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21.055 Message relatif à l'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» et au contre-projet direct (arrêté fédéral relatif à la politique climatique) du 11 août 2021

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre l'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de la rejeter. Nous vous soumettons simultanément un contre-projet direct que nous vous proposons d'adopter et de soumettre lui aussi au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de l'accepter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

11 août 2021

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Guy Parmelin Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2021-2702

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Condensé L'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» exige que les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse nocives pour le climat soient réduites à zéro net d'ici à 2050 et que, à partir de cette date, il ne soit plus autorisé de mettre en circulation des carburants et des combustibles fossiles.

Le contre-projet direct poursuit, sur le principe, le même objectif que l'initiative. Il tient compte des besoins en matière de sécurité du pays, ainsi que de la viabilité économique et sociale et de la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques. Il exclut l'interdiction des agents énergétiques fossiles dès 2050.

Contenu de l'initiative L'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» a été déposée le 27 novembre 2019 munie de 113 125 signatures valables par l'Association suisse de protection du climat. Elle prévoit l'introduction d'un nouvel article constitutionnel relatif à la politique climatique (art. 74a de la Constitution [Cst.]) exigeant que, à partir de 2050, la Suisse n'émette pas davantage de gaz à effet de serre que ce que les puits de gaz à effet de serre sûrs sont capables de stocker durablement. En outre, elle vise à ce que, dès cette date, il ne soit plus possible de mettre en circulation en Suisse des carburants et des combustibles fossiles. Des exceptions ne seront admises qu'en cas d'applications pour lesquelles il n'existe pas d'autres solutions techniques.

L'initiative a vu le jour dans le contexte des discussions relatives à la révision totale de la loi sur le CO2, qui était alors débattue au Parlement. Le projet finalement adopté par ce dernier prévoyait une réduction considérable des émissions de gaz à effet de serre et aurait permis à la Suisse d'être en mesure d'atteindre l'objectif de zéro net.

Or le peuple a refusé la révision totale de la loi lors de la votation populaire du 13 juin 2021. Pour le Conseil fédéral, ce résultat ne remet pas en question l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050. En effet, il estime qu'il ne doit pas être interprété comme une opposition à la protection du climat, mais plutôt comme un rejet des mesures proposées. Le Conseil fédéral se prononcera le plus rapidement possible sur les prochaines étapes, en tenant compte du résultat de la votation et
des causes de celui-ci.

Avantages et inconvénients de l'initiative Sur le principe, l'initiative vise le même objectif que le Conseil fédéral, à savoir l'objectif découlant de l'Accord de Paris (accord sur le climat) de décembre 2015, consistant à réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Le Conseil fédéral estime que l'inscription de cet objectif dans la Cst. assure de manière précoce la sécurité de planification et d'investissement pour l'économie et les particuliers, aidant ainsi à orienter les investissements vers un meilleur respect du climat.

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Cependant, il estime que l'initiative va trop loin sur certains points. Il s'oppose en particulier à inscrire dans la Cst. l'interdiction des énergies fossiles dès 2050, au vu des incertitudes concernant les développements technologiques à long terme. L'initiative n'entend admettre des exceptions que sur la base d'aspects techniques. Le Conseil fédéral juge trop restrictif ce point de vue purement technique. Une réduction de la consommation d'énergie d'origine fossile ne devrait pas seulement tenir compte de la faisabilité technique, mais aussi de la viabilité économique et sociale et du maintien de la sécurité du pays. Le Conseil fédéral estime que le choix de l'instrument nécessaire à la mise en oeuvre de l'objectif de zéro émission nette doit rester ouvert.

Propositions du Conseil fédéral Eu égard à ce qui précède, le Conseil fédéral propose aux Chambres fédérales de recommander au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative pour les glaciers.

Il propose de lui opposer un contre-projet direct qui remplace l'interdiction générale des agents énergétiques fossiles par une obligation de réduire la consommation de ces derniers. L'armée, la police et les services de sauvetage doivent pouvoir recourir en cas de besoin à des énergies fossiles durant leurs interventions. Aussi le contreprojet direct prévoit-il de préciser dans le nouvel article constitutionnel que la sécurité du pays ne saurait être affectée. De plus, des exceptions doivent être possibles si les technologies de substitution ne sont pas disponibles en quantités suffisantes ou à des coûts économiquement viables.

Le contre-projet prévoit de mentionner dans la Cst., outre l'acceptabilité sociale, la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques. Ces zones en particulier sont généralement moins bien desservies par les transports publics.

En Suisse, le potentiel de stockage durable du CO2 dans des puits (p. ex. forêts, sols, gisements géologiques) est limité en raison de conditions techniques, économiques, écologiques et sociales. C'est pourquoi le contre-projet laisse ouverte la question de savoir si les émissions issues d'énergies fossiles demeurant en 2050 devront être compensées par des puits de carbone en Suisse ou à l'étranger.

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Table des matières Condensé

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1

Aspects formels et validité de l'initiative 1.1 Texte de l'initiative 1.2 Aboutissement et délais de traitement 1.3 Validité

6 6 7 7

2

Contexte 2.1 Contexte politique 2.2 Principales bases légales et politiques sectorielles en lien avec l'initiative 2.2.1 Loi sur le CO2 2.2.2 Politique énergétique 2.2.3 Politique des transports 2.2.4 Politique agricole 2.2.5 Politique forestière et industrie du bois 2.3 Politique climatique après 2030 2.3.1 Stratégie climatique à long terme 2.3.2 Rôle des technologies d'émission négative

7 7 9 9 10 11 14 15 15 15 17

3

Buts et contenu de l'initiative 3.1 Buts visés 3.2 Réglementation proposée 3.3 Commentaire et interprétation du texte de l'initiative

18 18 19 20

4

Appréciation de l'initiative 4.1 Appréciation des objectifs de l'initiative 4.2 Avantages et inconvénients de l'initiative 4.2.1 Zéro émission nette d'ici à 2050 et trajectoire de réduction 4.2.2 Compétences de la Confédération et des cantons en matière de politique climatique 4.2.3 Interdiction des énergies fossiles 4.2.4 Réduction des émissions de gaz à effet de serre et puits de carbone en Suisse et à l'étranger 4.2.5 Promotion de l'innovation et de la technologie 4.2.6 Compatibilité avec les obligations internationales

22 22 23 23

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Conclusions

28

6

Contre-projet direct 6.1 Texte du contre-projet direct 6.2 Procédure de consultation 6.2.1 Résultats de la procédure de consultation 6.2.2 Refonte de l'avant-projet 6.3 Présentation du contre-projet direct

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6.4 6.5

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Commentaire des dispositions Conséquences 6.5.1 Conséquences pour la Confédération 6.5.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.5.3 Conséquences pour l'économie 6.5.4 Conséquences sociales 6.5.5 Conséquences environnementales Aspects juridiques 6.6.1 Rapport avec d'autres dispositions constitutionnelles 6.6.2 Compatibilité du contre-projet direct avec les obligations internationales de la Suisse

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Glossaire

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Bibliographie

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Arrêté fédéral relatif à l'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» (Projet)

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Arrêté fédéral relatif à la politique climatique (contre-projet direct à l'initiative populaire «Pour un climat sain [initiative pour les glaciers]») (Projet)

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Message 1 Aspects formels et validité de l'initiative 1.1 Texte de l'initiative L'initiative populaire fédérale «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» a la teneur suivante: La Constitution1 est modifiée comme suit: Art. 74a

Politique climatique

Dans le cadre de leurs compétences, la Confédération et les cantons s'engagent, en Suisse et dans les relations internationales, pour limiter les risques et les effets du changement climatique.

1

Pour autant que des gaz à effet de serre d'origine humaine soient encore émis en Suisse, leurs effets sur le climat doivent être durablement neutralisés au plus tard dès 2050 par des puits de gaz à effet de serre sûrs.

2

Plus aucun carburant ni combustible fossiles ne sera mis en circulation en Suisse à partir de 2050. Des exceptions sont admissibles pour des applications pour lesquelles il n'existe pas de substitution technique et pour autant que des puits de gaz à effet de serre sûrs situés en Suisse en neutralisent durablement les effets sur le climat.

3

La politique climatique vise un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social et utilise en particulier des instruments de promotion de l'innovation et de la technologie.

4

Art. 197, ch. 122 12. Dispositions transitoires ad art. 74a (Politique climatique) La Confédération édicte la législation d'exécution de l'art. 74a dans un délai de cinq ans à compter de l'acceptation dudit article par le peuple et les cantons.

1

La loi détermine la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2050. Elle arrête des objectifs intermédiaires qui conduisent au moins à une réduction linéaire et règle les instruments nécessaires au respect de la trajectoire de réduction.

2

1 2

RS 101 Le numéro définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

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1.2 Aboutissement et délais de traitement L'initiative pour les glaciers a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 16 avril 2019, et elle a été déposée le 27 novembre 2019 avec le nombre requis de signatures. Par décision du 17 décembre 20193, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait recueilli 113 125 signatures valables et qu'elle avait donc abouti.

L'initiative est présentée sous la forme d'un projet rédigé. Le Conseil fédéral lui oppose un contre-projet direct. Conformément à l'art. 97, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)4 et à l'art. 1, al. 1, de l'ordonnance du 20 mars 2020 sur la suspension des délais applicables aux initiatives populaires fédérales et aux demandes de référendum au niveau fédéral5, le Conseil fédéral a jusqu'au 7 août 2021 pour soumettre à l'Assemblée fédérale un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message. Conformément à l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale a jusqu'au 7 août 2022 pour adopter la recommandation de vote qu'elle présentera au peuple et aux cantons. Elle peut proroger ce délai d'un an si l'un des conseils a pris une décision sur un contre-projet ou un projet d'acte en rapport étroit avec l'initiative populaire (art. 105, al. 1, LParl).

1.3 Validité L'initiative remplit les conditions de validité selon l'art. 139, al. 3, de la Constitution (Cst.): a.

elle obéit au principe de l'unité de la forme, puisqu'elle revêt entièrement la forme d'un projet rédigé;

b.

elle obéit au principe de l'unité de la matière, puisqu'il existe un rapport intrinsèque entre ses différentes parties;

c.

elle obéit au principe de la conformité aux règles impératives du droit international, puisqu'elle ne contrevient à aucune d'elles.

2 Contexte 2.1 Contexte politique L'initiative a été déposée en novembre 2019 par l'Association suisse pour la protection du climat. Elle vise à inscrire dans la Cst. l'objectif découlant de l'Accord de Paris (accord sur le climat) du 12 décembre 20156, consistant à réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Dès 2050, la Suisse ne devra donc plus émettre davantage de gaz à effet de serre que ce qui peut être retiré de l'atmosphère

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par des puits*7 sûrs et stocké durablement. En outre, l'initiative vise à ce que, dès cette date, il ne soit plus possible de mettre en circulation en Suisse des carburants et des combustibles fossiles. Elle n'admet des exceptions qu'en cas d'applications pour lesquelles il n'existe pas d'autres solutions techniques.

La Suisse s'engage au niveau international pour la protection du climat. Après l'approbation de l'accord sur le climat par l'Assemblée fédérale le 16 juin 2017, la Suisse a déposé son instrument de ratification le 6 octobre 2017, s'engageant ainsi à atteindre les trois objectifs définis à l'art. 2, par. 1, de cet accord: premièrement contenir le réchauffement planétaire nettement en dessous de 2 °C ­ une hausse maximale de 1,5 °C étant visée ­ par rapport à l'ère préindustrielle, deuxièmement renforcer la capacité d'adaptation aux changements climatiques et troisièmement orienter les flux financiers vers un développement respectueux du climat. Selon l'art. 4, par. 1, de l'accord, la limitation de l'élévation de la température à 1,5 °C nécessite une compensation des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'ici la seconde moitié du siècle grâce aux prestations de puits de carbone*, ceci en tenant compte du principe d'équité et des meilleures connaissances scientifiques disponibles.

Lors de la Conférence sur le climat qui s'est tenue à Paris fin 2015, la communauté internationale a chargé le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) d'étudier la portée d'une limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle. Le rapport spécial publié en octobre 2018 indique clairement qu'il convient d'atteindre le bilan équilibré à zéro émission nette beaucoup plus tôt: pour les émissions de CO2 dans le monde à l'horizon 2050, avec une réduction simultanée et rapide des autres émissions de gaz à effet de serre tels que le méthane, le protoxyde d'azote et divers gaz synthétiques8. La trajectoire des émissions mondiales de CO2 nettes devra ensuite être négative d'ici la fin du siècle dans la plupart des cas étudiés; en somme, l'élimination permanente de CO2 de l'atmosphère (lesdites «émissions négatives»*, cf. ch. 2.3.2) devra alors être supérieure aux émissions de CO2. Se fondant sur ces constatations, le Conseil fédéral a décidé, le 28
août 2019, de réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse d'ici à 2050. La Suisse a déposé officiellement cet objectif, en plus de ceux qu'elle s'est fixés pour 2030, dans le cadre des négociations de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)9.

La Suisse met en oeuvre son engagement international principalement au moyen de la loi du 23 décembre 2011 sur le CO210. L'art. 4, al. 2, de cette loi fait référence aux mesures contribuant à l'objectif de réduction prévues dans d'autres actes législatifs,

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Les termes suivis d'un astérisque sont expliqués dans le glossaire.

Des informations et statistiques détaillées sur les émissions de gaz à effet de serre sont disponibles sous www.bafu.admin.ch > Thèmes > Thème Climat > Données, indicateurs et cartes > Données > Inventaire des gaz à effet de serre.

Switzerland's information necessary for clarity, transparency and understanding in accordance with decision 1/CP.21 of its updated and enhanced nationally determined contribution (NDC) under the Paris Agreement (2021­2030). Disponible sous www.bafu.admin.ch > Thèmes > Thème Climat > Informations pour spécialistes > Affaires internationales > Soumissions de la Suisse > 2020.

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notamment dans les domaines de l'environnement, de l'énergie, des déchets, des finances, de l'économie agricole et forestière, de l'industrie du bois, de la circulation routière et de l'imposition des huiles minérales.

2.2 Principales bases légales et politiques sectorielles en lien avec l'initiative 2.2.1 Loi sur le CO2 La loi sur le CO2 constitue la base légale pour mettre en oeuvre l'engagement international de la Suisse. Le 25 septembre 2020, le Parlement a adopté une révision totale de la loi sur le CO211 dans le but de donner une assise juridique aux objectifs et mesures jusqu'en 2030. Le projet de révision prévoyait de développer la combinaison de mesures existante de sorte que les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse puissent dans l'ensemble être réduites d'au moins 50 % par rapport à 1990, au moins trois quarts de cette réduction devant être atteints par des mesures réalisées en Suisse. L'article définissant le but de la loi reflétait les objectifs de l'accord sur le climat. Ainsi, la loi devait également avoir pour objectif de contribuer à ramener les émissions de gaz à effet de serre à «une quantité qui ne dépasse pas la capacité d'absorption des puits de carbone»12. Toutefois, cet objectif de zéro émission nette n'était pas lié à une année particulière.

L'accord sur le climat exige que les Parties soumettent au Secrétariat des Nations Unies sur les changements climatiques, tous les cinq ans, un objectif de réduction plus ambitieux, soit au plus tard en 2025 pour la période postérieure à 203013. En ce qui concerne les objectifs de réduction des émissions, il convient de noter que, conformément aux réglementations internationales, seul le transport aérien national est inclus dans l'objectif de réduction fixé dans la loi sur le CO2. Les émissions générées par le transport aérien international ­ tout comme par le transport maritime international ­ sont présentées séparément dans l'inventaire des gaz à effet de serre par lequel la Suisse rend compte chaque année de l'évolution de ses émissions au Secrétariat des Nations Unies sur les changements climatiques.

En raison de l'aboutissement d'un référendum, la nouvelle loi sur le CO2 a été soumise le 13 juin 2021 au vote du peuple, qui l'a refusée à 51,6 % des voix. Si la loi sur le CO2 et l'objectif climatique international de la Suisse ­ réduction des émissions de 50 % par rapport à 1990 ­ ne sont en soi pas limités dans le temps, la ratification de l'accord sur le climat demeure contraignante sur le plan politique. Toutefois, sans révision de
la loi sur le CO2, il manque un objectif de réduction national mesurable pour la période postérieure à 2021 et, ainsi, une assise juridique pour les mesures telles que l'obligation de compenser les émissions de CO2. En outre, les entreprises ne peuvent plus être exemptées de la taxe sur le CO2.

11 12 13

FF 2020 7607 Art. 1, let. b, de la loi sur le CO2.

Art. 4, par. 9, de l'accord sur le climat.

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La même situation prévalait en 2020 déjà pour certains instruments, qui arrivaient à échéance en 2021. Par conséquent, la loi sur le CO2 avait été révisée au 1er janvier 2021 sur la base d'une initiative parlementaire déposée par le conseiller aux États Thierry Burkart14, afin de prolonger ces instruments jusqu'à fin 2021 à titre de réglementation transitoire.

Pour combler une nouvelle lacune réglementaire imminente et garantir la sécurité juridique, la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-N ) a déposé, lors de sa séance du 21 juin 2021, une initiative parlementaire15. Elle souhaite vise à ce que l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre réalisé en Suisse prévu dans la loi sur le CO2 en vigueur soit maintenu jusqu'à la fin de l'année 2024, tout comme l'obligation de compenser les émissions de CO2, la possibilité d'exemption de la taxe sur le CO2 et les allègements de l'impôt sur les huiles minérales prélevé sur les biocarburants. Si son homologue du Conseil des États donne suite à cette initiative lors de ses séances des 12 et 13 août 2021, un avant-projet de révision partielle de la loi sur le CO2 pourra être débattu.

La décision du Souverain concernant la nouvelle loi sur le CO2 ne constitue pas, de l'avis du Conseil fédéral, une opposition à une politique énergétique et climatique durable; il s'agit plutôt d'un rejet du projet proposé. Ce non implique que les mesures existantes ne seront pas, comme cela était proposé, renforcées ou développées. Seules certaines mesures continueront d'être mises en oeuvre; selon les estimations, elles pourront permettre une réduction des émissions de 23 % d'ici à 2030.

Pour poser les jalons nécessaires à l'atteinte de l'objectif du zéro net malgré la modification des conditions-cadres, il est important, dans un premier temps, que les instruments de la loi sur le CO2 en vigueur qui seront poursuivis soient mis en oeuvre de manière conséquente et de façon à avoir un impact sur le climat. En outre, le Conseil fédéral se prononcera le plus rapidement possible, après avoir analysé le résultat de la votation du 13 juin 2021 et les causes de ce rejet, sur un nouveau projet pour développer la politique climatique. En effet, il juge qu'il est nécessaire, même après ce refus, d'agir pour que la Suisse puisse atteindre ses objectifs climatiques et en particulier celui de zéro émission nette d'ici à 2050.

2.2.2 Politique énergétique La consommation d'agents énergétiques fossiles est responsable de près des trois quarts des émissions de gaz à effet de serre en Suisse. Les politiques énergétique et climatique sont donc étroitement liées. La Stratégie énergétique 2050 contribue de manière importante aux objectifs de la politique climatique. Elle a comme objectif un approvisionnement énergétique respectueux de l'environnement, garantissant la sécurité d'approvisionnement. Dans le secteur de l'électricité, la stratégie vise une baisse

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Iv. pa. 17.405 Burkart «Reconduire les allègements fiscaux de durée limitée accordés pour le gaz naturel, le gaz liquide et les biocarburants».

Iv. pa 21.477 CEATE-N «Prolongation de l'objectif de réduction de la loi sur le CO2».

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de la consommation par habitant et un développement notable de la production d'énergies renouvelables (force hydraulique, photovoltaïque, biomasse, géothermie et énergie éolienne). Elle prévoit d'accroître l'efficacité et d'utiliser largement les énergies renouvelables plutôt que les énergies fossiles dans les secteurs du chauffage et de la mobilité. Dans le cadre de la Stratégie énergétique 2050, le peuple a accepté, le 21 mai 2017, la nouvelle loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie (LEne)16.

La Stratégie énergétique 2050 devra être développée pour que l'objectif de réduction à zéro net les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse puisse être atteint d'ici à 2050. Il s'agira en particulier de rapidement électrifier les secteurs des transports et du chauffage. Il est donc impératif de développer à temps la production d'électricité issue d'énergies renouvelables et les mesures spécifiques visant à renforcer la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Pour y parvenir, la LEne et la loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité (LApEI)17 devront être modifiées en conséquence. Le Conseil fédéral propose de procéder à ces deux révisions dans le cadre de la loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables et a adopté, le 18 juin 2021, le message correspondant18.

La révision proposée vise à prolonger les contributions d'encouragement des énergies renouvelables jusqu'en 2035 et à les aménager de manière à favoriser la compétitivité.

Par ailleurs, les valeurs indicatives relatives à la production d'électricité d'origine hydraulique et issue d'autres énergies renouvelables pour 2035 doivent être augmentées et transformées en valeurs cibles contraignantes. Par ailleurs, des valeurs cibles devront être définies pour l'année 2050. Avec l'ouverture du marché de l'électricité pour l'ensemble des consommateurs prévue dans la révision de la LApEI, le Conseil fédéral entend également mieux intégrer les énergies renouvelables dans le marché et renforcer la production décentralisée d'électricité. L'ouverture du marché permettra l'élaboration, s'agissant des énergies renouvelables, de nouveaux modèles d'affaires (p. ex. les communautés d'énergie) qui ne sont pas admis dans une situation de monopole ou pour lesquels les incitations à l'innovation
manquaient jusqu'ici. Ce projet comporte également des éléments importants visant à renforcer la sécurité de l'approvisionnement en électricité (soutien à l'augmentation des capacités de production en hiver, réserve d'énergie) ainsi que des améliorations au niveau du réseau. Ces dernières sont particulièrement importantes pour garantir une intégration sûre et efficace du nombre croissant d'installations de production d'électricité à partir de sources renouvelables dans le système global.

2.2.3 Politique des transports Les transports génèrent plus d'un tiers des émissions de gaz à effet de serre de la Suisse. Le choix et le taux d'occupation du mode de transport, la technologie de propulsion, l'efficacité énergétique des véhicules, les kilomètres parcourus et la source d'énergie utilisée sont déterminants pour l'évolution des émissions.

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RS 730.0 RS 734.7 FF 2021 1666

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S'agissant du transport routier, la plupart des véhicules fonctionnent à l'essence ou au diesel, qui sont des carburants fossiles. Pour que le transport routier n'émette plus, à quelques exceptions près, aucune émission de gaz à effet de serre en 2050, les efforts de réduction doivent être intensifiés davantage que dans les autres secteurs. À cette fin, les carburants fossiles doivent être remplacés le plus rapidement possible par des technologies de propulsion ne générant pas d'émissions.

Afin de soutenir l'électrification des transports, la Confédération a signé le 18 décembre 2018, conjointement avec les cantons et les communes ainsi que divers représentants de la branche, une feuille de route commune qui vise une augmentation de la part des véhicules électriques dans les nouvelles immatriculations de voitures de tourisme. Ces dernières années, les nouvelles immatriculations de voitures électriques (à batterie et hybrides rechargeables) ont augmenté, atteignant un nouveau record en Suisse en 2020 avec une part de 14,3 %. S'agissant des infrastructures, la Confédération soutient l'extension du réseau de stations de recharge. La Confédération et les cantons font progresser la mise en place d'un réseau de stations de recharge rapide le long des routes nationales.

L'électrification croissante du transport routier requiert une nouvelle approche du financement des infrastructures de transport. Si les ventes d'essence et de diesel diminuent en Suisse, les recettes provenant de l'impôt sur les huiles minérales baisseront également. Le 13 décembre 2019, le Conseil fédéral a donc chargé le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) et le Département fédéral des finances d'élaborer un concept pour assurer le financement à long terme des infrastructures de transport. Il s'agira de remplacer les impôts et les taxes existants par une redevance liée aux prestations. En outre, il conviendra de créer les bases juridiques nécessaires à la mise en place de projets pilotes visant une tarification de la mobilité différenciée en fonction du lieu et de l'heure, dans le but d'influencer les comportements au moyen des prix.

Outre le recours à des systèmes de propulsion prometteurs, le passage à des moyens de transport à faible émission revêt une importance
cruciale. Les transports publics sont efficaces sur le plan énergétique et génèrent peu d'émission. Ils sont soutenus par la Confédération, les cantons et les communes, la première finançant la maintenance et l'extension par étapes de l'infrastructure ferroviaire par le biais du fonds d'infrastructures ferroviaires (FIF) en vertu de la loi fédérale du 21 juin 2013 sur le financement et l'aménagement de l'infrastructure ferroviaire19. En outre, le rapport du Conseil fédéral du 12 mars 2021 en réponse au postulat 19.3000, déposé par la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national, formule d'autres possibilités pour soutenir le recours accru à des bus propulsés par des énergies non fossiles dans les transports publics routiers20.

Dans le domaine de la mobilité douce, la population suisse s'est exprimée en faveur de la revalorisation du trafic cycliste, en acceptant en 2018 l'arrêté fédéral concernant

19 20

RO 2015 651 Po. 19.3000 CTT-CN «Encourager le passage des véhicules de transport public aux énergies propres»; www.parlement.ch > 19.3000 > Rapport en réponse à l'intervention parlementaire.

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les voies cyclables et les chemins et sentiers pédestres21. Le 19 mai 2021, le Conseil fédéral a soumis au Parlement le message concernant la loi sur les voies cyclables, grâce à laquelle il entend améliorer la qualité et la sécurité des voies cyclables22.

Les nouvelles formes de travail, telles que le télétravail, et la coordination entre l'urbanisation et les transports contribueront aussi au transfert et à la limitation du trafic.

Un développement territorial correspondant aux infrastructures des transports publics permettra d'encourager une mobilité générant moins de CO2. Dans ce contexte, le plan sectoriel des transports révisé23 fixera le cadre à long terme pour le développement du système global des transports en Suisse et, ainsi, pour la stratégie du Conseil fédéral en matière de politique des transports. Les perspectives d'évolution du transport24, dans le cadre desquelles la Confédération calcule les évolutions du trafic jusqu'en 2040 et 2050 sous la forme de scénarios, serviront de base de planification.

S'agissant du transport de marchandises, la politique de la Suisse de transfert du trafic joue un rôle important. Le transport routier transalpin a ainsi atteint en 2019 son niveau le plus bas depuis deux décennies. À noter que l'objectif de transfert de 650 000 courses par an n'a jusqu'à présent jamais été atteint. Souhaitant renforcer la politique de transfert du trafic, le Conseil fédéral a proposé au Parlement, dans son message du 13 novembre 201925, de proroger et d'augmenter le plafond de dépenses pour promouvoir le transport transalpin non accompagné. Le Parlement a décidé de prolonger la durée des indemnités d'exploitation jusqu'en 203026. Par ailleurs, le prix du sillon est plus bas en 2021. Le transport ferroviaire sera dès lors plus attrayant non seulement en transit mais aussi sur l'ensemble du territoire. Afin de maintenir l'effet de transfert de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP), le Conseil fédéral déclassera à partir de l'été 2021, de la catégorie moyenne à la catégorie la plus chère, les véhicules des classes d'émission EURO IV et V. Ces derniers représentaient à fin 2020, selon le système de taxation de la RPLP exploité par l'Administration fédérale des douanes, 16,6 % du trafic de marchandises sur les routes suisses. Les camions
à propulsion électrique (à batterie ou à pile à combustible à hydrogène) sont actuellement exemptés de la RPLP. Dans son rapport sur le transfert du trafic 2019, le Conseil fédéral relève en outre que les options possibles pour l'orientation à long terme de la RPLP devront être examinées.

En outre, avec la loi fédérale sur le transport souterrain de marchandises, le Conseil fédéral veut créer les conditions qui permettent la réalisation du projet Cargo sous terrain, lancé par l'économie privée. Lors de sa séance du 28 octobre 2020, il a adopté

21 22 23

24 25

26

RO 2019 525 FF 2021 1260 www.are.admin.ch > Développement et aménagement du territoire > Stratégie et planification > Conceptions et plans sectoriels > Plans sectoriels de la Confédération > Transports.

www.are.admin.ch > Mobilité > Bases et données > Perspectives d'évolution du transport 2040.

19.064 Message du 13 novembre 2019 concernant l'arrêté fédéral portant augmentation et prorogation du plafond de dépenses pour promouvoir le trafic ferroviaire de marchandises à travers les Alpes; FF 2019 7915.

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le message à l'intention du Parlement27. Le projet prévoit un tunnel souterrain à triple voie reliant d'importants centres logistiques, dans lequel des marchandises seront transportées et intégrées dans le système à certains points d'accès ou le quitteront de manière entièrement automatisée. La réalisation de Cargo sous terrain permettra de réduire la densité du trafic ainsi que les émissions de polluants et de gaz à effet de serre.

Le transport aérien représente un cas spécial, car seul le transport aérien national est inclus dans l'objectif de réduction fixé dans la loi sur le CO2 (cf. ch. 2.2.1). Le transport aérien intra-européen est désormais inclus dans le système d'échange de quotas d'émission (SEQE) de la Suisse en raison du couplage avec le SEQE de l'UE28. De ce fait, une mesure de réduction des émissions de CO2 des vols intérieurs et des vols de la Suisse vers l'Espace économique européen est en vigueur depuis 2020. La Suisse participe également au système de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), qui vise à atteindre une croissance neutre en CO2 dans l'aviation civile à partir de 2021 avec le régime de compensation et de réduction de carbone pour l'aviation internationale (CORSIA, Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation). La réduction des émissions générées par le transport aérien international qui en résultera contribuera à la réalisation du but défini dans la loi sur le CO2, à savoir freiner le réchauffement climatique.

2.2.4 Politique agricole Le secteur de l'agriculture a généré en 2019 14 % des émissions de gaz à effet de serre en Suisse. En outre, il influence le bilan des gaz à effet de serre des sols agricoles. Ces émissions, qui s'élèvent actuellement à plusieurs centaines de milliers de tonnes, doivent aussi être compensées à long terme dans la perspective de la limitation du réchauffement mondial visée à l'art. 2 de l'accord sur le climat.

Le Conseil fédéral a adopté le 12 février 2020 le message relatif à l'évolution future de la politique agricole à partir de 202229. Il a posé des jalons en vue de réduire les émissions de méthane et de protoxyde d'azote dans le secteur de l'agriculture. Le 16 mars 2021, le Parlement a toutefois suspendu les travaux sur la politique agricole à partir de 2022 et chargé le Conseil fédéral de fournir d'ici à 2022 des indications complémentaires dans un rapport en réponse à un postulat30. Cette décision retarde pour le moment le développement du cadre politique que le Conseil fédéral souhaite mettre en place pour donner une orientation plus écologique à l'agriculture.

27 28

29 30

20.081 Message du 28 octobre 2020 concernant la loi fédérale sur le transport souterrain de marchandises; FF 2020 8537.

Accord du 23 novembre 2017 entre la Confédération suisse et l'Union européenne sur le couplage de leurs systèmes d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre; RS 0.814.011.268.

20.022 Message du Conseil fédéral du 12 février 2020 relatif à l'évolution future de la Politique agricole à partir de 2022 (PA22+); FF 2020 3851.

Po. 20.3931 CER-CE «Orientation future de la politique agricole».

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2.2.5 Politique forestière et industrie du bois Les forêts et la gestion forestière devront contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre par un recours accru à la matière première renouvelable qu'est le bois et par l'utilisation de celui-ci en lieu et place d'agents énergétiques ou de matériaux de construction émettant d'importantes quantités de CO231. Il est possible d'optimiser à long terme le bilan de CO2 en gérant les forêts de manière à faire pousser autant de bois que possible chaque année et en l'utilisant comme matériau de construction en premier lieu, puis comme agent énergétique. La fabrication et l'utilisation de produits en bois permettent en effet d'éviter les émissions de CO2 résultant de la transformation d'autres matières premières. Par ailleurs, une réutilisation du bois usagé et des déchets de bois comme agent énergétique contribue à la réduction des émissions liées à la combustion d'énergies fossiles (utilisation en cascade).

La forêt doit en outre être conservée en tant qu'écosystème capable d'adaptation afin qu'elle puisse continuer à fournir ses prestations multiples de protection contre les risques naturels, de fournisseur de bois, d'espace de détente, d'habitat pour les animaux et les plantes et de producteur d'eau potable dans des conditions climatiques en évolution.

Les forêts et les sols font office de puits de CO2 lorsqu'ils absorbent plus de carbone qu'ils n'en rejettent. Si le carbone stocké est à nouveau libéré, par exemple lorsque les arbres meurent à la suite d'une tempête ou d'une infestation par des parasites, les puits deviennent des sources de CO2 et grèvent le bilan des gaz à effet de serre. Lorsque le bois est récolté dans la forêt et transformé, le carbone reste stocké, du moins pendant la durée de vie du produit. Conformément à la réglementation internationale, seule la différence entre le bilan de CO2 du secteur forestier et de l'industrie du bois et une valeur de référence (forest reference level) peut être imputée à l'objectif de réduction. Cette valeur correspond à la pratique adoptée jusqu'ici en matière de gestion forestière.

2.3 Politique climatique après 2030 2.3.1 Stratégie climatique à long terme Parallèlement à la décision prise concernant l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, le Conseil fédéral a chargé le DETEC d'élaborer la stratégie climatique à long terme qui découle de cet objectif32. Cette stratégie a été adoptée par le Conseil fédéral le 27 janvier 2021, puis soumise par la Suisse au Secrétariat des Nations Unies sur les changements climatiques, afin qu'elle puisse remplir son obligation en tant que Partie à l'accord sur le climat (art. 4, par. 19).

31 32

Cf. Office fédéral de l'environnement (OFEV) 2013.

Rapport du Conseil fédéral du 27 janvier 2021 sur la stratégique climatique à long terme de la Suisse, disponible sous www.bafu.admin.ch > Thèmes > Thème Climat > Informations pour spécialistes > Réduction des émissions > Objectifs de réduction > Objectif 2050.

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La stratégie climatique à long terme met en évidence l'orientation générale qu'il convient de suivre dans les différents secteurs en matière d'émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Elle énonce, dans un premier temps, dix principes stratégiques transversaux qui sont déterminants pour atteindre l'objectif du zéro net et qui guideront et détermineront l'action de la Suisse en matière de politique climatique dans les années à venir.

1.

La Suisse saisit les possibilités offertes par une transition cohérente vers le zéro net.

2.

La Suisse assume sa responsabilité en matière de politique climatique.

3.

La réduction des émissions intérieures est privilégiée.

4.

Les émissions sont réduites tout au long des chaînes de valeur ajoutée.

5.

Tous les agents énergétiques sont utilisés de manière parcimonieuse et ciblée en tenant compte des possibilités d'application optimales.

6.

Dans tous les domaines liés au climat, la Confédération et les cantons axent leurs activités de planification en vue de l'obtention du zéro net.

7.

La transition vers le zéro net s'effectue de manière socialement acceptable.

8.

La transition vers le zéro net s'effectue de manière économiquement supportable.

9.

La transition vers le zéro net s'accompagne d'une amélioration de la qualité de l'environnement.

10. La stratégie climatique à long terme se fonde sur le principe de l'ouverture à la technologie.

La stratégie climatique définit des objectifs stratégiques pour les différents secteurs, présente l'évolution possible des émissions jusqu'en 2050 et détermine les émissions négatives probablement nécessaires pour compenser les émissions résiduelles. Elle se fonde sur les perspectives énergétiques 2050+33, qui analysent comment développer le système énergétique de façon compatible avec l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à zéro net d'ici à 2050.

Réduction des émissions d'ici à 2050 Sur la base des perspectives énergétiques 2050+, le Conseil fédéral part du principe, dans sa stratégie climatique à long terme, que les secteurs du bâtiment et des transports seront à même de réduire leurs émissions fossiles à zéro net d'ici à 2050. Dans l'industrie aussi, une élimination quasi totale des émissions liées à l'énergie sera possible.

Le potentiel de réduction de l'agriculture et de l'industrie alimentaire devra être exploité. Enfin, le transport aérien international devra également contribuer à la réalisation des objectifs, notamment en utilisant des carburants renouvelables et durables et des systèmes alternatifs de propulsion. Selon la stratégie climatique à long terme, le remplacement de combustibles et carburants fossiles et l'accroissement de l'efficacité permettra globalement de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 à

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Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020).

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quelque 11,8 millions de tonnes d'équivalents CO2 (éq.-CO2)34. Cette baisse correspond à une réduction de 79 % par rapport à la situation de 2018, en tenant compte du transport aérien international.

Des émissions résiduelles difficiles à éviter demeureront toutefois, en particulier celles provenant de l'incinération des déchets, de la production agricole de denrées alimentaires et de certains procédés industriels. La production de ciment par exemple libère des émissions dites géogènes, c'est-à-dire issues d'un procédé chimique. Pour éliminer ces émissions résiduelles et produire à long terme des émissions négatives, il est nécessaire de recourir à des technologies de captage et de stockage du CO2 (CSC*) directement au niveau des installations ainsi qu'à des technologies d'émission négative.

D'après les perspectives énergétiques 2050+, les technologies CSC pourront commencer à contribuer à la réduction des émissions, dès 2035 dans les usines d'incinération des ordures ménagères (UIOM) et dès 2040 aussi au niveau de la production de ciment. Ces contributions augmenteront rapidement après 2040. En 2050, les technologies CSC permettront d'éviter environ 5 millions de tonnes d'éq.-CO2 issues de sources fossiles et géogènes. Le remplacement de combustibles fossiles et l'accroissement de l'efficacité dans les autres secteurs amèneront une réduction totale des gaz à effet de serre d'environ 90 % par rapport à 1990.

Les émissions résiduelles de gaz à effet de serre, soit au total près de 7 millions de tonnes d'éq.-CO2, devront être durablement retirées de l'atmosphère au moyen des technologies d'émission négative35. Si le transport aérien international devait encore générer des émissions résiduelles en 2050, le besoin en émissions négatives augmenterait d'autant.

2.3.2 Rôle des technologies d'émission négative Les technologies d'émission négative* sont des procédés élaborés par l'être humain pour retirer du CO2 de l'atmosphère et le stocker durablement pendant plusieurs décennies, idéalement même plusieurs siècles. On distingue deux formes principales de technologies d'émission négative: premièrement, les approches naturelles, grâce auxquelles le CO2 est absorbé par la biomasse de manière ciblée (p. ex. en augmentant son absorption par les arbres ou les sols) et, deuxièmement, les approches techniques, visant par exemple à retirer directement le CO2 présent dans l'air ambiant au moyen de filtres mécaniques en vue de le stocker ailleurs (souvent dans le sous-sol). Les technologies d'émission négative visent donc à créer des puits stockant le CO2 de manière durable. Les technologies CSC et celles qui permettent de capter le CO2 dans une installation puis de l'utiliser comme matière première (captage, utilisation et stockage du CO2) peuvent générer des émissions négatives à certaines conditions. Tel peut être le cas, par exemple, dans le cadre de l'utilisation de technologies CSC dans 34 35

Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020), p. 80.

Concernant la composition des éventuelles émissions résiduelles, se référer au rapport du Conseil fédéral du 27 janvier 2021 sur la stratégie climatique à long terme de la Suisse, p. 55. Disponible sous www.bafu.admin.ch > Thèmes > Thème Climat > Informations pour spécialistes > Réduction des émissions > Objectifs de réduction > Objectif 2050.

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les UIOM, étant donné qu'environ 50 % des déchets incinérés aujourd'hui sont d'origine biogène.

Le rapport du Conseil fédéral du 2 septembre 2020 en réponse au postulat 18.421136, déposée par la conseillère aux États Adèle Thorens Goumaz, souligne l'importance des émissions négatives, montre comment évaluer du point de vue climatique les approches envisageables pour obtenir des émissions négatives et explique la nécessité de poursuivre les travaux dans ce domaine.

En Suisse, le potentiel théorique à long terme des prestations de puits de carbone est actuellement estimé à environ 6 millions de tonnes de CO2 par an37. Cependant, le potentiel pouvant effectivement être réalisé durablement est probablement beaucoup plus faible et ne peut pas encore être quantifié avec précision. Il dépend du développement des technologies, des conditions-cadres économiques et législatives, d'aspects écologiques et de l'acceptation sur le plan social. Ainsi, le potentiel de stockage du CO2 dans des puits géologiques existerait en théorie principalement sur le Plateau.

Faute d'essais sur le terrain, le potentiel n'est en fait pas connu. Après une période allant de quelques à plusieurs décennies, les puits de carbone* dans la forêt, le bois et le sol atteindront déjà un niveau qui n'admettra plus de stockage supplémentaire. Dans certains cas, ils pourraient même redevenir des sources d'émission de CO2 (cf. ch.

2.2.5). Pour générer des émissions négatives, il faut pouvoir garantir à long terme la prestation de puits, une fois celui-ci arrivé à saturation.

Les technologies d'émission négative doivent donc impérativement être réservées aux émissions difficiles à éviter, compte tenu des potentiels de stockage limités en Suisse, des risques possibles et d'autres défis à relever comme le transport du CO2 capté, parfois sur de longues distances. Afin que ces technologies puissent jouer ce rôle à moyen ou à long terme, il faut toutefois créer suffisamment tôt les conditions-cadres correspondantes et faire avancer rapidement la recherche, le développement et la mise en application de toutes les approches envisageables.

3 Buts et contenu de l'initiative 3.1 Buts visés L'initiative a pour but de créer les conditions-cadres nécessaires à une politique climatique ambitieuse. Elle vise à inscrire dans la Cst. l'objectif découlant de l'accord sur le climat de décembre 2015, consistant à réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Le comité d'initiative allègue que cet objectif s'impose parce que la politique suisse menée jusqu'à présent n'est pas conforme aux engagements pris dans le cadre de cet accord ni aux exigences d'une politique climatique sérieuse. Dans ce contexte, il convient de renvoyer à la décision du Conseil fédéral du 28 août 2019 de viser zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici à 2050

36

37

Po. 18.4211 Thorens Goumaz «Quelle pourrait être l'importance des émissions négatives de CO2 pour les futures politiques climatiques de la Suisse?»; www.parlement.ch > 18.4211 > Rapport en réponse à l'intervention parlementaire.

Fondation Risiko-Dialog (2019)

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(cf. ch. 4.1). Cette décision poursuit sur le fond le même objectif que l'initiative; elle a toutefois été prise après le début de la récolte des signatures (30 avril 2019).

Avec l'interdiction générale de mettre sur le marché des combustibles et des carburants fossiles dès 2050, l'initiative veut fixer une date pour la sortie des énergies fossiles, estimant que les investisseurs bénéficieront d'une plus grande sécurité pour leur planification.

Du fait qu'il conviendra d'éliminer à plus long terme toutes les émissions en Suisse et à l'étranger, l'initiative vise à exclure la possibilité de compenser à l'étranger les émissions de CO2 générées par les énergies fossiles, afin de mettre l'accent sur la restructuration du système énergétique suisse.

La Suisse doit saisir cette opportunité, par exemple en développant des technologies respectueuses du climat qui contribueront à la réduction des émissions au-delà des frontières. De l'avis du comité, l'initiative met en oeuvre l'accord sur le climat en Suisse de manière aussi fine, libérale et efficace que possible: elle fixe un objectif et laisse la voie ouverte pour l'atteindre avec la plus grande marge de manoeuvre possible.

3.2 Réglementation proposée L'élément central de l'initiative consiste en un engagement juridique à atteindre d'ici à 2050 les objectifs de réduction des émissions découlant de l'accord sur le climat. Aux termes de l'art. 74a sur la politique climatique à inscrire dans la Cst., la Confédération et les cantons doivent, dans le cadre de leurs compétences, agir dans l'intérêt de la protection du climat en Suisse et à l'étranger. L'article vise à ce que, d'ici à 2050, la Suisse ne rejette, dans l'atmosphère, pas davantage de gaz à effet de serre que ce qu'elle est capable de compenser durablement par des puits sûrs. La trajectoire de réduction à fixer dans la législation d'exécution doit être tout au moins linéaire.

En outre, aux termes de l'initiative, plus aucun carburant ni combustible fossiles ne pourront en principe être mis en circulation en Suisse à partir de 2050. La formulation «mis en circulation» implique, selon le comité d'initiative, que des mesures doivent être prises à la source pour réduire les émissions, à savoir pour éviter que du carbone fossile soit mis en circulation en Suisse.

Des exceptions seront admissibles pour des applications pour lesquelles il n'existe pas de substitution technique. Cependant, les émissions de CO2 de ce type devront être neutralisées par des puits de gaz à effet de serre sûrs en Suisse. En vertu de l'initiative, la politique climatique doit renforcer l'économie, être acceptable sur le plan social et promouvoir l'innovation et le développement technologique. L'initiative demande en outre qu'une trajectoire de réduction ainsi que des objectifs intermédiaires qui garantissent au moins une réduction linéaire des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 soient définis au niveau de la loi.

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3.3 Commentaire et interprétation du texte de l'initiative En vertu de l'al. 1 de l'art. 74a proposé, la Confédération et les cantons s'engagent, dans le cadre de leurs compétences, à agir dans l'intérêt de la protection du climat en Suisse et à l'étranger. Dès lors, les politiques étrangère et économique extérieure ainsi que la position de la Suisse au sein des organisations internationales doivent s'y conformer. Le comité d'initiative estime à juste titre que la Confédération et les cantons doivent s'engager en faveur de flux financiers respectueux du climat dans la mesure où ils agissent eux-mêmes en tant qu'investisseurs ou sont représentés dans les organes de décision d'organisations financières internationales. Les communes doivent être impliquées dans cet engagement par le biais de la législation cantonale, ce qui est également cohérent. Parallèlement à l'obligation de mener une politique visant à limiter autant que possible le réchauffement climatique, la Confédération et les cantons sont tenus de prendre des mesures d'adaptation à l'évolution du climat. Sur ce plan, l'art. 8 de la loi sur le CO238 en vigueur dispose que la Confédération assure la coordination et fournit les bases nécessaires; la mise en oeuvre incombe aux cantons (cf. ch. 6.4).

L'al. 2 du texte de l'initiative fixe un objectif de zéro net d'ici à 2050 au plus tard pour l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre imputables aux activités anthropiques en Suisse. À partir de cette date, les effets de ces émissions devront être entièrement compensés par des puits de gaz à effet de serre sûrs et durables (cf. ch. 2.3.2). Le terme «sûr» dans ce contexte signifie que les puits ne doivent présenter aucun danger pour l'être humain ou l'environnement. Selon l'état actuel des connaissances, il s'agira principalement de puits de carbone; par conséquent, les effets sur le climat des émissions de gaz à effet de serre autres que le CO2 (p. ex. le méthane issu de l'agriculture) devront être convertis en éq.-CO2 pour pouvoir calculer la compensation dans des puits de carbone. D'après le comité d'initiative, cet objectif inclut, outre les émissions de CO2 issues d'agents énergétiques fossiles, de procédés industriels, de l'agriculture, de l'économie forestière, de l'utilisation des sols et de l'incinération des déchets (dans la mesure
où elles proviennent de sources fossiles), également le protoxyde d'azote (N2O), le méthane (CH4), les gaz synthétiques ainsi que les oxydes d'azote (NOx) et la vapeur d'eau émis par le transport aérien. Hormis pour ce qui est des NOx et de la vapeur d'eau émis par ce secteur, dont les effets sur le climat sont difficiles à déterminer de manière systématique, cet objectif est en ligne avec la réglementation en vigueur: tous ces gaz et secteurs sont recensés dans l'inventaire suisse des gaz à effet de serre et pris en compte, sauf les émissions du transport aérien international, dans l'objectif de réduction fixé dans la loi sur le CO2 (cf. ch. 2.2.3 et 4.2.1).

Les puits de carbone peuvent être naturels (p. ex. les forêts et les sols) ou techniques (p. ex. le filtrage du CO2 présent dans l'air et le stockage permanent dans le sous-sol).

Le risque que les gaz à effet de serre stockés dans un puits soient à nouveau libérés (notamment lors d'un incendie de forêt ou par l'érosion du sol) doit être pris en compte dans le calcul de la prestation du puits afin de surveiller et de garantir les effets sur le climat (cf. ch. 2.3.2). Ces puits ne doivent pas nécessairement être situés sur le territoire suisse. Il est concevable que la Suisse participe à des projets de puits de carbone

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RS 641.71

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écologiquement et socialement durables à l'étranger et qu'elle soit créditée des prestations correspondantes.

L'année cible 2050 découle de l'accord sur le climat et du rapport spécial du GIEC d'octobre 2018 sur la limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C39. Elle a été reprise par le Conseil fédéral dans sa décision du 28 août 2019 de viser zéro émission nette. Le comité d'initiative considère néanmoins que l'année cible devrait être avancée si de nouvelles découvertes scientifiques indiquent qu'il est nécessaire que les émissions diminuent plus rapidement que ce que l'on présume aujourd'hui. Cet objectif est en ligne avec l'al. 1, qui prévoit que la Confédération et les cantons s'engagent pour limiter les risques et les effets des changements climatiques. À cette fin, ceux-ci doivent obligatoirement, conformément à la pratique, se fonder sur les dernières connaissances scientifiques. Dans ce contexte, ce n'est pas l'année de sortie qui est déterminante en matière d'impact sur le climat, mais la quantité cumulée de gaz à effet de serre qui sera encore émise d'ici là (cf. al. 2 des dispositions transitoires).

L'al. 3 du texte de l'initiative règle les émissions de CO2 issues de la combustion d'agents énergétiques fossiles: à partir de 2050, plus aucun combustible ni carburant fossiles ne devra être mis en circulation en Suisse. Cette interdiction concerne des agents énergétiques fossiles tels que le charbon, l'huile de chauffage, le gaz naturel, le coke, l'essence, le diesel, le kérosène ou l'essence pour avions, qui sont recensés dans la statistique globale de l'énergie, publiée par l'Office fédéral de l'énergie (OFEN). Conformément à cette statistique, cet alinéa ne couvre pas d'autres sources, notamment les émissions de CO2 géogènes libérées lors de la production de ciment et les émissions de CO2 issues de l'incinération des déchets (qui figurent néanmoins dans l'inventaire des gaz à effet de serre). Seul l'al. 2 s'applique à ces émissions. Toutefois, s'agissant du transport aérien, l'al. 3 inclut également, selon le comité d'initiative, les effets de la vapeur d'eau et des NOx générés dans la stratosphère lors de la combustion des carburants d'aviation, ce qui est pertinent sur le plan de la physique climatique et cohérent avec l'al. 2. Toutefois, conformément à la pratique internationale,
ni les émissions générées par le transport aérien international ni les effets sur le climat des NOx ou de la vapeur d'eau n'ont jusqu'à présent été pris en compte dans l'objectif de réduction de la Suisse (cf. ch. 2.2.3 et 4.2.1). Les exceptions admissibles pour des applications non substituables techniquement doivent être définies dans la loi. La réglementation des émissions de CO2 d'origine fossile est plus stricte que celle des autres gaz à effet de serre (tels que le protoxyde d'azote ou le méthane issu de l'agriculture) car, de l'avis du comité d'initiative, toutes les sources d'énergies fossiles sont en principe substituables par d'autres sources (p. ex. par des agents énergétiques biogènes ou synthétiques), bien que les processus et les capacités de production doivent encore être développés dans certains cas. Aussi, ces émissions de CO2 devraient être neutralisées exclusivement par des puits de carbone situés sur le territoire suisse, car le potentiel limité de ces derniers augmente l'incitation à remplacer aussi complètement que possible les énergies fossiles.

L'al. 4 du texte de l'initiative formule d'autres exigences en matière de politique climatique. Celle-ci doit renforcer l'économie, ce qui inclut la disponibilité d'emplois,

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IPCC (2018)

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une dépendance relativement faible vis-à-vis des pays étrangers (notamment en matière d'approvisionnement énergétique) ou le maintien de la compétitivité (par rapport aux concurrents internationaux, dans la mesure où leurs exigences en matière de protection du climat sont moins sévères). De plus, la politique climatique ne doit pas conduire les personnes socialement défavorisées à ne plus pouvoir participer correctement à la vie sociale. Le fait que des critères écologiques doivent également être pris en compte dans la politique climatique (p. ex. la protection de la biodiversité) découle implicitement de l'art. 74 Cst. En encourageant l'innovation et la technologie, le petit pays qu'est la Suisse pourrait apporter, en plus de sa contribution nationale, une contribution particulièrement importante à la protection du climat en développant des solutions respectueuses de celui-ci et en les mettant en oeuvre dans le monde entier.

Des conditions-cadres politiques et institutionnelles favorables sont nécessaires pour y parvenir.

Les dispositions transitoires de l'art. 197, ch. 12, Cst. prévoient que la Confédération édicte la législation d'exécution dans un délai de cinq ans à compter de l'acceptation de l'initiative. Cette législation devra définir une trajectoire de réduction avec des objectifs intermédiaires et les instruments de politique climatique nécessaires à cette fin.

Cette trajectoire devrait être tout au moins linéaire, afin que la quantité de gaz à effet de serre émis soit aussi faible que possible non seulement en 2050, mais aussi au cours des années précédentes. Si elle n'était pas respectée, les instruments devraient être adaptés sans délai de sorte à être conformes à l'objectif, étant donné que l'initiative prévoit l'obligation de suivre la trajectoire. Outre la loi d'exécution, des ajustements seraient également nécessaires dans d'autres domaines réglementaires, notamment la politique énergétique, le développement territorial, l'agriculture, la politique des transports, les marchés publics et la politique économique extérieure, en adoptant une approche systémique. Ils seraient conformes à la politique climatique actuelle, qui préconise et entend développer une approche systémique (cf. ch. 2.2).

4 Appréciation de l'initiative 4.1 Appréciation des objectifs de l'initiative Par sa décision du 28 août 2019 visant une neutralité (zéro net) pour toutes les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050, le Conseil fédéral poursuit sur le principe le même objectif que l'initiative. C'est pourquoi il se félicite de l'orientation suivie par celle-ci, qui vise à inscrire l'objectif de zéro émission nette dans la Cst.

Selon le Conseil fédéral, l'initiative va toutefois trop loin sur certains points. Il estime notamment que l'interdiction générale des agents énergétiques fossiles, telle que prévue par l'initiative, est trop radicale. Les énergies fossiles doivent rester admises pour certaines applications et ne doivent pas être liées à l'obligation de compenser leurs effets par des puits de carbone situés en Suisse. Vu que le potentiel de stockage durable du CO2 est limité en Suisse, le Conseil fédéral souhaite maintenir la possibilité d'imputer la mise en oeuvre des mesures de protection du climat à l'étranger, en ayant recours aux technologies d'émission négative.

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4.2 Avantages et inconvénients de l'initiative 4.2.1 Zéro émission nette d'ici à 2050 et trajectoire de réduction Le Conseil fédéral souscrit à la proposition de l'initiative d'inscrire dans la Cst. l'objectif du zéro net découlant de l'accord sur le climat. Sa décision de fixer l'objectif de zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici à 2050 repose sur les bases scientifiques présentées par le GIEC en octobre 2018. Celles-ci montrent qu'il faut déjà s'attendre à de graves conséquences pour l'être humain et les écosystèmes en cas de réchauffement planétaire de 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle. L'impact des changements climatiques est particulièrement prononcé en Suisse. C'est pourquoi le Conseil fédéral estime, comme le comité d'initiative, que la Suisse a tout intérêt à limiter le réchauffement climatique.

En se fixant pour objectif de réduire ses émissions de gaz à effet de serre à zéro net d'ici à 2050, la Suisse contribue à l'objectif de l'accord sur le climat à hauteur de ses responsabilités en matière de politique climatique et dans la mesure de ses possibilités.

Elle répond ainsi à son engagement en vertu de l'accord sur le climat, selon lequel les stratégies climatiques à long terme doivent appliquer le principe des «responsabilités communes mais différenciées» et tenir compte des «capacités respectives eu égard aux différentes situations nationales»40. Le Conseil fédéral partage ainsi l'avis du comité d'initiative: en tant que pays aisé, la Suisse doit assumer sa responsabilité en matière de politique climatique (cf. principe stratégique 2, ch. 2.3.1).

Par ailleurs, le Conseil fédéral partage la conviction du comité d'initiative quant au fait que, en sa qualité de pays novateur et financièrement solide, la Suisse dispose de très bonnes conditions pour réduire à zéro net ses émissions de gaz à effet de serre.

Avec cet objectif, elle est en phase avec son principal partenaire commercial, l'Union européenne, qui a également annoncé vouloir parvenir à la neutralité climatique d'ici à 2050 (pacte vert pour l'Europe41, loi européenne sur le climat42), avec les États-Unis et le Canada, qui ont également annoncé un objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, et avec la Chine, qui vise le même objectif d'ici à 2060. Plusieurs pays ont déjà fixé des objectifs de zéro net
juridiquement contraignants, comme la France, la Suède, le Danemark, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni.

La stratégie climatique à long terme illustre comment atteindre l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050 (cf. ch. 2.3.1). Elle pose ainsi les fondements de la législation d'exécution demandée par l'initiative dans les dispositions transitoires (art. 197, ch. 12, Cst.), législation qui devra être édictée dans un délai de cinq ans à compter de l'acceptation de l'initiative. La loi devra fixer des objectifs intermédiaires à atteindre d'ici à 2050. Ceux-ci devront conduire au moins à une réduction linéaire, en fonction des connaissances scientifiques. La volonté de suivre une trajectoire de réduction au moins linéaire est cohérente avec les engagements pris par la Suisse dans le cadre de l'accord sur le climat. En effet, ce dernier contraint les États Parties à formuler tous les cinq ans des objectifs de réduction des émissions de plus en plus ambitieux et à

40 41 42

Art. 4, par. 19; RS 0.814.012 Commission européenne (2019) Commission européenne (2020)

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prendre les mesures correspondantes sur le territoire national43. D'une année à l'autre, les émissions peuvent connaître de très importantes variations, par exemple en fonction des conditions météorologiques ou de la situation conjoncturelle. Dès lors, le Conseil fédéral estime judicieux d'axer les instruments de politique climatique sur des objectifs intermédiaires et non sur une trajectoire de réduction linéaire. Pour pouvoir orienter les instruments sur les objectifs intermédiaires, qui garantissent une certaine trajectoire de réduction en l'espace d'une période donnée, il serait possible de fixer, outre l'objectif annuel pour 2050, également un objectif moyen pour la période allant jusqu'à cette date, à l'image de ce que le Conseil fédéral a proposé dans le cadre de la révision totale de la loi sur le CO2 pour 2030 et pour la période 2021-203044.

L'initiative introduit un élément nouveau qu'impliquent les al. 2 et 3 de l'art. 74a: l'inclusion de l'impact climatique global des émissions du transport aérien dans l'objectif suisse de réduction. Tous les carburants d'aviation mis en circulation en Suisse, et leurs effets sur l'atmosphère, devraient dès lors être inclus. Le transport aérien transfrontalier n'est toutefois pas compris dans le champ d'application de l'objectif de réduction contraignant au plan international, ni dans celui de la loi sur le CO2.

Cependant, pour limiter le réchauffement planétaire conformément à l'art. 2 de l'accord sur le climat, le bilan climatique du transport aérien international devra, comme celui du transport maritime international, être compensé sur le long terme. L'impact climatique total du transport aérien (CO2 ainsi que les effets des NOx, de la vapeur d'eau et des particules de sulfates et de suie) fluctue en fonction de la période considérée, des conditions météorologiques et de l'altitude de vol. En effet, il équivaut à une à trois fois les émissions de CO2 générées par la combustion de carburants d'aviation fossiles45. L'impact du transport aérien sur le climat ne peut donc pas être déterminé forfaitairement à l'aide d'un facteur uniforme, mais uniquement de manière approximative. En revanche, les émissions de CO2 issues des carburants d'aviation fossiles, qui seront également prises en compte dans le système intra-européen d'échange de quotas d'émission
et dans le régime CORSIA, devront être déterminées sans ambiguïté. C'est pourquoi le Conseil fédéral accepte d'inclure les émissions du transport aérien dans l'objectif du zéro net, comme le demande l'initiative, mais seulement dans la mesure où cela s'avère scientifiquement et techniquement compatible avec les données de l'inventaire.

4.2.2 Compétences de la Confédération et des cantons en matière de politique climatique Les cantons assument également certaines tâches en matière de politique énergétique et promulguent leurs propres lois sur l'énergie, qui sont coordonnées à l'aune du modèle de prescriptions énergétiques des cantons élaboré par la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie. En revanche, la politique climatique relève majori-

43 44 45

16.083 Message du 21 décembre 2016 portant approbation de l'Accord de Paris sur le climat; FF 2017 289.

Art. 3, al. 1, de la loi sur le CO2 totalement révisée.

Neu (2020)

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tairement de la compétence de la Confédération. L'adaptation aux changements climatiques constitue toutefois une exception. Dans ce domaine, l'art. 8 de la loi sur le CO2 en vigueur dispose que la Confédération assure la coordination et fournit les bases nécessaires. Par ailleurs, la Confédération et les cantons s'engagent, dans le cadre de leurs compétences, également dans les relations internationales en faveur de la limitation des risques et des effets des changements climatiques. Si les affaires étrangères incombent à la Confédération (art. 54, al. 1, Cst.), les cantons peuvent conclure des traités avec l'étranger dans les domaines relevant de leur compétence (art. 56, al. 1, Cst.). Le mandat formulé à l'art. 74a, al. 1, du texte de l'initiative, à savoir que la Confédération et les cantons s'engagent, dans le cadre de leurs compétences, pour limiter les risques et les effets des changements climatiques, est par conséquent cohérent.

4.2.3 Interdiction des énergies fossiles L'utilisation d'énergies fossiles, principalement le pétrole, le gaz naturel et le charbon, constitue la source la plus importante de gaz à effet de serre dans le monde et, partant, la principale cause du réchauffement planétaire observé depuis le début de l'industrialisation. En Suisse, elle génère trois quarts des émissions. L'abandon des énergies fossiles se révèle donc urgent et essentiel en vue d'atteindre l'objectif de zéro émission nette. Il réduit en particulier la dépendance vis-à-vis des importations provenant, entre autres, de régions politiquement instables.

Aux termes de l'al. 3, l'initiative souhaite garantir que, à partir de 2050, plus aucun agent énergétique fossile ne puisse être mis en circulation en Suisse. Des exceptions ne seraient admissibles que si les solutions de substitution ne sont techniquement pas réalisables et qui si les émissions peuvent être neutralisées par des puits de carbone situés en Suisse. Le Conseil fédéral estime que cette interdiction de facto des énergies fossiles est trop radicale. Au vu de l'incertitude concernant les développements technologiques, il ne serait pas raisonnable d'inscrire dans la Cst. une interdiction qui prendrait effet dans 30 ans. Des exceptions qui se fondent uniquement sur des aspects techniques sont trop restrictives. Elles doivent également être possibles pour des raisons de viabilité sur les plans économique, écologique et social.

Les interdictions peuvent constituer des instruments judicieux de politique environnementale. Elles ont fait leurs preuves notamment pour les gaz chlorés, responsables de l'appauvrissement de la couche d'ozone, dont la substitution est aisée. Aujourd'hui, les combustibles et les carburants fossiles peuvent en principe être remplacés par des agents énergétiques de substitution, renouvelables, ou des technologies dans pratiquement toutes les applications. Il ne s'agit là que d'un point de vue purement technique. Il y a toutefois lieu de tenir compte du fait que les carburants et les combustibles produits de manière synthétique utilisés comme solutions de substitution sont aujourd'hui nettement plus coûteux que les agents énergétiques fossiles, ce qui explique le manque actuel de capacités et de procédés de production à large échelle. En outre, les exigences écologiques et sociales posées aux solutions de substitution en vertu de la législation actuelle doivent être remplies (cf. allègements fis-

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caux accordés pour les biocarburants en vertu de la loi du 21 juin 1996 sur l'imposition des huiles minérales46). Dès lors, une interdiction peut poser problème si les produits de substitution ne sont pas compatibles avec l'environnement ou disponibles en quantités suffisantes ou à un coût raisonnable, ou si leur fabrication génère des gaz à effet de serre ailleurs. Des problèmes liés au trafic transfrontalier pourraient également se poser si les technologies de propulsion fossile sont encore courantes à l'étranger.

Des instruments basés sur l'économie de marché, tels qu'une taxe d'incitation ou l'échange de quotas d'émission, peuvent également être utilisés pour atteindre les objectifs de réduction au coût le plus bas possible.

4.2.4 Réduction des émissions de gaz à effet de serre et puits de carbone en Suisse et à l'étranger En exigeant que les émissions inévitables issues des énergies fossiles soient obligatoirement neutralisées à l'intérieur des frontières nationales, le comité d'initiative place la barre très haut. Le potentiel limité des puits sur le territoire suisse augmente l'incitation à n'utiliser les énergies fossiles que dans des cas exceptionnels.

Le Conseil fédéral partage l'avis du comité d'initiative sur le fait que pour atteindre l'objectif du zéro net, il est impératif de réduire les émissions dans le pays, ce qui figure d'ailleurs dans les principes de la stratégie climatique à long terme (cf. principe stratégique 3, ch. 2.3.1). En tant que Partie à l'accord sur le climat, la Suisse s'est engagée à suivre le principe du «niveau d'ambition le plus élevé possible», ce qui signifie que les émissions intérieures de gaz à effet de serre doivent être réduites autant que possible. Selon la stratégie climatique à long terme, les technologies déjà connues permettront de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 de près de 90 % par rapport à 1990 (y c. les contributions des technologies CSC) (cf. ch. 2.3.1).

Il convient de compenser les émissions résiduelles grâce à des technologies d'émission négative, c'est-à-dire en renforçant les puits naturels ou techniques. Comme indiqué au ch. 2.3.2, des incertitudes considérables demeurent concernant les potentiels, les coûts et les risques liés à ces technologies. C'est pourquoi ces dernières ne sauraient se substituer à la réduction prioritaire et complète des émissions de gaz à effet de serre et doivent être réservées à la compensation des émissions difficiles à éviter.

De manière générale, au vu des capacités de stockage géologique dans le sous-sol limitées en Suisse, il n'est pas sûr qu'il soit possible de couvrir entièrement le besoin en émissions négatives.

La volonté du comité d'initiative de neutraliser les émissions de CO2 d'origine fossile uniquement dans des puits de carbone situés en Suisse pourrait en outre entraîner des désavantages concurrentiels si les coûts correspondants devaient être supportés selon le principe de causalité. Tel serait probablement le cas, notamment pour le transport aérien, puisqu'il ressort du rapport explicatif
relatif au texte de l'initiative que les émissions résiduelles des pleins de kérosène faits en Suisse, mais brûlés en grande partie lors de vols internationaux, devraient être entièrement compensées par des puits sûrs sur le territoire suisse. Selon l'inventaire des gaz à effet de serre pour 2018, les 46

RS 641.61

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émissions issues du transport aérien international (CO2, CH4 et N2O) se montent à 5,7 millions de tonnes. Ce chiffre ne comprend que les émissions liées à la combustion des carburants d'aviation.

C'est pourquoi, à la différence de l'initiative, le Conseil fédéral ne souhaite pas se limiter aux puits de carbone situés en Suisse; il veut aussi autoriser la réalisation de projets à l'étranger qui pourront être imputés à l'objectif. Bien que l'art. 4, par. 2, de l'accord sur le climat exige que les Parties prennent d'abord des mesures dans leur propre pays, l'art. 6 leur donne la possibilité d'imputer des mesures d'atténuation mises en oeuvre à l'étranger à condition d'éviter un double comptage et de promouvoir le développement durable. Les mesures d'atténuation peuvent comprendre des réductions de gaz à effet de serre ou des captages permanents de CO2 au moyen de puits de carbone.

L'imputation des réductions d'émissions obtenues à l'étranger permet, pendant une période de transition, d'accroître la flexibilité et de gagner du temps afin de pouvoir utiliser en Suisse les cycles d'investissement réguliers pour le renouvellement des infrastructures. À plus long terme toutefois, les projets de compensation à l'étranger n'offriront plus qu'un potentiel très limité, car ces pays devront réduire continuellement leurs émissions de gaz à effet de serre en vue d'atteindre le zéro net. Ces pays devraient donc être moins enclins à céder à d'autres pays des possibilités de réduction imputables obtenues à bas coût alors que les investissements nécessaires à une réduction des émissions résiduelles augmenteront. C'est pourquoi la condition essentielle pour atteindre l'objectif du zéro net est de réduire toutes les émissions évitables en Suisse, les émissions résiduelles ne devant être compensées à l'étranger dès 2050 qu'au moyen de technologies d'émission négative.

4.2.5 Promotion de l'innovation et de la technologie Le Conseil fédéral approuve l'exigence de l'initiative de mener une politique climatique orientée sur un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social (cf. notamment principes stratégiques 7 et 8, ch. 2.3.1) et recourant aux instruments de promotion de l'innovation et de la technologie. La recherche, qui est à la base de tout processus d'innovation, revêt une importance particulière.

Le développement de technologies respectueuses du climat joue un rôle central dans la transition vers le zéro net. Avec ses instituts de formation et de recherche de réputation mondiale, son niveau de vie élevé et sa grande capacité d'innovation, la Suisse réunit les meilleures conditions possibles pour assumer davantage ses responsabilités en matière de politique climatique, aussi à long terme. En s'engageant résolument sur la voie d'un avenir neutre en matière de gaz à effet de serre, elle a également la possibilité de renforcer son rôle de meneur en tant que place de recherche et d'innovation (cf. aussi principe stratégique 1, ch. 2.3.1).

La loi sur le CO2 mais aussi diverses politiques sectorielles en lien avec la politique climatique utilisent déjà en partie des instruments de promotion dans le but de soutenir le développement et la diffusion de technologies et d'innovations respectueuses du climat. Diverses mesures s'inscrivent déjà dans une perspective à plus long terme.

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4.2.6 Compatibilité avec les obligations internationales L'initiative est compatible avec les obligations internationales de la Suisse (cf. ch. 6.6.2).

5 Conclusions Les efforts conséquents visés par l'initiative dans le domaine de la politique climatique suisse sont également inscrits dans la stratégie climatique à long terme. Le Conseil fédéral est donc favorable à l'orientation générale de l'initiative et partage pour l'essentiel les objectifs de cette dernière, à savoir que la Suisse doit assumer ses responsabilités en matière de politique climatique et doit, pour cela, privilégier une réduction des émissions dans le pays, qu'elle doit saisir les possibilités offertes par une transition cohérente vers le zéro net et que cette transition s'effectue de manière socialement acceptable.

Le Conseil fédéral est donc favorable à l'inscription dans la Cst. de l'objectif de zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici à 2050, qu'il avait déjà défini en août 2019 en tant qu'objectif indicatif. La confirmation de cet objectif va dans le sens de la stratégie climatique à long terme que la Suisse a soumise le 28 janvier 2021 au Secrétariat des Nations Unies sur les changements climatiques, et assure une sécurité de planification et d'investissement pour l'économie et les ménages.

Le Conseil fédéral estime toutefois que certaines exigences de l'initiative vont trop loin. Ainsi, il est opposé à une interdiction générale des énergies fossiles qui serait inscrite dans la Cst., parce que cette interdiction ne prendrait effet que dans 30 ans et que des incertitudes demeurent concernant les développements technologiques. Par ailleurs, l'initiative n'admet que des exceptions qui se fondent sur des aspects techniques, ce que le Conseil fédéral juge trop restrictif. Une réduction de la consommation d'énergies fossiles devrait tenir compte non seulement de la faisabilité technique mais aussi de la viabilité économique et sociale et du maintien de la sécurité du pays.

Le Conseil fédéral estime que le choix de l'instrument nécessaire à la mise en oeuvre de l'objectif de zéro émission nette doit rester ouvert.

Le Conseil fédéral propose donc un contre-projet direct qui remplace l'interdiction générale des agents énergétiques fossiles par une obligation de réduction de la consommation de ces derniers, dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique, économiquement supportable et compatible avec la sécurité du pays et la protection de la population
(cf. ch. 6.4). En outre, l'impact du transport aérien sur le climat ne devrait être pris en compte dans l'objectif de zéro émission nette que dans la mesure où cela est scientifiquement et techniquement en accord avec les données figurant dans l'inventaire des gaz à effet de serre47, qui recense actuellement le CO2, le méthane et le protoxyde d'azote générés par la combustion de carburants d'aviation (transport aérien).

47

Les rapports élaborés par la Suisse dans le cadre de l'inventaire des gaz à effet de serre sont basés sur les directives de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et les lignes directrices méthodologiques du GIEC.

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Par ailleurs, le Conseil fédéral juge inadaptée l'exigence de l'initiative selon laquelle les émissions résiduelles d'agents énergétiques fossiles doivent être compensées exclusivement dans des puits de carbone situés en Suisse. Au regard des potentiels limités de stockage durable du CO2 en Suisse, le contre-projet prévoit une flexibilité permettant le recours à des technologies d'émission négative à l'étranger.

6 Contre-projet direct 6.1 Texte du contre-projet direct L'arrêté fédéral relatif à la politique climatique (contre-projet direct à l'initiative pour les glaciers) est reproduit dans le tableau ci-après qui compare le contre-projet (colonne de droite) à l'initiative (colonne de gauche). Le texte du contre-projet est souligné lorsqu'il s'écarte de celui de l'initiative. Les flèches indiquent que l'ordre des dispositions est différent dans le contre-projet. Des explications sont données plus loin.

La Constitution est modifiée comme suit: Art. 74a Politique climatique ( Initiative)

Art. 74a Politique climatique ( Contre-projet direct)

1

Dans le cadre de leurs compétences, la Confédération et les cantons s'engagent, en Suisse et dans les relations internationales, pour limiter les risques et les effets du changement climatique.

2 Pour autant que des gaz à effet de serre d'origine humaine soient encore émis en Suisse, leurs effets sur le climat doivent être durablement neutralisés au plus tard dès 2050 par des puits de gaz à effet de serre sûrs.

1

3

Plus aucun carburant ni combustible fossiles ne sera mis en circulation en Suisse à partir de 2050. Des exceptions sont admissibles pour des applications pour lesquelles il n'existe pas de substitution technique et pour autant que des puits de gaz à effet de serre sûrs situés en Suisse en neutralisent durablement les effets sur le climat.

3

4

4

La politique climatique vise un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social et utilise en particulier des instruments de promotion de l'innovation et de la technologie.

Dans le cadre de leurs compétences, la Confédération et les cantons s'engagent, en Suisse et dans les relations internationales, pour limiter les risques et les effets des changements climatiques.

2 L'utilisation de combustibles et de carburants fossiles doit être réduite autant que possible dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique, économiquement supportable et compatible avec la sécurité du pays et la protection de la population.

Les effets sur le climat des gaz à effet de serre d'origine anthropique émis en Suisse doivent être durablement neutralisés au plus tard dès 2050 par des puits de gaz à effet de serre sûrs en Suisse et à l'étranger.

La politique climatique vise un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social, tient compte de la situation des régions de montagne et des régions périphériques et utilise en particulier des instruments de promotion de la recherche, de l'innovation et de la technologie.

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Art. 197, ch. 1248

Art. 197, ch. 1349

12. Dispositions transitoires ad art. 74a (Politique climatique)

13. Dispositions transitoires ad art. 74a (Politique climatique)

1

La Confédération édicte la législation d'exécution de l'art. 74a dans un délai de cinq ans à compter de l'acceptation dudit article par le peuple et les cantons.

1

2

2

La loi détermine la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2050. Elle arrête des objectifs intermédiaires qui conduisent au moins à une réduction linéaire et règle les instruments nécessaires au respect de la trajectoire de réduction.

La Confédération édicte la législation d'exécution de l'art. 74a dans un délai de cinq ans à compter de l'acceptation dudit article par le peuple et les cantons.

La loi détermine la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2050. Elle arrête des objectifs intermédiaires qui conduisent au moins à une réduction linéaire et règle les instruments nécessaires à la réalisation des objectifs intermédiaires.

6.2 Procédure de consultation 6.2.1 Résultats de la procédure de consultation La procédure de consultation sur l'avant-projet du contre-projet direct a débuté le 2 septembre 2020 et s'est terminée le 2 décembre 2020. Au total, 143 avis ont été recueillis50. La procédure de consultation a montré en particulier qu'une majorité des participants est favorable à l'inscription de l'objectif de zéro émission nette au niveau constitutionnel. Les opinions divergent cependant quant à la forme concrète à adopter.

Un premier groupe de participants, parmi lesquels la plupart des cantons, soutient globalement le contre-projet direct. Deux tendances s'opposent cependant au sein de ce groupe: certains participants souhaitent rapprocher le contre-projet direct de l'initiative sur certains points, par exemple s'agissant de la définition de l'emplacement géographique des puits de gaz à effet de serre, tandis que d'autres demandent des assouplissements, notamment pour la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Un deuxième groupe trouve le contre-projet direct bien trop peu ambitieux.

Ces participants sont donc favorables à l'initiative ou à d'autres mesures de politique climatique allant bien au-delà de ce que prévoit le contre-projet. L'interdiction des carburants et des combustibles fossiles constitue une revendication majeure de ce groupe. Enfin, une minorité de participants rejette à la fois le contre-projet direct et l'initiative, pour des raisons notamment économiques.

Globalement, l'objectif fixé par la Suisse d'atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre est jugé positif. La question de l'interdiction des carburants et des combustibles fossiles à partir de 2050 est, en revanche, controversée. Tandis que quelques participants souhaiteraient mettre en oeuvre cette interdiction encore plus tôt, d'autres 48 49 50

Le numéro définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

Le numéro définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

Le rapport sur les résultats peut être téléchargé sous: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > DETEC.

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s'opposent farouchement à son application. Les opposants à l'interdiction font notamment part de leurs doutes concernant la disponibilité d'agents énergétiques de substitution, émettent des craintes concernant les coûts y afférents et sont, par principe, opposés à toute interdiction frappant certaines technologies. À l'inverse, les défenseurs de l'interdiction estiment que celle-ci est nécessaire pour réaliser l'objectif de zéro émission nette ou encore qu'elle offrira une plus grande sécurité de planification, ce qui sera bénéfique pour l'économie. La question des exceptions admissibles pour l'utilisation des agents énergétiques fossiles fait, elle aussi, débat. Tel est également le cas de la question de savoir si les émissions issues d'agents énergétiques fossiles demeurant en 2050 devront être compensées par des puits en Suisse ou à l'étranger.

Le principal argument invoqué contre la compensation de ces émissions par des puits situés uniquement en Suisse est le potentiel limité de cette mesure. Les personnes qui y sont favorables sont d'avis, au contraire, que cette obligation créera une incitation encore plus forte à abandonner les agents énergétiques fossiles. Par ailleurs, plusieurs participants demandent que l'engagement de la Confédération et des cantons dans les relations internationales soit explicitement mentionné, comme le prévoit l'initiative, mais pas le contre-projet.

Le fait que les dispositions transitoires de l'avant-projet prévoyaient la fixation d'objectifs intermédiaires au niveau de la loi a également fait l'objet de nombreuses discussions. Ces objectifs doivent conduire au moins à une réduction linéaire des émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2050. Si quelques cantons jugent insuffisante la prescription d'une trajectoire de réduction au moins linéaire pour pouvoir réduire rapidement les émissions, d'autres participants critiquent, au contraire, le simple fait qu'une telle trajectoire soit définie de manière contraignante. Ces participants estiment que cette trajectoire n'est pas adaptée aux développements technologiques et aux cycles d'investissement de l'économie ou qu'elle ne doit pas être fixée au niveau de la Cst. Quelques participants demandent que les objectifs intermédiaires soient définis dans le sens de valeurs indicatives.

6.2.2 Refonte de l'avant-projet La structure de l'article constitutionnel proposé dans le contre-projet et son principe n'ont pas été modifiés lors de la refonte de l'avant-projet. Les avis reçus dans le cadre de la consultation ont débouché sur les adaptations suivantes.

Obligation pour la Confédération et les cantons de s'engager en faveur de mesures de protection du climat Concernant l'obligation incombant à la Confédération et aux cantons de s'engager dans le cadre de leurs compétences pour limiter les risques et les effets des changements climatiques (art. 74a, al. 1), plusieurs participants se disent favorables au maintien de la mention «en Suisse et dans les relations internationales». Ils estiment que, de cette manière, l'engagement international sera contraignant et non facultatif. Le Conseil fédéral est prêt à renforcer l'engagement international de la Suisse, qui repose notamment sur des mécanismes multilatéraux s'inscrivant dans le cadre des Nations Unies, en complétant le nouvel article constitutionnel sur la politique climatique. Avec

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cet ajout, les cantons ont également la possibilité de conclure des traités avec l'étranger dans les domaines relevant de leur compétence, comme le transport transfrontalier ou l'énergie.

Utilisation de combustibles et de carburants fossiles Dans le cadre de la consultation, quelques participants ont rejeté l'introduction de la notion d'«économiquement supportable» à l'art. 74a, al. 2, de l'avant-projet, celle-ci impactant de manière problématique la réduction souhaitée de l'utilisation des combustibles et carburants fossiles. Par ailleurs, d'autres participants ont critiqué le fait que cette exception offre une trop grande marge d'interprétation. Le Conseil fédéral entend maintenir la notion de viabilité économique. Toutefois, afin de répondre à ces préoccupations, le message définit les critères permettant de préciser cette notion dans la législation d'exécution afin de créer des obstacles les plus élevés possible à l'autorisation d'exceptions sur le long terme (cf. ch. 6.4).

Compensation par des puits de gaz à effet de serre Les réponses des participants montrent que les explications sur la manière dont les émissions résiduelles en 2050 devront être compensées par des puits de gaz à effet de serre comportent des imprécisions, potentiellement des informations trompeuses.

Plusieurs participants ont demandé que l'absence de limitation géographique pour l'emplacement des puits, tel que le prévoit le contre-projet, soit explicitement reprise dans l'article constitutionnel. Cette demande de précision du texte constitutionnel, et par là de clarté en vue de la mise en oeuvre au niveau de la loi, est prise en compte avec l'ajout de la mention «en Suisse et à l'étranger» à l'al. 3 du nouvel article.

La demande de certains participants de définir des puits qui excluent une réduction des émissions à l'étranger est prise en compte dans le message, des précisions y étant été apportées sur ce point. La définition utilisée s'appuie sur la notion de puits sur laquelle se fonde le GIEC. Le présent message précise notamment que les émissions résiduelles générées en Suisse devront être compensées à partir de 2050 seulement en recourant à des technologies d'émission négative (cf. ch. 4.2.4). Les réductions d'émissions à l'étranger seraient possibles uniquement pour aider d'autres pays à réduire leurs propres
émissions, les réductions ainsi obtenues n'étant pas imputées à l'objectif national.

Orientation de la politique climatique Le souhait émis par plusieurs participants de mentionner explicitement la promotion de la recherche à l'art. 74a, al. 4, est pris en compte. Cet ajout permet d'insister davantage sur le rôle de la recherche, qui est à la base de tout processus d'innovation.

L'intensification des travaux de recherche et développement est indispensable pour pouvoir mettre à disposition, le plus rapidement possible, les technologies et bases décisionnelles requises pour la transition vers le zéro net, par exemple les technologies d'émission négative.

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Dispositions transitoires Comme indiqué au ch. 4.2.1, le Conseil fédéral soutient une trajectoire de réduction au moins linéaire, sur laquelle doivent se fonder les objectifs intermédiaires. Les quantités d'émissions variant fortement d'une année à l'autre, notamment en raison des conditions météorologiques et de la conjoncture, le respect d'une trajectoire de réduction prédéfinie nécessiterait d'ajuster régulièrement les mesures, ce qui serait difficilement réalisable dans la pratique. Contrairement à l'avant-projet, qui reprend telles quelles les dispositions transitoires de l'initiative, le contre-projet prévoit que les instruments ne devront pas être orientés sur le respect de la trajectoire de réduction mais sur la réalisation des objectifs intermédiaires.

Souhaits non pris en compte Concernant l'orientation de la politique climatique, plusieurs participants ont proposé d'autres compléments à l'art. 74a, al. 4, ou ont demandé l'ajout de nouveaux alinéas ou des durcissements sur d'autres thèmes, tels que les émissions grises*. Le Conseil fédéral renonce à d'autres modifications de l'article parce que celles-ci sont déjà couvertes par d'autres articles constitutionnels ou parce qu'elles impliqueraient une restriction inutile de la marge de manoeuvre à venir.

Certains participants ont estimé que le rapport explicatif aborde de manière insuffisante les conséquences de l'article proposé et demandent davantage de détails notamment sur les mesures de politique climatique prévues et les conséquences et coûts y afférents. Le présent message prend en compte ces préoccupations, du moins en partie, et fournit des explications plus détaillées sur les conséquences sur l'économie, la Confédération et les cantons de la transition vers un système énergétique compatible avec l'objectif de zéro émission nette. Les mesures concrètes associées seront définies dans le cadre de la mise en oeuvre de l'article constitutionnel au niveau de la loi.

Afin d'accélérer l'adoption et la mise en oeuvre de mesures contraignantes, quelques participants ont demandé un renforcement de la protection du climat par des modifications législatives (contre-projet indirect) en lieu et place d'un contre-projet direct, ou proposé des adaptations à la fois au niveau de la Cst. et au niveau de la loi. Les objectifs de la politique
climatique et éléments permettant leur réalisation seront vraisemblablement concrétisés au moyen de modifications de la loi sur le CO2. Après le refus de la révision totale de celle-ci, le Conseil fédéral se prononcera le plus rapidement possible, après avoir analysé le résultat de la votation du 13 juin 2021 et les causes de ce rejet, sur un nouveau projet pour développer la politique climatique.

6.3 Présentation du contre-projet direct La norme constitutionnelle proposée précise les objectifs fixés aux art. 74 et 89 Cst.

en matière de politique climatique en définissant les grandes lignes contraignantes en vue d'une politique climatique durable.

Seule une action rapide, déterminée et ciblée de l'ensemble des acteurs et secteurs permettra d'atteindre le zéro émission nette, objectif qui concerne toute la société et s'inscrit sur plusieurs générations. L'inscription de cet objectif climatique dans la Cst.

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le rendra contraignant, lui offrira une légitimité démocratique accrue et responsabilisera davantage la société à cet égard. Dans le même temps, la formulation de l'article constitutionnel est ouverte et offre au législateur une marge de manoeuvre suffisante pour l'aménagement concret de la législation d'exécution.

Contrairement à l'initiative, le contre-projet direct renonce à l'interdiction des énergies fossiles. Il autorise leur utilisation pour des raisons de sécurité du pays, de protection de la population et de viabilité économique. Le contre-projet offre davantage de flexibilité que l'initiative sur d'autres points, par exemple concernant l'absence de limitation géographique pour l'emplacement des puits et l'orientation des instruments sur le respect d'objectifs intermédiaires conduisant au moins à une réduction linéaire plutôt que sur l'obligation de respecter une telle trajectoire. La norme constitutionnelle proposée fixe ainsi le cadre permettant de recourir à un large éventail d'instruments de politique climatique efficaces, en fonction de la situation. Elle confère ainsi à la Confédération et aux cantons une plus grande marge de manoeuvre que l'initiative.

Cette approche permet également de respecter le principe de la sécurité d'approvisionnement énergétique, qui doit être garantie de manière économiquement optimale et respectueuse de l'environnement en vertu de l'art. 89, al. 1, Cst. De plus, en vertu de l'art. 57 Cst., la sécurité du pays ne doit pas être mise en péril.

Dans le cadre de la législation d'exécution, le Conseil fédéral juge pertinent de fixer des objectifs climatiques distincts, à savoir un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre ambitieux et un objectif pour les émissions négatives. Cette distinction claire offrirait une meilleure base pour pouvoir encourager de manière ciblée à la fois la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la production d'émissions négatives. La norme constitutionnelle permet de compenser les émissions de CO2 résiduelles par des puits en Suisse ou à l'étranger (cf. ch. 4.2.4) S'agissant de l'imputabilité des prestations de puits de carbone, les mêmes standards de qualité doivent s'appliquer en Suisse et à l'étranger, notamment sur les plans environnemental et social.

Ce point sera à concrétiser dans la législation
d'exécution, la promotion du développement durable, la garantie de l'intégrité environnementale et de la transparence ainsi que le respect des droits de l'homme devant être pris en compte dans ce contexte. En outre, il conviendra d'assurer l'acceptabilité sociale qu'importe où se trouvent les puits.

Tout comme l'initiative, la norme constitutionnelle proposée fixe comme grande ligne le fait que la politique climatique vise un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social. Elle tient compte, en outre, de la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques.

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6.4 Commentaire des dispositions L'art. 74a (Politique climatique) proposé permettra d'inscrire dans la Cst. des conditions-cadres contraignantes pour la politique climatique de la Suisse.

Art. 74a

Politique climatique

La nouvelle disposition sera ajoutée après la base constitutionnelle concernant la protection de l'environnement (art. 74 Cst.). Elle se trouve sur un pied d'égalité avec d'autres domaines de tâches et n'est pas prioritaire. Il convient de souligner que ­ tout comme la protection de l'environnement ­ la protection du climat est un thème transversal qui concerne aussi d'autres domaines politiques.

Les compétences de la Confédération et des cantons en matière de politique climatique ne sont pas affectées par la norme constitutionnelle proposée. La disposition n'entraîne pas de transfert de compétences complémentaires à la Confédération au détriment des cantons. La politique climatique relève en grande partie de la responsabilité de la Confédération (cf. art. 74 Cst.). Toutefois, les mesures concernant la consommation d'énergie dans les bâtiments sont avant tout du ressort des cantons (art. 89, al. 4, Cst.). Par conséquent, les cantons édictent leurs propres lois sur l'énergie, qui se fondent sur le Modèle de prescriptions énergétiques des cantons (MoPEC), élaboré par la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie. En matière d'adaptation aux changements climatiques aussi, la mise en oeuvre incombe généralement aux cantons; l'art. 8 de la loi sur le CO2 en vigueur dispose que, dans ce domaine, la Confédération assure la coordination et fournit les bases nécessaires.

L'al. 1 du contre-projet correspond au texte de l'initiative.

Les al. 2 et 3 de l'initiative sont intervertis dans le contre-projet direct. Ainsi, l'al. 2 du contre-projet direct formule un principe de réduction de la consommation de combustibles et de carburants fossiles qui s'applique immédiatement et pour une durée indéterminée, contrairement à ce que prévoit l'initiative. Se fondant sur cette base, l'al. 3 prévoit une composante temporelle concernant la réalisation de l'objectif du zéro net et définit la conséquence en cas de manquement de l'objectif prévu à l'al. 2.

L'al. 2 du contre-projet direct est formulé de sorte que l'engagement en faveur d'un abandon des énergies fossiles soit maintenu, sans toutefois que les instruments à utiliser à cette fin soient définis. En effet, cet objectif pourrait également être atteint, pour des raisons d'efficacité des coûts, par des incitations économiques comme une taxe d'incitation ou
l'échange de quotas d'émission. En outre, le contre-projet permet d'accorder des exceptions également pour des motifs de viabilité économique, et non pas uniquement pour des raisons techniques.

La notion de viabilité économique doit être précisée au niveau de la loi. De manière générale, l'examen permettant de déterminer si des applications pour lesquelles des technologies de substitution existent déjà et ont été testées continueront à être autorisées doit se fonder sur une perspective macroéconomique. En d'autres termes: l'adéquation du passage à des technologies ou agents énergétiques générant peu d'émissions sera évaluée en tenant compte des éventuels coûts de mise en oeuvre associés et de l'utilité indirecte de ces technologies et agents énergétiques pour la réduction des 35 / 50

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coûts externes d'un procédé. Ainsi, ce passage pourrait ne pas être économiquement supportable si les agents énergétiques de substitution ne sont pas disponibles dans des quantités suffisantes à un coût raisonnable, ce qui est encore le cas aujourd'hui, par exemple, pour les carburants alternatifs utilisés dans le transport aérien. Ici, la viabilité économique n'a pas le sens de viabilité commerciale (ou de rentabilité) dans le domaine de l'économie d'entreprise mais plutôt de faisabilité économique au regard de la liquidité dont disposerait une entreprise économiquement saine représentative d'une branche donnée. Il conviendra de préciser dans la législation d'exécution dans quelle mesure des considérations microéconomiques sont également prises en compte dans le sens d'une exception.

Les applications relatives à la sécurité du pays et à la protection de la population concernent plus particulièrement les opérations de l'armée et de la police, mais aussi les services de secours, l'assistance médicale et l'aide en cas de catastrophe.

L'al. 3 du contre-projet reprend le contenu de l'al. 2 de l'initiative. L'obligation de neutralisation par des puits de gaz à effet de serre sûrs figure dans le contre-projet à travers la formulation «par des puits de gaz à effet de serre sûrs en Suisse et à l'étranger». Aucune limitation géographique ne s'applique dès lors à l'emplacement des puits visant à compenser les émissions générées par la consommation d'énergies fossiles et autres émissions de gaz à effet de serre, et ces émissions pourront être compensées aussi bien en Suisse qu'à l'étranger par des technologies d'émission négative.

Il convient d'utiliser à cette fin des puits ne présentant aucun danger pour l'être humain ou l'environnement et pouvant donc être considérés comme sûrs. Par ailleurs, ces puits doivent stocker le CO2 durablement durant plusieurs décennies, idéalement même plusieurs siècles (cf. ch. 2.3.2). Ces exigences doivent être précisées au niveau de la loi conformément aux connaissances scientifiques actuelles.

Concernant l'al. 4 du contre-projet direct, le Conseil fédéral propose de mentionner explicitement la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques. Ces zones en particulier sont généralement moins bien desservies par les transports publics.

Afin de
tenir compte des avis émis lors de la consultation, le Conseil fédéral prévoit également de mentionner clairement la recherche à l'al. 4 (cf. ch. 6.2.2). En la désignant explicitement comme un instrument de la politique climatique, la recherche, qui est à la base de tout processus d'innovation et de développement, est ainsi reconnue à sa juste valeur.

Art. 197, ch. 13

Dispoitions transitoires ad art. 74a (Politique climatique)

Tout comme dans l'initiative, les dispositions transitoires proposées par le contre-projet direct précisent que les objectifs intermédiaires à atteindre d'ici à 2050 en matière d'émissions de gaz à effet de serre doivent conduire au moins à une réduction linéaire.

Ces objectifs devront être fixés dans la loi. En revanche, contrairement à ce que prévoit l'initiative, les instruments doivent être axés sur la réalisation d'objectifs intermédiaires et non sur le respect de la trajectoire de réduction (cf. ch. 4.2.1 et 6.2.2). En ce sens, la norme constitutionnelle proposée offre une plus grande marge de manoeuvre au législateur. L'obligation de respecter les objectifs intermédiaires fixés dans 36 / 50

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la législation d'exécution impose que, s'il s'avère que l'objectif de réduction ne peut être atteint, les mesures concernées soient adaptées.

Le fait que les dispositions transitoires figurent sous un ch. 13 dans le contre-projet et 12 dans l'initiative n'a aucune signification matérielle. Il se trouve que depuis le lancement de l'initiative pour les glaciers, le ch. 12 de l'art. 197 Cst. a été pris par d'autres dispositions transitoires. La note indique que le chiffre définitif sera fixé par la Chancellerie fédérale après l'acceptation éventuelle de l'art. 74a par le peuple et les cantons.

6.5 Conséquences Les diverses conséquences de la nouvelle disposition constitutionnelle dépendent de la manière dont le législateur mettra en oeuvre les nouvelles compétences.

La loi sur le CO2 totalement révisée, si elle avait été acceptée, et les mesures énumérées au ch. 2.2 auraient posé les premiers jalons en vue d'atteindre l'objectif de zéro émission nette. Or pour réaliser ce dernier, les efforts déployés devront donc être intensifiés ­dans le cadre notamment des périodes à venir (cf. ch. 4.2.1), mais également du développement de la politique énergétique actuelle ­, comme le montrent des études sur lesquelles se fonde la stratégie climatique à long terme (cf. ch. 2.3). Différentes options existent pour continuer à développer et pour adapter la combinaison de mesures actuelle. Une évaluation des conséquences plus détaillée devra être réalisée lors de l'élaboration des lois d'exécution. En effet, elle permettra de fournir des indications destinées à aménager de manière optimale les mesures politiques.

6.5.1 Conséquences pour la Confédération En approuvant l'accord sur le climat le 16 juin 2017, le Parlement a adhéré au principe de l'objectif de zéro émission nette. En vertu de l'art. 4, par. 1, dudit accord, la limitation de la hausse de la température globale implique une compensation des émissions de gaz à effet de serre mondiales par des prestations de puits de carbone d'ici la seconde moitié du siècle. Ce délai étant quelque peu vague, le Conseil fédéral l'a concrétisé par sa décision du 28 août 2019 de réduire, d'ici à 2050, à zéro net les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse. En ce sens, le contre-projet direct ne devrait pas entraîner de conséquences supplémentaires pour la Confédération et les cantons en comparaison de la volonté exprimée par la Suisse.

Le développement des technologies et des bases décisionnelles requises pour la transition vers le zéro net nécessite d'importants travaux de fond de la part de l'administration. Conformément au rapport du Conseil fédéral sur l'importance des émissions

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négatives de CO2 pour la Suisse51, il conviendra en particulier d'élaborer, sous la conduite de OFEV dans le cadre du développement de la politique climatique suisse, une feuille de route qui montrera plus concrètement comment produire d'ici à 2050 les émissions négatives nécessaires. Il conviendra de tenir compte de la reconfiguration nécessaire de l'approvisionnement énergétique, qui devra, d'ici à 2050, être assuré entièrement au moyen d'énergies renouvelables et de l'infrastructure idoine. Sont concernés non seulement la production et l'acheminement d'énergies renouvelables, mais aussi la distribution via les infrastructures de réseau et voies de transport correspondantes. L'élaboration et la mise en oeuvre de cette feuille de route nécessiteront notamment un développement des connaissances sur les liens systémiques, une promotion plus ciblée de la recherche, une clarification des aspects juridiques et des questions de gouvernance et la mise en place de coopérations nationales et internationales. Les ressources nécessaires pour assumer ces tâches de grande ampleur au sein de l'OFEV et de l'OFEN sont estimées à deux postes à plein temps.

Les travaux d'élaboration de la feuille de route devront permettre de définir le besoin de ressources supplémentaires de l'administration fédérale à moyen terme pour développer les capacités requises en matière d'émissions négatives. Les éventuelles conséquences de la disposition constitutionnelle proposée sur le personnel seront précisées dans le cadre de la législation d'exécution.

Sur le plan des recettes, il convient de mentionner l'accentuation, en raison de la décarbonation des transports et de la fourniture de chaleur nécessaire pour pouvoir réaliser les objectifs climatiques, de la tendance actuelle présentée au ch. 2.2.3 concernant la baisse des recettes provenant de l'impôt sur les huiles minérales (y c. surtaxe correspondante). Avec un montant total de 4,5 milliards de francs en 2019, soit 6,1 % des recettes ordinaires, l'impôt sur les huiles minérales est une source de recettes importante pour la Confédération. Aujourd'hui, il est essentiellement utilisé pour financer des tâches dans les domaines du transport routier et aérien. Les pertes de recettes résultant de l'abandon souhaité des carburants fossiles revêtent une importance majeure, car ces
derniers sont soumis à un taux d'impôt bien plus élevé que les combustibles52. Pour autant qu'ils respectent des critères écologiques et sociaux, les biocarburants tels que le biogaz, le bioéthanol ou le biodiesel bénéficient d'un allègement fiscal jusqu'à fin 202353. Les travaux menés actuellement par la Confédération sur une taxe basée sur les kilomètres parcourus en remplacement de l'impôt sur les huiles minérales (cf. ch. 2.2.3) montrent différentes possibilités afin de garantir à long terme le financement des infrastructures de transport.

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52

53

Rapport du Conseil fédéral du 12 décembre 2018 en réponse au postulat 18.4211 Thorens-Goumaz. «Quelle pourrait être l'importance des émissions négatives de CO2 pour les futures politiques climatiques de la Suisse?»; www.parlement.ch > 18.4211 > Rapport en réponse à l'intervention parlementaire.

Depuis janvier 2021, l'impôt sur les huiles minérales se monte, par litre, à 76,8 centimes pour l'essence sans plomb, à 79,5 centimes pour l'huile diesel, et à 0,3 centime pour l'huile de chauffage extra-légère. Cf. www.ezv.admin.ch > Administration fédérale des douanes > Infos pour entreprises > Impôts et redevances > Importation en Suisse > Impôt sur les huiles minérales.

Loi fédérale du 20 décembre 2019 sur la reconduction des allégements fiscaux accordés pour le gaz naturel, le gaz liquide et les biocarburants et sur la modification de la loi sur le CO2, RO 2020 1269.

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D'autres changements seront possibles sur le plan des recettes, notamment du fait de l'éventuelle adaptation future des instruments (taxe sur le CO2 dans les secteurs des transports et du chauffage ou les prestations de remplacement incombant aux importateurs de véhicules n'ayant pas rempli leurs objectifs.

Il conviendra de déterminer dans quelle mesure la Confédération encouragera, avec ces recettes, le développement de nouvelles technologies destinées à devenir des instruments majeurs de la politique climatique, tels que les émissions négatives ou les technologies de CCS.

De manière générale, l'impact de mesures plus rigoureuses de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur l'activité économique aurait des répercussions également sur la base fiscale de l'impôt fédéral direct ainsi que sur la TVA. Cet effet serait toutefois vraisemblablement minime, l'impact sur l'économie étant faible (cf. ch. 6.5.3).

Enfin, une politique climatique cohérente qui permette de réaliser l'objectif du zéro net contribuera, à long terme, aux efforts déployés au niveau international pour endiguer les changements climatiques. De cette manière, la Confédération pourrait éviter de futures dépenses, par exemple pour l'entretien de l'infrastructure. Par ailleurs, comme indiqué plus en détail au ch. 6.5.5, la réduction des émissions de CO2 entraînera aussi une réduction d'autres polluants, ce qui diminuera les dépenses liées à la santé.

6.5.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne En raison des tâches qu'ils exécutent en matière de politique énergétique et, en particulier, des compétences qu'ils assument en matière de mesures dans le domaine du bâtiment, les cantons peuvent être impactés par des règles de politique climatique plus rigoureuses. La mesure dans laquelle la norme constitutionnelle proposée pourrait affecter ces compétences dépendra de la législation d'exécution. Mais aucune conséquence directe sur les finances cantonales n'est attendue.

Les budgets des cantons subiraient toutefois des effets indirects. Bien que son impact sur les économies cantonales devrait être faible, le projet pourrait avoir des conséquences sur les finances des cantons, en particulier sur les recettes. La configuration future des instruments de politique climatique déterminera la mesure dans laquelle les cantons et leur économie seront touchés. De manière générale, les cantons qui consomment des agents énergétiques fossiles en grande quantité pourraient être plus fortement touchés, cette consommation se caractérisant par des facteurs tels que la structure économique, le revenu, le climat, l'offre de transports publics ou encore la disponibilité des énergies renouvelables ou le passage à celles-ci.

Comme indiqué au ch. 6.4, les régions de montagne et les régions périphériques sont désavantagées sur différents plans tels que la desserte par les transports publics et le climat. L'article constitutionnel proposé tient compte, lui aussi, de la situation des régions de montagne et des régions périphériques. Par conséquent, dans le cadre de

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l'élaboration de la législation d'exécution, la situation économique des régions de montagne sera intégrée, par exemple par des mesures dans le domaine de la mobilité.

La disposition constitutionnelle proposée pourrait avoir des conséquences indirectes sur les finances cantonales, notamment en raison d'une baisse des recettes provenant de l'impôt sur les huiles minérales (cf. ch. 6.5.1): les contributions fédérales actuelles pour le trafic d'agglomération (par le biais du fonds pour les routes nationales et le trafic d'agglomération) et les contributions aux routes principales cantonales, aux routes principales dans les régions de montagne et les régions périphériques et à d'autres tâches en lien avec la circulation routière (par le biais du financement spécial pour la circulation routière) sont couvertes en grande partie par les recettes provenant de l'impôt sur les huiles minérales. Ainsi, le remplacement étudié actuellement de l'impôt sur les huiles minérales par une taxe basée sur les kilomètres parcourus revêt une importance également pour le financement à long terme du transport routier cantonal.

6.5.3 Conséquences pour l'économie La réduction des émissions à zéro net d'ici à 2050 suppose que les investissements soient, aujourd'hui déjà, axés sur cet objectif. Si les cycles de renouvellement sont utilisés de manière cohérente pour remplacer les installations, les véhicules et les systèmes de chauffage par des technologies générant moins de CO2, il sera possible d'économiser des frais d'exploitation et d'éviter de coûteux investissements inappropriés. Aujourd'hui déjà, plusieurs solutions de substitution renouvelables se révèlent concurrentielles, notamment dans le domaine de l'électromobilité ou de la production de chaleur.

Les efforts déployés dans tous les domaines doivent donc continuer d'être renforcés afin que les émissions de l'ensemble des secteurs puissent baisser dans toute la mesure du possible. Les investissements dans les gains en efficacité énergétique sont souvent rentabilisés en quelques années grâce aux économies réalisées. La réalisation de l'objectif de zéro émission nette implique toutefois aussi l'extension et la restructuration du système d'approvisionnement en énergie actuel, encore fortement marqué par les agents énergétiques fossiles, y compris de l'infrastructure du réseau, ainsi que des investissements dans des technologies d'émission négative (cf. ch. 2.3.2).

Les résultats obtenus à partir des modélisations des Perspectives énergétiques 2050+ montrent que, d'ici à 2050, 1400 milliards de francs supplémentaires devront être investis dans le système énergétique, indépendamment de l'objectif du zéro net. Les investissements supplémentaires inhérents à ce dernier s'élèveront à 109 milliards de francs au total, soit 8 % de plus54. Les coûts d'exploitation des installations d'approvisionnement en énergie augmenteront d'environ 14 milliards de francs. Dans le même temps, la réduction des émissions à zéro net permettra de réaliser des économies sur les coûts de l'énergie à hauteur de 50 milliards de francs, notamment grâce à l'abandon des importations d'agents fossiles. La différence entre les investissements

54

Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020), p. 89.

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supplémentaires nécessaires et les économies réalisées en matière de coûts énergétiques sur la période allant de 2020 à 2050 donne lieu à des coûts économiques annuels directs de près de 2,4 milliards de francs55.

La restructuration du système d'approvisionnement énergétique et d'autres adaptations des systèmes de production, nécessaires pour réduire les émissions de manière globale, entraînent une modification de la structure sectorielle de la production et de la création de valeur, et par là de l'emploi. Les mesures de politique climatique conduisent à un abandon des produits et procédés émettant d'importantes quantités de CO2. Elles renforcent ainsi l'imputation des coûts externes de la consommation d'énergies fossiles à ceux qui les occasionnent.

Les entreprises adapteront leurs modèles commerciaux afin de les rendre compatibles avec le zéro net. Les ménages et les entreprises consommant peu d'énergie seront récompensés si les produits des taxes sur l'énergie leur sont, comme aujourd'hui, redistribués. À l'inverse, les branches fortement consommatrices d'énergie et générant d'importantes quantités d'émissions de gaz à effet de serre, telles que les secteurs qui reposent sur les matières premières (industrie de l'acier, du ciment, du papier) ou le secteur aérien, seront particulièrement touchés par les coûts des prestations préalables élevés en raison du renchérissement des énergies fossiles. Aujourd'hui, les allègements et les exceptions accordés aux entreprises de ces branches permettent de conserver la compétitivité de la place économique suisse. La nouvelle norme constitutionnelle reprend les principes inscrits dans la stratégie climatique à long terme, et précise que la transition vers le zéro net doit être économiquement supportable.

Il est aussi possible que des agents énergétiques fossiles soient encore utilisés en petites quantités en 2050 parce que les substituts ne seront pas disponibles en quantités suffisantes ou à un coût raisonnable, ou alors que leur production génère des gaz à effet de serre ailleurs. Des problèmes liés au trafic transfrontalier pourraient également se poser si les technologies de propulsion fossile sont encore courantes à l'étranger.

À partir de 2050, les émissions quantifiables de gaz à effet de serre générées par le transport aérien devraient aussi être
compensées par des émissions négatives si ces émissions ne peuvent être réduites par le biais de carburants neutres pour le climat ou de systèmes de propulsion de substitution. Pour ce type de cas, le contre-projet supprime l'exigence selon laquelle les émissions d'agents énergétiques fossiles doivent être compensées dans des puits situés en Suisse. Les désavantages concurrentiels potentiels pour certains secteurs, comme le transport aérien, sont ainsi atténués.

Concernant le commerce extérieur, le contexte international joue un rôle majeur: en se fixant l'objectif d'atteindre zéro émission nette d'ici à 2050, la Suisse s'aligne sur les stratégies de ses principaux partenaires commerciaux (cf. ch. 4.2.1). Aucune baisse de compétitivité de l'industrie nationale ni aucun effet sectoriel consécutif sur le commerce extérieur ne sont donc à prévoir. Des objectifs climatiques ambitieux encouragent l'innovation technique, et les pays qui se seront attelés suffisamment tôt au développement de technologies d'avenir pourront en profiter. Ils maintiendront ainsi la compétitivité de leur économie dans les marchés porteurs en pleine expansion.

55

Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020), p. 88.

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En Suisse, la réduction des émissions à zéro net offre des opportunités de croissance dans certaines branches. La Suisse compte un grand nombre d'entreprises novatrices et le secteur des technologies propres (cleantech) y est fortement représenté. Au cours des dernières années, ce secteur a connu une croissance nettement supérieure à la moyenne, et a vu sa valeur ajoutée pratiquement doubler depuis 2000. Selon la définition de l'Office fédéral de la statistique, le secteur environnemental regroupe «les activités qui produisent des biens ou des services destinés soit à protéger l'environnement de la pollution et de toutes autres dégradations, soit à gérer les ressources naturelles de façon à éviter leur épuisement»56. Les possibilités en matière d'énergies renouvelables, d'économies d'énergie et de gestion de l'énergie se sont considérablement accrues. L'emploi dans le secteur des cleantech a augmenté de 87 % depuis 2000 et représente 150 000 équivalents plein temps. Dans l'ensemble, le secteur des cleantech ainsi que d'autres branches importantes pour ce secteur, comme les transports publics, emploient aujourd'hui 5,1 % de la main-d'oeuvre et contribuent à hauteur de 4,2 % au produit intérieur brut (PIB).

On peut partir du principe que ces évolutions positives se renforceront encore avec l'objectif du zéro net. Celui-ci offre également des possibilités de croissance en dehors du secteur des cleantech, notamment dans le domaine des technologies de l'information, qui peuvent contribuer à abaisser les émissions dans différents domaines grâce à des solutions numériques, ou dans les domaines des assurances et de la finance, qui peuvent augmenter leur compétitivité grâce à des services financiers durables et respectueux du climat57, ou encore de l'économie forestière, dont la production devrait augmenter en raison de la demande accrue en biomasse. La place de recherche devrait, elle aussi, profiter d'une orientation cohérente sur l'objectif du zéro net.

La transition vers le zéro net s'accompagnera d'un changement structurel sectoriel accéléré. Une étude des conséquences économiques d'une telle transition, comprenant une analyse des effets régionaux et cantonaux et des effets de répartition possibles, sera disponible en janvier 2022.

Toutefois, les mesures choisies détermineront les effets de la
réduction des émissions de gaz à effet de serre sur des indicateurs macroéconomiques tels que le PIB, la prospérité et l'emploi. Les effets de la répartition dépendent, eux aussi, principalement de la combinaison de mesures de politique climatique concrètes. Une analyse détaillée des conséquences devra donc être réalisée lors de l'élaboration des lois d'exécution.

Une évaluation économique approfondie publiée par le Conseil fédéral le 1er décembre 2017 sur la politique climatique pour la période postérieure à 2020 a montré que les instruments éprouvés de la politique climatique permettaient de réduire sensiblement les émissions, notamment dans les secteurs du bâtiment et de l'industrie, tout en préservant la compétitivité des entreprises et en étant socialement acceptables grâce à des mécanismes appropriés de redistribution des taxes prélevées58.

56 57

58

Cf. www.bfs.admin.ch > Trouver des statistiques > Espace, environnement > Compatibilité environnementale > Biens et services environnementaux.

Cf. Conseil fédéral (2020). Rapport «Le développement durable dans le secteur financier en Suisse», dans lequel il est dit que la place financière suisse entend renforcer son rôle de référence mondiale en matière de services financiers durables.

OFEV (2017)

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Les coûts de la réduction des émissions à zéro net sont compensés par les avantages retirés des coûts évités qui seraient induits par un changement climatique non maîtrisé.

Cela aussi grâce à la coopération internationale.

Les changements climatiques causent, entre autres, des dommages accrus aux infrastructures, des coûts de santé plus élevés, une baisse de la productivité agricole et des rendements plus faibles dans les secteurs économiques particulièrement touchés, notamment le tourisme d'hiver. Si les mesures prises pour contrer les changements climatiques sont insuffisantes, voire inexistantes, les effets et les coûts induits continueront d'augmenter au fil du temps. En cas d'élévation trop importante de la température, le risque d'un dépassement des points de basculement (tipping points), qui aurait pour effet de modifier de manière permanente et irréversible le système climatique, n'est pas à exclure. Les coûts induits par le dépassement de ces points de basculement seraient considérables.

L'École polytechnique fédérale de Lausanne59 estime que la perte de PIB en cas de changements climatiques non maîtrisés pourrait atteindre 1,4 % en 2060. L'étude ne tient toutefois pas compte des événements inhabituels, tels que les vagues de chaleur exceptionnelles ou les périodes de sécheresse. Des études antérieures60 tablent sur une forte augmentation des coûts en cas d'élévation de la température au-dessus de 2 °C, surtout après 2050, qui pourrait représenter plusieurs pour cent du PIB de la Suisse vers la fin du siècle. Des coûts supplémentaires s'élevant à 1,1 % du PIB pourraient survenir en raison de pertes à l'exportation et d'interruptions des chaînes d'approvisionnement61. Dans le domaine des infrastructures, des changements climatiques non maîtrisés pourraient causer des dommages annuels à hauteur de 1 milliard de francs d'ici le milieu du siècle62. Dans le secteur de la santé, les coûts annuels pourraient même atteindre 11 milliards de francs à partir de 206063. Des travaux qui examinent les coûts des changements climatiques au niveau macroéconomique montrent que les coûts de l'inaction, en d'autres termes les coûts d'un réchauffement mondial non contrôlé, atteindront pour la Suisse en 2050 déjà un montant annuel équivalent à 4 % du PIB64. Des chiffres généralement un peu plus élevés sont
articulés dans des études internationales comme le rapport Stern65 ou les estimations de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)66), selon lesquelles la perte mondiale de PIB pourrait atteindre 10 % vers la fin du siècle.

Il convient de noter que les coûts et les avantages de la réduction à zéro net des émissions de gaz à effet de serre évoluent différemment au fil du temps. Conformément aux objectifs définis dans l'accord sur le climat, il sied de réduire ces émissions, en particulier les émissions de CO2, le plus rapidement et le plus largement possible en raison de leur persistance dans l'atmosphère. La restructuration de l'approvisionnement énergétique doit donc être accélérée au cours des prochaines années afin de 59 60 61 62 63 64 65 66

Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) (2017) Ecoplan / Sigmaplan (2007) Infras / Ecologic / Rütter + Partner (2007). L'étude a été actualisée depuis. On a toutefois renoncé à effectuer une estimation quantitative des coûts.

Swiss Economics (2019) Vöhringer et al. (2019) Kahn et al. (2019) Stern (2006) OCDE (2015)

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s'achever d'ici le milieu du siècle. La plupart des investissements nécessaires et des coûts interviendront donc pendant cette période, alors que les avantages des mesures prises par la communauté internationale à l'aune de l'accord sur le climat ne se feront pleinement sentir qu'à long terme. En effet, les coûts d'un réchauffement climatique effréné augmenteront assez lentement à court et moyen terme, mais fortement au-delà de 2050.

Dans l'ensemble, le bénéfice à long terme de mesures de protection du climat cohérentes se révélera supérieur aux investissements consentis, comme les conséquences économiques, très probablement dès le milieu du siècle, et avec certitude dans un avenir plus lointain.

6.5.4 Conséquences sociales Des mesures rigoureuses de politique climatique devant permettre d'atteindre l'objectif de zéro émission nette renforcent l'attrait des solutions de substitution aux énergies fossiles. La demande pour les biens énergivores et les combustibles fossiles devrait baisser.

Une protection du climat renforcée afin d'atteindre l'objectif de zéro émission nette doit préserver les intérêts des générations futures. Le contre-projet entend donc favoriser la solidarité intergénérationnelle, en contribuant à l'atténuation des changements climatiques, à une gestion rationnelle, économe et efficace des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables et à une réduction des risques environnementaux.

6.5.5 Conséquences environnementales Le principal objectif environnemental du présent article constitutionnel consiste à ce que, d'ici à 2050, la Suisse n'émette plus davantage de gaz à effet de serre que ce qu'elle est capable de compenser durablement par des puits de gaz à effet de serre sûrs. Cependant, d'autres effets environnementaux (secondaires) pourraient découler de plusieurs mesures de politique climatique susceptibles d'être utilisées pour atteindre l'objectif du zéro net. Ainsi, l'assainissement énergétique des bâtiments et le remplacement des combustibles et des carburants fossiles par des énergies non polluantes contribuent simultanément à réduire les polluants atmosphériques tels que les oxydes d'azote, le monoxyde de carbone, les poussières fines et l'ozone, ce qui se traduira par une diminution des affections liées à la pollution de l'air et des décès, et par une baisse des coûts de santé et des dégâts causés aux bâtiments. La combustion des énergies renouvelables ne présentera toutefois un bilan positif pour la qualité de l'air qu'à la condition qu'elle se fasse dans des installations à faibles émissions de poussières fines. Parmi les autres effets secondaires environnementaux importants qui se manifestent, on peut citer les effets sur les émissions de bruit, la qualité du sol ou la biodiversité. Dans le secteur des transports, les effets externes engendrés par la pollution atmosphérique s'élèvent actuellement à 4 milliards de francs, ceux liés aux

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émissions de bruit à 2,7 milliards de francs et ceux résultant des dommages causés à la nature et au paysage à 1,2 milliard de francs67.

6.6 Aspects juridiques 6.6.1 Rapport avec d'autres dispositions constitutionnelles En vertu de l'art. 139, al. 5, Cst., l'Assemblée fédérale peut opposer un contre-projet à une initiative populaire.

Le Conseil fédéral soumet à l'Assemblée fédérale un contre-projet direct à l'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» en lui proposant de l'adopter et de le soumettre au peuple et aux cantons parallèlement à l'initiative, avec pour recommandation de refuser l'initiative et d'accepter le contre-projet. Si l'initiative n'est pas retirée, le contre-projet sera soumis au vote du peuple et des cantons en même temps que l'initiative, selon la procédure prévue à l'art. 139b Cst.

L'art. 74, al. 1, Cst. (Protection de l'environnement) confère à la Confédération la compétence de légiférer sur la protection de l'être humain et de son environnement naturel contre les effets nuisibles ou incommodants. La portée de l'art. 74 Cst. n'est pas affectée par la réglementation proposée. L'art. 74a Cst. vise à préciser, sur le plan de la protection du climat, la disposition existante relative à la protection de l'environnement. La norme proposée définit ainsi les grandes lignes en vue d'une politique climatique durable, à l'aune de laquelle la Confédération et les cantons prennent des mesures dans le cadre de leurs compétences pour limiter les changements climatiques.

La législation relative à la politique climatique sera intégrée dans les structures existantes ou en création afin d'atteindre l'objectif de zéro émission nette.

Selon l'art. 89, al. 1, Cst. (Politique énergétique), la Confédération et les cantons garantissent un approvisionnement énergétique respectueux de l'environnement et économiquement optimal, ainsi qu'une consommation économe et rationnelle de l'énergie. L'al. 2 confère à la Confédération la compétence de fixer les principes applicables à l'utilisation des énergies indigènes et des énergies renouvelables et à la consommation économe et rationnelle de l'énergie. La norme constitutionnelle proposée respecte le principe de la sécurité d'approvisionnement en tenant compte des possibilités techniques, de la viabilité économique, de la sécurité du pays et de la protection de la population dans le cadre de la réduction de la consommation de combustibles et de carburants
fossiles. En outre, la norme proposée concrétise la disposition existante de sorte que des mesures de limitation des risques et effets des changements climatiques allant au-delà des aspects de politique climatique puissent être élaborées et prises. Les compétences des cantons en matière de mesures concernant la consommation d'énergie dans les bâtiments (art. 89, al. 4, Cst.) ne sont pas affectées par la norme proposée.

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6.6.2 Compatibilité du contre-projet direct avec les obligations internationales de la Suisse Le contre-projet direct du Conseil fédéral à l'initiative pour les glaciers est compatible avec toutes les obligations internationales de la Suisse.

En fixant l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, la Suisse apporte sa contribution à la limitation du réchauffement planétaire en dessous du seuil critique de 1,5 °C et remplit le mandat en matière de politique climatique défini dans l'accord sur le climat.

En vertu de l'Accord du 23 novembre 2017 entre la Confédération suisse et l'Union européenne sur le couplage de leurs systèmes d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre68, par lequel les émissions de CO2 générées par le transport aérien sont incluses pour la première fois dans le SEQE de la Suisse, les flux de transaction nets de droits d'émission entre les SEQE doivent être imputés conformément aux principes adoptés dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Toutefois, aucune règle relative à l'imputation n'a encore été définie entre la Suisse et l'UE en raison de décisions en suspens concernant la mise en oeuvre de l'art. 6 de l'accord sur le climat69.

Le régime CORSIA de l'OACI, qui vise une croissance neutre en CO2 de l'aviation civile internationale à partir de 2021 et auquel la Suisse participe depuis le début avec 82 autres États, s'appliquera dans un premier temps jusqu'en 2035; il sera ensuite maintenu ou remplacé par un nouveau système, en fonction de ses effets. Les certificats de CO2 générés par le biais de projets de compensation dans un pays («pays hôte») et imputés par un exploitant d'aéronefs dans le cadre de CORSIA ne peuvent pas être en même temps imputés par le pays hôte à son objectif climatique national70.

68 69 70

RS 0.814.011.268 RS 0.814.012 Cf. OACI (2019), Eligibility Criterion 7, p. 3.

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Glossaire Captage et stockage du carbone (CSC) (Carbon Capture and Storage, CCS): technologies consistant à capter le CO2 directement à la source (p. ex. libéré lors de la production de ciment ou issues de l'incinération des déchets), puis à le stocker à long terme. Si le CO2 provient de sources fossiles ou géogènes, il s'agit d'une mesure de réduction des émissions. S'il est d'origine biogène, d'une mesure de production d'émissions négatives (bioénergie avec captage et stockage du CO2 [BECCS], cf.

«Émissions négatives»).

Émissions grises: outre les émissions de gaz à effet de serre produites dans le pays, la Suisse est responsable d'autres émissions générées à l'étranger dans le cadre de la production et de l'approvisionnement de biens et de services, ou de la mise en place d'une infrastructure. Les émissions grises ne sont pas prises en compte dans l'inventaire national des gaz à effet de serre.

Réservoir de carbone: composante du système climatique, autre que l'atmosphère, ayant la capacité de stocker, d'accumuler ou de libérer du carbone. L'origine du carbone est indéterminée: il peut provenir soit de l'atmosphère (cf. «Émissions grises») soit être généré par une installation (cf. «Captage et stockage du carbone (CSC)»). Le stockage du carbone peut ainsi conduire à une réduction des émissions de CO2, ou à la production d'émissions négatives.

Émissions négatives, technologies d'émission négative: activités anthropiques, c'est-à-dire causées par l'homme, qui permettent d'extraire de l'atmosphère des gaz à effet de serre au moyen de procédés naturels et techniques, et de les stocker durablement. Les possibilités technologiques offertes pour la production d'émissions négatives sont souvent focalisées sur le CO2, raison pour laquelle le terme «technologies d'émission négative» est souvent synonyme d'élimination du dioxyde de carbone (Carbon Dioxide Removal, CDR).

Puits: procédé, activité ou mécanisme, naturel ou technique (intervention humaine), qui permet d'extraire des gaz à effet de serre de l'atmosphère lorsque la quantité de CO2 produite est supérieure à la quantité absorbée, et de les stocker (cf. «Émissions négatives»). Étant donné que le CO2 est le gaz à effet de serre le plus présent dans l'atmosphère mais aussi le plus persistant et que les procédés d'extraction d'autres gaz à effet
de serre de l'atmosphère sont pour l'heure peu connus, les discussions sur les puits de gaz à effet de serre se concentrent sur le CO2; on parle donc aussi de puits de carbone (cf. «Réservoir de carbone»).

Prestations de puits de carbone: bilan imputable au plan international entre les émissions de gaz à effet de serre et l'absorption de CO2 par les réservoirs de carbone.

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