15.048 Message relatif à la modification de la loi sur le blanchiment d'argent (Obligations de diligence étendues pour empêcher l'acceptation de valeurs patrimoniales non fiscalisées) du 5 juin 2015

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi sur le blanchiment d'argent, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

5 juin 2015

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2015-1455

3799

Condensé Le présent projet complète la stratégie poursuivie avec l'échange automatique de renseignements (EAR) relatifs aux comptes financiers, qui vise à garantir que les clients étrangers du secteur de la gestion de fortune remplissent leurs obligations fiscales. Il s'agit, moyennant l'inscription d'une nouvelle disposition dans la loi sur le blanchiment d'argent (LBA), d'imposer aux intermédiaires financiers des obligations de diligence basées sur les risques afin de s'assurer que les clients résidant à l'étranger se conforment aux règles de la fiscalité même lorsque la Suisse n'applique pas l'EAR avec leur pays de résidence.

Contexte Le 29 novembre 2013, après avoir pris connaissance des résultats de la procédure de consultation relative à la révision de la LBA intitulée «Stratégie concernant la place financière ­ obligations de diligence étendues pour empêcher l'acceptation de valeurs patrimoniales non fiscalisées», le Conseil fédéral a décidé de remettre l'ouvrage sur le métier, demandant que lui soit soumise une proposition concernant la teneur des obligations de diligence étendues lorsque des accords sur un EAR relatifs aux comptes financiers conformes à la norme de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) peuvent être conclus avec les principaux pays partenaires de la Suisse ou lorsqu'il apparaît que de tels accords ne peuvent au contraire pas être négociés dans un avenir prévisible. Les obligations de diligence étendues ont par la suite trouvé place, sous une forme fortement simplifiée, dans la loi sur les établissements financiers (LEFin) mise en consultation le 27 juin 2014, conjointement avec la loi sur les services financiers (LSFin). Etant donné toutefois que les efforts entrepris au niveau international pour développer une norme régissant l'EAR ont abouti plus rapidement que prévu et que le message concernant la LEFin ne sera vraisemblablement prêt qu'à la fin de 2015, les obligations de diligence étendues en matière de conformité aux règles de la fiscalité sont aujourd'hui soumises au Parlement à la faveur du présent projet distinct de révision de la LBA, en même temps que le message sur l'approbation de l'accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers et sa mise en oeuvre
(loi fédérale sur l'échange international automatique de renseignements en matière fiscale). A noter que ces obligations de diligence étendues s'appliqueront uniquement vis-à-vis des clients dont la résidence fiscale est à l'étranger.

Contenu du projet Les obligations de diligence étendues vaudront pour tous les intermédiaires financiers suisses susceptibles d'accepter et de placer des valeurs patrimoniales non fiscalisées. Il est opportun de définir ces obligations dans la loi sur le blanchiment d'argent, car celle-ci s'applique à tous les intermédiaires financiers déterminants, qui doivent d'ores et déjà remplir des obligations de diligence pour prévenir le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. L'adoption de règles dans la LBA s'impose d'autant plus que le projet de loi sur la mise en oeuvre des recom-

3800

mandations du Groupe d'action financière (GAFI) ­ adopté par le Parlement en décembre 2014 ­ prévoit que les délits fiscaux qualifiés seront constitutifs d'infractions préalables au blanchiment d'argent et que les intermédiaires financiers devront, à l'avenir, respecter des obligations de diligence étendues à ce type d'infractions.

Les nouvelles obligations de diligence étendues destinées à garantir la conformité des valeurs patrimoniales aux règles de la fiscalité seront mises en oeuvre au moyen d'un examen basé sur les risques. Elles ne devront pas être observées vis-à-vis des clients ayant leur résidence fiscale en Suisse, ni vis-à-vis de ceux dont l'Etat de résidence applique l'EAR avec la Suisse.

En ce qui concerne les intermédiaires financiers soumis à une surveillance prudentielle, des critères plus détaillés concernant l'examen basé sur les risques feront l'objet d'une autorégulation reconnue comme standard minimal par l'autorité de surveillance en vertu de la LBA. En l'absence d'autorégulation, l'autorité de surveillance édicte les dispositions d'exécution correspondantes. Il appartient aux organismes d'autorégulation de définir ces critères à l'intention des intermédiaires financiers qui leur sont affiliés.

A l'avenir, les intermédiaires financiers devront refuser les valeurs patrimoniales lorsqu'ils soupçonnent qu'elles ne sont pas conformes aux règles de la fiscalité.

Concernant les relations d'affaires existantes, l'intermédiaire financier devra vérifier si les valeurs patrimoniales déjà placées auprès de lui sont conformes aux règles de la fiscalité et, le cas échéant, les faire régulariser par le client; à défaut, il devra résilier cette relation.

3801

Message 1

Présentation du projet

1.1

Contexte

Le présent message relatif à une modification de la loi du 10 octobre 1997 sur le blanchiment d'argent (LBA)1 est étroitement lié au message sur l'approbation de l'accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers et sa mise en oeuvre (loi fédérale sur l'échange international automatique de renseignements en matière fiscale), présenté simultanément. Les obligations de diligence étendues ont le même but que l'échange automatique de renseignements (EAR) relatifs aux comptes financiers, en ceci qu'elles visent à empêcher l'afflux de valeurs patrimoniales non fiscalisées en Suisse. Elles ne doivent être observées que vis-à-vis des clients dont l'Etat de résidence n'applique pas l'EAR avec la Suisse. On peut donc les considérer comme des mesures d'accompagnement destinées à compléter le dispositif de l'EAR.

Début 2013, le Conseil fédéral avait déjà ouvert une procédure de consultation relative à une modification de la LBA, sous le titre «Stratégie concernant la place financière ­ obligations de diligence étendues pour empêcher l'acceptation de valeurs patrimoniales non fiscalisées»2. Le projet constituait alors le troisième pilier de la stratégie du Conseil fédéral en matière de place financière, selon laquelle l'objectif d'une place financière conforme aux règles de la fiscalité devait être atteint en concluant des accords sur l'imposition à la source, en améliorant l'assistance administrative et l'entraide judiciaire selon les normes internationales et en étendant les obligations de diligence. Le 14 juin 2013, le Conseil fédéral a pris connaissance du premier rapport du groupe d'experts «Développement de la stratégie en matière de marchés financiers». Il s'est alors déclaré disposé à collaborer activement, dans le cadre de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), à l'élaboration d'une norme mondiale en matière d'EAR permettant de garantir que les clients étrangers de gestionnaires de fortune suisses observent leurs obligations fiscales. Cette norme doit satisfaire aux exigences élevées posées en matière de respect du principe de spécialité et de la confidentialité, garantir la réciprocité et réglementer de manière fiable l'identification des ayants droit économiques de toutes les structures
juridiques, y compris les trusts et les sociétés de domicile. Le 29 novembre 2013, dans le cadre du développement de sa stratégie et après qu'il eut pris connaissance des résultats de la consultation mentionnée plus haut, le Conseil fédéral a décidé, en ce qui concerne les obligations de diligence étendues, de remettre l'ouvrage sur le métier, demandant que lui soit soumise une proposition concernant la teneur des obligations de diligence étendues lorsque des accords sur l'EAR conformes à la norme internationale peuvent être conclus avec les principaux pays partenaires de la Suisse ou lorsqu'il apparaît que de tels accords ne peuvent au contraire pas être négociés dans un avenir prévisible. Les obligations de diligence étendues ont alors été remaniées et intégrées, sous une forme condensée et adaptée, dans l'art. 11 (conformité fiscale) du projet de loi sur les établissements financiers 1 2

RS 955.0 www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2013 > DFF

3802

(LEFin) mis en consultation3. Compte tenu du rapport étroit existant avec le projet en matière d'EAR présenté parallèlement ­ la norme correspondante ayant entretemps beaucoup avancé au niveau international ­, l'occasion est aujourd'hui saisie d'inscrire dans la LBA les règles telles que conçues à l'origine, mais sous une forme très simplifiée et en limitant leur application au patrimoine des clients dont la résidence fiscale est à l'étranger.

1.2

Dispositif proposé

La crédibilité du développement de la stratégie en matière de place financière présuppose que les obligations de diligence étendues visant à empêcher l'afflux de valeurs patrimoniales non fiscalisées s'appliquent à tous les intermédiaires financiers participant à l'éventuelle acceptation et au placement de telles valeurs. Il convient par conséquent de s'appuyer sur la définition des intermédiaires financiers figurant à l'art. 2 LBA. Ces intermédiaires financiers sont au demeurant déjà tenus d'observer des obligations de diligence en relation avec le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Une réglementation dans la LBA s'impose en outre d'autant plus que, en vertu du projet de loi sur la mise en oeuvre des recommandations du Groupe d'action financière (GAFI), révisées en 20124 ­ que le Parlement a déjà adopté ­, les délits fiscaux qualifiés seront constitutifs, à partir du 1er janvier 2016, d'infractions préalables au blanchiment d'argent, si bien que les intermédiaires financiers seront également tenus d'observer les obligations de diligence étendues pour ce type d'infractions.

A la différence de la version mise en consultation début 2013, le présent projet regroupe les obligations de diligence étendues en un seul article, les limitant en outre à l'essentiel. Les détails devront être réglés par le biais de l'autorégulation. Complémentaires à l'EAR, les obligations de diligence ne doivent pas avoir d'effets allant au-delà de ce que prévoit ce dernier. Cela signifie, d'une part, qu'elles ne devront pas être observées vis-à-vis des clients dont l'Etat de résidence applique l'EAR avec la Suisse, ni, d'autre part ­ contrairement à ce qui était prévu dans les projets mis en consultation ­, vis-à-vis des clients ayant leur résidence fiscale en Suisse. La norme sur l'EAR ne concerne en effet que l'échange de renseignements financiers relatifs aux clients dont la résidence fiscale est à l'étranger.

Tout comme la clarification des soupçons de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme, les obligations de diligence étendues dépendront du risque présenté par le cocontractant (examen basé sur les risques). En présence d'indices d'un risque moindre, il sera en règle générale possible de renoncer à des vérifications approfondies.

Le système actuel de lutte contre le blanchiment d'argent,
selon lequel, pour les banques et les maisons de jeu, les obligations de diligence figurant dans la LBA peuvent être précisées par le biais de l'autorégulation (art. 17 LBA), dans la mesure où les règles fixées par voie d'ordonnance le permettent, doit également s'appliquer aux obligations de diligence étendues en matière de fiscalité. Les modalités d'évaluation de la conformité aux règles de la fiscalité des intermédiaires financiers 3 4

www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2014 > DFF FF 2014 9465

3803

assujettis à la surveillance prudentielle visés à l'art. 2, al. 2, LBA peuvent faire l'objet d'une autorégulation reconnue comme standard minimal par la FINMA (dans le domaine des marchés financiers) et la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ) (pour les maisons de jeu). Ce type d'autorégulation est un modèle qui a fait ses preuves dans la lutte contre le blanchiment d'argent ainsi que, récemment, en relation avec les exigences de fonds propres dans le domaine hypothécaire. Bien que son impact soit similaire à celui d'une réglementation étatique, l'autorégulation jouit de davantage de souplesse et d'une plus large acceptation. Pour les intermédiaires financiers qui sont affiliés à un organisme d'autorégulation (OAR) reconnu selon l'art. 24 LBA, l'OAR définit les modalités d'application des obligations de diligence, conformément à l'art. 25, al. 2, LBA. Enfin, pour les intermédiaires financiers qui ne sont assujettis ni à la surveillance prudentielle ni à celle d'un OAR, la FINMA précisera les obligations de diligence étendues (art. 18, al. 1, let. e, LBA).

1.3

Appréciation de la solution retenue

Par rapport au projet de 2013, la LEFin mise en consultation reprenait les obligations de diligence étendues (art. 11 AP-LEFin) sous une forme abrégée et simplifiée (voir à ce sujet le rapport sur les résultats de la consultation5). Si certaines réactions ont été positives, les milieux économiques, principalement, ont fait valoir que les règles proposées allaient au-delà du nécessaire et que l'on ne pouvait pas demander aux établissements financiers de répondre de la probité fiscale de leurs clients.

Il faut néanmoins s'en tenir sur le fond aux obligations de diligence étendues telles que les prévoit le projet. Il a d'ailleurs été tenu compte des critiques émises lors de la procédure de consultation, dans la mesure où les règles proposées aujourd'hui sont nettement plus simples et où il n'est plus prévu d'appliquer les obligations de diligence étendues vis-à-vis des personnes assujetties à l'impôt en Suisse. Ce projet met en oeuvre de manière crédible l'objectif d'une place financière intègre et contribue ainsi fortement au maintien de sa réputation.

1.4

Comparaison avec le droit étranger

Les Etats européens et les grandes places financières ne connaissent pas d'obligations de diligence étendues, car ils ont adopté, pour lutter contre l'acceptation de fonds non fiscalisés, d'autres approches empiétant généralement davantage sur la sphère privée des clients, même si c'est dans une mesure qui varie d'une juridiction à l'autre. Pour cette raison, les systèmes d'autres pays peuvent uniquement être exposés, sans toutefois pouvoir être comparés avec la présente solution.

1.4.1

OCDE

La norme en matière d'assistance administrative selon l'art. 26 du modèle de convention de l'OCDE prévoit que les Etats échangent, sur demande, les renseigne5

www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2014 > DFF

3804

ments nécessaires à l'application du droit national de l'Etat requérant concernant les impôts visés par la convention. En 2012, le Conseil de l'OCDE a adopté à Paris le commentaire révisé se rapportant à l'art. 26 du modèle de convention fiscale de l'OCDE. Désormais, la norme prévoit que l'assistance administrative doit être accordée non seulement dans des cas individuels, mais également, dans certaines circonstances, pour des groupes de contribuables. Dans ce cas, les personnes concernées doivent être identifiées au moyen de critères de recherche spécifiques. La transmission de demandes non fondées sur des indices concrets, appelée «pêche aux renseignements», demeure expressément interdite. La Suisse et les principales places financières mettent en oeuvre la norme de l'OCDE en matière d'assistance administrative dans sa version révisée.

A l'instar de l'échange de renseignements sur demande, l'échange de renseignements qualifié de spontané est également devenu la norme internationale. En matière d'échange spontané, les renseignements sont transmis non pas sur requête d'un autre Etat, mais lorsque l'Etat qui les détient considère qu'ils peuvent présenter un intérêt pour l'autre Etat. Cette forme d'assistance administrative est notamment prévue dans la convention du Conseil de l'Europe et de l'OCDE concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale (Convention). Parallèlement à l'échange spontané de renseignements, la Convention prévoit également l'échange sur demande et l'échange automatique de renseignements. La Suisse a signé la Convention le 15 octobre 2013. Le message relatif à l'approbation de la Convention du Conseil de l'Europe et de l'OCDE concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale et à sa mise en oeuvre (modification de la loi sur l'assistance administrative fiscale) est présenté au Parlement en même temps que le message sur l'approbation de l'accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers et sa mise en oeuvre (loi fédérale sur l'échange international automatique de renseignements en matière fiscale) et le présent projet.

Le 15 juillet 2014, le Conseil de l'OCDE a approuvé la norme internationale relative à l'EAR en matière fiscale. Depuis lors, près de 100 Etats
ont déclaré vouloir adopter cette nouvelle norme. Certains ont annoncé le premier échange de renseignements pour 2017, d'autres ­ dont la Suisse ­ pour 2018, sous réserve des procédures législatives internes. La nouvelle norme prévoit que les établissements financiers ainsi que certains instruments de placement collectif et sociétés d'assurance collectent des renseignements financiers relatifs à leurs clients ayant une résidence fiscale à l'étranger. Ces renseignements comprennent tous les types de revenus de capitaux ainsi que le solde des comptes. Ils sont transmis automatiquement, en règle générale une fois par an, aux autorités fiscales nationales, qui les communiquent ensuite aux autorités fiscales étrangères compétentes pour les clients concernés. Cette transparence vise à éviter que du substrat fiscal puisse échapper au fisc d'un pays en étant dissimulé à l'étranger.

1.4.2

UE

Au sein de l'UE, l'assistance administrative conforme à la norme de l'art. 26 du modèle de convention de l'OCDE est mise en oeuvre et intégrée à l'acquis communautaire dans la directive révisée relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2013. Cette directive s'appli3805

que en principe à tous les types de taxes et d'impôts et régit l'échange des «renseignements vraisemblablement pertinents pour l'administration et l'application de la législation interne des Etats membres». Seuls les impôts indirects en sont expressément exclus, pour autant qu'ils soient déjà couverts par d'autres textes législatifs de l'UE, à savoir la TVA, les droits de douane et les droits dits d'accises (taxes sur la consommation).

La directive relative à la coopération administrative contient, outre les dispositions concernant l'échange de renseignements sur demande, des dispositions sur l'assistance spontanée et l'EAR. Une autorité compétente peut communiquer spontanément à l'autorité compétente d'un autre Etat membre toutes les informations dont elle a connaissance et qui pourraient être utiles à cette dernière. La coopération administrative régit par ailleurs, en termes limitatifs, les cas dans lesquels les Etats membres doivent impérativement s'échanger spontanément les renseignements dont ils disposent. Tel est notamment le cas lorsqu'un Etat membre soupçonne une évasion fiscale dans un autre Etat membre, ou encore des avantages fiscaux résultant de transferts fictifs de bénéfices à l'intérieur d'un groupe d'entreprises.

Depuis le 1er janvier 2015, tout Etat membre est tenu de communiquer automatiquement à l'autorité compétente d'un autre Etat membre les renseignements dont il dispose sur les revenus professionnels (salariés), les jetons de présence, les produits d'assurance-vie, les pensions, la propriété et les revenus de biens immobiliers (tous renseignements qui ne sont pas des données bancaires). Le Conseil de l'UE a de nouveau révisé la directive relative à la coopération administrative le 9 décembre 2014 et ainsi inscrit la norme de l'OCDE sur l'EAR dans le droit européen. Les données devront en principe être collectées dès 2016 et échangées entre les Etats membres dès 2017. Selon les dispositions de la directive relative à la coopération administrative, l'Autriche appliquera, dès le 1er janvier 2017, les dispositions de la directive révisée aux périodes fiscales débutant à cette date. La directive sur la fiscalité des revenus de l'épargne doit être abrogée à l'entrée en vigueur de la directive révisée relative à la coopération administrative. Par ailleurs, le Conseil ECOFIN a
confirmé en octobre 2014 que les accords en matière de fiscalité des revenus de l'épargne avec les Etats tiers que sont la Suisse, Andorre, Liechtenstein, Monaco et Saint-Marin devraient être révisés de manière à ce qu'ils fixent la norme de l'OCDE sur l'EAR dans les relations entre ces Etats et l'UE. Le 27 mai 2015, la Suisse et l'UE ont signé un accord en ce sens, qui sera soumis à l'Assemblée fédérale pour approbation.

1.4.3

Autres Etats

Les Etats-Unis négocient les conventions contre les doubles impositions (CDI) et les accords sur l'échange de renseignements en matière fiscale (AERF) sur la base d'un modèle d'accord qui leur est propre, qui respecte les dispositions de l'art. 26 du modèle de convention de l'OCDE et va même plus loin. Ils échangent des renseignements sur demande dans le cadre de ces CDI et AERF, de même que de la convention du Conseil de l'Europe (dans sa version initiale). Par ailleurs, les Etats-Unis ont déclaré vouloir appliquer la norme sur l'EAR dès 2015 sur la base du FATCA6.

Certains de leurs accords FATCA prévoient qu'ils fournissent eux-mêmes des 6

FATCA: Foreign Account Tax Compliance Act

3806

données aux Etats partenaires. Dans ces accords, les Etats-Unis reconnaissent en outre devoir accorder la pleine réciprocité en la matière et confirment leur intention politique de créer les bases légales nécessaires à cet effet.

En tant que membre du Forum mondial, Singapour s'est engagée en mars 2009 à adopter les normes internationales régissant l'échange de renseignements en matière fiscale. Singapour s'est par ailleurs déclarée prête à appliquer la norme sur l'EAR et prévoit un premier échange de données pour 2018.

1.5

Mise en oeuvre

Les dispositions que le présent projet prévoit d'inscrire dans la LBA définissent le cadre des obligations de diligence étendues. Par analogie avec le système existant de mise en oeuvre de la loi, la FINMA et la CMFJ préciseront par voie d'ordonnance les obligations de diligence à l'intention des intermédiaires financiers qui leur sont assujettis en se fondant sur l'actuel art. 17 LBA, pour autant qu'aucune autorégulation ne l'ait fait. Les OAR préciseront les obligations de diligence à l'intention des intermédiaires financiers qui leur sont affiliés (art. 25, al. 2, LBA).

2

Commentaire des dispositions

Titre et art. 1 Le titre de la loi sur le blanchiment d'argent doit refléter les nouvelles dispositions visant à empêcher l'acceptation de valeurs patrimoniales non fiscalisées.

Il n'est en revanche pas nécessaire de modifier l'art. 1, qui règle l'objet de la loi, puisqu'il intègre déjà «la vigilance requise en matière d'opérations financières».

Comprise au sens large, cette expression couvre également les nouvelles obligations de diligence des intermédiaires financiers relatives aux valeurs patrimoniales non fiscalisées, même si elle a été interprétée jusqu'ici dans un sens plus étroit.

Le titre de la LBA est également modifié avec effet au 1er janvier 2016 compte tenu de l'adoption par le Parlement, durant la session d'hiver 2014, de la loi sur la mise en oeuvre des recommandations révisées du GAFI7. La modification qui en résulte (suppression de «dans le secteur financier») est proposée ici de manière anticipée.

Art. 6a

Vérification de la conformité aux règles de la fiscalité

Les obligations de vérification décrites ci-dessous ne restreignent ni ne remplacent les obligations de diligence existantes, à savoir les obligations de clarification visées à l'art. 6 LBA. En conséquence, les restrictions de vérification de la conformité aux règles de la fiscalité qui sont fixées à l'al. 1 (assujettissement à l'étranger) et à l'al. 3 (clients des pays avec lesquels est appliquée la norme sur l'EAR) ne s'appliquent pas aux obligations de clarification mentionnées à l'art. 6 LBA.

7

FF 2014 9465

3807

Al. 1 Cette disposition décrit les obligations de diligence que l'intermédiaire financier doit respecter lors de l'acceptation de valeurs patrimoniales pour s'assurer qu'elles sont conformes aux règles de la fiscalité. Tout comme les obligations de diligence existantes, les nouvelles obligations se basent sur le risque inhérent à chaque client. Ce risque doit être considéré et pondéré en fonction des informations fournies dans chaque cas, la pondération pouvant varier selon la branche. Par exemple, il est usuel dans les maisons de jeu que les clients apportent des sommes importantes en espèces, alors que cette situation est moins fréquente pour les dépôts bancaires et nécessite dès lors des vérifications plus approfondies. Les vérifications reposent sur une approche basée sur les risques, qui implique aussi la prise en compte de la situation sociale et juridique dans le pays de domicile du client concerné. Par exemple, si un Etat dispose d'une administration publique efficace, on sera en droit d'attendre que le client qui y réside apporte une preuve plus solide de sa conformité aux règles de la fiscalité qu'un client provenant d'un pays où ces structures sont déficientes, notamment en raison d'une guerre civile ou d'un régime dictatorial (mais dans ce dernier cas, il faut aussi prendre en considération le risque accru de blanchiment d'argent). En fin de compte, les vérifications individuelles à entreprendre et leur ampleur seront toujours évaluées selon l'exigence suivante: les obligations de diligence étendues doivent garantir de manière fiable que la place financière suisse fait tout pour éviter les valeurs patrimoniales non fiscalisées. Les indices déterminants seront définis en détail par le biais de l'autorégulation.

Enfin, lorsque la relation d'affaires concerne des valeurs patrimoniales de faible valeur, il doit être possible de ne pas observer les obligations de diligence. La valeur déterminante devra être fixée dans l'autorégulation.

Al. 2 En présence d'indices de risque élevé, l'intermédiaire financier n'a pas le droit de présumer que les valeurs patrimoniales sont fiscalisées et doit effectuer d'autres vérifications. Ces indices d'un risque accru existent notamment lorsque le client adopte un comportement qui laisse supposer une intention de se soustraire à ses obligations fiscales ou
qu'il ne peut expliquer de manière plausible. Ces indices sont les suivants: la création de sociétés de domicile ou de participations très imbriquées visant à dissimuler l'ayant droit économique des valeurs patrimoniales, l'exécution par le client d'opérations en espèces inhabituelles ou inhabituellement fréquentes dans le cadre de son activité ou l'exigence de mesures de discrétion sortant de l'ordinaire, de sérieux indices découlant de procédures administratives ou pénales connues indiquant que le client ne se conforme pas aux règles de la fiscalité, ou encore des indices montrant que le client entend dissimuler ses valeurs patrimoniales aux autorités fiscales, car il effectue essentiellement des placements exonérés d'impôt et ne demande aucun relevé fiscal à l'intermédiaire financier.

En présence d'indices d'un risque moindre, l'intermédiaire financier n'est au contraire pas tenu de vérifier plus en détail la conformité aux règles de la fiscalité. De tels indices peuvent consister par exemple en la présentation par le client d'une copie authentifiée de sa déclaration d'impôts ou d'une attestation des autorités fiscales crédibilisant la conformité aux règles de la fiscalité. Il peut également s'agir d'une déclaration écrite crédible du client, certifiant qu'il a rempli toutes ses obligations fiscales en relation avec les valeurs patrimoniales concernées et les revenus qui en découlent (autodéclaration). Cette pratique de l'autodéclaration a déjà fait ses 3808

preuves dans plusieurs banques. Reste à savoir si une autodéclaration mensongère constitue un faux dans les titres au sens de l'art. 251, ch. 1, du code pénal (CP)8 et, avant tout, si l'autodéclaration est un titre. Les tribunaux auront pour tâche de répondre à cette question. On peut cependant renvoyer aux liens entre l'autodéclaration et la déclaration selon l'art. 3 de la convention relative à l'obligation de diligence des banques (CDB) qui, au moyen du formulaire A, indique l'ayant droit économique, ainsi qu'à la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon lequel les autorités de surveillance attribuent au formulaire A une force probante plus importante (et donc la forme d'un titre officiel) en ce qui concerne le respect des obligations de diligence.

L'intermédiaire financier peut également renoncer à d'autres vérifications si le client remplit une déclaration de renonciation (waiver) autorisant son intermédiaire financier à communiquer ses données aux autorités fiscales et s'il renonce ainsi d'emblée à tout recours lors d'une éventuelle procédure d'assistance administrative en matière fiscale ouverte contre lui. Cette disposition n'affecte pas la nécessité éventuelle d'une autorisation en vertu de l'art. 271 CP pour que la banque puisse remettre les données dans un cas particulier. La question ne se poserait que si un Etat étranger s'adressait directement à la banque pour obtenir la transmission des données.

Al. 3 La vérification de la conformité aux règles de la fiscalité n'a plus lieu d'être vis-àvis des clients provenant de pays avec lesquels la Suisse applique l'EAR. Font également partie de cette catégorie les clients des Etats-Unis entrant dans le champ d'application de l'accord du 14 février 2013 entre la Suisse et les Etats-Unis d'Amérique sur leur coopération visant à faciliter la mise en oeuvre du FATCA9, qui prévoit de fait un EAR. Afin de faire valoir leurs droits en matière de fiscalité, les pays en question ont accès aux données des clients concernés. En revanche, l'impôt libératoire à la source ne garantit pas une transparence totale, car les droits aux renseignements découlant des accords correspondants ne sont pas aussi étendus.

Al. 4 Cet alinéa règle les obligations que l'intermédiaire financier doit observer lorsqu'il constate ou présume qu'un client lui propose des valeurs
patrimoniales non fiscalisées ou qu'il a déjà accepté de telles valeurs.

Let. a S'il présume, au terme de la vérification prévue à l'al. 1, qu'un nouveau client lui propose des valeurs patrimoniales non fiscalisées, l'intermédiaire financier est tenu de refuser d'accepter ces valeurs et, partant, de nouer la relation d'affaires.

Let. b Si, dans le cadre d'une relation client en cours, l'intermédiaire financier constate ou présume que son client lui propose des valeurs patrimoniales non fiscalisées, il ne suffit pas de refuser ces valeurs. Un tel comportement du client donne en effet à penser que les valeurs patrimoniales qu'il a déjà déposées auprès de l'intermédiaire financier ne sont pas non plus fiscalisées. L'intermédiaire financier doit par conséquent de nouveau procéder à une vérification du risque de non-conformité aux règles 8 9

RS 311.0 FF 2013 2849

3809

de la fiscalité de ces valeurs patrimoniales, conformément à l'al. 1. Si la vérification conduit à une présomption de non-conformité, le client doit prouver à l'intermédiaire financier, dans un délai raisonnable, que les valeurs patrimoniales sont correctement imposées ou qu'il a régularisé sa situation fiscale. Si le client n'apporte pas cette preuve dans le délai imparti, l'intermédiaire financier doit résilier la relation d'affaires.

Dans certains cas, le client ne peut pas prouver que ses valeurs patrimoniales sont conformes aux règles de la fiscalité ou que sa situation fiscale est régularisée sans subir des préjudices déraisonnables qui ne découlent pas directement de l'imposition des valeurs patrimoniales. Ces préjudices ne consistent donc pas en des pertes de valeurs patrimoniales, telles que des rappels d'impôt ou des amendes fiscales, découlant du droit fiscal en cas de régularisation de la situation du client dans son pays de résidence, bien que ces pertes puissent être importantes. Il s'agit plutôt de situations dans lesquelles le client peut rendre vraisemblable que, en cas de communication de ses relations d'affaires aux autorités, ses données risquent de ne pas rester auprès des autorités et que des organisations criminelles pourraient ainsi s'en prendre à lui. Parmi les autres situations entrant en ligne de compte, on peut citer l'absence de procédures conformes à l'Etat de droit, le risque d'arbitraire politique, une imposition confiscatoire ou des mesures pénales draconiennes. Dans de tels cas, le compte peut être momentanément conservé et le client ne devra procéder à une régularisation que lorsqu'elle apparaîtra raisonnable en raison d'une évolution de la situation.

Al. 5 Les obligations de l'intermédiaire financier en cas de soupçon de blanchiment d'argent arrêtées aux art. 9 ss LBA doivent être distinguées de celles qui lui incombent en présence d'indices de non-conformité aux règles de la fiscalité. En d'autres termes, s'il constate que les valeurs patrimoniales impliquées dans une relation d'affaires proviennent d'infractions préalables au sens de l'art. 9, al. 1, let. a, LBA, ou s'il rompt des négociations visant à établir une relation d'affaires comme prévu à la let. b de la même disposition, l'intermédiaire financier est soumis aux obligations en cas de soupçon de
blanchiment d'argent ­ en particulier information immédiate de l'autorité compétente ­ et les obligations visant à garantir la conformité aux règles de la fiscalité ne s'appliquent pas. Ces dernières ne devront de nouveau être observées, si nécessaire, que lorsque cela ne pourra plus compromettre la procédure concernant le blanchiment d'argent.

Art. 17 Les modifications visent à préciser la situation juridique actuelle. Il est clairement indiqué que la FINMA et la CFMJ doivent fixer par voie d'ordonnance les modalités d'application des obligations de diligence. Cela correspond à la pratique actuelle, les deux autorités de surveillance ayant adopté leur ordonnance respective: l'ordonnance de la FINMA du 8 décembre 2010 sur le blanchiment d'argent (OBAFINMA)10 et l'ordonnance de la CFMJ du 12 juin 2007 sur le blanchiment d'argent (OBA-CFMJ)11.

10 11

RS 955.033.0 RS 955.021

3810

Le terme organisme d'autorégulation est remplacé par autorégulation afin de clarifier que l'art. 17 se réfère aux intermédiaires financiers soumis à la surveillance prudentielle et non aux OAR visés à l'art. 24 (bien que le même terme soit actuellement utilisé dans les deux articles). Ainsi, la FINMA a la possibilité, sur la base de l'art. 7, al. 3, LFINMA, de reconnaître aux autorégulations d'organisations professionnelles d'intermédiaires financiers au sens de l'art. 2, al. 2, LBA une valeur de standard minimal. Il n'est donc pas nécessaire de désigner expressément, à l'art. 32 OBA-FINMA, la convention relative à l'obligation de diligence des banques comme étant déterminante, au motif que les banques ne disposent d'aucun OAR au sens de la LBA. Il suffit en l'occurrence d'exiger de façon générale que l'autorégulation des intermédiaires financiers soit observée. Des réflexions analogues s'appliquent aux entreprises d'assurance (art. 37 OBA-FINMA).

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les communes

A l'avenir, les autorités de surveillance devront veiller à ce que les nouvelles dispositions en matière de conformité aux règles de la fiscalité soient respectées dans leur domaine de surveillance. Cela nécessitera des ressources supplémentaires, relativement peu importantes, dont le financement devra être assuré par les émoluments des intermédiaires financiers.

Par ailleurs, le projet n'a aucune conséquence directe pour les collectivités publiques.

3.2

Conséquences économiques

Les obligations de diligence étendues entraîneront une charge supplémentaire pour les intermédiaires financiers, qui variera selon la branche et l'intermédiaire concerné. Bien qu'elle soit difficile à évaluer, cette charge supplémentaire devrait rester limitée pour les raisons suivantes: d'une part, il incombera au client de prouver la conformité de son patrimoine aux règles de la fiscalité et, d'autre part, l'intermédiaire financier pourra régulièrement se servir des renseignements obtenus lors des vérifications que le droit actuel lui impose déjà en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et que la mise en oeuvre des recommandations du GAFI va étendre à d'autres infractions préalables12. Les obligations de diligence étendues n'entraîneront pas de charge supplémentaire pour les intermédiaires financiers qui ont déjà adapté leur modèle d'affaires à la nouvelle donne ­ prévisible depuis longtemps ­ en matière de conformité aux règles de la fiscalité de leurs clients et qui observent déjà ces obligations. En revanche, les OAR devront à l'avenir veiller à ce que les intermédiaires financiers qui leur sont affiliés respectent aussi les nouvelles dispositions en matière de conformité aux règles de la fiscalité. La charge supplémentaire pour les OAR se traduira par une hausse modérée des émoluments dus par les intermédiaires financiers.

12

FF 2014 9465

3811

La charge supplémentaire se justifie par l'amélioration de la réputation de la place financière, réputation qui se répercute en fin de compte sur les intermédiaires financiers.

4

Relation avec le programme de la législature

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 201513 ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de la législature 2011 à 201514. Vu l'évolution rapide des marchés financiers internationaux et la mise en oeuvre de l'EAR, il est néanmoins présenté au Parlement, car, dans l'intérêt de la place financière suisse, il ne serait pas judicieux d'attendre jusqu'au prochain programme de législature.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et légalité

Les dispositions proposées reposent sur les mêmes bases constitutionnelles que le texte de loi à réviser.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales

Il n'existe pas d'obligations dont il faut vérifier la compatibilité avec le présent projet.

5.3

Délégation de compétences législatives

Aucune délégation de compétences en vue de l'adoption d'une ordonnance de substitution n'est prévue. Dans la mesure où les obligations de diligence en vertu de l'art. 6a LBA sont précisées par la FINMA ou l'autorégulation, les bases légales correspondantes sont définies aux art. 17 et 25 LBA et à l'art. 7, al. 3, LFINMA.

13 14

FF 2012 349 FF 2012 6667

3812