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Message concernant l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» et la révision de la loi fédérale sur le matériel de guerre du 15 février 1995

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre au vote du peuple et des cantons l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» en recommandant de la rejeter.

Simultanément, nous vous soumettons à titre de contre-proposition indirecte un projet de révision totale de la loi fédérale sur le matériel de guerre.

En outre, nous vous proposons de classer les postulats suivants: P 89.838 Loi sur le matériel de guerre. Extension du champ d'application (N 7. 3. 90, Groupe socialiste) P ad 90.001 Courtage de matériel de guerre et transfert de technologie dans le domaine de l'armement (N 7. 3. 90, Commission de gestion du Conseil national) P ad 91.403 Renforcement des dispositions touchant à l'exportation de matériel de guerre (N 12.12. 91, Commission du Conseil national) Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 février 1995

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Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Villiger Le chancelier de la Confédération, Couchepin

1994 - 858

Condensé L'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» poursuit quatre buts: 1. encourager les efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements en faveur du développement social; 2. interdire l'exportation et le transit de matériel de guerre et de services destinés exclusivement à des fins guerrières, ainsi que les activités d'intermédiaire et les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services; 3. interdire l'exportation et le transit de matériel et de services pouvant être utilisés aussi bien à des fins militaires que civiles, ainsi que les activités d'intermédiaire et les opérations de financement y relatives, lorsque l'acquéreur entend utiliser ces biens et ces services à des fins guerrières; 4. interdire les opérations servant à contourner les interdictions.

Ces buts devront être atteints au moyen du régime de l'autorisation ou de la déclaration obligatoire pour les opérations concernées; des dispositions pénales et une commission fédérale indépendante de l'administration sont prévues pour l'exécution.

La Suisse réalise actuellement de plusieurs façons l'objectif de politique de sécurité qui consiste à sauvegarder et à promouvoir la sécurité et la paix au moyen d'efforts visant le contrôle de l'armement et le désarmement. Par ailleurs, la capacité de défense d'un petit Etat comme la Suisse dépend de manière décisive, entre autres facteurs, de sa capacité à maintenir une production d'armements indigène et à échanger des armements avec des fabricants étrangers. Une interdiction totale des exportations et du transit de matériel de guerre et de services y afférents supprimerait cette possibilité. De plus, l'exécution des dispositions de l'initiative populaire nécessiterait un régime de contrôle partiellement inapplicable: enquêtes au sujet de l'utilisation du matériel à l'étranger, contrôles relatifs à des services et à des opérations de financement. Si l'initiative était acceptée, elle aurait des conséquences défavorables aussi bien pour la défense nationale que pour des secteurs clés de l'industrie d'exportation et pour les entreprises d'armement de la Confédération.

Pour ces raisons, le Conseil fédéral rejette l'initiative.

Suite à un mandat parlementaire, le présent message expose
également le projet d'une loi sur le matériel de guerre totalement révisée, qui devient ainsi, formellement, un contre-projet indirect à l'initiative. Le projet reprend le principe qui sous-tend la loi actuelle, selon lequel les opérations en relation avec du matériel de guerre doivent être soumises à autorisation, et non interdites (comme l'initiative le demande). La révision a d'abord pour but de combler les lacunes de la loi en vigueur; elle doit ensuite établir une certaine compatibilité avec l'ordre juridique d'Etats comparables au nôtre et avec les règles de conduite de la communauté internationale. Elle doit enfin faciliter la collaboration de notre industrie avec ses partenaires étrangers.

Les points principaux de la révision sont les suivants: d'abord, la notion de matériel de guerre a été quelque peu étendue. L'élément déterminant est la conception spécifiquement militaire du matériel. Le matériel à usage tant civil que militaire n'est pas visé.

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Viennent cependant s'ajouter à la notion de matériel de guerre des équipements spécifiques pour l'instruction de combat et certains moyens de production qui concernent exclusivement du matériel de guerre. Le matériel de guerre sera énuméré en détail dans une ordonnance du Conseil fédéral. Ensuite, le projet contient une interdiction formelle visant toute activité dans le domaine des armes ABC. Les opérations de courtage pour du matériel ne se trouvant jamais sur territoire suisse sont désormais comprises dans les activités soumises à autorisation. Ainsi, il sera possible notamment d'empêcher des trafics d'armes qui ne se déroulent à partir de la Suisse qu'en raison du droit libéral qui y règne et qui ne sont pas dans l'intérêt de notre pays.

Désormais, le transfert de technologies dans le domaine du matériel de guerre sera également soumis à autorisation. Ces nouveautés sont conformes à l'évolution observée dans l'ordre juridique d'Etats comparables au nôtre et aux recommandations des enceintes internationales. Cela vaut également pour la nouvelle définition des critères d'autorisation pour les opérations effectuées à l'étranger, lesquels devraient mieux tenir compte du caractère de politique extérieure que revêtent de telles décisions.

Il sera possible aussi de prendre des décisions d'embargo. Enfin, la collaboration de notre industrie d'armement avec ses partenaires étrangers doit être facilitée, grâce aux nouvelles dispositions sur les déclarations de non-réexportation. Il est dorénavant possible d'y renoncer également pour des éléments d'assemblage. On a renoncé à intégrer des dispositions relatives aux contrôles d'opérations purement financières et de filiales d'entreprises suisses à l'étranger. De tels contrôles engendreraient en effet des charges disproportionnées et se révéleraient en partie problématiques du point de vue du droit international public.

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Message I II

L'initiative populaire Teneur et aboutissement

L'initiative populaire a la teneur suivante: La constitution fédérale est modifiée comme il suit: Art. 40bis (nouveau) 1 La Confédération encourage et soutient des efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements au bénéfice du développement social.

2 L'exportation et le transit de matériel de guerre et de services destinés exclusivement à des fins guerrières, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits. La production de matériel de guerre est soumise à autorisation.

3 L'exportation et le transit de matériel de guerre et de services pouvant être utilisés aussi bien à des fins militaires que civiles, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits lorsque l'acquéreur entend utiliser ces biens et ces services à des fins guerrières.

4 Sont aussi interdites toutes les opérations servant à contourner les interdictions, en particulier: a.

les opérations réalisées par l'intermédiaire de filiales à l'étranger ou en coopération avec des firmes étrangères; b.

la remise d'installations de production, de licences et de données techniques indispensables au développement ou à la fabrication de matériel de guerre ou de moyens de destruction massive, ou les activités d'intermédiaire y relatives.

5 Une commission fédérale indépendante de l'administration est chargée de l'exécution. Elle est autorisée en particulier à: a.

intervenir lorsqu'il y a suspicion de violation des alinéas 3 ou 4; b.

évaluer l'impact sur la paix des développements technologiques; c.

procéder à des inspections et à des contrôles ultérieurs.

6 La législation fédérale règle les détails. Elle peut soumettre les opérations visées aux alinéas 3 et 4 au régime de l'autorisation ou de la déclaration obligatoire. Elle déclare punissables les infractions aux alinéas 2 à 4.

Art. 41, 2e, 3e et 4e al.

Abrogés

L'initiative contient une clause de retrait.

L'initiative populaire est fondée sur une décision prise à l'occasion du congrès du Parti socialiste suisse (PSS) des 2 et 3 mars 1991. La récolte des signatures a débuté le 21 mai 1991 (publication: FF 1991 II 438). L'initiative populaire a été déposée le 24 septembre 1992. Par décision du 24 décembre 1992 (FF 1993 I 95), la Chancellerie fédérale a établi que l'initiative avait formellement abouti avec 108 762 signatures valables sur un total de 110 705.

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Validité

Une initiative populaire peut être déposée sous la forme d'une proposition conçue en termes généraux ou sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces.

L'initiative «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» (ci-après: initiative) est présentée sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces. L'unité de la forme est ainsi respectée.

L'initiative poursuit les objectifs suivants: 1. encourager les efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements en faveur du développement social; 2. interdire l'exportation et le transit de biens et de services destinés à des fins guerrières ainsi que les activités d'intermédiaire et les opérations de financement qui en découlent; 3. interdire l'exportation et le transit de biens et de services utilisables tant à des fins militaires que civiles, ainsi que les activités d'intermédiaire et les opérations de financement qui en découlent, si l'acquéreur veut en faire un usage guerrier; 4. proscrire les actes servant à éluder les interdictions (établissement à l'étranger, coopération avec des firmes étrangères ou livraison et transfert d'installations de production, de licences et d'informations techniques concernant le matériel de guerre et les moyens de destruction massive).

Pour atteindre ces objectifs, outre les interdictions légales énumérées ci-dessus, l'initiative prévoit les mesures suivantes: - régime de l'autorisation pour la production de matériel de guerre; - possibilité d'introduire un régime d'autorisation et une obligation de renseigner l'administration pour le commerce qui en dépend; - dispositions pénales en cas d'infraction; - institution d'une commission indépendante de l'administration chargée de l'exécution.

Le texte renvoie à la législation fédérale pour le règlement des détails.

Les dispositions principales qui décrivent les buts de l'initiative populaire (cf. ch. 2 à 4 ci-dessus relatifs aux 2e à 4e al. de l'art. 40bls est. qui est proposé) se situent dans un contexte manifestement objectif et logique. Cette constatation s'applique également aux mesures prévues quant à la concrétisation des objectifs. Le 1er alinéa de la disposition constitutionnelle prescrit à la Confédération d'encourager et de soutenir des efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de
guerre et à réduire les armements. Ces points correspondent également aux autres exigences de l'initiative. On associe ainsi le désir d'appuyer ces efforts «au bénéfice du développement social». La notion de développement social est large et vague; c'est pourquoi elle a fait l'objet de l'interprétation qui se trouve au chapitre suivant. Cette expression indique une direction générale; toutefois elle coïncide parfaitement avec l'horizon lointain de l'initiative: constituer l'assise d'un renforcement de la politique de paix de la Suisse. Ainsi, l'unité de la matière, deuxième condition de validité de l'initiative populaire, est également respectée. La praticabilité de l'initiative ne suscite aucune autre remarque. C'est pourquoi l'initiative est valable.

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Interprétation de l'initiative

L'interprétation d'une initiative populaire doit partir de la teneur du texte et non de la volonté subjective de ses auteurs. Toutefois, on peut tenir compte d'une éventuelle argumentation de l'initiative et des explications données par ses auteurs. Les circonstances qui ont donné lieu à une initiative jouent également un rôle dans l'interprétation. Le commentaire de la présente initiative populaire s'appuie sur le texte de la proposition et en particulier sur les explications que les auteurs ont publiées (Arguments et commentaires des initiatives populaires pour le désarmement et pour l'arrêt des exportations d'armes, publié en mai 1991 par le Parti socialiste suisse et la Communauté de travail pour le contrôle de l'armement et l'interdiction des exportations d'armes; ARW).

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Objectifs de l'initiative

Comme on l'a déjà laissé entendre, l'initiative recèle quatre objectifs (cf. ch. 12 ci-dessus). Mais on peut envisager que le quatrième but (prohibition des opérations servant à éluder les interdictions) est consécutif aux trois premiers.

131.1

Limitation du commerce de matériel de guerre

Le 1er alinéa du nouvel article 40bis de la constitution contenu dans le texte de l'initiative précise cet objectif comme suit: 1 La Confédération encourage et soutient des efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements au bénéfice du développement social.

Les auteurs de l'initiative relèvent notamment que les livraisons de matériel de guerre déstabilisent les régions importatrices, qu'elles contribuent à la militarisation des conflits et qu'elles réduisent de la sorte les chances d'un règlement politique des conflits. En outre, selon eux, le commerce mondial du matériel de guerre offre peu de remèdes pour guérir les souffrances de l'humanité les plus importantes et il en résulte famine, sous-développement, destruction écologique et mouvements de réfugiés au niveau mondial. Enfin, ils soulignent qu'une politique qui vise le maintien et la promotion de la paix n'est pas crédible si elle s'accompagne d'exportations de matériel de guerre.

L'injonction faite à la Confédération, à propos de ce qu'il convient d'encourager et de soutenir, a une portée tout à fait générale. Les efforts ne sont pas précisés dans le détail; rien n'est non plus prescrit quant à la nature et à l'étendue de ce soutien. Il s'agit sur ce point d'un objectif de politique étrangère que la Suisse poursuit depuis toujours (sur le point de la situation actuelle, cf. le rapport du Conseil fédéral du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90, FF 19941150 ss, en particulier le ch. 411, et les explications fournies au ch. 141 du présent message).

Cette exigence est complétée par une précision: ces efforts doivent être effectués «au bénéfice du développement social». Cette notion n'est pas développée davan65 Feuille fédérale. 147e année. Vol. II

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tage. Une réduction sensible des dépenses d'armement a-t-elle automatiquement pour effet que l'Etat dispose de davantage de moyens à consacrer à la réalisation de buts sociaux comme la lutte contre la faim, la création de places de travail, la construction d'écoles ou l'amélioration du réseau de la santé? Certains l'affirment, dans le débat politique, mais dans les faits, il n'est pas toujours possible d'établir un lien. Si l'on interprète l'adjonction «au bénéfice du développement social» de cette manière, sa portée n'a alors plus qu'une valeur déclaratoire. Par contre, si l'on voulait signifier que les efforts visant à limiter le commerce international de matériel de guerre devaient être chaque fois liés à des programmes à caractère social, la mise en oeuvre poserait des difficultés tant politiques que pratiques. Politiquement, selon les vues des Etats concernés, les centres d'intérêts se présentent souvent différemment selon qu'il s'agisse de réductions des armements ou de questions relatives au développement social. Un lien contraignant entre ces questions pourrait déboucher sur un rejet des intéressés et nuire aux efforts effectués dans les deux domaines. Dans une perspective pratique, on peut ajouter que les efforts déployés tant sur le plan international qu'à l'intérieur des Etats en vue de contrôler les armements ne concernent pas les mêmes enceintes que celles de la coopération au développement, dans le cadre desquelles les programmes sociaux sont discutés; la coordination de délibérations ainsi liées serait sensiblement entravée. En fin de compte, à travers cette variante d'interprétation, on pourrait même se demander si le principe de l'unité de la matière est encore respecté. Pour ces raisons, nous admettons qu'il vaut mieux conférer une portée de valeur déclaratoire à l'adjonction «au bénéfice du développement social».

131.2

Interdiction de l'exportation et du transit de matériel de guerre ainsi que des activités d'intermédiaire et des services qui en découlent

L'article 40bls, 2e alinéa, du texte de l'initiative précise: 2

L'exportation et le transit de matériel de guerre et de services destinés exclusivement à des fins guerrières, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits. La production de matériel de guerre est soumise à autorisation.

Les auteurs de l'initiative motivent l'interdiction projetée par le fait ·qu'économiquement la Suisse ne dépend pas de l'exportation d'armes. En outre, ils estiment que rien ne garantit que le Conseil fédéral va exécuter rigoureusement la loi sur le matériel de guerre. Enfin, ils pensent que l'application stricte de la loi actuelle - qui présenterait du reste .d'importantes lacunes - ne permet pas d'empêcher l'utilisation d'armes suisses dans des conflits violents.

Les termes utilisés dans la présente disposition ne sont pas précisés davantage; une définition devrait en être donnée dans la législation. Tandis que l'interprétation des termes «exportation», «transit» et «production» peut se fonder sur la pratique et le droit actuels, il faudrait décrire plus précisément les «activités d'intermédiaire», les «services», les «opérations de financement» et les «fins 994

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guerrières». A vrai dire, dans la loi sur le matériel de guerre (LMG) en vigueur, les activités d'intermédiaire sont dans une certaine mesure soumises à autorisation.

Une définition légale fait néanmoins défaut. La notion de matériel de guerre devrait également être .définie dans la loi. Par ailleurs, la législation d'exécution relative à la présente disposition constitutionnelle devrait prévoir une définition et une délimitation des prestations de service tombant dans son champ d'application. De telles prestations entreraient principalement en ligne de compte pour l'instruction aux appareils et pour l'entretien duNmatériel.

Comme seuls sont concernés le matériel et les services destinés exclusivement à des «fins guerrières», cette dernière notion joue un rôle important. Il s'agit d'interdire une aide destinée à créer des conditions techniques importantes pour mener une guerre. Les auteurs de l'initiative ne définissent pas cette notion et · renvoient à cet effet à la loi. La délimitation est uniquement indiquée dans la mesure où, par exemple, la vente de vivres à des troupes étrangères qui ne sont pas en service actif ou l'exportation de vis et de boulons qui pourraient être intégrés dans du matériel d'armement ne sont pas considérées comme étant destinées à des fins guerrières. En revanche, c'est le cas pour l'exportation de profils d'aluminium destinés à la fabrication de munitions dans une entreprise d'armement à l'étranger, qui devrait par conséquent être interdite. L'importance de l'interprétation de cette notion est cependant quelque peu relativisée par le fait que les opérations servant à contourner les interdictions, prévues au 4e alinéa du texte de l'initiative, sont aussi interdites. Cette disposition permettrait ainsi de soumettre à la réglementation les éléments qu'une interprétation étroite des notions ne ferait pas tomber sous le coup des alinéas précédents.

L'étendue des opérations de financement «relatives à ce matériel» devrait également être définie. Selon les auteurs de l'initiative, il s'agit des opérations représentant une partie intégrante de l'exportation et du transit de matériel de guerre ainsi que des activités d'intermédiaire relatives à ce matériel.-

·

131.3

Réglementation de l'exportation, du transit et du courtage de matériel de guerre et de services pouvant être utilisés aussi bien à des fins militaires que civiles

Le 3e alinéa du texte de l'initiative a la teneur suivante: 3 v

Üexportation et le transit de matériel de guerre et de services pouvant être utilisés aussi bien à des fins militaires que civiles, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits lorsque l'acquéreur entend utiliser ces biens et ces services à des fins guerrières.

Cette disposition doit permettre aux auteurs de l'initiative de compléter le droit en vigueur qui, selon la définition de l'ordonnance sur le matériel de guerre (OMG; RS 514.511), ne comprend en principe que du matériel qui, dans la même exécution, n'est pas destiné à un usage civil, ce qui écarte de son champ d'application le matériel à usage tant civil que militaire. Actuellement, les prestations de service ne sont en général pas prises en considération. Selon le texte de l'initiative, l'exportation, le transit et le courtage de ces biens et de ces i

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services doivent être interdits s'ils sont destinés à des fins guerrières. Parfois, des avions légers servent à l'entraînement des pilotes militaires ou à des engagements de combat après transformation et sont utilisés également dans l'agriculture ou comme avions d'affaires. Cet exemple démontre qu'il est toujours question d'une utilisation à des fins guerrières lorsque l'acquéreur est un ministère de la défense ou une force aérienne, même si ces avions sont engagés pour l'instruction des pilotes militaires ou comme remorqueurs de cibles pour l'instruction des tireurs de défense aérienne. On consultera la loi pour une définition plus précise. Dans leurs explications, les auteurs de l'initiative indiquent cependant que la vente de denrées alimentaires à des troupes étrangères qui ne se trouvent pas en service actif ne serait en général pas considérée comme une utilisation à des fins guerrières, ni l'exportation de vis et de boulons qui pourraient être utilisés dans du matériel d'armement. En revanche, on peut présumer une utilisation à des fins guerrières lors de l'exportation de profils d'aluminium destinés à la fabrication de munitions dans une entreprise d'armement étrangère; il faudrait en interdire la livraison.

Au sujet des autres termes du présent alinéa, on peut se référer aux explications qui précèdent (ch. 131.2).

131.4

Opérations servant à contourner les interdictions

Ce domaine est réglé au 4e alinéa de l'initiative populaire: 4

Sont aussi interdites toutes les opérations servant à contourner les interdictions, en particulier: a.

les opérations réalisées par l'intermédiaire de filiales à l'étranger ou en coopération avec des firmes étrangères; b.

la remise d'installations de production, de licences et de données techniques indispensables au développement ou à la fabrication de matériel de guerre ou de moyens de destruction massive, ou les activités d'intermédiaire y relatives.

Cette prescription vise à éviter que les interdictions inscrites dans les alinéas précédents ne soient éludées.

A la lettre b, les auteurs de l'initiative se fondent, selon leurs propres indications, sur une réglementation relevant du domaine de la technologie nucléaire et qui figure dans la loi sur l'énergie atomique. Dans la version proposée, cette réglementation est étendue aux armes conventionnelles, biologiques et chimiques ainsi qu'aux systèmes de lancement. Elle est soumise à certaines limitations: les auteurs de l'initiative précisent qu'il ne s'agit que de contributions au développement et à la fabrication de matériel de guerre proprement dit et de moyens de destruction massive, uniquement dans la mesure où le matériel, les licences et les données livrés sont indispensables à leur développement et à leur fabrication. Le matériel et les données facilement accessibles ne sont pas concernés.

132

Les moyens de l'initiative

Les moyens nécessaires à l'exécution de la réglementation selon l'initiative populaire sont mentionnés dans les alinéas 5 et 6: 996

5

Une commission fédérale indépendante de l'administration est chargée de l'exécution. Elle est autorisée en particulier à: a.

intervenir lorsqu'il y a suspicion de violation des alinéas 3 ou 4; b.

évaluer l'impact sur la paix des développements technologiques; c.

procéder à des inspections et à des contrôles ultérieurs.

6 La législation fédérale règle les détails. Elle peut soumettre les opérations visées aux alinéas 3 et 4 au régime de l'autorisation ou de la déclaration obligatoire. Elle déclare punissables les infractions aux alinéas 2 à 4.

Les auteurs de ' l'initiative sont d'avis que les organes administratifs chargés jusqu'à présent de l'exécution de la loi sur le matériel de guerre ont échoué. C'est pourquoi une commission indépendante de l'administration doit être instituée selon un modèle analogue à celui de la Commission des banques. Cette commission serait composée de représentants des milieux économiques et scientifiques et d'experts en matière de paix, de développement et de droits de l'homme.

On ferait appel au DMF pour les questions de techniques d'armement, à l'organe spécialisé du DFTCE (Office fédéral de l'énergie) pour les questions nucléaires, à celui du DFEP (Office fédéral des affaires économiques extérieures) pour les questions relatives aux armes biologiques et chimiques et au matériel stratégique, au DFAE pour les questions politiques, au DFF (Direction générale des douanes) pour le contrôle à la frontière et au DFJP (Office central du Ministère public de la Confédération chargé de réprimer les activités illicites relatives au matériel de guerre) pour les tâches de police judiciaire. Les auteurs de l'initiative sont d'avis que le fait de charger une commission de l'exécution est avantageux également pour l'exportateur, qui s'adresse actuellement à six services fédéraux différents.

Selon les possibilités, les dispositions détaillées concernant cet article constitutionnel seront réunies dans une loi fédérale unitaire.

Pour l'exécution de la réglementation, les auteurs de l'initiative présupposent l'auto-contrôle et la responsabilité de l'industrie d'exportation et des hommes d'affaires. Ceux-ci doivent veiller à ce qu'aucun matériel ni service utilisables à des fins guerrières ne fassent l'objet d'une exportation, d'un transit ou d'une activité d'intermédiaire. Afin que ce principe de responsabilité personnelle s'impose, l'intervention de la commission est requise dès que des activités illégales sont soupçonnées. Elle ordonnera, par exemple, une enquête ou la suspension des affaires jusqu'à ce que l'entreprise suspecte ait apporté la preuve qu'il s'agit d'une activité légale.

Par ailleurs, la commission aurait pour tâche d'évaluer l'impact de l'évolution technologique sur la paix. Par le biais de prospectives, il s'agirait d'évaluer, dans des domaines sensibles, les effets futurs de la recherche et du développement
actuels dans les laboratoires des universités et dans les services de développement de l'industrie. Les auteurs de l'initiative sont d'avis que de telles études d'impact sur la paix sont envisageables dans les domaines de la recherche nucléaire et de la recherche spatiale. Par exemple, il serait possible de déterminer dans ces domaines dans quelle mesure la recherche et le développement en cours peuvent servir à la fabrication d'armes atomiques et de systèmes de lancement (missiles).

Ils précisent que de nombreux Etats procèdent à l'estimation et à l'évaluation des conséquences technologiques, par exemple 1' «Office for Technology Assessment» aux Etats-Unis ou un organe analogue auprès du Bundestag en Allemagne. En Suisse, le Conseil national a déjà transmis en 1987 un postulat concernant 997

l'évaluation des risques technologiques (P 86.142, N 9.10.1987) et approuvé une nouvelle fois l'institutionnalisation de cette évaluation en 1990.

La lettre c du 5e alinéa reprend la compétence de contrôle des organes chargés de .

l'exécution qui existe aujourd'hui déjà. Le pouvoir de procéder, à l'étranger également, à des contrôles ultérieurs sur le règlement légal d'affaires ayant obtenu une autorisation, notamment pour déterminer si l'acquéreur étranger utilise effectivement du matériel à usage tant civil que militaire à des fins civiles et pacifiques, constituerait une nouveauté.

Selon les explications des auteurs de l'initiative, la commission serait tenue de rendre publiquement compte de ses activités, notamment sur les développements récents dans les efforts internationaux visant à réduire le commerce de matériel de guerre et à limiter les armements, sur les autorisations accordées pour la fabrication de matériel de guerre, sur les interventions contre l'exportation d'armes et d'autres affaires interdites, ainsi que sur les études d'impact sur la paix, les inspections et les contrôles ultérieurs.

Par ailleurs, la loi doit donner la compétence à la commission d'instituer un régime d'autorisation ou de déclaration obligatoire (6e al.) dans les domaines du matériel et des services à double usage et des technologies de fabrication particulièrement sensibles. D'une manière générale, les auteurs de l'initiative estiment cependant que l'effet préventif déployé par la menace de sanctions pénales est suffisant.

14

Appréciation des buts de l'initiative

Peuvent être considérés comme les buts principaux de l'initiative: l'encouragement des efforts visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements, de même que l'interdiction de l'exportation et du transit de matériel de guerre et de services destinés à des fins guerrières ainsi que des activités d'intermédiaire relatives à ce matériel et à ces services. Les explications qui suivent sont destinées à justifier et à relever l'importance relative des exportations suisses de matériel de guerre. Enfin, quelques problèmes spécifiques de l'initiative feront l'objet d'une appréciation critique (matériel et services à double usage, opérations servant à contourner les interdictions, autorité chargée de l'exécution).

141 141.1

La contribution de la Suisse au contrôle de l'armement et au désarmement Principes et perspectives de la politique suisse en matière de contrôle de l'armement et de désarmement

Le rapport du Conseil fédéral du 1er octobre 1990 sur la politique de sécurité (FF 1990 III 794) et le rapport du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90 considèrent le maintien et la promotion de la sécurité et de la paix comme des objectifs sécuritaires pour la Suisse et comme des contributions à la stabilité internationale, principalement en Europe. Dans ce contexte, le contrôle de l'armement et le désarmement forment une composante 998

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de la politique extérieure et de la politique de sécurité, dans la mesure où ils favorisent un ordre international fondé sur la stabilité et sur la sécurité au sens large du terme.

Les efforts internationaux entrepris depuis le milieu des années 80 pour le contrôle de l'armement et le désarmement ont obtenu d'importants résultats dans le domaine des armes conventionnelles comme dans celui des armes de destruction massive. Ce sont les suites non seulement de l'évolution de la situation politique générale, mais également des patients efforts fournis par les Etats participants. Les marges que laisse la politique pragmatique n'ont pas empêché la Suisse de toujours oeuvrer en ce sens. Les efforts de notre pays ont permis de promouvoir un équilibre des forces militaires à un niveau le plus bas possible, d'inciter à la transparence et à l'évaluation des activités militaires, des structures et des potentiels. Ils ont renforcé également la coopération en matière de politique de sécurité, par exemple au moyen des conventions signées dans le cadre de la CSCE pour créer des relations de confiance et une situation de sécurité, au moyen de l'accord sur l'interdiction du développement, de la production, du stockage et de l'engagement d'armes chimiques et de leur destruction. La Suisse a inspiré des traités à la négociation desquels elle n'a pas pu participer, mais dont les résultats sont tout de même importants dans le contexte stratégique actuel (p. ex.

le traité sur les Forces conventionnelles en Europe ou les conventions dans le domaine nucléaire).

Les activités suisses dans le domaine du contrôle de l'armement et du désarmement sont principalement régies selon trois lignes directrices: - L'histoire démontre qu'à long terme, la paix et la sécurité ne peuvent pas être obtenues uniquement au moyen du contrôle de l'armement et du désarmement.

En effet, il ne s'agit pas d'un objectif en soi, mais d'une tentative de contrôle et de limitation de la force militaire, d'élimination des sources de conflits et d'instabilité et d'une contribution à la sauvegarde de la paix au moyen de réglementations imperatives de droit international ou politiques. C'est pourquoi elles doivent être intégrées dans une politique extérieure et une politique de sécurité globales, qui tiennent compte des développements internationaux et
des intérêts de la sécurité nationale au même titre que de la situation générale spécifique au contrôle d'armement, au désarmement et à la politique militaire.

- Les possibilités de la Suisse en matière de politique de contrôle de l'armement et de politique de désarmement se fondent principalement sur la volonté d'autodéfense et la disponibilité d'un instrument de défense crédible. D'une part, celui-ci permet un certain recul et une liberté d'action pour diriger au niveau international une politique de contrôle de l'armement et une politique de sauvegarde de la paix active et si possible indépendante. Cet instrument détermine essentiellement le poids de la Suisse au niveau des négociations et l'importance de sa participation. D'autre part, il représente une mesure préventive à l'égard de rivalités et de conflits politiques violents et face auxquels la Suisse ne peut pas compter d'emblée sur les garanties de sécurité d'autres Etats.

- Les activités de la Suisse en matière de contrôle de l'armement et de politique de désarmement sont en grande partie influencées par des paramètres, des faits 999

et des objectifs qui sont dictés par des grandes puissances et des alliances et qui font partie intégrante de notre position de négociateur. Les résultats des négociations devraient être équilibrés, vérifiables et aussi universels que possible. Ils doivent accroître la sécurité de toutes les parties à la convention et en aucun cas ils ne doivent la réduire. La Suisse ne soutient pas les solutions discriminatoires ou unilatérales. Par ailleurs, elle vise à imposer si possible ses intérêts et ses préoccupations en collaboration avec des tiers. Son champ de coopération dépend alors du nombre de compromis qu'elle peut accepter, refuser ou au besoin défendre seule sur la base des constellations d'intérêts spécifiques.

Face aux nouveaux défis et aux facteurs de risques apparus dans le sillage de l'évolution de l'environnement politique en Europe, le contrôle de l'armement et le désarmement ont bénéficié de fonctions stabilisatrices supplémentaires, par exemple l'amélioration des mécanismes de prévention des conflits, de gestion des crises et de collaboration lors des contrôles. Face à la nouvelle situation et en se fondant sur une approche globale tant en politique de sécurité qu'en matière de contrôle, la Suisse s'engagera avec ses partenaires en faveur d'une application conforme aux traités conclus, d'une participation aussi large que possible aux accords de contrôle de l'armement et de politique de désarmement, de l'interdiction sur le plan mondial de la diffusion des armes de destruction massive, de leurs systèmes de lancement, y compris les systèmes à usage tant civil que militaire, du contrôle du transfert d'armes conventionnelles au moyen de principes et d'accords multilatéraux et de la poursuite du contrôle de l'armement et du désarmement à l'échelon régional dans le cadre du Forum de la CSCE pour la coopération en matière de sécurité. Ce dernier se consacre au développement de mesures de confiance et de sécurité, au renforcement de potentiels défensifs au détriment des moyens offensifs, à l'adoption de doctrines qui favorisent les structures de défense et le système des réservistes et qui acceptent des exigences militaires nationales, à l'établissement de dispositions efficaces de vérification du respect des accords et aux activités qui en découlent.

Pour coopérer avec le plus grand nombre
possible d'Etats au renforcement de la paix et de la sécurité sur la base de traités universels, équitables, politiquement contraignants, militairement pertinents et contrôlables, le Conseil fédéral cherche, dans sa politique en matière de contrôle de l'armement et de désarmement, à utiliser pleinement la marge de manoeuvre qu'offrent la politique extérieure et la politique de sécurité pour le contrôle de l'armement et la sauvegarde de la paix. La Suisse entend profiter de la chance que lui offre cette collaboration pour agir, en tant que partenaire fiable, de manière constructive et qualifiée.

141.2

Les efforts de la Suisse en matière de contrôle de l'armement et de désarmement sur le plan international

La Suisse a fourni des efforts importants dans le domaine du contrôle de l'armement et de la politique de désarmement. A cet effet, elle a, ratifié l'ensemble des traités multilatéraux en matière de contrôle de l'armement et de désarmement actuellement en vigueur. Elle s'engage en faveur de mesures de confiance et de 1000

sécurité, en faveur de l'interdiction de la production d'armes de destruction massive, contre leur diffusion, en faveur de la limitation des exportations d'armement et en faveur d'une transparence accrue dans le transfert d'armes conventionnelles et dans la production d'armement. En outre, elle participe, dans le cadre d'enceintes internationales, aux discussions sur le contrôle des exportations.

141.21

Activités au plan régional: la participation à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE)

Depuis les débuts de la CSCE, en 1972, la Suisse a profité des possibilités que ce processus lui offrait pour promouvoir une transparence raisonnable pour les forces militaires de l'Atlantique à l'Oural et au-delà, pour étendre les possibilités de prévision concernant les activités militaires et pour limiter les risques d'attaques surprises. Lors de ces négociations, elle a cependant également su ménager ses intérêts nationaux, qui comprenaient notamment la protection d'informations, d'installations et d'événements importants (mobilisation) pour la défense.

Le Document de Vienne 1992 sur les mesures de confiance et de sécurité met un terme provisoire aux négociations de détail. Actuellement, la Suisse participe activement et dans un esprit de coopération à la réalisation fidèle des mesures prévues par l'accord, telles que l'échange d'informations, la visite d'aérodromes militaires, les contacts, les observations, les inspections et les contrôles.

A l'occasion du Forum de la CSCE pour la coopération en matière de sécurité, constitué le 22 septembre 1992, notre pays a notamment soutenu les documents et les trains de mesures suivants, adoptés au mois de novembre 1993: - principes de la CSCE pour le règlement du transfert d'armes conventionnelles; - mesures stabilisatrices pour les situations de crises localement limitées; - échange d'informations concernant des planifications de défense; - programme concernant les contacts et la collaboration militaires.

Dans le cadre de la CSCE, la Suisse a travaillé à une proposition visant un contrôle étatique efficace du transfert d'armes et d'équipements. Au mois de novembre 1993, elle a approuvé les principes arrêtés pour le règlement du transfert d'armes conventionnelles en vue de la promotion de la sécurité internationale. Elle reconnaît ainsi une norme valable pour la CSCE en vue du transfert d'armes conventionnelles. En cas d'examen de transferts prévus, elle s'engage à appliquer les critères qui s'imposent (cf. ch. 245).

Elle contribue activement à l'harmonisation des droits et des obligations entre les Etats signataires du Document de Vienne 1992 et du Traité sur les Forces conventionnelles en Europe, au développement du Document de Vienne 1992, à l'institution d'un régime destiné à un échange global d'informations et à un code de conduite. Au sommet
de Budapest de décembre 1994, d'autres documents ont été approuvés.

Par ailleurs, la Suisse approuve, dans le cadre de la CSCE, toutes les mesures visant à prévenir les conflits et à améliorer les capacités opérationnelles de la CSCE pour les interventions en cas de crise. Elle contribue à l'organisation et au développement de l'instrument de maintien de la paix de la CSCE et s'engage en 1001

faveur d'une collaboration définie avec des organisations telles l'OTAN et l'ONU dans le domaine des mesures de maintien de la paix. Elle a participé à différentes reprises à des missions de reconnaissance de la CSCE, de nature politique, militaire et en relation avec les droits de l'homme, dans des régions de crise (Etats baltes, Balkans, Transcaucasie).

Le Forum de la CSCE pour la coopération en matière de sécurité offre la chance aux Etats participants de la CSCE de former un ordre sécuritaire plus équilibré. A l'avenir également, la Suisse poursuivra son engagement dans la CSCE pour éviter sa mise à l'écart et sa marginalisation en politique extérieure et pour obtenir une garantie de sécurité aussi étendue que possible dans les limites d'un partenariat solidaire de sécurité. En outre, l'utilisation de la CSCE permet à la Suisse de sauvegarder ses intérêts nationaux, de susciter une compréhension à son égard et d'obtenir une certaine liberté d'action compte tenu des particularismes ignorés de son système de défense et de créer ainsi des conditions-cadres favorables à la conception de notre préparation à la défense.

141.22 Activités au plan global 141.221 Participation à des accords multilatéraux de contrôle de l'armement et de désarmement La Suisse a signé l'ensemble des accords multilatéraux de contrôle de l'armement et de désarmement auxquels elle peut actuellement adhérer (cf. l'aperçu en annexe). Afin que ces accords s'imposent universellement et que leurs effets soient permanents, elle s'efforce, d'inciter le plus grand nombre possible d'Etats à y adhérer.

141.222 Participation à la Conférence de Genève sur le désarmement Depuis 1980, la Suisse participe activement, à titre d'observateur, aux négociations de la Conférence de Genève sur le désarmement, unique forum multilatéral sur le désarmement, comprenant des diplomates et des experts militaires. En 1991, le Conseil fédéral a remis la candidature d'adhésion à part entière de la Suisse. Il a agi dans l'intention de mieux appuyer les futures négociations globales sur le désarmement en tant que partenaire. Le Conseil fédéral estime que sa demande sera acceptée dans un proche avenir. Au cours des débats permanents, la Suisse soutient les travaux qui visent essentiellement une meilleure transparence lors des exportations d'armement
conventionnel et la négociation d'un traité détaillé et contrôlable concernant l'arrêt des essais nucléaires.

141.223 Non-prolifération des armes de destruction massive La Suisse a renoncé depuis longtemps à posséder des armes de destruction massive et elle a adhéré à tous les traités conclus dans ce sens. Comme elle ne possède pas de telles armes, elle a tout intérêt, au plan sécuritaire, à ce que le plus grand nombre possible d'Etats adhèrent au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et au Traité sur les armes B et C, et qu'ils les respectent.

1002

Armes nucléaires: A l'occasion des préparatifs pour la conférence prévue en 1995 pour le contrôle et la prolongation du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, nous nous engageons en faveur de la poursuite et du renforcement de ce régime et notamment en faveur de l'adhésion d'autres Etats et de l'amélioration du régime de contrôle, à savoir le renforcement et le développement des possibilités d'inspection de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA). Par ailleurs, nous soutenons les efforts destinés à promouvoir la sécurité de tous les Etats, à contribuer à arrêter la course aux armements nucléaires, à poursuivre le désarmement nucléaire et à maintenir l'accès à la technologie nucléaire et à l'approvisionnement en carburant nucléaire.

Depuis des années, nous sommes favorables à des accords multilatéraux pour le contrôle des exportations de matériel nucléaire qui, outre un usage civil, peut également être utilisé pour la fabrication d'armes de destruction massive (matériel à usage tant civil que militaire). Dès le début des années septante, dans le cadre du «comité Zangger», la Suisse avait pris l'initiative d'interpréter les prescriptions d'exportation formulées d'une manière très générale dans le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Par la suite, le comité en question a établi des listes détaillées des produits nucléaires qui ne peuvent être transmis à un Etat non doté d'armes nucléaires uniquement si celui-ci accepte certaines conditions de non-prolifération. Ces listes sont régulièrement mises à jour. En 1977, la Suisse a adhéré au Club de Londres (actuellement le groupe des pays exportateurs de technologie nucléaire), dont les membres s'engagent à contrôler, outre les biens de la liste du «comité Zangger», l'exportation de technologie et certaines installations. En 1992, la Suisse est devenue membre du Régime de non-prolifération balistique (Missile Technology Control Regime; MTCR), qui est destiné à empêcher la prolifération de missiles porteurs d'armes de destruction massive.

Armes biologiques: Dans le domaine des armes biologiques, la Suisse s'engage afin que la Convention sur les armes bactériologiques, conclue en 1972, soit complétée par des mesures de vérification et de confiance appropriées et proportionnées. L'industrie du pays concerné ne
devra cependant pas en subir d'inconvénients. La troisième conférence de révision, qui s'est tenue à Genève en 1991, a désigné un groupe d'experts chargé d'examiner d'éventuelles mesures de vérification. La Suisse a contribué aux recherches de solutions possibles pour le contrôle des armes B au moyen d'expertises scientifiques. Elle participe activement aux efforts visant à élaborer des mesures concrètes.

Armes chimiques: La Convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (Convention sur les armes chimiques) représente, après 24 ans de négociations, le premier traité de désarmement multilatéral détaillé prévoyant un régime de vérification. Il interdit toute une catégorie d'armes et contraint chaque Etat signataire à éliminer intégralement dans un délai de dix ans les armes chimiques

1003

dont il dispose et ses installations de production. Il prévoit d'importantes mesures de coopération et de vérification qui permettront de contrôler partout et à tout moment si des armes chimiques ou leurs précurseurs ont été développés (dans des installations s civiles également), fabriqués, stockés ou engagés quelque part illégalement. Ainsi, comme dans le cas de la non-prolifération nucléaire, le contrôle de l'armement et la vérification sortent du domaine militaire lorsqu'ils impliquent l'industrie chimique civile. La Convention sur les armes chimiques est ainsi un des fondements d'une politique internationale de non-prolifération des armes de destruction massive, à la fois large et axée sur la coopération. Elle entrera vraisemblablement en vigueur en 1995. Le siège de l'organisation de contrôle qui en fait partie sera à La Haye, où la Commission préparatoire procède, avec la participation de la Suisse, à tous les travaux d'organisation et administratifs nécessaires pour que la Convention puisse entrer en vigueur à la date prévue.

La Suisse a signé l'importante Convention sur les armes chimiques lors de la conférence qui a eu lieu à Paris du 13 au 15 janvier 1993. Durant les négociations, qui se sont étendues sur plusieurs années, elle a fourni des contributions techniques importantes. Elle participe activement aux rencontres d'experts dans le cadre de la Commission préparatoire et collabore à la formation des inspecteurs et à l'équipement des laboratoires de vérification. Lors de la session d'automne 1994, le Parlement a habilité le Conseil fédéral à ratifier la Convention.

Par ailleurs, notre pays participe aux rencontres du Groupe d'Australie, qui se déroulent depuis 1984. Celui-ci vise notamment l'amélioration et l'harmonisation des contrôles nationaux à l'exportation pour les produits chimiques à usage tant civil que militaire, les installations chimiques et, récemment, les agents et les installations de fabrication d'armes biologiques. Il cherche aussi à associer de nouveaux Etats.

141.224 Encouragement de la transparence et des contrôles dans les transferts d'armements conventionnels Outre les activités poursuivies en ce domaine dans le cadre de la CSCE, la Suisse soutient des mesures globales visant la transparence, le contrôle et la réduction des exportations d'armements conventionnels. Elle
a approuvé la résolution pour la création d'un registre des armes conventionnelles, votée le 9 décembre 1991, par la 46e Assemblée générale des Nations Unies. Ce registre doit assurer une plus grande transparence lors de l'exportation et de · l'importation de sept catégories d'armes et offrir des éléments destinés à la collecte d'informations concernant les effectifs et les productions nationales de telles armes. Cependant, il n'est que volontaire et ne comprend pas les aspects qualitatifs et les productions propres. Le 30 avril 1993, la Suisse s'est jointe à la réalisation de ce registre en fournissant aux Nations Unies des indications relatives au transfert de biens d'armements. Elle poursuivra sa participation et s'efforcera d'obtenir des améliorations de ce régime.

Les activités du comité ad hoc «Transparency in Armaments» de la Conférence de Genève sur le désarmement sont consacrées à la négociation de mesures univer1004

selles et non discriminatoires qui visent la transparence en relation avec les concentrations d'armes déstabilisatrices, les effectifs militaires, les productions étatiques et le transfert de haute technologie à usage militaire. La Suisse a exposé sa position et s'efforcera de coordonner les travaux de la Conférence sur le désarmement avec les résultats du processus de la CSCE.

141.225 Encouragement de mesures de vérification efficaces Les traités sur le contrôle de l'armement conventionnel et les efforts portant sur la non-prolifération exigent des moyens de contrôle efficaces. C'est exactement ce que recherche un petit Etat dont les influences politiques et militaires sont limitées et qui dépend bien plus que les moyennes et grandes puissances du respect du droit international. Aussi la Suisse considère-t-elle les possibilités de vérification comme une condition préalable essentielle à toute forme de contrôle de l'armement et de désarmement crédibles.

C'est pourquoi la Suisse participe depuis de nombreuses années à des missions d'enquête et de contrôle de l'ONU. Depuis 1984, des experts suisses et le Laboratoire AC de Spiez ont été plusieurs fois mis à contribution lors d'enquêtes ordonnées par l'ONU concernant l'engagement de gaz toxiques dans la guerre Iran-Iraq, de 1981 à 1988. Le 3 juin 1991, le Conseil fédéral a décidé de mettre à la disposition de la Commission spéciale de l'ONU (United Nations Spécial Commission; UNSCOM), créée à la fin de la guerre du Golfe, des experts suisses, du matériel et des équipements du laboratoire AC de Spiez pour le démantèlement des armes de destruction massive de l'Iraq. Depuis le mois d'août 1991, des experts suisses collaborent avec l'UNSCOM, sur la base du mandat du Secrétaire général de l'ONU. En 1992, un expert en -armes chimiques faisait partie de l'équipe de contrôle qui a procédé à des analyses au Mozambique et en Azerbaïdjan. Depuis le mois de juin 1992, la Suisse met à disposition deux experts pour des périodes de trois mois chacun, en vue de la destruction des armes chimiques à Muthanna (Iraq). Au printemps de 1993, un Suisse a fait partie d'une équipe chargée d'examiner des photos en Iraq. A diverses reprises, le Laboratoire AC de Spiez a pu utiliser ses connaissances et ses installations pour procéder aux évaluations de ces missions. L'armée
équipe les inspecteurs avec le matériel et les appareils nécessaires. La Suisse continuera de mettre à disposition ses connaissances et du personnel dans le cadre de l'UNSCOM.

141.3

L'initiative populaire à la lumière des efforts consentis par la Suisse pour le contrôle de l'armement et le désarmement

Les explications qui précèdent démontrent que le Conseil fédéral poursuit de plusieurs façons l'objectif de politique de sécurité qui consiste à sauvegarder et à promouvoir la sécurité et la paix, dans le domaine du contrôle de l'armement et du désarmement à l'échelon international et selon les possibilités de notre pays.

L'engagement de la Suisse est constructif et pertinent; en effet, il tient compte des aspects de politique intérieure et de politique extérieure. A l'avenir également, notre pays s'engagera activement en faveur de la prévention des conflits et de la 1005

maîtrise des crises en participant notamment au processus de contrôle de l'armement et du désarmement qui vise un maintien solidaire de la sécurité comme base d'une paix durable. Dans la mesure où l'initiative, à travers son objectif de réduction des armements, suppose que la Suisse n'est pas suffisamment entreprenante dans ces domaines, elle néglige le fait que le Conseil fédéral a contribué, de manière constructive, à résoudre les crises et les conflits en appliquant une politique de sécurité et de contrôle d'armement éprouvée et fonctionnelle. Il a entrepris ce qui était réalisable et nécessaire pour encourager à l'échelon mondial et régional non seulement la limitation des armements, mais encore celle de la course aux armements, pour interdire le transfert d'armes de destruction massive et d'armes conventionnelles, ainsi que pour créer une situation de confiance et de sécurité. Indépendamment de la présente initiative populaire, la Suisse, poursuivra une politique de contrôle de l'armement et une politique de désarmement extensive, active, réaliste et pragmatique, qui répondra également à nos intérêts nationaux. A une époque marquée par les conflits, l'Europe et, partant, la Suisse ne sont pas des îlots de paix. Le Conseil fédéral admet que les analyses du risque de développements futurs doivent tenir compte de l'interdépendance de développements régionaux et globaux en admettant certaines tendances sociales, économiques et écologiques et en offrant un instrument diversifié de résolution des problèmes. Dans la mesure où l'initiative vise à conclure que la réduction des armements suffirait à éliminer les sources de conflits, les forces militaires, leur potentiel d'armement et la prolifération des armes, elle n'ignore pas seulement une certaine réalité politique, mais remet également en question la nécessité de maintenir un instrument de défense nationale crédible et adapté à un contexte sécuritaire instable. Face aux possibilités d'une politique de force irrationnelle, de menaces militaires potentielles ou d'une escalade incontrôlée d'un conflit, il est nécessaire de prévoir la protection militaire de la Suisse et de sa population au même titre que sont encouragés les efforts internationaux déployés pour le contrôle de l'armement et le désarmement.

142 142.1

Exportations de matériel de guerre à partir de la Suisse L'importance de la Suisse dans le commerce international de matériel de guerre

II existe deux sources offrant des informations quantitatives sur le commerce global de matériel de guerre: la «United States Arms Control and Disarmament Agency» (une agence de l'administration américaine) et le «Stockholm International Peace Research Institute» (un institut de recherche indépendant, financé par le Parlement suédois). Les deux institutions publient régulièrement des estimations concernant les montants des exportations et des importations d'armement. En raison des méthodes appliquées, ces estimations ne concordent pas et parfois divergent même considérablement des indications nationales officielles.

Pour la fin des années quatre-vingts, les deux institutions indiquent cependant un commerce de matériel de guerre global pour un montant d'environ 40 à 50 milliards de dollars. Ce commerce a cependant diminué par la suite et, jusqu'en 1993, il a vraisemblablement régressé de plus de moitié. Cette situation est due,

1006

S-

part, à la fin de l'ancien conflit Est-Ouest et, d'autre part, aux barrières t d'une financières imposées par les pays importateurs potentiels.

I Les deux institutions affirment que la Suisse occupe une position mineure parmi ! les pays exportateurs. Pour la période qui s'étend de 1988 à 1992, le Stockholm 1 International Peace Research Institute indique les données suivantes (SIPRI Yearbook 1993, Oxford University Press, p. 444): Exportations globales d'armements (mio. US $)

Exportations globales d'armements Exportations d'armements de la Suisse Part de la Suisse en pour-cent

1988

1989

1990

1991

1992

1988-1992

40034

38133

29972

24470

18045

151013

76

154

192

369

83

874

0,19

0,40

0,64

1,51

0,46

0,58

Exportations d'armements à des pays industrialisés (mio. US $)

Exportations globales d'armements Exportations d'armements de la Suisse Part de la Suisse en pour-cent

1988

1989

1990

1991

16346

16510

12290

11230

9086

65461

41

130

157

341

56

725

0,25

0,79

1,28

1992

3,04

1988-1992

0,62

1,11

Exportations d'armements à des pays en développement (mio. US $)

Exportations globales d'armements Exportations d'armements de la Suisse Part de la Suisse en pour-cent

1988

1989

1990

1991

23688

21623

17682

13240

9320

85552

35

24

35

28

27

149

0,15

0,11

0,20

1992

0,21

1988-1992

0,29

0,17

Les fluctuations annuelles sont caractéristiques des petits pays exportateurs. Elles mettent en question la fiabilité des données annuelles. On peut cependant estimer que la part de la Suisse représente en règle générale moins de 1 pour cent du

1007

commerce d'armements global. La part des livraisons aux pays en développement est inférieure à 0,3 pour cent. Dans la documentation internationale spécialisée, la Suisse est qualifiée «d'exportateur d'armement réservé ou restrictif», ce qui fait référence aux bases légales concernant les exportations de matériel de guerre et au volume de ces exportations.

142.2

La justification des exportations de matériel de guerre

L'initiative vise à interdire l'exportation, le transit et le courtage du matériel de guerre et des services qui lui sont liés. Cette mesure est contraire, tout au moins indirectement, au droit dont dispose chaque Etat de se défendre par la force contre toute agression et qui est reconnu par le droit international. Ce droit de légitime défense figure notamment à l'article 51 de la Charte des Nations Unies.

Implicitement, il contient également celui de se procurer les moyens nécessaires pour se défendre. Dans ce domaine, seules les grandes puissances peuvent être autonomes. Les autres pays, dont le nôtre, dépendent plus ou moins de l'étranger pour leur armement. C'est pourquoi il serait difficile de concilier une interdiction générale d'exportation de matériel de guerre, vers quelque pays que ce soit, avec le droit que nous revendiquons de pouvoir acquérir, à l'étranger, des biens d'armement. Nous sommes par conséquent d'avis qu'une interdiction aussi absolue ne serait ni justifiée, ni opportune. Il convient dès lors de s'en tenir au principe actuel selon lequel les exportations de matériel de guerre sont autorisées sous certaines conditions.

Nous renvoyons au chiffre 15 quant aux conséquences qu'une interdiction absolue des exportations de matériel de guerre entraînerait pour la défense nationale et l'industrie d'armement.

143

La problématique des biens et des services à double usage (dual use)

Selon l'initiative populaire, l'exportation, le transit et le courtage de biens et de services pouvant être utilisés à des fins tant militaires que civiles (biens et services à double usage), ainsi que les activités d'intermédiaire et les opérations de financement qui leur sont liés sont interdits s'ils doivent être utilisés à des fins guerrières. A cet effet, ce genre d'opérations peut être soumis au régime de l'autorisation ou de la déclaration obligatoire.

Le problème du contrôle des exportations de matériel à double usage est effectivement devenu plus aigu au cours de ces dernières années, notamment en relation avec les efforts déployés par certains Etats pour acquérir des armes ABC et de la technologie en matière de missiles. Aussi les Etats industriels occidentaux ont-ils accru et coordonné leurs efforts en vue d'une non-prolifération dans ces domaines. Les pays de l'Est et les pays en développement sont de plus en plus nombreux à y contribuer également.

La Suisse a introduit-en 1951 déjà des contrôles à l'exportation pour les biens à double usage afin de garantir à l'industrie suisse des possibilités d'acquisition de biens technologiquement vitaux dans les pays membres du COCOM (pays de 1008

l'OTAN, sans l'Islande, plus le Japon et l'Australie). Les biens en question sont actuellement mentionnés dans l'annexe de l'ordonnance du 22 décembre 1993 sur l'exportation et le transit de produits (RO 1994 426). Sur la base de cette ordonnance, les demandes d'exportation de marchandises d'origine exclusivement suisse ne peuvent pas être refusées. Pour l'exportation de telles marchandises, l'ordonnance ne permet qu'un contrôle. Si, pour des raisons politiques, une exportation précise de marchandises d'origine exclusivement suisse doit être empêchée dans un cas particulier, le Conseil fédéral justifie une telle interdiction en se fondant sur l'article 102, chiffre 8, de la constitution. En revanche, l'exportation de marchandises d'origine étrangère est refusée si le pays d'origine ou le pays de fabrication exige son accord pour la réexportation et que celui-ci fait défaut.

Au cours des années 80, la problématique de la prolifération des armes C et de la technologie en matière de missiles est devenue un sujet d'actualité brûlant. Les mesures nécessaires ont été coordonnées au niveau international par le Groupe d'Australie et par le régime international de contrôle en matière de technologie de missiles. Il s'agit essentiellement de contrôles des exportations de biens à double usage. Le contrôle de 54 substances clés pour les toxiques chimiques de combat ainsi que d 'agents B a été introduit par les modifications du 27 mai 1987 et du 25 novembre 1992 de l'ordonnance sur le matériel de guerre (OMG). Les substances chimiques et les agents biologiques sont énumérés dans des ordonnances du DMF (RS 514.511.1 et RS 514.511.2, RO 1993 2268). Les biens d'équipement pouvant être utilisés pour la fabrication d'armes chimiques et biologiques, de même que les biens à usage tant civil que militaire pour la fabrication de systèmes de lancement, sont contrôlés dans le cadre de l'ordonnance sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles (RS 946.225, RO 1993 990 2019, 1994 114).

Après la découverte du programme irakien de fabrication d'armes nucléaires, le groupe des pays exportateurs de technologie nucléaire a reconnu que les contrôles introduits en 1978 déjà pour les produits nucléaires ne suffisaient pas. C'est pourquoi, en 1991, il s'est prononcé en
faveur du contrôle des produits nucléaires à double usage. En Suisse, de tels contrôles ont été rendus possibles dans le domaine nucléaire par l'adjonction d'une annexe à l'ordonnance sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles.

Cette ordonnance est valable jusqu'au 31 décembre 1995. Elle sera remplacée par une loi fédérale sur le contrôle des biens utilisables à des fins civiles et militaires (loi sur le contrôle des biens), qui habilitera le Conseil fédéral à édicter les mesures de contrôle nécessaires. Celles-ci se réfèrent d'une part à l'application des traités internationaux ratifiés par la Suisse. D'autre part, il s'agit de mesures que, selon le droit international, la Suisse n'est pas tenue d'édicter, mais qui sont cependant nécessaires pour soutenir les mesures de contrôle dans le domaine des armes non conventionnelles, et partiellement aussi dans celui des armes conventionnelles. La Suisse participera à de tels contrôles dans les cas où des intérêts de notre pays seront en jeu.

Les deux domaines de mesures ont en commun qu'ils imposent des contrôles internationaux dans le domaine des biens de haute technologie. On part de l'idée 66 Feuille fédérale. 147e année. Vol. II

.

1009

que des contrôles dans ce domaine ne peuvent être efficaces que s'ils bénéficient ' d'un soutien multilatéral aussi large que possible, soit sur la base de traités internationaux, soit sur celle de mesures similaires appliquées par le plus grand nombre de pays possible suite à des conventions conclues dans les enceintes coordonnant les contrôles sur le plan international. Si des traités internationaux ou des mesures de contrôle internationales font défaut, la loi ne permet pas d'agir.

Dans ce domaine délicat, dans lequel divers intérêts politiques et économiques s'opposent, les bases légales destinées à l'application des contrôles offrent une souplesse indispensable qui s'écarte de la proposition des auteurs de l'initiative.

La solution préconisée par l'initiative repose unilatéralement sur le but de l'utilisation. Ce but peut cependant être facilement camouflé par le destinataire du matériel et, souvent, le fournisseur l'ignore. Par ailleurs, les auteurs de l'initiative proposent une inversion du fardeau de la preuve par rapport à la situation actuelle. Ainsi, une opération pourrait être suspendue en cas de soupçon d'illégalité jusqu'à ce que l'entrepreneur prouve qu'il s'agit d'une affaire légale (cf.

ch. 132). Cette conception soumettrait à des mesures radicales de vastes domaines de la production de matériel civil d'exportation qui peut également servir à un usage militaire. Selon les circonstances, en effet, la preuve exigée ne pourrait pas être fournie.

Contrairement au droit en vigueur, le texte de l'initiative soumet en outre à un régime de contrôle les services et les opérations financières. La question des possibilités de contrôle se pose principalement ici. Dans plusieurs cas, il serait difficile d'établir, et par conséquent de contrôler, dans quelle mesure des services sont destinés à des fins guerrières. En règle générale, il manque en effet un objet ou une pièce rédigée offrant la possibilité d'une vérification objective, ce qui n'est pas le cas lors de l'exportation de marchandises ou de technologies (plans, banques de données, directives techniques écrites, etc.). A l'exception de découvertes fortuites, les organes de contrôle dépendraient uniquement des indications fournies par les personnes concernées. Des problèmes supplémentaires se poseraient lors du contrôle d'opérations de financement (cf. ch. 244.1).

144

Opérations servant à contourner les interdictions

L'initiative veut empêcher également que la règle constitutionnelle soit contournée. A titre d'exemple, le 4e alinéa du texte indique les opérations réalisées par l'intermédiaire de filiales à l'étranger ou en coopération avec des firmes étrangères, ainsi que la fourniture ou le courtage d'équipements de production, de licences et de données techniques. Comme cette énumération n'est pas exhaustive, la législation serait alors chargée de décrire en détail les opérations servant à contourner les interdictions ou de les régler au moyen d'une autorisation générale d'intervention.

L'actuelle loi fédérale sur le matériel de guerre (LMG), élaborée à l'époque à titre de contre-projet indirect à une initiative populaire, pouvait être considérée alors comme une loi progressiste, dont la réglementation pouvait être considérée comme sévère en comparaison internationale. Au cours de ces dernières années, divers problèmes ont cependant révélé que la loi ne correspondait plus aux

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exigences actuelles sur tous les points. La réglementation admet notamment des possibilités de contournement dont il faut impérativement tenir compte aujourd'hui. Au cours des 20 dernières années, les réglementations similaires dans des Etats comparables ont évolué pour s'adapter aux changements des conditions dans le domaine de la production d'armements et du commerce de matériel de guerre. Dans le projet de révision de la LMG, qui est présenté ci-après, une réponse est apportée à ces questions, ce qui contribue à étendre le champ d'application du domaine concerné. Certaines possibilités de contournement qui ne sont pas réglées dans la LMG actuelle le seront désormais, notamment le transfert de technologie et le courtage d'affaires conclues uniquement à l'étranger. Cependant, la portée du projet de LMG est moins étendue que celle du texte de l'initiative dans la mesure où ces faits ne sont en principe pas interdits, mais soumis à un régime d'autorisation applicable selon des critères différenciés (cf. ch.

243.1 et 243.2).

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Dispositions d'exécution

Deux éléments avant tout doivent être examinés à propos des dispositions d'exécution: ['autorité chargée de l'exécution et les contrôles ultérieurs à l'étranger.

Il est proposé de confier les tâches d'exécution à une commission indépendante de l'administration. Si l'on considère cependant que le domaine du matériel de guerre est très étroitement lié à des aspects de politique extérieure et qu'il est influencé par celle-ci, il est évident qu'il doit également relever de l'autorité qui est compétente pour la politique extérieure, soit le Conseil fédéral. Aussi le projet de révision de la LMG prévoit-il que la décision au sujet des demandes qui posent une question de principe ou revêtent une portée politique fondamentale incombe au Conseil fédéral et que les recours contre les décisions d'autorités inférieures peuvent lui être déférés. Cette solution, qui est en principe conforme à celle du droit actuel, permet de satisfaire aux exigences dans ce secteur politique souvent délicat.

Par ailleurs, l'intention des auteurs de l'initiative de soumettre à des contrôles ultérieurs, même à l'étranger, le déroulement légal d'opérations autorisées suscite une remarque. De tels contrôles seraient exposés à d'importantes difficultés juridiques et pratiques. La collaboration avec des services à l'étranger dans le cadre de l'assistance administrative est certes admise et prévue, aussi dans le projet de LMG (art. 39). Cependant, les mesures de contrôle de nos propres autorités à l'étranger ne sont pas admissibles sans l'accord de l'Etat concerné et ne sont souvent ni souhaitées ni possibles. Pour sa part, la Suisse a toujours exprimé la plus grande réserve lorsque d'autres Etats ont formulé des demandes ou exigé des mesures similaires sur notre territoire. De tels accords devraient être fondés sur la réciprocité. Il faut présumer que la base de ceux-ci ne serait pas la même pour tous les Etats et qu'une pratique différente en découlerait. Cette situation, très insatisfaisante, aurait pour conséquence que, de facto, seule une exécution inéquitable serait possible, les entreprises et les particuliers pouvant, le cas échéant, en tirer profit.

Le contrôle du transit, auquel on ne peut souvent procéder que par sondage, se révèle également problématique. L'obligation de déterminer chaque but d'utilisa-

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tion de la marchandise en transit, telle que l'initiative populaire l'exige, ne serait guère applicable et occasionnerait des charges disproportionnées pour les transporteurs et aussi pour les autorités chargées de l'exécution. Pour les survols du territoire avec du matériel de guerre, qui représentent en principe un transit, le respect intégral de l'interdiction ne serait pas contrôlable.

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Conséquences d'une acceptation de l'initiative Pour la défense nationale

Même en cas d'acceptation de l'interdiction des exportations d'armes, la Suisse ferait valoir son droit à une défense nationale militaire. D'autres Etats devraient pouvoir continuer de lui livrer du matériel de guerre moderne. En même temps, elle ne pourrait pas répondre aux besoins semblables d'autres Etats de droit démocratiques aspirant à assurer leur défense militaire et à obtenir ainsi des livraisons d'armes de la Suisse. Cette attitude ne serait guère profitable à la crédibilité de la Suisse.

Notre défense nationale est tributaire du potentiel industriel du pays. Mis à part les six entreprises fédérales d'armement, qui se chargent principalement de la fabrication de systèmes d'armes, il existe de nombreuses entreprises qui, outre du matériel civil, fabriquent des biens d'armement en plus ou moins grande quantité.

Des milliers d'entreprises civiles de toute importance participent à la fabrication de biens d'armement en tant que sous-traitants. Toutes ces fabriques soutiennent la défense nationale au moyen d'un know-how spécialisé, de services et de produits. Leur importance est confirmée par les acquisitions d'armements auxquelles procède le Groupement de l'armement, acquisitions qui représentent une part indigène de 80 pour cent. Cette part correspond à un volume d'occupation annuel de 15 000 personnes. Des connaissances approfondies et des aptitudes dans le domaine de la technologie de la défense sont pour l'industrie du pays une condition pour maîtriser les techniques nouvelles dans des domaines importants et pour apprécier leur utilité pour la défense nationale. Par ailleurs, c'est le seul moyen de conserver dans le pays la connaissance des systèmes. Celle-ci est particulièrement précieuse lors de la phase d'entretien qui est assurée durant les périodes d'utilisation, qui sont particulièrement longues dans notre pays et qui jouent un rôle dans le développement de programmes destinés au maintien et à l'amélioration de l'efficacité au combat des systèmes d'armes. Ainsi, d'importants moyens de production tels que des gabarits et des dispositifs restent conservés dans le pays en vue de l'exécution ultérieure de tels travaux. Finalement, les services d'entretien peuvent, d'une manière très simple, se familiariser avec le matériel avant la livraison et tirer directement profit de l'expérience
industrielle.

L'ensemble de ces activités se fait dans l'intérêt de la défense nationale, qui doit être à même de disposer d'un matériel répondant aux normes les plus récentes et dont l'entretien puisse être assuré.

La survie du potentiel industriel suisse dans le domaine de la technique de défense présente un intérêt indéniable pour la politique de sécurité également. Les besoins limités en biens d'armement pour notre armée, plus petite, et les moyens financiers limités dont il faut tenir compte ne permettent cependant guère de 1012

procéder à des développements allant au-delà des besoins propres. La complexité des systèmes d'armes modernes exige des capacités de développement dont la Suisse ne dispose plus dans la mesure nécessaire. Aussi la coopération avec des partenaires étrangers se révèle-t-elle une nécessité vitale. Pour les entreprises suisses, il s'agira notamment de pratiquer une politique sectorielle à un haut niveau technique et avec une qualité supérieure, compte tenu des conditions de concurrence accrue sur le plan international. A cet égard, elles dépendent d'un marché ouvert à la concurrence libre et de possibilités d'échanges illimitées de valeurs matérielles et immatérielles.

L'interdiction des exportations rendrait impossible de telles collaborations. L'industrie privée serait contrainte de se retirer du domaine de la défense en raison du manque de possibilités de commercialisation. L'armée perdrait ainsi un important know-how industriel. Les entreprises d'entretien de la Confédération ne pourraient maintenir un niveau satisfaisant de connaissances qu'au moyen de dépenses supplémentaires élevées. Elles devraient pour cela augmenter leurs capacités, ce qui serait en contradiction avec les efforts de rationalisation entrepris actuellement.

Si la Suisse devait couvrir essentiellement à l'étranger ses besoins en matériel d'armement, sa dépendance à l'égard des grandes entreprises d'armement étrangères, qui occupent en partie une position de monopole aujourd'hui déjà, irait en s'accroissant. La perte de know-how dans le domaine technique de l'armement apparaîtrait également lors de la réalisation de projets d'acquisitions, lors de l'instruction, de la préparation et de l'entretien de matériel d'armement, et il faudrait faire appel à un nombre croissant de spécialistes étrangers. Enfin, en raison de la diminution des capacités de livraison et de réparation dans le pays, la Confédération devrait installer d'importants entrepôts d'unités d'échange et de pièces de rechange.

Par ailleurs, l'interdiction du transit de matériel de guerre aurait pour conséquence que la Suisse ne pourrait autoriser aucune livraison faite par un Etat à des troupes de la communauté internationale. La Suisse serait également menacée d'isolement au plan de la politique de sécurité, et toute collaboration ou participation à des systèmes internationaux de sécurité collective, tel que l'exigent aussi les auteurs de l'initiative, serait impossible à long terme.

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Pour l'économie suisse

L'initiative ne concerne pas seulement le matériel de guerre proprement dit, mais également les biens, les services et la technologie à double usage, que l'acquéreur veut utiliser à des fins guerrières. Cette situation touche d'importantes parties de notre industrie d'exportation civile. Aussi notre industrie des machines est-elle particulièrement concernée, puisque ses produits permettent de fabriquer du matériel susceptible d'être utilisé tant au plan civil que militaire. Les fabricants de tels produits pourraient violer l'interdiction à leur insu parce que les clients dans les pays acquéreurs ne peuvent souvent pas être identifiés comme acheteurs de matériel de guerre et que l'affectation n'est pas toujours reconnaissable. Les sous-traitants notamment n'ont souvent pas la possibilité de connaître l'affecta1013

tion finale de l'élément qu'ils ont fabriqué. L'exportateur devrait préalablement procéder à des enquêtes détaillées auprès de ses clients pour déterminer l'usage prévu et procéder au besoin à des recherches complémentaires ultérieures à l'étranger pour que l'engagement soit conforme aux prescriptions. Il porterait le fardeau de la preuve pour une utilisation du matériel conforme à la loi. Jusqu'à ce que cette preuve soit apportée, l'autorité chargée de l'exécution pourrait, en cas de doute, interdire provisoirement une opération déterminée. Ces obligations ne sont guère praticables dans une économie fondée sur la division du travail et étroitement imbriquée au plan international. Dans de nombreux cas, le client ne serait pas en mesure de fournir à l'entrepreneur suisse les informations nécessaires, ni disposé à le faire. Lors de l'exportation de produits et de services, l'industrie suisse devrait se soumettre à des contrôles et à des interventions de la part des autorités, qui seraient nettement plus incisifs que ceux pratiqués par d'autres Etats européens comparables. Cette situation créerait, au détriment de notre industrie, un obstacle commercial lourd de conséquences. Compte tenu de ces contrôles officiels auxquels l'acheteur serait également soumis, les offres des entreprises suisses risqueraient de ne plus être prises en considération. Pour les industries des machines, de l'électronique et de la métallurgie, secteur clé de l'économie d'exportation qui occupe 365 000 salariés, les chances de concurrence seraient gravement compromises.

La possibilité de participation de l'industrie suisse à la fabrication de matériel d'armement étranger, destiné à notre pays, serait de fait considérablement réduite. A proprement parler, une telle participation ne serait pas interdite, même en cas d'interdiction d'exportation d'armes. Mais en raison des possibilités de coopération extrêmement limitées de l'industrie suisse, les capacités acquises au moyen de telles participations ne pourraient plus être utilisées que de manière très limitée. Ainsi, par exemple, les capacités de production créées pour les besoins propres de la Suisse, dans le cadre d'une participation directe, ne pourraient plus être utilisées en faveur de clients tiers. En raison des trop petites quantités de séries indigènes, cette situation
aurait pour conséquence que la répercussion des investissements entraînerait des frais unitaires trop importants et, partant, la perte de la capacité de concurrence. L'industrie perdrait ainsi un intérêt économique à participer à de tels projets. Enfin, il ne serait plus possible de maintenir l'actuelle part indigène, qui se monte à environ 80 pour cent lors de l'acquisition d'armements.

Ces entreprises perdraient également la possibilité d'introduire de nouvelles connaissances et procédures acquises à l'occasion de tels projets d'armement.

C'est ainsi que la production de matériel d'armement de haute technologie implique en règle générale l'introduction d'un système de qualité de niveau analogue. De telles procédures peuvent être utilisées également pour des produits civils exigeants et constituent la condition qui permet aux secteurs en question de se montrer concurrentiels au niveau international.

L'interdiction des opérations de financement aurait par ailleurs des conséquences graves pour le secteur financier de notre pays (cf. ch. 244.1).

L'interdiction du transit de matériel de guerre aurait également des conséquences perceptibles, dans la mesure où, par exemple, un tel matériel ne pourrait plus être transporté d'Allemagne en Italie, en passant par la Suisse, pour y être réparé. Une

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réglementation aussi restrictive inciterait les Etats concernés à prendre des mesures de rétorsion, qui auraient ensuite des répercussions négatives sur les entreprises suisses.

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Pour les entreprises fédérales d'armement

En vertu de l'ordonnance du 24 octobre 1990 concernant l'Office fédéral de la production d'armements (RS 510.521), cet office a d'abord pour tâche d'exercer une activité industrielle en faveur de la défense nationale. A cet effet, il planifie ses capacités en fonction de l'évolution des affaires prévisible à long terme. Les entreprises d'armement ont notamment pour tâche d'exercer la fonction d'entreprise générale et de conserver ainsi dans le pays les connaissances acquises dans le domaine des systèmes d'armes. Dans le cas d'une interdiction d'exportation, les entreprises d'armement seraient certes en mesure d'assumer des tâches supplémentaires dans des domaines spécifiques, qui relèvent actuellement de l'industrie privée. En revanche, dans de nombreux domaines, seuls des investissements supplémentaires importants dans des installations et des développements propres permettraient une extension des tâches. Compte tenu des besoins très limités de l'armée, ces dépenses ne pourraient guère être amorties de manière rentable. Il faut ajouter que les entreprises d'armement occuperaient ainsi, dans le pays, par rapport à leur principal client, l'administration centrale du Groupement de l'armement, une position de monopole indésirable. En raison de leur isolement politico-commercial, elles seraient défavorisées par rapport aux entreprises étrangères.

C'est pourquoi, dans leur domaine d'activité principal aussi, les entreprises d'armement dépendent, comme l'économie privée, des possibilités de collaboration internationale avec l'étranger. Une interdiction d'exportation anéantirait aussi les possibilités de coopération, et les entreprises d'armement n'auraient plus la possibilité d'acquérir de nouvelles technologies et un nouveau know-how grâce à des participations. A long terme, elles ne pourraient plus guère faire face à la concurrence étrangère, même en tenant compte d'une marge raisonnable de frais additionnels.

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La reconversion des entreprises d'armement, une alternative?

L'alternative proposée par les milieux des auteurs de l'initiative pour l'industrie d'armement consiste à convertir la production militaire et ses postes de travail directement dans la fabrication de produits civils grâce à la diversification et à la réorientation de la production (reconversion des entreprises d'armement).

Les expériences réalisées dans d'autres Etats nous enseignent cependant qu'il est très difficile de mener à bien de telles reconversions. Il faut d'abord disposer de marchés et de produits. Ensuite, les procédés de fabrication doivent être modifiés, la main-d'oeuvre doit être reconvertie et les méthodes de gestion adaptées. Ce processus exige beaucoup de temps, d'autant plus s'il est lié à des programmes sociaux en faveur des travailleurs. En outre, d'importants investissements sont nécessaires. L'encombrement des marchés visés et les performances de la concur-

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rence soulèvent des problèmes supplémentaires. Dans ce domaine, les débuts sont très difficiles. C'est pourquoi seules quelques entreprises à travers le monde sont parvenues à un succès économique après une reconversion de la production d'armements. La présente initiative n'offre aux entreprises concernées aucun délai d'adaptation. Même les étapes de réforme à long terme engagées par le DMF pour ses propres entreprises d'armement devraient être abandonnées. Ainsi une réduction des postes de travail serait inévitable aussi bien dans les entreprises fédérales d'armement que dans les nombreuses entreprises civiles.

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Révision de la loi fédérale sur le matériel de guerre

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Le projet de révision, contre-projet indirect à l'initiative

L'actuelle loi sur le matériel de guerre constituait un contre-projet indirect à une initiative populaire réclamant l'interdiction des exportations de matériel de guerre, à l'exception de celles destinées aux Etats neutres d'Europe. Lors de son élaboration au début des années septante, la loi pouvait être considérée, à certains égards, comme très en avance sur son temps. Ces dernières années cependant, divers problèmes sont apparus, qui montrent que la loi présente, aujourd'hui, certaines lacunes. Le 7 mars 1990, le Conseil national a accepté deux postulats invitant le Conseil fédéral à examiner la possibilité et l'opportunité d'une extension du champ d'application de la loi sur le matériel de guerre: le postulat II de la Commission de gestion du Conseil national du 21 novembre 1989 (90.001) et un postulat du Groupe socialiste du 15 décembre 1989 (89.838). Ces interventions portaient essentiellement sur quatre problèmes qui ne sont pas réglés par le droit en vigueur: - les activités d'intermédiaire (courtage) au cours desquelles le matériel n'entre pas sur le territoire suisse (affaires conclues à l'étranger uniquement), - les opérations de financement, - le transfert de technologie, notamment le transfert de licences, et - l'activité des filiales étrangères d'entreprises suisses.

A la suite d'un examen approfondi mené par un groupe de travail interdépartemental, le Conseil fédéral a reconnu, au mois de juin 1991, la nécessité d'une révision totale de la loi et a chargé le Département militaire fédéral d'élaborer un projet de révision. Des solutions pour le contrôle des activités d'intermédiaire à l'étranger et pour le transfert de technologie ont été intégrées au projet. En revanche, on a renoncé à un régime d'autorisation pour les opérations de financement et à une extension du contrôle aux filiales étrangères d'entreprises suisses (cf. ch. 244). Lorsque l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» a été déposée, le 24 septembre 1992, il est apparu logique de présenter le projet de révision comme contre-projet indirect à l'initiative.

Le 13 décembre 1993, le projet de LMG a été soumis à la procédure de consultation, qui a duré jusqu'au 28 février 1994.

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Résultats de la procédure de consultation

Les 26 cantons, huit partis politiques, dix organisations de l'économie, sept autres organisations et deux entreprises privées ont participé à la consultation. En résumé, les prises de position révèlent que la tendance du projet (combler les lacunes de l'actuelle LMG, créer une certaine compatibilité avec les règles de conduite de la communauté internationale, encourager la collaboration de l'industrie suisse avec ses partenaires étrangers) recueille l'approbation d'une majorité des participants à la consultation et suscite des réserves à l'égard de certains points de la révision. Treize cantons, cinq partis et huit organisations se sont exprimés dans ce sens.

Les réserves portent principalement sur l'application de la réglementation, sur la concertation au niveau international (pas question de «faire cavalier seul»), sur la prise en compte de points de vue économiques (garantie des postes de travail, préservation du know-how). Une organisation syndicale exige la réduction des exportations d'armements, qui, selon elle, neutralisent souvent les efforts entrepris par la Suisse pour encourager les droits de l'homme; selon elle, la survie de l'économie doit être garantie par la reconversion dans des produits civils. Des participants à la consultation issus des milieux politiques de gauche sont en partie fondamentalement opposés à l'exportation de matériel de guerre. Les milieux ecclésiastiques proposent d'instituer une commission qui serait chargée de la préparation des décisions de principe du Conseil fédéral et de leur réalisation pratique et qui serait composée de spécialistes de la politique de paix et de sécurité, de la politique de développement, des droits de l'homme, de la politique de l'environnement, ainsi que de représentants de l'office central chargé de lutter contre le trafic illicite de matériel de guerre.

La révision est principalement rejetée par les milieux proches de l'économie. Les principaux motifs invoqués sont le fait que la loi actuelle est sévère, qu'elle a fait ses preuves et qu'une révision est dès lors inutile. Par ailleurs, on estime que l'industrie suisse serait considérablement entravée par les nouveautés et désavantagée dans les rapports de concurrence; l'économie serait beaucoup plus affectée par la nouvelle loi qu'elle ne l'est aujourd'hui. En outre, on déplore que
le projet présente des lacunes juridiques (absence de base constitutionnelle pour le contrôle du transfert de technologies et d'opérations se déroulant à l'étranger et au cours desquelles le matériel ne pénètre pas sur le territoire suisse; effets rétroactifs des dispositions transitoires). De nombreux participants à la consultation demandent également l'introduction d'une nouvelle obligation contraignant la Confédération à verser une indemnité dans les cas où des autorisations seraient suspendues ou révoquées pour des motifs non imputables à une faute du détenteur (la législation actuelle ne prévoit pas une telle indemnité). Six cantons, trois partis et six organisations ou entreprises ont exprimé un avis négatif.

Les observations relatives à des points spécifiques du projet seront présentées sous forme condensée dans les explications relatives à la réglementation concernée.

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Les buts de la révision

La révision de la LMG vise les buts suivants: II s'agit tout d'abord de combler les lacunes reconnues, et de remédier à certaines imperfections dont souffre la loi actuelle. Il convient ensuite d'assurer une certaine compatibilité avec les règles de conduite que l'on s'efforce d'élaborer, au niveau international, dans le domaine des transferts d'armement. Il convient également de se doter des instruments nécessaires pour pouvoir transposer, dans l'ordre juridique suisse, les mesures d'embargo décidées par la communauté internationale, concernant les livraisons de matériel de guerre. Il s'agit enfin de tenir compte de la tendance générale à une division de travail toujours plus poussée, par-dessus même les frontières nationales. Cette tendance s'observe pour tout ce qui est production industrielle, et pas seulement dans le domaine de l'armement. Plutôt que d'encourager la délocalisation de notre industrie de l'armement, il convient de favoriser sa collaboration avec ceux de nos partenaires économiques qui partagent les mêmes valeurs et possèdent un régime de contrôle des exportations comparable au nôtre.

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Les principales nouveautés introduites par la révision La notion de matériel de guerre

Actuellement, le champ d'application de la loi se limite au matériel susceptible de servir de moyen de combat, c'est-à-dire ayant un effet destructeur direct. Cette définition apparaît aujourd'hui trop étroite, comparativement à la plupart des législations étrangères et compte tenu des expériences faites ces dernières années.

Il convient donc de trouver de nouveaux critères qui satisfassent aux exigences de la sécurité du droit et tiennent compte de l'évolution technologique.

Certains ont proposé que -soit considéré comme matériel de guerre tout matériel destiné à des fins militaires. (Voir à ce sujet l'initiative parlementaire Longet du 22 juin 1988 et le postulat du groupe AdI/PEP du 21 mars 1990.) Cette idée revient à faire dépendre la qualification juridique d'un produit, de son utilisation. Or, les intentions de l'utilisateur ne sont pas toujours évidentes et sont, de surcroît, faciles à déguiser. En outre, l'acheteur n'est pas nécessairement l'utilisateur et il ignore le plus souvent la destination finale du produit. C'est particulièrement vrai pour les sous-traitants qui fabriquent des pièces détachées. Plutôt que de lier la qualification juridique d'un produit aux intentions présumées de son utilisateur, il faut donc s'efforcer de trouver une définition qui repose sur des données strictement objectives et aisément contrôlables.

Cette double exigence est remplie si l'on prend en compte, non le but auquel un produit est destiné, mais le but pour lequel celui-ci a été conçu, qu'il s'agisse de la conception initiale ou d'une modification subséquente. Dorénavant, il est prévu d'assujettir à la loi non seulement les matériels susceptibles de servir de moyens de combat, mais encore, de manière générale, les matériels qui ont été spécialement conçus ou modifiés à des fins militaires. La notion de «conception spécifique» s'applique au produit lui-même et non à la technologie sous-jacente. Un radar ou un véhicule tout terrain, par exemple, ne constituent pas nécessairement du 1018

i ; i I [ j

matériel de guerre sous prétexte que l'invention répondait, à l'origine, à des besoins militaires. Tout dépend de l'usage pour lequel ce radar ou ce véhicule ont été spécialement conçus, ainsi que des caractéristiques particulières qu'impliqué un usage militaire. A cet égard, l'aspect extérieur (la peinture notamment) ne saurait être à lui seul un critère déterminant, à moins que le revêtement extérieur ne soit spécialement destiné à réduire la signature radar ou infrarouge. Inversement, les matériels qui n'ont pas été spécialement conçus ou modifiés à des fins militaires ne seront pas considérés comme matériel de guerre, même s'ils sont aussi utilisables à des fins militaires. Encore faut-il, dans ce cas, que les versions civiles et militaires soient techniquement identiques. Par ailleurs, et conformément à la pratique actuelle, les pièces élémentaires telles que vis, écrous, boulons, axes, roues dentées, ressorts, etc., ne seront pas assujetties à la loi même s'il s'agit d'une exécution spéciale.

Contrairement aux craintes exprimées lors de la procédure de consultation, les biens à usage tant civil que militaire ne sont donc absolument pas assujettis à la loi. En revanche, et comme c'est déjà le cas aujourd'hui, la notion de matériel de guerre ne s'applique pas seulement au produit terminé, mais aussi aux éléments qui le composent, même partiellement usinés, à moins qu'ils ne soient aussi utilisables à des fins civiles, dans la même exécution.

Cette nouvelle définition du matériel de guerre a pour conséquence que le champ d'application de la loi n'est plus limité aux matériels utiles aux opérations militaires, et qu'il s'étend dorénavant à certains équipements destinés à l'instruction, ainsi qu'à certains instruments et machines de fabrication, de contrôle et d'entretien du matériel de guerre. Le critère de la spécificité oblige ici à se montrer plus restrictif dans la définition. C'est ainsi que seuls sont visés les équipements destinés à l'instruction au combat. De même, seuls sont assujettis à la loi les machines et outils conçus exclusivement pour la production, le contrôle ou l'entretien du matériel de guerre. La plupart des machines-outils se prêtent en effet aussi bien à la fabrication de produits civils que de produits militaires. Il suffit pour cela de modifier les ordres donnés à la
machine. Dans lès-faits, les équipements de production qui tombent sous le coup de la loi seront donc peu nombreux. Il s'agira essentiellement de machines (ou de parties de celles-ci) destinées à produire des munitions ou à forger des tubes de canons, ainsi que de certains moules de fonderie. En revanche, et conformément au principe de la spécificité, les machines ou parties de machines qui constituent des biens à double usage (par exemple les moteurs électriques, les machines-outils à commande numérique, les appareils électroniques destinés au contrôle) ne sont pas considérées comme matériel de guerre.

Enfin, comme il s'agit là aussi de biens à usage tant civil que militaire, les substances chimiques et les agents pathogènes susceptibles d'être utilisés pour la fabrication d'armes chimiques ou biologiques sont soustraits du champ d'application de la loi fédérale sur le matériel de guerre, pour être assujettis à la future loi sur le contrôle des biens (cf. ch. 143).

Sur le plan de la systématique, il convient, comme aujourd'hui, que le législateur donne une définition générale du matériel de guerre et laisse au Conseil fédéral le soin d'en dresser une liste détaillée. Une telle délégation de compétence est nécessaire afin de pouvoir réagir rapidement à l'évolution technologique.

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La définition générale du matériel de guerre et la liste que le Conseil fédéral se propose de dresser dans l'ordonnance d'exécution sont en tous points compatibles avec la liste internationale du matériel de guerre («International Munitions List») élaborée au sein du COCOM, organisme destiné à coordonner le contrôle des exportations de biens stratégiques et réunissant l'Allemagne, l'Australie, la Belgique, le Canada, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, la Grèce, l'Italie, le Japon, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la Turquie et les USA. La définition contenue dans la loi sur le matériel de guerre et la liste que contiendra l'ordonnance d'exécution sont également compatibles avec la liste qui est en cours d'élaboration au sein du régime appelé à succéder au COCOM et qui réunira un nombre d'Etats encore plus grand («New Forum»). On ne saurait donc prétendre, comme l'ont fait certains lors de la procédure de consultation, que la Suisse choisit là une voie singulière. Au contraire, la Suisse ne fait que rapprocher sur ce point sa législation de celle des autres pays industrialisés. Afin d'assurer une parfaite compatibilité avec la nouvelle «International Munitions List», le Conseil fédéral renoncera à inclure les tenues de combat dans l'ordonnance sur le matériel de guerre, à moins qu'il ne s'agisse de tenues de protection contre les armes chimiques.

Il vaut enfin la peine de relever qu'avec l'élargissement de la notion de matériel de guerre, il deviendra plus facile pour notre pays d'accorder l'entraide judiciaire internationale dans des affaires de commerce illicite de matériel de guerre.

L'exigence de double punissabilité implique en effet que le matériel litigieux soit également considéré comme matériel de guerre au regard du droit suisse.

Lors de la procédure de consultation, neuf cantons et deux partis ont approuvé sans réserve la redéfinition de la notion de matériel de guerre. Trois cantons et trois partis la rejettent pour cause de base constitutionnelle insuffisante ou en raison des difficultés que soulève parfois la distinction avec du matériel civil. Onze cantons ont exprimé le désir que la liste du matériel de guerre soit établie après entente avec les cantons. Une organisation patronale a proposé de ne pas définir comme matériel de guerre les
pièces de rechange relatives à de précédentes livraisons. Deux organisations souhaiteraient que le Conseil fédéral puisse interdire la livraison de marchandises et de pièces de rechange ainsi que l'assistance technique qui leur est associée, lorsque des produits à double usage ont été utilisés à des fins militaires.

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Activités prohibées

La nouvelle loi contient une disposition (art. 7) qui, de manière générale, interdit toute activité ayant trait aux armes nucléaires, biologiques ou chimiques (armes ABC). Outre les actes commis sur le territoire suisse, cette interdiction s'applique à toute personne de nationalité suisse ou domiciliée en Suisse, qui a commis un acte qui contrevient à des accords internationaux auxquels la Suisse est partie, quel que soit l'endroit où l'acte a été commis (Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, du 1er juillet 1968; Convention sur l'interdiction des armes B, du 10 avril 1972; Convention sur l'interdiction des armes chimiques, du 13 janvier 1993, textes que le Conseil fédéral, lors de la session parlementaire en automne 1994, a été autorisé à ratifier).

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Cette disposition reflète la volonté de notre pays de tout mettre en oeuvre pour s'opposer à la prolifération des armes de destruction massive. La loi sur le contrôle des biens réglementera pour sa part l'exportation et le transit d'équipements et de technologies civils pouvant servir à fabriquer des armes ABC, domaine actuellement régi par l'ordonnance du 12 février 1992 sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles (RS 946.225).

Cette interdiction générale correspond, dans le domaine des armes chimiques, à ce que prévoit la Convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction des armes chimiques. Ne tombent pas sous le coup de cette interdiction les actes destinés à permettre la destruction d'armes ABC par les organes compétents, ou à assurer une protection contre les effets de telles armes. Ainsi donc, la · fabrication d'équipements de protection n'est pas interdite en soi mais est sujette à autorisation, dans la mesure où ces équipements sont soumis à la LMG.

Cette disposition a reçu un soutien unanime lors de la procédure de consultation.

243

Activités soumises à autorisation

Seules sont commentées ici les nouveautés introduites à l'occasion de la révision totale de la LMG.

243.1

Le commerce et l'activité d'intermédiaire (courtage)

Actuellement, la loi ne s'applique qu'aux opérations portant sur du matériel physiquement présent, à un moment ou à un autre, sur le territoire suisse. Ne sont donc pas soumises à autorisation, même si elles se déroulent en Suisse, les activités commerciales prévoyant la livraison de matériel de guerre d'un pays A vers un pays B, si ce matériel ne franchit pas les frontières de la Suisse.

Ce caractère limité du champ d'application de la LMG est apparu au fil des ans comme une lacune. Il est arrivé en effet que des sociétés ou des personnes physiques s'établissent en Suisse afin de s'y livrer à des activités qui n'auraient pas été autorisées chez elles, et auxquelles notre pays ne voudrait pas voir associer son nom. Dorénavant, le commerce et le courtage seront donc soumis à la loi, quel que soit l'endroit où se trouve l'objet de la transaction. Il demeure en revanche nécessaire que cette activité se déroule, même partiellement, sur le territoire suisse.

La question a été examinée de savoir s'il ne conviendrait pas de supprimer cette dernière condition et d'assujettir aussi à la loi l'activité accomplie à l'étranger par des personnes domiciliées en Suisse. Cette question a été tranchée par la négative, car une telle mesure irait au-delà du but poursuivi par la loi, et le contrôle s'avérerait pratiquement impossible. En effet, soit cette activité se déroule en violation de la loi étrangère et elle relève alors des tribunaux étrangers, soit elle se déroule avec l'autorisation, même tacite, des autorités étrangères, et alors celles-ci n'ont aucune raison de collaborer avec les autorités suisses dans le cadre d'une poursuite pénale intentée en Suisse. En outre, il y aurait là une certaine ' atteinte au principe de la territorialité des lois, auquel notre pays est attaché, et 1021

auquel seules des circonstances particulières justifient que l'on déroge. C'est notamment le cas des armes de destruction massive, parce qu'il s'agit là de moyens de combat condamnés par le droit international (cf. ch. 242).

L'activité d'intermédiaire est par ailleurs définie de manière suffisamment souple (art. 6, 3e al.) pour que l'on ne puisse échapper à la loi sous le prétexte que la signature du contrat a finalement eu lieu à l'étranger. Agit en effet comme intermédiaire celui qui, en Suisse, crée les conditions essentielles à la conclusiond'un contrat, même si le contrat est signé ailleurs qu'en Suisse.

A l'instar de la fabrication du matériel de guerre, le courtage exercé à titre professionnel nécessite à la fois une autorisation initiale et une autorisation spécifique. L'autorisation initiale n'est accordée qu'aux personnes morales ou physiques qui offrent les garanties nécessaires d'une gestion régulière de leurs affaires et dont l'activité prévue n'est pas contraire aux intérêts du pays. L'autorisation spécifique n'est accordée, de surcroît, que lorsque l'affaire envisagée n'est pas contraire aux principes de la politique étrangère de la Suisse.

En comparaison, on observe que plusieurs pays soumettent déjà à autorisation ce genre d'opérations: les USA, la Suède, la Norvège, l'Allemagne et les Pays-Bas. La tendance va d'ailleurs clairement dans ce sens. La Hongrie et la Tchéquie ont récemment modifié leur législation pour y introduire les dispositions nécessaires, et la Pologne s'apprête à faire de même. Or, sans doute davantage que d'autres pays, la Suisse est guettée par les dangers qu'engendré un vide juridique dans ce domaine. La réputation de notre pays, son efficacité dans le domaine des prestations de services et son secret bancaire sont propres à attirer chez nous les sociétés «boîte aux lettres» et celles-ci offrent un cadre idéal pour des opérations plus ou moins clandestines. Un certain contrôle sur ce genre d'activités s'impose donc.

Lors de la procédure de consultation, trois partis ont expressément approuvé cette extension du champ d'application de la loi. Un parti conteste l'existence d'une base constitutionnelle suffisante. Un autre parti souhaiterait que le contrôle ne s'applique qu'aux sociétés «boîte aux lettres» et que l'autorisation initiale de fabriquer du matériel
de guerre donne ipso jure le droit de pratiquer le courtage, afin de ne pas nuire à la compétitivité de l'industrie suisse. Une telle proposition cependant ne constitue pas une solution adéquate, car le strict contrôle de la fabrication du matériel de guerre qu'assuré l'autorisation initiale ne porte nullement sur les affaires que le détenteur de l'autorisation est susceptible de traiter, comme intermédiaire, sur quelque objet et avec quelque partenaire que ce soit. En outre, s'il est le fait d'un fabricant, le courtage porte par définition sur du matériel de guerre produit à l'étranger. Sinon, il s'agit de commerce. Les seuls fabricants de matériel de guerre concernés par cette nouvelle réglementation du courtage sont donc ceux qui ont transféré à l'étranger une partie de leur production.

Pour tenir compte des craintes exprimées par les milieux industriels concernés, le Conseil fédéral doit pouvoir prévoir certaines exceptions et dispenser de l'obligation d'autorisation les affaires de courtage négociées avec des pays partageant nos valeurs et disposant d'un régime de contrôle des exportations comparable au nôtre. Tel est le cas des pays qui participent aux mesures internationales de.

1022

contrôle soutenues par la Suisse. Le but est de simplifier la procédure en supprimant l'obligation de requérir une autorisation pour chaque cas particulier lorsque cette autorisation serait de toute manière accordée. L'obligation d'être titulaire d'une autorisation initiale demeure inchangée.

243.2

Les transferts de technologie

Actuellement, la loi ne régit que les transferts de matériel de guerre («hardware»).

Les transferts de technologie («software») échappent donc à tout contrôle. Il apparaît cependant nécessaire de les empêcher lorsqu'ils visent à fournir à un pays donné la capacité de produire un matériel de guerre pour lequel les autorités suisses refuseraient l'autorisation d'exporter.

La nouvelle loi se propose ainsi de soumettre à autorisation le transfert de biens immatériels, y compris le know-how, et la concession de droits y afférents, lorsque ceux-ci portent sur du matériel de guerre, tel qu'il est défini dans la loi et énuméré dans l'ordonnance d'exécution. Pour des motifs de sécurité juridique, c'est la conclusion du contrat, et non le transfert lui-même, qui sera soumise à autorisation.

Comme le but de la loi est avant tout de contrôler ce qui est transféré à l'étranger, une autorisation n'est nécessaire que si le cessionnaire a son siège ou son domicile à l'étranger.

En outre, la loi ne s'attache qu'au transfert entre le cédant ayant son siège ou son domicile en Suisse et le cessionnaire domicilié à l'étranger. Ce qu'il advient ensuite des droits ainsi transférés relève exclusivement de la responsabilité politique de l'Etat vers lequel la Suisse a autorisé le transfert. Lors de l'examen des critères d'autorisation, il sera tenu compte de la mesure dans laquelle cet Etat exerce sa responsabilité internationale, notamment s'agissant du respect des décisions d'embargo prises par la communauté des Etats.

En comparaison internationale, on constate qu'un tel contrôle existe déjà en Allemagne, au Canada, au Danemark, en Espagne, en Finlande, en France, en Grande-Bretagne, en Grèce, en Hongrie, en Italie, au Japon, au Luxembourg, en Norvège, aux Pays-Bas, en Pologne, au Portugal, en Suède, en Tchéquie et aux USA. Le contrôle des transferts de technologie est par ailleurs prévu par le régime multilatéral appelé à succéder au COCOM («New Forum»).

Lors de la procédure de consultation, huit cantons et trois partis ont expressément approuvé cette extension du champ d'application de la loi. Cinq cantons et un parti auraient souhaité que l'on aille plus loin encore, en prévoyant une sorte de droit de veto quant à l'utilisateur final des droits transférés. Trois cantons et trois partis se sont opposés à ce que
l'on réglemente les transferts de technologie en raison de l'absence de base constitutionnelle, en raison des problèmes d'application liés à de tels contrôles ou en raison du risque d'entraver le secteur «recherche et développement» dans les domaines concernés.

Pour tenir compte des craintes exprimées par les milieux industriels concernés, le Conseil fédéral doit pouvoir prévoir certaines exceptions et dispenser de l'obligation d'autorisation les transferts de technologie vers des pays partageant nos valeurs et disposant d'un régime, de contrôle des exportations comparable au 1023

nôtre. Tel est le cas des pays qui participent aux mesures internationales de contrôle soutenues par la Suisse. Le but est de simplifier la procédure en supprimant l'obligation de requérir une autorisation pour chaque cas particulier lorsque cette autorisation serait de toute manière accordée. L'obligation d'être titulaire d'une autorisation initiale demeure inchangée.

244 244.1

Autres problèmes examinés Les affaires de financement

La question des affaires dites de financement a fait l'objet d'un examen approfondi. Dans quelle mesure faut-il soumettre ce genre d'affaires à la loi fédérale sur le matériel de guerre? En regardant de plus près les cas qui ont été évoqués ces dernières années dans la presse, on observe que les personnes en cause n'ont pas eu qu'un rôle financier, mais qu'elles ont agi comme de véritables intermédiaires.

Si elles ont pu exercer leurs activités en Suisse sans être inquiétées, c'est parce que les affaires qu'elles traitaient portaient sur du matériel de guerre qui ne pénétrait à aucun moment sur sol suisse. Avec l'extension du champ d'application de la LMG aux opérations concernant du matériel situé à l'étranger, ces affaires tomberont à l'avenir sous le coup de la loi, et leurs protagonistes seront condamnables s'ils ont agi en Suisse sans autorisation.

Quant au financement proprement dit, il n'est pas soumis au régime de l'autorisation. Il peut toutefois être assimilé à une activité d'intermédiaire si la récolte de fonds s'inscrit dans le cadre d'une affaire de courtage et apparaît comme une «condition sine qua non» de sa réalisation. Il serait en revanche disproportionné et aucun pays ne le fait - de soumettre à autorisation le trafic des paiements. Il faut au contraire se limiter à sanctionner le financement de trafics illicites.

Il convient de relever à ce sujet que, déjà maintenant, la loi punit celui qui participe au financement d'un trafic illicite de matériel de guerre ou sert d'intermédiaire pour son financement (art. 17, 1er al., let. e, LMG). Si cette disposition n'a pas été appliquée plus souvent, c'est parce qu'aucune affaire n'était illicite tant que le matériel de guerre ne touchait pas le territoire de la Suisse. Avec l'extension prévue du champ d'application de la loi, ce ne sera plus le cas.

244.2

Le contrôle des filiales étrangères de sociétés suisses

La question de savoir s'il conviendrait de soumettre à la loi l'activité déployée à l'étranger par des filiales de sociétés suisses a également été examinée. Faut-il concrètement que la Suisse s'arroge un droit de veto sur des activités menées à l'étranger par des sociétés de droit étranger agissant en pleine conformité avec le droit étranger? Un contrôle qui prétendrait s'exercer au-delà de nos frontières serait difficilement conciliatale avec notre conception du droit, et la Suisse pourrait se voir reprocher de se comporter vis-à-vis d'un pays étranger comme elle ne tolérerait pas qu'on le fasse à son égard. Au surplus, le contrôle par les autorités suisses s'avérerait pratiquement impossible, car le droit international s'oppose à ce qu'un Etat accomplisse des actes de puissance publique sur le 1024

territoire d'un autre Etat. Enfin, il serait également difficile de déterminer le seuil à partir duquel une société de droit étranger devrait être considérée comme étant dominée par une société suisse.

Pour toutes ces raisons, il n'est pas opportun d'étendre sur ce point le champ d'application de la loi. Il est d'ailleurs significatif que ni la Suède ni l'Allemagne n'aient introduit de telles dispositions et que seuls les USA semblent s'être dotés d'un tel régime.

245

Les critères d'autorisation

Le système actuel (art. 11, 2e al., LMG) a pour caractéristique que la loi fait dépendre des conséquences juridiques énoncées comme absolues de notions juridiques imprécises. Par exemple: si un pays est en proie à des tensions dangereuses, aucune autorisation d'exporter ne peut être délivrée. Or, la loi ne définit pas ce qu'il faut entendre par «tensions» et encore moins à partir de quel stade celles-ci doivent être considérées comme dangereuses. Elle ne tient pas compte des causes de ces tensions et ne permet pas de distinguer l'agresseur potentiel de celui qui est au contraire menacé d'agression. La loi ne permet pas non plus de faire d'exception en faveur des troupes engagées dans des opérations de maintien ou de rétablissement de la paix. Notre pays devrait ainsi refuser qu'une entreprise suisse fournisse des pièces de rechange aux troupes envoyées par l'ONU dans une région en crise.

L'actuelle loi fédérale sur le matériel de guerre tend ainsi à réduire à un problème juridique la décision d'accorder ou de ne pas accorder une autorisation d'exporter lorsqu'il s'agit au préalable de déterminer si un certain état de fait est ou n'est pas réalisé. En réalité, toute décision dans ce domaine, mis à part les cas de routine, apparaît comme une question politique lorsqu'il s'agit de peser des intérêts de politique étrangère et des intérêts économiques. Plutôt qu'énoncer des critères conçus comme des règles normatives, la loi devrait donc énumérer tous les facteurs qui sont obligatoirement pris en considération dans l'analyse de la situation: risque d'attiser les tensions régionales, risque d'influer négativement sur le respect des droits de l'homme, risque de compromettre la coopération au développement, risque de renforcer un Etat dont le comportement viole le droit des gens, position des pays qui participent à des régimes internationaux de contrôle des exportations.

Tous ces facteurs sont d'ailleurs implicitement contenus dans les articles 10 et 11 LMG. Les formuler de manière explicite aurait pour avantage de rendre notre législation parfaitement compatible avec les règles de conduite qui, au niveau international, sont de plus en plus reconnues par les Etats comme critères communs.

Ces facteurs ont pour corollaire que la décision d'accorder ou de refuser une autorisation d'exporter s'inscrit dans
une véritable réflexion politique, où l'analyse doit prendre en compte tous les éléments pertinents, y compris la nature du matériel de guerre considéré. Il sera ainsi possible de se montrer moins rigoureux, dans son appréciation, s'il s'agit de matériel de guerre autre que des armes ou des munitions, ou encore s'il s'agit de la fourniture de pièces de rechange pour du 67 Feuille fédérale. 147' année. Vol. II

1025

matériel précédemment livré. La Suède elle-même considère, à propos des pièces de rechange, qu'on ne peut accepter d'exporter du matériel de guerre sans s'engager à une certaine cohérence. Tout cela aura pour conséquence que, beaucoup plus fréquemment qu'aujourd'hui, les décisions seront prises par le Conseil fédéral lui-même.

Cette redéfinition des critères n'entraînera pas de bouleversement dans la pratique des autorités suisses, mais elle permettra de mieux tenir compte, dans l'analyse globale, des éléments du cas d'espèce.

Sur le plan international, les comparaisons s'avèrent difficiles. Tous les pays, en effet, n'érigent pas les critères d'autorisation au rang de loi formelle. En Suède, par exemple, ces critères ne sont fixés que dans une directive gouvernementale.

Outre les différences observées quant au niveau normatif, il faut par ailleurs constater que le libellé des critères ne renseigne pas sur la manière dont ceux-ci sont effectivement interprétés. Seules les statistiques permettent en définitive de faire certaines comparaisons, mais tous les pays sont loin de publier des statistiques qui permettent de tirer des conclusions sur les motifs qui sont à l'origine des autorisations.

La plupart des Etats considèrent les exportations de matériel de guerre comme un domaine inséparable de leur politique de sécurité. Pour cette raison, les seules règles de droit international que l'on trouve à ce propos concernent la nonprolifération des armes de destruction massive. En matière d'armes classiques, on assiste cependant, depuis la seconde guerre du Golfe (1991), à une tentative d'élaborer certaines règles de conduite communes. Il ne s'agit pas là de traités internationaux, mais de principes discutés dans des enceintes internationales et adoptés par consensus, qui engagent politiquement les Etats qui y ont souscrit. Il s'agit notamment des règles de conduite élaborées dans le cadre de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) afin d'intensifier la collaboration internationale en matière de transferts d'armes classiques et de technologies associées. Ces «Principes régissant les transferts d'armes classiques» ont été adoptés à Rome le 30 novembre 1993. Ils énumèrent les différents critères à prendre en compte avant d'autoriser de tels transferts: a. le respect des droits de
l'homme et des libertés fondamentales dans le pays bénéficiaire; b. la situation dans le pays bénéficiaire et alentour, compte tenu des tensions ou des conflits armés existants; c. la mesure dans laquelle le pays bénéficiaire respecte les engagements internationaux, notamment en ce qui concerne le non-recours à la force, en matière de non-prolifération ou dans d'autres domaines de la maîtrise des armements et du désarmement; d. la nature et le coût des armes à transférer, compte tenu des conditions prévalant dans le pays bénéficiaire, y compris ses besoins légitimes de sécurité et de défense, en visant à détourner le moins de ressources humaines et économiques possible à des fins d'armement; e. la nécessité pour le pays bénéficiaire d'être en mesure d'exercer son droit de légitime défense individuelle ou collective, conformément à l'article 51 de la Charte des Nations Unies;

1026

f.

la question de savoir si les transferts constituent une réponse appropriée et proportionnelle aux menaces auxquelles est confronté le pays bénéficiaire; g. , les besoins légitimes du pays bénéficiaire en matière de sécurité intérieure; h. la nécessité pour le pays bénéficiaire d'être en mesure de participer à des opérations de maintien de la paix ou à d'autres mesures conformément aux décisions de l'Organisation des Nations Unies ou de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe.

Aux termes de ces «Principes régissant les transferts d'armes classiques», les Etats sont par ailleurs exhortés à éviter les transferts susceptibles: a. d'être utilisés aux fins de violation ou de répression des droits de l'homme et des libertés fondamentales; b. de menacer la sécurité nationale d'autres Etats et de territoires dont les relations extérieures relèvent de la responsabilité internationalement reconnue d'un autre Etat; c. de contrevenir à des engagements internationaux, notamment en ce qui concerne les sanctions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations Unies, les décisions prises par le Conseil de la CSCE, les accords en matière de non-prolifération ou d'autres accords relatifs à la maîtrise des armements et au désarmement; d. de prolonger ou d'aggraver un conflit armé en cours, compte tenu des besoins légitimes d'autodéfense; e. de menacer la paix, d'introduire dans une région des capacités militaires déstabilisantes ou de contribuer de quelque autre manière à l'instabilité d'une région; f.

de faire l'objet d'un détournement dans le pays bénéficiaire ou d'une réexportation à des fins contraires aux objectifs énoncés dans les «Principes» de la CSCE; g. d'être utilisés à des fins de répression; h. de soutenir ou d'encourager le terrorisme; i.

d'être utilisés à d'autres fins que celle de pourvoir aux besoins légitimes de défense et de sécurité du pays bénéficiaire.

Les recommandations formulées lors du Conseil européen de Luxembourg de juin 1991 et du Conseil européen de Lisbonne de juin 1992 abondent dans le même sens. Bien que l'article 223 du Traité de Rome réserve la compétence nationale des Etats membres de la CEE pour tout ce qui a trait aux exportations de matériel de guerre, certaines règles communes ont été définies dans le cadre de la Coopération politique européenne (CPE). Cette
coopération se poursuit maintenant au niveau de la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC, cf. ch. 5, Relation avec le droit européen). Ces règles recommandent ainsi de prendre en considération les critères suivants: a. le respect des engagements internationaux des Etats membres de la Communauté, notamment les sanctions édictées par le Conseil de sécurité des Nations Unies et celles édictées par la Communauté, les accords de nonprolifération et d'autres obligations internationales; b. le respect des droits de l'homme de la part du pays de destination finale; c. la situation intérieure du pays de destination finale en fonction de l'existence de tensions ou de conflits armés internes;

1027

d.

e.

le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionale; la sécurité nationale des Etats membres et des territoires desquels un Etat membre assume les relations extérieures, ainsi que celle des pays amis ou alliés; f.

le comportement du pays acheteur à l'égard de la communauté internationale, notamment son attitude envers le terrorisme, la nature de ses alliances et le respect du droit international; g. l'existence d'un risque de détournement interne ou d'une réexportation non souhaitée; h. la compatibilité des exportations d'armes avec la capacité technique et économique du pays bénéficiaire, compte tenu du fait qu'il est souhaitable que les Etats répondent à leurs besoins légitimes en matière de sécurité et de défense tout en consacrant un minimum de ressources humaines et économiques aux armements.

On voit ainsi que les critères d'autorisation proposés dans le cadre de la révision de la loi fédérale sur le matériel de guerre sont pleinement compatibles avec les règles de conduite qui s'élaborent autour de nous.

Mentionnons également, pour être complet, les travaux entrepris dans le même domaine au sein du «New Forum», régime appelé à succéder au COCOM. Lors de la rédaction du présent message, les travaux n'étaient pas suffisamment avancés pour que l'on puisse dire avec précision quelles seraient les règles prévues par ce régime à propos des transferts d'armes classiques. Il est cependant certain que ces travaux, auxquels la Suisse participe, vont dans la même direction que ceux de la CSCE et qu'ils renforcent pour notre pays la nécessité de veiller à la compatibilité de ses critères d'autorisation, sans qu'ils ne l'empêchent de suivre sa propre voie, chaque fois qu'elle l'estime nécessaire. De plus en plus, ces problèmes méritent d'être examinés dans une perspective de coopération internationale, où la position de nos partenaires joue un rôle important.

Lors de la procédure de consultation, cette redéfinition des critères d'autorisation a été approuvée par quinze cantons et trois partis. L'un de ceux-ci souhaiterait cependant que l'on maintienne la notion de «zone de tensions» et que-les critères soient formulés de manière à s'aligner sur les cinq objectifs de la politique extérieure de la Suisse énoncés dans le rapport du Conseil fédéral du 29 novembre 1993. Deux partis demandent
à ce que l'on mentionne également, parmi les critères d'autorisation, les intérêts de la Suisse en matière de politique économique et de politique de sécurité. Nous avons tenu compte de cette revendication en complétant le projet par une disposition (article premier) définissant le but de la loi et affirmant clairement la nécessité, pour la Suisse, de maintenir une capacité industrielle adaptée aux besoins de sa défense. Certaines critiques ont été émises également à propos des risques encourus par l'industrie lorsque la situation dans le pays destinataire vient à se détériorer postérieurement à l'octroi de l'autorisation de fabrication. Pour tenir compte de ce souci et afin d'améliorer la sécurité juridique, le projet de loi prévoit que, si l'autorisation de fabriquer est sollicitée pour un produit destiné à être exporté, les critères applicables à l'autorisation d'exporter doivent être remplis, mais qu'une fois l'autorisation de fabriquer accordée, l'autorisation d'exporter ne pourra être refusée que si des circonstances exceptionnelles l'exigent (art. 13).

1028

246

Décisions d'embargo

Dans la pratique actuelle, des décisions négatives n'interviennent qu'à l'occasion de demandes concrètes. Ceci découle de ce que l'exportation est par principe interdite, à moins d'être expressément autorisée (art. 9,1er al., LMG). Or, il serait parfois utile que des décisions puissent être prises aussi en l'absence de demande concrète. Tel est le cas lorsque la Suisse désire faire savoir qu'elle se joindra à un embargo décidé par la communauté internationale (ONU ou CSCE, p. ex.). Le prononcé d'un embargo a en effet une portée politique plus grande qu'une simple information selon laquelle une éventuelle demande d'autorisation d'exporter vers tel ou tel pays se heurterait à une décision négative. Il convient donc de donner au Conseil fédéral la possibilité de décréter qu'aucune autorisation d'exporter ne sera plus accordée, pour un certain pays ou pour un groupe de pays.

Lors de la procédure de consultation, la possibilité pour le Conseil fédéral de prononcer des embargos n'a suscité aucune opposition de principe. Quatorze cantons ont toutefois souhaité que les critères pouvant fonder une décision d'embargo soient mentionnés dans la loi même. Pour tenir compte de cette remarque, la loi disposera que les décisions d'embargo ont pour but de traduire dans l'ordre juridique suisse des décisions analogues prises par la communauté internationale. Dans les faits, on imagine mal que la communauté internationale puisse décider de telles mesures pour d'autres motifs que ceux mentionnés à l'article 21 du projet de loi.

247

Déclarations de non-réexportation; exceptions

En règle générale, une autorisation d'exporter n'est accordée que si le destinataire s'engage à ne pas réexporter le matériel de guerre. Il arrive cependant qu'il soit impossible d'exiger une déclaration de non-réexportation. Tel est le cas, par exemple, lorsqu'une entreprise suisse est appelée, comme sous-traitant, à fournir à une entreprise étrangère des pièces destinées à être intégrées dans un ensemble plus vaste qui, lui-même, est susceptible d'être exporté.

Pour tenir compte de ce problème, l'ordonnance sur le matériel de guerre a été modifiée en 1978 de manière à permettre de renoncer à une déclaration de non-réexportation pour les pièces considérées comme des produits anonymes de série et dont la valeur, par rapport à celle du matériel de guerre terminé, apparaît négligeable (art. 14, 2e al.).

A l'instar de ce que connaît la Suède, il convient d'étendre cette possibilité aux éléments d'assemblage lorsque ces éléments sont destinés à des pays qui partagent avec nous les mêmes valeurs et possèdent un système de contrôle des exportations comparable au nôtre. Dans de tels cas, l'autorité doit pouvoir renoncer à une déclaration de non-réexportation et exiger, en revanche, comme le fait la Suède, une déclaration de l'acheteur étranger certifiant que les pièces livrées par la Suisse sont destinées à être intégrées à sa propre production et qu'elles ne seront pas réexportées telles quelles. Sans cette possibilité, les entreprises suisses du secteur de la métallurgie et de l'électronique risquent d'être systématiquement désavantagées par rapport à leurs concurrents étrangers.

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Lors de la procédure de consultation, cette nouveauté n'a suscité que peu de réactions. Un parti s'y oppose. Une association patronale a demandé que, parallèlement, la loi maintienne l'institution des pièces anonymes de série. Nous avons tenu compte de cette revendication et avons abandonné, de surcroît, la notion de pièces «de série», car elle donnait lieu à des difficultés d'interprétation dans la pratique, sans que ce critère soit vraiment utile.

25

Commentaire des dispositions spécifiques

Préambule

Outre les articles 41 et 64bls de la constitution, la loi se fondera désormais également sur la compétence de la Confédération en matière de relations extérieures. Cela correspond à l'idée qui sous-tend la présente révision et qui consiste à mettre en évidence, de façon plus claire que ce n'était le cas jusqu'à présent, les facteurs de politique étrangère intervenant dans les décisions (cf. ch.

245). Le point de la situation sous l'aspect particulier du droit constitutionnel est traité au chiffre 61.

Article premier

L'introduction d'une disposition définissant le but de la loi répond à la proposition formulée par quelques participants à la procédure de consultation. Une telle disposition a un caractère plutôt déclaratoire. C'est en ce sens que sont mentionnés les obligations internationales et les principes de la politique étrangère de la Suisse, ainsi que le maintien d'une capacité industrielle de fabrication d'armements adaptée aux besoins de notre défense nationale.

Art. 2 Désormais, le courtage sans limitation territoriale sera soumis à autorisation, ce qui signifie que le matériel de guerre soumis à des activités d'intermédiaire ne devra pas se trouver nécessairement sur le territoire suisse. Seront également soumis à autorisation le transfert de biens immatériels, y compris le know-how, la concession de droits y afférents, s'ils concernent du matériel de guerre et qu'ils quittent la Suisse pour l'étranger.

L'objet des autorisations et les conditions à réunir pour les obtenir sont présentés au chapitre 4 (autorisations spécifiques, art. 11 ss).

Art. 3

La référence à la législation fédérale sur les armes se fonde notamment sur l'article 40bls de la constitution, accepté par le peuple et les cantons le 26 septembre 1993. Cet article accorde à la Confédération la compétence d'édicter des dispositions légales; ces dispositions sont en cours d'élaboration.

Au nombre des actes législatifs concernant le commerce extérieur, il faut spécialement mentionner l'ordonnance du 12 février 1992 sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles (RS 946.225). Cette ordonnance a effet jusqu'à la fin de 1995 et sera remplacée ensuite par une loi formelle qui est en cours d'élaboration (projet de loi sur le contrôle des

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biens. Voir également les explications du ch. 143). La loi sur le contrôle des biens contient une réserve en faveur de la LMG, dont le champ d'application déroge aux dispositions de ladite loi.

Art. 4 Aujourd'hui déjà, les entreprises d'armement de la Confédération ne sont pas assujetties intégralement au régime de l'autorisation. Avec le nouveau droit, elles n'ont pas non plus besoin d'autorisation initiale ni d'autorisation spécifique pour la fabrication de matériel de guerre. En revanche, elles ont besoin d'une autorisation spécifique pour le courtage, l'importation et l'exportation de matériel de guerre ainsi que pour le transfert de biens immatériels et la concession de droits liés à ces derniers, lorsque ces opérations ne sont pas en rapport avec l'acquisition de matériel pour l'armée suisse. Le seul changement apporté à la solution actuelle résulte donc de l'extension du champ d'application. La position particulière qu'occupent les entreprises d'armement découle de la constitution fédérale (art. 41,2e al.); elle est justifiée par le fait que, dans les domaines où elles bénéficient de dérogations, elles ne font qu'exécuter des travaux au profit de l'armée suisse. Il ne serait par conséquent pas judicieux de prévoir un régime d'autorisation. De plus, en tant que régies de la Confédération, ces entreprises sont soumises à sa surveillance. Cette position particulière n'est en revanche pas justifiée s'agissant de travaux destinés à l'étranger, auquel cas le régime de l'autorisation est alors applicable.

Art. 5 Par rapport à la LMG en vigueur, la notion de matériel de guerre est quelque peu élargie: désormais, cette définition comprend certains équipements prévus pour l'instruction au combat, certaines machines et certains outils de fabrication (cf. ch.

241).

Les biens à usage tant civil que militaire ne sont pas soumis à la LMG. Ils font l'objet d'une législation propre: selon le projet de loi sur le contrôle des biens, les biens à usage tant civil que militaire peuvent être soumis aux mesures de contrôle légales si ces dernières sont prévues dans des traités internationaux sur la non-prolifération d'armes de destruction massive ou si cela est nécessaire pour soutenir des mesures internationales de contrôle (p. ex. par la réglementation destinée à remplacer celle du COCOM).

Sont considérés comme matériel de guerre les pièces détachées ainsi que les composantes ou les éléments d'assemblage d'un système complet.

Comme le prévoit le droit actuel, le matériel de guerre figurera sous
forme de liste dans une ordonnance du Conseil fédéral. Cette solution permettra d'adapter cette énumération aux nouvelles exigences sans devoir chaque fois soumettre une modification de la loi au Parlement. Pour des raisons de sécurité du droit, cette liste enumererà exhaustivement le matériel de guerre. Pour les mêmes raisons, on renonce également à une clause générale qui permettrait en cas d'urgence d'ajouter du matériel supplémentaire. Une telle clause a été exigée par certains participants lors de la procédure de consultation. Il faut tenir compte du fait que les biens à double usage seront pris en considération par la future loi sur le 1031

contrôle des biens. La solution proposée dans le projet de loi permet d'éviter dans la mesure du possible les problèmes de délimitation.

Art. 6 Dans l'actuelle loi sur le matériel de guerre, les notions de fabrication, de commerce (acquisition et commercialisation) et de courtage ne sont pas définies.

Le nouveau droit en donne une définition légale. Cependant, quant au fond, il n'y a pas de modification par rapport aux définitions actuelles. En revanche, le champ d'application de la loi présente des modifications, mais il est déterminé par d'autres dispositions.

La fabrication comprend également les transformations d'armes, notamment celles d'armes à feu portatives semi-automatiques en armes de tir en rafales comme on l'observe souvent actuellement. Comme la présente loi ne comprendra que la fabrication professionnelle de matériel de guerre, une telle transformation sera autorisée sur la base de la LMG uniquement si elle est effectuée par le détenteur d'une autorisation initiale, en règle générale par un armurier. Quant à la transformation d'une arme personnelle par un particulier, elle sera assujettie à la future loi sur les armes.

La proposition de définition du commerce exclut l'achat et la vente entre particuliers pour autant qu'il ne s'agisse pas de l'exercice d'une activité lucrative accessoire. Cette activité privée sera soumise à la future loi fédérale sur les armes.

La notion de commerce englobe également l'offre de matériel de guerre; cependant, le régime de l'autorisation ne comprend dans le cas présent que l'offre au sens du droit des contrats du CO, à savoir une offre concrète de vente d'un matériel déterminé, clairement défini et dont le prix est indiqué. Une annonce rédigée en termes généraux dans une revue spécialisée concernant le choix offert par le commerçant n'est pas concernée par cette réglementation. Contrairement à ce qui se passe pour le courtage, la marchandise se trouve en possession de la personne concernée.

Dans le cas du courtage,,peu importe que l'opération ait lieu à titre professionnel ou par l'intermédiaire d'un particulier. Ainsi, par exemple, l'activité d'un étranger établi en Suisse qui, par idéal et sans intention d'achat, veut servir d'intermédiaire pour une livraison d'armes à un parti favorable à une guerre civile dans sa patrie, peut également revêtir pour notre pays une importance en matière de politique extérieure et doit, par conséquent, tomber sous le coup de la LMG. En ce qui
concerne la définition du courtage, il convient de délimiter cette activité. D'une part, il faut établir une distinction entre .un comportement soumis à autorisation et des travaux préparatoires qui ne tombent pas sous le coup de la loi (p. ex. la mise à disposition par un hôtelier d'une salle de conférence pour la négociation d'un contrat). D'autre part, il est indispensable que ce ne soit pas seulement la conclusion formelle du contrat qui soit soumise au régime de l'autorisation, l'obligation pouvant trop facilement être contournée. C'est pourquoi la création des conditions essentielles pour la conclusion du contrat est considérée comme un critère déterminant. Ce sera par exemple le cas lorsque l'intermédiaire, dans la perspective d'une conclusion ultérieure du contrat et avec une intention déterminée, met en contact les-futurs partenaires contractuels, lorsqu'il prend une part active dans les négociations et dans la rédaction du contrat ou qu'il organise le

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financement d'une affaire de matériel de guerre dont celle-ci serait tributaire. Les opérations de paiement en relation avec de telles affaires ne sont en revanche pas considérées comme des services d'intermédiaire.

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Art. 7 La Suisse a adhéré à une série d'accords de désarmement, au terme desquels elle s'est engagée à contribuer à empêcher la prolifération des armes de destruction massive. Plus ces accords sont récents et plus ils exigent des Etats signataires qu'ils contribuent à la réalisation des buts de l'accord par des adaptations de leur droit national. Dans le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, qui date de 1968, cette obligation ne ressort que de l'objectif du traité, alors que la Convention sur les armes chimiques, signée par la Suisse en 1993, prescrit très clairement les dispositions qui doivent être reprises en droit interne. La Suisse a adhéré à ces accords de désarmement afin de sauvegarder ses intérêts de politique étrangère et de politique de sécurité. Pour cette raison, elle, a également avantage à empêcher que ces accords ne soient violés par des ressortissants suisses, par des étrangers établis en Suisse ou pair des personnes agissant depuis le territoire de la Suisse.

- Les dispositions pénales de l'article 32 sont conçues pour avoir en particulier un effet préventif général qui fait actuellement défaut dans la législation suisse.

Les produits irritants destinés à des engagements de police (p. ex. grenades lacrymogènes) et à la protection individuelle (sprays lacrymogènes) ne tombent pas sous le coup de l'interdiction, car la Convention sur les armes chimiques ne les interdit pas. La réglementation suisse se fonde sur les dispositions de la Convention, qui n'exige pas non plus l'interdiction de l'exportation d'équipements de protection ABC. Mais une autorisation est nécessaire.

Lors de la procédure de consultation, la disposition a été en général accueillie positivement. Une critique a cependant été émise à l'égard du fait que la Suisse n'a pas intérêt à autoriser que l'on soutienne les puissances nucléaires dans la fabrication de telles armes. La présente réglementation renvoie à des conventions internationales auxquelles la Suisse est liée. Nous estimons, dans notre version, que l'interdiction légale devrait respecter l'obligation imposée par le droit international.

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Art. 8 Le régime de l'autorisation actuel, qui comprend une autorisation initiale pour l'admissibilité générale de certaines activités et des autorisations spécifiques pour les cas concrets, est maintenu. La systématique prévue aux chapitres 3 et 4 permet de mieux faire ressortir cette distinction.

L'autorisation initiale exige de son détenteur que ses affaires soient tenues régulièrement, qu'il tienne notamment une comptabilité qui permette le contrôle, du moins partiel, de certains processus (cf. art. 24 ss).

Les intermédiaires ont besoin d'une autorisation initiale uniquement lorsque leur activité de courtage est exercée à titre professionnel et que le matériel de guerre est prévu pour des destinataires à l'étranger. L'activité d'intermédiaire dans le pays doit être réglée dans la législation sur les armes.

1033

Le champ d'application de la loi s'étend désormais aux opérations de commerce et de courtage portant sur du matériel qui n 'est pas physiquement présent sur le territoire suisse. Cette nouveauté est présentée de manière détaillée dans la partie générale du présent message (ch. 243.1; au sujet de la constitutionnalité, cf. ch. 61). Il convient d'ajouter que le régime de l'autorisation n'est en règle générale applicable qu'aux entreprises ou aux personnes qui ont leur siège ou leur domicile en Suisse. Un contrôle ne serait sinon guère réalisable. Une exception est cependant prévue pour les commerçants ou intermédiaires étrangers qui souhaitent participer à des expositions ou des bourses suisses: à cet effet, et comme le prévoit le droit actuel, une autorisation initiale temporaire est nécessaire.

Art. 9 .

Au 1er alinéa, la définition selon laquelle l'activité prévue ne doit pas être contraire aux intérêts du pays correspond au droit en vigueur. On est ainsi en présence d'un genre de clause générale qui pourrait être invoqué comme ultima ratio dans ce domaine politiquement très délicat. Par ailleurs, l'autorisation initiale est une autorisation de police fondée sur un droit lorsque les conditions d'octroi nécessaires sont satisfaites (cf. Malinverni, Kommentar zur BV, Art. 41, Randziffer 30).

Le 2e alinéa est notamment applicable aux marchands d'armes qui exercent leur activité sur la base d'une patente cantonale. On ne connaît pas encore la réglementation que contiendra la future loi sur les armes.

Au 3e alinéa, on veut éviter que des directions d'entreprises puissent se dégager de toute responsabilité sous prétexte de ne pas connaître le déroulement exact des affaires. Il s'agit d'une disposition de responsabilité spécifique sans rapport avec le droit des sociétés anonymes. La législation allemande prévoit une prescription similaire (cf. ch. 2 des «Grundsätze der Bundesregierung zur Prüfung der Zuverlässigkeit von Exporteuren von Kriegswaffen und rüstungsrelevanten Gütern», du 29 nov. 1990).

Art. 10

L'autorisation initiale peut être d'une durée limitée et liée à des conditions et à des charges (1er al.). En outre, selon le 2e alinéa, elle peut être révoquée, totalement ou partiellement, lorsque les conditions de son octroi ne sont plus réunies. C'est notamment le cas lorsque les qualités personnelles du détenteur de l'autorisation ne garantissent plus une gestion régulière des affaires. Aussi aucune obligation de réparation de la part de l'Etat n'est-elle prévue. Une nouvelle autorisation initiale ne sera pas accordée avant que les conditions soient à nouveau réunies. La présente réglementation est ainsi conforme au droit en vigueur.

Art. 11

L'article 11 donne une vue d'ensemble sur les autorisations spécifiques. La systématique du chapitre 4 a été modifiée par rapport au projet mis en consultation. Les conditions d'autorisation pour les affaires avec l'étranger font l'objet d'une section propre après les autorisations spécifiques (section 6, art. 21).

1034

Lors de la procédure de consultation, de nombreux cantons ont exigé une autorisation spécifique pour le commerce. Cette mesure ne s'impose cependant pas ici: le commerce en Suisse sera à l'avenir traité par la législation sur les armes.

En revanche, dans les cas où du matériel de guerre franchit la frontière, une autorisation d'exportation est nécessaire. Lorsqu'un commerçant dont le siège ou le domicile est en Suisse acquiert et transfère du matériel de guerre se trouvant à l'étranger, l'autorisation initiale est suffisante pour garantir les intérêts du pays.

En effet, l'opération principale, la livraison du matériel, est enregistrée dans les pays tiers concernés. Dans l'opération de courtage, au contraire, les négociations contractuelles ont autant d'importance que la livraison elle-même et doivent par conséquent être contrôlées en Suisse également.

Art. 12 et 13 Les dispositions concernant l'autorisation de fabrication sont conformes à la réglementation actuelle. Lorsque la fabrication doit être mise en train à la suite d'une commande provenant de l'étranger, il est possible déjà de décider sur la base des critères concernant l'exportation de matériel de guerre (art. 21). Cela signifie que dans les cas où l'autorisation d'exportation serait refusée, l'autorisation de fabrication doit aussi être refusée. Mais si l'autorisation de fabrication est accordée, les exigences de la sécurité du droit commandent que l'autorisation d'exportation ne puisse être refusée qu'en cas de circonstances exceptionnelles.

Le droit en vigueur est par ailleurs formulé de manière moins restrictive que la nouvelle version proposée (art. 8,3e al., LMG: «La délivrance d'une autorisation de fabrication ne préjuge en rien la décision officielle concernant l'exportation»)', jusqu'à présent, il n'a cependant été appliqué qu'avec une réserve extrême. Cette pratique réservée ne sera pas modifiée, mais plutôt consolidée par la nouvelle teneur.

Toutefois, si une telle situation se présente, on présumera, conformément au droit actuel, qu'il s'agit d'un risque que l'entreprise doit assumer, parce qu'il est en général lié aux opérations en matière d'armement, pour lequel l'Etat n'a donc pas à verser automatiquement une indemnité. Comme dans chaque domaine, l'obligation d'indemniser est prévue dans la loi sur la responsabilité (RS 170.32), selon les conditions applicables à la responsabilité de l'Etat.

Art. 14 et 15

Toute personne qui veut faire à titre professionnel le courtage du matériel de guerre doit être titulaire d'une autorisation initiale prévue à l'article 8,1er alinéa, lettre b. Par ailleurs, une autorisation de courtage est nécessaire pour chaque cas spécifique lorsque le destinataire du matériel se trouve à l'étranger. L'intermédiaire qui n'exerce pas le courtage à titre professionnel ne doit être en possession que de l'autorisation spécifique, lors d'affaires avec l'étranger. Les affaires de courtage qui ne concernent que la Suisse seront réglées par la future loi fédérale sur les armes.

, Cette autorisation de courtage est nouvelle dans la mesure où il s'agit d'affaires dans lesquelles le matériel de guerre ne touche pas le territoire suisse, mais pour lesquelles les conditions essentielles à la conclusion du contrat (art. 6, 3e al.) ont été créées en Suisse (cf. ch. 243.1). Pour les affaires avec l'étranger, comme pour les autorisations de fabrication, les critères pour les autorisations d'exportation sont déterminants.

1035

Conformément à l'article 15, 2e alinéa, des circonstances exceptionnelles, par exemple une modification importante de la situation politique dans l'Etat destinataire, peuvent entraîner la suspension ou la révocation d'une autorisation. Une telle mesure ne pourra cependant intervenir que comme ultima ratio, au terme d'une appréciation complète des intérêts en cause. Les considérations du commentaire relatif à l'article 13 au sujet de la question de l'obligation d'indemniser sont également valables ici. Dans ce cas, comme dans celui de la disposition analogue de l'article 18, 2e alinéa, l'obligation d'indemniser doit être examinée exclusivement à la lumière de la responsabilité de l'Etat (loi sur la responsabilité).

Cela correspond au droit en vigueur, qui n'a donné lieu à aucune critique jusqu'à présent.

Art. 16 La réglementation concernant les autorisations d'importation, d'exportation et de transit reprend pour l'essentiel la réglementation en vigueur. Seuls les critères d'autorisation ont été adaptés (art. 21). Le présent article consacre pour tous les entrepôts douaniers la pratique actuelle, selon laquelle des livraisons dans un port-franc de douane sont considérées comme du transit. Si, depuis le port-franc, la marchandise entre en Suisse, une autorisation d'importation est nécessaire; si, au contraire, elle est expédiée à l'étranger, il faut une nouvelle autorisation de transit (2e al).

Une réglementation particulière doit également être prévue pour les survols de notre territoire par des avions transportant du matériel de guerre, ainsi que pour les survols par des avions de combat étrangers. De tels survols constituent également des transits et sont dès lors soumis au régime de l'autorisation. Le Conseil fédéral devra notamment régler les cas où des survols ont lieu sans atterrissage (intermédiaire) sur territoire suisse. Dans de tels cas, les possibilités de contrôle sont limitées, circonstances dont tiennent compte également les traités internationaux concernant ce domaine en n'exigeant pas l'annonce préalable de tels transports. Il est prévu que, dans de tels cas, l'Office fédéral de l'aviation civile accorde l'autorisation de survol en collaboration avec le Département fédéral des affaires étrangères.

Une autorisation d'importation n'est pas requise lorsqu'il s'agit d'importations non professionnelles, par des particuliers, d'armes à feu de poing et d'armes à feu à épauler. Ce genre d'autorisation sera réglé par la future loi sur les arrhes, les critères d'appréciation concernant davantage la sécurité intérieure du pays que la politique étrangère. Toutefois, jusqu'à l'entrée en vigueur d'une loi fédérale sur les armes, il ne saurait être question de renoncer à une autorisation d'importation pour les particuliers. A titre de réglementation transitoire, on peut prévoir de différer l'application de la disposition d'exception du 4e alinéa, lettre a, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur les armes (cf. art. 43, 2e al., du projet). Ainsi le régime de l'autorisation serait provisoirement régi par la LMG, comme dans le droit en vigueur. En outre, les livraisons à la Confédération ne sont pas sujettes à l'autorisation d'importation (4e al., let. b).

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Art. 17 L'exigence d'une déclaration de non-réexportation est reprise du droit en vigueur (art. 11, 1er al., let. b, LMG). En principe, cette déclaration est une condition fondamentale pour l'octroi d'une autorisation d'exportation. Lorsqu'une telle déclaration a été établie, l'autorisation ne sera cependant accordée que si les autres conditions sont également remplies (cf. art. 21). On peut renoncer aux garanties d'utilisation pour l'autodéfense prévues dans le droit actuel. Une telle garantie a d'ailleurs une valeur très relative, en raison de conceptions très divergentes sur l'autodéfense. Il convient plutôt de retenir cet élément parmi les critères de l'article 21.

La déclaration sera exigée uniquement pour les exportations de matériel de guerre et non pour le transfert de technologie. En effet, par rapport au transfert de biens immatériels, l'acheminement du matériel est plus facilement contrôlable.

L'exigence d'une déclaration de non-réexportation, telle qu'elle a été demandée au cours de la procédure de consultation, se heurterait dans l'exécution à des limites pratiques.

Le 2e alinéa mentionne les exceptions à l'obligation d'une déclaration de non-réexportation. Par rapport à la réglementation actuelle, qui ne prévoit une exception que. pour la livraison de produits anonymes de séries (art. 14, 2e al., OMG), la nouvelle version est plus souple: la réglementation d'exception sera applicable également aux pièces détachées et aux éléments d'assemblage s'il est établi qu'ils doivent être intégrés à un produit à l'étranger. Cette réglementation doit permettre à l'industrie suisse de participer à des projets internationaux et d'améliorer ainsi la collaboration industrielle. En tout état de cause, ces relations n'entreront en ligne de compte qu'avec des entreprises qui figurent parmi nos partenaires commerciaux traditionnels - les Etats industriels occidentaux - qui, au même titre que notre pays, sont liés par les mêmes valeurs et qui contrôlent aussi l'exportation de matériel de guerre.

An. 18 La LMG actuelle prévoit à l'article 9 que l'autorisation d'importation, d'exportation ou de transit peut être retirée en tout temps. Malgré cette formulation très ouverte, des retraits n'ont cependant été décidés qu'au terme de circonstances extraordinaires. Depuis l'entrée en vigueur de la loi actuelle
en 1973, cette situation ne s'est présentée que deux fois: après l'écrasement du mouvement démocratique en 1989, à l'égard de la République populaire de Chine, et après le déclenchement de la guerre du Golfe en 1990, à l'égard d'Etats de la région du Golfe. La nouvelle version proposée tient compte de cette pratique jusqu'ici réservée. Dans un cas aussi rare, aucune obligation d'indemnisation spéciale de la part de la Confédération ne sera cependant prévue. En effet, il n'est pas question d'un comportement illégal de la part d'une autorité, et la Confédération n'est pas tenue d'assumer l'événement qui se produit. La situation juridique actuelle, qui n'a pas été contestée jusqu'ici, est ainsi conservée.

An. 19 et 20 L'introduction d'un contrôle pour le transfert de technologies de Suisse à l'étranger répond aux exigences actuelles, ainsi que cela a été reconnu dans presque tous les

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Etats européens et ainsi que cela ressort de directives internationales (cf. ch.

243.2). Comme seuls les transferts à l'étranger sont concernés, les critères qui régissent les autorisations d'exportation (art. 21) sont applicables par analogie.

Seul le transfert dans le premier Etat de destination est soumis à autorisation.

Dans le cas présent, il s'impose de restreindre le régime de l'autorisation par rapport au matériel de guerre proprement dit et de laisser à l'Etat de destination la responsabilité politique, et par conséquent le contrôle, de l'utilisation ultérieure de la technologie en question. Aussi renoncera-t-on dans ce cas également à des déclarations de non-réexportation.

Y est soumis également le know-how, qui comprend les connaissances techniques dans le processus de production qui ne sont pas accessibles au public. La diffusion de know-how représentera probablement le cas d'application principal en matière de transfert de technologie.

Le régime de l'autorisation est lié à la conclusion du contrat. Les actes juridiques passés entre une société mère et une filiale tombent sous le coup de la réglementation. En revanche, la prestation d'un appui technique n'est pas concernée, à moins qu'elle n'implique le transfert de know-how. Seules sont comprises les opérations au cours desquelles le bien concerné ou le droit qui y est lié passe à l'étranger. Les contrats conclus entre parties qui ont toutes deux leur siège ou leur domicile en Suisse font ainsi exception au régime de l'autorisation, même s'ils comprennent un transfert de know-how secret.

Art. 21

Sont énumérées dans cet article les conditions particulières valables pour une autorisation accordée pour des affaires avec des acquéreurs ou des aliénateurs de matériel de guerre étrangers (cf. ch. 245 pour les aspects fondamentaux de la présente réglementation).

Les conditions générales se fondent sur le droit en vigueur. La nouveauté réside dans l'affirmation du principe selon lequel les demandes doivent être appréciées sur la base de critères de politique étrangère. Cela correspond au véritable but de la procédure d'autorisation. En effet, les autorisations ne se prêtent guère à une appréciation juridique telle que l'actuelle version de l'article 11, 2e alinéa, LMG, le laisse entendre. Selon la nouvelle conception, c'est l'appréciation politique globale de la situation dans l'Etat destinataire et dans la région concernée qui fonde la décision relative à l'octroi d'une autorisation. La décision peut ainsi se présenter de manière différenciée, et il sera possible de mieux la motiver que ce n'est le cas aujourd'hui, sans que la pratique doive être fondamentalement modifiée.

Ce nouveau principe est concrétisé par l'énumération - non exhaustive - des critères principaux. La lettre a permet notamment que les autorisations puissent par exemple être accordées également pour certaines livraisons à l'intention de troupes de casques bleus dans le cadre d'opérations internationales de promotion de la paix, pour autant que les devoirs de neutralité soient respectés. La qualification en tant que zone de guerre ou de tension ne sera plus le seul critère déterminant; il conviendra d'examiner si la livraison est propre ou non à mettre en péril la paix, la sécurité internationale et la stabilité régionale. Selon la lettre b, il faudra surtout apprécier la situation sur le plan des droits de l'homme. Les

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troubles qui ne présentent pas l'intensité exigée par la lettre a peuvent par exemple être pris en considération ici. La lettre c reprend un critère de la législation actuelle (art. 11, 2e al., let. b, LMG). Il s'agira ici de tenir compte des efforts entrepris dans un cadre bilatéral ainsi que de la participation de la Suisse à des projets multilatéraux de coopération au développement. Selon la lettre d, il faut observer dans quelle mesure un Etat respecte le droit international, notamment dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération. Mais on peut aussi par exemple prendre en considération le comportement d'un Etat à l'égard du terrorisme international. Selon la lettre e, il s'agira lors de l'examen d'une demande, de prendre également en considération la position des Etats participant aux mesures internationales de contrôle des exportations soutenues par la Suisse.

On cherche ainsi à parvenir à une certaine harmonisation, sur le plan international, laquelle est une condition nécessaire pour qu'une politique de contrôle des exportations puisse être efficace.

Art. 22 Comme les critères applicables aux autorisations d'importation de matériel de guerre sont différents de ceux qui concernent les exportations, ils doivent faire l'objet d'un article distinct. D'éventuelles obligations de droit international (p. ex.

interdiction de certaines armes) sont déterminantes, tout comme les intérêts du pays notamment en ce qui concerne la sécurité intérieure.

Art. 23 Tandis que les autorisations d'exportation et de transit sont uniquement appréciées sur la base de demandes concrètes, il est apparu nécessaire que le Conseil fédéral puisse prononcer un embargo à titre préalable et de manière générale. Par principe, de telles décisions ne seront prises qu'en conformité avec des décisions analogues prises par la communauté internationale (cf. ch. 246 pour plus de détails).

Art. 24 Les dispositions concernant les contrôles, dont l'exécution est de la compétence du Conseil fédéral, correspondent aux prescriptions actuelles (art. 13 à 15 LMG).

Art, 25 La présente disposition énonce l'obligation de renseigner incombant aux titulaires d'une autorisation. Les organes compétents doivent notamment avoir la possibilité de procéder à des contrôles de routine pour s'assurer que les conditions permettant l'obtention d'une autorisation sont réalisées. C'est déjà le cas aujourd'hui en ce qui concerne notamment les conditions qui régissent l'autorisation initiale selon l'article 9, par exemple la gestion régulière des affaires (comptabilité). Il y a des changements dans deux domaines: d'une part, on renonce à soumettre les requérants à cette obligation, puisqu'on peut partir de l'idée qu'il est dans leur intérêt de donner les renseignements nécessaires. S'ils n'agissaient pas ainsi, l'autorisation demandée ne leur serait pas accordée. D'autre part, s'il existe le soupçon, d'un acte illicite, ce n'est pas la présente obligation de renseigner qui est applicable. En effet, si quelqu'un qui ne possède pas d'autorisation initiale 1039

procède à l'exportation de matériel de guerre sans autorisation, les recherches effectuées constituent une enquête préliminaire en vue d'une action pénale pour violation des dispositions de la LMG.

Art. 26 Comme corollaire à l'obligation de renseigner, le présent article contient les attributions des organes de contrôle. L'efficacité du contrôle dépend du droit de visiter les locaux commerciaux et de prendre connaissance des documents utiles.

Ces mesures, auxquelles ne sont soumis que les titulaires d'une autorisation, sont déjà prévues par le droit actuel (art. 14 LMG). Il s'agit de mesures qui sont prévues sous une forme analogue dans d'autres actes législatifs également, dans lesquelles l'exécution d'un contrôle soutenu s'impose (cf. art. 42« de la loi sur l'alcool; RS 680, art. 39 de la loi sur l'énergie atomique, RS 752.0, art. 12 de l'ordonnance du 12 février 1992 sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles; RS 946.225, ou le projet de loi sur le contrôle des biens). Lorsqu'il peut y avoir atteinte aux droits fondamentaux, les conditions y relatives sont applicables et les mesures doivent être proportionnées. La disposition est complétée par une autorisation de traiter des données (3e al.), tel que l'exige l'article 17 de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (RS 235.1), pour le traitement des données sensibles.

Comme le traitement de telles données durant le contrôle peut être nécessaire, il faut profiter de l'occasion offerte par la révision de la loi pour adapter les bases légales nécessaires au droit sur la protection des données.

Art. 27

L'ordonnance d'exécution réglera en détail le déroulement de la procédure et la question des organes compétents. Il est prévu de confier l'exécution au Département militaire fédéral (art. 40, 2e al.), qui en est déjà chargé actuellement.

Aux termes du 2e alinéa, le Conseil fédéral se réserve les décisions de principe et les décisions de portée politique. Cette formulation aura probablement pour conséquence que le Conseil fédéral sera appelé plus souvent qu'aujourd'hui à décider d'une autorisation.

Comme aujourd'hui, le Conseil fédéral est l'autorité de recours (3e al.); il s'agit en effet d'un domaine qui concerne principalement la défense nationale d'une part, et la politique étrangère d'autre part. Ces deux domaines relèvent de la compétence du Conseil fédéral, raison pour laquelle l'article 100, lettre a, de la loi d'organisation judiciaire (RS 173.110) les soustrait du champ d'application du recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Les voies de recours prévues correspondent dès lors à cette réglementation générale.

Art. 28

La présente disposition transfère dans la nouvelle LMG la base légale actuelle (art. 13,2e al.) pour les activités de l'office central chargé de réprimer les activités illicites concernant le matériel de guerre, office qui existe d'ores et déjà au Ministère public de la Confédération. En même temps, les tâches de cet office sont précisées et le droit de traiter des données personnelles est défini conformément aux exigences légales. Par ailleurs, le traitement des données dans le

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domaine de l'office central mentionné se fera selon les règles élaborées en relation avec la lutte contre le crime organisé et qui sont applicables également à d'autres offices centraux de la Confédération (cf. la loi fédérale sur les Offices centraux de police criminelle de la Confédération, approuvée par le Parlement lors de la session d'automne 1994).

Art. 30 Cet article reprend l'obligation pour le Conseil fédéral d'informer les commissions de gestion sur le détail des exportations de matériel de guerre (art. 13, 3e al., LMG).

Dispositions pénales et entraide administrative Les dispositions pénales ont été adaptées aux nouveautés de la'loi. Elles sanctionnent les règles de conduite indiquées dans les chapitres précédents. Mais, conformément à la disposition générale de l'article premier du code pénal (CP), leur portée ne va cependant pas au-delà.

Par ailleurs, les peines prévues aux articles 31 et 33 ont été adaptées au degré d'illégalité accru des actes commis (l'importance des intérêts lésés et les valeurs patrimoniales énormes qui sont généralement en jeu dans de telles affaires). Les peines, la formulation des dispositions des deux chapitres relatifs aux dispositions pénales et {'entraide administrative ont été coordonnées avec les dispositions analogues de la loi sur l'énergie atomique (message du 19 janvier 1994 relatif à une révision partielle de la loi sur l'énergie atomique et de l'arrêté fédéral concernant cette loi, FF 199411341) et le projet relatif à la loi sur le contrôle des biens.

Art. 31 Par rapport au droit actuel, l'infraction spéciale de trafic prohibé (1er al., let. c) est nouvelle. Cette disposition prime l'article 76 de la loi fédérale sur les douanes (RS 631.0; cf. art. 77, 1er al., de la loi précitée).

La lettre e du 1er alinéa se réfère au régime de l'autorisation applicable au transfert de technologie. Comme c'est le cas pour l'obligation définie dans les articles 19 et 20, seul le premier transfert est concerné. Un éventuel nouveau transfert est soumis au droit du premier pays de destination. Sont réservés les contrats simulés au moyen desquels est effectué par exemple un transfert à un destinataire (autorisé) dans l'Etat A dans l'unique intention de céder immédiatement la technologie à un destinataire final (non autorisé à partir de la Suisse) dans l'Etat B. Comme la demande d'autorisation contiendrait alors des indications fausses au sujet de l'acquéreur indiqué, on serait dans ce cas en présence d'une violation des obligations de fournir des indications prévues à la lettre b du 1er alinéa.

Selon le 4e alinéa, et comme le prévoit le droit en vigueur (art. 17, 3e al., LMG), l'infraction commise à l'étranger est également punissable, indépendamment de sa punissabilité au lieu de commission.

Feuille fédérale. 147' année. Vol. II

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Art. 32 Cet article sanctionne l'interdiction de disposer d'armes ABC conformément à l'article 7.

Art. 33 Au 4e alinéa, le délai de prescription de la poursuite qui, selon le code pénal, est d'une année pour les contraventions et serait par conséquent trop bref dans le présent domaine, a été fixé à cinq ans. (En cas d'interruption, il peut être prolongé jusqu'à 7,5 ans.) Ce délai est conforme à la réglementation prévue par la révision de la loi sur l'énergie atomique et par la loi sur le contrôle des biens.

Art. 35 et 36 Ces dispositions règlent la confiscation de matériel et d'avantages patrimoniaux illégaux, en relation avec un acte punissable. A la différence de la réglementation prévue par le code pénal, la confiscation de matériel de guerre ne sera ordonnée que s'il n'y a pas de garantie que ce matériel sera utilisé à l'avenir d'une manière conforme au droit. Le produit éventuel de la vente de matériel et de valeurs patrimoniales confisqués est dévolu à la Confédération. En effet, la compétence de réglementer le domaine du matériel de guerre lui incombe, et celui-ci est soumis à la juridiction fédérale. Par ailleurs, les dispositions générales révisées concernant la confiscation de valeurs patrimoniales acquises illicitement sont applicables (art. 58 et 59 du code pénal; FF 1994 II 278).

. Art. 37 L'assujettissement à la juridiction pénale fédérale correspond au droit actuel (1er al.). Le 2e alinéa prévoit une obligation de dénoncer les infractions au Ministère public de la Confédération, telle qu'elle se présente sous une forme similaire dans la procédure pénale administrative (art. 19 DPA).

Art. 38 et 39 Ces deux articles règlent l'entraide administrative en Suisse ainsi qu'avec les autorités étrangères et les organisations internationales. L'article 39, 2e alinéa, a pour objet la requête adressée aux autorités étrangères et aux organisations internationales. A cet effet, la Suisse peut communiquer des données aux autorités étrangères afin que celles-ci puissent au besoin procéder à d'autres enquêtes et être en mesure de livrer à l'autorité suisse les indications nécessaires pour engager une procédure dans notre pays. La communication des données permet ainsi une entraide administrative entre des autorités étrangères ou des organisations internationales et la Suisse. Les données (p. ex. informations concernant du matériel et des technologies, le lieu de livraison, ainsi que les personnes qui participent à la fabrication, à la livraison ou qui servent d'intermédiaire) ne sont transmises qu'à condition que les autorités étrangères et les organisations internationales soient liées par le secret de fonction.

Les 3e et 4e alinéas de l'article 39 règlent en revanche l'entraide administrative de la Suisse en faveur de l'étranger. Les autorités suisses doivent être en mesure de transmettre sous certaines conditions des données à des services étrangers ou internationaux afin que celles-ci puissent être utilisées dans le cadre d'une 1042

procédure à l'étranger. Cette entraide administrative part du principe que les autorités suisses ne recevront de l'étranger les données nécessaires à l'exécution de cette loi que si elles-mêmes mettent à disposition de l'étranger les données nécessaires à l'application de prescriptions comparables.

L'échange de données au niveau international doit pouvoir se faire cas par cas, rapidement et sans formalité. Il n'y a pas de parties comme c'est le cas dans une procédure administrative; aussi la loi sur la procédure administrative (RS 172.021) n'est-elle pas applicable dans ce cas. Mais dans ceux où les données seraient utilisées dans une procédure pénale, les dispositions concernant l'entraide judiciaire internationale en matière pénale sont réservées.

Art. 42

Par rapport à la version du projet mis en consultation, la disposition transitoire a été simplifiée. Afin que le nouveau droit puisse prendre effet, une disposition transitoire est prévue pour les activités qui ne nécessitent pas d'autorisation en vertu de la LMG actuelle (p. ex. importation, exportation et transit de matériel désormais considéré comme matériel de guerre; courtage de matériel de guerre se trouvant à l'étranger). Ces activités pourront être poursuivies sans autorisation pendant une période de cinq ans. Si elles sont maintenues par la suite, une autorisation sera alors nécessaire. Dans de tels cas, la décision concernant l'octroi de l'autorisation tiendra compte des intérêts des requérants à pouvoir respecter leurs engagements contractuels.

Comme la conclusion du contrat est soumise à autorisation en cas de transfert de biens immatériels ou de concession de droits y afférents, cette situation doit faire l'objet d'une réglementation spéciale. Aussi le 2e alinéa précise-t-il que les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de la loi et dont l'exécution se poursuit après ne sont pas soumis à autorisation. Cela est valable également pour les apports complémentaires de modifications techniques, pour autant qu'ils se fondent sur le premier contrat. En revanche, si ces livraisons se fondent sur de nouveaux accords, la conclusion de ces contrats est soumise à autorisation si elle a lieu après l'entrée en vigueur de la loi.

Selon le nouveau droit, les anciennes autorisations demeurent valables.

Art. 43

Le 2e alinéa accorde la compétence de fixer l'entrée en vigueur de certaines dispositions de la loi par rapport à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi fédérale sur les armes. Sont notamment concernés les faits contenus dans l'actuelle loi sur le matériel de guerre, mais qui seront réglés à l'avenir par la législation sur les armes (importation d'armes par des particuliers, cf. art. 16, 4e al., let. a, du projet de LMG).

3

Conséquences

Les conséquences en matière financière et en matière de personnel que représentent pour la Confédération d'une part l'acceptation de l'initiative populaire, d'autre part le projet relatif à une nouvelle loi sur le matériel de guerre, sont

1043

exposées plus bas. Comme la Confédération est chargée de l'exécution des dispositions en relation avec le matériel de guerre, les cantons n'en subiront aucune conséquence. Les autres conséquences, surtout économiques, d'une acceptation de l'initiative populaire ont été exposées précédemment (cf. notamment ch. 14 et 15).

31

Conséquences financières

La loi sur le matériel de guerre actuelle prévoit des émoluments pour l'octroi des autorisations. Pour les importations et les exportations, ils représentent 0,8 pour cent de la valeur du matériel. Durant la seconde moitié des années quatre-vingts, la valeur des exportations de matériel de guerre s'est située par année entre 400 et 500 millions de francs, avec une pointe de 578 millions de francs en 1987. Depuis, la valeur du matériel de guerre exporté a diminué, atteignant son niveau le plus bas en 1993 avec 260 millions de francs seulement. Les recettes des émoluments pour les exportations de matériel de guerre, qui représentaient 5 millions de francs en 1987, sont actuellement en dessous des 2 millions de francs. Ces recettes sont versées à la Confédération.

Ces émoluments seraient supprimés si l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» était acceptée. On ne sait pas encore si, au besoin, l'exécution de la réglementation, ou l'activité de la commission indépendante de l'administration, serait soumise à un émolument.

Avec la nouvelle loi sur le matériel de guerre, le régime de l'autorisation s'appliquerait à une quantité de matériel plus importante qu'aujourd'hui, ainsi qu'à des domaines supplémentaires (transfert de technologies, affaires d'intermédiaires à l'étranger uniquement). Certaines opérations soumises à autorisation ne seraient plus prises en considération (p. ex. importations par des particuliers). Dans l'ensemble, la Confédération devrait bénéficier d'un certain accroissement des recettes d'émoluments.

32

Effets sur l'effectif du personnel

Le Département militaire fédéral (DMF) exécute les travaux administratifs en relation avec la loi sur le matériel de guerre. Le service concerné comprend , actuellement environ trois postes et demi. Avec la suppression des exportations conformément à l'initiative populaire, les autorisations disparaîtraient. D'autre part, il y aurait toujours des demandes d'autorisations initiales, d'autorisations de fabrication et d'importation, ainsi que les tâches de contrôle et d'administration afférentes. Pour l'exécution de ces travaux, il faudrait prévoir environ deux postes.

Il convient d'y ajouter les membres et le personnel de la nouvelle commission indépendante de l'administration. Ce n'est qu'après l'élaboration d'un projet de loi, dans lequel le domaine des tâches et l'organisation seraient détaillés, qu'il serait possible d'estimer le nombre de personnes à engager. La tendance de l'initiative laisse cependant supposer qu'il serait nécessaire de créer une administration dotée d'un effectif considérable.

1044

Le projet de loi sur le matériel de guerre occasionnerait du travail supplémentaire en raison de l'extension prévue du champ d'application et de la notion de matériel de guerre. L'actuel service pour le contrôle du matériel de guerre devrait être renforcé par une ou deux personnes. Selon les possibilités, le DMF compenserait cette augmentation de personnel dans le cadre du contingent de postes accordés.

4

Programme de la législature

La révision de la loi sur le matériel de guerre a été annoncée dans le rapport sur le Programme de la législature 1991 à 1995 (FF 1992 III 1, appendice A2, let. a, ch. 3).

5

Relation avec le droit européen

Sous le titre «protection des intérêts essentiels de sécurité», l'article 223,1er alinéa, lettre b, du traité CE autorise tout Etat membre à prendre les mesures «qu'il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre». Il s'agit d'un domaine non intégré pour lequel les Etats membres ont conservé une responsabilité intégrale. Les Etats membres ne peuvent cependant pas abuser de l'autorisation d'agir de manière unilatérale et doivent garantir que les mesures dans ce domaine n'altèrent pas les conditions de la concurrence dans le Marché Commun en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires. Les mesures nationales, par exemple les limitations d'exportation pour le matériel de guerre, sont autorisées à l'égard des Etats membres et des Etats tiers également.

Les dispositions du titre V du Traité sur l'Union européenne concernant une politique étrangère et de sécurité commune (PESC) prévoient le développement de la Coopération politique européenne (CPE), consacrée dans l'Acte unique européen du 28 février 1986. La PESC fait l'objet d'une coopération intergouvernementale et n'est à ce titre pas soumise aux règles supranationales du traité CE. Selon l'article J.4, 1er alinéa, la PESC a pour objet «l'ensemble des questions relatives à la sécurité de l'Union européenne».

A l'occasion de sa réunion de décembre 1992 à Edimbourg, le Conseil européen a pris .connaissance d'un premier rapport du comité politique concernant des possibilités «d'actions communes». En vue d'encourager l'équilibre général dans les pays périphériques du sud et de l'est de l'Union, la «coopération dans le domaine du transfert des armes conventionnelles» a notamment été déclarée prioritaire pour des «actions communes». Conformément à l'article J.8, le Conseil européen prend à l'unanimité des décisions nécessaires à la définition et à la mise en oeuvre de la PESC. Les actions communes sont contraignantes pour les Etats membres.

1045

6 61

Bases légales Constitutionnalité

Conformément à l'article 41 de la constitution, le contrôle de la fabrication, de l'acquisition, du commerce et de la distribution, de l'importation, de l'exportation et du transit de matériel de guerre est du ressort de la Confédération. Le 1er alinéa de cette disposition mentionne la régale des poudres et les 2e à 4e alinéas règlent les domaines mentionnés. Ils ont la teneur suivante: 2

La fabrication, l'acquisition, le commerce et la distribution d'armes, de munitions, d'explosifs, d'autre matériel de guerre et de pièces détachées sont soumis à une autorisation de la Confédération. Cette autorisation ne sera accordée qu'aux personnes et entreprises qui, du point de vue de l'intérêt national, présentent les garanties nécessaires. Les droits des établissements en régie de la Confédération sont réservés.

3 L'importation et l'exportation d'armes, de munitions et de matériel de guerre dans le sens de la présente disposition ne peuvent avoir lieu qu'avec l'autorisation de la Confédération. Celle-ci a le droit de subordonner également le transit à des autorisations.

4 Le Conseil fédéral édictera par voie d'ordonnance, sous réserve de la législation fédérale, les dispositions nécessaires pour l'exécution des 2e et 3e alinéas. II établira en particulier des dispositions détaillées concernant l'octroi, la durée et le retrait des autorisations, ainsi que sur le contrôle des concessionnaires. Il déterminera en outre les armes, munitions, explosifs, autre matériel et parties détachées auxquels s'applique la présente disposition.

La présente version de l'article 41 de la constitution a été acceptée lors de la votation populaire du 20 février 1938 comme contre-projet à une initiative populaire. Cette initiative populaire de 1938 s'était opposée à l'industrie privée des armements et avait exigé un monopole d'Etat pour la fabrication et la vente de matériel de guerre (FF 1937II545). Le contre-projet qui, depuis son acceptation, a force de loi prévoyait au lieu du monopole un contrôle de la Confédération pour la fabrication, l'acquisition, le commerce et la distribution, l'importation et l'exportation de matériel de guerre (au sujet des travaux préparatoires, du but et de la teneur de la disposition constitutionnelle, cf. Malinverni, Kommentar zur BV, Art. 41).

Les actes qui sont soumis à autorisation sont énumérés dans les 2e et 3e alinéas. Il s'agit d'une part de la fabrication, de l'acquisition, du commerce et de la distribution (2e al.) et d'autre part de l'importation, de l'exportation et du transit de matériel de guerre (3e al.) - le transit n'étant pas prévu de manière imperative.

En relation avec la présente révision, la question se pose notamment de savoir si des opérations servant à contourner les interdictions comme le courtage de marchandises qui ne touchent pas le territoire suisse ou le transfert de technologie peuvent également être prises en considération.

La question de la prise en considération d'affaires visant du matériel de guerre fabriqué et commercialisé à l'étranger sans toucher le territoire suisse a fait l'objet en 1938, soit peu après l'acceptation de la disposition constitutionnelle, d'une décision sur recours du Conseil fédéral, qui a précisé ce qui suit (traduction du texte original, qui est en allemand):

1046

«Le fait que ces activités» (activités d'intermédiaire lors de l'acquisition ainsi que du commerce et de la distribution de matériel de guerre) «doivent être prises en considération uniquement lorsqu'il s'agit de matériel de guerre qui est fabriqué, importé ou exporté dans le pays ne peut être déduit de la lettre de l'article constitutionnel ou du règlement» (soit le règlement du 8 juillet 1938 sur la fabrication, l'acquisition, le commerce et la distribution, l'importation et l'exportation de matériel de guerre); «une telle restriction ne se justifierait que si elle était expressément prévue par le législateur. (...)

Aucune raison ne peut être invoquée pour renoncer à un contrôle du commerce des armes lorsqu'il est question de commerce et de distribution de matériel de guerre dans d'autres pays; les considérants qui ont consacré le contrôle de l'armement sont également déterminants, dans de tels cas. Il n'y a pas de différence d'importance et de responsabilité entre la direction d'une entreprise de commerce d'armes et le propriétaire d'une exploitation destinée à la fabrication de matériel de guerre. La surveillance de simples entreprises de commerce d'armes est comprise dans la notion de contrôle de l'armement. En soumettant ' l'entreprise S. AG au règlement du 8 juillet 1938, la Suisse ne porte nullement atteinte à la souveraineté d'autres Etats. En effet, elle applique ainsi ses prescriptions par rapport à une activité qui se déroule au siège de l'entreprise, donc sur territoire suisse, et qui est dirigée de cet endroit.» (Décision du Conseil fédéral du 4 novembre 1938 dans l'affaire S. AG; archives fédérales E27/19401).

En 1951, le Tribunal fédéral a abouti à un autre résultat à l'occasion de l'examen d'un jugement pénal. Le prévenu s'était vu reprocher d'avoir agi dans des activités d'intermédiaire à l'étranger sans être titulaire d'une autorisation prévue par l'arrêté du Conseil fédéral du 28 mars 1949 concernant le matériel de guerre en vigueur à l'époque. Le Tribunal fédéral a rejeté une violation des dispositions d'alors en se référant notamment à la genèse de l'article 41 de la constitution fédérale: si, lors de l'examen du problème posé par le transit, des réserves ont été exprimées, il ne saurait être question de poursuivre le raisonnement et de vouloir imposer que le territoire suisse soit utilisé non sans autorisation pour conclure des opérations ou pour servir d'intermédiaire à des opérations relatives à du matériel de guerre qui ne traversera jamais la Suisse. Par ailleurs, le contrôle de telles opérations se heurterait à des difficultés pratiques (ATF 77IV 30).

Par la suite, le Conseil fédéral et le Parlement ont suivi cette dernière interprétation (cf. le rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur l'initiative populaire pour un contrôle renforcé des industries d'armement et l'interdiction d'exportation d'armes, FF 1971 I 1605, notamment p. 1612, de même que les réponses à de nombreuses interventions parlementaires de 1972 à 1990). Cependant, cette interprétation étroite de la disposition constitutionnelle a été rapidement critiquée. Dans une expertise de 1952 relative à la genèse de l'article 41 de la constitution, le Professeur Edouard von Waldkirch constatait que la notion de «Vertrieb» permettait diverses interprétations et qu'elle pouvait également être étendue; il s'agissait à la fois de «Handel» (commerce) et de «Verteilung» (distribution), ce qui peut signifier «Abgabe» (remise), mais également «Lenkung» (contrôle) dans certaines conditions (p. 22 de l'avis de droit). Ces considérations n'ont cependant pas incité l'auteur à prévoir une interprétation plus large de la norme constitutionnelle, mais elles ont permis des réflexions plus approfondies. Dans un nouvel avis de droit du 2 décembre 1969 à l'intention de la Commission d'experts Weber, la Division de la justice du Département de justice et

1047

police a conclu que le Conseil fédéral, en vertu de sa compétence en matière de relations extérieures (art. 102, ch. 8 et 9, est), qu'il invoque également dans le préambule de l'arrêté du 28 mars 1949 concernant le matériel de guerre, pouvait étendre le régime de l'autorisation à la conclusion d'opérations relatives à du matériel de guerre et aux activités d'intermédiaire y relatives, effectuées en Suisse, le matériel de guerre ne touchant pas le territoire de notre pays. A ce sujet, la Commission Weber a précisé dans son rapport au Conseil fédéral du 13 novembre 1969 sur l'exportation suisse de matériel de guerre qu'elle était d'avis que le commerce relatif à du matériel de guerre entrait dans la notion de «Vertrieb», si bien qu'il était soumis au régime de l'autorisation prévu à l'article 41 de la constitution. A cet effet, la commission s'est expressément référée à des entreprises suisses chargées du commerce d'armes et d'autre matériel de guerre qui ·n'est pas fabriqué en Suisse et qui ne touchera jamais notre pays. Certes la commission mentionne la décision du Tribunal fédéral, qui précise que l'interprétation de l'article 41 de la constitution ne devait pas être aussi large, mais elle partage cependant l'opinion exprimée dans l'avis de droit de la Division de la justice, selon lequel cette extension pouvait se fonder sur l'article 102, chiffres 8 et 9, de la constitution. Comme le nom de notre pays pourrait être mis en relation avec des affaires de trafic d'armes à l'étranger, la commission a estimé souhaitable d'examiner la possibilité d'une extension dans ce sens. Certes, elle se rend compte qu'un contrôle serait difficile à exécuter, mais on pourrait cependant en attendre un effet préventif certain, et l'autorité disposerait ainsi d'une réglementation qui lui permettrait d'intervenir en cas d'abus (FF 197111651 s.). Ainsi, la commission a concrètement proposé de soumettre à autorisation le commerce d'armes qui ne touche pas la Suisse (FF 7977 I 1654, proposition n 3). Cependant, le Conseil fédéral n'a pas tenu compte de cette proposition lors de l'élaboration du projet de loi, et le Parlement l'a suivi sur ce point. Les motifs se fondaient principalement sur les considérations exprimées par le Tribunal fédéral dans sa décision de 1951.

Ces motifs ont par la suite été invoqués par le
Conseil fédéral et le Parlement pour répondre ou traiter les interventions parlementaires qui souhaitaient un réexamen de cette prise de position.

La question n'a cependant pas cessé de préoccuper le Parlement, le Conseil fédéral et le public. A l'occasion de son inspection dans le domaine de l'exportation de matériel de guerre en 1989, la Commission de gestion du Conseil national (CdG CN) a chargé le professeur Luzius Wildhaber d'examiner notamment la question de savoir si les opérations en Suisse relatives à du matériel de guerre qui ne touche pas notre pays devaient être admises impérativement en raison du principe de la territorialité. Dans son avis de droit du 8 mars 1989, le professeur Wildhaber a conclu que de telles opérations pouvaient, en vertu de la constitution, parfaitement être soumises à un contrôle. Outre le principe de la territorialité, le droit international connaît également le principe de la personnalité, le principe de la protection et le principe de l'universalité. Selon le principe actif de la personnalité, il appartient à chaque Etat de statuer souverainement sur les activités que ses propres ressortissants exercent à l'étranger. Mais la Suisse a également le droit, selon le principe de la territorialité, de régler une activité exercée en Suisse qui a cependant des effets à l'étranger. Une réglementation au niveau de la loi est toutefois nécessaire, car la LMG actuelle ne mentionne pas, à dessein, ces cas et respecte un «silence qualifié». Toujours selon l'auteur de l'avis

1048

de droit, la situation est analogue pour le transfert de technologie, qui pourrait également être soumis à un contrôle de la Confédération en vertu de l'article 41 de la constitution. En effet, l'objectif de cette norme consiste à exercer un contrôle sur l'industrie suisse d'armement et ses exportations, ce contrôle étant jugé nécessaire pour des raisons de politique extérieure et de politique de neutralité. C'est pourquoi une compétence de légiférer étendue doit être accordée à la Confédération dans ce domaine, qui comprend également la technologie.

Enfin, l'auteur de l'avis de droit précise que, du reste, une affirmation générale selon laquelle les compétences de la Confédération devraient, dans la mesure du possible, être interprétées de manière restrictive n'existe ni dans la doctrine ni dans la pratique. Sur la base de cet avis de droit, qui est résumé dans le rapport de la CdG CN concernant son inspection sur les exportations de matériel de guerre (FF 7990 I 945), la Commission de gestion a proposé au plénum du conseil d'examiner le postulat intitulé «Courtage de matériel de guerre et transfert de technologie dans le domaine de l'armement», selon lequel le Conseil fédéral est invité à examiner s'il est possible d'étendre le champ d'application de la LMG (FF 7990 I 959). Comme nous l'avons mentionné précédemment (cf. ch. 21), ce postulat constitue un des éléments à l'origine du présent projet de révision.

A l'occasion des travaux préparatoires en relation avec la présente révision de loi, VOffice fédéral de la justice a été invité à exprimer un nouvel avis au sujet de la portée de l'article 41 de la constitution et de l'avis de droit Wildhaber. Dans son avis de droit du 11 janvier 1991, cet office a conclu à son tour que l'interprétation étroite de la disposition par le Tribunal fédéral en 1951 reposait uniquement sur la méthode d'interprétation historique dans sa forme subjective et qu'elle ne tenait pas compte d'autres méthodes similaires. En revanche, si l'on se fonde sur la teneur de la disposition, la portée de la notion de «Vertrieb» devient plus large, ce qui est confirmé par les versions en langues française et italienne («le commerce et la distribution»; «il commercio e la distribuzione»): ces deux versions ne recouvriraient pas seulement l'achat, la vente, la revente ou le transport
proprement dits de matériel de guerre, mais viseraient toutes les activités favorisant ou conditionnant la réalisation de transactions sur le marché du matériel de guerre, comme le courtage ou les opérations de financement; toutefois, la disposition ne contient pas de limitation concernant l'emplacement du matériel de guerre. Outre l'article 41 de la constitution, les attributions de la Confédération en matière de relations extérieures entreraient en ligne de compte pour étendre aujourd'hui cette compétence. Le droit international permet de prendre en considération, selon le droit national, toutes les activités exercées en relation avec le commerce de matériel de guerre en Suisse, indépendamment de la nature de ces activités et du lieu où le matériel se trouve. Par ailleurs, un contrôle serait également admissible pour toutes les activités dans le domaine du commerce de matériel de guerre exercées à l'étranger par des personnes physiques ou morales dont le siège ou le domicile se trouve en Suisse. Toujours selon cet avis de droit, le contrôle du transfert de biens immatériels est également conforme à la constitution. Certes, l'article 41 de la constitution ne le prévoit pas expressément et sa prise en considération dans l'arrêté du Conseil fédéral du 30 août 1940 concernant le trafic des inventions se rapportant au matériel de guerre (RO 56 II [1940] 1499) ne se fonde pas sur la norme de la constitution, mais sur l'arrêté de 1939 consacrant le régime des pleins pouvoirs en temps de guerre. Cependant, les transferts de

1049

brevets d'inventions et de licences étaient une condition indispensable pour la fabrication de matériel de guerre. A l'aide de tels transferts, les restrictions à l'exportation de matériel de guerre pouvaient par ailleurs être contournées. Ainsi, il existe une relation étroite entre le transfert de technologie et la fabrication de même que l'exportation de matériel de guerre, si bien que ces transferts font partie du champ d'application de l'article 41 de la constitution. L'avis de droit précise enfin que la compétence de la Confédération en matière de relations extérieures peut également être invoquée, car le transfert à l'étranger de technologie dans le domaine de l'armement pourrait avoir des conséquences importantes sur les relations de la Suisse avec l'étranger.

Ce bref aperçu au sujet des tendances que l'on peut constater en relation avec l'interprétation de l'article 41 de la constitution démontre que la prise en considération d'opérations relatives à du matériel qui reste à l'étranger peut, du point de vue du droit, être admise dans la grande majorité des cas. L'interprétation a évolué avec le temps, l'environnement politique ayant joué chaque fois un rôle: la nécessité d'un contrôle efficace de l'armement, fortement marqué durant la période de l'Entre-deux guerres, apparaît dans la décision sur recours du Conseil fédéral de 1938. Treize ans plus tard pourtant, au début de la course aux armements entre les deux blocs, la même disposition était considérée avec plus de retenue (Tribunal fédéral, Parlement et Conseil fédéral). Alors que la doctrine examinait cette question sous un angle purement juridique, l'admissibilité de la prise en considération des faits en question a été approuvée par la plupart, en se fondant notamment sur la compétence de la Confédération en matière de relations extérieures, qu'il convenait d'évoquer à titre complémentaire. Actuellement, le Conseil fédéral estime qu'il est-nécessaire de soumettre à un examen l'interprétation qui, jusqu'à présent, était restrictive. Le projet de la nouvelle LMG tient compte des éléments qui font défaut dans la loi actuelle et que l'on trouve à l'étranger dans des ordres juridiques comparables. Au vu de ce qui précède, il n'y a pas de doute que les nouveautés introduites sont conformes à l'article 41 de la constitution.

62

Délégation du droit de légiférer

Le Conseil fédéral conserve les pouvoirs que lui confère déjà la LMG actuelle. Il s'agit avant tout de la désignation du matériel de guerre dans l'ordonnance. En raison de la nécessité de prévoir des adaptations, l'inscription d'une telle liste dans la loi ne serait pas judicieuse. Par ailleurs, le Conseil fédéral est notamment compétent pour la réglementation de détail de la procédure d'autorisation et du contrôle, ainsi que pour la désignation des organes compétents.

N37464

1050

AppendtSe Participation de la Suisse à des traités et des conventions en matière de contrôle des armements destinés à renforcer la confiance et la sécurité Traités

En vigueur depuis

Etats (déc. 92)

La Suisse depuis

Contenu

Protocole de Genève

1928

131

1932

Traité sur l'Antarctique Traité interdisant les essais d'armes nucléaires Traité sur l'espace extraatmosphérique Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires Traité sur les fonds marins

1961 1963

41

119

1990 1964

1967

92

1969

1970')

156

1977

1972

87

1976

Convention sur -les armes biologiques Convention sur la modification de l'environnement Convention sur l'interdiction de certaines armes classiques Document de Stockholm Document de Vienne 90 Document de Vienne 92 Convention sur les armes chimiques

1975

125

1976

1978

57

1988

1983

35

1982

1986 1990 1992 au plus tôt en 1995 2>

35 34

1986 1990 1992 signée

Prohibition de l'emploi de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires Non-militarisation, non-nucléarisation de l'Antarctique Interdiction des essais d'armes nucléaires dans l'atmosphère, dans l'espace extra-atmosphérique et-sous l'eau Interdiction de tester des armes dans l'espace extra-atmosphérique et sur les corps célestes Interdiction de fabriquer des armes nucléaires et de les transférer Interdiction de placer des armes de destruction massive sur le fond des mers en dehors des eaux territoriales Interdiction de mettre au point, de fabriquer, de stocker et d'acquérir des armes biologiques Interdiction d'utiliser à des fins militaires ou à d'autres fins hostiles des techniques de modification de l'environnement Interdiction des armes produisant des effets traumatiques excessifs Mesures de confiance et de sécurité Mesures de confiance et de sécurité Mesures de confiance et de sécurité Destruction des armes chimiques existantes et des installations de production, interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi de ces armes

52 (53)

') Sera prolongé en 1995.

) A été signée à Paris au mois de janvier 1993. Entrera en vigueur dès que plus de 65 Etats l'auront ratifiée.

2

Arrêté fédéral Projet concernant l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre», déposée le 24 septembre 1992 ^ vu le message du Conseil fédéral du 15 février 19952\ arrête:

Article premier 1 L'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» est valable et est soumise au vote du peuple et des cantons.

2 L'initiative a la teneur suivante:

La constitution fédérale est modifiée comme il suit: Art. 401"1 (nouveau) 1 La Confédération encourage et soutient des efforts internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à réduire les armements au bénéfice du développement social.

2 L'exportation et le transit de matériel de guerre et de services destinés exclusivement à des fins guerrières, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits. La production de matériel de guerre est soumise à autorisation.

3 L'exportation et le transit de matériel de guerre et de services pouvant être utilisés aussi bien à des fins militaires que civiles, les activités d'intermédiaire ainsi que les opérations de financement relatives à ce matériel et à ces services sont interdits lorsque l'acquéreur entend utiliser ces biens et ces services à des fins guerrières.

4 Sont aussi interdites toutes les opérations servant à contourner les interdictions, en particulier: a.

les opérations réalisées par l'intermédiaire de filiales à l'étranger ou en coopération avec des firmes étrangères; b.

la remise d'installations de production, de licences et de données techniques indispensables au développement ou à la fabrication de matériel de guerre ou de moyens de destruction massive, ou Jes activités d'intermédiaire y relatives.

') FF 1993 I 95 > FF 1995 II 988

2

1052

».

Initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre»

i I,

5

Une commission fédérale indépendante de l'administration est chargée de l'exécution. Elle est autorisée en particulier à: a.

intervenir lorsqu'il y a suspicion de violation des alinéas 3 ou 4; b.

évaluer l'impact sur la paix des développements technologiques; c.

procéder à des inspections et à des contrôles ultérieurs.

6 La législation fédérale règle les détails. Elle peut soumettre les opérations visées aux alinéas 3 et 4 au régime de l'autorisation ou de la déclaration obligatoire. Elle déclare punissables les infractions aux alinéas 2 à 4.

Art. 41, 2e, 3' et 4' al.

Abrogés

Art. 2 L'Assemblée fédérale recommande au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative.

N37464

1053

Loi fédérale sur le matériel de guerre

Projet

(LMG)

du L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 41, 2e et y alinéas, et 64bis de la constitution; vu la compétence de la Confédération en matière de relations extérieures; vu le message du Conseil fédéral du 15 février 19951J, arrête:

Chapitre premier: Dispositions générales Article premier But La présente loi a pour but de .veiller au respect des obligations internationales et des principes de la politique étrangère de la Suisse, par le contrôle de la fabrication et du transfert de matériel de guerre et de la technologie associée, tout en permettant le maintien en Suisse d'une capacité industrielle adaptée aux besoins de sa défense.

Art. 2 Principe Sont soumis à l'autorisation de la Confédération: a. la fabrication de matériel de guerre; b. le commerce de matériel de guerre; c. le courtage de matériel de guerre; d. l'importation, l'exportation et le transit de matériel de guerre; e. le transfert de biens immatériels, y compris le know-how, et la concession de droits y afférents, pour autant qu'ils concernent du matériel de guerre et qu'ils soient destinés à des personnes physiques ou morales ayant leur domicile ou leur siège à l'étranger.

Art. 3 Rapport avec d'autres dispositions légales Sont réservées: a. les législations fédérale et cantonale sur les armes; b. les prescriptions de la législation douanière, les prescriptions sur le trafic des paiements, ainsi que d'autres actes législatifs concernant le commerce extérieur.

') FF 1995 II 988

1054

Matériel de guerre. LF

Art. 4 Entreprises d'armement de la Confédération Les dispositions concernant l'autorisation initiale (art. 8 à 10) et l'autorisation de fabrication (art. 12 et 13) ne sont pas applicables aux entreprises d'armement de la Confédération. Les dispositions concernant le courtage (art. 14 et 15), l'importation et l'exportation (art. 16 à 18) ainsi que le transfert de biens immatériels ou la concession de droits y afférents (art. 19 et 20) ne sont pas applicables aux entreprises d'armement lorsque leurs opérations sont en rapport avec l'acquisition de matériel de guerre pour l'armée suisse.

Art. 5 Définition du matériel de guerre 1 Par matériel de guerre, on entend: a. les armes, les systèmes d'arme, les munitions et les explosifs militaires; b. les équipements spécifiquement conçus ou modifiés pour un engagement militaire ou pour l'instruction au combat et qui, en principe, ne sont pas utilisés à des fins civiles; c. les machines et les outils exclusivement conçus pour la fabrication, le contrôle ou l'entretien du matériel visé aux lettres a et b.

2 Par matériel de guerre, on entend aussi les pièces détachées et les éléments d'assemblage pour le matériel visé au 1er alinéa, même partiellement usinés, à moins qu'ils ne soient aussi utilisables dans la même exécution à des fins civiles.

3 Le Conseil fédéral définit le matériel de guerre dans une ordonnance.

Art. 6 Autres définitions 1 Par fabrication, au sens de la présente loi, on entend toute activité professionnelle consistant à produire du matériel de guerre ou à en modifier les parties essentielles à son fonctionnement.

2 Par commerce, au sens de la présente loi, on entend toute activité professionnelle consistant à offrir, à acquérir ou à transférer du matériel de guerre.

3 Par courtage, on entend: a. la création des conditions essentielles pour la conclusion de contrats ayant pour objet la fabrication, l'offre, l'acquisition ou le transfert de matériel de guerre, ou encore le transfert de biens immatériels, y compris le know-how, ou la concession de droits y afférents, pour autant que ceux-ci concernent du matériel de guerre; b. la conclusion de tels contrats lorsque les prestations sont fournies par des tiers.

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Chapitre 2: Interdiction des armes nucléaires, biologiques et chimiques

Art. 7 1 II est interdit: a. de développer, de fabriquer, de procurer à titre d'intermédiaire, d'acquérir, de remettre à quiconque, d'importer, d'exporter, de faire transiter, d'entreposer des armes nucléaires, biologiques ou chimiques (armes ABC) ou d'en disposer d'une autre manière; j b. d'inciter quiconque à commettre un acte mentionné à la lettre a; c. de favoriser l'accomplissement d'un acte mentionné à la lettre a.

2 Ne tombent pas sous le coup de cette interdiction les actes qui sont destinés: a. à permettre aux organes compétents de détruire des armes ABC, ou b. à assurer une protection contre les effets d'armes ABC ou à combattre ces effets.

3 L'interdiction vaut également pour les actes commis à l'étranger, indépendamment du droit applicable au lieu de commission, si: a. ces actes violent des accords de droit international auxquels la Suisse est partie, et b. l'auteur est suisse ou a son domicile en Suisse.

Chapitre 3: Autorisation initiale Art. 8 Objet 1 Doit être titulaire d'une autorisation initiale toute personne qui a l'intention sur le territoire suisse: a. de fabriquer du matériel de guerre; b. de faire le commerce de matériel de guerre, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, ou d'en faire le courtage, à titre professionnel, pour des destinataires à l'étranger, quel que soit le lieu où se trouve ledit matériel.

2 Aucune autorisation initiale n'est requise pour l'exécution des commandes de la Confédération portant sur du matériel de guerre destiné à l'armée suisse.

Art. 9 Conditions 1 L'autorisation initiale est accordée aux personnes physiques ou morales: a. qui offrent les garanties nécessaires d'une gestion régulière de leurs affaires, et b. dont l'activité prévue n'est pas contraire aux intérêts du pays.

2 Si, pour exercer son activité, le requérant doit en outre être titulaire d'une autorisation prévue par la législation fédérale ou cantonale sur les armes, l'autorisation initiale ne sera délivrée que si la première autorisation a été accordée.

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3

Les personnes morales désignent un membre de la direction, qui sera, pour toutes les affaires de l'entreprise concernant du matériel de guerre, responsable du respect des dispositions découlant de la loi ou de l'autorisation.

Art. 10

Portée

1

L'autorisation initiale est incessible et n'est valable que pour le matériel de guerre qu'elle mentionne. Elle peut être d'une durée limitée et assortie de charges et de conditions.

2 Elle peut être révoquée, partiellement ou complètement, si les conditions de son octroi ne sont plus réunies.

3 Elle ne remplace pas les autorisations prescrites par d'autres dispositions du droit fédéral ou cantonal.

Chapitre 4: Autorisations spécifiques Section 1: Types d'autorisations

Art. 11 Pour les activités soumises au régime de l'autorisation selon la présente loi, on distingue les autorisations spécifiques suivantes: a. l'autorisation de fabrication; b. l'autorisation de courtage; c. l'autorisation d'importation; d. l'autorisation d'exportation; e. l'autorisation de transit; f.

l'autorisation de transfert de biens immatériels, y compris le know-how, ou de concession de droits y afférents.

Section 2: Autorisation de fabrication Art. 12 Objet 1 Toute personne qui veut fabriquer du matériel de guerre sur le territoire suisse doit être titulaire, en plus de l'autorisation initiale, d'une autorisation de fabrication pour chaque cas particulier.

2 Les sous-traitants n'ont pas besoin d'autorisation de fabrication.

3 Aucune autorisation de fabrication n'est requise pour l'exécution des commandes de la Confédération portant sur du matériel de guerre destiné à l'armée suisse.

Art. 13 Portée 1 L'autorisation de fabrication peut être d'une durée limitée et assortie de charges et de conditions.

69 Feuille fédérale. 147' année. Vol. II

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2

Si l'autorisation de fabrication est requise pour du matériel de guerre destiné à être exporté, les conditions applicables à l'octroi de l'autorisation d'exportation (art. 21) doivent être réunies.

3 Une fois accordée l'autorisation dé fabrication pour du matériel de guerre destiné à l'exportation, l'autorisation d'exporter ce matériel ne pourra être refusée que si des circonstances exceptionnelles l'exigent.

Section 3: Autorisation de courtage

Art. 14 Objet 1 Toute personne qui, sur le territoire suisse, veut procurer à titre d'intermédiaire du matériel de guerre à un destinataire à l'étranger doit être titulaire d'une autorisation de courtage pour chaque cas particulier, quel que soit le lieu où se trouve ledit matériel.

2 Le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions pour certains pays.

Art. 15 Portée 1 L'autorisation de courtage peut être d'une durée limitée et assortie de charges et de conditions.

2 Si des circonstances exceptionnelles l'exigent, l'autorisation de courtage peut être suspendue ou révoquée.

Section 4: Autorisations d'importation, d'exportation et de transit Art. 16 Objet 1 L'importation, l'exportation et le transit de matériel de guerre sont soumis à l'autorisation de la Confédération.

2 Une autorisation de transit est requise pour les livraisons dans un entrepôt douanier suisse et pour les livraisons à partir d'un tel entrepôt vers l'étranger.

3 Le Conseil fédéral règle le régime de l'autorisation et la procédure concernant le transit de matériel de guerre dans l'espace aérien.

4 Aucune autorisation n'est requise pour: a. l'importation non professionnelle, par des particuliers, d'armes à feu de poing et d'armes à feu à épauler; b. l'importation de matériel de guerre destiné à la Confédération.

Art. 17 Déclaration de non-réexportation; exceptions 1 En règle générale, une autorisation d'exportation ne peut être accordée que lorsqu'il s'agit d'une livraison à un gouvernement étranger ou à une entreprise travaillant pour un tel gouvernement, et que ce dernier a établi une déclaration

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attestant que le matériel ne sera pas réexporté (déclaration de non-réexportation).

2 II est possible de renoncer à la déclaration de non-réexportation pour des pièces détachées ou des éléments d'assemblage de matériel de guerre lorsqu'il est établi qu'ils seront, à l'étranger, intégrés dans un produit et qu'ils ne seront pas réexportés tels quels, ou s'il s'agit de pièces anonymes dont la valeur est négligeable par rapport à celle du matériel de guerre fini.

Art. 18 Portée 1 Les autorisations d'importation, d'exportation et de transit sont d'une durée limitée.

2 Si des circonstances exceptionnelles l'exigent, elles peuvent être suspendues ou révoquées.

Section 5: Autorisation de transfert de biens immatériels ou de concession de droits y afférents Art. 19 Objet 1 La conclusion d'un contrat prévoyant le transfert de biens immatériels concernant du matériel de guerre, y compris le know-how, ou la concession de droits y afférents est soumise à autorisation si le transfert ou la concession s'opère depuis la Suisse en faveur d'une personne physique ou morale ayant son domicile ou son siège à l'étranger.

2 Le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions pour certains pays.

Art. 20

Conditions

L'autorisation n'est pas accordée si l'acquéreur a son domicile ou son siège dans un pays vers lequel l'exportation du matériel de guerre en question ne serait pas autorisée.

Section 6: Conditions d'autorisation pour les affaires avec l'étranger Art. 21 Fabrication, courtage, exportation et transit La fabrication, le courtage, l'exportation et le transit de matériel de guerre pour des destinataires à l'étranger seront autorisés si ces activités ne contreviennent pas au droit international et ne sont pas contraires aux principes de la politique étrangère de la Suisse. L'analyse tiendra compte en particulier des critères suivants: a. la sauvegarde de la paix, de la sécurité internationale et de la stabilité régionale;

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b.

c.

d.

e.

la situation dans le pays destinataire, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l'homme; les efforts de la Suisse dans le domaine de la coopération au développement; l'attitude du pays destinataire à l'égard de la communauté des Etats, notamment en ce qui concerne le respect du droit international; la position des pays qui participent avec la Suisse à des régimes internationaux de contrôle des exportations.

Art. 22 Importation L'importation de matériel de guerre sera autorisée si elle ne contrevient pas au droit international et n'est pas contraire aux intérêts du pays.

Section 7: Embargo

Art. 23 Pour tenir compte des décisions prises par la communauté internationale, le Conseil fédéral peut décider qu'aucune autorisation ne sera accordée pour un pays déterminé ou pour un groupe de pays.

Chapitre 5: Contrôles, procédure, émoluments Art. 24 Contrôles Le Conseil fédéral édicté des prescriptions sur le contrôle de la fabrication, du commerce, du courtage, de l'importation, de l'exportation et du transit de matériel de guerre, ainsi que sur le contrôle du transfert de biens immatériels, y compris le know-how, et de la concession de droits y afférents, lorsque ceux-ci concernent du matériel de guerre.

Art. 25 Obligation de renseigner Le titulaire d'une autorisation au-sens de la présente loi ainsi que les détenteurs et le personnel des entreprises concernées sont tenus de fournir aux organes de contrôle tous les renseignements permettant un contrôle en bonne et due forme et de leur présenter tous les documents nécessaires.

Art. 26 Attributions des organes de contrôle 1 Les organes de contrôle ont le droit de pénétrer dans les locaux commerciaux des personnes soumises à l'obligation de renseigner ainsi que de les visiter pendant les heures de travail usuelles et sans avis préalable; ils ont aussi le droit de prendre connaissance des documents utiles. Ils séquestrent les pièces à conviction.

En cas de soupçons d'actes illicites, les dispositions plus rigoureuses du droit de procédure sont réservées.

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2

Pour leurs contrôles, ils peuvent faire appel en cas de besoin aux organes de police des cantons et des communes, aux organes d'enquête de l'administration des douanes ainsi qu'à la police fédérale.

3 Ils sont habilités, dans les limites des objectifs de la présente loi, à traiter des données personnelles. En ce qui concerne les données sensibles, seules peuvent être traitées les données sur des poursuites ou des sanctions pénales ou administratives. Le traitement d'autres données sensibles est autorisé lorsqu'il est indispensable au règlement d'un cas.

4 Ils sont tenus au secret de fonction.

Art. 27 Compétence et procédure 1 Le Conseil fédéral désigne les organes compétents et règle le détail de la procédure. Les contrôles à la frontière incombent aux organes des douanes.

2 Le Conseil fédéral statue sur les demandes qui posent une question de principe ou revêtent une portée politique.

3 Les décisions sur recours fondées sur la présente loi peuvent faire l'objet d'un recours auprès du Conseil fédéral selon les articles 72 ss de la loi sur la procédure administrative1).

Art. 28 Office central 1 Le Conseil fédéral désigne un office central chargé de réprimer les activités illicites relatives au matériel de guerre.

2 L'office central participe à l'exécution de la présente loi ainsi qu'à la prévention des infractions et mène les enquêtes de police. Il a le droit de traiter des données personnelles, y compris des données sensibles et des profils de la personnalité, dans la mesure et aussi longtemps que ses tâches l'exigent.

Art. 29 Emoluments Les autorisations prévues par la présente loi sont sujettes à émoluments. Le Conseil fédéral en fixe les montants.

Art. 30 Information du Parlement Le Conseil fédéral renseigne les Commissions de gestion des Chambres fédérales sur le détail des exportations de matériel de guerre.

» RS 172.021

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Chapitre 6: Dispositions pénales Art. 31

Infractions au régime de l'autorisation et aux déclarations obligatoires 1 Sera punie de l'emprisonnement ou d'une amende de 1 million de francs au plus toute personne qui, intentionnellement: a. sans être titulaire d'une autorisation ou en violation des conditions ou des charges fixées dans une autorisation, fabrique, importe, fait transiter, exporte, fait le commerce ou le courtage du matériel de guerre, ou encore transfère des biens immatériels qui concernent du matériel de guerre, y compris le know-how, ou concède des droits y afférents; b. dans une demande, donne des indications fausses ou incomplètes alors qu'elles sont essentielles pour l'octroi d'une autorisation, ou utilise une telle demande faite par un tiers; c. n'annonce pas ou annonce de manière inexacte du matériel de guerre qui est importé, exporté ou en transit; d. livre, transfère ou procure à titre d'intermédiaire du matériel de guerre à un destinataire ou vers un lieu de destination autre que celui qui figure dans l'autorisation; e. transfère des droits immatériels, y compris le know-how, ou concède des droits y afférents à un destinataire ou vers un lieu de destination autre que celui qui figure dans l'autorisation; f. participe aux opérations financières liées à un trafic illicite de matériel de guerre ou sert d'intermédiaire dans le financement d'une telle affaire.

2 Dans les cas graves, la peine sera la réclusion pour dix ans au plus. Cette peine pourra être assortie d'une amende de 5 millions de francs au plus.

3 Si l'auteur agit pas négligence, la peine sera l'emprisonnement pour six mois au plus ou une amende de 100 000 francs au plus.

4 En cas d'importation ou de transit non autorisés, l'infraction commise à l'étranger est également punissable.

Art. 32

Infractions à l'interdiction des armes nucléaires, biologiques et chimiques 1 Sera punie de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement toute personne qui, intentionnellement et sans qu'elle puisse invoquer l'une des exceptions prévues à l'article 7, 2e alinéa: a. développe, fabrique, procure à titre d'intermédiaire, acquiert, remet à quiconque, importe, exporte, fait transiter, entrepose des armes nucléaires, biologiques ou chimiques (armes ABC) ou en dispose d'une autre manière, b. incite quiconque à commettre un acte mentionné à la lettre a, ou c. favorise l'accomplissement d'un acte mentionné à la lettre a.

2 La peine privative de liberté pourra être assortie d'une amende de 5 millions de francs au plus.

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3

Si l'auteur agit par négligence, la peine sera l'emprisonnement pour douze mois au plus ou une amende de 500 000 francs au plus.

4

Tout acte commis à l'étranger est punissable, indépendamment du droit applicable au lieu de commission: a. s'il viole des accords de droit international auxquels la Suisse est partie, et b. si son auteur est Suisse ou a son domicile en Suisse.

Art. 33

Contraventions

1

Sera punie des arrêts ou d'une amende de 100 000 francs au plus toute personne qui, intentionnellement: a. refuse de fournir les renseignements, les documents ou l'accès aux locaux commerciaux prévus par les articles 25 et 26,1er alinéa, ou donne à ce sujet de fausses indications; b. contrevient d'une autre manière à la présente loi, à l'une de ses dispositions d'exécution dont la violation est déclarée punissable, ou à une décision se référant aux dispositions pénales du présent article, sans que son comportement soit punissable en vertu d'une autre disposition.

2

La tentative et la complicité sont punissables.

Si l'auteur agit par négligence, la peine sera une amende de 40 000 francs au plus.

4 La poursuite pénale se prescrit par cinq ans. Ce délai peut être prolongé au maximum de moitié si la prescription est interrompue.

3

Art. 34 Infractions dans les entreprises L'article 6 de la loi sur le droit pénal administratif1) est applicable aux infractions commises dans les entreprises.

Art. 35 Confiscation de matériel de guerre Indépendamment du fait qu'une personne est punissable ou non, le juge ordonne la confiscation du matériel de guerre concerné s'il n'y a pas de garantie qu'il sera utilisé à l'avenir d'une manière conforme au droit. Le matériel de guerre confisqué ainsi que le produit éventuel de sa vente sont dévolus à la Confédération.

Art. 36 Confiscation de valeurs patrimoniales Les valeurs patrimoniales confisquées et les créances compensatoires sont dévolues à la Confédération.

J

> RS 313.0

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Art. 37 Juridiction; obligation de dénoncer 1 La poursuite et le jugement des infractions relèvent de la juridiction pénale fédérale.

2 Les autorités de la Confédération et des cantons chargées de l'octroi des autorisations et du contrôle, les organes de police des cantons et des communes, ainsi que les organes des douanes sont tenus de dénoncer au Ministère public de la Confédération les infractions à la présente loi qu'ils ont découvertes ou dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions.

Chapitre 7: Entraide administrative Art. 38 Entraide administrative en Suisse Les autorités compétentes de la Confédération ainsi que les organes de police des cantons et des communes peuvent se communiquer entre eux et faire connaître aux autorités de surveillance compétentes les données nécessaires à l'exécution de la présente loi.

Art. 39

Entraide administrative entre les autorités suisses et les autorités .

étrangères 1 Les autorités fédérales compétentes en matière d'exécution, de contrôle, de prévention des délits et de poursuite pénale peuvent collaborer avec les autorités étrangères compétentes, ainsi qu'avec des organisations et des enceintes internationales, et coordonner leurs enquêtes dans la mesure: a. où l'exécution de la présente loi ou de prescriptions étrangères comparables l'exige, et b. où les autorités étrangères, organisations et enceintes en question sont liées par le secret de fonction ou par un devoir de discrétion équivalent.

2 Elles peuvent notamment requérir des autorités étrangères ainsi que des organisations et des enceintes internationales la communication des données nécessaires. Pour les obtenir, elles peuvent leur fournir des données sur: a. la nature, la quantité, le lieu de destination et d'utilisation, l'usage ainsi que les destinataires de marchandises, de pièces détachées, de biens immatériels, y compris le know-how, ou de droits y afférents; b. les personnes qui participent à la fabrication, à la livraison, au courtage ou au financement de marchandises ou de pièces détachées, au transfert de biens immatériels, y compris le know-how, ou à la concession de droits y afférents; c. les modalités financières 'de l'opération.

3 Si l'Etat étranger accorde la réciprocité, elles peuvent communiquer les données mentionnées au 2e alinéa, d'office ou sur demande, dans la mesure où l'autorité étrangère donne l'assurance que ces données: a. ne seront traitées qu'à des fins conformes à la présente loi, et 1064

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b.

ne seront utilisées dans une procédure pénale qu'à la condition d'être ultérieurement obtenues conformément aux dispositions relatives à l'entraide judiciaire internationale.

4 Elles peuvent également communiquer les données en question à des organisations ou à des enceintes internationales si les conditions prévues au 3e alinéa sont remplies, nonobstant l'exigence de réciprocité.

5 Les dispositions relatives à l'entraide judiciaire internationale en matière pénale sont réservées.

Chapitre 8: Dispositions finales

Art. 40 Exécution 1 Le Conseil fédéral arrête les dispositions d'exécution.

2 Le Département militaire fédéral est chargé de l'exécution.

Art. 41 Abrogation du droit en vigueur La loi fédérale du 30 juin 1972 ^ sur le matériel de guerre est abrogée.

Art. 42 Dispositions transitoires 1 Les activités qui ne nécessitaient pas d'autorisation en vertu de l'ancien droit et qui ne sont pas encore exécutées ou achevées peuvent être poursuivies sans autorisation pendant une période de cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente loi. Après ce délai, les autorisations requises par la présente loi doivent être demandées.

2 Les contrats relatifs au transfert de biens immatériels, y compris le know-how, ou à la concession de droits y afférents, qui ont été conclus avant l'entrée en vigueur de la présente loi, ne requièrent pas d'autorisation prévue par cette dernière.

Art. 43 Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est sujette au référendum facultatif.

2 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur; il peut renoncer à mettre en vigueur certaines dispositions jusqu'à l'entrée en vigueur d'une législation fédérale sur les armes.

N37464

!) RO 1973 107

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Message concernant l'initiative populaire «pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre» et la révision de la loi fédérale sur le matériel de guerre du 15 février 1995

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1995

Année Anno Band

2

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18

Cahier Numero Geschäftsnummer

95.015

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

09.05.1995

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988-1065

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