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86.020 Message relatif à l'approbation des Protocoles nos 6, 7 et 8 à la Convention européenne des droits de l'homme du 7 mai 1986

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre par le présent message, en vous proposant de les adopter, trois projets d'arrêtés fédéraux concernant la ratification de trois Protocoles à la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

Il s'agit des trois Protocoles suivants: - Protocole additionnel n° 6 portant abolition de la peine de mort (Série des traités européens, STE, n° 114), - Protocole additionnel n° 7, élargissant la liste des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme (STE n° 117) et - Protocole d'amendement n° 8, tendant notamment à accélérer la procédure devant la Commission européenne des droits de l'homme (STE n°118).

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

7 mai 1986

1986-348

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Egli Le chancelier de la Confédération, Buser

43 Feuille fédérale. 138 e année. Vol. II

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Condensé En adhérant, le 6 mai 1963, au Conseil de l'Europe, la Suisse s'est engagée à collaborer sincèrement et activement à la réalisation des objectifs statutaires de cette organisation. Un des objectifs principaux du Conseil de l'Europe est la protection des droits de l homme. La Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), que la Suisse a ratifiée en 1974, a été élaborée dans ce but. En ratifiant les Protocoles n°s 6, 7 et 8 à la CEDH, la Suisse manifeste sa volonté de contribuer davantage encore à une protection efficace des droits de l'homme.

Par la ratification du Protocole additionnel n° 6, la Suisse s'engage sur le plan international à abolir ou à ne pas réintroduire la peine de mort en temps de paix. Le Protocole additionnel n° 7 a pour but de compléter la liste des droits civils et politiques contenus dans la Convention. A la différence des Protocoles additionnels n°s 6 et 7, le Protocole n°8 amende la CEDH elle-même, sur des questions de procédure et d'organisation. Ce protocole poursuit avant tout le but d'accélérer le traitement des requêtes pendantes devant la Commission européenne des droits de l'homme.

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«

Message l

La Suisse et la Convention européenne des droits de l'homme. Situation actuelle

La Suisse a ratifié en 1974 la Convention européenne des droits de l'homme. Outre la Convention, elle a ratifié les Protocoles additionnels n° 2 (compétence de la Cour européenne des droits de l'homme de rendre des avis consultatifs), 3 et 5 (dispositions de procédure). On renonça alors à une ratification des Protocoles additionnels nos 1 et 4 (qui complètent tous deux la liste des garanties conventionnelles; voir rapport complémentaire du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la CEDH, du 23 février 1972; FF 7972 I 989 999). Il n'a pu encore être donné suite à l'intention de ratifier ultérieurement le Protocole additionnel n° 1. A l'occasion de la procédure de consultation, une majorité de cantons a exprimé de sérieuses réserves (qui portaient essentiellement sur le «droit à l'instruction»). En conséquence, le Conseil fédéral a décidé, le 26 juin 1985, de ne pas ratifier pour l'instant le Protocole additionnel n° 1. La ratification du Protocole additionnel n° 4 avait déjà été reportée antérieurement (voir le troisième rapport du Conseil fédéral sur la Suisse et les conventions du Conseil de l'Europe, du 22 février 1984; FF 1984 I 792 802 et 803).

En ratifiant la CEDH, la Suisse a reconnu pour une durée de trois ans le droit de recours individuel (art. 25 CEDH). Par la suite, cette déclaration de reconnaissance a été régulièrement reconduite par le Conseil fédéral (sur l'issue et les conséquences de quelques affaires suisses devant les organes de la CEDH, voir troisième rapport; FF 1984 I 792 847 à 852).

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Protocole additionnel n° 6 à la Convention européenne des droits de l'homme, du 28 avril 1983, concernant l'abolition de la peine de mort (STE n° 114) Introduction

Le Protocole additionnel n° 6 à la Convention européenne des droits de l'homme a pour objet l'abolition de la peine de mort. Il est l'expression d'une tendance générale, manifestée sur le plan national et international, en faveur de la suppression de cette sanction pénale dans le droit des Etats.

A l'époque de l'élaboration de la CEDH, en 1950, cette tendance ne faisait que débuter. Il n'est donc pas étonnant que l'article 2 de la CEDH, qui garantit le droit de toute personne à la vie, autorise expressément la peine de mort. Le paragraphe 1er de cette disposition a la teneur suivante: 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi.

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Même seize ans plus tard, lors de l'élaboration en 1966 du Pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques, dont l'article 6, paragraphe 1er, qualifie le droit à la vie d'inhérent à la personne humaine, les esprits n'étaient pas encore mûrs pour l'abolition de la peine de mort. Le fait que dans le Pacte (par. 2, 4, 5 et 6) la peine de mort soit davantage limitée que dans la CEDH témoigne cependant d'une certaine évolution des conceptions: Article 6 (1) Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie.

(2) Dans les pays où la peine de mort n'a pas été abolie, une sentence de mort ne peut être prononcée que pour les crimes les plus graves, conformément à la législation en vigueur au moment où le crime a été commis et qui ne doit pas être en contradiction avec les dispositions du présent Pacte ni avec la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Cette peine ne peut être appliquée qu'en vertu d'un jugement définitif rendu par un tribunal compétent. · (4) Tout condamné à mort a le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine. L'amnistie, la grâce ou la commutation de la peine de mort peuvent dans tous les cas être accordées.

(5) Une sentence de mort ne peut être imposée pour des crimes commis par des personnes âgées de moins de dix-huit ans et ne peut être exécutée contre les femmes enceintes.

(6) Aucune disposition du présent article ne peut être invoquée pour retarder ou empêcher l'abolition de la peine capitale par un Etat partie au présent Pacte.

En Europe, l'abolition de la peine de mort s'est étendue rapidement dans les années soixante et septante1'*'. Ainsi que le montre le tableau qui figure en annexe, dix Etats membres du Conseil de l'Europe avaient aboli de manière générale la peine de mort à fin 1985. Cinq pays ne l'ont maintenue qu'en temps de guerre (Espagne, Italie, Malte, Royaume-Uni, Suisse). Les six autres (Belgique, Chypre, Grèce, Irlande, Liechtenstein et Turquie) prévoient la peine de mort aussi bien en temps de guerre qu'en temps de paix.

A l'exception de la Turquie, ces Etats n'ont toutefois pas fait usage, ces dernières années, de la possibilité de prononcer des peines de mort ou de les exécuter. C'est ainsi que dans la principauté du Liechtenstein, la dernière exécution a eu lieu il y a plus de deux cents ans. Le nouveau code pénal liechtensteinois, qui doit entrer en vigueur en 1987, abolira la peine de mort, selon toute vraisemblance sans restriction.2' En Suisse, la peine de mort en temps de paix a été abolie par le code pénal de 1937 (CP), entré en vigueur en 1942. La question de la peine de mort a joué un grand rôle dans les débats publics qui ont précédé le vote populaire sur le code pénal. Les efforts entrepris plus récemment au sein du Parlement en vue de l'abolition de la peine de mort, y compris dans le droit *> La note» comme les autres notes figurent à la fin du message.

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pénal militaire, ou concernant la réintroduction de la peine de mort dans le droit pénal ordinaire sont demeurés vains.3' A l'occasion des travaux de revision totale de la constitution, la majorité de la Commission d'experts a proposé, dans le projet de 1977, l'abolition générale de la peine de mort (art. 10, 2e al. du projet)4'. Cette proposition a été reprise dans l'essai de modèle de constitution du 30 octobre 1985, élaboré par le Département fédéral de justice et police (art. 9; voir le rapport du Conseil fédéral du 6 novembre 1985 sur la revision totale de la Constitution fédérale; FF 1985 III 1 206).

En résumé, on constate que la peine de mort, du moins en temps de paix, est, sous réserve d'une seule exception, abolie sur le plan juridique ou en pratique dans les Etats membres du Conseil de l'Europe.

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Genèse du Protocole additionnel n° 6

Les efforts nationaux entrepris en vue de restreindre ou d'abolir la peine de mort sont à, l'origine d'initiatives similaires prises sur le plan international5', notamment au sein du Conseil de l'Europe6'.

Au sein du Conseil de l'Europe, ces initiatives ont trouvé un écho concret dans le Protocole additionnel n° 6 à la CEDH. Les Etats membres ont ainsi élaboré le premier instrument international qui prévoit l'obligation, figurant dans une convention internationale, d'abolir la peine de mort.

L'élaboration du Protocole additionnel remonte à des initiatives prises au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe7' et au sein de la Conférence des ministres européens de la justice8'.

A la suite des ces initiatives, le Comité des ministres a, le 25 janvier 1981, chargé le Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH), organe de la coopération interétatique au sein duquel la Suisse est représentée, d'entreprendre les travaux nécessaires. Le projet élaboré par la suite, qui a pris la forme d'un Protocole additionnel n° 6 à la CEDH, a été adopté par le Comité des ministres dans sa séance du 6 au 10 décembre 1982.9' Le Protocole additionnel n° 6 a été ouvert à la signature le 28 avril 1983.

Des 21 Etats membres au Conseil de l'Europe, ce protocole a été signé aujourd'hui, outre par la Suisse, par l'Autriche, la République fédérale d'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la France, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal et la Suède.

Depuis lors, la Grèce, l'Islande et l'Italie l'ont également signé. Ne l'ont pas signé jusqu'ici, Chypre, l'Irlande, le Liechtenstein, Malte, le Royaume-Uni et la Turquie.

Le Protocole additionnel n° 6 est entré en vigueur le 1er mars 1985, après le dépôt de cinq ratifications (Autriche, Danemark, Espagne, Luxembourg et Suède), conformément à son article 8. Depuis lors, la France et les PaysBas l'ont également ratifié.

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Contenu du Protocole additionnel n° 6

L'article 1, qui doit être lu en liaison avec l'article 23 CEDH, pose le principe de l'abolition de la peine de mort. La seconde phrase fonde le droit subjectif de l'individu à ne pas être condamné à une telle peine ni exécuté.

L'article 2 définit le champ d'application. En ratifiant le Protocole, les Etats contractent l'obligation de droit international d'abolir la peine de mort en temps de paix. Peuvent par conséquent également adhérer au Protocole les Etats qui prévoient la peine de mort en temps de guerre ou de danger imminent de guerre. Les dispositions afférentes à la législation en cause doivent être communiquées au Secrétaire général du Conseil de l'Europe. Cette obligation vaut aussi bien pour les dispositions existantes que pour les dispositions futures.

L'article 3 soustrait le régime des dérogations au Protocole additionnel aux dispositions de l'article 15 CEDH. Selon cette dernière disposition, les dérogations au droit conventionnel ne sont autorisées qu'«en cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation». Le Protocole additionnel est plus restrictif: la peine de mort ne peut être appliquée qu'en temps de guerre ou de danger imminent de guerre, mais pas en cas de danger public menaçant la vie de la nation.

L'article 4 prévoit qu'aucune réserve, au sens de l'article 64 CEDH, n'est admise.

L'article 5 définit le champ d'application territorial, conformément au modèle de clauses finales élaborées par le Conseil de l'Europe en 1980.

L'article 6 règle les relations du Protocole additionnel avec la CEDH. Les articles 1 à 5 du Protocole complètent la CEDH. Toutes les dispositions de la CEDH s'appliquent en conséquence lors de l'interprétation du Protocole.

Cela signifie que la reconnaissance du droit de requête individuel (art. 25 CEDH) et de la juridiction obligatoire de la Cour européenne des droits de l'homme (art. 46 CEDH) s'étend au Protocole additionnel.

L'article 2 CEDH n'est pas abrogé pour autant. Cette disposition reste en vigueur pour les Etats qui n'ont pas adhéré au Protocole additionnel.

L'obligation de protéger par la loi le droit de toute personne à la vie, conformément à la première phase du paragraphe 1er, subsiste également pour les Etats parties au Protocole. Il en va de même pour le paragraphe 2.

En outre, l'article 65 CEDH est
applicable. Selon cette disposition, un Etat partie ne peut dénoncer la Convention qu'après l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la Convention à son égard. Certaines difficultés pourraient apparaître dans l'application de cette disposition, lorsqu'un Etat annonce son intention de ne dénoncer que le Protocole additionnel, mais non la CEDH en tant que telle. Les difficultés proviendraient moins de la computation du délai que de la question de savoir si une telle dénonciation du seul Protocole serait admissible. Etant donné qu'il est possible d'adhérer séparément aux Protocoles, on doit admettre que des dénonciations séparées sont aussi possibles. Dans ce cas, le délai de

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dénonciation ne devrait cependant être calculé qu'à partir du jour de l'entrée en vigueur du Protocole en cause.

Les articles 7, 8 et 9 reprennent le modèle des clauses finales élaborées par le Conseil de l'Europe en 1980.

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Appréciation par la Suisse du Protocole additionnel n° 6

Dans le troisième rapport sur la Suisse et les conventions du Conseil de l'Europe, du 22 février 1984 (FF 1984 I 792 803 et 804), nous avons soutenu le point de vue que compte tenu de la situation juridique en vigueur, aucune difficulté ne devrait survenir en ce qui concerne la ratification du Protocole additionnel n° 6 (voir également le message du Conseil fédéral sur l'initiative populaire «Pour le droit à la vie», du 28 février 1983; FF 1983 II 1 27).

Cette appréciation peut être maintenue. La peine de mort a été abolie en temps de paix en Suisse en 1942, par l'entrée en vigueur du code pénal.

La condamnation à mort pour cause de délit politique est expressément interdite (art. 65 est.). Le fait que le code pénal militaire de 1927 (CPM) prévoit la peine de mort en temps de guerre ou d'un danger de guerre imminent (art. 5 et 27 CPM; RS 321.0) ne s'oppose pas à une ratification du Protocole additionnel. En cas d'adhésion, la Suisse aurait seulement l'obligation, découlant de l'article 2 du Protocole additionnel, de communiquer au Secrétaire général du Conseil de l'Europe les dispositions pertinentes du code pénal militaire.

Par ailleurs, il n'est guère possible d'établir, en pratique, à quel moment on passe de l'état de paix à l'état de guerre. L'article 5 CPM tient compte de cette situation, dans la mesure où il accorde au Conseil fédéral la compétence, en cas de «danger de guerre imminent», de décider l'application des dispositions du code pénal militaire prévues pour le temps de guerre. Une telle décision constitue un acte éminemment politique, peu apte à être circonscrit de manière précise sur le plan juridique.10' Lors de la Seconde guerre mondiale, le Conseil fédéral n'a pas pris de décision de ce type. Selon la conception suisse, notre pays se trouvait ces années-là en temps de service actif qui, d'après la division tripartite du code pénal militaire, constitue une étape intermédiaire entre le temps de paix et le temps de guerre."' L'introduction de la peine de mort, fondée sur les articles 5 et 27 CPM, était exclue, car cette sanction extrême est prévue exclusivement pour les catégories relevant du temps de guerre ou du danger de guerre imminent. Compte tenu de la situation délicate dans laquelle se trouvait la Suisse entre 1939 et 1945, le Conseil fédéral décida néanmoins en 1940 de
réintroduire la peine de mort pour certains actes commis en temps de service actif. Il fit cela par le biais du droit de nécessité (ordonnance du 28 mai 1940 revisant et complétant le code pénal militaire; voir le rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale, du 19 novembre 1940; FF 1940 1226 1233).12' 611

En l'occurrence, il faut se demander si le Conseil fédéral, après une ratification éventuelle du Protocole additionnel n° 6, pourrait procéder de la même manière ou non. Dans ce contexte, il faut partir de l'idée que le concept de «en temps de guerre ou de danger imminent de guerre» du Protocole additionnel constitue un concept pour soi dont l'interprétation ne doit pas obligatoirement recouvrir le concept correspondant du droit interne. Compte tenu de la situation qui régnait de 1939 à 1945 dans les Etats limitrophes de la Suisse, on doit admettre que la Suisse se trouvait, à cette époque, dans un cas de «danger imminent de guerre» au sens du Protocole additionnel.13' Le Conseil fédéral est par conséquent de l'avis que, même en cas de ratification du Protocole additionnel, la Suisse serait légitimée, dans une situation analogue à celle qui prévalait lors de la Seconde guerre mondiale, à réintroduire la peine de mort par le biais du droit de nécessité.

Il en irait différemment si la levée de troupes devait être ordonnée pour rétablir la tranquillité et l'ordre à l'intérieur (art. 2 est.; art. 195 et 196 de la loi fédérale sur l'organisation militaire; RS 510.10). Bien que le service d'ordre de l'armée soit également considéré comme service actif, la réintroduction de la peine de mort pour des cas de ce genre ne serait pas possible, car le Protocole additionnel n° 6 exclut la peine de mort en temps de danger public menaçant la vie de la nation. Pour la Suisse, la question est toutefois de portée purement théorique; elle ne se pose pas en pratique.

3

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Protocole additionnel n° 7, du 22 novembre 1984, à la Convention européenne des droits de l'homme (STEn°117) Genèse du Protocole additionnel n° 7

Le 16 décembre 1966, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cette adoption a posé aux Etats membres du Conseil de l'Europe le problème de la compatibilité de ce pacte avec la Convention européenne des droits de l'homme.

Aussi le Comité des ministres du Conseil de l'Europe a-t-il chargé, en 1967, un comité d'experts d'étudier ce problème. Dans le courant de 1969, ce comité d'experts a soumis au Comité des ministres un rapport concernant les différences essentielles entre les droits garantis par la Convention européenne d'une part et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques d'autre part.

Se fondant sur les travaux préparatoires, le Comité des ministres décida en 1976 d'examiner si certaines des dispositions du Pacte qui allaient au-delà des garanties offertes par la CEDH pouvaient être reprises d'un plan universel pour figurer dans un catalogue des droits de l'homme applicable au niveau régional.

Les travaux du comité d'experts, transmis par la suite au Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH), ont abouti à un projet de Protocole additionnel qui contient cinq positions: garanties procédurales minimales 612

«g.

en cas d'expulsion d'un étranger du territoire d'une partie contractante (art.

1); droit de faire examiner, par une juridiction supérieure, une condamnation pénale (art. 2); droit à l'indemnisation d'une personne victime d'une erreur judiciaire (art. 3); principe «ne bis in idem» (art. 4); et principe de l'égalité de droits et de responsabilités des époux (art. 5).

Le Comité des ministres du Conseil de l'Europe a adopté le Protocole additionnel n° 7 au début du mois d'octobre 1984. Le 22 novembre 1984, ce dernier a été ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe. Jusqu'à présent, 16 des 21 Etats membres ont signé ce Protocole (République fédérale d'Allemagne, Autriche, Danemark, Espagne, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Suède et Turquie). Quant à la Suisse, elle a signé le Protocole le 28 février 1986.

Aujourd'hui seules l'Autriche, la France et la Suède l'ont ratifié.

32 321 321.1

Contenu et appréciation par la Suisse du Protocole additionnel n° 7 Article 1

L'article 1 prévoit des garanties pour les étrangers qui font l'objet d'une mesure d'expulsion. Un étranger ne peut bénéficier de ces garanties procédurales minimales que lorsqu'il réside régulièrement sur le territoire de l'Etat en question. L'étranger doit notamment pouvoir faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion. Il peut exiger qu'une autorité compétente examine son cas et doit avoir le droit de se faire représenter devant cette dernière (ch. 1).

Contrairement à l'article 4 du Protocole additionnel n° 4 (interdiction des expulsions collectives d'étrangers), la CEDH ne contient aucune disposition qui a trait directement à l'entrée, au séjour ou à l'expulsion d'un ressortissant étranger. Cette constatation est confirmée par la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l'homme.1'*' La Commission a notamment déclaré que dans ce contexte, l'article 6 CEDH, relatif au procès équitable en matière civile et pénale, n'était pas applicable.2' Il convient toutefois de rappeler la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l'homme selon laquelle certaines garanties de la CEDH doivent être prises en compte lors d'une procédure d'expulsion.

Ainsi, l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'expulsion vers un pays dans lequel il pourrait être soumis à la torture, à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants, peut-il aujourd'hui déjà invoquer l'article 3 CEDH (interdiction de la torture; voir à ce sujet le message du Conseil fédéral du 30 octobre 1985 relatif à la Convention de l'ONU sur la torture; FF 7955 III 273). L'article 3 CEDH est en effet un droit qui a une valeur absolue. L'étranger faisant l'objet d'une mesure d'expulsion peut en outre, *> La note ') comme les autres notes figurent à la fin du message.

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dans certains cas et sous réserve de l'ordre public, invoquer l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale; voir ATF 709 Ib 183) et l'article 12 CEDH (droit au mariage).3' L'article 1 a pour but de garantir que la personne qui fait l'objet d'une mesure d'expulsion sera entendue. Il ne règle toutefois pas le déroulement de la procédure. Il requiert seulement un examen du cas par l'autorité compétente, ce qui signifie que la décision doit être prise conformément aux dispositions applicables du droit interne. Le Protocole ne désigne en revanche pas l'autorité habilitée à prendre la décision. Il appartient donc à la législation interne de désigner soit une autorité administrative, soit une autorité judiciaire. L'article 1 n'exige pas que la procédure se déroule en deux étapes devant des autorités différentes. Il n'implique pas non plus une audition de l'intéressé. Une procédure qui se déroulerait entièrement par écrit satisferait aux conditions de cette disposition.

L'article 1 ne concerne que les étrangers «résidant régulièrement» sur le territoire de l'Etat en question. Le terme «résidant» indique que le séjour de l'étranger sur le territoire de l'Etat en question doit être d'une certaine durée. Aussi les personnes qui sont refoulées par les autorités douanières, les touristes ou les passagers en transit sont-ils exclus du champ d'application de cette disposition. L'étranger doit en outre résider «régulièrement» sur le territoire de l'Etat et être au bénéfice d'un permis qui lui donne le droit de résider sur le territoire de cet Etat. L'article 1 ne couvre par conséquent pas le renvoi des étrangers qui se trouvent illégalement sur le territoire de l'Etat, soit parce qu'ils y sont entrés de façon irrégulière, soit parce que leur autorisation est arrivée à échéance.

Il convient enfin de relever que les garanties de l'article 1 ne s'appliquent pas lorsque l'étranger est expulsé du territoire de l'Etat en question pour des motifs de sécurité nationale ou lorsque l'expulsion est considérée comme nécessaire dans l'intérêt de l'ordre public. Dans de tels cas, l'intéressé peut être expulsé sans avoir été autorisé au préalable à exercer les droits énoncés dans cette disposition (ch. 2).

321.2 L'article 1 s'inspire de l'article 13 du Pacte des Nations Unies relatif aux droits civils et politiques. Aujourd'hui déjà, un certain nombre de conventions européennes offrent des garanties procédurales à l'étranger menacé d'une mesure d'expulsion. A cet égard, on peut citer la Convention européenne d'établissement de 1955 (art. 3, ch. 2) et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant de 1977 (art. 9, ch. 5). A la différence de l'article 1 du Protocole additionnel n° 7, qui s'applique à toute personne relevant de la juridiction suisse (art. 1 CEDH), les conventions précitées ne déploient leurs effets qu'à l'égard des ressortissants des Etats membres du Conseil de l'Europe qui ont ratifié ces conventions. La Suisse n'a ratifié jusqu'à présent ni l'une ni l'autre de ces deux conventions.

614



Ce ne sont toutefois pas les garanties procédurales prévues par ces instruments qui l'en empêcheraient (pour une motivation plus précise, voir le troisième rapport; FF 1984 I 792, 804 s. et 843 s.).

321.3 En droit suisse, le droit d'être entendu découle de l'article 4 de la constitution. Dans toutes les procédures étatiques concernant directement un particulier, celui-ci doit pouvoir faire valoir son point de vue dans la mesure où la décision étatique le touche personnellement. Il a le droit de s'exprimer et d'être entendu au cours de la procédure.4' Ce principe vaut également en cas de procédure d'expulsion.

Différents motifs peuvent justifier l'expulsion d'un étranger du territoire de la Suisse. Une décision d'expulsion peut en effet être prise pour des raisons politiques, selon l'article 70 de la constitution, à la suite d'un jugement pénal ou par la police des étrangers, conformément à l'article 10 de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20).V II n'est pas nécessaire d'examiner dans le détail la procédure d'expulsion suite à une décision judiciaire pénale. En effet, l'article 55 du code pénal et l'article 40 du code pénal militaire autorisent le juge à expulser un étranger du territoire de la Confédération lorsque les conditions prévues par la loi sont satisfaites. Dans ces cas, la décision du juge est prise au cours d'une procédure pénale et les garanties procédurales de l'article 6 CEDH, garanties qui vont au-delà de celles prévues par l'article 1 du Protocole additionnel, doivent être appliquées (voir notamment le ch. 3 de l'art. 6 CEDH).

La décision prise par la police des étrangers est soumise aux conditions prévues par la LSEE (art. 10).6) La décision d'expulser un étranger doit être prise par la police cantonale des étrangers ou par une autorité qui lui est préposée (art. 15, 2e al.). Lorsque la décision n'est pas prise en première instance par l'autorité préposée (département, gouvernement cantonal), la législation cantonale doit réserver un recours à une autorité cantonale supérieure (art. 19, 1er al.). Les décisions d'expulsion doivent être motivées par écrit; toute décision susceptible de recours doit indiquer le délai et l'autorité de recours. Le recourant, ou son représentant, a le droit de consulter le dossier, à moins que l'ordre et la sécurité publics ne s'y opposent (art. 19, 2e al.). Après épuisement des voies de recours cantonales, l'intéressé peut saisir le Tribunal fédéral par un recours de droit administratif
(art. 97, 98, 100 et 103 de la loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'organisation judiciaire [OJ]; RS 1 73.110).

Il ressort des développements faits ci-dessus que la Suisse remplit les conditions posées par l'article 1. Dans le cas d'une décision d'expulsion prise par la police des étrangers, l'étranger se voit en effet reconnaître la possibilité de faire valoir son droit d'être entendu, en vertu notamment de la LSEE, 615

des lois cantonales de procédure administrative et de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire.

Dans les cas d'expulsion de personnes compromettant la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse (art. 70 est.), la décision d'expulsion est prise par le Conseil fédéral sur proposition du Ministère public de la Confédération.

Cette décision est un acte de gouvernement qui, en tant que tel, ne peut pas être porté devant une autorité judiciaire. Le Conseil fédéral n'est responsable de cette décision que devant le Parlement. En principe, la procédure est régie par les prescriptions de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (RS 172.021). Il y est prévu que les parties doivent être entendues avant que l'autorité ne prenne sa décision (art. 29 et 30 LPA). Dans certaines affaires, l'exécution de la mesure ne peut toutefois être différée. Dans ces cas, la LPA ne peut donc être appliquée (art. 3, let.

f), ce qui signifie que l'intéressé ne peut être entendu. A cela s'ajoute qu'une décision d'expulsion prise conformément à l'article 70 de la constitution ne peut être portée devant le Tribunal fédéral par un recours de droit administratif (art. 100, let. b, ch. 4, OJ). Cette procédure est toutefois compatible avec l'article 1 du Protocole. Selon le chiffre 2 de cette disposition, un étranger peut être expulsé avant d'avoir exercé son droit d'être entendu lorsque cette expulsion est nécessaire dans l'intérêt de l'ordre public ou est basée sur des motifs de sécurité nationale.

Il faut néanmoins mettre en évidence une difficulté. En effet, l'intéressé doit être autorisé à exercer ses droits après son expulsion lorsqu'il a été expulsé pour des motifs d'ordre public ou de sécurité nationale (par. 15, 2e al., du rapport explicatif du 8 octobre 1984 relatif au Protocole n° 7). Ce droit de l'intéressé n'est pas compatible avec une décision d'expulsion prise conformément à l'article 70 de la constitution. En effet, si le Conseil fédéral, après un examen approfondi, a constaté que l'expulsion était indispensable à la sauvegarde de la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse, l'audition de l'intéressé expulsé n'est plus nécessaire. C'est la raison pour laquelle la Suisse devra faire une réserve à l'article 1.

322 322.1

Article 2

Cet article introduit dans la CEDH le droit de toute personne de faire examiner sa condamnation par une juridiction supérieure. Jusqu'à présent, en effet, le droit de l'individu, de faire examiner son cas par plusieurs instances ne pouvait être déduit ni de l'article 6, ni d'une autre disposition de la CEDH.7' Par l'adoption de cet article 2, ce droit sera reconnu, tout au moins pour les affaires pénales.

Ainsi toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal doit avoir la possibilité de faire examiner par une juridiction supérieure ladite condamnation. Les conditions d'introduction du recours ne sont en revanche pas réglées par l'article 2. L'exercice de ce droit est régi par le droit national.

616

L'article 2 ne règle en particulier pas le pouvoir de cognition de l'instance de recours. Le nouvel examen, au sens de cette disposition, peut donc faire suite à l'introduction d'un moyen de droit ordinaire (qui porte sur l'ensemble du procès, par exemple l'appel) ou d'un moyen extraordinaire (qui ne porte que sur certains aspects du jugement, par exemple le pourvoi en nullité ou la cassation).

L'examen à posteriori d'une condamnation prononcée par un tribunal souffre trois exceptions. En cas de condamnation pour une infraction mineure, il n'est pas nécessaire de prévoir une deuxième instance. Sur ce point également, il est fait renvoi au droit national. Pour déterminer le caractère mineur d'une infraction, un critère important consiste à voir si l'infraction est passible ou non d'une peine privative de liberté. Il est également possible de renoncer à une deuxième instance lorsque l'intéressé a été jugé en première instance par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et condamné à la suite d'un recours contre son acquittement.

322.2 En Suisse, l'organisation judiciaire en matière pénale consacre le principe des degrés différents de juridiction. Les codes de procédure pénale de la Confédération et des cantons prévoient des dispositions selon lesquelles une juridiction supérieure doit pouvoir examiner une condamnation. Les conditions d'introduction du recours sont toutefois fort diverses.

Une condamnation par un juge pénal peut faire l'objet d'un recours à une instance supérieure par la voie de l'appel et/ou par la voie de la cassation (pourvoi en nullité). Ces voies de recours diffèrent d'un canton à l'autre.8' La plupart des cantons connaissent l'appel, soit d'une manière générale, soit avec certaines restrictions, en cas, par exemple, d'infraction mineure.

Les cantons de Fribourg, du Tessin et de Neuchâtel ne connaissent pas l'appel. Le moyen de droit le plus important à disposition des justiciables est le pourvoi en nullité. La situation inverse se présente en revanche dans les cantons d'Uri, d'Unterwald-le-Bas, de Zoug, de Baie-Campagne, d'Appenzell Rh.-Ext., des Grisons et d'Argovie dont les codes de procédure pénale ignorent le pourvoi en nullité. Dans les autres cantons, les deux moyens de droit coexistent.

Cette pluralité des degrés de juridiction exigée par l'article 2 est
donc déjà réalisée dans les cantons. A ces degrés de juridiction cantonaux s'ajoute, avec certaines exceptions, celui de la cour de cassation du Tribunal fédéral . saisie par la voie du pourvoi en nullité (art. 268 ss LPP).

· Comme exceptions à ce principe de la pluralité des degrés de juridiction prévues par le Protocole n° 7 (art. 2, ch. 2) figurent notamment, comme nous l'avons mentionné ci-dessus, les condamnations pour des infractions mineures. Plusieurs codes cantonaux de procédure pénale contiennent des dispositions expresses sur les délits mineurs (p. ex. Zurich, Berne, Lucerne, Schwyz, Zoug, Baie-Ville, Saint-Gall). Les condamnations pour de telles infractions, qui sont d'ailleurs définies de façon très diverses dans les can617

tons, n'ouvrent pas la voie de l'appel. En revanche, le pourvoi en nullité cantonal reste possible.

En résumé, nous pouvons affirmer que le droit de faire examiner par une juridiction supérieure une condamnation, au sens de l'article 2 du Protocole n° 7, est garanti en Suisse.

323 323.1

Article 3

L'article 3 consacre sous certaines conditions le principe de l'indemnisation de la personne victime d'une erreur judiciaire. Tout d'abord, la personne concernée doit avoir été déclarée coupable d'une infraction par une décision définitive et avoir subi une peine à la suite d'une condamnation. Ensuite, pour que les autorités étatiques soient contraintes de verser une indemnité à la personne concernée, la condamnation doit avoir été annulée, lors d'une procédure de révision, en raison d'un fait nouveau ou nouvellement révélé. Enfin, l'indemnisation est exclue lorsque la non-révélation en temps utile du fait inconnu est imputable, en tout ou en partie, à la personne condamnée.

Cette disposition exclut également toute indemnisation en cas de non-lieu, ou en cas d'acquittement en première instance ou devant une instance supérieure. L'article 5, chiffre 5, CEDH est applicable, comme à présent, en cas de détention préventive illégale.

L'obligation de verser l'indemnisation n'existe que lorsque les faits nouveaux ou nouvellement révélés ont permis de démontrer l'innocence de la personne condamnée. Cette constatation se fait en règle générale au cours d'une procédure de révision. Dans certains Etats, ce droit peut naître à la suite de l'octroi d'une grâce. Si le jugement est annulé pour d'autres raisons que celles que nous venons d'énumérer, aucune obligation d'indemnisation ne peut être mise à la charge des autorités. Quant aux modalités de l'indemnisation, elles se déroulent conformément à la loi et aux usages en vigueur dans l'Etat concerné.

323.2 Selon le droit suisse, la personne condamnée a droit à une indemnisation lorsqu'il apparaît au cours de la procédure de révision qu'elle a été condamnée à tort. Les dispositions applicables se trouvent dans les codes de procédure pénale de la Confédération et des cantons, mais aussi, en partie, dans les constitutions cantonales.9' Cantons et Confédération prévoient une indemnisation non seulement pour le cas où l'erreur judiciaire serait découverte au cours d'une procédure de révision, mais également en cas de non-lieu ou d'acquittement.

Plusieurs codes cantonaux de procédure pénale (p. ex. Berne, Baie-Campagne, Appenzell Rh-Ext., Glaris, Lucerne, Unterwald-le-Bas, Valais, Genè618

ve, Fribourg, Jura) reconnaissent la liberté d'appréciation des autorités compétentes pour octroyer le versement d'une indemnisation. D'autres cantons (p. ex. Zurich, Argovie, Soleure, Baie-Ville, Saint-Gall, Thurgovie, Appenzell Rh.-Int., Grisons, Zoug, Schwyz, Unterwald-le-Haut, Tessin) ainsi que les lois fédérales accordent à la personne condamnée à tort un droit de réclamer une indemnisation lorsque les conditions légales sont satisfaites. Il va de soi que la première condition pour l'octroi d'une telle indemnisation est que la personne concernée ait subi un dommage. A cet égard, le Tribunal fédéral a précisé, pour le moins en ce qui concerne la procédure pénale fédérale, que n'importe quel dommage ne suffisait pas, mais que celui-ci devait être d'une certaine importance (ATF 84 IV 46). En règle générale, ce droit est refusé, totalement ou partiellement, lorsque la personne condamnée a provoqué l'introduction d'une procédure pénale par un comportement répréhensible.

En ce qui concerne la portée de l'indemnisation, relevons que la plupart des dispositions se limitent à parler d'«indemnité». Aussi laissent-elles ouverte la question de savoir si l'intéressé n'a droit à une indemnisation que pour le dommage matériel, ou si le dédommagement doit couvrir également le tort moral. Se prononçant sur l'article 122 de la loi fédérale sur la procédure pénale, le Tribunal fédéral a décidé que cette disposition donnait également droit à une indemnisation pour tort moral (ATF 84 IV 47). De nombreuses dispositions cantonales (Soleure, Saint-Gall, Thurgovie, Schaffhouse, Appenzell Rh.-Ext., Lucerne, Unterwald-le-Bas) ainsi que la loi fédérale sur la procédure pénale militaire prévoient la possibilité d'une indemnisation pour tort moral. Seuls deux cantons (Zoug et Appenzell Rh.-Int.) limitent expressément le droit de l'intéressé à une indemnisation pour les seuls dommages matériels découlant directement de la privation de liberté. Les autres cantons prévoient la couverture d'autres dommages, notamment ceux engendrés par la procédure (p. ex. les honoraires d'avocat).

En Suisse, les erreurs judiciaires sont corrigées par la voie de la révision, en cas de présentation d'un fait nouveau ou nouvellement révélé, et non, comme dans d'autres Etats européens, par voie de grâce. En effet, dans la conception suisse,
la grâce n'annule pas le jugement, contrairement à la révision, mais en supprime l'exécution (ATF 80 IV 11). IO) Aussi, en Suisse, aucune demandé d'indemnisation ne pourra-t-elle être formulée sur la base de l'article 3 à la suite de l'octroi d'une grâce.

Nous pouvons donc affirmer qu'en principe, la Suisse garantit le droit à une indemnisation au sens de l'article 3 du Protocole.

324 324.1

Article 4

Cet article consacre le principe selon lequel une personne ne peut être poursuivie ou punie pénalement par les juridictions du même Etat en rai619

son d'une infraction pour laquelle elle a déjà été acquittée ou condamnée par un jugement définitif («ne bis in idem»).

Reste toutefois réservée la possibilité d'un procès en révision conformément aux dispositions procédurales pertinentes de l'Etat qui a prononcé le jugement. Le procès peut être réouvert à la suite de l'apparition de faits nouveaux ou nouvellement révélés, ou s'il apparaît qu'il y a eu un vice fondamental dans la procédure, susceptible d'affecter l'issue du procès soit en faveur, soit au détriment de la personne concernée.

L'expression «des faits nouveaux ou nouvellement révélés» englobe tous moyens de preuve relatifs à des faits préexistants. En principe, cet article n'exclut pas non plus une réouverture de la procédure en faveur du condamné, ni toute autre modification du jugement au profit de ce dernier.

L'interdiction d'une double condamnation ne s'applique que dans le cadre d'un procès pénal. Il n'empêche donc pas que les autorités poursuivent une personne, pour le même acte, par une procédure disciplinaire ou administrative. Restent évidemment aussi réservées les actions civiles qui sont examinées par le juge au cours d'une procédure pénale.

Il convient enfin de relever que cet article 4 ne peut pas faire l'objet d'une dérogation, au sens de l'article 15 de la CEDH, en cas de guerre ou d'autre danger public menaçant la vie de la nation. Si toutefois, et contre toute attente, la Suisse se voyait contrainte, en vertu du droit de nécessité, de déroger à cette disposition, elle devrait alors envisager une dénonciation du Protocole.

324.2 Le droit suisse connaît aujourd'hui déjà le principe de l'interdiction d'une double condamnation. Le principe «ne bis in idem» relève du droit fédéral et doit être appliqué d'office (ATF 65 I 77, 86 IV 52).'"

Selon l'article 4, l'interdiction d'une poursuite pénale par les juridictions du même Etat en raison d'une même infraction ne s'applique qu'aux tribunaux nationaux. Elle ne vaut donc pas au plan international. A cet égard, le code pénal suisse va plus loin. Il applique en effet le principe de l'interdiction de la double condamnation et renonce à une nouvelle poursuite, ou impute la peine subie à l'étranger lorsque l'auteur d'une infraction a déjà été jugé par un tribunal étranger pour la même infraction et qu'il est de nouveau poursuivi en Suisse pour le même acte (art. 3 à 7 CPS).

Plusieurs autres instruments du Conseil de l'Europe, tels que la Convention européenne sur l'extradition (art. 9; RS 0.353.1), le Protocole additionnel sur l'extradition (art. 2; RS 0.353*11), la Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs et la Convention européenne sur la transmission des procédures répressives (toutes deux non encore ratifiées par la Suisse, voir FF 1984 I 785 823 et 825) règlent l'application de ce principe au plan international12'. Enfin, ce principe est expressément prévu dans la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale (art. 5, 1er al., let. a et b; RS 351.1).

620

325 325.1

Article 5

Aux termes de l'article 5, les époux jouissent de l'égalité de droits et de responsabilités de caractère civil entre eux et dans leurs relations avec leurs enfants au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution.

L'égalité exigée par cette disposition ne régit que les relations entre époux eux-mêmes, quant à leurs personnes et leurs biens, de même que les relations avec leurs enfants. Il ne s'agit donc que de droits et de responsabilités de caractère civil. Aussi cette disposition ne s'applique-t-elle pas à d'autres domaines du droit, tels que le droit pénal, social, administratif, fiscal ou encore le droit du travail.

Cette disposition ne s'applique pas non plus aux conditions de capacité prévues par la législation nationale pour contracter le mariage (voir art. 12 CEDH) et n'a pas trait à la période qui précède le mariage. Quant à l'expression «au regard du mariage», elle vise les effets juridiques liés à la conclusion du mariage et celle de «lors de sa dissolution» n'implique aucune obligation de prévoir la dissolution ou des formes spéciales de dissolution du mariage.

La seconde phrase de l'article 5 précise que ce dernier n'empêche pas les Etats de prendre les mesures nécessaires dans l'intérêt des enfants. A ce sujet, il convient de rappeler la jurisprudence des organes de contrôle institués par la Convention, relative en particulier aux articles 8 et 14 CEDH.

En ce qui concerne l'article 8 (droit au respect de la vie familiale), la Commission et la Cour européennes des droits de l'homme ont souligné la nécessité de tenir compte des intérêts de l'enfant. Quant à l'article 14 (principe de non-discrimination), la Cour a précisé qu'il est violé «si la discrimination manque de justification objective et raisonnable».13' 325.2 Le 14 juin 1981, peuple et cantons ont accepté une nouvelle disposition constitutionnelle qui proclame l'égalité en droits de l'homme et de la femme et qui donne mandat au législateur de pourvoir à cette égalité dans le domaine de la famille notamment (art. 4, 2e al., est.).

Le législateur avait déjà fait un pas vers l'égalité entre conjoints en révisant le droit de la filiation, révision entrée en vigueur le 1er janvier 1978. Ce nouveau droit, axé sur le bien de l'enfant, a introduit l'égalité entre père et mère vis-à-vis de leur enfant en substituant
notamment à la notion de «puissance paternelle» celle d'«autorité parentale», supprimant ainsi le pouvoir de décision du père en cas de désaccord avec la mère sur une question concernant les enfants.

Le nouveau droit matrimonial, accepté à une très large majorité par les Chambres fédérales le 5 octobre 1984, et par le peuple le 22 septembre 1985, concrétise désormais l'égalité de droits et de responsabilités entre 44 Feuille fédérale. 138= année. Vol. H

621

époux. Au principe de l'autorité maritale se substitue celui de la concertation. Les époux choisiront ensemble la demeure commune (art. 162 CC).

Ils devront contribuer, chacun selon ses facultés, à l'entretien de la famille et conviendront de la façon dont chacun apportera sa contribution en tenant compte des besoins de l'union conjugale et de leur situation personnelle (art. 163 CC). La parité entre époux est également réalisée dans la représentation de l'union conjugale (art. 166 CC) et dans le choix de l'exercice d'une profession ou d'une industrie (art. 167 CC).

Dans leurs rapports patrimoniaux, les époux sont aussi placés sur un pied d'égalité. A défaut de choix d'un régime conventionnel, les époux seront soumis au régime de la participation aux acquêts (art. 196 à 220 CC).

Il convient de relever que le nouveau droit de la filiation et le nouveau droit matrimonial répondent largement aux principes figurant dans la Résolution (78) 37 sur l'égalité des époux en droit civil, adoptée par le Comité des ministres le 27 septembre 1978. Sur deux points toutefois, le nouveau droit matrimonial ne respecte pas, du moins de façon formelle, le postulat de l'égalité entre époux. Il s'agit du nom et du droit de cité.

En ce qui concerne le nom, la solution retenue prévoit en effet que le nom de famille est celui du mari (art. 160, 1er al, CC). C'est ce nom là que portent les enfants. La fiancée est toutefois en droit de déclarer à l'officier de l'état civil vouloir conserver le nom qu'elle portait jusqu'alors, suivi du nom de famille (art. 160, 2e al., CC). Quant aux fiancés qui tiennent à l'unité du nom de famille, tout en souhaitant porter le nom de la fiancée, ils pourront, s'ils font valoir des intérêts légitimes, être autorisés à porter le nom de la femme dès la célébration du mariage (art. 30, 2e al., CC). En cas de divorce ou de nullité du mariage, l'époux qui a changé de nom conserve le nom qu'il a acquis lors du mariage, à moins que, dans les six mois à compter du jugement passé en force, il ne déclare à l'officier de l'état civil vouloir reprendre son nom de célibataire ou le nom qu'il portait avant le mariage (art. 134, 2e al, et 149, 2e al., CC).

La seconde question réglée de façon inégalitaire est celle du droit de cité.

La femme acquerra les droits de cité communal et cantonal de son mari
sans perdre ceux qu'elle possédait lorsqu'elle était célibataire (art. 161 CC). Elle ne transmettra en revanche pas son propre droit de cité à son conjoint. Quant aux enfants issus du mariage, ils n'acquièrent que le droit de cité de leur père.

Ces deux questions devront donc faire l'objet d'une réserve.

326

Articles 6 à 10

Les articles 6 à 10 contiennent pour l'essentiel lés clauses finales modèles élaborées en 1980 par le Conseil de l'Europe. Nous soulignons que les articles 1 à 5 sont, tout comme les dispositions du Protocole n° 6, des articles additionnels à la CEDH (art. 7, ch. 1). A la différence toutefois du Protocole additionnel sur l'abolition de la peine de mort, les Etats devront déclarer 622

jg

expressément s'ils reconnaissent le droit de recours individuel conformément à l'article 25 de la Convention.

En 1974, la Suisse a en principe reconnu le droit de recours individuel. Depuis lors, le Conseil fédéral a eu l'occasion de constater que le bilan de ces procédures de recours était largement positif (troisième rapport; FF 1984 I 785 851). Aussi le Conseil fédéral envisage-t-il, conformément à la compétence que lui reconnaît l'article 2 de l'arrêté fédéral du 3 octobre 1974 sur l'approbation de la CEDH (RO 7974 2148), d'étendre la reconnaissance du droit de recours individuel aux articles 1 à 5 du Protocole additionnel n° 7.

4

41

Protocole d'amendement n° 8 à la Convention européenne des droits de l'homme, du 19 mars 1985, tendant notamment à accélérer la procédure devant la Commission (STEn°118) Origine du Protocole n° 8

A l'instar de nombreuses cours suprêmes nationales, les organes de contrôle institués par la Convention européenne des droits de l'homme souffrent actuellement d'une importante surcharge. Cette surcharge affecte essentiellement la Commission européenne des droits de l'homme, dans une mesure moindre.la Cour européenne des droits de l'homme. Elle s'explique notamment par le fait qu'aujourd'hui, 18 des 21 Etats parties à la Convention ont reconnu le droit de recours individuel prévu à l'article 25 CEDH (exceptions: Chypre, Malte et Turquie), et que 19 d'entre eux ont reconnu la juridiction obligatoire de la Cour en faisant la déclaration prévue à l'article 46 CEDH (exceptions: Malte et Turquie). La meilleure connaissance de la Convention au sein des Etats membres du Conseil de l'Europe a également favorisé l'augmentation du nombre et de la diversité des requêtes complexes soumises à l'examen des organes de la Convention.

Quelques statistiques permettent d'illustrer cette situation.1'*' Depuis 1955, date à laquelle la Commission a commencé son activité, plus de 11 000 requêtes individuelles lui ont été adressées, au rythme actuel de 400 à 600 requêtes par année. Il est vrai que 97 pour cent des requêtes introduites sont écartées au stade de l'examen de leur recevabilité. Mais le tiers environ des requêtes déclarées recevables par la Commission depuis 1955 (environ 350) l'ont été depuis 1981. Ce sont ces requêtes, parfois complexes, qui nécessitent un examen approfondi par la Commission.

L'évolution des activités de la Cour (qui a commencé à fonctionner en 1958) est très frappante elle aussi: pour la période allant de 1958 à 1972, la Cour rendait en moyenne un arrêt par année; de 1973 à 1980, trois arrêts par année; de 1981 à 1984, onze arrêts en moyenne par année. Plus de la moitié des quelque 85 arrêts rendus par la Cour l'ont été depuis 1981.

L'augmentation du nombre des requêtes déclarées recevables a eu pour conséquence une augmentation de la durée des procédures, qui devient in*' La note " comme les autres notes figurent à la fin du message.

623

tolérable: lorsque l'affaire prend fin par un arrêt de la Cour, la procédure a duré en moyenne au total six ans (quatre ans devant la Commission et deux ans devant la Cour). Lorsque l'affaire aboutit à une décision du Comité des ministres (en cas de non-saisine de la Cour), la durée totale moyenne de la procédure dépasse quatre ans (trois ans devant la Commission et un peu moins d'une année devant le Comité des ministres).

Les organes politiques du Conseil de l'Europe et les Etats membres du Conseil de l'Europe n'ont pas manqué de réagir face à cette situation. C'est ainsi que dans la Déclaration sur les droits de l'homme adoptée le 27 avril 1978 par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, les Etats membres de l'organisation se sont déclarés persuadés qu'il est «primordial que les organes institués par la Convention européenne des droits de l'homme demeurent un moyen effectif d'assurer le respect des engagements qui en résultent».

Le 19 novembre 1981, lors de leur 69e session, les ministres, tout en se félicitant de la décision prise par l'Espagne et par la France de reconnaître le droit de recours individuel prévu par la Convention, ont réaffirmé «l'importance qu'ils attachent au renforcement de la protection des droits de l'homme en Europe et à l'efficacité du mécanisme de contrôle institué par la Convention». Ils ont souligné, dans ce contexte, «la nécessité de réaliser des progrès dans le sens de la Déclaration des Etats membres du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme du 27 avril 1978 et de prendre les mesures nécessaires pour permettre à la Commission et à la Cour des droits de l'homme d'exercer pleinement leurs fonctions dans l'intérêt de la sauvegarde et de l'exercice effectif des droits fondamentaux en Europe».

Ces préoccupations se sont traduites dans les faits par les travaux du Comité d'experts pour l'amélioration de la procédure de la Convention européenne des droits de l'homme, organe subordonné au Comité directeur pour les droits de l'homme du Conseil de l'Europe. Ce Comité d'experts, qui a pu se baser sur des travaux déjà effectués par le Comité directeur dans le passé, a étudié à titre prioritaire les moyens d'améliorer et notamment d'accélérer la procédure devant les organes de la Convention. Un ensemble de mesures a été provisoirement identifié et le Comité
d'experts a décidé de concentrer son attention, pour commencer, sur certains problèmes urgents posés par la procédure devant la Commission. Certaines mesures impliquant des amendements à la Convention, il a été indispensable d'élaborer à cet effet un protocole portant amendement à celle-ci. Quelques modifications mineures relatives à la procédure devant la Cour ont également été introduites dans le texte.

Parallèlement, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe s'est préoccupée de l'organisation et du fonctionnement du mécanisme de contrôle institué par la Convention. Le 28 septembre 1983, elle adoptait un rapport du 12 août 1983 présenté par l'ancien conseiller national Anton Muheim au nom de la Commission des questions juridiques de l'Assemblée.2' A la même date, l'Assemblée parlementaire adoptait une Recommandation 970 relative aux affaires soumises dans le cadre la Convention européenne des droits de l'homme. Dans ce texte, l'Assemblée parlementaire recommandait 624

notamment que diverses améliorations soient apportées à la procédure devant la Commission. Le Comité d'experts susmentionné a largement tenu compte des propositions de l'Assemblée en élaborant le projet de Protocole d'amendement.

Une fois élaboré, ce projet de Protocole a été mis au point par le Comité directeur pour les droits de l'homme et soumis au Comité des ministres, qui a adopté le texte à la 379e réunion des Délégués des ministres, tenue du 17 au 25 janvier 1985. Le 19 mars 1985 à Vienne, le texte du Protocole d'amendement n° 8 a été ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la Convention européenne, à l'occasion de la première Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'homme. Le conseiller fédéral Aubert l'a signé à cette occasion au nom de la Suisse. 18 autres Etats l'ont signé (République fédérale d'Allemagne, Autriche, Chypre, Belgique, Danemark, Espagne, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Liechtenstein, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède). Par la suite, la Turquie l'a également signé, ce qui porte à 20 le nombre des Etats signataires. Seul un Etat ne l'a pas encore signé (Malte). Six ratifications sont intervenues à ce jour (Autriche, Belgique, Danemark, Liechtenstein, Royaume-Uni, Suède).

42

Nature juridique du Protocole n° 8

A la différence des Protocoles additionnels n08 1, 4, 6 et 7 à la Convention, qui allongent la liste des droits garantis par cet instrument, le Protocole n° 8 (comme les Protocoles n08 3 et 5) est un protocole d'amendement, qui a pour objet de modifier le texte même de la Convention. Il en découle que le Protocole n° 8 n'entrera en vigueur, en vertu de son article 13, que le premier jour du mois qui suivra l'expiration d'une période de trois mois après la date à laquelle tous les Etats parties à la Convention européenne des droits de l'homme auront exprimé leur consentement à être liés par le Protocole n° 8 conformément aux dispositions de l'article 12 de ce dernier (signature avec ou sans réserve de ratification, d'acceptation ou d'approbation). Une fois entré en vigueur, le Protocole d'amendement n° 8 fera partie intégrante de la Convention européenne des droits de l'homme. Tout Etat qui ratifierait la Convention après cette date serait automatiquement partie au Protocole n° 8 (et aux Protocoles n05 3 et 5). En ratifiant la Convention européenne des droits de l'homme en 1974, la Suisse s'est trouvée dans cette situation vis-à-vis des Protocoles d'amendement n08 3 et 5.

Dans la Résolution n° 1 adoptée le 20 mars 1985 à l'issue de la première Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'homme3', les ministres, après avoir réaffirmé leur profond attachement au système de protection des droits de l'homme établi par la Convention et avoir rendu hommage à l'oeuvre remarquable accomplie par la Cour et la Commission dans l'application de la Convention, ont invité «instamment les Etats membres du Conseil de l'Europe à devenir parties aussitôt que possible au huitième Protocole d'amendement à la Convention, concernant la procédure de la Commission et de la Cour».

625

Cette invitation pressante s'explique non seulement par l'objet du Protocole n° 8, mais par le fait que l'entrée en vigueur de ce dernier exige 21 ratifications.

43 431

Objet du Protocole d'amendement n° 8 Analyse de ses dispositions Objet du Protocole n° 8

La plupart des amendements à la Convention introduits par le Protocole n° 8 découlent de l'objectif prioritaire de celui-ci: améliorer la procédure, notamment devant la Commission européenne des droits de l'homme.

Voici une description sommaire des principales innovations apportées par le Protocole n° 8: a. L'innovation la plus importante introduite par le Protocole n° 8 consiste dans la compétence accordée à la Commission européenne des droits de l'homme de créer en son sein des chambres. Chacune de ces chambres jouira, pour les requêtes individuelles qui lui seront soumises, de l'ensemble des compétences conférées à la Commission, jusqu'à et y compris l'adoption d'un rapport (art. 30 et 31 CEDH). Cette innovation devrait alléger notablement la tâche de la Commission.

Les chambres devront comprendre au moins sept membres. En les créant, la Commission devra veiller à assurer une représentation géographique équitable au sein de chaque chambre et une représentation, au sein de chacune d'entre elles, des principaux systèmes juridiques des Etats membres du Conseil de l'Europe. Le membre de la Commission élu au titre de l'Etat contre lequel la requête est dirigée (ci-après: le membre «national») aura le droit de siéger au sein de la chambre saisie de ladite requête.

Si le membre «national» de la Commission renonce à exercer son droit, la Chambre pourra et devra traiter la requête en son absence.

b. Une autre innovation importante apportée par le Protocole n° 8 consiste dans la compétence donnée à la Commission de créer en son sein des comités restreints, habilités à rejeter des requêtes individuelles lorsque celles-ci sont manifestement irrecevables. La création de ces comités présentera un double avantage: d'une part, la Commission et ses chambres n'auront plus à s'occuper de ces requêtes, ce qui leur donnera davantage de temps pour examiner les affaires importantes; d'autre part, le temps nécessaire à l'examen des requêtes manifestement irrecevables sera considérablement réduit, notamment en raison du fait que les comités auront la possibilité de se réunir fréquemment, le cas échéant entre les sessions de la Commission pionière.

c. Parmi les autres innovations introduites dans la procédure de la Commission par le Protocole n° 8, on mentionnera: l'amendement de l'article 23 CEDH, qui précisera désormais les conditions que doivent remplir les membres de la Commission durant l'exercice de leur man626

dat; l'amendement de l'article 29 CEDH, sur la question de la majorité requise pour le rejet, pour des motifs de non-recevabilité, d'une requête précédemment retenue; et l'introduction d'un nouvel article 30 CEDH, qui définit les modalités de la radiation des requêtes par la Commission (cette question était jusqu'ici régie par le règlement intérieur de la Commission; son importance pratique pour les requérants a paru justifier de le faire figurer désormais dans la Convention).

d. Enfin, le Protocole n° 8 contient certaines dispositions qui concernent la Cour européenne des droits de l'homme. C'est ainsi que, par souci de cohérence avec l'article 23 CEDH précité, il a été décidé de compléter l'article 40 CEDH en précisant que tout comme les membres de la Commission, les membres de la Cour siègent à titre individuel et ne peuvent, durant tout l'exercice de leur mandat, assumer des fonctions incompatibles avec les exigences d'indépendance, d'impartialité et de disponibilité inhérentes à leur mandat. En outre, un amendement de l'article 43 CEDH a été décidé en vue de porter désormais la composition des chambres devant la Cour à neuf juges (sept jusqu'ici). Cette suggestion, faite par la Cour elle-même, devrait aussi contribuer à accélérer la procédure, dans la mesure où elle réduira probablement les cas (assez fréquents) de dessaisissement des chambres au profit de la Cour plénière. Enfin, à la suggestion de la Cour également, un amendement mineur a été porté à l'article 41 CEDH en vue de permettre, comme à la Commission, la désignation d'un second viceprésident.

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Analyse des dispositions du Protocole n° 8

Article 1 Cette disposition porte amendement à l'article 20 CEDH. Elle définit les compétences des chambres et des comités restreints.

La structure de cette disposition montre qu'au sein de la Commission, l'examen des requêtes individuelles en séances plénières reste en principe la règle, bien qu'il soit prévisible - et souhaitable, du point de vue de l'accélération de la procédure - que la Commission fasse en pratique un large usage de sa compétence de traiter certaines requêtes au sein des chambres et des comités restreints. On observera que le système envisagé pour la Commission est opposé à celui qui existe à la Cour, où l'examen des affaires au sein de chambres demeure la règle, la saisine de la Cour plénière demeurant l'exception. On notera en outre qu'au sein de la Commission, les requêtes seront soumises à une ou plusieurs chambres préexistantes alors qu'au sein de la Cour, une nouvelle chambre est créée (par tirage au sort du nombre de juges correspondants) pour les besoins de chaque affaire dont la Cour est saisie.

a. Compétences des chambres (art. 20, par 2 et 5, CEDH) Les auteurs du Protocole ont souhaité conférer aux chambres des compétences larges. La règle est que ces chambres exerceront (sous réserve des ex627

copiions mentionnées ci-dessous) toutes les compétences actuellement exercées par la Commission. En conséquence, sauf indication contraire, le terme «Commission», dans la Convention, devra désormais être compris comme visant aussi une «chambre», ou un «comité restreint», si cela résulte du contexte.

On a vu plus haut que la latitude réservée à la Commission, dans la création de chambres, était limitée par une règle concernant la taille de cellesci: les chambres devront être composées chacune d'au moins sept membres.

Il est également entendu que ces chambres devront refléter une représentation géographique et juridique adéquate.

L'article 20, paragraphe 5, CEDH réserve à la Commission plénière l'exercice des compétences suivantes: - examen des requêtes interétatiques (art. 24 CEDH); - saisine de la cour (art. 48, let. a, CEDH); - établissement du règlement intérieur de la Commission (art. 36 CEDH).

En outre, en vertu de l'article 20, paragraphe 2, CEDH, les chambres ne pourront examiner que les requêtes individuelles «qui peuvent être traitées sur la base d'une jurisprudence établie ou qui ne soulèvent pas de question grave relative à l'interprétation ou à l'application de la Convention».

Cette limite matérielle à la compétence des chambres répond aux préoccupations suivantes: - les requêtes complexes doivent être examinées par la Commission plénière, en raison de leur nature même et de la nécessité d'assurer l'unité de la jurisprudence; - le concept de «jurisprudence établie» est destiné à réserver aux chambres certaines questions déjà abondamment traitées par la Commission (p. ex., les problèmes relatifs à la durée de procès pénaux ou civils ou à certains aspects de la condition pénitentiaire); - la notion de «question grave relative à Y interprétation ( . . . ) de la Convention» devrait permettre une certaine souplesse: les chambres pourront examiner les requêtes qui, bien que présentant certains aspects nouveaux, ne soulèvent pas de questions d'importance particulière; - la notion de «question grave relative (...) à l'application de la Convention» vise le cas de requêtes qui, bien que ne soulevant pas elles-mêmes de question grave d'interprétation de la Convention, pourraient avoir des incidences pratiques importantes sur le système juridique de l'Etat en cause. Pour des raisons évidentes,
les auteurs du Protocole ont voulu que de telles requêtes fussent examinées par la Commission plénière.

Il est prévu que les majorités requises lors de la prise de décision par la Commission vaudront aussi pour les chambres: celles-ci prendront donc leurs décisions à la majorité de leurs membres présents et votant (art. 34 CEDH), sauf dans le cas de l'article 29 CEDH (qui prévoit actuellement la règle de l'unanimité, règle que le Protocole n° 8 se propose de remplacer par la majorité des deux tiers).

Les auteurs du Protocole n° 8 n'ont pas perdu de vue les droits de l'individu. En premier lieu, ils ont estimé que la répartition des compétences en628

tre la Commission pionière et les chambres, telle qu'esquissée ci-dessus, tient aussi compte des intérêts du requérant. En outre, la règle prévue au second alinéa de l'article 20, paragraphe 2, CEDH (selon lequel le membre «national» de la Commission a le droit de faire partie de la chambre saisie d'une requête introduite contre un Etat donné) constitue aussi, dans une certaine mesure, une garantie pour lui. Enfin, bien que le texte de l'article 20 CEDH ne contienne aucune précision à cet effet, les auteurs du Protocole n° 8 ont envisagé qu'avant qu'une chambre ne soit saisie d'une requête, le requérant (tout comme l'Etat contre lequel la requête est introduite) devait avoir la possibilité de faire valoir son point de vue sur la question de la saisine.

b. Compétences des comités restreints (art. 20, par. 3, CEDH) Comme déjà dit, les comités restreints, que la Commission pourra constituer en son sein et qui seront composés chacun d'au moins trois membres, auront le pouvoir de déclarer irrecevables ou de rayer du rôle, à l'unanimité, les requêtes individuelles qui peuvent être écartées sans plus ample examen.

En créant ce système, les auteurs du Protocole n° 8 ont eu à l'esprit la procédure sommaire pratiquée par les cours suprêmes de plusieurs Etats membres (voir, en ce qui concerne la procédure devant le Tribunal fédéral suisse, les art. 92 et 109 OJ). Cet aménagement procédural devrait notablement contribuer à remédier à l'engorgement actuel du rôle de la Commission.

c. Modalités du dessaisissement des chambres au profit de la Commission plénière (art. 20, par. 4, CEDH) Cette disposition permettra à une chambre ou à un comité restreint, en tout état de la cause, de se dessaisir en faveur de la Commission plénière si cette chambre ou ce comité restreint se heurtent par exemple à un problème juridique particulier qui n'avait pas été prévu initialement, ou si une chambre estime nécessaire de s'écarter d'une jurisprudence établie. Cette disposition traduit un souci de souplesse: ^lle permettra aussi à la Commission plénière d'évoquer toute requête confiée à une chambre ou à un comité restreint. L'uniformité d'interprétation de la Convention devrait être ainsi garantie.

Article 2 Cette disposition complétera l'article 21 CEDH en précisant les qualifications requises des candidats à la Commission. Les
candidats, qui devront être juristes, devront jouir de la plus haute considération morale et réunir les conditions requises pour l'exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des personnes reconnues pour leurs compétences en droit national ou international. Ce texte s'inspire de la disposition correspondante concernant la Cour (art. 39, par. 3, CEDH). Le terme de «jurisconsulte» a été toutefois évité, parce qu'imprécis et quelque peu désuet. L'expression «hautes fonctions judiciaires» doit être interprétée largement: elle ne vise pas 629

seulement les juges du siège, mais la magistrature debout (procureurs généraux notamment). L'expression «compétences en droit national ou international» laisse entendre qu'un certain équilibre entre les internationalistes et les spécialistes du droit interne (droit public, droit pénal, droit privé) devrait être réalisé au sein de la Commission.

Article 3 Dans le même esprit, l'article 3 du Protocole n° 8 vise à amender l'article 23 CEDH en vue de mettre en lumière les qualités d'indépendance, d'impartialité et de disponibilité inhérentes à la fonction de membre de la Commission. Les Etats membres sont conscients que les conditions matérielles de travail des membres de la Commission doivent être adaptées en conséquence. Aujourd'hui déjà, la charge de membre de la Commission équivaut à un emploi à mi-temps.

Article 4 L'article 4 du Protocole n° 8 permettra de regrouper, au sein de l'article 28 CEDH, les dispositions concernant les règlements amiables (jusqu'ici ces dispositions, incomplètes, étaient dispersées aux art. 28 et 30 CEDH). La lecture de la Convention gagnera en lisibilité.

Article 5 L'article 5 du Protocole n° 8 modifie la majorité requise pour rejeter, en vertu de l'article 29 CEDH, une requête précédemment retenue. La pratique montre en effet qu'un motif de non-recevabilité d'une requête peut apparaître après une décision de recevabilité et justifier le rejet d'une telle requête. L'article 29 CEDH est toutefois demeuré quasi lettre morte en raison de l'exigence de l'unanimité. Les auteurs du Protocole ont estimé en conséquence qu'il fallait assouplir les conditions d'application de l'article 29 de la Convention, en ramenant l'exigence de l'unanimité à celle des deux tiers des membres de la Commission.

Article 6 La Convention ne régit pas, actuellement, les modalités de la radiation du rôle des requêtes. Dès le début, la Commission a régi la matière dans son règlement intérieur. L'importance de la question a paru justifier qu'elle soit désormais traitée, dans ses aspects essentiels, dans la Convention.

Article 7 L'article 7 du Protocole n° 8 porte amendement de la phrase liminaire de l'article 31, paragraphe 1er, CEDH, de manière à mieux faire comprendre que cette disposition ne trouve application que dans le cas où un règlement amiable n'est pas intervenu ou que la procédure n'a pas pris fin autrement en application des articles 29 ou 30 CEDH.

Article 8 L'article 8 du Protocole n° 8 modifie l'article 34 CEDH de manière à tenir

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compte de la règle de l'unanimité applicable aux décisions des comités restreints.

Article 9 Un souci de cohérence et de systématique a incité les auteurs du Protocole n° 8 à harmoniser l'article 40 CEDH avec l'article 23 CEDH, tel que modifié par l'article 3 du Protocole n° 8: en conséquence, l'article 40 CEDH indiquera désormais, en son paragraphe 7, les fonctions qui sont incompatibles avec la charge de membre de la Cour.

Article 10 L'article 10 du Protocole n° 8 prévoit une modification de l'article 41 CEDH, afin de permettre l'élection d'un second vice-président de la Cour.

Cette mesure, suggérée par la Cour elle-même, se justifie en raison tant de l'accroissement du nombre des membres de la Cour que du travail accompli par celle-ci. On notera que la Commission, elle, a déjà deux vice-présidents.

Article 11 En vue de réduire, autant que possible, les cas de dessaisissement des chambres de la Cour en faveur de la Cour pionière, celle-ci a suggéré que le nombre des membres des chambres de la Cour soit porté de sept à neuf. La modification envisagée de l'article 43 CEDH paraît également de nature à accélérer la procédure.

Articles 12 à 14 Les articles 12 à 14 du Protocole n° 8 contiennent les clauses finales, conformes au modèle adopté par le Comité des ministres.

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Position de la Suisse

La Suisse a joué un rôle important dans l'élaboration du Protocole. On a vu plus haut que la Résolution 970 adoptée par l'Assemblée parlementaire le 28 septembre 1983 l'a été sur la base d'un rapport présenté par un membre de la délégation suisse à l'Assemblée parlementaire (l'ancien conseiller national Anton Muheim) au nom de la Commission des questions juridiques de cet organe. En outre, la Suisse, qui a assumé la vice-présidence du Comité d'experts pour l'amélioration de la procédure qui a mis au point le Protocole, a soumis des propositions décisives pour les travaux de ce comité. Enfin, on rappellera que la Résolution n° 1 adopté le 20 mars 1985 par la première Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'homme (Résolution qui préconise une entrée en vigueur aussi rapide que possible du Protocole d'amendement n° 8) l'a été sur la base d'un rapport présenté par la délégation suisse à Vienne.4' Nous sommes d'avis que l'efficacité du mécanisme international de contrôle institué par la Convention exige impérieusement l'entrée en vigueur rapide du Protocole d'amendement n° 8. En même temps, nous n'excluons pas

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que ce premier train de mesures puisse se révéler insuffisant et qu'ultérieurement des réformes plus profondes du mécanisme de contrôle devront être envisagées, telles que la fusion de la Commission et de la Cour en un organe juridictionnel unique. Il paraît cependant raisonnable, dans un premier temps, de mettre en vigueur le Protocole n° 8 et de mesurer les résultats obtenus dans son application.

5

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

La ratification des Protocoles additionnels nos 6 et 7 n'aura pour la Confédération ni conséquences financières ni effets sur l'état du personnel.

Cette remarque vaut également pour le Protocole n° 8. Toutefois, la ratification de ce dernier Protocole entraînera une conséquence financière limitée et indirecte dans la mesure où la Suisse doit verser une contribution au budget du Conseil de l'Europe (en 1985, la participation de la Suisse au budget du Conseil de l'Europe s'élevait à 2 776 300 fr.). Or les innovations apportées à la Commission et à la Cour auront des répercussions sur le fonctionnement du Secrétariat, du greffe et de la Direction des droits de l'homme. Aussi, la participation de la Confédération au budget du Conseil de l'Europe devra-t-elle être adaptée proportionnellement.

6

Grandes lignes de la politique gouvernementale

L'objet qui vous est soumis a été annoncé dans les Grandes lignes de la politique gouvernementale 1983-1987 (FF 1984 I 153, appendice 2).

Dans ces Grandes lignes, nous avions à nouveau souligné que nous attachions la plus grande importance aux conventions et recommandations qui renforcent l'harmonisation du droit en Europe (FF 1984 I 193).

Dans notre troisième rapport sur la Suisse et les conventions du Conseil de l'Europe, du 22 février 1984 (FF 1984 I 792 803 ss), nous avons rangé le Protocole n° 6 parmi les instruments conventionnels que nous considérons comme prioritaires et dont la ratification devait intervenir encore durant la présente législature. Cette remarque vaut également pour les Protocoles additionnels nos 7 et 8, qui n'avaient pu être mentionnés dans le rapport susmentionné car ils étaient encore en cours d'élaboration.

7

Constitutiornalité

La compétence de la Confédération de ratifier les Protocoles additionnels n08 6 et 7, ainsi que le Protocole n° 8 à la Convention européenne des droits de l'homme découle de l'article 8 de la constitution. L'approbation des Protocoles additionnels n08 6 et 7 par l'Assemblée fédérale se fait en vertu de l'article 85, 5e alinéa, de la constitution. Le Protocole n° 8 modifie et complète le droit institutionnel de la Convention sur des points importants, de sorte qu'il doit être soumis comme celle-ci à l'approbation de l'Assemblée fédérale.

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jg

Les trois arrêtés fédéraux par lesquels le Parlement donne son approbation ne sont pas sujets au référendum facultatif en .matière de traités internationaux prévu à l'article 89, 3e alinéa, lettres a, b et c de la consitution. En effet, ils sont dénonçables, à l'instar de la Convention, et ne prévoient pas l'adhésion à une organisation internationale. En outre, aucun d'entre eux, et en particulier les Protocoles additionnels nos 6 et 7, n'entraîne une unification multilatérale du droit au sens de l'article 89, 3e alinéa, lettre c, de la constitution, et ceci pour les raisons suivantes: Selon la pratique constante (cf. notamment FF 1980 II 733, 1981 II 957, 1982 I 947, 1982 II 12, 1983 I 123, 1983 IV 158, 1984 III 943, 1985 III 287, 1985 III 372), seuls entraînent une unification multilatérale du droit au sens de l'article 89, 3e alinéa, lettre c, de la constitution les traités qui contiennent du droit uniforme élaboré sur le plan multilatéral, droit qui remplace ou tout au moins complète directement le droit interne et dont les principales dispositions sont directement applicables. Le nouveau droit uniforme ainsi créé doit régler en détail un domaine juridique bien défini, c'est-à-dire qu'il doit, par sa forme et quant au fond, constituer un ensemble suffisamment important pour justifier sur le plan national, par analogie, l'élaboration d'une loi particulière. Les exemples cités lors des débats parlementaires qui ont conduit à l'adoption de cet article constitutionnel indiquent clairement la portée et l'étendue d'une unification du droit au sens de l'article précité, telle que le constituant l'entendait. Les Protocoles additionnels nos 6 et 7 à la Convention européenne des droits de l'homme ne remplissent pas ces conditions. Dans les deux cas, il ne s'agit que d'une harmonisation de normes isolées qui sont insérées dans la Convention en tant que droits fondamentaux distincts. Par ailleurs, les Protocoles en question se bornent, comme d'ailleurs la Convention elle-même (art. 60), à établir un régime subsidiaire minimum, harmonisé sur des points particuliers, par rapport aux droits fondamentaux garantis sur le plan national, de sorte qu'ils ne sauraient remplacer ou compléter des normes matérielles du droit suisse.

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Notes relatives au Protocole additionnel n° 6 ') Hanno Hartig, Die Todesstrafe in den Mitgliedsstaaten des Europarates, Europäische Grundrechte Zeitschrift, 1980, p. 340 à 344.

2 > Rapport et proposition du Gouvernement de la Principauté du Liechtenstein, du 7 novembre 1984, adressé au Parlement en vue de l'introduction d'un nouveau code pénal, p. 32 à 35.

3 > Proposition Merz relative à l'abolition totale de la peine de mort dans le CPM (BÖ N 1978 p. 115); initiative Oehen, délits politiques, peine de mort (BÖ N 1979 p. 1926).

Le 17 octobre 1983 a été déposée une liste de signatures à l'appui de l'initiative populaire fédérale «pour sauver notre jeunesse: réintroduction de la peine capitale pour les personnes qui font le commerce des drogues dures». L'initiative n'a toutefois pas recueilli le nombre nécessaire de signatures dans le délai légal (FF 1983 IV 113 et 19851 1233).

4 > Rapport de la Commission d'experts pour la préparation d'une revision totale de la constitution fédérale, 1977, p. 35 à 37.

5 > Irene Maier, Initiativen zur Abschaffung der Todesstrafe, Vereinte Nationen 1/81, p. 6 à 10.

6 > Christian Broda, Europäische Menschenrechtskonvention und Todesstrafe, Mélanges Klecatsky, Vienna 1980, p. 75 à 84.

7 >Le 22 avril 1980, l'Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 727 (1980) et la Recommandation 891 (1980) dans lesquelles elle demande l'abolition de la peine de mort dans le droit des Etats membres et dans la CEDH. La délégation suisse à l'Assemblée parlementaire a, unanimement, voté en faveur des deux textes.

«Lors de leur 11e Conférence, tenue les 21 et 22 juin 1978 à Copenhague, les Ministres européens de la justice ont recommandé au Comité des ministres du Conseil de l'Europe de charger les instances compétentes de l'Organisation de l'examen de la question de la peine de mort. Lors de leur 12e Conférence tenue à Luxembourg les 20 et 21 mai 1980, les ministres ont examiné les résultats de ces travaux ainsi que la Recommandation 891 (1980) de l'Assemblée parlementaire, et fixé comme but l'abolition de la peine de mort en Europe occidentale. Dans la Recommandation adressée au Comité des ministres du Conseil de l'Europe, ils se sont engagés à faire en sorte que des normes européennes correspondantes soient élaborées. Cette question fut également discutée lors de la Réunion
informelle du 10 septembre 1981 à Montreux, qui a siégé sous la présidence de M. Furgler, président de la Confédération.

" Hanno Hartig, Abschaffung der Todesstrafe in Europa/Das 6. Zusatzprotokoll zur EMRK, Europäische Grundrechte Zeitschrift, 1983, p. 270 à 272.

"»Kurt Hauri, Militärstrafgesetz, Bundesgesetz vom 13. Juni 1927, Kommentar, Berne 1983, p. 77.

1 ') Kurt Gysin, Todesstrafe und todeswürdige Verbrechen im schweizerischen Militärstrafrecht, thèse, Zurich 1953, p. 39.

Kurt Hauri, op. cit., p. 51.

12 > L'ordonnance du 28 mai 1940 a été abrogée avec effet le 21 août 1945, par la levée de l'état de service actif (décision du Conseil fédéral du 3 août 1945 concernant la levée du service actif).

' 3 >Le message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 29 août 1939 sur les mesures propres à assurer la sécurité du pays et le maintien de sa neutralité débute par ces mots:

634

,.»

Monsieur le Président et Messieurs, La tension politique en Europe, voire dans le monde entier, est forte.

L'espoir d'un règlement pacifique, caressé par les peuples, paraît fragile.

Nous devons compter avec le danger d'une guerre. Si la guerre éclatait vraiment, elle aurait peut-être toute l'ampleur de la catastrophe des années 1914-1918.

(FF 1939 II 217).

Notes relatives au Protocole additionnel n° 7 " Décision de la Commission européenne des droits de l'homme du 12 juillet 1976 dans l'affaire X c/Suisse, Décisions et Rapports (DR) vol. 6, p. 124 et 125.

2 > Décision de la Commission européenne des droits de l'homme du 6 juillet 1982 dans l'affaire X, Y et Z c/Royaume-Uni, DR 29, p. 205 ss, p. 218.

3 > Andrew Drzemczewski, La situation des étrangers au regard de la Convention européenne des droits de l'homme, Conseil de l'Europe, Dossier sur les droits de l'homme n°8, Strasbourg 1985; voir également à ce sujet Alfred Kohler, Die Reneja-Praxis des Bundesgerichtes, Zbl. 86, 1985, p. 513 à 522.

4 >Jörg Paul Müller/Stefan Müller, Grundrechte, Besonderer Teil, Berne 1985, p. 233 ss.

5) Peter Sulgef Büel, Vollzug von Fernhalte- und Entfernungsmassnahmen gegenüber Fremden nach dem Recht des Bundes und des Kantons Zürich, thèse, Zurich 1984, p. 84.

6 > De même, il convient de considérer comme expulsion, au sens de l'article 1 du Protocole additionnel n° 7, l'expulsion qui consiste dans la révocation ou le retrait d'une autorisation, au sens de l'article 12, 3e alinéa, LSEE, en particulier lorsque cette mesure est liée à une interdiction de revenir en Suisse. Les garanties procédurales sont également remplies dans ce cas, mais le recours de droit administratif au Tribunal fédéral peut être introduit (art. 100, let. b, OJ a contrario).

''Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 17 janvier 1970 dans l'affaire Delcourt, Série A n° 11.

8) Robert Hauser, Kurzlehrbuch des schweizerischen Strafprozessrechts, 2B édition complétée et augmentée, Zurich 1984, p. 276 et ss.

« Ernst Fischii, Die Entschädigung unschuldig Verfolgter, RDS 79, 1960 II, p. 263 ss, p. 362 à 368.

Adam Claus Eckert, Die Wiederaufnahme des Verfahrens im schweizerischen Strafprozessrecht, Berlin 1974.

Robert Hauser, op. cit., p. 325.

10 > François Clerc, De l'exercice du droit de grâce par les cantons sous l'empire
du code pénal suisse, RDS 73, 1958, p. 93 ss, p. 110 et 111.

Hans Schultz, Einführung in den allgemeinen Teil des Strafrechts, volume I, 4e édition augmentée, Berne 1982, p. 256.

"> Robert Hauser, op. cit., p. 241 à 244.

121 Commission juridique du Parlement européen, Application du principe «ne bis in idem» dans le droit pénal de la CE, Europäische Grundrechte Zeitschrift, 1984, p. 349 à 351.

'"Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 23 juillet 1966 dans l'affaire linguistique belge, Série A, n° 6.

635

Notes relatives au Protocole additionnel n° 8 " Les chiffres cités sont repris d'un rapport que la Suisse a présenté, le 19 mars 1985 à Vienne, lors de la première Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'homme. Ce rapport, consacré au «fonctionnement des organes de la Convention européenne des droits de l'homme (évaluation, amélioration et renforcement du mécanisme international de contrôle institué par la Convention)» a été publié dans la JAAC 1984 (48/IV) n° 106, p. 553 à 577.

2 > Document 5102 de l'Assemblée parlementaire, du 17 août 1983 (Rapport Muheim sur les affaires soumises dans le cadre de la CEDH).

3 > Cette Résolution n° 1, du 20 mars 1985, sur le système de contrôle institué par la CEDH, est publiée dans la JAAC 1984 (48/IV) n° 106, p. 578 s.

4 > Voir ci-dessus, notes 1 et 3.

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636

·$

Annexe

La peine de mort dans les Etats membres du Conseil de l'Europe 1. Etats qui ont aboli la peine de mort de façon générale

République fédérale d'Allemagne Autriche Danemark France Islande Luxembourg Norvège Pays-Bas Portugal Suède

en vertu de la loi fondamentale de 1949 (art. 102).

depuis 1968 (art. 85 de la constitution).

en temps de paix depuis 1930, en temps de guerre depuis 1978 en vertu de la loi du 9 octobre 1981 depuis 1928 en vertu de la loi du 17 mai 1979 en vertu de la loi du 8 juin 1979 en temps de paix depuis 1870, en temps de guerre depuis 1983 depuis 1867, et en vertu de la constitution depuis 1975 (art. 25, 2e al.).

en temps de paix depuis 1921, en temps de guerre depuis 1973

2. Etats qui ont aboli la peine de mort en temps de paix

Espagne Italie Malte Royaume-Uni Suisse

depuis 1978 (art. 15, deuxième phrase, de la constitution) depuis 1948 (art. 27 de la constitution) depuis 1971 depuis 1969 depuis 1942

3. Etats qui n'ont pas aboli la peine de mort

Belgique Chypre Grèce Irlande

les personnes condamnées à mort depuis 1863 ont été généralement graciées (la dernière exception date de 1918) le dernier jugement de condamnation à mort remonte à 1962 la dernière exécution a eu lieu en 1972 la dernière exécution a eu lieu en 1954

45 Feuille fédérale. 138e année. Vol. U

637

Liechtenstein

Turquie

638

depuis 200 ans, aucun jugement de condamnation à mort n'a été exécuté. Le code pénal est actuellement en révision. Le Gouvernement a déjà décidé d'abolir d'une façon générale la peine de mort. Le nouveau code pénal entrera vraisemblablement en vigueur en 1987.

des condamnations à mort ont été prononcées et exécutées pour des délits de droit commun et des délits militaires.

Arrêté fédéral

Projet

relatif au Protocole additionnel n" 6 à la Convention européenne des droits de l'homme, du 28 avril 1983, concernant l'abolition de la peine de mort (Série des Traités européens n° 114) du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 8 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 7 mai 1986 '', arrête: Article premier 1 Le Protocole additionnel n° 6 à la Convention européenne des droits de l'homme, du 28 avril 1983, concernant l'abolition de la peine de mort, est approuvé.

2 Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier le Protocole additionnel n° 6.

Art. 2 Le présent arrêté n'est pas sujet au référendum en matière de traités internationaux.

30740

» FF 1986 II 605

639

Arrêté fédéral

Projet

relatif au Protocole additionnel n° 7, du 22 novembre 1984, complétant la Convention européenne des droits de l'homme (Série des Traités européens n° 117) du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 8 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 7 mai 1986 ", arrête: Article premier 1

Le Protocole additionnel n° 7 du 22 novembre 1984, complétant la Convention européenne des droits de l'homme, est approuvé avec les réserves suivantes: - Réserve portant sur l'article 1: Lorsque l'expulsion intervient à la suite d'une décision du Conseil fédéral fondée sur l'article 70 de la constitution pour menace de la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse, la personne concernée ne bénéficie pas des droits énumérés au 1er alinéa, même après l'exécution de l'expulsion.

- Réserve portant sur l'article 5: Après l'entrée en vigueur des dispositions révisées du code civil suisse du 5 octobre 19842), les dispositions de l'article 5 du Protocole additionnel n° 7 seront appliquées sous réserve, d'une part, des dispositions du droit fédéral relatives au nom de famille (art. 160 CC et Sa Tit. fin., CC) et, d'autre part, de celles relatives à l'acquisition du droit de cité (art. 161, 134, 1er al., 149, 1er al., CC et 8è Tit. fin., CC).

2 Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier le Protocole additionnel n° 7, en formulant les réserves mentionnées ci-dessus.

Art. 2 Le Conseil fédéral est habilité à remettre au Secrétaire général du Conseil de l'Europe une déclaration, fondée sur l'article 7, 2e alinéa, du Protocole additionnel n° 7, aux termes de laquelle la Suisse étend aux articles 1 à 5 du Protocole n° 7 la reconnaissance du droit de recours individuel (art. 25 CEDH) et de la juridiction obligatoire de la Cour (art. 46 CEDH).

') FF 1986 II 605 «RO1986 122

640

Droits de l'homme

Art. 3 Le présent arrêté n'est pas sujet au référendum en matière de traités internationaux.

30740

641

Arrêté fédéral

Projet

relatif au Protocole n° 8, du 19 mars 1985, modifiant la Convention européenne des droits de l'homme, en vue notamment d'accélérer la procédure devant la Commission européenne des droits de l'homme (Série des Traités européens n° 118)

du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'article 8 de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 7 mai 1986 '', arrête: Article premier 1 Le Protocole n° 8 du 19 mars 1985, portant amendement de la Convention européenne des droits de l'homme, est approuvé.

2 Le Conseil fédéral est autorisé à ratifier le Protocole n° 8.

Art. 2 Le présent arrêté n'est pas sujet au référendum en matière de traités internationaux.

30740

'> FF 1986 II 605 642

Protocole n° 6

Texte original

à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales concernant l'abolition de la peine de mort

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires du présent Protocole à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention»), Considérant que les développements intervenus dans plusieurs Etats membres du Conseil de l'Europe expriment une tendance générale en faveur de l'abolition de la peine de mort; Sont convenus de ce qui suit: Article 1 La peine de mort est abolie. Nul ne peut être condamné à une telle peine ni exécuté.

Article 2 Un Etat peut prévoir dans sa législation la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre ou de danger imminent de guerre; une telle peine ne sera appliquée que dans les cas prévus par cette législation et conformément à ses dispositions. Cet Etat communiquera au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les dispositions afférentes de la législation en cause.

Article 3 Aucune dérogation n'est autorisée aux dispositions du présent Protocole au titre de l'article 15 de la Convention.

Article 4 Aucune réserve n'est admise aux dispositions du présent Protocole au titre de l'article 64 de la Convention.

Article 5 1. Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera le présent Protocole.

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Droits de l'homme et libertés fondamentales 2. Tout Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application du présent Protocole à tout autre territoire désigné dans la déclaration. Le Protocole entrera en vigueur à l'égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général.

3. Toute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secrétaire Général. Le retrait prendra effet le premier jour du mois qui suit la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.

Article 6 Les Etats Parties considèrent les articles 1 à 5 du présent Protocole comme des articles additionnels à la Convention et toutes les dispositions de la Convention s'appliquent en conséquence.

Article 7 Le présent Protocole est ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la Convention. Il sera soumis à ratification, acceptation ou approbation. Un Etat membre du Conseil de l'Europe ne pourra ratifier, accepter ou approuver le présent Protocole sans avoir simultanément ou antérieurement ratifié la Convention. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 8 1. Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit la date à laquelle cinq Etats membres du Conseil de l'Europe auront exprimé leur consentement à être liés par le Protocole conformément aux dispositions de l'article 7.

2. Pour tout Etat membre qui exprimera ultérieurement son consentement à être lié par le Protocole, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit la date du dépôt de l'instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

Article 9 Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil: a. toute signature; b. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;

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Droits de l'homme et libertés fondamentales c. toute date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à ses articles 5 et 8 ; d. tout autre acte, notification ou communication ayant trait au présent Protocole.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 28 avril 1983, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.

(Suivent les signatures)

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Protocole n° 7

Texte original

à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires du présent Protocole, Résolus à prendre de nouvelles mesures propres à assurer la garantie collective de certains droits et libertés par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention»), Sont convenus de ce qui suif.

Article 1 1. Un étranger résidant régulièrement sur le territoire d'un Etat ne peut en être expulsé qu'en exécution d'une décision prise conformément à la loi et doit pouvoir: a. faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion; b. faire examiner son cas, et c. se faire représenter à ces fins devant l'autorité compétente ou une ou plusieurs personnes désignées par cette autorité.

2. Un étranger peut être expulsé avant l'exercice des droits énumérés au paragraphe l.a, b et c de cet article lorsque cette expulsion est nécessaire dans l'intérêt de l'ordre public ou est basée sur des motifs de sécurité nationale.

Article 2 1. Toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation. L'exercice de ce droit, y compris les motifs pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi.

2. Ce droit peut faire l'objet d'exceptions pour des infractions mineures telles qu'elles sont définies par la loi ou lorsque l'intéressé a été jugé en première instance par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et condamné à la suite d'un recours contre son acquittement.

Article 3 Lorsqu'une condamnation pénale définitive est ultérieurement annulée, ou lorsque la grâce est accordée, parce qu'un fait nouveau ou nouvellement 646

Droits de l'homme et libertés fondamentales révélé prouve qu'il s'est produit une erreur judiciaire, la personne qui a subi une peine en raison de cette condamnation est indemnisée, conformément à la loi ou à l'usage en vigueur dans l'Etat concerné, à moins qu'il ne soit prouvé que la non-révélation en temps utile du fait inconnu lui est imputable en tout ou en partie.

Article 4

1. Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il y a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat.

2. Les dispositions du paragraphe précédent n'empêchent pas la réouverture du procès, conformément à la loi et à la procédure pénale de l'Etat concerné, si des faits nouveaux ou nouvellement révélés ou un vice fondamental dans la procédure précédente sont de nature à affecter le jugement intervenu.

3. Aucune dérogation n'est autorisée au présent article au titre de l'article 15 de la Convention.

Article 5

Les époux jouissent de l'égalité de droits et de responsabilités de caractère civil entre eux et dans leurs relations avec leurs enfants au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. Le présent article n'empêche pas les Etats de prendre les mesures nécessaires dans l'intérêt des enfants.

Article 6

1. Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera le présent Protocole, en indiquant la mesure dans laquelle il s'engage à ce que les dispositions du présent Protocole s'appliquent à ce ou ces territoires.

2. Tout Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application du présent Protocole à tout autre territoire désigné dans la déclaration. Le Protocole entrera en vigueur à l'égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général.

3. Toute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée ou modifiée en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secretare Général. Le retrait ou la 647

Droits de l'homme et libertés fondamentales modification prendra effet le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.

4. Une déclaration faite conformément au présent article sera considérée comme ayant été faite conformément au paragraphe 1 de l'article 63 de la Convention.

5. Le territoire de tout Etat auquel le présent Protocole s'applique en vertu de sa ratification, de son acceptation ou de son approbation par ledit Etat, et chacun des territoires auxquels le Protocole s'applique en vertu d'une déclaration souscrite par ledit Etat conformément au présent article, peuvent être considérés comme des territoires distincts aux fins de la référence au territoire d'un Etat faite par l'article 1.

Article 7

1. Les Etats Parties considèrent les articles 1 à 6 du présent Protocole comme des articles additionnels à la Convention et toutes les dispositions de la Convention s'appliquent en conséquence.

2. Toutefois, le droit de recours individuel reconnu par une déclaration faite en vertu de l'article 25 de la Convention ou la reconnaissance de la juridiction obligatoire de la Cour faite par une déclaration en vertu de l'article 46 de la Convention ne s'exercera en ce qui concerne le présent Protocole que dans la mesure où l'Etat intéressé aura déclaré reconnaître ledit droit ou accepter ladite juridiction pour les articles 1 à 5 du Protocole.

Article 8

Le présent Protocole est ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe qui ont signé la Convention. Il sera soumis à ratification, acceptation ou approbation. Un Etat membre du Conseil de l'Europe ne peut ratifier, accepter ou approuver le présent Protocole sans avoir simultanément ou antérieurement ratifié la Convention. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 9

1. Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date à laquelle sept Etats membres du Conseil de l'Europe auront exprimé leur consentement à être liés par le Protocole conformément aux dispositions de l'article 8.

2. Pour tout Etat membre qui exprimera ultérieurement son consentement à être lié par le Protocole, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date du dépôt de l'instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

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Droits de l'homme et libertés fondamentales Article 10

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera à tous les Etats membres du Conseil de l'Europe: a. toute signature; b. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation; c. toute date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à ses articles 6 et 9; d. tout autre acte, notification ou déclaration ayant trait au présent Protocole.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le pré^ sent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 22 novembre 1984, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.

(Suivent les signatures) 30740

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Protocole n° 8

Texte original

à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires du présent Protocole à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention»), Considérant qu'il convient d'amender certaines dispositions de la Convention en vue d'améliorer et plus particulièrement d'accélérer la procédure de la Commission européenne des Droits de l'Homme, Considérant qu'il est également opportun d'amender certaines dispositions de la Convention relatives à la procédure de la Cour européenne des Droits de l'Homme, Sont convenus de ce qui suit: Article 1

Le texte de l'article 20 de la Convention devient le paragraphe 1 du même article et est complété par quatre paragraphes ainsi rédigés: «2. La Commission siège en séance plénière. Toutefois, elle peut constituer en son sein des Chambres, composées chacune d'au moins sept membres. Les Chambres peuvent examiner les requêtes introduites en application de l'article 25 de la présente Convention qui peuvent être traitées sur la base d'une jurisprudence établie ou qui ne soulèvent pas de question grave relative à l'interprétation ou à l'application de la Convention. Dans ces limites, et sous réserve du paragraphe 5 du présent article, les Chambres exercent toutes les compétences confiées à la Commission par la Convention.

Le membre de la Commission élu au titre de la Haute Partie Contractante contre laquelle une requête a été introduite a le droit de faire partie de la Chambre saisie de cette requête.

3. La Commission peut constituer en son sein des Comités, composés chacun d'au moins trois membres, avec le pouvoir de déclarer à l'unanimité, irrecevable ou rayée du rôle, une requête introduite en application de l'article 25, lorsqu'une telle décision peut être prise sans plus ample examen.

4. Une Chambre ou un Comité peut, en tout état de la cause, se dessaisir en faveur de la Commission plénière, laquelle peut aussi évoquer toute requête confiée à une Chambre ou à un Comité.

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jg.

Droits de l'homme et libertés fondamentales 5. Seule la Commission pionière peut exercer les compétences suivantes: a. l'examen des requêtes introduites en application de l'article 24; b. la saisine de la Cour conformément à l'article 48a; c. l'établissement du règlement intérieur conformément à l'article 36.» Article 2 L'article 21 de la Convention est complété par un paragraphe 3 ainsi rédigé: «3. Les candidats devront jouir de la plus haute considération morale et réunir les conditions requises pour l'exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des personnes reconnues pour leurs compétences en droit national ou international.» Article 3 L'article 23 de la Convention est complété par la phrase ainsi rédigée: «Durant tout l'exercice de leur mandat, ils ne peuvent assumer de fonctions incompatibles avec les exigences d'indépendance, d'impartialité et de disponibilité inhérentes à ce mandat.» Article 4 Le texte, modifié, de l'article 28 de la Convention devient le paragraphe 1 du même article et le texte, modifié, de l'article 30 devient le paragraphe 2.

Le nouveau texte de l'article 28 se lit comme suit: «Article 28 1. Dans le cas où la Commission retient la requête : a. afin d'établir les faits, elle procède à un examen contradictoire de la requête avec les représentants des parties et, s'il y a lieu, à une . enquête pour la conduite efficace de laquelle les Etats intéressés fourniront toutes facilités nécessaires, après échange de vues avec la Commission; b. elle se met en même temps à la disposition des intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable de l'affaire qui s'inspire du respect des Droits de l'Homme, tels que les reconnaît la présente Convention.

2. Si elle parvient à obtenir un règlement amiable, la Commission dresse un rapport qui est transmis aux Etats intéressés, au Comité des Ministres et au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, aux fins de publication. Ce rapport se limite à un bref exposé des faits et de la solution adoptée.»

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Droits de l'homme et libertés fondamentales Article 5 Au premier alinéa de l'article 29 de la Convention, les mots «à l'unanimité» sont remplacés par les mots «à la majorité des deux-tiers de ses membres».

Article 6 La disposition suivante est insérée dans la Convention: «Article 30 1. A tout moment de la procédure, la Commission peut décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances permettent de conclure que: a. le requérant n'entend plus la maintenir, ou b. le litige a été résolu, ou c. pour tout autre motif, dont la Commission constate l'existence, il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de la requête.

Toutefois, la Commission poursuit l'examen de la requête si le respect des Droits de l'Homme garantis par la Convention l'exige.

2. Si la Commission décide de rayer une requête du rôle après l'avoir retenue, elle dresse un rapport qui comprend un exposé des faits et une décision motivée de radiation du rôle. Le rapport est transmis aux parties ainsi que, pour information, au Comité des Ministres. La Commission peut le publier.

3. La Commission peut décider la réinscription au rôle d'une requête lorsqu'elle estime que les circonstances le justifient.» Article 7 A l'article 31 de la Convention, le paragraphe 1 se lit comme suit: «1. Si l'examen d'une requête n'a pas pris fin en application des articles 28 (paragraphe 2), 29 ou 30, la Commission rédige un rapport dans lequel elle constate les faits et formule un avis sur le point de savoir si les faits constatés révèlent, de la part de l'Etat intéressé, une violation des obligations qui lui incombent aux termes de la Convention. Les opinions individuelles des membres de la Commission sur ce point peuvent être exprimées dans ce rapport.» Article 8 L'article 34 de la Convention se lit comme suit: «Sous réserve des dispositions des articles 20 (paragraphe 3) et 29, les décisions de la Commission sont prises à la majorité des membres présents et votant.»

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Droits de l'homme et libertés fondamentales Article 9

L'article 40 de la Convention est complété par un paragraphe 7 ainsi rédigé: «7. Les membres de la Cour siègent à la Cour à titre individuel.

Durant tout l'exercice de leur mandat, ils ne peuvent assumer de fonctions incompatibles avec les exigences d'indépendance, d'impartialité et de disponibilité inhérentes à ce mandat.» Article 10

L'article 41 de la Convention se lit comme suit: «La Cour élit son Président et un ou deux Vice-Présidents pour une durée de trois ans. Ils sont rééligibles.» Article 11

A la première phrase de l'article 43 de la Convention, le mot «sept» est remplacé par le mot «neuf».

Article 12

1. Le présent Protocole est ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe signataires de la Convention, qui peuvent exprimer leur consentement à être liés par: a. signature sans réserve de ratification, d'acceptation ou d'approbation, ou b. signature sous réserve de ratification, d'acceptation ou d'approbation, suivie de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

2. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 13

Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date à laquelle toutes les Parties à la Convention auront exprimé leur consentement à être liées par le Protocole conformément aux dispositions de l'article 12.

Article 14

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil: a. toute signature; b. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation; 46 Feuille fédérale. 138e année. Vol. II

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Droits de l'homme et libertés fondamentales c. la date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à l'article 13; d. tout autre acte, notification ou communication ayant trait au présent Protocole.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Vienne, le 19 mars 1985, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.

(Suivent les signatures)

30740

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Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message relatif à l'approbation des Protocoles nos 6, 7 et 8 à la Convention européenne des droits de l'homme du 7 mai 1986

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1986

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

25

Cahier Numero Geschäftsnummer

86.020

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

01.07.1986

Date Data Seite

605-654

Page Pagina Ref. No

10 104 776

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