03.463 Initiative parlementaire Ouverture sans restriction des magasins un nombre limité de dimanches Rapport de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national du 24 avril 2007

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons un projet de modification de la loi sur le travail, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

24 avril 2007

Pour la commission: Le président, Caspar Baader

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Rapport 1

Genèse du projet

Le Conseiller national Kurt Wasserfallen a déposé, le 17 décembre 2003, une initiative parlementaire réclamant une modification des prescriptions de la loi sur le travail (LTr) et des ordonnances y relatives, de sorte que le travail dominical temporaire puisse être autorisé jusqu'à quatre ventes dominicales sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un besoin urgent. Ceci permettrait notamment de couvrir les ventes des dimanches précédant Noël. Il reviendrait à chaque canton de décider, dans la limite de quatre ventes dominicales par année au maximum, combien il souhaite en autoriser sur son territoire. La règle du supplément de salaire et l'exigence du consentement du travailleur demeureraient.

Le 18 novembre 2004, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-N) a procédé à l'examen préalable de l'initiative parlementaire. Elle a décidé, par 14 voix contre 10, d'y donner suite.

Le 5 septembre 2006, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a procédé à son tour à l'examen préalable de l'initiative. Elle a approuvé, par 5 contre 3, la décision de la CER-N de donner suite à l'initiative.

Le 28 novembre 2006, la CER-N a chargé l'administration d'élaborer un avantprojet concrétisant la requête contenue dans l'initiative.

Le 24 avril 2007, la commission a, par 14 voix contre 7, adopté le présent projet de loi lors du vote sur l'ensemble.

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Grandes lignes du projet

2.1

Droit en vigueur

Cette initiative a été lancée suite à l'arrêt prononcé le 22 octobre 2002 par le Tribunal fédéral au sujet d'un recours déposé dans le canton de Berne. Ledit arrêt répertorie les conditions très restrictives auxquelles l'occupation de personnel de vente pendant les dimanches de l'Avent est admissible. Le seco avait fixé dans sa circulaire 2/97 que l'occupation de personnel dans les commerces pouvait être approuvée deux dimanches par an sans plus ample examen. Le Tribunal fédéral a estimé que le fondement juridique manquait pour appliquer cette circulaire, puisque le besoin urgent ­ la condition requise pour l'octroi d'un permis de travail dominical temporaire ­ devait être examiné sur la base de la situation concrète. Il a rappelé que la première révision de la loi sur le travail avait été rejetée en 1996 notamment parce qu'elle introduisait une libéralisation du travail du dimanche dans les commerces. Il a également précisé que cette circulaire ne devait pas permettre de contourner la volonté populaire qui avait ainsi été exprimée.

Le Tribunal fédéral a par ailleurs statué que le besoin urgent de travail dominical peut être considéré comme établi si l'ouverture de commerces a lieu à proximité d'un marché de Noël ou s'il repose sur une longue tradition, une exception ne pouvant être faite à l'interdiction du travail du dimanche que pour répondre à un besoin existant et non pour en créer un nouveau. Le Tribunal fédéral a ajouté que la concur4052

rence étrangère, telle qu'elle existe dans le canton du Tessin, peut être considérée comme un besoin urgent pour des raisons économiques. Il a en revanche clairement énoncé qu'il n'existe dans le canton de Berne ni une tradition suffisante ayant cours sur tout le territoire cantonal ni une concurrence étrangère susceptible de justifier une autorisation du travail du dimanche. Il a également formulé l'exigence d'établir au cas par cas si un marché de Noël justifie de faire une exception à l'interdiction du travail du dimanche.

Le droit en vigueur et l'arrêt restrictif du Tribunal fédéral ne permettent par conséquent pas une interprétation plus généreuse des conditions d'octroi de permis de travail dominical pendant la période de l'Avent. Le seco s'est donc vu dans l'obligation d'adresser aux cantons des directives réglant l'occupation de personnel le dimanche pendant la période de l'Avent conformément aux principes indiqués ci-dessus (directives du 18 mars 2004).

Les cantons ont développé depuis lors des pratiques individuelles et se sont entendus, dans de nombreux cas, avec les syndicats sur la question de la compensation du travail dominical et de la majoration de salaire liée au travail dominical. Aussi existe-t-il en Suisse une pratique qui n'est pas uniforme et qui, en maints endroits, ne correspond pas à la jurisprudence du Tribunal fédéral. Au 3 décembre 2004, dix-neuf cantons autorisaient des ventes dominicales pendant la période de l'Avent.

Il convient de souligner que si la réglementation des heures d'ouverture des magasins relève de la compétence des cantons ou des communes, l'admissibilité de l'occupation de personnel la nuit ou le dimanche dépend des dispositions de la loi sur le travail. Il est permis d'occuper des travailleurs sans autorisation du lundi au samedi entre 6 h et 23 h. Le travail de nuit et du dimanche sont en principe interdits.

L'occupation de personnel le dimanche n'est possible que si l'entreprise qui emploie les travailleurs entre dans le cadre des dérogations prévues par la loi sur le travail et les ordonnances afférentes ou qu'elle dispose d'un permis cantonal ou fédéral l'y autorisant.

2.2

Nécessité de légiférer et proposition de la majorité

La révision proposée ­ qui consiste à autoriser l'occupation de personnel le dimanche jusqu'à quatre dimanches dans l'année sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un besoin urgent ­ signifierait pour les autorités cantonales d'exécution de la loi sur le travail un pas non négligeable vers une sécurité juridique et une uniformité de traitement supérieures.

Les autorités cantonales d'exécution sont en effet confrontées à des demandes de permis de travail du dimanche pour des ventes dans le cadre de manifestations, de jubilés d'entreprise, d'expositions automobiles, d'événements culturels, de fêtes de village, etc. Dans la plupart des cas, les conditions requises par la loi sur le travail pour l'octroi d'un permis de travail du dimanche ne sont pas remplies. Certains cantons accordent néanmoins les permis en question, d'autres respectent les restrictions légales et n'octroient pas de permis. Cette différence de pratique entre les cantons rencontre incompréhension et sentiment d'insécurité juridique, surtout chez les entreprises actives sur l'ensemble du territoire suisse.

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La mise en place d'une réglementation claire et uniforme, comme le réclame l'initiative, correspondrait à la fois au besoin de flexibilité accrue manifesté par le commerce de détail et au besoin des autorités d'exécution de la loi sur le travail de disposer de bases juridiques claires.

2.3

Propositions de minorité

2.3.1

Non entrée en matière

Une minorité (Rennwald, Berberat, Fässler, Fehr Hans-Jörg, Genner, Gysin Remo, Leutenegger Oberholzer, Rechsteiner Paul, Recordon) s'est exprimée contre l'entrée en matière en se basant sur des arguments de nature politique, sociale et économique. Selon la minorité, le peuple a accepté en 2005 à une très courte majorité (50,6 %) l'ouverture des magasins dans les gares et les aéroports. Elle soutient par ailleurs que le travail du dimanche porterait préjudice à une catégorie de travailleurs déjà souvent en situation précaire. Enfin, rien ne prouve que la libéralisation des horaires d'ouverture des magasins induise une augmentation de la croissance économique.

2.3.2

Renvoi à la commission

Une minorité (Berberat, Favre, Fehr Hans-Jörg, Genner, Germanier, Gysin Remo, Leutenegger Oberholzer, Pelli, Rechsteiner Paul, Recordon, Rennwald) propose que le conseil renvoie cet objet à la commission afin d'effectuer une procédure de consultation. Cette démarche permettrait prendre en considération l'avis des cantons et des partenaires sociaux. La majorité de la commission juge par contre que la nature facultative de la mesure rend la consultation des cantons superflue.

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Commentaire de l'article

Le projet dont il est question ici prévoit l'ajout d'un sixième alinéa à l'art. 19 de la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (Loi sur le travail, LTr)1: Les cantons peuvent fixer au maximum quatre dimanches par an pendant lesquels le personnel peut être occupé dans les commerces sans qu'une autorisation ne soit nécessaire.

Cette disposition permet d'occuper du personnel quatre dimanches par an sans avoir à apporter la preuve du besoin urgent ­ exigence posée par l'al. 3 du même article.

L'application des dispositions figurant aux al. 3 et 4 de l'art. 19 au personnel des commerces occupé temporairement le dimanche ­ autrement dit, majoration de salaire de 50 % pour le temps de travail effectué le dimanche et consentement du travailleur comme pré requis à son affectation au travail dominical ­ correspond aux souhaits formulés dans l'initiative.

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RS 822.11

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Une minorité (Berberat, Fässler, Fehr Hans-Jörg, Genner, Gysin Remo, Leutenegger Oberholzer, Rechsteiner Paul, Recordon, Rennwald) propose une majoration du salaire de 75 %, au lieu de 50 %, pour les employés concernés, lesquels sont déjà généralement peu payés.

Un travailleur occupé un dimanche doit, en vertu de l'art. 20 LTr, bénéficier, dans un délai de deux semaines, d'un dimanche de congé complet suivant ou précédant directement la plage de repos quotidien. La plage de repos complète qui doit être accordée est donc de 35 heures. Une personne occupée pendant plus de cinq heures un dimanche a droit, pendant la semaine précédente ou suivante, à un jour de repos compensatoire coïncidant avec un jour de travail et s'ajoutant au repos quotidien.

Dans ces cas également, la plage de repos complète qui doit lui être accordée est de 35 heures. Le travail dominical d'une durée inférieure ou égale à cinq heures doit seulement être compensé par un temps libre équivalent.

Cette disposition donne la possibilité d'occuper du personnel quatre dimanches par an. La question de savoir si une entreprise du commerce de détail pourra être ouverte dépendra toutefois du droit cantonal sur les horaires d'ouverture des magasins. Il relève de la compétence des cantons de déterminer s'ils veulent indiquer quatre dimanches par année dans lesquels les magasins peuvent ouvrir leur porte ou s'ils veulent y renoncer. La compétence de fixer les dates des quatre dimanches durant lesquels il est permis d'ouvrir les magasins est guidée par la volonté d'amener les cantons à se prononcer en la matière, en particulier là où il n'y a pas de réglementation sur les heures d'ouverture des magasins et, par conséquent, de réglementation sur l'ouverture dominicale. Le respect des compétences centrales permet, en outre, de tenir compte des us et coutumes locaux.

Les entreprises qui, en vertu de l'art. 27 LTr, entrent dans le cadre des dispositions spéciales de l'ordonnance 2 relative à la loi sur le travail et qui sont, à ce titre, exemptées de l'obligation de solliciter un permis pour le travail du dimanche ne sont pas concernées par la réglementation dont il est question ici.

4

Conséquences

4.1

Conséquences financières et effet sur le personnel

La révision légale proposée n'a pas de conséquences financières sur le personnel de la Confédération.

4.2

Conséquences pour l'exécution

Cette disposition amène un allègement de la charge de travail pour les inspections cantonales du travail puisque ces dernières n'auront plus à examiner pour chaque demande de permis individuel si le besoin urgent tel que l'entend l'art. 19, al. 3, est établi. Elle met des limites claires au travail du dimanche dans les commerces, limites applicables dans toute la Suisse et garantissant dès lors l'égalité de traitement de tous.

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5

Relation avec le droit européen

La directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 sur certains aspects de l'aménagement du temps de travail arrête à son article 5 que la durée hebdomadaire de repos doit durer au moins 35 heures (11 heures de repos quotidien plus 24 heures de repos hebdomadaire) et doit en principe comprendre le dimanche. Des exceptions à ce principe sont toutefois possibles à condition que les travailleurs concernés bénéficient de repos compensatoires équivalents ou d'une protection adaptée dans les cas où des raisons objectives ne permettent pas l'octroi de tels repos compensatoires. La révision proposée de la loi sur le travail est parfaitement compatible avec le droit européen.

6

Bases légales

6.1

Constitutionnalité et légalité

La proposition de révision concerne la modification d'une disposition existante et se fonde ­ comme la disposition existante ­ sur les dispositions constitutionnelles mentionnées dans le préambule à la loi sur le travail.

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