Protection de l'enfance et mesures de contrainte en matière de droit des étrangers Rapport de la Commission de gestion du Conseil national du 7 novembre 2006

2006-2888

2373

Liste des abréviations al.

art.

ATF CC CdG-N cf.

ChF ch.

consid.

CPA CRDE DFJP FF LAsi let.

LSEE ODM ONU p. ex.

RS

2374

alinéa article Arrêt du Tribunal fédéral suisse (recueil officiel) Code civil suisse; RS 210 Commission de gestion du Conseil national confer, comparez Chancellerie fédérale chiffre considérant Contrôle parlementaire de l'administration Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (Convention des droits de l'enfant); RS 0.107 Département fédéral de justice et police Feuille fédérale Loi sur l'asile du 26 juin 1998; RS 142.31 lettre Loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers; RS 142.20 Office fédéral des migrations Organisation des Nations unies (Nations unies) par exemple Recueil systématique du droit fédéral

Rapport 1

Contexte et objet de l'enquête

1.1

Situation initiale

Se fondant sur une évaluation du Contrôle parlementaire de l'administration (CPA)1, la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) a adopté, le 24 août 2005, un rapport sur l'application des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers2. Il ressortait de l'enquête du CPA que des mineurs3 étaient parfois placés en détention en vue du refoulement. L'enquête n'ayant pas porté en soi sur cet aspect particulier de la détention en vue du refoulement, la CdG-N a chargé sa souscommission DFJP/ChF4, le 24 août 2005, de procéder à des investigations complémentaires concernant la protection de l'enfance et les mesures de contrainte. Il s'agissait en particulier de déterminer si l'exécution des mesures de détention en phase préparatoire et de détention en vue du refoulement tenait suffisamment compte de la Convention des droits de l'enfant5, par exemple pour ce qui est des conditions de détention.

1.2

Démarche et questionnaire

La sous-commission DFJP/ChF a adressé aux cantons un questionnaire concernant l'application aux mineurs des mesures de détention en phase préparatoire et de détention en vue du refoulement. Les questions portaient sur cinq thèmes: 1) données quantitatives concernant la détention en phase préparatoire et la détention en vue du refoulement des mineurs, de 2002 à 2004; 2) application des mesures de contrainte aux familles et séparation des mineurs de leurs parents; 3) séparation des détenus mineurs et majeurs; 4) accès à l'assistance judiciaire et mesures tutélaires jusqu'au départ; 5) vérification de l'âge et harmonisation des statistiques.

Le CPA a évalué et résumé les résultats de cette enquête (voir annexe). Les conclusions de la CdG-N reposent sur une évaluation de l'enquête du CPA. Le 19 octobre 2006, la sous-commission DFJP/ChF a adopté le présent rapport à l'intention de la CdG-N, qui l'a approuvé à son tour le 7 novembre 2006 par 14 voix contre 5, et décidé de le rendre public.

1

2 3 4

5

Evaluation des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers. Rapport final du Contrôle parlementaire de l'administration à l'attention de la Commission de gestion du Conseil national (FF 2006 2539).

Application et effet des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers. Rapport du 24.8.2005 de la Commission de gestion du Conseil national (FF 2006 2515).

Pour une définition de la notion de «mineur» dans les dispositions régissant la détention en vue du refoulement et dans la Convention des droits de l'enfant, voir ch. 1.4.

Membres de la sous-commission DFJP/ChF-N: Lucrezia Meier-Schatz (présidente), Max Binder, Toni Brunner, André Daguet, Jean-Paul Glasson, Walter Glur, Josy Gyr-Steiner, Brigitte Häberli-Koller, Claude Janiak, Geri Müller et Kurt Wasserfallen.

Convention du 20.11.1989 relative aux droits de l'enfant (Convention des droits de l'enfant, CRDE; RS 0.107).

2375

1.3

But et portée de l'enquête

Le présent rapport porte sur l'application et le respect de la Convention des droits de l'enfant dans les mesures de contrainte en matière de droit des étrangers. La Suisse a adhéré à la Convention des droits de l'enfant le 24 février 1997 (entrée en vigueur le 26 mars 1997). En septembre 2007, elle présentera au Comité des droits de l'enfant de l'ONU ses deuxième et troisième rapports concernant l'application de la convention. Le présent rapport vise donc à présenter au Conseil fédéral les résultats de l'enquête et les conclusions que la CdG-N en tire afin qu'il puisse en tenir compte dans son rapport à l'intention du Comité des droits de l'enfant. Les résultats de l'enquête soulèvent toute une série de questions que des entretiens avec les autorités cantonales concernées et l'Office fédéral des migrations (ODM) permettraient de clarifier. La CdG-N renonce cependant à approfondir elle-même ces questions, non sans en faire mention lorsque cela lui paraît nécessaire.

Recommandation 1

Intégrer les résultats de l'enquête au rapport à l'intention de l'ONU

Le Conseil fédéral intègre dans son rapport à l'intention du Comité des droits de l'enfant de l'ONU concernant l'application de la Convention des droits de l'enfant les résultats exposés dans le présent rapport, ainsi que les résultats des éclaircissements demandés.

1.4

Présentation du sujet, définitions

La détention en vue du refoulement est la principale mesure de contrainte du droit des étrangers. Elle peut être ordonnée par l'autorité cantonale à l'encontre d'un étranger ayant fait l'objet d'une décision de renvoi ou d'expulsion en première instance afin d'assurer l'exécution de cette décision, lorsqu'il existe un motif de mise en détention (art. 13b LSEE6). Le motif de détention le plus fréquent est le risque de passage à la clandestinité. Pour le reste, on trouvera une présentation des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers dans l'évaluation du 15 mars 2005 menée par le CPA, ainsi que dans le rapport de la CdG-N qui en découle. En Suisse, les mineurs de plus de 15 ans peuvent être placés en détention en phase préparatoire ou en détention en vue du refoulement (art. 13c, al. 3, LSEE). Par conséquent, les mineurs en détention en phase préparatoire ou en détention en vue du refoulement dont il est question dans le présent rapport sont des jeunes de 15 à 17 ans, jeunes que la Convention des droits de l'enfant définit comme des enfants7.

L'exécution de la détention en phase préparatoire ou de la détention en vue du refoulement des mineurs relève principalement des articles suivants de la Convention des droits de l'enfant:

6 7

Loi fédérale du 26.3.1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20) Aux termes de l'art. 1 de la Convention des droits de l'enfant, «tout être humain âgé de moins de dix-huit ans» est un enfant au sens de la convention.

2376

­

Art. 3, al. 1: «Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale.»

­

Art. 9, al. 1: «Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant.»

­

Art. 37, let. b: «Les Etats parties veillent à ce que nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort, et être d'une durée aussi brève que possible.»

­

Art. 37, let. c: «Les Etats parties veillent à ce que tout enfant privé de liberté soit traité [...] d'une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l'on n'estime préférable de ne pas le faire dans l'intérêt supérieur de l'enfant [...].»

­

Art. 37, let. d: «Les Etats parties veillent à ce que les enfants privés de liberté aient le droit d'avoir rapidement accès à l'assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée, ainsi que le droit de contester la légalité de leur privation de liberté devant un tribunal ou une autre autorité compétente, indépendante et impartiale, et à ce qu'une décision rapide soit prise en la matière.»

2

Conclusions de la Commission de gestion

2.1

Les mineurs en détention en vue de l'expulsion

L'enquête du CPA montre que 355 mineurs ou présumés mineurs ont été placés en détention en phase préparatoire ou en détention en vue du refoulement entre 2002 et 2004 (à l'exception des 32 cas du canton du Valais8). La détention en vue du refoulement9 concerne donc un nombre important de mineurs. C'est pourquoi la CdG-N a trouvé utile d'examiner la pratique des cantons en matière d'exécution de la déten-

8

9

Les données suivantes concernant le canton du Valais n'ont pu être intégrées dans le présent rapport car elles sont parvenues trop tard aux auteurs : entre 2002 et 2004, 32 mineurs se trouvaient en détention en vue du refoulement. Parmi ceux-ci, 18 étaient des requérants d'asile déboutés. 10 mineurs ont été maintenus en détention durant quatre jours, 13 durant un mois, 3 durant trois mois et 6 durant six mois. Ces proportions ne mofifient pas de manière substantielle les pourcentages des différents durées de détention de mineurs relevés dans les tableaux 1 et 2 de l'annexe. Troix mineurs étaient accompagnés de leurs parents en Suisse ; ils furent placés en détention afin d'assurer qu'ils quittent la suisse avec leurs parents.

La détention en phase préparatoire concernant un seul cas, la suite du présent rapport porte uniquement sur la détention en vue du refoulement.

2377

tion en vue du refoulement concernant les mineurs, en particulier en la mettant en relation avec l'application de la Convention des droits de l'enfant.

La Convention des droits de l'enfant demande aux Etats parties de ne recourir à la privation de liberté des enfants qu'en dernier ressort et «pour une durée aussi brève que possible» (art. 37, let. b, CRDE). De plus, la convention érige en principe l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les mesures le concernant (art. 3, al. 1, CRDE).

L'évaluation de l'enquête et une comparaison avec le nombre total de personnes placées en détention en vue du refoulement selon l'évaluation réalisée en 2005 par le CPA révèle que près de 60 % des mineurs concernés sont détenus pendant plus de quatre jours. De plus, la proportion de mineurs détenus pendant plus de trois mois est de 14 % à 18 %, alors qu'elle n'est que de 8 % pour l'ensemble des personnes détenues. Les détentions prolongées (entre 6 et 9 mois) concernent 4 % à 5 % des mineurs, contre 2 % de l'ensemble de la population détenue en vue du refoulement (cf. tableau 2 en annexe). Même si l'on tient compte du fait que quelques personnes détenues en vue du refoulement sont enregistrées comme mineures alors qu'elles sont majeures (voir point 5 de l'annexe), le nombre de personnes soumises à une détention prolongée apparaît élevé. On aurait pu s'attendre à une tendance inverse du fait des principes fixés dans la Convention des droits de l'enfant.

Pour la CdG-N, ces chiffres soulèvent toute une série de questions: ­

Quelles sont les raisons qui expliquent que la durée de la détention des mineurs soit en moyenne plus élevée que celle des adultes?

­

La détention en vue du refoulement concerne presque exclusivement des jeunes non accompagnés, en grande majorité de sexe masculin. Les mineurs placés en détention en vue du refoulement constituent-ils une catégorie de population particulièrement récalcitrante ou difficile à expulser?

­

Existe-t-il des raisons particulières expliquant pourquoi les cantons maintiennent les mineurs plus longtemps en détention (selon les informations recueillies par la CdG, l'administration fédérale suggère la possibilité que l'expulsion soit repoussée jusqu'à ce que les mineurs deviennent majeurs afin de s'épargner le surcroît d'organisation que nécessite leur expulsion; la Convention des droits de l'enfant dispose en effet que les mineurs ne peuvent être expulsés vers leur pays d'origine ou vers un Etat tiers que si l'on a la garantie qu'ils pourront être confiés à des parents à l'aéroport ou accueillis dans un orphelinat, p. ex.)?

­

Les cantons sont-ils suffisamment sensibilisés aux obligations figurant dans la Convention des droits de l'enfant, à savoir que la détention des enfants soit aussi brève que possible et que l'intérêt supérieur de l'enfant soit pris en considération dans toutes les décisions?

2378

Recommandation 2

Analyser les raisons des longues durées de détention des mineurs

La CdG-N recommande au Conseil fédéral d'analyser les raisons pour lesquelles les mineurs sont, en moyenne, détenus plus longtemps que les adultes et de prendre le cas échéant les mesures nécessaires pour garantir le respect de la Convention des droits de l'enfant.

Par ailleurs, la CdG-N constate, comme dans son rapport du 24 août 2005 sur les mesures de contrainte en matière de droit des étrangers, que les grandes différences de pratique entre les cantons peuvent créer des inégalités choquantes. En effet, alors que des dispositions législatives ou administratives interdisent la détention des mineurs en vue du refoulement dans certains cantons (bien que le droit fédéral prévoie la possibilité de placer en détention en vue du refoulement des mineurs de plus de 15 ans; cf. art. 13c, al. 3, LSEE), la plupart d'entre eux l'ordonnent selon les mêmes critères pour les mineurs et pour les adultes. Ainsi, un mineur peut faire jusqu'à neuf mois de détention dans un canton et, pour un même comportement, échapper à la détention en vue du refoulement dans un autre.

Recommandation 3

Harmoniser les pratiques des cantons

Le Conseil fédéral intervient auprès des cantons pour qu'ils harmonisent leurs pratiques en matière de détention en vue du refoulement, de façon à éviter les inégalités manifestes.

2.2

Conditions de détention et séparation des mineurs et des adultes pendant la détention en vue du refoulement

La Convention des droits de l'enfant demande que les Etats parties veillent à ce que tout enfant privé de liberté soit traité selon les besoins de son âge et, en particulier, que tout enfant privé de liberté soit séparé des adultes, à moins que l'on n'estime préférable de ne pas le faire dans l'intérêt supérieur de l'enfant (art. 37, let. c, CRDE). Lorsqu'elle a ratifié la convention, la Suisse a formulé une réserve concernant l'art. 37, let. c, suivant laquelle «la séparation des jeunes et des adultes privés de liberté n'est pas garantie sans exception.» Dans son rapport initial au Comité des droits de l'enfant de l'ONU sur la mise en oeuvre de la convention, la Suisse a indiqué que, pour le moment, elle ne pouvait garantir une séparation des jeunes et des adultes placés en détention dans tous les cas, mais qu'une révision du droit pénal des mineurs prévoyait leur séparation complète. Elle précisait toutefois que si les cantons seraient tenus d'appliquer les nouvelles dispositions dès leur entrée en vigueur pour la détention préventive, ils disposeraient d'un délai de dix ans pour créer les

2379

établissements nécessaires à l'exécution des peines et des mesures. A l'échéance de ce délai, un retrait de la réserve serait possible10.

La plupart des cantons disent ne pas accorder aux mineurs de conditions de détention particulières, c'est-à-dire adaptées à leur âge, par rapport aux adultes, hormis les allégements attachés au caractère administratif de la détention en vue du refoulement par opposition à la détention provisoire et à la détention pour l'exécution d'une peine (cf. point 1 de l'annexe). Un canton se réfère à un arrêt du Tribunal fédéral selon lequel les mineurs n'ont pas droit à un régime de détention spécial. Dans cet arrêt, qui date de 1966, le Tribunal fédéral explique que, bien que le recourant soit encore mineur, ce statut ne lui donne pas en soi le droit de bénéficier d'un régime de détention spécial, même s'il faut tenir compte des besoins des personnes de son âge.

Le Tribunal fédéral ajoute que, selon l'art. 13c, al. 3, LSEE, il est exclu d'ordonner la mise en détention en phase préparatoire ou en vue du refoulement à l'encontre d'enfants et d'adolescents de moins de quinze ans révolus; le législateur est donc parti du principe qu'à partir de cet âge, la détention peut avoir lieu dans les mêmes établissements que pour les adultes (ATF 122 II 299, consid. 7a).

Dans presque tous les cantons, les détenus mineurs placés en détention en vue du refoulement ne sont pas séparés des adultes. Le Tribunal fédéral s'est également exprimé sur ce point dans le même arrêt, relevant que les autorités cantonales objectent à juste titre que les dispositions applicables au droit pénal et à la détention provisoire concernant la séparation des mineurs et des adultes ne peuvent être simplement transposées à la détention administrative prévue par le droit des étrangers; en effet, il s'agit, dans le premier cas, de protéger des jeunes influençables de contacts avec des délinquants plus âgés (et éventuellement plus endurcis), alors que dans le second cas il n'y a pas de nécessité de cet ordre (ATF 122 II 299, consid. 7a).

Cet arrêt du Tribunal fédéral a été rendu avant l'entrée en vigueur de la Convention des droits de l'enfant pour la Suisse, en 1997. Celle-ci impose-t-elle une obligation de séparation plus étendue ou des conditions de détention particulières? La jurisprudence ne s'est pas
exprimée sur cette question à ce jour.

La CdG-N aboutit à la conclusion qu'il est nécessaire de clarifier sur le plan juridique la question de la séparation des mineurs placés en détention en vue du refoulement. La Convention des droits de l'enfant fait obligation de séparer les mineurs des adultes, mais cette disposition est-elle applicable à la forme particulière de détention administrative que constitue la détention en vue du refoulement? Dans l'affirmative, la CdG-N jugerait nécessaire que les cantons montrent leur volonté de prendre les mesures indispensables à l'application d'une telle séparation, afin que la réserve de la Suisse puisse être retirée dans les meilleurs délais. D'autres éclaircissements s'imposent en ce qui concerne la mise en oeuvre concrète dans les cantons de cette obligation de séparation. La séparation des mineurs peut-elle, dans certaines circonstances, conduire à un isolement contraire à la loi ou suffit-il de mettre à la disposition des mineurs des cellules individuelles dont les portes ouvertes permettent une libre circulation et des contacts sociaux? Il conviendrait en tout état de cause d'examiner dans quelle mesure les mineurs placés en détention en vue du refoulement ne devraient pas être regroupés dans des centres particuliers, afin de leur offrir 10

Rapport initial de la Suisse au Comité des droits de l'enfant de l'ONU sur la situation réelle des enfants en Suisse et sur le régime juridique qui leur est applicable (résumé de la version originale du rapport du 1.11.2000), p. 15 (n'existe qu'en allemand).

2380

des conditions de détention adaptées (séparation des adultes sans risque d'isolement et possibilité de garder des contacts avec d'autres mineurs).

Recommandation 4

Clarifier la question des conditions de détention particulière

La CdG-N recommande au Conseil fédéral, d'une part, de clarifier la question de savoir si la Convention des droits de l'enfant impose des conditions de détention particulières pour les mineurs en détention en vue du refoulement et en particulier une séparation d'avec les adultes et, d'autre part, de se concerter avec les cantons afin de rechercher des solutions concrètes pour mettre en oeuvre ces éventuelles obligations.

2.3

Séparation des mineurs en détention en vue du refoulement d'avec leurs parents

Selon la Convention des droits de l'enfant, un enfant ne peut être séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant (art. 9, al. 1, CRDE). Le présent rapport ne se penche pas plus avant sur la question de savoir dans quelle mesure cette disposition s'applique à la détention des mineurs en détention en vue du refoulement. Néanmoins, on peut dire que, selon l'esprit de la Convention des droits de l'enfant, il faut éviter autant que possible de séparer de leurs parents les mineurs placés en détention en vue du refoulement.

La plupart des cantons devant expulser des familles ne placent en détention que le chef de famille. Seuls quelques cantons n'excluent pas la détention de familles entières. En tout état de cause, les résultats de l'enquête menée auprès des cantons ne mettent pas en évidence de problèmes en ce qui concerne la séparation des mineurs en détention en vue du refoulement d'avec leurs parents.

2.4

Accès à l'assistance judiciaire et mesures tutélaires

Aux termes de l'art. 37, let. d, de la Convention des droits de l'enfant, les Etats parties doivent veiller à ce que «les enfants privés de liberté aient le droit d'avoir rapidement accès à l'assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée». La loi sur l'asile dispose quant à elle que les cantons nomment «immédiatement une personne de confiance chargée de représenter les intérêts de l'enfant pendant la durée de la procédure» (art. 17, al. 3, LAsi11). La plupart des cantons partent dès lors du principe que cette personne de confiance poursuit sa mission pendant la détention en vue du refoulement. En général, elle est par ailleurs informée le cas échéant de la mise en détention. Ainsi, seuls quelques cantons accordent une véritable assistance judiciaire, et uniquement à certaines conditions (cf. ch. 4 de l'annexe). Dans le

11

Loi sur l'asile du 26.6.1998 (LAsi; RS 142.31).

2381

domaine de la LSEE12, celle-ci semble encore plus aléatoire, d'autant qu'aucune personne de confiance au sens de la loi sur l'asile n'est nommée pour défendre leurs intérêts. Les cantons doivent toutefois veiller à prendre, si nécessaire, des mesures tutélaires pour les mineurs non accompagnés, comme le prévoit le code civil13.

Toujours est-il que de nombreux cantons ne prennent aucune mesure particulière pour soutenir les mineurs, se contentant de leur remettre un document qui leur explique leurs droits ou d'attirer leur attention sur la liste des avocats.

La CdG-N estime qu'il faut tenir compte de manière appropriée des besoins de protection particuliers des mineurs non accompagnés placés en détention en vue du refoulement, conformément au principe de l'intérêt supérieur de l'enfant inscrit dans la Convention des droits de l'enfant. Du point de vue de la CdG-N, les différents régimes juridiques (LAsi, LSEE) et les différences de pratique entre les cantons font courir le risque que tous les mineurs concernés ne bénéficient pas de l'assistance dont ils ont besoin.

Recommandation 5

Garantir l'assistance judiciaire et prendre d'éventuelles mesures tutélaires

La CdG-N recommande au Conseil fédéral d'intervenir auprès des cantons pour qu'ils garantissent l'assistance judiciaire et prennent d'éventuelles mesures tutélaires (institution d'un tuteur ou d'un curateur). L'objectif serait de faire en sorte que les cantons coopèrent et adoptent une pratique harmonisée et conforme aux intérêts de l'enfant.

3

Suite de la procédure

La CdG-N prie le Conseil fédéral de prendre position, d'ici à la fin mars 2007, au sujet des conclusions et des recommandations exposées dans le présent rapport et de l'informer des mesures prises en conséquence.

7 novembre 2006

Au nom de la Commission de gestion du Conseil national Le vice-président: Pierre-François Veillon Le secrétaire: Philippe Schwab La présidente de la sous-commission DFJP/ChF: Lucrezia Meier-Schatz La secrétaire de la sous-commission: Irene Moser

12 13

Cas des mineurs qui séjournent illégalement en Suisse sans avoir déposé de demande d'asile et qui sont placés en détention en vue du refoulement.

Code civil suisse, art. 368 (CC; RS 210).

2382

Annexe

Enquête de la CdG-N concernant la protection de l'enfance et les mesures de contrainte dans le droit des étrangers Evaluation menée par le Contrôle parlementaire de l'administration du 21 mars 2006

2383

Remarques préliminaires Le 14 novembre 2005, la CdG-N a procédé à une enquête par écrit auprès des 26 cantons. Tous ont répondu14, à l'exception du canton du VS, mais la qualité des réponses n'était pas toujours satisfaisante. Ainsi, les cantons de BS et de LU n'ont pu rendre que des estimations, et celui de ZH, que des données grossièrement structurées.

L'évaluation contient les principaux résultats de l'enquête et expose brièvement les différences entre les cantons.

1.

Détention préparatoire et détention en vue du refoulement.

Application aux mineurs

Dans 20 cantons, des adolescents sont mis en détention préparatoire ou en détention en vue du refoulement. Un seul canton a précisé le type de détention concerné, mais de manière générale, la détention préparatoire semble extrêmement rare (UR mentionne un cas unique). L'analyse qui suit porte donc exclusivement sur la détention en vue du refoulement (ci-après: détention).

Dans les cantons de GE, de NE et de VD, des dispositions légales ou internes à l'administration interdisent la détention pour les mineurs. Le canton du TI n'a mis aucun mineur en détention car il a préféré d'autres mesures telles que les programmes de rapatriement. Le canton de GL, qui n'a pas non plus mis de mineurs en détention, laisse les personnes concernées sur leur lieu de séjour jusqu'à disposer des papiers permettant d'exécuter le renvoi. Les cantons d'AI, d'AR et du JU appliquent la détention aux mineurs, mais n'ont eu aucun cas de ce type durant la période sous revue (2002 à 2004). Dans le canton de FR, le règlement concernant la détention en matière de droit des étrangers prévoit qu'il faut tenir compte du jeune âge des détenus et qu'il peut être dérogé au régime de détention en faveur des mineurs.

Entre 2002 et 2004, 355 mineurs ou présumés mineurs ont été mis en détention préparatoire ou en détention en vue du refoulement dans 17 cantons. Près de la moitié des cas provenaient du canton de ZH (162 cas); puis, on trouve dans l'ordre les cantons de BL (42 cas), de BE (39) et de BS (24), suivis par les cantons de SO (16), des GR (14) et de SG (12); les autres cantons comptaient tous moins de dix cas de mise en détention sur les trois années considérées. Dans tous les cantons ayant compté plus de dix cas, ainsi que dans le canton d'UR, des mineurs ont été mis en détention chacune des trois années considérées; dans les autres cantons, certaines années se sont écoulées sans aucune mise en détention de mineurs.

Le tableau ci-dessous présente la durée de la détention entre 2002 et 2004 dans les cantons ayant répondu au questionnaire (sauf ZH et LU [entre 3 et 6 cas env.], le premier n'ayant distingué qu'entre les détentions supérieures et inférieures à quatre jours, le second n'ayant donné aucune indication sur la durée de la détention), le nombre total de mineurs mis en détention sur les trois années et le nombre de
demandeurs d'asile parmi eux. Dans leur grande majorité (plus de 139 cas sur 188), les mineurs mis en détention relevaient du domaine de l'asile. Le canton de ZH, dont les données n'apparaissent pas dans le tableau, n'a pas distingué les cas relevant du 14

Les données du canton du Valais conernant les mineurs en détention en vue de refoulement font l'objet de la note de bas de page no 8 (chap. 2.1 du rapport)

2384

domaine de l'asile de ceux relevant de la LSEE. On peut toutefois déduire de l'évaluation menée par le CPA sur les mesures de contrainte15 que, sur l'ensemble des cas (mineurs comme adultes), ceux ressortissant à la LSEE sont nettement plus nombreux (74 %). On retrouve d'ailleurs une proportion similaire dans le canton de ZH s'agissant des mineurs: de 2001 à 2003, 190 mineurs ont été mis en détention, et près de deux tiers d'entre eux relevaient du domaine de la LSEE.

Tableau 1 Nombre de mineurs mis en détention en vue du refoulement.

Durée de la détention et nombre de demandeurs d'asile par canton (période 2002 à 2004) Jusqu'à 4 jours

Jusqu'à 1 mois

Jusqu'à 3 mois

Jusqu'à 6 mois

AG* BE BL BS** FR GR NW OW SG SH SO SZ** TG*** UR ZG

2 5 8 24 4 5 2 1

1 11 5

13 22

10 5

3 6

2

1

2

1

Jusqu'à 9 mois

2

2

12

Total

Demandeurs d'asile

3 39 42 24 7 14 2 6 12 2 16 6 4 7 4

3 39 33 ** 4 14 2 6 12 1 11 ** 4 7 3 min. 139 (max. 165)

1 7 6

1 6

1 3

3 1

2

Total

69

39

54

17

9

188

En %

36 %

21 %

29 %

9%

5%

100 %

* ** ***

3 4 1

Pas de données pour le domaine LSEE Pas de distinction entre LSEE et asile Durée moyenne uniquement

Dans 36 % des cas, la durée de la détention est très courte, soit inférieure ou égale à quatre jours, tandis que dans 5 % des cas, tous enregistrés dans quatre cantons (BL, OW, TG et UR), celle-ci peut durer entre six et neuf mois. Le canton de ZH a indiqué que, sur un total de 162 mineurs, 74 avaient été mis en détention pour moins de quatre jours et 88 pour plus de quatre jours. Au total (cas du canton de ZH et cas des

15

Evaluation des mesures de contrainte en matière de droit des étrangers. Rapport final du Contrôle parlementaire de l'administration à l'attention de la Commission de gestion du Conseil national du 15.3.2005 (FF 2006 2539).

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autres cantons), près de 60 % des mineurs concernés ont été mis en détention pour plus de quatre jours.

Pour préciser la durée de la détention dans le canton de ZH, il a fallu tirer les données spécifiquement applicables aux mineurs de l'évaluation du CPA pour les années 2001 à 2003. Sur cette période, 190 mineurs ont été mis en détention: 122 relevaient du domaine de la LSEE et 68 de celui de l'asile; seul un cas de détention préparatoire a été recensé (en 2001, LSEE, 25 jours de détention). Le tableau ci-dessous permet dès lors de comparer, sur la base de l'évaluation menée en 2005 par le CPA, la durée de la détention des mineurs à la durée de la détention pour l'ensemble des cas (détention en vue du refoulement des mineurs et des adultes dans cinq cantons).

Tableau 2 Mineurs en détention en vue du refoulement selon la durée et comparaison avec les résultats de l'enquête 2005 menée par le CPA

Enquête de la CdG, mineurs en détention: N=188; 15 cantons; 2002 à 2004 Evaluation du CPA, mineurs en détention dans le canton de ZH: N=190; 2001 à 2003 Evaluation du CPA, ensemble des cas de détention dans 5 cantons (BL, GE, SH, VS, ZH):; N=6952; 2001 à 2003

Jusqu'à 4 jours

Jusqu'à 1 mois

Jusqu'à 3 mois

Jusqu'à 6 mois

Jusqu'à 9 mois

69 (36 %)

39 (21 %)

54 (29 %)

17 (9 %)

9 (5 %)

93 (48 %)

43 (23 %)

21 (11 %)

26 (14 %)

7 (4 %)

4369 (63 %)

1351 (19 %)

685 (10 %)

434 (6 %)

113 (2 %)

La durée de la détention des mineurs dans le canton de ZH est similaire à celle observée dans les autres cantons dans l'enquête de la CdG. Il ressort qu'une part relativement importante des détentions dure entre trois et neuf mois et que, par rapport à l'ensemble des cas de détention (mineurs et adultes) recensés dans cinq cantons, les mineurs sont plus fréquemment détenus pour une durée supérieure à quatre jours. Les mineurs sont donc détenus plus longtemps que les adultes.

58 % des mineurs mis en détention étaient originaires des Balkans ou de l'est de l'Europe, 27 % provenaient d'Afrique, et 14 % du reste du monde (1 % d'origine inconnue).

L'art. 13b, al. 1, let. c, LSEE (risque de passage à la clandestinité) est de loin le motif de détention le plus fréquemment cité. Ponctuellement, c'est l'art. 13b, al. 1, let. b, LSEE qui est avancé, en relation avec l'art. 13a, let. e (poursuite pénale pour mise en danger de la vie ou de l'intégrité corporelle d'autrui), ou, dans un cas, en relation avec l'art. 13a, let. b (inobservation du périmètre d'assignation ou d'exclusion).

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La grande majorité des cantons exécute de la même manière les ordres de mise en détention des mineurs ou des adultes. Les cantons de BE et de SG indiquent mettre en oeuvre la mesure en tenant compte tout particulièrement de l'âge des intéressés; le canton du JU précise l'éviter autant que possible pour les mineurs; le canton de LU indique tenir compte de la situation familiale et de la santé de la personne concernée.

Dans le canton de FR, la mesure n'est mise en oeuvre qu'après que l'on s'est assuré qu'aucune autre mesure ne permet l'exécution du renvoi.

En général, les mineurs mis en détention ne bénéficient pas de conditions de détention particulières: selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, rappellent les cantons, ils n'ont d'ailleurs pas droit à un régime de détention spécial (ATF 122 II 312 E.7).

Certains cantons soulignent leur accorder des avantages (possibilité de recevoir plus de colis ou d'utiliser la salle de musculation deux fois par semaine au lieu d'une).

Dans le canton de BS, des conditions de détention particulières (séparation d'avec certains détenus) peuvent être accordées à la demande des autorités responsables de la détention.

Les cantons ayant appliqué des mesures moins sévères que l'outil coercitif de la détention en tirent des enseignements divers. Le plus souvent, ces mesures sont qualifiées de mauvaises, et les cantons concernés soulignent qu'elles ne remplacent pas une mise en détention. Cinq cantons les considèrent toutefois plus ou moins comme des solutions de rechange crédibles (BS, GL, SO. TG, VD). Un canton (AI) a relevé que le bilan des mesures moins sévères était plus mauvais avec les adolescents qu'avec les adultes.

2.

Séparation des familles

Lorsqu'ils doivent mettre en détention une famille avec enfants, la plupart des cantons procèdent de la même manière: ils arrêtent le père et laissent les enfants aux soins de la mère, ce qui permet de ne pas les séparer totalement de leurs parents. Le jour du départ, la police va chercher la mère et les enfants et les amène à l'aéroport, où, en règle générale, le père a lui aussi été transféré depuis son lieu de détention.

Aucun chiffre n'est donné sur la fréquence de ces procédures, même si quelques cantons indiquent leur caractère absolument exceptionnel. Dans les cantons de BS et de LU, la mise en détention de toute une famille n'est pas exclue.

Les cantons devaient indiquer combien de mineurs accompagnés et non accompagnés avaient été mis en détention entre 2002 et 2004. Ceux qui ont répondu ont indiqué qu'il s'agissait toujours de mineurs non accompagnés, à trois exceptions près: dans le premier cas (AG), c'est pour garantir le renvoi qu'une mère et sa fille de 17 ans ont été mises en détention; dans le deuxième cas (BS), une mineure a été mise en détention après que sa mère était entrée dans la clandestinité; dans le troisième cas (FR) un mineur a été placé en détention en même temps que son père (pour une durée de quatre jours). Le canton de ZH a souligné qu'il ne faisait pas la distinction dans ses statistiques entre mineurs accompagnés et mineurs non accompagnés. Il a en outre précisé que, en général, les familles sont amenées directement à l'aéroport le jour de l'exécution du renvoi: ce n'est que dans des cas exceptionnels que des membres d'une famille (parent ou éventuellement adolescent) devaient préalablement être mis en détention.

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3.

Séparation des détenus mineurs et majeurs

Dans presque tous les cantons, les mineurs ne sont pas séparés des adultes. Deux cantons prévoient cette séparation, mais ils n'ont mis aucun mineur en détention. Un canton a indiqué qu'il était tenu par les dispositions cantonales de trouver des locaux appropriés.

Deux cantons n'excluent pas de placer en cellule individuelle les mineurs en instance de renvoi, du moins initialement. Dans quelques prisons, les seules cellules individuelles disponibles sont ouvertes durant la journée. Dans le canton de SG, la personne peut choisir si elle veut être détenue en cellule individuelle ou en cellule double.

Le canton d'AG a relevé que sa loi d'application (comme celle d'autres cantons) fait obligation de laisser les personnes mises en détention en vue du refoulement avoir les contacts sociaux les plus libres possibles avec les autres détenus en instance de renvoi qui se trouvent dans le même établissement. Concrètement, les détenus peuvent notamment circuler dans l'établissement et les portes de leur cellule doivent rester ouvertes dix heures par jour. Le canton d'AG a par ailleurs fait remarquer que séparer les mineurs des autres détenus reviendrait en l'occurrence à les placer de facto en isolement ­ interdit par la loi ­, puisque le canton ne compte pratiquement jamais deux mineurs en détention en même temps. Le canton de ZH, qui compte un nombre appréciable de mineurs en détention, a relevé pour sa part que, du fait des différentes religions et ethnies en présence, la détention préparatoire ou en vue du refoulement était déjà difficile, et qu'il était donc préférable de mettre en adolescent avec un de ses compatriotes adultes plutôt qu'avec des adolescents d'une ethnie ou d'une religion opposées.

4.

Accès à l'assistance judiciaire et mesures tutélaires jusqu'au départ

Les cantons devaient indiquer si les mineurs mis en détention bénéficiaient d'un encadrement particulier. La grande majorité des cantons ont répondu par la négative, rappelant que, dès le début de la procédure, les mineurs non accompagnés qui déposent une demande d'asile se voient nommer un tuteur ou un curateur, lequel est informé en général de la mise en détention.

Seuls quelques cantons accordent une assistance judiciaire aux mineurs, et uniquement à certaines conditions: le canton de SZ l'accorde en principe à chaque contrôle judiciaire de la légalité de la détention; le canton des GR l'accorde lorsqu'il prévoit plus de 45 jours de détention ou des difficultés dans l'application du droit; le canton de LU l'accorde automatiquement aux mineurs qui n'ont «manifestement» pas menti sur leur âge; enfin, le canton de SG l'accorde pour les prolongations de la détention allant au-delà de trois mois. Dans le canton de FR, les mineurs sont annoncés d'office à la Justice de paix afin d'examiner l'opportunité de les mettre sous curatelle. Toute personne peut par ailleurs demander l'assistance judiciaire dès la mise en détention, et les mineurs en bénéficient systématiquement. Le canton de SH procure une assistance judiciaire aux mineurs. Les autres cantons n'accordent pas d'assistance judiciaire. Ils ont précisé qu'ils remettaient aux mineurs un document qui leur explique leurs droits, qu'ils appelaient leur attention sur la liste des avocats

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ou qu'il revenait aux tribunaux d'accorder l'assistance judiciaire aux personnes mises en détention.

5.

Vérification de l'âge et harmonisation des statistiques

S'agissant de la vérification de l'âge (mineur ou majeur), les cantons ont le plus souvent indiqué qu'ils ne procédaient pas à des vérifications particulières ou qu'ils s'appuyaient sur les investigations menées par l'ODM. Dans le domaine de la LSEE, les offices cantonaux responsables des migrations se contentent en général des déclarations de la personne concernée, des documents disponibles et des informations prises auprès des représentations étrangères. Parfois, des informations sont aussi fournies par les autorités de procédure pénale, étant donné que, en cas d'infraction, c'est l'âge de la personne qui détermine le tribunal compétent.

La plupart des cantons traitent les personnes en instance de renvoi dont l'âge ne peut être établi avec certitude en fonction de l'âge qu'elles ont indiqué ou qui figure sur le dossier. Les cantons d'AG et de LU ajoutent que, lorsqu'il est manifeste ou vraisemblable qu'une personne qui se déclare mineure ne l'est pas, elle est enregistrée comme majeure et traitée comme telle. Dans l'immense majorité des cantons, c'est l'âge figurant sur le dossier ou les indications de l'ODM qui sont déterminants.

Sept cantons, qui comptaient au total 52 mineurs en détention, ont répondu à la question portant sur les papiers d'identité. Selon leurs indications, 58 % d'entre eux (soit 30 mineurs) ne possédaient aucun papier d'identité. Le canton des GR a précisé qu'entre 2002 et 2004 une mise en détention préparatoire ou en vue du refoulement avait été ordonnée contre quatorze personnes qui avaient déclaré être mineures lors de la procédure d'asile, et que, après obtention des documents de voyage, il était apparu que seules quatre d'entre elles étaient incontestablement mineures (dans trois cas, aucune vérification n'a été possible, et dans sept cas, les contrôles d'identité menés dans le pays d'origine ont permis d'établir que les personnes concernées étaient majeures). Les mineurs mis en détention avaient entre 16 ans et 8 mois et 17 ans et demi. L'enquête menée auprès des cantons ne permet pas de dire si les chiffres fournis par les GR sont représentatifs.

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