07.021 Message concernant le Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil du 28 février 2007

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'approuver, un projet d'arrêté fédéral concernant le Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil signé le 12 mai 2004 à Berne.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

28 février 2007

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Micheline Calmy-Rey La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2005-1637

1903

Condensé Point de la situation Actuellement, l'efficacité de la lutte contre la criminalité passe de plus en plus par la coopération judiciaire en matière pénale. Sous l'effet de la globalisation croissante et de la mondialisation, le caractère transfrontalier de la criminalité se renforce. Les nouvelles technologies, notamment en matière de communication et de transmission des données, contribuent à l'internationalisation grandissante de la criminalité. En outre, certains types de criminalité sont de plus en plus souvent le fait d'organisations structurées. Tous ces éléments ont pour résultat qu'un Etat est de moins en moins capable de maîtriser seul les enjeux d'une lutte efficace contre le crime. Pour contrecarrer le déficit de sécurité qui peut en résulter, il convient de développer continuellement, à l'échelle mondiale, un réseau de traités bilatéraux dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale. La conclusion du Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil apporte une nouvelle pierre à cet édifice. Il constitue, en outre, une poursuite dans la voie de la coopération engagée avec cet Etat qui est le plus grand d'Amérique latine, puisque la Suisse et le Brésil ont conclu un Traité d'extradition dès 1932.

Dans le cadre des relations avec le Brésil, la volonté première de la Suisse était de pouvoir, à l'avenir, lutter plus efficacement contre les auteurs d'infractions telles que la corruption, le trafic illicite de stupéfiants, le blanchiment d'argent et la traite des femmes et des enfants. Ceci importe d'autant plus que la Suisse entretient avec le Brésil d'importantes relations d'entraide judiciaire internationale pénale, comme en témoignent les statistiques des dernières années.

Teneur du Traité Le Traité établit une base légale internationale permettant aux deux Etats de coopérer dans la recherche, la poursuite et la répression d'infractions. Les Etats contractants s'y sont engagés à s'accorder mutuellement l'entraide judiciaire dans les limites fixées par le texte. Jusqu'ici, la Suisse ne pouvait accorder l'entraide judiciaire au Brésil que sur la base du Traité d'extradition conclu avec cet Etat (art. XVII; RS 0.353.919.8) et de la loi sur l'entraide pénale internationale (EIMP; RS 351.1).

Le Traité
s'inscrit dans la lignée des instruments d'entraide judiciaire que la Suisse a conclus récemment avec les Philippines, Hongkong, l'Egypte, le Pérou et l'Equateur. A l'instar de ces derniers, il reprend les principes essentiels consacrés par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1) ainsi que par l'EIMP, tout en tenant compte des dernières évolutions dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale. Le Traité ne nécessite pas de modification du droit en vigueur.

1904

Diverses dispositions ont été intégrées dans le Traité pour éclaircir, simplifier et accélérer la procédure d'entraide judiciaire ainsi que pour améliorer, d'un point de vue général, les relations entre les autorités chargées de l'entraide dans les deux Etats.

1905

Table des matières Condensé

1904

1 Partie générale 1.1 Situation initiale 1.2 Déroulement des négociations 1.3 Aperçu de la teneur du Traité 1.4 Appréciation du Traité

1907 1907 1908 1908 1909

2 Commentaire des principales dispositions du Traité 2.1 Titre I: Dispositions générales 2.2 Titre II: Demandes d'entraide judiciaire 2.3 Titre III: Notification et comparution 2.4 Titre IV: Casier judiciaire et échange d'avis de condamnation 2.5 Titre V: Procédure 2.6 Titre VI: Transmission spontanée et dénonciation aux fins de poursuites et de confiscation 2.7 Titre VII: Dispositions finales

1910 1910 1913 1915 1917 1918

3 Conséquences 3.1 Conséquences pour les finances et le personnel de la Confédération et des cantons 3.2 Conséquences économiques

1920

1919 1920

1920 1921

4 Programme de la législature

1921

5 Relation avec le droit européen

1921

6 Aspects juridiques 6.1 Constitutionnalité 6.2 Procédure de consultation

1921 1921 1922

Arrêté fédéral portant approbation du Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil (Projet)

1923

Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil

1925

1906

Message 1

Partie générale

1.1

Situation initiale

Le Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République fédérative du Brésil (ci-après le Traité) est un instrument de lutte contre la criminalité qui répond à l'exigence d'une lutte plus efficace contre ce fléau, dans l'intérêt d'une meilleure sécurité. En effet, un Etat est de moins en moins capable de maîtriser seul les enjeux d'une lutte efficace contre la criminalité.

Le Brésil est l'Etat d'Amérique latine le plus important avec lequel la Suisse a de nombreux cas d'entraide judiciaire en matière pénale, au sens des statistiques de ces dernières années. L'entraide judiciaire en matière pénale entre les deux Etats est actuellement régie, au niveau international, par l'art. XVII du Traité d'extradition du 23 juillet 1932 entre la Suisse et le Brésil1. Cette disposition prévoit la possibilité pour les deux Etats de se présenter des commissions rogatoires (demandes d'entraide judiciaire en matière pénale) par la voie diplomatique. Les nombreuses commissions rogatoires émanant de et adressées au Brésil présentent actuellement des déficits que le projet de Traité résout, par les éclaircissements qu'il apporte ainsi que par la simplification et l'accélération de la procédure qu'il institue entre les deux Etats. Le Traité apporte notamment les éclaircissements utiles aux autorités concernées. Ainsi, par exemple, certaines commissions rogatoires émanant du Brésil ne contiennent actuellement qu'un exposé lacunaire des faits et les autorités suisses sont dans l'incapacité de vérifier que ces faits répondent à l'exigence de la double punissabilité, essentielle pour l'octroi de l'entraide. La réglementation précise et détaillée du Traité palliera cette carence.

En conséquence, l'objectif du Traité est de lutter plus efficacement contre la criminalité en améliorant, en renforçant, en éclaircissant, en simplifiant et en accélérant la coopération entre les deux pays. Sont particulièrement concernés les domaines de la lutte contre la corruption, le trafic illicite de stupéfiants, le blanchiment d'argent et la traite des femmes et des enfants. Les autres infractions pénales sont cependant également couvertes par les dispositions du Traité.

Ce dernier reprend les principes essentiels consacrés par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale ainsi
que par la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, tout en tenant compte des dernières évolutions dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale. Peuvent être cités à titre d'exemple de telles évolutions l'audition par conférence vidéo, la création d'Autorités centrales qui communiquent directement entre elles, la dispense de formalité et la transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations. Une disposition régissant l'audition par conférence vidéo ainsi que la transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations ne se trouve pas, par exemple, dans des traités récents comme le Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République du Pérou2 en vigueur depuis 1998 ou le Traité d'entraide

1 2

RS 0.353.919.8 RS 0.351.964.1

1907

judiciaire en matière pénale entre la Confédération suisse et la République de l'Equateur3 en vigueur depuis 1999.

1.2

Déroulement des négociations

Le Traité résulte de deux rondes de négociations qui se sont déroulées en mai 2003 à Brasilia et en août 2003 à Berne. La délégation brésilienne a accepté d'abandonner, comme texte de base des négociations, sa proposition de Traité conclu avec les Etats-Unis fondée sur le droit anglo-saxon. Ladite délégation a ensuite souscrit au modèle de Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, auquel ont été incluses des dispositions modernes postérieures importantes en pratique.

1.3

Aperçu de la teneur du Traité

Le Traité règle la coopération entre la Suisse et le Brésil en matière de recherche, de poursuite et de répression des infractions. Les Etats contractants s'y engagent à s'accorder mutuellement l'entraide judiciaire la plus large possible en la matière, au sens du Traité. Jusqu'à présent, la Suisse ne pouvait accorder l'entraide au Brésil que, d'une part, sur la base de l'art. XVII du Traité d'extradition entre la Suisse et le Brésil, ce dernier instrument instituant uniquement la possibilité qu'ont les deux Etats de se présenter une commission rogatoire par la voie diplomatique et, d'autre part, sur la base de la loi sur l'entraide pénale internationale.

Les difficultés rencontrées dans les relations d'entraide justifient un Traité apportant les éclaircissements nécessaires au bon déroulement de la procédure, une simplification et une accélération de la procédure.

Le Traité est un instrument moderne et efficace. Il se situe dans la lignée des traités bilatéraux d'entraide judiciaire que la Suisse a récemment conclus4. A l'instar de ces derniers, il s'inspire de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale ainsi que de l'EIMP, dont il reprend les principes essentiels. Par conséquent, il ne nécessite pas de modification de cette loi. Le Traité prend également en compte les dernières évolutions provenant essentiellement du droit interne suisse et du Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale; STCE n°: 1825.

Parmi les principales innovations qu'il contient, il convient de mentionner que: ­

3 4 5

des Autorités centrales sont prévues (art. 1, par. 2, et art. 23), lesquelles communiquent directement entre elles, ce qui est un gain de temps en particulier lorsque des demandes d'entraide problématiques sont présentées. La pratique montre des commissions rogatoires brésiliennes insuffisamment motivées; les contacts directs permettront de les faire améliorer plus rapidement;

RS 0.351.932.7 Traités d'entraide judiciaire avec les Philippines (RS 0.351.964.5), Hong Kong (RS 0.351.941.6), l'Egypte (RS 0.351.932.1), le Pérou et l'Equateur.

RS 0.351.12; en vigueur depuis le 1er février 2005.

1908

­

les objets ou valeurs saisis à titre conservatoire peuvent être remis à l'Etat requérant en vue de leur confiscation ou de leur restitution à l'ayant droit (art. 12);

­

à certaines conditions, des moyens de preuve et des informations peuvent être transmis à l'autre Etat contractant même si ce dernier n'a pas présenté au préalable une demande d'entraide judiciaire (art. 29);

­

les témoins, les experts et, si elles y consentent, les personnes poursuivies pénalement peuvent être interrogés par conférence vidéo, s'il est impossible ou inopportun qu'ils comparaissent en personne sur le territoire de l'autre Etat contractant (art. 21);

­

à titre de motif supplémentaire de refus, le Traité prévoit explicitement que l'entraide judiciaire peut être refusée s'il existe de sérieuses raisons de supposer que la procédure étrangère viole les garanties contenues dans le Pacte de l'ONU du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (art. 3, par. 1, let. f). La Suisse et le Brésil ont tous deux ratifié cet instrument.

Les prescriptions de procédure figurant dans la première et la troisième partie de l'EIMP forment la base de l'application du Traité.

1.4

Appréciation du Traité

Le Traité doit être considéré comme faisant partie intégrante de la politique de développement du réseau d'instruments bilatéraux en matière d'entraide judiciaire que la Suisse cherche à tisser dans toutes les régions du monde. La coopération internationale dans ce domaine vise à renforcer l'efficacité de la lutte contre la criminalité.

Le Traité est en harmonie avec les dispositions et les principes éprouvés qui régissent le domaine de l'entraide judiciaire. Il reprend les principes essentiels consacrés par le droit suisse en la matière, tels que la double punissabilité, la règle de la spécialité et le principe selon lequel les mesures d'entraide sont exécutées conformément au droit procédural de l'Etat requis. Le Traité donne la faculté d'accorder l'entraide relativement aux enquêtes ou procédures pénales visant une escroquerie en matière fiscale. L'intégration de dispositions novatrices fait que cet instrument bilatéral tient également compte des dernières évolutions dans le domaine de l'entraide judiciaire.

Différentes dispositions ont, en effet, été adoptées dans le but de simplifier, d'accélérer et d'améliorer le déroulement de la procédure d'entraide. En reprenant certaines dispositions qui figuraient déjà dans l'EIMP, le Traité en fait des normes de portée internationale valables pour les deux Etats contractants.

Le Traité est un instrument moderne et simple qui répond aux impératifs de la pratique. En intégrant des dispositions qui prévoient une amélioration de la coopération entre les autorités de justice pénale des deux Etats ou qui se traduisent par une telle amélioration, il jette les bases d'un renforcement de l'efficacité dans la lutte contre la criminalité. Toutefois, ce gain d'efficacité ne doit pas se faire au détriment des droits fondamentaux des personnes concernées. Cela explique la volonté de souligner dans le texte, par l'adoption d'une disposition nouvelle, l'importance du respect des droits de l'homme. La Suisse a ainsi obtenu satisfaction sur un point qui revêt de l'importance.

1909

Le Traité est l'un des éléments de la coopération internationale entre la Suisse et le Brésil en vue de lutter contre la criminalité. Le Traité en est la composante bilatérale «coopération judiciaire en matière pénale» à laquelle s'ajoute une composante «coopération policière». Dans ce dernier domaine, la Suisse a, en février 2005, stationné un agent de liaison suisse à Brasilia.

2

Commentaire des principales dispositions du Traité

2.1

Titre I: Dispositions générales

Art. 1

Obligation d'accorder l'entraide judiciaire

Sur la base du droit international public, le par. 1 oblige les Etats contractants à s'accorder l'entraide judiciaire la plus large possible en matière pénale. Une demande d'entraide judiciaire doit, par conséquent, être exécutée s'il n'y a pas de motif d'inapplicabilité ou de refus au sens des art. 2 et 3.

Le par. 2 institue l'échange entre la Suisse et le Brésil de la liste des autorités compétentes pour présenter des demandes d'entraide judiciaire, en vue de combler une lacune apparue en pratique. Cette disposition doit se lire en relation avec l'art. 23 et ne confère pas un droit au contact direct entre autorités de poursuite pénale.

Le par. 3 énumère les mesures d'entraide judiciaire possibles selon le Traité. Il convient de relever à cet égard qu'une clause générale permet aux autorités d'ordonner toute autre mesure que celles qui sont expressément énumérées, à condition toutefois que ladite mesure soit compatible avec les buts du Traité et acceptable pour les Etats contractants (let. i). En Suisse, une telle mesure peut être arrêtée si nécessaire pour autant qu'elle respecte les limites imparties par le droit national. La clause générale précitée offre une certaine souplesse dans le cas d'espèce et permet de tenir compte de besoins particuliers et d'évolutions futures.

Art. 2

Inapplicabilité

Cette disposition explicite ce qui est exclu du champ d'application du Traité: il s'agit de l'extradition, de l'arrestation, de la recherche ou de la détention de personnes poursuivies pénalement ou condamnées pour une infraction, ainsi que l'exécution de jugements pénaux.

Art. 3

Motifs pour refuser ou différer l'entraide judiciaire

Cette disposition énumère exhaustivement les motifs qui permettent de refuser l'entraide judiciaire. Ce sont des motifs classiques de refus qui sont présentés sous forme potestative, afin que l'entraide judiciaire soit la plus large possible, mais aussi pour permettre une certaine souplesse, tenant compte de l'évolution du droit. Quant à savoir si l'Etat requis est tenu de refuser l'entraide judiciaire dans les cas énumérés, il s'agit d'un point qui se détermine dans chaque cas à la lumière du droit national. Pour la Suisse, la liste des motifs de refus est inspirée des dispositions pertinentes que sont essentiellement les art. 1a, 2 et 3 EIMP. Ces dispositions prévoient, de manière générale, une irrecevabilité de la demande d'entraide fondée sur l'un des motifs justifiant un refus. Le Traité ne prévoit cependant pas de motif d'irreceva-

1910

bilité pour des raisons de prescription de l'action pénale, ce qui représente une évolution par rapport à l'art. 5, al. 1, let. c, EIMP.

En vertu du par. 1, let. a et b, l'entraide judiciaire pourra être refusée si la procédure étrangère se rapporte à une infraction politique ou à une infraction réprimée exclusivement par la législation militaire; il en va de même lorsque l'exécution de la demande risque de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels de l'Etat requis (let. d). Selon la doctrine suisse, la notion d'«ordre public» recouvre également le respect des droits humains fondamentaux dont font notamment partie le droit à la vie, l'interdiction de la torture ou de tout autre traitement ou châtiment cruel, inhumain ou dégradant, ainsi que les garanties de procédure élémentaires. Au niveau mondial, ces garanties figurent notamment dans le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques6.

A son art. 3, par. 1, let. c, le Traité contient une clause particulière dans le domaine fiscal qui a fait l'objet de négociations ardues, la délégation brésilienne ayant longuement insisté pour obtenir l'entraide en matière fiscale. Le compromis agréé par les deux délégations prévoit que l'entraide judiciaire peut être accordée si la procédure vise une escroquerie en matière fiscale (cf. art. 3, al. 3, EIMP). L'étendue de l'entraide que la Suisse peut accorder dans le domaine des infractions fiscales a été précisée et clarifiée, à l'intention des autorités judiciaires brésiliennes, dans la deuxième phrase de l'art. 3, par. 1, let. c: «Si la demande se rapporte en partie seulement à des infractions fiscales, l'Etat requis peut limiter, pour cette partie, l'utilisation des informations et moyens de preuves fournis». Lorsque les autorités compétentes brésiliennes présentent une demande d'entraide judiciaire pour un état de fait de ce qui correspondrait en Suisse, par exemple, à un abus de confiance, une escroquerie en matière fiscale et une évasion fiscale, et si, au sens du Traité, les conditions pour le faire sont réalisées7, les autorités suisses accorderont l'entraide concernant l'état de fait qui transposé en droit suisse correspond à un abus de confiance et à une escroquerie en matière fiscale. Par contre, en relation
avec ce qui constituerait, en droit suisse, une évasion fiscale, les moyens de preuve livrés ne pourront pas être utilisés. En d'autres termes, cela signifie, pour la Suisse, que l'entraide pourra d'une part être accordée concernant les escroqueries en matière fiscale et autres infractions de droit commun, mais sera d'autre part refusée pour toute autre infraction fiscale. Cette réglementation est en harmonie avec le principe de la spécialité régi à l'art. 13 du Traité, selon lequel les actes remis ne peuvent être utilisés dans une procédure relative à une infraction pour laquelle l'entraide ne peut être fournie. Le critère d'appréciation déterminant pour l'escroquerie en matière fiscale est, en application de l'art. 5, par. 1, du Traité, le droit de l'Etat requis, donc la politique d'entraide judiciaire exercée par la Suisse jusqu'à présent en matière fiscale ne sera en rien modifiée.

En application du par. 1, let. e et f, l'entraide peut aussi être refusée s'il existe de sérieuses raisons de supposer que l'exécution de la demande conduira une personne à subir une discrimination du fait de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de son sexe ou de ses opinions politiques, ou que la procédure étrangère viole les 6 7

Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (RS 0.103.2).

Au sens de l'art. 24, par. 1, let. d, du Traité, il faut par exemple une description suffisante des faits (date, lieu et circonstances dans lesquelles l'infraction a été commise). Voir également, concernant les conditions de l'escroquerie en matière fiscale, l'ATF 125 II 250.

1911

garanties contenues dans le Pacte de l'ONU précité relatif aux droits civils et politiques.

La let. f innove par rapport aux instruments bilatéraux d'entraide judiciaire que la Suisse a conclus jusqu'ici. Elle doit être mise en relation avec le motif de refus concernant l'atteinte à l'ordre public (let. d). Là encore, la notion d'«ordre public» recouvre notamment le respect des droits humains fondamentaux et des garanties de procédure élémentaires, telles qu'ils figurent notamment dans le Pacte de l'ONU relatif aux droits civils et politiques. La mention explicite, à la let. f, du Pacte de l'ONU auquel ont adhéré depuis 1992 tant la Suisse8 que le Brésil9, renforce la sécurité du droit en précisant que l'entraide judiciaire pourra être refusée en cas de violation d'une garantie dudit Pacte. Une telle disposition renforce la dimension des droits de l'homme à la sauvegarde desquels la Suisse attache de l'importance. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsque l'Etat requérant demande l'entraide judiciaire et notamment la remise de documents bancaires, l'accusé se trouvant sur le territoire de l'Etat requérant qui peut démontrer être concrètement exposé au risque de traitements contraires à cet instrument peut invoquer la violation du Pacte ONU II précité10. Il convient à cet égard de préciser que le Brésil consacre l'abolition de la peine de mort (sauf en temps de guerre) au niveau constitutionnel.

Le par. 2 donne à l'Etat requis la possibilité de différer l'entraide judiciaire lorsque l'exécution d'une demande pourrait être préjudiciable à une procédure pénale en cours dans cet Etat. De telles situations sont rares.

Le par. 3 règle la procédure à suivre lorsque l'Etat requis souhaite refuser ou différer l'entraide judiciaire: avant de prendre une décision négative, il devra, selon let. a informer l'Etat requérant des motifs qui l'incitent à envisager de refuser l'entraide ou de différer l'exécution de la demande. Parallèlement, l'Etat requis devra, au sens de la let. b, examiner s'il peut tout de même accorder l'entraide, et à quelles conditions; le cas échéant, ces conditions devront être respectées par l'Etat requérant.

Art. 4

Ne bis in idem

Dans son essence, le «ne bis in idem» représente un principe général visant à éviter de doubles poursuites pour les mêmes faits. La présente disposition prévoit que l'entraide peut être refusée lorsque la demande vise une infraction pour laquelle la personne concernée a déjà été acquittée ou condamnée dans l'Etat requis, à condition que la sanction éventuellement prononcée soit en cours d'exécution ou ait déjà été exécutée. L'entraide peut cependant être accordée dans différentes situations, par exemple pour des faits commis partiellement ou totalement sur le territoire de l'Etat requérant (sauf s'ils ont été commis en partie sur le territoire de l'Etat requis), ou des faits constituant une infraction contre la sécurité ou d'autres intérêts essentiels de l'Etat requérant.

8 9 10

Depuis le 18 juin 1992.

Depuis le 24 janvier 1992.

ATF 129 II 271 consid. 6.1 et réf. citées.

1912

2.2

Titre II: Demandes d'entraide judiciaire

Art. 5

Droit applicable

Le par. 1 consacre le principe selon lequel les demandes seront exécutées conformément au droit de l'Etat requis. En Suisse, l'exécution se fera conformément à l'EIMP, ainsi qu'au droit de procédure déterminant des cantons et de la Confédération.

Le par. 2 permet, à certaines conditions, de déroger au principe du par. 1. A la demande explicite de l'Etat requérant, une demande d'entraide judiciaire peut être exécutée selon ses propres règles de procédure, pour autant que le droit de l'Etat requis ne s'y oppose pas. Cette possibilité de dérogation vise à éviter que l'utilisation, dans l'Etat requérant, d'éléments de preuve obtenus par la voie de l'entraide judiciaire échoue ou se heurte à des difficultés disproportionnées en raison du nonrespect d'une procédure obligatoire dans cet Etat. La même idée est à la base de l'art. 65 EIMP relatif à l'application du droit étranger dans la procédure d'entraide judiciaire suisse.

Art. 6

Mesures de contrainte

Selon cette disposition, les demandes d'entraide judiciaire dont l'exécution implique des mesures de contrainte11 devront, par principe, être acceptées. L'entraide peut cependant être refusée lorsque les faits à la base de la demande ne constituent pas une infraction punissable tant dans l'Etat requis que dans l'Etat requérant12.

L'exigence de la double punissabilité comme condition préalable à une mesure coercitive correspond à un principe important pour la Suisse, lequel figure dans la déclaration suisse relative à l'art. 5, al. 1, CEEJ, de même qu'à l'art. 64 EIMP.

Art. 7

Mesures provisoires

L'art. 18 EIMP représente le modèle de cette disposition qui revêt une importance considérable dans la pratique de l'entraide judiciaire, dans la mesure où elle permet d'intervenir très rapidement pour prendre les premières mesures de lutte contre la criminalité nécessitées par une entraide efficace, comme par exemple le blocage d'un compte bancaire ou, en matière de haute technologie, la préservation d'informations qui pourraient être rapidement détruites.

Le par. 1 prévoit que, sur demande de l'Etat requérant, l'autorité compétente de l'Etat requis ordonne des mesures provisoires. Pour qu'une telle mesure puisse être ordonnée, la condition d'absence de motifs manifestes entraînant un refus de l'entraide judiciaire doit être réalisée.

11

12

Selon la conception suisse, cette catégorie comprend toutes les mesures impliquant le recours à une contrainte prévue par le droit de procédure. Outre la perquisition et la saisie d'objets et de valeurs, il s'agit notamment de la comparution de témoins récalcitrants, des dépositions de témoins faites sous la contrainte ou de la divulgation de secrets protégés par la loi.

La double punissabilité ne signifie pas que les législations des deux Etats doivent appréhender les faits incriminés sous le même angle juridique ni que les éléments constitutifs de l'infraction que représentent ces faits doivent être identiques dans les deux droits nationaux. Il suffit que l'état de fait exposé dans la demande d'entraide judiciaire constitue une infraction aussi bien dans l'Etat requis que dans l'Etat requérant (cf. ATF 126 II 409, cons. 6c.cc, avec renvois).

1913

En cas d'urgence, le par. 2 permet d'ordonner des mesures provisoires avant même que la demande d'entraide judiciaire ait formellement été présentée. L'annonce d'une demande suffit. Toutefois, les informations communiquées doivent permettre de vérifier que toutes les conditions sont réunies pour pouvoir ordonner de telles mesures. L'Etat requérant se voit fixer un délai pour présenter sa demande formelle d'entraide judiciaire. Si ce délai n'est pas respecté, les mesures provisoires sont levées.

Art. 8

Présence de personnes qui participent à la procédure

Les personnes ou autorités participant à la procédure étrangère sont, sur demande de l'Etat requérant, autorisées à être présentes lors de l'exécution de la demande. La présente disposition est inspirée de l'art. 4 CEEJ. Lorsque la Suisse est l'Etat requis, les détails sont réglés par l'art. 65a EIMP. En ce qui concerne l'art. 8, par. 4, qui prévoit que des faits ressortissant au domaine secret ne doivent pas être portés à la connaissance des personnes participant à la procédure étrangère avant que l'autorité compétente ait statué sur l'octroi et l'étendue de l'entraide, il appartient à l'autorité suisse compétente pour l'exécution de la demande d'entraide de prendre les dispositions nécessaires.

Art. 9

Déposition de témoins dans l'Etat requis

En vertu de l'art. 9, l'audition de témoins dans l'Etat requis doit se dérouler conformément au droit de cet Etat. Le par. 1 institue que la personne concernée peut cependant aussi refuser de témoigner si le droit de l'Etat requérant le permet. Dans ce cas, le par. 2 prévoit que l'Etat requérant est appelé à confirmer qu'en l'espèce la personne concernée a le droit de refuser de témoigner. Le par. 3 consacre à cet égard que l'invocation de ce droit ne peut entraîner aucune sanction légale.

Art. 12

Restitution d'objets et de valeurs

Cette disposition importe en pratique. Elle prévoit que les objets et les valeurs saisis à titre conservatoire peuvent être remis à l'Etat requérant en vue de leur confiscation. La remise se fait selon le droit interne de l'Etat requis, en Suisse selon l'art. 74a EIMP.

L'art. 12 complète la disposition que l'on trouve habituellement sur la remise à des fins de preuve figurant à l'art. 10 du Traité. Elle tient compte du fait que la saisie, à titre conservatoire, d'objets et notamment de valeurs dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire n'a, en particulier, de sens que s'il est ensuite possible de les remettre à l'Etat requérant pour qu'il les confisque ou les rende à leur propriétaire légitime.

Art. 13

Utilisation restreinte

L'art. 67 EIMP sert de modèle à cette disposition.

Cette dernière définit le principe de la spécialité qui est d'importance pour la Suisse.

L'art. 13 précise l'utilisation qui peut être faite, dans l'Etat requérant, des informations et des moyens de preuve obtenus par voie d'entraide. L'objectif de cette disposition est d'empêcher que des documents transmis par cette voie soient ensuite

1914

utilisés par l'Etat requérant dans une procédure pour laquelle l'entraide judiciaire ne lui aurait pas été accordée.

Ainsi, le par. 1 précise que l'Etat requérant ne peut utiliser les informations et les éléments de preuve qu'il obtient par la voie de l'entraide judiciaire que dans une procédure concernant une infraction pouvant faire l'objet de l'entraide judiciaire.

L'intérêt principal de cette disposition pour la Suisse est que les renseignements transmis ne puissent être utilisés dans des procédures fiscales, à moins qu'il ne s'agisse d'un cas d'escroquerie en matière fiscale, également réprimé par le droit suisse13. L'interdiction d'utiliser les informations transmises s'applique également aux faits qualifiés d'infractions politiques ou militaires.

Le par. 2 prévoit que toute autre utilisation des informations transmises est subordonnée à l'approbation de l'Autorité centrale de l'Etat requis. Il énumère ensuite les cas dans lesquels cette approbation n'est pas nécessaire.

2.3

Titre III: Notification et comparution

Art. 14 à 20

Notification d'actes de procédure et comparution

Les dispositions relatives à la notification d'actes de procédure et de décisions judiciaires ainsi que celles qui concernent la comparution de témoins ou d'experts dans l'Etat requérant ont été reprises du titre III de la CEEJ (art. 7 à 10 et art. 12).

En comparaison des quinze jours consécutifs prévus à l'art. 12, par. 3, CEEJ, le Traité étend le champ d'application ratione temporis du sauf-conduit institué à son art. 18, par. 3: l'immunité dont bénéficie la personne concernée contre toute poursuite et autre restriction de sa liberté individuelle sur le territoire de l'Etat requérant pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ de l'Etat requis cesse si cette personne, ayant eu la possibilité de quitter le territoire de l'Etat requérant pendant trente jours consécutifs, n'a pas tiré parti de cette possibilité. Ce délai correspond à celui qui a été arrêté dans le cadre des Traités d'entraide judiciaire avec l'Australie, Hongkong14 et les Philippines15.

Art. 19

Témoignage dans l'Etat requérant

La personne qui comparaît dans l'Etat requérant à la suite d'une citation pour y déposer en tant que témoin est tenue de témoigner à moins que le droit de l'Etat requérant ou de l'Etat requis lui permette de refuser. Le respect de l'obligation de témoigner et de produire les moyens de preuve pertinents peut être assuré par des mesures de contrainte.

L'art. 19 constitue le pendant de l'art. 9 qui vise les dépositions de témoins dans l'Etat requis.

13 14 15

Cf. art. 3, al. 3, EIMP.

Art. 15 du Traité d'entraide judiciaire avec l'Australie (RS 0.351.915.8) et art. 21 du Traité d'entraide judiciaire avec Hongkong (RS 0.351.941.6).

Art. 17 du Traité avec les Philippines (RS 0.351.964.5).

1915

Art. 20

Remise temporaire de personnes détenues

Cette disposition reprend la teneur de l'art. 11, par. 1 et 3, CEEJ, tout en y ajoutant expressis verbis, au par. 4, que la détention subie dans l'Etat requérant par cette personne sera imputée sur la peine qu'il lui reste à purger dans l'Etat requis, clause établie dans l'intérêt de la personne remise. Une disposition similaire se trouve dans le Traité d'entraide judiciaire avec l'Australie16 et dans celui conclu avec les Philippines17.

Art. 21

Audition par conférence vidéo

La présente disposition s'inspire de l'art. 9 du Deuxième Protocole additionnel à la CEEJ18. Sur le plan bilatéral, la Suisse a adopté pour la première fois une telle réglementation dans le cadre de l'Accord additionnel à la CEEJ conclu avec l'Italie19. Le Traité avec les Philippines contient également une telle disposition20.

La présente réglementation se justifie particulièrement en raison de la distance qui sépare la Suisse du Brésil et, comme il est relevé en début du message, de l'importance des relations d'entraide judiciaire entre les deux Etats.

L'art. 21 règle l'audition par conférence vidéo de témoins et d'experts ainsi que, dans certaines circonstances, de personnes poursuivies pénalement. Cette disposition tire parti des progrès enregistrés dans le domaine des télécommunications. En effet, en autorisant le recours à une liaison vidéo directe, elle permet d'auditionner des personnes dans l'Etat requis dans lequel elles résident, ce qui les dispense de comparaître en personne sur le territoire de l'Etat requérant. Cette disposition est applicable s'il est inopportun ou impossible que la comparution ait lieu sur le territoire de l'Etat requérant. Tel peut être le cas, par exemple, lorsque la personne concernée s'est réfugiée à l'étranger parce qu'elle risque des poursuites pénales dans l'Etat qui a requis son audition. Il peut également être envisageable de recourir à la conférence vidéo lorsque la présence d'un témoin est indispensable au déroulement d'une autre procédure dans l'Etat requis ou encore lorsqu'un témoin appréhendé dans l'un des deux Etats contractants fait l'objet d'une procédure d'extradition vers un Etat tiers.

A titre d'autres motifs pouvant justifier une audition par conférence vidéo, peuvent être cités: le risque de fuite ou de collusion, la nécessité d'assurer la protection d'un témoin ou encore l'âge ou l'état de santé de la personne concernée. Enfin si une personne doit faire un long voyage pour être auditionnée sur place, la question peut se poser de savoir ­ eu égard notamment aux indemnités de déplacement qui devront lui être versées ­ s'il n'est pas disproportionné de l'obliger à comparaître en personne.

Les par. 1 à 7 règlent l'audition des témoins et des experts. Ils définissent les conditions auxquelles est soumise la conférence vidéo et la procédure qu'il convient de suivre en la matière21.

16 17 18 19

20 21

Art. 13, par. 4, de cet instrument.

Art. 21, par. 4, dudit Traité.

RS 0.351.12 Art. VI de l'Accord du 10 septembre 1998 entre la Suisse et l'Italie en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et d'en faciliter l'application (RS 0.351.945.41).

Art. 22 dudit instrument.

Les frais en rapport avec l'audition par conférence vidéo sont réglés dans une disposition distincte, à savoir l'art. 28, par. 1, let. d, du Traité.

1916

Si les conditions visées au par. 1 sont réalisées, l'Etat saisi d'une demande d'audition par conférence vidéo peut consentir à cette audition.

Au nombre des règles essentielles de procédure, il convient de mentionner celle du par. 5, let. a, selon laquelle les principes fondamentaux du droit de l'Etat requis doivent être respectés pendant l'audition. Lorsque la Suisse est l'Etat requis, son autorité judiciaire devra, en particulier, intervenir si elle constate que l'autorité judiciaire de l'Etat requérant use, durant l'audition, de moyens déloyaux ou incorrects dans le but d'influencer le résultat de celle-ci. Le par. 5, let. e, stipule que le droit de refuser de témoigner est soumis aux mêmes règles que celles qui valent dans le cadre d'une audition ordinaire.

Le par. 6 institue l'établissement d'un procès-verbal à l'issue de l'audition. N'y sont toutefois consignés que des éléments tels que le lieu et la date de l'audition, l'identité des personnes entendues, etc. et non la teneur des dépositions.

Le par. 7 prévoit que les conséquences d'un refus de témoigner ou d'une fausse déposition sont identiques à celles qu'entraînerait une audition dans le cadre d'une procédure nationale.

Aux termes du par. 8, la personne poursuivie pénalement peut également être auditionnée par conférence vidéo. Le Traité prévoit toutefois sur certains points des règles différentes de celles qui s'appliquent aux témoins et aux experts. Ainsi, une audition par conférence vidéo ne peut avoir lieu que si la personne concernée y consent. Là également, l'Etat requis n'est pas tenu de donner suite à une demande d'audition par cette technique. La décision de tenir la conférence vidéo et la manière dont elle se déroule font l'objet d'un accord entre les Etats contractants et doit être conforme à leur droit national ainsi qu'aux instruments internationaux idoines.

2.4

Titre IV: Casier judiciaire et échange d'avis de condamnation

Art. 22

Casier judiciaire et échange d'avis de condamnation

Cette disposition s'inspire des art. 13 et 22 CEEJ. On retrouve également une telle réglementation dans les Traités avec l'Egypte22 et les Philippines23.

Le par. 1 a trait aux demandes d'informations du casier judiciaire présentées dans le cadre d'une affaire pénale. Les informations à communiquer sont celles qu'il est d'usage, pour l'Etat requis, de transmettre à ses propres autorités judiciaires.

Le par. 2 stipule que des extraits du casier judiciaire peuvent également être transmis dans un cadre autre que pénal, par exemple aux fins d'une procédure administrative. En l'occurrence, c'est le droit interne qui s'applique. En Suisse, la communication d'extraits du casier judiciaire à des autorités étrangères est réglée par l'art. 24 de l'ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé24.

22 23 24

Art. 20 de ce Traité.

Art. 13 dudit Traité.

RS 331

1917

Le par. 3 porte sur la communication automatique à l'autre Etat contractant des sentences pénales prononcées contre des ressortissants de cet Etat. L'obligation d'informer se limite aux inscriptions telles qu'elles figurent dans le casier judiciaire.

En pratique, ces informations sont transmises au moyen d'un formulaire. Dans le cadre de la présente disposition, l'obligation ne vise pas la transmission d'informations plus détaillées, par exemple sous forme d'un jugement complet.

2.5

Titre V: Procédure

Art. 23 et 25

Autorité centrale/Exécution de la demande

Le Traité prévoit que les demandes d'entraide judiciaire seront transmises par les Autorités centrales désignées par les Etats contractants. Celles-ci jouent également le rôle d'interlocuteur pour le traitement desdites demandes. Actuellement, le canal de la voie diplomatique est utilisé. A l'avenir, il n'y sera recouru seulement si cela se révèle indispensable dans le cas d'espèce. La présente disposition accélère notablement la procédure. En outre, les contacts directs qu'elle permet d'établir entre les personnes responsables de l'organisation de l'entraide judiciaire au sein des administrations de chacun des deux Etats améliorent la coopération dans son ensemble.

Ils permettent notamment d'aplanir plus facilement les malentendus qui peuvent entraver l'entraide.

En Suisse, l'Office fédéral de la justice est l'Autorité centrale. Dans le cadre de l'entraide judiciaire avec le Brésil, l'Autorité centrale dispose, dans l'ensemble, de prérogatives moins étendues que l'Autorité centrale chargée des relations avec les Etats-Unis25 ou l'Italie26, qui toutes les deux relèvent aussi de l'Office fédéral de la justice. Il lui incombe uniquement d'exercer les trois fonctions prévues par l'EIMP, à savoir examiner préalablement les demandes, les transmettre et en contrôler l'exécution, fonctions qui ressortent de l'art. 25 du Traité entre la Suisse et le Brésil.

Dans certaines circonstances toutefois, l'art. 79a EIMP confère à l'Office fédéral de la justice la compétence de statuer lui-même sur l'exécution d'une demande d'entraide judiciaire.

L'exécution concrète d'une demande d'entraide judiciaire est régie par les dispositions pertinentes de l'EIMP et par les normes de procédure pénale des cantons et de la Confédération.

Art. 26

Dispense de légalisation, d'authentification et d'autres formalités

Le par. 1 statue la dispense de légalisation ou d'autres formalités. Cela signifie que l'Etat requérant ne peut soumettre à une quelconque exigence formelle les pièces et autres éléments de preuve transmis par l'Etat requis dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire au sens du Traité. Cette disposition s'inspire de l'art. 17 CEEJ et vise à simplifier et à accélérer la procédure.

25 26

Art. 28 du Traité entre la Confédération Suisse et les Etats-Unis d'Amérique sur l'entraide judiciaire en matière pénale du 25 mai 1973 (RS 0.351.933.6).

Art. XVIII de l'Accord du 10 septembre 1998 entre la Suisse et l'Italie en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et d'en faciliter l'application (RS 0.351.945.41).

1918

Aux termes du par. 2, la limitation des exigences formelles se répercute sur la procédure au sein de l'Etat requérant, en ce sens que les éléments de preuve transmis par l'Autorité centrale de l'Etat requis sont acceptés comme moyens de preuve sans autre justification ou attestation d'authenticité. En effet, comme le prévoit le par. 3, la lettre de transmission de l'Autorité centrale de l'Etat requis assure l'authenticité des pièces communiquées.

Art. 27

Langue

La clause régissant la langue dans laquelle doivent être rédigées les demandes d'entraide judiciaire et leurs annexes tient compte des différentes langues officielles suisses. L'Autorité centrale suisse désignera par conséquent, dans le cas d'espèce, celle qui est concernée.

2.6

Titre VI: Transmission spontanée et dénonciation aux fins de poursuites et de confiscation

Art. 29

Transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations

Actuellement, les infractions revêtent souvent une dimension transnationale. Il peut arriver qu'au cours de ses investigations, une autorité découvre des informations et des moyens de preuve qui peuvent également présenter un intérêt pour les autorités de l'autre Etat contractant. De tels moyens de preuve et informations doivent pouvoir être transmis même sans demande d'entraide judiciaire préalable, s'ils sont de nature à aider l'autre Etat à engager ou à mener à bien ses propres investigations ou procédures, ou s'ils peuvent le mettre en situation de présenter une demande d'entraide judiciaire. L'échange le plus rapide possible des informations obtenues pouvant intéresser l'autre Etat constitue une arme importante dans la lutte contre la criminalité et contribue à renforcer son efficacité, en particulier dans les cas de criminalité organisée, d'infractions économiques ou de corruption.

La communication des moyens de preuve et d'informations se fait dans les limites du droit national. Elle est facultative et n'empêche pas l'Etat qui les communique de mener ses propres investigations ou d'engager ses propres procédures. L'utilisation des moyens de preuve et d'informations transmis peut en outre être soumise à certaines conditions.

L'idée de la transmission d'informations et de moyens de preuve sans demande d'entraide judiciaire préalable est inspirée de l'art. 10 de la Convention du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime27. L'art. 67a EIMP régit la transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations au niveau interne suisse et règle les détails lorsque la Suisse communique les informations.

27

«Convention relative au blanchiment d'argent» (RS 0.311.53).

1919

Art. 30

Dénonciation aux fins de poursuites et de confiscation

La réglementation de l'art. 30 reprend celle de l'art. 21 CEEJ, mais de manière plus complète, puisqu'elle couvre également les dénonciations visant la confiscation de l'objet d'une infraction selon l'art. 10, par. 4.

L'art. 30, par. 1, permet de demander à l'autre Etat contractant d'ouvrir une procédure pénale. Cette disposition sera utilisée lorsqu'un Etat a connaissance d'une infraction et montre un intérêt à sa répression, sans toutefois être en mesure d'ouvrir lui-même une procédure. Ce peut être le cas lorsqu'une personne qui s'est rendue coupable d'une infraction dans l'un des Etats contractants se réfugie par la suite sur le territoire de l'autre Etat et qu'une extradition est impossible, par exemple en raison de la nationalité de la personne concernée. Un autre cas peut être que l'un des Etats contractants dispose d'informations concrètes selon lesquelles une infraction a été commise contre l'un de ses ressortissants sur le territoire de l'autre Etat, mais qu'il ne peut pas engager lui-même des poursuites contre l'auteur de cette infraction, car une extradition, là encore, n'entre pas en ligne de compte.

Cette disposition ne fonde pas une obligation d'engager des poursuites pénales.

L'Etat qui reçoit une telle dénonciation doit toutefois, selon le par. 2, informer l'autre Etat de toutes les mesures qu'il prend suite à cette dénonciation.

2.7 Art. 33

Titre VII: Dispositions finales Règlement des différends

L'art. 33, par. 1, institue que les différends soulevés par l'interprétation ou l'application du Traité sont réglés par la voie diplomatique. Les différends ne pouvant être réglés dans les douze mois sont, en application des par. 2 ss de la présente disposition, tranchés par un tribunal arbitral qui, selon le par. 6, arrête lui-même sa procédure et rend, au sens du par. 7, une décision définitive et obligatoire.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour les finances et le personnel de la Confédération et des cantons

La Suisse et le Brésil coopèrent actuellement dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale sur la base du Traité d'extradition de 1932, ainsi que, pour la Suisse, sur la base de l'EIMP. Le Traité apporte les éclaircissements que la pratique a montrés nécessaires, simplifie et accélère la procédure, notamment parce qu'il n'est plus nécessaire d'utiliser la voie diplomatique pour présenter des demandes d'entraide et que les autres formalités sont également simplifiées. Partant, il ne résulte pas du Traité de supplément de tâches imposé aux autorités chargées de l'entraide judiciaire au niveau fédéral et cantonal, le Traité conduisant plutôt à une coopération facilitée dans le sens des besoins pratiques des deux Etats.

1920

3.2

Conséquences économiques

Le Traité n'aura pas de répercussion sur le plan économique en Suisse.

4

Programme de la législature

Le projet n'est certes pas mentionné dans le «Rapport sur le Programme de la législature 2003 à 2007»28, mais exploiter de manière optimale la coopération internationale est une composante importante de la stratégie que la Suisse poursuit depuis toujours en matière de politique de sécurité, telle que l'a présentée le Conseil fédéral dans le rapport «La sécurité par la coopération» du 7 juin 199929. Le Traité d'entraide judiciaire conclu avec le Brésil est une contribution importante à la réalisation de cette stratégie et complète les Accords d'association à Schengen et à Dublin dans le cadre des Bilatérales II avec l'UE ainsi que la Convention de l'ONU contre la criminalité transnationale organisée et ses Protocoles additionnels contre la traite des personnes et contre le trafic de migrants que le Conseil fédéral a déclarés prioritaires30.

5

Relation avec le droit européen

La coopération entre la Suisse et les Etats membres du Conseil de l'Europe dans le domaine de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale est régie par la CEEJ et le Deuxième Protocole additionnel à cette Convention. Des traités bilatéraux conclus entre la Suisse et ses voisins sont également appliqués à titre complémentaire31. D'autres instruments du Conseil de l'Europe, tels que la Convention relative au blanchiment des produits du crime, règlent l'entraide judiciaire concernant certains types de criminalité.

Le Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Suisse et le Brésil d'une part reprend les principes essentiels fixés dans la CEEJ, et d'autre part tire parti des innovations introduites par d'autres instruments du Conseil de l'Europe. Partant, il est compatible avec le droit européen.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité

En vertu de l'art. 54, al. 1, de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 199932, la Confédération est compétente en matière d'affaires étrangères. La conclusion de traités internationaux est donc de son ressort. Le corollaire de cette compétence est que le Conseil fédéral signe les traités internationaux avec les Etats 28 29 30 31

32

FF 2004 1035 FF 1999 6903 RS 0.311.54; RS 0.311.541; RS 0.311.542 La Suisse a conclu des traités additionnels à la CEEJ avec tous ses voisins, sauf le Liechtenstein: avec l'Allemagne (RS 0.351.913.61), l'Autriche (RS 0.351.916.32), la France (RS 0.351.934.92) et l'Italie (RS 0.351.945.41).

Cst.; RS 101

1921

étrangers et les soumet à l'approbation de l'Assemblée fédérale en application de l'art. 184, al. 2, Cst. L'approbation de traités internationaux incombe à l'Assemblée fédérale conformément à l'art. 166, al. 2, Cst.

Les traités internationaux sont sujets au référendum en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, Cst. lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables (ch. 1), qu'ils prévoient l'adhésion à une organisation internationale (ch. 2), qu'ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales (ch. 3).

L'art. 34, par. 2, du Traité d'entraide judiciaire avec le Brésil prévoit que cet instrument est dénonçable. Le Traité ne prévoit par ailleurs pas l'adhésion à une organisation internationale.

Il reste à déterminer si ce Traité contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit ou si sa mise en oeuvre nécessite l'adoption d'une loi fédérale. Selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale33, sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Sont importantes les dispositions qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale selon les critères posés à l'art. 164, al. 1, Cst.

En l'occurrence, le Traité d'entraide judiciaire conclu avec le Brésil contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit. Il crée pour les Etats contractants l'obligation de s'accorder une entraide judiciaire aussi large que possible ­ obligation qui a des incidences sur les droits et les devoirs des individus ­ et attribue des compétences aux autorités chargées de son application. Partant, cet instrument international contient des dispositions qui fixent des règles de droit. Ces dispositions doivent être qualifiées d'importantes dans la mesure où, si elles devaient être édictées sur le plan national, elles le seraient sous la forme d'une loi fédérale, en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst. En conséquence, l'arrêté de l'Assemblée fédérale portant approbation du Traité est sujet au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

6.2

Procédure de consultation

Il a été renoncé à une procédure de consultation au sens de l'art. 2 de la loi sur la consultation34 concernant le présent traité. En effet, le contenu du traité correspond, pour l'essentiel, à celui des traités déjà conclus en la matière. Le traité avec le Brésil ne s'écarte, de manière substantielle, ni de l'EIMP, ni des traités bi- ou multilatéraux que la Suisse a déjà conclus par le passé. Au contraire, le traité avec le Brésil étend le réseau des traités dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale, de sorte à poursuivre, par une coopération internationale en réseau, la politique du Conseil fédéral en matière de sécurité intérieure. Jusqu'à présent, le bien-fondé de ces traités n'a, sous l'angle politique, pour aucun d'entre eux été remis en cause et il n'apparaît pas de raison permettant de penser qu'il puisse en aller différemment concernant le traité avec le Brésil.

33 34

Loi sur le parlement (LParl; RS 171.10).

LCo; RS 172.061

1922