FF 2021 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

21.047 Message concernant la loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables du 18 juin 2021

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer les interventions parlementaires suivantes: 2012 M 12.3253 Réseaux électriques. Assurer des retours sur investissement décents pour permettre la restructuration du système énergétique (N 15.6.12, Gasche; E 13.12.12) 2018 M 18.3000 Stimuler les investissements pour maintenir à long terme les installations suisses de production électrique (E 5.3.18, CEATE-E; N 11.9.18) 2019 M 19.3004 Sécurité de l'approvisionnement en électricité à long terme.

Garantie et clarification des responsabilités (E 18.6.19, CEATE-E; N 9.12.19) 2019 M 19.3742 Installations de production d'électricité renouvelable. Autoriser un endettement temporaire du fonds alimenté par le supplément pour réduire les listes d'attente (E 10.9.19, Müller Damian; N 17.12.20) 2019 M 19.3755 Intégrer de manière efficiente les énergies renouvelables dans les réseaux électriques (N 27.9.19, Guhl; E 3.6.20)

2021-2204

FF 2021 1666

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

18 juin 2021

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Guy Parmelin Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2 / 154

FF 2021 1666

Condensé Avec la Stratégie énergétique 2050, la Suisse veut rendre son système énergétique plus durable et plus respectueux du climat tout en assurant une sécurité d'approvisionnement élevée. La mise en oeuvre se fait par étapes. Pour atteindre l'objectif climatique fixé par le Conseil fédéral pour 2050, une électrification rapide du secteur des transports et du chauffage s'avère nécessaire. Il est par conséquent indispensable de développer plus fortement et opportunément la production d'électricité issue d'énergies renouvelables, et des mesures spécifiques visant à renforcer la sécurité de l'approvisionnement en électricité sont nécessaires. Cela implique des modifications de la loi sur l'énergie et de la loi sur l'approvisionnement en électricité, lesquelles sont proposées conjointement dans la présente loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables.

Contexte En vertu de la Constitution, la Confédération s'emploie à promouvoir un approvisionnement énergétique suffisant, diversifié, sûr, économiquement optimal et respectueux de l'environnement. La nouvelle orientation de la politique énergétique, approuvée par le peuple suisse dans le cadre de la Stratégie énergétique 2050, permet à la Confédération de contribuer à ce que l'approvisionnement énergétique du pays soit durable et respectueux du climat. Le nouvel objectif du Conseil fédéral ­ à partir de 2050, la Suisse ne devra plus rejeter dans l'atmosphère davantage de gaz à effet de serre que ce que les réservoirs naturels et artificiels sont capables d'absorber («zéro émission nette») ­ requiert le développement de la Stratégie énergétique 2050.

Il est notamment nécessaire de remplacer en grande partie les agents énergétiques fossiles dans le domaine des transports et du chauffage par du courant produit dans le respect de l'environnement. Cela implique de développer plus fortement et opportunément la production d'électricité issue d'énergies renouvelables. Dans le but de garantir une sécurité d'approvisionnement élevée de la Suisse tout au long du processus de transformation et au-delà, il est indispensable de développer maintenant les conditions-cadres légales et de prévoir les mesures spécifiquement nécessaires pour les mois d'hiver. Comme l'électricité est produite de manière toujours plus
décentralisée, le cadre légal doit contribuer à son intégration dans le système global en plus de développer la capacité de production d'électricité. Cela permet une transition sûre et efficace d'un système d'électricité centralisé vers une organisation plus décentralisée.

Contenu du projet Afin de renforcer la sécurité d'approvisionnement spécifiquement en hiver, le Conseil fédéral entend introduire dans la loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEl) deux nouvelles mesures, qui se complètent l'une l'autre. D'une part, le développement de la capacité de production, de 2 TWh, climatiquement neutre et d'une disponibilité assurée pendant l'hiver, doit bénéficier d'un soutien financier. Le Conseil fédéral veut ainsi préserver à long terme la capacité d'autonomie de la Suisse, qui est actuellement d'environ 22 jours en moyenne. Il fixe à cette fin un objectif de développement spécifique pour 2040. Le financement du développement sera assuré par un supplément, 3 / 154

FF 2021 1666

aujourd'hui déjà prévu dans la LApEl pour éviter d'éventuels déficits d'approvisionnement en électricité, à la charge des consommateurs d'électricité. Le développement vise en priorité les grandes centrales hydroélectriques à accumulation. D'autre part, il s'agit d'instituer une réserve d'énergie stratégique qui garantit la disponibilité de l'énergie à la fin de l'hiver en plus des mécanismes prévus sur le marché de l'électricité.

Par ailleurs, le Conseil fédéral propose une ouverture complète du marché de l'électricité. Celle-ci permet d'instaurer la même situation de départ pour l'ensemble des consommateurs finaux, producteurs et fournisseurs d'électricité. L'ouverture complète du marché permet une meilleure intégration des énergies renouvelables. Elle permettra ainsi, pour les énergies renouvelables, de nouveaux modèles d'affaires (p.

ex. communautés d'énergie) qui ne sont pas autorisés dans un monopole et pour lesquels il n'y a donc pour l'heure guère d'incitations à l'innovation. Un approvisionnement de base protégeant adéquatement les petits consommateurs finaux contre les tarifs abusifs sera maintenu. Les fournisseurs de l'approvisionnement de base devront proposer, comme produit standard, de l'électricité produite exclusivement à partir d'énergies renouvelables indigènes.

Le Conseil fédéral propose en outre de prolonger les mesures d'encouragement pour le développement des énergies renouvelables jusqu'en 2035. Il s'agit de rapprocher du marché les instruments existants. Le système de rétribution de l'injection prendra fin comme prévu et sera remplacé par des contributions d'investissement. Ce changement se traduit par un allégement administratif et permet un développement plus important avec les mêmes ressources. L'octroi de ces contributions sera désormais possible par le biais de mises aux enchères pour les grandes installations photovoltaïques. Pour les grandes installations hydroélectriques, il y aura davantage de moyens disponibles. Le financement reste assuré par le supplément perçu sur le réseau, qui ne subira pas d'augmentation mais sera prélevé plus longtemps.

De plus, la loi sur l'énergie (LEne) comprendra désormais des valeurs cibles contraignantes pour le développement de la force hydraulique et d'autres énergies renouvelables ainsi que pour la réduction de la consommation
énergétique et électrique par personne d'ici à 2035 et 2050. Le but est d'orienter résolument la politique énergétique vers la sécurité d'approvisionnement et la politique climatique tout en renforçant la sécurité de planification pour les investisseurs.

Enfin, le Conseil fédéral propose aussi des améliorations mineures des bases légales.

En plus de l'introduction d'un cadre pour l'utilisation de la flexibilité liée à la possibilité de gérer le soutirage, le stockage et l'injection de l'électricité, il est nécessaire d'améliorer la transparence des coûts de réseau pour accroître l'efficacité dans le domaine de l'utilisation et du développement des réseaux électriques. Des améliorations sont également visées dans le système de tarification. En outre, l'échange des données et l'accès à celles-ci doivent être organisés plus efficacement. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose un cadre légal pour l'échange et la protection des données et une infrastructure nationale de données énergétiques comprenant un registre de données (datahub). Enfin, il clarifie les responsabilités et les libertés de choix prévues par la loi dans le domaine des systèmes de mesure.

4 / 154

FF 2021 1666

Table des matières Condensé 1

3

Contexte 1.1 Nécessité d'agir et objectifs visés 1.2 Actes législatifs concernés 1.3 Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral 1.4 Classement d'interventions parlementaires

7 7 11

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

15

3

Présentation du projet 3.1 Réglementation proposée dans la LApEl et la LEne 3.1.1 Vue d'ensemble et contexte des mesures importantes 3.1.2 Objectifs portant sur la consommation énergétique et électrique ainsi que sur le développement de l'électricité issue d'énergies renouvelables (LEne) 3.1.3 Renforcement de la sécurité d'approvisionnement pendant les mois d'hiver (LApEl) 3.1.3.1 Sécurité d'approvisionnement 3.1.3.2 Maintien de la capacité d'autonomie 3.1.3.3 Réserve d'énergie en complément du marché 3.1.4 Ouverture complète du marché de l'électricité (LApEl) 3.1.5 Régime d'encouragement jusqu'en 2035 (LEne) 3.1.5.1 Encouragement jusqu'en 2035 et financement 3.1.5.2 Instruments d'encouragement 3.1.5.3 Installations photovoltaïques 3.1.5.4 Grande hydraulique 3.1.5.5 Énergie éolienne 3.1.5.6 Géothermie 3.1.5.7 Petite hydraulique 3.1.5.8 Biomasse 3.1.6 Amélioration de l'efficacité énergétique (LEne) 3.1.7 Utilisation des flexibilités dans le réseau de distribution (LApEl) 3.1.8 Registre de données dans le secteur de l'électricité (LApEl) 3.1.9 Liberté de choix et organisation des systèmes de mesure (LApEl) 3.1.10 Adaptations de la tarification du réseau (LApEl) 3.1.11 Régulation Sunshine (LApEl) 3.1.12 Espace d'innovation non réglementé (LApEl) 3.1.13 Autres mesures en lien avec la sécurité de l'approvisionnement et la sécurité de l'exploitation des réseaux électriques (LApEl)

16 16 16

12 13

20 22 22 23 26 29 33 33 35 37 39 42 42 43 43 44 45 47 49 51 54 55 56 5 / 154

FF 2021 1666

3.2 3.3 3.4

3.1.14 Optimisations dans la LApEl 3.1.15 Optimisations dans la LEne Solutions étudiées Adéquation des moyens requis Mise en oeuvre

57 59 60 63 63

4

Commentaire des dispositions 4.1 Loi sur l'énergie (LEne) 4.2 Loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEl)

5

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

129

6

Conséquences 6.1 Conséquences sur l'état du personnel de la Confédération 6.2 Conséquences financières pour la Confédération 6.3 Conséquences pour le fonds alimenté par le supplément et autres conséquences 6.4 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.5 Conséquences pour les consommateurs finaux (en particulier les ménages et les grands consommateurs) 6.6 Conséquences économiques 6.6.1 Évaluation des conséquences en lien avec la réalisation de l'objectif de zéro émission nette 6.6.2 Évaluations des mesures économiquement importantes 6.6.3 Conséquences pour l'emploi et effets de répartition 6.6.4 Conséquences pour les branches 6.7 Conséquences sociales et environnementales

132 132 133

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.1.1 Bases juridiques 7.1.2 Compatibilité avec les droits fondamentaux 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Frein aux dépenses 7.5 Conformité à la loi sur les subventions 7.6 Délégation de compétences législatives 7.7 Protection des données

145 145 145 146 147 148 148 148 150 150

7

Liste des abréviations utilisées

64 64 79

133 136 136 137 138 139 143 143 145

152

Loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables (Modification de la loi sur l'énergie et de la loi sur l'approvisionnement en électricité) (Projet) FF 2021 1667

6 / 154

FF 2021 1666

Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

Avec la nouvelle orientation de la politique énergétique, approuvée par le peuple suisse dans le cadre de la Stratégie énergétique 2050, la Suisse est en train de rendre son système énergétique plus durable et plus respectueux du climat. Elle entend améliorer l'efficacité énergétique et développer les énergies renouvelables. En même temps, il est nécessaire de réduire les émissions de CO2 générées par la combustion d'agents énergétiques à des fins de production d'énergie motrice ou de chaleur (émissions de CO2 liées à l'énergie): à partir de 2050, la Suisse ne devra plus rejeter dans l'atmosphère davantage de gaz à effet de serre que ce que les réservoirs naturels et artificiels sont capables d'absorber (objectif «zéro émission nette» du Conseil fédéral). En raison de la part élevée d'émissions de CO2 liées à l'énergie dans l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre de la Suisse, cette décision a des conséquences directes sur la politique énergétique de la Confédération. Elle implique une électrification rapide du secteur des transports et du chauffage. Dans ce contexte, il est indispensable de développer plus fortement et opportunément la production d'électricité issue d'énergies renouvelables. Pour pouvoir garantir une sécurité d'approvisionnement élevée de la Suisse tout au long du processus de transformation, il y a lieu de développer maintenant les conditions-cadres légales. L'objectif premier de la loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables (qui réunit les révisions de la loi du 23 mars 2017 sur l'approvisionnement en électricité [LApEl]1 et de la loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie [LEne]2) est donc ­ compte tenu des implications des objectifs climatiques à long terme ­ de créer les conditions nécessaires à un renforcement durable de la sécurité d'approvisionnement.

Objectif principal: renforcer durablement la sécurité de l'approvisionnement en électricité avec des énergies renouvelables indigènes Dans le secteur de l'électricité, d'importantes capacités de production seront déconnectées du réseau ces prochaines années à la suite de la décision de sortie du nucléaire.

Elles devront être remplacées par de nouvelles unités de production. Si la politique énergétique entend poursuivre systématiquement l'objectif de zéro émission nette,
il est nécessaire de renforcer les objectifs de développement pour la production d'électricité issue d'énergies renouvelables et d'adapter les objectifs de consommation énergétique et électrique. Par ailleurs, les objectifs doivent revêtir un caractère plus contraignant. S'agissant du renforcement de la sécurité d'approvisionnement, il convient d'agir à trois niveaux dans cette transformation du système énergétique: Premièrement, il faut s'assurer, en particulier en ce qui concerne l'approvisionnement en électricité pendant les mois d'hiver, que la Suisse dispose d'une capacité de pro-

1 2

RS 734.7 RS 730.0

7 / 154

FF 2021 1666

duction permettant d'assurer qu'à l'avenir également, une quantité suffisante d'énergie est disponible et de répondre à la demande de façon fiable (aspect qualitatif). Les procédures de consultation relatives aux révisions de la LApEl et de la LEne ont suscité des retours clairs à cet égard. Même si la sécurité de l'approvisionnement de la Suisse en électricité bénéficie largement de son intégration dans le marché européen de l'électricité, il s'agit, à moyen et long termes, de développer suffisamment de capacités (de stockage) indigènes. Du côté du consommateur, il y a lieu de tirer parti de potentiels supplémentaires d'amélioration de l'efficacité énergétique (réduction de la consommation), lesquels contribuent également à la sécurité d'approvisionnement.

Quant à la situation de l'approvisionnement à la fin de l'hiver, il est nécessaire de mieux assurer la capacité de production effective alors que le niveau de remplissage des lacs d'accumulation est généralement bas en cette période.

Deuxièmement, le développement concret des énergies renouvelables doit être en phase avec les objectifs définis. Ce développement fournit une contribution fondamentale importante à la sécurité d'approvisionnement (aspect quantitatif). S'il repose sur les seuls mécanismes du marché, ce développement ne progressera pas suffisamment. Le Conseil fédéral a déjà signalé par le passé que de nouvelles mesures seraient nécessaires à plus long terme3. Le Conseil national et le Conseil des États n'étaient alors pas entrés en matière sur sa proposition visant à instaurer un système incitatif (article constitutionnel concernant un système incitatif en matière climatique et énergétique).

L'Office fédéral de l'énergie (OFEN) observe chaque année l'évolution des valeurs indicatives actuellement prévues par la LEne. Ce monitoring révèle que des efforts importants seront nécessaires pour atteindre les valeurs indicatives à plus long terme d'ici 2035. Du fait de l'expiration de l'encouragement en 2023 (en particulier pour l'énergie éolienne et la géothermie) et en 2030 (en particulier pour la grande hydraulique et le photovoltaïque), il existe un risque imminent de ralentissement, voire d'arrêt, du développement et par conséquent d'affaiblissement de la sécurité d'approvisionnement. Pour que les investisseurs potentiels disposent
d'une sécurité de planification suffisante pour prendre leurs décisions, et ainsi favoriser le développement, et pour tenir compte des objectifs (climatiques) ambitieux, la présente révision de lois comprend les adaptations du régime d'encouragement nécessaires.

Troisièmement, l'électricité sera produite de manière plus décentralisée à l'avenir et injectée également dans les niveaux inférieurs des réseaux électriques (réseaux de distribution). Pour relever ce défi de la transformation du système d'approvisionnement, une plus grande flexibilisation du réseau, de la production et de la consommation est importante d'un point de vue économique et sous l'aspect de la sécurité d'approvisionnement. Le nombre des acteurs impliqués dans le système d'électricité augmentera par ailleurs, avec des interactions également plus fréquentes et plus fortes. Pour que cela fonctionne de manière sûre et efficace, il faut instaurer un cadre légal approprié.

3

FF 2013 6771, 6775 s.

8 / 154

FF 2021 1666

Avec le présent projet de loi, le Conseil fédéral répond à ces défis. Ce projet instaure les conditions-cadres et instruments nécessaires afin de renforcer la sécurité d'approvisionnement et d'assurer ainsi durablement un approvisionnement sûr de la Suisse en électricité issue d'énergies renouvelables.

Objectif: renforcer l'innovation et améliorer l'efficacité Cette transformation du système énergétique doit être la plus efficace possible. Le renforcement de l'innovation joue un rôle déterminant en l'espèce. L'ouverture partielle qui prévaut actuellement sur le marché de l'électricité fait obstacle à plusieurs innovations, car les modèles d'affaires novateurs sont en partie entravés. Il est par exemple important d'adapter les conditions-cadres légales de manière à créer des possibilités pour la vente et l'échange d'électricité produite localement («électricité de proximité»). Cela permet d'augmenter la valeur ajoutée directement dans la production décentralisée et, partant, de réduire les besoins d'encouragement. Le cadre légal du marché de l'électricité doit être davantage orienté vers une intégration efficace des énergies renouvelables dans le marché. Dans le contexte de la Stratégie énergétique 2050, une intervention directe est nécessaire au niveau de l'ouverture complète du marché de l'électricité: contrairement à la situation qui prévalait il y a 20 ans, à l'époque de la loi sur le marché de l'électricité, un marché ouvert est aujourd'hui un moyen efficace et important pour l'intégration des énergies renouvelables décentralisées dans le système d'électricité.

Lors de la conception des modèles d'encouragement pour les différentes technologies, il est nécessaire de définir les incitations de telle manière que l'injection de courant réponde autant que possible aux besoins. Enfin, des mesures sont nécessaires pour améliorer l'accès aux données et aux informations, car elles servent de fondement aux innovations et aux nouveaux modèles d'affaires portant sur l'efficacité énergétique et la production d'électricité renouvelable. Elles permettent non seulement d'encourager la production locale, mais aussi de mieux intégrer le courant d'origine renouvelable dans le marché de l'électricité grâce à une utilisation flexible. Les prix de l'électricité sont plus proches de la réalité du marché, plus
flexibles, et l'approvisionnement durable en énergie est renforcé.

La transformation du système d'électricité prévue dans le cadre de la stratégie énergétique implique un développement effectif de la production d'énergie renouvelable et, en même temps, la mise à disposition de l'infrastructure de réseau nécessaire. Les réseaux électriques constituent l'infrastructure déterminante pour le transport et la distribution d'électricité. Avec l'augmentation de la quantité d'électricité injectée de manière décentralisée dans les réseaux de distribution, le simple entretien de l'infrastructure existante ne suffit plus et il devient nécessaire d'optimiser, d'agrandir et de développer cette infrastructure. Même avec une ouverture complète du marché de l'électricité, les réseaux demeurent impérativement dans le domaine réglementé, car ils constituent un monopole naturel. Des modifications de la loi sont notamment nécessaires au niveau de la réglementation du réseau afin d'assurer une intégration efficace des énergies renouvelables dans le réseau à long terme et de parvenir à une prise en charge plus juste des coûts de réseau.

Comme la transformation du système énergétique en lien avec l'objectif de zéro émission nette implique une électrification accrue, d'autres améliorations sont nécessaires 9 / 154

FF 2021 1666

en matière d'efficacité énergétique et électrique et font donc partie du présent projet de loi.

Objectif: améliorer l'orientation client Enfin, le présent projet a pour autre objectif important d'améliorer l'orientation client.

Dans un système énergétique qui sera plus décentralisé, les différents acteurs (consommateurs finaux, prosommateurs [utilisateurs qui sont à la fois consommateur et producteur et d'électricité], prestataires, etc.) joueront un rôle plus important et plus actif qu'aujourd'hui. Pour cela, les petits consommateurs finaux ont, eux aussi, besoin d'avoir accès au marché de l'électricité et partant, aux informations ainsi que d'une transparence accrue des produits et des coûts. L'actuelle ouverture partielle du marché ne leur permet guère de participer activement au marché et de solliciter ou de proposer des services. En ce qui concerne la fourniture d'électricité, aujourd'hui, 99 % des consommateurs finaux sont des clients captifs des gestionnaires d'un réseau de distribution locaux. Ces derniers se procurent eux-mêmes plus de deux tiers de l'électricité consommée dans l'approvisionnement de base en Suisse sur le libre marché. En revanche, l'accès au marché est interdit aux petits consommateurs finaux. Comme clients, ceux-ci sont non seulement limités dans le choix du fournisseur, mais souvent aussi dans celui de la qualité du courant. Le présent projet de loi comprend des éléments qui remédient à ces lacunes, renforcent l'information des acteurs dans leur rôle de clients et améliorent la transparence dans les secteurs de l'économie électrique qui restent soumis à un monopole (en particulier le réseau électrique).

Implications du terme mis aux négociations en vue d'un accord institutionnel avec l'UE Suite au terme mis aux négociations en vue d'un accord institutionnel, l'accord sur l'électricité visé par la Suisse et l'UE n'est plus envisageable jusqu'à nouvel avis. Le Conseil fédéral considère que le présent projet de loi conserve, pour sa part, toute sa validité et son actualité. En effet, le projet de loi n'a jamais été conçu comme un projet de mise en oeuvre d'un accord sur l'électricité. De plus, il contient un éventail de mesures adaptées à la situation de la Suisse, en phase avec les objectifs susmentionnés, en particulier pour le renforcement de la sécurité de
l'approvisionnement en électricité à long terme. En l'absence d'un accord sur l'électricité, il devient encore plus important de mettre rapidement en oeuvre des mesures en ce sens. De l'avis du Conseil fédéral, ces mesures sont énoncées de façon suffisamment générale dans le présent projet de loi pour pouvoir aisément être étendues, si besoin est.

S'agissant des implications à court et moyen termes de la rupture des négociations, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC), en collaboration avec la Commission fédérale de l'électricité (ElCom) et d'entente avec la Société nationale responsable du réseau de transport de l'électricité (Swissgrid), va entreprendre une analyse des effets sur la sécurité d'approvisionnement et la stabilité du réseau. Le DETEC fera rapport à ce sujet au Conseil fédéral jusqu'à l'automne 2021. Dans le même temps, le

10 / 154

FF 2021 1666

DETEC informera le Conseil fédéral des éventuelles mesures prévues par l'ElCom et Swissgrid à brève échéance pour assurer la sécurité d'approvisionnement et la stabilité du réseau à court et moyen termes. Outre des mesures dans le domaine des réseaux, des mesures sont également concevables, de manière générale, dans les domaines de l'efficacité énergétique et de l'efficacité électrique ainsi qu'au niveau de la production d'électricité.

Si la nécessité se faisait sentir, le Conseil fédéral, sur demande de l'ElCom, examinerait d'autres mesures possibles sur la base de l'art. 9 de la LApEl actuelle et prendrait celles qui s'imposent. Ce faisant, il tiendrait compte des implications et de l'interaction avec les mesures prévues dans l'acte modificateur unique pour le renforcement de la sécurité d'approvisionnement. Si les clarifications effectuées montrent qu'il y a lieu d'intervenir également au niveau législatif, le DETEC demandera au Conseil fédéral d'adopter un message complémentaire.

1.2

Actes législatifs concernés

Les modifications législatives nécessaires pour réaliser les objectifs précités doivent intervenir dans la LApEl et la LEne. La LApEl vise à créer les conditions propres à assurer un approvisionnement en électricité sûr ainsi qu'un marché de l'électricité axé sur la concurrence. Les mesures prévues par la loi dans le domaine de la sécurité d'approvisionnement au sens strict (aspect qualitatif) relèvent donc en premier lieu de la LApEl. Il en va de même des mesures visant à renforcer l'efficacité et l'orientation client du marché de l'électricité.

La LEne a un champ d'application plus large. Elle vise à contribuer à un approvisionnement énergétique suffisant, diversifié, sûr, économique et respectueux de l'environnement. Elle comprend des valeurs indicatives de développement et de consommation, aussi bien pour le domaine de l'énergie dans son ensemble que pour celui de l'électricité. Ces valeurs (en tant que composante quantitative) joueront également un rôle important lorsqu'il s'agira d'assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité à l'avenir. Les mesures prévues par la loi pour atteindre ces valeurs indicatives et objectifs doivent donc figurer dans la LEne.

La modification de ces deux lois est nécessaire, car chacune comprend des éléments essentiels, en particulier pour le domaine de la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Dans un souci de cohérence de la législation, le Conseil fédéral soumet au Parlement les modifications des deux lois dans un acte modificateur unique.

11 / 154

FF 2021 1666

1.3

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Les modifications de la LApEl et de la LEne sont annoncées dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20234 et dans l'arrêté fédéral du 21 septembre 2020 sur le programme de la législature 2019 à 20235.

Le projet fait partie de la mise en oeuvre et du développement de la Stratégie énergétique 2050, car il soutient l'augmentation visée à long terme de la production d'électricité issue d'énergies renouvelables et accroît l'efficacité énergétique. Les mesures prévues contribuent à une mise en oeuvre économiquement efficace des objectifs de la stratégie énergétique. Les valeurs cibles remaniées s'alignent sur l'objectif du Conseil fédéral selon lequel, à partir de 2050, la Suisse ne devra pas rejeter dans l'atmosphère davantage de gaz à effet de serre que ce que les réservoirs naturels et artificiels sont capables d'absorber (zéro émission nette). Le renforcement de la sécurité d'approvisionnement au moyen de l'électricité issue d'énergies renouvelables ainsi que l'efficacité énergétique et électrique jettent les bases pour l'électrification et la décarbonisation nécessaires pour y parvenir. Ainsi, le projet de loi soutient la mise en oeuvre de la Stratégie climatique 2050 et de la stratégie pour le développement durable6.

Ces mesures correspondent par ailleurs aux objectifs de la stratégie de la Confédération en matière d'infrastructures7. Cette stratégie doit assurer la performance des infrastructures nationales, à laquelle contribuent les mesures visant la sécurité d'approvisionnement. L'optimisation des conditions-cadres et l'amélioration de la rentabilité, également visées par la stratégie en matière d'infrastructures, sont réalisées dans la mesure où la deuxième étape de l'ouverture du marché et la liberté de choix introduite dans le domaine des systèmes de mesure créent des incitations fondamentales à investir dans de nouvelles technologies. Les lacunes d'efficacité qui subsistent tendent à être supprimées par la dynamique du marché. En outre, la régulation du réseau connaît des améliorations importantes: une meilleure utilisation de la flexibilité, qui est liée à la possibilité de gérer le soutirage, le stockage et l'injection de l'électricité, et les mesures de tarification qui sont en outre prévues entraînent une utilisation plus efficace du réseau et une
optimisation du réseau sur le long terme. Cela va aussi dans le sens de la stratégie Réseaux électriques du Conseil fédéral8.

L'ouverture complète du marché et les améliorations apportées à la régulation du réseau faisaient aussi partie de la Politique de croissance 2016­20199 du Conseil fédéral, puisqu'elles améliorent l'efficacité de l'approvisionnement en électricité. Comme il s'agit d'infrastructures qui ont des effets considérables sur d'autres branches, un

4 5 6 7 8 9

FF 2020 1709, 1792, 1793 et 1830 FF 2020 8087, 8093 www.are.admin.ch > Développement durable > Stratégie pour le développement durable 2016-2019 www.detec.admin.ch > Le DETEC > Stratégie de la Confédération en matière d'infrastructures www.developpementreseaux.ch www.seco.admin.ch > Services et publications > Publications > Changement structurel et Croissance > Croissance > Politique de croissance 2016­2019

12 / 154

FF 2021 1666

renforcement de la sécurité de l'approvisionnement en électricité améliore aussi la capacité de résistance de l'économie dans son ensemble.

De plus, les innovations attendues, liées à la deuxième étape de l'ouverture du marché, et le registre de données (datahub) prévu dans le secteur de l'électricité sont en accord avec la stratégie Suisse numérique. Ils concourent à la réalisation de l'objectif selon lequel l'approvisionnement en énergie futur utilisera des technologies innovantes.

1.4

Classement d'interventions parlementaires

Par le présent message, le Conseil fédéral propose de classer les interventions parlementaires suivantes: 2012 M 12.3253 Réseaux électriques. Assurer des retours sur investissement décents pour permettre la restructuration du système énergétique (N 15.6.12, Gasche; E 13.12.12) 2018 M 18.3000 Stimuler les investissements pour maintenir à long terme les installations suisses de production électrique (E 5.3.18, CEATE-E; N 11.9.18) 2019 M 19.3004 Sécurité de l'approvisionnement en électricité à long terme.

Garantie et clarification des responsabilités (E 18.6.19, CEATE-E; N 9.12.19) 2019 M 19.3742 Installations de production d'électricité renouvelable.

Autoriser un endettement temporaire du fonds alimenté par le supplément pour réduire les listes d'attente (E 10.9.19, Müller Damian; N 17.12.20) 2019 M 19.3755 Intégrer de manière efficiente les énergies renouvelables dans les réseaux électriques (N 27.9.19, Guhl; E 3.6.20) La motion déposée par le conseiller national Urs Gasche, transmise par le Parlement, demande, sous le premier point, de faire en sorte que pour l'approvisionnement de base en matière de distribution de l'électricité, les tarifs soient fixés en fonction des prix du marché et non en fonction des coûts de production et des contrats d'achat à long terme. Le Conseil fédéral répond à cette attente dans le cadre de l'ouverture complète du marché. L'ElCom examine, sur la base des prix d'offres comparables du marché libre et selon d'autres critères, si les tarifs sont équitables dans l'approvisionnement de base.

Les deux motions déposées par la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États (CEATE-E) chargent le Conseil fédéral de soumettre au Parlement des propositions de modifications de la loi visant à créer et maintenir des incitations à l'investissement en faveur du maintien à long terme des installations de production d'électricité. Cette demande s'appuie sur la nécessité de préserver la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Dans le même ordre d'idées, le Parlement a chargé le Conseil fédéral, en adoptant la LEne en vigueur, de lui soumettre un projet d'acte visant à introduire un modèle proche de la réalité du

13 / 154

FF 2021 1666

marché pour la grande hydraulique (art. 30, al. 5, LEne). Les incitations à l'investissement déjà existantes, qui découlent des signaux du marché et des subventions selon le droit en vigueur, sont complétées par la prolongation et le renforcement des mesures d'encouragement prévues dans la LEne ainsi que par les nouvelles contributions d'investissement destinées aux projets de stockage dans la LApEl. Le Conseil fédéral a ainsi satisfait les demandes de ces motions. Quant à la seconde demande formulée dans la motion 19.3004, à savoir la clarification des rôles et des responsabilités en matière de sécurité de l'approvisionnement en électricité sur le plan législatif, l'OFEN a organisé une table ronde avec les milieux concernés à l'été 2019. Les participants ont souligné que la priorité devait être donnée au soutien à l'investissement et n'ont relevé aucune nécessité de légiférer dans le domaine des rôles et responsabilités.

Avec la motion déposée par le conseiller aux États Damian Müller, le Parlement a chargé le Conseil fédéral d'étudier la possibilité d'autoriser le fonds alimenté par le supplément à s'endetter temporairement. Le Conseil fédéral a procédé à l'examen demandé et est parvenu à la conclusion que l'interdiction d'endettement du fonds alimenté par le supplément devait être maintenue. Les réserves cumulées jusqu'à l'entrée en vigueur du présent projet pourront selon toute vraisemblance couvrir, avec les recettes annuelles, les dépenses attendues liées aux engagements jusqu'à l'échéance du système d'encouragement. La réduction des listes d'attente est déjà prévue dans cette planification. Pour autant qu'on puisse en juger aujourd'hui, il est donc improbable que les réserves du fonds soient complètement épuisées. Dans la seule éventualité d'une évolution inattendue des conditions-cadres (p. ex. en cas d'effondrement des prix de l'électricité débouchant sur des rétributions de l'injection plus élevées), il se pourrait que les réserves et les recettes courantes issues du supplément perçu sur le réseau ne suffisent pas pour couvrir toutes les dépenses prévues. Si une pénurie de liquidités ne pouvait être évitée par d'autres mesures, la Confédération devrait avancer les sommes nécessaires à hauteur du découvert naissant pour le fonds. Cette avance devrait être compensée dans les meilleurs
délais par une réduction correspondante des dépenses pour les nouvelles contributions d'investissement.

La motion déposée par l'ancien conseiller national Bernhard Guhl charge le Conseil fédéral de présenter au Parlement les modifications légales nécessaires à la gestion de l'injection de l'électricité provenant des installations de production afin que le réseau électrique soit développé de manière efficiente. Le Conseil fédéral répond à cette exigence par la réglementation de la flexibilité dans la LApEl proposée dans le cadre de la présente révision.

On mentionnera par ailleurs la motion 17.3970 «Révision de la LApEl. Établir une réserve stratégique» et la motion 17.3971 «Marché de l'électricité 2.0. Deuxième étape de la libéralisation du marché de l'électricité», qui ont été adoptées par le Conseil national le 8 mars 2018, mais n'ont pas encore été traitées par le Conseil des États.

À l'heure actuelle, le Parlement traite le domaine concerné par le présent projet de loi par voie d'initiatives parlementaires. La CEATE-N a ainsi décidé, le 28 août 2017, de donner suite à l'initiative parlementaire 16.448 «Garantir l'autoapprovisionnement en électricité d'origine hydraulique pour faire face à l'actuelle baisse des prix de l'électricité» déposée par le conseiller national Albert Rösti. La CEATE-E a adhéré à cette décision le 13 août 2018. En outre, le Conseil national a donné suite, le 7 septembre 2020, à la décision de la CEATE-N d'élaborer un projet d'acte dans le cadre 14 / 154

FF 2021 1666

de l'initiative parlementaire 20.401 «Aide aux installations photovoltaïques sans consommation propre». L'initiative parlementaire 19.443 «Promouvoir les énergies renouvelables de manière uniforme. Accorder une rétribution unique également pour le biogaz, la petite hydraulique, l'éolien et la géothermie» déposée par le conseiller national Bastien Girod a également fait son chemin. Le 26 octobre 2020, la CEATE-N a décidé d'y donner suite; la CEATE-E y a adhéré le 14 janvier 2021. La CEATE-N a élaboré un projet de loi, qu'elle a adopté le 19 avril 2021 en ayant connaissance du fait que le Conseil fédéral adopterait peu après le présent message, qui aborde notamment le même objet que l'initiative parlementaire. Le Conseil fédéral a demandé au Conseil national, le 1er juin 2021, de ne pas entrer en matière sur le projet d'acte de la CEATE-N.10

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

Le Conseil fédéral a mené une procédure de consultation sur une révision de la LApEl du 17 octobre 2018 au 31 janvier 2019. Ce projet de révision prévoyait ­ en plus d'améliorations dans le domaine des réseaux électriques (p. ex. régulation de la flexibilité, tarification, systèmes de mesure, registre de données [datahub]) ­ en particulier l'ouverture complète du marché de l'électricité. Il avait aussi pour but d'assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité à long terme11. En plus des mécanismes existants, l'avant-projet prévoyait à cette fin de créer une réserve de stockage. La dynamique sur un marché ouvert laisse également présumer un développement des énergies renouvelables et donc une amélioration de la sécurité d'approvisionnement. La majorité des participants à la consultation s'est dite favorable aussi bien à la réserve de stockage qu'à l'ouverture du marché12.

Dans la procédure de consultation sur la LApEl, une majorité a toutefois demandé des mesures supplémentaires afin de renforcer la sécurité d'approvisionnement. Concrètement, de nombreux avis ont mentionné le développement des incitations à l'investissement, par exemple dans le sens de contributions d'investissement. En réponse à cette demande, le Conseil fédéral a mené une procédure de consultation sur une révision de la LEne du 3 avril au 12 juillet 2020. Le projet de révision prévoyait une prolongation de la mise en oeuvre et le développement ponctuel de l'éventail d'instruments d'encouragement existant dans la LEne. La consultation a apporté la confirmation que la poursuite de l'encouragement visant la production d'électricité issue d'énergies renouvelables bénéficiait d'un large soutien13.

Le 11 novembre 2020, le Conseil fédéral a pris acte des résultats de la consultation sur la révision de la LEne. Comme l'avaient suggéré plusieurs participants à la consultation, il a décidé de présenter au Parlement les modifications des deux lois sous la 10 11

12 13

FF 2021 1316 www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DETEC; voir à cet égard le ch. 1.2 du rapport explicatif relatif au projet soumis à consultation.

Voir à cet égard le rapport sur les résultats de la consultation sous www.admin.ch > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2018 > DETEC.

Voir à cet égard le rapport sur les résultats de la consultation sous www.admin.ch > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > DETEC.

15 / 154

FF 2021 1666

forme d'un acte modificateur unique. Les deux révisions sont étroitement liées sur le fond et, de l'avis du Conseil fédéral, les différents domaines qui font l'objet de la révision, fortement interdépendants, doivent être examinés simultanément par le Parlement. Cette démarche garantit une législation cohérente.

3

Présentation du projet

3.1

Réglementation proposée dans la LApEl et la LEne

3.1.1

Vue d'ensemble et contexte des mesures importantes

Pour orienter la politique énergétique de manière plus cohérente et contraignante vers la sécurité d'approvisionnement, la politique climatique et la transformation plus rapide du système énergétique nécessaire à cette fin tout en renforçant la sécurité de planification pour les investisseurs, les valeurs indicatives à atteindre d'ici 2035, qui figurent aujourd'hui déjà dans la LEne, deviennent des objectifs contraignants: il s'agit, d'une part, des valeurs indicatives pour le développement de l'énergie hydraulique et d'autres énergies renouvelables et, d'autre part, des valeurs indicatives pour la réduction de la consommation énergétique et électrique par personne. De plus, des objectifs de développement et des objectifs portant sur la consommation énergétique et électrique à atteindre d'ici 2050 sont désormais inscrits dans la LEne. Les valeurs cibles, reprises des nouvelles perspectives énergétiques de la Confédération, constituent des trajectoires de développement du système énergétique suisse compatibles avec l'objectif de zéro émission nette.

S'agissant du renforcement de la sécurité de l'approvisionnement en électricité spécifiquement en hiver, deux nouvelles mesures sont introduites dans la LApEl.

Premièrement, un instrument est mis en place pour développer la production d'électricité dont la disponibilité est assurée en hiver, raccordée au réseau suisse et exempte de CO2. Ces capacités, de pair avec une réserve d'énergie stratégique (voir le point suivant, sous «Deuxièmement»), visent à préserver à long terme la capacité d'autonomie actuelle de la Suisse (env. 22 jours en moyenne). L'objectif d'une augmentation de 2 térawattheures (TWh) d'ici 2040 est inscrit en conséquence dans la LApEl. Cette mesure permet d'augmenter la quantité de courant disponible pour le marché de l'électricité (aspect qualitatif).

Au regard de cet objectif, de l'objectif «zéro émission nette» du Conseil fédéral et des longs processus de planification, d'autorisation et de construction qui s'appliquent aux centrales, le développement concerne en priorité les grandes centrales hydroélectriques à accumulation: les projets qui satisfont aux critères, fixés dans la LApEl, de qualification et de contribution à l'objectif de production d'électricité hivernale, reçoivent sur demande un soutien financier sous la forme
d'une contribution d'investissement. Une présélection impliquant les milieux intéressés (exploitants, organisations pour la protection de l'environnement) et les cantons déterminera, dans toute la mesure du possible par consensus, quels projets sont éligibles à une contribution d'investissement. S'il apparaît d'ici 2030 que l'objectif d'augmentation de 2 TWh ne pourra pas être atteint d'ici 2040 avec la grande hydraulique, des appels d'offres ouverts à toute technologie seront lancés pour des capacités supplémentaires satisfaisant aux 16 / 154

FF 2021 1666

critères précités et nécessitant des travaux préparatoires plus courts que les projets dans le domaine de la force hydraulique. L'instrument est financé par le biais du supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension qui est aujourd'hui déjà prévu à l'art. 9, al. 4, LApEl pour éviter d'éventuels déficits d'approvisionnement en électricité. Le Conseil fédéral fixe ce «supplément hiver» en fonction des besoins, au maximum à 0,2 ct./kWh.

Deuxièmement, il s'agit d'instituer une réserve d'énergie stratégique qui assure la disponibilité de l'énergie à la fin de l'hiver en plus des mécanismes prévus sur le marché de l'électricité. En temps normal, l'approvisionnement de la Suisse en énergie est assuré et optimisé sur le plan économique par la mise sur le marché des capacités des centrales électriques ainsi que par les échanges avec les marchés de l'électricité des pays voisins. Dans des situations exceptionnelles qui ne sont pas prévisibles par les acteurs du marché, il pourrait arriver que la sécurité de l'approvisionnement soit compromise. La réserve d'énergie offrira alors une assurance concrète: elle tiendra de l'énergie à disposition pour les cas où les mécanismes du marché feraient défaut («réserve de secours») et pourra contribuer à la capacité d'autonomie de la Suisse. Swissgrid réalisera une procédure d'appel d'offres soumise aux règles de la concurrence pour l'acquisition de la réserve. Quiconque reçoit l'adjudication pour une offre s'engage, pendant une période définie, à conserver une quantité minimale déterminée d'énergie ou à renoncer à son soutirage.

Le marché de l'électricité sera complètement ouvert (LApEl), ce qui constitue une mesure importante pour permettre l'innovation et renforcer l'efficacité du système dans son ensemble. Cette mesure va dans le sens de la Stratégie énergétique 2050, puisqu'elle encourage les produits novateurs dans des domaines liés à la fourniture d'énergie et permet de nouveaux modèles d'affaires, par exemple la vente directe d'électricité produite localement par le biais de plateformes («électricité de proximité») ou la possibilité d'offres innovantes en lien avec l'électromobilité et l'automatisation des bâtiments. Avec l'ouverture complète du marché, tout consommateur final aura le droit de choisir librement son fournisseur. Les petits
consommateurs finaux dont la consommation annuelle n'atteint pas 100 MWh pourront opter pour l'approvisionnement de base. Au regard de la Stratégie énergétique 2050, l'ouverture complète du marché a une raison d'être et un but beaucoup plus concrets qu'en 2002, à l'époque de la loi sur le marché de l'électricité. Une ouverture complète permet de donner aux petits producteurs décentralisés un accès simple au marché et d'intégrer directement les énergies renouvelables dans le système, ce qui, à son tour, favorise le développement de ces sources d'énergie. Une ouverture complète permet par ailleurs l'émergence d'innovations et de modèles propices à une amélioration de l'efficacité énergétique, ce qui va également dans le sens de la Stratégie énergétique 2050. Les gestionnaires d'un réseau de distribution locaux proposent, dans l'approvisionnement de base, un produit standard composé exclusivement d'énergie renouvelable indigène.

Les énergies renouvelables disposent ainsi d'un canal de distribution important sur le marché. L'ouverture complète est en outre une condition essentielle pour un marché de l'électricité performant et efficace. Elle soutient la sécurité d'approvisionnement grâce à une meilleure coordination temporelle de l'offre et de la demande. Le libre choix et la garantie d'un approvisionnement de base régulé constituent un renforcement de l'orientation client pour les consommateurs finaux.

17 / 154

FF 2021 1666

Pour que le développement des énergies renouvelables suive avec succès les objectifs définis et puisse contribuer à la sécurité d'approvisionnement, le système d'encouragement est prolongé jusqu'en 2035 dans la LEne. Il y a ainsi une concordance temporelle entre l'année cible 2035 et la fin de l'encouragement, ce qui garantit une sécurité de planification pour les responsables de projets. Compte tenu de phases de planification qui peuvent durer plus de dix ans, comme pour les installations hydroélectriques et éoliennes, les investisseurs ont besoin de conditions stables et prévisibles à long terme.

Le système d'encouragement est en outre optimisé dans le but d'améliorer son efficacité (LEne). Il s'agit de rapprocher du marché les instruments existants: le système de rétribution de l'injection prendra fin comme prévu dans la LEne en vigueur et sera remplacé par des contributions d'investissement. Ce changement vise un allègement administratif et permet une augmentation plus importante de la production avec les mêmes ressources. Le Conseil fédéral souhaite en particulier accélérer le développement du photovoltaïque. L'octroi des contributions sera désormais possible par le biais de mises aux enchères pour les grandes installations photovoltaïques. Pour les grandes installations hydroélectriques, il y aura davantage de moyens disponibles. Le financement reste assuré par le supplément perçu sur le réseau, qui ne subit pas d'augmentation (autrement dit, il est maintenu à 2,3 ct./kWh) mais sera, en contrepartie, prélevé plus longtemps. Les moyens du fonds alimenté par le supplément sont calculés au plus juste pour atteindre les objectifs de développement en 2035. Le Conseil fédéral part toutefois du principe que les nouveaux objectifs de développement pourront être atteints. Si ça devait ne pas être le cas, il aurait la possibilité, dans le cadre du monitoring inscrit dans la LEne, de proposer des mesures supplémentaires.

18 / 154

FF 2021 1666

La figure ci-dessous donne un aperçu général des instruments d'encouragement d'aujourd'hui et de demain:

Figure 1: Vue d'ensemble des instruments d'encouragement dans la LEne, aujourd'hui et demain.

D'autres améliorations de l'efficacité énergétique et notamment de l'efficacité électrique sont également nécessaires au regard de l'électrification croissante. C'est pourquoi il est prévu de créer une base pour l'instauration de programmes d'encouragement à l'échelle nationale portant sur des mesures standard visant à augmenter l'efficacité électrique.

L'utilisation de la flexibilité offerte par les producteurs, les exploitants de stockage ou les consommateurs finaux joue un rôle de plus en plus important. Les avantages de l'utilisation de cette flexibilité sont multiples, que ce soit dans le domaine des réseaux (comme moyen de prévention des pénuries et pour l'intégration des unités de production décentralisées), sur le marché de l'électricité, mais aussi directement chez les détenteurs de cette flexibilité (p. ex. pour l'optimisation de la consommation propre).

Afin de permettre une utilisation efficace de la flexibilité alors que les besoins des uns et des autres se trouvent en concurrence, une réglementation appropriée de la flexibilité est inscrite dans la LApEl. Elle permet une intégration plus efficace des installations de production décentralisées dans le système et se traduit par un renforcement de l'orientation client.

L'organisation efficace de l'échange de données et informations numériques et de l'accès à celles-ci joue un rôle décisif en vue d'une concurrence opérationnelle et de modèles d'affaires novateurs sur le marché de l'électricité. Deux mesures sont prévues à cet égard. Premièrement, le cadre réglant l'échange de données et la protection des 19 / 154

FF 2021 1666

données est défini dans la LApEl. Afin de soutenir les différentes mesures, une infrastructure nationale de données énergétiques est créée, avec un registre de données (datahub), dans le but d'accélérer la numérisation et la transformation du secteur de l'électricité. Le registre de données assure un échange de données performant et permet un accès uniforme aux données dans le respect de la sécurité des données et de la protection des données. Deuxièmement, dans le domaine des systèmes de mesure, des clarifications sont apportées dans la LApEl en ce qui concerne les responsabilités et les libres choix inscrits dans la loi. Les grands consommateurs finaux, les producteurs d'électricité et les exploitants de stockage peuvent choisir librement leur fournisseur.

Par ailleurs, le libre choix est également accordé ­ indépendamment de la consommation d'électricité annuelle ­ à tous les consommateurs finaux avec consommation propre, ainsi qu'à certains groupes de consommateurs finaux qui ont besoin d'un accès aux données des prestations de mesure les concernant en relation avec la flexibilité au niveau de la consommation ou avec des mesures d'économie d'énergie. Ces deux mesures sont une condition essentielle pour permettre des innovations tout en renforçant l'efficacité et l'orientation client.

Dans le domaine de la tarification de l'utilisation du réseau, une réglementation de la flexibilité est introduite et l'efficacité du système de tarification prévu par la LApEl est améliorée grâce à une tarification plus flexible du réseau. Concrètement, les gestionnaires d'un réseau de distribution doivent pouvoir axer davantage leurs systèmes tarifaires sur des modèles de charge liés à la Stratégie énergétique 2050 et définir des tarifs de réseau dynamiques de manière plus étendue qu'aujourd'hui. De façon générale, les consommateurs finaux doivent pouvoir mieux visualiser les coûts de réseau qu'ils ont réellement occasionnés. Ils peuvent adapter durablement leur propre utilisation du réseau (p. ex. par le recours à la flexibilité ou à d'autres solutions intelligentes). Cela permet de réduire les besoins d'extension du réseau, d'optimiser le dimensionnement de l'infrastructure et de limiter globalement les coûts pour l'ensemble des consommateurs finaux.

L'ElCom sera désormais tenue par la loi, aux fins de
renforcer la transparence au niveau des réseaux de distribution, de publier des comparatifs (LApEl). La régulation dite «Sunshine» permet d'améliorer l'information à la clientèle et de créer certaines incitations à l'efficacité.

3.1.2

Objectifs portant sur la consommation énergétique et électrique ainsi que sur le développement de l'électricité issue d'énergies renouvelables (LEne)

Le 28 août 2019, le Conseil fédéral a décidé de viser un bilan équilibré des gaz à effet de serre pour la Suisse d'ici 2050 (zéro émission nette). Cet objectif constitue la base de la stratégie climatique à long terme de la Confédération, par laquelle la Suisse entend satisfaire à l'une des exigences de l'Accord de Paris. Celui-ci prévoit que toutes les parties contractantes élaborent de telles stratégies à l'horizon 2050 et les transmettent au secrétariat d'ONU Climat d'ici fin 2020. De nouvelles perspectives énergétiques (PE 2050+) ont notamment été établies pour servir de fondement à cette stratégie climatique. Depuis les années 70, les perspectives énergétiques de l'OFEN 20 / 154

FF 2021 1666

constituent une base quantitative importante pour la politique énergétique et, aujourd'hui, également pour la politique climatique. Elles ont été complètement mises à jour pour la dernière fois en 2007, puis actualisées et étendues en 2012 pour la Stratégie énergétique 2050. Dans le scénario «zéro émission nette», les nouvelles perspectives énergétiques analysent un développement du système énergétique compatible avec l'objectif climatique consistant à abaisser à long terme les émissions de gaz à effet de serre à zéro net en 2050 tout en garantissant un approvisionnement énergétique sûr14.

En inscrivant des objectifs de consommation et de développement contraignants dans la LEne, la Confédération donne d'emblée un signal clair sur l'ampleur des adaptations nécessaires dans le système énergétique suisse. C'est une contribution importante au renforcement de la sécurité de la planification pour les investisseurs.

En appliquant la variante de base «zéro émission nette» des nouvelles perspectives énergétiques et un développement de la production d'électricité renouvelable conformément à la variante «bilan annuel équilibré 2050», on obtient une valeur cible de 17 TWh pour l'année 2035 (jusqu'ici: 11,4 TWh) en ce qui concerne le développement de l'électricité issue de nouvelles énergies renouvelables. Le photovoltaïque y contribue pour la plus grande part (14 TWh). L'objectif pour le développement de l'électricité issue d'énergies renouvelables en 2050 est fixé dans la loi à 39 TWh (jusqu'ici: 24,2 TWh). Les valeurs indicatives pour le développement de la production d'électricité issue de la force hydraulique sont reprises telles quelles (37,4 TWh en 2035), mais sous forme d'objectifs contraignants. De plus, une valeur cible de 38,6 TWh (conformément au message du Conseil fédéral relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 205015) est désormais fixée dans la loi pour 2050.

De plus, des objectifs de consommation contraignants sont désormais inscrits dans la loi pour 2035 et 2050. En vertu des nouvelles perspectives énergétiques, il n'est pas nécessaire d'adapter les valeurs indicatives actuelles pour 2035. Celles-ci sont toutefois déclarées contraignantes. Les valeurs cibles correspondantes du scénario des perspectives énergétiques précité sont utilisées pour 2050. Les valeurs cibles
concernant la consommation énergétique moyenne par personne restent inchangées d'ici 2035 (baisse de 43 % par rapport à l'an 2000) et presque inchangées d'ici 2050 (baisse de 53 %). La valeur cible pour la consommation électrique moyenne par personne pour 2035 reste inchangée (baisse de 13 % par rapport à l'an 2000). Par contre, la consommation électrique par habitant augmentera après 2035 en raison de l'électrification accrue qui est nécessaire pour réaliser l'objectif de zéro émission nette, raison pour laquelle il est nécessaire d'adapter la valeur cible pour 2050, qui prévoira désormais une baisse de 5 % par rapport à 2000, alors que jusqu'à présent, la baisse prévue était de 18 %.

Comme mentionné précédemment, la définition d'objectifs de consommation et de développement contraignants vise à montrer d'emblée à tous les acteurs impliqués dans quelle mesure des adaptations sont nécessaires dans le système énergétique suisse. Le Conseil fédéral examine régulièrement, en particulier dans les rapports 14 15

www.perspectivesenergetiques.ch FF 2013 6771

21 / 154

FF 2021 1666

quinquennaux rédigés dans le cadre du monitoring de la Stratégie énergétique 2050, les avancées dans la réalisation des objectifs. Ce faisant, il tient également compte des nouvelles tendances concernant les données générales (données économiques, transports, évolution démographique, etc.) et des décisions politiques dans le domaine climatique (p. ex. mesures prises à l'étranger) ou énergétique. Il prend par ailleurs en considération les développements et progrès technologiques importants ou les changements liés aux conditions du marché. Dans le cadre de ces analyses, il procédera si nécessaire aussi à un réexamen des objectifs.

3.1.3

Renforcement de la sécurité d'approvisionnement pendant les mois d'hiver (LApEl)

3.1.3.1

Sécurité d'approvisionnement

Les modélisations de la capacité de production et des capacités du système réalisées jusqu'ici par la Confédération montrent, de façon générale, une situation d'approvisionnement stable pour la Suisse jusqu'en 2035. Les échanges d'électricité avec les pays voisins et le bon fonctionnement du marché de l'électricité sont cependant déterminants. Les analyses montrent que les capacités flexibles dans le secteur de la force hydraulique en Suisse, en particulier, permettent de réagir efficacement à de nombreux développements européens, par exemple si des pays d'Europe réduisent temporairement leurs exportations. Dans le contexte de l'augmentation à plus long terme de la consommation d'électricité en raison de la décarbonisation, il est important de continuer à développer des capacités appropriées pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en hiver et pour garantir d'ici 2040 la disponibilité, dans le marché de l'électricité, d'une quantité suffisante de courant dont la disponibilité est assurée (aspect qualitatif).

En Suisse, l'approvisionnement énergétique relève de la branche énergétique (art. 6, al. 2, LEne). Le rôle de l'État, c'est-à-dire de la Confédération et des cantons, est subsidiaire: il crée les conditions générales nécessaires pour que cette branche puisse assurer l'approvisionnement énergétique de manière optimale. Il assume par ailleurs une certaine responsabilité lorsqu'il s'agit de prévenir une mise en danger de l'approvisionnement. Le Conseil fédéral peut ainsi prendre des mesures si la sécurité de l'approvisionnement en électricité est sérieusement compromise à moyen ou à long terme (art. 9 LApEl) et des mesures temporaires sont possibles pour débloquer une situation, imminente ou déclarée, de grave pénurie d'électricité dans le cadre de l'approvisionnement économique du pays. La LEne réaffirme le fait que l'État doit créer à temps les conditions permettant la mise à disposition des capacités nécessaires s'il apparaît que la sécurité de l'approvisionnement en électricité pourrait être compromise.

Un approvisionnement en électricité sûr repose sur un système complexe qui implique de nombreux acteurs. Il n'y a pas de responsabilité d'ensemble, intégrale, en ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement. Il existe une répartition des rôles entre la branche et l'État qui s'est
établie au fil du temps. Le présent projet n'y change rien et la responsabilité primaire de la branche pour l'approvisionnement énergétique et électrique est donc maintenue. Les mesures proposées s'intègrent dans ce concept. Les

22 / 154

FF 2021 1666

conditions-cadres sont ainsi améliorées afin de permettre, par exemple, une augmentation accrue des énergies renouvelables par le biais des instruments d'encouragement visés par la LEne et un renforcement de l'innovation et de l'efficience du système global par le biais de l'ouverture complète du marché de l'électricité. À l'interface entre les conditions-cadres et les mesures étatiques, il y a les mesures spécifiques visant à renforcer la sécurité de l'approvisionnement en hiver (augmentation de 2 TWh et réserve d'énergie). Sur ce point, l'État initie et soutient un développement qui, en tant que tel, devra être mis en oeuvre par la branche et qui n'encadre la gestion des lacs d'accumulation par les exploitants de centrales électriques que par une mesure d'urgence.

3.1.3.2

Maintien de la capacité d'autonomie

Pour renforcer la sécurité d'approvisionnement, le Conseil fédéral propose de développer des capacités en ce sens afin de préserver à long terme la capacité d'autonomie actuelle, qui est d'environ 22 jours en moyenne, de pair avec la réserve d'énergie dans le cas de figure d'une pénurie à l'échelle européenne. À cette fin, le Conseil fédéral fixe un objectif de développement spécifique pour 2040. L'augmentation effectivement nécessaire de la production des centrales électriques avec capacité de stockage pendant les mois d'hiver dépend de la capacité d'autonomie souhaitée: pour une période donnée, on compare la production et la consommation à la fin de l'hiver, au moment où la Suisse est la plus tributaire des importations. Une capacité d'autonomie de 22 jours implique un objectif consistant à augmenter, d'ici 2040, de 2 TWh la production d'électricité issue des centrales électriques avec capacité de stockage pendant l'hiver.

D'un point de vue historique, la capacité d'autonomie varie beaucoup d'une année à l'autre. Elle dépend fortement des conditions météorologiques et de l'exploitation des centrales électriques. En raison du rôle important de la force hydraulique, l'exploitation des centrales dépend quant à elle de la situation des débits entrants et de la structure des prix en Suisse et à l'étranger. Ces 15 dernières années, la capacité d'autonomie minimale a été d'environ 8 jours (pendant l'hiver 2012­2013), la capacité maximale dépassant 40 jours. À noter qu'il s'agit d'une valeur théorique qui est calculée a posteriori dans l'hypothèse où aucune importation n'aurait été possible.

La capacité d'autonomie réelle dépend des conditions qui prévalent pendant l'hiver en question et, dans une large mesure, de l'exploitation des lacs d'accumulation. Les lacs d'accumulation (y c. pour la production supplémentaire de 2 TWh) sont exploités et vidés au cours de l'hiver en fonction du marché et des besoins. L'exploitation dans le cadre du marché ne garantit pas, à elle seule, qu'une capacité d'autonomie de 22 jours sera disponible à tout moment, comme on a d'ailleurs pu le constater par le passé. L'augmentation proposée de la production de 2 TWh en hiver en relation avec le projet de réserve d'énergie doit contribuer à préserver une capacité d'autonomie d'environ 22 jours en moyenne. Ce faisant, il faut
garder à l'esprit qu'après l'arrêt des dernières centrales nucléaires en 2035 (dans l'hypothèse d'une durée de fonctionnement de 50 ans), la capacité d'autonomie liée au marché devrait quelque peu diminuer

23 / 154

FF 2021 1666

de manière temporaire. Si nécessaire, ce recul peut être compensé suffisamment tôt par une conservation d'énergie plus conséquente dans la réserve.

Au regard de l'orientation et de l'importance d'une telle augmentation de la production d'électricité en hiver, il est opportun que le Parlement en définisse les élémentsclés.

C'est pourquoi un objectif d'augmentation de la production correspondant est inscrit dans la LApEl. Au vu de la tâche prévue en matière d'approvisionnement et de l'objectif de zéro émission nette du Conseil fédéral, les capacités de production éligibles doivent remplir les trois critères suivants: leur disponibilité doit être assurée, elles doivent être raccordées au réseau électrique suisse et elles doivent être climatiquement neutres. Un soutien financier doit leur être apporté.

La grande hydraulique, notamment les grandes centrales hydroélectriques à accumulation, remplissent fort bien ces critères. Par rapport à d'autres technologies de production, en particulier en comparaison avec l'énergie éolienne ou l'énergie solaire, les centrales hydroélectriques à accumulation sont largement pilotables et leur disponibilité est donc assurée. Les capacités éoliennes et solaires, quant à elles, même en cas de raccordement direct à des batteries de stockage, ne contribueraient que très modestement à un transfert saisonnier efficace. Les centrales hydroélectriques à accumulation garantissent par ailleurs ­ ce qui n'est pas le cas, par exemple, des réservoirs de gaz ­ que le stockage se fait en Suisse, la dépendance vis-à-vis de l'étranger étant ainsi moindre. Enfin, elles n'émettent, de fait, pas de CO2. En mettant l'accent sur l'hydraulique à accumulation pour atteindre l'objectif de 2 TWh, il ne donne pas lieu à une adaptation «dissimulée» des objectifs de développement pour la production d'électricité d'origine hydraulique au sens de la LEne (cf. ch. 3.1.2). Les capacités requises pour le transfert saisonnier et la production en hiver (aspect qualitatif) peuvent conduire à une augmentation de la production annuelle (aspect quantitatif). Une éventuelle augmentation des volumes annuels serait prise en compte dans les objectifs de la LEne. La disponibilité effective des quantités de stockage nécessaires à la fin de l'hiver est garantie par l'exploitation des lacs d'accumulation en
combinaison avec la réserve d'énergie stratégique.

Le développement de l'énergie hydraulique doit être thématisé en priorité et dans les meilleurs délais, car cette technologie passe par des procédures particulièrement longues jusqu'à sa réalisation (planification, autorisation et construction). C'est pourquoi le DETEC a déjà entamé les travaux en vue du développement de l'énergie hydraulique avec les cantons, l'économie hydraulique et les organisations pour la protection de l'environnement (table ronde consacrée à l'énergie hydraulique). Ces travaux en cours visent à identifier des projets potentiels qui sont particulièrement appropriés et susceptibles d'être acceptés au niveau de l'efficacité de la contribution à la production hivernale, de la faisabilité, du site et de l'environnement. À l'heure actuelle, ils ont permis d'identifier un potentiel de production hivernale supplémentaire d'un peu plus de 2 TWh issue de projets de la grande hydraulique. Le régime d'autorisation de ces projets demeure inchangé. Ceux-ci doivent donc obtenir les concessions (cantonales) et suivre les procédures d'autorisation nécessaires. Ces procédures abordent aussi le conflit d'objectifs entre les impératifs de protection et d'utilisation. Il sera par ailleurs essentiel que les agrandissements puissent s'intégrer dans des installations dont les concessions sont en cours. Il existe des instruments pour cela, 24 / 154

FF 2021 1666

comme un renouvellement anticipé de la concession ou une convention sur la valeur résiduelle négociée entre concédant et concessionnaire.

D'après l'art. 9 LApEl en vigueur, le Conseil fédéral peut prendre des mesures de sa propre initiative afin d'assurer la sécurité d'approvisionnement. Cela n'exclut évidemment pas que le législateur décide de mesures de ce type de son côté. Le nouvel instrument constitue en quelque sorte un cas d'application concret des mesures telles qu'elles sont prévues à l'art. 9, avec l'activation du supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension qui y est prévu pour le financement de tels cas. Les projets de centrales à accumulation doivent être soutenus par le biais de contributions d'investissement. Celles-ci se montent en général à 40 % au plus (60 % au plus dans des cas exceptionnels) des coûts d'investissement imputables. Il s'agira également de vérifier si les coûts et donc l'encouragement sont encore proportionnés au regard de la quantité d'énergie de stockage ajoutée. Le financement de l'instrument sera assuré par le supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension qui est aujourd'hui déjà prévu à l'art. 9, al. 4, LApEl pour éviter d'éventuels déficits d'approvisionnement en électricité. Ce «supplément hiver» n'excédera pas 0,2 ct./kWh. Il ne donnera pas lieu à des remboursements tels que ceux prévus aux art. 39 à 43 LEne pour les entreprises grandes consommatrices d'énergie puisque celles-ci bénéficieront directement, et dans une très large mesure, du renforcement de la sécurité d'approvisionnement. En plus de ce nouvel instrument dans la LApEl qui favorisera un développement certes ponctuel, mais qui s'inscrit dans une vision à long terme, l'art. 9 et les possibilités qu'il donne au Conseil fédéral subsistent. Une action du Conseil fédéral fondée directement sur cette disposition peut être nécessaire à l'avenir. Les contributions d'investissement au sens de la LApEl ­ visant un objectif bien plus spécifique ­ doivent être examinées parallèlement à celles visées par la LEne.

Les projets soutenus doivent remplir les critères de qualification et de contribution à l'objectif de production d'électricité en hiver. En raison du nombre très limité de projets de centrales à accumulation, du cercle restreint de prestataires (manque de
concurrence) et des grandes différences de coûts entre les projets, des appels d'offres publics n'entrent pas en ligne de compte pour l'attribution des contributions de soutien. De telles mises aux enchères ne déboucheraient pas sur un résultat efficient et se traduiraient par des prix excessifs. Un soutien par le biais de contributions d'investissement, définies par l'OFEN au cas par cas sur la base de critères fixés dans la loi et l'ordonnance, est donc plus efficace. Dans le cadre de la décision sur l'octroi d'un soutien, la rentabilité d'un projet peut être analysée spécifiquement. Au demeurant, les appels d'offres ne tiennent pas compte de la dimension de l'acceptation par la population et des aspects environnementaux. Dans un premier temps, une présélection des projets éligibles à une contribution d'investissement sera faite. Ils devront être déterminés, dans toute la mesure du possible par consensus, dans le cadre de la table ronde consacrée à l'énergie hydraulique. Le DETEC officialisera cette présélection en établissant une liste des projets retenus, ce qui donnera aux exploitants la sécurité de planification nécessaire.

Si, dans le cadre du monitoring régulier de la stratégie énergétique et d'autres analyses, il apparaît, au plus tard en 2030, que l'objectif d'augmentation de 2 TWh d'ici 2040 ne pourra pas être atteint avec la seule grande hydraulique ou si des problèmes se dessinent déjà en amont, des appels d'offres ouverts à toute technologie 25 / 154

FF 2021 1666

seront lancés pour des capacités supplémentaires nécessitant des travaux préparatoires plus courts que pour la force hydraulique. Ces capacités devront également satisfaire aux trois critères précités. Des centrales à gaz à cycle combiné (CCC) pourraient entrer en ligne de compte tant que le critère de la neutralité climatique (objectif supérieur «zéro émission nette») est effectivement rempli. Il est donc précisé que cette neutralité peut être atteinte par le biais du procédé de captage et de stockage du carbone (CSC), de la compensation du CO2 ou des technologies d'émission négative (NET) en Suisse ou à l'étranger, ou par le biais de l'utilisation de gaz renouvelables (biogaz, hydrogène d'origine renouvelable et méthane d'origine renouvelable). Les dispositions de la loi du 23 décembre 2011 sur le CO216 concernant la compensation et l'échange de quotas d'émission doivent être respectées. Dès lors, les capacités provenant de centrales thermiques à combustibles fossiles envisageables seront soumises au système d'échange de quotas d'émission. Ces centrales n'obtiendront pas gratuitement des droits d'émission, mais devront les acquérir aux enchères sur le marché primaire ou les acheter sur le marché secondaire. En outre, elles devront s'acquitter au moins des coûts climatiques externes (art. 17, al. 2, de la loi sur le CO2). Pour que la «disponibilité soit assurée», il sera par ailleurs nécessaire de démontrer la capacité à stocker une certaine quantité de gaz en Suisse.

3.1.3.3

Réserve d'énergie en complément du marché

L'équilibre entre l'offre et la demande se forme en principe par le biais des mécanismes du marché de l'électricité (en particulier du marché de gros européen et suisse).

Un marché de l'électricité performant est ainsi un élément important pour assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Les acteurs du marché peuvent normalement gérer une large palette d'incertitudes (p. ex. variations du débit d'eau entrant pour la production d'électricité ou baisse inattendue de la demande dans l'industrie, etc.), des produits correspondants sont utilisés sur le marché pour se prémunir contre les risques financiers ou physiques.

Dans des situations extraordinaires, il pourrait arriver que l'étendue du risque effectif dépasse les prévisions et les capacités de réaction des acteurs du marché, par exemple en raison d'une situation météorologique extrême et persistante ou d'une interruption imprévue d'infrastructures (de réseau) importantes. Le système suisse d'électricité est le plus sujet à de telles situations à la fin de l'hiver, car les lacs de retenue sont généralement en grande partie vidés et les marges de réserve très faibles. Du point de vue de la sécurité d'approvisionnement, cette situation ne constitue normalement pas un problème, car la force hydraulique est à nouveau disponible au printemps grâce à la fonte des neiges.

Pour garantir la disponibilité de l'énergie dans les situations extraordinaires non prévisibles, il est toutefois nécessaire de constituer une réserve d'énergie stratégique: celle-ci n'est utilisée que si les mécanismes du marché ne jouent pas leur rôle («réserve de secours»). La réserve d'énergie consiste donc, concrètement, à conserver de l'énergie hors du marché pour les situations de pénurie critiques extraordinaires, 16

RS 641.71

26 / 154

FF 2021 1666

que les acteurs du marché ne peuvent pas prévoir. Elle doit constituer un élément permanent pour la sécurité d'approvisionnement et compléter les instruments existants. Les différents rôles établis à ce jour ainsi que les responsabilités et compétences actuelles lorsqu'il s'agit d'assurer la sécurité d'approvisionnement demeurent inchangés.

En garantissant la capacité de production effective d'énergie (kWh) dans une centrale existante ou de réduction de la consommation chez le consommateur, dans une installation existante disposant d'une flexibilité, la réserve ne constitue pas un mécanisme permettant d'ajouter de nouvelles capacités. Elle complète plutôt les mesures de développement de la capacité de production (en particulier la mesure mentionnée précédemment visant à favoriser le développement des capacités de production d'électricité en hiver). Elle fait en sorte que les niveaux de stockage nécessaires pour garantir la capacité d'autonomie soient disponibles à la fin de l'hiver, même en cas d'événements imprévus, en retirant cette énergie du marché au début de l'hiver et en ne l'utilisant qu'en cas d'urgence.

La disponibilité de la puissance des centrales électriques suisses dépend pour l'essentiel de la gestion des lacs d'accumulation. La réserve doit donc prendre la forme d'une réserve d'accumulation active au sens d'une assurance. La puissance des centrales n'étant pas retirée du marché, l'intervention reste moindre. La répartition de l'énergie de réserve entre plusieurs prestataires devrait permettre, en cas de besoin, l'injection dans le réseau également sans stockage séparé de la puissance (car en général, dans un cas extrême, seule l'énergie contenue dans la réserve est disponible et donc la puissance de production est à la disposition de la réserve). Au lieu qu'une centrale couvre la charge, dans les situations de pénurie, il est possible de réduire la charge elle-même.

Les consommateurs flexibles, qui sont en mesure de cesser le prélèvement d'électricité pendant une période prolongée, doivent par conséquent également pouvoir participer à la réserve. La réserve est en principe ouverte à toute technologie: tous les fournisseurs potentiels d'énergie issue de centrales à accumulation raccordés au réseau électrique suisse, les exploitants de stockage ou ceux qui ont la capacité d'interrompre
leur charge doivent pouvoir participer à cette réserve pour autant que leur équipement technique le permette.

La participation à la réserve doit faire l'objet d'un contrat organisé par Swissgrid dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres ouvert à la concurrence. S'il reçoit l'adjudication, l'exploitant de stockage ou celui qui dispose d'une flexibilité au niveau de la charge s'engage à stocker une quantité minimale déterminée d'énergie pendant une période définie respectivement à être prêt à se déconnecter afin de libérer une quantité minimale déterminée d'énergie pendant une période définie. Ils perçoivent une rémunération à cet effet. Un éventuel prélèvement d'énergie fait l'objet d'une rétribution séparée. S'il apparaît que Swissgrid ne se voit pas proposer suffisamment d'énergie dans la procédure d'appel d'offres, le Conseil fédéral pourrait prévoir une obligation, pour les capacités soutenues au moyen de l'art. 9bis LApEl, en vertu de laquelle les exploitants de ces capacités sont tenus de proposer de l'énergie à Swissgrid (obligation de fourniture).

Les mécanismes du marché doivent assurer aussi complètement que possible la sécurité d'approvisionnement. Pour éviter autant que possible de perturber ces méca-

27 / 154

FF 2021 1666

nismes, il faut veiller à concevoir la réserve en la séparant clairement du marché. Fondamentalement, cette réserve ne doit être utilisée qu'au moment où le marché n'est plus en mesure d'équilibrer l'offre et la demande. D'ici là, il peut arriver que les prix de marché soient très élevés pendant un court laps de temps, car l'excédent de demande est important, sans que le recours à la réserve soit nécessaire ou judicieux.

L'énergie en réserve ne sera en principe libérée par l'ElCom pour un prélèvement, mais non pas encore prélevée, que si une situation de pénurie extraordinaire se dessine. Afin d'identifier les situations de pénurie de manière efficace, Swissgrid effectue un monitoring couvrant, d'une part, la situation du réseau et, d'autre part, la disponibilité de l'énergie en Suisse et à l'étranger. Le prélèvement effectif, opéré par Swissgrid, ne doit si possible intervenir qu'après la clôture du négoce (c'est-à-dire une fois épuisées les possibilités d'ajustement par les marchés), de manière à exclure des interactions avec les marchés de l'électricité. Pour ce faire, les groupes-bilan communiquent les quantités non équilibrées qu'ils n'ont pas pu acquérir sur le marché. L'énergie prélevée dans la réserve n'est alors pas directement fournie aux acteurs du marché: elle transite par le gestionnaire du système, Swissgrid, qui l'utilisera pour compenser les quantités d'énergie manquantes des groupes-bilan concernés. Ainsi, l'énergie n'entre pas dans le marché de l'électricité. Une tarification adéquate garantit qu'une acquisition sur le marché est financièrement plus intéressante que le recours à la réserve. Au terme de la période de réservation d'énergie prévue contractuellement (donc en été, lorsque la disponibilité de l'énergie ne pose aucun problème en raison des eaux de fonte), les exploitants de stockage peuvent librement utiliser l'énergie réservée sur le marché de l'électricité. La réserve est ainsi dissoute.

Pour le dimensionnement de la réserve, il s'agit de procéder au début de l'hiver à une évaluation des risques pour déterminer quelle quantité d'énergie il est nécessaire de retirer du marché. Cette énergie sera disponible dans tous les cas, indépendamment de l'exploitation des lacs d'accumulation. En plus d'aspects techniques tels que le parc de centrales électriques à l'étranger et
les capacités transfrontalières disponibles, il est possible de tenir compte des aspects politiques. Le Conseil fédéral fixe les principes du dimensionnement de la réserve et les critères pour déterminer la quantité concrète d'énergie réservée. Il définit en outre les autres paramètres du dimensionnement. Puis, sur la base des directives du Conseil fédéral et d'entente avec Swissgrid, l'ElCom définit précisément le volume de réserve nécessaire et la durée de sa conservation en s'appuyant notamment sur une analyse complète de la sécurité de l'approvisionnement. L'ElCom est particulièrement à même d'assurer cette tâche, car en tant qu'organe de surveillance indépendant de la sécurité d'approvisionnement, elle connaît les risques menaçant le système suisse d'électricité à court et moyen termes. Elle définit ensuite, d'entente avec Swissgrid, les grandes lignes de l'appel d'offres (en particulier le dédommagement et d'éventuelles sanctions). L'implication de Swissgrid est importante, puisque celle-ci connaît en détail le système global (réseau, production, charge) et qu'elle peut se référer à des expériences correspondantes dans le domaine des services-système (p. ex. concernant la conception des produits). Enfin, Swissgrid définit les produits spécifiques et procède chaque année à l'appel d'offres pour la réserve.

Certaines obligations d'informer doivent être prescrites aux exploitants prenant part à la constitution de la réserve pour assurer la transparence du système et pour contrôler que l'énergie réservée est effectivement disponible.

28 / 154

FF 2021 1666

À l'instar des services-système, une réserve d'énergie sert en définitive à préserver la stabilité du système. Elle constitue ainsi une sorte de service-système fourni par Swissgrid et fait donc partie des coûts imputables de celle-ci. En conséquence, elle sera financée par la rémunération versée pour l'utilisation du réseau de transport.

Les réglementations relatives à la réserve d'énergie sont évaluées par l'OFEN, par exemple dans le cadre du rapport à établir à intervalles réguliers conformément à l'art. 27, al. 3, de l'ordonnance du 14 mars 2008 sur l'approvisionnement en électricité (OApEl)17.

La figure suivante présente schématiquement les principales étapes du processus, les principaux responsables et les moments où les étapes interviennent.

Figure 2: Les principales étapes du processus, les principaux responsables et les moments de survenance des étapes pour la réserve d'énergie. Les principaux responsables apparaissent en caractères gras, les autres acteurs directement impliqués sont désignés en caractères normaux.

Code couleurs: gris = étape unique de préparation; vert = étapes en rythme annuel dans le cas normal; jaune = l'étape ne survient que si une situation d'approvisionnement critique se dessine, mais qu'elle n'est pas encore survenue; rouge = étape de prélèvement d'énergie réservée si une situation de pénurie survient effectivement.

3.1.4

Ouverture complète du marché de l'électricité (LApEl)

À l'heure actuelle, le marché de l'électricité en Suisse n'est ouvert que pour les grands consommateurs avec une consommation annuelle d'au moins 100 MWh. L'ouverture complète du marché mettra l'ensemble des consommateurs finaux, producteurs et fournisseurs d'électricité sur un plan d'égalité. Les petits consommateurs finaux (ménages, petites entreprises) pourront ainsi bénéficier également des avantages du libre choix.

17

RS 734.71

29 / 154

FF 2021 1666

Innovations et intégration des énergies renouvelables L'ouverture complète du marché permettra une meilleure intégration des énergies renouvelables. Elle permettra ainsi, pour ces énergies, de nouveaux modèles d'affaires qui ne sont pas autorisés dans une situation de monopole ou pour lesquels il n'y a pour l'heure guère d'incitations à l'innovation. Une telle orientation vers la clientèle (orientation client) va dans le sens de la Stratégie énergétique 2050. Des communautés d'énergie seront par exemple envisageables, avec la possibilité de vendre directement de l'électricité d'origine renouvelable produite localement par le biais de plateformes («électricité de proximité»). Ce modèle peut être combiné avec des participations dans des installations de production, si bien que des locataires pourront par exemple produire leur propre courant dans la région et le consommer. En rendant possibles de nouvelles offres innovantes, que ce soit dans le cadre de l'électromobilité, de la consommation propre sur place ou de l'automatisation des bâtiments, on permet aussi la diffusion de projets de grande envergure.

Suppression des distorsions du marché L'ouverture du marché est étroitement liée aux objectifs fondamentaux du marché de l'électricité (sécurité d'approvisionnement, efficacité et intégration des énergies renouvelables). Elle supprime des distorsions du marché, rééquilibre des asymétries et améliore la rentabilité. Les différentes offres électriques peuvent être utilisées plus efficacement sur le libre marché, les prix sont fixés de manière plus flexible et plus proche de la réalité du marché. Des effets positifs sont donc escomptés sur l'évolution de la flexibilité du côté du consommateur; le potentiel de gestion de la demande en énergie sera mieux exploité. Dans le cadre d'une telle ouverture complète du marché de l'électricité, il faut en outre s'attendre à de nouveaux modèles d'affaires et à des innovations de produits qui améliorent l'intégration des énergies renouvelables et soutiennent par conséquent la Stratégie énergétique 2050. L'exploitation de tous ces potentiels améliore aussi la sécurité d'approvisionnement.

Approvisionnement de base Un approvisionnement de base continuera à être assuré de façon à protéger adéquatement les petits consommateurs finaux contre les tarifs abusifs. Les
gestionnaires d'un réseau de distribution locaux sont chargés de l'approvisionnement de base. Ils proposent, dans ce cadre, un produit standard composé exclusivement d'énergie renouvelable indigène. D'autres produits peuvent également être proposés dans l'approvisionnement de base. S'ils n'ont pas opté pour un autre produit, les consommateurs finaux reçoivent le produit standard. Les gestionnaires d'un réseau de distribution locaux peuvent déléguer, sous leur propre responsabilité, le mandat de l'approvisionnement de base à des tiers, notamment de plus grands fournisseurs de l'approvisionnement de base.

Une ouverture complète du marché n'est pas compatible avec la régulation en fonction des coûts de revient qui a prévalu jusqu'à présent. L'ouverture du marché crée une situation initiale identique pour tous les consommateurs finaux et les producteurs, avec pour corollaire que le prix d'un marché concurrentiel devient la mesure de référence. L'adéquation des tarifs de l'approvisionnement de base sera évaluée en fonction des prix de marché facturés aux ménages et clients commerciaux suisses (prix 30 / 154

FF 2021 1666

comparatifs du marché). Ce mécanisme correspond à la proposition soumise par le Conseil fédéral dans le cadre de la consultation relative à l'arrêté fédéral sur l'ouverture du marché18. Un marché comparatif approprié comporte en premier lieu des offres sur le libre marché. L'observation comparative du marché peut également prendre en compte les offres de l'approvisionnement de base. Les fournisseurs de l'approvisionnement de base et les fournisseurs actifs sur le libre marché sont tenus de communiquer à l'ElCom les prix moyens pondérés en fonction des volumes. Les prix de marché étrangers peuvent également servir de mesure de comparaison. Ils pourraient être importants au moins pendant la phase initiale, quand il n'y a pas encore d'indices de marché suffisamment représentatifs en Suisse pour les prix déterminants. Étant donné que les fournisseurs de l'approvisionnement de base se couvrent pour les années tarifaires correspondantes, les prix à terme sur le marché de gros, négociés au moment de la publication des tarifs de l'énergie, peuvent aussi fournir des indications.

En cas d'observation comparative du marché, il est nécessaire de tenir compte de la qualité écologique et de l'origine de l'électricité fournie, les prix du marché correspondant aux garanties d'origine étant déterminants (cf. art. 9 LEne). Dans le cadre de l'examen de l'adéquation, il faut en outre considérer que les tarifs de l'approvisionnement de base sont fixés pour un an et que le fournisseur de l'approvisionnement de base assume par conséquent le risque lié aux variations de volume et de prix. Lors de ses examens ex-post de l'adéquation des tarifs, l'ElCom doit donc opérer avec certaines marges de tolérance. La régulation des prix de l'approvisionnement de base sert à protéger les consommateurs finaux qui y restent et peuvent ainsi s'assurer que des prix équitables leur sont proposés. Au terme de dix ans, il faudra réévaluer dans quelle mesure l'examen de l'adéquation des tarifs et des prescriptions concernant les produits dans l'approvisionnement de base sera encore nécessaire.

Approvisionnement de remplacement Si un fournisseur cesse d'approvisionner un consommateur final ou qu'un consommateur final ne désigne pas un nouveau fournisseur en temps utile à l'expiration de son contrat de livraison d'électricité, l'approvisionnement
de remplacement est assuré par le fournisseur de l'approvisionnement de base. Dans ce domaine, celui-ci n'est soumis à aucune régulation tarifaire. L'ElCom a néanmoins la possibilité d'intervenir si les conditions sont abusives.

Processus de changement La loi confère au Conseil fédéral la compétence de régler les processus de changement. S'agissant de l'approvisionnement de base, les entrées et les sorties doivent être généralement possibles à la fin de chaque année. Des changements en cours d'année tendraient à hausser les tarifs (éventuels surcoûts dus à l'acquisition à court terme).

La licéité du changement de fournisseur sur le libre marché dépend des possibilités de résiliation contractuelles. Cependant, pour qu'un retour à l'approvisionnement de base reste possible, les petits consommateurs doivent être en mesure de résilier leur contrat 18

www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2014 > DETEC; cf. Rapport explicatif du 8 octobre 2014 relatif au projet mis en consultation concernant l'arrêté fédéral sur la deuxième étape de l'ouverture du marché de l'électricité.

31 / 154

FF 2021 1666

au moins pour la fin de chaque année. Pour éviter que les gestionnaires d'un réseau de distribution n'entravent l'ouverture complète du marché en appliquant des frais de transaction, il leur est interdit d'imputer individuellement leurs coûts générés par les processus de changement, qu'il s'agisse de coûts de réseau ou d'énergie, au consommateur final concerné.

Transparence et information à la clientèle Le Conseil fédéral est habilité à obliger les fournisseurs d'électricité, à savoir tant les fournisseurs de l'approvisionnement de base que les fournisseurs sur le libre marché, à communiquer certaines informations sur l'électricité proposée (déclaration de produit). Il peut aussi s'agir d'indications dans la facturation sur la consommation électrique moyenne de consommateurs finaux comparables.

Actuellement, les garanties d'origine (GO) pour le marquage de l'électricité sont consignées sur une base annuelle. Cela signifie par exemple que la consommation pendant le trimestre d'hiver peut être couverte par des garanties d'origine du trimestre d'été.

Afin de rapprocher dans le temps les périodes de production et de consommation dans le marquage de l'électricité et de représenter ces périodes de manière plus réaliste, ainsi que dans un souci de transparence, il serait concevable de prévoir une consignation des garanties d'origine également une base trimestrielle, et non plus annuelle. La consommation devrait donc correspondre, chaque trimestre, aux garanties d'origine produites. Pour la mise en oeuvre, le DETEC pourrait procéder à une adaptation correspondante de l'ordonnance du DETEC du 1er novembre 2017 sur la garantie d'origine et le marquage de l'électricité19. Le marquage de l'électricité continuerait pour sa part à être effectué seulement une fois par an, comme aujourd'hui, au moyen des garanties d'origine.

Mesures en lien avec les énergies renouvelables Dans un régime d'ouverture complète du marché de l'électricité, l'obligation de reprise et de rétribution de l'électricité provenant d'énergies renouvelables (art. 15 LEne) incombe également au gestionnaire du réseau de distribution local qui doit assurer l'approvisionnement de base. Comme les tarifs de l'énergie dans l'approvisionnement de base doivent, de façon générale, être proposés à des prix axés sur le marché, la rétribution de
l'électricité (courant gris) se basera désormais sur le prix du marché au moment de l'injection. Comme aujourd'hui, la plus-value écologique (garantie d'origine) pourra être commercialisée en plus ou reprise volontairement par le gestionnaire du réseau contre rétribution. Le fait que la rétribution soit axée sur le marché favorise l'intégration des installations de production décentralisées dans le système global. Les conséquences négatives sur la rentabilité des installations photovoltaïques sont atténuées par la protection des acquis (cf. ch. 3.1.5.3).

L'ouverture complète du marché de l'électricité a aussi des répercussions sur les regroupements dans le cadre de la consommation propre (RCP). Ceux-ci deviendront un fournisseur d'électricité «normal» pour les participants à la suite de l'ouverture du marché, alors qu'ils agissent comme des fournisseurs de l'approvisionnement de base

19

RS 730.010.1

32 / 154

FF 2021 1666

par analogie selon le droit en vigueur. La réglementation des RCP est adaptée en conséquence.

Mesures d'accompagnement en matière de partenariat social À titre de mesure d'accompagnement, le Conseil fédéral observera les conséquences de l'ouverture du marché. S'il constate des répercussions négatives concernant les conditions de travail dans le secteur de l'électricité, il pourra engager des mesures correspondantes. Il pourra par exemple prendre des mesures dans le domaine de la reconversion, de la formation et du perfectionnement. Il pourra aussi informer la commission tripartite de la Confédération d'une éventuelle détérioration de la situation sur le marché du travail. La commission pourra alors procéder elle-même à des clarifications ou prendre des mesures. En outre, les partenaires sociaux pourront examiner si les conditions sont réunies pour négocier une convention collective de travail ou, le cas échéant, viser la conclusion d'un tel accord dans le but de prévenir les risques liés au marché du travail dans le secteur de l'électricité, ce dont le Conseil fédéral se féliciterait.

Évaluation Les développements intervenant sous le régime de l'ouverture complète du marché font l'objet d'une évaluation dans le cadre du rapport à établir par l'OFEN à intervalles réguliers conformément à l'art. 27, al. 3, OApEl.

Exemple d'application de l'ouverture du marché de l'électricité: du courant en provenance de l'école du village Une école en zone rurale fait construire une grande installation photovoltaïque sur son toit et aimerait vendre le courant produit qu'elle ne consomme pas elle-même, en particulier aux alentours de midi. Selon le droit en vigueur, il n'y a guère de possibilités. L'ouverture du marché de l'électricité permettra à un fournisseur de courant vert de reprendre l'électricité et de la proposer sur une plateforme avec des informations sur sa provenance (origine, technologie employée et, par exemple, des photos de l'installation). Les consommateurs finaux géographiquement éloignés de l'installation pourront ainsi conclure un contrat de fourniture d'électricité renouvelable en quelques clics.

3.1.5

Régime d'encouragement jusqu'en 2035 (LEne)

3.1.5.1

Encouragement jusqu'en 2035 et financement

Pour les installations éoliennes, les installations de biogaz et les nouvelles petites installations hydroélectriques, plus aucun encouragement n'est prévu en vertu du droit en vigueur à l'échéance du système de rétribution de l'injection fin 2022. C'est aussi le cas pour les installations de production d'électricité à partir de la géothermie. Pour les autres technologies, en particulier le photovoltaïque et la grande hydraulique, le soutien par le biais des contributions d'investissement se termine fin 2030. Le risque 33 / 154

FF 2021 1666

existe donc que le développement diminue trop fortement après l'expiration de l'encouragement.

Pour que le développement des énergies renouvelables se déroule conformément aux objectifs définis (cf. ch. 3.1.2) et puisse contribuer à la sécurité d'approvisionnement, le système d'encouragement doit être prolongé jusqu'en 2035. Cela crée la sécurité de planification nécessaire pour les responsables de projets. Ces derniers sont tributaires de conditions stables et prévisibles à long terme, car la phase de planification des centrales hydroélectriques et éoliennes, procédure de demande d'autorisation de construire comprise, peut durer plus de dix ans. La prolongation du régime d'encouragement jusqu'en 2035 permet en outre de faire coïncider dans le temps les conditions d'encouragement et l'objectif de développement pour 2035.

Le Conseil fédéral a pour ambition d'accélérer en particulier le développement du photovoltaïque. Au regard de l'augmentation de 332 MW en 2019, le développement devrait atteindre 600 à 700 MW par an à moyen terme. La production annuelle d'électricité d'origine photovoltaïque pourrait ainsi passer à environ 14 TWh d'ici 2035 et représenter, et de loin, la plus grande contribution au développement des énergies renouvelables. Néanmoins, les contributions des autres technologies (biomasse, géothermie, énergie éolienne, force hydraulique) sont également importantes pour la réalisation des objectifs et la sécurité d'approvisionnement. Dans la conception des instruments d'encouragement, le Conseil fédéral tient compte, dans la mesure du possible, des spécificités des différentes technologies pour qu'elles puissent contribuer à l'objectif de développement le plus efficacement possible (efficacité de l'encouragement). Le ch. 3.1.5.2 comprend des explications détaillées à ce sujet.

Malgré l'augmentation de l'objectif de développement pour les nouvelles énergies renouvelables à 17 TWh pour 2035, le plafond de 2,3 ct./kWh ne doit pas être relevé.

Certes, les moyens sont limités et il manque approximativement 200 millions de francs par an dans les conditions actuelles pour atteindre les objectifs de développement en 2035 (ce qui, ramené au supplément perçu sur le réseau, correspond à environ 0,3 ct./kWh). Le Conseil fédéral part toutefois du principe que les nouveaux objectifs de développement
pourront être atteints malgré tout grâce à des modèles d'affaires innovants et à des initiatives privées attendues avec l'ouverture du marché de l'électricité, grâce au progrès technologique dans le photovoltaïque et au renforcement des prescriptions énergétiques des cantons concernant les bâtiments. Une autre condition importante est que les prix du CO2 en Europe augmentent, ce qui entraînerait une hausse des prix de l'électricité dans l'UE et en Suisse. Si l'innovation est en deçà des attentes ou que les prix du CO2 (et, par conséquent, les prix de l'électricité) n'augmentent pas comme prévu, avec un supplément perçu sur le réseau fixé à 2,3 ct./kWh, il devrait manquer quelque 2,5 TWh pour atteindre les objectifs pour l'année 2035.

L'état de l'évolution par rapport aux objectifs de la LEne est suivi dans le cadre du monitoring de la Stratégie énergétique 2050. S'il apparaît que les objectifs ne pourront pas être atteints, le Conseil fédéral proposera des mesures et des moyens supplémentaires, comme cela est déjà prévu dans le droit en vigueur (art. 55 LEne). Il présentera en particulier un état des lieux comprenant les avantages et les inconvénients du passage à un système de taxe d'incitation sur le prix de l'électricité («système incitatif en matière d'électricité»). Pour l'heure, il convient de s'en tenir à l'échéance de 2035 en ce qui concerne le régime d'encouragement.

34 / 154

FF 2021 1666

Pour garantir la cohérence avec la stratégie climatique, le Conseil fédéral estime réaliste et judicieux de fonder les objectifs de développement et de consommation sur les valeurs actuelles des perspectives énergétiques. De plus, la variante «bilan annuel équilibré 2050» tient particulièrement compte de l'objectif visant une sécurité d'approvisionnement à long terme. Des valeurs cibles plus élevées (comme l'ont demandé des participants à la consultation) entraîneraient un développement plus rapide, mais nécessiteraient davantage de moyens ces prochaines années et, partant, un relèvement du supplément perçu sur le réseau. Un objectif de développement augmenté de 30 % ­ environ 22 TWh/an en 2035 (soit une augmentation de 5 TWh/an) ­ impliquerait par exemple un développement de la production photovoltaïque la faisant passer à 19 TWh/an (à titre de comparaison, la production annuelle moyenne des centrales nucléaires suisses s'élevait à 24,4 TWh en 2019). Dans un tel scénario, le supplément perçu sur le réseau devrait être relevé à 3,0 ct./kWh.

3.1.5.2

Instruments d'encouragement

Remplacement du système de rétribution de l'injection par des contributions d'investissement En 2016, le Parlement a décidé de mettre un terme au système de rétribution de l'injection pour la fin 2022 et de plafonner les coûts liés à l'encouragement; le peuple l'a confirmé en 2017 en vote référendaire. Depuis, de nombreux responsables de projets d'installations hydroélectriques et de biomasse sont passés aux nouvelles contributions d'investissement. Dans les domaines où la contribution d'investissement est assez élevée (en particulier pour les agrandissements des petites centrales hydroélectriques, où 60 % au plus des coûts d'investissement sont pris en charge), il y a eu suffisamment d'intéressés disposés à se lancer dans de nouveaux projets avec cet instrument d'encouragement. Depuis l'entrée en vigueur de la révision totale de la LEne le 1er janvier 2018, l'OFEN a ainsi pu rendre des décisions d'octroi d'encouragement à hauteur d'environ 215 millions de francs en faveur d'une cinquantaine de projets.

Une contribution d'investissement permet d'apporter un soutien financier ciblé à la phase de construction d'une installation de production d'électricité qui nécessite des capitaux importants. Les installations hydroélectriques et éoliennes, en particulier, requièrent en effet des investissements importants dans la phase de construction et peuvent bénéficier idéalement des contributions d'investissement. Par la suite, ce qui n'était pas le cas avec l'ancienne rétribution de l'injection à prix coûtant, le responsable de projet est exposé aux forces du marché et optimise l'exploitation de l'installation et la production d'électricité en fonction des prix sur le marché de l'énergie, de sorte qu'il produit par exemple davantage d'électricité au moment où les prix sont élevés, et inversement. Les contributions d'investissement ont comme autre avantage que la Confédération n'est plus liée financièrement aux projets pour de longues périodes de rétribution et peut donc soutenir davantage de nouveaux projets.

Le système de la rétribution unique (RU) pour les installations photovoltaïques a fait ses preuves ces dernières années. Depuis 2014, il est disponible pour les installations d'une puissance inférieure à 30 kW et aussi, depuis 2018, pour des installations plus grandes, d'une puissance allant jusqu'à 50 MW. L'extension de la rétribution unique 35 / 154

FF 2021 1666

aux grandes installations a eu pour conséquence qu'en 2020, le développement du photovoltaïque devrait atteindre un niveau jamais observé auparavant. En comparaison européenne, la Suisse figurait en 2019 à la septième place en matière de puissance photovoltaïque installée par habitant.

Le Conseil fédéral estime que l'encouragement par le biais de contributions d'investissement (y c. rétributions uniques), qui permettent une forte intégration de l'électricité issue d'énergies renouvelables dans le marché de l'énergie, est efficace. Il propose par conséquent de maintenir les contributions d'investissement établies. Cela fait également sens au regard des expériences faites à l'échelle internationale, qui montrent que des conditions-cadres constantes dans l'encouragement des énergies renouvelables sont la principale condition pour assurer un développement continu. Au vu des avantages précités et des expériences positives, l'encouragement doit se poursuivre jusqu'en 2035 par le biais de contributions d'investissement pour les installations éoliennes, les installations de biogaz et les nouvelles petites installations hydroélectriques ainsi que pour les installations de production d'électricité à partir de la géothermie.

Les infrastructures des pouvoirs publics (usines d'incinération des ordures ménagères, stations d'épuration des eaux usées) qui peuvent financer leur exploitation par des taxes d'élimination conformes au principe de causalité, ne doivent plus être soutenues pour leur production d'électricité.

Jusqu'ici, l'exécution a en outre révélé que les coûts supplémentaires non amortissables sont presque toujours plus élevés que les taux fixés par le Conseil fédéral en vertu de la loi (art. 29, al. 1, let. b, LEne). Dans le cadre des contributions d'investissement, les coûts supplémentaires non amortissables ne seront donc en principe plus calculés pour chaque installation: les requérants obtiendront le taux pour les coûts d'investissement imputables défini dans l'ordonnance. Le Conseil fédéral devra se baser sur les coûts d'une nouvelle installation ou de l'agrandissement ou la rénovation d'une installation pour fixer les taux et ainsi s'assurer qu'il n'y a pas de rétribution excessive. Il pourra par ailleurs prévoir la possibilité de procéder à des examens approfondis de la rentabilité au cas
par cas. Si l'examen approfondi d'une demande ne révèle pas de coûts non couverts, aucune contribution d'investissement n'est accordée. Cette solution permettra une diminution importante de la charge liée à l'exécution pour l'autorité et les requérants.

Garantie des coûts d'étude de projet Le développement de projets pour l'utilisation de la force hydraulique, de l'énergie éolienne et de la géothermie implique des coûts d'études de projet très élevés. Il n'est pas rare que des projets prometteurs échouent du fait des procédures longues et coûteuses. Cette situation dissuade des promoteurs potentiels de lancer de nouveaux projets. Les nouvelles contributions d'étude de projet visent à réduire le risque lié à la réalisation et le risque financier qui en découle. Elles se montent à 40 % au plus des coûts d'étude de projet. Dans le cas où une garantie de contribution d'investissement est attribuée par la suite, les contributions d'étude de projet seront déduites de celle-ci.

36 / 154

FF 2021 1666

3.1.5.3

Installations photovoltaïques

Pour les installations photovoltaïques sans consommation propre, les contributions maximales sont augmentées de 30 à 60 % des coûts d'investissement imputables. Une fois que la liste d'attente pour la rétribution unique aura été entièrement résorbée, il sera possible dès 2022 de viser un développement de 500 à 600 MW par an jusqu'en 2035 avec les subventions existantes, en fonction des montants individuels consentis.

Pour les grandes installations photovoltaïques à partir d'une certaine puissance, les contributions de la rétribution unique doivent pouvoir être fixées par mises aux enchères. Ce faisant, le Conseil fédéral peut instaurer séparément des mises aux enchères pour les installations avec et sans consommation propre. Ces dernières ont la priorité, car elles ne sont guère réalisées dans le contexte actuel et les mises aux enchères permettent ainsi d'exploiter de nouveaux potentiels de manière ciblée. Pour cela, il est nécessaire de relever de 30 à 60 % le plafond de la rétribution unique, rapporté aux coûts d'investissement déterminants des installations de référence au moment de leur mise en exploitation, pour les installations sans consommation propre. Cette mesure est nécessaire, car ce type d'installations ne bénéficie pas des avantages de la consommation propre (aucune rémunération pour l'utilisation du réseau ni redevance n'est due pour l'électricité consommée en propre), la consommation d'électricité sur place étant par exemple trop faible. L'octroi de la rétribution unique par mise aux enchères doit permettre d'augmenter l'efficacité du dispositif d'encouragement, car ce sont alors les installations les plus économiques de ce segment qui obtiennent l'adjudication. Des ressources supplémentaires sont prévues pour ces mises aux enchères dans le but de soutenir un développement annuel supplémentaire de 100 à 130 MW environ dans ce segment de marché. La production annuelle d'électricité d'origine photovoltaïque devrait ainsi atteindre jusqu'à 14 TWh d'ici 2035.

Comme mentionné précédemment, le Conseil national a décidé le 7 septembre 2020, sans opposition, de maintenir son soutien à l'initiative 20.401 de la CEATE-N, qui demande également l'introduction d'un système de mise aux enchères pour l'octroi de rétributions uniques aux grandes installations photovoltaïques sans consommation propre.
Lors des mises aux enchères, le taux de financement proposé par kilowatt de puissance installée constitue le critère d'adjudication principal. Par ailleurs, la capacité de produire de l'électricité pendant le semestre d'hiver peut être prise en considération pour l'adjudication. Pour mener à bien des mises aux enchères avec une véritable concurrence entre soumissionnaires, il est cependant essentiel d'attirer un nombre suffisant de participants. À cette fin, il est nécessaire de concevoir une procédure de mise aux enchères claire et aisément compréhensible. La participation aux mises aux enchères doit être ouverte aux projets prêts à être réalisés sur un site spécifique, mais qui n'en sont pas encore au stade de la mise en oeuvre. Si la puissance définie dans l'offre n'est pas atteinte, que les délais impartis pour la réalisation ne sont pas respectés ou que d'autres qualités figurant dans l'offre ne sont pas concrétisées, le Conseil fédéral peut prévoir des sanctions à l'encontre des participants.

Dans le but d'accélérer encore le développement du photovoltaïque, l'OFEN compte renforcer la communication par le biais du programme SuisseEnergie (en particulier 37 / 154

FF 2021 1666

en ce qui concerne l'exploitation des grandes surfaces de toiture dans l'agriculture, l'industrie et le secteur des services) et oeuvrer à la réduction des obstacles administratifs et à la simplification des processus (au moyen de la numérisation).

Le développement en cours et l'évolution prévue des capacités photovoltaïques sont détaillés dans la figure ci-dessous:

Figure 3: Développement en cours et évolution prévue du photovoltaïque en Suisse.

Pour les installations photovoltaïques, il est prévu d'atténuer les possibles conséquences négatives découlant de l'adaptation de la réglementation relative à l'obligation de rétribution. Les installations photovoltaïques mises en service jusqu'au moment de l'entrée en vigueur de la loi, qui sont éligibles à l'obligation de reprise et de rétribution et qui ne bénéficient pas ni n'ont bénéficié d'une rétribution du courant injecté, d'un financement des frais supplémentaires ou d'un soutien cantonal ou communal comparable, doivent être protégées contre une baisse des revenus à la suite d'une diminution de la rétribution au sens de l'art. 15 LEne. La protection des acquis doit s'appliquer pour une période limitée à dix ans. Ces installations continueront à réaliser des revenus à la hauteur de la rétribution que les gestionnaires d'un réseau de distribution suisses ont globalement octroyée, c'est-à-dire pour l'électricité et les garanties d'origine, en moyenne au cours des cinq années précédant l'entrée en vigueur de la loi. Les exploitants des installations visées doivent pouvoir vendre leurs garanties d'origine à l'organe d'exécution à un tarif défini. Le tarif de reprise des garanties d'origine correspond à la différence entre la moyenne sur cinq ans que le Conseil fédéral doit fixer et le prix de marché de référence (art. 23 LEne). Les garanties d'origine reprises par l'organe d'exécution sont revendues sur le marché; la différence est financée par le fonds alimenté par le supplément.

38 / 154

FF 2021 1666

Exemple d'application des appels d'offres pour les installations photovoltaïques sans consommation propre Un agriculteur aimerait faire construire une installation photovoltaïque sur le toit de sa grange. Comme le bâtiment consomme peu d'électricité, seule une petite partie du courant photovoltaïque peut servir à la consommation propre. La seule source de revenus est par conséquent la vente d'électricité par le biais du réseau, par exemple à un gestionnaire de réseau local ou sur le marché de l'électricité.

Étant donné que les revenus sont plus incertains dans ce cas et que, contrairement aux installations destinées à la consommation propre, les économies réalisées sur la rémunération pour l'utilisation du réseau ne contribuent pas à améliorer la rentabilité, de telles installations sans consommation propre recevront un soutien plus important, pouvant atteindre 60 % des coûts d'investissement (jusqu'ici au maximum 30 %).

Pour ce faire, le propriétaire pourra participer à des enchères. De telles enchères auront lieu régulièrement et n'impliqueront pas une charge de travail disproportionnée. L'agriculteur soumettra une offre, dans laquelle il indiquera quel soutien il demande pour l'installation. Les offres les plus avantageuses en fonction de la puissance installée seront sélectionnées au cours de la procédure et recevront l'adjudication en vue de l'encouragement. Cela permet de garantir que chaque installation sélectionnée reçoit exactement le soutien nécessaire à une exploitation rentable. Par ailleurs, les fonds disponibles sont alloués efficacement. Quiconque ne reçoit pas d'adjudication lors d'une mise aux enchères peut prendre part à de nouvelles enchères ultérieurement.

3.1.5.4

Grande hydraulique

L'étude de l'OFEN de 2019 sur le potentiel hydroélectrique20 a révélé que la grande hydraulique est essentielle pour le développement de la force hydraulique. Il s'agit aussi bien de la construction de nouvelles installations que de l'agrandissement d'installations existantes, celui-ci devant être particulièrement encouragé dans l'intérêt de la biodiversité. Par ses caractéristiques spécifiques, la grande hydraulique fournit, d'une part, une contribution quantitative importante aux objectifs de développement inscrits dans la loi et, d'autre part, les centrales à accumulation contribuent particulièrement au renforcement de la sécurité d'approvisionnement.

L'instrument inscrit dans la LApEl et décrit au ch. 3.1.3.2 apportera un soutien aux projets particulièrement adaptés à un transfert saisonnier d'énergie de l'été à l'hiver, qui contribuent ainsi notablement au renforcement de la sécurité d'approvisionnement en hiver.

20

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Energies renouvelables > Force hydraulique; Potentiel hydroélectrique de la Suisse: Évaluation du potentiel de développement de la force hydraulique dans le cadre de la Stratégie énergétique 2050, 2.9.2019.

39 / 154

FF 2021 1666

Les nouveaux projets dans la grande hydraulique, y compris ceux qui ne visent pas spécifiquement la production en hiver, impliquent toutefois des coûts de revient élevés21, si bien que, sans soutien financier, la plupart ne sont pas rentables et ne sont donc pas réalisés. L'objectif quantitatif de développement prévu dans la Stratégie énergétique 2050 est dès lors difficile à atteindre. C'est pourquoi il y a lieu d'adapter partiellement le système d'encouragement.

Les centrales hydroélectriques impliquent des coûts élevés d'investissement initial; une fois ces installations construites, leurs coûts d'exploitation sont relativement faibles. Même pendant les périodes où les prix étaient bas, les recettes réalisées sur le marché couvraient en grande partie les coûts variables par le passé, si bien qu'il n'était pas judicieux économiquement d'arrêter une installation. En plus des coûts d'exploitation récurrents, il y a aussi régulièrement des investissements liés à la rénovation des installations hydroélectriques. À cet égard, on a assisté à un changement de paradigme ces dernières années en raison de la pression sur les coûts. Alors que la nécessité d'investir dans la rénovation n'était auparavant guère remise en question, des approches fondées sur les risques sont de plus en plus appliquées aujourd'hui, si bien que les décisions prises en matière de rénovation, en se focalisant sur les parties les plus critiques des installations, répondent davantage à une logique d'efficacité.

Les investissements de rénovation indispensables, sans lesquels il n'est plus possible d'exploiter une installation, sont consentis pour les grandes installations hydroélectriques dans un intérêt purement économique. Pour les installations plus petites, qui ont en général des coûts de revient plus élevés (coûts annuels constitués des coûts d'exploitation et de capital annuels, par rapport à la production annuelle) que les grandes installations, des investissements de rénovation importants ne sont en revanche souvent pas viables sur le plan économique; en conséquence, ils peuvent conduire à une mise hors service durable des installations. C'est pourquoi les rénovations notables de petites installations hydroélectriques d'une puissance que le Conseil fédéral doit définir, mais qui ne peut excéder 5 MW, doivent encore pouvoir
bénéficier d'une contribution d'investissement, dont le montant maximal est abaissé à 40 % des coûts d'investissement imputables. Le Conseil fédéral fixe la limite de puissance sur la base des conditions économiques qui prévalent; elle serait actuellement de l'ordre de 1 à 2 MW. Il n'est pas exclu qu'une augmentation soit nécessaire d'un point de vue économique à l'avenir. Ces nouvelles règles permettront de mieux cibler le soutien au développement de l'énergie hydraulique.

Jusqu'ici, la part de pompage-turbinage des centrales à pompage-turbinage était exclue de l'encouragement par le biais des contributions d'investissement. Lors des débats relatifs à la Stratégie énergétique 2050, le Parlement avait introduit des contributions d'investissement pour la grande hydraulique, tout en excluant le soutien au pompage-turbinage. La raison en était que le pompage-turbinage était considéré comme rentable et axé sur l'Europe et que les pompes étaient généralement alimentées par de l'énergie en ruban issue de centrales nucléaires et de centrales à charbon la nuit 21

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Energies renouvelables > Force hydraulique > Grande hydraulique; Perspektiven für die Grosswasserkraft in der Schweiz ­ Wirtschaftlichkeit von Projekten für grosse Laufwasser- und Speicherkraftwerke und mögliche Instrumente zur Förderung der Grosswasserkraft, 12.12.2013, OFEN (en allemand avec résumé en français).

40 / 154

FF 2021 1666

et par le turbinage le jour. Cet état de fait a déjà changé entre-temps et évoluera encore à l'avenir, l'intégration de la production d'origine renouvelable devenant ici prédominante. Or, dans les conditions qui prévalent aujourd'hui, les investissements dans les installations de pompage-turbinage pures ne sont pas rentables. En Suisse, deux grandes installations de pompage-turbinage pures ont été construites au cours de la décennie écoulée (Linth-Limmern et Nant de Drance), qui sont intégrées aujourd'hui au marché et dont les capacités couvrent pour l'instant suffisamment les besoins de flexibilité sur le marché suisse. Avec la part croissante de la production d'énergie d'origine renouvelable, il peut être nécessaire, pour son intégration dans le système, de développer de nouvelles capacités de stockage hautement flexibles, comme celles des centrales à pompage-turbinage servant partiellement ou exclusivement au pompage-turbinage. C'est pourquoi le Conseil fédéral doit aussi avoir la possibilité de permettre un encouragement de la part de pompage-turbinage par le biais de contributions d'investissement. Il suivra le développement et l'intégration des énergies renouvelables dans le marché et, si nécessaire, précisera cet encouragement dans les dispositions d'exécution.

Suppression de l'examen des coûts supplémentaires non amortissables lors de la fixation des contributions d'investissement Les investisseurs ont besoin, le plus tôt possible, d'une sécurité de planification élevée pour développer et réaliser un projet. À l'heure actuelle, la contribution d'investissement est déterminée à l'aide d'un calcul des coûts d'investissement. Celui-ci entraîne une charge considérable aussi bien pour les requérants que pour l'autorité chargée de l'examen des demandes, et suscite certaines incertitudes. L'examen des demandes déposées jusqu'ici a également révélé que les coûts supplémentaires non amortissables n'étaient guère déterminants pour le calcul des différentes contributions d'investissement dans le contexte actuel et que les taux maximaux étaient presque toujours appliqués. C'est pourquoi les coûts supplémentaires non amortissables ne devront dorénavant plus être calculés.

Cette approche augmente toutefois la probabilité d'un surfinancement, en particulier si les prix du marché devaient sensiblement
augmenter. Le Conseil fédéral doit en tenir compte en fixant concrètement les taux au niveau de l'ordonnance. Par ailleurs, il peut procéder au cas par cas à un examen approfondi de la rentabilité des différents projets en présence d'indices laissant supposer qu'ils ne présentent pas de coûts non couverts.

Augmentation de la part de l'encouragement en faveur de la grande hydraulique de 0,1 à 0,2 ct./kWh Pour le soutien de la grande hydraulique, une part maximale moyenne de 0,1 ct./kWh sur cinq ans était jusqu'ici disponible par le biais du supplément perçu sur le réseau.

Afin de pouvoir soutenir les installations les plus efficaces, le Conseil fédéral a instauré une réglementation concernant les jours de référence. Tous les deux ans, environ 100 millions de francs sont octroyés; les ressources du premier jour de référence (pour les années 2018 et 2019) ont été allouées dans leur intégralité.

Les grands projets actuels, comme le projet d'installation hydroélectrique de Chlus, présentent un volume d'investissements allant jusqu'à 400 millions de francs d'après 41 / 154

FF 2021 1666

le stade de planification actuel. Compte tenu des imprécisions au niveau des coûts, il faut s'attendre à ce qu'une contribution d'investissement pouvant atteindre 200 millions de francs soit sollicitée pour un tel projet, autrement dit les ressources disponibles pour quatre ans. Avec la dotation financière actuelle, le risque existe ainsi que d'autres grandes centrales hydroélectriques ne puissent être soutenues qu'ultérieurement, voire pas du tout, et ne voient donc pas le jour. De telles installations de grande envergure offrent une production considérable et leur concrétisation contribue de manière substantielle à la réalisation des objectifs de développement.

Il faut donc davantage de moyens d'encouragement pour atteindre les objectifs de développement fixés dans la stratégie énergétique. C'est pourquoi la grande hydraulique disposera désormais de 0,2 ct./kWh.

Les mesures proposées dans la LEne et la LApEl se complètent: tandis que les mesures prévues dans la LEne visent, de façon générale, la réalisation des objectifs de développement (volume annuel, quantité), la mesure prévue dans la LApEl vise à garantir les capacités nécessaires pour l'hiver (capacité d'autonomie, qualité). Un financement simultané de projets de stockage spécifiques avec les moyens de la LEne et de la LApEl est exclu.

3.1.5.5

Énergie éolienne

Des contributions d'investissement à hauteur de 60 % au plus des coûts d'investissement imputables pourront être allouées aux nouvelles installations éoliennes d'une puissance d'au moins 2 MW. Seront soutenus les projets qui ont suivi le processus de planification et d'approbation ordinaire et ont été autorisés par les autorités compétentes.

3.1.5.6

Géothermie

Dans le domaine de la géothermie, des contributions d'investissement pourront désormais aussi être allouées ­ au-delà de la recherche de ressources géothermiques ­ pour la mise en valeur du sous-sol. La mise en valeur va plus loin que la recherche de ressources au sens du droit en vigueur: elle comprend la confirmation d'un réservoir géothermique présumé, la détermination du potentiel de rendement (exploration) et la réinjection éventuelle de l'eau extraite dans le réservoir géothermique. L'encouragement de la mise en valeur du sous-sol pour les projets de production d'électricité se rapproche ainsi de celui de l'utilisation directe pour la production de chaleur (d'après la loi sur le CO2). Il sera par ailleurs possible ­ par une approche globale de la mise en valeur du sous-sol ­ de tenir compte des exigences croissantes en matière de sécurité (p. ex. pour l'atténuation du risque sismique). De plus, des contributions d'investissement pourront aussi être sollicitées pour la construction et la mise en service d'installations géothermiques. Compte tenu des caractéristiques géologiques, les contributions seront allouées à la géothermie de manière échelonnée par phase de projet ­ pour la prospection, la mise en valeur, la construction et la mise en service d'installations de production d'électricité. Comme c'est le cas dans le droit en 42 / 154

FF 2021 1666

vigueur, les responsables de projets pourront solliciter pour chaque phase une garantie (cf. art. 33 LEne) ou une contribution.

3.1.5.7

Petite hydraulique

Pour pouvoir satisfaire aux objectifs de développement visés à l'art. 2, al. 2, LEne, il est indispensable de valoriser le potentiel inexploité de la petite hydraulique. Sur la base de la liste d'attente actuelle de la rétribution de l'injection, l'OFEN estime que des contributions d'investissement de l'ordre de 340 millions de francs permettraient de soutenir des projets représentant une production de 390 GWh. C'est pourquoi les nouvelles petites installations hydroélectriques d'une puissance minimale de 1 MW recevront une contribution d'investissement à la place de la rétribution de l'injection.

Il ne sera pas nécessaire d'utiliser davantage de subventions qu'aujourd'hui à cette fin.

Toutes les installations d'exploitation accessoire qui ne satisfont pas aux limites inférieures de puissance au sens de l'art. 26, al. 1, LEne peuvent quand même solliciter une contribution d'investissement. Le Conseil fédéral doit aussi pouvoir prévoir un tel non-respect des limites inférieures pour d'autres installations hydroélectriques dans certaines conditions (sur un cours d'eau déjà exploité ou si un potentiel supplémentaire peut être valorisé sans nouvelle atteinte à la nature).

3.1.5.8

Biomasse

Les contributions d'investissement allouées pour les installations de biomasse passent de 20 % au plus aujourd'hui à 60 % au plus des coûts d'investissement imputables pour les parties de l'installation dédiées à la production d'électricité. À l'avenir, les installations de biogaz pourront aussi bénéficier d'une contribution d'investissement.

Les installations alimentées partiellement en combustibles ou en carburants fossiles, les usines d'incinération des ordures ménagères (UIOM) et les stations publiques d'épuration des eaux usées (STEP) ne pourront plus solliciter de contributions d'investissement. Ces installations sont déjà exploitées avec une pleine couverture des coûts grâce aux taxes d'élimination selon le principe du pollueur-payeur. Les UIOM doivent en outre respecter des exigences énergétiques minimales en vertu de l'ordonnance du 4 décembre 2015 sur les déchets22. Elles sont tenues d'utiliser au moins 55 % du potentiel énergétique des déchets en dehors des installations.

Pour les STEP, il est nécessaire d'ajouter des mesures énergétiques dans les prescriptions sur la protection de l'environnement au niveau de l'ordonnance, de façon analogue aux réglementations précitées relatives aux UIOM, pour que les STEP soient exploitées le plus efficacement possible sur le plan énergétique et utilisent les éventuels gaz d'épuration et les rejets de chaleur dans les eaux usées. Ce faisant, il convient de tenir compte de la protection des eaux, des possibilités techniques et opérationnelles ainsi que de la viabilité économique.

22

RS 814.600

43 / 154

FF 2021 1666

3.1.6

Amélioration de l'efficacité énergétique (LEne)

L'adaptation du système énergétique à l'objectif climatique de zéro émission nette implique une électrification accrue. Il convient en particulier de mettre l'accent sur le remplacement des chauffages à combustibles fossiles par des pompes à chaleur et par d'autres énergies renouvelables, ainsi que sur l'électrification des transports et de la chaleur destinée aux processus industriels. De nouvelles améliorations de l'efficacité énergétique, et notamment de l'efficacité électrique, sont donc importantes. Plusieurs applications disposent encore d'un potentiel d'efficacité et d'économie élevé, comme les chauffages et chauffe-eau électriques, les systèmes d'entraînement électriques dans les entreprises, ainsi que l'éclairage et des appareils utilisés par les professionnels et les ménages.

Dans le domaine de l'efficacité électrique, la Confédération met actuellement en oeuvre, en se fondant sur la LEne, des prescriptions, des programmes d'encouragement et des mesures d'information, de conseil, de formation et de perfectionnement.

Ces instruments seront encore utilisés et en partie renforcés. L'efficacité est primordiale, c'est-à-dire que la consommation d'énergie est optimisée afin d'utiliser moins d'énergie qu'aujourd'hui pour le même résultat. Les mesures visant la suffisance, qui cherchent à modifier les habitudes de consommation, revêtent aussi une importance fondamentale afin de réduire dans l'absolu la consommation d'énergie et de ressources.

Une base est créée dans la LEne pour des programmes à l'échelle nationale visant à soutenir des mesures standard visant à augmenter l'efficacité électrique (p. ex. certains types de moteurs ou d'installations de ventilation sont remplacés dans toute la Suisse). À l'heure actuelle, la Confédération encourage uniquement l'efficacité électrique dans le cadre d'appels d'offres publics, des projets et programmes étant subventionnés chaque année par ce biais. L'instrument est une réussite et permet chaque année des économies d'électricité d'environ 740 GWh. Toutefois, il atteint ses limites: les programmes soutenus sont limités dans le temps en raison de l'exigence de mise en concurrence, ne couvrent pas toujours la Suisse entière et sont mis en oeuvre successivement par divers organismes responsables. C'est pourquoi des programmes doivent désormais pouvoir
être directement lancés à l'échelle nationale pour des mesures standardisées et évolutives. Désormais, c'est la Confédération qui fixera les conditions applicables à l'encouragement et mettra la mise en oeuvre du programme au concours. Cela permet d'éviter des interruptions dans l'encouragement, de couvrir toute la Suisse et d'exploiter davantage de potentiels d'efficacité grâce à une meilleure visibilité et continuité. Cette démarche permettra chaque année des économies d'électricité supplémentaires allant jusqu'à 500 GWh. La Confédération veillera à ce que l'efficacité de l'encouragement (en centime de subvention de la Confédération par kWh économisé) soit au moins aussi bonne que dans les appels d'offres publics actuels. Les nouveaux programmes seront financés par la part maximale de 0,1 ct./kWh qui est d'ores et déjà prévue dans le supplément perçu sur le réseau pour les appels d'offres publics concernant les mesures d'efficacité énergétique.

Comme mesure ciblée pour restreindre la consommation d'électricité en hiver, il convient d'examiner comment réduire fortement la consommation d'électricité destinée

44 / 154

FF 2021 1666

aux chauffages à résistance électrique. Ces chauffages consomment actuellement environ 2,8 TWh d'électricité pendant l'hiver. En les remplaçant à large échelle par des pompes à chaleur, il serait possible d'économiser quelque 2 TWh. Les cantons font aujourd'hui déjà des efforts dans différents domaines pour réduire la consommation.

En impliquant les cantons, il est nécessaire d'examiner les possibilités d'étendre et d'accélérer sensiblement le remplacement de ces chauffages. L'examen porte notamment sur la question de savoir s'il y a lieu d'interdire la mise à disposition sur le marché de certaines catégories de chauffages à résistance électrique (sur la base de l'art. 44 LEne et, le cas échéant, de l'art. 4 de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce [LETC]23).

3.1.7

Utilisation des flexibilités dans le réseau de distribution (LApEl)

Les avantages liés à l'utilisation de la flexibilité ­ variation de la puissance injectée ou pilotage du côté de la consommation ­ sont multiples et peuvent être mis à profit dans le domaine des réseaux (pour prévenir les pénuries et pour intégrer des unités de production décentralisées), sur le marché de l'électricité, mais aussi directement chez les détenteurs de flexibilité (pour optimiser la consommation propre). La gestion de l'injection des installations de production est particulièrement intéressante du point de vue économique. Pour que les flexibilités puissent être intégrées dans le marché à court ou moyen terme et aussi servir à prévenir les congestions du réseau, des conditions-cadres régulatrices adéquates sont nécessaires à l'interface entre les gestionnaires d'un réseau de distribution et les prestataires de flexibilité.

La clarification des droits d'accès est un élément-clé: les producteurs, exploitants de stockage ou consommateurs finaux concernés doivent avoir le droit d'utiliser leurs propres flexibilités. Si des tiers, gestionnaires d'un réseau de distribution compris, veulent utiliser les flexibilités, ils doivent en principe fixer les modalités d'utilisation dans un contrat. Si les gestionnaires de réseau de distribution veulent, comme jusqu'ici, utiliser la flexibilité au service du réseau, ils doivent proposer aux détenteurs de flexibilité des conditions contractuelles qui, au sein d'une même configuration, sont uniformes et non discriminatoires. Les rétributions pour la flexibilité au niveau de la consommation sont par exemple possibles par le biais d'une réduction de la rémunération pour l'utilisation du réseau. Ces rétributions doivent refléter la valeur financière de la flexibilité. Des contrats individuels sont admis pour les détenteurs de flexibilité de grande envergure.

Afin d'optimiser les coûts de développement du réseau par l'utilisation des flexibilités, les gestionnaires de réseau doivent éviter de mettre en oeuvre d'autres mesures, plus onéreuses, liées au réseau. Ils doivent par conséquent tenir compte, dans leur planification du réseau, du potentiel de flexibilité dans leur zone de desserte. Ce point est explicité par un ajout dans le principe légal ORARE (Optimisation du Réseau avant Renforcement et avant Extension). Selon ce principe, l'exploitation du réseau actuelle ­ y compris l'utilisation de la flexibilité ­ est optimisée en premier, avant le 23

RS 946.51

45 / 154

FF 2021 1666

renforcement des lignes existantes, l'extension constituant la dernière mesure. Les gestionnaires de réseau doivent en principe pouvoir imputer, sans dépasser certaines limites, les coûts occasionnés par l'utilisation de flexibilités au service du réseau, le rapport coût-efficacité étant vérifié par l'ElCom.

De plus, des droits d'utilisation garantis sont définis pour les gestionnaires de réseau: s'agissant de la flexibilité au niveau de la production, les gestionnaires doivent bénéficier de possibilités forfaitaires limitées d'ajustement de l'injection contre rémunération. En outre, ils se voient garantir le droit d'utiliser les flexibilités pour éviter une mise en péril immédiate et importante de la sécurité de l'exploitation du réseau. Une telle utilisation ne lui occasionne aucun coût si on ne peut raisonnablement exiger de lui qu'il évite le péril par un autre moyen.

Dans le domaine de la flexibilité au service du réseau, l'ElCom dispose également de compétences: elle statue sur les utilisations garanties, sur la protection des détenteurs de flexibilité ainsi qu'en cas de rémunérations abusives. Son concours serait en outre nécessaire dans le cadre d'une éventuelle évaluation de la réglementation de la flexibilité.

La réglementation qui régit la flexibilité ne doit pas être confondue avec celle qui vise les systèmes de commande et de réglage intelligents, qui a déjà été introduite dans le cadre de la révision de la LEne en 2016 (art. 17b LApEl). Grâce à de tels systèmes, les flexibilités deviennent véritablement utilisables. S'agissant de la régulation de l'accès, le principe du consentement (opt-in), qui laisse aux acteurs concernés le choix de confier la gestion de leur installation à un tiers, est fondamental. La flexibilité est en revanche un bien proprement dit, dont la gestion, respectivement les droits beaucoup plus fondamentaux qui lui sont liés, sont réglés par les dispositions de la LApEl.

Il est donc nécessaire de prévoir une telle réglementation parallèlement à celle des systèmes de commande et de réglage intelligents et de les harmoniser.

L'accès à la flexibilité se fait par le biais de systèmes numériques et comporte certains risques en matière de sécurité des données. C'est pourquoi il est nécessaire de prévoir des exigences spécifiques dans ce domaine (cf. aussi le ch. 3.1.8
portant sur le registre de données dans le secteur de l'électricité).

Deux exemples d'application de la réglementation de la flexibilité Exemple no 1: une famille dans une maison équipée d'une pompe à chaleur Dans cet exemple, la pompe à chaleur est une source de flexibilité: grâce à la chaleur accumulée, le moment du soutirage d'électricité peut être différé jusqu'à un certain point sans même que la famille s'en rende compte. La réglementation qui régit la flexibilité la rend exploitable et le détenteur de flexibilité peut décider de son utilisation. Le gestionnaire du réseau de distribution local peut par exemple éviter une congestion dans son réseau grâce au pilotage ciblé de la pompe à chaleur. Il peut ainsi éviter un coûteux développement du réseau. Dans cet exemple, le gestionnaire du réseau de distribution propose à la famille un contrat régissant le pilotage de la pompe à chaleur ainsi que la rétribution. Cela peut se faire très simplement par le biais d'un rabais sur la rémunération pour l'utilisation du réseau. Le gestionnaire de réseau bénéficie dès lors de flexibilité dans son réseau, 46 / 154

FF 2021 1666

et la famille profite d'une rétribution. Si par la suite, la famille souhaite utiliser elle-même la flexibilité de sa pompe à chaleur, par exemple pour une consommation optimale de l'électricité produite par l'installation photovoltaïque sur le toit, elle résilie le contrat avec le gestionnaire du réseau de distribution.

Exemple no 2: réduction de l'injection pour une entreprise artisanale disposant d'une installation photovoltaïque Dans cet exemple, l'installation photovoltaïque est une source de flexibilité: grâce à la réduction ciblée de la puissance d'injection à un moment déterminé, le réseau de distribution auquel l'installation de production est raccordée peut être concrètement déchargé. Une congestion, par exemple sur une ligne ou un transformateur, est ainsi évitée. Le gestionnaire de réseau peut donc optimiser le développement de celui-ci en mettant à profit la possibilité de réduire la puissance injectée. La diminution de certains pics de puissance injectée a certes un effet positif indéniable sur le réseau mais, en termes quantitatifs, la différence au niveau de l'électricité produite et injectée est minime. Pour que les gestionnaires d'un réseau de distribution puissent utiliser cette flexibilité sans obstacles majeurs, le projet de loi prévoit explicitement qu'ils ont le droit d'utiliser cette flexibilité du côté de l'injection dans une mesure définie. Il va de soi que le gestionnaire de réseau doit dédommager l'exploitant de l'installation, dans le cas présent l'entreprise artisanale, pour l'électricité utilisée à des fins d'ajustement; l'exploitant ne subit ainsi aucun préjudice financier.

3.1.8

Registre de données dans le secteur de l'électricité (LApEl)

L'organisation efficace de l'échange des données et informations numériques et de l'accès à celles-ci joue un rôle décisif en vue d'un système d'approvisionnement en électricité moderne, d'une concurrence opérationnelle et de modèles d'affaires novateurs sur le marché de l'électricité. À l'ère du numérique, il est indispensable de garantir que les participants au marché, les consommateurs et les prestataires mandatés ne sont pas discriminés dans l'accès aux données et informations sur le marché et l'utilisation de celles-ci, et que les nouveaux participants ne se heurtent pas à des barrières à l'entrée sur le marché.

Une infrastructure de données performante à l'échelle nationale dans le secteur de l'électricité, fondée sur un registre de données central (appelé aussi datahub), répond aux exigences croissantes posées à l'échange de données dans le secteur de l'électricité. Le développement numérique et la transformation du marché de l'électricité deviennent ainsi une priorité, en particulier dans la perspective de l'augmentation, de la meilleure intégration et de l'utilisation des agents énergétiques renouvelables décentralisés, de l'ouverture du marché et en vue de l'utilisation de la flexibilité. La numérisation, les modèles d'affaires centrés sur les données et l'innovation soutiennent par ailleurs l'efficacité énergétique, la décarbonisation et la décentralisation liée aux sources d'énergie renouvelables. Dans cette optique, le registre de données garantit l'accès nécessaire à des données de qualité et réduit le risque de discriminations dans 47 / 154

FF 2021 1666

l'utilisation des données. Les données relatives à l'approvisionnement en électricité, comme celles de la mobilité, présentent des caractéristiques d'un bien public en lien avec les infrastructures. C'est un domaine où une défaillance du marché peut souvent survenir. Aujourd'hui déjà, des solutions partielles, parfois peu compatibles entre elles, se développent, avec des standards et des profils d'exigences différents qui ne suffisent pas pour relever les défis futurs. Cela implique, d'un point de vue économique, des investissements inefficaces ou des coûts irrécupérables à la charge des consommateurs finaux. L'instauration d'une infrastructure de données à l'échelle nationale avec un registre de données produit en revanche des effets externes positifs.

Le registre de données ne comprendra que la partie des données absolument nécessaire aux processus prévus (p. ex. nom, adresse, numéro du point de mesure, puissance de raccordement, présence d'une installation de production d'électricité à partir d'énergies renouvelables). Les données de mesure des consommateurs, qui revêtent un caractère assez sensible sur le plan du droit régissant la protection des données, restent décentralisées auprès des acteurs actuels. L'accès aux données est assuré par le registre de données de manière uniforme dans toute la Suisse et géré dans une très large mesure par le consommateur. Le registre de données intervient de manière neutre sur le marché et traite tous les acteurs sur un pied d'égalité. Dans un premier temps, les milieux économiques ont la possibilité, à condition de définir des principes de gouvernance correspondants, de procéder à la constitution et à l'exploitation du registre de données. S'il n'est pas fait usage de cette possibilité dans le respect des principes et dans le délai prescrit, la Confédération veillera à l'instauration d'un registre de données (principe de subsidiarité). Les coûts du registre de données sont couverts, selon le principe de causalité, par une rémunération perçue, en fonction des points de mesure, auprès des gestionnaires d'un réseau de distribution, des exploitants des stations de mesure et des prestataires de mesure. Ces derniers seront libres de répercuter ces coûts, par le biais des coûts de mesure, à leurs clients, qui profiteront en fin de compte des avantages du registre
de données. La cybersécurité du registre de données est assurée, en fonction des risques, par des exigences particulières en matière de sécurité des données.

Exemples d'application du registre de données Exemple no 1: le registre de données facilite l'échange de données entre les acteurs Une boulangerie aimerait changer de fournisseur d'électricité et conclut un contrat avec un nouveau fournisseur. Pour que l'électricité soit décomptée correctement, aujourd'hui déjà, de nombreux acteurs doivent obtenir des données correctes dans les meilleurs délais. La boulangerie a par ailleurs opté pour un prestataire de mesure indépendant et pour un prestataire de flexibilité. Le nouveau fournisseur d'électricité informe le registre de données du changement de contrat via un portail numérique. Le registre de données vérifie la recevabilité de la demande de changement et en informe la boulangerie. Cette dernière peut le confirmer au registre d'un simple clic sur son portail d'accès. Le registre informe les entreprises concernées qui exercent leurs activités en ce point de mesure. Il centralise et simplifie considérablement la communication entre les acteurs, réduit les doublons et 48 / 154

FF 2021 1666

facilite la recherche d'erreurs, dans le respect de la sécurité des données et de la cybersécurité.

Exemple no 2: services énergétiques basés sur les données pour le consommateur Une propriétaire aimerait rénover sa maison dans une optique de durabilité et d'efficacité énergétique. Pour ce faire, elle a besoin d'un crédit. Les établissements financiers peuvent lui proposer des services de conseil, avec des informations fiables sur la consommation d'énergie et d'électricité, et des «hypothèques vertes» répondant parfaitement ses besoins. La propriétaire donne à l'établissement financier (d'un clic sur le portail client sécurisé du registre de données) le droit d'obtenir les données sur sa consommation électrique des cinq dernières années. L'établissement financier les reçoit automatiquement par le biais d'une interface numérique uniforme à l'échelle nationale. La propriétaire reçoit ainsi rapidement une offre adaptée à sa situation.

Exemple no 3: collecte de données par la Confédération et les cantons dans le cadre de leurs tâches La Confédération et les cantons doivent collecter des données pour remplir leurs mandats légaux (les cantons p. ex. dans le domaine de la planification énergétique cantonale). Les universités ont besoin de données pour faire avancer l'innovation et la recherche. Pour les obtenir, elles s'adressent directement aux acteurs qui disposent de ces données. Le registre de données permet de réduire les coûts liés à l'obtention de l'information. Certaines données qu'il gère ou qui transitent par son intermédiaire, par exemple des informations sur le secteur économique d'une entreprise faisant l'objet de mesures ou sur la consommation et la production énergétiques, sont accessibles numériquement pour les autorités. Le registre de données soutient en même temps le principe «once only» décrété par le Conseil fédéral: les données qui sont requises plusieurs fois ne doivent être collectées qu'une seule fois.

3.1.9

Liberté de choix et organisation des systèmes de mesure (LApEl)

Au milieu de l'année 2017, le Tribunal fédéral a décidé que les exploitants de grandes installations de production électrique (puissance de raccordement supérieure à 30 kVA) pouvaient en principe confier l'exécution des services de mesure à un tiers de leur choix24. Par contre, il a laissé ouverte la question de savoir si les exploitants de petites installations de production électrique ou les consommateurs finaux disposent également de ce libre choix ou si la mesure incombe dans leur cas exclusivement au gestionnaire de réseau de même que la question de savoir si la liberté de choix s'étend à l'exploitation d'une station de mesure.

24

ATF 143 I 395

49 / 154

FF 2021 1666

Le fait est que la mesure de décompte (qui comprend l'exploitation d'une station de mesure et les prestations de mesure) est effectuée, malgré cet arrêt du Tribunal fédéral, dans la grande majorité des cas par les gestionnaires de réseau. Cela tient sans doute au fait qu'il manque un cadre légal approprié pour le déroulement des processus de changement. Par ailleurs, les coûts de mesure sont couverts, dans le cadre juridique actuel, comme une partie des coûts de réseau imputables au moyen de la rémunération pour l'utilisation du réseau (art. 13a, let. a, OApEl). Cela réduit encore l'incitation à mandater un tiers.

Les coûts que les gestionnaires de réseau font valoir pour les systèmes de mesure sont parfois très élevés. C'était particulièrement visible quand les coûts des mesures de la courbe de charge étaient encore facturés individuellement aux clients. Si on tient compte de la valeur médiane, la rémunération demandée était supérieure aux coûts dans 56 % des cas25. De plus, certains gros consommateurs finaux et producteurs déplorent d'importants problèmes de qualité dans les données mises à leur disposition.

Elles sont souvent fournies trop tard ou de façon incorrecte, ce qui entraîne aujourd'hui déjà des coûts non négligeables, mais évitables dans l'acquisition d'énergie et l'énergie d'ajustement.

Dans le domaine des systèmes de mesure, les responsabilités sont clarifiées et des possibilités de choix sont prévues. Les gros consommateurs finaux (ayant une consommation annuelle d'au moins 100 MWh) ainsi que tous les producteurs d'électricité et les exploitants de stockage peuvent librement choisir leur fournisseur. Par ailleurs, la liberté de choix est également accordée ­ indépendamment de la consommation d'électricité annuelle ­ à tous les consommateurs finaux avec consommation propre et à certains groupes de consommateurs finaux qui ont besoin d'un accès à leurs prestations de mesure en relation avec la flexibilité au niveau de la consommation ou avec des mesures d'économie d'énergie. Le libre choix quant aux prestations de mesure est notamment donné aux clients pour lesquels la qualité des données et du service et les coûts de la mesure et des prestations fournies en aval revêtent un caractère particulièrement sensible. La liberté de choix concernerait actuellement environ 55000 points de
mesure représentant environ 22 TWh, soit plus d'un tiers de la consommation finale totale. Avec la diffusion croissante de solutions comprenant une consommation propre et de services sur le marché de la flexibilité, un nombre accru d'acteurs pourront bénéficier de la liberté de choix. Il y a actuellement quelque 77000 installations incluant la consommation propre qui pourraient en bénéficier (ce chiffre progresse d'environ 15 000 par an).

La liberté de choix s'applique à l'exploitation d'une station de mesure et aux prestations de mesure. La mesure d'exploitation directement liée à l'exploitation du réseau demeure cependant une tâche du gestionnaire de réseau.

Le gestionnaire du réseau de distribution local est compétent pour l'exploitation d'une station de mesure et les prestations de mesure à l'égard des clients de mesure qui ne bénéficient pas d'une liberté de choix ou qui n'exercent pas leur libre choix en ce qui concerne les systèmes de mesure. Afin d'assurer leur protection, il est prévu que la rémunération perçue pour les prestations de mesure sera calculée au moyen de tarifs 25

Les coûts de mesure en Suisse. Rapport d'enquête 2017 sur les coûts de mesure, ElCom (2018).

50 / 154

FF 2021 1666

de mesure que les gestionnaires de réseau devront fixer sur la base des coûts imputables. Le contrôle de l'imputabilité des coûts de mesure, des tarifs de mesure et de la rétribution des prestations de mesure calculée sur cette base incombe à l'ElCom.

L'OFEN analysera la situation de concurrence dans le domaine des systèmes de mesure dans le cadre de ses rapports réguliers à l'intention du Conseil fédéral (art. 27, al. 3, OApEl). On notera, dans la perspective de la future loi sur l'approvisionnement en gaz, que les dispositions relatives aux systèmes de mesure doivent être harmonisées dans les domaines de l'approvisionnement en gaz et de l'approvisionnement en électricité.

3.1.10

Adaptations de la tarification du réseau (LApEl)

Amélioration des principes de tarification prévus par la loi Le développement des capacités du réseau pèse lourd dans les coûts du réseau électrique. Jusqu'ici, le développement suit dans une large mesure l'évolution des besoins.

Le dimensionnement des capacités du réseau est déterminé en grande partie par les exigences structurelles qui s'appliquent au réseau ­ autrement dit par le nombre et la situation géographique des points de raccordement des utilisateurs du réseau ­ et par les capacités de raccordement au réseau garanties contractuellement. L'utilisation effective du réseau par les personnes raccordées, autrement dit la puissance prélevée et donc la sollicitation du réseau, ne jouent qu'un rôle moindre dans les coûts de réseau à court terme. À plus long terme, elle influe toutefois sur le dimensionnement et, partant, sur les coûts de l'infrastructure par le biais des changements de la charge de pointe simultanée.

Les tarifs actuels pour l'utilisation du réseau ne reflètent que partiellement les structures de coûts effectives, car les tarifs pondèrent davantage l'énergie électrique prélevée sur le réseau (kWh, travail) que la puissance effectivement demandée ou raccordée (kW). Au niveau de réseau le plus bas (niveau de réseau 7, basse tension), auquel sont raccordés les petits consommateurs finaux (ménages, etc.), les tarifs de l'utilisation du réseau doivent en principe présenter une composante de travail d'au moins 70 % en vertu de l'ordonnance en vigueur.

Le projet mis en consultation comportait une proposition concrète visant à ce que les structures tarifaires reflètent davantage les coûts. Le présent projet ne comprend plus une conception concrète de la tarification du réseau. Même si le reflet des coûts reste un principe important, il se limite désormais à deux principes tarifaires complémentaires: d'une part, la conception des tarifs de l'utilisation du réseau doit pouvoir être plus dynamique qu'aujourd'hui (avec, en particulier, des tarifs variables dans le temps). Au lieu de structures «simples», des structures «compréhensibles» sont désormais exigées. D'autre part, un nouveau principe tarifaire prévoit que les consommateurs finaux avec consommation propre et les regroupements dans le cadre de la consommation propre ne doivent pas être discriminés.

Sur la base des principes
tarifaires fixés dans la loi, le Conseil fédéral dispose d'une grande marge de manoeuvre pour concrétiser les prescriptions tarifaires. C'est notamment important pour le niveau de réseau 7. Afin d'améliorer l'application du principe 51 / 154

FF 2021 1666

de causalité et de soutenir ainsi un dimensionnement efficace de l'infrastructure à long terme, il semble opportun que les gestionnaires de réseau bénéficient d'une plus grande liberté dans la tarification, en particulier pour les consommateurs finaux chez qui un système de mesure de la puissance est installé (p. ex. compteur intelligent). Du point de vue de l'économie de réseau, il faudrait par exemple concrétiser au niveau de l'ordonnance, sur le modèle du projet soumis à la consultation, le fait qu'une composante de puissance (CHF/kW) plus importante ou des composantes de base (CHF/raccordement) plus importantes sont déjà admises dans le tarif de base. Avec le déploiement prévu de l'infrastructure des compteurs intelligents, au moins 80 % des consommateurs finaux auront la possibilité d'ici 2027 de mesurer exactement la puissance effectivement soutirée et la consommation. Il est ainsi possible d'appliquer des modèles d'utilisation du réseau basés sur la puissance et plus dynamiques.

Les adaptations possibles doivent spécifiquement tenir compte de solutions comprenant une consommation propre. En cas de composantes de travail importantes, du fait de la baisse du soutirage du réseau (qui est une conséquence de la consommation propre), elles profitent généralement davantage d'économies dans les rémunérations pour l'utilisation du réseau, aux dépens toutefois des autres utilisateurs du réseau dans la zone de desserte. Dans un souci d'amélioration du principe de causalité, il est donc opportun de permettre également l'application aux consommateurs finaux avec consommation propre de composantes de puissance et/ou de composantes de base plus importantes. Par ailleurs, une discrimination des solutions comprenant une consommation propre (p. ex. par des composantes de puissance spécialement élevées pour le groupe de clients en question) n'est en aucun cas autorisée. Le nouveau principe tarifaire susmentionné y veille.

Les améliorations dans la tarification du réseau sont compatibles avec la régulation des flexibilités. Tant que des tarifs dynamiques sont définis de manière à refléter les coûts, ils peuvent être combinés avec la régulation des flexibilités, qui vise concrètement des mesures curatives, c'est-à-dire des mesures propres à éviter ou résoudre les congestions du réseau.

Des interventions
parlementaires récentes demandent également une adaptation de la tarification du réseau. La motion du conseiller national Jürg Grossen 19.4162 «Stratégie énergétique 2050. Libéraliser la production décentralisée d'électricité» (non encore traitée au conseil) demande par exemple que la régulation du réseau soit adaptée aux besoins des nouvelles structures du système d'électricité. Elle demande que le prix pour l'utilisation du réseau électrique soit fixé équitablement en fonction de la sollicitation du réseau (reflet des coûts) et que les gestionnaires de réseau et les utilisateurs de réseau disposent d'une plus grande marge de manoeuvre dans la fixation du prix. Les principes tarifaires complémentaires prévus dans le présent projet de loi sont compatibles avec les éventuels futurs développements du système de tarification du réseau et n'en préjugent pas.

Répercussion des coûts de réseau entre les niveaux de réseau Les coûts de réseau (à l'exception des coûts facturés individuellement, en particulier les coûts de raccordement) sont répercutés entre les différents niveaux de réseau (1 à 7) de manière descendante. Cela correspond au principe du point de prélèvement appliqué dans la tarification du réseau. La répercussion comprend une composante de 52 / 154

FF 2021 1666

puissance et une composante de travail, un prix de base étant par ailleurs appliqué au niveau de réseau le plus élevé. Ces coûts constituent le fondement de la tarification pour les consommateurs finaux. Des adaptations sont nécessaires dans ce système de répercussion des coûts entre les différents niveaux de réseau, jusqu'aux consommateurs finaux. Le but est qu'il reflète davantage les coûts en tenant mieux compte des éléments de puissance et du sens des flux de charge, qui changent en raison de la décentralisation croissante de la production.

La répercussion des coûts de transport (niveau de réseau 1) dans le réseau de distribution (niveaux de réseau 2 à 7) ne se fera plus selon le rapport 30 % de tarif de travail, 60 % de tarif de puissance et 10 % de tarif de base, mais selon le rapport 10 % de tarif de travail et 90 % de tarif de puissance. La répercussion des coûts de distribution dans les différents niveaux du réseau de distribution n'obéira plus au rapport 30 % de tarif de travail et 70 % de tarif de puissance, mais également au rapport 10 % de tarif de travail et 90 % de tarif de puissance.

En outre, le calcul des valeurs énergétiques déterminantes pour la répercussion des coûts, qui revêt une importance pour la composante de travail dans le tarif, changera dans le réseau de distribution. Afin de tenir compte de l'injection d'électricité de plus en plus décentralisée et de la modification des flux d'électricité entre les niveaux de réseau qui en découle, le principe du volume effectif d'énergie nette remplacera désormais le principe de l'énergie brute. Cela permettra de mieux prendre en compte les flux d'énergie effectifs. Le principe de l'énergie nette aura pour conséquence qu'on ne fera plus d'extrapolation concernant l'énergie injectée dans un niveau de réseau sur la base de la consommation de ce niveau. Dans le cadre de la répercussion des coûts, les niveaux de réseau inférieurs seront déchargés lorsque l'électricité ne provient pas du niveau supérieur, mais qu'elle est directement injectée dans le niveau en question, par exemple par des installations photovoltaïques. En outre, le principe du volume effectif d'énergie nette permettra de prendre également en compte les flux d'énergie allant «du bas vers le haut». La charge occasionnée aux niveaux de réseau supérieurs en raison de
telles injections d'énergie d'un réseau à l'autre sera imputée en conséquence aux niveaux inférieurs. Le principe du point de prélèvement (art. 14, al. 2, LApEl) restera inchangé.

L'OFEN expliquera les conséquences des modifications des prescriptions relatives à l'imputation des coûts de réseau dans le cadre de ses rapports réguliers à l'intention du Conseil fédéral (art. 27, al. 3, OApEl).

Clarification du terme de consommateur final en lien avec les exploitants de stockage Quiconque soutire de l'électricité pour les propres besoins d'une centrale électrique ou pour faire fonctionner les pompes d'une centrale de pompage n'est aujourd'hui déjà pas considéré comme un consommateur final. Aucune modification ne doit être apportée aux exceptions existantes. Mais il est nécessaire de préciser explicitement que les exploitants de stockage, hormis dans le cas des centrales de pompage, qui constituent une exception, sont des consommateurs finaux. Le principe du point de prélèvement reste la base: tout client qui soutire de l'électricité du réseau à des fins de stockage est considéré comme client final pour l'électricité ainsi prélevée dans la mesure où cette électricité n'est pas utilisée pour faire fonctionner les pompes des centrales de pompage.

53 / 154

FF 2021 1666

Échanges d'eau dans les centrales de pompage Enfin, il est prévu de mieux régler un cas particulier de l'interaction entre le réseau à 50 Hz, régi par la LApEl, et le réseau de courant de traction à 16,7 Hz, géré par les chemins de fer suisses. Désormais, une exception sera également prévue pour les «échanges d'eau» dans les centrales à production mixte à 50 Hz et à 16,7 Hz. Un échange d'eau s'applique lorsque, dans le cadre de deux centrales en partenariat, l'un des partenaires veut pomper et l'autre entend produire (turbiner) simultanément. Le soutirage d'électricité dans le réseau à 50 Hz en lien avec un échange d'eau ne doit plus être assimilé à une consommation finale. Les centrales de pompage à production mixte sont assimilées à cet égard aux centrales exploitées exclusivement à 50 Hz.

Contributions aux coûts de réseau Si les gestionnaires d'un réseau de distribution exigent des contributions lors du raccordement d'un consommateur final ou en cas d'augmentation de la puissance à un point de raccordement au réseau pour d'éventuels renforcements du réseau (contributions aux coûts de réseau), ils seront désormais soumis à une obligation en matière de publication. Celle-ci permettra d'obtenir des informations sur le mode de calcul ainsi qu'une meilleure comparaison des coûts. Cela va dans le sens de l'orientation client.

3.1.11

Régulation Sunshine (LApEl)

Les examens réalisés par l'ElCom sur l'introduction de la régulation Sunshine (comparaison des prestations et des coûts des gestionnaires de réseau, à ce jour publiée sous forme agrégée uniquement) montrent une forte diversité des coûts des gestionnaires d'un réseau de distribution, que les différences de taille entre les entreprises ne permettent pas d'expliquer. Cela laisse supposer l'existence d'inefficacités importantes. Ainsi, il y a des cas de coûts d'exploitation élevés liés à des coûts de capital importants, qui n'amènent pourtant pas une meilleure qualité.

Dans le cadre de la régulation Sunshine, l'ElCom réalisera des comparaisons très complètes entre les gestionnaires d'un réseau de distribution dans le domaine relevant de sa compétence en vertu de l'art. 22, al. 1 et 2, LApEl, et en mettra les résultats à la disposition du public sur son site Internet. La transparence y gagne. Il s'agit en outre de créer des incitations modérées à l'efficacité. La régulation Sunshine ne remplace pas les procédures de contrôle des tarifs, elle les complète.

Depuis plusieurs années, l'ElCom teste un tel complément à la pratique régulatrice basée sur les coûts. Une base légale est nécessaire pour que les résultats puissent être mis à la disposition du public. Actuellement, seuls les gestionnaires de réseau reçoivent ces comparaisons, le grand public n'a, pour sa part, pas d'informations transparentes sur la rentabilité de la distribution d'électricité, ce qui réduit la pression en faveur d'adaptations.

En appliquant l'instrument de transparence «Sunshine», l'ElCom adopte une approche pluridimensionnelle. Cette approche comprend surtout l'adéquation des coûts et tarifs, la qualité de l'approvisionnement et des services ainsi que la mise en oeuvre

54 / 154

FF 2021 1666

des obligations de publier et de communiquer. Le choix des modalités concrètes de ces comparaisons est laissé à l'ElCom.

Les investissements dans les réseaux intelligents relèvent principalement des coûts d'exploitation et non des coûts de capital. Contrairement aux coûts de capital, les coûts d'exploitation n'entraînent aucun coût moyen pondéré du capital (WACC, weighted average cost of capital). Dans le système de régulation actuel, les gestionnaires de réseau ont donc peu d'intérêt à investir dans des réseaux intelligents. Afin de créer des incitations à l'investissement, l'ElCom doit procéder à une comparaison présentant les investissements dans les réseaux intelligents. Un indicateur de ce type complète les autres indicateurs sur les coûts de réseau. Il faut aussi créer un indicateur pour les prestations de mesure lorsqu'aucune liberté de choix n'existe pour celles-ci.

Si les gains d'efficacité et les effets correspondants sur les coûts de réseau ne sont pas suffisants dans le domaine du réseau, le Conseil fédéral soumettra au Parlement un projet de loi portant introduction d'une régulation incitative. L'OFEN évaluera, tous les quatre ans, l'évolution des coûts de réseau dans le cadre de la régulation Sunshine.

3.1.12

Espace d'innovation non réglementé (LApEl)

Dans un domaine aussi réglementé et marqué par un haut degré de technicité que le secteur de l'électricité, il apparaît qu'une fois fixées, les conditions-cadres atteignent rapidement leurs limites quand il s'agit de soutenir l'innovation ou d'exploiter le potentiel de la numérisation. Lors de l'élaboration de nouvelles mesures législatives, de telles approches novatrices et de tels potentiels ne sont guère prévisibles.

En ce qui concerne la législation expérimentale dans le droit régissant l'approvisionnement en électricité, il s'agit d'instaurer désormais une base légale, et plus précisément un espace d'innovation non réglementé (aussi appelé «bac à sable réglementaire» [regulatory sandbox]). Cette disposition a pour objectif de soutenir et d'encourager l'innovation dans le domaine de l'approvisionnement en électricité et le développement de la législation ad hoc. Il est parfois difficile d'estimer l'effet des adaptations des prescriptions légales. Le nouvel instrument introduit par cette disposition permet d'accumuler, dans le cadre de projets pilotes, des expériences concernant des réglementations dérogeant au droit en vigueur pour une période limitée, dans un domaine matériellement et géographiquement bien défini. Sur la base de ces expériences, il est ensuite possible d'évaluer si, et le cas échéant comment, il est nécessaire d'adapter la législation sur l'approvisionnement en électricité. Les projets pilotes et de démonstration visés à l'art. 49 LEne sont sans lien direct avec ces projets pilotes.

Aussi bien ces projets que d'autres types de projets peuvent bénéficier de ce nouvel instrument. Il sera nécessaire de coordonner les procédures d'autorisation au niveau de l'ordonnance.

55 / 154

FF 2021 1666

3.1.13

Autres mesures en lien avec la sécurité de l'approvisionnement et la sécurité de l'exploitation des réseaux électriques (LApEl)

Saisie et transmission des données sur les lacs d'accumulation Différentes tâches de surveillance et de monitoring publiques nécessitent des données sur les lacs d'accumulation suisses. Il s'agit notamment d'indications sur les niveaux d'eau actuels et les teneurs énergétiques des lacs d'accumulation. Aujourd'hui, ces données sont fournies chaque semaine manuellement à l'OFEN, qui les saisit sous forme de données statistiques. Avec l'accord des exploitants des centrales, des données portant sur des lacs d'accumulation spécifiques sont transférées aux services fédéraux qui en ont besoin pour accomplir leurs tâches, par exemple pour la protection contre les crues ou la sécurité des barrages. L'OFEN publie en outre un bulletin hebdomadaire sur les niveaux de remplissage des bassins d'accumulation, agrégés au niveau régional.

À l'avenir, la transmission des données se fera de manière centralisée par le biais d'un système automatisé qui mettra les données, pour la période et la portée géographique requises, à la disposition des destinataires par voie électronique. En conséquence, les données pourront être actualisées tous les jours et non plus chaque semaine et, au besoin, elles seront disponibles sans délai, par exemple pour le recours à la réserve d'énergie ou l'exploitation des centrales en cas de pénurie d'électricité.

Prise en charge des coûts liés à la saisie des données sur les lacs d'accumulation et aux mesures visant l'approvisionnement économique du pays Le système de saisie et de transmission des données sur les lacs d'accumulation, au même titre que les mesures prises par l'économie électrique pour assurer l'approvisionnement en cas de situation de pénurie d'électricité, servent à maintenir un approvisionnement en électricité sûr à l'échelle nationale. En tant que condition préalable à une exploitation sûre du réseau, ces mesures doivent être financées par le biais de la rémunération pour l'utilisation du réseau de transport. Les coûts sont ainsi supportés, par le biais du mécanisme de répercussion des coûts, par tous les clients finaux suisses, qui profitent de la sécurité de l'approvisionnement.

Mesures visant à assurer la sécurité de l'exploitation du réseau Les gestionnaires de réseau ne peuvent pourvoir pleinement à une exploitation sûre du réseau (art. 8, al. 1, let. a, LApEl;
cf. message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité26) qu'avec le soutien d'autres acteurs. En effet, dans un réseau électrique, les injections et les prélèvements notamment doivent toujours rester en équilibre, sous peine de complications. Désormais, la loi explicite l'obligation de soutenir les mesures des gestionnaires de réseau visant à assurer la sécurité de l'exploitation du réseau et à suivre les instructions en cas de dangers qui menacent la sécurité de l'exploitation du réseau de transport.

26

FF 2005 1493, 1531

56 / 154

FF 2021 1666

Swissgrid doit répondre par les mesures nécessaires aux dangers qui menacent la sécurité de l'exploitation du réseau de transport. Comme de telles menaces constituent simultanément un risque pour l'ensemble du système, il est fondamentalement possible de répercuter les coûts de ces mesures sur la société à l'échelle de la Suisse.

Swissgrid est tenue de convenir, de manière uniforme, des mesures nécessaires à éviter ou supprimer toute menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport avec des acteurs appropriés raccordés au réseau de transport. En l'absence d'une telle convention, l'ElCom peut en décider la conclusion en fixant la teneur minimale nécessaire. En cas d'urgence, c'est-à-dire si un péril considérable et imminent menace la sécurité d'exploitation du réseau de transport, Swissgrid peut et doit exceptionnellement ordonner ces mesures unilatéralement si elles n'ont pas été prévues par convention malgré l'obligation qui en est faite. De tels ordres doivent ensuite être communiqués immédiatement à l'ElCom. Enfin, Swissgrid doit prendre des mesures de substitution si une mesure n'est pas prise conformément à ce qui a été convenu ou ordonné. Les coûts supplémentaires causés par une telle intervention sont supportés par les parties qui ont failli.

3.1.14

Optimisations dans la LApEl

ElCom En raison des nouveautés présentées ci-dessus, l'ElCom reçoit des tâches et des compétences supplémentaires, telles que la surveillance des abus dans le cadre de l'approvisionnement de remplacement et de l'utilisation des flexibilités. Si nécessaire, elle intervient souverainement lorsque la sécurité de l'exploitation du réseau de transport est menacée et pour les questions ayant trait à la réserve d'énergie. S'agissant de la réserve d'énergie, l'ElCom fixe chaque année les valeurs-clés.

Des modifications concernent aussi l'ElCom elle-même. Elle est renforcée dans sa fonction de régulateur en ce qu'elle reçoit un droit légal de recours qui lui permet de contester devant le Tribunal fédéral les arrêts du Tribunal administratif fédéral lorsque celui-ci ne confirme pas la décision préalable de l'ElCom. Certaines autres autorités semblables à l'ElCom détiennent aussi un tel droit de recours. Parallèlement, le droit de recours du DETEC demeure. En outre, le droit de l'ElCom de donner des instructions à l'OFEN est supprimé. L'ElCom n'en a jamais fait usage et cet instrument est un corps étranger au système.

Garantie d'une majorité suisse chez Swissgrid Swissgrid est une société anonyme de droit privé (SA) selon l'art. 18 LApEl. Son capital et les droits de vote doivent être détenus, directement ou indirectement, en majorité par les cantons et les communes («majorité suisse»). Cette solution résulte de travaux longs et intensifs du Parlement. D'autres variantes, comme un établissement de droit public ou une participation directe des cantons, ont été rejetées. C'est ainsi que nombre d'entreprises d'approvisionnement en énergie (EAE) aux mains des cantons et des communes sont devenues des actionnaires de Swissgrid.

Les cantons, les communes et les EAE à majorité suisse disposent d'un droit légal de préemption sur les actions Swissgrid. Ces droits de préemption sont le seul moyen 57 / 154

FF 2021 1666

permettant de garantir la majorité prescrite. Au demeurant, Swissgrid est responsable de s'en assurer. Elle a créé en 2015 une catégorie d'actions que seuls peuvent détenir les cantons, les communes et les entreprises sous leur contrôle, contribuant ainsi grandement à cette garantie. Mais il manque encore un levier pour les cas où la majorité cantonale ou communale n'est qu'indirecte. Il est nécessaire d'intervenir sur le plan législatif pour traiter cette problématique de longue date. Les CEATE des deux Chambres ont aussi appelé de leurs voeux cette démarche. Elles ont toutefois suspendu la procédure correspondante27 dans la perspective que le Conseil fédéral soumette une proposition dans le cadre de la présente révision, ce qui est désormais chose faite.

Le concept proposé fonctionne sur deux niveaux. Premièrement, il s'agit de rendre plus efficaces les droits de préemption dans le but de mieux garantir la «majorité suisse». À cet effet, un classement des titulaires du droit de préemption est introduit: 1) cantons, 2) communes et 3) EAE suisses. Deuxièmement, on crée la base légale pour une suspension du droit de vote à titre de mesure d'accompagnement et subsidiairement: si la règle de majorité prévue par la LApEl n'est plus réunie, les droits de vote des actionnaires qui ne sont plus sous contrôle suisse sont suspendus. Le Parlement élabore actuellement un projet28 qui limiterait fortement la vente de parts de Swissgrid à l'étranger. En fonction du résultat, la suspension du droit de vote proposée pourrait devenir obsolète.

Une plus grande indépendance du personnel est en outre prévue. Au sein de la direction et du conseil d'administration, il ne suffit plus qu'une majorité soit indépendante du secteur de l'électricité: tous les membres devront l'être. De plus, il doit y avoir pour le conseil d'administration un équivalent de la suspension du droit de vote dans l'assemblée générale.

Entraide administrative et transmission des données entre l'ElCom et l'OFEN Afin d'éviter les acquisitions de données à double et sous réserve de dispositions contraires, l'ElCom et l'OFEN se confèrent mutuellement l'accès aux données que l'autre autorité serait en droit d'acquérir pour remplir ses tâches.

Services-système Conformément à la réalité vécue et à l'intention du législateur (cf. message du 3 décembre
2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité29), le type d'acteur qui offre ses services-système à Swissgrid est en principe sans importance. Il est par contre déterminant de savoir si le fournisseur ou le groupe de fournisseurs remplit les exigences techniques et d'exploitation minimales nécessaires selon Swissgrid pour le servicesystème visé (conditions dites de préqualification). Plus le cercle des fournisseurs est large, plus la liquidité du marché des services-système tend à être élevée. La sécurité d'approvisionnement s'en trouve améliorée et les prix d'acquisition sont plus avantageux pour Swissgrid. Afin de répondre à l'objectif de la Stratégie énergétique 2050 27 28 29

Initiative parlementaire 13.467 «Énergie d'ajustement. Obligation de prendre en charge les coûts pour un approvisionnement sûr en électricité», projet 2.

Initiative parlementaire 16.498 «Soumettre les infrastructures stratégiques du secteur énergétique à la lex Koller».

FF 2005 1493, 1543

58 / 154

FF 2021 1666

qui concerne notamment l'utilisation efficace de l'énergie dans la mise à disposition de services-système, Swissgrid doit toutefois prendre en considération, du côté du consommateur, en priorité des offres visant une utilisation efficace de l'énergie.

Il est en outre précisé que Swissgrid peut acquérir des services-système au-delà de la zone de réglage en association avec des gestionnaires d'un réseau de transport étrangers (GRT) par le biais de «modèles GRT-GRT». Ce faisant, les gestionnaires d'un réseau de transport concernés continuent d'acheter des services-système dans le cadre de leurs propres appels d'offres, mais l'adjudication des offres se fait dans le cadre d'une optimisation centrale. Les coûts liés à l'acquisition des services-système sont ainsi réduits.

3.1.15

Optimisations dans la LEne

Élargissement des possibilités de constituer un regroupement dans le cadre de la consommation propre Désormais, les RCP auront la possibilité d'avoir un point de mesure virtuel comme interface avec le réseau. La disposition actuelle, qui exige un point de mesure physique, peut impliquer, lors de la création de RCP, certaines installations complexes qui ne seront dorénavant plus nécessaires.

Enfin, le Conseil fédéral pourra autoriser l'utilisation de lignes de raccordement pour la consommation propre. Les lignes de raccordement sont une partie du réseau de distribution qui est utilisée de manière individuelle et financée en principe de manière individuelle. La possibilité d'utiliser ces lignes simplifie surtout, au regard d'une mesure virtuelle, la mise en oeuvre de la consommation propre en coopération dans des bâtiments existants, car les transformations parfois coûteuses visant à respecter les dispositions actuelles en matière de RCP ne seront plus nécessaires.

Indications sur les installations, véhicules et appareils fabriqués en série Les indications relatives à la consommation, aux émissions de CO2 et à la catégorie d'efficacité énergétique dans l'information à la clientèle et au point de vente sont un élément central en vue d'une utilisation de l'énergie efficace et générant peu d'émissions. Les adaptations prévues permettent plus de flexibilité dans la présentation des coûts (en particulier les coûts de carburant et d'électricité) et des économies. Du point de vue de l'économie comportementale, celles-ci ont le plus d'impact sur un changement des comportements pour l'achat d'une voiture plus efficiente. La mise en avant de l'avantage économique serait en principe aussi intéressante pour les installations et les appareils. Néanmoins, puisqu'à la différence des véhicules, les étiquettes utilisées pour les installations et les appareils sont souvent identiques à l'échelle européenne et que le Conseil fédéral devrait approuver des dérogations en Suisse conformément à la LTC comme une exception au principe du «Cassis de Dijon», l'avantage économique ne sera sans doute pas exploité dans le cas des installations et des appareils. En outre, les adaptations permettent davantage de liberté dans la base de calcul de la catégorie d'efficacité énergétique et l'inscription d'informations supplémentaires. À
l'heure actuelle, seule la consommation peut servir de base de calcul pour la catégorie d'efficacité énergétique. Les adaptations proposées permettraient de tenir compte d'autres 59 / 154

FF 2021 1666

critères ou de critères supplémentaires. D'autres informations pourraient y figurer, par exemple les émissions sonores, les émissions de polluants, la charge de fabrication et d'élimination du véhicule, etc. L'UE prévoit de créer les conditions juridiques pour que les émissions de CO2 soient comptabilisées tout au long du cycle de vie des véhicules. La modification proposée de l'art. 44 LEne permettrait de tenir également compte de ces données en cas de développement de l'étiquette-énergie et de les mettre à la disposition de l'industrie automobile, pour laquelle l'acquisition et la transmission de ces informations n'engendreraient pas de coûts supplémentaires.

Il en va de même pour les installations et les appareils fabriqués en série.

Ces adaptations créent la base pour qu'il soit tenu compte des exigences du monde politique et de la société (prise en compte de la fabrication et de l'élimination des véhicules), des enseignements de l'économie comportementale décrits ci-dessus et des réglementations prévues dans l'UE.

Production d'énergie et injection dans le réseau par des unités administratives de la Confédération Les surfaces utiles qui sont en mains publiques doivent être utilisées pour la production d'énergie renouvelable. Ainsi, les toitures qui se prêtent à l'installation de panneaux photovoltaïques peuvent aujourd'hui déjà, par le biais d'appels d'offres, être données à bail à des particuliers qui s'occupent de la production d'électricité solaire sur mandat des pouvoirs publics. Mais ce n'est pas la solution optimale dans tous les cas. Pour certaines infrastructures, il est hors de question, pour des motifs de sécurité, de proposer une utilisation parallèle à un particulier. Le présent projet de loi doit donc créer la base légale permettant une alternative. À l'avenir, les unités administratives de la Confédération doivent pouvoir non seulement consommer les énergies liées au réseau qu'elles ont produites sur le lieu de la production, mais aussi les mettre à la disposition d'autres sites de consommation de la Confédération par le biais du réseau public. La rémunération pour l'utilisation du réseau ainsi que les taxes et les prestations fournies aux collectivités publiques sont dues tout à fait normalement pour l'utilisation du réseau électrique. La production d'énergie doit en principe
se limiter aux besoins de la Confédération pour des raisons de neutralité concurrentielle. Dans la mesure où une production excédentaire ne peut être évitée, celle-ci pourra être vendue sur le marché libre au prix du marché. Les nouvelles dispositions sont notamment importantes pour le domaine de l'électricité. Elles s'appliquent par ailleurs à tous les autres agents énergétiques qui entrent en ligne de compte pour une injection dans le réseau, et pourraient donc être par exemple importantes pour le gaz d'origine renouvelable ou le chauffage à distance. Les unités administratives cantonales et communales ne sont pas concernées. Les cantons et les communes devraient créer leurs propres bases légales pour appliquer des dispositions similaires.

3.2

Solutions étudiées

Le présent chapitre aborde spécifiquement des possibilités de conception qui ont été étudiées comme des alternatives concrètes sur la base des résultats des procédures de

60 / 154

FF 2021 1666

consultation ou dans le cadre des travaux exploratoires, mais ont été écartées en raison d'un certain nombre d'inconvénients.

Encouragement au moyen de la rétribution unique plutôt que par les contributions d'investissement Dans le cadre de la procédure de consultation relative à la révision de la LEne, certains participants ont réclamé un encouragement au moyen d'une «prime de marché flottante». C'est une sorte de rétribution de l'injection qui correspond au SRI actuel avec commercialisation directe, complété par des mises aux enchères. L'injection dans le réseau serait rétribuée par une prime en plus du prix du marché de l'électricité pour une période de 15 à 25 ans, jusqu'en 2060 environ. Les producteurs d'électricité seraient ainsi complètement assurés contre les risques d'une baisse des prix du marché de l'électricité.

Une telle poursuite du système actuel de rétribution de l'injection avec commercialisation directe serait en principe envisageable comme alternative aux contributions d'investissement. Cet instrument d'encouragement offrirait aux producteurs une sécurité d'investissement élevée en leur assurant des recettes pour l'électricité injectée.

Si les prix du marché se situent par ailleurs à un niveau très bas sur une longue période, la rétribution de l'injection conduit à un développement plus soutenu. Dans ce cas de figure extrême, avec des contributions d'investissement, les installations rentables seraient moins nombreuses.

Une sécurité d'investissement élevée a toutefois son revers. D'une part, les risques liés aux prix sont en grande partie répercutés sur la société, ce qui peut en principe se refléter dans des coûts plus élevés. Dans le même temps, les exploitants d'installations perçoivent l'intégralité des produits de leur investissement, sauf si un système de remboursement est prévu. De plus, par rapport au système des contributions d'investissement, le fonds alimenté par le supplément devrait constituer des réserves pour la rétribution de l'injection afin de se prémunir contre les fluctuations des prix du marché.

Le montant des subventions engagées au titre de ces réserves représenterait au moins 10 % du volume d'encouragement. Les contingents de subvention devraient être diminués d'environ 10 %, ce qui impliquerait l'encouragement d'une plus petite quantité d'énergie. Il
faudrait en outre s'attendre à des coûts de mise en oeuvre plus élevés en raison de la conception plus complexe de la rétribution de l'injection et des mises aux enchères. Enfin, les incitations visant une injection conforme à la réalité du marché (intégration dans le marché) sont plus faibles avec une prime d'injection garantie qu'avec des contributions d'investissement.

Des moyens limités (plafonnement à 2,3 ct./kWh) ne permettent par conséquent pas d'atteindre aussi bien les objectifs de développement visés avec une telle rétribution de l'injection, qui engagerait davantage de moyens par rapport aux contributions d'investissement. Des contributions permettraient d'augmenter davantage le nombre de kilowattheures avec les mêmes ressources.

À noter en outre qu'à part dans le photovoltaïque, le nombre de projets en Suisse est insuffisant pour une conception concurrentielle de la rétribution de l'injection sous forme d'enchères. Sans un marché liquide, il ne peut pas y avoir de formation concurrentielle des prix et une partie au moins des gains en efficacité obtenus par les mises

61 / 154

FF 2021 1666

aux enchères pour les primes d'injection serait perdue. Les expériences faites à l'étranger le montrent.

Forfait à la place d'une liberté de choix adaptée à des segments de clientèle appropriés dans les systèmes de mesure En ce qui concerne l'organisation du marché des systèmes de mesure, différentes alternatives à une ouverture complète du marché ont été étudiées par rapport à la proposition d'ouverture partielle. En cas d'ouverture du marché pour les systèmes de mesure, il faut tenir compte du fait que le déploiement des compteurs intelligents est en cours (environ 1,5 million de compteurs étaient installés début 2020) et se poursuit à un rythme soutenu (ils représenteront probablement 60 à 70 % des compteurs utilisés d'ici 2024­2025). L'interopérabilité des appareils de mesure intelligents installés dans le cadre de ce déploiement est limitée et n'est pas réalisable de manière étendue sans surcoûts. Une réutilisation de ces appareils par des prestataires tiers est plutôt incertaine. Une fois que les compteurs actuellement installés seront largement amortis, il sera possible de parvenir plus facilement à une interopérabilité plus étendue par une vaste standardisation lors du remplacement des compteurs ou après le déploiement.

Par ailleurs, le potentiel d'innovation est considérable dans les services énergétiques (en particulier les innovations en matière d'efficacité énergétique et d'utilisation de la flexibilité) qui bénéficieraient d'une ouverture complète du marché et gagnera encore en importance à l'avenir. Une analyse coûts-bénéfices montre que le moment d'une ouverture complète du marché pour les systèmes de mesure influe considérablement sur l'avantage économique qu'on en retire. Compte tenu de ces conclusions, l'ouverture partielle du marché proposée en consultation a été élargie à des segments de clients finaux pour lesquels l'accès à des offres innovantes revêt une grande importance (ouverture partielle du marché élargie). Une ouverture complète est toutefois écartée à l'heure actuelle. Les segments de la clientèle qui restent dans le monopole des gestionnaires d'un réseau de distribution doivent être protégés par un contrôle des coûts et l'application de la régulation Sunshine pour que les augmentations excessives de prix puissent être corrigées. De plus, une adaptation de l'OApEl
au 1er janvier 2021 a amélioré l'accès aux données de mesure, de sorte qu'une dynamique de marché plus importante se dessine déjà dans les services énergétiques (mais pas dans tous les nouveaux services).

Majorité suisse chez Swissgrid Des alternatives aux mesures visant à garantir une majorité suisse chez Swissgrid présentées au ch. 3.1.14 ont aussi été examinées, mais elles ont été rejetées, principalement pour des raisons de proportionnalité. Il aurait été par exemple possible de soumettre les transactions portant sur les actions en question à une obligation d'annonce et d'autorisation. Une telle mesure n'aurait toutefois un impact que si les participations indirectes étaient aussi recensées, c'est-à-dire l'actionnariat des actionnaires de Swissgrid. Or, il ne serait guère possible de justifier des interventions aussi intensives dans des domaines qui ne sont pas concernés par la LApEl. L'idée de suspendre les droits des actionnaires autres que le droit de vote, par exemple le droit aux dividendes, n'a pas été retenue. En ce qui concerne le droit de préemption, l'approche consistant à réduire le cercle des ayants droit, par exemple aux actionnaires actuels, comme le prévoient aujourd'hui les statuts, a été rejetée. Cette solution serait en contradiction 62 / 154

FF 2021 1666

avec l'approche visant à rendre Swissgrid plus indépendante de la branche de l'électricité.

Gouvernance de Pronovo Pronovo AG assure la mise en oeuvre des programmes d'encouragement des énergies renouvelables sur mandat de la Confédération. Lors de la procédure de consultation relative à la révision de la LEne, le Conseil fédéral avait remis en question la gouvernance de Pronovo AG et envisagé de procéder à cet examen dans le cadre du présent message. Or, cet examen prend plus de temps que prévu. Partant, on renonce à inclure des adaptations de la gouvernance et des compétences de Pronovo dans le présent message.

3.3

Adéquation des moyens requis

Au regard des coûts économiques qui peuvent résulter d'une sécurité d'approvisionnement lacunaire, des incitations à investir dans un approvisionnement sûr en électricité financées au moyen de taxes se justifient. Cela vaut autant pour les instruments d'encouragement visés par la LEne que pour le soutien au développement d'énergie spécifiquement disponible pendant l'hiver. Ces deux mesures renforcent la sécurité d'approvisionnement. La réserve d'énergie prévue doit aussi être considérée comme une assurance supplémentaire pour garantir l'approvisionnement en électricité de la Suisse. Son financement par une répercussion des coûts sur la rémunération pour l'utilisation du réseau constitue, pour les consommateurs d'électricité, une charge supplémentaire très modérée, et avantageuse compte tenu de l'utilité de l'instrument.

3.4

Mise en oeuvre

Le principe de subsidiarité joue un rôle important dans le droit régissant l'approvisionnement en électricité. L'art. 3, al. 1, LApEl prévoit que la Confédération associe les organisations économiques, notamment, à la mise en oeuvre de la loi. Il doit en être ainsi également dans le cadre de la mise en oeuvre du présent projet. Le Conseil fédéral édictera les dispositions d'exécution nécessaires et déléguera l'édiction de dispositions jusqu'au niveau de l'office fédéral pour les réglementations de nature particulièrement technique ou administrative (art. 30, al. 3, LApEl). La branche de l'électricité doit conserver la marge de manoeuvre nécessaire à l'accomplissement de sa tâche.

Cela étant, il lui est demandé d'élaborer, dans le cadre prescrit, des concepts et propositions de mise en oeuvre de la LApEl généralement acceptés.

L'exécution des instruments de soutien au développement des énergies renouvelables est assurée d'une part par l'OFEN (cf. ch. 6.1 et 6.2), d'autre part par l'organe d'exécution visé à l'art. 64 LEne. Les coûts d'exécution peuvent être financés par le supplément perçu sur le réseau et par le supplément perçu sur la base de l'art. 9bis LApEl.

63 / 154

FF 2021 1666

4

Commentaire des dispositions

4.1

Loi sur l'énergie (LEne)

Art. 2

Objectifs pour le développement de la production d'électricité issue d'énergies renouvelables

L'article prévoit désormais, pour le développement de l'électricité issue d'énergies renouvelables (al. 1) et la production d'électricité d'origine hydraulique (al. 2), des objectifs contraignants pour 2035 et 2050. S'il devait apparaître que ces valeurs ne peuvent pas être atteintes, le Conseil fédéral devra proposer au Parlement des mesures supplémentaires sur la base de l'art. 55.

Art. 3

Objectifs de consommation

La loi parle désormais d'objectifs de consommation qu'il s'agit d'atteindre et non plus de valeurs indicatives de consommation. Les valeurs correspondent à la réglementation actuelle pour 2035. Des objectifs de consommation énergétique et de consommation électrique sont fixés pour 2050 (voir ch. 3.1.2).

Art. 13, al. 1, let. a En raison de la modification à l'art. 3, il convient de parler d'objectifs de développement et non plus de valeurs indicatives de développement dans le cas présent.

Art. 15, al. 3 et 4 Comme les tarifs de l'approvisionnement de base dans un marché complètement ouvert doivent évoluer dans le cadre des prix du marché de produits électriques comparables pour l'année en question (cf. art. 6, al. 3, LApEl), les rétributions à verser pour l'électricité en vertu de l'art. 15, al. 3, doivent se conformer aux prix du marché. Si des rétributions plus élevées étaient prescrites, les gestionnaires de réseau seraient contraints à essuyer des pertes systématiques. La disposition en vigueur, qui prévoit que pour l'électricité provenant d'installations de couplage chaleur-force alimentées totalement ou partiellement aux énergies fossiles, la rétribution est fonction du prix du marché au moment de l'injection, est ainsi étendue à l'électricité issue d'énergies renouvelables. Comme pour l'électricité provenant desdites installations de couplage chaleur-force, les tarifs horaires sur la bourse de l'électricité pour le jour suivant concernant le marché suisse doivent être également déterminants pour l'électricité issue d'énergies renouvelables (cf. art. 12, al. 2, de l'ordonnance du 1er novembre 2017 sur l'énergie [OEne]30). Rien ne change à part cela. La prescription relative au montant de la rétribution ne s'applique notamment qu'à titre subsidiaire, dans les cas où les parties ne parviennent pas à s'entendre. L'obligation de reprise et de rétribution continue d'incomber au gestionnaire d'un réseau de distribution local, qu'un prosommateur ait exercé ou non son droit d'accès au réseau. Pour les installations photovoltaïques, il convient de tenir compte de l'art. 75b LEne.

30

RS 730.01

64 / 154

FF 2021 1666

Au lieu d'adapter le renvoi à l'al. 4 en raison des nouvelles dispositions relatives aux contributions d'investissement, seule l'exception à l'obligation de reprise et de rétribution est encore spécifiée et il est renoncé à mentionner explicitement que l'obligation s'applique aussi aux installations pour lesquelles une rétribution unique ou une contribution d'investissement a été octroyée.

Art. 16, al. 1, 4e phrase, et 2 Le fait que le réseau de distribution ne puisse pas être utilisé pour la consommation propre est un élément inhérent à la définition de la consommation propre. Avec l'initiative parlementaire 12.400, dans le cadre de laquelle la consommation propre a pour la première fois été expressément réglementée, le législateur a fixé qu'il n'est plus question de consommation propre à partir du moment où le réseau du gestionnaire de réseau est utilisé entre l'installation de production et le point de consommation31.

En vertu de l'al. 1, 4e phrase, le Conseil fédéral pourra désormais permettre, pour la consommation propre, la possibilité d'utiliser des lignes de raccordement pour l'acheminement de l'électricité. L'électricité produite par une installation serait ainsi aussi considérée comme consommée sur le lieu de production si elle parvient par exemple aux membres du RCP par les lignes de raccordement. Cela ne change rien aux rôles et aux responsabilités relevant du droit de l'électricité; il est toutefois ainsi possible d'éviter, pour les bâtiments existants, la construction de coûteuses lignes parallèles et de réduire des désavantages par rapport aux nouvelles constructions. Comme les lignes de raccordement font partie du réseau de distribution du gestionnaire de réseau (cf. art. 2, al. 2, de l'ordonnance du 7 novembre 2001 sur les installations à basse tension [OIBT]32), la compétence est expressément conférée au Conseil fédéral au niveau de la loi, au regard de l'initiative parlementaire 12.400 précitée.

L'usage de lignes de raccordement doit être considéré en relation avec la mise au point à l'art. 18, al. 1, LEne, selon laquelle les RCP peuvent utiliser un point de mesure virtuel comme interface avec le réseau. Ce point permet de déterminer quelle part de la consommation d'électricité d'un RCP relève du soutirage du réseau et quelle part relève de la consommation propre. Comme le
RCP continue d'être considéré de l'extérieur comme un consommateur final unique (cf. commentaire de l'art. 18, al. 1), aucune rémunération pour l'utilisation du réseau n'est versée pour la consommation propre, y compris lors d'une telle mesure, car il s'agit toujours d'un procédé purement interne du RCP et non d'un soutirage au sens de la LApEl. Cela s'accorde avec le fait que les lignes de raccordement devraient en principe être payées individuellement par les personnes raccordées au réseau33 et donc qu'aucune infrastructure, dont le financement est assuré par les consommateurs finaux par le biais de la rémunération pour l'utilisation du réseau, ne serait utilisée à cet effet (cf. art. 14, al. 3bis, LApEl). En tenant compte de ces principes, le Conseil fédéral devra notamment décider si une éventuelle autorisation s'appliquera à toutes les lignes de raccordement, ou seulement à celles qui ont bel et bien été payées individuellement. S'il y a lieu de considérer

31 32 33

FF 2013 1527, 1535 RS 734.27 FF 2005 1493, 1501

65 / 154

FF 2021 1666

l'ensemble des lignes de raccordement, il n'y aurait pas de rémunération pour l'utilisation du réseau pour la part d'électricité consommée en propre, indépendamment du type de financement (pas de soutirage). Ce faisant, il est nécessaire de s'assurer que l'élément du lieu de production n'est pas vidé de sa substance. Une autorisation d'utilisation des lignes de raccordement devrait au moins comprendre des cas de figure où, d'un point de vue technique, d'infimes parties du «réseau de distribution public» financé par le biais des rémunérations pour l'utilisation du réseau, par exemple des installations de protection, sont aussi utilisées. Cela peut par exemple être le cas si plusieurs lignes de raccordement aux différents membres du RCP partent du même point de connexion au réseau de distribution. Là non plus, il n'y aurait pas de soutirage au sens de la LApEl.

Les présentes modifications ne concernent donc pas la question de la conception des tarifs d'utilisation du réseau. Si la proximité géographique entre la production et la consommation, les deux intervenant simultanément, devait pouvoir se répercuter un jour sur les coûts liés à l'utilisation du réseau (tarifs d'utilisation du réseau locaux), ce qui impliquerait une utilisation du réseau de distribution au-delà des lignes de raccordement, il serait nécessaire d'adapter les principes de tarification du réseau fixés dans la LApEl. Un examen approfondi et une analyse minutieuse des intérêts en présence seraient requis pour continuer de garantir une répartition des coûts de réseau conforme au principe de causalité.

En raison des nouvelles dispositions relatives aux contributions d'investissement, il est nécessaire d'adapter le renvoi à l'al. 2.

Art. 17, al. 1, 1re phrase, 2, 3, 3bis et 4, 2e phrase La modification à l'al. 1 est liée à la mise au point à l'art. 18, al. 1, selon laquelle il n'y a pas de point de mesure unique (physique) prescrit pour un RCP. Il est donc plus pertinent de parler ici de puissance de raccordement du regroupement que de puissance de raccordement au point de mesure.

Les modifications à l'al. 2 portent sur l'ouverture complète du marché. Dans le droit en vigueur, les consommateurs finaux qui consomment annuellement moins de 100 MWh par site de consommation n'ont pas de droit à l'accès au réseau et sont captifs de
l'approvisionnement de base. Si le propriétaire foncier se place entre les (anciens) consommateurs finaux et le fournisseur de l'approvisionnement de base, il est logique que les obligations de l'approvisionnement de base lui incombent par analogie à l'égard des membres du RCP. Dans un marché complètement ouvert, cela ne fait en revanche plus sens d'un point de vue conceptuel. L'approvisionnement de base ne s'entend plus comme une structure obligatoire, mais comme un refuge dans lequel un consommateur final qui consomme annuellement moins de 100 MWh par site de consommation peut rester ou revenir à tout moment. L'approvisionnement de base est une tâche exercée uniquement par le gestionnaire de réseau local (art. 6, al. 1, LApEl).

Dans un marché complètement ouvert, le propriétaire foncier doit être considéré comme un «fournisseur normal», auprès duquel les locataires ou les fermiers peuvent se fournir s'ils le souhaitent. Par ailleurs, le propriétaire foncier, dans son rôle de fournisseur, doit être libre de fixer le prix comme tout autre fournisseur, et ne doit pas être

66 / 154

FF 2021 1666

soumis aux prescriptions de l'art. 6 LApEl. C'est pourquoi les passages qui se rapportent à l'obligation, pour le propriétaire foncier, de fournir l'approvisionnement de base par analogie sont supprimés. La 1re phrase relève en outre que le propriétaire foncier peut proposer un RCP sur le lieu de production également aux consommateurs finaux avec qui il a conclu un bail à loyer ou à ferme. La formulation dans le droit en vigueur, selon laquelle les propriétaires fonciers peuvent «prévoir» le RCP, n'est plus adaptée dans un marché complètement ouvert dans lequel le propriétaire foncier est un «fournisseur normal» et les membres du RCP conservent leur droit à l'approvisionnement de base et leur droit à l'accès au réseau (art. 17, al. 3bis). Cette nouvelle situation doit être notamment prise en compte à l'égard des locataires et des fermiers lors de l'institution d'un RCP. Enfin la 2e phrase, qui précise que les propriétaires fonciers sont responsables de l'approvisionnement des membres du RCP, est conservée. Comme ces derniers perdent leur position de consommateurs finaux à la suite de la mise en place du RCP, il incombe au propriétaire foncier de pourvoir aux besoins qui ne sont pas couverts par la production propre.

En vertu de l'actuel al. 3, un consommateur final peut se décider pour l'approvisionnement de base au moment de la mise en place d'un RCP. Dans un marché complètement ouvert, il doit en outre pouvoir se décider pour l'approvisionnement par un fournisseur de son choix. Ce second élément est désormais inscrit à la let. b. La participation à un RCP doit être ­ comme tout choix de fournisseur ­ une décision expresse (opt-in). Si un locataire ne choisit pas de fournisseur en changeant de domicile, il fait son entrée par défaut à la nouvelle adresse dans l'approvisionnement de base du gestionnaire de réseau.

Le message fondamental de l'actuel al. 3, 3e phrase, selon lequel les (anciens) consommateurs finaux conservent leur droit à l'accès au réseau pour autant qu'il leur soit accordé en vertu de la LApEl, est déplacé dans un nouvel al. 3bis et complété par le droit à l'approvisionnement de base, car les consommateurs finaux dont la consommation annuelle est inférieure à 100 MWh n'ont pas seulement le droit de changer pour un fournisseur de leur choix, mais aussi celui de retrouver la sécurité
de l'approvisionnement de base (art. 6, al. 1, LApEl). Cela s'applique en particulier aux RCP existants pour lesquels la participation est réglée dans un contrat de location. Il en découle que les locataires et les fermiers peuvent non seulement choisir, dans un marché complètement ouvert, de participer à un RCP ou de se fournir auprès du fournisseur de l'approvisionnement de base ou d'un fournisseur tiers, mais qu'ils ont aussi le choix de quitter le RCP en tout temps dans les délais prévus par les processus de changement (art. 13a LApEl). À noter que la participation à un RCP est très intéressante pour les locataires et les fermiers, car il n'y a pas de rémunération pour l'utilisation du réseau sur l'électricité consommée en propre, si bien que la marge de manoeuvre est plus importante pour la fixation des prix, et parce qu'ils consomment de l'électricité d'origine renouvelable et produite localement. Si un membre quitte le regroupement, il redevient un consommateur final à part entière disposant d'une interface propre avec le réseau, raison pour laquelle il est nécessaire de garantir que l'appareil de mesure utilisé satisfait aux dispositions du droit relatif à l'approvisionnement en électricité. Il va de soi qu'un raccordement physique séparé n'est pas nécessaire; la séparation doit être appliquée à l'aide de mesures, c'est-à-dire que la consommation du consommateur final en question est en principe entièrement considérée comme un soutirage du réseau. Du point de vue des coûts, aucune règle spéciale n'est établie au 67 / 154

FF 2021 1666

niveau de la loi pour la sortie d'un RCP. À ce sujet, les règles générales concernant les raccordements au réseau, les installations électriques et les systèmes de mesure doivent s'appliquer en fonction des travaux nécessaires. Le cas échéant, le Conseil fédéral peut procéder à des ajustements (art. 18, al. 2, let. a et b).

Le terme «directement» est ajouté à l'al. 4. L'orientation générale de la disposition est ainsi clarifiée. Les propriétaires fonciers doivent naturellement avoir la possibilité d'amortir les coûts liés à la mise en place du RCP dans le temps, faute de quoi ils seraient contraints à une opération à perte. Ils ne peuvent pas répercuter de tels coûts directement sur les locataires ou les fermiers, mais il est permis de les intégrer dans le prix interne de l'électricité. De tels coûts peuvent en outre concerner des prestations supplémentaires qui ne dépendent pas de la participation à un RCP. C'est pourquoi on peut aussi penser à d'éventuelles possibilités de répercuter ces coûts sur la base du droit du bail, lesquelles ne sont pas affectées par la LEne.

Art. 18, titre et al. 1 La principale modification à l'al. 1 concerne l'interface avec le réseau. En vertu du droit en vigueur, le RCP dispose d'un point de mesure unique, comme un consommateur final. Le législateur avait à l'esprit une ligne de raccordement unique, et donc un point de mesure physique unique, auquel le RCP est raccordé, le reste se déroulant «en coulisses»34. Comme le passage concernant le point de mesure unique est supprimé, il est précisé que l'interface avec le réseau peut aussi être un point de mesure virtuel, dans le cadre duquel les appareils de mesure installés chez les consommateurs finaux anciennement autonomes sont désormais utilisés non seulement pour la mesure interne au RCP, mais aussi pour la détermination du soutirage d'électricité du réseau par le RCP. Une telle mesure ne change rien au RCP d'un point de vue conceptuel: il reste une unité dans les relations extérieures, c'est-à-dire un consommateur final unique, le reste se déroulant aussi «dans les coulisses» (cf. aussi le commentaire de l'art. 16, al. 1) ne joue ici aucun rôle. Dès qu'il est question d'échange avec le réseau, les appareils de mesure doivent satisfaire aux prescriptions du droit relatif à l'approvisionnement en électricité. Seule
l'essence même de ce qui est constitutif du RCP dans les relations externes apparaît encore à l'al. 1, à savoir une communauté de consommation. Le RCP doit être traité comme une unité, c'est-à-dire comme un consommateur final unique. Il n'y a plus de consommateurs finaux autonomes, tels qu'on les trouvait auparavant, dans les relations externes. Cela vaut pour le gestionnaire de réseau aussi bien que pour un éventuel fournisseur tiers, un exploitant de stations de mesure ou un prestataire de mesure. L'idée de l'unité implique aussi que chaque RCP doit désigner un interlocuteur dans les relations externes, qui peut être concerné par certaines obligations d'annoncer.

Art. 18a

Injection d'énergie par la Confédération

Cette nouvelle disposition permet aux unités administratives de la Confédération de couvrir elles-mêmes leurs besoins en énergie par leur propre production par le biais

34

Voir à ce sujet BO 2015, p. 949.

68 / 154

FF 2021 1666

de l'utilisation des réseaux publics. La nouvelle réglementation appelle deux remarques préalables. D'une part, elle ne s'applique pas aux unités de l'administration fédérale décentralisée, pour lesquelles il faudrait créer des réglementations particulières dans les différentes lois spéciales correspondantes. D'autre part, la compétence pour l'application de l'art. 18a appartient aux unités administratives qui sont aujourd'hui déjà responsables des bâtiments et des infrastructures de la Confédération.

Les services de la construction et des immeubles (SCI) visés en vertu de l'ordonnance du 5 décembre 2008 concernant la gestion de l'immobilier et la logistique de la Confédération35 sont concernés. Il s'agit de l'Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL) et de l'Office fédéral de l'armement (armasuisse). Les infrastructures dans le domaine des routes nationales relèvent en outre de la compétence de l'Office fédéral des routes (OFROU; art. 54 de l'ordonnance du 7 novembre 2007 sur les routes nationales36).

L'al. 1 précise que la quantité d'énergie produite ne doit en principe pas excéder ce que les unités administratives concernées peuvent elles-mêmes consommer. En d'autres termes, de l'énergie ne peut pas être produite expressément pour la vente sur le libre marché (cf. art. 94, al. 1 et 4, de la Constitution [Cst.]37). Néanmoins, comme il n'est pas possible de prévoir la consommation et la production de manière exacte, il peut parfois y avoir une production excédentaire. La production d'électricité solaire est par exemple soumise à des fluctuations saisonnières et journalières en fonction des conditions météorologiques. Cette production excédentaire qui ne peut pas être consommée sur le lieu de production ni mise à la disposition d'un autre site de consommation de la Confédération, peut être vendue sur le libre marché aux prix usuels du marché. Pour qu'une telle production excédentaire reste moindre, le regroupement de plusieurs unités administratives peut être utile afin de combiner leur production et leur consommation. Pour cela, des groupes-bilan ou des sous-groupes-bilan peuvent être constitués dans le domaine de l'approvisionnement en électricité (art. 4, al. 1, let. ebis, LApEl et 23 OApEl). Ceux-ci permettent d'attribuer à la même unité économique les points d'injection et
de soutirage correspondants du réseau électrique. Après l'ouverture complète du marché de l'électricité, il n'y aura plus d'obstacle à cet égard: le fournisseur d'électricité pourra être librement choisi, y compris dans les petits sites de consommation. Quant aux sites de consommation qui relèvent de la compétence de l'OFCL et de l'OFROU, environ 90 % de l'électricité consommée peuvent déjà être achetés auprès d'un fournisseur librement choisi dans le régime de l'ouverture partielle du marché. Il est donc d'ores et déjà possible de promouvoir la production d'énergie à grande échelle en assumant ainsi un rôle de modèle. De plus, il est également possible de faire exploiter une installation par le biais d'un contracting (affermage de la surface en toiture à des fins de production d'électricité photovoltaïque par un tiers).

Puisqu'une production excédentaire ne doit pas survenir systématiquement et qu'elle doit être proposée par ailleurs au prix de marché (al. 1), on s'assure ainsi dans une large mesure que la Confédération ne deviendra pas un acteur important du marché, d'autant plus que les besoins en énergie de l'administration fédérale centrale s'élèvent 35 36 37

RS 172.010.21 RS 725.111 RS 101

69 / 154

FF 2021 1666

à environ 0,1 % de la consommation totale d'électricité de la Suisse. Si on constatait cependant une influence significative sur les prix du marché, il appartiendrait au DETEC, en vertu de l'al. 2, de garantir la neutralité concurrentielle nécessaire et d'ordonner aux unités administratives concernées de limiter les ventes ou la production en conséquence.

En vertu de l'al. 3, le Conseil fédéral peut régler les modalités d'utilisation des garanties d'origine (GO). Cette norme de délégation n'est pertinente pour l'instant que pour le domaine de l'électricité. À l'heure actuelle, il n'y a pas de système de garanties d'origine régi par la loi dans le domaine du gaz ni dans d'autres domaines de l'énergie.

Au niveau de l'ordonnance, les unités administratives concernées pourraient par exemple être tenues d'utiliser les garanties d'origine de telle manière que les fournitures d'énergie internes à la Confédération se reflètent également dans le marquage de l'électricité. Le fournisseur mandaté devrait ainsi attribuer ses livraisons d'électricité aux GO correspondantes. En seraient exclues les GO délivrées pour l'électricité qui est directement consommée sur le lieu de production dans le cadre de la consommation propre (art. 16, al. 1, LEne) ­ de telles GO sont annulées en amont en vertu de l'art. 3, al. 1, OEne et ne sont donc pas prises en compte dans le marquage de l'électricité. Pour la production excédentaire qui est écoulée sur le libre marché sur la base de l'al. 1, une limitation de la libre négociabilité des GO en question ne s'impose pas.

Cependant, ces GO ne doivent être vendues qu'à des conditions conformes au marché dans un souci de neutralité concurrentielle. Par ailleurs, le Conseil fédéral peut régler les modalités d'utilisation des revenus tirés de la vente de l'énergie sur la base de l'al. 2. Les unités administratives (ou les SCI) restent toutefois dans tous les cas libres d'organiser comme elles le souhaitent les échanges d'électricité entre elles.

Art. 19, al. 6 Une légère reformulation de cette disposition s'impose, car plus aucune limite supérieure de puissance n'est prévue pour la rétribution unique.

Art. 24

Principes

L'art. 24, al. 1, pose le principe selon lequel les contributions d'investissement peuvent être sollicitées pour autant que les moyens du fonds alimenté par le supplément suffisent. Les dispositions relatives aux différentes technologies règlent séparément pour quels types de projets et d'installations et sous quelle forme des contributions d'investissement peuvent être demandées.

Désormais, il sera possible d'obtenir une contribution d'investissement pour des prestations d'étude de projet portant sur la construction ou l'agrandissement notable d'une installation de production d'électricité. Pour éviter que les travaux en vue de nouveaux projets soient retardés jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi en raison de cette nouvelle possibilité offerte, les prestations d'étude de projet réalisées pourront être imputées rétroactivement à partir de la date d'ouverture de la consultation (al. 2).

70 / 154

FF 2021 1666

Art. 25

Contribution d'investissement allouée pour les installations photovoltaïques

L'art. 25 précise pour quelles installations photovoltaïques une contribution d'investissement peut être sollicitée (al. 1). Les simples rénovations d'installations photovoltaïques ne pourront plus bénéficier d'une contribution d'investissement. Si une installation est rénovée tout en connaissant une augmentation de puissance qui remplit le critère d'un agrandissement notable, il est possible ­ comme dans le droit en vigueur ­ de solliciter une rétribution unique.

La contribution maximale de 30 % est en principe maintenue (al. 2). Pour les installations qui injectent toute l'électricité produite, la contribution maximale est augmentée à 60 % en vertu de l'al. 3, notamment pour pouvoir créer davantage de flexibilité dans les mises aux enchères pour la rétribution unique et mieux exploiter le potentiel supplémentaire dans la production d'électricité d'origine photovoltaïque.

Art. 25a

Mises aux enchères pour la rétribution unique

Avec les taux en vigueur pour la rétribution unique, seules les installations dont une partie de l'électricité produite est consommée sur le site de production peuvent être exploitées avec une pleine couverture de leurs coûts. En conséquence, beaucoup de grandes installations photovoltaïques pour lesquelles la consommation propre n'est pas possible ou est limitée ne voient pas le jour. Dans le but d'exploiter un potentiel supplémentaire dans les grandes installations photovoltaïques, le Conseil fédéral doit avoir la possibilité de réaliser des mises aux enchères pour octroyer et en même temps fixer le montant des rétributions uniques (al. 1). Dans un premier temps, les mises aux enchères doivent être introduites pour les grandes installations qui injectent toute l'électricité produite dans le réseau, car ce domaine présente un grand potentiel de développement (p. ex. constructions agricoles).

Avec l'introduction des mises aux enchères, le Conseil fédéral définira, sur la base de l'al. 1, à partir de quelle puissance les installations photovoltaïques pourront participer aux mises aux enchères. Il convient de noter que le potentiel des surfaces qui entrent en ligne de compte diminue fortement avec cette limite inférieure de puissance (le potentiel des installations en toiture d'une puissance d'au moins 400 kW ne représente p. ex. qu'environ 4 % du potentiel total exploitable en toiture). Pour permettre une concurrence efficace entre fournisseurs et, dans le même temps, pouvoir organiser des mises aux enchères fréquentes, il est nécessaire de viser une limite inférieure aussi basse que possible. Elle doit néanmoins être suffisamment élevée pour que la charge liée à la participation à une mise aux enchères soit raisonnable par rapport au montant des subventions allouées dans le cadre de ces enchères. Le Conseil fédéral règlera les principes de cette procédure, les critères de participation et d'adjudication de même que d'autres modalités. Il assurera ainsi une véritable concurrence entre les fournisseurs.

Dans le but de garantir qu'une installation photovoltaïque ayant fait l'objet d'une adjudication dans le cadre de la procédure de mises aux enchères est effectivement construite ou de pouvoir appliquer une éventuelle sanction par la suite, le Conseil fédéral peut prévoir que soit déposée une sûreté comme condition de la garantie effective d'une rétribution unique (al. 4).

71 / 154

FF 2021 1666

Grâce à la possibilité de prévoir une sanction pour le cas où une installation photovoltaïque n'est pas construite ou ne respecte pas les termes prévus dans la procédure de mises aux enchères (al. 5), le Conseil fédéral dispose d'un moyen d'augmenter la probabilité de réalisation des installations photovoltaïques qui bénéficient d'une adjudication. Une sanction correspondante s'ajouterait à la restitution telle qu'elle est prévue à l'art. 28 de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)38.

Art. 26

Contribution d'investissement allouée pour les installations hydroélectriques

Suite à la suppression de la rétribution du courant injecté à prix coûtant, les nouvelles installations d'une puissance d'au moins 1 MW peuvent solliciter une contribution d'investissement. Les agrandissements notables d'installations existantes reçoivent une contribution si l'installation présente une puissance d'au moins 300 kW après l'agrandissement. En revanche, les rénovations notables ne font l'objet d'une contribution que si la puissance n'excède pas 5 MW: pour les petites installations hydroélectriques, une rénovation n'est pas rentable. Elles ne seraient donc pas remplacées mais arrêtées sans contribution d'investissement. Les grandes installations peuvent être exploitées quant à elles de manière rentable et amortir ainsi l'investissement dans la rénovation (al. 1). Le Conseil fédéral peut abaisser cette limite supérieure de puissance (art. 29, al. 3, let. j, LEne).

L'al. 2 concrétise la disposition selon laquelle les centrales à pompage-turbinage ne doivent pas recevoir de contribution d'investissement. D'après les débats parlementaires dans le cadre de la Stratégie énergétique 2050, les centrales à pompage-turbinage pures devraient être exclues du soutien par le biais des contributions d'investissement. Par conséquent, dans les installations fonctionnant partiellement au pompageturbinage, seule la part de pompage-turbinage en est exclue. Cela reflète la pratique actuelle. Si, au cours du développement des énergies renouvelables, en particulier du photovoltaïque, des capacités de stockage supplémentaires ou une plus grande flexibilisation de la production d'électricité sont nécessaires pour assurer la stabilité du réseau, le Conseil fédéral peut prévoir la possibilité que les centrales à pompage-turbinage reçoivent une contribution d'investissement malgré l'exclusion de principe.

Les critères à remplir sont toutefois que cette technologie doit être la meilleure solution par rapport à d'autres technologies telles que l'hydrogène et que les conditions relatives au droit des subventions doivent être réunies.

Dans le cas de nouvelles installations hydroélectriques d'une puissance d'au moins 1 MW et d'agrandissements notables d'installations hydroélectriques d'une puissance d'au moins 300 kW, une contribution d'étude de projet peut être attribuée pour couvrir les charges liées à l'étude de
projet jusqu'à l'obtention de la concession et de l'autorisation de construire (al. 4). L'OFEN vérifie d'abord, par exemple au moyen d'études préliminaires au sens des normes SIA, que le projet correspond aux standards techniques fondamentaux et qu'il est plausible. Si tel est le cas, 40 % au plus des coûts d'étude de projet jusqu'à l'obtention de la concession et de l'autorisation de construire (conception du projet selon les normes SIA) sont garantis au requérant. Aujourd'hui déjà, les coûts d'étude de projet sont considérés comme des coûts imputables dans le 38

RS 616.1

72 / 154

FF 2021 1666

calcul de la contribution d'investissement au sens de l'al. 1. Il est prévu que le montant versé à titre de contribution pour les coûts d'étude de projet sera déduit d'une éventuelle contribution d'investissement. Cela garantit que ces coûts ne seront pas remboursés deux fois.

Les installations d'exploitation accessoire pourront toujours solliciter une contribution d'investissement, même si elles n'atteignent pas les limites inférieures visées à l'al. 1 (al. 5). Il s'agit d'installations hydroélectriques qui sont liées à d'autres installations dont la finalité n'est pas la production d'électricité (p. ex. installations d'eau potable ou d'enneigement).

Le Conseil fédéral pourra aussi prévoir d'exempter d'autres installations hydroélectriques de la limite inférieure pour autant qu'elles soient implantées sur des tronçons de cours d'eau déjà exploités ou qu'il n'en résulte aucune nouvelle atteinte aux cours d'eau naturels ou présentant un intérêt écologique (al. 6).

Art. 27

Contribution d'investissement allouée pour les installations de biomasse

Toutes les installations de biomasse qui pouvaient participer jusqu'ici à la rétribution de l'injection bénéficieront désormais d'une contribution d'investissement qui pourra se monter à 60 % au plus des coûts d'investissement imputables. Les STEP et les UIOM ne recevront plus de contributions d'investissement.

Art. 27a

Contribution d'investissement allouée pour les installations éoliennes

Toutes les nouvelles installations éoliennes qui présentent une puissance d'au moins 2 MW recevront désormais une contribution d'investissement de 60 % au plus (al. 1 et 2). Le remplacement complet d'une installation existante est également considéré comme une nouvelle installation. Cela vaut aussi pour des installations qui viennent agrandir un parc éolien existant ou remplacer des installations existantes au sein d'un parc éolien.

En vertu de l'al. 3, une contribution de 40 % au plus des coûts imputables peut être allouée pour les études de projet pour des installations éoliennes si celles-ci sont réalisées pour un site qui se prête à l'exploitation de l'énergie éolienne. Le Conseil fédéral fixe les critères de qualification (p. ex. pas de mesure du vent dans les zones à exclure d'après la Conception énergie éolienne, exigences minimales relatives au contenu et à la documentation [métadonnées] de la mesure du vent). Il est prévu que le montant versé à titre de contribution pour les coûts d'étude de projet sera déduit d'une éventuelle contribution d'investissement. Cela garantit que ces coûts ne seront pas remboursés deux fois.

Art. 27b

Contributions d'investissement allouées pour les installations géothermiques

Les installations géothermiques de production d'électricité recevront désormais des contributions d'investissement et des garanties pour la géothermie. Il sera possible de

73 / 154

FF 2021 1666

solliciter à chaque fois une contribution pour la prospection de ressources géothermiques, pour la mise en valeur de telles ressources, ainsi que pour la construction et la mise en service de nouvelles installations géothermiques (al. 1). La mise en valeur va plus loin que la recherche au sens du droit en vigueur: elle comprend l'exploration au moyen d'un forage, l'extraction d'eau chaude et la réinjection éventuelle de l'eau extraite dans le réservoir géothermique.

Les contributions se montent à 60 % au plus des coûts d'investissement imputables (al. 2).

Par ailleurs, une contribution peut être allouée pour les études de projet de construction d'installations géothermiques à des fins de production d'électricité (al. 3). Les coûts d'étude de projet sont considérés comme des coûts imputables en cas d'éventuelle contribution d'investissement par la suite. Il est prévu que le montant versé à titre de contribution pour les coûts d'étude de projet sera déduit d'une éventuelle contribution d'investissement. Cela garantit que ces coûts ne seront pas remboursés deux fois.

Art. 28, al. 1 et 2 Les renvois doivent être adaptés. Sur le fond, cette modification ne change rien au principe relevant du droit des subventions, tel qu'il est aussi précisé à l'art. 26 LSu, en vertu duquel il n'est possible de mettre en chantier des travaux de construction que si l'aide a été au moins accordée provisoirement. Les travaux d'étude de projet ne sont pas concernés par ce principe.

Art. 29, titre, al. 1, phrase introductive, al. 2 et 3, phrase introductive et let. bbis et h à k L'al. 1 s'applique à l'ensemble des contributions d'investissement du chapitre 5 LEne et fait l'objet d'une adaptation rédactionnelle en ce sens.

Comme il est renoncé à un calcul concret des coûts supplémentaires non amortissables au cas par cas (cf. ch. 3.1.5.2), l'al. 2 prévoit que le Conseil fédéral s'aligne, pour fixer le montant des contributions d'investissement dans les limites des taux maximaux prévus aux art. 25 à 27b, sur les coûts d'une nouvelle installation ou de l'agrandissement ou la rénovation d'une installation non couverts par son exploitation.

Pour garantir que seuls les projets qui dépendent d'une subvention sont soutenus, il est nécessaire de pouvoir procéder exceptionnellement à des examens approfondis de la rentabilité au
cas par cas. Si une telle demande examinée de manière approfondie ne présente pas de coûts non couverts, aucune contribution d'investissement n'est accordée (al. 3, let. bbis).

La possibilité de former des catégories différentes dans le cadre de chaque technologie est reprise du système de rétribution de l'injection (al. 3, let. h).

Il est nécessaire de prévoir la possibilité de définir des taux pour certaines classes de puissance selon le principe des installations de référence pour l'ensemble des technologies (al. 3, let. i).

74 / 154

FF 2021 1666

Le Conseil fédéral peut fixer une limite supérieure pour le taux concernant les rénovations d'installations hydroélectriques dans le cadre de la prescription visée à l'art. 26, al. 1, let. c (al. 3, let. j). Il tient compte du fait que les rénovations des petites installations ne sont souvent pas rentables, que l'exploitation risque de cesser si une rénovation s'impose et que les grandes installations, avec des coûts similaires, affichent davantage de revenus et peuvent donc amortir les coûts d'investissement.

En vertu de l'al. 3, let. k, le Conseil fédéral peut en outre prévoir l'obligation pour ceux qui obtiennent une contribution d'investissement au sens du chapitre 5 LEne de mettre les données et les informations d'intérêt public à la disposition de la Confédération. Il s'agit par exemple des données de mesure du vent collectées dans le cadre de l'étude de projet et visées à l'art. 27a, al. 3, qui doivent être mises à la disposition de l'OFEN en vue notamment du développement et de l'actualisation des bases méthodologiques au sens de l'art. 11 LEne. Il faudra respecter certaines prescriptions concernant le contenu et la documentation (métadonnées). Ces données ne sont divulguées que sous une forme agrégée (géoinformations au sens de la loi du 5 octobre 2007 sur la géoinformation [LGéo]39). Rien ne change en ce qui concerne la gestion des géodonnées provenant des projets de géothermie (cf. p. ex. ch. 5 de l'annexe 1 OEne).

Art. 30, al. 4, let. e Il est nécessaire d'adapter le renvoi en raison des nouvelles dispositions relatives aux contributions d'investissement.

Art. 32, al. 2 Les programmes soutenus jusqu'ici dans le cadre de l'appel d'offres public sont limités dans le temps en raison des exigences de la mise au concours. De plus, ils ne couvrent pas toujours la Suisse entière et sont mis en oeuvre par divers organismes responsables. En raison de ces désavantages, il n'est pas possible d'exploiter pleinement les potentiels d'efficacité. Pour y remédier, la Confédération doit pouvoir mettre au concours, de manière centralisée, la mise en oeuvre de programmes qui couvrent l'ensemble de la Suisse.

Art. 33

Garanties pour la géothermie

En guise d'alternative aux contributions d'investissement visées à l'art. 27b, une garantie qui se monte à 60 % au plus des coûts d'investissement imputables peut être fournie, comme dans le droit en vigueur, pour couvrir le risque des investissements (al. 1).

En vertu de l'al. 2, le requérant pourra décider pour chaque étape ­ prospection, mise en valeur et réalisation d'une installation ­ s'il veut déposer une demande de contribution d'investissement ou de garantie.

39

RS 510.62

75 / 154

FF 2021 1666

Art. 35, al. 2, let. d et g, et 4 En raison des adaptations concernant les contributions d'investissement, il est nécessaire de procéder à une adaptation rédactionnelle de l'al. 2 de cette disposition.

L'al. 4 précise que l'organe d'exécution est également compétent pour la perception du supplément hiver visé à l'art. 9bis LApEl.

Art. 36

Limitation du soutien selon les affectations et liste d'attente

L'art. 36 doit être adapté en raison de l'expiration de la rétribution du courant injecté à prix coûtant et des nouvelles contributions d'investissement prévues.

Sur le fond, un maximum de 0,2 ct./kWh est désormais prévu pour la grande hydraulique (0,1 ct./kWh dans le droit en vigueur) et les ressources allouées pour les installations photovoltaïques et les installations d'autres technologies sont définies ou peuvent être définies par contingents. Les critères de la sollicitation des réseaux électriques et des possibilités de stockage sont en revanche supprimés, car ces deux points ne doivent pas être réglés dans le cadre de la détermination annuelle des moyens du fonds alimenté par le supplément.

Art. 37, al. 1 Le supplément hiver est versé dans le fonds alimenté par le supplément, sur un compte séparé.

Art. 38, al. 1, let. b, ch. 1, 2 et 4 Les contributions d'investissement pourront être allouées jusqu'à la fin 2035. Il y a aussi des adaptations d'ordre rédactionnel du fait de l'extension des contributions d'investissement aux installations éoliennes et géothermiques de même que des mises aux enchères pour les installations photovoltaïques.

Art. 44, al. 1, 2, 4, 2e phrase, et 5 L'extension de cette disposition devrait permettre de pondérer davantage les indications relatives aux émissions dans le cadre de l'information de la clientèle. Il s'agit en outre de garantir que, dans le cadre des données sur l'intensité énergétique des installations, véhicules et appareils, y compris de leurs pièces fabriquées en série, il soit possible d'exiger par exemple des indications relatives à l'extraction des matières premières, à la fabrication, au transport ou à l'élimination ­ c'est-à-dire sur l'ensemble du cycle de vie. Cela renforce la transparence et la comparabilité des différents produits et permet aux consommateurs d'intégrer ces réflexions dans leur décision d'achat.

Le complément sur la consommation en mode veille est supprimé à la let. c, car il peut de toute façon faire partie des exigences relatives à la mise à disposition sur le marché et ne doit pas figurer explicitement au niveau de la loi. Sur le fond, cette modification ne change rien par rapport au droit en vigueur.

76 / 154

FF 2021 1666

Pour des questions d'économie comportementale, la nouvelle let. d doit en outre créer la possibilité ­ en particulier pour les étiquettes-énergie des voitures de tourisme ­ de montrer aux clients la différence sur le plan financier entre l'achat d'un véhicule d'une catégorie inférieure et l'achat d'un véhicule moyen de la catégorie A.

Enfin, dans tout l'article, l'expression «mise en circulation» est remplacée par «mise à disposition sur le marché». Au sein de l'UE, la mise en circulation désigne uniquement la première mise à disposition sur le marché, tandis qu'en Suisse, le terme désignait initialement également les étapes suivantes, entre le grossiste et le détaillant ainsi qu'entre le détaillant et le consommateur final. Au niveau de l'ordonnance, l'expression a toutefois été délimitée de façon plus étroite dans un souci d'adaptation à la définition de l'UE (voir l'art. 2, let. a, de l'ordonnance du 1er novembre 2017 sur les exigences relatives à l'efficacité énergétique [OEEE]). Afin qu'il soit clairement établi que toutes les étapes demeurent incluses, l'expression «mise en circulation» au sens trop étroit doit être remplacée par l'expression «mise à disposition sur le marché» dont le sens est plus large.

Art. 55, al. 1 et 3 L'al. 1 parle désormais d'objectifs, et non plus de valeurs indicatives, conformément à la modification apportée aux art. 1 et 2.

D'un point de vue temporel, le Conseil fédéral n'est pas en mesure, en raison de la nécessité d'une procédure de consultation, de soumettre au Parlement le rapport visé à l'al. 3 et de lui proposer simultanément des mesures correspondantes; c'est pourquoi le terme «simultanément» est supprimé. La nécessité de prendre des mesures supplémentaires est évaluée, comme c'est le cas jusqu'à présent, sur la base d'une analyse de l'impact et de l'efficacité des mesures au sens de la présente loi dans le cadre des rapports quinquennaux du Conseil fédéral.

Art. 57, al. 1 L'expression «met en circulation» est remplacée par «met à disposition sur le marché». Voir à ce sujet le commentaire de l'art. 44.

Art. 64, al. 2, 1re phrase En vertu de l'art. 9, al. 5, le Conseil fédéral est habilité à introduire un système de garanties d'origine pour des domaines de l'économie énergétique autres que celui de l'électricité. S'il fait usage de cette compétence,
l'exigence d'indépendance à laquelle sont soumis les membres du conseil d'administration et de la direction de l'organe d'exécution sera élargie en conséquence. Des doubles mandats seraient en particulier délicats s'ils étaient en rapport avec des activités économiques dans le domaine des combustibles ou des carburants renouvelables liquides ou gazeux (p. ex. biogaz, biométhane ou hydrogène produit à partir d'énergies renouvelables). Les garanties d'origine qui seront (un jour) délivrées pour ces substances joueront un rôle important dans la prise en compte des agents énergétiques renouvelables.

77 / 154

FF 2021 1666

Art. 70, al. 1, let. b Il est nécessaire d'adapter le renvoi en raison des nouvelles dispositions relatives aux contributions d'investissement.

Art. 73, al. 1 et 2 Désormais, seules les nouvelles installations dont la construction n'a pas encore commencé au moment de l'entrée en vigueur des présentes modifications doivent pouvoir bénéficier de contributions d'investissement. Cette disposition doit permettre d'éviter les effets d'aubaine et d'utiliser les ressources de manière productive.

Art. 75a

Dispositions transitoires relatives aux contributions d'investissement ainsi qu'aux contributions à la recherche de ressources géothermiques et aux garanties pour la géothermie

Lorsque l'octroi d'une contribution d'investissement pour une installation photovoltaïque, hydroélectrique ou de biomasse a été confirmé par une décision de garantie de principe avant l'entrée en vigueur des présentes modifications, l'ancien droit s'applique pour cette installation (al. 1). Les coûts supplémentaires non amortissables restent déterminants dans les cas où ils devaient être pris en compte.

Les demandes qui ont été déposées au plus tard le dernier jour de référence prévu dans l'ordonnance du 1er novembre 2017 sur l'encouragement de la production d'électricité issue d'énergies renouvelables40 précédant l'entrée en vigueur de la présente modification sont évaluées sur la base de l'ancien droit (al. 2).

La disposition transitoire prévue à l'al. 3 garantit que des rénovations notables d'installations hydroélectriques d'une puissance allant jusqu'à 10 MW, d'installations de combustion des déchets urbains et d'installations au gaz d'épuration peuvent continuer de bénéficier de contributions d'investissement pour autant qu'une demande complète qui remplit toutes les exigences légales ait été déposée auprès de l'OFEN avant l'entrée en vigueur des présentes modifications. Si ces installations n'étaient pas protégées, la question de savoir si un projet reçoit encore ou non une contribution d'investissement dépendrait en premier lieu du laps de temps dans lequel l'OFEN est en mesure d'examiner la demande.

La disposition transitoire prévue à l'al. 4 tient compte du fait que non seulement la recherche, mais aussi la mise en valeur du sous-sol pour la production d'électricité d'origine géothermique, doivent être soutenues par une contribution d'investissement.

Dans le but d'éviter une interruption des projets en cours, la disposition transitoire sert à ce que quiconque a déposé une demande de contribution à la recherche de ressources géothermiques ou de garantie pour la géothermie selon l'ancien droit ou a déjà conclu un contrat correspondant, puisse déposer une demande de réexamen et demander une contribution d'investissement supplémentaire pour la mise en valeur. Cela signifie qu'il résulterait davantage de coûts imputables lors du calcul de la contribution d'investissement et qu'il faudrait allouer une contribution plus élevée.

40

RS 730.03

78 / 154

FF 2021 1666

Art. 75b

Dispositions transitoires relatives à l'obligation de reprise et de rétribution

Les exploitants d'installations photovoltaïques existantes qui entrent dans le champ d'application de l'obligation de reprise et de rétribution et qui ne bénéficient pas ni n'ont bénéficié d'une rétribution de l'injection, d'un financement des coûts supplémentaires ou d'un soutien cantonal ou communal comparable, doivent être protégés pendant dix ans contre le risque d'une baisse des revenus à la suite d'une éventuelle baisse des prix du marché. Ils doivent obtenir des revenus à hauteur de la rétribution globale moyenne pour l'électricité et les garanties d'origine versée par les gestionnaires d'un réseau de distribution suisses au cours des cinq années précédant l'entrée en vigueur de la modification dans le cadre de l'obligation de reprise et de rétribution.

En conséquence, un droit à la reprise et à la rétribution des garanties d'origine est accordé aux exploitants de telles installations à l'al. 1. Les exploitants d'installations éligibles sont libres de continuer à vendre leurs garanties d'origine sur le marché.

L'exécution se fait dans le cadre des dispositions en vigueur sur la répartition des compétences. Elle met l'accent sur la compétence du Conseil fédéral de déléguer à l'organe d'exécution d'autres tâches qui portent sur l'utilisation des moyens issus du supplément ou qui sont liées aux garanties d'origine (art. 63, al. 1, let. f). En vertu de la let. a, il suffit que l'installation relève en principe du champ d'application de l'obligation de reprise et de rétribution. Le droit à la reprise et à la rétribution des garanties d'origine s'applique donc aussi aux cas où l'exploitant d'installation vend sa production sur le marché.

En vertu de l'al. 2, le tarif de reprise découle de la moyenne sur cinq ans qui sera fixée par le Conseil fédéral grâce à sa compétence générale de mise en oeuvre, déduction faite du prix de marché de référence en vigueur. L'al. 3 précise que les garanties d'origine sont revendues sur le marché, la différence étant à la charge du fonds alimenté par le supplément.

4.2

Loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEl)

Art. 4, al. 1, let. b, e, f, j et k Dans le cadre de la stratégie Réseaux électriques, l'exploitant de stockage a été inscrit pour la première fois comme un acteur dans la loi (voir les modifications du 1er juin 2019 aux art. 17a et 17b). C'est pourquoi la let. b précise la définition du consommateur final en tenant compte du principe du point de prélèvement, selon lequel il y a lieu de payer pour l'utilisation du réseau lors du prélèvement et non lors de l'injection dans le réseau (art. 14, al. 2). En conséquence, aussi bien le soutirage d'électricité du réseau pour les propres besoins que le soutirage du réseau à des fins de stockage doivent être qualifiés de consommation finale. Dans ces configurations, il n'y a pas de consommation finale uniquement si l'une des deux exceptions, maintenues sans modification, s'applique. Ce qui se passe après un soutirage du réseau à des fins de stockage ne joue aucun rôle pour la qualification en tant que consommateur final; peu importe que l'électricité soutirée soit consommée de manière différée par celui qui l'a soutirée ou réinjectée dans le réseau après application d'une déduction pour la perte de transformation.

79 / 154

FF 2021 1666

L'adaptation à la let. e ne correspond pas à une modification matérielle, mais à une clarification qui vise à rendre la réalité vécue. L'énergie de réglage n'est pas fructueusement proposée à Swissgrid uniquement par des centrales électriques, mais aussi par des consommateurs finaux ou des exploitants de stockage. Il n'est pas déterminant de savoir qui propose un service-système, mais il faut savoir si les conditions de préqualification de Swissgrid sont remplies. C'est pourquoi la mention d'un acteur déterminé disparaît (cf. également la modification à l'art. 20, al. 2, let. b).

À la let. f, une expression est remplacée en allemand et en italien uniquement.

Les nouvelles dispositions légales visant les systèmes de mesure nécessitent une clarification des termes (let. j et k). Il est parfois question de mesure de décompte comme terme générique. Il faut faire la distinction avec la mesure d'exploitation; celle-ci fait partie du fonctionnement du réseau (cf. let. g).

Art. 4a

Soutirage d'électricité par le réseau de courant de traction

L'art. 4a clarifie le rapport entre le réseau à 50 Hz, réglé par la LApEl, et le réseau de courant de traction à 16,7 Hz, exploité par les entreprises ferroviaires. L'exploitation du réseau à 16,7 Hz n'est en principe pas soumise à la LApEl (sous réserve de règles spéciales dans l'OApEl). Mais dans la mesure où le réseau de courant de traction soutire de l'électricité du réseau à 50 Hz, il est réputé (hormis des exceptions) consommateur final au sens de la LApEl. Ces règles de base visant les interactions entre les réseaux à 50 Hz et à 16,7 Hz, précisées à ce stade dans l'ordonnance (art. 1, al. 3, OApEl), sont désormais inscrites, exceptions comprises, dans la loi. Dans le même temps, la réglementation est complétée par une exception supplémentaire pour une situation dans laquelle l'assimilation du réseau à 16,7 Hz à un consommateur final n'apparaît pas adéquate, à savoir pour les échanges d'eau.

L'al. 1 établit le principe dans la phrase introductive, tandis que les let. a à c précisent les exceptions. Les let. a et b, qui concernent la question du soutirage d'électricité pour l'exploitation d'une centrale électrique, correspondent à la réglementation en vigueur dans l'ordonnance (art. 1, al. 3, let. b, OApEl). Le soutirage d'électricité du réseau à 50 Hz pour les propres besoins d'une centrale électrique ou pour faire fonctionner les pompes d'une centrale de pompage n'est d'ores et déjà pas assimilable à une consommation finale, conformément à l'art. 4, al. 1, let. b (qui reste inchangé à cet égard). Mais comme l'exploitation d'équipements à 16,7 Hz passe nécessairement par le réseau à 16,7 Hz, la question se pose de savoir, pour les installations de production correspondantes, si le nécessaire soutirage d'électricité du réseau à 50 Hz par celui à 16,7 Hz est assimilable à une consommation finale (car il s'agit d'un soutirage par le réseau à 16,7 Hz) ou non (car l'électricité soutirée est destinée au pompage, respectivement aux propres besoins d'une centrale électrique). En l'occurrence, par souci de mise sur un pied d'égalité, il est précisé qu'il ne s'agit pas de consommation finale. Au regard du cas de figure réglé à la let. b, le principe d'égalité de traitement implique cependant que la quantité d'électricité produite par la suite par turbinage soit réinjectée dans le réseau à 50 Hz. La
mise en oeuvre concrète, notamment la question des délais dans lesquels la réinjection doit se faire, est laissée à la branche au regard du principe de subsidiarité (art. 3, al. 2). La let. c évoque dorénavant le cas des échanges d'eau. Lorsque, dans des centrales électriques en partenariat, le partenaire 80 / 154

FF 2021 1666

A pompe, tandis que simultanément le partenaire B souhaite produire (turbiner), les deux programmes de production annoncés sont consolidés. Par conséquent, la centrale ne produit que la valeur nette, le partenaire A se passe d'énergie de pompage et le partenaire B soutire, quant à lui, la part d'énergie manquante du réseau et non de la centrale. S'agissant de centrales de pompage mixtes, l'échange d'eau n'est pas attrayant pour le partenaire qui opère à 16,7 Hz. En effet, il est considéré comme un consommateur final s'il soutire à titre supplétif de l'électricité du réseau à 50 Hz et doit de ce fait verser la rémunération pour l'utilisation du réseau. C'est pourquoi une exception est également ménagée pour les prélèvements d'électricité effectués en raison d'un échange d'eau. Dans ce contexte, cette mesure ne concerne que le soutirage d'électricité achetée en remplacement de l'énergie qui aurait été soutirée de la centrale électrique. En d'autres termes, le réseau à 16,7 Hz peut soutirer de l'électricité sans devoir rémunérer l'utilisation du réseau uniquement à concurrence de la production propre évitée et non pas en fonction de l'énergie de pompage économisée.

Lors de la mise en oeuvre des exceptions, il sera crucial de garantir que seuls sont traités de manière privilégiée les soutirages d'électricité survenant dans le cadre des cas d'exploitation cités. C'est pourquoi la let. c couvre exclusivement les soutirages effectués au sein des centrales électriques. En outre, il va de soi que cet avantage s'applique seulement s'il est prouvé que le soutirage du réseau intervient en même temps que l'échange d'eau, respectivement au moment où surviennent les propres besoins de la centrale électrique ou l'actionnement des pompes. L'ElCom peut contrôler de tels éléments dans le cadre de sa compétence étendue en matière de surveillance du respect des dispositions de la LApEl (art. 22, al. 1). On peut par exemple penser à une comparaison des comptabilités de l'eau des centrales partenaires avec les programmes prévisionnels correspondants, qui sont déposés auprès de Swissgrid. L'ElCom peut obtenir les informations requises auprès des centrales partenaires et de Swissgrid en s'appuyant sur l'art. 25. Si cela devait s'avérer nécessaire, le Conseil fédéral peut édicter des dispositions d'exécution en vertu de
sa compétence générale de mise en oeuvre.

En vertu de l'al. 2, le Conseil fédéral peut régler d'autres modalités et questions spéciales découlant des interactions entre le réseau à 16,7 Hz et le réseau à 50 Hz. Cela pourrait être impératif, par exemple, si le Conseil fédéral soumettait l'exploitation du réseau à 16,7 Hz à certaines dispositions de la LApEl (cf. art. 2, al. 2) et que cette mesure constitue un point de friction avec les autres règles applicables au réseau. Il faut aussi songer aux dispositions d'ores et déjà fixées dans l'OApEl (art. 1, al. 3 et 3bis, OApEl) précisant, par exemple, que le soutirage d'électricité provenant de la propre production à l'intérieur d'une centrale électrique n'est évidemment pas considéré comme une consommation finale, y compris lorsque sont utilisés à cet effet, au sein de la centrale, des éléments qui, du point de vue technique, font partie du réseau de transport.

Art. 6

Approvisionnement de base

L'art. 6 constitue le coeur de l'ouverture complète du marché (déjà envisagée par le Parlement dans le cadre de ses délibérations sur la LApEl). Cette disposition reçoit quelques modifications rédactionnelles par rapport à la version déjà adoptée à l'époque par le législateur, mais non encore entrée en vigueur (anciennement art. 7).

81 / 154

FF 2021 1666

C'est ainsi que les aspects concernant le réseau sont conséquemment déplacés à l'art. 14. Cette séparation entre les aspects concernant l'énergie (approvisionnement de base) et ceux concernant le réseau clarifie la structure de la loi. Simultanément, la terminologie est épurée: jusqu'ici, le terme «tarif d'électricité» était parfois employé comme un terme générique recouvrant les divers tarifs (énergie et réseau), mais il représentait parfois seulement les tarifs de l'approvisionnement de base. Dans le texte de loi, il sera désormais uniquement question du tarif d'utilisation du réseau, d'une part, et du tarif de l'approvisionnement de base, d'autre part ­ ce dernier par opposition aux prix de l'électricité du libre marché. La transposition des obligations de publication à l'art. 12, la suppression de la référence à la réglementation de la consommation propre, qui servait à améliorer la lisibilité, et la disparition de la référence aux niveaux de tension n'ont en outre pas d'incidence matérielle.

Les gestionnaires de réseau locaux restent chargés de l'approvisionnement de base.

Or dans la pratique, il arrive que les petites entreprises n'accomplissent pas cette tâche elles-mêmes, mais la délèguent à des tiers, notamment à de plus grands fournisseurs de l'approvisionnement de base. La teneur essentielle de l'actuelle réglementation (le titre la présente comme «Modèle de l'approvisionnement en électricité garanti») reste inchangée. Selon l'al. 1, les petits consommateurs (consommation annuelle inférieure à 100 MWh) peuvent choisir s'ils veulent recevoir leur électricité du fournisseur de leur choix ou, dans le cadre de l'approvisionnement de base, du gestionnaire du réseau de distribution local. La formulation («pas ou plus») établit clairement qu'un retour dans l'approvisionnement de base leur reste ouvert.

L'obligation de proposer un produit électrique standard, inscrite à l'al. 2, est nouvelle.

Ce produit standard se caractérise par l'utilisation d'énergie exclusivement indigène de source renouvelable. Les garanties d'origine (art. 9 LEne) apporteront la preuve de la provenance et de la qualité écologique de l'électricité fournie. Les garanties non librement négociables qui proviennent des installations participant au système de rétribution de l'injection seront réparties de manière proportionnelle
entre tous les consommateurs finaux, comme c'est d'ores et déjà le cas (cf. art. 4, al. 5, OEne), et prises en compte dans le calcul de la part minimale requise. Il est loisible aux gestionnaires d'un réseau de distribution de proposer encore d'autres produits électriques dans le cadre de l'approvisionnement de base. Toutefois, sous réserve d'un choix expressément différent du consommateur final concerné, l'approvisionnement de base repose sur le produit standard.

Conformément à l'al. 3, 1re phrase, les tarifs de l'approvisionnement de base ­ tout comme les tarifs d'utilisation du réseau ­ sont définis en fonction des profils de soutirage. Cette disposition est appropriée, car l'approvisionnement de base se fait par le biais du soutirage d'électricité du réseau de distribution. La 2e phrase introduit un départ de la réglementation actuelle basée sur les coûts de revient: l'exigence d'une comptabilité par unité d'imputation disparaît. Désormais, l'adéquation des tarifs de l'approvisionnement de base sera évaluée en fonction de la réalité du marché, à l'aide des prix auxquels des produits électriques comparables sont vendus sur le libre marché (prix comparatifs du marché), c'est-à-dire notamment en regard des prix facturés aux consommateurs finaux du segment de clientèle correspondant. Étant donné que les fournisseurs de l'approvisionnement de base se couvrent pour les années tarifaires correspondantes, les prix à terme sur le marché de gros, négociés au moment de la 82 / 154

FF 2021 1666

publication des tarifs de l'approvisionnement de base, peuvent aussi fournir des indications. Ces prix à terme sont en partie aussi déterminants pour la couverture des risques de prix des produits électriques comparables sur le libre marché. Les prix de gros peuvent, eux aussi, constituer des références. Par ailleurs, les tarifs de l'approvisionnement de base des autres zones de desserte et les prix de l'électricité dans des marchés étrangers peuvent aussi être pris en compte dans l'analyse.

Certaines marges de tolérance doivent être accordées aux gestionnaires d'un réseau de distribution s'agissant de fixer des tarifs adéquats. Comme ils doivent fixer les tarifs à l'avance, mais que l'évolution des prix de marché n'est pas prévisible avec certitude, ils doivent intégrer dans le calcul une certaine marge de manoeuvre. C'est pourquoi l'ElCom pourra procéder au contrôle des tarifs en ménageant des plages de tolérance. En ce qui concerne la comparabilité des différents produits électriques, il faut surtout considérer la qualité écologique et l'origine géographique sur la base des garanties d'origine fournies lors de la livraison de l'électricité au consommateur final et tenir éventuellement compte de critères supplémentaires tels que les modalités de paiement, les catégories de consommation différentes et la diversité des prix dans l'approvisionnement de base. Le départ de la réglementation basée sur les coûts de revient a pour effet de supprimer les différences de couverture annuelles. Il n'en demeure pas moins que toute rémunération perçue de façon inappropriée devra être remboursée via une baisse correspondante des tarifs de l'approvisionnement de base les années suivantes, conformément à la pratique en vigueur jusqu'ici. À défaut, l'ElCom peut ordonner une réduction des tarifs, en vertu de l'art. 22, al. 2, let. b. À titre transitoire, les différences de couverture positives ou négatives échues avant l'entrée en vigueur des modifications de la loi peuvent, et doivent, être compensées sur le plan tarifaire. L'ordonnance pourrait prévoir à cet effet une disposition transitoire en ce sens, avec un délai concret.

Selon l'al. 4, le Conseil fédéral règle les modalités concernant la détermination des prix comparatifs du marché. Il prévoira notamment l'obligation pour les fournisseurs de l'approvisionnement
de base, c'est-à-dire les gestionnaires de réseau locaux et les fournisseurs d'électricité actifs sur le libre marché, à communiquer à l'ElCom leurs prix de l'approvisionnement de base et de l'électricité pour les clients dont la consommation annuelle est inférieure à 100 MWh (sous forme de prix moyens des contrats pondérés en fonction des volumes par produit). Pour permettre une comparaison pertinente, ces déclarations doivent présenter séparément les quantités d'électricité concernées et les prix, et fournir des informations relatives à la qualité écologique (garanties d'origine). La périodicité de l'obligation de communiquer sera définie au niveau de l'ordonnance. En ce qui concerne la composition des énergies renouvelables dans le produit standard de l'approvisionnement de base (énergie solaire, hydraulique, etc.), l'exigence légale est neutre sur le plan technologique. Néanmoins, le Conseil fédéral peut édicter des prescriptions correspondantes (p. ex. fixer des parts minimales).

Art. 7

Approvisionnement de remplacement

L'approvisionnement de remplacement intervient, d'une part, lorsqu'un consommateur final n'a pas conclu de nouveau contrat de livraison en temps utile à l'expiration de l'accord de fourniture d'électricité, que le contrat ait été résilié ou qu'il ait été de 83 / 154

FF 2021 1666

durée déterminée dès le début. D'autre part, l'approvisionnement de remplacement est aussi d'actualité si le fournisseur d'électricité choisi par le consommateur final fait défection, c'est-à-dire lorsqu'il ne remplit plus dûment son obligation contractuelle de livrer (p. ex. en cas de faillite). Cependant, l'approvisionnement de remplacement est une solution de dernier recours et ne survient pas obligatoirement: le consommateur final reste libre de choisir une autre solution (contractuelle) au préalable ou sur le moment. Il semble par ailleurs judicieux que les consommateurs finaux puissent à nouveau quitter l'approvisionnement de remplacement après seulement un mois (cf.

commentaire de l'art. 13a).

Art. 8, al. 1bis et 3 Étant donné que le gestionnaire de réseau ne peut pourvoir pleinement à la sécurité du réseau, comme il lui incombe (art. 8, al. 1, let. a), qu'avec le soutien d'autres acteurs, l'al. 1bis, 1re phrase, dispose qu'il doit recevoir à cet effet le soutien des utilisateurs raccordés à son réseau (devoir de soutien). Il ressort de la 3e phrase que l'obligation s'applique également aux gestionnaires de réseau dont les réseaux sont interconnectés.

Comme il en découle de l'emplacement de l'art. 8 dans la loi, les mesures prises par le gestionnaire de réseau pour assurer la sécurité de l'exploitation du réseau visent à assurer la sécurité d'approvisionnement (cf. aussi le message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité41). L'al. 1bis ne s'applique donc notamment pas aux mesures visant à éviter les risques et les dommages pour les personnes ou les biens prises dans le but de respecter la loi du 24 juin 1902 sur les installations électriques (LIE)42 et ses dispositions d'exécution. Les dispositions relatives au recours à la flexibilité (cf. art. 17bbis), ainsi que les réglementations, les normes et les recommandations d'organisations techniques reconnues devront être prises en compte lors de la mise en oeuvre pratique du devoir de soutien. Peu importe, pour les utilisateurs obligés d'apporter leur soutien, qu'ils soient directement ou indirectement reliés au réseau du gestionnaire de réseau. Ainsi, les acteurs d'un réseau de faible envergure seraient aussi compris dans cette
disposition. La portée de l'obligation de soutien dépend, de cas en cas, de l'acteur concret et de son influence potentielle sur la sécurité du réseau. Par exemple, l'obligation sera plus importante s'il s'agit d'une grande centrale à pompage-turbinage que d'un entrepôt frigorifique raccordé au réseau à moyenne tension.

L'expression «mesures visant à assurer la sécurité de l'exploitation du réseau» comprend aussi bien les mesures en lien avec l'exploitation normale que celles visant à prévenir ou à éliminer une menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau. Si la sécurité de l'exploitation du réseau de transport est menacée, la disposition spéciale de l'art. 20a s'applique.

Par rapport au devoir général de soutien, la 2e phrase fixe une obligation de se conformer et de tolérer plus stricte en cas de menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport, lorsque Swissgrid doit prendre des mesures ou des mesures de substitution pour lesquelles il n'y a pas de base contractuelle (art. 20a, al. 3 et 4). Si

41 42

FF 2005 1493, 1531 RS 734.0

84 / 154

FF 2021 1666

une telle mesure est prononcée à l'encontre d'un gestionnaire d'un réseau de distribution raccordé au réseau de transport, celui-ci a la compétence ­ si cela est nécessaire pour la mise en oeuvre de la mesure ­ de répercuter l'ordre sur ses utilisateurs de réseau et sur les gestionnaires d'un réseau de distribution d'un niveau inférieur (principe en cascade, voir à cet égard le commentaire de l'art. 20a). La 3e phrase, selon laquelle les obligations visées à l'art. 8, al. 1bis, s'appliquent par analogie aux gestionnaires de réseau dont les réseaux sont interconnectés, implique, en ce qui concerne les mesures visées à l'art. 20a, que leur transmission n'est possible que de manière descendante, par exemple d'un gestionnaire d'un réseau de distribution de niveau 3 à un gestionnaire d'un réseau de distribution de niveau 5 qui est relié à son réseau. Néanmoins, le devoir général de soutien doit être observé dans les rapports entre gestionnaires du même niveau de réseau. Si les mesures à prendre en cas de menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport sont prévues par des conventions (art. 20a, al. 1 et 2), le recours à l'obligation de se conformer et de tolérer n'est pas nécessaire.

Les modifications à l'al. 3 sont uniquement d'ordre rédactionnel.

Art. 8a

Réserve d'énergie pour les situations d'approvisionnement critiques

D'après l'al. 1, la réserve d'énergie est un élément fixe, avec un caractère d'assurance, qui vient s'ajouter aux instruments existants au service de la sécurité d'approvisionnement. Il ne s'agit pas d'un instrument «dormant» qui serait uniquement activé quand un besoin est possible ou probable, ni d'une des mesures visées à l'art. 9 LApEl. Le seuil de sollicitation de la réserve, ou plus précisément la «situation exceptionnelle» exigée, apparaîtra en règle générale, après la clôture du négoce, sous forme d'un déficit du bilan électrique global de la Suisse. Un tel déficit dépasse les fluctuations habituelles que peuvent compenser les services-système (énergie de réglage) et n'intervient que si les mécanismes du marché ne parviennent pas à résoudre le problème.

Par conséquent, cette réserve n'est pas conçue pour résoudre des problèmes régionaux rencontrés dans l'exploitation du réseau (pannes d'électricité locales). Les acteurs du marché (responsables des groupes-bilan) sont tenus d'équilibrer leurs bilans grâce au marché. L'énergie ainsi réservée, par le fait qu'elle est sortie du marché, ne va pas à l'encontre de celui-ci.

La nouvelle réserve d'énergie présente donc un seuil d'entrée élevé, mais qui est cependant inférieur aux mesures prévues par la loi du 17 juin 2016 sur l'approvisionnement du pays (LAP)43, qui régit les mesures en cas de pénurie grave. Cette réserve peut toutefois, selon les circonstances, permettre d'éviter le recours aux instruments de la LAP ou de le repousser pendant qu'elle pallie les besoins dans un premier temps.

Les responsables de la constitution de la réserve, à savoir l'ElCom et Swissgrid, sont tenus de communiquer aux services responsables de la LAP toutes les informations nécessaires concernant la constitution de la réserve pour l'année concernée.

L'al. 2 définit qui a le droit de participer à la réserve. La participation est en principe ouverte à toute technologie. Il va de soi que les participants doivent être indigènes, c'est-à-dire raccordés au réseau suisse. Parmi les installations de stockage, celles de

43

RS 531

85 / 154

FF 2021 1666

la grande hydraulique, en particulier, sont prédestinées pour y participer. La participation d'usines d'incinération des ordures ménagères, par exemple, est cependant également envisageable. Peuvent aussi participer à la réserve de grands consommateurs, tels que des entreprises industrielles, disposés à réduire fortement leur consommation d'électricité pour une durée déterminée (réduction de la charge). Aucune obligation générale de participer à la réserve n'est prévue à l'art. 8a. L'éventualité qu'aucun exploitant approprié ne participe à l'appel d'offres est plutôt improbable. Les participants sont soumis à l'obligation générale de renseigner. C'est de toute façon le cas vis-à-vis de l'ElCom (art. 25), il en va de même vis-à-vis de Swissgrid. L'obligation ne se limite pas à de simples informations, elle comprend aussi d'autres actions de coopération nécessaires à une exécution en bonne et due forme (cf. commentaire des al. 4 et 5).

La tâche de veiller à la constitution de la réserve est partagée en deux: à l'al. 3, l'ElCom est chargée d'établir les valeurs-clés et les spécifications préalables tout en surveillant la mise en oeuvre, alors que Swissgrid est responsable de la gestion technique annuelle de la réserve, du soutien à l'ElCom et des mesures opérationnelles (al. 4). L'ElCom définit les valeurs-clés dans une détermination préalable qui n'est ni une ordonnance ni une décision. L'élément principal est le dimensionnement précis de la réserve, qui découle des directives du Conseil fédéral et repose sur les besoins et les circonstances qui prévalent l'année concernée. Dans ce domaine, le concours de Swissgrid est nécessaire. Il convient notamment de définir la durée de conservation et la durée de la disposition à réduire la consommation (p. ex. de mi-mars à mi-mai) ainsi que les valeurs-clés de l'appel d'offres. Celles-ci peuvent aussi demeurer inchangées pendant plusieurs années. Il convient par ailleurs d'établir des lignes directrices pour les divers versements en lien avec la réserve: à la rémunération octroyée pour la constitution de la réserve, qui est définie par appel d'offres, s'ajoutent l'indemnisation en cas de recours à la réserve et les sanctions (dont doivent s'acquitter ceux qui ne rempliraient pas les obligations liées à la réserve). En ce qui concerne la rémunération octroyée
pour la constitution de la réserve, il faudra décider s'il y a lieu de tenir compte de la différence qui prévaut entre les exploitants de stockage, qui doivent conserver de l'énergie même sans recours à la réserve, et les prestataires proposant une réduction de la charge, qui peuvent fonctionner normalement jusqu'à un recours à la réserve. Il va de soi que la rémunération est toujours déterminée par mise aux enchères. L'ElCom doit établir le cadre de ces différents aspects financiers. Elle peut aussi définir un plafond pour la rémunération perçue pour la conservation et la constitution de la réserve dans le cas où, en raison d'un nombre trop faible d'offrants, aucune vraie concurrence ne se forme.

Al. 4: Swissgrid est chargée de la gestion technique annuelle de la réserve dans le cadre défini par la loi, l'ordonnance et les grandes lignes établies par l'ElCom. Elle devrait globalement le faire de manière analogue à l'acquisition de services-système.

Le cercle des participants est en principe ouvert conformément à l'al. 2, mais est susceptible d'être restreint au moyen des critères de qualification que Swissgrid peut ajuster (sur le plan technique ou géographique). C'est ainsi Swissgrid qui se charge de l'appel d'offres proprement dit, qui permet de déterminer les participants ­ des regroupements (pooling) sont aussi envisageables ­ et la rémunération reçue pour la constitution de la réserve. Les conventions à passer avec chacun des exploitants doi-

86 / 154

FF 2021 1666

vent être aussi uniformes que possible, hormis les cas où les spécifications d'un participant doivent être prises en compte. La coopération entre Swissgrid et les participants reposera également sur ces conventions, leur obligation de renseigner et de coopérer découlant, quant à elle, de la loi (al. 2). Les informations en question sont notamment les niveaux d'eau, les courbes relatives au niveau et à la teneur énergétique, les débits entrants, les programmes prévisionnels de production ou la répartition entre les partenaires dans le cas de centrales partenaires (pour la réduction de la charge, on peut penser aux données des points de mesure). Pour la gestion, Swissgrid pourra solliciter le cas échéant des tiers pour certains services auxiliaires, mais ne pourra pas externaliser la tâche de fait. Il n'en demeure pas moins que des décisions souveraines pourront s'avérer nécessaires au bon fonctionnement. Or, ces dernières ne sont pas du ressort de Swissgrid, mais de l'ElCom (art. 22). L'ElCom sera souvent informée par Swissgrid de certains faits nécessitant que l'ElCom ordonne les mesures qui s'imposent.

L'al. 5 décrit la procédure de recours à la réserve d'énergie, qui se fait en plusieurs étapes, ainsi que les circonstances débouchant généralement sur un besoin (équilibre de marché inexistant, épuisement du potentiel d'énergie à court terme disponible sur le marché). La procédure commence par la phase d'observation de la situation en matière d'approvisionnement, qui est une tâche conjointe de Swissgrid et de l'ElCom.

Swissgrid, qui est plus proche de la réalité du terrain, doit tenir l'ElCom au courant des événements. Il revient à l'ElCom seule de procéder aux mesures de surveillance proprement dites, par exemple de constater si les obligations de conservation de l'eau dans les réservoirs sont respectées. Mais la coopération des participants à la réserve est également importante en ce qui concerne l'observation. Cette obligation (al. 2) s'applique aussi bien à l'égard de l'ElCom que de Swissgrid. Le recours à la réserve en tant que tel est une procédure en deux temps, à savoir l'autorisation du recours à la réserve et le recours à la réserve. La procédure n'est activée que si la nécessité de recourir à la réserve devient probable. Dans ce contexte, l'ElCom dépend des informations transmises
systématiquement dans les meilleurs délais par Swissgrid, laquelle y est tenue en vertu de son obligation d'apporter son soutien à l'ElCom (al. 4). L'autorisation du recours à la réserve, du ressort de l'ElCom, constitue l'autorisation fondamentale habilitant Swissgrid à recourir par la suite à la réserve quand la nécessité s'en fait sentir. Il n'est pas nécessaire d'impliquer l'Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays (OFAE) à la procédure d'autorisation, mais il doit en être informé. En cas d'urgence, il doit être possible de recourir à la réserve sans autorisation préalable: le Conseil fédéral pourra régler ce point (al. 6, let. b). En cas de recours effectif à la réserve, Swissgrid ne doit pas recourir à toute l'énergie disponible, mais seulement à la quantité nécessaire. Elle n'est pas non plus tenue d'impliquer tous les participants à la réserve et peut se limiter, compte tenu du problème qui se présente, à faire appel à ceux qui s'y prêtent. À cette fin, Swissgrid requiert une certaine marge de manoeuvre, mais elle est tenue d'agir de manière équitable, pondérée et sans arbitraire. L'éventuel recours à la réserve est indemnisé séparément, c'est-à-dire en sus de la rémunération pour la conservation d'énergie et la réserve. Pour que les exploitants de stockage ne soient pas incités à provoquer un recours à la réserve par un comportement particulier sur le marché, par exemple en retenant de l'énergie hors du marché de manière ciblée, la rétribution de l'énergie prélevée dans la réserve doit être sensiblement inférieure au prix du marché constaté au moment du recours. L'imputation 87 / 154

FF 2021 1666

des coûts en ce qui concerne l'indemnisation du recours doit fonctionner comme pour l'énergie d'ajustement. Les groupes-bilan à l'origine de déséquilibres nécessitant le recours à la réserve doivent subir de lourdes conséquences financières (al. 6, let. c); mais ils ne paient pas directement les exploitants chez lesquels l'énergie est soutirée.

De façon générale, les coûts liés à la réserve sont financés au moyen de la rémunération pour l'utilisation du réseau (art. 15, al. 2). Les moyens en lien avec la réserve constituent un pot commun sans subdivision. Les fonds issus de la rémunération pour l'utilisation du réseau et les éventuels revenus provenant des groupes-bilan y sont versés sans distinction et utilisés pour la rémunération, pour les coûts administratifs de même que pour l'indemnisation en cas de recours.

L'al. 6 contient des normes de délégation. Le Conseil fédéral doit fixer les critères de dimensionnement de la réserve, dont l'élément-clé est le volume. Il s'en acquittera en se fondant sur les faits, c'est-à-dire en s'appuyant sur une analyse des risques menaçant la sécurité d'approvisionnement. Il pourrait notamment arrêter une période, par exemple toutes les heures à haut tarif au cours d'une semaine, pendant lesquelles il doit être possible de couvrir en tout temps l'intégralité des besoins en électricité de la Suisse par les centrales électriques indigènes. La possibilité de dissoudre la réserve de manière anticipée est ensuite abordée. Cela ne doit se produire qu'à titre exceptionnel, si pour une année en particulier, il est clair pendant la période de conservation d'énergie que la réserve n'est plus nécessaire. Les exploitants qui participent à la réserve, en particulier les exploitants de stockage, doivent être déchargés de leur obligation plus tôt que prévu pour que l'énergie en question puisse regagner le marché. Normalement, c'est-à-dire sans dissolution anticipée de la réserve, l'obligation de réservation ou de conservation d'énergie s'éteint à l'expiration de la période de conservation. Une distinction doit être faite entre la dissolution de la réserve et la suspension de la réserve (cf. phrase introductive). La réserve ne doit pas devenir un instrument «dormant», ce qui impliquerait qu'on passe presque chaque année d'une situation «avec réserve» à une situation «sans
réserve», et inversement. Une «suspension» s'inscrit dans une perspective à plus long terme: sans une possibilité de suspension, si la nécessité n'était plus donnée pour les années à venir, il faudrait constituer la réserve malgré tout, car elle est inscrite dans la loi. Un autre aspect important est le déroulement du recours à la réserve (let. b), qui doit survenir après la clôture du négoce. Si la demande d'électricité sur le marché Day-Ahead est plus importante que l'offre et que le marché intrajournalier ne permet pas non plus de combler cette lacune (équilibre de marché inexistant), les groupes-bilan concernés annoncent le déséquilibre à Swissgrid, qui prélève l'énergie manquante dans la réserve. Ainsi, l'énergie de la réserve reste hors du marché et ne le perturbe pas. Le moment choisi pour le recours à la réserve (après la clôture du négoce) permet d'éviter les flux de la réserve vers l'étranger sans pour autant que les exportations soient interdites. Il faudra peut-être aussi une règle sur l'interaction des deux catégories de réserve (stockage et réduction de la charge). Enfin, pour les centrales électriques qui bénéficient d'un soutien en application de l'art. 9bis, la possibilité d'une obligation de fourniture dans le cadre de la réserve d'énergie est prévue (let. d).

88 / 154

FF 2021 1666

Art. 8b

Saisie et transmission des données sur les lacs d'accumulation

Les niveaux de remplissage et les débits entrants et sortants des lacs d'accumulation suisses sont une donnée centrale pour diverses tâches en lien avec la sécurité d'approvisionnement. À noter en particulier les tâches d'observation et de surveillance de l'ElCom (art. 22, al. 3 et 4) ainsi que les tâches de Swissgrid en lien avec l'exploitation du réseau de transport et la réserve d'énergie pour les situations d'approvisionnement critiques (art. 8, 8a et 20). Les données sont également essentielles pour le suivi de la situation en matière d'approvisionnement au sens de l'art. 62 LAP. Dans le domaine de l'électricité, il incombe au domaine Énergie de l'Approvisionnement économique du pays (AEP) d'observer et d'analyser régulièrement l'évolution de l'approvisionnement économique du pays (cf. art. 7 de l'ordonnance du 10 mai 2017 sur l'approvisionnement économique du pays44); de telles tâches peuvent être confiées à des organisations des milieux économiques (art. 60, al. 1, let. b, LAP). L'OFEN a aussi besoin des données sur les lacs d'accumulation, par exemple pour établir la statistique suisse de l'électricité en vertu de la loi du 9 octobre 1992 sur la statistique fédérale (LSF)45 ainsi que pour ses tâches en lien avec la haute surveillance sur l'utilisation des forces hydrauliques en vertu de l'art. 1, al. 1, de la loi du 22 décembre 1916 sur les forces hydrauliques46 et la surveillance en vertu de l'art. 22 de la loi fédérale de 1er octobre 2010 sur les ouvrages d'accumulation47. Partant, il convient de centraliser la saisie et la transmission des données sur les lacs d'accumulation au sein d'une instance compétente. Comme il s'agit de données économiques sensibles qui doivent être saisies et traitées de manière automatisée, efficace et durable, il en découle pour cette instance des exigences élevées en matière d'indépendance, de fiabilité ainsi que de savoir-faire et d'infrastructure informatiques. En vertu de l'al. 1, le Conseil fédéral désignera cette instance. L'Institut fédéral de métrologie, qui dispose déjà d'une somme d'expérience dans ce domaine, entre notamment en ligne de compte, car il entretient le réseau d'observation hydrologique de la Suisse pour l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) sur la base de l'art. 3, al. 1, let. a, de l'ordonnance du 21 novembre 2012 sur l'Institut
fédéral de métrologie48. Les données que les exploitants de centrales doivent fournir comprennent, d'une part, la livraison unique de données historiques pour que la situation actuelle en matière d'approvisionnement puisse être évaluée par rapport au passé. Les teneurs énergétiques des lacs d'accumulation, les apports au fil de l'eau et les apports en eaux de retenue sont par exemple nécessaires, les données devant présenter un niveau de granularité suffisant. D'autre part, des données actuelles sur les lacs d'accumulation doivent être transmises régulièrement. Concrètement, les teneurs énergétiques actuelles, le niveau des lacs, les teneurs énergétiques maximales, la somme des trop-pleins, y compris les curages et les apports en eaux de retenue des différents lacs d'accumulation ainsi que les apports au fil de l'eau sont nécessaires pour chaque centrale. En cas de passage d'une exploitation normale à une exploitation en disponibilité accrue, c'est-à-dire si la situation en matière d'approvisionnement est jugée critique et le recours à la réserve d'énergie possible, les

44 45 46 47 48

RS 531.11 RS 431.01 RS 721.80 RS 721.101 RS 941.272

89 / 154

FF 2021 1666

données doivent être fournies à une fréquence plus élevée (p. ex. à un rythme journalier et non plus hebdomadaire). Une exploitation en disponibilité accrue est déclenchée si l'AEP relève le niveau de préparation ou si l'ElCom autorise en principe le recours à la réserve d'énergie lors de situations d'approvisionnement critiques.

L'al. 2 règle ensuite la transmission des données saisies sur les lacs d'accumulation.

Elle ne peut se faire que dans la mesure nécessaire à l'accomplissement des tâches des différents acteurs. Le critère de la mesure nécessaire vise notamment la périodicité de la transmission et la granularité des données. Une transmission hebdomadaire de données agrégées au niveau régional suffit par exemple pour le suivi de la situation en matière d'approvisionnement au sens de la LAP en cas d'exploitation normale. En cas de passage à une exploitation en disponibilité accrue, les données devraient être fournies et transmises quotidiennement pour chaque lac d'accumulation ou centrale. En plus des services explicitement mentionnés, les données sur les lacs d'accumulation pourraient aussi être transmises à d'autres services fédéraux, pour autant qu'ils en aient besoin pour l'accomplissement de leurs tâches. On peut notamment penser à l'OFEV (modélisations hydrologiques et protection contre les crues), mais aussi à l'État-major de conduite de l'armée et à la Centrale nationale d'alarme.

Comme les données sur les lacs d'accumulation sont des données des exploitants de centrales qui sont économiquement sensibles, elles doivent être traitées, en vertu de l'al. 3, de manière absolument confidentielle par l'instance qui doit être désignée par le Conseil fédéral et les acteurs qui reçoivent ces données en vertu de l'al. 2. Les données sur les lacs d'accumulation ne peuvent notamment pas être demandées par le biais d'une demande d'accès à des documents officiels au sens de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans)49. En d'autres termes, l'al. 3 crée une disposition spéciale au sens de l'art. 4, let. a, LTrans. En outre, les acteurs visés à l'al. 2 auxquels l'instance transmet les données sur les lacs d'accumulation doivent prendre des mesures pour que les données ne soient en aucun cas utilisées dans un autre but.

Art. 9bis

Augmentation de la production d'électricité en hiver

Al. 1: l'art. 9bis comprend la base et les instruments permettant de renforcer la sécurité d'approvisionnement en hiver. Il fixe ­ à l'intention de la branche tenue à faire des investissements ­ une augmentation (2 TWh d'ici 2040) et prévoit un soutien financier. La mesure est un cas d'application de l'art. 9 initié par le législateur, avec toutefois une procédure spécifique, une priorisation en termes de technologie et des critères très précis. Un critère important pour qu'une installation puisse être prise en compte dans l'instrument de l'art. 9bis est sa qualification en ce qui concerne le potentiel de production d'électricité indigène en hiver. Il va de soi que l'installation doit être raccordée au réseau suisse. La nécessité d'assurer la disponibilité de l'électricité en hiver implique en général une capacité de stockage. À cela s'ajoute l'objectif de durabilité important: la production doit être climatiquement neutre, c'est-à-dire neutre en ce qui concerne les émissions de CO2 ou d'autres émissions nocives pour le climat. Le Conseil fédéral concrétisera ce critère (voir le commentaire de l'al. 3). Le terme de centrale électrique doit être compris au sens large puisqu'il englobe les agrandissements et

49

RS 152.3

90 / 154

FF 2021 1666

donc, pour les centrales hydroélectriques à accumulation, les surélévations de barrages. Il ne doit pas y avoir de double financement. Le même projet ne peut pas bénéficier à la fois d'un soutien au sens de la LEne et d'un encouragement au sens de l'art. 9bis LApEl.

L'al. 2 donne la priorité aux centrales hydroélectriques à accumulation pour obtenir cette augmentation et prévoit une procédure en deux temps: un ensemble d'installations appropriées et bénéficiant du plus grand consensus possible ainsi que de mécanismes de compensation écologique est d'abord défini de manière aussi étayée que possible. Il en résulte une liste de ces installations établie par le DETEC (let. a). Les contributions d'investissement sont ensuite allouées par l'OFEN (let. b).

L'identification des projets se fait, dans toute la mesure du possible, dans le cadre d'un dialogue où il est notamment question de l'acceptation du site et des conséquences environnementales. Le dialogue peut avoir lieu dans le cadre d'une table ronde ou sous une autre forme et doit intégrer les représentants des acteurs concernés au premier chef. Une telle table ronde est déjà lancée; il est concevable d'impliquer par la suite d'autres acteurs que ceux mentionnés dans la loi. Les projets que le DETEC inscrit à la fin sur la liste doivent, autant que possible, permettre d'atteindre l'objectif de développement de 2 TWh d'ici 2040. Ils doivent par ailleurs être largement étayés et présenter une faible empreinte écologique. L'expression «autant que possible» se rapporte donc aux trois aspects. La liste n'est édictée ni par voie d'ordonnance ni par voie de décision, mais se rapproche d'un arrêté en matière de planification, et doit être publiée. Le DETEC dispose d'une certaine marge d'appréciation pour l'établissement de la liste. Il n'existe pas de droit à figurer sur la liste et il n'existe pas de droits de participation ni de droits de procédure spécifiques. La liste doit donner une certaine sécurité à l'ensemble des participants. Elle ne remplace pas l'autorisation de construire. Celle-ci est octroyée comme d'habitude dans le cadre de la procédure d'autorisation le plus souvent cantonale (concession et autorisation de construire).

Cette procédure comprend un examen étendu, également en ce qui concerne la protection de la nature et du paysage et
les mesures de compensation. Dans cette appréciation globale, il y aura lieu de prendre dûment en compte le fait qu'un projet figure sur la liste du DETEC.

En vertu de la let. b, l'OFEN alloue les contributions d'investissement après examen des demandes. Seuls les projets figurant sur la liste entrent en ligne de compte. Une demande de contribution d'investissement peut être déposée peu après l'établissement de la liste ou quelque temps plus tard, selon le degré d'avancement de la planification d'un projet. En général, le responsable de projet doit être en possession de l'autorisation de construire au moment où il dépose la demande. Pour ce qui est des coûts imputables, on s'inspirera pour l'essentiel de la LEne; mais le Conseil fédéral peut aussi s'en écarter. Du reste, les règles de la LEne relatives aux contributions d'investissement ne sont applicables par analogie qu'à certaines conditions à l'art. 9bis. Il ne ferait par exemple aucun sens d'appliquer la disposition sur le début des travaux, en revanche un versement échelonné de la contribution est également judicieux. En plus d'une contribution aux coûts de l'infrastructure proprement dite, l'art. 9bis permet également une contribution aux coûts d'étude de projet. Un plafond de 40 % vaut pour les deux types de contribution, mais des taux différents sont possibles pour chaque catégorie. Pour les exceptions, où le plafond peut atteindre 60 %, il faut penser à des 91 / 154

FF 2021 1666

cas où une contribution de 40 % ne permettrait pas une exploitation rentable à long terme. Des preuves circonstanciées seront alors nécessaires. C'est un défi, notamment au regard du long horizon temporel, raison pour laquelle le Conseil fédéral devra définir des exigences en matière de preuves. En outre, il ne doit pas y avoir de contributions au-delà de 40 % si des moyens nettement moins importants devaient être dépensés pour d'autres installations que des centrales hydroélectriques puisque, dans une possible seconde phase du mécanisme visé à l'art. 9bis, d'autres technologies peuvent entrer en ligne de compte par le biais de mises aux enchères (al. 3). Par ailleurs, toutes les contributions possibles sont soumises au plafond visé à l'al. 4 et à la fixation du supplément par le Conseil fédéral.

L'al. 3 règle la seconde étape de l'augmentation (2 TWh d'ici 2040), qui prend en compte d'autres technologies. Le DETEC décidera si et quand cette seconde phase débutera, sans doute au plus tard en 2030. La phase 1 (force hydraulique) et la phase 2 (autres technologies) doivent le cas échéant pouvoir coïncider pendant un certain temps. Le fait que la phase 2 soit déjà en cours n'exclut pas en soi qu'une contribution soit versée à une centrale hydroélectrique à accumulation (phase 1), d'autant moins surtout s'il s'agit de demandes pendantes. Les installations ou les projets de la phase 2 sont définis au moyen de mises aux enchères ouvertes à toute technologie et ont des durées de réalisation plus courtes que la force hydraulique. Dans un premier temps, on peut penser aux centrales à gaz à cycle combiné. Les critères visés à l'al. 1 sont aussi applicables pour toutes les installations déterminées par mise aux enchères. Le critère central de la neutralité climatique implique une production globalement neutre sur le plan climatique, exempte notamment de CO2. Il est également rempli en cas d'utilisation de procédés de captage et stockage du carbone ou en cas de recours à des gaz renouvelables (biogaz, hydrogène d'origine renouvelable, méthane d'origine renouvelable). La compensation du CO2 ou les technologies d'émission négative sont d'autres possibilités envisageables. Ce qui est possible d'après les standards de la loi sur le CO2 en vigueur à un moment donné doit être envisageable. Des critères en plus de
ceux visés à l'al. 1, en particulier des critères de qualification ou de site, seront peut-être nécessaires. On pourrait imaginer une procédure en deux étapes. Les projets qui ne remplissent pas les critères visés à l'al. 1 ou ceux qui n'ont aucune chance d'aboutir ne seraient pas admis (préqualification). Les projets restants pourraient être admis dans la mise aux enchères et les critères supplémentaires affinés seraient pris en compte dans l'évaluation des offres. L'OFEN pourra définir en aval, dans le cadre de l'ordonnance, de tels critères, spécifiques aux enchères. Par ailleurs, il s'agira de déterminer les projets au prix le plus attractif, ce qui est caractéristique des mises aux enchères. Le but est de générer la plus grande production d'électricité hivernale possible avec l'argent investi. L'OFEN peut solliciter l'aide de tiers pour la réalisation des enchères. À la fin, il rend une décision sur la contribution d'investissement en même temps que l'adjudication. Cela ne veut pas dire que l'installation peut être construite. Il faut les autorisations nécessaires des autorités compétentes. Il n'est pas indispensable de disposer d'une autorisation de construire pour participer à la mise aux enchères, mais il est nécessaire de pouvoir démontrer la plausibilité d'une construction dans les délais (au regard de l'horizon 2040).

En vertu de l'al. 4, le supplément déjà prévu à l'art. 9 est activé, sous le nom de «supplément hiver», pour le nouvel instrument visé à l'art. 9bis. Il est versé dans le fonds alimenté par le supplément au sens de la LEne, sur un compte séparé. Le Conseil 92 / 154

FF 2021 1666

fédéral fixe le taux, jusqu'à un plafond de 0,2 ct./kWh. L'expression «en fonction des besoins» englobe aussi une certaine constitution de réserves, puisque l'augmentation ne commencera que plusieurs années après l'entrée en vigueur de l'art. 9bis et que plusieurs projets peuvent être d'actualité en même temps. Le Conseil fédéral doit donc pouvoir lisser la perception des moyens et fixer le supplément à zéro si le besoin n'est plus avéré. Si, à la fin du mécanisme visé à l'art. 9bis, il devait rester un montant important sur le compte du fonds, ces moyens devraient être remboursés de manière appropriée. Les modalités prévues dans la LEne s'appliquent par analogie au supplément hiver. En ce qui concerne la perception, cela implique que l'organe d'exécution perçoit le supplément et, en ce qui concerne la répercussion des coûts, que le supplément peut être facturé aux clients finaux. Il n'y aura pas de remboursement aux entreprises grandes consommatrices d'énergie. Le supplément hiver devra être mentionné séparément sur les factures (art. 12).

En ce qui concerne les futures dispositions d'exécution du Conseil fédéral, l'al. 5 énumère spécialement certains aspects. Il est ainsi envisageable aussi bien pour la phase 1 (force hydraulique) que pour la phase 2 (mises aux enchères ouvertes aux différentes technologies) qu'il y ait des conséquences si des exploitants soumettent un projet sans réellement avoir l'intention de le réaliser ou si, après avoir soumis une demande, ils abandonnent le projet sans motifs valables ou pour des raisons indues. Comme c'est habituellement le cas dans les systèmes d'enchères, il doit y avoir une sanction financière (let. b), et la réglementation concernée pourrait même prévoir le dépôt d'une sûreté en conséquence. Pour le stockage de l'eau (let. a), on pourrait envisager dans des cas exceptionnels de rendre les connaissances résultant des travaux d'étude de projet accessibles à d'autres auteurs de projets potentiels. Cette solution pourrait notamment entrer en ligne de compte pour de nouvelles centrales sur de nouveaux sites; elle serait beaucoup plus compliquée et guère réalisable en cas d'agrandissements. La let. c prévoit enfin un remboursement auquel les exploitants doivent procéder s'ils réalisent par la suite des profits importants grâce à l'infrastructure soutenue. Il
s'agit d'un remboursement partiel et modéré. Une réglementation en matière de remboursement devrait notamment définir les périodes, d'une certaine durée, dont il faudrait tenir compte. Par conséquent, il peut être aussi nécessaire de prévoir une obligation de conservation des documents comptables plus longue que d'ordinaire.

Art. 9b, al. 2 En ce qui concerne le développement du réseau, le principe ORARE a été inscrit à l'art. 9b. Parmi les optimisations, il y a aussi l'utilisation de la flexibilité, qui doit être précisée. En vertu de ce principe, généralement un développement n'est souhaitable que si un réseau sûr, performant et efficace ne peut pas être atteint par le biais d'autres mesures. La flexibilité doit passer avant d'autres mesures si elle est plus efficace.

Art. 12

Information et facturation

L'al. 1 énumère toutes les obligations de publication des gestionnaires de réseau. Il va de soi que la nouvelle obligation de publication concernant les contributions aux coûts de réseau ne s'applique que si un gestionnaire de réseau perçoit de telles contributions. Elle doit permettre à une personne raccordée au réseau (p. ex. exploitant 93 / 154

FF 2021 1666

d'une station de recharge) d'évaluer les coûts correspondants avec le plus de précision possible. Le gestionnaire de réseau devra l'informer sur les bases de calcul appliquées chez lui et le montant escompté d'une contribution aux coûts de réseau (p. ex. différenciée en fonction du niveau de tension et de la puissance de raccordement).

Quant aux obligations d'information, le Conseil fédéral pourrait en outre obliger les entreprises d'approvisionnement en électricité, sur la base de l'art. 59, al. 1, let. a, LEne, à indiquer dans la facturation la consommation électrique moyenne de consommateurs finaux comparables (p. ex. même groupe de clients). Cela pourrait sensibiliser les consommateurs finaux ayant une consommation d'électricité relativement élevée et constituer une incitation supplémentaire à économiser l'électricité. La valeur moyenne à indiquer pourrait se référer au portefeuille de clients du fournisseur concerné ou du fournisseur de l'approvisionnement de base, ou à des valeurs pour l'ensemble de la Suisse.

L'al. 2 se réfère aussi bien aux fournisseurs de l'approvisionnement de base qu'aux fournisseurs d'électricité sur le libre marché.

La reformulation de l'actuel al. 2 (désormais al. 3) est principalement liée aux changements dans le domaine de la mesure.

Le contenu de l'ancien al. 3 est transféré dans le nouvel art. 13a.

L'al. 4 répond à une demande des consommateurs.

Art. 13, al. 3 Le traitement privilégié prévu par les dispositions actuelles lors de l'attribution de capacités de réseau pour la fourniture d'électricité aux consommateurs finaux dans l'approvisionnement de base (let. a et b) et pour la fourniture d'électricité provenant d'énergies renouvelables (let. c) n'est pas applicable en pratique pour des raisons techniques liées au système. Il n'est possible de privilégier certaines technologies de production que lors de l'injection dans le réseau (cf. p. ex. art. 15 LEne) et, par le système des groupes-bilan, au niveau de l'attribution des capacités du réseau de transport transfrontalier (cf. art. 17, al. 1 et 2, LApEl). Par contre, une attribution différenciée des capacités du réseau n'est pas possible à l'intérieur de la zone de réglage Suisse. L'al. 3 est donc abrogé puisqu'il s'est avéré dénué de substance dans la pratique.

Art. 13a

Processus de changement

Sur la base de l'al. 1, le Conseil fédéral peut prescrire aux acteurs de la branche le délai dans lequel un changement de fournisseur doit être traité. S'agissant des changements concernant l'approvisionnement de base et l'approvisionnement de remplacement, il doit notamment définir les délais et les échéances. En vertu de la let. a, il peut en outre assigner aux acteurs impliqués des tâches (en imposant p. ex. des obligations d'annoncer).

Il apparaît opportun de prévoir la possibilité d'intégrer et de quitter l'approvisionnement de base (let. b) une fois par an ­ judicieusement à la fin de l'année. Les petits consommateurs (consommation annuelle inférieure à 100 MWh) peuvent ainsi régulièrement changer de statut sans exercer sur les tarifs de l'approvisionnement de base 94 / 154

FF 2021 1666

une pression à la hausse disproportionnée en raison des difficultés à planifier. Des changements trop fréquents contraindraient le fournisseur de l'approvisionnement de base à acquérir de l'électricité à court terme et, par conséquent, à des prix élevés.

Concernant l'approvisionnement de remplacement (let. c), il apparaît judicieux que les consommateurs finaux puissent, après seulement un mois, opter soit pour le libre marché, soit pour l'approvisionnement de base. Le choix d'un délai aussi court que possible se justifie par le fait que l'approvisionnement de remplacement ne relève pas d'un régime tarifaire mais d'une surveillance des conditions abusives (cf. art. 22, al. 2, let. c).

En ce qui concerne les contrats de fourniture d'électricité conclus par les petits consommateurs sur le libre marché (let. d), le Conseil fédéral devra au moins prévoir qu'ils soient résiliables, en respectant un délai déterminé, pour la fin de l'année, sans quoi la possibilité de réintégrer l'approvisionnement de base au début de chaque année civile, comme cela est prévu, serait exclue. Il est en outre prévu que les petits consommateurs puissent résilier les contrats qu'ils ont conclus sur le libre marché dans tous les cas et sans frais supplémentaires, une fois la première année du contrat échue, pour n'importe quelle échéance moyennant un préavis de deux mois. Les clients sont ainsi mieux protégés contre des conditions commerciales durablement défavorables, sur le libre marché également.

Le déroulement des processus de changement génère des coûts pour les gestionnaires d'un réseau de distribution. Bien que ces coûts soient en principe attribuables à un consommateur final déterminé, l'al. 2 interdit la facturation individuelle de ces coûts.

Cette clause vise à empêcher que l'accès au marché soit entravé par l'instauration de frais de changement. Les gestionnaires d'un réseau de distribution sont concernés aussi bien dans leur fonction de gestionnaire de réseau que dans celle de fournisseur de l'approvisionnement de base. Les changements de fournisseurs sur le libre marché ou le passage entre le marché et le monopole (approvisionnement de base et approvisionnement de remplacement) peuvent leur occasionner tant des coûts de réseau que des coûts d'énergie. Les premiers sont comptabilisables dans les tarifs d'utilisation
du réseau, tandis que les derniers le sont dans les tarifs de l'approvisionnement de base ou dans les conditions de l'approvisionnement de remplacement. À l'inverse, une entreprise d'approvisionnement en électricité ne peut pas inclure dans les tarifs régulés les charges qui proviennent des activités sur le libre marché (p. ex. mesures visant à attirer de nouveaux clients) en raison de l'interdiction des subventions croisées (art. 10, al. 1).

Art. 14, titre et al. 1, 3, partie introductive et let. a et f, et 3 bis L'al. 1 est complété par une deuxième phrase, qui aborde la gestion des différences de couverture. Ce terme désigne la différence entre la rémunération globalement perçue pour l'utilisation du réseau et le total des coûts de réseau qui est imputable au gestionnaire de réseau au cours de l'année tarifaire concernée. En cas de différence de couverture positive ­ dans ce cas, les recettes sont supérieures aux coûts imputables ­ il y a un excédent de couverture. Dans le cas contraire, on parle de couverture insuffisante. Comme il s'agit d'un aspect central des prescriptions concernant les tarifs d'utilisation du réseau et les coûts de réseau imputables, une réglementation au niveau 95 / 154

FF 2021 1666

de la loi semble opportune (voir à ce sujet l'art. 15, al. 3bis, 1re phrase). La période pendant laquelle les différences de couverture doivent être compensées peut être précisée au niveau de l'ordonnance. D'après la pratique actuelle de l'ElCom, la compensation doit être généralement réglée dans les trois ans. Si des couvertures insuffisantes ne sont pas comblées dans les délais impartis, elles sont perdues et le gestionnaire de réseau doit renoncer aux recettes correspondantes. Si, à l'inverse, des excédents de couverture ne sont pas dissous dans les délais, l'ElCom peut décider de réduire le tarif d'utilisation du réseau dans la mesure correspondante (art. 22, al. 2, let. b, 3e phrase).

À l'instar des tarifs de l'approvisionnement de base, les tarifs d'utilisation du réseau sont aussi fixés pour une année. Ce principe découle des anciens art. 6 et 7. Afin de donner une structure plus cohérente à la loi, les aspects concernant le réseau sont désormais traités séparément et cette clause figure désormais à l'al. 3 (phrase introductive). Comme les tarifs d'utilisation du réseau ne doivent plus présenter des structures «simples» mais seulement des structures «compréhensibles» à la suite de la modification de la let. a, il y a une plus grande marge de manoeuvre pour adopter une conception dynamique des tarifs, notamment du point de vue des délais. La nouvelle let. f concrétise le principe de causalité dans la mesure où les consommateurs finaux avec consommation propre et les regroupements dans le cadre de la consommation propre ne doivent pas être désavantagés dans la tarification. C'est surtout important pour la structure des différentes composantes du tarif (composantes du travail, de la puissance et de base), d'autant plus qu'elles peuvent être fixées en principe différemment pour les différents groupes de clients. Le Conseil fédéral devrait édicter des dispositions d'exécution concrètes pour le niveau de réseau 7, comme c'est déjà le cas aujourd'hui.

Il pourra s'appuyer sur les propositions contenues à ce sujet dans le projet soumis à consultation (cf. ch. 3.1.10). À noter, s'agissant de ces dispositions tarifaires générales, que la let. c concerne uniquement les tarifs des réseaux de distribution.

La légère correction apportée à la formulation de l'al. 3bis (les tarifs d'utilisation du réseau
au lieu de la rémunération pour l'utilisation du réseau) souligne que les coûts de réseau imputables sont en principe répercutés par le biais des tarifs en sus de la rémunération pour l'utilisation du réseau. Aux fins de respecter le principe de causalité, les coûts de réseau directement imputables au sens de l'al. 3ter à un utilisateur du réseau peuvent aussi être facturés individuellement pour autant qu'il existe une base juridique correspondante (cf. message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité50).

Art. 15, al. 1, 2, let. a et d, 3, let. b, 3bis, partie introductive et let. a et d, et 3ter Les modifications apportées aux al. 1 et 3 soulignent que les coûts d'exploitation imputables ne comportent pas de composante de bénéfice. Seuls les coûts de capital imputables contiennent une telle composante, puisque le WACC est fixé de manière à obtenir un bénéfice d'exploitation adéquat. Les modifications visées ne changent donc rien à la pratique actuelle.

50

FF 2005 1493, 1539

96 / 154

FF 2021 1666

Deux postes ont été ajoutés à l'al. 2 afin de préciser que les coûts liés à la réserve d'énergie et à l'utilisation de la flexibilité sont compris dans la rémunération pour l'utilisation du réseau. Il va de soi que les critères cités à l'al. 1 sont applicables pour l'imputabilité. Pour la flexibilité, seuls les coûts liés à la flexibilité au service du réseau sont enregistrés.

Al. 3bis: sur la base de la nouvelle 1re phrase, le Conseil fédéral peut concrétiser la réglementation concernant la gestion des différences de couverture (art. 14, al. 1, 2e phrase; cf. aussi le commentaire de l'art. 14, al. 1). Pour éviter la constitution systématique, inefficace d'un point de vue économique, de différences de couverture négatives, il pourrait par exemple prévoir que les situations de sous-couverture ­ lorsque la rémunération pour l'utilisation du réseau encaissée au cours des périodes tarifaires précédentes est inférieure aux coûts de réseau imputables ­ ne soient pas rémunérées avec le taux d'intérêt WACC. La modification de la let. a est liée aux nouveautés dans les systèmes de mesure. En raison des nouvelles libertés de choix, la possibilité de déclarer imputables certains coûts de sensibilisation visant à réduire la consommation disparaît (cette réglementation est un élément de l'actuelle let. a).

Al. 3ter: la réglementation prévue jusqu'ici aux al. 1 et 3bis, let. d, est déplacée dans cet alinéa pour des questions de clarté.

Concernant les coûts d'exploitation, il est envisagé de préciser dans l'OApEl que si une autre unité de l'entreprise ou du groupe de sociétés fournit des prestations à l'exploitation du réseau, ces prestations peuvent être facturées au maximum à hauteur des coûts qui auraient été occasionnés si les prestations avaient été fournies par l'exploitation du réseau. Si les coûts facturés en interne sont supérieurs au prix du marché, les prix du marché tout au plus sont imputables.

Art. 15a

Coûts spécifiques au réseau de transport

L'al. 1 détermine, pour deux postes de coûts en lien direct avec la garantie de la sécurité d'approvisionnement à l'échelle nationale, qu'ils sont considérés comme des coûts d'exploitation imputables du réseau de transport. Cela permet de répercuter les coûts sur l'ensemble des consommateurs finaux à l'échelle nationale, ce qui est conforme à l'objectif de ces activités. La réglementation est subsidiaire et ne s'applique que si la couverture des coûts n'est pas envisageable par des instruments de financement prévus dans une loi spéciale (en dehors de la LApEl; voir p. ex. l'art. 38 LAP).

Sont considérées comme des mesures nécessaires au maintien de l'approvisionnement en électricité au sens de la LAP (let. b) les préparatifs visés à l'art. 5 LAP, les mesures d'intervention économique visées aux art. 31 et 32 LAP et les activités en lien avec le suivi de la situation en matière d'approvisionnement (art. 62 LAP). Lorsque l'approvisionnement n'est pas perturbé, les organes de l'approvisionnement économique du pays préparent, en collaboration avec l'économie électrique, l'exécution de directives de gestion concernant le domaine de l'électricité et, à cet effet, ils prennent les mesures techniques et organisationnelles requises. Le Conseil fédéral peut aussi confier des tâches publiques à des organisations de l'économie électrique, par exemple l'observation du marché ou des activités d'exécution dans le cadre des préparatifs et des mesures d'intervention de l'approvisionnement économique du pays (art. 60 LAP).

Les organisations des milieux économiques sont en général des associations de droit 97 / 154

FF 2021 1666

privé ou des corporations de droit public. En cas d'adéquation, il doit aussi être possible de confier des tâches à des corporations de droit privé qui sont dirigées par les pouvoirs publics, par exemple la société nationale responsable du réseau de transport de l'électricité. Seuls sont saisis les coûts directement occasionnés aux gestionnaires de réseau, aux producteurs et aux exploitants de stockage par la préparation et la mise en oeuvre de telles mesures. Les consommateurs finaux ne sont pas inclus dans le champ d'application personnel de la disposition, car ils ne sont impliqués ni dans la préparation, ni dans la réalisation des mesures au sens de la LAP. Ils n'ont donc pas de tels coûts directs. D'un point de vue matériel, les éventuels coûts induits pour les entreprises concernées par les mesures d'intervention économique ne sont pas pris en compte. On peut par exemple penser à des préjudices financiers pour les consommateurs finaux à la suite de pertes de production. L'indemnisation de l'Association des entreprises électriques suisses (AES) pour ses tâches visées à l'art. 1, al. 1, de l'ordonnance du 10 mai 2017 sur l'organisation de la branche électricité pour garantir l'approvisionnement économique du pays (OOBE)51 continue d'être fixée par le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR; art. 4, al. 1, OOBE) et n'est pas socialisée par le biais des coûts d'exploitation du réseau de transport.

Les mesures au sens de la LAP doivent enfin être nécessaires pour que leurs coûts soient considérés comme des coûts d'exploitation imputables du réseau de transport.

Cette condition vise non seulement le besoin, mais aussi le montant des coûts. En vertu de l'al. 2, l'OFAE examine au préalable la nécessité des mesures, ce n'est donc pas un risque qui doit être supporté par les gestionnaires de réseau, les producteurs et les exploitants de stockage impliqués. À l'inverse, cela signifie que ce n'est évidemment pas aux entreprises de l'économie électrique de préparer d'elles-mêmes des mesures au sens de la LAP. L'OFAE doit également examiner au préalable l'immédiateté des coûts esquissée ainsi que la question de savoir si l'art. 15a est applicable, c'est-àdire si aucun autre instrument de financement n'est disponible. Une liste des mesures prévues, y compris une estimation
des coûts, établie par le domaine Énergie de l'Approvisionnement économique du pays (AEP), peut par exemple servir de base à l'OFAE. Comme pour les autres coûts de réseau, l'examen des coûts proprement dit se fait ex post. À la différence toutefois que l'OFAE est compétent pour les coûts au sens de la LAP et non pas l'ElCom. Comme les conditions ont déjà été examinées au préalable, il s'agit en fin de compte d'un examen des coûts limité, qui devrait se concentrer sur les dépassements de coûts sensibles et les erreurs comptables.

En vertu de l'al. 3, le Conseil fédéral édicte notamment des dispositions d'exécution sur l'attestation des coûts attribués au réseau de transport en application de cet article.

Cela concerne non seulement l'attestation à l'égard de l'AEP ou de l'OFAE, mais aussi une éventuelle obligation de publier les coûts socialisés par le biais du réseau de transport.

51

RS 531.35

98 / 154

FF 2021 1666

Art. 15abis, titre et al. 1 La disposition prévue à l'al. 1, let. a, correspond au droit en vigueur. La nouvelle let. b transpose au niveau de la loi une règle fixée jusqu'ici au niveau de l'ordonnance (cf.

art. 15, al. 1, let. a, OApEl).

Art. 17a

Responsabilité et liberté de choix

L'al. 1 règle la compétence fondamentale des gestionnaires de réseau. Leur cahier des charges inclut en tout cas la mesure d'exploitation ainsi que la désignation et la gestion des points de mesure. En ce qui concerne l'exploitation d'une station de mesure ou les prestations de mesure, leur compétence disparaît dès lors qu'un client qui y a droit fait usage de la liberté de choix que lui donne la loi (cf. aussi l'al. 4, 2e phrase).

Comme il s'agit d'une tâche des gestionnaires de réseau, ils sont tenus aux dispositions en matière de séparation des activités dans l'exercice de cette compétence de base. Ils ne peuvent notamment pas utiliser les informations économiques sensibles obtenues dans ce cadre pour des activités sur le libre marché (art. 10, al. 2).

L'al. 2 confère à certains clients de mesure le droit de mandater un exploitant de station de mesure et/ou un prestataire de mesure de leur choix. La liberté de choix revient dans un premier temps à tous les producteurs d'électricité et exploitants de stockage.

Les consommateurs finaux ne peuvent exercer cette liberté de choix que si l'une des conditions légales est remplie (let. a à c).

Les petits consommateurs finaux n'ont accès au libre marché des mesures par le biais d'une offre de flexibilité (let. c, ch. 1) que si l'offre n'est pas au service du réseau et n'est donc pas destinée au gestionnaire de réseau de distribution (cf. art. 17bbis, al. 2).

Les chauffe-eau, qui sont mis en service et hors service par le gestionnaire d'un réseau de distribution dans le cadre d'une télécommande centralisée, sont un exemple typique d'utilisation de la flexibilité au service du réseau du côté du consommateur. En revanche, les offres pour les fournisseurs de services-système, qui regroupent le potentiel de flexibilité de plusieurs consommateurs finaux (pooling) afin de le proposer à Swissgrid comme réglage tertiaire, par exemple, donnent accès au libre marché. Les pompes à chaleur, les chauffe-eau combinés/accumulateurs de chaleur ou les stations de recharge pour les véhicules électriques entrent notamment en ligne de compte comme ressources en matière de flexibilité. Il est judicieux que les petits consommateurs finaux puissent aussi choisir librement leur fournisseur dans ces cas, car le prestataire externe a parfois besoin que les mêmes appareils de
mesure soient utilisés par tous ses clients (parc de compteurs homogène), notamment pour optimiser les coûts (d'acquisition) et l'exploitation des appareils de mesure.

Les prestations qu'un consommateur final peut solliciter pour réduire sa consommation d'énergie et qui lui donnent accès au libre marché des mesures (ch. 2) sont de nature diverse. On peut penser aux applications pour les maisons intelligentes (p. ex.

automatisation du bâtiment pour les installations photovoltaïques, l'électromobilité et les pompes à chaleur). L'accès aux données de mesure peut être notamment nécessaire à cet égard pour relever l'impact de ces installations sur la consommation d'électricité ou pour évaluer l'opportunité de prendre d'autres mesures. Des prestations énergétiques dans le cadre des mesures d'amélioration de l'efficacité énergétique entrent également en ligne de compte.

99 / 154

FF 2021 1666

En ce qui concerne l'exercice de la liberté de choix, il se peut qu'en cas de location, des exigences relevant du droit du bail doivent être observées dans les rapports entre le locataire, en tant que consommateur final bénéficiant de la liberté de choix, et le propriétaire. Un locataire n'a par exemple pas simplement le droit d'accéder au contrôle d'une pompe à chaleur pour proposer de la flexibilité du côté de la consommation. Néanmoins, en raison de la diversité des situations, il n'est pas possible d'établir une règle générale pour de telles questions relevant du droit du bail.

En principe, la liberté de choix d'un consommateur final n'existe que pour les sites de consommation où l'une des conditions légales est remplie. L'al. 3 va à l'encontre de ce principe avec une réglementation spéciale pour les entreprises multisites. Il s'agit d'entreprises avec plusieurs sites de consommation dont la consommation annuelle globale atteint au moins 100 MWh. Ces entreprises multisites ont directement droit au libre choix de l'exploitant de stations de mesure et du prestataire de mesure sur tous les sites de consommation de l'entreprise. C'est selon des critères économiques qu'il convient d'évaluer quels sites de consommation sont rattachés à l'entreprise. Si sa consommation annuelle n'atteint pas le seuil fixé, la réalisation des conditions visées à l'al. 2 doit être évaluée séparément pour chaque site de consommation.

L'al. 4 précise que la liberté de choix est étendue. La liberté de choix d'un producteur d'électricité ou d'un consommateur final avec consommation propre n'est ainsi pas limitée à la mesure de la production d'électricité nette; elle s'étend aussi à la mesure au point de raccordement au réseau (1re phrase). Tant que les clients de mesure éligibles n'exercent pas leur liberté de choix, le gestionnaire du réseau de distribution local reste compétent (2e phrase).

Sur la base de l'al. 5, le Conseil fédéral est autorisé à régler les processus de changement (en particulier les obligations de communication, délais et échéances). Dans le même temps, il peut définir les modalités de résiliation des contrats du libre marché.

Pour dynamiser le changement de fournisseurs, il semble judicieux que les clients de mesure puissent résilier leurs contrats avec les exploitants de stations de mesure et les prestataires de mesure pour la fin de chaque mois en respectant un délai de résiliation de trois mois.

Art. 17abis

Rémunération et tarifs de mesure

En vertu du droit en vigueur, les gestionnaires de réseau répercutent tous les coûts qui leur incombent dans le cadre de l'exécution de leurs tâches légales dans le domaine des systèmes de mesure sur l'ensemble des consommateurs finaux de leur zone de desserte, au moyen de la rémunération pour l'utilisation du réseau. Dans un marché ouvert, qui permet aux clients, même s'il ne s'agit que des plus gros, de choisir librement leur fournisseur, une telle imputation des coûts n'est pas appropriée. Elle a pour conséquence que les consommateurs finaux qui opèrent sur le libre marché des exploitants de stations de mesure doivent assumer leurs propres coûts de mesure mais aussi ­ au moyen de la rémunération pour l'utilisation du réseau ­ ceux d'autres clients. Les producteurs d'électricité qui, en application du principe du point de prélèvement (art. 14, al. 2), ne versent pas de rémunération pour l'utilisation du réseau, ont en outre peu de raisons d'opter pour un autre prestataire de mesure.

100 / 154

FF 2021 1666

L'al. 1 veille à une imputation des coûts qui tient compte du principe de causalité: désormais, les gestionnaires de réseau doivent fixer des tarifs de mesure basés sur les coûts pour les coûts générés dans le cadre de leur compétence légale de base. La période tarifaire sera définie au niveau de l'ordonnance. Il devrait (aussi) s'agir de tarifs pour une durée d'un an. Ces tarifs permettent aux gestionnaires de réseau de calculer la rémunération due pour les prestations de mesure sur la base des coûts imputables.

Les tarifs de mesure doivent se conformer au principe de causalité pour l'imputation des coûts et peuvent ou doivent être définis différemment selon le type de prestation et l'instrument de mesure. Les éventuels effets de synergie (installation, transmission des données, etc.) peuvent ainsi être pris en compte chez les clients disposant de plusieurs points de mesure.

Les tarifs de mesure régulés ne sont pas uniquement applicables dans le domaine soumis au monopole légal des gestionnaires d'un réseau de distribution. Ils s'appliquent également lorsque le client de mesure n'exerce pas la liberté de choix prévue par la loi. Cette réglementation apporte la clarté nécessaire dans la détermination des coûts de mesure imputables. Tant que le client de mesure ne fait pas de choix actif, les coûts qui peuvent lui être attribués sont répercutés sur les coûts imputables et peuvent être pris en compte en conséquence dans la fixation des tarifs de mesure. La différenciation entre les clients de mesure est par ailleurs pertinente pour les entreprises d'approvisionnement en électricité exploitant un réseau de distribution au regard du principe du traitement confidentiel des informations économiques sensibles. Pour des raisons de séparation des activités, il peut être nécessaire, en cas d'offres combinées sur le marché, de les présenter séparément au client de mesure (p. ex. couplage d'offres dans les domaines de la flexibilité et de la mesure).

Al. 2 à 4: le Conseil fédéral détermine le taux de rendement des fonds propres (WACC) approprié pour les investissements. L'imputation des coûts est vérifiée par l'ElCom (art. 22, al. 2, let. b). Si des différences de couverture (positives ou négatives) apparaissent, elles doivent être compensées dans les périodes tarifaires suivantes, à l'instar des coûts de
réseau. Avec la compétence légale de fixer des plafonds pour les tarifs (al. 4), le Conseil fédéral peut aider l'ElCom à mettre un terme à des conditions inappropriées dans le domaine soumis au monopole des gestionnaires d'un réseau de distribution. À noter que les coûts liés à la mesure d'exploitation ne sont pas concernés par ce processus; ceux-ci ne sont pas pris en compte dans les tarifs de mesure, mais dans le calcul des tarifs d'utilisation du réseau comme jusqu'ici.

Art. 17ater

Exigences applicables à l'exploitation des stations de mesure et aux prestations de mesure

L'al. 1 prévoit que des modèles de contrat uniformes sont élaborés à l'échelle nationale pour les rapports de droit entre le gestionnaire de réseau et l'exploitant de stations de mesure, d'une part, et entre le gestionnaire de réseau et le prestataire de mesure, d'autre part. L'obligation d'une consultation préalable de l'ElCom et des milieux intéressés permet de garantir qu'ils puissent influer à temps sur la conception des normes applicables aux contrats. Il va de soi que l'ElCom peut en principe, sur la base de l'art. 22, al. 1, LApEl, prendre des mesures correctives à tout moment, même a posteriori.

101 / 154

FF 2021 1666

Le Conseil fédéral peut définir certaines exigences sur le contenu de ces contrats et désigner des tâches qu'implique l'activité d'exploitant de stations de mesure ou de prestataire de mesure (al. 2). Par exemple, si le client de mesure a mandaté des fournisseurs différents, l'exploitant de stations de mesure doit donner accès aux compteurs d'électricité au prestataire de mesure. Cet accès doit aussi être accordé au gestionnaire d'un réseau de distribution s'il en a besoin dans le cadre de l'obligation d'exploiter le réseau ou de la mesure d'exploitation. Aujourd'hui déjà, une autorisation accordée par l'Inspection fédérale des installations à courant fort (ESTI) est nécessaire pour procéder à l'exploitation de stations de mesure en vertu de l'art. 6 OIBT.

Art. 17aquater, al. 1 et 2, 3e phrase La révision de la LApEl effectuée lors de la révision totale de la LEne a habilité le Conseil fédéral à donner aux gestionnaires d'un réseau de distribution des directives sur l'introduction des systèmes de mesure intelligents. À l'avenir, il pourra en faire de même pour les exploitants de stations de mesure actifs sur le libre marché (al. 2, 3e phrase). Pour poursuivre de manière fluide le déploiement des compteurs intelligents, il semble opportun que ces acteurs du libre marché puissent uniquement utiliser les compteurs d'électricité électroniques correspondants. La modification d'ordre purement linguistique à l'al. 1 ne concerne que la version française. En raison des nouvelles dispositions relatives aux systèmes de mesure (art. 17a, 17abis et 17ater), la disposition actuelle de l'art. 17a se trouve désormais à l'art. 17aquater.

Art. 17b, al. 2, 1re phrase, et 3, 1re phrase Dans un souci d'harmonisation du texte de loi dans les différentes langues, une modification d'ordre rédactionnel est apportée dans le texte français uniquement, aux al. 2 et 3.

Art. 17bbis

Utilisation de la flexibilité

La nouvelle disposition régissant la flexibilité se limite à un principe de base central (al. 1) et à quelques exigences concernant l'utilisation au service du réseau (al. 2 à 5), qui est un aspect important de la flexibilité; les autres aspects (p. ex. l'utilisation au service du marché) ne sont pas réglés et sont soumis aux lois du marché. La flexibilité joue également un rôle dans la planification du réseau, ce qui est précisé à l'art. 9b.

L'al. 1 établit, comme principale règle de base, à qui la flexibilité «appartient» en attribuant cette propriété aux producteurs, aux consommateurs finaux et aux exploitants de stockage. Ce droit permet de déduire notamment que personne ne peut faire usage d'une flexibilité contre la volonté de ces détenteurs. L'al. 3 constitue une exception à cet égard: il oblige les détenteurs de flexibilité à tolérer certaines utilisations «garanties», par exemple en cas d'urgence. La règle de base s'applique à tous les types de flexibilité, notamment donc, en plus de la flexibilité au service du réseau nouvellement réglée (p. ex. gestion des congestions), aussi à la flexibilité au service du marché ou du système (p. ex. maintien de la fréquence). S'agissant de ces domaines, la loi prévoit seulement, sans les nommer explicitement, que les tiers qui veulent utiliser de la flexibilité concluent des contrats correspondants. Il est bien entendu possible de constituer des regroupements (pooling) pour de tels contrats. Si Swissgrid (en tant que 102 / 154

FF 2021 1666

tiers) entend utiliser de la flexibilité au service du réseau, elle peut évidemment en contracter aussi. L'art. 17bbis ne comprend donc aucune réglementation spéciale sur le réseau de transport ou sur Swissgrid. À l'exception des al. 3 et 4, aucune disposition n'établit de hiérarchie entre les différentes flexibilités. Des solutions en cas d'intérêts contradictoires, par exemple en cas de conflit entre différentes utilisations au service du réseau ou entre les gestionnaires d'un réseau de distribution et Swissgrid, doivent voir le jour grâce à la coordination de ces acteurs et à des conventions en ce sens, donc avec une orientation vers le marché dans la mesure du possible.

L'al. 2 vise le contrat sur l'utilisation au service du réseau et prévoit deux restrictions importantes applicables aux gestionnaires d'un réseau de distribution: ils ont uniquement le droit à l'utilisation au service du réseau, et ce uniquement dans le cadre de leur propre zone de desserte et non dans d'autres zones. Tout usage autre qu'une utilisation au service du réseau n'est donc pas possible et ne serait pas compatible avec le concept de la séparation des activités (art. 10). Lorsqu'il existe déjà un contrat (contrat d'utilisation du réseau) entre le gestionnaire d'un réseau de distribution et le producteur ou le consommateur final, il est assez logique d'intégrer dans ce contrat la convention sur la flexibilité. La formulation de la loi n'implique aucune obligation de tels contrats pour les gestionnaires de réseau. L'obligation de définir des conditions uniformes au sein des différentes configurations se rapporte déjà à la phase de l'offre.

Quant aux conditions applicables à chaque configuration, il s'agit surtout d'un prix uniforme qui reflète la valeur de marché. Se fonder uniquement sur le prix spot n'est cependant pas «adéquat» dans tous les cas; un supplément peut par exemple être opportun pour la rémunération de la plus-value écologique (garantie d'origine) pour les petites installations photovoltaïques. En ce qui concerne les configurations servant de base pour la différenciation, on peut penser à une distinction principale entre la flexibilité liée à la production et la flexibilité liée à la consommation, et à l'attribution des exploitants de stockage à cette dernière catégorie. Mais cela ne doit pas exclure la
possibilité que les exploitants de stockage injectent de l'énergie et proposent également la flexibilité correspondante au service du réseau. En vertu de l'al. 2, il n'est pas non plus exclu, bien au contraire, qu'en cas de flexibilité particulièrement utile au réseau, des contrats individualisés puissent être conclus. Une telle utilité au service du réseau ne s'entend pas comme une configuration séparée. C'est pourquoi, dans ce cas de figure, l'uniformité n'est pas requise et les conditions peuvent être conclues individuellement. Un site de consommation (p. ex. un grand entrepôt frigorifique) peut être particulièrement utile au réseau si sa consommation d'électricité est comparativement si élevée que sa contribution à la flexibilité est déterminante. Conformément au principe de subsidiarité, il appartient dans un premier temps à la branche d'élaborer des solutions adéquates. Si cela ne se fait pas dans des délais raisonnables, le Conseil fédéral pourrait prévoir les catégorisations nécessaires par voie d'ordonnance. Dans les contrats, il est nécessaire de préciser les utilisations de la flexibilité et les accès qui sont autorisés, les conditions, les moyens de mise en oeuvre de l'accès (applications intelligentes, p. ex.). Des prescriptions existent déjà s'agissant des moyens de mise en oeuvre, à savoir les systèmes de commande et de réglage intelligents. L'art. 17b, al. 3, instaure l'exigence du consentement (opt-in) qui s'applique aussi bien aux consommateurs finaux qu'aux producteurs. S'il s'avère nécessaire, pour utiliser la flexibilité, de recourir à des applications intelligentes de ce type, ce qui est le plus souvent le cas,

103 / 154

FF 2021 1666

le consentement est une condition préalable à leur utilisation. Un consentement explicite est requis au moyen d'un accord individuel. Les clauses dans les conditions générales qui permettent d'exclure la règle du consentement ne sont pas autorisées et sont sans effet. Si un détenteur de flexibilité refuse de donner son consentement, il n'est pas non plus disposé à conclure un contrat d'utilisation de la flexibilité avec le gestionnaire d'un réseau de distribution. Pour la phase subséquente à la conclusion des contrats, c'est-à-dire pour leur application dans la pratique, l'al. 2 prévoit enfin une utilisation «non discriminatoire». En plus de la rémunération uniforme, cela implique que les gestionnaires de réseau doivent utiliser la flexibilité de manière aussi équilibrée que possible entre leurs partenaires de flexibilité, sauf si les détenteurs de flexibilité ne tiennent pas du tout à un tel équilibre ou si des flexibilités régulièrement réparties ne sont pas en mesure de résoudre concrètement le problème. Les coûts de l'utilisation de la flexibilité sont en principe imputables en tant que coûts de réseau (cf. les commentaires de l'art. 15, al. 2, let. d), selon les règles générales d'imputabilité au sens de l'art. 15. Ils ne sont donc pas imputables sans limites. Si les rétributions peuvent être «adéquates» conformément à l'art. 17bbis, elles ne doivent pas forcement être entièrement imputables.

Al. 3 et 4: dans un certain nombre de situations bien définies, les gestionnaires d'un réseau de distribution bénéficient d'un accès garanti à la flexibilité, qui prime sur les éventuels droits de tiers. Même l'«optimisation individuelle» par le détenteur de la flexibilité doit passer au second plan. Les accès garantis sont à la disposition des seuls gestionnaires d'un réseau de distribution locaux («dans leur zone de desserte»). Cette disposition est en conflit avec le principe du consentement nécessaire pour l'utilisation d'un système de commande et de réglage intelligent (art. 17b, al. 3). La décision prise est défavorable aux détenteurs de flexibilité. Un cas d'accès connu à la flexibilité liée à la production réside dans l'ajustement de l'injection, qui consiste à empêcher l'injection dans le réseau (let. a). Les gestionnaires de réseau doivent pouvoir en disposer sans devoir négocier individuellement
avec chaque producteur. Cependant, le droit d'ajustement n'est pas sans limites, il ne concerne qu'une part déterminée de l'injection. Le Conseil fédéral fixera cette part, probablement inférieure à 10 %, en fonction de la technologie de production; il est question ici d'énergie et non de puissance. Les parties peuvent, quant à elles, convenir contractuellement d'une valeur plus élevée.

La rémunération doit en outre être «adéquate», une notion que le Conseil fédéral peut préciser si cela s'avère judicieux et nécessaire. Une rémunération est en général «adéquate» si elle correspond aux prix du marché ou ­ en dehors du marché ­ si elle est usuelle; en cas d'ajustement (let. a), le manque à gagner du producteur peut être pris en compte. Dans l'idéal, les parties conviennent de la rétribution. Mais ce n'est pas indispensable, de même pour les autres aspects de l'accès, car ces utilisations sont garanties aux gestionnaires de réseau, même contre la volonté des détenteurs de flexibilité.

Al. 5: le potentiel pour des dispositions au niveau de l'OApEl est relativement important. Le Conseil fédéral décidera, le moment venu, avec quelle intensité il entend réglementer, le besoin pouvant changer avec le temps. D'une part, il précisera les notions laissés ouvertes dans la loi ou concrétisera les modalités des principes (p. ex.

cercle de détenteurs). Il pourra par exemple préciser que les gestionnaires d'un réseau de distribution sont tenus de toujours proposer au moins un produit d'utilisation du réseau sans utilisation de la flexibilité ­ en conséquence du droit des détenteurs de 104 / 154

FF 2021 1666

flexibilité à déterminer eux-mêmes s'ils entendent permettre à des tiers d'utiliser leur flexibilité. D'autre part, le Conseil fédéral peut fixer des règles sur la base de délégations explicites. Pour une partie des aspects visés à l'al. 5, le Conseil fédéral doit édicter des prescriptions et, pour une autre partie, de telles prescriptions sont à sa discrétion (disposition potestative). En ce qui concerne les différents points, les obligations de transparence et de publication imposées aux gestionnaires d'un réseau de distribution visent surtout à ce que les détenteurs de flexibilité, compte tenu de leur déficit d'information, puissent savoir, dans les grandes lignes, ce qui se passe en termes de flexibilité de manière générale. Il se peut que seules des informations relativement générales soient demandées dans un premier temps (transparence), alors que des renseignements plus détaillés seront exigés ultérieurement (publication). Les prix que paient les gestionnaires de réseau pour l'utilisation de la flexibilité au service du réseau peuvent être inclus dans les tarifs d'utilisation du réseau, lorsque de tels tarifs existent (un tarif pour l'utilisation avec flexibilité et un tarif pour l'utilisation sans flexibilité). On peut envisager par exemple, à titre de disposition de protection en faveur des détenteurs de flexibilité (let. a), que certaines clauses dans les conditions générales pénalisant trop fortement les détenteurs de flexibilité soient interdites. L'OApEl ne doit pas contenir de disposition relative à la rétribution, sauf le cas échéant pour les utilisations garanties. Il appartient malgré tout à l'ElCom d'intervenir en cas d'abus (art. 22). Ce filet de sécurité est prévu même s'il s'agit ici d'un domaine «non régulé»; celui-ci a toutefois un rapport étroit avec les tarifs de réseau régulés et il existe un risque d'abus significatif en raison des structures du marché. Une standardisation des produits relevant de la flexibilité (let. b) peut être utile pour rendre la flexibilité mieux commercialisable. L'al. 5 aborde ensuite la situation où les gestionnaires d'un réseau de distribution évincent, grâce à leur position de force et à la possibilité de proposer des rémunérations assez attractives, d'autres utilisateurs de flexibilité dont les utilisations de flexibilité (let. c) sont
pertinentes. Si la formation de tels produits et marchés est empêchée, le Conseil fédéral doit pouvoir intervenir en édictant des prescriptions, en s'imposant toutefois la retenue voulue. La let. d élargit le champ au-delà de la seule flexibilité au service du réseau. Il peut ainsi apparaître nécessaire de fixer certaines lignes directrices également pour d'autres flexibilités qui ne sont pas au service du réseau, par exemple si une pratique qui s'installe mène à ce que les utilisations au service du réseau soient désavantagées au point d'influencer négativement le système. Songeons par exemple au fait que certaines utilisations de la flexibilité ont pour effet de requérir d'importantes quantités d'énergie d'ajustement au niveau du réseau ou du bilan. Un monitoring de la nouvelle réglementation en matière de flexibilité peut s'avérer judicieux. Cette évaluation se fondra peut-être dans l'évaluation générale de la LApEl effectuée par l'OFEN en vertu de l'art. 27, al. 3, OApEl.

Dans ce cas, l'OFEN dépendra assurément de l'aide de l'ElCom. Si besoin est, cette coopération devrait être précisée dans l'ordonnance (p. ex. fourniture de toutes les données nécessaires concernant l'évolution du marché).

Art. 17bter

Principe

Les art. 17bter à 17bsexies portent sur l'échange de données et d'informations. Son déroulement efficace et orienté vers l'avenir au moyen d'une infrastructure de données performante est indispensable à la numérisation progressive de l'approvisionnement en électricité. L'échange fluide de données et d'informations et l'accès à des données 105 / 154

FF 2021 1666

de qualité entre les acteurs impliqués sont essentiels. Si les données et informations requises ne sont pas fournies à temps ou qu'elles n'ont pas la qualité voulue, l'accès au marché de fournisseurs tiers et les innovations numériques se trouvent entravés et cela génère des coûts non négligeables, par exemple dans la gestion des bilans. C'est pourquoi le coeur des dispositions contenues à ce jour dans l'ordonnance (cf. art. 8, al. 2 à 4, OApEl) est transposé au niveau de la loi (art. 17bter), et assorti d'une disposition pénale pour le cas d'une transmission incorrecte des données (art. 29, al. 1, let. ebis).

La norme de base s'adresse aux gestionnaires de réseau ou aux exploitants de stations de mesure et prestataires de mesure mandatés qui disposent des données et informations pertinentes (la directive de la branche «Metering Code Suisse, MC-CH» donne des renseignements sur les données, les tâches en lien avec le traitement, la mise à disposition et l'assurance de la qualité des données)52. Les acteurs énumérés de manière exhaustive sont habilités à recevoir les données et informations selon les prescriptions de l'al. 1. Les contenus des données et informations à mettre à disposition dépendent de ce qu'il faut pour garantir le bon fonctionnement de l'approvisionnement en électricité. Sont en particulier concernés l'exploitation du réseau (il s'agit en particulier des données et informations au sens des directives de la branche «Transmission Code Suisse, TC-CH» et «Distribution Code Suisse, DC-CH»)53, la gestion des bilans d'ajustement, les livraisons d'énergie, le déroulement des processus de changement au sens des art. 13a et 17a, al. 5, la coordination nécessaire entre les acteurs concernés pour l'utilisation de systèmes de commande et de réglage intelligents (flexibilités) de même que le calcul et l'imputation de la rémunération pour l'utilisation du réseau et d'autres coûts. Cela comprend également le flux de données vers les tiers habilités par des consommateurs finaux, des producteurs et des exploitants de stockage, comme des prestataires de services énergétiques qui ont besoin des données pour fournir leurs services (il s'agit en particulier des données et informations au sens des directives de la branche «Échange de données standardisé pour le marché du courant électrique CH» [SDAT-CH],
«Balancing Concept Suisse BC-CH» et «Metering Code Suisse, MC-CH»)54. En plus de ces processus qui relèvent du droit de l'approvisionnement en électricité, il faut aussi tenir compte des tâches et processus prévus dans la législation sur l'énergie, par exemple en lien avec la commercialisation directe, les garanties d'origine ou le prélèvement du supplément perçu sur le réseau.

Art. 17bquater

Échange de données par l'intermédiaire du registre de données

Eu égard aux multiples interfaces dans l'échange de données et d'informations, une uniformisation des divers processus grâce à la création d'un registre de données (datahub) est l'option la plus judicieuse du point de vue économique et d'une importance fondamentale pour soutenir efficacement la numérisation progressive dans le domaine de l'électricité (cf. ch. 3.1.8). Le registre de données constitue le coeur d'une infrastructure de données nationale performante pour l'approvisionnement en électricité,

52 53 54

www.electricite.ch www.electricite.ch www.electricite.ch

106 / 154

FF 2021 1666

qui garantit un échange d'informations fiables, libre d'intérêts commerciaux. Le présent projet de loi prévoit que l'échange des données de mesure et de référence dans certains domaines se fasse par l'intermédiaire d'un registre de données. Conformément à la neutralité technologique, celui-ci peut être conçu comme une plateforme centrale voire, à l'avenir, sur la base des technologies du registre distribué (distributed ledger) et de la chaîne de blocs (blockchain). Il est important que la solution technique soit conçue de manière performante et uniforme à l'échelle nationale.

L'al. 1 instaure un registre de données central (datahub) qui vise un échange de données efficace et performant. Les données et les informations qui sont nécessaires pour traiter les processus de changement dans le marché de l'électricité ou dans les systèmes de mesure, procéder au décompte des coûts de réseau, d'électricité ou de mesure (y c. décompte de l'énergie d'ajustement), faire des prévisions dans le cadre de la gestion des bilans d'ajustement ou saisir l'électricité au moyen de garanties d'origine, seront désormais échangées par l'intermédiaire du registre de données. Pour cela, il est nécessaire de disposer des données de mesure sur la consommation et la production, qui sont fournies en général par le biais de systèmes de mesure intelligents avec des intervalles de 15 minutes, ainsi que leurs agrégats. Le choix d'un nouveau fournisseur d'électricité, le changement de fournisseur à la suite d'un déménagement, les entrées et les sorties dans l'approvisionnement de base ou l'approvisionnement de remplacement ainsi que le choix d'un exploitant de stations de mesure ou d'un prestataire de mesure notamment comptent parmi les processus de changement dans le marché de l'électricité. En matière de prévisions, les données de mesure sur la consommation ou la production, pour l'essentiel, qui sont rapidement mises à disposition sans que leur plausibilité ne soit forcément vérifiée, sont importantes pour garantir une base d'information, notamment dans l'élaboration des programmes prévisionnels dans le cadre de la gestion des bilans d'ajustement. Ces prévisions diffèrent en particulier de celles de l'art. 5c OApEl en ce qu'elles ne sont pas établies par le biais du réseau du gestionnaire de réseau, mais sur la base de certains
points de mesure ou d'agrégats de ceux-ci. Les données qui ne sont pas basées sur les données de mesure, à l'instar des données météorologiques ou autres données similaires, ne relèvent pas de cette finalité. Toutes les données de mesure et de référence dans les quatre domaines précités doivent être échangées par l'intermédiaire d'un registre de données central pour la zone de réglage Suisse. L'obligation de cet échange de données par l'intermédiaire du registre de données concerne tous les acteurs visés à l'al. 1. Les données de référence comprennent au moins des informations telles que le nom, le prénom, l'adresse, la désignation du point de mesure et le type de mesure, y compris des informations sur les rôles de marché actifs au point de mesure (attributions). Par ailleurs, des informations supplémentaires en lien avec les points de mesure peuvent également s'avérer pertinentes, telles que la puissance de raccordement, la présence d'une station de recharge pour l'électromobilité ou des informations conformément à la nomenclature des activités économiques. Font partie des données de mesure les flux d'électricité et les puissances électriques mesurés à une station de mesure. Aussi bien les données de référence que les données de mesure comprennent des informations sur les consommateurs finaux, les producteurs et les exploitants de stockage, raison pour laquelle ces données sont en général des données personnelles au sens de la loi

107 / 154

FF 2021 1666

fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)55. Le Conseil fédéral précisera si nécessaire par voie d'ordonnance les données de référence à conserver dans le registre de données et les données de mesure à échanger par le biais du registre, ainsi que les délais et les formats, et définira d'autres exigences en matière de protection des données (cf. aussi l'art. 17c, al. 3).

L'al. 2 règle de manière générale l'échange de données par l'intermédiaire du registre de données. Ce faisant, il est nécessaire de faire la distinction entre les données de mesure et les données de référence: les données de référence sont sauvegardées dans le registre de données. Les données ne peuvent pas être enregistrées à l'étranger pour des raisons de protection des données. L'exploitant du registre de données a pour tâche de gérer les données sauvegardées et de veiller à la confidentialité, la disponibilité et l'intégrité des données (sécurité des données). Il procède aux modifications des données de référence (p. ex. à la suite d'un déménagement ou d'un nouveau raccordement) sur information de l'acteur du marché soumis à cette obligation. Si une partie prenante visée à l'art. 17bter veut accéder aux données sauvegardées dans le registre de données, l'exploitant du registre de données lui garantit l'accès pour autant qu'elle y soit autorisée (p. ex. par la loi ou avec l'accord de la personne concernée). Contrairement aux données de référence, les données de mesure ne sont pas sauvegardées dans le registre de données, mais chez les acteurs qui collectent les données de mesure, par exemple le gestionnaire d'un réseau de distribution ou le prestataire de mesure.

L'exploitant du registre de données doit toutefois permettre, au moyen d'une infrastructure informatique appropriée, l'échange de données prescrit entre ceux chez lesquels les données de mesure sont sauvegardées et les participants qui sollicitent l'accès à ces données. Ceux qui sauvegardent les données sont tenus de collaborer avec l'exploitant du registre de données et ont la responsabilité de fournir les données en temps voulu et d'exploiter de leur côté une infrastructure informatique appropriée permettant cet échange. Si un participant, par exemple un fournisseur d'électricité, demande la publication de données de mesure ou d'agrégats de celles-ci,
les données correspondantes lui sont communiquées par le participant sollicité par l'intermédiaire du registre de données (routage des données). Pour cela, comme pour les données de référence, il doit y avoir une autorisation de la personne concernée. La gestion de l'autorisation pour l'accès aux données de référence et de mesure, c'est-à-dire la gestion des accès, est assurée par l'exploitant du registre de données.

L'al. 3 constitue en outre une base légale qui permet aux autorités fédérales et cantonales d'avoir accès aux données de référence et de mesure ou aux agrégats par l'intermédiaire du registre de données. Ce droit ne s'applique que dans la mesure où ces autorités sont habilitées, s'agissant des données concrètes, à demander leur communication par les participants (p. ex. dans le cadre d'un relevé statistique). Si tel est le cas, l'autorité peut demander que la communication des données se fasse par l'intermédiaire du registre de données (et non par un autre moyen).

L'al. 4 précise que le Conseil fédéral réglera plus précisément l'échange de données et les tâches de l'exploitant du registre de données au niveau de l'ordonnance. La disposition octroie par ailleurs la compétence au Conseil fédéral d'élargir le registre

55

RS 235.1

108 / 154

FF 2021 1666

de données. Cette compétence est toutefois limitée par la finalité du registre de données: son élargissement doit toujours servir à un échange de données efficace et performant et ne doit pas aller au-delà du but de cette réglementation. Dans ce cadre, le Conseil fédéral peut enrichir le registre de données de nouvelles fonctionnalités et processus. Il peut ainsi prévoir que l'exploitant du registre de données contrôle la qualité du processus d'échange de données et des données de mesure et de référence nécessaires à cette fin (let. a). Il peut en outre compléter l'enregistrement des données de référence par un enregistrement des données de mesure si cela s'avère nécessaire pour la transformation en cours de l'approvisionnement en électricité (let. b). Il peut également prendre des mesures pour que les agrégats des données devant être échangées par l'intermédiaire du registre de données puissent être transmis à des tiers au moyen de ce même registre pour autant que cela serve les buts définis de manière exhaustive dans la loi (let. c). Ainsi le Conseil fédéral pourrait-il prévoir par exemple, dans un but de recherche, que des hautes écoles puissent disposer de certains agrégats de données pour effectuer des analyses de modèles de marché dans le domaine de l'électricité. S'agissant du but de sécurité d'approvisionnement, il est envisageable que certains agrégats soient transmis ou publiés afin de permettre aux acteurs du marché de l'électricité d'améliorer la qualité de leurs prévisions. Quant à la communication des données dans un but de fourniture de prestations énergétiques, elle a pour destinataires les prestataires les plus divers, qui en ont besoin pour des activités de mesure, de commercialisation directe (art. 21 LEne) ou en lien avec des économies d'énergie. Le but d'un renforcement de la concurrence sur le marché de l'électricité pourrait déboucher sur la publication quotidienne d'agrégats de données concernant la production issue des énergies renouvelables, favorisant ainsi une transparence accrue sur le marché et l'émergence de plateformes de marché pour les énergies renouvelables. Toutes les données visées à la let. c sont communiquées sous une forme anonymisée: les données doivent être agrégées de manière à ce que l'on ne puisse pas identifier les personnes concernées, que ce soit
directement ou indirectement (p. ex.

en recoupant des données). Afin de satisfaire à cette exigence, les agrégats de données devraient être réglés individuellement au niveau de l'ordonnance. Aucune rémunération n'est due pour la communication des agrégats puisqu'elle favorise un approvisionnement en énergie sûr et économique et ne nécessite pas d'importantes ressources matérielles ou en personnel. Le Conseil fédéral peut aussi définir que l'échange de données de mesure et de référence nécessaire entre les participants pour une utilisation de flexibilités par le biais de systèmes de commande et de réglage intelligents se fasse sous la forme d'un processus d'échange de données supplémentaire par l'intermédiaire du registre de données, si cela s'avère indispensable pour l'application de l'art. 17bbis (let. d). Enfin, la norme de délégation à l'al. 4 permet au Conseil fédéral de prévoir que l'accès au registre de données doit être accordé aux consommateurs finaux, aux producteurs et aux exploitants de stockage pour qu'ils puissent faire en sorte que leurs données soient remises ou transmises à des tiers autorisés (p. ex. entreprises de services énergétiques) en leur accordant des droits d'accès correspondants (let. e). Cela permettrait aux personnes concernées de faire valoir efficacement leur droit à la portabilité des données56. Dans le cadre des extensions visées à l'al. 4, le 56

Art. 28 de la loi fédérale du 25 septembre 2020 sur la protection des données révisée, FF 2020 7397.

109 / 154

FF 2021 1666

Conseil fédéral devra tenir dûment compte de la protection des données et de la sécurité des données.

Art. 17bquinquies Constitution de l'exploitant du registre de données Conformément au principe de subsidiarité, l'al. 1 donne la possibilité aux acteurs du marché et aux entreprises qui ne font pas partie de l'économie électrique de créer et d'exploiter ensemble le registre de données central. Ils devront prévoir une société de capitaux ou une coopérative de droit privé ayant son siège en Suisse pour l'exploitation du registre. Le fait que cette société d'exploitation soit créée avant ou après l'entrée en vigueur de cette disposition ne joue aucun rôle.

L'approbation des statuts visée à l'al. 2 confirme que la société est autorisée à exploiter le registre de données central au sens de l'al. 1. Cette approbation est en outre une condition nécessaire au remboursement des coûts d'investissement visé à l'al. 4. L'exploitant du registre de données devra démarrer l'exploitation dans un délai fixé au niveau de l'ordonnance. L'approbation est donc accordée à la condition que l'exploitation du registre de données commence dans ces délais. Dans la mesure où cela est opportun, une mise en service échelonnée dans le temps des domaines couverts par le registre de données (art. 17bquater, al. 1, let. a à d) est aussi envisageable. Les obligations de contrôle des statuts par l'office du registre du commerce ne sont pas affectées par cette disposition.

L'al. 3 garantit, au sens d'une solution subsidiaire, que la création et l'exploitation du registre de données se font aussi si la constitution au sens des al. 1 et 2 n'aboutit pas.

Dans ce cas, le Conseil fédéral est habilité à confier la création et l'exploitation du registre de données à un service de droit public existant ou créé à cet effet. La transmission de la tâche à un particulier au sens d'une délégation est ainsi exclue. Si un service de droit public existant (p. ex. un office fédéral ou un établissement de droit public) est chargé de gérer le registre de données, des dispositions d'exécution correspondantes sont nécessaires au niveau de l'ordonnance. En ce qui concerne la réglementation de l'organisation et le financement de l'exploitant du registre de données, il y a lieu de tenir compte des dispositions de l'art. 17bsexies. Le service existant
pourrait naturellement continuer d'assumer ses tâches au regard de la disposition de l'art. 17bsexies, al. 2, mais il devrait se limiter aux tâches prévues dans le cadre de sa fonction d'exploitant du registre de données. Si la création et l'exploitation du registre de données sont confiées à une nouvelle entité juridique de droit public (p. ex. un établissement de droit public), le Parlement devrait édicter les dispositions régissant son organisation.

Al. 4: les coûts d'investissement nécessaires à la création du registre de données sont remboursés aux entreprises visées à l'al. 1 (respectivement au service public dans le cas d'un registre de données au sens de l'al. 3) pour une période à définir dans l'ordonnance et la perte des coûts d'opportunité est prise en compte à un taux d'intérêt modéré. Le remboursement est effectué par l'exploitant du registre de données, qui couvre les coûts occasionnés par les recettes provenant de la rémunération. Ne sont pas remboursés les apports qui ont dû être fournis sur la base des dispositions du droit des sociétés anonymes, des sociétés à responsabilité limitée ou des coopératives, en

110 / 154

FF 2021 1666

particulier pour la libération des parts des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée. Un remboursement constituerait en l'occurrence une infraction à l'interdiction formelle de restituer les versements.

Art. 17bsexies

Organisation et financement de l'exploitant du registre de données

L'al. 1 précise que l'exploitant du registre de données agit indépendamment du secteur de l'électricité afin d'éviter toute position d'avantage ou d'influence. La disposition légale prévoit déjà, au sens d'une disposition minimale, que l'exploitant du registre de données doit être séparé à cet effet, au niveau du personnel notamment (conseil d'administration, direction et reste du personnel), du secteur de l'électricité.

Pour atteindre l'indépendance requise de l'exploitant du registre de données, d'autres instruments de séparation sont toutefois nécessaires. Aucun acteur, pris individuellement ou collectivement (plusieurs acteurs dont les intérêts convergent, p. ex. des entreprises d'approvisionnement en énergie), ne doit par exemple pouvoir exercer une influence décisive sur l'exploitant du registre de données. L'exploitant du registre de données doit en outre garantir qu'aucune information économique sensible ne peut parvenir directement ou indirectement à des tiers non autorisés. Une cotation en bourse de l'exploitant du registre de données serait également en contradiction avec l'indépendance requise. Les exigences détaillées relatives à l'indépendance de l'exploitant du registre de données devront être précisées dans l'ordonnance. La majorité suisse implique que la majeure partie des détenteurs de participations a son siège ou son domicile en Suisse, ce qui peut être garanti dans les statuts (p. ex. par une suspension, proportionnelle aux parts détenues, des droits de vote en cas de violation de la règle applicable à la participation).

L'al. 2 limite le domaine d'activité de l'exploitant du registre de données aux tâches inscrites dans la loi et l'ordonnance. Il lui est notamment interdit de procéder à un traitement des données qui dépasse le cadre prévu par la loi et les dispositions d'exécution. En outre, l'exploitant du registre de données exerce son activité sans poursuivre de but lucratif.

En vertu de l'al. 3, l'exploitant du registre de données couvre ses coûts de capital et d'exploitation par le biais d'une rémunération qui couvre les frais encourus et qu'il doit percevoir par point de mesure. La rémunération doit être perçue auprès des gestionnaires d'un réseau de distribution, des prestataires de mesure et des exploitants de stations de mesure qui ont recours au registre de données
pour échanger des données de mesure par son intermédiaire ou pour accéder à des données de référence dans le registre. Les exploitants de stations de mesure et les prestataires de mesure ne sont donc soumis à la rémunération que s'ils ont été mandatés par un client de mesure pour un point de mesure concret. Pour définir le montant de la rémunération, il est nécessaire de tenir compte de la charge générée par l'utilisation du registre de données (principe de causalité et couverture des coûts). Les entreprises soumises à la rémunération peuvent répercuter leurs coûts sur les clients de mesure (consommateurs finaux, producteurs et exploitants de stockage).

L'al. 4 charge le Conseil fédéral d'édicter d'autres dispositions concernant l'organisation, l'indépendance et le financement. Le Conseil fédéral concrétisera par exemple

111 / 154

FF 2021 1666

la procédure de constitution de l'exploitant du registre de données et de remboursement des coûts d'investissement.

Art. 17c, titre et al. 2 et 3 Les données de mesure et de référence se rapportent à un consommateur final, un producteur ou un exploitant de stockage. Les données peuvent être en général attribuées à une personne spécifique et constituent ainsi des données personnelles au sens de la LPD. En vertu de cette dernière, les données personnelles ne peuvent être traitées que s'il y a une base légale correspondante. Pour répondre à cette exigence, l'al. 2 contient une base légale concernant le traitement de données personnelles par l'exploitant du registre de données. Les données de personnes morales ne seront plus considérées comme des données personnelles en vertu de la LPD révisée du 25 septembre 202057. Leur traitement nécessitera toutefois encore une base légale en raison du principe de légalité. Pour respecter cette obligation, ces données sont mentionnées spécifiquement dans la présente disposition. La 2e phrase de l'al. 2 accorde à l'exploitant du registre de données la compétence de requérir les informations correspondantes pour pouvoir accomplir ses tâches de manière efficace.

L'al. 3 comprend pour l'essentiel la disposition actuelle de l'al. 2, qui a été adaptée sur le plan rédactionnel. La remarque générale selon laquelle le Conseil fédéral édicte les dispositions d'exécution n'est pas nécessaire et peut donc être biffée. La nouvelle disposition doit garantir comme jusqu'ici que le Conseil fédéral peut fixer des exigences spécifiques en matière de protection et de sécurité des données dans les dispositions d'exécution et définir une procédure de contrôle de leur respect. La numérisation croissante accroît les exigences techniques en matière de sécurité posées aux entreprises qui exploitent les infrastructures critiques liées au réseau électrique. Il est donc nécessaire, d'une part, de garantir la protection de données sensibles. À l'heure des cyberattaques et de la cybercriminalité, il faut d'autre part garantir un niveau de sécurité suffisant dans les infrastructures critiques de l'approvisionnement en énergie, pour que les infrastructures d'information et de communication utilisées dans ce domaine ainsi que les processus automatisés et numériques de transmission et de traitement
des données fonctionnent comme prévu. Cela concerne en particulier l'intégration et l'utilisation de systèmes de commande et de réglage, car ils permettent d'intervenir activement dans l'exploitation des réseaux électriques. À cet effet, outre les exigences techniques posées aux moyens d'exploitation, des mesures organisationnelles peuvent être requises. En plus des systèmes de mesure, de commande et de réglage énumérés à titre d'exemple, les exigences et mesures relevant de la législation sur la protection des données peuvent aussi concerner les équipements correspondants. Il s'agit d'infrastructures en arrière-plan chez les gestionnaires de réseau qui permettent l'exploitation et le pilotage des systèmes.

Art. 18, al. 4, 4bis, 6, 3e phrase, et 7 L'al. 4 règle aujourd'hui déjà le droit de préemption en cas d'aliénation d'actions Swissgrid. Par analogie à d'autres domaines du droit (cf. p. ex. les art. 42 et 49 de la 57

FF 2020 7397

112 / 154

FF 2021 1666

loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural58), il prévoit désormais un ordre. Sont titulaires d'un droit de préemption en principe l'ensemble des cantons, des communes ou des EAE suisses, et pas seulement ceux qui possèdent déjà des actions Swissgrid. La réglementation proposée adopte délibérément cette interprétation large.

Exclure des acteurs capables de garantir les majorités demandées contredirait en effet la raison d'être du droit de préemption, qui se veut un instrument visant à sécuriser ces majorités. En outre, Swissgrid doit être indépendante du reste du secteur de l'électricité dans la mesure du possible. Il appartiendra à Swissgrid d'éliminer les éventuelles contradictions entre ses statuts actuels et la loi. Il est clair que la loi prime de toute manière les statuts, aujourd'hui déjà. Des clarifications seront nécessaires sur divers aspects, en particulier sur le déroulement concret. Les statuts pourront préciser bien des choses, comme c'est déjà le cas aujourd'hui. Mais certaines dispositions, de par leur nature, devront être réglées par l'État (cf. délégations à l'al. 4bis).

Une question essentielle qui découle de l'al. 4 est de savoir quels acheteurs sont assimilables à un «canton» ou à une «commune». Cela peut être parfois équivoque en pratique. Le cas est limpide si un canton, représenté par exemple par une direction, achète lui-même des actions. Mais il est souvent plus difficile de répondre à la question lorsqu'on est en présence d'unités décentralisées. Comme les droits de préemption de même que la suspension du droit de vote servent à garantir une majorité suisse, il faudra se référer dans les deux cas à l'idée directrice du contrôle direct ou indirect par les cantons et les communes (cf. art. 18a). Les acteurs qui appartiennent à la sphère étatique bénéficient d'un droit de préemption de premier ou de deuxième rang pour autant que les pouvoirs publics puissent exercer une influence correspondante. Il faudra clarifier dans quel rang il convient de classer les EAE qui ne sont pas dotées de la personnalité juridique mais sont intégrées dans une administration communale. Le facteur déterminant en l'espèce ne devrait pas être le droit organisationnel, mais le fait qu'une telle EAE agit sur le plan économique comme d'autres EAE de droit privé et ne devrait pas être
avantagée. La question se pose par ailleurs de savoir si une même collectivité publique peut exercer son droit à plusieurs reprises. De fait, une seule et même collectivité publique ne devrait pas pouvoir se présenter plusieurs fois en parallèle comme détentrice d'un droit de préemption pour un même achat.

L'al. 4bis comprend une énumération de quelques précisions supplémentaires qui seront nécessaires pour simplifier le déroulement d'un cas de préemption concret. Il est ainsi nécessaire, au préalable, de réglementer la publication pour que les détenteurs du droit de préemption puissent être au courant d'un cas de préemption. La Feuille officielle suisse du commerce ferait parfaitement l'affaire. Les délais pour faire valoir le droit de préemption sont un autre aspect procédural. Une réglementation précisant que les délais commencent de courir simultanément pour tous les ayants droit de tous les rangs pourrait être judicieuse à cet égard. On peut aussi envisager des règles spéciales, notamment à l'endroit des collectivités publiques pour lesquelles les délais sont trop courts parce que les instances politiques doivent statuer sur l'exercice de leur droit. Il est par ailleurs important de clarifier un certain nombre de cas de figure qui ne constituent pas un cas de préemption (let. c). Pour ce faire, le Conseil fédéral se rapportera aux dispositions du code civil (CC)59, selon lequel un cas de préemption 58 59

RS 211.412.11 RS 210

113 / 154

FF 2021 1666

n'intervient pas dès lors qu'un autre détenteur du droit de préemption se porte acquéreur. Un cas de préemption ne devrait donc pas se présenter si quelqu'un de rang égal ou prioritaire entend acheter des actions Swissgrid. Cette clause permet aux cantons et aux communes de se porter acquéreurs sans être «dérangés» par d'autres détenteurs d'un droit de préemption. Pour les communes en particulier, qui n'ont souvent pas la possibilité d'acheter de grands paquets d'actions, ce principe est préférable à un droit de préemption prioritaire. S'agissant des «entités liées aux cantons et aux communes» expressément mentionnées, il faut penser en premier lieu aux caisses de pension publiques, qui appartiennent à la sphère étatique malgré leur autonomie. Une solution alternative qui ne saurait être exclue est que le Conseil fédéral désigne directement comme détenteurs d'un droit de préemption les caisses de pension publiques qui agissent au nom d'un canton. Au surplus, il semble évident que des transferts au sein d'une entreprise ne constituent pas un cas de préemption. Les «cas bagatelle» constituent une autre catégorie. Une autre question importante est enfin de savoir à qui vont les actions Swissgrid quand plusieurs détenteurs d'un droit de préemption de même rang font valoir leur droit. On pourrait penser à une réglementation qui tiendrait compte prioritairement de détenteurs d'un droit de préemption qui se regrouperaient à cette fin. Il serait également possible de répartir les parts équitablement entre toutes les personnes intéressées, dans la mesure où elles demeurent intéressées dans ces conditions.

La réglementation des droits de préemption (en tant qu'instrument intervenant entre la société anonyme et ses actionnaires potentiels) relève du droit privé. Les décisions concernant son application sont donc soumises à la juridiction civile. L'ElCom pourrait tout au plus être appelée à intervenir si, dans le contexte des droits de préemption, des questions de droit public en lien avec la LApEl se posaient également.

Le complément apporté à l'al. 6 établit clairement que Swissgrid est autorisée à participer aux modèles dits GRT-GRT. Le fonctionnement de tels modèles (cf.

ch. 3.1.14) implique que Swissgrid n'intervient pas comme fournisseur proprement dit de services-système, mais que son rôle se limite
à celui d'intermédiaire. Le libellé actuel n'apporte pas toute la clarté voulue quant à savoir si Swissgrid peut intervenir en qualité d'intermédiaire pour des services-système proposés à des gestionnaires d'un réseau de transport étrangers dans le cadre d'un modèle GRT-GRT. Il est établi clairement que Swissgrid doit exploiter le réseau de transport en le gérant comme une seule zone de réglage (art. 20, al. 2, let. a). Il est aussi clair que la mise à disposition de services-système est nécessaire à cet effet (pour les besoins de l'exploitation, art.

18, al. 6, 2e phrase), l'ordonnance précisant d'ores et déjà que l'acquisition transfrontalière d'énergie de réglage est licite (art. 26, al. 2, OApEl). Désormais cependant, le système complet de l'acquisition de services-système au-delà de la zone de réglage, en association avec des gestionnaires d'un réseau de transport étrangers et moyennant toutes les actions nécessaires à cet effet, devient explicitement licite. La fonction d'intermédiaire pour des gestionnaires d'un réseau de transport étrangers concernant des services-système constitue l'une de ces actions. Cette clarification n'assigne pas à Swissgrid la fonction d'acquérir des services-système dans le cadre du modèle GRTGRT. Elle peut aussi continuer de considérer directement les offres adéquates que lui soumettent les prestataires étrangers. Les modèles GRT-GRT accroissent la liquidité du marché des services-système, ce qui permet de réduire les coûts d'acquisition et

114 / 154

FF 2021 1666

concourt à l'exploitation efficace du réseau. Les coûts générés dans le cadre de l'acquisition de services-système, au-delà de la zone de réglage et en association avec des gestionnaires d'un réseau de transport étrangers, sont en principe réputés coûts d'exploitation au sens de l'art. 15, al. 2. Il en découle, d'une part, que ces coûts sont imputables, conformément à l'art. 15, al. 1, et que, d'autre part, Swissgrid n'est pas autorisée à générer des bénéfices en exerçant sa fonction d'intermédiaire (cf. commentaire de l'art. 15). Il ne peut s'agir de coûts de capital que dans des configurations particulières, par exemple quand il est nécessaire d'acquérir une infrastructure informatique supplémentaire spécifiquement pour la mise en oeuvre d'un modèle GRT-GRT.

Le durcissement de l'al. 7 sert à mieux dissocier Swissgrid de la branche dans l'intérêt de son indépendance. Tous les membres du conseil d'administration doivent être indépendants de la branche, et non plus une simple majorité d'entre eux comme dans le droit en vigueur jusqu'ici. Ce point est important notamment en raison du rôle joué par Swissgrid dans la réserve d'énergie ou de sa fonction en tant qu'acquéreuse de services-système.

Art. 18a

Effets de l'absence de majorité des cantons et des communes

Le nouvel art. 18a fait suite au principe visé à l'art. 18, al. 3, en vertu duquel les cantons et les communes doivent détenir, directement ou indirectement, une majorité de Swissgrid. Il manquait jusqu'ici un moyen de sécuriser la part de cette majorité détenue indirectement. La base est ici créée pour une suspension du droit de vote dans le cas où la majorité n'est pas réunie. Les actionnaires qui sont responsables de la violation de cette disposition doivent être limités dans leur participation. En parallèle à cette solution qui s'applique à l'assemblée générale, il faut aussi un correctif au niveau du conseil d'administration (let. b). Les actionnaires n'ont juridiquement aucun droit à une représentation au sein du conseil d'administration ou de la direction.

Mais dans les faits, il peut arriver qu'ils y siègent par l'intermédiaire d'une personne qui défend leurs intérêts ou reflète leur participation. Les actionnaires qui ne sont «pas à majorité suisse» ne doivent pas pouvoir réunir une majorité dans les deux instances précitées si, globalement, Swissgrid n'est pas contrôlée par des cantons ou des communes. Pour déterminer si cette majorité aux mains des pouvoirs publics suisses n'est plus réunie dans le conseil d'administration ou au sein de la direction, on procède de la même manière que pour l'assemblée générale. Au sein du conseil d'administration ou de la direction, la disposition de la let. b peut conduire, le cas échéant, au départ d'un membre.

Al. 2: afin de déterminer si cette prescription est respectée pour l'ensemble de la société, il faut un critère de vérification qui se rapporte à l'actionnaire individuel. Ce critère vise à apprécier si chaque actionnaire est contrôlé par un canton ou une commune. Il ne constitue pas une nouvelle disposition matérielle autonome et n'est pertinent que pour l'appréciation globale. Si la majorité d'ensemble n'est pas réunie, cela entraîne les deux conséquences visées à l'al. 1. La conséquence au sein du conseil d'administration n'intervient pas nécessairement: elle s'applique uniquement si la composition du conseil d'administration se traduit dans les faits par une participation non souhaitée. Le «contrôle» signifie la possibilité d'exercer une influence déterminante, ce qui peut être encore précisé dans l'ordonnance. Une approche consisterait à se fonder sur les définitions du droit des cartels. Si l'on est en présence de longues 115 / 154

FF 2021 1666

chaînes de participation, le contrôle doit être exercé en début de chaîne, sans quoi il ne peut être question de «contrôle».

Al. 3: si les majorités requises ne sont pas réunies, les droits de vote des actionnaires qui n'ont pas apporté la preuve de la participation majoritaire attendue sont partiellement suspendus en vue de l'assemblée générale (AG). La suspension des droits de vote ne concerne pas seulement les actionnaires dont il est démontré, preuves à l'appui, qu'ils ne sont pas contrôlés par des cantons ou des communes, mais elle concerne tous ceux chez lesquels un tel contrôle n'a pas été prouvé ou ne l'a pas été suffisamment. Le Conseil fédéral devra régler les modalités détaillées. Il pourra par exemple exempter de cette obligation de preuve les cantons et les communes qui détiennent des participations directes dans Swissgrid, puisque le caractère suisse va de soi dans ces cas. S'agissant des actionnaires qui ne sont clairement pas contrôlés par un canton ou une commune depuis un certain temps, il serait éventuellement opportun de proposer une solution permettant d'éviter de les obliger à reconfirmer régulièrement cet état de fait. En ce qui concerne la suspension en tant que telle, les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité exigent que la suspension soit appliquée selon la même proportion à tous les actionnaires et, en outre, uniquement dans la mesure requise et aussi longtemps qu'elle est nécessaire au rétablissement de la majorité des voix exigée. Quant à la définition de la suspension proportionnelle, l'exemple chiffré suivant l'illustre: Swissgrid a cinq actionnaires, dont deux ne sont pas «suisses», à savoir A avec une part de 40 % et B avec une part de 20 %. On ne suspend pas la totalité des parts qui ne sont pas «suisses», à savoir 60 %, mais seulement 10 % (plus une voix pour A et une voix pour B). De plus, la suspension intervient dans un rapport de 2:1 au détriment de A. Seuls les droits de vote sont suspendus et non pas les droits qui leur sont directement liés, tels que le droit de proposition, le droit d'inscription d'un objet à l'ordre du jour et le droit de consultation. Les autres droits de l'actionnaire, comme le droit aux dividendes ou le droit de souscription préférentiel, ne sont pas non plus touchés. Il faut en outre souligner qu'il appartiendra
à Swissgrid de mettre en oeuvre cette disposition dans le cadre de la loi et de l'ordonnance. Les tribunaux civils seront compétents pour juger les éventuels litiges au sujet de la suspension.

Quiconque estime que ses droits de vote ont été suspendus à tort peut agir auprès du tribunal civil contre la décision correspondante de l'AG (art. 706 du code des obligations [CO]60). L'ElCom peut intervenir si elle constate que Swissgrid n'applique pas la réglementation ou que des erreurs sont systématiquement commises dans le cadre de l'application.

Art. 20, al. 2, let. b et c, et 3 L'al. 2, let. b, 2e phrase, ne mentionne plus d'acteur spécifique, parce que l'identité du prestataire de services-système n'est pas déterminante, l'essentiel étant de remplir les conditions de préqualification posées par Swissgrid (cf. commentaire de l'art. 4, al. 1, let. e). La modification exprime en outre clairement que ce ne sont pas uniquement les énergies de réglage que Swissgrid doit acquérir selon des procédures axées sur le marché, transparentes et non discriminatoires, mais qu'elle doit en faire de même pour tous les services-système qu'elle ne fournit pas elle-même. Cet aspect 60

RS 220

116 / 154

FF 2021 1666

également correspond d'ores et déjà à la pratique en vertu d'une disposition au niveau de l'ordonnance (art. 22, al. 1, OApEl). Dans ce contexte, il faut évidemment tenir compte de l'art. 18, al. 6, LApEl. Swissgrid fournit elle-même la gestion des bilans d'ajustement, qui relève expressément des services-système en vertu de l'art. 4, al. 1, let. g, et la coordination du système. À part cela et outre l'utilisation de ses propres moyens d'exploitation techniques, notamment pour compenser les pertes de transport ou la puissance réactive, Swissgrid acquiert les services-système selon des procédures axées sur le marché, transparentes et non discriminatoires. La modification de la 3e phrase oblige Swissgrid, lorsqu'elle acquiert des services-système, en principe à ne pas prendre en considération les installations consommant de l'électricité sans qu'elle soit utilisée ni stockée en vue d'une utilisation ultérieure. Citons comme exemple une installation au moyen de laquelle de l'énergie de réglage négative est proposée à Swissgrid, et que l'électricité soutirée soit transformée en chaleur ellemême rejetée dans l'environnement sans autre utilisation. Une telle «destruction» d'électricité n'est pas compatible avec l'objectif d'utilisation efficace de l'énergie fixé par la Stratégie énergétique 2050 et elle est susceptible de nuire aux flexibilités grâce auxquelles l'électricité soutirée est effectivement utilisée ou stockée pour une utilisation ultérieure. Mais le terme de «prioritairement» ne ferme pas complètement la porte. Si le marché des services-système devient illiquide, des installations telles celles de l'exemple cité doivent être considérées en dernier recours lors de l'acquisition de services-système au niveau de la consommation.

La liste des tâches de Swissgrid à l'al. 2, let. c, comprend toujours le cas où l'exploitation sûre du réseau de transport est menacée. Les dispositions matérielles proprement dites se trouvent désormais à l'art. 20a. À des fins d'uniformité, eu égard à l'art. 8, il est aussi question ici de sécurité de l'exploitation du réseau plutôt que de stabilité de l'exploitation du réseau. Cette adaptation n'entraîne pas de modification matérielle.

En vertu de l'actuel al. 3, le Conseil fédéral peut obliger Swissgrid à utiliser en priorité de l'électricité issue d'énergies
renouvelables, notamment de la force hydraulique, pour couvrir le besoin d'énergie de réglage. Abstraction faite des difficultés que peut réserver l'application de cette disposition, la priorité ainsi accordée peut réduire l'efficacité du marché de l'énergie de réglage, qui dépend d'une liquidité aussi élevée que possible. Il n'est dès lors pas étonnant que les États voisins de la Suisse ne fixent pas de telles priorités dans le domaine de l'acquisition d'énergie de réglage. L'al. 3 est donc abrogé. Swissgrid doit acquérir l'énergie de réglage nécessaire indépendamment de la technologie utilisée.

Art. 20a

Mesures en cas de menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport

Le cas spécial d'une menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport est soumis à une réglementation spécifique visée à l'art. 20a. La sécurité de l'exploitation du réseau de transport est compromise lorsque la sécurité du réseau et du système est menacée, c'est-à-dire en particulier lorsqu'il y a des pannes locales du réseau de transport ou des congestions du réseau à court terme et que le maintien de la fréquence et de la tension ne peut plus être garanti dans la mesure nécessaire. La nouvelle disposition renforce encore le concept en vigueur, qui distingue les conventions et les 117 / 154

FF 2021 1666

ordres de Swissgrid (cf. actuel art. 20, al. 2, let. c, et art. 5, OApEl) tout en le précisant au niveau de la loi en raison de son importance dans la pratique.

En vertu de l'al. 1, Swissgrid est dans l'obligation, au sens d'un principe, de préparer contractuellement les mesures nécessaires pour prévenir ou éliminer une telle menace pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport. Cette base contractuelle doit permettre de préparer toute la palette de mesures pour pouvoir réagir de manière efficace et performante en cas d'urgence. Les autorisations et les mesures techniques devraient être réglementées en premier lieu. À titre d'exemples, on peut mentionner les mesures liées à la topologie du réseau (p. ex. changement du jeu de barres, séparation des réseaux, marche en antenne d'une partie d'un réseau) ou les adaptations de l'injection pour la puissance active ou réactive dans les installations de production, qui permettent d'éviter les mesures de dernier recours, à savoir les délestages manuels et automatiques, qui doivent également être préparées contractuellement. Les mesures de prévention («prévenir») doivent empêcher la survenance d'une menace. On entend ici des mesures qui sont déclenchées si une menace n'est pas encore survenue mais se dessine concrètement («zone orange foncé»). Les mesures qui produisent déjà des effets auparavant sont liées à l'exploitation normale et ne sont pas concernées par l'art. 20a. À titre d'exemple de mesure préventive, on peut mentionner le concept d'urgence «Acquisition de puissance de réglage en cas de manque de liquidités lors de l'appel d'offres de puissance» de Swissgrid, qui permet d'obliger le producteur à fournir de la puissance de réglage à titre exceptionnel. Les mesures d'élimination doivent remédier à une menace déjà survenue («zone rouge»). L'art. 20a reproduit le principe en cascade avec l'art. 8, al. 1bis. Swissgrid ne conclut des contrats qu'avec les utilisateurs et les gestionnaires d'un réseau de distribution raccordés à son réseau.

Les gestionnaires d'un réseau de distribution de niveau 3 concernés sont alors tenus, à l'al. 2, de s'assurer de leur côté, par des conventions, qu'ils sont à même de remplir leurs obligations vis-à-vis de Swissgrid en cas d'urgence. L'expression «par des conventions» s'adresse surtout au cercle de
partenaires contractuels possibles: comme Swissgrid, les gestionnaires d'un réseau de distribution concernés concluent aussi des conventions avec des gestionnaires d'un réseau de distribution appropriés qui sont raccordés à leur réseau (c.-à-d. actifs aux niveaux de réseau 3 et 5), producteurs, consommateurs finaux et exploitants de stockage. Comme il incombe à Swissgrid de prendre les mesures nécessaires en cas d'urgence, c'est aussi à elle de fixer les mesures préparatoires et les critères de leur déclenchement en cas de menace. La disposition visée à l'al. 1 précise encore que les mesures nécessaires devront être convenues de façon uniforme. Il reste néanmoins de la marge pour régler les cas d'espèce, par exemple pour prendre les dispositions spécifiques qui s'imposent en un point particulièrement névralgique. Si Swissgrid ou les gestionnaires d'un réseau de distribution en aval et les différents acteurs directement raccordés à leur réseau ne parviennent pas à convenir d'un contrat, l'ElCom peut être sollicitée. Elle peut décider la conclusion de la convention, dont elle fixe la teneur minimale (cf. art. 22, al. 2, let. e).

L'al. 3 règle le cas d'exception lié aux menaces pour la sécurité de l'exploitation du réseau de transport. Si une menace qualifiée se présente (immédiate et importante) et que les mesures nécessaires n'ont pas été préalablement convenues, contrairement aux dispositions des al. 1 et 2, Swissgrid peut et doit exceptionnellement ordonner ces mesures. Les acteurs avec lesquels Swissgrid pourrait conclure une convention au sens de l'al. 1 sont de possibles destinataires des ordres. Les ordres peuvent aussi être 118 / 154

FF 2021 1666

répercutés par les gestionnaires d'un réseau de distribution conformément au principe en cascade (art. 8, al. 1bis, 2e phrase). Swissgrid dispose d'une grande marge de manoeuvre. Elle peut en principe adapter l'ensemble des flux d'électricité (injection et soutirage, y compris transits) ou exiger cette adaptation si elle est nécessaire au rétablissement de l'exploitation normale. Comme les ordres donnés doivent être communiqués sans délai à l'ElCom, la base d'une éventuelle vérification est fournie. Il serait notamment possible de vérifier que les obligations visant l'exploitation du réseau et prescrites par le droit relatif à l'approvisionnement en électricité sont respectées ou que les coûts sont imputables au sens de l'art. 15.

L'al. 4 habilite et oblige explicitement Swissgrid à ordonner des mesures de substitution. Swissgrid et les tiers éventuellement concernés par ces mesures doivent être traités comme si les acteurs défaillants avaient rempli leurs obligations contractuelles ou respecté les ordres. Les éventuels surcoûts ou rubriques de coûts qu'auraient évités Swissgrid et les tiers concernés par les mesures de substitution si les mesures initialement convenues ou ordonnées avaient été mises en oeuvre doivent leur être indemnisés par les acteurs défaillants.

Comme les mesures visant à prévenir ou à éliminer les menaces pour la sécurité d'exploitation du réseau de transport ont une grande portée (l'intégralité du système étant mise en péril), les coûts de ces mesures doivent être répartis, conformément à l'al. 5, entre tous les utilisateurs de ce système. La condition nécessaire pour que les coûts de réseau puissent être répartis à l'échelle suisse est leur attribution aux coûts du réseau de transport. Dans la pratique, cela peut signifier que Swissgrid doit fournir des rémunérations correspondantes. Ce faisant, il y a deux types de coûts, à savoir les coûts de préparation et les coûts inhérents à l'exécution des mesures. Un délestage manuel ciblé exige par exemple d'importants préparatifs, en particulier pour la garantie contractuelle de la mesure et pour la mise en place de la technique et des processus. Les coûts d'exécution sont gérables en cas de préparation consciencieuse: si Swissgrid ou les gestionnaires de réseau en charge de la mise en oeuvre se sont ménagé contractuellement le
droit de délester le réseau dans une telle situation de menace, au sens d'une mesure de dernier recours, les coûts éventuellement subis par les consommateurs finaux concernés ne font en particulier pas partie des coûts d'exécution, d'autant moins que la déconnexion fait l'objet d'un consentement. Les contrats correspondants comportent d'ores et déjà de telles dispositions (cf. Recommandation de la branche pour le marché suisse de l'énergie électrique, contrats types 2013)61. Ces dispositions sont cohérentes, car il n'existe pas de droit à un réseau totalement exempt de perturbations.

Le réseau ne doit pas être seulement sûr et performant, il doit aussi être efficace (art. 8, al. 1, let. a). Quiconque dépend particulièrement d'un approvisionnement en électricité ininterrompu et exempt de perturbations doit prendre des dispositions appropriées (p. ex. génératrice de secours dans un hôpital). Par contre, la rétribution éventuellement convenue en contrepartie du droit de déconnecter, par exemple chez les grands consommateurs finaux, doit être comprise comme un poste de coûts lié à la préparation ou à l'exécution de la mesure. D'emblée, l'al. 5 ne couvre pas les coûts survenant en lien avec un effondrement du réseau dû à un cas de force majeure, car il ne s'agit pas d'une mesure de Swissgrid. Dans de tels cas, les dispositions générales du droit 61

www.electricite.ch

119 / 154

FF 2021 1666

relatif à la responsabilité et les éventuelles réglementations contractuelles y afférentes s'appliquent. La 2e phrase habilite le Conseil fédéral à prévoir des dérogations au principe d'attribution des coûts au réseau de transport. Songeons notamment à une règle dérogatoire pour les cas où il serait choquant de voir en définitive la collectivité supporter certains coûts. La compétence comprend aussi, selon le principe a maiore ad minus, la compétence législative pour les configurations où il est opportun de n'attribuer qu'en partie les coûts au réseau de transport.

Art. 22, al. 2 à 2ter L'ouverture du marché, tout comme l'introduction de diverses autres mesures, influe sur les compétences de l'ElCom (modification des compétences dans le domaine tarifaire et ajout de tâches spécifiques supplémentaires). Ces nouveautés se reflètent désormais à l'al. 2. La modification de cet article a permis de formuler plus simplement et précisément les let. a et b. La let. a se limite exclusivement, pour ménager une meilleure clarté, au régime des compétences dans le domaine de l'accès au réseau et des conditions d'utilisation du réseau, tandis que la let. b porte uniquement sur le contrôle des tarifs de l'approvisionnement de base, d'utilisation du réseau et de mesure ainsi que sur la rémunération calculée sur cette base. Il va de soi que cette dernière inclut la compétence de contrôler l'imputabilité des coûts invoqués. Hormis l'imputation séparée des coûts de mesure et la compétence de contrôle correspondante, le changement de formulation n'entraîne aucune modification matérielle. Il découle désormais de la phrase introductive que l'ElCom peut ou doit exercer ses compétences aussi bien d'office qu'en cas de litige entre deux parties, cette disposition s'appliquant à toutes les lettres de l'énumération. L'obligation de statuer en cas de litige contribue à fournir la garantie de l'accès au juge (art. 29a Cst.62): les personnes assujetties à ces dispositions juridiques ont droit à ce que l'ElCom rende une décision63.

La let. c confère à l'ElCom la compétence d'intervenir en cas de conditions abusives dans l'approvisionnement de remplacement. Certes, cet approvisionnement n'est soumis à aucune réglementation étatique des prix, mais les prix ne s'y forment pas par le libre jeu du marché entre l'offre et la demande. En
raison de leur position monopolistique, les gestionnaires d'un réseau de distribution sont en situation de fixer les conditions unilatéralement. En soi, il appartiendrait à la Commission de la concurrence d'intervenir (cf. art. 7, al. 2, let. c, de la loi du 6 octobre 1995 sur les cartels64). Eu égard à son expertise spécifique, l'ElCom seule s'impose pour disposer de cette compétence. Mais vu le caractère exceptionnel de l'approvisionnement de remplacement et l'absence d'un régime tarifaire proprement dit, l'ElCom ne doit pas procéder à l'examen de tous les cas, elle ne doit intervenir que si des indices donnent à penser que les conditions sont effectivement abusives (soit sur dénonciation, soit d'office).

Les tarifs de l'approvisionnement de base et les prix du marché spot actuels peuvent par exemple servir de référence.

En vertu de la let. d, l'ElCom assume aussi certaines tâches dans le domaine de la flexibilité. Les «utilisations garanties» sont un nouveau domaine réglementé et la 62 63 64

RS 101 Arrêts du Tribunal fédéral du 20 juillet 2016 2C_681/2015 et 2C_682/2015, ch. 3.6.5.

RS 251

120 / 154

FF 2021 1666

compétence de l'ElCom en la matière est mentionnée explicitement dans la loi. Les contrats visés à l'art. 17bbis, al. 2, ne relèvent en principe pas de la compétence de l'ElCom. Les tribunaux civils sont compétents pour régler les différends contractuels, c'est-à-dire ceux qui découlent de l'application des contrats conclus. Avant que ceuxci ne soient conclus, la compétence de surveillance générale de l'ElCom peut s'appliquer. Si les prescriptions que le Conseil fédéral édicte dans le but de protéger les détenteurs de flexibilité sont contournées ou ne sont pas intégrées dans les contrats, l'ElCom peut intervenir auprès des gestionnaires de réseau fautifs. Pour un élément du contrat, à savoir la rémunération, l'ElCom a une compétence explicite, quoique limitée: elle peut faire cesser les abus. Il peut y avoir un abus en cas de disproportion évidente par rapport à la contre-prestation. Les éléments d'appréciation relevant de la législation sur la surveillance des prix peuvent servir d'indices pour démontrer qu'il y a un abus. Cette surveillance des abus ne supplante en aucun cas les règles traditionnelles concernant l'imputabilité des coûts de réseau (art. 14). Ces règles s'appliquent toujours en premier, alors que le concept d'abus intervient à titre complémentaire. Un gestionnaire d'un réseau de distribution ne doit pas rémunérer la flexibilité de manière abusivement basse, d'autant plus qu'il peut répercuter les coûts (dans la mesure où ceux-ci sont imputables en vertu de l'art. 15). Le concept d'abus doit protéger en premier lieu les détenteurs de flexibilité, mais protégerait naturellement aussi les gestionnaires de réseau s'ils devaient payer des prix abusifs. Il n'est en revanche pas conçu pour le cas où un prix de flexibilité élevé se situe en dessous du seuil d'abus, mais audessus de ce qui est imputable.

La let. e règle deux compétences spécifiques de l'ElCom en lien avec les mesures prises lorsque la sécurité de l'exploitation du réseau de transport est menacée. Elle peut d'une part, conformément à la 1re phrase, décider la conclusion d'une convention au sens de l'art. 20a, al. 1 et 2, si les parties ne parviennent pas à s'entendre. Cela comprend aussi bien les conventions à conclure par Swissgrid que celles des gestionnaires d'un réseau de distribution qui leur permettent de garantir
qu'ils remplissent leurs obligations vis-à-vis de Swissgrid. D'autre part, en vertu de la 2e phrase, l'ElCom peut vérifier les ordres de Swissgrid et, en cas de non-observation de ceuxci, les mesures de substitution décrétées. La compétence visée à la 2e phrase se limite au domaine des ordres, car les questions de respect ou de violation des droits et obligations contractuels ainsi que leur application relèvent en principe de la compétence des tribunaux. La même remarque s'applique aux mesures de substitution ordonnées par Swissgrid lorsqu'une mesure prévue contractuellement n'est pas prise ou ne peut pas être prise (cf. art. 20a, al. 4). Il convient toutefois de noter que l'ElCom peut fort bien arrêter des décisions dont l'impact est immédiat sur les conventions. Par exemple, elle pourrait vérifier, à l'appui de l'art. 22, al. 1, si les mesures prévues par une convention sont adéquates pour faire face à une menace pesant sur la sécurité de l'exploitation du réseau de transport (art. 20, al. 2, let. c).

Let. f: Swissgrid est compétente pour assurer l'administration de la nouvelle réserve d'énergie (art. 8a, al. 3 et 4), dans le cadre des valeurs-clés définies par l'ElCom. La coopération entre Swissgrid et les participants à la réserve de même que ses interventions sont réglées par contrat. Swissgrid conclut donc avec eux une convention au moment de l'adjudication. Si l'intervention d'une autorité s'avérait nécessaire, ce rôle incomberait à l'ElCom. Swissgrid peut proposer à l'ElCom d'émettre certains ordres,

121 / 154

FF 2021 1666

mais l'ElCom peut aussi agir de son propre chef. En fin de compte, la surveillance est une tâche de l'ElCom.

Le registre de données au sens de l'art. 17bquinquies, al. 1, est placé sous la surveillance de l'ElCom. Les prescriptions dont il faut tenir compte découlent de la LApEl et des dispositions d'exécution. En vertu de la let. g, l'ElCom contrôle notamment les coûts calculés par l'exploitant du registre de données pour la création et l'exploitation du registre de données ainsi que la perception correcte des rémunérations sur la base de ce calcul des coûts. Comme l'exploitant du registre de données ne peut pas faire de bénéfices, les rémunérations doivent être perçues de façon à couvrir les coûts. L'ElCom devra en outre contrôler les exigences organisationnelles posées au registre de données. Elle devra notamment surveiller que l'exploitant du registre de données n'assume pas de tâches outrepassant celles qui lui ont été confiées par la loi ou les dispositions d'exécution (art. 17bsexies, al. 2). L'ElCom pourra par exemple prendre des mesures si l'exploitant du registre de données procède à des traitements de données qui ne sont pas nécessaires à l'accomplissement des tâches prescrites par la loi et l'ordonnance. Dans l'exercice de ses compétences relevant du droit de la surveillance dans le domaine de la protection des données, elle devra se coordonner le cas échéant avec le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence. L'ElCom est chargée par ailleurs, sur la base de sa compétence générale subsidiaire (art. 22, al. 1, LApEl), de se prononcer par voie de décision sur les litiges en lien avec le registre de données (p. ex. entre les participants et l'exploitant du registre de données). L'exploitant du registre de données n'est pas habilité à rendre des décisions. L'approbation des statuts par le DETEC au sens de l'art. 17bquinquies, al. 2, n'est pas concernée par la surveillance visée à la let. g. En fonction de la conception organisationnelle de l'exploitant du registre de données, le registre de données institué par le Conseil fédéral en vertu de l'art. 17bquinquies, al. 3, ne relève pas non plus de la surveillance de l'ElCom.

Art. 22a

Publication de comparatifs de qualité et d'efficacité

L'art. 22a introduit la régulation Sunshine pour compléter la réglementation cost-plus établie dans le domaine du réseau, respectivement pour contrôler les tarifs de l'approvisionnement de base. Cette disposition vise exclusivement la régulation Sunshine.

L'art. 22a ne concerne pas d'éventuels autres comparatifs établis par l'ElCom dans un contexte différent.

Les principaux éléments de la régulation Sunshine sont arrêtés à l'al. 1, qui fixe de manière générale le domaine dans lequel l'ElCom peut comparer les gestionnaires d'un réseau de distribution, à savoir le cadre de son domaine de compétence au sens de l'art. 22, al. 1 et 2. Les domaines réglementés à l'art. 22, al. 3 et 4, dans lesquels l'ElCom est investie de compétences d'observation et de surveillance spécifiques, ne font pas l'objet de la régulation Sunshine. Les objectifs mentionnés de la régulation Sunshine servent de lignes directrices à la mise en oeuvre de ce nouvel instrument. Il faut notamment en tenir compte lors du choix des valeurs comparatives adéquates et de la publication des résultats. Afin d'obtenir des résultats parlants, l'ElCom peut tenir compte, lors des comparaisons, d'éléments étrangers au domaine de régulation visé à l'art. 22, al. 1 et 2, pour autant que la valeur comparative relève elle-même de ce domaine. Pour atteindre l'objectif d'une transparence améliorée aux yeux des con-

122 / 154

FF 2021 1666

sommateurs finaux, il devrait être possible à ceux-ci de se faire une idée de leur gestionnaire de réseau en comparaison avec d'autres gestionnaires de réseau. C'est pourquoi l'ElCom peut publier les résultats de manière à ce qu'il soit possible de consulter les résultats individuels des gestionnaires d'un réseau de distribution. Il peut être indiqué, pour garantir la comparabilité des résultats, de répartir les gestionnaires d'un réseau de distribution en groupes selon des critères adéquats (p. ex. la topographie, la densité d'urbanisation, la densité énergétique en MWh par kilomètre de lignes électriques). Pour certaines comparaisons, il peut en outre s'avérer nécessaire de considérer seulement certains gestionnaires d'un réseau de distribution. Tel est par exemple le cas lorsque des valeurs extrêmes non significatives émaneraient de petits gestionnaires d'un réseau de distribution. Sous l'angle de la protection des données, l'ElCom est habilitée à rendre accessibles en ligne des données personnelles conformément à l'art. 19, al. 3, LPD.

Les domaines pour lesquels l'ElCom établit des comparatifs entre gestionnaires d'un réseau de distribution sont énumérés à l'al. 2. Sans être exhaustive, cette liste restitue très largement le contenu et la portée de la régulation Sunshine. L'ElCom bénéficie d'une marge de manoeuvre considérable, parce que les domaines sont définis largement et qu'un comparatif doit être établi seulement par lettre et non, par exemple, par sous-position. Au sein d'un domaine, outre des comparatifs sur la base de valeurs comparatives individuelles concrètes, on peut envisager de regrouper plusieurs valeurs comparatives pour obtenir par exemple, comme résultat, une sorte d'efficacité globale dans un domaine déterminé. Cela permet en particulier d'éviter que des adaptations ciblées, notamment dans l'imputation des coûts, entraînent de meilleurs résultats au niveau des valeurs individuelles. Au moment de choisir les domaines, on a veillé à ce que la régulation Sunshine débouche sur un coût supplémentaire raisonnable pour les entreprises concernées. Dans toute la mesure du possible, l'ElCom doit baser les comparatifs sur des valeurs provenant de données déjà en sa possession. Elle a néanmoins la possibilité, en vertu de l'art. 25, al. 1, de collecter des données supplémentaires pour
la régulation Sunshine auprès des gestionnaires ou des propriétaires d'un réseau de distribution. Lors de l'élaboration des principes régissant les comparaisons et la publication des résultats, l'ElCom implique les gestionnaires d'un réseau de distribution de manière appropriée.

Dans le domaine de la qualité de l'approvisionnement (let. a), il est possible de comparer les gestionnaires d'un réseau de distribution en fonction de la durée ou de la fréquence des interruptions de l'approvisionnement. Dans le domaine du réseau (let. b), des comparaisons sont envisageables, par exemple, en référence aux coûts de réseau par kilomètre de lignes électriques. Dans ce domaine, il apparaît particulièrement judicieux, pour les raisons précitées, de présenter les résultats (aussi) sous la forme d'une efficacité globale. L'évaluation des gains d'efficacité dans le domaine du réseau en vertu de l'al. 3 nécessite par ailleurs une vision globale. S'agissant des tarifs de l'approvisionnement de base (let. c), l'ElCom peut établir des comparatifs tant pour le produit standard que pour d'autres produits de l'approvisionnement de base. Il est possible de comparer le genre d'information reçue par les consommateurs finaux en cas d'interruption planifiée (let. d). Les comparatifs dans le domaine de l'exploitation des stations de mesure et des prestations de mesure (let. f ) se limitent au domaine monopolistique des gestionnaires d'un réseau de distribution, c'est-à-dire aux cas de

123 / 154

FF 2021 1666

figure où les tarifs de mesure réglementés par la loi sont applicables, car les consommateurs finaux concernés ne peuvent pas choisir librement leur exploitant de stations de mesure et leur prestataire de mesure (cf. art. 17a et 17abis). Enfin, la let. g vise surtout les obligations en matière de publication et de communication des gestionnaires d'un réseau de distribution envers les consommateurs finaux et les autres acteurs du marché, à commencer par la publication ou la communication correcte et en temps utile des informations visées à l'art. 12.

L'al. 3 arrête le principe que la régulation Sunshine doit être remplacée par une régulation incitative, dans le domaine du réseau, si on n'y observe pas de gains d'efficacité suffisants ni d'effets correspondants sur les coûts de réseau. Dans les autres domaines, on pourrait en principe maintenir la régulation Sunshine parallèlement à une régulation incitative. Sur la base des résultats de l'évaluation réalisée tous les quatre ans par l'OFEN, le Conseil fédéral décidera si un projet d'acte visant l'introduction d'une régulation incitative doit être élaboré à l'intention du Parlement. La rémunération pour l'utilisation du réseau doit reposer sur les coûts d'un réseau sûr, performant et efficace.

Par conséquent, l'évolution de la rémunération pour l'utilisation du réseau doit pouvoir démontrer que l'objectif d'efficacité visé est réalisé dans une mesure suffisante.

L'OFEN a mené des réflexions concernant le rapport coûts-utilité et parvient à la conclusion, sur la base d'une estimation plutôt conservatrice, qu'une régulation incitative peut induire une progression annuelle de la prospérité comprise entre 190 et 270 millions de francs grâce aux gains d'efficacité obtenus65. L'évaluation débouchera sur une transmission de données entre l'ElCom et l'OFEN, conformément à l'art. 27, al. 1bis (cf. commentaire de l'art. 27).

Une régulation incitative correspondrait à un changement d'une régulation ex post à une régulation ex ante. Les gestionnaires d'un réseau de distribution recevraient alors des directives quant à leurs recettes durant une période de régulation (généralement quatre à cinq ans). Ces directives se déduisent des valeurs d'efficacité des gestionnaires de réseau déterminables dans les comparaisons statistiques (comparaisons par référence ou
benchmarking). Les coûts influençables d'un gestionnaire de réseau sont alors comparés à ceux d'un gestionnaire de réseau efficace comparable. Les coûts non influençables, notamment les coûts des réseaux en amont, de même que les impôts et les redevances, n'entrent pas dans la comparaison de l'efficacité et sont répercutés.

Il faut comprendre le principe fondamental de la régulation incitative comme suit: si les directives relatives aux gains d'efficacité sont remplies au-delà des objectifs fixés, le gestionnaire de réseau peut garder la différence pour lui à concurrence du montant maximal de recettes calculé; quant aux coûts qui excéderaient cette limite, il n'est pas permis de les répercuter sur le consommateur final par le biais de la rémunération pour l'utilisation du réseau.

65

Kosten-Nutzen-Analyse der Einführung einer Anreizregulierung für Stromnetzbetreiber in der Schweiz, Frontier Economics (2015, en allemand uniquement); p. 43 et Infras, Regulierungsfolgenabschätzung zur Revision Stromversorgungsgesetz (StromVG) (2017), p. 83 (en allemand uniquement). www.bfe.admin.ch/bfe/fr/home/approvisionnement/approvisionnement-en-electricite/loi-sur-approvisionnement-en-electricite-lapel/ revision-lapel.html.

124 / 154

FF 2021 1666

Une régulation incitative évite notamment les surinvestissements sous forme de développement du réseau à trop forte intensité capitalistique. Compte tenu des particularités et de la faible comparabilité, Swissgrid devrait demeurer principalement dans un régime basé sur les coûts.

Art. 23

Voies de recours

La modification à l'al. 1 est d'ordre rédactionnel uniquement.

Le nouveau droit de recours conféré par la loi à l'ElCom en vertu de l'al. 2 se limite aux cas visés à l'art. 23, c'est-à-dire les cas où une décision de l'ElCom contestée devant le Tribunal administratif fédéral (al. 1) n'est pas confirmée par celui-ci. Dans les domaines du marché de l'électricité relevant de la compétence des cantons, qui peuvent donner lieu à des jugements des tribunaux cantonaux, l'ElCom ne dispose pas d'un droit de recours.

Art. 23a Les projets pilotes visés à l'al. 1 doivent encourager l'innovation et permettre ainsi le développement de la législation sur l'approvisionnement en électricité. Ils permettent d'expérimenter des technologies innovantes, des modèles d'affaires ou des produits novateurs dans le secteur de l'énergie qui dérogent aux dispositions légales (cf. al. 3).

Dans ce cadre, il serait par exemple possible d'étudier un nouveau modèle de tarification qui diverge des dispositions légales. Un projet ne peut toutefois être autorisé que s'il est nécessaire à l'acquisition de connaissances pour le développement de la loi sur l'approvisionnement en électricité. Pour être admissible, une dérogation à la loi (p. ex. une exemption de l'obligation de verser la rémunération pour l'utilisation du réseau) doit par ailleurs découler du projet, c'est-à-dire porter sur un objet d'étude permettant de clarifier une question complexe et d'établir une future réglementation en ce sens sur la base des résultats de l'étude. Une dérogation ne serait pas autorisée si elle servait uniquement à financer un projet pilote dont aucun résultat pertinent ne serait escompté ou dont les résultats ne seraient de toute façon pas de nature à être pris en compte dans une future réglementation.

L'al. 2 prévoit par ailleurs, compte tenu des principes applicables aux réglementations expérimentales, que le projet doit être limité d'un point de vue matériel, temporel et géographique. Il faut aussi veiller à ce qu'il n'aille pas plus loin dans son champ d'application que cela n'est nécessaire à la réalisation de son objectif. Dans l'esprit d'une législation aussi égale et équitable que possible, il convient de limiter les inégalités créées par les réglementations expérimentales au strict nécessaire, ce qui devrait aussi être pris en compte
concernant une éventuelle prolongation du projet.

L'al. 3 prévoit que le DETEC règle les conditions-cadres pour chaque projet par voie d'ordonnance (ordonnance ad hoc). L'ordonnance règlera les droits et devoirs des participants conformément au principe de légalité et précisera les dispositions auxquelles le projet pilote peut déroger. De telles dérogations à la loi ne peuvent être prévues qu'en ce qui concerne des domaines énumérés de manière exhaustive, à savoir l'approvisionnement de base (art. 6 LApEl), les tâches des gestionnaires de réseau (art. 8 LApEl) et l'utilisation du réseau (art. 10 à 20b LApEl). Dans la mesure où cela

125 / 154

FF 2021 1666

s'avère nécessaire, il est également possible de diverger des dispositions d'exécution correspondantes.

Si un projet pilote autorisé prévoit des exemptions de l'obligation de verser la rémunération pour l'utilisation du réseau pour certains consommateurs finaux par dérogation à la LApEl, cela peut entraîner une charge financière supplémentaire pour les autres consommateurs finaux dans la zone de desserte concernée par le projet. Les coûts supplémentaires qui ne sont pas couverts par une exemption de l'obligation de verser la rémunération pour l'utilisation du réseau devraient être supportés, le cas échéant, par les consommateurs finaux de la zone de desserte concernée qui ne sont pas impliqués dans le projet, ce qui pourrait conduire à des charges supplémentaires disproportionnées. L'al. 4 permet donc au DETEC de prévoir dans l'ordonnance la répartition de ces coûts entre les consommateurs finaux de la Suisse entière par le biais de Swissgrid, avec pour conséquence une atténuation de l'incidence financière sur chaque consommateur final. À cet effet, Swissgrid paiera les coûts non couverts au gestionnaire de réseau et les inclura ensuite dans ses coûts de services-système. Cette répercussion des coûts permet, en fin de compte, le financement des coûts supplémentaires non couverts par les consommateurs finaux de toute la zone de réglage Suisse.

Cette socialisation des coûts de réseau n'est cependant possible que dans la mesure où des coûts supplémentaires non couverts qui sont induits par le projet autorisé se présentent effectivement pour des consommateurs qui ne sont pas impliqués dans le projet dans la zone de desserte concernée. S'il n'y a pas de coûts supplémentaires pour les consommateurs finaux, par exemple parce que les coûts sont financés par le gestionnaire de réseau ou par un projet pilote ou de démonstration au sens de l'art. 49 LEne, ils ne peuvent pas être imputés aux services-système. En outre, la socialisation des coûts ne se justifie que si la plus-value immatérielle et matérielle du projet (gain de connaissances, délestage du réseau, économies financières, etc.) bénéficie en majeure partie à l'ensemble de la zone de réglage Suisse et pas seulement à la zone de desserte concernée. L'intérêt national pour le projet pilote doit donc être plus important que celui de la zone de desserte
concernée. Le DETEC devra, pour chaque projet, examiner si c'est le cas. Il appartient par conséquent au DETEC de décider si les coûts sont imputés aux services-système.

Al. 5: le Conseil fédéral devra prévoir une procédure qui permettra aux acteurs intéressés à lancer un projet pilote de déposer une demande en ce sens. Il pourra préciser les conditions préalables au dépôt d'une demande. Il s'assurera en particulier que le DETEC a accès aux informations nécessaires des responsables de projets, d'autant plus que c'est la seule façon de recueillir des expériences correspondantes en vue du développement de la législation sur l'approvisionnement en électricité. Pour ce faire, il faut un suivi administratif, technologique et réglementaire étroit ainsi que des obligations d'évaluation et de documentation correspondantes et, le cas échéant, des obligations de publication, incombant aux responsables de projets.

Art. 25, al. 1 L'art. 25, al. 1, vise spécifiquement l'obtention de données par l'ElCom et l'OFEN. Il ouvre à ces autorités l'accès à des données qui leur sont nécessaires à la mise en oeuvre de la loi ou à sa préparation (cf. message du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en 126 / 154

FF 2021 1666

électricité66). En raison de la transmission des données entre l'OFEN et l'ElCom introduite à l'art. 27, al. 1bis, le texte de la loi est précisé et mentionne expressément le développement de la loi comme un élément constitutif de l'exécution. Ce complément n'entraîne pas de modification matérielle, car l'aspect du développement est déjà compris matériellement dans le droit en vigueur d'après le passage du message précité («préparation»).

L'extension de l'obligation d'informer à l'exploitant du registre de données est nouvelle sur le plan matériel. Elle permet à l'ElCom d'exercer son activité de surveillance.

L'ordonnance pourra prévoir des obligations plus étendues en matière d'information (le cas échéant périodiques) pour l'exploitant du registre de données.

Art. 26, al. 1 La précision apportée à l'art. 25, al. 1, est logiquement répercutée dans l'art. 26, al. 1, les deux dispositions étant liées entre elles.

Art. 27, titre et al. 1bis La transmission des données introduite à l'al. 1bis couvre toutes les données disponibles auprès de l'OFEN ou de l'ElCom dont l'autorité requérante devrait disposer pour accomplir ses tâches. Les dispositions restreignant la transmission, notamment l'art. 14, al. 1, LSF67, doivent être observées. L'al. 1bis revêt une importance en particulier pour les données collectées en vertu de l'art. 25, al. 1: comme l'ElCom aussi bien que l'OFEN peuvent s'appuyer sur cette disposition, des recoupements sont possibles. Afin d'éviter, pour tous les intéressés, d'inefficaces collectes de données à double, l'al. 1bis permet la transmission entre ces instances des données nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches respectives. Sur la base des principes généraux du droit de la protection des données, il apparaît que les données ne peuvent notamment pas être traitées à des fins autres ou dans une ampleur dépassant ce qui est nécessaire à l'accomplissement des tâches pour lesquelles elles ont été transmises. Même s'il n'y a pas de devoir d'informer au sens de la LPD (art. 18a, al. 4, let. a, LPD), il semble utile, dans un esprit de transparence, que l'OFEN et l'ElCom informent les personnes concernées après coup sur les transmissions de données dès lors qu'elles représentent un volume non négligeable et pour autant que cela ne nécessite pas d'efforts disproportionnés. Lors
de futures acquisitions de données directement auprès d'entreprises du secteur de l'électricité, il faudrait en outre signaler la possibilité d'une transmission des données entre l'ElCom et l'OFEN.

Art. 29, al. 1, let. a, d, ebis et f, et 2bis Al. 1: la disposition contenue à l'actuel art. 6, al. 5, selon laquelle les gestionnaires d'un réseau de distribution sont tenus de répercuter proportionnellement sur les consommateurs captifs le bénéfice qu'ils tirent du libre accès au réseau, disparaît suite à la nouvelle conception de l'approvisionnement de base, désormais plus proche du

66 67

FF 2005 1493, 1547 RS 431.01

127 / 154

FF 2021 1666

marché (abandon de la régulation en fonction des coûts de revient). De ce fait, la disposition de l'art. 29, al. 1, let. a, devient caduque et doit être abrogée.

La disposition pénale du nouvel al. 1, let. ebis fait respecter l'obligation visée à l'art. 17bter qui s'applique aux gestionnaires d'un réseau de distribution et à tous les prestataires de mesure et exploitants de stations de mesure sur le libre marché. Il faut distinguer cette disposition pénale de la mise en oeuvre de l'obligation visée à l'art. 17bter sur le plan du droit administratif, qui relève de la compétence de l'ElCom (art. 22, al. 1). S'agissant de la nouvelle réserve d'énergie, la transmission d'informations inexactes ou incomplètes est aussi passible de sanction pénale. En plus des informations adressées à l'ElCom (qui sont déjà comprises dans l'actuelle let. f) il s'agit de la transmission de telles informations et de documents à Swissgrid, bien qu'elle ne soit pas une autorité. L'actuelle let. f est complétée sur ce point, et reste par ailleurs inchangée. Elle s'applique aussi aux informations en lien avec le nouvel instrument visé à l'art. 9bis (augmentation de la production d'électricité en hiver).

Al. 2bis: la possibilité d'infliger une amende selon l'art. 7 de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif68 est utilisée en l'occurrence, par exemple par analogie à l'art. 71 LEne, pour les amendes jusqu'à 20000 francs (au lieu de 5000 francs).

Art. 33c

Dispositions transitoires relatives à la modification du ...

L'al. 1 accorde à la branche un délai transitoire pour mettre en place les processus nécessaires à la mise en oeuvre de l'ouverture complète du marché.

À ce stade, les grands consommateurs finaux avaient également le droit de participer à l'approvisionnement de base. Ils ne perdaient ce droit qu'en signant un contrat sur le libre marché («libre un jour, libre toujours»). Désormais, les consommateurs finaux dont la consommation annuelle est de 100 MWh ou plus perdent ce droit. L'al. 2 clarifie ce qui se passe s'ils n'utilisent pas leur accès au réseau malgré l'absence de droit à l'approvisionnement de base.

Al. 3: le Conseil fédéral devra évaluer, dix ans après l'entrée en vigueur, si les prescriptions concernant l'adéquation des tarifs et le produit électrique standard (art. 6) dans l'approvisionnement de base demeurent nécessaires et appropriées. L'évolution du marché de l'électricité est difficilement prévisible. Les expériences sur le long terme montreront peut-être que des tarifs appropriés surviendront dans l'approvisionnement de base grâce à la seule possibilité de passer au libre marché. Les prescriptions légales et la charge liée à leur exécution seraient alors obsolètes. On peut aussi imaginer que les produits électriques à partir d'énergies indigènes et renouvelables seront de plus en plus répandus sur la base d'initiatives privées, en particulier si la demande en électricité produite de manière décentralisée augmente à l'échelle locale.

La disposition transitoire visée à l'al. 4 doit permettre au Conseil fédéral d'identifier à temps d'éventuels effets négatifs de l'ouverture complète du marché de l'électricité et de prendre des premières mesures. Pour ce faire, le Conseil fédéral observera les conditions sur le marché du travail dans le secteur de l'électricité pendant la période 68

RS 313.0

128 / 154

FF 2021 1666

prévue de dix ans. En ce qui concerne l'observation, il s'appuiera sur les rapports établis régulièrement par l'OFEN en vertu de l'art. 27, al. 3, OApEl. Ces rapports mettront à disposition les analyses nécessaires (p. ex. sur le niveau et l'évolution des salaires). Si le Conseil fédéral informe la commission tripartite de la Confédération, au sens de l'art. 360b CO, celle-ci décidera ensuite de son propre chef si elle entend procéder elle-même à des clarifications ou prendre des mesures. Les mesures de coordination et de développement dans le domaine de la formation et du perfectionnement professionnels visent à éviter dans la mesure du possible, ou du moins à atténuer, les conséquences négatives lors d'éventuelles restructurations et à contribuer à assurer la qualité et la sécurité d'approvisionnement. Dans ce cadre, le Conseil fédéral pourrait consulter les partenaires sociaux (et/ou d'autres organisations ou autorités) afin d'analyser la qualité et la disponibilité des offres de formation et de perfectionnement dans le secteur de l'électricité et d'examiner s'il y a lieu d'apporter des adaptations. Le domaine de l'exploitation du réseau, qui n'est pas concerné par l'ouverture du marché, n'est pas compris dans la réglementation visée à l'al. 4.

Al. 5: cette disposition transitoire vise à ce que l'ElCom ne soit pas limitée, même au début de la régulation Sunshine, à une vision ponctuelle des gestionnaires de réseau, mais puisse montrer l'évolution des résultats sur une certaine période. Cela permet une appréciation plus objective des gestionnaires de réseau dès l'entrée en vigueur du projet de loi. Pour que l'effet rétroactif reste modéré, l'ElCom peut seulement utiliser des données qui portent au plus tôt sur l'année 2022 et dont elle disposait déjà au moment de l'entrée en vigueur de la modification proposée. L'année 2022 sera la première année complète après que le message aura été soumis au Parlement. À compter de ce moment-là, les gestionnaires de réseau auront connaissance du fait que les données pourront aussi être utilisées ultérieurement pour la régulation Sunshine. L'ElCom indiquera en outre ce fait lors de l'acquisition des données correspondantes.

Art. 34, al. 2 et 3 Le projet de loi entraîne une ouverture complète du marché. En conséquence, la disposition finale de l'arrêté fédéral, qui fixait l'entrée en vigueur des dispositions prévues à l'époque, devient caduque et doit être abrogée.

5

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Évolution générale dans l'UE et accent sur les énergies renouvelables Ces 20 dernières années, l'UE a adopté plusieurs paquets législatifs portant sur le marché intérieur de l'énergie et accéléré ainsi l'intégration du marché intérieur de l'électricité. Les marchés de l'électricité ont été ouverts (libre choix du fournisseur depuis 2007) et des règles ont été définies concernant les échanges transfrontaliers d'électricité et l'encouragement des énergies renouvelables. Le quatrième paquet de cette série a été décidé en décembre 2018 et juin 2019. Il s'agit du train de mesures «Une énergie propre pour tous les Européens» (Clean Energy Package, CEP).

129 / 154

FF 2021 1666

Le CEP vise à renforcer l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables, avec un objectif global contraignant prévoyant une part d'au moins 32 % d'énergie renouvelable en 203069. Avec un mécanisme de gouvernance, l'UE crée un nouveau système de planification et de monitoring pour la mise en oeuvre des objectifs de l'union de l'énergie, en particulier les objectifs énergétiques et climatiques de l'UE à l'horizon 203070. Mais l'UE entend aller plus loin et a initié son projet de «pacte vert pour l'Europe» en 2019. D'ici 2050, l'objectif est de ne plus libérer d'émissions nettes de gaz à effet de serre et de promouvoir l'utilisation efficace des ressources en passant à une économie propre et circulaire. Les travaux relatifs au «pacte vert» sont en cours.

CEP: marché intérieur de l'électricité et sécurité d'approvisionnement Les règles du CEP pour le marché intérieur de l'électricité71 visent à améliorer l'intégration de l'électricité issue de sources renouvelables dans le système et le marché.

Les droits des consommateurs sont notamment renforcés pour leur permettre une participation plus active sur le marché, avec des règles pour les «clients actifs», les «communautés énergétiques citoyennes» ou l'«agrégation». Il y a en outre des règles sur les installations de stockage et un cadre pour l'utilisation de la flexibilité.

Les mécanismes du marché sont également renforcés par d'autres biais, par exemple par une responsabilité accrue de tous les acteurs du marché en matière d'équilibrage, et les possibilités d'échanges transfrontaliers à court terme sont améliorées. Les interconnexions à cet effet sont renforcées, avec une augmentation progressive jusqu'à 70 % des capacités disponibles pour les échanges. Il y a désormais des règles pour les marchés portant sur les capacités, qui rémunèrent la disponibilité des ressources. De tels mécanismes ne peuvent être introduits qu'en dernier recours, si une analyse de l'adéquation du système en révèle la nécessité. Ils ne doivent pas entraîner une distorsion du marché ni être durables.

Un nouveau règlement porte par ailleurs sur la préparation aux risques72 d'une crise électrique. Il prévoit une meilleure coopération entre les États.

69

70

71

72

Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte), JO L 328 du 21.12.2018, p. 82.

Règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l'union de l'énergie et de l'action pour le climat, modifiant les règlements (CE) no 663/2009 et (CE) no 715/2009 du Parlement européen et du Conseil, les directives 94/22/CE, 98/70/CE, 2009/31/CE, 2009/73/CE, 2010/31/UE, 2012/27/UE et 2013/30/UE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2009/119/CE et (UE) 2015/652 du Conseil et abrogeant le règlement (UE) no 525/2013 du Parlement européen et du Conseil, JO L 328 du 21.12.2018, p. 1.

Directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive2012/27/UE (refonte), JO L 158 du 14.6.2019, p. 125, et règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l'électricité (refonte), JO L 158 du 14.6.2019, p. 54.

Règlement (UE) 2019/941 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur la préparation aux risques dans le secteur de l'électricité et abrogeant la directive 2005/89/CE, JO L 158 du 14.6.2019, p. 1.

130 / 154

FF 2021 1666

Pertinence du droit de l'UE pour la Suisse Suite au terme mis aux négociations en vue d'un accord institutionnel, l'accord sur l'électricité visé par la Suisse et l'UE n'est plus envisageable jusqu'à nouvel avis. Le droit européen relatif au marché intérieur de l'électricité et les règles concernant les aides d'État ne sont donc pas déterminants pour la Suisse. La Suisse n'est pas tenue de prendre en compte le droit européen lorsqu'elle édicte des normes juridiques mais elle s'efforce toutefois souvent de le prendre en considération. Même en l'absence d'un accord sur l'électricité, le droit européen dans le secteur de l'électricité et de l'énergie reste en grande partie une référence. Les éléments nouveaux du présent projet de loi sont par conséquent conformes, dans toute la mesure du possible, au droit de l'UE. Le présent projet n'a jamais été conçu comme un projet de mise en oeuvre d'un accord sur l'électricité. Si la Suisse entend se rapprocher davantage du droit européen à l'avenir, même sans accord sur l'électricité, un autre projet de loi devra être établi.

Les thèmes suivants de la révision, en particulier, présentent un intérêt: Développement des énergies renouvelables: comme précisé ci-avant, l'UE accélère le développement des énergies renouvelables avec le CEP, dans le domaine de l'électricité également. Elle ne prévoit plus d'objectifs nationaux pour le développement, contrairement aux actes antérieurs, mais uniquement un objectif global pour l'UE. Il n'en demeure pas moins que chaque pays doit faire des efforts par le biais de contributions nationales. La Suisse fait de même avec le présent projet de loi, en renforçant dans la LEne les mesures permettant d'atteindre les objectifs de développement: elle modernise les instruments d'encouragement (avec des mises aux enchères partielles) et prolonge leur mise en oeuvre. Le droit européen sur les aides d'État, et notamment les lignes directrices en la matière, dont découlent de nombreuses exceptions qui relativisent fortement l'interdiction de principe des aides d'État, est en particulier pertinent.

Au regard du droit sur les aides d'État, un aspect positif de l'adaptation de la LEne est le fait que celle-ci subsistera au terme de la prime de marché pour la grande hydraulique et de l'arrêt du système de rétribution de l'injection. Ce
dernier n'est pourtant pas supprimé, mais est remplacé par des contributions d'investissement, reconnues dans l'UE par les règles sur les aides d'État. Pour être totalement conforme à l'UE, il faudrait éventuellement procéder à des ajustements des instruments dans le contexte des aides d'État.

Ouverture complète du marché et approvisionnement de base: l'ouverture complète du marché prévue par la LApEl est un élément central du droit européen. Le nouvel examen de l'adéquation dans l'approvisionnement de base sera axé sur une prise en compte de prix comparatifs (prix du marché en lieu et place des coûts de revient), sans toutefois que l'ElCom n'exerce un contrôle systématique en raison de la liberté du choix du fournisseur pour les consommateurs finaux. Un tel modèle est conforme au droit européen, le fait de ne plus se baser sur les coûts de revient étant notamment important. Un autre élément de l'approvisionnement de base à noter est le produit standard prescrit, composé d'énergies renouvelables indigènes. Si on le considère comme une contribution à la volonté centrale de développer les énergies renouvelables, intégrée dans le système global «ouverture du marché/approvisionnement de base», il apparaît acceptable du point de vue du droit de l'UE. Ce d'autant plus que le marché n'est guère affecté, car les consommateurs finaux ont la possibilité de changer

131 / 154

FF 2021 1666

de fournisseur ou de choisir un autre produit auprès du fournisseur de l'approvisionnement de base. Une certaine divergence avec l'UE existe toutefois pour ce qui est du délai d'une année prévu pour quitter l'approvisionnement de base, ce délai étant plus court au sein de l'UE.

Réserve d'énergie et augmentation de la production d'électricité en hiver: dans le cadre de la réserve d'énergie, ce n'est pas la puissance, mais l'énergie en tant que telle qui est conservée. Néanmoins, la réserve pourrait être considérée comme une réserve stratégique et par conséquent comme un marché de capacité. Le besoin, qui doit être avéré pour qu'une réserve puisse être réalisée, devrait être accepté pour le modèle suisse, ou en tout cas il devrait être considéré comme admissible, car il s'agit d'une assurance à petite échelle conçue pour couvrir quelques semaines critiques. De plus, la réserve est basée sur une mise aux enchères, ouverte à toute technologie, et fonctionne en dehors des mécanismes du marché. Le second élément de la LApEl en faveur de la sécurité d'approvisionnement, à savoir l'augmentation de la production d'électricité en hiver, peut également subsister face au droit européen: s'il s'agit en premier lieu de développer les centrales hydrauliques à accumulation en s'appuyant sur l'instrument accepté de la contribution d'investissement, on obtient un développement des énergies renouvelables. Contrairement aux formes habituelles de soutien prévues dans la LEne, un accent est mis sur ce développement dans l'intérêt de la sécurité d'approvisionnement en hiver. C'est pourquoi la LApEl prévoit des critères plus spécifiques et très ciblés.

Autres aspects: le droit européen ne connaît pas de prescriptions sur tous les thèmes de la présente révision. L'UE exige certes un déploiement des compteurs intelligents, mais elle ne prévoit pas de dispositions concernant le libre choix du fournisseur pour ce qui est des systèmes de mesure. Avec ses propositions portant sur les flexibilités et le registre de données, la Suisse est progressiste en comparaison européenne et en ligne avec les règles de l'UE. L'exemption de la rémunération pour l'utilisation du réseau visant les centrales de pompage-turbinage, qui n'est pas une nouveauté, ne sera en revanche guère conforme au droit européen. Enfin, l'espace d'innovation («bac à sable réglementaire» prévu n'est pas problématique sur le plan du droit européen.

6

Conséquences

6.1

Conséquences sur l'état du personnel de la Confédération

À l'OFEN, par rapport à la situation actuelle, le projet nécessite des postes supplémentaires à durée indéterminée équivalant à 200 points de pourcentage. Ils seront entièrement financés par le supplément perçu sur le réseau, lequel demeure inchangé. Ils serviront dès 2022 à l'exécution de l'encouragement du photovoltaïque conçue de façon plus concurrentielle (mises aux enchères) et aux travaux préparatoires liés à l'exécution (d'une durée indéterminée). En outre, les postes équivalant à 400 points de pourcentage chargés de l'application de la prime de marché pour la grande hydraulique et de l'élaboration d'un modèle proche de la réalité du marché pour la grande hydraulique qui arriveront à échéance fin 2022 seront transformés en postes à durée indéterminée. Ils sont également entièrement financés et serviront dès 2024 132 / 154

FF 2021 1666

(300 points de pourcentage) ou 2022 (100 points de pourcentage) à la conception et à l'application d'un encouragement concurrentiel par le biais de contributions d'investissement, notamment des nouvelles contributions d'investissement destinées à la production d'électricité d'origine hydraulique en hiver. En outre, l'OFEN a besoin de postes équivalant à 200 points de pourcentages à titre transitoire (de 2022 à 2024) pour améliorer la disponibilité des données et l'accès à celles-ci dans le domaine de l'électricité, en particulier pour la mise en place du registre de données prévu dans le projet de loi.

À l'ElCom, le projet nécessite des postes supplémentaires à durée indéterminée équivalant à 300 points de pourcentage par rapport à la situation actuelle. Ils sont en partie financés. Les postes seront requis dès 2024 pour de nouvelles tâches d'exécution ou des tâches plus étendues dans les domaines de l'ouverture du marché, de la réserve d'énergie, des systèmes de mesure et de la régulation du réseau.

Les adaptations des prescriptions en matière de déclaration (art. 44 LEne) n'ont pas de conséquences sur l'état du personnel de la Confédération.

6.2

Conséquences financières pour la Confédération

L'application des mises aux enchères instaurées par ce projet pour les grandes installations photovoltaïques et les contributions d'étude de projet impliquent pour l'OFEN des coûts annuels de 550000 francs, financés par des moyens issus du supplément perçu sur le réseau.

Pour garantir que les projets de géothermie lancés en application des mesures d'encouragement au sens de la LEne et de la loi sur le CO2 soient réalisés de la manière la plus sûre possible, la Confédération financera, sur la base de l'art. 51 de la loi du 7 octobre 1983 sur la protection de l'environnement73, des installations de contrôle et de surveillance pour le monitoring notamment des risques sismiques par le Service sismologique suisse et par les cantons, ce qui grèvera le budget fédéral de 800 000 francs par an.

Les adaptations des prescriptions en matière de déclaration (art. 44 LEne) n'ont pas de conséquences financières pour la Confédération.

6.3

Conséquences pour le fonds alimenté par le supplément et autres conséquences

Les coûts liés aux nouvelles contributions d'investissement pour les installations éoliennes, les petites centrales hydroélectriques, les installations de biomasse et les centrales géothermiques, aux mises aux enchères pour les installations photovoltaïques, à l'augmentation des subventions pour la grande hydraulique et aux contributions d'étude de projet s'élèvent à près de 215 millions de francs par an. Par ailleurs, des besoins de 40 millions de francs par an sont prévus pour le financement des droits 73

RS 814.01

133 / 154

FF 2021 1666

acquis en ce qui concerne le tarif de reprise pour les exploitants d'installations photovoltaïques pendant dix ans à compter de l'ouverture du marché de l'électricité.

Besoins d'encouragement supplémentaires

Montant en millions CHF/an

Mises aux enchères pour les installations photovoltaïques

65

Contributions d'investissement allouées pour les grandes installations hydroélectriques

55

Contributions d'investissement allouées pour les installations de biomasse

30

Contributions d'investissement allouées pour les petites installations hydroélectriques

30

Contributions d'étude de projet

20

Contributions d'investissement allouées pour les installations éoliennes

15

Garantie des droits acquis pour les installations photovoltaïques

40

Total

255

Tableau 1: Répartition prévisionnelle des besoins d'encouragement supplémentaires entre les différentes technologies.

Le financement du dispositif d'encouragement adapté sera assuré par le supplément perçu sur le réseau, qui reste à un maximum de 2,3 ct./kWh (près de 1,3 milliard de francs par an). Même si certains instruments d'encouragement, tels que la prime de marché pour la grande hydraulique existante, sont supprimés, les moyens sont limités pour la réalisation des objectifs. Les nouveaux objectifs de développement devraient toutefois pouvoir être atteints grâce à des initiatives privées et à des innovations. Une condition importante est par ailleurs que des prix du CO2 nettement plus élevés en Europe entraînent également une hausse des prix de l'électricité en Suisse.

Le report de l'échéance des instruments d'encouragement de 2030 à 2035 a pour conséquence que le supplément perçu sur le réseau sera prélevé cinq ans de plus auprès des consommateurs finaux d'électricité, au niveau actuel. Les coûts liés au financement de la poursuite de l'encouragement après 2030 sont estimés entre 500 et 550 millions de francs par an.

134 / 154

FF 2021 1666

Figure 4: Évolution du fonds alimenté par le supplément. Les hypothèses de base se fondent sur un scénario moyen, vraisemblable d'un point de vue actuel, la planification actuelle et l'entrée en vigueur de la présente révision de la LEne en 2023. Les modifications des conditions-cadres, des hypothèses ou des contributions d'encouragement peuvent donner lieu à des écarts importants. Les effets d'innovation ont été pris en compte dans les rétributions uniques pour les petites installations.

En cas de demande très forte, les besoins d'encouragement peuvent être réglés par des contingents ou l'abaissement des taux de financement. En cas d'évolution inattendue et non influençable des conditions-cadres, il pourrait toutefois y avoir des pénuries de liquidités. En pareil cas, la Confédération pourra avancer les sommes nécessaires à l'égard du fonds alimenté par le supplément.

Autres conséquences Pour l'augmentation de la production d'électricité issue des centrales à accumulation en hiver d'environ 2 TWh, 900 millions à 1,3 milliard de francs seront globalement nécessaires. Le financement sera assuré par le supplément sur le réseau de transport qui est aujourd'hui déjà prévu à l'art. 9, al. 4, LApEl pour éviter d'éventuels déficits au niveau de la sécurité d'approvisionnement. Les surcoûts qui en résultent pour les

135 / 154

FF 2021 1666

consommateurs d'électricité doivent être mis en relation avec les coûts potentiellement très élevés découlant d'une situation persistante de pénurie d'électricité74.

6.4

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Les mesures proposées ne génèrent aucune conséquence directe importante pour les cantons et les communes, les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne.

Les cantons et les communes en profitent indirectement en tant que propriétaires d'entreprises qui reçoivent des contributions d'encouragement. Les régions dans lesquelles les investissements, sur la base de l'encouragement, sont injectés dans des capacités de production d'électricité profitent des conséquences qui en découlent pour l'emploi et les redevances aux communes. Il s'agit surtout des régions de montagne.

En tant que propriétaires, les cantons et les communes profitent en outre indirectement des conséquences sur les gestionnaires de réseau, surtout dans la mesure où la future valeur de rendement des entreprises concernées par l'ouverture du marché, dont ils sont propriétaires, peut changer. La future valeur de rendement dépend essentiellement de la façon dont ces entreprises feront face à la concurrence.

6.5

Conséquences pour les consommateurs finaux (en particulier les ménages et les grands consommateurs)

Les principales conséquences du projet pour les consommateurs finaux sont présentées ci-après.

D'une manière générale, ce projet permet aux consommateurs finaux de bénéficier d'une amélioration de la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Cela revêt une grande importance, notamment du fait de l'électrification croissante, aussi bien pour les petits que pour les grands consommateurs finaux. Pour financer les mesures nécessaires à l'augmentation de la production d'électricité indigène en hiver, un «supplément hiver» de 0,2 ct./kWh au maximum sera prélevé. Tous les consommateurs finaux devront s'en acquitter.

À la suite de l'ouverture complète du marché de l'électricité, l'ensemble des consommateurs finaux auront accès au marché de l'électricité. Ils pourront utiliser cette possibilité, d'une part, pour vendre l'électricité qu'ils auront produite, par exemple au moyen d'une installation photovoltaïque sur le toit de leur maison, directement et simplement à d'autres consommateurs finaux. D'autre part, l'ouverture du marché de l'électricité leur donnera la possibilité de choisir entre différentes offres de produits 74

www.babs.admin.ch > Autres domaines d'activités > La gestion des risques et des dangers > Analyse nationale des risques; cf. à ce sujet le rapport de l'Office fédéral de la protection de la population de novembre 2020 sur l'analyse nationale des risques.

136 / 154

FF 2021 1666

électriques ou de recourir à des services en lien avec le produit électrique. Les services envisageables sont multiples et comprennent par exemple la combinaison entre un produit électrique et une solution de recharge dans le domaine de la mobilité électrique ou l'optimisation de la consommation dans des installations appartenant aux consommateurs finaux. L'ouverture du marché de l'électricité leur garantit effectivement l'accès à l'ensemble des services proposés en Suisse et les consommateurs finaux ne dépendront plus de l'offre d'un distributeur d'énergie local. Les consommateurs finaux profiteront ainsi directement de la force d'innovation de ce secteur. En même temps, un approvisionnement de base régulé demeure possible pour les consommateurs finaux qui ne souhaitent pas recourir à des services. Ils sont alors fournis en courant indigène renouvelable, à moins qu'ils demandent expressément à ce qu'il en soit autrement. Le projet de loi règle des points essentiels liés à la mise en oeuvre de l'ouverture du marché de l'électricité et tient explicitement compte des préoccupations des consommateurs. Il garantit par exemple la transparence des produits et améliore l'information à la clientèle.

Pour les consommateurs finaux qui aimeraient exploiter leurs propres installations de production d'électricité à partir d'énergies renouvelables, à l'instar d'une installation photovoltaïque sur leur bâtiment, le projet de loi présente d'autres avantages: grâce à la prolongation des mesures d'encouragement jusqu'en 2035, ils pourront en principe obtenir des contributions d'investissement pour la construction d'une telle installation. Le supplément perçu sur le réseau actuel (max. 2,3 ct./kWh) ne subit pas d'augmentation, mais sera, en contrepartie, prélevé plus longtemps.

En outre, diverses mesures dans le domaine de la régulation du réseau électrique sont importantes pour les consommateurs finaux. À la suite de l'introduction d'une régulation de la flexibilité, les consommateurs finaux deviendront explicitement les détenteurs de leur flexibilité (p. ex. la flexibilité dans le cadre de l'utilisation de leur pompe à chaleur). Les consommateurs finaux pourront utiliser leur flexibilité, conformément à la réglementation prévue, de manière autonome ou la mettre à la disposition d'un gestionnaire d'un réseau de
distribution ou d'un tiers moyennant une rétribution. Ils n'ont pas ces droits à l'heure actuelle. L'adaptation de la tarification de l'utilisation du réseau permettra en principe aux consommateurs finaux de bénéficier d'une infrastructure de réseau rentable à long terme. La liberté de choix prévue dans le domaine des systèmes de mesure leur donnera la possibilité de solliciter directement de nouveaux services pour pouvoir, par exemple, mettre en oeuvre simplement des mesures visant à améliorer l'efficacité énergétique ou à optimiser la consommation propre. La création d'un registre de données à l'échelle nationale permettra aux consommateurs finaux de profiter d'un échange de données et d'informations efficace et sûr. Les comparatifs dans le cadre de la régulation Sunshine, accessibles au public, leur fourniront des informations transparentes, en particulier concernant les coûts, les tarifs et la qualité de l'approvisionnement dans leur région.

6.6

Conséquences économiques

Le financement du régime d'encouragement adapté dans la LEne assure la mise en oeuvre des objectifs de la Stratégie énergétique 2050 et contribue à la réalisation de 137 / 154

FF 2021 1666

l'objectif climatique de zéro émission nette. Cela peut se faire dans le cadre du supplément perçu aujourd'hui déjà sur le réseau et qui ne sera pas augmenté. Les consommateurs d'électricité ne seront donc pas sollicités davantage qu'aujourd'hui, mais ils le seront un peu plus longtemps. En raison de la prolongation du régime d'encouragement, l'abaissement du supplément perçu sur le réseau est reporté de cinq ans à 2035.

La garantie de l'approvisionnement spécialement en hiver est assurée par l'encouragement de l'augmentation de la production d'électricité issue des centrales à accumulation en hiver d'environ 2 TWh. Son financement nécessite un supplément sur le réseau de transport à hauteur de 0,2 ct./kWh au plus. À la différence du fonds alimenté par le supplément au sens de la LEne, il n'y a pas de remboursement prévu pour les entreprises grandes consommatrices d'électricité, car la sécurité d'approvisionnement est un bien important pour tous. Les coûts sont donc répercutés sur tous les consommateurs finaux.

Les adaptations prévues dans la LEne et la LApEl susciteront des innovations et des progrès techniques dans le domaine des énergies renouvelables en plus d'une nette amélioration des conditions-cadres visant à renforcer la sécurité de l'approvisionnement de la Suisse et à réaliser les objectifs de développement de la Stratégie énergétique 2050. L'ouverture complète du marché prévue dans la LApEl, qui donne une liberté de choix du fournisseur économiquement importante pour tous les consommateurs finaux, encourage ainsi l'innovation, laquelle soutient la mise en oeuvre de la Stratégie énergétique 2050. Une tarification de l'utilisation du réseau plus conforme au principe de causalité entraîne une meilleure équité des coûts et peut conduire à une optimisation du développement du réseau à long terme. En outre, il y aura une tendance à la réduction du développement conventionnel du réseau grâce à une utilisation accrue des flexibilités (au service du réseau et du marché). La régulation Sunshine offrira de meilleures incitations à l'efficacité dans le monopole du réseau. Une liberté de choix judicieusement limitée, du point de vue macroéconomique, dans le domaine des systèmes de mesure conduira à des innovations de produits à l'interface entre le marché et le réseau et favorisera l'émergence de nouveaux services énergétiques.

6.6.1

Évaluation des conséquences en lien avec la réalisation de l'objectif de zéro émission nette

Dans le cadre des Perspectives énergétiques 2050+, l'OFEN a commandé une étude pour déterminer les conséquences économiques liées à la réalisation de l'objectif de zéro émission nette (produit intérieur brut, prospérité, emploi, commerce extérieur, etc.). Le recours à un modèle d'équilibre dynamique prévisible doit permettre d'analyser les conséquences économiques d'une Suisse climatiquement neutre (zéro émission nette) par rapport au scénario «Poursuite de la politique énergétique actuelle».

Divers scénarios de mesures politiques sont considérés dans le contexte international.

Au moment de l'adoption du message, l'étude était en cours d'élaboration. Le rapport final, prévu fin 2021, sera publié. Les commissions parlementaires seront informées de la publication dans les meilleurs délais.

138 / 154

FF 2021 1666

6.6.2

Évaluations des mesures économiquement importantes

Régime d'encouragement La poursuite des instruments d'encouragement pour des technologies qui ne seraient sinon plus soutenues à partir de 2023 nécessite la perception de quelque 215 millions de francs de plus chaque année auprès des consommateurs d'électricité par rapport à l'actuelle LEne, à partir de l'entrée en vigueur du présent projet et jusqu'en 2030.

Environ 40 millions de francs par an pendant dix ans seront en outre utilisés pour garantir les droits acquis dans le tarif de reprise pour les installations photovoltaïques.

En raison de la prolongation du régime d'encouragement, l'abaissement du supplément perçu sur le réseau est reporté de cinq ans à 2035, tout comme l'allègement pour les consommateurs d'électricité (entre 500 et 550 millions de francs par an). En revanche, le renforcement sensible du développement pourrait donner lieu à la création de places de travail supplémentaires, dans le domaine du photovoltaïque notamment.

Il faut surtout s'attendre à des innovations et à des développements du parc immobilier suisse comme site de production d'électricité.

Augmentation de la production des centrales à accumulation en hiver Pour encourager l'augmentation de la production d'électricité issue des centrales à accumulation, 900 millions à 1,3 milliard de francs seront globalement nécessaires. Il en résulte une charge supplémentaire de quelque 120 millions de francs par an pour les consommateurs d'électricité pour une durée de neuf à treize ans. Le Conseil fédéral fixe le supplément sur le réseau de transport en fonction des besoins. Le développement suscite notamment des investissements dans le domaine de la force hydraulique et conduit, sur place, à une valeur ajoutée régionale relativement élevée.

Ouverture complète du marché de l'électricité La liberté de choix liée à une ouverture complète du marché pour tous les clients finaux entraîne une meilleure orientation client de la part des gestionnaires de réseau.

Des avantages financiers devraient apparaître en particulier pour les grandes PME, qui opèrent encore à ce stade sous le régime du monopole partiel.

D'un point de vue économique, les effets suivants sont escomptés: ­

Effets dynamiques positifs sur la branche de l'électricité: de nouvelles offres plus spécifiquement définies en fonction des clients apparaîtront; la pression en faveur de l'efficacité augmentera dans le cadre des achats (p. ex. acquisitions conjointes dans un cadre élargi).

­

Réduction des différences de prix entre les régions: l'apparition d'une concurrence réduira les différences actuelles dans les prix de l'énergie dans l'approvisionnement de base.

­

Possibilités d'économies pour les consommateurs finaux: d'éventuelles futures baisses de prix de l'électricité bénéficieront aux PME et aux ménages ainsi qu'aux grands clients restés dans l'approvisionnement de base.

139 / 154

FF 2021 1666

Outre ces incitations fondamentales à l'efficacité, une ouverture complète du marché crée un champ bien plus vaste pour les innovations de produits et de processus qui n'ont pas pu s'établir jusqu'ici dans le cadre de l'ouverture partielle du marché. Cela tient au fait que seul un marché complètement ouvert incite largement à développer des modèles d'affaires inédits et novateurs, notamment pour une utilisation étendue et économique des énergies renouvelables. Un regard sur l'étranger le montre: nombre de nouveaux modèles d'affaires pour les énergies renouvelables ou l'efficacité énergétique ne sont pas possibles aujourd'hui en Suisse. Or, les innovations escomptées, de même que le produit standard à partir d'énergies indigènes uniquement renouvelables qui est défini dans l'approvisionnement de base, soutiennent la mise en oeuvre de la Stratégie énergétique 2050.

En ce qui concerne les effets d'innovation, un examen des modèles d'affaires pour les énergies renouvelables dans les pays voisins montre que le marché des énergies renouvelables bénéficie, de façon générale, de la possibilité de vendre directement aux consommateurs finaux et d'une formation des prix plus flexible75. Les modèles fondés sur un mode d'acquisition de l'électricité par des sources autres que le fournisseur de l'approvisionnement de base ne peuvent pas être mis en oeuvre en Suisse à l'heure actuelle. Sur les marchés de l'électricité ouverts, les nouveaux acteurs comme les acteurs établis sont appelés à tenir davantage compte des besoins des clients finaux. En plus des effets sur les prix, cela offre de meilleures opportunités pour des modèles d'affaires qui contribuent à une diffusion plus rapide des énergies renouvelables et à leur intégration dans le marché. Dans le marché élargi, outre les entreprises établies, des communautés de citoyens (ainsi que des particuliers), des PME, des entreprises du commerce de détail, des entreprises de transport et des entreprises de services peuvent s'engager à produire des énergies renouvelables et à assurer une commercialisation de proximité. L'ouverture complète du marché crée de nouveaux modèles de participation, si bien que des locataires, par exemple, peuvent produire eux-mêmes leur propre courant dans la région et le consommer. L'électromobilité pourra également bénéficier des nouvelles
offres de produits dans le marché élargi, ce qui permettra une meilleure diffusion. De même, des potentiels de flexibilité supplémentaires pourront être mieux exploités dans la production et la consommation. Ces potentiels peuvent aussi soutenir l'utilisation accrue du couplage des secteurs à long terme.

Un produit standard à partir d'énergies indigènes renouvelables sera défini dans l'approvisionnement de base afin de soutenir la mise en oeuvre de la Stratégie énergétique 2050. Parallèlement à la tendance à la baisse des prix occasionnée par une ouverture du marché, ce dispositif pourrait entraîner des surcoûts pour les consommateurs finaux dans l'approvisionnement de base. Mais ces coûts supplémentaires devraient rester limités, puisque la réglementation actuelle (en application de l'art. 6, al. 5bis, LApEl, décidé par le Parlement dans le cadre de la stratégie Réseaux électriques) a pour effet que l'électricité renouvelable est d'ores et déjà davantage vendue dans l'approvisionnement de base.

75

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Approvisionnement en électricité > Révision de la LApEl; cf. Reinschauer & Hampl (2018), Analyse von Geschäftsmodellinnovationen für Erneuerbare Energien in liberalisierten Märkten, Institut für Strategisches Management, Wirtschaftsuniversität Wien (en allemand uniquement).

140 / 154

FF 2021 1666

Réserve d'énergie Les coûts d'une réserve d'énergie sont de quelques dizaines de millions de francs par an (selon une estimation approximative, entre 15 et 30 millions de francs)76. Ces coûts sont refinancés par la rémunération pour l'utilisation du réseau de transport, ce qui correspond à une hausse des tarifs d'utilisation du réseau de 0,025 à 0,05 ct./kWh.

Sous l'angle du dimensionnement, la solution visée est celle d'une conservation exclusivement de l'énergie. Par rapport à une réservation supplémentaire de puissance, cette variante entraîne des coûts beaucoup plus faibles et son impact sur le marché des services-système est nettement moindre.

Tarification de l'utilisation du réseau Les adaptations de la tarification tiennent compte du fait que les caractéristiques structurelles du réseau et la charge (de pointe) sont des facteurs essentiels dans le dimensionnement du réseau et partant, dans les coûts de réseau, qu'il faut davantage prendre en compte. Étant donné le principe du point de prélèvement, ceci concerne d'abord le consommateur final, c'est-à-dire la tarification au niveau de réseau 7. La rémunération pour l'utilisation du réseau qui reflète davantage les coûts garantit que les coûts sont payés par celui qui les génère et que l'ensemble du système est mieux piloté sur le long terme. Elle peut réduire les besoins de développement du réseau à moyen et long termes et contribue ainsi à réduire les coûts de réseau. Les adaptations prévues mènent à une meilleure conformité au principe de causalité tout en étant compatibles avec les objectifs de la Stratégie énergétique 2050.

Régulation Sunshine L'introduction d'une régulation Sunshine vise à améliorer graduellement le système actuel de la régulation basée sur les coûts, ce qui peut engendrer une plus grande efficacité. La réalisation des objectifs dépend pour beaucoup de l'effet de la publication des indices sur les propriétaires des réseaux de distribution (l'idée étant qu'ils anticipent une perte de réputation). L'ElCom pourra utiliser les éléments tirés de la régulation Sunshine pour approfondir son examen des coûts. De plus, une évaluation régulière de l'évolution des coûts de réseau dans le cadre de la régulation Sunshine incitera les gestionnaires de réseau à adopter un comportement efficient, ce qui aura des effets positifs sur
le plan économique. Si les gains d'efficacité demeurent insuffisants, le Conseil fédéral soumettra un projet visant à introduire une régulation incitative. Une rémunération pour l'utilisation du réseau plus efficace en termes de coûts induit à moyen terme des réductions sensibles des charges pour tous les consommateurs finaux, car cette rémunération représente en moyenne un peu plus de la moitié des coûts de l'électricité.

76

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Approvisionnement en électricité > Révision de la LApEl; cf. Frontier Economics et Consentec (2018), Ausgestaltung einer strategischen Reserve für den Strommarkt (en allemand avec résumé en français).

141 / 154

FF 2021 1666

Flexibilités La régulation des flexibilités a pour but principal de permettre d'en exploiter mieux et plus largement le potentiel économique, qui est considérable en Suisse77. Un cercle de détenteurs clairement défini est mis en place à cet effet, ce qui encourage l'utilisation économique des flexibilités. Grâce aux possibilités de pilotage et d'ajustement de l'injection dont disposent les gestionnaires de réseau et moyennant l'intégration requise des flexibilités dans la planification du réseau, les besoins de développement du réseau peuvent être réduits à moyen et long termes. En outre, les nouveaux modèles d'affaires sont encouragés, ce qui entraîne d'importantes innovations et peut contribuer à ce que les unités de charge et de consommation actuelles soient coordonnées plus efficacement.

Concernant la gestion de l'injection, le potentiel de réduction des coûts au niveau du réseau inhérent à une meilleure utilisation des flexibilités est estimé à quelque 800 millions de francs sur 20 ans après déduction des coûts de mise en oeuvre78. Cette estimation ne tient pas compte des coûts de gestion de l'injection, soit en particulier du coût des acquisitions de remplacement et celui des dédommagements pour les quantités d'énergie non injectées (ajustement de l'injection). Il faut encore ajouter à cela les potentiels offerts par les nouveaux modèles d'affaires sur le marché.

Systèmes de mesure À l'heure actuelle, les déficits ­ tarifs excessifs pour la mesure des courbes de charge et qualité du service ­ se situent surtout au niveau des grands consommateurs finaux avec consommation propre et des consommateurs finaux disposant de plusieurs sites de consommation (grands distributeurs, etc.). Des coûts de mesure élevés peuvent constituer une barrière à l'entrée sur le marché et dissuader de participer au libre marché de l'électricité. Le droit partiellement accordé au libre choix du fournisseur dans les segments de clientèle qui y sont sensibles crée des incitations à ce que les fournisseurs existants dans la zone de desserte des gestionnaires de réseau, mais aussi les nouveaux prestataires, proposent les prestations de mesure à des prix intéressants et de meilleure qualité. Cela permet aussi un meilleur contrôle des offres restantes dans le monopole. Une ouverture, dans des proportions adaptées, du marché
pour les systèmes de mesure soutient, de façon générale, le développement de nouveaux services énergétiques, lesquels mènent à une plus grande efficacité énergétique.

Tant le développement des flexibilités que la liberté de choix inscrite dans la loi concernant les systèmes de mesure apportent donc des avantages économiques. L'amélioration de l'utilisation des flexibilités permet à leurs détenteurs de réaliser des revenus supplémentaires ou de réduire leurs versements dans le cadre de la rémunération pour l'utilisation du réseau, tandis que le réseau peut se développer plus efficacement sur le long terme, ce qui génère en retour des effets généraux sur la rémunération pour

77

78

www.gazenergie.ch; cf. Breig, O. et al. (2016), Multi-Client-Studie Endkundenflexibilität. Eine Empfehlung zur besseren Nutzung der Flexibilitätspotenziale bei den Schweizer Stromverbrauchern bis 2020, Zollikon (en allemand uniquement).

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Approvisionnement en électricité > Révision de la LApEl; cf. Infras (2017), Regulierungsfolgenabschätzung zur Revision Stromversorgungsgesetz (StromVG) (en allemand uniquement).

142 / 154

FF 2021 1666

l'utilisation du réseau qui bénéficient à l'ensemble des consommateurs finaux. La liberté de choix dans le domaine des systèmes de mesure conduira aussi à des baisses de coûts significatives pour les clients concernés.

6.6.3

Conséquences pour l'emploi et effets de répartition

Le développement plus important du photovoltaïque conduit à une augmentation de l'emploi dans le secteur des installateurs, des couvreurs et des électriciens. Mais la hausse visée en matière de construction d'installations hydroélectriques, éoliennes, géothermiques et de biomasse entraîne également une création de valeur accrue, surtout dans les régions périphériques. L'effet pour la force hydraulique résulte notamment des mesures visant à améliorer la sécurité de l'approvisionnement en électricité pendant l'hiver. La perception d'un supplément pour soutenir l'augmentation de la production hivernale conduit à une certaine charge supplémentaire pour les branches grandes consommatrices d'électricité.

Du point de vue actuel, les mesures prévues ne devraient en outre pas avoir un grand impact sur le nombre d'actifs dans la branche de l'électricité. Le Conseil fédéral observera les conséquences de l'ouverture du marché. S'il constate des conséquences négatives concernant les conditions de travail dans le secteur de l'électricité, il pourra engager des mesures correspondantes. D'éventuelles adaptations structurelles découlant de l'ouverture complète du marché de l'électricité devraient être compensées par une demande de main-d'oeuvre accrue due à l'émergence de nouveaux produits et services.

Les mesures ne devraient pas engendrer d'importants effets de répartition. À court terme, les effets provenant surtout de l'ouverture complète du marché et l'augmentation prévue de la production des centrales à accumulation en hiver peuvent s'avérer importants. En cas de tendance baissière des prix de l'électricité, les ménages profitent de l'allègement de leurs coûts d'électricité. Dans une perspective régionale, l'ouverture du marché devrait surtout bénéficier aux consommateurs finaux dans les régions où le niveau de prix est actuellement élevé.

Les autres mesures de la révision dans le cadre de la LApEl tendront à se faire sentir plutôt à moyen et long termes79.

6.6.4

Conséquences pour les branches

Effets au sein de la branche de l'électricité Les meilleures conditions d'encouragement et les mesures visant à renforcer la sécurité d'approvisionnement en hiver conduisent à une amélioration des conditions d'investissement pour la branche de l'électricité. La force hydraulique joue un rôle de premier plan dans les mesures visant à renforcer la sécurité d'approvisionnement en 79

www.ofen.admin.ch > Approvisionnement > Approvisionnement en électricité > Révision de la LApEl; cf. Infras (2017): Regulierungsfolgenabschätzung zur Revision Stromversorgungsgesetz (StromVG) (en allemand uniquement).

143 / 154

FF 2021 1666

hiver. Les projets hydrauliques entraînent une valeur ajoutée régionale relativement élevée, qui apparaît surtout dans les régions de montagne du fait de la situation des lacs d'accumulation nouvellement construits ou agrandis.

L'ouverture complète du marché devrait entraîner un gain d'efficacité dans la branche suisse de l'électricité. Elle mènera au développement de nouvelles prestations et influencera aussi les prix. Elle aura des répercussions sur la concurrence au niveau de la production. Elle mettra en avant les opportunités économiques, comme c'est généralement le cas lors d'une ouverture de marché, et les risques commerciaux. Ce point est important dans les cas où les propres centrales électriques ne sont pas en mesure de produire à des prix concurrentiels. Cet effet est atténué par le fait que, dans l'approvisionnement de base, les consommateurs finaux se voient proposer un produit standard leur permettant de choisir s'ils veulent soutenir une offre d'énergies renouvelables d'origine suisse. Tous les producteurs suisses, en particulier les entreprises possédant des centrales hydroélectriques en Suisse, en profitent, puisque les garanties d'origine gagnent en valeur.

Une meilleure prise en compte des coûts au niveau de réseau 7 renforce, de façon générale, la rentabilité à long terme du développement du réseau. La régulation prévue des flexibilités et l'élargissement du marché des services-système, étayé (en sus) par la loi, encouragent la concurrence et sont susceptibles d'attirer de nouveaux acteurs sur le marché. À plus long terme, la nouvelle régulation des flexibilités devrait générer un potentiel d'innovation considérable, notamment si les petits consommateurs finaux et leur comportement d'utilisateurs sont, eux aussi, mieux intégrés dans le marché lors de l'introduction des compteurs intelligents.

Dans le domaine des systèmes de mesure également, de nouveaux acteurs peuvent entrer sur le marché et concurrencer les prestataires établis. Les nouveaux arrivants ont du succès s'ils soumettent des offres plus économiques. Comme le marché des systèmes de mesure est partiellement ouvert, les coûts consécutifs à l'ouverture du marché restent limités pour les gestionnaires de réseau, notamment parce que des mandats sont d'ores et déjà donnés à des tiers.

Effets sur d'autres branches Les
autres branches sont surtout influencées par l'ouverture complète du marché.

Tous les consommateurs finaux commerciaux et industriels ont ainsi la possibilité de lutter à armes égales avec leurs concurrents européens pour leurs achats d'électricité.

Les effets dynamiques d'une ouverture du marché de l'électricité, qui stimulent l'innovation, et à long terme la régulation des flexibilités, peuvent avoir des effets induits dans l'ensemble de l'économie. Le supplément perçu sur les coûts du réseau de transport pour la réalisation de l'objectif de production d'électricité hivernale (0,2 ct./kWh) entraîne surtout des coûts supplémentaires pour les branches énergivores. Ces branches profitent directement d'un renforcement de la sécurité d'approvisionnement en hiver, même si les entreprises très grandes consommatrices d'électricité (p. ex.

celles qui sont actives dans le recyclage de la ferraille) sont particulièrement touchées sur le plan financier.

Une adaptation de l'étiquette-énergie pour les installations, véhicules et appareils fabriqués en série n'entraînerait pas de coûts supplémentaires pour les acteurs de la branche par rapport à la situation actuelle. Des coûts supplémentaires résultant 144 / 154

FF 2021 1666

d'autres mesures pour la branche seraient, le cas échéant, présentés dans le cadre d'une révision de l'OEEE.

6.7

Conséquences sociales et environnementales

Il est probable que les chauffages à mazout et au gaz soient de plus en plus remplacés par des systèmes de pompes à chaleur. Dans le domaine de la mobilité, les moteurs à combustion perdent du terrain au profit de moteurs électriques de plus en plus efficaces. L'électrification dans les domaines des transports et du bâtiment réduit les émissions de CO2 liées à la consommation d'énergie. Grâce au développement de la production d'électricité à partir de sources renouvelables, la production de l'électricité nécessaire en l'espèce ne générera pas d'émissions de CO2 supplémentaires. La révision de la loi favorise la décarbonisation et apporte ainsi un soutien déterminant à la réalisation des objectifs de politique climatique de la Suisse. Le développement nécessaire des grandes centrales hydroélectriques et des installations éoliennes a toutefois des conséquences sur la nature et l'environnement et peut porter atteinte au paysage.

Une ouverture complète du marché suscite en principe un contexte plus dynamique pour l'économie énergétique suisse. Les actifs de la branche y trouveront des opportunités, mais aussi des défis nouveaux. Ils pourront surtout profiter de la dynamique liée à des idées commerciales inédites. Les innovations induites par l'ouverture du marché de l'électricité contribuent à une meilleure intégration des énergies renouvelables dans la société.

S'agissant des mesures qui ont une incidence sur le réseau, il faut noter qu'un développement intelligent des réseaux électriques, indirectement soutenu, diminue les atteintes au territoire et à l'environnement s'il permet de renoncer partiellement au développement conventionnel du réseau. Fondamentalement, il faut considérer positivement les potentiels d'innovation, car ils peuvent contribuer à un approvisionnement en énergie moderne qui économise les ressources.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

7.1.1

Bases juridiques

Les modifications prévues dans la LApEl reposent en premier lieu sur l'art. 91, al. 1, Cst. Cette disposition confère à la Confédération une vaste compétence législative s'exerçant dans le domaine du transport et de la livraison de l'électricité, qui comprend

145 / 154

FF 2021 1666

notamment la régulation du marché80. Les modifications prévues dans la LEne se fondent principalement sur l'article sur la politique énergétique (art. 89 Cst.). Les articles sur la protection de l'environnement et sur les eaux (art. 74 et 76 Cst.) servent aussi de base81.

7.1.2

Compatibilité avec les droits fondamentaux

Le projet préserve les droits fondamentaux constitutionnels, en particulier la garantie de la propriété (art. 26 Cst.) et la liberté économique (art. 27 Cst.). Il ne contient pas de disposition contraire à la concurrence, comme c'est le cas des mesures de politique économique ou de politique professionnelle. Les modifications prévues dans la LApEl sont au contraire dans l'intérêt de la libre définition des relations d'affaires, notamment l'ouverture complète du marché de l'électricité, la liberté de choix prévue par la loi en ce qui concerne les systèmes de mesure et la réglementation de l'utilisation des flexibilités au service du réseau. La réserve d'énergie se déroule en dehors du marché.

Ceux qui y prennent part sont déterminés par une procédure d'appel d'offres public.

Les modifications dans la LEne sont aussi neutres du point de vue de la concurrence. Elles garantissent notamment qu'une production d'énergie par des unités administratives de la Confédération ne conduit pas à une distorsion des prix du marché (art. 18a LEne).

En ce qui concerne la garantie de la propriété et la liberté économique, un élément important est le fait que, en vertu de l'art. 18a LApEl, une suspension du droit de vote des actionnaires de Swissgrid qui ne sont pas à majorité suisse puisse intervenir dans des cas exceptionnels. À cet égard, les conditions de l'intervention sont remplies (art. 36 Cst.). Le mécanisme prévu est nécessaire pour garantir le contrôle national voulu sur la société (art. 18, al. 3, LApEl). De plus, l'intervention est plus modérée qu'elle ne le serait dans les autres variantes possibles.

Présentement, le principe de l'égalité de droit demeure aussi préservé. Toutes les différenciations effectuées sont objectivement fondées. Ce point vaut particulièrement pour les modalités de l'ouverture du marché. Le fait que l'approvisionnement de base ne soit plus ouvert à l'avenir qu'aux petits consommateurs finaux (consommation annuelle inférieure à 100 MWh) se justifie par le besoin accru de protection, en particulier des ménages, et il correspond au demeurant aux dispositions du droit de l'UE.

80

81

René Schaffhauser in: Ehrenzeller et al., Die Schweizerische Bundesverfassung; St. Galler Kommentar (2014), ch. marg. 3 ad art. 91. Zum Zweck von Art. 91 BV; cf. message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale, FF 1997 I 1, p. 272 à 274; cf. avis de droit du 23 octobre 1996 de l'Office fédéral de la justice, Expertise concernant les compétences constitutionnelles de la Confédération dans le domaine de l'économie électrique (Gutachten betreffend die verfassungsmässigen Kompetenzen des Bundes im Bereich der Elektrizitätswirtschaft, avec de plus amples références bibliographiques).

Voir à ce sujet les explications du message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 2050, FF 2013 6771, 6958 à 6961.

146 / 154

FF 2021 1666

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Dans le droit du commerce mondial, l'électricité est assimilée à une marchandise ordinaire. De ce fait, les principes de l'Accord du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale du commerce82 et de l'Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)83 s'appliquent aussi au commerce de l'électricité.

Les tâches qui présentent un caractère de service sont régies par l'Accord général sur le commerce des services84. La gestion des aides d'État se conforme quant à elle à l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (ASMC)85 et l'introduction de prescriptions techniques et de normes est soumise aux dispositions de l'Accord sur les obstacles techniques au commerce (TBT)86. Dans la relation à l'UE, il faut encore tenir compte de l'accord de libre-échange du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne87 et, envers les États de l'AELE, de la Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association Européenne de Libre-Echange (AELE)88.

Le présent projet tient compte de ces obligations internationales. L'ouverture complète du marché de l'électricité s'inscrit en particulier dans l'esprit du droit du commerce international. L'approvisionnement de base, qui doit être assuré par le gestionnaire d'un réseau de distribution local et dont le produit standard doit être exclusivement composé d'énergie indigène renouvelable (art. 6, al. 2, LApEl), est le seul reliquat, minime, d'une intervention dans le marché. Les contributions d'investissement prévues dans la loi sur l'énergie (et qui continueront de s'appliquer) pour les installations photovoltaïques, les installations hydroélectriques, les installations de biomasse, les installations éoliennes et les installations géothermiques ainsi que le financement de la réserve d'énergie pour les situations d'approvisionnement critiques (art. 8a LApEl) et le soutien à l'augmentation de la production d'électricité par des centrales électriques en hiver (art. 9bis LApEl) doivent être considérés comme des subventions au sens de l'ASMC. Il n'en découle cependant aucune conséquence négative pour le commerce international, d'autant que ces instruments sont aussi ouverts aux investisseurs étrangers. La disposition selon laquelle le produit électrique standard dans l'approvisionnement de base se
compose exclusivement d'énergie indigène issue de sources renouvelables (art. 6, al. 2, LApEl), pourrait être considérée par les partenaires commerciaux de la Suisse comme une violation du principe du traitement national (art. III, ch. 4 ou 5, GATT). Le produit électrique standard est toutefois au service de la sécurité d'approvisionnement et de la promotion des énergies renouvelables ­ deux objectifs d'action qui sont aussi pris en compte dans le droit commercial international.

82 83 84 85 86 87 88

RS 0.632.20 RS 0.632.21 RS 0.632.20, annexe 1B.

RS 0.632.20, annexe 1A.13.

RS 0.632.20, annexe 1A.6.

RS 0.632.401 RS 0.632.31

147 / 154

FF 2021 1666

7.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet contient des dispositions importantes fixant des règles de droit, qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst.

Les révisions de la LApEl et de la LEne suivent par conséquent la procédure législative normale.

7.4

Frein aux dépenses

Selon l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., les dispositions relatives aux subventions, ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs, doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil. Dans la révision de la LEne, cela concerne les mesures prévues aux art. 26, al. 2, 27a et 27b (nouvelles dispositions relatives aux subventions), aux art. 25 à 27, 32, al. 2, 33 et 36, al. 1, let. a, ch. 2, et let. b (dispositions étendues relatives aux subventions) et à l'art. 38, al. 1, let. b (dispositions prolongées relatives aux subventions). Elles sont donc soumises au frein aux dépenses au sens de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst.

7.5

Conformité à la loi sur les subventions

L'art. 5 LSu impose au Conseil fédéral d'examiner périodiquement les aides et les indemnités allouées par la Confédération. Dans le Rapport 2008 du Conseil fédéral sur les subventions89, le Conseil fédéral a établi le principe selon lequel l'examen des subventions dont la base légale a été créée ou modifiée pendant la période d'examen doit systématiquement être intégré dans le message y afférent. Puisque tel est le cas avec le présent message, il a été vérifié que les aides financières et les indemnités allouées par la Confédération répondent à un intérêt justifié et suffisant de cette dernière, qu'elles atteignent leur objectif de manière économique et efficace et qu'elles sont allouées selon des principes uniformes et équitables. Il convient par ailleurs de vérifier qu'elles sont aménagées en tenant compte des impératifs de politique budgétaire et qu'elles correspondent à une répartition judicieuse des tâches et des charges entre la Confédération et les cantons.

En ce qui concerne la LApEl, il y a lieu de mentionner à cet égard les mesures visant à renforcer la sécurité d'approvisionnement, qui doivent pouvoir être financées par un supplément de 0,2 ct./kWh au plus sur les coûts du réseau de transport. Au reste, le projet ne prévoit pas d'aides ou d'indemnités au sens de la LSu. Il en va autrement des modifications de la LEne. Celles-ci prévoient des subventions sous la forme de contributions d'investissement pour les nouvelles installations photovoltaïques (rétributions uniques) ainsi que pour les installations hydroélectriques, éoliennes, géother-

89

FF 2008 5651

148 / 154

FF 2021 1666

miques et de biomasse. À noter en outre la garantie des droits acquis quant à l'obligation de reprise et de rétribution qui est accordée temporairement aux exploitants d'installations photovoltaïques dans le cadre des modifications (art. 75b LEne).

Importance des aides financières pour la réalisation des objectifs Dans son message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 205090, le Conseil fédéral s'est fixé des objectifs de développement de l'électricité issue des énergies renouvelables d'ici 2020 et 2035 ainsi que d'autres objectifs d'ici 2050. Les valeurs indicatives à court terme devraient pouvoir être atteintes en 2020. Un développement accru des installations de production d'électricité provenant d'énergies renouvelables sera en revanche nécessaire pour atteindre les objectifs à plus long terme d'ici 2035.

En raison des prix durablement bas de l'électricité et des obstacles à la construction de nouvelles installations de production d'électricité, des mesures d'incitation financière restent indispensables.

C'est pourquoi la plupart des contributions d'investissement actuelles sont prolongées. Les nouvelles contributions d'investissement prévues remplacent complètement le modèle auparavant en vigueur de la rétribution de l'injection pour toutes les technologies. Les exploitants d'installations recevront moins de subventions par rapport au système de la rétribution de l'injection et devront eux-mêmes prendre en charge, en fonction de la technologie, au moins 40 % des coûts d'investissement.

Gestion matérielle et financière d'une subvention, procédure d'octroi des contributions L'octroi des contributions obéit à une procédure allégée. Les requérants obtiennent une certaine contribution pour leurs coûts d'investissement. Pour ce faire, il sera uniquement nécessaire d'étudier les coûts d'investissement, il n'y aura plus de calcul détaillé des coûts non amortissables. Le Conseil fédéral vérifiera en fixant les taux qu'ils ne donnent pas lieu à une rétribution excessive. L'effet des subventions sera régulièrement évalué sur la base de l'art. 55 LEne.

Limitation dans le temps des aides financières Les ressources qui peuvent être allouées chaque année aux installations géothermiques (contributions d'investissement et garanties), aux grandes installations
hydroélectriques et aux installations photovoltaïques (contributions d'investissement) sont limitées (cf. art. 36, al. 1, let. a, ch. 2, et b, et al. 3, LEne). En outre, le Conseil fédéral a la possibilité de fixer, si nécessaire, des contingents pour les autres technologies (cf. art. 36, al. 3, 2e phrase, LEne). L'encouragement est par ailleurs limité dans le temps, à la fin de l'année 2035.

90

FF 2013 6771, 6804

149 / 154

FF 2021 1666

7.6

Délégation de compétences législatives

La présente révision prévoit de nouvelles délégations de compétences qui se limitent à un objet réglementaire déterminé et qui sont suffisamment concrétisées quant à leur contenu, leur but et leur étendue.

Les délégations prévues dans la LApEl portent en particulier sur les modalités détaillées concernant la réserve d'énergie (art. 8a, al. 6), les processus de changement (art. 13a), les différences de couverture pour les coûts de réseau (art. 15, al. 3bis), les systèmes de mesure (art. 17a, al. 5, 17abis, al. 4, et 17ater, al. 2), la flexibilité (art. 17bbis, al. 4), l'échange de données et le registre de données (art. 17bquater, al. 4, 17bquinquies, al. 3, et 17bsexies, al. 4), le droit de préemption lors de la cession d'actions Swissgrid (art. 18, al. 4bis) et les projets pilotes (art. 23a). Ces délégations doivent permettre d'alléger le texte de loi de dispositions d'un degré de concrétisation élevé.

Il s'agit en outre souvent de contenus susceptibles de requérir des adaptations rapides pour tenir compte des conditions changeantes ou des développements techniques.

S'agissant des dispositions de la LEne, il convient de mentionner à cet égard que le Conseil fédéral reste habilité à édicter les dispositions d'exécution concernant les contributions d'investissement (art. 29). En plus, le projet précise expressément que le Conseil fédéral peut prévoir la définition de catégories différentes dans le cadre de chaque technologie et l'obligation pour les responsables de projet de mettre les données et les informations d'intérêt public (p. ex. mesures du vent et géodonnées pour les projets de géothermie) à la disposition de la Confédération. Par ailleurs, les compétences du Conseil fédéral en lien avec les installations, véhicules et appareils sont légèrement étendues.

7.7

Protection des données

En vertu de l'art. 19 LPD, la communication de données personnelles par des organes fédéraux requiert en principe une réglementation expresse dans une loi au sens formel.

Cette exigence s'applique également à l'échange de données entre autorités et à la transmission de données à des personnes privées. En l'occurrence, elle importe à la coopération entre l'OFEN et l'ElCom. Ces deux autorités traitent d'ores et déjà des données dans l'accomplissement de leurs tâches. Désormais, elles pourront se transmettre des données à des fins déterminées (art. 27, al. 1bis, LApEl). Dans ce contexte, les dispositions portant sur la saisie et la transmission des données sur les lacs d'accumulation et la régulation Sunshine (art. 8b et 22a LApEl), de par la publication qu'elles prévoient des résultats des comparatifs, revêtent aussi de l'importance.

L'art. 17bter LApEl oblige les gestionnaires de réseau et les autres acteurs qui opèrent dans le domaine des systèmes de mesure à se fournir mutuellement toutes les données nécessaires au bon fonctionnement de l'approvisionnement en électricité. Même s'il ne s'agit pas en l'occurrence de données sensibles (art. 3, let. c, LPD), cette disposition contenue jusqu'ici dans l'OApEl est élevée au niveau de la loi, car elle est d'une importance fondamentale dans un marché de l'électricité complètement ouvert. Il est par ailleurs prévu que l'échange des données de mesure et des données de référence se

150 / 154

FF 2021 1666

fasse désormais par le biais d'un registre de données (art. 17bquater, al. 1 à 4, 17bquinquies et 17bsexies LApEl). La base légale nécessaire pour le traitement des données qui en découle est contenue dans le nouvel art. 17c, al. 2, LApEl. L'art. 17c, al. 3, LApEl prévoit en outre que le Conseil fédéral peut fixer des exigences spécifiques quant à la protection des données et à la sécurité des données pour les systèmes de mesure, de commande et de réglage et pour le registre de données.

En vertu du nouvel art. 29, al. 3, let. k, LEne, le Conseil fédéral peut prévoir l'obligation pour ceux qui obtiennent une contribution d'investissement au sens du chap. 5 LEne de mettre les données et les informations d'intérêt public à la disposition de la Confédération. Il s'agit par exemple de données de mesure du vent, qui sont rendues accessibles à la population sous une forme agrégée en tant que géoinformations au sens de la LGéo, et de géodonnées dans les projets de géothermie. Pour le reste, il est renvoyé au message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 205091 en ce qui concerne les aspects de la protection des données qui sont pertinents pour la loi sur l'énergie.

91

FF 2013 6771, 6969

151 / 154

FF 2021 1666

Liste des abréviations utilisées AELE

Association européenne de libre-échange

AEP

approvisionnement économique du pays

AG

assemblée générale

ASMC

Accord sur les subventions et les mesures compensatoires

ATF

arrêt du Tribunal fédéral

BO

Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale

CCC

centrale à gaz à cycle combiné

CEATE-E

Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États

CEATE-N

Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national

CEP

Clean Energy Package

CI

contribution d'investissement

CO

Code des obligations (RS 220)

Cst.

Constitution (RS 101)

DPA

Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (RS 313.0)

EAE

entreprise d'approvisionnement en énergie

ElCom

Commission fédérale de l'électricité

ESTI

Inspection fédérale des installations à courant fort

FF

Feuille fédérale

GATT

Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce (RS 0.632.21)

GO

garantie d'origine

GRD

gestionnaire d'un réseau de distribution

GRT

gestionnaire de réseau de transport

GWh

gigawattheure

Hz

hertz

JO

Journal officiel de l'Union européenne

kVA

kilovoltampère

kWh

kilowattheure

LAP

Loi du 17 juin 2016 sur l'approvisionnement du pays (RS 531)

152 / 154

FF 2021 1666

LApEl

Loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité (RS 734.7)

LEne

Loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie (RS 730.0)

LETC

Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (RS 946.51)

LFH

Loi du 22 décembre 1916 sur les forces hydrauliques (RS 721.80)

LGéo

Loi du 5 octobre 2007 sur la géoinformation (RS 510.62)

LOA

Loi fédérale du 1er octobre 2010 sur les ouvrages d'accumulation (RS 721.101)

LPD

Loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (RS 235.1)

LSF

Loi du 9 octobre 1992 sur la statistique fédérale (RS 431.01)

LSu

Loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (RS 616.1)

LTrans

Loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (RS 152.3)

MWh

mégawattheure

OAEP

Ordonnance du 10 mai 2017 sur l'approvisionnement économique du pays (RS 531.11)

OApEl

Ordonnance du 14 mars 2008 sur l'approvisionnement en électricité (RS 734.71)

OEne

Ordonnance du 1er novembre 2017 sur l'énergie (RS 730.01)

OFAE

Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays

OFEN

Office fédéral de l'énergie

OIBT

Ordonnance du 7 novembre 2001 sur les installations à basse tension (RS 734.27)

ORARE

optimisation du réseau avant renforcement avant extension

PME

petites et moyennes entreprises

RCP

regroupement dans le cadre de la consommation propre

SIA

Société suisse des ingénieurs et des architectes

STEP

station d'épuration des eaux usées

TWh

térawattheure

UIOM

usine d'incinération des ordures ménagères

WACC

coût moyen pondéré du capital

153 / 154

FF 2021 1666

154 / 154