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21.044 Message relatif à l'initiative populaire «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)» et au contre-projet direct (arrêté fédéral concernant la protection et le bien-être des animaux) du 19 mai 2021

Monsieur le Président du Conseil national, Monsieur le Président du Conseil des États, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre l'initiative populaire «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)» au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de la rejeter. Nous vous soumettons simultanément un contre-projet direct que nous vous proposons d'adopter et de soumettre lui aussi au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de l'accepter.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président du Conseil national, Monsieur le Président du Conseil des États, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 mai 2021

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Guy Parmelin Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2021-1716

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Condensé L'initiative populaire fédérale «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)» (ci-après: IEI) vise à interdire l'élevage dit «intensif» et à inscrire dans la Constitution la notion de dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles. Le Conseil fédéral rejette l'initiative, car la législation actuelle sur la protection des animaux interdit déjà l'élevage intensif. En outre, la réglementation des importations réclamée par l'initiative ne serait pas conciliable avec les engagements internationaux de la Suisse et son application entraînerait une lourde charge administrative. Dans son contre-projet direct, le Conseil fédéral propose d'introduire dans la Constitution la notion de bien-être pour tous les animaux en général ainsi que les notions d'hébergement et de soins respectueux, de sorties régulières et de conditions d'abattage respectueuses pour les animaux de rente en particulier.

Contexte L'initiative populaire fédérale «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)» a été déposée le 17 septembre 2019 avec 106 125 signatures valables.

Contenu de l'initiative L'initiative vise à introduire dans la Constitution une disposition pour protéger la dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles, ce qui impliquerait, entre autres, que les animaux en question ne fassent pas l'objet d'un «élevage intensif». Aux termes de l'initiative, la Confédération devrait fixer les critères concernant, notamment, un hébergement et des soins respectueux des animaux, l'accès à l'extérieur, l'abattage et la taille maximale des groupes par étable. Elle devrait en outre édicter des dispositions sur l'importation d'animaux et de produits d'origine animale à des fins alimentaires qui tiennent compte du nouvel article constitutionnel. Enfin, l'initiative demande que les exigences relatives à la dignité de l'animal correspondent au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse. Ces directives, qui vont au-delà des exigences légales minimales, contiennent notamment des prescriptions sur la détention des animaux et leur accès à l'extérieur, et sur les effectifs maximaux de volailles. Le texte prévoit pour les nouvelles dispositions des délais transitoires pouvant aller jusqu'à 25 ans.

Avantages et
inconvénients de l'initiative La protection de la dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles est au coeur de l'initiative. La dignité de l'animal comprend le droit de ne pas faire l'objet d'un élevage intensif. L'initiative définit «l'élevage intensif» comme portant systématiquement atteinte au bien-être des animaux. Ce type d'élevage est d'ores et déjà interdit dans la législation sur la protection des animaux, indépendamment du nombre d'animaux détenus.

Le Conseil fédéral estime lui aussi que la dignité de l'animal est un principe important et que des progrès doivent être réalisés en termes «d'hébergement et de soins respectueux des animaux», «d'accès à l'extérieur» et «d'abattage» des animaux. Cependant, 2 / 48

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à la différence des auteurs de l'initiative, le Conseil fédéral ne limite pas ce but à la garde d'animaux à des fins agricoles, mais l'élargit à tous les animaux de rente. Par contre, il est d'avis qu'il est inutile de limiter davantage la taille des groupes eu égard à la protection des animaux, car la législation en la matière protège le bien-être des animaux à titre individuel, indépendamment du nombre d'animaux détenus ensemble.

Une plus grande limitation de la taille des élevages pourrait causer des pertes financières graves aux exploitations qui sont, à l'heure actuelle, principalement axées sur la détention d'animaux. D'ailleurs, l'initiative elle-même ne fixe pas de restrictions concrètes de la taille des élevages, exception faite de celle des exploitations avicoles.

Selon l'initiative, la Confédération devrait édicter des dispositions sur l'importation d'animaux et de produits d'origine animale à des fins alimentaires, en veillant à ce que ces dispositions tiennent compte du nouvel article constitutionnel. Elle ne précise pas ce qu'il faut concrètement entendre par là. Si les importations devaient être soumises elles aussi à des exigences au moins équivalentes à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse, cela pourrait pousser les prix à la hausse et limiter le choix des marchandises, tout en posant des problèmes d'exécution du droit et de compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse. Contrôler le respect des conditions exigées serait coûteux et très lourd administrativement parlant.

Propositions du Conseil fédéral Le Conseil fédéral propose donc à l'Assemblée fédérale de recommander au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative sur l'élevage intensif.

Il propose d'opposer un contre-projet direct à l'initiative. Il entend lui aussi tenir compte des souhaits du grand public et des acteurs politiques, qui attachent une grande importance au bien-être des animaux et aux méthodes de production des denrées alimentaires. Le contre-projet direct prévoit d'introduire dans la Constitution la protection du bien-être de tous les animaux, à titre de principe général. En cela, le Conseil fédéral va plus loin que l'initiative qui se limite exclusivement aux animaux détenus à des fins agricoles. Pour les animaux de rente, le contre-projet reprend trois éléments centraux de
l'initiative: un hébergement et des soins respectueux, des sorties régulières et des conditions d'abattage respectueuses. Par contre, contrairement à ce que proposent les auteurs de l'initiative, ni le Cahier des charges 2018 de Bio Suisse, qui relève du droit privé, ni des réglementations d'importation spécifiques ne devraient être inscrits dans la Constitution.

En conséquence, le Conseil fédéral propose à l'Assemblée fédérale d'approuver le contre-projet et de le soumettre au peuple et aux cantons en même temps que l'initiative, en leur recommandant de l'approuver.

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Table des matières Condensé

2

1

Aspects formels et validité de l'initiative 1.1 Texte 1.2 Aboutissement et délais de traitement 1.3 Validité

6 6 7 7

2

Contexte 2.1 Contexte politique 2.2 Principales bases légales liées à l'initiative 2.2.1 Législation sur la protection des animaux 2.2.2 Législation sur l'agriculture 2.2.3 Législation sur la protection de l'environnement 2.2.4 Législation sur la protection des eaux 2.2.5 Droit sur l'aménagement du territoire 2.3 Développements prévus dans les domaines politiques concernés par l'initiative 2.3.1 Protection des animaux 2.3.2 Évolution future de la politique agricole 2.3.3 Initiatives populaires 2.3.4 Initiatives parlementaires

7 8 8 8 8 10 10 11

3

Buts et contenu de l'initiative 3.1 Buts visés 3.2 Réglementation proposée 3.3 Commentaire et interprétation du texte de l'initiative

14 14 14 15

4

Appréciation de l'initiative 4.1 Appréciation des objectifs poursuivis par l'initiative 4.2 Avantages et inconvénients de l'initiative 4.2.1 Dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles 4.2.2 Définition de critères 4.2.3 Nouvelles dispositions relatives à l'importation 4.2.4 Reprise du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse comme standard minimal 4.3 Conséquences en cas d'acceptation de l'initiative 4.3.1 Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes 4.3.2 Conséquences pour les exploitations 4.3.3 Conséquences pour l'économie 4.3.4 Effets sur l'environnement 4.3.5 Conséquences sur la nature et les zones d'habitation 4.4 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

16 16 17

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11 11 12 12 13

17 18 18 19 19 20 20 22 24 24 25

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4.4.1 4.4.2 4.4.3

Droit de l'OMC Accords bilatéraux avec l'UE Accords avec d'autres partenaires

25 25 26

5

Conclusions

27

6

Contre-projet direct 6.1 Texte du contre-projet direct 6.2 Procédure de consultation 6.3 Présentation du contre-projet direct 6.3.1 Généralités 6.3.2 Réglementation des importations 6.3.3 Réglementation de la taille des groupes d'animaux 6.3.4 Réglementation des aspects environnementaux 6.4 Commentaire des alinéas 6.5 Conséquences 6.5.1 Conséquences pour la Confédération 6.5.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.5.3 Conséquences économiques, sociales et environnementales 6.6 Comparaison entre le contre-projet direct et l'initiative 6.7 Aspects juridiques 6.7.1 Constitutionnalité 6.7.2 Forme de l'acte à adopter 6.7.3 Frein aux dépenses 6.7.4 Compatibilité du contre-projet avec les engagements internationaux de la Suisse

28 28 28 29 29 31 32 33 33 37 37 38 38 41 42 42 42 42 43

Arrêté fédéral relatif à l'initiative populaire «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)» (Projet)

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Arrêté fédéral concernant la protection et le bien-être des animaux (contre-projet direct à l'initiative populaire «Non à l'élevage intensif en Suisse [initiative sur l'élevage intensif]») (Projet)

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Message 1

Aspects formels et validité de l'initiative

1.1

Texte

L'initiative populaire fédérale «Non à l'élevage intensif en Suisse (initiative sur l'élevage intensif)», ci-après «IEI», a la teneur suivante: La Constitution1 est modifiée comme suit: Art. 80a

Garde d'animaux à des fins agricoles

La Confédération protège la dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles. La dignité de l'animal comprend le droit de ne pas faire l'objet d'un élevage intensif.

1

L'élevage intensif désigne l'élevage industriel visant à rendre la production de produits d'origine animale la plus efficace possible et portant systématiquement atteinte au bien-être des animaux.

2

La Confédération fixe les critères relatifs notamment à un hébergement et à des soins respectueux des animaux, à l'accès à l'extérieur, à l'abattage et à la taille maximale des groupes par étable.

3

Elle édicte des dispositions sur l'importation d'animaux et de produits d'origine animale à des fins alimentaires qui tiennent compte du présent article.

4

Art. 197, ch. 132 13. Disposition transitoire ad art. 80a (Garde d'animaux à des fins agricoles) Les dispositions d'exécution relatives à la garde d'animaux à des fins agricoles visée à l'art. 80a peuvent prévoir des délais transitoires de 25 ans au plus.

1

La législation d'exécution doit fixer des exigences relatives à la dignité de l'animal qui correspondent au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse3.

2

Si la législation d'exécution n'est pas entrée en vigueur dans les trois ans à compter de l'acceptation de l'art. 80a, le Conseil fédéral édicte provisoirement les dispositions d'exécution par voie d'ordonnance.

3

1 2 3

RS 101 Le numéro définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

Cahier des charges de Bio Suisse pour la production, la transformation et le commerce des produits Bourgeon, version du 1er janvier 2018, disponible sous www.bio-suisse.ch.

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1.2

Aboutissement et délais de traitement

L'IEI a été déposée par l'association Sentience Politics. Le comité d'initiative se compose de 26 représentants de divers partis et organisations. L'initiative a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 29 mai 20184 et a été déposée le 17 septembre 2019 avec le nombre de signatures requis.

Par décision du 15 octobre 20195, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait recueilli 106 125 signatures valables et qu'elle avait donc abouti.

L'IEI est présentée sous la forme d'un projet rédigé. Le Conseil fédéral lui oppose un contre-projet direct. Conformément à l'art. 97, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)6, le Conseil fédéral avait jusqu'au 17 mars 2021 pour soumettre à l'Assemblée fédérale les projets d'arrêtés fédéraux accompagné d'un message. En raison de la pandémie de coronavirus et vu l'ordonnance du 20 mars 2020 sur la suspension des délais applicables aux initiatives populaires fédérales et aux demandes de référendum au niveau fédéral7, le délai a été suspendu et arrive à échéance le 28 mai 2021. Conformément à l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale a jusqu'au 28 mai 2022 pour adopter la recommandation de vote qu'elle présentera au peuple et aux cantons.

1.3

Validité

L'IEI remplit les critères de validité énumérés à l'art. 139, al. 3, de la Constitution (Cst.)8: a.

elle obéit au principe de l'unité de la forme, puisqu'elle revêt entièrement la forme d'un projet rédigé;

b.

elle obéit au principe de l'unité de la matière, puisqu'il existe un rapport intrinsèque entre ses différentes parties;

c.

elle obéit au principe de la conformité aux règles impératives du droit international, puisqu'elle ne contrevient à aucune d'elles.

2

Contexte

Selon le comité d'initiative, l'agriculture suisse serait confrontée à la tendance planétaire de l'intensification et de la concentration de la production animale. Les petites exploitations agricoles ne pourraient que difficilement faire face à la pression sur les prix et devraient produire toujours plus de viande pour de moins en moins d'argent.

Simultanément, on verrait se multiplier des «fabriques d'animaux» bafouant le bien-

4 5 6 7 8

FF 2018 3324 FF 2019 6577 RS 171.10 RO 2020 847 RS 101

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être des animaux, administrant des antibiotiques de façon routinière et important d'énormes quantités de fourrage.

L'exploitation industrielle des animaux de rente serait «effroyable» pour les animaux, les humains et l'environnement. De grands groupes d'animaux seraient détenus dans un petit espace et leurs besoins de base seraient ignorés. Près de 50 tonnes d'antibiotiques seraient administrées aux animaux chaque année en Suisse, ce qui nuirait aussi aux humains. L'élevage «intensif» utiliserait les ressources de façon très inefficace et polluerait l'air et l'eau. Ses énormes émissions de gaz à effet de serre accentueraient en outre le changement climatique.9

2.1

Contexte politique

L'IEI est principalement liée à la législation sur la protection des animaux, à la législation sur l'agriculture et à la politique commerciale, mais la politique environnementale et l'aménagement du territoire sont également concernés. Le grand public et les acteurs politiques accordent une grande importance au bien-être des animaux, à leur provenance et aux méthodes de production des denrées alimentaires. Le grand nombre d'interventions parlementaires déposées dans ce domaine ces dernières années et la demande croissante de produits biologiques10 en témoignent.

2.2

Principales bases légales liées à l'initiative

2.2.1

Législation sur la protection des animaux

L'art. 80 Cst. charge la Confédération de légiférer sur la protection des animaux. La législation en la matière met en oeuvre ce mandat. La loi fédérale du 16 décembre 2005 sur la protection des animaux (LPA)11 vise à protéger la dignité et le bien-être de l'animal. Toute personne qui s'occupe d'animaux doit tenir compte au mieux de leurs besoins et veiller à leur bien-être dans la mesure où le but de leur utilisation le permet (art. 4 LPA). Toute personne qui détient des animaux ou en assume la garde doit, d'une manière appropriée, les nourrir, en prendre soin, leur garantir l'activité et la liberté de mouvement nécessaires à leur bien-être et, s'il le faut, leur fournir un gîte (art. 6 LPA). Toutes ces exigences se rapportent au bien-être de l'animal à titre individuel et doivent être remplies indépendamment de la taille de l'exploitation.

2.2.2

Législation sur l'agriculture

Aux termes de l'art. 104, al. 3, let. b, Cst., la Confédération doit encourager, au moyen de mesures incitatives présentant un intérêt économique, les formes d'exploitation 9 10 11

Voir www.massentierhaltung.ch (consulté le 7 janvier 2021).

Voir «Le Bio en chiffres 2020», www.bio-suisse.ch > À notre sujet > Médias > Bio en chiffres.

RS 455

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particulièrement en accord avec la nature et respectueuses de l'environnement et des animaux. L'art. 1 de la loi du 29 avril 1998 sur l'agriculture (LAgr)12 prévoit que la Confédération veille à ce que l'agriculture, par une production répondant à la fois aux exigences du développement durable et à celles du marché, contribue substantiellement entre autres au bien-être des animaux. Le respect des exigences de protection des animaux fait partie des prestations écologiques requises (PER) et constitue, selon l'art. 70a LAgr, l'une des conditions à remplir pour obtenir des paiements directs dans l'agriculture. L'application des prescriptions PER est régulièrement contrôlée.

Depuis les années 90, les agriculteurs suisses ont la possibilité de participer aux programmes de promotion des systèmes de stabulation particulièrement respectueux des animaux (programme SST)13 et des sorties régulières en plein air (programme SRPA)14. Ces programmes fixent des exigences plus élevées pour le bien-être animal que les standards minimaux de la législation sur la protection des animaux.

Encouragés depuis des années par des incitations financières, les programmes SRPA et SST sont très répandus, car leur application est aisée. L'augmentation constante de la participation laisse supposer un niveau d'acceptation élevé dans l'ensemble. Pour le programme SRPA, le taux de participation a atteint 77 % des animaux en unité de gros bétail (UGB) en 2019, l'objectif étant d'atteindre 80 % en 2021. Pour le programme SST, le taux de participation s'est élevé en 2019 à 61 % des UGB15. Toutefois, bien qu'établis depuis longtemps, ces programmes ne se sont pas encore imposés partout et le taux de participation varie fortement selon les espèces animales. Alors qu'en 2019 ­ toujours sur la base des UGB ­ 84 % des bovins, 88 % des ovins et 79 % des caprins bénéficiaient du programme SRPA, les taux de participation tombent à 51 % pour les porcs et à 42 % pour la volaille de rente (poulets de chair: 8 % et poules pondeuses: 82 %). Quant au programme SST il concernait 59 % des bovins, 45 % des caprins, 68 % des porcs et 93 % des volailles (poulets de chair: 97 %, poules pondeuses: 92 %)16.

L'agriculture biologique est soutenue par des contributions au système de production de l'exploitation dans son ensemble, versées sous forme de
contributions à la surface.

Sur différents points, les exigences pour détenir des animaux de rente dans les exploitations biologiques sont plus sévères que dans d'autres exploitations, par exemple eu égard au fourrage ou à l'espace dont chaque animal doit disposer. Les exploitations qui participent doivent limiter le nombre de leurs animaux de rente à la surface agricole utile se prêtant à l'utilisation des engrais de ferme (que la surface agricole soit en propriété ou en affermage). En outre, les exploitations biologiques s'engagent à participer au programme SRPA, mais les bovins peuvent y être gardés attachés (art. 15a, al. 2, let. b, de l'ordonnance du 22 septembre 1997 sur l'agriculture biologique17), pour autant que des sorties conformes aux exigences du programme SRPA leur soient 12 13 14 15 16 17

RS 910.1 Voir art. 74 de l'ordonnance du 23 octobre 2013 sur les paiements directs (OPD), RS 910.13.

Voir art. 75 OPD.

Voir www.agrarbericht.ch > Politique > Paiements directs > Contributions au système de production.

Voir annexe 1.

RS 910.18

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accordées. Les lapins sont les seuls à ne pas bénéficier du programme «SRPA», mais ils doivent être détenus selon les dispositions du programme «SST».

Pour l'élevage des porcs, la détention des poules pondeuses et l'engraissement des porcs, des poulets, des dindes et des veaux, la législation agricole, plus précisément l'ordonnance du 23 octobre 2013 sur les effectifs maximums (OEM)18 limite les effectifs maximums par exploitation. L'exploitant ne touche les paiements directs que si les effectifs de son exploitation ne dépassent pas les limites fixées par l'OEM. Sur demande, l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) autorise des effectifs plus élevés aux exploitations qui fournissent les PER sans livrer de l'engrais de ferme à des tiers, de même qu'aux exploitations élevant des porcs qui valorisent les sous-produits issus de la transformation du lait et de la fabrication de denrées alimentaires.

2.2.3

Législation sur la protection de l'environnement

L'ordonnance du 16 décembre 1985 sur la protection de l'air (OPair)19 prévoit une limitation préventive des émissions qui causent des pollutions atmosphériques. Des mesures de construction et d'exploitation conformes à l'état de la technique doivent être prises pour la limitation préventive des émissions d'ammoniac. En outre, et compte tenu des émissions excessives d'azote, les autorités cantonales sont priées d'élaborer un plan de mesures cantonal pour la limitation des émissions conformément à l'OPair. Lors de la construction des locaux de stabulation, il y a lieu de respecter les distances minimales jusqu'aux zones habitées. L'Office fédéral de l'environnement (OFEV) édicte en outre des recommandations pour la limitation préventive des émissions d'ammoniac.

2.2.4

Législation sur la protection des eaux

Aux termes de la loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (LEaux)20, toute exploitation pratiquant la garde d'animaux de rente doit s'efforcer d'équilibrer le bilan des engrais (art. 14, al. 1, LEaux pour tous les agriculteurs qui détiennent des animaux de rente; art. 13 OPD pour toutes les exploitations PER). En outre, l'art. 14, al. 4, LEaux, en relation avec l'art. 23 de l'ordonnance du 28 octobre 1998 sur la protection des eaux (OEaux)21, limite à trois unités de gros bétail-fumure (UGBF, correspondant à 315 kg d'azote et 45 kg de phosphore) la quantité d'engrais de ferme qu'une exploitation qui détient des animaux de rente peut épandre par hectare de surface utile. Si la quantité d'engrais de ferme par hectare dépasse cette quantité maximale, l'exploitant doit se défaire des engrais en surplus, augmenter sa surface utile ou réduire la taille de ses effectifs, ce qui lui occasionne du travail et des coûts, et qui a donc un effet dissuasif sur l'augmentation des effectifs. L'art. 14, al. 6, LEaux exige de l'autorité cantonale qu'elle réduise le nombre d'UGBF par hectare en fonction de 18 19 20 21

RS 916.344 RS 814.318.142.1 RS 814.20 RS 814.201

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la charge du sol en polluants, de l'altitude et des conditions topographiques. En outre l'art. 14, al. 4, LEaux, en relation avec l'art. 24 OEaux, dispose que si une partie de l'engrais de ferme provenant de l'exploitation est épandue hors du rayon d'exploitation normal pour la localité, le nombre d'animaux de rente doit permettre l'épandage, sur la surface utile, en propre ou en fermage, de la moitié au moins de la quantité d'engrais de ferme provenant de l'exploitation. En vertu de l'art. 25 OEaux, cette réglementation n'est pas applicable aux exploitations qui pratiquent l'aviculture ou la garde de chevaux ni aux entreprises qui assument des tâches d'intérêt public.

2.2.5

Droit sur l'aménagement du territoire

Les constructions et les installations admises pour la garde d'animaux dans la zone agricole sont régies par la loi du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire22 et l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire23. Sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui servent à l'exploitation tributaire du sol ou au développement interne. Les constructions et installations excédant les limites d'un développement interne peuvent être affectées à une zone agricole spéciale. La garde d'animaux est considérée comme tributaire du sol si l'exploitation dispose d'une base de matière fourragère suffisante pour ses animaux et que les animaux ne sont pas nourris principalement avec des aliments achetés.

2.3

Développements prévus dans les domaines politiques concernés par l'initiative

2.3.1

Protection des animaux

La législation sur la protection des animaux est régulièrement adaptée aux derniers développements et résultats de la recherche scientifique. Les thématiques en cours de traitement à l'heure actuelle sont les suivantes:

22 23

­

le remplacement du dioxyde de carbone (CO2) utilisé pour l'étourdissement des volailles et des porcs lors de leur abattage et pour la mise à mort de certains animaux (poules pondeuses de réforme, animaux de laboratoire);

­

l'abandon d'interventions zootechniques telles que l'écornage ou la castration grâce à des méthodes alternatives (consistant par ex. à vacciner les porcelets au lieu de les castrer); l'optimisation de la stabulation libre des chèvres à cornes;

­

l'occupation des porcs d'engraissement pour éviter la caudophagie;

­

l'interdiction de la mise à mort des poussins mâles d'un jour aussitôt qu'il sera possible de déterminer le sexe dans l'oeuf ou de créer une race à deux fins permettant de rentabiliser l'engraissement des mâles.

RS 700 RS 700.1

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Il est prévu en outre de développer des méthodes d'enregistrement et d'évaluation de la santé et du bien-être des animaux de rente (Smart Animal Health) dans le cadre d'une vaste étude de l'Institut de santé publique vétérinaire de la Faculté Vetsuisse de l'Université de Berne. Les résultats de cette étude, attendus en été 2021, serviront à promouvoir davantage le bien-être des animaux.

En réponse au postulat 17.3967 «Déclaration obligatoire des modes de production de denrées alimentaire» déposé par la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil des États, le Conseil fédéral a approuvé le 11 septembre 2020 un rapport sur la manière dont la déclaration obligatoire peut être renforcée pour les produits qui n'ont pas été fabriqués selon les normes suisses. 24

2.3.2

Évolution future de la politique agricole

Dans son message du 12 février 2020 relatif à l'évolution future de la Politique agricole à partir de 2022 (PA22+)25, le Conseil fédéral propose de promouvoir la santé et le bien-être des animaux de rente en renforçant les systèmes d'incitation financière.

En outre, un soutien financier de la Confédération à des réseaux de compétences et d'innovation pour la santé des animaux de rente est prévu. Par ailleurs, la mise en oeuvre de la «Stratégie de sélection animale à l'horizon 2030» devrait permettre d'axer davantage l'encouragement de la sélection animale sur la santé et le bien-être des animaux. Enfin, l'encouragement de la production de lait et de viande basée sur les herbages doit mieux prendre en considération la base fourragère de l'exploitation pour l'approvisionnement en protéines. Ces mesures contribuent à lier encore plus étroitement la taille des effectifs au potentiel du site des exploitations. Le 14 décembre 2020, le Conseil des États a adopté le postulat 20.3931 «Orientation future de la politique agricole» déposé par la Commission de l'économie et des redevance (CER-E). Ce postulat charge le Conseil fédéral de soumettre au Parlement, d'ici 2022 au plus tard, un rapport consacré à l'orientation future de la politique agricole. C'est pour cette raison que les délibérations sur la PA22+ sont suspendues pour le moment. Le Parlement a extrait de la PA22+ une partie des dispositions ayant un rapport avec l'environnement et les a reprises dans l'initiative parlementaire 19.475 «Réduire le risque de l'utilisation des pesticides» déposée par la CER-E le 29 août 2019 (voir ch. 2.3.4 ci-dessous).

2.3.3

Initiatives populaires

L'initiative populaire «Pour une eau potable propre et une alimentation saine ­ Pas de subventions pour l'utilisation de pesticides et l'utilisation d'antibiotiques à titre prophylactique»26 (ci-après: «initiative pour une eau potable propre») demande que les

24 25 26

Ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.parlement.ch > 17.3967 > Rapport en réponse à l'intervention parlementaire.

FF 2020 3851 FF 2017 2059

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paiements directs ne soient plus accordés qu'aux exploitations agricoles dont le cheptel peut être nourri avec des aliments issus de l'exploitation. Si cette initiative était acceptée, la plupart des exploitations agricoles produisant des porcs, de la volaille ou des oeufs seraient de facto exclues des paiements directs agricoles, car elles sont généralement dépendantes d'apports extérieurs pour l'alimentation de leurs animaux.

Une partie des exploitations détenant des animaux de rente consommant des fourrages grossiers (vaches, génisses, chevaux, chèvres, moutons) seraient également touchées.

Ces exploitations seraient confrontées au dilemme suivant: soit réduire la taille de leurs effectifs, soit maintenir leur ancien mode de production (avec des apports extérieurs de fourrages) en se voyant privées de paiements directs. Dans son message sur cette initiative27, le Conseil fédéral s'est prononcé pour le rejet de celle-ci sans contreprojet direct ou indirect. Cette initiative passera en votation le 13 juin 2021.

2.3.4

Initiatives parlementaires

L'initiative parlementaire 19.475 «Réduire le risque de l'utilisation de pesticides» déposée par la CER-E le 20 août 2019 est née des discussions menées au Parlement concernant l'initiative sur l'eau potable. Elle vise à inscrire dans la législation une trajectoire de réduction avec des valeurs cibles pour les risques découlant de l'utilisation de pesticides. En outre, la CER-E voulait inscrire dans ce projet la réduction des pertes d'azote et de phosphore de l'agriculture dans l'environnement, une mesure tirée de la PA22+ dont le débat est actuellement suspendu (voir 2.3.2 ci-dessus). Une réduction de 10 % d'ici à 2025 et de 20 % d'ici à 2030 a été proposée, avec pour valeur de référence la moyenne des années 2014 à 2016.28 Le Conseil des États a approuvé la proposition de la CER-E, mais sous une forme atténuée. La majorité s'est prononcée pour que les pertes d'azote et de phosphore soient réduites «de manière adéquate» d'ici à 2030, sans fixer des valeurs chiffrées en pour cent. C'est au Conseil fédéral qu'il appartiendra de fixer les objectifs de réduction (art. 6a LAgr).29 Il est prévu en outre d'encourager davantage la mise au pâturage par des contributions, ce qui devrait permettre de réduire aussi les atteintes à l'environnement (voir le nouvel art. 75a OPD30 proposé dans le paquet d'ordonnances visant à mettre en oeuvre l'initiative parlementaire). Le Conseil national s'est rallié au Conseil des États sur ces points le 10 décembre 2020. Lors du vote final du 19 mars 2021, le Conseil national et le Conseil des États ont approuvé l'initiative parlementaire.

27

28

29

30

Message relatif à l'initiative populaire «Pour une eau potable propre et une alimentation saine ­ Pas de subventions pour l'utilisation de pesticides et l'utilisation d'antibiotiques à titre prophylactique», FF 2019 1093.

Proposition de la CER-E, du 27 août 2020, d'un nouvel art. 6a LAgr dans le projet de loi fédérale sur la réduction des risques liés à l'utilisation de pesticides, dépliant «Session d'automne 2020 Conseil des États»; ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.parlament.ch > 19.475 > Propositions, dépliants.

Décision du Conseil des États du 14 septembre 2020, dépliant «Session 2020 Décision Conseil des États»; ce document peut être consulté à l'adresse suivante: www.parlament.ch > 19.475 > Propositions, dépliants.

Le projet peut être consulté à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation en cours > Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche.

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3

Buts et contenu de l'initiative

3.1

Buts visés

Le comité d'initiative réclame la fin de «l'élevage intensif» en Suisse. Les produits animaux doivent être obtenus de manière équitable et consommés de manière responsable, dans le respect du bien-être de l'animal, de l'être humain et de l'environnement.

Le comité s'engage pour une agriculture suisse respectueuse des ressources, bienveillante à l'égard des animaux et proche de la nature.31

3.2

Réglementation proposée

Le comité d'initiative veut inscrire dans la Constitution la protection de la dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles, Pour lui, la dignité de l'animal devrait comprendre le droit de ne pas faire l'objet d'un élevage intensif. Le texte constitutionnel proposé définit l'«élevage intensif» comme un «élevage industriel» visant à obtenir des produits d'origine animale de la manière «la plus efficace possible» et «portant systématiquement atteinte au bien-être des animaux».

Aux termes de l'initiative, la Confédération devrait fixer les critères concernant, notamment, un hébergement et des soins respectueux des animaux, l'accès à l'extérieur, l'abattage et la taille maximale des groupes par étable. Elle devrait en outre édicter des dispositions sur l'importation d'animaux et de produits d'origine animale à des fins alimentaires qui tiennent compte du nouvel article constitutionnel. Concrètement, en cas d'acceptation de l'IEI, il ne serait plus possible d'importer de la viande provenant d'élevages intensifs.32 L'IEI demande en outre que les exigences relatives à la dignité de l'animal correspondent au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse33. Un délai de trois ans est imparti au législateur pour édicter les dispositions demandées. Si ce délai n'est pas tenu, le Conseil fédéral est censé édicter les dispositions d'exécution par voie d'ordonnance. Les nouvelles dispositions peuvent être assorties de délais transitoires de 25 ans au plus.

31 32 33

Voir www.elevage-intensif.ch Voir www.elevage-intensif.ch > Initiative > Foire aux questions et réponses > Son adoption ne provoquerait-elle pas une augmentation de l'importation de viande bon marché?

Le Cahier des charges de Bio Suisse pour la production, la transformation et le commerce des produits Bourgeon, version du 1er janvier 2018, peut être consulté à l'adresse suivante: www.bio-suisse.ch.

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3.3

Commentaire et interprétation du texte de l'initiative

Le comité d'initiative n'a pas publié jusqu'à présent des explications détaillées du texte de l'initiative.

Art. 80a

Garde d'animaux à des fins agricoles

Le nouvel art. 80a est destiné à compléter l'art. 80 Cst. existant.

Al. 1: La notion de dignité figure déjà aujourd'hui dans la disposition de la LPA qui fixe le but de la loi. La dignité comprend des aspects biologiques tels que l'absence de douleurs, de maux, de dommages et d'anxiété, mais aussi des aspects éthiques. La mise en oeuvre des aspects biologiques n'est pas problématique en comparaison de celle, beaucoup plus complexe, du principe éthique: une pesée des intérêts est ici nécessaire au cas par cas pour déterminer si la dignité est respectée ou non. Selon le texte de l'initiative, les animaux devraient avoir notamment le droit de ne pas vivre dans un «élevage intensif».

Al. 2: Cet alinéa définit la notion «d'élevage intensif» utilisée à l'al. 1, faute de quoi on ne saurait pas clairement ce que vise l'IEI. Cependant cette définition contient ellemême des notions qui demandent à être expliquées. Il n'y a par exemple pas de consensus international sur ce qu'il faut entendre par «élevage industriel». Les auteurs du texte de l'initiative définissent entre autres ce terme par le fait de produire de la manière «la plus efficace possible» des produits d'origine animale. Mais ce critère en luimême ne permet guère de distinguer l'élevage industriel des autres formes d'élevage, car tant que les éleveurs tireront leurs revenus de produits animaux, ils viseront toujours la production la plus efficace possible. Il en va de même du critère de la production «portant systématiquement atteinte au bien-être des animaux», car il peut aussi y avoir une atteinte systématique au bien-être animal dans un local de stabulation comptant quatre chèvres. Ce critère ne permet donc pas non plus de répondre à la question de savoir ce qu'il faut entendre exactement par «élevage industriel».

Al. 3: Cette disposition est en relation étroite avec l'al. 1. Elle charge la Confédération d'établir des critères permettant d'empêcher que les animaux ne fassent l'objet d'un «élevage intensif». Les domaines cités ne constituent pas une énumération exhaustive.

Trois d'entre eux, à savoir l'hébergement et les soins respectueux, l'accès à l'extérieur et l'abattage sont pertinents pour garantir le bien-être des animaux. Par contre, la taille du groupe n'a pas forcément une influence sur le bien-être de chacun des animaux à titre
individuel (voir ch. 6.3.3).

Al. 4: L'art. 80a, al. 1 à 3, est censé s'appliquer non seulement aux produits animaux obtenus en Suisse, mais aussi aux importations. Cependant, le libellé choisi laisse un peu plus de marge de manoeuvre pour les produits importés («qui tiennent compte») que pour la production nationale. Il est vrai toutefois que cette marge de manoeuvre est à nouveau relativisée par l'al. 2 des dispositions transitoires.

Les dispositions à édicter sont clairement destinées à n'être applicables qu'aux animaux et aux produits animaux utilisés pour la consommation humaine. Cela est probablement lié au fait que c'est essentiellement dans ce domaine que «l'élevage intensif» est pratiqué.

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197, ch. 13 13. Disposition transitoire ad art. 80a (Garde d'animaux à des fins agricoles) Al. 1: Le Parlement est habilité à prévoir une période transitoire de 25 ans au plus pour la mise en oeuvre de la nouvelle disposition constitutionnelle. Cette période transitoire devrait être pleinement utilisée, par exemple, si des mesures de construction devaient être prises en raison de nouvelles exigences plus strictes concernant la taille ou l'agencement des locaux de stabulation.

Al. 2: Alors que les dispositions matérielles du nouvel article 80a proposé laissent une certaine marge de manoeuvre à la Confédération pour édicter la législation d'exécution, l'al. 2 des dispositions transitoires prévoit sans ambiguïté que la législation d'exécution devra fixer des exigences en matière de dignité de l'animal qui répondent au moins aux exigences du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse. Si l'on interprète l'al. 2 avec les outils classiques de l'explication législative (libellé, système juridique et but de la disposition), on peut conclure que l'expression «qui correspondent au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse» vise les dispositions d'exécution relatives tant à la production nationale qu'aux importations. Sentience Politics, qui représente le comité d'initiative, a cependant contesté cette interprétation, en avançant qu'en ce qui concerne les importations, il faudrait seulement trouver des «équivalences appropriées»34. Il n'en reste pas moins que, si l'initiative sur l'élevage intensif était acceptée, ce serait la première fois que des normes privées seraient introduites dans la Constitution.

Al. 3: Cette disposition vise à empêcher que du retard soit pris dans la mise en oeuvre de l'IEI. La législation d'exécution doit entrer en vigueur trois ans au plus tard après l'acceptation de l'article constitutionnel. Si tel n'était pas le cas, le Conseil fédéral devrait édicter des dispositions d'exécution par voie d'ordonnance.

4

Appréciation de l'initiative

4.1

Appréciation des objectifs poursuivis par l'initiative

Les objectifs poursuivis par l'IEI sont conformes aux grandes orientations fixées par le Conseil fédéral en matière de protection des animaux. La législation actuelle dispose explicitement que personne ne doit de façon injustifiée causer à des animaux des douleurs, des maux ou des dommages, les mettre dans un état d'anxiété ou porter atteinte à leur dignité d'une autre manière. Elle interdit de maltraiter les animaux, de les négliger ou de les surmener inutilement (art. 4, al. 2, LPA). Cependant, même si la Suisse dispose aujourd'hui de l'une des législations les plus strictes au monde en matière de protection des animaux, le Conseil fédéral convient que les principes inscrits dans la Constitution ne tiennent plus suffisamment compte des évolutions souhaitées dans ce domaine. L'IEI veut fixer dans la Constitution les contours de la législation sur la protection des animaux telle qu'elle devra se présenter d'ici vingt-cinq ans, ce qui est une intention louable en soi.

34

Voir www.massentierhaltung.ch > prise de position sur le contre-projet du Conseil fédéral.

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En se référant au Cahier des charges 2018 de Bio Suisse et aux exigences qu'il contient en matière de sortie en plein air et d'alimentation des animaux, l'IEI voudrait en outre réduire la taille des effectifs d'animaux en Suisse. Le comité d'initiative attend plusieurs effets positifs de cette mesure: un impact moindre sur l'environnement (par ex. moins d'azote, d'ammoniac ou de méthane, un gaz à effet de serre), un renforcement de la protection des animaux (moins de maladies animales, plus d'espace pour chaque animal), des effets positifs sur la santé humaine (réduction de la propagation des germes antibiorésistants, moins de maladies dues à une consommation excessive de viande et de produits animaux) et moins de conflits d'affectation entre zones agricoles destinées à l'élevage et zones constructibles, puisque le besoin de surfaces agricoles sera moins important. Ces thématiques sont en effet d'une grande importance, raison pour laquelle le Conseil fédéral les a adoptées dans la PA22+.

Enfin, l'IEI veut empêcher que le rehaussement du niveau de protection des animaux en Suisse stimule la demande de denrées alimentaires importées devenues comparativement moins chères. Selon le comité d'initiative, cela reviendrait à délocaliser les problèmes de protection des animaux, de protection de l'environnement et de durabilité. Pour que les exigences relatives aux méthodes de production des denrées alimentaires en Suisse ne soient pas plus strictes que celles qui s'appliquent aux denrées alimentaires importées, l'IEI exige de la Confédération qu'elle édicte des dispositions d'importation qui tiennent compte de l'art. 80a proposé.

Le Conseil fédéral comprend également ce point de préoccupation des auteurs de l'initiative, pour autant que ces dispositions soient compatibles avec les obligations internationales de la Suisse (Organisation mondiale du commerce [OMC], accords bilatéraux). C'est dans cette optique qu'il a publié le 11 septembre 2020 le rapport mentionné au ch. 2.3.1, qui examine les possibilités de renforcer la déclaration des modes de production des produits d'origine animale importés.

4.2

Avantages et inconvénients de l'initiative

4.2.1

Dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles

La protection de la dignité de l'animal dans le domaine de la garde d'animaux à des fins agricoles est au coeur de l'IEI. Selon le texte de l'initiative, «l'élevage intensif» n'est pas compatible avec le respect de la dignité de l'animal. L'IEI définit «l'élevage intensif» comme portant systématiquement atteinte au bien-être des animaux. Toutefois, la législation sur la protection des animaux interdit aujourd'hui déjà ce type de détention. De plus, la dignité des animaux est comprise dans l'intégrité des organismes vivants visée à l'art. 120 Cst. (en allemand «Würde der Kreatur», soit dignité de la créature). En outre la LPA définit la dignité de l'animal comme «la valeur propre de l'animal, qui doit être respectée par les personnes qui s'en occupent» (art. 3, let. a, LPA). En conséquence, la législation sur la protection des animaux vise à garantir le bien-être et la dignité de l'animal (art. 1 LPA), indépendamment du nombre d'animaux qui sont détenus. Si le bien-être animal est garanti, il n'y a en principe aucune raison ni en termes de protection des animaux ni en termes de dignité de l'animal en

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particulier de limiter le nombre d'animaux. Le bien-être de l'animal individuel n'augmente pas du seul fait que le nombre d'animaux détenus est moins élevé.

4.2.2

Définition de critères

L'art. 80 Cst. donne déjà à la Confédération le mandat de réglementer tous les aspects qui peuvent être liés à la garde des animaux (détention, soins, expérimentation, atteintes à l'intégrité d'animaux vivants, etc.). Cependant, l'IEI voudrait inscrire dans la Constitution des critères spécifiques pour la garde d'animaux à des fins agricoles, en particulier concernant l'hébergement et les soins respectueux des animaux, l'accès à l'extérieur, l'abattage et la taille maximale des groupes par local de stabulation. La référence au Cahier des charges 2018 de Bio Suisse (voir ch. 4.2.4) entraîne donc des exigences en matière de détention d'animaux nettement plus détaillées que celles de la disposition constitutionnelle actuelle (voir ch. 4.2.4).

4.2.3

Nouvelles dispositions relatives à l'importation

La nouvelle disposition constitutionnelle est censée s'appliquer non seulement aux produits animaux obtenus en Suisse, mais aussi aux importations. Ce que cela signifie concrètement n'est pas précisé. Alors que la formulation choisie laisse une plus grande marge de manoeuvre pour réglementer les conditions d'importation («tiennent compte») que la production nationale, l'al. 2 des dispositions transitoires supprime finalement cette marge de manoeuvre. Selon cet alinéa en effet, toutes les exploitations doivent se conformer à des exigences relatives à la dignité de l'animal qui correspondent au Cahier des charges 2018 de Bio Suisse, et ce au plus tard 25 ans après l'acceptation de l'IEI. Il est à supposer que l'obligation de respecter les exigences de ce cahier des charges ou du moins des prescriptions équivalentes vaut à la fois pour la production nationale et pour les importations. Mais cela ne serait pas compatible avec les engagements internationaux de la Suisse envers l'OMC, l'UE et les États avec lesquels elle a conclu des accords commerciaux. Une renégociation, de ces derniers notamment, deviendrait inévitable. L'issue d'une éventuelle plainte devant l'OMC serait incertaine. En cas de défaite, la Suisse devrait soit revenir sur sa décision, soit s'attendre à des mesures de rétorsion de la part d'autres partenaires commerciaux. En outre, la mise en oeuvre des dispositions concernées ne pourrait que difficilement être garantie. Les organes d'exécution devraient pouvoir vérifier dans quelles conditions les denrées alimentaires importées sont effectivement produites à l'étranger et si ces conditions sont conformes aux prescriptions suisses. La mise en place d'un tel dispositif de contrôle serait très complexe et nécessiterait beaucoup de ressources. Il faudrait créer des systèmes de certification, ce qui présuppose l'existence sur place de services accrédités capables de certifier une exploitation selon les normes suisses.

Même en limitant la procédure à un contrôle documentaire, le travail administratif serait énorme et il ne serait pas garanti que les indications fournies dans les documents soient toujours conformes à la réalité.

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4.2.4

Reprise du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse comme standard minimal

L'al. 2 des dispositions transitoires prévoit que «la législation d'exécution doit fixer des exigences relatives à la dignité de l'animal qui correspondent au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse». Ce cahier des charges contient entre autres des exigences en termes de détention, d'alimentation animale, de sorties des animaux et d'effectifs maximaux spécifiques pour la volaille. Vu que la disposition constitutionnelle demandée par l'IEI concerne pratiquement tous les aspects de la garde d'animaux à des fins agricoles et que le Cahier des charges 2018 de Bio Suisse couvre tous ces domaines, tous les animaux devraient être détenus conformément à ce cahier des charges au plus tard 25 ans après l'acceptation de l'initiative. Ce même cahier indique que pour les sorties, il faut tenir compte du programme SRPA défini par la législation agricole (voir ch. 2.2.2) Le programme SST, en revanche, va au-delà des exigences minimales du Cahier des charges de Bio Suisse 2018, sauf pour la détention des lapins.

Ces conditions limitent le nombre d'animaux dans les régions de plaine à 2,5 UGBF par hectare de surface agricole utile (voir ch. 4.1 du cahier des charges). Dans les régions situées en altitude et lorsque les conditions du site sont défavorables, la densité animale doit être réduite. Quant aux espèces animales, ce n'est que pour la volaille que les limites fixées par halle sont inférieures aux dispositions légales, par exemple à environ 2000 pondeuses et à 4000 poules d'élevage.

Si l'IEI était acceptée, ce serait la première fois que des standards privés (Cahier des charges 2018 de Bio Suisse) seraient repris dans la Constitution fédérale. Cela serait problématique puisque des normes techniques aussi détaillées, qui sont mises à jour régulièrement, seraient inscrites dans la Constitution et fixeraient les règles minimales pour de nombreuses années à venir dans une version qui n'est plus actuelle. Cette situation ne respecterait pas les niveaux législatifs et ne permettrait pas de tenir compte en temps utile des progrès de la science et de la technique et des évolutions sociales. Et, d'ailleurs, on ne comprend pas non plus pourquoi il faudrait privilégier les standards de Bio Suisse par rapport à toutes les autres normes biologiques.

4.3

Conséquences en cas d'acceptation de l'initiative

Les conséquences économiques de l'initiative ont fait l'objet d'une analyse d'impact de la réglementation (AIR)35. Les estimations qui sont faites dans cette analyse se fondent sur les données ­ nombre d'exploitations, nombre d'animaux par troupeaux, chiffre d'affaires, participation aux programmes SST et SRPA ­ fournies par l'Office fédéral de la statistique, et sur d'autres sources. La rareté des données sur certains points, l'absence de mise en oeuvre concrète de l'initiative, de même que la brièveté du délai pour élaborer l'AIR ont contraint les auteurs à faire dans certains cas des hypothèses simplificatrices.

35

Voir à ce sujet l'analyse d'impact de la réglementation («Regulierungsfolgenabschätzung Massentierhaltungsinitiative und direkter Gegenentwurf»), rapport final du 27 avril 2021 de Quirin Oberpriller, Anna Vettori, Jürg Heldstab et Thomas von Stokar (INFRAS); ce document peut être consulté sous www.blv.admin.ch > L'OSAV > Bases légales et documents d'application > Votations > Initiative sur l'élevage intensif.

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Les coûts supplémentaires sont calculés par rapport au développement de référence.

D'une part, cela inclut des mesures que les entreprises agricoles mettraient en oeuvre même sans l'IEI. D'autre part, cela comprend également, dans un sens plus large, des mesures qui sont encouragées ou requises par d'autres secteurs ou instruments politiques.

4.3.1

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes

L'IEI prévoit des restrictions à l'importation d'animaux et de produits animaux à des fins alimentaires en provenance de l'étranger. C'est à la Confédération de s'assurer que ceux-ci répondent aux exigences suisses. Ce serait donc aux organes d'exécution de le vérifier, ce qui serait très complexe et nécessiterait beaucoup de ressources (cf. ch. 4.2.3).

Aucun coût supplémentaire n'est attendu pour les contrôles dans les unités d'élevage agricoles en Suisse. Ceux-ci continueront d'être effectués par les autorités vétérinaires cantonales et les offices cantonaux de l'agriculture.

4.3.2

Conséquences pour les exploitations

L'IEI demande qu'en cas d'acceptation de l'initiative, le Conseil fédéral fixe des exigences relatives à la dignité de l'animal correspondant au moins à celles du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse. L'adoption des standards de Bio Suisse équivaudrait à un changement de système qui impliquerait des adaptations plus poussées de la production (par ex. le remplacement d'une race animale par une autre, l'augmentation des surfaces de pâture) dont les conséquences financières sont peu claires. Les nouvelles exigences toucheraient particulièrement les exploitations de poulets de chair, qui devraient se tourner vers d'autres races animales, et les exploitations de bovins à l'engrais qui auraient besoin de plus grandes surfaces de pâture à proximité de l'exploitation. Les exigences accrues en termes d'hébergement et de soins poussent plutôt à augmenter la surface par animal, ce qui favorise les exploitations de grande taille, mieux à même de supporter les coûts supplémentaires.

L'objectif explicite de l'initiative est de réduire les effectifs d'animaux dans les exploitations. Or, à moins que les exploitants concernés ne se tournent vers d'autres produits ou n'étendent leur domaine par l'affermage ou l'achat de surfaces supplémentaires, leur production baissera.

Frais supplémentaires en cas de mise en oeuvre immédiate, sans délais transitoires En ce qui concerne les effectifs d'animaux, l'IEI fixe un plafond absolu uniquement pour les exploitations avicoles; pour toutes les autres espèces animales, le nombre d'animaux est fixé par hectare de surface agricole utile.

En ce qui concerne les exploitations avicoles, environ 900 d'entre elles seraient touchées par l'exigence de réduction des effectifs de l'initiative. Les aviculteurs auraient alors deux possibilités pour appliquer cette exigence: soit ils réduiraient leurs effectifs 20 / 48

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d'animaux, ce qui entraînerait une perte de chiffre d'affaires estimée à 330 millions de francs par an, soit ils ouvriraient de nouvelles exploitations, ce qui leur permettrait de ne pas dépasser les effectifs maximums autorisés, mais coûterait environ 270 à 360 millions de francs par an.

Quant à l'obligation de limiter le nombre maximum d'animaux par hectare, elle concernerait 2400 autres exploitations (principalement des exploitations d'engraissement de bovins). Pour satisfaire aux prescriptions, celles-ci pourraient elles aussi réduire le nombre de leurs animaux, ce qui entraînerait une baisse du chiffre d'affaires de 250 millions de francs par an, ou augmenter leur surface, ou encore livrer leurs engrais excédentaires à d'autres exploitations, avec les frais que cela suppose. Pour maintenir le même cheptel (de porcs et de bovins) sans livraison d'engrais, l'achat (ou l'affermage complémentaire) d'environ 19 000 hectares serait nécessaire. Toutefois, seules quelques exploitations seront effectivement en mesure d'étendre leur surface agricole utile, car, dans nombre de cas, diverses difficultés (financement des nouveaux terrains agricoles, manque de surfaces appropriées à proximité, etc.) feront obstacle à l'expansion.

La perte totale de chiffre d'affaires s'élève donc à un maximum d'environ 580 millions de francs par an (330+250 millions de francs), soit environ 10 % du chiffre d'affaires total que les exploitations agricoles suisses réalisent chaque année avec les denrées alimentaires d'origine animale (à savoir, grosso modo, 5,5 milliards de francs).

Dans cette situation, des exploitations agricoles pourraient ne plus être en mesure de couvrir leurs frais de fonctionnement ou de financer leurs investissements obligatoires. Elles seraient alors contraintes de se tourner vers d'autres produits, voire de fermer. Il n'est pas possible d'estimer le nombre d'exploitations agricoles qui se trouveraient finalement dans ce cas.

Coûts supplémentaires en tenant compte de la période de transition de 25 ans La période de transition de 25 ans réduit les coûts supplémentaires calculés ci-dessus sur deux points: premièrement, il existe des facteurs d'influence susceptibles de réduire les coûts à l'avenir; deuxièmement, de nombreuses mesures seront de toute façon mises en oeuvre avant la fin de la période de transition, en raison des progrès technologiques.

Les facteurs d'influence pertinents pour l'évolution des coûts sont les suivants: ­

Dans le domaine de la détention des animaux de rente, il faut s'attendre à ce que le nombre d'animaux par exploitation continue d'augmenter en permanence. Plus une exploitation possède d'animaux, plus les coûts par animal sont faibles en raison des économies d'échelle.

­

Les exploitations qui ont un nombre élevé d'animaux par surface seront contraintes de réduire le nombre de leurs animaux ou d'exploiter davantage de terres, en propre ou en fermage.

­

Les progrès technologiques réduisent les coûts de main-d'oeuvre et les contraintes physiques (systèmes de traite automatisés, numérisation, etc.).

­

La mise en oeuvre des objectifs dans d'autres domaines politiques (par exemple, objectifs environnementaux pour l'agriculture) peut nécessiter des 21 / 48

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investissements dans l'élevage et entraîner une réduction des effectifs d'animaux.

Pour calculer les coûts supplémentaires effectifs, il faudrait donc déduire les coûts supportés de toute manière des coûts supplémentaires totaux.

Les coûts supportés de toute manière seront dus principalement aux aspects suivants: ­

Cycles d'investissement réguliers: dans le processus de modernisation des unités d'élevage pendant la période transitoire, il y aura de toute manière des investissements pour l'hébergement et les soins respectueux des animaux et pour leur accès à l'extérieur.

­

Politique environnementale: les objectifs environnementaux de l'agriculture peuvent être atteints par des adaptations des systèmes de détention et par la réduction des effectifs d'animaux;

­

Production agricole: le message PA22+ fixe l'objectif «d'une production de denrées alimentaires adaptée aux conditions locales et utilisant les ressources de manière efficiente» en tenant compte de la résistance des écosystèmes sur le plan écologique. L'initiative parlementaire 19.475 implique la mise en oeuvre de mesures de la PA22+ pour réduire les pertes d'éléments fertilisants agricoles. Et d'autres initiatives vont dans le même sens (par exemple, l'initiative sur l'eau potable, voir ch. 2.3.3).

­

Changement de comportement des consommateurs: une demande accrue d'aliments d'origine végétale, par exemple, conduit à une diminution de la détention d'animaux, et une demande accrue de produits biologiques favorise l'expansion de l'agriculture biologique.

L'AIR suppose que la part des coûts supportés de toute manière pourrait atteindre 50 à 75 %, selon l'importance respective des facteurs susmentionnés. Les coûts supplémentaires de l'IEI, déduction faite des coûts supportés de toute manière, devraient donc osciller, selon les estimations, entre 0,3 et 1,1 milliard de francs par an environ (voir annexe 2). À titre de comparaison, la valeur totale de la production agricole suisse est de 11,4 milliards de francs, et celle des seules denrées alimentaires d'origine animale de 5,5 milliards de francs. L'IEI augmenterait donc les coûts de production des denrées alimentaires d'origine animale ­ selon les différents scénarios ­ de 5 à 20 % environ.

Ces chiffres correspondent aux coûts additionnels juste avant l'expiration du délai transitoire de 25 ans. On peut supposer que les coûts supplémentaires seront relativement faibles au cours des 20 premières années, puis qu'ils augmenteront pour se situer dans la fourchette indiquée ci-dessus vers la fin de la période de transition.

4.3.3

Conséquences pour l'économie

L'effet net de l'IEI, résultant des coûts supplémentaires pour les exploitations et du bénéfice environnemental (voir ch. 4.3.4), en tenant compte de l'effet des coûts supportés de toute manière, atteint environ 0,3 à 1,1 milliard de francs par an (voir tableau

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à l'annexe 3). Mais les explications ci-dessus montrent que déterminer de telles fourchettes de coûts est lié à de grandes incertitudes. L'évolution des facteurs d'influence et les coûts supportés de toute manière sont difficiles à estimer sur une période de 25 ans. Les facteurs de réduction des coûts tels que le progrès technique, les changements structurels dans l'agriculture, le comportement des consommateurs ou les mesures politiques (entre autres environnementales), de même que la mise en oeuvre concrète du projet, pourraient avoir une plus grande influence que prévu, de sorte que les coûts pourraient se révéler plus faibles qu'indiqués.

Effets sur les exploitations détenant des animaux et leurs employés Pour les exploitations détenant des animaux, l'impact pourrait être important. Si elles ne peuvent pas compenser les coûts supplémentaires et la baisse de leur chiffre d'affaires par des prix de vente plus élevés ou des paiements directs plus importants, elles devront convertir ou étendre leurs activités afin de maintenir leurs revenus, faute de quoi elles pourraient être contraintes de fusionner, voire de fermer. Dans le secteur avicole, par exemple, une menace particulière pèse sur les 200 exploitations dont les effectifs de volaille dépassent actuellement l'effectif maximal prévu par l'IEI. Si les pertes de production dues à la baisse du nombre de volailles ne peuvent être compensées par des prix plus élevés, l'IEI entraînera une baisse de leur chiffre d'affaires qui, suivant la réduction du nombre d'animaux, pourra se révéler importante. Et si l'on suppose que chacune des 200 exploitations emploie environ trois personnes, quelque 600 employés seraient touchés.

Impact sur les prix Si les pertes de revenus ne sont pas compensées par des nouvelles contributions de l'État ou par une adaptation des contributions existantes, les exploitations détenant des animaux de rente tenteront de répercuter les coûts supplémentaires sur le marché en augmentant les prix de production. La réussite de ces tentatives dépendra du pouvoir respectif dont disposent les producteurs et les distributeurs sur le marché, et de la réaction des consommateurs.

Les distributeurs de leur côté tenteront de répercuter la hausse des prix à la production sur les consommateurs. Plus ces derniers sont disposés à payer davantage
pour des denrées alimentaires produites par des élevages respectueux des animaux et plus leur choix est restreint, plus cela sera facile pour les distributeurs.

Conséquences pour les consommateurs L'amélioration du bien-être animal va dans le sens des consommateurs, mais il est fort probable qu'ils devront payer des prix plus élevés pour cela (cf. ci-dessus). La hausse des prix pourrait entraîner une baisse de la demande de denrées alimentaires d'origine animale produites en Suisse, et une augmentation du tourisme d'achat.

Les ménages à faibles revenus seraient davantage pénalisés par une hausse des prix des denrées alimentaires que les ménages à revenus élevés, car l'alimentation représente une part plus importante de leur budget.

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4.3.4

Effets sur l'environnement

L'AIR évalue l'impact environnemental sur la base des émissions d'ammoniac, de méthane et de gaz hilarant.

L'augmentation du nombre de bovins mis au pâturage, telle que prévue par l'IEI, augmenterait les émissions d'ammoniac d'environ 1 % du cheptel actuel (augmentation de la surface polluée). Toutefois, si le nombre de têtes de bétail est réduit comme le prévoit l'IEI (max. 20 000 UGB pour la volaille et max. 45 000 UGB pour les bovins), ces émissions diminueraient de 3 à 4 % (donc ­2 à ­3 % nets). Les émissions d'ammoniac de l'agriculture étant d'environ 42 500 tonnes de NH3-N36 en 201537, cela correspond à une réduction d'environ 900 à 1300 tonnes de NH3-N.

Le cheptel est le facteur déterminant pour les émissions de gaz hilarant et de méthane.

Une réduction du cheptel, telle que prévue par l'IEI, modifierait donc également les émissions de gaz hilarant et de méthane, qui devraient diminuer. Pour le méthane, cette diminution est estimée à 165 000 tonnes d'équivalent CO2 par an, en raison de la réduction du nombre de bovins. Pour le gaz hilarant, la diminution est estimée à 95 000 de tonnes d'équivalents CO2 par an (en supposant une réduction des émissions de gaz hilarant d'environ 5 %).

L'impact sur les émissions de CO2 est considéré comme faible, car celles-ci ne dépendent pas beaucoup de la taille du cheptel.

Si ces résultats sont chiffrés en termes de coûts38, l'AIR montre que l'IEI réduirait les coûts environnementaux d'environ 110 à 280 millions de francs par an grâce à la réduction des émissions d'ammoniac, de méthane et de gaz hilarant. Si l'on tient compte de l'effet des coûts supportés de toute manière (50 % à 75 %, voir section 4.3.2), on obtient un bénéfice environnemental de 30 à 140 millions de francs par an.

4.3.5

Conséquences sur la nature et les zones d'habitation

Si les exploitations appliquent la limitation du nombre d'animaux par hectare sans réduction de l'effectif d'animaux, elles devront augmenter leur surface d'environ 19 000 hectares par rapport au cheptel actuel pour maintenir le volume de production actuel. Cela correspond à environ 2 % des surfaces agricoles utiles. Au vu des conflits d'objectifs avec d'autres exigences quant à l'utilisation de l'espace (autres besoins de l'agriculture, habitat, transport, espace naturel, etc.), on peut légitimement se demander s'il y a, d'une manière générale, assez de surfaces agricoles adéquates à disposition à proximité des exploitations.

36 37 38

NH3-N: quantité d'émissions d'azote (part N) sous forme d'ammoniac (NH3).

Voir AIR Estimations de l'office allemand de l'environnement.

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4.4

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

4.4.1

Droit de l'OMC

Le droit du commerce mondial (droit de l'OMC, notamment l'Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce [GATT]39) repose sur le principe de la non-discrimination (clause de la nation la plus favorisée et traitement national). Selon ce principe, les États membres de l'OMC ne doivent pas accorder aux produits étrangers un traitement moins favorable que celui accordé aux produits nationaux similaires. Or, le texte de l'initiative laisse supposer que les importations d'animaux et de produits animaux à des fins alimentaires devraient être, elles aussi, conformes au Cahier des charges 2018 de Bio Suisse (voir ch. 4.2.3; pour l'interprétation contraire faite par le comité d'initiative, voir ch. 3.3). La Suisse violerait cependant les dispositions du GATT si elle différenciait les produits selon des procédés et méthodes de production qui restent sans répercussions sur les caractéristiques physiques des produits. Les restrictions à l'importation iraient aussi à l'encontre de l'art. XI du GATT, qui interdit les restrictions quantitatives et les mesures ayant des effets similaires.

Il est vrai que l'art. XX du GATT prévoit plusieurs exceptions qui peuvent justifier le non-respect des prescriptions de l'accord dans des cas particuliers. Des restrictions à l'importation pourraient notamment se fonder sur les let. a) ou b) de cette disposition, qui autorisent les restrictions au commerce pour protéger la moralité publique ou pour protéger la santé ou la vie des personnes et des animaux. Cependant, des exigences élevées doivent être remplies pour parvenir à justifier de telles mesures. Premièrement, un État devrait prouver pour telle ou telle mesure envisagée qu'elle est réellement nécessaire ou qu'aucune autre, moins stricte, ne permettrait d'atteindre l'objectif politique souhaité. Deuxièmement, il n'existe pour l'instant pas de normes internationalement reconnues pour les domaines concernés. Troisièmement, les mesures visant à faire respecter ces exigences sur les produits importés, même lorsqu'elles invoquent la disposition d'exception, ne doivent pas entraîner une discrimination arbitraire ou injustifiée entre des pays qui présentent les mêmes conditions, ni constituer une entrave déguisée au commerce mondial. Compte tenu de l'art. 80a, al. 4, du texte de l'initiative, en particulier, la Suisse risquerait d'avoir des difficultés à réfuter l'accusation de protectionnisme dans un différend devant l'OMC.

4.4.2

Accords bilatéraux avec l'UE

Accords de libre-échange Les produits agricoles transformés couverts par le Protocole n o 2 de l'Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne (Accord de libre-échange, ALE)40 sont soumis aux dispositions de l'ALE.

L'art. 13 de l'ALE interdit toute nouvelle restriction quantitative à l'importation ou 39 40

RS 0.632.21 RS 0.632.401

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toute mesure d'effet équivalent dans les échanges de marchandises entre l'UE et la Suisse. En outre, de telles mesures ne doivent pas conduire à une discrimination arbitraire ou à une restriction déguisée au commerce.

En ce qui concerne les dispositions prévues à l'art. 80a, al. 4, du texte de l'initiative sur l'importation d'animaux et de produits animaux à des fins alimentaires, on peut se demander si elles seraient compatibles avec l'art. 13 de l'ALE, compte tenu des dispositions transitoires (voir ch. 4.2.3). Il est vrai que l'art. 20 de l'ALE ne fait pas obstacle aux restrictions d'importation «justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux». Toutefois, même si le critère obligatoire d'un intérêt public prépondérant pouvait être satisfait et donc justifier les mesures fondées sur l'art. 80a, il faudrait encore démontrer que ces mesures sont proportionnées (c'est-à-dire à la fois appropriées et nécessaires) pour préserver l'intérêt public visé (par analogie avec les commentaires ci-dessus sur l'art. XX du GATT).

Accord agricole L'art. 80a, al. 4, du texte de l'initiative serait notamment aussi problématique eu égard à l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif aux échanges de produits agricoles41. Cet accord couvre certaines denrées alimentaires et certains moyens de production (entre autres les produits issus de l'agriculture biologique, les aliments pour animaux, les semences, les produits d'origine animale) et, sur la base de l'équivalence des normes de production, garantit réciproquement aux parties contractantes l'accès simplifié de ces produits agricoles au marché partenaire. Si les règles d'importation spécifiques aux produits agricoles et aux denrées alimentaires devaient s'écarter des règles européennes, elles pourraient entrer en conflit avec l'équivalence prévue par l'accord sur l'agriculture, ce qui serait contraire à l'accès simplifié au marché réciproquement garanti pour les produits couverts par l'accord. Selon l'art. 14, al. 2, de l'accord agricole, les parties s'abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de cet accord.

Il n'est pas inutile de
rappeler dans ce contexte que les accords bilatéraux I (y compris l'accord agricole) sont liés par la clause guillotine: si l'un des accords était dénoncé, les autres seraient automatiquement caducs.

4.4.3

Accords avec d'autres partenaires

La Suisse a conclu à ce jour trente-deux accords de libre-échange avec quarante-deux partenaires hors de l'UE et de l'Association européenne de libre-échange. Tous ces accords de libre-échange comprennent des engagements en matière d'accès au marché pour les produits agricoles et les produits agricoles transformés. Comme ils sont fondés sur les dispositions pertinentes du droit de l'OMC, les considérations présentées au ch. 4.4.1 doivent en principe être prises en compte également. La clause du traitement national inscrite dans les accords de libre-échange a notamment une importance dans le cadre de l'IEI. Les mesures telles que proposées par l'initiative seraient aussi 41

RS 0.916.026.81

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problématiques dans ce contexte. La Suisse pourrait faire l'objet de plaintes déposées par l'un de ses partenaires aux accords de libre-échange, conformément aux procédures de règlement des différends qui y sont prévues.

5

Conclusions

Les explications ci-dessus montrent que l'orientation générale de l'initiative ­ la protection de la dignité des animaux dans les élevages agricoles ­ est en accord avec les objectifs que le Conseil fédéral poursuit lui aussi en matière de protection des animaux. Toutefois, le Conseil fédéral ne peut pas approuver le nouveau texte constitutionnel proposé pour les raisons suivantes: ­

La législation sur la protection des animaux interdit déjà «l'élevage intensif» au sens de l'initiative.

­

La législation sur la protection des animaux protège le bien-être individuel des animaux, indépendamment du nombre d'animaux. La limitation de la taille des élevages ne conduirait donc pas à une amélioration immédiate du bienêtre des animaux. Par contre, elle entraînerait des pertes économiques importantes pour les agriculteurs. De toute manière, vu la structure des exploitations agricoles en Suisse et la législation dans ce domaine, les effectifs d'animaux sont déjà très limités en Suisse en comparaison internationale.

­

Les réglementations frappant les importations entraîneraient une violation des engagements commerciaux de la Suisse sur le plan international (voir ch. 4.4).

­

Le contrôle des produits importés serait difficile et coûteux, notamment celui des denrées alimentaires composées. En outre, ces contrôles causeraient un travail administratif considérable, tant pour les autorités que les acteurs du marché.

­

Exiger que les animaux ou produits animaux proviennent d'élevages répondant au moins au standard du Cahier des charges 2018 de Bio Suisse aurait de larges répercussions: à supposer que la demande reste constante, les prix des denrées alimentaires agricoles d'origine animale, qu'elles soient indigènes ou importées, augmenteraient, ce qui favoriserait le tourisme d'achats dans les régions frontalières. Les augmentations de prix pourraient toucher non seulement les consommateurs, mais aussi les établissements qui produisent ou transforment des denrées alimentaires en Suisse.

­

La liberté de choix des consommateurs serait restreinte.

­

L'introduction d'un cahier des charges privé comme norme minimale dans la Constitution est à rejeter par principe. De plus, ce cahier des charges spécifique de 2018 serait dépassé depuis bien longtemps s'il devait prendre effet après l'expiration du délai transitoire de 25 ans. Enfin, il n'y a aucune raison d'introduire dans la Constitution le cahier des charges de Bio Suisse plutôt qu'un autre. Il existe de nombreuses autres normes bio, privées et publiques.

Se fondant sur les considérations qui précèdent, le Conseil fédéral propose de rejeter l'IEI et d'y opposer un contre-projet direct.

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Contre-projet direct

6.1

Texte du contre-projet direct

Le contre-projet direct «Arrêté fédéral concernant la protection et le bien-être des animaux» a la teneur suivante: La Constitution est modifiée comme suit: Art. 80, al. 1 et 2bis 1

La Confédération légifère sur la protection et le bien-être des animaux.

2bis

S'agissant des animaux de rente, leur bien-être doit être assuré en particulier par:

a.

un hébergement et des soins respectueux des animaux;

b.

des sorties régulières;

c.

des conditions d'abattage respectueuses des animaux.

6.2

Procédure de consultation

L'avant-projet du contre-projet a été mis en consultation du 12 août au 20 novembre 2020. Il a suscité 110 prises de position.

La majorité des cantons (AG, BL, BS, FR, GE, GL, GR, NW, LU, SH, TI, VD, VS, ZH et ZG), le PS et le PVL, les associations de consommateurs et de nombreuses ONG se sont prononcés en faveur du contre-projet direct. Ils demandent cependant de l'améliorer sur certains points (définir concrètement ce qu'on entend par «hébergement respectueux des animaux» et «sorties régulières» et fixer un nombre maximal d'animaux par effectif). Ils sont, en outre, partisans de l'inscription, dans la Constitution, d'une disposition réglementant les importations. Ils signalent, enfin, des conflits d'objectifs par rapport à l'aménagement du territoire et à l'environnement (ammoniac, azote) et qu'un soutien financier aux exploitations agricoles sera nécessaire. Le PVL suggère de viser une réduction de la consommation de viande.

BE et JU défendent aussi le contre-projet, mais avec quelques réserves. Ils craignent qu'il ait une faible utilité économique en comparaison des coûts supplémentaires attendus pour l'exécution (ressources supplémentaires), pour les investissements dans les nouvelles constructions et pour l'élimination des conséquences environnementales (pollution de l'environnement par l'ammoniac et l'azote). Ils redoutent que le contreprojet désavantage les exploitations agricoles suisses qui doivent produire dans le respect des normes suisses strictes, contrairement aux producteurs d'aliments importés.

L'Association suisse des vétérinaires cantonaux, qui représente les organes chargés de l'application de la législation sur la protection des animaux en Suisse, est favorable au contre-projet direct et rejette l'initiative. Elle demande cependant de compléter la disposition constitutionnelle en lui ajoutant les aspects «alimentation adaptée aux besoins des animaux», «soins et occupation», et «conditions de transport respectueuses des animaux», voire une disposition applicable aux importations.

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La Fédération romande des consommateurs (FRC) et la Stiftung für Konsumentenschutz (SKS) sont partisanes du contre-projet direct, mais demandent de l'élargir (par ex. programme SRPA et SST complet comme standard minimal, définition de la taille des groupes d'animaux, mise en oeuvre de l'art. 104a, let. d, Cst., compensation des pertes de paiements directs et, le cas échéant, déclaration obligatoire des importations qui ne répondent pas aux nouvelles normes).

Sentience Politics (s'exprimant en tant que représentant du comité d'initiative) et les Verts saluent les efforts du Conseil fédéral en vue d'améliorer le bien-être des animaux. Ils considèrent cependant que les améliorations promises sont des déclarations d'intention sans caractère juridiquement contraignant et qu'elles restent nettement en deçà des exigences de l'initiative. Le texte du contre-projet ne contient pas la notion de «dignité de la créature» ni de disposition applicable aux importations. De plus, à leurs yeux, le texte constitutionnel concernant le «bien-être» des animaux devrait être concrétisé. Ils soutiennent donc l'initiative et rejettent le contre-projet direct.

La Protection suisse des animaux formule des exigences analogues à celles de Sentience Politics et des Verts, mais elle demande en plus de trouver un moyen de maintenir le système des paiements directs en faveur des programmes de promotion du bien-être des animaux.

S'opposent au contre-projet direct une minorité de cantons (AI, AR, NE, OW, SZ, TG et UR), les partis bourgeois (PDC, UDC et PLR), l'Union suisse des paysans et d'autres associations paysannes, les organisations de producteurs (l'Union professionnelle suisse de la viande, les Producteurs suisses de lait, l'Association suisse des fabricants d'aliments fourragers et Proviande) ainsi que le commerce et l'artisanat (CI Commerce de détail Suisse, l'Union suisse des arts et métiers). Ils argumentent en disant que les dispositions légales en vigueur sont suffisamment strictes. Selon eux, l'élevage intensif est interdit aujourd'hui déjà et des dispositions constitutionnelles supplémentaires ne sont pas nécessaires. Ils avancent, en outre, que les labels peuvent aujourd'hui déjà se profiler avec les programmes SRPA et SST. Si ces systèmes incitatifs devaient devenir le standard minimal, il n'y aurait plus de
marge de manoeuvre pour des contributions en faveur du bien-être animal dans ces domaines. Ils critiquent, par ailleurs, l'absence d'une disposition applicable aux importations et jugent trop strictes les exigences relatives aux sorties et à la détention des animaux à l'étable dans des régions où l'espace est limité. Ils signalent enfin que le passage à un nouveau système générerait des coûts élevés pour les agriculteurs.

L'Association GastroSuisse est, elle aussi, opposée au contre-projet direct. Elle craint qu'il renchérisse la viande suisse et qu'il favorise le tourisme d'achats.

6.3

Présentation du contre-projet direct

6.3.1

Généralités

Le contre-projet direct créerait la base permettant à la Suisse d'améliorer encore son niveau de protection des animaux, qui est déjà élevé en comparaison avec celui d'autres pays. En cas d'acceptation, le Conseil fédéral soumettrait au Parlement des

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propositions pour transposer les nouvelles dispositions constitutionnelles au niveau de la loi. Ces propositions feraient au préalable l'objet d'une AIR.

Le contre-projet direct vise à inscrire dans la Constitution le principe selon lequel tous les animaux doivent être détenus conformément à leurs besoins tout au long de leur vie. Dans ce contexte, il est essentiel que les animaux de rente notamment puissent bénéficier de sorties régulières, soient détenus dans le respect de leurs besoins et traités (soins) avec tous les égards. Si les animaux doivent être abattus, il faut qu'ils le soient dans des conditions respectueuses. Pour conférer une base solide aux exigences, la protection du «bien-être» de tous les animaux doit être inscrite dans la Constitution, ce qui permettra aussi d'édicter des dispositions plus strictes sur la détention des animaux sauvages par exemple (cirques, zoos, détention de reptiles et d'amphibiens par des particuliers). Pour les animaux de rente, il faut inscrire les éléments «hébergement et soins respectueux des animaux», «sorties régulières» et «abattage dans des conditions respectueuses» dans la Constitution.

Il convient, en revanche, d'écarter la proposition des auteurs de l'initiative d'inscrire dans la Constitution une référence au Cahier des charges 2018 de Bio Suisse, qui relève du droit privé.

Les programmes d'incitation peuvent contribuer dans une large mesure à l'amélioration du bien-être des animaux. Aussi sont-ils largement utilisés aujourd'hui déjà (cf. ch. 2.2.2). Ils ne sont cependant pas entièrement satisfaisants sous l'angle de la protection des animaux, car seule une partie des animaux sont détenus dans le respect de ces programmes. Le contre-projet direct vise donc à élever les exigences minimales applicables à la détention des animaux de rente dans les domaines «des sorties» ainsi que «de l'hébergement et des soins respectueux», ce qui représenterait un progrès décisif pour le bien-être de tous les animaux de rente.

Le niveau de protection visé sera augmenté en reprenant dans une large mesure, comme normes minimales, les exigences des programmes facultatifs SRPA et SST.

Seront privilégiées les exigences qui contribuent particulièrement au bien-être des animaux de rente et dont le coût est supportable pour les agriculteurs. Il s'agit de tenir compte,
en outre, des connaissances les plus récentes en matière de détention d'animaux. Les standards minimaux correspondants doivent être au fur et à mesure fixés au niveau de la loi et des ordonnances.

Les dépenses liées à des mesures de construction que les exploitations agricoles devront engager pour élever le standard de protection des animaux de rente afin d'améliorer le bien-être animal devront être co-financées davantage par des aides à l'investissement, comme le propose la PA22+. On considère, en outre, que le changement structurel de ces 25 prochaines années conduira à une nouvelle diminution du nombre d'exploitations. Si le montant des paiements directs devait rester inchangé, cela signifierait davantage d'argent à la disposition des exploitations. De plus, une partie des coûts additionnels constituent des frais qui devront être supportés de toute manière.

En d'autres termes, ces investissements seront réalisés de toute façon durant la période transitoire jusqu'à la mise en oeuvre des règles plus strictes. Par ailleurs, les développements technologiques des 25 prochaines années devraient permettre de produire de manière plus efficiente et de réduire les coûts de production. Enfin, les modes de dé-

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tention particulièrement respectueux des animaux, qui vont au-delà des exigences minimales, continueront d'être soutenus financièrement au moyen de programmes d'incitation (plus développés) liés aux paiements directs. En raison de la longue période de transition, on estime que le contre-projet direct ne devrait pas provoquer une modification significative du revenu des agriculteurs. Le Conseil fédéral s'engage à ce que le contre-projet direct soit mis en oeuvre sans coûts supplémentaires pour le budget de la Confédération en procédant, le cas échéant, à des transferts dans les instruments existants.

De l'initiative le contre-projet direct reprendra aussi l'aspect de l'abattage. C'est un secteur d'activité particulièrement sensible et caché à la vue du public. Les manquements lors de l'abattage provoquent souvent de fortes douleurs, de grands maux et une anxiété considérable chez les animaux. Il est donc prévu d'élever également les exigences en matière d'abattage (voir à ce sujet les commentaires sur l'art. 80, al. 2bis, let. c, sous ch. 6.4).

Pour réaliser les améliorations visées, un délai transitoire raisonnable, que l'IEI prévoit aussi, doit être accordé. Le Conseil fédéral considère «approprié» un délai transitoire de 25 ans au plus, en phase avec l'IEI, lorsque des adaptations de construction sont nécessaires. Les changements proposés ne concerneront donc que la prochaine génération d'agriculteurs. Des délais transitoires de l'ordre de 15 ans peuvent suffire si les adaptations ne concernent pas les bâtiments ou les installations. Ce délai transitoire plus court devrait bénéficier principalement aux domaines des soins et de l'abattage. Une analyse approfondie de l'impact de la réglementation, qu'il faudra réaliser en cas d'acception du contre-projet et en prévision du message du Conseil fédéral pour sa réalisation, indiquera dans quels domaines de tels délais seraient encore possibles.

Aucun changement ne devrait être apporté à la protection des investissements visée à l'art. 8 LPA.

6.3.2

Réglementation des importations

Il faut s'abstenir d'inscrire dans la Constitution une disposition spécifique aux importations. Les art. 80, al. 2, let. d et 104a Cst. et 14, al. 1, LPA en vigueur permettent déjà au législateur d'édicter des dispositions dans ce domaine.

L'art. 104a Cst. charge la Confédération de créer, en vue d'assurer l'approvisionnement de la population en denrées alimentaires, des conditions pour des relations commerciales transfrontalières qui contribuent au développement durable de l'agriculture et du secteur agroalimentaire. Cela inclut la possibilité pour la Suisse de proposer à ses partenaires d'entamer des discussions sur une agriculture et des systèmes alimentaires durables dans le cadre de négociations de nouveaux accords de libre-échange.

Les questions liées aux méthodes de production durable peuvent, elles aussi, être traitées lors de ce dialogue.

L'art. 14, al. 1, LPA prévoit que le Conseil fédéral peut, pour des raisons relevant de la protection des animaux, soumettre l'importation, le transit et l'exportation d'animaux et de produits d'origine animale à certaines conditions, les limiter ou les interdire. Cette disposition suffirait à l'avenir pour soumettre à une déclaration obligatoire

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les importations de produits animaux qui ne sont pas conformes aux nouvelles exigences suisses plus strictes. Des déclarations obligatoires supplémentaires pourraient s'appuyer sur les art. 13 de la loi du 20 juin 2014 sur les denrées alimentaires42, 18 LAgr ou 2 de la loi fédérale du 5 octobre 1990 sur l'information des consommatrices et des consommateurs43. Des dispositions réglant les importations peuvent cependant entrer en conflit avec les engagements internationaux de la Suisse. Il est donc nécessaire d'examiner au cas par cas si une telle disposition est conforme au droit international. De plus, il est permis aujourd'hui déjà d'indiquer qu'un produit a été fabriqué en respectant les exigences suisses particulièrement sévères.

6.3.3

Réglementation de la taille des groupes d'animaux

Le droit suisse sur la protection des animaux protège l'animal indépendamment du nombre d'animaux détenus dans un élevage (taille de l'effectif). Cela signifie qu'il n'est pas nécessaire du point de vue de la protection des animaux (dignité, bien-être des animaux) de limiter la taille des effectifs. En ce qui concerne la taille des groupes d'animaux (à savoir le nombre d'animaux admis dans un local d'hébergement ou dans un enclos), le droit en vigueur prévoit déjà qu'il ne faut pas dépasser le nombre audelà duquel la faculté d'adaptation des animaux individuels serait sollicitée de manière excessive. Il n'est donc pas nécessaire non plus, du point de vue de la protection des animaux, de durcir les prescriptions légales concernant la taille des groupes d'animaux. La santé et le bien-être des animaux de rente dépendent surtout du confort offert par l'infrastructure (aires de repos, protection visuelle, retraite, occupation) et de la manière de gérer l'exploitation (aliments, soins).

Les animaux de rente sont des espèces sociables qui doivent avoir des contacts avec des congénères. Ils devraient être détenus en groupes dans lesquels ils peuvent se mouvoir librement. Quiconque détient des animaux doit observer leur comportement et celui du groupe, veiller à ce qu'ils aient des possibilités de s'éviter ou de se retirer et, si nécessaire, séparer les individus qui ne se supportent pas.

Comme indiqué précédemment, il n'est pas nécessaire du point de vue de la protection des animaux (protection de leur dignité et de leur bien-être) de réduire la taille des effectifs dans les unités d'élevage. La réglementer peut cependant être indiqué pour des raisons environnementales ou pour encourager les exploitations paysannes cultivant le sol. Une limitation de la taille des effectifs est déjà réalisée par l'OEM, par les prescriptions du droit de l'environnement et par celles du droit de l'aménagement du territoire. Elle peut aussi être encouragée par des mesures incitatives liées à des paiements directs. L'attribution de crédits pour les nouvelles constructions peut aussi être subordonnée au respect de ces critères. Signalons enfin que la réduction de la taille des groupes d'animaux peut aussi être mise en avant par des labels, ce qu'autorisent tant la loi sur l'agriculture que le droit alimentaire.

Une réglementation supplémentaire au niveau de la Constitution n'est donc pas nécessaire.

42 43

RS 817.0 RS 944.0

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6.3.4

Réglementation des aspects environnementaux

L'art. 80 Cst. traite de la protection des animaux. Il ne peut servir de base à des dispositions sur la protection de l'environnement. Celles-ci se fondent notamment sur les art. 73 et 104 Cst. Les dispositions visant à réduire les atteintes à l'environnement causées par l'élevage d'animaux sont édictées actuellement surtout sur la base de l'initiative parlementaire 19.475 «Réduire le risque de l'utilisation de pesticides» (cf. ch. 2.3.4). Les travaux au sein de l'administration pour sa mise en oeuvre ont déjà débuté. Dans ce contexte, le 28 avril 2021, le Conseil fédéral a mis entre autres les propositions suivantes en consultation44: ­

les actuelles marges d'erreur de + 10 % pour l'azote et le phosphore seront abrogées, ce qui dans les faits correspond à une réduction;

­

concernant les contributions aux systèmes de production, il est prévu de soutenir: ­ l'utilisation efficiente de l'azote, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d'ammoniac ainsi que les excédents d'azote; ­ une détention accrue au pâturage des différentes catégories de bovins; ­ une utilisation prolongée des vaches, afin de réduire les émissions de méthane.

Si elles sont acceptées dans le cadre de la consultation, les dispositions d'ordonnances entreront en vigueur le 1er janvier 2023.

6.4

Commentaire des alinéas

Le contre-projet direct du Conseil fédéral à l'initiative modifie l'actuel art. 80, al. 1, Cst. et le complète par un nouvel al. 2bis. Les actuels al. 2 et 3 restent inchangés.

Al. 1 Le «bien-être des animaux» doit désormais être inscrit explicitement dans la disposition de base de l'art. 80, al. 1 Cst. Le terme «animaux» doit inclure non seulement les animaux vertébrés mais aussi les céphalopodes (Cephalopoda) et les décapodes marcheurs (Reptantia), car on estime que ces animaux sont, eux aussi, capables de ressentir des douleurs et des maux. Par contre, le Conseil fédéral décidera, comme il l'a fait jusqu'à présent, dans quelle mesure le droit sur la protection des animaux doit s'appliquer aux animaux invertébrés. Il faut régler non seulement l'utilisation et la détention de ces animaux mais aussi les interventions qu'ils peuvent subir.

Actuellement, le «bien-être de l'animal» est cité à l'art. 1 LPA («But») et doit à présent être inscrit dans la Constitution. Il ne se limite pas au respect des exigences minimales de l'actuelle législation sur la protection des animaux. Une unité d'élevage

44

Les documents peuvent être consultés à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Consultations > Consultations en cours > Département de l'économie, de la formation et de la recherche.

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respectueuse des animaux doit leur permettre notamment d'exprimer autant que possible les comportements propres à l'espèce. Un système de détention ne doit pas solliciter les capacités d'adaptation des animaux de manière excessive. Le «bien-être» comprend aussi la prise en compte suffisante du besoin de mouvement des animaux et la nécessité de leur fournir les possibilités d'occupation qui leur permettent d'exprimer les comportements propres à l'espèce. La nouvelle disposition constitutionnelle proposée indique clairement qu'il faudra, à l'avenir, mettre davantage l'accent sur le bien-être de tous les animaux. Cela doit permettre de clarifier, dans la Constitution également, que les animaux ne sont plus considérés comme des choses depuis 2003. Alors que l'IEI ne concerne que les animaux détenus pour la production agricole, le contre-projet direct propose d'étendre l'objectif de «bien-être» à tous les animaux. La Constitution doit fixer les contours de la future législation applicable aux animaux. À cet égard, le contre-projet direct va plus loin que l'IEI.

Al. 2bis Cet alinéa précise ce qu'il faut entendre par «bien-être» chez les animaux de rente spécifiquement. Les animaux de rente sont des animaux d'espèces détenues ou destinées à être détenues directement ou indirectement pour la production de denrées alimentaires ou pour une autre prestation déterminée (chevaux de calèche pour le tourisme ou chiens d'intervention au sens de l'art. 69, al. 2 de l'ordonnance du 23 avril 2008 sur la protection des animaux45). La limitation à cette catégorie d'animaux s'explique par le fait que les animaux de rente sont dans une situation spéciale en raison de l'utilisation qui en est faite. Dans le cas des animaux de rente, rentabilité et bienêtre entrent en conflit, ce qui n'est pas le cas pour les animaux de compagnie. Pour ces derniers, il n'y a aucune urgence à adapter la législation sur la protection des animaux. Et si une adaptation devenait nécessaire, les mesures à prendre seraient couvertes par le nouvel al. 1 proposé.

Les exigences à remplir pour obtenir les contributions pour le bien-être animal SST sont définies aux art. 72 à 76 et à l'annexe 6 OPD. Ces exigences seront reprises dans une large mesure. Seront privilégiées les exigences qui contribuent particulièrement au bien-être des animaux et dont
le coût est supportable pour les agriculteurs. Il s'agit de tenir compte, en outre, des connaissances les plus récentes en matière de détention d'animaux. Ces exigences deviendront les conditions minimales.

Let. a Le critère «hébergement et soins respectueux» se réfère aux locaux de stabulation et aux espaces extérieurs, d'une part, et à la manière de traiter les animaux, d'autre part.

Les locaux de stabulation et les espaces extérieurs doivent être conçus de manière à pouvoir répondre aux besoins fondamentaux des animaux: l'alimentation (y compris la recherche de nourriture et la possibilité d'avoir des contacts sociaux, qui constituent des activités d'occupation pour les animaux), le repos (essentiel pour la digestion, le métabolisme et le système immunitaire) et la liberté de mouvement (voir let. b). Une litière est en principe requise, même si la quantité peut varier d'une espèce à l'autre

45

RS 455.1

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(voir plus bas). Non seulement la surface des locaux mais aussi un éclairage suffisant revêtent une grande importance.

La détention des bovins à l'attache ne sera pas interdite de manière générale: elle restera autorisée si les animaux peuvent bénéficier de sorties (réglementation analogue au Cahier des charges de Bio Suisse). Chez les chèvres, en revanche, la détention à l'attache sera interdite.

En cas d'acceptation du contre-projet, les exploitations qui n'ont jamais participé à des programmes de bien-être animal connaîtront les améliorations suivantes par rapport à la situation actuelle: Exigences générales pour toutes les catégories d'animaux: ­

une alimentation conforme aux besoins de l'espèce;

­

davantage de matériel d'occupation;

­

une aire de repos non perforée avec des couches recouvertes de litière.

Bovins: ­

des étables à stabulation libre avec des aires d'affouragement et d'abreuvement fixes;

­

détention de bovins à l'attache à partir de 5 mois uniquement s'ils bénéficient du programme SRPA;

­

interdiction des box à une seule seule surface munis d'un caillebotis intégral pour l'engraissement des taureaux;

­

pour les bovins à l'engrais, un box à deux surfaces avec une aire de repos recouverte de litière ou une stabulation libre à logettes avec des matelas souples dans les boxes;

­

un meilleur approvisionnement en fourrage grossier, qui résoudra le problème de l'anémie des veaux (viande blanche) et celui des troubles du comportement chez les bovins à l'engrais.

Porcs: ­

une offre de matériels d'occupation plus étendue par ex. pour jouer, fouiller le sol et ronger;

­

un meilleur approvisionnement en fourrage grossier en vue d'améliorer l'occupation (prévention de la caudophagie).

Chèvres: ­

interdiction de la détention à l'attache; détention en groupe non attachées.

Lapins: ­

un accès à une aire recouverte d'une litière, qui permette aux animaux de gratter le sol;

­

des surfaces surélevées dans l'enclos;

­

des boxes d'une surface d'au moins 2 m2 pour les lapins à l'engrais.

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Volaille de rente: ­

un poulailler entièrement recouvert de litière;

­

un accès journalier à l'aire à climat extérieur: ­ pondeuses: à partir de la 24e semaine de vie; ­ poulets de chair: à partir du 22e jour de vie;

­

des surfaces surélevées pour la volaille d'engraissement;

­

une intensité lumineuse d'au moins 15 Lux dans le poulailler.

Let. b La liberté de mouvement est un besoin fondamental des animaux. C'est un aspect important d'une détention respectueuse des animaux, de leur bien-être et de leur santé.

Les sorties régulières contribuent également à améliorer la résistance aux maladies et, partant, à réduire le recours aux médicaments, en particulier aux antibiotiques. Il est prévu que tous les animaux de rente bénéficient de sorties régulières. Dans ce domaine, les exigences actuelles du programme SRPA seront largement reprises et deviendront les exigences minimales futures. Par «sorties régulières», on entend l'accès quotidien à une aire à climat extérieur, à une cour extérieure ou au pâturage. Si cela contribue au bien-être animal, il faudrait, si nécessaire, une protection contre le rayonnement solaire et les intempéries, même dans l'aire de sortie. Selon l'espèce animale (volailles, veaux et porcs en été), cette protection peut même être nécessaire. Les animaux doivent en principe pouvoir se mouvoir librement et décider eux-mêmes de leur allure, leur direction et leur vitesse de déplacement sans être entravés dans leurs mouvements par des cordes, chaînes ou liens semblables.

Des exceptions supplémentaires ponctuelles seront possibles quant aux sorties régulières, mais le bien-être des animaux devra être garanti même dans ces cas-là. Par exemple, il doit être permis de laisser sortir les animaux par groupes lorsque l'aire de sortie n'est pas très grande. Pour les établissements d'engraissement de la volaille, le programme SRPA (sorties au pâturage) n'est praticable que s'il existe un pré à proximité du poulailler, puisque la volaille, contrairement aux bovins, ne peut être conduite au pâturage (actuellement 8 % des poulets à l'engrais participent au programme de SRPA). Il faudrait aussi utiliser d'autres races pour les SRPA en raison de l'exigence d'une durée de vie des animaux plus longue. Le programme SRPA ne devrait donc pas être obligatoire pour la volaille d'engraissement.

Dans les autres domaines, la reprise des exigences du programme SRPA comme standard minimal pourrait apporter les améliorations suivantes sur les exploitations nonSRPA par rapport à la situation actuelle: Bovins, équidés, chèvres et moutons: ­

sorties au moins 26 jours par mois en été et 13 jours par mois en hiver sur une aire de sorties ou au pâturage;

­

les bovins à l'engrais doivent avoir un accès permanent à une aire de sortie consolidée.

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Porcs: ­

plusieurs heures de sortie à l'air libre par jour;

­

porcs à l'engrais disposant d'une aire de sortie consolidée: accès à l'aire de sortie plusieurs heures par jour;

­

truies allaitantes: une heure de sortie pendant au moins 20 jours durant la période d'allaitement.

Volaille de rente: ­

en plus de l'accès quotidien à l'aire à climat extérieur, la volaille doit avoir accès à un pré cinq heures par jour.

Let. c Par «abattage respectueux des animaux», on entend un abattage lors duquel on évite par tous les moyens possibles et raisonnablement exigibles de causer des douleurs, des maux, des dommages ou de l'anxiété aux animaux. Un personnel hautement qualifié est requis pour traiter avec ménagement les animaux livrés à l'abattoir, les étourdir et les saigner dans les règles de l'art. Un abattage est respectueux lorsqu'il est pratiqué par des personnes compétentes et expérimentées, qui ont de bonnes connaissances de la méthode utilisée pour l'espèce animale concernée. Enfin, pour que l'abattage soit respectueux des animaux, les installations et les appareils d'étourdissement doivent être adaptés à l'usage prévu, faire l'objet d'une maintenance et de contrôles réguliers, et le personnel qui les utilise doit avoir suivi la formation nécessaire. Il faudra donc édicter des dispositions plus strictes sur la formation du personnel, qui viendront s'ajouter aux exigences actuelles applicables à l'abattage d'animaux. Il est prévu de réglementer plus strictement et de soumettre à autorisation la mise sur le marché d'installations et d'appareils d'étourdissement. Il faudra aussi restreindre le nombre de méthodes d'étourdissement autorisées (CO2 par ex.).

6.5

Conséquences

6.5.1

Conséquences pour la Confédération

Dans son message sur la PA22+, le Conseil fédéral a proposé notamment un soutien plus ciblé du bien-être et de la santé des animaux de rente par des paiements directs et des aides à l'investissement. Le contre-projet direct se fonde sur ce message et renforce la voie suivie en élevant les exigences légales minimales et en fixant des dispositions transitoires appropriées. Un élément essentiel du contre-projet direct est que l'augmentation du bien-être animal ne se fera pas aux dépens des exploitations suisses.

Les résultats de la consultation révèlent un large consensus politique sur ce point.

Le Conseil fédéral vise à compenser les coûts supplémentaires et les pertes de revenu pour les producteurs concernés au moyen de paiements directs ou d'aides à l'investissement adaptés. L'AIR effectuée (voir ch. 4.3) a également examiné les conséquences du contre-projet direct. Elle conclut que, dans le cas du contre-projet direct, les coûts additionnels se situeraient dans une fourchette de 260 à 390 millions de francs par an,

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si les exigences devaient être satisfaites à court terme. Les coûts supplémentaires effectifs seraient plus faibles avec un délai transitoire de 25 ans: ils ne seraient plus que de 25 à 40 millions de francs par an (voir tableau dans les annexes 2 et 3). Si le changement structurel devait se poursuivre comme jusqu'à présent, le nombre d'exploitations devrait encore diminuer au cours des 25 prochaines années. Et si le montant des paiements directs devait rester inchangé, cela signifierait davantage d'argent à la disposition des exploitations. Aujourd'hui, les paiements directs de la Confédération s'élèvent à 2,8 milliards de francs par an, dont environ 280 millions utilisés spécifiquement pour le bien-être animal. Sur cette somme, 200 millions sont affectés aux SRPA et 80 millions au SST. Dans ces circonstances, on peut partir du principe que le contre-projet direct pourra être réalisé sans coûts supplémentaires pour la Confédération si les paiements directs et les aides financières nécessaires sont transférés.

6.5.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Les autorités contrôlent aujourd'hui déjà le respect des normes de la protection des animaux. Une charge de travail supplémentaire dans ce domaine n'est donc pas attendue.

6.5.3

Conséquences économiques, sociales et environnementales

Comme indiqué aux ch. 4.3 et 6.5.1, une AIR a été réalisée afin d'estimer les effets de l'IEI et ceux du contre-projet direct. En cas d'acceptation du contre-projet, les mesures nécessaires à sa mise en oeuvre, que le Conseil fédéral proposera dans un message le moment venu, feront l'objet d'une AIR approfondie. La présente AIR donne une première estimation grossière des conséquences possibles du contre-projet direct.

Les mesures concrètes de mise en oeuvre du contre-projet n'étant pas arrêtées, il n'est pas possible pour l'heure d'en évaluer les effets en détail.

L'AIR a porté sur les aspects suivants: a.

Nécessité et possibilité d'une action de l'État

L'actuelle disposition constitutionnelle sur la protection des animaux (art. 80 Cst.)

date des années 70. À l'époque, les aspects du bien-être animal, de la liberté de mouvement et des sorties n'étaient pas des thèmes centraux. En 1999, lors de la révision totale de la Constitution, l'ancien art. 25bis a, certes, connu des modifications de nature rédactionnelle, mais il n'a pas changé sur le fond. La LPA en vigueur a mis la dignité et le bien-être de l'animal au centre et a suivi ainsi une approche bien plus moderne.

Cette approche tient compte aussi du fait que les animaux ne sont plus considérés comme des choses depuis 2003 (voir aussi ch. 6.4). Le contre-projet direct à l'IEI donne l'occasion d'adapter la disposition constitutionnelle en vigueur, qui est fondée

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sur une vision des années 70, aux attentes actuelles de la société sur la manière de traiter les animaux.

D'un point de vue économique, le bien-être animal est un bien public. La détention respectueuse des animaux de rente est dans l'ensemble une cause défendue par toute la société. Mais, comme pour tous les biens publics, il est possible de se comporter en profiteur, c'est-à-dire de profiter du bien-être animal sans contribuer à son financement. Les conséquences en sont une attention trop faible prêtée au bien-être des animaux et une négligence de ce bien-être par le marché. D'un point de vue économique, il y a une défaillance du marché avec le bien-être animal. L'objectif des mesures proposées par l'IEI et le contre-projet est d'améliorer cette situation.

b.

Autre solution possible

On peut s'en tenir à la disposition constitutionnelle existante et poursuivre le développement du droit sur la protection des animaux uniquement au niveau législatif. Cela aurait cependant pour conséquence que la législation s'éloignerait toujours plus de la disposition constitutionnelle au fur et à mesure que le temps passe, et que la disposition constitutionnelle refléterait de moins en moins les attentes de la société.

c.

Impacts sur certains groupes de la société

Consommateurs Les consommateurs disposeraient d'un choix encore plus vaste de produits agricoles obtenus de manière durable. La mise en oeuvre visée, neutre sur le plan des coûts, ne devrait pas entraîner une hausse des prix des produits indigènes. Les consommateurs obtiendraient dans ce cas pour le même argent des produits de plus haute valeur du point de vue de la protection des animaux.

Producteurs Les mesures du contre-projet direct à l'IEI touchent principalement les exploitations agricoles qui détiennent des animaux. Selon l'AIR, il faut s'attendre à des coûts supplémentaires de l'ordre de 25 à 40 millions de francs par an après l'expiration du délai transitoire.

Ces coûts supplémentaires seraient supportés principalement par les exploitations détenant des animaux qui ne participent pas encore aux programmes de bien-être animal SST et SRPA. Selon la catégorie d'animaux, l'impact sur les exploitations est différent (voir annexe 1, état 2019).

Les exploitations qui ne seraient pas en mesure de compenser les coûts supplémentaires et la perte de chiffre d'affaires en obtenant davantage de paiements directs ou en augmentant leurs prix de vente pourraient devoir se reconvertir ou fermer, même dans le cas du contre-projet direct.

Le Conseil fédéral souhaite cependant que la mise en oeuvre du contre-projet soit neutre sur le plan des coûts pour les producteurs (voir ch. 6.5.1). Par ailleurs, les programmes d'incitation adaptés aux nouvelles exigences légales minimales pourront être encore développés et offrir de nouvelles perspectives entrepreneuriales à de nombreuses exploitations.

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Importateurs Si les producteurs ne sont pas frappés par des coûts supplémentaires, les prix des produits indigènes ne devraient pas augmenter. Par conséquent, il ne devrait pas y avoir d'effets non plus sur les importateurs.

Entreprises de la construction Une grande partie des coûts est liée aux investissements pour les nouveaux locaux de stabulation. Ces investissements profiteront au secteur de la construction. Il convient toutefois de souligner qu'une grande partie des coûts d'investissement sont des coûts qui doivent être engagés de toute manière. Ces investissements ne sont pas additionnels mais font partie du cycle d'investissement régulier.

d.

Impacts sur l'économie

Le changement structurel dans la production et la commercialisation des produits agricoles ainsi que la taille des exploitations devraient continuer à évoluer au cours des 25 prochaines années. Si les fonds de la Confédération alloués aux paiements directs devaient rester constants, les paiements directs par exploitation devraient augmenter.

Cela devrait permettre en principe de maintenir les prix des produits agricoles indigènes au niveau actuel en tenant compte des évolutions technologiques de ces 25 prochaines années.

e.

Adéquation dans l'exécution

Le défi en matière d'application de la législation consiste à vérifier le respect des nouvelles exigences dans les exploitations. En Suisse, on peut recourir aux structures existantes pour réaliser ces vérifications.

f.

Effets sur l'environnement

Les données disponibles indiquent qu'une amélioration de la protection des animaux n'entraîne pas nécessairement une charge supplémentaire pour l'environnement. Ce qui est décisif, c'est la mise en oeuvre concrète des exigences dans les différentes unités d'élevage.

L'AIR montre que les émissions d'ammoniac pour toutes les catégories d'animaux ne varieront pas de manière significative par rapport à la situation actuelle. Dans le cas du contre-projet, il faut s'attendre à une augmentation d'environ 2,2 % pour un effectif d'animaux qui resterait identique.

Sur les quelque 42 500 tonnes d'émissions d'ammoniac NH3-N46 par an47, cela représente, dans le cas du contre-projet, une augmentation des émissions de 900 tonnes NH3-N. Si les effectifs d'animaux diminuent d'ici à la mise en oeuvre du contre-projet, les effets baisseraient d'autant. Indépendamment de l'acceptation du contre-projet, il est important de prévenir une augmentation des émissions à l'avenir par des mesures d'accompagnement spécifiques et de le vérifier par un monitoring.

46 47

NH3-N: quantité d'émission d'azote (pourcentage N) sous forme d'ammoniac (NH 3).

Voir AIR.

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Concernant les émissions de gaz hilarant et de méthane, l'élément déterminant est la taille de l'effectif d'animaux. Le contre-projet n'a pas de conséquences sur l'effectif d'animaux ni, par conséquent, sur les émissions de méthane et de gaz hilarant.

Le contre-projet fait augmenter les coûts environnementaux d'environ 40 millions de francs par an. Si l'on intègre les effets induits de toute manière, on obtient des coûts environnementaux de l'ordre de 5 millions de francs par an.

6.6

Comparaison entre le contre-projet direct et l'initiative

La comparaison du contre-projet direct et de l'IEI donne l'image suivante: ­

Le contre-projet direct et l'IEI visent tous deux une amélioration sensible du bien-être animal, qui est plus importante dans le cas de l'IEI que dans celui du contre-projet. Les coûts de mise en oeuvre du contre-projet ne représentent qu'une petite partie des coûts qu'occasionnerait la mise en oeuvre de l'IEI.

Concrètement, la valeur totale de la production de l'agriculture suisse est de 11,4 milliards de francs, et celle des seules denrées alimentaires d'origine animale est de 5,5 milliards de francs. Selon l'AIR, l'IEI augmenterait les coûts de production des aliments d'origine animale d'environ 5 à 20 %, le contreprojet d'environ 1 %.

­

Un élément essentiel du contre-projet direct est que l'augmentation du bienêtre animal ne doit pas se faire aux dépens des exploitations suisses (cf.

ch. 6.5.1). Remplir cette exigence semble réaliste du fait du changement structurel, qui réduira le nombre d'exploitations mais augmentera la taille de celles qui subsisteront, du fait des évolutions technologiques, de la réduction probable des effectifs d'animaux dans les 25 années à venir et de la possibilité de compenser dans une large mesure les coûts supplémentaires éventuels des producteurs en adaptant les aides aux investissements, le système des paiements directs et par d'autres mesures de la politique agricole. Les coûts de l'IEI étant plus importants que ceux du contre-projet, les producteurs pourraient devoir supporter des charges plus élevées en cas d'acceptation de l'IEI.

­

S'il n'occasionne pas ou peu de coûts supplémentaires aux producteurs, le contre-projet ne devrait pas provoquer de hausse ou tout au plus une faible hausse des prix des denrées alimentaires d'origine animale. En cas d'acceptation de l'initiative, en revanche, il faudrait s'attendre à une augmentation des prix des denrées alimentaires d'origine animale.

­

L'initiative est un peu meilleure que le contre-projet en ce qui concerne les effets sur l'environnement. Si les effectifs d'animaux sont réduits comme le demande l'IEI, les émissions diminueront de 2 à 3 % par rapport à aujourd'hui, tandis qu'ils augmenteront d'environ 2,2 % avec le contre-projet.

En outre, on peut partir du principe que la diminution du nombre d'animaux sera plus importante en cas d'acceptation de l'IEI qu'en cas d'acception du contre-projet direct. Par conséquent, la baisse des émissions de gaz à effet de serre (méthane par ex.) devrait être aussi plus importante.

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­

Si elle édictait des dispositions réglementant l'importation, comme le demande l'initiative, la Suisse ne respecterait plus ses engagements internationaux. Le contre-projet, en revanche, pourrait être mis en oeuvre tout en respectant ces engagements.

­

L'IEI prévoit que seules pourraient être importées les denrées alimentaires d'origine animale produites selon les principes du Cahier des charges de BioSuisse 2018 concernant la dignité des animaux (ou pour le moins produites selon des «équivalences appropriées»; cf. considérants concernant l'al. 2 des dispositions transitoires de l'initiative sous ch. 3.3). Contrôler cela serait difficile et coûteux, notamment pour les denrées alimentaires composées, et nécessiterait un travail administratif important.

­

L'inscription des standards de production de Bio Suisse dans la Constitution serait problématique pour plusieurs raisons: d'abord, des normes de production privées n'ont pas leur place dans la Constitution; ensuite, ces exigences sont trop détaillées et ne peuvent figurer au niveau normatif le plus élevé; enfin, ces règles sont aussi trop statiques et seront déjà dépassées au moment de leur entrée en vigueur au terme du délai transitoire.

6.7

Aspects juridiques

6.7.1

Constitutionnalité

Selon l'art. 139, al. 5, Cst., l'Assemblée fédérale peut opposer un contre-projet à une initiative populaire. Le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale un contre-projet direct à l'initiative en lui proposant de l'adopter et de le soumettre également au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de l'accepter. Si l'initiative n'est pas retirée, le contre-projet et l'initiative seront soumis simultanément au vote du peuple et des cantons selon la procédure fixée à l'art. 139b Cst.

6.7.2

Forme de l'acte à adopter

En vertu des art. 97, al. 1, let. a, et 101 LParl., le Conseil fédéral soumet le contreprojet à l'initiative à l'Assemblée fédérale sous la forme d'un arrêté fédéral.

6.7.3

Frein aux dépenses

Aux termes de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., les dispositions qui entraînent une nouvelle dépense unique de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs doivent être adoptées à la majorité des membres de chaque conseil. Ce sujet devra être traité dans le message du Conseil fédéral sur la mise en oeuvre du contre-projet en cas d'acceptation de celui-ci lors de la votation populaire. Il faudra au préalable soumettre les mesures concrètes à une AIR approfondie. C'est seulement après cette analyse qu'il sera possible d'évaluer les dépenses.

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6.7.4

Compatibilité du contre-projet avec les engagements internationaux de la Suisse

Contrairement à l'IEI, le contre-projet direct peut être mis en oeuvre en respectant les engagements internationaux, puisqu'il ne contient pas de dispositions demandant de réglementer les importations.

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Annexe 1

Statistique des contributions 2019 aux programmes SRPA et SST En chiffres Part sans contribution SRPA en 2019 Espèce

Part sans contribution SST en 2019

UGB

Exploitations*

148 476

4 899

Bovins

Chevaux

7 108

2 808

Chèvres

2 526

2 730

Bovins

Moutons

4 576

1 919

Porcs

77 484

3 070

Volaille

44 335

10 070

Cervidés

337

73

Bisons

128

7

284 970

5 440

Total

Espèce

UGB

Exploitations*

373 529

15 188

Chevaux

24 742

7 999

Chèvres

6 302

4 580

49 865

2 877

4 933

9 735

214

599

Toutes les espèces 459 585

16 291

Porcs Volaille Lapins

En pour-cent Part sans contribution SRPA en 2019 Espèce

Part sans contribution SST en 2019

UGB

Exploitations*

Bovins

16 %

14 %

Chevaux

20 %

Chèvres

21 %

Moutons

12 %

26 %

Porcs

49 %

Volaille Cervidés

Espèce

UGB

Exploitations*

Bovins

41 %

44 %

28 %

Chevaux

80 %

80 %

46 %

Chèvres

55 %

77 %

49 %

Porcs

32 %

46 %

58 %

78 %

Volaille

7%

76 %

25 %

29 %

Lapins

27 %

85 %

Bisons

35 %

44 %

Total

23 %

14 %

Toutes les espèces

39 %

42 %

* Base: exploitations détenant des animaux de l'espèce animale en question et ayant droit à des paiements directs Source: OFAG

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Annexe 2

Coûts annuels de l'initiative et du contre-projet48 Initiative Mesure

Espèce animale

Hébergement et soins respectueux des animaux et accès à l'air libre

Poules pondeuses

Exploitations concernées [Nombre]

Contre-projet

Coûts* [mio CHF/an]

Exploitations concernées [Nombre]

Coûts* [mio CHF/an]

faibles

100

faibles

d) 390­580

non pertinent

­

70­100 b) c)

3 000 2 900

30­50

Vaches laitières

440­660 b) c)

6 600 17 800

170­250

Bovins

210 ­ 10 b) c)

7 300 11 800

60­90

e)

260­390

a)

Poulets de chair Porcs

Total

n.a. 1 100­1 650

Effectifs d'animaux Poules maximaux f) pondeuses

900

g) 160­250

Poulets de chair Effectif max.

de 2,5 UGBF par ha

Toutes les espèces animales

Total

110 h) 2 400 resp. 200 900

Total coûts Coûts supportés de toute manière j) Total des coûts (après déduction des coûts à supporter de toute manière et en approchant du terme du délai transitoire)

n.a.

i)

250

520­610 1 620­2 260

260­390

50 %­75 %

90 %

410­1 130

n.a.

25­40

* Valeur supérieure: coûts estimés pour une mise en oeuvre immédiate. Valeur inférieure: coûts estimés après déduction d'un tiers des coûts en raison de divers facteurs d'influence.

n.a. non quantifiable.

a) Le nombre en question n'a pas pu être calculé, mais il est supérieur au nombre d'exploitations concernées par le contre-projet.

b) N'ont pas participé à ce jour à un programme SRPA, c) N'ont pas participé à ce jour à un programme SST.

d) Y compris le passage à des races de poulets à croissance lente.

48

Les calculs concernent les coûts supplémentaires avant l'expiration du délai transitoire de 25 ans. Auparavant, les coûts supplémentaires sont nettement plus faibles.

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e) Le nombre en question n'a pas été quantifié. Les valeurs individuelles ne peuvent être additionnées (recoupements avec des exploitations qui élèvent plusieurs espèces animales).

f) Des exploitations avicoles ouvrent de nouvelles exploitations pour que l'effectif d'animaux demeure inchangé.

g) Sur les 250 millions de francs, 160 millions sont destinés aux nouvelles méthodes de production et 90 millions aux investissements supplémentaires (informations à l'attention d'Aviforum).

h) Sur les 2400 exploitations, 200 sont fortement touchées.

i) Pertes de chiffre d'affaires suite à la réduction de l'effectif d'animaux.

j) Par coûts supportés de toute manière, on entend les coûts générés de toute façon (notamment coûts d'investissement dans un cycle d'investissement régulier).

Tableau INFRAS

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Annexe 3

Coûts annuels des exploitations et coûts environnementaux de l'initiative et du contre-projet49

Total des coûts exploitations Total des coûts environnementaux Net (arrondi)** Effets produits de toute manière* Net** (après déduction des coûts supportés de toute manière et en approchant du terme du délai transitoire)

Initiative

Contre-projet

Coûts [mio CHF/an]

Coûts [mio CHF/an]

de 1 620 à 2 260

260 ­ 390

de ­110 à ­280

40

de 1 340 à 2 150

de 300 à 430

50 %-75 %

90 %

de 340 à 1 080

de 30 à 45

* Par effets produits de toute manière, on entend les coûts occasionnés et les bénéfices générés de toute manière.

** Les fourchettes ont été déduites d'une logique minimale et d'une logique maximale.

Ex. 1620­280 millions = 1340 millions de francs. Si l'on soustrait de ce montant 75 % de coûts à supporter de toute manière, on obtient 340 millions de francs.

Tableau INFRAS

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Les calculs concernent les coûts supplémentaires avant l'expiration du délai transitoire de 25 ans. Auparavant, les coûts supplémentaires sont nettement plus faibles.

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