu quo), 50 % (mise en oeuvre de la 1re étape) ou 100 % (mise en oeuvre de la 2e étape) de l'électorat, si le système utilisé satisfait aux exigences correspondantes. Ces pourcentages correspondent à des plafonds à ne pas dépasser.

Avant de pouvoir relever son plafond au cran suivant, le canton doit avoir testé avec succès son nouveau système au cran inférieur au moins une fois lors d'un scrutin fédéral, cantonal ou communal. En tout état de cause, le système doit satisfaire aux conditions d'agrément et le canton produire les confirmations et les certificats requis.

Si la sécurité du système augmente, permettant l'implication d'une part plus grande de l'électorat, le canton devra déposer une nouvelle demande d'autorisation.

L'autorisation est accordée à la condition expresse que le canton ait reçu l'agrément de la Chancellerie fédérale pour effectuer son essai.

14.2

Agrément de la Chancellerie fédérale

14.2.1

Procédure ordinaire

Pour les cantons bénéficiaires d'une autorisation du Conseil fédéral, la Chancellerie fédérale vérifiera à l'avenir pour chaque scrutin si toutes les conditions préalables à l'expérimentation du vote électronique sont (encore) remplies. Si oui, elle autorisera le canton à procéder à un essai de vote électronique ou agréera un système.

Il s'agit là d'un examen purement formel, la Chancellerie fédérale se contentant ­ ce qui n'est pas rien ­ de vérifier que les documents fournis sont complets et surtout que les certificats à produire pour chaque système sont encore valables. Si oui, elle signifie par écrit aux cantons qu'ils peuvent procéder à l'essai de vote électronique conformément à l'autorisation du Conseil fédéral pour le scrutin en question.

14.2.2

Procédure en cas de non-agrément

Si les documents fournis ne permettent pas d'agréer un canton ou un système, la Chancellerie fédérale en informe le canton concerné au plus vite par écrit, en motivant sa décision. Le canton bénéficie alors d'un délai pour compléter son dossier.

S'il ne fournit les précisions requises à l'expiration de ce délai ou conteste l'appréciation de la Chancellerie fédérale, celle-ci soumet la demande du canton au Conseil fédéral qui tranchera.

Si un système ne remplit plus les conditions techniques requises pour le plafond autorisé antérieurement par le Conseil fédéral, la Chancellerie fédérale peut autoriser le canton à procéder à son essai avec une part plus réduite de l'électorat, pour autant que les conditions correspondantes soient remplies.

Si, malgré l'autorisation du Conseil fédéral, un canton se retrouve dans l'impossibilité d'expérimenter le vote électronique lors d'un scrutin fédéral pour n'avoir pas 267

Cf. ch. 11.2.

4634

obtenu l'agrément de la Chancellerie fédérale, la Chancellerie fédérale et lui mettront tout en oeuvre pour résoudre le problème au plus vite, et si possible avant le scrutin suivant. En principe les cantons doivent en effet pouvoir réaliser un essai à chacun des scrutins pour lesquels ils ont reçu l'autorisation du Conseil fédéral.

Il ne faut pas confondre le non-agrément avec une limitation, une suspension ou un retrait d'autorisation générale du Conseil fédéral: il n'empêche en effet le recours au vote électronique que pour un scrutin bien précis, sans modifier le principe de l'autorisation générale.

14.3

Contenu des demandes

14.3.1

Demande au Conseil fédéral

Les demandes cantonales au Conseil fédéral consistent en un simple courrier rédigé par l'instance politique, dans lequel doivent figurer les éléments suivants: ­

part maximale de l'électorat devant être intégrée dans l'essai (nouveau),

­

nombre de scrutins ou durée maximale pour laquelle l'autorisation générale est sollicitée (nouveau),

­

système devant être adopté et certificats et documents correspondants (nouveau),

­

engagement de respecter les directives fédérales (inchangé),

­

bases juridiques cantonales (inchangé),

­

garantie d'un concept viable reposant sur des mesures techniques, financières et organisationnelles (inchangé).

Sur la base de ces éléments, la Chancellerie fédérale propose au Conseil fédéral de donner (ou non) son autorisation.

14.3.2

Demande à la Chancellerie fédérale

Une fois que le Conseil fédéral a donné son autorisation générale, il convient de fournir à la Chancellerie fédéral plusieurs documents dans le cadre de la procédure d'agrément. La liste de ces documents diffère selon que la demande d'agrément concerne un canton ou un système.

4635

Agrément d'un canton Documents à fournir à la Chancellerie fédérale en vue de l'agrément d'un canton: No

Document

Fréquence

1.

Formulaire de la Chancellerie fédérale dûment complété comportant toutes les informations concernant l'essai prévu (inchangé)

Pour chaque scrutin

2.

Mesures financières et organisationnelles (inchangé)

Une seule fois, et à nouveau en cas de changement

3.

Contrats avec des tiers (inchangé)

Une seule fois, et à nouveau en cas de changement

Les cantons sont en outre tenus de remettre pour chaque scrutin à la Chancellerie fédérale un échéancier afin de mieux coordonner l'ensemble des activités.

Ces documents peuvent être remis à la Chancellerie fédérale par le service cantonal responsable du vote électronique.

Agrément d'un système Seuls les cantons émetteurs ou responsables d'un système (direction du consortium, p. ex.) sont tenus de produire ces documents. Les autres peuvent y renvoyer simplement en indiquant le type de système qu'ils ont adopté. Documents à fournir à la Chancellerie fédérale en vue de l'agrément d'un système: No

Document

Fréquence

1.

Spécifications du système et descriptif du mode de fonctionnement (inchangé)

Une seule fois, et à nouveau en cas de changement

2.

Validation officielle du protocole cryptographique, rapport compris (nouveau)

Une seule fois, et à nouveau en cas de changement

3.

Certificats valables, y compris rapport(s) d'audit (nouveau)

Pour chaque scrutin.

Les certificats doivent être valables jusqu'à la date du scrutin

4.

Rapport sur le test de fonctionnalité (cf. ch. 12.2) (nouveau)

Pour chaque scrutin

Ces documents peuvent également être remis à la Chancellerie fédérale par le service cantonal responsable du vote électronique.

4636

15

Communication

15.1

Objet et buts de la communication

Les autorités responsables sont tenues de pratiquer une communication claire et transparente au sujet des droits politiques, notamment pour favoriser l'acceptation du nouveau canal de vote et susciter la confiance à son égard. Elles doivent s'interroger régulièrement sur leurs moyens de communication et les adapter à l'évolution des besoins.

15.2

Coordination entre la Confédération et les cantons

En août 2011, le comité de pilotage Vote électronique a approuvé le concept de communication Vote électronique mis au point par la Chancellerie fédérale en concertation avec les cantons. Ce document définit des règles claires de coordination de la communication et propose de nouveaux instruments (brochure sur le vote électronique, par exemple). Son utilisation s'étant révélée utile, le concept sera maintenu. Ses auteurs le feront évoluer en fonction des besoins.

15.3

Groupes cibles

La Confédération a jusqu'à présent axé sa communication sur les représentants des autorités fédérales et cantonales, les politiques et les scientifiques. Ces interlocuteurs restent très importants.

Mais si elle s'est peu adressée aux électeurs non encore admis à voter par Internet, c'est-à-dire la grande majorité d'entre eux, la mise en oeuvre des nouvelles mesures de sécurité et l'extension du vote électronique impliquent un effort de communication accru dans ce domaine. Il faut faire connaître à tous les électeurs le mode de fonctionnement et les avantages du vote électronique, mais aussi les risques qui lui sont attachés, et ce en toute transparence. La confiance de la population au sens large est un facteur essentiel du développement du nouveau canal de vote.

Il faut convaincre tous les groupes concernés ­ décideurs politiques, électeurs et autres ­ de l'efficacité des exigences de sécurité, dans un langage adapté à chacun.

15.4

Publication de documents

La multiplication des demandes fondées sur la LTrans quant au vote électronique prouve qu'il y a fort à faire en la matière.

Le guide «Mise en oeuvre du principe de transparence dans le domaine du vote électronique» approuvé en 2012 par le groupe de travail Vote électronique268 constitue un premier élément de réponse. Il vise à générer une unité de doctrine la plus large possible entre la Confédération et les cantons pour accroître la transparence ­ principe méconnu dans certains cantons ­ de la documentation relative au projet. Car lorsque la Confédération ou un canton décide de rendre public un document ou un 268

Cf. ch. 5.2.

4637

élément du système (question des logiciels libres), les conséquences de cette décision touchent tous les acteurs impliqués. Dans ce domaine, la coordination est capitale et incombe en grande partie à la Chancellerie fédérale.

Avant de publier un document quel qu'il soit, il convient d'évaluer précisément les risques encourus et de bien peser le pour et le contre de cette démarche pour éviter de heurter les intérêts du public. Louable en soi, la transparence peut nuire lorsqu'elle est poussée à l'excès.

16

Bases juridiques

Il convient de modifier les bases juridiques actuelles du vote électronique en suivant les propositions du présent rapport, ou d'en créer de nouvelles. Sont notamment concernés les actes suivants: ­

loi fédérale sur les droits politiques (ch. 16.1);

­

ordonnance sur les droits politiques (ch. 16.2);

­

règlement technique du vote électronique (ch. 16.3).

Ces modifications concernent aussi d'autres bases juridiques fédérales (ch. 16.4) et cantonales (ch. 16.5), qui devront être prises en compte de même que des normes internationales (ch. 16.6).

16.1

Loi fédérale sur les droits politiques

Le vote électronique est réglé à l'art. 8a LDP dans les termes suivants: 1

Le Conseil fédéral peut, en accord avec les cantons et les communes intéressés, autoriser l'expérimentation du vote électronique en la limitant à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets.

1bis Il peut, à la demande d'un canton qui a expérimenté le vote électronique sur une période prolongée sans avoir connu de panne, l'autoriser à poursuivre ses essais pendant une période dont il fixe la durée. Il peut assortir l'autorisation de conditions et de charges, ou encore la limiter à tout moment, en fonction des circonstances, à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets.

2 Le contrôle de la qualité d'électeur, le secret du vote et le dépouillement de la totalité des suffrages doivent être garantis. Tout risque d'abus doit être écarté.

3...

4 Le Conseil fédéral règle les modalités.

Il n'y a pas lieu de modifier pour l'instant cette disposition dans le cadre de l'adaptation des bases juridiques du vote électronique. La notion d'essais doit être maintenue, même si les résultats sont officiellement pris en compte et si certains cantons proposent régulièrement le vote électronique depuis une période prolongée.

Le vote électronique n'est pas encore suffisamment répandu pour qu'on puisse dire que la Suisse dispose d'un troisième canal de vote. D'autant que chaque essai nécessite une autorisation. Le Conseil fédéral doit garder le pouvoir de limiter les essais à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets, voire de les interdire, et d'assortir son autorisation de conditions particulières. A ce jour, quatre cantons seulement ont expérimenté une première fois le vote électronique lors d'élections 4638

(fédérales). Il sera toujours temps d'adapter les termes de la LDP lorsque le vote électronique aura été généralisé.

La possibilité d'octroyer des autorisations générales (art. 8a, al. 1bis, LDP) n'a pas encore été employée à ce jour, car les conditions des essais de la première phase ont subi de fréquentes modifications, généralement mineures il est vrai, au point de vue technique ou organisationnel. Mais rien ne s'y oppose plus désormais269. Les cantons qui ont expérimenté le vote électronique pendant plusieurs années sans avoir connu de panne méritent l'autorisation de longue durée qu'ils appellent de leurs voeux et qui d'ailleurs allégera leur propre charge administrative et celle de la Confédération.

Il va de soi que les dispositions générales de la LDP sur les élections et les votations s'appliquent aussi au vote électronique, sauf mention contraire. La Chancellerie fédérale a «traduit» ces dispositions et celles de l'ODP dans plusieurs cahiers des charges élaborés en concertation avec les cantons et visant à faciliter leur interprétation. Ces cahiers des charges restent en vigueur et seront développés si nécessaire, toujours en concertation avec les cantons.

Les dispositions de la LDP relatives au vote électronique, et en particulier la question de savoir si l'autorisation du Conseil fédéral doit être maintenue, seront examinées dans le cadre de la prochaine révision partielle de cette loi.

16.2

Ordonnance sur les droits politiques

L'autorisation de principe d'expérimenter le vote électronique formulée à l'art. 8a LDP est développée dans la section 6a ODP. Les art. 27a à 27q ODP en fixent les conditions.

Les 19 dispositions relatives au vote électronique nécessitent une refonte intégrale sur la base de trois paramètres: l'expérience pratique acquise pendant les dix dernières années, l'évolution des techniques et les modifications proposées dans le présent rapport en vue de l'extension du vote électronique.

L'expérience a montré que certaines dispositions de l'ODP étaient trop détaillées ou trop restrictives. Il convient donc de les reformuler de la façon la plus claire et la plus précise possible, en veillant à ne fermer aucune porte pour l'avenir.

D'autres dispositions se sont révélées trop complexes au point de vue technique. Il est donc question d'élaborer un nouveau règlement technique du vote électronique (RT VE)270, qui aura forcément des répercussions sur le contenu de l'ordonnance.

La révision partielle de l'ODP devra avant tout viser à préciser les principes du nouveau canal de vote, tandis que les prescriptions plus concrètes (souvent techniques) trouveront leur place dans le règlement technique.

Le remaniement de l'ODP devra tenir compte du fait que les cantons ont à satisfaire à des exigences variables en fonction de la part de l'électorat qu'ils souhaitent inclure dans leurs essais (cf. ch. 11.2).

269 270

Cf. ch. 14.1.

Cf. ch. 16.3.

4639

L'entrée en vigueur de l'ODP révisée a été fixée au 1er janvier 2014, en concertation avec les cantons expérimentant le vote électronique.

16.3

Règlement technique du vote électronique

Le vote électronique est un projet techniquement très complexe. Il fait appel à des technologies en constante évolution et nécessite à cet égard un règlement strict, pour lequel le niveau normatif de l'ODP ne convient pas. C'est la raison pour laquelle les détails techniques seront désormais traités dans un acte distinct, ce qui permettra par la même occasion d'alléger et d'affiner la teneur de l'ODP et de procéder plus facilement aux remaniements fréquents imposés par le progrès technique.

La pratique qui consiste à régler des aspects techniques dans un règlement (sous diverses appellations) n'a rien d'exceptionnel. Elle est même courante dans les domaines qui dépendent de l'Office fédéral de la communication, par exemple271.

L'élaboration de ce document correspond en outre à une recommandation de l'OSCE/BIDDH formulée dans son rapport sur l'observation des élections 2011 du Conseil national272.

Le futur RT VE contiendra avant tout les normes de sécurité définies en commun par la Confédération et les cantons273.

C'est à la Chancellerie fédérale, responsable du projet, qu'incombent l'élaboration et la mise à jour de ce nouveau règlement. L'exercice consiste à traduire les principes ancrés dans l'ODP en exigences techniques posées aux systèmes et aux procédures.

La Chancellerie fédérale s'acquitte de cette tâche en étroite collaboration avec les cantons, propriétaires et exploitants des systèmes, qui sont consultés systématiquement.

Comme l'ODP, le RT VE devra tenir compte du fait que les cantons ont à satisfaire à des exigences variables en fonction de la part de l'électorat qu'ils souhaitent inclure dans leurs essais.

Le nouveau RT VE doit entrer en vigueur avec la modification de l'ODP le 1er janvier 2014.

271

Cf. p. ex. les ordonnances de l'OFCOM du 6 décembre 2004 sur les services de certification dans le domaine de la signature électronique (RS 943.032.1) ou du 9 décembre 1997 sur les services de télécommunication et les ressources d'adressage (RS 784.101.113). Voir aussi les autres prescriptions techniques et administratives de l'OFCOM sur www.ofcom.admin.ch > L'OFCOM > Bases légales > Pratique en matière d'exécution.

272 Cf. annexe 4.

273 Cf. ch. 12.1.1

4640

16.4

Loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger

Outre les actes que nous venons d'évoquer, le vote électronique est aussi régi par la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (LDPSE)274.

En vertu de l'art. 1 LDPSE entré en vigueur en 2003, le Conseil fédéral peut, en accord avec les cantons et les communes intéressés, autoriser l'expérimentation du vote électronique en la limitant à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets, conformément à l'art. 8a LDP.

L'art. 5b LDPSE entré en vigueur en janvier 2008 oblige les cantons à harmoniser ou à centraliser leur registre électoral des Suisses de l'étranger, condition indispensable à la mise en place du vote électronique.

Les modifications suggérées dans le présent rapport n'impliquent aucune modification des dispositions mentionnées de la LDPSE et ne concernent en rien la future loi sur les Suisses de l'étranger275, en cours d'élaboration, qui reprendra probablement les dispositions de la LDPSE à quelques ajustements près.

16.5

Bases juridiques cantonales

Les cantons expérimentant le vote électronique ont édicté à son sujet des actes normatifs très variables par leur niveau d'exigence et par leur densité. Certains ont déjà intégré dans leurs droits les bases juridiques leur permettant d'expérimenter le vote électronique pour les électeurs suisses résidant en Suisse, alors que d'autres limitent cette possibilité aux électeurs suisses de l'étranger. Or, en vertu de la répartition des compétences dans le domaine des droits politiques, les cantons sont libres de décider d'introduire ou non le vote électronique et si oui d'en fixer la cadence.

Les nouvelles directives fédérales ne nécessitent pas d'ajustement majeur des différents droits cantonaux: le groupe de travail technique chargé de définir les nouvelles normes applicables aux systèmes de deuxième génération y a veillé. Par contre, l'OSCE/BIDDH recommande, comme nous l'avons vu, que la Confédération et les cantons assoient le vote électronique sur des bases juridiques détaillées276. La Confédération s'y est attelée en prévoyant la révision de l'ODP et l'élaboration d'un nouveau règlement technique277. Il serait souhaitable que les cantons réexaminent leur propre législation dans la perspective de l'extension de l'électorat admis à voter par voie électronique.

De manière générale, tout canton qui envisage de mettre en place le vote électronique ou de l'expérimenter à plus grande échelle ou lors d'un scrutin fédéral doit adapter sa législation à ce projet, en respectant les directives fédérales en la matière.

Cette condition continuera de s'appliquer aux cantons qui demandent au Conseil fédéral l'autorisation de procéder à un essai de vote électronique lors d'un scrutin fédéral.

274 275

Cf. ch. 1.4.1 Initiative parlementaire Lombardi «Pour une loi sur les Suisses de l'étranger» (11.446) du 15 juin 2011.

276 Cf. annexe 4.

277 Cf. ch. 16.2 et 16.3.

4641

16.6

Normes internationales

Sur le plan international, deux organisations clés en matière de droits politiques s'engagent en faveur de la mise au point de normes dans le domaine du vote électronique et offre une plate-forme d'échange d'expériences aux Etats. Elles ont émis des recommandations sur le vote électronique en général et sur le projet suisse en particulier: ­

le Conseil de l'Europe (ch. 16.6.1),

­

l'OSCE/BIDDH après avoir observé les élections 2011 du Conseil national (ch. 16.6.2).

Ces recommandations ne sont pas contraignantes pour la Suisse mais celle-ci devra s'en inspirer le plus largement possible pour le remaniement des bases juridiques ou justifier le cas échéant leur rejet, pour qu'elle puisse faire valoir ses solutions sur la scène internationale, ce qui ne pourra que servir le rayonnement et le du nouveau canal de vote sur le plan national.

16.6.1

Recommandations du Conseil de l'Europe

Comme nous l'avons expliqué dans la partie I278, le Conseil de l'Europe a émis à l'intention des Etats membres les recommandations suivantes: ­

recommandation (2004) 11 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les normes juridiques, opérationnelles et techniques relatives au vote électronique,

­

lignes directrices sur la certification des systèmes de vote électronique279,

­

lignes directrices relatives à la transparence des élections par voie électronique280.

La mise en oeuvre de la recommandation (2004) 11 est évaluée tous les deux ans dans le cadre d'une réunion spéciale, dont la quatrième et dernière en date a eu lieu en juillet 2012. A cette occasion, les pays présents ont conclu à l'unanimité que le texte était dépassé et qu'il était temps de le réviser à la lumière de l'expérience acquise. Aussi les propositions de changement du présent rapport sont-elles présentées indépendamment de leur compatibilité avec la recommandation (2004) 11.

278 279

Cf. ch. 1.8.1.

«Certification des systèmes de vote électronique ­ Lignes directrices pour la conception de processus de confirmation du respect des exigences et normes recommandées» émises par le Conseil de l'Europe le 16 février 2011 (www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > International).

280 «Lignes directrices relatives à la transparence des élections par voie électronique» émises par le Conseil de l'Europe le 16 février 2011. (www.bk.admin.ch > Thèmes > Droits politiques > Vote électronique > International).

4642

16.6.2

Recommandations de l'OSCE/BIDDH

Les recommandations sur le vote électronique que l'OSCE/BIDDH a formulées dans son rapport du 30 janvier 2012 consécutif à son observation des élections 2011 du Conseil national sont reproduites dans la partie I281 et dans l'annexe 4.

Le tableau ci-dessous en dresse le récapitulatif et indique la proximité de chacune avec les mesures proposées dans le présent rapport.

No

Recommandation

Remarques/Justification (en cas non-mise en oeuvre)

Emplacement dans le rapport (chapitre)

1.

Elaboration de bases juridiques détaillées pour le vote électronique

Remaniement en cours. Achèvement programmé en 2013

ch. 16

2.

Elaboration d'une procédure formelle de destruction des données électroniques

La procédure existe en vue du développement du vote électronique

ch. 12.1.1

3.

Contrôle de la procédure d'impression des cartes d'électeur pour le vote électronique

En cours (cahier des charges de la ChF en vigueur depuis le ch. 1.1.12)

ch. 12.1.1

4.

Vérifiabilité et «re-voting»282

Le «re-voting» est considéré incompatible avec le système suisse des droits politiques

ch. 12.1.1

5.

Utilisation de méthodes de cryptage de pointe

Pas décryptage des votes (cryptage de bout en bout)

ch. 12.1.1

6.

Décryptage tardif de l'urne électronique

Il est question de repousser le moment du décryptage

ch. 12.1.4

7.

Sécurité du mot de passe protégeant le vote électronique

En cours (cahier des charges de la ChF en vigueur depuis le ch. 1.1.12)

ch. 12.1.1

8.

Plus de techniciens au service des cantons

Pas de déclaration globale possible de la part de la Confédération. Relève des compétences des cantons

ch. 17.1.2

9.

Meilleure gestion des données cryptées

Cryptage assuré de bout en bout. Le degré de transparence relève de la compétence des cantons (décision politique)

ch. 12.1.1

Le degré de transparence relève de la compétence des cantons (décision politique)

ch. 12.1.2

10. Test de bout en bout avant chaque utilisation

281 282

Cf. ch. 1.8.1.

Il est possible voter plusieurs fois mais seul le dernier suffrage donné est comptabilisé.

4643

No

Recommandation

Remarques/Justification (en cas non-mise en oeuvre)

Emplacement dans le rapport (chapitre)

11. Indépendance de l'organisme certificateur

Conseil fédéral et Chancellerie fédérale

ch. 12.1.2

12 Indépendance de l'organisme évaluateur

Entreprises privées accréditées par le SAS Le degré de transparence relève de la compétence des cantons (décision politique)

ch. 12.1.2

13. Echange de pratiques exemplaires

Effectif depuis longtemps dans le cadre du groupe de travail, du groupe de suivi et du comité de pilotage Vote électronique

ch. 1.7.1

Les modifications proposées recoupent d'une façon ou d'une autre la majeure partie de ces recommandations, à l'exception de celle concernant le re-voting (4.). Il faut d'ailleurs souligner que la plupart d'entre elles ont été mises en chantier avant les recommandations de l'OSCE/BIDDH, notamment les aspects techniques dans le cadre du groupe de travail technique qui a fonctionné de mai 2011 à juin 2012283.

L'OSCE/BIDDH envisage par ailleurs la publication d'un manuel d'observation du vote électronique, plusieurs de ses pays membres ayant expérimenté ce canal en 2011/12 (Estonie, Norvège, Suisse et France). Les spécialistes suisses du sujet suivent la question de près et s'efforceront, le moment venu, de faire respecter les particularités de la Suisse en la matière.

17

Conséquences financières

17.1

Nouvelles procédures

Les procédures de vote électronique et notamment la procédure d'autorisation vont être remaniées de fond en comble. Quelles en seront les conséquences financières pour la Confédération et les cantons?

17.1.1

Estimation de la Confédération

La Confédération estime qu'à plus ou moins long terme, les nouvelles procédures coûteront moins cher que les actuelles. Mais les économies potentielles ne devraient pas se faire sentir de si tôt. La Chancellerie fédérale sera, en particulier dans un premier temps, fortement mise à contribution dans le contexte de la mise en oeuvre des nouvelles procédures (autorisation et approbation, gestion des risques, communication, etc.). Les cantons devraient aussi avoir besoin d'un soutien accru de la Chancellerie fédérale lors de la mise en oeuvre des nouvelles exigences. Dans une 283

Cf. ch. 12.1.

4644

première phase, les économies seront compensées par l'extension du vote électronique.

17.1.2

Estimations des cantons

Selon les cantons, les nouvelles procédures d'autorisation demanderont un effort moindre, contrairement à celles qui concernent la mise en oeuvre des nouvelles exigences de sécurité.

L'OSCE/BIDDH a recommandé, dans son rapport du 30 janvier 2012, que les cantons engagent plus de personnes spécialement formées pour réaliser leurs essais de vote électronique. Cela concerne en priorité les cantons hébergés et ceux du consortium, dont le système est exploité par un autre canton ou par un prestataire privé. Cette décision relève clairement de la compétence des cantons comme responsables de projet. La Confédération présuppose simplement que le concept global d'un canton donné est cohérent et qu'il respecte à la lettre les directives fédérales en matière de vote électronique.

17.1.3

Coût du développement du vote électronique

Il convient de bien distinguer le coût du développement des systèmes (ch. 17.1.3) et celui des contrôles portant sur la mise en oeuvre des exigences fédérales (ch. 17.1.3).

Dans les deux cas, la progression vers la vérifiabilité intégrale284 se fait en deux étapes.

Les estimations des cantons sont variables, ce qui n'a rien d'étonnant puisqu'elles se réfèrent exclusivement au développement ou à la vérification de leur propre système.

Les cantons de Neuchâtel et de Genève et le consortium n'ont pas évalué les coûts de la même façon. L'un a prévu un plancher et un plafond, dont on a tiré une moyenne pour effectuer la comparaison, les autres ont indiqué un montant prévisible en indiquant toutefois, sans la quantifier, qu'il était entouré d'une forte incertitude.

Les montants cités ci-dessous, qui englobent coûts internes et coûts externes, correspondent aux plus hautes des estimations qui ont été soumises à la Confédération. Ils n'ont rien de définitif car les cantons n'ont reçu à ce jour aucune offre concrète.

Il convient par ailleurs de se demander qui prendra en charge quels types de coûts (ch. 17.2).

Coût du développement des systèmes Pour ce qui est d'atteindre la première étape285, l'estimation la plus haute s'élève à 1 700 000 francs.

Pour arriver aux systèmes de deuxième génération, les coûts supplémentaires engendrés ne devraient pas excéder 3 900 000 francs.

284 285

Cf. ch. 12.1.1.

Cf. ch. 12.1.1.

4645

Coût des contrôles Le coût des contrôles à effectuer sur un système de vote électronique de la première étape286 en vue de son agrément est estimé à 550 000 francs maximum.

Pour les systèmes de deuxième génération, l'estimation monte à 700 000 francs.

Il faut y ajouter des frais récurrents estimés à env. 44 000 francs par an.

17.2

Répartition des charges entre Confédération et cantons

Ces estimations des coûts montrent que le développement des systèmes et les contrôles externes réguliers impliquent des coûts non négligeables. Du fait de l'actuelle répartition des compétences dans le domaine des droits politiques, les cantons devraient en principe prendre en charge ces coûts. Mais comme le vote électronique est un projet commun de la Confédération et des cantons et que la Confédération s'est fixé pour objectif, dans le cadre de la stratégie suisse de cyberadministration, d'introduire le nouveau canal de vote au plan national, les cantons ont adressé la proposition suivante à la Chancellerie fédérale: que la Confédération participe aux coûts. Les cantons continueront bien évidemment de prendre en charge les coûts d'exploitation des systèmes.

Sur proposition de la Chancellerie fédérale, les cantons seront soutenus en 2013 par l'intermédiaire des ressources du «Plan d'action» d'E-Government Suisse287 à hauteur de 100 000 francs par système, soit 300 000 francs au total. La Confédération est prête à soutenir les cantons en 2014 à concurrence de la même somme, issue du budget général de la Chancellerie fédérale. Elle a par ailleurs promis aux cantons de les soutenir financièrement lors des premiers audits des systèmes développés; les moyens proviendront également du budget général de la Chancellerie fédérale. Sur proposition de la Chancellerie fédérale et en accord avec les cantons, le Conseil fédéral examinera en 2013 l'opportunité d'une participation (unique) de la Confédération au-delà de ce cadre à partir de 2015.

18

Suite des opérations

L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2014, des nouvelles bases juridiques remaniées selon les propositions du présent rapport modifiera les conditions d'expérimentation du vote électronique. Certains cantons en profiteront pour porter de 30 à 50 % la part de leurs électeurs admis à voter par voie électronique. Nul doute que si leurs essais sont concluants, ils feront des émules.

Les cantons pourront alors viser la deuxième étape, qui leur permettra d'intégrer 100 % de leur électorat dans leurs essais. Certains ont déjà annoncé ne pas l'envisager avant 2016/17. Tout dépendra de l'issue de la première étape.

286 287

Cf. ch. 12.1.1.

Cf. www.egovernment.ch >Mise en oeuvre > Plan d'action.

4646

Le vote électronique doit aussi faire l'objet de nouveaux essais lors d'élections, à l'échelon communal ou cantonal tout d'abord. Plusieurs cantons y songent déjà.

L'idée, c'est que la grande majorité des Suisses de l'étranger et, dans l'idéal, la majorité des cantons puissent expérimenter le vote électronique lors des prochaines élections fédérales, en 2015. La Confédération encourage par ailleurs les cantons à offrir dès 2015 à leurs électeurs résidant en Suisse la possibilité de participer pour la première fois aux élections par Internet.

Pour que les objectifs décrits ici puissent être atteints, il est indispensable que nouveaux cantons adoptent le vote électronique. Ils peuvent compter sur le soutien ferme de la Chancellerie fédérale et des cantons dotés de leur propre système, qui à plusieurs reprises se sont déclarés prêts à partager celui-ci. Rien ne les empêche par ailleurs de mettre au point leur propre système, pour autant qu'il soit conforme aux exigences fédérales.

Le Conseil fédéral devrait publier son quatrième et a priori dernier rapport sur le vote électronique en 2017/18. Il y évaluera les expérimentations réalisées dans les nouvelles conditions. Si le résultat est positif, le troisième canal de vote pourrait être instauré définitivement, les cantons restant libres de le proposer ou non. Les conditions de la Confédération sont très claires à cet égard. Il est encore trop tôt pour dire si le principe des autorisations devra être maintenu, et si oui sous quelle forme. En tout état de cause, l'instauration ferme du troisième canal de vote entraînerait la dissolution de la structure actuellement en place à la Confédération.

L'instauration définitive du vote électronique entraînerait aussi une modification de la LDP. Autrement dit, il faudrait que l'Assemblée fédérale se penche sur la question et donne son feu vert à la généralisation du principe. Les électeurs auraient alors la possibilité de contester cette instauration par référendum.

La mise en place de la collecte de signatures électronique pour les requêtes populaires (fédérales), e-collecting en anglais, constitue, comme l'indique le rapport 2006 du Conseil fédéral sur le vote électronique, la troisième phase du projet. Depuis 2006, elle a fait l'objet de plusieurs interventions parlementaires288. Ce système n'a toutefois
pas encore été expérimenté faute d'un cadre approprié: il nécessite en effet des conditions particulières, comme la création d'un identificateur de personnes unique ou d'interfaces harmonisées pour les registres électoraux. La Chancellerie fédérale prévoit néanmoins d'étudier la question et de lancer une étude préalable visant à évaluer notamment l'expérience acquise à l'étranger, en particulier dans l'Union européenne avec l'initiative citoyenne européenne. L'aboutissement de la troisième phase ouvrirait la voie à la quatrième et dernière phase du projet: la collecte de signatures électronique pour les listes de candidats aux élections du Conseil national.

La Chancellerie fédérale est chargée de maintenir l'accompagnement scientifique du projet Vote électronique et de faire examiner ses conséquences sur la démocratie directe en fonction de plusieurs disciplines.

288

Cf. annexe 3. En plus des interventions qui y sont citées, on peut se référer à l'interpellation Wermuth du 7.3.2012 (12.3082, «Initiatives populaires et référendums fédéraux. Centralisation de l'attestation des signatures») et à la réponse du Conseil fédéral.

4647

Dans le domaine de la coopération internationale, la Suisse poursuivra ses échanges bilatéraux et multilatéraux avec d'autres Etats, dans le double but de préserver ses intérêts et de partager son expérience dans un domaine où elle a fait oeuvre de pionnier. Elle contribuera notamment au remaniement des normes relatives au vote électronique.

4648

Documentation complémentaire Les sujets qui suivent font l'objet de publications électroniques distinctes fournissant des informations complémentaires: 1.

Bases juridiques

2.

Bases juridiques pour les Suisses de l'étranger

3.

Interventions parlementaires au niveau fédéral et dans les cantons

4.

Recommandations de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur le vote électronique

5.

Base de calcul commune des coûts du vote électronique

6.

Contrôle par des instances extérieures

7.

Mise en oeuvre possible des exigences de sécurité

Tout ou partie de cette documentation peut être demandée à la Section des droits politiques de la Chancellerie fédérale ou consultée et téléchargée à l'adresse suivante: www.admin.ch (rubrique: «Chancellerie fédérale/Section des droits politiques/Vote électronique»)

4649

Liste des abréviations BIDDH

Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme

CACJ

Chambre administrative de la Cour de justice

CEC

Commission électorale centrale

CF

Conseil fédéral

CP VE

Comité de pilotage «Vote électronique»

CST

Constitution (RS 101)

CTI

Centre des technologies et de l'information

DFAE

Département fédéral des affaires étrangères

DGSI

Direction générale des systèmes d'information de l'Etat de Genève

EPFZ

Ecole polytechnique fédérale de Zurich

FF

Feuille fédérale

GA VE

Groupe d'accompagnement «Vote électronique»

GT VE

Groupe de travail «Vote électronique»

HESB

Haute école spécialisée bernoise

HSM

Hardware Security Modules

ISO

International Organization for Standardization

LDP

Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (RS 161.1)

LDPSE

Loi fédérale du 19 décembre 1975 sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (RS 161.5)

LEDP

Loi du 15 octobre 1982 sur l'exercice des droits politiques (RSG A 5 05)

LHand

Loi du 13 décembre 2002 l'égalité pour les handicapés (RS 151.3)

LPD

Loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (RS 235.1)

LTrans

Loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (RS 152.3)

MELANI

Centrale d'enregistrement et d'analyse pour la sûreté de l'information

NDA

Non-Disclosure Agreement

OAccD

Ordonnance du 17 juin 1996 sur l'accréditation et la désignation (RS 946.512)

ODP

Ordonnance du 24 mai 1978 sur les droits politiques (RS 161.11)

OFCOM

Office fédéral de la communication

OFJ

Office fédéral de la justice

OFS

Office fédéral de la statistique

4650

OLOGA

Ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (RS 172.010.1)

OSCE

Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

OSE

Organisation des Suisses de l'étranger

PFPDT

Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence

RT vote électronique

Règlement technique du vote électronique

RVeA

Contrat cadre e-Voting pour les Suisses de l'étranger

SCSE

Loi du 19 décembre 2003 sur la signature électronique (RS 943.03)

SECO

Secrétariat d'Etat à l'économie

SIEN

Service informatique de l'Entité neuchâteloise

SSL

Secure Socket Layer

UPIC

Unité de pilotage informatique de la Confédération

USIC

Unité de stratégie informatique de la Confédération

VERA

Système d'information de l'administration en réseau des Suisses de l'étranger

4651

4652