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Message concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire (Infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, les moeurs et la famille) du 26 juin 1985

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons les projets visant à modifier et à compléter les dispositions du code pénal et du code pénal militaire relatives aux infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, contre les moeurs et contre la famille et vous proposons de les adopter.

Nous vous proposons en outre de classer les interventions parlementaires suivantes: 1956 P 6989 Mesures contre les films et écrits immoraux ( N I 8.9. 56, Frei) 1962 P 8401 Lutte contre l'homosexualité (N 5. 12. 62, Schmid Philipp) 1973 P 11524 Délits contre les moeurs (N25. 6. 73, Tanner-Zurich) 1981 P 80.521 Non-assistance à personne en danger (NI 9. 6. 81,Crevoisier) 1983 M 82.598 Vidéofilms. Scènes de violence (E 9. 3. 83, Zbinden; N 5. 10. 83) 1983 M 82.927 Mise en circulation de films vidéo (E 9. 3. 83, Guntern; N 5. 10. 83) 1983 P 82.950 Films vidéo. Scènes de brutalité (N 18. 3. 83, Jaggi) 1984 M 83.378 Infractions contre les moeurs. Revision du code pénal.

(N 14. 12. 84, Christinat; E 6. 6. 85) Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 juin 1985

1985-506

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Furgler Le chancelier de la Confédération, Buser

69 Feuille fédérale. 137e année. Vol. II

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Vue d'ensemble La présente révision, qui fait suite à la modification des dispositions sur les actes de violence criminels, constitue la deuxième étape de la réforme du droit pénal. Elle embrasse également les dispositions correspondantes du droit pénal militaire. Cette revision a pour but d'adapter les éléments constitutifs des infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, les moeurs et la famille aux impératifs actuels de la politique criminelle.

Pour vous permettre de vous forger une opinion politique nuancée, nous vous soumettons un message portant sur deux projets de lois. Le projet A concerne les infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, ainsi que contre la famille. Quant au projet B, il a trait aux infractions contre les moeurs (droit pénal en matière sexuelle).

Le projet A soumet tout d'abord les autorités compétentes à l'obligation générale d'exempter de poursuite ou de peine l'auteur qui à été atteint directement par les conséquences de son acte au point qu 'une peine serait inappropriée. Cette innovation peut jouer un rôle non négligeable précisément dans les matières qui font l'objet de cette revision.

Pour ce qui a trait aux dispositions particulières concernées par le projet A, les modifications proposées sont en substance les suivantes: Les éléments constitutifs de l'assassinat sont redéfinis et la sanction qui l'accompagne est moins rigide. Elle va dorénavant de la réclusion pour dix ans au moins à la réclusion à vie. L'infraction privilégiée qu'est le meurtre passionnel est désormais réalisée non seulement par celui qui a agi alors qu'il était «en proie à une émotion violente et que les circonstances rendaient excusable», mais aussi par celui qui, au moment de l'acte, se trouvait «dans un état de profond désarroi». Quant à la peine d'emprisonnement qui sanctionne le meurtre commis sur la demande de la victime, elle est à présent subordonnée à la condition que l'auteur ait, ce faisant, cédé à des mobiles honorables.

Parmi les modifications les plus importantes apportées aux différentes dispositions qui régissent les lésions corporelles et la mise en danger de la vie et de la santé d'autrui, relevons le fait que les enfants et les adultes qui ont besoin d'être assistés seront mieux protégés. Cette protection accrue se traduit notamment par la poursuite d'office
des lésions corporelles simples et des voies de fait répétées commises sur les personnes précitées et par l'extension des éléments constitutifs de l'infraction consistant à procurer à des enfants des substances dangereuses pour la santé. C'est également dans le but de protéger avant tout les enfants et les adolescents qu'a été élaborée la nouvelle disposition pénale sur les représentations de la violence. Ces modifications rendent superflues les dispositions actuelles sur les mauvais traitements et la négligence envers les enfants, ainsi que sur le surmenage des enfants, et des subordonnés; ces dernières se sont d'ailleurs révélées peut ef-

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ficaces. Au surplus l'actuelle disposition sur ['«abandon d'un blessé» a été étendue. Elle fonde désormais une obligation générale d'assistance en punissant également celui qui omet de porter secours à une personne se trouvant en danger de mort imminent ou qui empêche un tiers de prêter ce secours. Les éléments constitutifs de la rixe ont eux aussi été élargis et complétés par une nouvelle disposition sur l'agression. Quant aux dispositions particulières qui aujourd'hui privilégient le duel par rapport au meurtre et à d'autres formes de lésions corporelles, elles sont supprimées. Enfin - et c'est là aussi une innovation importante - on a supprimé toutes les dispositions qui, contrevenant au principe du droit pénal fondé sur la culpabilité, prévoient une peine aggravée pour les infractions dites qualifiées en raison du résultat.

La nouvelle disposition sur la représentation punissable de la violence, déjà mentionnée ci-dessus, constitue un des points centraux de cette revision.

Elle tire sa raison d'être du fait que les représentations de la brutalité peuvent avoir sur les jeunes en particulier un effet au moins aussi néfaste que la pornographie. De telles représentations doivent, par ailleurs, pouvoir être confisquées et séquestrées provisoirement à la frontière déjà, ce qui implique une modification de la toi sur les douanesParmi les dispositions relatives aux délits contre la famille, celles sur l'inceste et la bigamie n'ont pas subi de modifications fondamentales. Dans ces deux cas, on a essentiellement atténué les sanctions. Le nouveau droit de la filiation, entré en vigueur le 1er janvier 1978, a permis de grandement simplifier et, en partie, de limiter la disposition actuelle sur la violation d'une obligation d'entretien. Le débiteur d'une telle obligation n'est désormais punissable que si cette dernière lui est imposée par le droit de la famille et qu'il puisse ou pût avoir les moyens de s'en acquitter. La norme relative à la violation du devoir d'assistance ou d'éducation a subi une refonte fondamentale: elle s'adresse notamment aux parents, aux tuteurs, ainsi qu 'aux enseignants; mais elle renforce aussi la protection des enfants et des adolescents. Cette protection est également assurée par deux nouvelles dispositions qui obligent les autorités judiciaires pénales - et autorisent les
personnes tenues au secret professionnel ou de fonction - à dénoncer aux autorités tutélaires les actes punissables commis'à l'égard des mineurs. Quant aux dispositions pénales relatives à l'adultère, à l'abandon d'une femme enceinte et à la suppression ou à la falsification d'état civil, elles ont été abandonnées.

Le projet B concerne les modifications afférentes aux infractions d'ordre sexuel. C'est avant tout dans l'intérêt de la protection de la jeunesse que nous entendons suivre une ligne dure en ce qui concerne la pornographie et amorcer une libéralisation prudente pour le surplus. C'est également dans cette optique qu'ont Été élaborées les nouvelles dispositions relatives aux actes d'ordre sexuel avec des enfants et des personnes dépendantes. Ces actes englobent les rapports hétérosexuels et homosexuels. L'âge limite de protec-

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lion a été maintenu à 16 ans, les personnes dépendantes étant, quant à elles, protégées jusqu 'à leur majorité.

Selon la nouvelle disposition sur le viol, ce n 'est plus seulement la femme âgée de 16 ans au mains qui peut être la victime d'un tel acte, mais toute personne de sexe féminin, à l'exception de l'épouse de l'auteur, qui ne saurait être considérée comme victime d'une telle infraction, puisque l'acte délictueux continue à être constitué exclusivement par la contrainte à l'acte sexuel hors mariage. Quant au viol homosexuel, il est, en tant que contrainte à un autre acte d'ordre sexuel, puni de la même peine maximale de dix ans de réclusion.

Nous avons quelque peu atténué la sanction pénale dans 'toute une série de dispositions, étant d'avis que le cadre de la peine tel qu'il est proposé doit suffire à garantir une punition appropriée à la faute commise.

L'outrage public à la pudeur tel qu'il est défini par le droit actuel devient punissable au titre d'exhibitionnisme ou de désagrément causé par la confrontation à un acte d'ordre sexuel. La procédure pénale peut être suspendue si l'exhibitionniste se soumet à un traitement médical.

Les infractions relatives au proxénétisme, aux souteneurs et au fait défavoriser la débauche fusionnent en une seule et nouvelle infraction, l'encouragement à la prostitution. La nouvelle disposition protège, d'une part, la liberté de décision des personnes adonnées à la prostitution et, d'autre part, les autres personnes qui, contre leur gré, sont poussées à s'y livrer. Les cantons peuvent édicter des dispositions qui réglementent les lieux, heures el modes de l'exercice de la prostitution et punir les infractions correspondantes de peines d'arrêts ou d'amende. Cette réglementation permet de supprimer toutes les contraventions que sont le racolage, le trouble causé au voisinage par la prostitution, le fait de tolérer le proxénétisme professionnel dans des locaux donnés à bail, ainsi que la publicité donnée aux occasions de débauche. Ces incriminations se sont d'ailleurs révélées peu efficaces.

La pornographie - le droit actuel parle de publications obscènes -fait l'objet d'une nouvelle disposition qui établit une distinction entre la pornographie que ion peut appeler «douce» et la pornographie «dure». Cette disposition entend protéger les jeunes en général
jusqu'à l'âge de 16 ans. Mais l'importation et la mise en circulation de la pornographie dure - c'est-àdire de représentations ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence - sont punissables indépendamment de tout âge limite. Tout comme les représentations de la violence non pornographiques, il est impératif que de tels objets puissent être confisqués et séquestrés provisoirement à la frontière déjà.

Le juge a désormais la possibilité d'aggraver la peine lorsque des actes punissables d'ordre sexuel ont été commis en commun.

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Enfin, dans le cadre de la révision parallèle du code pénal militaire, nous proposons, dans un projet C. de modifier les articles 218 et 219 du code pénal militaire et de donner au commandant de troupes des compétences disciplinaires à l'encontre de consommateurs de quantités minimes de stupéfiants.

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Message I

Partie générale

II

Interventions parlementaires

Les interventions parlementaires suivantes ont souligné la nécessité d'une revision: Postulat Frei (6989; N 18. 9. 56) relatif à des mesures à prendre contre les films et écrits immoraux: Dans de larges milieux de la population, on s'inquiète de ce qu'une littérature de bas étage et des films de peu de valeur inondent le pays. Aussi le Conseil fédéral est-il prié de présenter aux Chambres un rapport et des propositions pour instituer des mesures juridiques permettant de lutter efficacement contre la diffusion de cette littérature et ces films.

Postulat Schmid Philipp (8401; N 5. 12. 62) relatif à la lutte contre l'homosexualité (déposé sous forme de motion le 13 déc. 1961): En liaison avec la révision du code pénal, le Conseil fédéral est invité à proposer une modification de l'article 194 de ce code, qui prévoie des peines plus sévères en cas de débauche contre nature, et permette de combattre plus efficacement l'homosexualité.

Postulat Tanner-Zurich (11 524; N 25. 6. 73) relatif aux délits contre les moeurs: Le Conseil fédéral est invité à reviser et à moderniser le titre cinquième du code pénal «Infractions contre les moeurs». En l'occurrence, il faudra tenir spécialement compte des modifications intervenues dans les domaines moral et social, ainsi que de l'accélération du processus de maturité que l'on observe chez les jeunes. En tout premier lieu, les articles 204,-211 et 212 du code pénal devront faire l'objet d'une nouvelle rédaction; il devrait en aller de même des dispositions se rapportant à la même matière, qui sont contenues dans d'autres lois et ordonnances.

Postulat Crevoisier (80.521; N 19.6.81) relatif à la non-assistance à personne en danger (déposé sous forme de motion le 1 er oct, 1980), Le .Conseil fédéral est invité à examiner s'il ne serait pas indiqué de proposer un complément au code pénal suisse prévoyant, sous certaines conditions, la pénalisation de ceux qui se rendraient coupables de nonassistance à personne en danger. Les obligations de personnes dont c'est le devoir de venir en aide à autrui dans l'exercice de leurs charges professionnelles (la police et les médecins, par exemple) seront notamment précisées.

Motion Zbinden du 30 novembre 1982 (82.598; E 9.3.83; N 5.10.83) relative aux scènes de violence dans les vidéofîlms.

Le Conseil fédéral est prié de présenter
aux Chambres un projet de revision du code pénal, de la loi sur les douanes et, le cas échéant, d'autres lois encore; ce projet, visant à protéger la jeunesse, interdira l'importation, la fabrication, le commerce et toute diffusion de vidéocassettes comportant

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des scènes de violence et de brutalité qui constituent un outrage à la dignité humaine.

Motion Guntern du 14 décembre 1982 (82.927; E 9. 3. 83; N 5. 10. 83) relative à la mise en circulation de films vidéo.

Le Conseil fédéral est chargé: 1. de présenter un projet limitant ou interdisant la vente, la location ou l'échange de films vidéo cruels et pervers; 2. de prendre des mesures permettant une protection efficace de la jeunesse dans ce domaine.

Postulat Jaggi (82.950; N 16. 12.82) relatif aux films vidéo contenant des scènes de violence.

Le Conseil fédéral est chargé d'examiner si les dispositions légales actuelles (en particulier le nouvel art. 259, 2e al., CP) suffisent pour contrôler les films vidéo présentant des scènes de brutalité et de violence à l'égard des femmes. D'un apport culturel évidemment nul, ces films constituent de véritables provocations à la violence et présentent une image totalement dégradante de la femme, réduite à l'état d'objet destiné à subir les pratiques les plus atroces, comme de l'homme, espèce de brute ayant besoin d'assouvir des fantasmes totalement amoraux.

Motion Christinat du 16 mars 1983 (83.378; N 14. 12. 84; E 6. 6. 85) relative aux infractions contre les moeurs.

Le Conseil fédéral est prié: 1. d'envisager la modification du code pénal afin d'introduire la notion de circonstances aggravantes pour les viols commis par des individus agissant en bande; 2. d'étendre cette notion de bande à tous les articles du titre cinquième qui se rapportent aux infractions contre les moeurs.

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Commission d'experts

En 1971, le Département fédéral de justice et police a chargé une commission d'experts"*' présidée par le professeur Hans Schultz, d'examiner par étapes les dispositions de la partie spéciale du code pénal suisse. La commission se chargea tout d'abord des dispositions relatives à l'interruption de grossesse, dont vous connaissez la destinée, pour examiner ensuite les infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, les moeurs et la famille.

En janvier 1977, la commission remit son rapport ainsi qu'un avant-projet au Département fédéral de justice et police.

Si nous vous soumettons, aujourd'hui seulement la présente revision, c'est que nous avons accordé la priorité à la revision des dispositions concernant les actes de violence criminels, pour laquelle les travaux ont débuté en 1977 et qui est entrée en vigueur le Ì" octobre 1982.

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Les notes figurent à la fin du message.

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Procédure de consultation

Le Département fédéral de justice et police a ouvert en 1981, auprès des gouvernements cantonaux, des partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale et des organismes intéressés2', la procédure de consultation sur l'avant-projet de la commission d'experts. II a reçu 54 réponses. Elles peuvent être résumées succinctement comme il suit: Alors que les propositions dans les domaines «vie et intégrité corporelle» et «famille» ont trouvé dans l'ensemble un accueil favorable, certaines propositions de modification des dispositions concernant les délits contre les «moeurs» se sont heurtées à de vives critiques.

Certes, les milieux consultés ont reconnu presque unanimement qu'une modification de ces dispositions est nécessaire du fait de l'évolution des idées dans ce domaine. Tous ont salué l'introduction du concept d'«actes d'ordre sexuel», uniforme et neutre, destiné en particulier à remplacer les notions actuelles d'«attentat à la pudeun> et d'«actes contraires à la pudeur». La large décriminalisation sur laquelle était basé l'avant-projet de la commission d'experts a cependant été rejetée par la plupart des milieux consultés. Les critiques ont avant tout porté sur la fixation de l'âge limite de protection à 14 ans (cf. art. 187, 188 et 197 du projet), sur la nouvelle disposition relative à l'inceste ainsi que sur l'absence de disposition réprimant les actes de pure violence. Nous reviendrons sur les avis émis lors de la procédure de consultation dans le cadre du commentaire relatif aux différentes dispositions.

Un groupe de travail interdépartemental composé de représentants du Département fédéral de justice et police, du Département fédéral de l'intérieur et du Département militaire fédéral a analysé les résultats de la procédure de consultation et a informé le Département fédéral de justice et police, à l'intention du Conseil fédéral. Après que le Conseil fédéral en eut pris connaissance (en 1983) et eut arrêté ses décisions sur certains points controversés et politiquement importants (âge limite de protection, inceste, pornographie, actes de violence p, ex,), il a chargé le groupe de travail de remanier l'avant-projet dans le sens de ces décisions et des résultats de la procédure de consultation. Les projets que nous vous soumettons aujourd'hui sont le produit de ce travail, 2

Partie spéciale

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Commentaire du projet À du code pénal (Disposition générale; infractions contre la vie et l'intégrité corporelle et contre la famille)

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Exemption de poursuite ou de peine (Art. 66bis)

En général Les conséquences d'un acte punissable frappent parfois non seulement des tiers mais aussi, voire exclusivement l'auteur lui-même, à tel point que ce-

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lui-ci paraît déjà suffisamment «puni» et qu'une condamnation serait vide de sens et inappropriée. C'est par exemple le cas lorsque l'auteur d'un incendie par négligence ne cause pas de dommages importants mais est grièvement brûlé. En règle générale, le droit actuel ne permet pas à la justice de tenir suffisamment compte de ces cas particuliers, c'est-à-dire de renoncer à toute peine. Jusqu'ici, seuls quelques codes de procédure permettent une telle exemption: ce sont ceux des cantons qui connaissent le principe illimité de l'opportunité (ainsi Vaud, Neuchâtel et Genève). Cette situation est des plus insatisfaisantes, notamment pour les autorités judiciaires. Dans de tels cas, elles ont souvent recours à des peines purement symboliques, ce qui en fin de compte ne peut que nuire à la crédibilité de la justice. Le nouvel article 66bls, qui correspond mot pour mot à la proposition de la commission d'experts, a pour but de remédier à cette situation.

A première vue, on peut s'étonner que, dans le cadre d'une revision de la partie spéciale du code pénal, on propose également de modifier ce point précis de la partie générale. De fait, la commission d'experts n'avait tout d'abord examiné la question qu'en relation avec l'homicide et les lésions corporelles par négligence; elle pensait alors simplement compléter dans ce sens les articles 117 et 125 CP. A l'examen, elle s'est cependant rendu compte que le caractère général du problème nécessitait l'insertion d'une disposition dans la partie générale du code. Sinon, celui qui, par exemple, serait devenu invalide à la suite d'un accident de la circulation dû à sa propre faute échapperait à la peine prévue pour les lésions - ou l'homicide causées par négligence à autrui lors de cet accident, mais il serait néanmoins punissable pour violation des règles de la circulation routière ou même en vertu de l'article 239, chiffre 2, CP s'il a, ce faisant, troublé par négligence l'exploitation d'un service d'intérêt général en endommageant une ligne téléphonique.

Le point central de la nouvelle disposition, c'est-à-dire l'exemption de poursuite ou de peine lorsque l'auteur a été durement atteint par les conséquences de son acte, a rencontré une large approbation lors de la procédure de consultation. Ses adversaires ont, quant à eux, invoqué notamment les motifs
suivants: cette disposition équivaudrait à introduire partiellement le principe de l'opportunité; en d'autres termes, elle porterait sévèrement atteinte au principe de la légalité et, partant, à la souveraineté des cantons dont la procédure pénale est fondée sur celui-ci; elle pourrait compromettre l'égalité de traitement et la sécurité juridique; ou faisant du résultat de l'infraction l'élément déterminant de sa répression, elle s'écarterait du droit pénal fondé sur la culpabilité; la grâce serait une institution qui suffirait amplement à régler ces cas limites.

Ces critiques appellent les remarques suivantes: il n'est pas exact de dire que la disposition proposée vise principalement à introduire - du moins en partie - le principe de l'opportunité. II convient bien plus de la comparer avec d'autres motifs d'exemption de poursuite ou de peine, la prescription par exemple. C'est en effet une question de droit matériel que de déterminer si, sous certaines conditions réunies en la personne de l'auteur, une peine est ou non justifiée et appropriée. Il est tout aussi inexact d'y voir le

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germe de l'inégalité de traitement ou de l'insécurité juridique. La disposition proposée doit au contraire permettre de mieux tenir compte de chaque cas particulier et de mieux satisfaire au principe qui veut que l'on traite de façon identique des situations semblables et de façon différente des situations différentes. Si le pouvoir d'appréciation donné ici aux autorités de poursuite pénale est de nature à compromettre la sécurité juridique, on peut en dire autant de décisions comparables pour lesquelles ces autorités disposent depuis longtemps déjà d'un tel pouvoir. Nous reviendrons sur ce point.

Enfin, la disposition proposée ne s'écarte nullement de notre système de droit pénal fondé sur la culpabilité. Le résultat dont il est question ici concerne les conséquences qui surviennent en la personne même de l'auteur de l'acte et non pas les conséquences du fait dommageable pour la victime. Par ailleurs, la décision quant au caractère inapproprié de la peine dépend essentiellement de la faute de l'auteur, comme nous l'exposerons en détail ci-après.

Conditions Aux termes de la disposition proposée, l'exemption de poursuite ou de peine est soumise à la condition que l'auteur soit lui-même durement atteint par les conséquences directes de son acte. Il est donc exclut que l'auteur puisse se mettre à l'abri des poursuites ou d'une peine en faisant valoir les conséquences indirectes de l'acte. Ce sont principalement celles qui n'apparaissent que lors de l'instruction et du jugement, telles que longueur et désagrément de la procédure, sévérité de la peine, frais judiciaires et dommages-intérêts. La disposition proposée exclut aussi les conséquences qui apparaissent bien après que l'acte a été commis. En revanche, les conséquences directes concernent, d'une part, les lésions corporelles subies par l'auteur lors d'un accident de la circulation ou du maniement d'explosifs par exemple, ou encore du fait de la violence d'un incendie ou de l'escalade non réussie d'une façade. Elles englobent en outre l'atteinte psychique (morale) dont souffre l'auteur du fait des lésions corporelles causées à autrui, voire des morts ainsi provoquées, d'autant plus s'il s'agit de ses proches.

La question de savoir à quel degré l'auteur doit avoir été atteint, physiquement ou psychiquement, pour qu'une peine paraisse inappropriée,
dépend des circonstances de chaque cas particulier, dont l'appréciation appartient en dernier lieu aux autorités de poursuite pénale. Par conséquent, leur décision devra dépendre essentiellement de la gravité et de la punissabilité de l'acte et, partant, de la faute imputable à l'auteur. Plus celle-ci sera lourde, plus les conséquences touchant la personne de l'auteur devront être graves pour rendre la peine inadéquate. Ainsi, celui qui a causé des lésions corporelles on provoqué la mort d'autrui et qui subit une atteinte morale de ce fait doit en règle générale n'avoir agi que par négligence; de tels cas se présentent principalement lors d'accidents de la circulation ou de délits créant un danger, collectif (cf. art. 221 ss CP). Pour de tels crimes, la peine ne paraîtra que très rarement inappropriée si l'auteur a agi intentionnellement,

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même s'il manifeste après coup du repentir ou de la contrition. Les actes commis par désespoir peuvent peut-être faire exception: ainsi la mère qui, voulant se suicider avec son enfant, échoue dans son entreprise alors que l'enfant meurt; ou encore le suicide préparé et mis à exécution par deux personnes, dont l'une décède alors que l'autre y survit et est punissable pour incitation et assistance au suicide (art. 115 CP). En cas de délits intentionnels, il est en revanche possible d'envisager d'exempter de poursuite ou de peine l'auteur qui, ce faisant, a subi des lésions corporelles d'une extrême gravité.

La nouvelle disposition vise des faits que l'on pourrait qualifier généralement de cas limites et pour la plupart desquels le simple sentiment de justice commande déjà que l'on renonce à toute poursuite pénale. Comme nous l'avons relevé précédemment, elle trouve sa justification première dans le fait que l'auteur est déjà suffisamment puni, autrement dit, que la fonction expiatoire de la peine est déjà remplie. Il est évident que l'exemption de peine ne peut être envisagée que si la poursuite pénale se révèle inappropriée à tous les points de vue imaginables, notamment sous l'angle de la prévention spéciale et générale.

Autorités compétentes Si les conditions en sont remplies, la nouvelle disposition autorise et oblige l'autorité compétente à s'abstenir de poursuivre l'auteur, de le renvoyer devant un tribunal ou de lui infliger une peine. De nombreux participants à la procédure de consultation ont rejeté cette formulation. Craignant que l'on en déduise que les organes de la police judiciaire peuvent renoncer, dès le stade de l'enquête préliminaire, à dénoncer une infraction au juge d'instruction, ils souhaitent que l'on supprime au moins le passage concernant l'exemption de «poursuite». A cet égard, il y a lieu de préciser qu'en dépit des dénominations adoptées dans les différents codes de procédure cantonaux, l'expression «autorités compétentes» vise exclusivement les organes chargés de l'administration de la justice, c'est-à-dire les autorités investies de la souveraineté judiciaire (autorités judiciaires), dont font notamment partie les autorités chargées de l'instruction et de la mise en accusation, ainsi que les autorités de jugement, mais qui n'englobent en aucun cas la police. La
commission d'experts avait d'ailleurs déjà posé la même condition. Le libellé proposé est nécessaire parce qu'il permet de tenir compte de toutes les particularités des codes cantonaux de procédure pénale, notamment et surtout en ce qui concerne la répartition des tâches entre les autorités d'instruction et de mise en accusation.

Certains adversaires de la nouvelle disposition vont plus loin encore et souhaitent que la compétence d'exempter de poursuite ou de peine soit attribuée uniquement au juge du fond. Ils estiment en effet que celui-ci est seul à même de décider du caractère approprié ou non d'une peine, qui est une question d'appréciation des plus difficiles. La disposition proposée ouvrirait une brèche dans le système actuel du code pénal qui, dans plusieurs de ses dispositions, fait du juge l'autorité exclusivement compétente pour décider si, sous certaines conditions, il convient de renoncer à infliger une peine.

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Donner une telle compétence aux autres autorités chargées de la poursuite pénale constitue certes une nouveauté pour notre code, mais ce n'en est pas une pour la législation pénale accessoire, où les termes «autorités compétentes» sont déjà employés à plusieurs reprises (ainsi à l'art. \9a, ch. 2, de la loi sur les stupéfiants; RS 812.121). En outre, le droit pénal des mineurs utilise toujours l'expression «autorités compétentes». Il serait par ailleurs absurde de dénier au juge d'instruction et au ministère public toute compétence de statuer sur des questions aussi importantes, alors que ces mêmes autorités doivent chaque jour décider si, dans tel ou tel cas, il convient d'ouvrir une procédure pénale ou d'y surseoir, du fait de l'absence d'acte punissable en raison de faits justificatifs (tels que la légitime défense ou l'état de nécessité) ou d'autres motifs entraînant l'exemption de poursuite ou de peine, comme la prescription. Toutes ces décisions sont souvent aussi importantes, aussi délicates que celles qu'ils seraient amenés à prendre à l'avenir en vertu de l'article 66bls.

En outre, les considérations qui précèdent contredisent déjà la thèse selon laquelle la réglementation des compétences proposée conduira probablement à une plus grande insécurité juridique et à l'inégalité de traitement.

Celui qui soutient une telle argumentation devrait alors, pour être conséquent, exiger que l'on restreigne également les compétences que le droit actuel attribue aux autorités d'instruction et de mise en accusation dans des cas tout aussi complexes. On a toutes les raisons d'admettre que ni le juge d'instruction, ni le ministère public ne renonceront à la légère à poursuivre une infraction et que, dans le doute, ils laisseront au juge du fond le soin d'en décider. Toutefois, dans les cas où il appert d'emblée qu'une peine est inappropriée, il est souhaitable que le juge d'instruction ait la possibilité de renoncer à toute poursuite, afin d'épargner à l'intéressé les longueurs et le coût d'une procédure qui, suivant les circonstances, pourrait s'avérer aussi pénible qu'un jugement. En outre, cette solution, qui répond au souci d'économie de procédure, est également dans l'intérêt de l'Etat. Enfin, il est permis de supposer que les cas de ce genre seront rares ou, du moins, ne feront pas partie du quotidien
des autorités judiciaires.

Prescription obligatoire ou pouvoir d'appréciation Si l'autorité compétente parvient à la conclusion que l'auteur est atteint par les conséquences de son acte à tel point qu'une peine paraît inappropriée, elle doit renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant un tribunal ou à lui infliger une peine. Certains participants à la procédure de consultation ont contesté cette obligation, lui préférant une prescription facultative qui laisserait à l'autorité compétente toute latitude d'appréciation et qui ne la contraindrait pas, dans les cas de crimes particulièrement graves, à renoncer à infliger une peine. Cependant, le fait de lier l'exemption de poursuite ou de peine au caractère inapproprié de cette dernière rend toute formulation potestative superflue. Celle-ci serait d'ailleurs parfaitement contradictoire: elle permettrait à l'autorité compétente de continuer la procédure et d'infliger une peine qu'elle considérerait pourtant comme inappropriée.

C'est précisément ce que la nouvelle disposition veut éviter: l'autorité com-

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petente doit renoncer à toute peine lorsque celle-ci s'avère véritablement inappropriée; de même, elle renoncera à continuer toute procédure au cours de laquelle elle aura acquis la conviction qu'une peine serait inadéquate. Pour parvenir à une décision claire et fondée, l'autorité compétente peut et doit faire usage de son pouvoir d'appréciation pour interpréter les notions juridiques indéterminées que constituent les termes «atteint à un tel point» et «inappropriée». Si l'on avait adopté la formulation potestative, le juge aurait pu se soustraire à une telle décision et prononcer une condamnation fondée sur des critères arbitraires.

212 212.1

Homicides Assassinat (Art. 112)

Dans sa nouvelle version, l'article 112 comporte deux modifications par rapport au droit actuel: il donne, d'une part, une nouvelle définition des éléments constitutifs qui caractérisent l'assassinat, comme un homicide qualifié, particulièrement répréhensible; il prévoit, d'autre part, une sanction quelque peu atténuée.

La teneur actuelle de l'article 112 est insatisfaisante; selon cette disposition se rend coupable d'assassinat celui qui a tué dans des circonstances ou avec une préméditation dénotant qu'il est particulièrement pervers ou dangereux. Ces critères ont souvent suscité des difficultés dans la pratique et donné lieu à des interprétations que la doctrine a fortement critiquées à plusieurs reprises. Tout d'abord, les versions qu'en donnent les trois langues officielles divergent: les textes français et italien parlent respectivement de préméditation et de «premeditazione», le texte allemand de «Überlegung».

A cela s'ajoute que les interprétations données à cette disposition ne sont pas compatibles avec le principe «pas de peine sans culpabilité» qui régit notre code pénal. Ainsi le Tribunal fédéral a, dans plusieurs arrêts, décidé qu'il convenait d'interpréter la loi de manière littérale et que les éléments constitutifs de l'infraction que sont la perversité particulière et le caractère particulièrement dangereux de l'auteur sont des conditions alternatives et non cumulatives (cf. ATF 106 IV 344 et arrêts cités). Le caractère particulièrement dangereux de l'auteur suffit à faire du meurtre un assassinat; point n'est besoin que le crime dénote aussi le caractère particulièrement pervers de l'assassin ni, par conséquent, qu'il repose sur une faute. Le caractère dangereux de l'auteur peut se déduire de circonstances purement objectives sans rapport avec son intention, ce qui contrevient manifestement au principe du droit pénal fondé sur la culpabilité.

Le problème réside en outre dans le fait que, par circonstances dénotant le caractère pervers ou dangereux de l'auteur, la jurisprudence n'entend pas seulement les circonstances de l'acte proprement dites, c'est-à-dire celles qui ont présidé à l'acte ou les réflexions qui l'ont accompagné, mais aussi celles qui ont existé avant ou après l'acte, dans la mesure où l'on peut en tirer des conclusions quant à la personnalité de l'auteur à ce moment. Le risque est grand par conséquent que ce ne soit pas l'attitude de l'auteur au 1033

moment de l'acte face aux valeurs protégées par notre ordre juridique qui soit incriminée pour démontrer son caractère pervers, mais celle qu'il a eue longtemps avant l'acte ou bien après celui-ci. On impute ainsi à l'auteur une faute appréciée par rapport à la façon dont il mène sa vie (Lebensfiihrungsschuld) et ce en violation du principe qui veut que la faute soit déduite exclusivement de la commission de l'acte (Tatschuldprinzip). Il y a certes lieu de tenir compte des antécédents de l'auteur dans le cadre de la fixation de la peine selon l'article 63 CP mais non pas lors de la qualification de l'acte comme assassinat.

Ce sont ces lacunes que comble la nouvelle version de l'article 112. Puisqu'une solution compatible avec le principe «pas de peine sans culpabilité» ne peut être préconisée que si l'on exige que ce soit le caractère particulièrement pervers de l'auteur qui détermine son caractère dangereux, il n'y a pas lieu de faire expressément de celui-ci un élément constitutif de l'infraction. La version proposée ne se réfère donc qu'au caractère particulièrement pervers de l'auteur, qu'elle exprime toutefois en d'autres termes. Elle emploie l'expression d'«absence particulière de scrupules», condition qui sera réalisée notamment lorsque les mobiles, le but ou la façon d'agir de l'auteur sont hautement répréhensibles. Cet énoncé non exhaustif a pour but d'éviter au juge d'avoir à appliquer uniquement une clause générale (l'absence particulière de scrupules), dont l'interprétation et la délimitation pourraient lui causer de nouvelles difficultés. Cette énumération correspond aussi aux circonstances typiquement aptes à dénoter le caractère particulièrement pervers du crime commis, telles que la doctrine et la jurisprudence les ont déterminées dans le cadre du droit actuel.3) Comparée à la réglementation actuelle, l'énumération proposée met clairement en évidence que seules les circonstances mêmes de l'acte, c'est-à-dire celles qui sont en rapport immédiat avec sa commission, sont considérées comme pertinentes pour déterminer si les éléments constitutifs de l'assassinat sont réalisés. Cette solution est d'ailleurs la seule compatible avec le principe en vertu duquel la faute doit être déduite exclusivement de la commission de l'acte (Tatschuldprinzip) et qui régit notre code pénal. On s'est
efforcé de trouver une rédaction qui caractérise le mieux possible le type d'assassin décrit par le psychiatre Hans Binder: sans scrupule, agissant de sang-froid, d'un égoïsme primaire et odieux avec une absence quasi totale de tendances sociales, et qui, dans le but de poursuivre ses propres intérêts, ne tient absolument pas compte de la vie d'autrui.4) La proposition de la commission d'experts a été reprise sans modification.

Elle a rencontré une large approbation lors de la procédure de consultation. Les participants, peu nombreux, qui l'ont rejetée ont invoqué l'inutilité de la revision ou souhaité que l'on maintienne expressément le caractère particulièrement dangereux en tant que critère qualifiant l'assassinat. Les problèmes ainsi soulevés ne seraient pas d'une importance telle que l'on ne puisse s'en accommoder.

La réclusion à vie - peine que l'actuel article 112 CP rend imperative suscite depuis longtemps déjà des controverses. Ses adversaires la considè-

1034

rent comme peu compatible avec la politique, la psychologie et la pédagogie criminelles et la tiennent aussi pour inhumaine. Ses effets dépendant de l'âge du délinquant, elle ne se détermine pas d'après la faute afférente au cas particulier et est à l'origine de grandes inégalités. Prévue par la partie générale du code pénal (art. 35), sa raison d'être ne pourra être remise en question que dans le cadre d'une revision future de ladite partie générale. A l'instar de la commission d'experts, nous sommes d'avis que cette sanction, telle qu'elle est prévue actuellement, est trop rigide. Nous vous proposons par conséquent de donner au juge la possibilité de prononcer, en lieu et place de la réclusion à vie, une peine de réclusion d'une durée déterminée, mais en aucun cas inférieure à dix ans. Cette solution plus souple devrait permettre de restreindre considérablement l'ampleur des lacunes susmentionnées. De par la possibilité qui lui est ainsi offerte, le juge devrait être moins tenté d'admettre des causes d'atténuation de la peine - parfois quelque peu factices dans les cas d'assassinat - afin d'éviter d'avoir à prononcer une peine de réclusion à vie. Les statistiques criminelles montrent d'ailleurs que, même sous l'empire du droit actuel, l'assassin est rarement condamné à la réclusion à vie.

Les critiques émises lors de la procédure de consultation à l'égard de cette sanction plus souple ont été plus nombreuses que celles qui ont accompagné la nouvelle formulation des éléments constitutifs de l'infraction. Une partie de ses adversaires rejettent le principe même d'un assouplissement de la sanction rigide prévue actuellement. Ils craignent que par le biais des causes d'atténuation, on ne prononce des peines sensiblement inférieures aux dix ans prévus. A leurs yeux, ce serait montrer une mansuétude déplacée face à l'augmentation constante des actes de violence criminels et compte tenu du fait que seuls les délits d'homicide les plus graves et dénotant la plus grande absence de scrupules doivent être qualifiés d'assassinat; on effacerait ainsi toute frontière entre assassinat et meurtre et la classification des délits d'homicide en trois types perdrait toute signification. D'autres participants à la procédure de consultation, tout en approuvant l'assouplissement de la sanction, proposent toutefois
une peine minimale supérieure (soit 12 ou 15 ans). Malgré ces objections, nous nous en tenons à la peine minimale de dix ans. Elle nous paraît d'autant plus justifiée et appropriée qu'elle constitue la peine minimale la plus lourde de tout le code pénal, et représente le double de celle prévue pour le meurtre.

212.2

Meurtre par passion (Art. 113)

La seule modification matérielle subie par l'article 113 réside dans le complément apporté à sa teneur actuelle: se rendra dorénavant coupable de cette forme privilégiée d'homicide non seulement celui qui aura tué alors qu'il était en proie à une émotion violente et que les circonstances rendaient excusable, mais aussi celui qui, au moment de l'acte, était dans un «profond désarroi». Cette formulation englobe ainsi des situations dans lesquelles l'auteur n'a agi ni par passion ni sous l'effet de pressions aiguës qui se se1035

raient manifestées de manière relativement subite, mais dans un état d'émotion qui a mûri pendant une longue période, progressivement, et qui est tout aussi excusable. Il s'agit donc d'états psychiques chroniques qui, pour ainsi dire, couvent pendant longtemps jusqu'à ce que l'auteur soit complètement désespéré et n'y voie d'autre issue que l'homicide. On citera pour exemple la mère qui se résout à tuer son enfant incurable parce qu'elle n'en peut plus de le voir souffrir et, surtout, ne peut plus endurer la situation qui s'y rattache. De tels états de profond désarroi pourraient également avoir pour origine des liens ou des rapports familiaux complètement perturbés.

Ce complément apporté aux éléments constitutifs du meurtre par passion se justifie d'autant plus que le législateur entendait manifestement, lors de l'élaboration de la disposition actuelle, y soumettre aussi des situations telles que celles décrites ci-dessus. On trouve en effet à plusieurs reprises dans les travaux préparatoires l'exemple de la veuve qui, dans le plus complet dénuement, se jette à l'eau avec son enfant. Dans la pratique, l'article 113 CP a d'ailleurs été occasionnellement appliqué dans des cas d'homicides commis dans de telles situations. Le complément proposé devrait permettre de voir plus clair dans l'application de cette disposition.

La nouvelle teneur de l'article 113, qui reprend l'avant-projet de la commission d'experts, a reçu un très bon accueil lors de la procédure de consultation. Seuls quelques participants estiment le complément inutile ou regrettent son libellé qui, trop large, rend, à leur avis, les éléments constitutifs de l'infraction trop vagues. Ils craignent que, dans de tels cas, toute la responsabilité du jugement ne soit transférée sur les épaules du psychiatre appelé à titre d'expert; le meurtre par passion perdrait ainsi le caractère exceptionnel que lui confère la classification des délits d'homicide en trois types; les cas qu'il vise pourraient être jugés de manière tout aussi équitable, si l'on faisait appel aux circonstances atténuantes de l'article 64 CP; par ailleurs, on devrait pour le moins préciser que l'auteur ne doit pas avoir lui-même causé l'état de profond désarroi dans lequel il s'est trouvé.

Après un examen approfondi, nous-ne partageons pas ces réserves d'autant moins que nous avons exposé, avec plus de précision encore que dans le rapport de la commission d'experts, les situations que vise le complément proposé.

212.3

Meurtre sur la demande de la victime (Art. 114)

L'article 114 CP a fait lui aussi l'objet d'une proposition visant à le compléter. Celui qui, sur la demande d'une personne, lui aura donné la mort ne tombera dorénavant sous le coup de cette forme privilégiée de meurtre que si, ce faisant, il a cédé «à un mobile honorable, notamment à la pitié».

Cette définition plus restrictive des éléments constitutifs de l'infraction devrait mieux répondre au principe du droit pénal fondé sur la culpabilité que la disposition actuelle, aux termes de laquelle il faut et il suffit que 1036

l'auteur ait agi à la demande de la victime. Si cette condition est remplie, l'auteur n'encourt aujourd'hui qu'une peine de trois ans d'emprisonnement au plus, indépendamment du mobile, honorable ou non, auquel il a cédé pour réaliser le voeu de la victime. Cette réglementation n'est manifestement pas compatible avec l'article 1 15 CP, qui punit de cinq ans de réclusion au plus ou de l'emprisonnement celui qui, poussé par un mobile égoïste, aura incité une personne au suicide ou lui aura prêté assistance à cette fin. La disproportion paraît plus évidente encore si l'on songe que, dans ce dernier cas, la victime reste libre de décider si elle veut ou non se donner la mort, alors qu'en cas de meurtre sur demande, puni bien moins sévèrement, il s'agit d'un véritable homicide intentionnel. Il est dès lors justifié que seul celui qui a cédé à un mobile honorable soit privilégié. La disposition proposée le précise en citant à titre d'exemple le motif de la pitié.

Cette innovation est également reprise de l'avant-projet de la commission d'experts. Elle a été approuvée à la quasi-unanimité lors de la procédure de consultation.

En remplaçant l'expression «ernstliches und dringendes», qualifiant la demande, par «ernsthaftes und eindringliches», nous avons voulu adapter le texte allemand au langage actuel. Cette modification rédactionnelle a aussi quelque incidence du point de vue matériel. L'adjectif «eindringlich» exprime en effet plus clairement ce que la demande de la victime doit avoir eu d'instant et d'intense pour exercer une pression réelle sur l'auteur. Ces considérations n'ont cependant aucune influence sur le libellé du texte français. La commission d'experts avait, dans un premier temps, adopté la formulation actuelle. Elle l'a abandonnée, estimant que caractériser la demande de la victime de «sérieuse» était suffisant, le terme «instante», déjà compris dans cette expression, n'apportant rien de nouveau. Nous avons craint que cette formulation soit mal interprétée, notamment que l'on en déduise que la demande de la victime n'a plus besoin d'être aussi insistante qu'auparavant pour que cet élément soit réalisé. Cette crainte, plusieurs participants à la procédure de consultation l'ont d'ailleurs exprimée.

Dans ce contexte, nous avons aussi été confrontés au problème de l'euthanasie et de la
nécessité d'édicter une disposition qui définisse les limites de sa punissabilité. La commission d'experts avait décidé d'entrée de cause qu'une telle prescription pouvait tout au plus se concevoir pour l'euthanasie passive - c'est-à-dire le fait de s'abstenir de tout acte médical susceptible de prolonger la vie d'un malade incurable, proche de la mort et qui endure de graves souffrances - mais qu'il était exclu d'y réglementer l'euthanasie active - soit l'homicide par le fait d'abréger la vie du malade - qui, dans quelque circonstance que ce soit, est un acte inacceptable et qui doit rester punissable. Elle a toutefois convenu qu'il fallait examiner dans chaque cas s'il y avait des causes d'atténuation de la peine au sens de l'article 64 CP ou si on se trouvait en présence d'une forme privilégiée d'homicide (meurtre par passion ou sur la demande de la victime). Nous partageons sans réserve la position de la commission d'experts. Nous avons d'ailleurs déjà exprimé notre opinion à ce sujet en maintes autres circonstances.5' Après un examen approfondi des aspects les plus importants de ce problème, la com70 Feuille Icdérale. 137e année. Vol. II

1037

mission d'experts est parvenue à la conclusion qu'admettre ou non l'euthanasie passive dépendait à tel point des circonstances du cas d'espèce qu'il était impossible d'élaborer une norme générale qui soit satisfaisante; elle n'offrirait d'ailleurs qu'un semblant de sécurité juridique. Il incombe en fait au médecin de décider à la lumière des circonstances du cas d'espèce quelles mesures sont indispensables ou inutiles. Nous partageons cette opinion qui, du reste, n'a pas été contredite lors de la procédure de consultation.

212.4

Infanticide (Art. 116)

Cet article subit une seule modification: la mère qui aura tué son enfant dans les conditions prévues par cette disposition bénéficiera dorénavant d'une peine plus douce. Puni actuellement de la réclusion pour trois ans au plus ou de l'emprisonnement pour six mois au moins, l'infanticide ne sera désormais passible que d'une peine d'emprisonnement sans durée minimale. Notre proposition en fait donc un délit et non plus un crime. Prévoir pour cette infraction une peine maximale de trois ans de réclusion en lieu et place de trois ans d'emprisonnement n'a en effet plus guère de sens, puisque la revision partielle de 1971 du code pénal a supprimé toute différence entre l'exécution de la réclusion et de l'emprisonnement (cf. art. 37 CP).

Quant à la suppression de la peine minimale, elle s'inscrit dans la tendance actuelle en la matière. Enfin, il y a lieu de relever qu'il existe une différence, à peine explicable, avec l'article 115 (incitation et assistance au suicide) qui prévoit une peine maximale mais ne prescrit aucune peine minimale.

Cette modification de l'article 116 - qui correspond à la proposition de la commission d'experts - s'est heurtée à l'opposition d'une minorité de participants à la procédure de consultation. Transformer ce crime en délit équivaut, pour certains, à supprimer la protection que la loi offre actuellement aux nouveau-nés; l'infanticide n'en reste pas moins un homicide que l'actuel article 116 privilégie déjà suffisamment à leur avis. Ces arguments, un autre groupe, de même importance numérique, les a également invoqués à rencontre de la suppression de la peine minimale; il se réfère aussi à la peine qui sanctionne certaines infractions contre le patrimoine. Quelques autres participants proposent au contraire d'étendre le cadre de la peine aux arrêts et même de prévoir la possibilité, dans certaines circonstances, de renoncer à toute peine. Mais c'est en définitive une majorité qui s'est dégagée en faveur de la proposition reprise de la commission d'experts, certains participants soulignant expressément la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve une mère pendant et peu après l'accouchement.

Enfin, de la définition des éléments constitutifs de l'infanticide seul le mot «intentionnellement» a été supprimé. Il est en effet superflu puisque l'article 18, 1er alinéa,
CP prévoit que, sauf disposition expresse et contraire de la loi, est seul punissable celui qui commet intentionnellement un crime ou un délit. Cette modification, purement rédactionnelle, allait donc de soi.

Elle n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune opposition lors de la procédure de consultation.

1038

212.5

Homicide par négligence (Art. 117)

Point n'est besoin, à notre avis, de modifier la teneur actuelle de l'article 117, qui régit l'homicide par négligence. La commission d'experts avait certes proposé de compléter cette disposition par un second alinéa qui, suivant la formule de l'article 66bls, prévoyait l'exemption de poursuite ou de peine en cas de négligence particulièrement légère. Elle pensait avant tout aux accidents de circulation, où c'est souvent le fait du hasard que la faute commise provoque ou non une lésion; en cas de faute légère, la punition pour infraction à la loi sur la circulation routière devrait par conséquent suffire. Elle estimait aussi qu'une telle disposition était susceptible de décharger les autorités de poursuite pénale du soin de décider, dans les cas limites, si oui ou non une négligence légère était à l'origine de l'homicide.

Elle aurait ainsi incité les justiciables à engager moins de procès pénaux et à faire valoir leurs prétentions par la voie civile. Tout en admettant que cette disposition ressortissait plutôt à la partie générale du code pénal, la commission avait toutefois renoncé à l'y insérer, estimant que ses effets sur le droit pénal accessoire étaient peu clairs et méritaient encore un examen approfondi.

Cette proposition a été rejelée par la majorité des participants à la procédure de consultation, essentiellement pour les motifs suivants: la notion nouvelle de négligence particulièrement légère risquerait de se heurter à de nombreuses difficultés dans la pratique et de compromettre la sécurité juridique; elle peut, aujourd'hui déjà, être prise en considération lors de la fixation de le peine; la possibilité d'exempter de poursuite ou de peine devrait par conséquent être prévue pour d'autres infractions également; la disposition devrait être insérée dans la partie générale du code, de manière que les contrevenants aux règles de la circulation routière n'en soient pas les seuls bénéficiaires. Plusieurs participants ont en outre - comme dans le cadre de l'article 66bis - émis le souhait que le juge soit seul autorisé à décider de l'exemption de poursuite ou de peine.

La question de savoir s'il convient d'introduire un tel motif d'exemption de poursuite ou de peine doit en effet être examinée dans le cadre de la revision de la partie générale du code pénal. Limiter ce privilège aux cas
d'homicide par négligence ou de lésions corporelles par négligence est difficilement justifiable. En outre, une telle disposition ne déchargerait pas le juge des cas limites souvent ardus. Le problème ne serait que déplacé et il n'y aurait plus lieu d'examiner s'il y a eu absence de faute ou négligence particulièrement légère, mais de distinguer cette dernière de la négligence simplement légère.

213 213.1

Lésions corporelles Lésions corporelles graves (Art. 122)

L'article 122 - qui sanctionne les lésions corporelles graves - fait tout 1039

d'abord l'objet de deux modifications purement linguistiques et qui ne concernent que le texte allemand: nous vous proposons de remplacer le terme de «Körperteil» par celui de «Körper» et l'adjectif «siech» par «gebrechlich», expression plus compréhensible et plus moderne. Tout comme le terme français «infirmité», elle englobe toutes les maladies et autres préjudices durables portés à la santé, tels que des empoisonnements, voire la toxicomanie.

Notre seconde proposition apporte en revanche une modification matérielle essentielle à l'article 122: elle vise en effet à en supprimer purement et simplement le chiffre 2, qui dispose que la peine sera aggravée si la victime est morte des suites de la lésion et si le délinquant avait pu le prévoir. Il s'agit en fait d'une infraction punie selon son résultat et qui se compose d'un délit de base intentionnel dont les conséquences graves sont dues à la négligence. Cette disposition - comme d'autres d'ailleurs - est une survivance de la «répression fondée sur le résultat», qui contrevient aux principes du droit pénal fondé sur la culpabilité. Si donc l'auteur n'a voulu causer que des lésions corporelles sans que jamais son intention ait été de donner la mort, le résultat produit ne peut, s'il était prévisible, lui être imputable qu'au titre de la négligence. La seule solution compatible avec le principe de la culpabilité serait, par conséquent, de le condamner pour lésions corporelles graves et pour homicide par négligence, conformément aux dispositions de l'article 68, chiffre 1, CP sur le concours. Il ne serait ainsi passible que d'une peine maximale de 15 ans de réclusion, alors qu'aux termes du chiffre 2 de l'article 122 - que nous vous proposons précisément de supprimer - il encourt une peine allant jusqu'à 20 ans de réclusion. Toutefois, si l'auteur a admis l'idée que ses actes pouvaient entraîner la mort de la victime et a accepté de courir ce risque (dol éventuel), c'est l'article 111 CP (meurtre) qui s'applique.

En renonçant au chiffre 2 de la disposition actuelle, on respecte aussi mieux la logique et la systématique de notre code pénal, qui est fondé sur la hiérarchie des biens juridiques qu'il protège: ainsi, les actes intentionnels contre la vie sont en principe passibles de la réclusion jusqu'à 20 ans, ceux qui, intentionnellement, ne visent
«qu'à» provoquer des lésions corporelles, jusqu'à 15 ans de réclusion.

La proposition d'abroger le chiffre 2 de l'article 122 CP émane de la commission d'experts. Elle n'a rencontré que peu d'opposition lors de la procédure de consultation. Ses adversaires estiment que la prescription du chiffre 2 permet de parer aux cas graves et qu'elle ne devrait pas être supprimée sans nécessité; d'autant moins si les actes tombant sous le coup de cette disposition se rapprochent des infractions commises par dol éventuel. D'autres craignent aussi que l'auteur ne soit jugé avec trop d'indulgence, parce qu'en pratique on hésitera à appliquer les articles 122 et 117 CP cumulativement. Dans le même ordre d'idées, on reproche en outre à notre proposition d'être inconséquente. Cet argument n'est pas pertinent. Toutes les dispositions qui concernent la présente revision et qui consacrent encore des infractions punies en fonction du résultat (art. 123, ch. 2 et 3; 127, ch. 2; 129, 3e al.; 134, ch. 1, 2e et 3e al.; 135, ch. 1, 2e et 3e al.; 195) doivent elles

1040

aussi être supprimées. Quant à l'issue mortelle prévue aux articles 133 (rixe) et 134 (agression) du projet, elle constitue une condition objective de la punissabilité des actes qui y sont sanctionnés et a donc une tout autre signification (cf. ch. 214.4). D'une manière ou d'une autre, on ne saurait justifier le maintien de ces dispositions .ou d'autres prescriptions similaires, pour le motif que les actes qu'elles sanctionnent se rapprochent des infractions commises par dol éventuel. Cette argumentation contreviendrait, elle aussi, au principe de la culpabilité. Notre droit pénal ne connaît d'ailleurs aucune autre forme de culpabilité qui vienne s'insérer entre la négligence et l'intention (y compris le dol éventuel). Lorsque l'intention ne peut être prouvée, l'auteur reste tout au plus punissable pour négligence. Mais en cas de difficultés de preuve, il ne saurait être question d'instaurer des peines légèrement plus modérées pour les faits qui ne reposent que sur de simples présomptions d'intention. Pour toutes ces raisons, nous sommes convaincus du bien-fondé de notre proposition de supprimer le chiffre 2 de l'article 122.

213.2

Lésions corporelles simples (Art. 123)

L'actuel article 123 relatif aux lésions corporelles simples subit un certain nombre de modifications. La plus frappante est certainement l'abandon des infractions qualifiées en raison du résultat, prévues aux chiffres 2 et 3. Ces dispositions prévoient des peines plus sévères à rencontre de celui qui a causé des lésions corporelles graves ou la mort de la victime alors qu'il n'avait l'intention de causer que des lésions simples mais qu'il aurait pu prévoir ce résultat plus grave. Les motifs de cette suppression sont les mêmes que ceux invoqués à l'appui de l'abandon du chiffre 2 de l'article 122 (cf. ch. 213.1).Dans les cas mentionnés ci-dessus, l'application de l'article 68, chiffre 1, CP sur le concours, qui lie le juge au maximum légal du genre de peine, ne permettra désormais de prononcer que des peines maximales de trois ans d'emprisonnement, car les dispositions relatives à l'homicide par négligence et aux lésions corporelles par négligence (art. 117 CP et art. 125 du projet) prévoient comme l'article 123 l'emprisonnement comme peine maximale. En outre, l'infraction ne sera poursuivie d'office que si la victime est décédée.

Quant à la proposition de scinder le 1er alinéa du chiffre 1 en deux alinéas, elle n'apporte aucune modification matérielle, mais vise simplement à mettre en évidence le fait qu'il s'agit de deux questions fondamentalement différentes.

Le délit qualifié défini à l'heure actuelle par l'alinéa 2 du chiffre 1 devient à présent le chiffre 2 et a été, du point de vue matériel, complété dans une mesure importante. Outre le poison et les armes, il prévoit non plus l'usage d'un «instrument» dangereux, mais d'un «objet» dangereux. En effet, la teneur de la disposition actuelle est équivoque, car la jurisprudence a depuis fort longtemps et à juste titre admis qu'il ne fallait pas entendre exclusivement les intruments au sens technique du terme. Dans un arrêt récent 1041

(ATF 707 IV 285), le Tribunal fédéral a qualifié d'instrument dangereux un verre à bière, lancé d'une distance de 4 m, et qui avait pour cible la tête de la victime.

Par ailleurs, aux termes du nouveau chiffre 2, la poursuite pour lésions corporelles simples aura lieu d'office non seulement si l'auteur s'en est pris à une personne hors d'état de se défendre, mais aussi lorsque la victime est une personne, notamment un enfant, dont il avait la garde ou sur laquelle il avait le devoir de veiller. Ce complément est emprunté au chiffre 1 de l'article 127 CP, qui réprime l'exposition au danger. Il a pour but de mieux protéger les enfants contre les mauvais traitements, si tant est que cet objectif puisse être atteint par le biais du droit pénal. Une protection pénale efficace des enfants maltraités exige en effet une dénonciation rapide aux autorités, ce qui est rarement le cas. Par ailleurs, l'expérience montre que la plupart des mauvais traitements infligés aux enfants sont le fait de leurs parents, leurs instituteurs ou autres éducateurs. Ceux-ci ne sauraient justifier leurs agissements en faisant appel à leur droit de correction: l'éducation d'un enfant ne justifie jamais qu'on lui inflige des lésions corporelles.

Ce complément rend superflu l'article 134, chiffre 1, 1er alinéa, CP, dans la mesure où il se réfère aux atteintes portées à la santé d'un enfant du fait des traitements infligés par les éducateurs (cf. ch. 214.7). Enfin, le nouvel article 123, chiffre 2, 3e alinéa, protège également les adultes qui dépendent de l'auteur en raison des soins dont ils ont besoin, par exemple les pensionnaires d'asiles de vieillards ou les personnes hospitalisées. La disposition s'appliquera d'ailleurs à toute personne qui se trouve à la garde d'une autre ou au bénéfice d'une assistance effective; point n'est besoin que celles-ci se fondent sur le droit de famille.

Ces modifications sont calquées sur les propositions faites par la commission d'experts. Elles ont trouvé un écho très positif lors de la procédure de consultation. Quelques rares critiques ont été émises à rencontre de la sanction prévue qui, comparée à l'article 134 - pourtant repris dans la présente disposition - serait trop douce. Nous ne pouvons nous rallier à ces objections. En effet, si la lésion corporelle subie est grave, elle tombe
sous le coup de l'article 122, qui prévoit une peine allant jusqu'à dix ans de réclusion; lorsque l'enfant meurt des suites des mauvais traitements infligés, le juge peut même, en vertu de l'article 68, chiffre 1, CP, prononcer une peine de 15 ans de réclusion.

D'autres participants, peu nombreux, ont déploré que le champ d'application de l'article 123, chiffre 2, 3e alinéa, de l'avant-projet soit plus étroit que celui de l'article 134 CP, qui, outre les dommages infligés à un enfant, englobe aussi sa mise en danger grave ainsi que la commission de l'infraction par le simple fait de négliger l'enfant. En ce qui concerne la mise en danger, force est de constater que l'article 134 CP est resté inefficace, notamment parce qu'il est difficile en pratiqué d'apporter la preuve de l'intention (cf. ch. 214.7). Par ailleurs, il ne fait aucun doute que l'article 123, chiffre 2, 3e alinéa, vise également toute commission par omission c'est-à-dire le fait de négliger l'enfant - si celle-ci était intentionnelle et a provoqué véritablement des lésions corporelles.

1042

Enfin, certaines réserves ont été émises à l'égard de la suppression totale de l'article 134 sur les mauvais traitements et la négligence envers les enfants et son incorporation à l'article 123, chiffre 2, 3e alinéa. Elles sont motivées par la crainte qu'à la suite de l'abandon de toute interdiction expresse et directe des mauvais traitements envers les enfants, l'effet de prévention soit moindre. Nous comprenons ces réserves et en avons tenu compte, de sorte que nous avons ajouté à la version proposée par la commission d'experts le passage «notamment à un enfant». S'il ne change rien au contenu matériel de la disposition, il met en évidence que, parmi les personnes qui se trouvent sous la garde de l'auteur ou sur lesquelles celui-ci a le devoir de veiller, on a surtout pensé aux enfants maltraités.

213.3

Conséquences fortuites d'une lésion corporelle (Art. 124: abrogation)

L'article 124 CP doit être purement et simplement supprimé. Il dispose que «lorsque le délinquant aura causé un résultat qu'il n'avait pas voulu et qu'il n'avait pu prévoir, il sera puni pour la lésion qu'il avait voulu faire subir».

Cette disposition ne fait donc que confirmer, pour les lésions corporelles, le principe essentiel qui régit notre code pénal et qui veut qu'il n'y ait pas de peine sans culpabilité. Consacré à l'article 18 CP, ce principe signifie que personne ne peut être puni en raison des conséquences d'un acte qui ne peuvent lui être imputées à faute, c'est-à-dire qu'il n'a provoquées ni intentionnellement ni par négligence. L'article 124 est donc superflu. Son maintien ne contribuerait pas à préciser le principe susmentionné mais aurait même l'effet contraire. Sa suppression a d'ailleurs fait la quasi-unanimité des participants à la procédure de consultation.

213.4

Lésions corporelles par négligence (Art. 125)

L'article 125 - qui régit la punissabilité des lésions corporelles - dispose à son 2e alinéa que le délinquant sera poursuivi d'office si la lésion est grave.

Nous vous proposons de supprimer cet alinéa. Ainsi, qu'elles soient graves ou non, les lésions corporelles par négligence ne pourraient dorénavant être poursuivies que sur plainte. Cette modification est souhaitable tout d'abord parce que, dans les cas de négligence, la gravité de la lésion dépend le plus souvent du hasard. La distinction que l'on fait aujourd'hui entre lésions corporelles légères ou graves est un vestige du système de répression fondée sur le résultat.

Il faut avouer ensuite qu'il est souvent difficile pour les autorités de poursuite pénale de déterminer s'il y a eu lésion corporelle grave au sens de la loi et, partant, si la poursuite doit avoir lieu d'office. Dans la plupart des cas, cette décision ne peut être prise sans rapport médical, ce qui présuppose que le blessé ait délié son médecin du secret professionnel. Dans le cas contraire, les divers critères que le Tribunal fédéral a retenus comme déterminants pour établir s'il y a lésion corporelle grave - tels la très lon1043

gué durée ou la gravité de la maladie ou encore le traitement qu'elle nécessite - ne sont en règle générale pas d'un grand secours; la décision d'ouvrir ou non une poursuite d'office doit en effet, dans la plupart des cas, être prise relativement rapidement. Il est vrai que l'on se heurte à des difficultés du même ordre en matière de lésions corporelles intentionnelles. Car dans ce cas aussi, il peut dépendre du degré de la lésion subie que l'on se trouve en présence d'un délit poursuivi d'office ou sur plainte. Cette situation doit néanmoins être tolérée car la faute beaucoup plus lourde - conséquence de l'intention - dont résultent les lésions corporelles graves implique que celles-ci soient poursuivies d'office. En cas de doute sur la gravité de la lésion subie, il est nécessaire de chercher à l'établir immédiatement. En cas de simple négligence en revanche, il paraît plus judicieux de n'entreprendre des recherches approfondies sur l'état de santé de la victime que si celle-ci démontre, en déposant plainte pénale, son intention d'introduire une procédure et d'en supporter les atteintes inévitables à sa vie privée.

La poursuite n'ayant plus lieu d'office, l'auteur de lésions corporelles par négligence restera impuni si le lésé ne porte pas plainte. Le risque est toutefois moindre, car le même état de fait réunit souvent aussi les éléments constitutifs d'autres infractions, comme la violation des règles de la circulation routière (art. 90, ch. 1 et 2 LCR) ou des mises en danger collectif (art.

222, 223, 225, 227 à 231, 234, 237 et 238 CP) qui, même s'il n'y a que négligence, sont toutes poursuivies d'office. Dans tous ces cas, il est évident qu'on relèvera tous les indices importants pour la cause, y compris ceux concernant la lésion corporelle. On ne saurait y manquer sous prétexte qu'aucune plainte pénale n'aurait encore été déposée. D'ailleurs il n'est pas toujours possible d'établir dès le début si un acte a été commis intentionnellement ou par négligence. Dans les cas manifestes de lésions corporelles graves, on doit procéder aux investigations nécessaires et consigner tous les indices. Et si, suite aux lésions graves qu'elle a subies, la victime devait rester inconsciente ou incapable de discernement pendant un certain temps, son droit de porter plainte ne se prescrirait pas. Aux termes
de l'article 29 CP, le délai de plainte ne court en effet que du jour où l'ayant droit connaît l'infraction et son auteur. Par ailleurs, si l'incapacité de discernement devait durer plus longtemps ou même devenir définitive, l'article 28, 2e alinéa, CP prévoit que le droit de porter plainte appartient alors au représentant légal du lésé ou, si ce dernier est sous tutelle, à l'autorité tutélaire.

Ces considérations nous ont confortés dans la décision de maintenir notre proposition, qui reprend Pavant-projet de la commission d'experts, et nous semble plus convaincante que les très nombreuses objections formulées par ses adversaires lors de la procédure de consultation. Ces derniers estiment que cette modification va à l'encontre des intérêts de la victime qui, souvent, ne serait que diminuée dans sa capacité d'agir sans pour autant être incapable de discernement; de plus, il est fréquent que les conséquences graves d'une lésion corporelle n'apparaissent qu'après un certains temps; une lésion grave pourrait compromettre la sécurité juridique de manière importante et il ne faudrait d'autre part pas sous-estimer l'effet dissuasif de la poursuite d'office; notre proposition serait en outre en contradiction avec

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la tendance jadis manifestée à supprimer le principe même de la plainte partout où l'on risque d'en abuser à titre de représailles; les lésions corporelles graves causées par négligence étant le corollaire de l'homicide par négligence sanctionné par l'article 117 CP, il conviendrait, ne serait-ce que par souci d'égalité de traitement, de maintenir la poursuite d'office. Telle qu'elle est exprimée, cette dernière comparaison nous parait erronée. Pour le reste, nous renvoyons au commentaire ci-dessus.

Comme pour l'homicide par négligence, la commission d'experts proposait ici aussi de renoncer à toute poursuite en cas de négligence particulièrement légère. Nous n'avons pas repris cette proposition, pas plus que nous ne l'avons acceptée pour l'article 117 (cf. ch. 212.5).

213.5

Voies de fait (Art. 126)

L'article 126 comprend désormais deux alinéas: le premier reprend la disposition actuelle sans la modifier. Quant au second, il prévoit que les voies de fait seront poursuivies d'office si le délinquant a agi à réitérées reprises contre une personne dont il avait la garde ou sur laquelle il avait le devoir de veiller. Cette formule est semblable à celle adoptée pour les lésions corporelles simples qualifiées (art. 123, ch. 2, 3e al; cf. ch. 213.2). Ces deux dispositions ont avant tout pour but d'assurer une meilleure protection des enfants contre les mauvais traitements. Elles remplacent l'article 134 CP (cf. ch. 214.7). C'est précisément pour des situations de ce genre qu'il est impérieux de développer la protection pénale des enfants, puisque le Tribunal fédéral ne considère pas les voies de fait comme susceptibles à elles seules de constituer un mauvais traitement au sens de l'article 134, chiffre 1er, 1er alinéa, CP (cf. ATF 80 IV 107 et S5 IV 126). Dorénavant, pour qu'elles tombent sous le coup du nouvel article 126, 2E alinéa, les voies de fait devront avoir été commises à réitérées reprises, c'est-à-dire avoir été perpétrées plusieurs fois sur la même victime et dénoter une certaine habitude.

Répétées, ces voies de fait s'apparentent aux mauvais traitements par les effets hautement préjudiciables qu'elles peuvent avoir sur le psychisme des enfants.6) Le 2e alinéa remplace, comme nous l'avons déjà relevé, l'article 134 CP. Tout comme le nouvel article 123, chiffre 2, 3e alinéa, la protection prévue par l'article 126, chiffre 2, s'étendra non seulement aux enfants, mais aussi aux adultes qui dépendent de l'auteur en raison des soins dont ils ont besoin.

Cette modification - qui reprend intégralement la proposition de la commission d'experts - s'est heurtée à quelques objections lors de la procédure de consultation. Mais il ne s'est trouvé que très peu de participants pour rejeter complètement le nouvel alinéa 2. On a cependant demandé à plusieurs reprises que le droit de correction des parents soit expressément réservé. Nous estimons que cette réserve est tout à fait superflue. En ce qui concerne les parents, ce droit se déduit notamment de l'article 302 du code civil (CC). Dans la mesure où le droit de correction existe, son impunité est garantie par l'article 32 CP (actes licites). Prévoir une réserve expresse ne

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serait d'ailleurs pas indiqué, puisque la norme s'applique, comme nous l'avons déjà mentionné, aussi aux adultes dont l'auteur a la garde et envers lesquels ce dernier n'a bien évidemment aucun droit de correction.

Les quelques participants qui rejettent totalement la nouvelle disposition craignent que cette dernière n'engendre une ingérence indésirable de l'Etat dans la vie familiale et l'éducation des enfants. A leur avis, elle risque de multiplier les dénonciations infondées et abusives contre les parents et autres éducateurs. Ils font en outre valoir qu'il sera très difficile aux autorités de distinguer entre voies de fait permises et interdites dans le domaine de l'éducation des enfants.

Nous ne pouvons en aucune manière partager ces doutes. Ce serait sous-estimer les autorités de poursuite pénale. Fortes de leur expérience, elles sont parfaitement à même, dans un laps de temps relativement court, de distinguer entre les plaintes fondées ou non, d'une part, et de reconnaître, d'autre part, les excès manifestes du droit de correction. D'ailleurs, l'actuel article 134 comporte le même risque de dénonciation abusive à l'égard des éducateurs; on n'en a pourtant enregistré qu'un nombre relativement modeste.

Nous ne pouvons en aucun cas nous rallier à l'objection selon laquelle la nouvelle disposition constituerait une ingérence inadmissible dans la vie familiale et l'éducation des enfants. Même si leurs effets dommageables ne sont pas immédiatement visibles, il n'en reste pas moins que les coups excèdent manifestement le droit de correction et d'éducation lorsqu'ils sont répétés, c'est-à-dire quasi habituels pour ne pas dire systématiques. C'est pourquoi il nous paraît opportun et nécessaire que de tels actes soient poursuivis d'office s'ils parviennent à la connaissance des autorités. Un enfant maltraité de cette manière n'ose en général pas déposer plainte, ne serait-ce que par peur des représailles. On peut en dire autant des personnes âgées ou de celles qui ont besoin de soins. Ce qui précède devrait dissiper les doutes exprimés par ceux qui craignent qu'une paire de gifles ne constitue déjà des voies de fait poursuivies d'office. Comme nous l'avons expliqué, l'expression «à réitérées reprises» exige bien plus que cela. Pour prévenir une interprétation trop restrictive, on a suggéré à
plusieurs reprises, de remplacer le terme «wiederholt» du texte allemand par «immer wieder», «systematisches Verüben» ou «fortgesetzt». Après un examen approfondi, nous avons décidé de nous en tenir à la version proposée, les autres formulations étant à l'inverse susceptibles d'être interprétées de manière trop extensive. Il s'agit en particulier d'éviter que la nouvelle disposition ne s'applique qu'aux voies de fait perpétrées pendant un temps assez long. Car tel n'est pas son seul but; elle vise en effet aussi à protéger la victime qui aura reçu de nombreux coups, de manière systématique, ne serait-ce que durant quelques heures ou quelques jours.

214

214.1

Mise en danger de la vie ou de la santé d'autrui

Exposition (Art. 127)

Suivant en cela la commission d'experts, nous vous proposons de rempla-

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cer l'actuel chiffre 1er de l'article 127 - qui en deux alinéas donne une répétition fastidieuse des éléments constitutifs de l'exposition - par une formulation plus simple et plus concise. Nous vous proposons aussi de renoncer à la peine minimale d'un mois d'emprisonnement qui y est actuellement prévue; cette unique modification matérielle correspond d'ailleurs à la tendance générale qui se fait jour actuellement.

Certains participants à la procédure de consultation voient dans cette suppression un affaiblissement de la protection pénale que rien ne justifie. Ils craignent qu'elle n'entraîne avec le temps une atténuation considérable des peines moyennes et que, par le biais des circonstances atténuantes prévues à l'article 65 CP, le juge n'en vienne à ne prononcer que des peines d'arrêts ou d'amende, ce qui serait pour le moins inapproprié s'agissant d'infractions d'une telle gravité. Nous ne partageons pas ces inquiétudes, car nous faisons confiance au bon sens et à l'expérience de nos juges en ce qui concerne la fixation de la peine. C'est pourquoi nous estimons que la peine minimale prévue actuellement est superflue.

Nous vous proposons enfin de supprimer purement et simplement le chiffre 2 de l'article 127, selon lequel la peine sera la réclusion si la victime est morte des suites du crime et si le délinquant pouvait le prévoir. Il s'agit ici d'une infraction qualifiée en raison du résultat, tout comme celle que sanctionne l'article 122, chiffre 2, auquel nous renvoyons (cf. ch. 213.1).

214.2

Omission de prêter secours (Art. 128)

L'article 128, qui punit de l'emprisonnement ou de l'amende celui qui aura abandonné, sans la secourir, une personne blessée soit par lui, soit par un véhicule ou un animal de selle ou de trait dont il se servait, a subi plusieurs modifications. L'idée fondamentale de cette disposition a cependant été maintenue: celle-ci punira toujours de l'emprisonnement ou de l'amende celui qui blesse une autre personne, et la laisse ensuite à son destin. On a cependant renoncé à énumérer expressément les «moyens» dont l'auteur s'est servi, à savoir un véhicule, un animal de selle ou de trait. Mentionner le véhicule est totalement superflu, depuis que l'article 92, 1er alinéa, combiné avec l'article 51, 2e alinéa, de la loi sur la circulation routière (RS 741.01) oblige le conducteur, sous menace de poursuites pénales, à prêter secours à la personne qu'il a blessée. Quant aux animaux de selle ou de trait, ils ne sont de nos jours plus guère utilisés comme moyens de transport. Si leur mention a un côté suranné, elle est aussi superflue parce qu'ils ne représentent que les «moyens» dont s'est servi l'auteur, qui n'en reste pas moins l'auteur médiat responsable de la lésion ainsi provoquée. En outre, l'expression «qui aura abandonné» est remplacée par «qui n'aura pas prêté secours». II s'agit d'une simple modification rédactionnelle, rendue nécessaire du fait de l'extension des éléments constitutifs, sur laquelle nous reviendrons. Par ailleurs, la nouvelle formulation décrit le comportement punissable de manière plus précise et met mieux en évidence qu'il s'agit

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d'un véritable délit par omission: peu importe ce que l'auteur a fait au lieu de porter secours à la victime.

En introduisant une obligation générale de porter secours en cas d'urgence, nous avons donné suite aux suggestions répétées faites par la doctrine. Plusieurs pays voisins la connaissent déjà et certains cantons l'ont introduite en vertu de leur droit de police. Ainsi, quiconque omet de porter secours à une personne en danger de mon imminent sera également puni de l'emprisonnement ou de l'amende. Cette innovation reprend presque mot à mot la disposition que prévoyait le projet de 1918 du code pénal et qui avait été abandonnée pour des raisons politiques, notamment par crainte du référendum. Comme cette obligation d'assistance incombe à toute personne, qu'elle soit ou non responsable de la détresse de la victime, elle ne doit pas être conçue de manière trop large. Par conséquent, si l'on n'est pas tenu de secourir une personne en cas de «simple» danger pour la santé, il est par contre obligatoire de porter secours à la victime en danger de mort, pour autant que celui-ci soit imminent, On vise des situations telles que celles où se trouvent la personne qui se noie ou celle qui s'écroule à la suite d'une crise cardiaque ou encore celle qui, ivre morte, s'effondre et reste couchée sur la chaussée. Encore faut-il que, d'après les circonstances, ce secours puisse être raisonnablement exigé. Cette condition - qui restreint encore le devoir d'assistance - exclut, par exemple, que le sauveteur potentiel se mette lui-même en sérieux danger en portant secours. Par ailleurs - la nouvelle disposition le précise expressément - cette restriction vaut également pour l'obligation de porter secours qui incombe à celui qui a lui-même blessé une personne. Dans de tels cas, le caractère raisonnablement exigible de l'assistance était jusqu'à présent une condition non écrite de la punissabilité. Toutefois, celui qui a blessé autrui porte, en particulier si cet acte lui est imputable à faute, une double responsabilité qui dépasse l'obligation générale de porter secours et qui fait que, dans de tels cas, ce secours pourra, en principe, être raisonnablement exigé de lui.

La proposition de punir également et de la même manière celui qui aura empêché un tiers de prêter secours ou qui l'aura entravé dans l'accomplissement
de ce devoir constitue un autre élargissement important des éléments constitutifs de l'infraction. Point n'est besoin d'expliciter plus avant pourquoi un tel comportement est tout aussi punissable que l'omission elle-même. Cette disposition est également reprise du projet de 1918 du code pénal.

Qu'en est-il de la relation entre cette nouvelle disposition et les articles 92 et 51, 2e alinéa, de la loi sur la circulation routière? Selon cette dernière disposition, toutes les personnes impliquées dans un accident où sont en cause des véhicules automobiles ou des cycles doivent porter secours aux blessés; les personnes non impliquées ont également cette obligation («dans la mesure qu'on peni exiger d'elles»). Aux termes de l'article 92, 1er alinéa de la loi sur la circulation routière, la violation des devoirs ainsi définis est passible des arrêts ou de l'amende. De plus, le conducteur qui aura pris la fuite après avoir tué ou blessé une personne lors d'un accident sera, selon l'article 92, 2e alinéa, de la loi sur la circulation routière, puni de l'empri-

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sonnement. On admet en principe qu'il y a concours imparfait entre ces dispositions de la loi sur la circulation routière et l'article 128 CP, si, dans un cas d'espèce, tous les éléments constitutifs des infractions qui y sont sanctionnées sont réunis. Conformément aux règles générales sur le concours, c'est donc la disposition qui prévoit la peine la plus grave qui a préséance et qui est seule applicable. Ainsi le délit de fuite tombera toujours sous le coup de l'article 92, 2e alinéa, de la loi sur la circulation routière, qui est plus sévère puisque seul l'emprisonnement y est prévu. C'est en revanche le nouvel article 128 qui s'appliquera lorsqu'une personne, impliquée dans un accident de la circulation et responsable à quelque titre que ce soit des blessures qui ont été causées à une ou plusieurs victimes, aura omis - sans pour autant prendre la fuite - de prêter le secours qu'on pouvait exiger d'elle. Il en ira de même pour les personnes qui, bien qu'impliquées dans l'accident, ne sont pas responsables des blessures qui y ont été causées - ou encore pour les personnes totalement étrangères à l'accident, par exemple des curieux - qui sont restées inactives alors que les blessés se trouvaient en danger de mort imminent. Ce sont cependant les dispositions correspondantes de la loi sur la circulation routière - soit l'article 92, 1er alinéa, en relation avec l'article 51, 2e alinéa - qui sont seules applicables si, dans de tels cas, le danger de mort n'était pas imminent.

Notre proposition va plus loin que celle de la commission d'experts sur un point. Selon la version élaborée par cette dernière, celui qui abandonne sans la secourir une personne qu'il a blessée, n'est passible d'une peine que si, ce faisant, il contrevient au devoir général d'assistance tel qu'il est désormais formulé, à savoir si le blessé est en danger de mort imminent. La commission était convaincue qu'en pratique ces cas tombaient déjà sous le coup de l'article 92 de la loi sur la circulation routière. Elle estimait en outre que l'obligation de garantie inhérente à cette situation rend l'auteur de la lésion punissable pour lésion corporelle par omission si la blessure de la victime venait à s'aggraver des suites de la violation du devoir d'assistance.

Au cours de la procédure de consultation, de nombreuses réserves ont
été formulées à ce sujet. On ne comprenait pas pourquoi imposer à tout un chacun l'obligation de porter secours, indépendamment du fait qu'il était ou non responsable de l'état de la victime. En outre, on doutait que les cas de lésions causées à autrui lors de la pratique de sports comme le ski, l'alpinisme, les sports nautiques ou lors d'une rixe soient couverts par la loi sur la circulation routière. C'est pourquoi les auteurs de la plupart de ces critiques demandent que l'on maintienne l'actuel article 128 en le complétant par des alinéas 2 et 3 qui reprendraient la disposition proposée par la commission d'experts. On a quand même largement approuvé l'idée de punir quiconque renonce à porter secours à une personne en danger de mort imminent - alors que cela était possible et qu'on pouvait raisonnablement l'exiger de lui - ainsi que celui qui empêche ou entrave l'accomplissement de ce devoir.

Notre proposition montre que nous avons largement tenu compte de ces exigences, que nous considérons comme justifiées. Ainsi que nous l'avons déjà expliqué, nous avons intégré l'actuel article 128 dans la nouvelle dis-

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position en le modifiant quelque peu. Une autre possibilité, relevée par de nombreux participants à la procédure, aurait été de punir tout manquement au devoir général d'assistance et d'étendre ce devoir à toutes les situations où une personne est en «simple» danger pour sa santé. La commission d'experts avait tout d'abord envisagé cette solution. Celle-ci aurait certes pour avantage que personne ne pourrait se soustraire à sa responsabilité en prétendant ne pas avoir su que le blessé était en danger de mort imminent. En revanche, son champ d'application serait par trop indéterminé et on aurait ainsi étendu le devoir d'assistance vraisemblablement bien audelà de celui prescrit par la norme actuelle, car le danger pour la santé ne consiste pas toujours et exclusivement dans une blessure dont souffre la personne en danger. Cette remarque vaut également pour la formulation proposée par certains participants qui voudraient que l'on parle de «danger grave pour la santé». Il est vrai que tout adulte a le devoir moral d'empêcher par exemple des enfants de se livrer à un duel avec des bâtons pointus, de peur qu'ils ne se blessent gravement aux yeux. Il serait tout de même exagéré de punir la violation de ce devoir d'une peine allant jusqu'à trois ans d'emprisonnement. C'est pourquoi nous estimons que notre proposition est équitable. Celui qui a blessé autrui est, à juste titre, soumis à une obligation d'assistance plus sévère que le tiers non impliqué, lequel n'aura le devoir de prêter secours qu'en cas de danger de mort imminent.

214.3

Mise en danger de la vie d'autrui (Art. 129)

L'actuel article 129, 1er alinéa, qui punit de la réclusion pour trois ans au plus ou de l'emprisonnement pour un mois au moins celui qui, sciemment et sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent, fait l'objet de deux modifications: la première consiste à supprimer le terme «sciemment» qualifiant la manière dont l'auteur a agi. La seconde vise à aggraver la peine maximale en la fixant non plus à trois mais à cinq ans de réclusion, la peine minimale de un mois d'emprisonnement étant, quant à elle, supprimée.

Si le terme «sciemment» qualifiait auparavant une forme de culpabilité située entre l'intention et la négligence, notamment la faute consciente («Wissensschuld»), il n'est, selon la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (cf. ATF 94 IV 60) que l'expression de l'intention directe et exclut le dol éventuel. Et puisque celui qui agit par dol éventuel ne peut de surcroît créer un danger de mort imminent mais tout au plus conditionnel, le terme «sciemment» n'a plus aucune signification et peut donc être supprimé.

La modification relatée dans ce paragraphe consiste à remplacer le terme «gewissenlos» par l'expression «in skrupelloser Weise» et ne concerne par conséquent que le texte allemand. Selon le Tribunal fédéral, agit «gewissenlos», celui qui se comporte d'une manière que la morale réprouve (cf. ATF 94 IV 65) ou dont le comportement ne repose sur aucune raison compréhensible (cf. ATF 100 IV 215). Nous partageons l'opinion de la commission d'experts et d'une partie de la doctrine qui estiment qu'ainsi compris,

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l'élément constitutif qu'est la «Gewissenlosigkeit» est à vrai dire superflu. Il va de soi que toute mise en danger de mort imminent doit être réprouvée si elle ne se fonde sur aucun motif la justifiant. L'absence de raison compréhensible ne saurait, à plus forte raison, donner une qualification particulière au comportement ainsi réprouvé. Une telle interprétation fait de cet élément constitutif une notion trop indéterminée. En pratique, il est aujourd'hui appliqué à une multiplicité de comportements. Les expressions française («sans scrupules») et italienne («senza scrupoli») mettent au contraire clairement en évidence le caractère particulièrement répréhensible que doit révéler le comportement incriminé; elles confirment que cet élément constitutif devrait se limiter aux cas graves. Il convient donc d'adapter la version allemande aux versions latines et de punir dorénavant celui qui «in skrupelloser Weise» aura mis autrui en danger de mort imminent. La disposition de l'article 129 ne frappera donc que l'auteur qui, agissant au mépris de la vie humaine et de propos délibéré, aura mis la vie d'autrui en danger.

Ainsi défini, ce comportement présente certaines similitudes avec celui qu'impliqué l'homicide commis intentionnellement. De fait, la modification proposée ressemble à la nouvelle définition des éléments constitutifs de l'assassinat qui emploie l'expression d'«absence particulière de scrupules» (cf. ch. 212.1). Sous cette forme modifiée, la norme vise des cas typiques: par exemple tirer un coup de feu à une courte distance en direction d'une personne qu'on manque de peu; conduire un véhicule en direction d'un groupe humain sans ralentir, dans le but, par exemple, de forcer un barrage de police; faire travailler des ouvriers dans des conditions ne satisfaisant pas aux normes de sécurité. Il s'agit donc de situations où la vie humaine est hautement en danger, sans que l'intention de tuer puisse être prouvée.

Cette modification, identique à la proposition de la commission d'experts, n'a rencontré pratiquement aucune opposition lors de la procédure de consultation.

La gravité de l'acte justifie que l'on porte la peine maximale de trois à cinq ans de réclusion. Cette aggravation est d'autant plus nécessaire que la disposition proposée ne vise dorénavant que les cas vraiment graves, tels que
ceux que nous avons déjà mentionnés. Elle représente par ailleurs une harmonisation judicieuse et évidente avec la peine sanctionnant l'exposition au danger (cf. ch. 214.1). Cette aggravation n'a rencontré aucune opposition lors de la procédure de consultation. Quelques participants ont même proposé que l'on augmente encore la peine maximale, voire que l'on prévoie purement et simplement une peine de réclusion. Comme cela a été le cas pour les articles 116 et 127 (cf. ch. 212.4 et 214.1), un petit nombre de voix négatives se sont élevées contre la suppression de la peine minimale.

Forts de l'appui d'une large majorité, nous maintenons cependant notre proposition et renvoyons au commentaire figurant au chiffre 214.1.

L'actuel article 129 subit une autre modification de par la suppression de ses 2e et y alinéas. En prévoyant que l'auteur sera puni de la réclusion pour dix ans au plus si le crime a entraîné la mort, le 3e alinéa décrit une infraction qualifiée en raison du résultat et il y a donc lieu de le supprimer.

Au surplus nous renvoyons au commentaire de l'article 122, chiffre 2 (cf.

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eh. 213.1). Le 2e alinea fait obligation au juge d'ajouter l'amende à la peine privative de liberté si le délinquant a agi dans un dessein de lucre. Cette réglementation peut paraître singulière s'agissant d'une infraction telle que celle décrite à l'article 129. Cet alinéa a pu se justifier par le souci du législateur de protéger avant tout le travailleur. Cette protection n'est plus nécessaire aujourd'hui. Les cas typiques de mise en danger punissable ne sont en effet, et de manière générale, que rarement commis dans un dessein de lucre. Et si malgré tout tel devait être le cas, le juge aurait toujours, aux termes de l'article 50, 1er alinéa, CP, la possibilité d'ajouter l'amende à la peine privative de liberté qu'il entend prononcer. La proposition de supprimer cet alinéa a d'ailleurs rencontré une approbation quasi unanime lors de la procédure de consultation.

214.4

Duel ainsi que provocation et excitation au duel (Art. 130 à 132: abrogation)

Les actuels articles 130 à 132, qui ont trait au duel, doivent être purement et simplement supprimés. Ils contiennent tous trois une réglementation pénale particulière d'une forme traditionnelle de duel que l'on peut définir comme le combat entre deux personnes, réglé d'avance et conduit au moyen d'armes égales. Alors que l'article 131 concerne le duel en tant que tel, l'article 130 sanctionne la provocation en duel et son acceptation.

Quant à l'article 132, il punit l'excitation au duel. Ces dispositions, et en particulier l'article 131, sont dans une large mesure plus favorables pour le délinquant - ce qui ne se justifie plus de nos jours - que le droit commun, en tout cas lorsque le combat conduit ou devait conduire à des lésions corporelles graves ou à la mort d'un participant. En effet, en dépit de telles conséquences, l'article 131, chiffre 1, ne punit le duel que d'une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement et n'en fait par conséquent qu'un délit. Par ailleurs, aux termes de l'article 131, chiffre 2, le duel n'est plus considéré que comme une contravention lorsque les combattants ont pris des précautions propres à écarter le danger de mort, par exemple dans les combats d'étudiants (Mensur). Enfin, selon l'article 131, chiffre 3, ce n'est que si l'un des duellistes a sciemment enfreint les règles du combat que les dispositions générales régissant l'homicide ou les lésions corporelles sont applicables. Le privilège n'est nullement compensé par le fait que d'autre part, le duel est punissable en tant que mise en danger, alors même qu'aucun des antagonistes ne subit de lésion. En effet, dans de tels cas, il s'agirait souvent de tentatives d'homicide ou de lésions corporelles graves au sens des dispositions générales.

En outre, comme les duellistes, on privilégie l'instigateur au duel. Dans la mesure où l'instigation contient les éléments constitutifs prévus à l'article 132, le privilège peut être encore plus grand. En effet, cette disposition permet de ne punir que des arrêts celui qui aura excité autrui à se battre en duel avec un tiers. Il est vrai que, par la suppression de l'article 132, certains comportements demeurent impunis. En effet, même si le duel n'a pas Heu, l'instigation au duel est punissable d'après l'article 132 CP, alors que, 1052

aux termes de l'article 24, 2e alinéa, CP, seule la tentative d'instigation au crime - et non au délit - est punissable.

Enfin, la disposition privilégie également de manière évidente, outre les duellistes, toute personne qui prend part d'une manière ou d'une autre au duel, tels que les seconds, les témoins ou les médecins, ne serait-ce que parce que l'article 131, chiffre 4, ne réprime leur comportement que s'ils ont excité, au sens de cette disposition, les adversaires à se battre. Ainsi, toute complicité au duel reste totalement impunie.

Par ailleurs, les statistiques annuelles des tribunaux montrent que le duel est pratiquement tombé en désuétude. Aussi peut-on admettre qu'il tombe sous le coup des dispositions générales sur l'homicide intentionnel et les lésions corporelles intentionnelles, la tentative et la participation et que les règles concernent les circonstances atténuantes et le fait justificatif extralégal - admis tant par la pratique que par la doctrine - qu'est le consentement du lésé trouvent application. Les combats d'étudiants - seuls à avoir conservé une certaine importance pratique - ne seront pas punis, pour autant qu'ils n'entraînent que des lésions corporelles légères. La finalité du duel n'étant pas digne de protection, le lésé ne peut en revanche, selon la doctrine dominante, consentir valablement aux lésions corporelles graves qui seraient ainsi provoquées. Dans un tels cas, l'auteur ne saurait se voir reconnaître un quelconque motif d'exculpation et serait punissable pour lésion corporelle.

Notre proposition s'éloigne de celle formulée par la commission d'experts qui, pour des raisons de prévention générale, entendait non seulement maintenir la disposition sur la provocation en duel (art. 130), mais encore en faire un délit passible de l'emprisonnement. Partant du fait que le traitement particulier réservé au duel par notre code pénal était désuet - et cela la commission d'experts l'avait elle aussi souligné - nous avons estimé que la solution consistant à supprimer les dispositions topiques était la seule logique. Il serait en effet incohérent de soumettre le duel en tant que tel, ses conséquences, ainsi que l'excitation au duel aux dispositions générales du code, tout en sanctionnant les actes préparatoires que sont la provocation en duel, et son acceptation par
une peine particulière, plus lourde encore que celle prévue actuellement. Si l'on entend renoncer à privilégier le duel, on ne saurait maintenir, en réprimant des actes purement préparatoires, une punissabilitc qui excède celle prévue par les dispositions générales.

D'ailleurs, aucune nécessité tenant à la politique criminelle ne commande le maintien des dispositions actuelles, qui ont perdu toute leur importance pratique.

Si la suppression des articles 131 et 132 a rencontré une approbation quasi unanime lors de la procédure de consultation, on constate qu'une majorité se déclarait d'accord de maintenir l'article 130.

7l

Feuille foderale. 137e année. Vol. II

1053

214.5

Rixe (Art. 133)

L'actuel article 133 punit de l'emprisonnement ou de l'amende celui qui a pris part à une rixe ayant entraîné la mort d'un des participants ou causé à l'un d'eux des lésions corporelles. Cette disposition subit une seule modification matérielle: alors qu'à présent, il faut que ce soit un des participants à la rixe qui ait été tué ou atteint dans son intégrité corporelle, l'article 133 s'appliquera dorénavant si la victime est par exemple un spectateur ou un policier intervenu pour rétablir l'ordre, c'est-à-dire n'importe quelle tierce personne. Cette extension des conditions objectives de la punissabilité est conforme au sens et au but visé par la norme. Celle-ci ne punit l'auteur qu'en raison de sa participation à la rixe et du caractère typiquement dangereux de celle-ci, et non en fonction du résultat. Celui-ci n'est une condition de la punissabilité que dans la mesure où i) limite les éléments constitutifs de la rixe à ceux dont le caractère dangereux est hautement vraisemblable et se manifeste précisément par les indices que sont la mort et la lésion corporelle. Rechercher qui, dans un combat entre plusieurs personnes, est le véritable responsable de la mort ou des lésions qui y ont été provoquées est souvent une tâche vouée à l'échec. De là, la création de ce délit spécial de mise en danger de la vie et de l'intégrité corporelle du fait de la participation. Tout cela vaudra également lorsqu'un tiers, ne participant pas à la rixe, en sera la victime. Certes, il est bien plus probable que ce soit un participant qui soit tué ou blessé. Mais dans les rixes, il est souvent difficile de distinguer clairement les participants des non-participants. Si la rixe a lieu dans un restaurant par exemple, la bagarre peut également être dangereuse pour une tierce personne. II convient donc d'admettre qu'il y a là une condition objective suffisante de la punissabilité. C'est ici que réside d'ailleurs la différence avec les éléments constitutifs de l'agression (cf. ch.

214.6).

Pour le surplus, l'article 133 ne subit que des modifications purement rédactionnelles. Ainsi, l'expression «pour ce seul fait» est supprimée. Elle est en effet superflue puisque la disposition établit avec suffisamment de précision que c'est la participation à la rixe qui est sanctionnée. En outre, par souci de clarté, nous vous proposons
d'insérer dans un second alinéa la disposition afférente à la non-punissabilité de celui qui se sera borné à se défendre ou à séparer les combattants. On pourrait certes prétendre que cette dernière disposition est superflue au regard de l'article 33 CP concernant la légitime défense. Mais l'application de cet article à celui qui ne cherche qu'à mettre un terme à la bagarre est pour le moins discutable. La disposition du 2e alinéa a le mérite de montrer clairement qu'un tel comportement ne réunit pas les éléments constitutifs de l'infraction et n'est de ce seul fait pas punissable, sans qu'il soit nécessaire d'invoquer un fait justificatif.

Ces propositions ont rencontré l'approbation unanime des participants à la procédure de consultation.

1054

214.6 Agression (Art. 134[nouveau]) Selon la doctrine dominante et la jurisprudence, il n'y a pas rixe au sens de l'article 133 CP lorsque ce ne sont pas deux partis qui s'affrontent, mais qu'il y a agression de plusieurs individus sur une ou plusieurs personnes qui restent passives. Par rapport aux participants à la rixe, les agresseurs sont ainsi privilégiés de manière injustifiée. En effet, leur comportement est tout aussi dangereux et, comme c'est le cas pour la rixe, il est souvent difficile de déterminer qui a blessé ou tué la ou les personnes attaquées. On ne peut non plus admettre d'emblée qu'il y a complicité de tous les participants à l'agression: d'une part, parce que l'acte peut avoir été commis spontanément sans qu'il y ait eu coopération consciente et voulue, qui est l'élément caractéristique de la complicité; d'autre part, parce qu'il est très difficile de prouver que les agresseurs avaient l'intention de provoquer la mort ou les lésions.

Il est impérieux de combler cette lacune par l'introduction d'un nouvel article 134, d'autant que les agressions commises par des groupes de «casseurs» contre des individus isolés ou des groupes de personnes très inférieurs en nombre sont hélas fréquentes à notre époque. Certains pays voisins du reste ont déjà édicté des dispositions similaires.7' Selon la nouvelle norme, celui qui aura participé à l'agression d'une ou plusieurs personnes au cours de laquelle l'une d'entre elles aura trouvé la mort ou aura subi une lésion corporelle sera puni de l'emprisonnement pour cinq ans au plus. La notion de participation suppose plusieurs auteurs, soit au moins deux agresseurs. On ne saurait parler de participation lorsque l'agression est le fait d'une seule personne. La commission d'experts avait elle aussi estimé qu'il suffisait de deux agresseurs pour que les éléments constitutifs de l'infraction soient réunis. La formulation qu'elle proposait, soit «celui qui se sera joint à plusieurs agresseurs menant leur action ...», laissait cependant planer un doute sur la question de savoir si, ainsi conçue, elle ne requérait pas un minimum de trois agresseurs. Aussi avons-nous estimé nécessaire de la modifier en la précisant sur ce point. Il suffit donc de deux agresseurs pour que les éléments constitutifs soient réunis. Le caractère particulièrement dangereux,
ainsi que les difficultés de preuve qui peuvent déjà résulter de ce très petit nombre justifient une telle solution. 11 suffît d'ailleurs de deux individus pour constituer une bande (cf.

ATF 700 IV 220). Enfin, on s'accorde à reconnaître que, pour qu'il y ait rixe - infraction proche de l'agression -, il faut un minimum de trois participants, de sorte qu'il suffit que l'un des partis compte deux combattants.

De la même manière que pour la rixe, la disposition proposée vise également, et à juste titre, celui qui se sera joint à l'agression.

Comme la rixe, l'agression est un délit de mise en danger. Pour que les éléments constitutifs de l'agression soient réunis, il faut qu'une ou plusieurs des personnes agressées soient blessées ou tuées. Mais il ne s'agit là que d'une condition objective de la punissabilité. Cela signifie que l'auteur se rend passible d'une peine du seul fait de sa participation à l'agression. Par

1055

conséquent, il suffit de prouver l'intention de l'auteur de participer à l'agression; point n'est besoin d'établir qu'il a voulu donner la mort ou provoquer les lésions corporelles. A la différence de la rixe telle que nous l'avons définie - où il suffît que n'importe quelle tierce personne en ait été la victime (cf. ch. 214.5) - il faut ici, pour que la condition objective de la punissabilité soit remplie, qu'une des personnes agressées ait été tuée ou blessée. La rixe se définit en effet comme un combat général et réciproque, alors que l'agression vise un petit nombre de victimes, déterminées à l'avance et qui, en règle générale, se distinguent clairement des non-participants. Contrairement à la rixe, il est donc très peu probable qu'un non-participant en soit la victime.

Rares sont les avis recueillis au cours de la procédure de consultation qui refusent le principe même d'une telle disposition. Ils considèrent que les normes actuelles régissant la participation par coauteurs, la rixe, l'émeute et le brigandage suffisent à y parer. Ils estiment aussi que l'extension de la punissabilité à la mise en danger est problématique et la preuve de la participation difficile à rapporter. Enfin, la nouvelle disposition leur paraît faire de l'agression un délit fondé sur le seul résultat, ce qui contrevient au principe de la culpabilité. Ce dernier argument n'est pas pertinent - et c'est également l'opinion dominante dans la doctrine - tant que l'auteur n'est rendu responsable que de sa participation et non de la mort d'une des personnes agressées ou des lésions subies par celle-ci. Quant aux autres objections, nous y avons répondu dans le commentaire qui précède.

Certains participants à la procédure de consultation, tout en saluant le principe de la nouvelle disposition, émettent quelques réserves. Elles ont trait en premier lieu à la sanction prévue. On considère que la peine maximale de cinq ans d'emprisonnement est trop douce et on voudrait la remplacer par dix ans de réclusion. A l'inverse, deux participants demandent que la sanction soit atténuée, en ce sens qu'une peine d'amende soit instituée à côté de l'emprisonnement. La sanction proposée nous paraît au contraire la plus appropriée au caractère particulier de la prescription et comparativement aux autres infractions semblables. Il ne faut pas
oublier qu'il s'agit ici d'un délit de mise en danger et non d'un délit de lésion. Sa commission n'exige pas, nous le répétons, l'intention de donner la mort ou de provoquer les lésions. On ne pourrait sanctionner d'une peine semblable à celle prévue pour les lésions corporelles graves intentionnelles (art. 122) ou le meurtre (art. 111) qu'en se référant au résultat défendu. On créerait ainsi à nouveau un de ces délits fondés sur le résultat, alors que nous proposons précisément de les supprimer en raison de leur incompatibilité avec le principe de la culpabilité.

214.7

Mauvais traitements et négligence envers les enfants (Art. 134 du droit actuel: abrogation)

L'actuel article 134, nous l'avons déjà dit par deux fois (cf. ch. 213.2 et 213.5), doit être supprimé et remplacé par d'autres dispositions. S'agissant de mauvais traitements et de négligence envers les enfants, il y a lieu de 1056

justifier tout particulièrement la suppression de cette disposition. Cela vaut en premier lieu pour les éléments constitutifs établis par le chiffre 1, 1 " alinéa. Il punit de l'emprisonnement celui qui, ayant la garde d'un enfant de moins de 16 ans, l'aura maltraité, négligé ou traité avec cruauté, de façon que la santé ou le développement intellectuel de cet enfant soit atteint ou gravement compromis. L'interprétation de cette norme, dont la formulation est alambiquée, a depuis toujours suscité des difficultés. En ce qui concerne tout d'abord les actes visés, à savoir «maltraiter», «négliger» ou «traiter avec cruauté» un enfant, il n'est pas nécessaire de les interpréter ou d'en examiner la portée de manière précise, car ils sont à vrai dire superflus sous cette forme. Le seul point décisif est de savoir s'ils ont eu les suites décrites, c'est-à-dire s'ils ont porté atteinte à la santé ou au développement intellectuel de l'enfant ou l'ont gravement compromis. Selon la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (ATF 105 IV 25 ss), tout mauvais traitement constitutif de lésions corporelles au sens de l'article 123, chiffre l, 1er alinéa, représente une atteinte à la santé, à l'exception d'actes qui, comme la tonte des cheveux, ne la compromettent pas. Dans ses arrêts antérieurs (ATF 80 IV 106 et 85 IV 126), le Tribunal fédéral avait soutenu une interprétation plus stricte: il ne considérait pas les lésions corporelles de moindre importance, telles que les tuméfactions, les marques de coup, les bleus, les traces de griffures ou encore les vomissements, comme des atteintes à la santé au sens de l'article 123. Quant à l'atteinte au développement intellectuel, on peut douter qu'elle ait une signification autonome. Selon la doctrine dominante, il faut, du moins en règle générale, qu'elle constitue aussi une atteinte à la santé; sinon les actes contre lesquels l'article 134 entend protéger l'enfant seraient illimités, d'autant plus que cette disposition punit également le fait de le négliger.

Ne serait-ce que par souci de clarté, il est donc tout indiqué de renoncer à la réglementation particulière établie à l'article 134 et de protéger désormais, par l'article 123 (lésions corporelles simples), les enfants contre les atteintes à leur santé que pourraient leur infliger les personnes chargées de leur
éducation. Afin que cette protection soit équivalente à celle existant actuellement (poursuite d'office), l'article 123 a été complété, nous l'avons dit (cf. eh. 213.2), par les nouvelles qualifications que consacre à présent son chiffre 2, 3e alinéa. Quant à la protection de l'enfant contre les lésions corporelles graves, elle est assurée par l'article 122 qui, contrairement à l'article 123, prend le pas sur l'actuel article 134.

En ce qui concerne la mise en danger grave au sens de l'article 134, on a posé de telles exigences (ATF 98 IV 186) qu'elle a perdu toute importance pratique. Dans la majeure partie des cas, il est en outre extrêmement difficile de prouver que l'auteur était conscient de l'éventualité de la mise en danger et à fortiori que cette mise en danger était intentionnelle. Il convient donc de supprimer ce délit, du moins sous cette forme. Nous vous proposons de substituer à la norme actuelle une solution qui aura davantage d'effets, en la remplaçant par les dispositions légales suivantes: d'une part, le nouvel article 126, 2e alinéa - que nous avons déjà commenté (cf. ch.

213.5) - qui prévoit la poursuite d'ofFice des voies de fait perpétrées de ma-

1057

nière répétée, notamment à l'égard des enfants. Dans la plupart des cas, des châtiments de ce genre sont sans aucun doute susceptibles de compromettre le développement intellectuel de l'enfant. D'autre part, nous vous proposons de prévoir expressément un délit de mise en danger à l'article 219, dont la formulation est nouvelle et qui pallie ainsi dans la mesure du possible les insuffisances de l'article 134 (cf. ch. 215.7). Enfin, dans ce contexte, nous vous renvoyons à l'article 127, qui concerne l'exposition au danger (cf. ch. 214.1).

La suppression pure et simple des 2e et 3e alinéas du chiffre 1 de l'article 134 se justifie, ne serait-ce que parce qu'ils consacrent un délit fondé sur le résultat, contrevenant ainsi au principe de la culpabilité (cf. ch. 213.1), II en va autrement du chiffre 2 de l'actuel article 134, qui fait obligation au juge d'aviser les autorités de tutelle de tout acte punissable au sens du chiffre premier, afin que celles-ci prennent les mesures nécessaires à la protection de l'enfant. Cette disposition est remplacée par les nouveaux articles 358bis et 358ter, qui lui sont pour le moins équivalents (cf. ch. 216,1 et 216.2).

Si la proposition de supprimer l'actuel article 134 a rencontré une large approbation lors de la procédure de consultation, c'est, dans la plupart des cas, sous la réserve expresse que les nouvelles dispositions prévues en remplacement (art. 123, ch. 2, 3e al., art. 126, 2e al. et art. 219) soient effectivement adoptées. Une petite minorité s'y est opposée, arguant que les dispositions de substitution étaient insuffisantes, soit du point de vue matériel, soit au regard de leur effet psychologique ou de prévention générale. Nous avons répondu à ces objections dans les commentaires relatifs à ces nouvelles dispositions (cf. ch. 213.1 et 215.7). Nous tenons néanmoins à répéter que les dispositions qui remplacent l'actuel article 134 protègent mieux l'enfant contre un mauvais traitement et mise en danger, car elles circonscrivent mieux et moins strictement les conditions d'une intervention pénale.

214.8

Surmenage des enfants et des subordonnés (Art. 135 du droit actuel: abrogation)

Tout comme l'article 134, l'article 135 doit lui aussi être totalement supprimé. Aux termes de son chiffre 1, 1er alinéa, est punissable «celui qui, par égoïsme ou par méchanceté, aura surmené physiquement ou intellectuellement soit son enfant mineur, soit une personne mineure, ou de sexe féminin, ou faible de santé ou d'esprit, qui lui était subordonnée en qualité d'employé, d'ouvrier, d'apprenti, de domestique, d'élève ou de personne confiée à ses soins, de façon que la santé de la victime en soit atteinte ou gravement compromise». Ici aussi, ce n'est pas l'acte constitutif du surmenage - décrit de manière plutôt compliquée - qui est décisif en lui-même, mais la question de savoir s'il a porté atteinte ou gravement compromis la santé de la victime. Ce qui vient d'être dit à propos de la suppression de l'article 134 (cf. ch. 214.7) vaut ici par analogie, lorsque la victime est l'enfant de l'auteur, se trouve sous sa garde ou lui a été confiée pour d'autres 1058

raisons. Toute atteinte ou mise en danger est désormais sanctionnée de manière plus claire par les nouvelles dispositions des articles 123, chiffre 2, 3e alinéa, et 219. Comparées à l'actuel article 135, elles offrent auxdites victimes une protection indubitablement plus efficace, puisqu'elles ne font pas dépendre la punissabilité des actes qu'elles répriment de l'«égoïsme» ou de la «méchanceté» de leur auteur. Dans la mesure où il vise aussi à protéger du surmenage d'autres personnes subordonnées à l'auteur, l'article 135 est dépassé. La protection des travailleurs est aujourd'hui réglée par le droit public du travail. Si de mauvaises conditions de travail sont à l'origine d'atteintes à la santé qui constituent des lésions corporelles, les articles 122 ss CP sont applicables. Au demeurant, l'article 62, 1er alinéa, de la loi sur le travail (RS 822.11) réserve expressément les dispositions spéciales du code pénal. L'assimilation discriminatoire d'adultes du sexe féminin aux travailleurs mineurs, faibles de santé ou d'esprit fait en outre déjà de l'article 135 une disposition inadaptée à notre époque. Enfin, force est de constater que cette disposition n'a de tout temps eu qu'une portée pratique très minime.

Quant à la suppression du chiffre 1, 2e et 3e alinéas, ainsi que du chiffre 2 de l'article 135, nous renvoyons au commentaire relatif au chiffre I, 2e et 3e alinéas, ainsi qu'au chiffre 2 de l'article 134, qui leur sont en tous points analogues (cf. ch. 214.7).

Lors de la procédure de consultation, la suppression de l'article 135 a suscité une opposition encore plus réduite que celle manifestée à propos de l'article 134.

214.9

Représentations de la violence (Art. 135 [nouveau])

Le nouvel article 135 est une disposition qui, du moins en ce qui concerne son principe, ne figurait pas jusqu'à présent dans le code pénal. Il punit de l'emprisonnement ou de l'amende la fabrication et toutes les formes de transmission, de publication ou de diffusion de certaines représentations de violence cruelle, ainsi qu'une série d'actes préparatoires à cette infraction.

Considérés sous l'angle des moyens - médias ou supports des représentations punissables - ainsi que des actes, les éléments constitutifs correspondent mot pour mot au nouvel article sur la pornographie (art. 197). Nous renvoyons donc à cet égard aux commentaires relatifs à l'article 197 (cf. ch.

232,41). Les deux dispositions ne diffèrent donc que par la nature des représentations punissables: dans un cas la pornographie, dans l'autre la brutalité. Par conséquent, le nouvel article 135 n'appelle de commentaires que sur la nature des représentations de la violence qu'il entend interdire. Elles sont qualifiées dans le texte de loi de «représentations illustrant avec insistance des actes de cruauté envers des hommes ou des animaux, sans aucune valeur d'ordre culturel ou scientifique digne de protection». Cette formulation exprime le motif essentiel qui a présidé à la création de pareils éléments constitutifs: tout comme la pornographie, les représentations de la brutalité peuvent heurter à l'excès le sens moral ou - ce qui est plus grave -

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influencer le comportement, des jeunes en particulier, d'une manière néfaste à la fois pour eux et pour la société. On a tout lieu de craindre qu'elles n'aient pour effet d'inciter à un comportement grossier et brutal envers d'autres êtres humains. On ne saurait le tolérer, lors même que de nombreuses dispositions répriment le recours effectif à la violence envers autrui.

Au vu de ce qui précède, on comprendra que ce n'est pas la représentation de tous les actes de violence jusqu'aux plus anodins qui doit être punie, mais uniquement celle susceptible d'exercer sur les observateurs les effets négatifs redoutés. Il faut donc se limiter aux formes extrêmes de la représentation de la violence, à la brutalité au sens le plus étroit. Le terme couramment utilisé de «cruauté», que l'on rencontre également dans d'autres dispositions (cf. art. 139, ch. 3, 195, 3e al. CP et articles 198, 190 du projet; ch. 232.21 et 232.22), nous semble parfaitement approprié. Un acte de violence est cruel si dans la réalité il causerait à la victime des souffrances particulièrement graves, qu'elles soient physiques ou morales. Bien souvent, ces souffrances ne sont pas causées par un seul acte de violence très intense, mais par la manière particulière dont la violence est utilisée, par sa durée ou par sa répétition. Elle présuppose en outre que l'auteur est étranger à toute émotion humaine. L'insistance, autre caractéristique de la représentation, exige que celle-ci soit propre à rester gravée dans la conscience de l'observateur. Pour cela, elle ne doit pas nécessairement être longue ou répétée. Une représentation unique, si elle est intense, peut également suffire.

Les représentations doivent par ailleurs être dénuées de toute «valeur d'ordre culturel ou scientifique»; c'est dans ces cas seulement qu'elles portent en elles ce potentiel de danger - du moins pour l'observateur adulte - qui justifie des sanctions pénales. N'ont aucune valeur d'ordre culturel les représentations qui se bornent à montrer des actes de cruauté pour divertir ou amuser. Elles ne doivent pas être confondues avec les documentaires ou les oeuvres artistiques dont le but est d'illustrer pour les prévenir les conséquences de la violence individuelle ou collective, et d'éveiller ou de renforcer le sens critique à son égard. Lorsque la représentation de
ces actes ne déborde pas ce cadre, et qu'elle ne glorifie ni ne minimise la violence, on peut dire qu'elle a une valeur d'ordre culturel.

Pour que la représentation de la violence ait une valeur d'ordre scientifique, il faut qu'elle soit indispensable à l'enseignement ou à la recherche.

La représentation d'actes de cruauté envers des animaux - au sens de l'article premier, 2e alinéa, de la loi sur la protection des animaux (RS 455) - est traitée comme celle qui montre des actes de cruauté envers les humains. En effet, ces deux formes de représentation de la violence peuvent inciter à un comportement brutal envers d'autres êtres humains. Si la disposition sanctionne les actes de violence envers les animaux, c'est dans le but de protéger l'être humain, de sorte que la nouvelle disposition ne recouvre pas l'article 27 de la loi sur la protection des animaux, qui protège l'animal maltraité.

Il est depuis longtemps admis que les représentations de la brutalité peuvent avoir sur les jeunes en particulier un effet au moins aussi néfaste que

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la pornographie. Cette disposition pénale répond donc sans nul doute à un besoin latent. II était cependant difficile de la formuler et de la limiter et c'est certainement pourquoi elle n'a encore jamais fait l'objet d'une disposition légale jusqu'à maintenant. Ce besoin s'est fait particulièrement pressant ces trois ou quatre dernières années puisque, pendant cette période, l'habitude de regarder en privé des films enregistrés sur cassettes-vidéo s'est répandue aussi soudainement que largement. Un marché de plus en plus vaste s'est également développé pour les cassettes montrant des scènes de brutalité, les jeunes - cela est inquiétant - n'étant pas les clients les moins intéressés. Certes, les actuels articles 204 (publications obscènes) et 212 CP (mise en danger de mineurs par des images ou écrits immoraux) permettent d'intervenir dans la mesure où ces produits combinent brutalité et pornographie punissable. Mais seuls certains cantons prévoient, dans leurs dispositions légales sur les contraventions de police, une intervention contre les représentations exclusives de la violence et répriment la diffusion d'écrits, de films, etc., incitant à la brutalité. L'opinion publique a rapidement manifesté le désir de voir cette lacune de la loi comblée au plus vite.

Des interventions émanant de parlementaires de toutes les tendances politiques ont également été déposées aux Chambres fédérales (question ordinaire Oester du 20 septembre 1982; motion Zbinden du 30 novembre 1982; motion Guntern du 14 décembre 1982 et postulat Jaggi du 16 décembre 1982).

Aux termes du chiffre 1, 2e alinéa, les représentations exclusives de la violence doivent être séquestrées par le juge sans qu'il soit nécessaire d'apporter la preuve, exigée par.l'article 58 CP, que de tels produits compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public. Au demeurant, la même réglementation est prévue pour la confiscation des représentations de pornographie dure (cf. en. 232.41).

Si l'auteur a agi par cupidité, le juge devra, accessoirement à la peine privative de liberté prononcée, le condamner à une amende. Nous vous proposons cette réglementation car l'article 50 CP ne prévoit que la faculté pour le juge de condamner accessoirement à une demande le délinquant qui a agi par cupidité.

A notre avis, le projet présenté par
la commission d'experts ne contient aucune disposition qui incrimine certainement la seule représentation de la violence. Nous ne pouvons pas nous rallier d'emblée à l'avis selon lequel l'article 204, chiffre 4, de l'àvant-projet de la commission d'experts, relatif à la pornographie dure, inclurait les actes de violence pure et simple.8' La procédure de consultation a également montré qu'en général, cette disposition n'était pas comprise dans ce sens. Nombre de participants ont en effet réclamé une disposition supplémentaire qui traite spécifiquement des représentations de la violence.

Les recherches étendues de droit comparé auxquelles un a procédé n'ont guère donné de résultat. De tous les pays européens englobés par l'enquête, seules la République fédérale d'Allemagne et la Suède connaissent des dispositions réprimant de manière générale la diffusion de certaines représen-

1061

talions de la violence. La République fédérale d'Allemagne s'apprête à accentuer la sévérité de sa prescription qui, en raison du caractère vague de certaines définitions légales, s'est révélée trop peu efficace. La France, la Grande-Bretagne et l'Italie ne connaissent à cet égard que des dispositions sur la protection de la jeunesse, tandis que l'Autriche, la Belgique et les Pays-Bas se bornent à engager des poursuites pénales contre les représentations de la violence lorsqu'elles sont combinées avec la pornographie.

A étudier la systématique du livre deuxième du code pénal, l'on se rend rapidement compte que sur les dix-neufs titres qu'il contient, seuls le premier (infractions contre la vie et l'intégrité corporelle) et le douzième (crimes ou délits contre la paix publique) peuvent être sérieusement envisagés pour l'intégration du nouvel article. Nous nous sommes finalement décidés à l'insérer au titre premier sous «Mise en danger de la vie ou de la santé d'autrui» (4e sous-titre), car le motif principal qui justifie la répression des représentations de la violence est qu'elles se prêtent à augmenter chez leurs nombreux spectateurs la propension à user de violence contre autrui ou, tout au moins, à favoriser l'indifférence générale à l'égard des actes de violence, II s'agit bien là d'une mise en danger abstraite de la vie et de l'intégrité corporelle d'autrui.

214.10 Procurer à des enfants des substances dangereuses pour la santé (Art. 136) L'actuel article 136 punit des arrêts ou de l'amende celui qui aura servi, ou qui aura fait ou laissé servir à un enfant de moins de seize ans des boisons alcooliques qui, par leur nature ou par leur quantité, nuisent à la santé de l'enfant ou la compromettent. Nous proposons de modifier cette disposition sur trois points essentiels, qui vont tous dans le sens d'une sévérité renforcée. Nous entendons apporter ainsi un élément supplémentaire à une protection de la jeunesse se voulant plus efficace encore, ce qui est d'ailleurs un des objectifs de ce projet.

Jusqu'à présent, seul le fait de procurer de l'alcool à des enfants était punissable. Tombera désormais également sous le coup de cette disposition, la fourniture d'autres substances dangereuses pour la santé, telles que les stupéfiants au sens de l'article premier de la loi sur les stupéfiants (RS 812.121).
Par «autres substances», on entend également les médicaments délivrés sans indication médicale et le tabac. Comme cela est déjà le cas avec l'alcool, le fait de procurer ces substances aux enfants ne sera punissable que si les quantités remises peuvent réellement mettre leur santé en danger. Nous avons réintroduit cette précision dans le texte légal, répondant d'ailleurs ainsi au voeu exprimé dans de nombreuses réponses à la procédure de consultation.

En revanche, la remise de stupéfiants - même en quantité infime - à des enfants doit être punie. La loi établit donc la présomption irréfragable que 1062

la drogue est dangereuse pour les enfants, en quelque quantité que ce soit.

L'on s'écarte ainsi sciemment de l'article I9b de la loi sur les stupéfiants, aux termes duquel celui qui permet à des tiers de consommer des stupéfiants simultanément et en commun après leur en avoir fourni gratuitement n'est pas punissable s'il s'agit de quantités minimes. Il va de soi que l'article 136 CP prime cette disposition. Dans ce contexte, l'article I9b de la loi sur les stupéfiants ne sera plus applicable qu'à celui qui aura fourni gratuitement des stupéfiants à des personnes âgées de plus de 16 ans. En élaborant cette réglementation, la commission d'experts constatait déjà que les jeunes s'adonnaient de plus en plus tôt à la drogue. Situation qui malheureusement ne s'est pas améliorée.

Selon l'actuel article 136, comme d'ailleurs aux termes des articles 134 et 135 en vigueur, ce n'est pas l'acte en tant que tel qui est déterminant pour la punissabilité, mais plutôt le fait que cet acte est néfaste à la santé de l'enfant ou, du moins, qu'il la met concrètement en danger. Il faut donc toujours prouver que tel était l'intention de l'auteur. Avec le nouvel article 136, cette nécessité disparaîtra et c'est là que réside la deuxième innovation d'importance. L'infraction est réalisée par le seul fait de procurer des substances dangereuses,' dans la mesure où la quantité remise suffit en principe à mettre la santé en danger. Il n'est plus besoin de prouver dans chaque cas qu'il y a réellement eu mise en danger. Par conséquent, nous avons désormais affaire à un délit de mise en danger abstraite. Les dommages effectifs causés à la santé par suite d'un tel comportement seront désormais englobés dans les éléments constitutifs de la lésion corporelle, ce qui est beaucoup plus judicieux.

Quant à la troisième modification essentielle, elle fait de cette infraction non plus une contravention mais un délit, puisque l'acte sera désormais puni de l'emprisonnement ou de l'amende. Cette sévérité accrue ne nécessite aucune justification particulière si l'on songe aux graves dangers que l'on fait sciemment courir aux enfants en leur procurant de la drogue.

Pour ce qui est de l'âge limite de protection, nous ne proposons aucune modification du droit en vigueur. Les enfants doivent continuer à être protégés contre ce type de mise
en danger jusqu'à leurs 16 ans révolus. Cet âge limite de protection correspond d'ailleurs à celui fixé dans d'autres dispositions, notamment à l'article 187 de notre projet. La commission d'experts avait, on s'en souvient, proposé de ramener cette limite à l'âge de 14 ans pour cette disposition de même que pour l'article 187, toutefois cette modification a suscité de vives critiques chez de nombreux participants à la procédure de consultation.

Si dans toute une série de réponses à la consultation on salue le fait que la remise de drogue à des enfants sera réprimée, on souhaite toutefois que pareille réglementation soit fixée dans la loi sur les stupéfiants plutôt que dans le code pénal. Cette solution aurait pour avantage que tous les délits ayant trait aux stupéfiants seraient réglés dans une même loi; l'on pourrait y souscrire sans hésiter s'il n'y avait l'article 136 CP. Il appert, du fait même de son existence, qu'il est tout aussi judicieux d'y regrouper toutes les substances dangereuses pour la santé, dont la remise aux enfants doit

1063

être punie. Par ailleurs cette solution est plus simple sur le plan de la procédure, puisqu'elle permet d'éviter une revision partielle de la loi sur les stupéfiants.

Hormis les objections que nous venons de commenter et qui ne portent que sur quelques points, la nouvelle disposition proposée a trouvé un écho presque entièrement favorable lors de la procédure de consultation.

215 215.1

Délits contre la famille Inceste (Art. 213)

.

Les quatre modifications que nous proposons d'apporter à l'actuel article 213 qui réprime l'inceste ne sont pas fondamentales. Notamment, l'acte sexuel entre ascendants et descendants ou entre frère et soeur reste punissable.

Le nouveau titre marginal de la version allemande «Inzest» correspond, à notre avis, beaucoup mieux au langage moderne que le terme de «Blutschande», désuet et inélégant. Certes l'on introduit de nouveau un mot étranger dans le langage législatif, mais pour une fois, cela nous semble être un moindre mal.

Au lieu d'être punies de la réclusion pour trois ans au plus ou de l'emprisonnement pour un mois au moins, comme c'est le cas actuellement, les relations incestueuses seront désormais passibles de l'emprisonnement. De crime, cette infraction devient donc un délit. Cette atténuation, modeste en soi, se justifie déjà par le seul fait que la proposition de la commission d'experts de ne pas punir l'inceste commis entre personnes de plus de 18 ans a trouvé de nombreux partisans lors de la procédure de consultation.

De plus, ce qui a déjà été dit à propos de la modification similaire de l'article 116 (cf. ch. 212.4) s'applique également dans ce cas-ci: prévoir une peine maximale de trois ans de réclusion n'a plus aucun sens, étant donné que depuis la revision partielle de 1971 du CP, réclusion et emprisonnement ne présentent plus de différence quant à leur exécution. Quant à la peine minimale, il faut le plus possible en faire abstraction, conformément à la tendance généralement observée aujourd'hui. Signalons en outre que des relations incestueuses entretenues avec des enfants de moins de 16 ans peuvent également se trouver en concours idéal avec l'infraction définie à l'article 187 du projet (actes d'ordre sexuel avec des enfants) qui prévoit une peine plus sévère (réclusion pour cinq ans au plus ou emprisonnement) (cf. ch.

232.11). Dans pareils cas, une peine allant jusqu'à sept ans et demi de réclusion pourrait donc être prononcée.

II s'agit là toutefois d'une sanction nettement plus douce que celle prévue pour le même acte par l'actuel article 191, chiffre 1, 2e alinéa, (attentat à la pudeur des enfants), à savoir la réclusion pour 2 à 20 ans. Ne serait-ce que dans cette optique, il est juste de ne plus réprimer pareilles relations avec des mineurs de plus de 16 ans par des peines qualifiées; il faut donc biffer l'actuel 2e alinéa de l'article 213. De plus, il peut là aussi y avoir concours 1064

idéal avec l'article 188 du projet (actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes), dans la mesure où l'inceste avec le mineur a abouti par l'exploitation de la dépendance de celui-ci. Aux termes de l'article 68, chiffre 1, dernière phrase, on ne pourrait toutefois en pareils cas prononcer qu'une peine de trois ans d'emprisonnement au plus, puisqu'aussi bien l'article 213 du projet (inceste) que l'article 188 du projet ne prévoient que l'emprisonnement.

Par ailleurs, on ne voit pas pourquoi il faudrait laisser les mineurs impunis uniquement si, comme le veut le droit en vigueur, ils ont été séduits par une personne majeure. Il peut en effet fort bien advenir que des jeunes soient séduits par leurs frères ou soeurs, vieux de quelques années de plus seulement, mais eux aussi mineurs. Logiquement, les personnes séduites devraient également rester impunies dans pareils cas.

Le projet de la commission d'experts prévoyait ici une décriminalisation très poussée. La disposition qu'ils proposaient sur l'inceste se bornait à punir de l'emprisonnement celui qui a commis l'acte sexuel sur un de ses propres enfants ou petits-enfants âgé de 14 à 18 ans. L'inceste commis sur un enfant de moins de 14 ans aurait été alors simplement réprimé par le nouvel article 187 qui sanctionne de manière générale les actes d'ordre sexuel avec des enfants de cet âge (selon notre proposition, les enfants de moins de 16 ans révolus). Les relations incestueuses entre adultes de plus de 18 ans seraient restées totalement impunies, tout comme celles entre frères et soeurs à partir de 14 ans déjà, dans la mesure où l'article 188 du projet sur les actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes n'aurait pas été applicable.

Pour motiver ses propositions, la commission d'experts arguait essentiellement du fait qu'il n'était pas possible de prouver les dommages eugéniques de l'inceste. Toujours selon la commission, les troubles affectant les enfants nés de ce type de relations ne sont pas la conséquence de l'inceste, mais plutôt celle du fait qu'ils vivent dans un environnement familial particulièrement perturbé. La procédure de consultation l'a montré, ce raisonnement a été mal interprété. On n'a pas compris que la commission voulait simplement dire que l'inceste en tant que tel ne cause pas nécessairement des dommages
eugéniques; ce faisant, elle n'entendait pas contester qu'un nombre élevé d'enfants nés de relations incestueuses souffrent de troubles génétiques. Elle estimait par ailleurs qu'on ne peut pas constater des lésions psychiques chez les jeunes victimes âgées de plus de 18 ans. Toujours selon la commission, l'inceste n'est en règle générale pas la cause principale du déséquilibre d'une famille, car il se produit la plupart du temps dans un environnement familial déjà perturbé. Pour les experts, ce sont bien plutôt les poursuites pénales engagées à la suite d'un tel acte qui peuvent être extrêmement néfastes pour la famille en question. A leur avis, la nouvelle disposition doit uniquement servir à protéger les adolescents, afin de leur assurer une atmosphère familiale dans laquelle ils se sentent entourés, soutenus et aidés. La famille n'est plus à même de remplir cette fonction, lorsque les parents ou grands-parents entretiennent des relations sexuelles avec

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leurs descendants, car le rôle d'éducateur et celui de partenaire sexuel ne sont pas compatibles.

Ce raisonnement a été vivement critiqué par les participants à la procédure de consultation et par l'opinion publique. Comme nous l'avons déjà relevé, les considérations des experts sur les risques de voir les enfants nés de relations incestueuses souffrir de troubles eugéniques n'ont trouvé que peu de compréhension. Des doutes ont également été exprimés quant aux possibilités qu'ont en général les jeunes de plus de 18 ans de résister aux avances sexuelles faites par leurs ascendants plus âges. Les descendants adultes, et en particulier les filles, courraient au contraire souvent le risque de devoir subir des actes d'ordre sexuel en raison des rapports de dépendance familiaux.

L'accent a de plus été mis sur le fait que l'inceste n'avait pas pour seule conséquence des dommages psychiques causés aux partenaires à l'inceste mais qu'il remettait en question la famille, en tant qu'institution, ce qui est fondamental. Selon les participants à la consultation, les relations incestueuses entre des personnes de tous âges sont fondamentalement propres à perturber la paix familiale. Pour protéger la famille, mais aussi pour des considérations d'ordre moral, il importerait donc que l'inceste reste punissable. Cela correspondrait d'ailleurs à une opinion saine et largement répandue dans la population, dont il convient de tenir compte: l'interdiction de l'inceste, qui repose sur une longue tradition, serait profondément ancrée dans la conscience populaire. Enfin, dans plusieurs réponses à la consultation, on souligne l'effet préventif de cette disposition pénale, effet qui ne saurait être mis en doute du seul fait qu'un grand nombre d'incestes ne sont pas réprimés.

Ainsi que le montrent nos explications liminaires, nous avons tenu compte de l'opinion négative exprimée par une écrasante majorité des participants à la procédure. Les modifications de l'article 213 que nous vous soumettons - notamment l'atténuation de la sanction et la suppression des peines qualifiées pour l'inceste commis avec des jeunes de 16 à 20 ans - ont toutes reçu un écho favorable lors de la consultation.

215.2

Adultère (Art. 214: abrogation)

L'article 214 CP est depuis longtemps source de, contestation. Selon cette disposition, le conjoint qui aura commis l'adultère et son complice sont, sur plainte du conjoint outragé, punis de l'emprisonnement ou de l'amende si le divorce ou la séparation de corps a été prononcé à raison de cet adultère. Il est douteux que cette disposition ait une quelconque utilité sur le plan de la politique criminelle; aucun argument convaincant ne parle en sa faveur, pas plus du point de vue de la prévention générale que de celui de la prévention spéciale. Les statistiques judiciaires montrent que cette norme a rarement été appliquée ces dernières années. Elle peut devenir, pour le conjoint trompé, un instrument de vengeance qu'il est permis de mettre en doute. Les conceptions modernes n'admettent plus de norme pénale dans

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pareil cas. Les dispositions de droit civil sur la séparation et le divorce, ainsi que leurs effets accessoires, sont suffisantes pour permettre au conjoint effectivement trompé d'obtenir réparation.

La proposition faite par la commission d'experts de supprimer cette infraction a d'ailleurs trouvé lors de la procédure de consultation un écho unanimement favorable.

215.3

Bigamie (Art. 215)

Celui qui, étant marié, contracte un nouveau mariage est, aux termes de l'article 215 actuel, passible d'une peine de réclusion pour cinq ans au plus ou d'emprisonnement pour trois mois au moins. Quant à la personne non mariée qui contracte mariage avec une personne mariée, elle est également punissable, mais moins sévèrement ' puisqu'elle ne viole, en ce qui la concerne, aucun devoir de fidélité; elle n'encourt de ce chef «que» la réclusion pour trois ans au plus ou l'emprisonnement.

Les modifications que nous proposons d'apporter à cette disposition concernent toutes deux les sanctions qui y sont prévues. Il s'agit d'une part de supprimer la distinction que fait la loi entre l'auteur marié et celui qui ne l'est pas. La personne mariée qui contracte un nouveau mariage ne commet pas obligatoirement et de prime abord une faute plus grande que son partenaire célibataire jusqu'alors. Et si tel devait être le cas, il serait toujours possible d'en tenir compte lors de la fixation de la peine, même si la loi prévoit une sanction identique pour les deux protagonistes. La seconde modification apportée à l'article 215 fait de la bigamie non plus un crime mais un simple délit, puisque cette infraction n'est désormais punissable que d'une peine d'emprisonnement. S'il est encore et toujours nécessaire de protéger la monogamie - un des piliers de notre société et de notre culture - sur le plan pénal également, la sanction qui jusqu'à présent a été attachée à la transgression de cette institution paraît trop sévère à l'heure actuelle.

Quant aux autres motifs qui militent en faveur de la suppression des peines de trois ans de réclusion au plus ou de trois mois d'emprisonnement au moins, nous renvoyons aux commentaires qui y sont consacrés dans le présent message (cf. ch. 212.4, 214.1 et 215.1).

Puisque l'auteur non marié et celui qui l'était déjà sont désormais placés sur pied d'égalité en ce qui concerne la peine légale, il est possible de réunir les deux alinéas de l'article 215 actuel en une seule disposition. Par ailleurs, les éléments constitutifs définis au 2e alinéa actuel sont simplifiés, mais ne subissent pas de changement quant au fond. Il est inutile de dire que «la personne non mariée qui aura sciemment contracté mariage avec une personne mariée» sera punie. Il est également inutile de préciser
que l'auteur n'est pas marié; s'il l'était, il tomberait de toute façon sous le coup de la première phrase de la disposition et ce, indépendamment du fait de savoir si le mariage ainsi contracté l'a été avec une personne déjà mariée ou un partenaire célibataire.

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Il convient en outre de supprimer l'adverbe «sciemment». 11 est superflu dans la mesure où il signifie «intentionnellement». Pour que l'infraction soit réalisée, il faut selon les règles générales que l'intention de l'auteur non marié ait porté sur tous les éléments constitutifs objectifs de ladite infraction et, par conséquent, qu'il ait su que son partenaire était déjà marié.

On pourrait certes également interpréter le terme «sciemment» comme caractérisant le dol direct et excluant par conséquent le dol éventuel, comme c'est le cas à l'article 129 actuel (mise en danger de la vie d'autrui; cf. ch.

214.3). 11 n'y a cependant ici aucun motif qui justifie une telle exclusion.

Toutes les modifications commentées ici sont pour l'essentiel reprises de l'avant-projet de la commission d'experts. Elles ont été approuvées presque sans exception lors de la procédure de consultation. L'atténuation de la peine légale a suscité quelques critiques. Nous en avons partiellement tenu compte même si elles ne reflètent nullement l'opinion d'une majorité: contrairement à l'avant-projet de la commission d'experts, qui prévoyait une peine d'amende à titre alternatif, nous n'avons retenu qu'une peine d'emprisonnement. Il s'agit d'empêcher que dans certains cas ne soit prononcée qu'une peine pécuniaire, sanction trop douce à notre avis pour un tel délit, surtout s'il est perpétré par des personnes disposant de moyens financiers importants.

Nous estimons en revanche inutile de préciser que l'infraction ne peut être réalisée que par celui qui est marié «selon le droit suisse». Ce complément, proposé dans l'une des réponses à la consultation, vise à exclure toute punissabilité dans les cas où la Suisse permet le divorce et le remariage d'étrangers, bien que, selon le droit du pays d'origine de l'un ou l'autre des partenaires, le divorce ne soit pas reconnu et que par conséquent le précédent mariage reste valable (mariages dits «boiteux»). C'est précisément parce que le droit civil suisse reconnaît la validité du divorce et du remariage dans de tels cas que ces derniers ne constituent pas un acte punissable au sens de l'article 215 CP. D'autre part, il ne s'agit pas de limiter l'infraction aux seuls cas où le mariage préexistant a été contracté en Suisse, comme on pourrait le déduire de la formulation proposée. La bigamie
est également punissable si le premier mariage a été contracté à l'étranger et est reconnu par le droit suisse. Selon les règles de droit international privé, la forme et la validité du mariage sont en principe régies par le droit du lieu où il a été célébré. Cela signifie aussi que celui qui a contracté valablement plusieurs mariages à l'étranger n'est pas punissable au sens de l'article 215 CP. Il ne peut simplement plus conclure ou avoir conclu un nouveau mariage en Suisse.

215.4

Suppression et falsification d'état civil

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(Art. 216: abrogation) L'article 216 punit de l'emprisonnement, ou, dans les cas graves, de la réclusion pour cinq ans au plus celui qui aura supprimé ou falsifié l'état civil d'autrui, notamment par substitution d'enfant. Cette incrimination ne nous semble plus indispensable: les actes que la disposition réprime tom-

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bent dans bien des cas également sous le coup des articles 253 (obtention frauduleuse d'une constatation fausse) et 254 (suppression de titres), éventuellement 317 CP (faux), puisque souvent ils impliquent la falsification d'un registre. Ce n'est d'ailleurs qu'à ce stade que ces actes sont réellement répréhensibles. Il en va autrement lorsqu'un nourrisson est abandonné ou que deux nouveau-nés sont intervertis. Mais ces cas sont, d'une part, extrêmement rares, et, d'autre part, s'il en résulte une mise en danger de la vie des enfants en question, le nouvel article 219 (violation du devoir d'assistance ou d'éducation) ou l'article 127 (exposition) sont applicables.

Nous nous rallions à la proposition faite par la commission d'experts de biffer cet article, proposition qui d'ailleurs a été très bien accueillie lors de la procédure de consultation. Certes, certains spécialistes du droit civil ont exprimé quelques réserves à cet égard. Le fait que les abandons d'enfants sont extrêmement rares et que, si l'enfant devait en souffrir, ils tomberaient désormais sous le coup d'autres dispositions, ne leur semblent pas des arguments suffisants. Ils estiment que s'il est un bien juridique qu'il convient tout particulièrement de protéger, c'est le lien qui s'établit à la naissance entre l'enfant et la mère ainsi que, si elle est mariée, le père. En d'autres termes, il existerait un droit de l'enfant à connaître ses parents; cet élément capital du droit de la filiation serait remis en question si la mère pouvait impunément se débarrasser de son enfant. C'est pourquoi ils proposent le maintien de l'article 216 en limitant l'applicabilité à la suppression de l'état civil et en atténuant la peine. Pour les motifs susmentionnés, nous maintenons néanmoins notre proposition d'abroger cet article.

215.5

Violation d'une obligation d'entretien (Art. 217)

En modifiant l'article 217 sur la violation d'une obligation d'entretien, nous nous sommes surtout efforcés d'adapter le contenu mais aussi la rédaction de cette norme au nouveau droit de la filiation entré en vigueur le 1er janvier 1978. L'infraction qu'elle sanctionne y est définie de manière beaucoup plus lapidaire et plus simple. L'acte délictueux consiste comme auparavant en la violation d'une obligation d'entretien due en vertu du droit de la famille. La peine légale demeure l'emprisonnement et l'infraction reste un délit poursuivi sur plainte.

Alors qu'actuellement la loi énumère expressément les ayants droit aux aliments ou aux subsides, nous avons renoncé à préciser les obligations dont la violation entraîne l'application d'une sanction pénale. La formulation choisie, qui parle d'aliments ou de subsides dus en vertu du droit de la famille, est suffisamment explicite à cet égard. Il s'agit de toutes les obligations prévues par le livre deuxième du code civil (CC), à savoir: les obligations d'entretien envers le conjoint (art. 1607 161 et 1Q2, 2e al., CC et art, 163 de la LF du 5 oct. 19849)), envers le conjoint divorcé (art. 151 et 152 CC), à l'égard de l'enfant (art. 276 CC); les obligations pécuniaires envers la mère non mariée (art. 295 CC); la dette alimentaire envers les parents (art. 328 et 329 CC). N'est pas compris le devoir d'assistance envers le 72 Feuille fédérale. 137e année. Vol. n

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conjoint dans l'accomplissement de son obligation d'entretien envers les enfants nés avant le mariage, prévu par l'article 278, 2e alinéa, CC. Comme toutes ces dispositions consacrent manifestement et en premier lieu des obligations d'«entretien», il est judicieux de modifier le titre marginal du texte allemand en «Vernachlässigung von Unterhaltspflichten» et de l'adapter ainsi à la version française, qui parle de la violation d'une «obligation d'entretien».

L'actuel 2e alinéa du chiffre 1 est devenu totalement superflu. Il sanctionne la violation des obligations pécunaires qui, selon l'ancien droit civil, incombent au «père alimentaire» envers la personne qu'il a mise enceinte hors mariage, ainsi qu'envers l'enfant né d'une telle liaison. Or le nouveau droit de la filiation a supprimé la paternité alimentaire, ainsi que la distinction entre enfant légitime et illégitime. Une fois la paternité juridiquement établie, il existe un lien de parenté reconnu entre le père et l'enfant. L'obligation d'entretien qui en résulte découle donc bien du droit de la famille et tombe par conséquent sous le coup du nouvel et unique alinéa du chiffre 1.

Il en va de même des prétentions de la mère non mariée.

Les conditions particulières limitant la punissabilité ont elles aussi été considérablement modifiées. Alors qu'aujourd'hui l'auteur doit omettre de s'exécuter par mauvaise volonté, fainéantise ou inconduite pour que l'infraction soit réalisée, la nouvelle disposition exige simplement qu'il ait ou puisse avoir les moyens de s'acquitter de son obligation. Elle punit ainsi également celui qui, d'une part, ne dispose certes pas de moyens suffisants pour s'acquitter de son obligation, mais qui, d'autre part, ne saisit pas les occasions de gain qui lui sont offertes et qu'il pourrait accepter. Cette modification des éléments constitutifs n'est au fond qu'une adaptation à l'interprétation soutenue depuis des années par le Tribunal fédéral, selon laquelle est réputé avoir agi avec mauvaise volonté celui qui sans motifs suffisants ne veut pas payer, alors qu'il pourrait le faire (cf. ATF 73 IV 178).

Pratiquement, seule la complète impécuniosité a été reconnue comme constituant un motif suffisant. Cette jurisprudence a par conséquent fait perdre toute signification aux motifs tirés de la «fainéantise» et de l'«inconduite».
La dernière modification concerne le chiffre 2, qui prévoit actuellement que - outre les personnes mentionnées à l'article 28 CP - le droit de porter plainte appartient aussi aux autorités désignées par le canton. Dorénavant, ce droit sera également conféré aux «services» autorisés à cet effet. Nous entendons par là les offices et les organismes privés qui s'occupent du recouvrement de telles créances.

Le projet de modification de l'article 217 proposé par la commission d'experts n'apportait pas de changements aussi profonds au texte actuel que la disposition que nous soumettons à votre appréciation. II est vrai que c'est la commission qui a suggéré de modifier les conditions particulières de la punissabilité afférentes à la personne de l'auteur. C'est elle aussi qui a proposé d'étendre aux organismes privés le cercle des requérants autorisés à porter plainte. Pour le surplus, les experts ne voulaient que supprimer l'expression «en vertu du droit de la famille» contenue au chiffre 1, I er alinéa, et maintenir le 2' alinéa de ce même chiffre 1, qui concerne les obligations

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pécunaires envers la femme mise enceinte hors mariage ou envers un enfant illégitime. Ils estimaient cette disposition nécessaire parce qu'elle permet aussi de réprimer l'inexécution des obligations résultant de la paternité alimentaire de l'ancien droit, obligations qui subsisteront au plus tard jusqu'en 1996. Les civilistes sont cependant d'un avis contraire. Ils estiment que ces obligations peuvent purement et simplement être assimilées aux aliments et subsides dus en vertu du droit de la famille, ce qui rend toute réglementation transitoire superflue. Ce faisant, on évite également de maintenir dans le code pénal la notion d'enfant illégitime, que le droit revisé de la filiation ne connaît plus.

Enfin, en abandonnant une telle disposition, on supprime ajuste titre toute protection pénale aux prétentions fondées sur une simple convention d'entretien, parce que la mère non mariée a refusé de révéler l'identité du père, empêchant ainsi que la paternité soit juridiquement établie et qu'un rapport de filiation soit fondé. Ces prétentions purement conventionnelles ne méritent plus aucune protection pénale puisqu'on vertu du droit civil revisé il n'existe plus ou né devrait plus exister de paternité purement alimentaire, dans l'intérêt même de l'enfant. En réprimant l'inexécution de telles obligations, on aurait frisé en outre la violation de l'interdiction constitutionnelle de la prison pour dettes (art. 59, 3e al., Cst). La proposition de la commission d'experts de supprimer l'expression «en vertu du droit de la famille» au chiffre 1, I 5r alinéa, aurait permis également de réprimer l'inexécution des obligations d'entretien purement conventionnelles envers les proches et qui ne découlent pas du droit de la famille. Ce faisant, on se serait rapproché encore plus de la prison pour dettes aujourd'hui abolie. C'est pour toutes ces raisons que nous avons apporté des modifications aussi considérables à l'avant-projet de la commission d'experts.

215.6

Abandon d'une femme enceinte (Art. 218: abrogation)

Aux termes de l'article 218, celui qui aura abandonné dans une situation critique une femme non mariée qu'il sait enceinte de ses oeuvres et l'aura ainsi livrée à la détresse sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement. II y a lieu de supprimer cette disposition formulée de façon malheureuse et quasiment dénuée de portée pratique. Elle est discutable, car elle réprime la violation d'une obligation morale dont l'étendue n'est pas définie avec précision. En outre, la revision du code civil a amélioré considérablement la situation de la mère célibataire du point de vue de ses prétentions financières (cf. art. 282, 283 et 295 CC), ce qui a également des implications durant la période de la grossesse. La femme enceinte qui n'est pas mariée ne se trouve dès lors plus si facilement dans la détresse, même si l'on doit admettre que l'article 218 CP ne comprend pas la détresse dans un sens exclusivement matériel.

La grande majorité des participants à la procédure de consultation s'est prononcée en faveur de la proposition faite par la commission d'experts d'abroger cet article.

1071

215.7

Violation du devoir d'assistance ou d'éducation (Art. 219)

Le délit sanctionné par l'article 219 actuel - qui porte le titre marginal de «violation du devoir d'élever un enfant» - ne peut être commis que par les parents qui se sont déchargés de leur enfant en le confiant à long terme aux soins de personnes chez lesquelles, ainsi qu'ils le savaient ou devaient le présumer, cet enfant est moralement ou matériellement en danger. Cette disposition qui a trait à un cas particulier de violation punissable du devoir d'éducation n'a eu qu'une portée très minime dans la pratique.

Nous proposons de lui substituer une nouvelle disposition qui a moins de points communs avec la prescription actuelle qu'on ne pourrait le penser de prime abord au vu de son emplacement et de l'analogie de son titre marginal. Elle est plutôt destinée à remplacer les délits de mise en danger sanctionnés notamment aux articles 134 et 135, qui sont supprimés (cf. ch.

214.7 et 214.8). L'infraction consiste en la violation ou la non-observation de tout devoir d'assistance ou d'éducation qu'une personne est appelée à assumer à l'égard d'un mineur. Le cercle des auteurs potentiels comprend par conséquent tous ceux qui ont le devoir d'assister ou d'élever une personne mineure en vertu de la loi, de leur fonction, de leur profession, d'un contrat ou qui exercent cette charge de fait. Ce ne sont donc pas seulement les parents, mais aussi les maîtres d'école et les tuteurs par exemple qui peuvent entrer en ligne de compte comme auteurs du délit. Cette disposition n'entend pas protéger seulement les mineurs de moins de 16 ans, mais tous les jeunes jusqu'à leur majorité. Jusqu'à ce moment-là, les personnes chargées de leur assistance ou de leur éducation ont des responsabilités importantes, notamment en ce qui concerne la formation.

La violation des devoirs susmentionnés n'est punissable que si elle a mis en danger le développement physique ou psychique de l'enfant ou de l'adolescent. Il s'agit donc d'un délit de mise en danger concrète. Sans cette restriction, on étendrait à l'excès le domaine de la répression pénale en punissant même les manquements les plus anodins. 11 faut donc, pour qu'une peine puisse être prononcée et soit nécessaire du point de vue de la politique criminelle, que le développement psychique et physique de la victime soit véritablement mis en danger. D'autre part, c'est à
dessein qu'on a renoncé à exiger que la mise en danger soit grave. L'expérience faite avec les articles 134 et 135 du droit actuel a montré qu'une restriction aussi importante compromettait notablement l'efficacité de ces incriminations (cf. ch.

214,7 et 214.8). C'est également pour prévenir le manque d'efficience qui pourrait résulter de ce que la culpabilité de l'auteur ne peut souvent être qu'insuffisamment prouvée que la commission par négligence a elle aussi été déclarée punissable. Comme dans les cas de simple négligence la faute peut être moindre, il convient de prévoir la possibilité de ne prononcer qu'une peine d'amende.

A l'exception du 2e alinéa, que nous avons quelque peu précisé, la nouvelle teneur de l'article 219 CP correspond à l'avant-projet de la commission d'experts. Elle a été approuvée par la plupart des participants à la procédu1072

re de consultation. Seuls quelques uns ont rejeté le principe de cette incrimination, estimant qu'elle ne satisfait pas à l'exigence de précision inhérente au principe de la légalité, établi par l'article premier CP, et qu'elle permet ainsi une ingérence illimitée de l'Etat dans les domaines de l'assistance et de l'éducation. A leur avis, le droit civil offre à cet égard des possibilités d'intervention suffisantes. Quelques autres participants souhaitent que l'on subordonne la punissabilité à la gravité de la violation et à l'importance de la mise en danger. Nous avons déjà exposé ci-dessus les raisons qui militent en faveur de la suppression d'une telle restriction. Il n'est pas nécessaire non plus d'élargir la protection offerte par l'article 219 aux adultes assistés, comme cela a été proposé. Ceux-ci peuvent se défendre eux-mêmes, du moins s'ils sont capables de discernement. Si tel n'est pas le cas, la personne chargée en premier lieu d'assister l'incapable devrait être un tuteur qui - comme on sait - est placé sous la surveillance de l'Etat.

La commission d'experts avait prévu d'ajouter à l'article 219 un nouvel alinéa 3 qui oblige les autorités judiciaires pénales à informer les autres autorités compétentes des infractions définies aux 1er et 2e alinéas, afin que ces dernières puissent prendre, le cas échéant, d'autres mesures nécessaires à la protection des mineurs concernés. Elle avait également proposé un 4e alinéa, pour conférer aux personnes tenues d'observer le secret professionnel ou de fonction, au sens des articles 320 et 321 CP, le droit de dénoncer les violations du devoir d'assistance ou d'éducation aux autorités tutélaires ou de protection de la jeunesse. A cet égard, nous proposons d'étendre ces obligations et droits d'information à d'autres infractions et de faire des nouveaux articles 358bis et 358lcr le siège de cette matière (cf. ch. 216.1 et 216.2).

215.8

Enlèvement de mineur (Art. 220)

L'article 220 actuel punit celui qui aura soustrait ou refusé de remettre un mineur à la personne qui exerce la puissance paternelle ou la tutelle. Nous n'avons apporté à cette disposition qu'une simple modification matérielle: le verbe «vorenthält» est remplacé par l'expression «sich weigert, sie ihm zurückzugeben». Par là, nous n'entendons pas seulement adapter la disposition en allemand aux versions française et italienne du droit en vigueur, mais également introduire une modification matérielle qui limite en quelque sorte cet élément constitutif. En effet, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 99 IV 271 ss), celui qui héberge et nourrit de jeunes fugueurs, ne serait-ce que pendant peu de temps, peut de ce seul fait se voir inculpé de refus de remettre le mineur à l'ayant droit. Nous pensons, tout comme la commission d'experts, que c'est aller trop loin. On criminalise ainsi, selon les circonstances, celui qui, par serviabilité ou par sympathie, accueille des jeunes qui par exemple ont fui un foyer familial perturbé ou qui, pour d'autres raisons, se trouvent dans une situation de détresse. Cette disposition ne peut pas, à l'extrême, contraindre à refuser toute aide aux jeunes et à les laisser à la rue, alors même que l'article précédent punit de 1073

l'emprisonnement celui qui en manquant à son devoir d'assister un mineur, met en danger le développement physique ou psychique de celui-ci.

Il s'agit par ailleurs de tenir compte des intérêts de celui qui, en vertu de la loi, exerce l'autorité parentale ou la tutelle. Lui garantir une protection par le biais du droit pénal se justifie si le «refus de remettre» le mineur implique un comportement actif de la part de l'auteur et que cet agissement soit comparable à un «enlèvement» punissable. Il faut pour cela, en plus d'offrir le gîte et le couvert, exercer sur le mineur une influence supplémentaire qui équivale à une violence effective, au fait de le retenir. Celui qui refuse de remettre un mineur à ses parents, à l'un de ses parents ou à son tuteur signifie dans tous les cas clairement qu'il s'associe sciemment et volontairement à la persistance de l'illégalité de l'enlèvement.

Le texte français ne subit qu'une modification purement rédactionnelle: l'expression «puissance paternelle» doit être remplacée par «autorité parentale», afin de rétablir la concordance avec la terminologie du code civil.

La commission d'experts avait prévu d'apporter à cette infraction des restrictions plus importantes que celles que nous proposons maintenant. Son intention était de biffer purement et simplement le verbe «vorenthalten», afin d'éliminer les problèmes causés par l'interprétation extensive de ce terme. Elle avait en outre introduit l'élément de la durabililé, notamment pour éviter que les époux divorcés n'en viennent, par le biais de cet article, à vider leurs querelles au sujet de l'exercice du droit de visite par devant les tribunaux pénaux. Mais l'objectif premier de la commission était d'empêcher que cette disposition ne fût employée comme moyen de combat dans la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale ou dans les procès en divorce. C'est pour cette raison qu'elle proposait de limiter expressément le cercle des auteurs aux personnes n'exerçant plus aucune autorité parentale sur le mineur concerné. Tel était, à son avis, le sens premier de cette disposition. Ces restrictions ont suscité une vague de refus lors de la procédure de consultation. Alors que de nombreuses critiques ne constituant toutefois pas une majorité - se sont élevées contre l'introduction du caractère de «durabilité»,
la limitation du cercle des auteurs dans le sens décrit ci-dessus et la suppression pure et simple du verbe «vorenthalten» n'ont provoqué que peu d'opposition.

Si nous avons finalement décidé de tenir largement compte de ces objections, c'est aussi parce que les spécialistes du droit international privé, directement confrontés aux problèmes des rapts d'enfants à l'étranger, ont exprimé les doutes les plus sérieux à rencontre de la définition restrictive de l'infraction proposée par la commission d'experts. Les statistiques montrent qu'en fait l'article 220 CP s'est appliqué presque exclusivement ces dernières années à des affaires impliquant des étrangers qui enlevaient ou tentaient d'enlever leurs entants pour les conduire dans leur pays d'origine et qui, partant, empêchaient l'exercice de l'autorité parentale par son titulaire en Suisse. Cela tend à prouver que cette incrimination, avec l'effet préventif qu'elle exerce sans nul doute dans sa forme actuelle, est nécessaire surtout dans de pareils cas. Les modifications proposées par la commission d'experts auraient annulé presque complètement cet effet. Car en limitant

1074

le cercle des auteurs aux personnes non-titulaires de l'autorité parentale, on laisserait précisément aux affaires d'enlèvement les plus fréquentes toute chance de rester impunies. Un arrêt récent du Tribunal fédéral (cf. ATF 110 IV 35) établit clairement qu'une personne qui exerce encore l'autorité parentale avec son conjoint peut se rendre coupable d'enlèvement de mineur et tombe à juste titre sous le coup de l'article 220 CP. Cet arrêt concerne un père qui, après avoir exercé son droit de visite, a refusé de rendre l'enfant à sa mère, dont il n'était pas encore divorcé mais séparé judiciairement. Il a ainsi violé la décision judiciaire qui avait confié la garde de l'enfant à la mère pour la durée de la procédure de divorce et qui n'avait accordé au père qu'un droit de visite.

L'introduction du caractère de durabililë aurait elle aussi réduit sensiblement l'efficacité de cette incrimination. Dans bien des cas, il ne serait en effet plus possible d'intervenir assez rapidement contre l'auteur présumé car au moment décisif les soupçons pesant sur lui quant à son intention de soustraire durablement l'enfant seraient encore insuffisants. Or il est capital d'intervenir avant que l'auteur n'ait quitté la Suisse avec l'enfant. En effet, une fois celui-ci à l'étranger, il est extrêmement difficile de l'en faire revenir, même en usant de toutes les possibilités offertes par l'entraide judiciaire internationale.

Dans quelques rares réponses à la consultation, on a demandé que l'enlèvement en cas de «simple» droit de garde soit également réprimé. Dans tous les cas où le mineur est retiré ou retenu loin d'un foyer ou d'un autre établissement de soins dans lequel il séjourne avec l'accord du titulaire de l'autorité parentale ou tutélaire, une telle répression n'est pas nécessaire.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 99 IV 269 s.), l'article 220 CP est en effet applicable en pareil cas. Si, en revanche, le mineur séjourne dans un tel entrait en vertu d'une décison prise par le Tribunal des mineurs et qu'il en soit retiré, ni l'article 220, ni l'article 305 CP sur l'entrave à l'action pénale ne sont applicables. C'est pourquoi quelques participants à la procédure ont demandé que l'article 305 CP soit modifié en conséquence. Mais nous sortirions du cadre de la présente revision. L'article 305
CP a en effet pour but de protéger l'administration de la justice, tandis que l'article 220 CP protège les droits de celui qui exerce l'autorité parentale ou tutélaire. Enfin, il n'existe selon nous aucune nécessité de protéger par le biais de l'article 220 CP - ainsi qu'on l'a parfois demandé - le droit de visite de celui des parents qui n'a plus l'autorité parentale. L'article 292 CP (insoumission à une décision de l'autorité) devrait, à cet égard, être suffisant.

216 216.1

Avis concernant des infractions commises à l'encontre de mineurs Obligation d'aviser (Art. 358bis)

On constate fréquemment, lors de poursuites relatives à des infractions 1075

commises à rencontre de mineurs, que d'autres mesures - souvent tout aussi importantes que les sanctions pénales - auraient été nécessaires pour protéger les mineurs en question. L'article 358bis fait obligation aux autorités de poursuite pénale concernées (cf. ch. 211) d'aviser immédiatement l'autorite tutélaire en pareil cas.

La nouvelle disposition élargit l'obligation d'aviser telle qu'elle est consacrée au chiffre 2 des actuels articles 134 et 135. Ces deux articles se bornent en effet à faire obligation au juge d'aviser les autorités de tutelle des cas de mauvais traitements et de négligence envers les enfants ou de surmenage des enfants, au sens de leurs chiffres premiers respectifs. Ainsi que nous l'avons exposé précédemment, ces deux dispositions doivent être abrogées et remplacées notamment par l'infraction de mise en danger nouvellement définie à l'article 219 (cf. ch. 214.7 et 215.7). C'est pourquoi la commission d'experts proposait d'introduire également à l'article 219, 3e alinéa, une obligation d'informer plus large, régie par des modalités nouvelles: en cas de violation du devoir d'assistance ou d'éducation au sens de l'article 219, 1er et 2e alinéas, du projet, toutes les autorités judiciaires pénales, et non plus seulement le juge, auraient ainsi été tenues d'informer, en particulier, les autorités tutélaires ou scolaires et les autorités -d'assistance ou de protection de la jeunesse.

Il est très important d'étendre l'obligation d'aviser à toutes les autorités de poursuite pénale. Les mesures supplémentaires sont en effet souvent prises trop tard, si les autorités compétentes ne sont informées que lors du jugement. On ne voit pas non plus pourquoi l'obligation d'aviser ne serait imposée qu'en ce qui concerne l'acte réprimé à l'article 219 du projet. Elle semble tout aussi indispensable en cas de lésions corporelles, de.voies de fait, d'abus en matière sexuelle ou lorsque des substances dangereuses pour la santé sont procurées à des enfants. Nous proposons dès lors d'introduire l'obligation d'aviser pour toutes les infractions commises à rencontre de mineurs; il faudra naturellement que durant la procédure les autorités de poursuite pénale reconnaissent la nécessité de prendre des mesures supplémentaires qui sont de la compétence d'une autre autorité. Contrairement à la proposition
de la commission d'experts, nous limitons l'obligation d'aviser aux autorités tutélaires, à l'instar de l'actuel article 134, chiffre 2. En effet, elles sont les autorités types de protection de la jeunesse. C'est à elles qu'il appartient de décider dans chaque cas si des mesures supplémentaires doivent être prises - et dans l'affirmative de quelle nature - et si d'autres autorités ou services doivent être avisés.

Quant à la place qu'il convient de réserver à cette nouvelle disposition dans le code pénal, force est de constater qu'il est impossible de l'intégrer au titre quatrième du livre troisième. Celui-ci traite en effet de l'entraide entre la Confédération et les cantons, ainsi que de l'entraide intercantonale. En l'occurrence il s'agit au contraire d'une sorte d'entraide entre autorités civiles et autorités pénales, la plupart du temps au sein du même canton. Nous avons renoncé à intégrer le nouvel article dans les dispositions générales sous «autres mesures» (art. 57 à 62 CP) pour ne pas donner l'impression que l'obligation d'aviser est en quelque sorte une sanction. En faire un

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complément à l'article 371 CC n'aurait guère été judicieux, car ceux à qui cette disposition s'adresse n'auraient pas eu l'idée d'aller la chercher là.

L'obligation d'aviser, telle qu'elle était proposée à l'article 219, 3e alinéa, de l'avant-projet de la commission d'experts, n'a suscité que peu de commentaires lors de la procédure de consultation. Les quelques rares critiques formulées à cet égard allaient toutes dans le sens d'un renforcement de cette obligation: soit en donnant à la disposition en question un caractère général - comme le fait notre projet - soit en faisant obligation aux autorités de poursuite pénale de former recours devant les autorités de surveillance pour le cas où leur avis resterait sans suite. Cette dernière solution n'aurait guère été judicieuse, l'autorité ainsi avisée devant pouvoir décider en toute liberté si des mesures supplémentaires doivent être prises et si oui, lesquelles.

216.2

Droit d'aviser (Art. 358'")

Si l'article 358bis doit remplacer en partie des prescriptions destinées à être abrogées (art. 134, ch. 2 et 135, ch. 2), l'article 358ter est une disposition entièrement nouvelle, même quant au fond. Elle a pour but de délier du secret professionnel ou de fonction les personnes qui normalement y sont astreintes en vertu des articles 320 et 321 CP, afin qu'elles puissent signaler aux autorités tutélaires les infractions commises à l'encontre de mineurs et dont elles ont eu connaissance. Certes, aujourd'hui déjà, secret de fonction et secret professionnel ne sont pas protégés de manière absolue, puisque les chiffres 2 des articles 320 et 321 CP prévoient qu'ils peuvent être levés avec le consentement de l'autorité supérieure ou du détenteur du secret. En outre, l'article 321 CP réserve expressément l'obligation de renseigner ou de témoigner. Enfin, l'article 358ter - comme d'ailleurs l'article 14, 4e alinéa, de la loi sur la circulation routière (RS 741.01) - dispense les intéressés de la nécessité quelque peu pesante d'obtenir le consentement de l'autorité supérieure et leur permet, en cas d'urgence, de fournir sans délai des informations. A la différence de l'article 358bis, cette disposition ne fonde aucune obligation, mais uniquement un droit d'aviser. Concrètement, c'est donc au détenteur du secret et à lui seul qu'il appartient de décider si un avis à l'autorité tutélaire est réellement «dans l'intérêt des mineurs», comme le veut l'article 358lcr. A cet égard, il n'en va pas seulement de l'intérêt de la victime de l'infraction au sujet de laquelle on va donner des informations, mais aussi de celui d'autres mineurs (p. ex. des frères et soeurs ou des camarades d'école de la victime) dont la protection contre d'autres infractions nécessite éventuellement des mesures particulières. Il s'agit dans chaque cas de peser le pour et le contre: les responsables ne peuvent donc pas donner des informations à la hâte - dont les conséquences seraient plutôt néfastes ni les autorités s'immiscer de manière injustifiée dans la vie privée d'une famille. Si le détenteur du secret commet une erreur dans l'appréciation de cette question ou sur l'existence d'une infraction comme condition justifiant l'information, il peut invoquer l'erreur sur les faits au sens de l'article 19 CP.

1077

La disposition correspond à l'article 219, 4e alinéa, proposé par la commission d'experts, à la différence importante toutefois que, comme pour l'article 358bis, le droit d'aviser n'est pas limité aux seules violations du devoir d'assistance ou d'éducation au sens de l'article 219, 1er et 2e alinéas, du projet, mais concerne au contraire toutes les infractions commises à ['encontre de mineurs (cf. ch. 216.1).

Les remarques formulées à propos de l'article 358bls, au sujet des réponses à la procédure de consultation, s'appliquent également dans une large mesure à cette question (cf. ch. 216.1).

Etant donné que la présente disposition prévoit une exception aux articles 320 et 321 CP, elle aurait pu aussi être rangée à leur côté dans le code. Il nous a semblé cependant plus commode de l'intégrer à la suite de l'article 358bls sur l'obligation pour les autorités de poursuite pénale d'aviser, puisqu'elle lui est apparentée, et de renvoyer expressément aux articles 320 et 321 CP. Pour ce qui est de l'intégration au titre quatrième, nous renvoyons aux commentaires relatifs à l'article 358bls (cf. ch. 216,1).

22

Commentaire du projet A relatif au code pénal militaire (Disposition générale; crimes ou délits contre la vie et l'intégrité corporelle)

Le code pénal militaire doit être adapté aux modifications apportées au code pénal. Cela concerne la disposition suivante de la partie générale: Art. 47a (nouveau) (exemption de poursuite ou de peine) Dans son principe, le nouvel article 41a CPM correspond à l'article 66bls du projet. Dans le contexte de l'enquête de justice militaire, on ne saurait toutefois pas parler d'autorité compétente qui renonce à poursuivre. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons la formule suivante: «Si l'auteur . . . , il y aura lieu de renoncer à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.» Les dispositions suivantes de la partie spéciale sont modifiées: Article 116, 1er alinéa (Assassinat) Article 117 (Meurtre par passion) Article 118 (Meurtre sur la demande de la victime) Article 121 (Lésions corporelles graves) Article 122, ch. 2 et 3 (Lésions corporelles simples. Voies de fait: abrogation) Article 123 (Conséquences fortuites d'une lésion corporelle: abrogation) Article 125 (Provocation en duel: abrogation) Article 126 (Excitation au duel: abrogation) Article 127 (Duel: abrogation) Article 128 (Rixe)

1078

Article 12Sa (nouveau) (Agression illicite) L'article 128a CPM est semblable au nouvel article 134 CF. Toutefois, nous vous proposons d'y apporter la modification suivante: «celui qui aura participé sans droit à une agression ...». A défaut de cette précision - comme l'a relevé à juste titre le Tribunal militaire de cassation - les éléments constitutifs de l'infraction viseraient un comportement qui en cas de guerre constitue une obligation pour le soldat. 11 s'agit donc d'établir ainsi que seule l'agression commise sans droit est punissable. Cette précision n'est pas nécessaire dans le cadre du nouvel article 134 CP puisque, en vertu de l'article 32 CP, un acte ordonné ou permis par la loi ne constitue pas une infraction. En revanche, la partie générale du code pénal militaire ne connaît pas un tel fait justificatif. Eu égard à ce problème, le Tribunal militaire de cassation a proposé d'introduire une disposition similaire dans la partie générale du code pénal militaire. Ce serait toutefois, à notre avis, outrepasser les limites de la présente revision. L'examen de cette question doit être ajournée jusqu'au moment de la revision de la partie générale du code pénal militaire.

23 231

Commentaire du projet B de re vision du code pénal (Moeurs) Généralités

II est évident que notre conception actuelle de la sexualité a bien changé par rapport à celle qui prévalait à l'époque de l'élaboration du code pénal et de son titre cinquième, consacré aux «infractions contre les moeurs».

11 est donc temps d'adapter ces dispositions pénales à la mentalité actuelle de notre société.

Si le principe d'une telle adaptation n'a pas été combattu lors de la procédure de consultation, les opinions divergent toutefois sur le point de savoir ce qu'il convient de considérer encore comme répréhensible et ce qui ne l'est plus.

Sous réserve de ces opinions divergentes, nous souscrivons aux considérations de principe émises par la commission d'experts: le citoyen doit, selon notre conception de l'Etat, être libre de se comporter comme il l'entend pour autant que, ce faisant, il ne cause pas de dommage à autrui. Cela vaut tout particulièrement pour le comportement sexuel, qui fait partie de la vie privée de chaque individu. Il ne doit être réprimé que s'il lèse ou est de nature à léser autrui, ou si l'un des partenaires n'a pas pleinement la faculté de se déterminer face à un tel comportement, ou encore s'il y a lieu d'empêcher que quelqu'un prenne connaissance contre son gré d'actes d'ordre sexuel.

Nous avons tenu compte de ces principes lors de la modification du titre cinquième, notamment en ce qui concerne les propositions suivantes, qui reprennent celles de la commission d'experts et qui ont été approuvées lors de la procédure de consultation.

1079

S'agissant du libellé du titre cinquième, nous avons évité d'employer le terme de moeurs, qui a une consonnance quelque peu moralisatrice, et qu'il s'agit de ne pas confondre avec les bonnes moeurs. C'est pourquoi nous proposons de le changer en «infractions d'ordre sexuel».

Pour des motifs analogues, nous proposons de remplacer de manière générale les termes d'«attentat à la pudeun> et d'«actes contraires à la pudeur» par l'expression «actes d'ordre sexuel», exempte de tout jugement de valeur.

Un premier chapitre, intitulé «mise en danger du développement de mineurs», est consacré à la protection de la jeunesse, à laquelle le droit pénal ménage une place de tout premier plan dans ce domaine. Les deux chapitres suivants contiennent des dispositions qui protègent la faculté de se déterminer: d'une part, en ce qui a trait aux «atteintes à la liberté et à l'honneur sexuels», qui font l'objet du chapitre deuxième; d'autre part, en ce qui concerne l'«exploitation de l'activité sexuelle», à laquelle le chapitre troisième est consacré. Cette nouvelle articulation du texte légal exige une nouvelle numérotation.

232 Infractions d'ordre sexuel 232.1 Mise en danger du développement de mineurs 232.11 Actes d'ordre sexuel avec des enfants (Art. 187) Cette disposition remplace l'article 191 CP (attentat à la pudeur des enfants).

Age limite de protection II s'agit d'assurer à l'enfant un développement paisible jusqu'à ce qu'il ait atteint la maturité nécessaire pour consentir de manière responsable à des actes d'ordre sexuel. Cette protection, nous vous proposons de la garantir aux enfants jusqu'à l'âge de 16 ans, comme c'est le cas actuellement.

Le droit actuel connaît déjà une limite fixe de l'âge. Elle a l'avantage décisif de la précision par rapport à une réglementation qui se fonderait sur l'immaturité de l'enfant dans le cas particulier. Si la maturité était déterminante, l'auteur pourrait facilement se libérer de toute peine en faisant valoir qu'il était dans l'erreur quant à cette circonstance, précisément difficile à déterminer. Si l'expérience sexuelle de l'enfant devait jouer un rôle, la procédure pénale deviendrait un procès de la victime tendant à prouver sa perversion.

La commission d'experts a également opté pour un âge limite fixe. Considérant toutefois que la maturité physique, plus précoce
aujourd'hui qu'autrefois, implique chez les jeunes une accélération du développement psychique, elle préconisait l'abaissement de cette limite à 14 ans. Elle s'est surtout fondée sur des recherches criminologiques empiriques, qui font état d'un comportement provocateur chez les victimes proches de l'âge limite de protection.10)

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Lors de la procédure de consultation, aucune majorité ne s'est dégagée en faveur d'un âge limite de protection fixé à 14 ans.

Une forte minorité s'est exprimée en faveur d'un âge limite de 15 ans. Ses principaux arguments sont les suivants: - Cet âge limite de protection correspond à celui qui détermine la responsabilité pénale de l'enfant (art. 82 et 89 CP); - Cet âge met fin en principe à l'obligation de fréquenter l'école, ce qui est aussi le cap qui sépare l'enfance de l'adolescence; - D'une manière générale, la fixation de l'âge limite de protection à 16 ans ne correspond plus aux circonstances actuelles de la vie; tant la conception de la sexualité que le comportement des jeunes se sont modifiés.

C'est la raison pour laquelle les autorités de poursuite pénale renoncent de plus en plus à la poursuite de ce que l'on appelle les «infractions contre les moeurs» lorsque la victime est proche de l'âge limite de protection. Le grand nombre de délits d'ordre sexuel non poursuivis montre bien à quel point l'application du droit actuel est difficile.

Une autre minorité importante s'est exprimée en faveur du maintien de l'âge limite actuel, soit 16 ans. Elle conteste que la maturité psychique aille de pair avec le développement physique, plus précoce aujourd'hui, et refuse une limite d'âge fixée à 14 ou 15 ans. Le fait que les jeunes soient informés plus tôt et mieux qu'autrefois ne leur garantit pas toujours une maturité d'esprit suffisante. Que les enfants proches de l'âge limite de protection prennent souvent l'initiative d'actes d'ordre sexuel n'est pas un argument de poids face aux conséquences que pourrait avoir l'abaissement de cette limite: risques de grossesses précoces et d'avortements, puisque l'administration de contraceptifs à base d'hormones aux adolescentes n'est pas indiquée médicalement; risque aussi que la suppression de l'effet préventif de l'âge limite de protection actuel ne soit comprise des adolescents comme le signal d'une plus grande liberté sexuelle.

Compte tenu des avis susmentionnés, nous avons décidé de maintenir la limite d'âge de 16 ans. Cette décision n'a pas été facile à prendre, d'autant moins que la tendance politico-juridique en faveur d'une libéralisation en la matière a influé sur les législations étrangères.1" Le fait que de larges cercles de la population
rejettent cette libéralisation nous a toutefois semblé plus décisif. Il convient de tenir compte de ces considérations d'ordre moral, qui s'appuient d'ailleurs sur de bonnes raisons.

Acte incriminé Ce qui est désormais interdit, c'est la participation d'un enfant à un acte d'ordre sexuel. Contrairement à l'article 191 CP, la nouvelle disposition ne fait donc plus aucune distinction entre l'acte sexuel, les actes analogues ou ceux contraires à la pudeur.

L'expérience montre qu'un acte analogue à l'acte sexuel, voire d'autres actes d'ordre sexuel, sont de nature - selon les circonstances et la façon dont ils ont été commis-à traumatiser davantage l'enfant que l'acte sexuel luimême. La notion d'acte analogue à l'acte sexuel a fait l'objet d'une interprétation large (cf. notamment ATF 86 IV 178), qui a rendu plus difficile

1081

encore la distinction d'avec les autres actes contraires à la pudeur.12) La notion à la fois plus large et plus concise d'actes d'ordre sexuel supprime ces difficultés et permet aussi de simplifier quelque peu l'interrogatoire de l'enfant au cours de la procédure pénale.

Par actes d'ordre sexuel, on entend comme aujourd'hui les actes tant hétéro- qu'homosexuels.

En ce qui concerne la commission de l'acte d'ordre sexuel, le chiffre 1 coïncide avec le contenu de l'article 191, chiffre 2, du droit actuel. Il punit celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant ou qui l'aura entraîné à commettre un tel acte, ou encore qui l'y aura mêlé.

La commission d'un acte d'ordre sexuel sur un enfant suppose que celui-ci y participe directement, ne serait-ce que passivement.

Entraîner l'enfant à un acte d'ordre sexuel signifie lui demander de commettre un tel acte soit avec un tiers, soit sur lui-même (p. ex. lui demander qu'il se masturbe). Il est évident que l'enseignant qui, dans les cours d'éducation sexuelle, décrit simplement des actes d'ordre sexuel sans exercer d'autre influence sur l'enfant ne saurait se rendre coupable de cette infraction.

Mêler un enfant à un acte d'ordre sexuel signifie plus précisément qu'aujourd'hui que l'auteur commet sciemment cet acte devant l'enfant et veut que celui-ci le perçoive. Ne sont donc pas punissables les cas où l'enfant est le témoin fortuit de tels actes entre un frère plus âgé et son amie, ni celui où, en raison de l'exiguïté du logement par exemple, l'enfant peut observer les relations sexuelles qu'entrctiennent ses parents. Le droit actuel en revanche n'exclut pas la répression des cas susmentionnés, puisque se rend déjà punissable celui qui a admis l'idée que l'enfant pouvait percevoir l'acte d'ordre sexuel et qui a accepté de courir ce risque.

Ces propositions, reprises de l'avant-projet de la commission d'experts, ont été approuvées lors de la procédure de consultation.

Sanction pénale Le droit actuel prévoit une peine de réclusion jusqu'à 20 ans ou d'emprisonnement de six mois au moins pour l'acte sexuel ou les actes analogues commis sur des enfants. Tout comme la commission d'experts, et ainsi que cela ressort de la plupart des réponses à la consultation, nous estimons cette sanction trop rigoureuse. C'est pourquoi nous proposons pour tous
les actes d'ordre sexuel avec des enfants Une peine de réclusion de cinq ans au plus ou une peine d'emprisonnement.

L'auteur qui contraint l'enfant à un acte d'ordre sexuel en usant de violence ou de menace grave réalise simultanément les éléments constitutifs du viol ou de la contrainte à un autre acte d'ordre sexuel (art. 189 et 190 du projet); il est dès lors passible d'une peine pouvant aller jusqu'à 15 ans de réclusion, puisqu'il y a concours idéal au sens de l'article 68 CP. Il en est de même en cas de concours idéal avec l'inceste (art. 213 du projet).

Un problème particulier se pose en cas d'erreur sur l'âge de l'enfant. En ef-

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fet, l'auteur se prévaut fréquemment de ce qu'il a été trompé par l'apparence extérieure de l'enfant ou par de fausses indications. Dans le but de remédier au problème, l'article 187, chiffre 3, du projet ne prévoit qu'une peine d'emprisonnement si l'auteur a agi en admettant par erreur que l'enfant était âgé de 16 ans au moins, alors qu'en usant des précautions voulues, il aurait pu éviter l'erreur. Ces éléments constitutifs de l'infraction commise par négligence correspondent déjà au droit actuel. La commission d'experts avait supprimé cette disposition, étant d'avis que la limite d'âge de 14 ans devait rendre une erreur sur l'âge de l'enfant sensiblement plus rare; il suffirait en outre de savoir que l'auteur est punissable lorsqu'on peut établir qu'il avait, pour le moins, admis l'idée qu'il pouvait avoir affaire à un enfant plus jeune et qu'il a accepté de courir ce risque (dol éventuel). En fixant l'âge limite de protection à 16 ans, on ne supprime pas les cas d'erreur. D'autre part, l'absence d'une disposition réprimant la commission par négligence ne devrait pas conduire à admettre dans les cas douteux un dol éventuel qui en réalité fait défaut. L'auteur doit faire preuve d'une prudence accrue lorsque la victime présente un âge apparent proche de l'âge limite de protection; ce n'est que si des faits précis lui ont fait admettre que la personne avait plus de 16 ans qu'il ne sera pas punissable (cf. ATF 700 IV 230), II en va de même pour l'auteur, d'âge déjà plus mûr, qui se commet avec une jeune fille: l'expérience qu'il a de la vie commande qu'il use aussi d'une prudence accrue (cf. ATF 55 IV 77). D'autre part, en raison de la nature de leurs relations, on ne peut exiger de jeunes auteurs qu'ils fassent preuve de la même vigilance quant à l'âge de leur partenaire; il faudra en pareil cas appliquer la loi souplement en se fondant sur le chiffre 2 que nous proposons,13) Motifs d'exemption de poursuite ou de peine Par le chiffre 2, nous préconisons de donner aux autorités de poursuite pénale la possibilité de renoncer à poursuivre, à renvoyer devant un tribunal ou à punir l'auteur qui présente une différence d'âge minime avec sa victime ou qui a contracté mariage avec celle-ci. La formule est analogue à celle de l'article 66 bls du projet (cf. ch. 211), à la différence toutefois qu'il s'agit
ici d'une prescription facultative («Kann-Vorschrift»).

Le chiffre 2 profite à l'auteur qui, au moment de l'acte, a moins de 18 ans et a donc à peine dépassé l'âge limite de protection. Il s'agit de décriminaliser les relations sexuelles entre jeunes gens du même âge ou presque et de tenir compte aussi du fait que c'est quelquefois le partenaire plus jeune qui joue un rôle actif, faisant ainsi de Fwauteur» à peine plus âgé la victime effective de l'acte.

Une minorité de participants à la consultation estiment que cette décriminalisation peut déjà être obtenue par application des articles 97 et 98 CP (ajournement des sanctions/renonciation à toute mesure nu peine). Il est vrai que ces dispositions permettent aux autorités de jugement d'ajourner la peine ou d'y renoncer. Mais il est évident que l'on irait ainsi à rencontre du but poursuivi par l'article 187, chiffre 2, du projet, puisque ces dispositions ne s'adressent qu'aux autorités de jugement et qu'elles subordonnent

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l'exemption de peine à des conditions limitatives. Si donc on renonce, en vertu de l'article 187, chiffre 2, à poursuivre ou à renvoyer l'auteur devant les autorités de jugement, on exclut l'application du droit pénal des mineurs.

La commission d'experts avait en outre proposé de ne pas punir l'auteur d'une telle infraction, qui n'avait pas dépassé l'âge limite, de protection.

Elle était d'avis qu'il n'était pas logique de traiter de la même manière que des personnes adultes et mûres l'enfant au-dessous de l'âge limite de protection qui commet des actes d'ordre sexuel, alors que le but était précisément de le protéger contre des sollicitations d'ordre sexuel. Néanmoins-tout comme un nombre important de participants à la procédure de consultation-nous préférons à cette proposition rigide une exemption de peine plus nuancée, dans le sens de l'article 187, chiffre 2, de notre projet. Nous sommes d'avis que notre proposition a l'avantage d'offrir une solution souple tenant compte des circonstances du cas d'espèce.

L'auteur doit également pouvoir être exonéré de poursuite ou de peine s'il a contracté mariage avec la victime. Le droit actuel connaît une prescription analogue, mais imperative, aux articles 196 (séduction, abrogé selon le projet) et 197 CP (abus de la détresse ou de la dépendance où se trouve une.

femme, art. 193 du projet). Il ne devrait pas en aller autrement lorsque les relations amoureuses sérieuses qu'un adolescent entretient avec une jeune fille en âge d'être protégée aboutissent à un mariage.

Le mariage subséquent de l'auteur avec sa victime n'entraîne pas impérativement l'exemption de poursuite ou de peine. Cela devrait rassurer les quelques participants à la procédure de consultation qui craignaient que la disposition ne produise un effet accessoire^ à savoir que l'auteur fasse pression sur sa victime et la contraigne à l'épouser uniquement pour pouvoir bénéficier de ce traitement de faveur. Cette prescription a été approuvée par la majorité des participants à la consultation, qui considèrent qu'il serait choquant de punir un époux pour avoir entretenu des relations avec sa femme avant le mariage.

Comme nous le proposons ci-dessous, l'action pénale se prescrit par deux ans de sorte que le motif facultatif d'exemption de poursuite ou de peine prévu par l'article 187, chiffre 2,
ne produit ses effets que pour une durée limitée. Si la victime est de sexe féminin, elle ne peut selon le droit suisse contracter mariage que lorsqu'elle a atteint l'âge de 17 ans révolus et à certaines conditions (art. 96, 2e al., CC). Dès lors, il faut qu'elle soit âgée de 15 ans au moment de l'acte pour que l'auteur puisse, le cas échéant, être exempté de poursuite ou de peine avant l'échéance du délai de prescription.

Prescription Selon le chiffre 4, le délai de prescription de dix ans (art. 70 CP) est ramené à deux ans. Cette modification est dans l'intérêt de la victime. Elle correspond à l'avant-projet de la commission d'experts, qui entendait tenir compte de l'expérience acquise par les psychologues et les psychiatres dans ce domaine. Il s'agit d'éviter que l'enfant qui a retouvé son équilibre psychique ne soit à nouveau bouleversé par l'enquête et les actes d'instruction

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subséquents. La brièveté du délai de prescription devrait également favoriser le rassemblement des preuves, particulièrement difficiles à rapporter dans ce domaine.

232.12 Actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (Art. 188) Les jeunes de plus de 16 ans ont également besoin d'une protection pénale contre les abus d'ordre sexuel lorsqu'ils se trouvent dans un rapport de dépendance diminuant leur liberté de décision à un point tel qu'ils ne sont plus à même de se défendre contre des sollicitations d'ordre sexuel. Cette protection leur était assurée jusqu'ici par l'article 192 CP.

La nouvelle disposition que nous proposons en remplacement ne distingue plus l'acte sexuel des autres actes contraires à la pudeur, mais emploie comme l'article 187 du projet - l'expression d'actes d'ordre sexuel. En outre, elle n'énumère plus de manière exhaustive les personnes dites dépendantes, mais introduit une clause générale qui protège tous les mineurs se trouvant dans un état de dépendance de quelque forme que ce soit et, bien entendu, toutes les personnes que la disposition actuelle énumère de manière exhaustive.

La dépendance peut résulter en premier lieu de rapports d'éducation ou de confiance. C'est pourquoi la nouvelle disposition les cite à titre d'exemple principal. Afin que certains cas ne restent pas impunis, on admet qu'il y a rapport de confiance lorsque sa mise à profit est le fait de personnes auxquelles incombe un devoir de surveillance des mineurs qui ne résulte pas directement d'un devoir d'éducation. Il n'est que de penser au personnes d'assistance sociale (p. ex. d'aide aux drogués), aux responsables de camps de vacances ou encore à l'ami à qui une famille confie sa fille pour la durée d'un voyage de vacances (cf. pour un tel cas, ATF 99 IV 265).

Par «liens de dépendance d'autre nature», la nouvelle disposition veut englober des situations de dépendance autres que celles qui résultent de rapports effectifs d'éducation ou de confiance. Nous entendons cerner de cette manière toutes les possibilités répréhensibles d'influencer les jeunes gens.

La mise à profit doit être prouvée dans le cas concret; elle ne résulte pas a priori du rapport de dépendance. Dans l'hypothèse inverse, on limiterait trop le droit qu'ont les jeunes gens de se déterminer dès 16 ans en matière sexuelle.

Si l'auteur
profite de la dépendance de sa victime pour l'entraîner à commettre un acte d'ordre sexuel avec une autre personne, point n'est besoin qu'il y ait également rapport de dépendance entre cette dernière et la victime. L'élément constitutif qu'est le fait d'entraîner autrui à commettre un acte d'ordre sexuel est repris du droit actuel, soit de l'article 192, chiffre 2, 2e alinéa, CP.

La commission d'experts recommandait d'abaisser à 18 ans la limite d'âge supérieure que le droit actuel fixe à la majorité. Elle considérait que les jeunes sont dès cet âge suffisamment indépendants pour défendre leurs droits, 73 Feuille fédérale. 137e année. Vol. n

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même s'ils se trouvent dans un rapport de dépendance. Nous avons préféré maintenir cette limite à la majorité eu égard au fait que la dépendance résultant par exemple des rapports de formation dure souvent bien au-delà de l'âge de 18 ans.

Sanction pénale Nous avons prévu une peine d'emprisonnement, suivant en cela la commission d'experts. Cette sanction, plus douce que celle prévue à l'article 187 du projet, est justifiée par l'âge plus élevé de la victime. Bien qu'apparentées, ces deux infractions connaissent déjà un régime différent sous l'empire du droit actuel. Si, en l'occurrence, l'acte sexuel a été commis, il peut y avoir concours idéal avec l'article 213 du projet (inceste).

Motifs d'exemption de poursuite ou de peine L'exemption facultative de poursuite ou de peine pour l'auteur qui a contracté mariage avec sa victime correspond à l'article 187, chiffre 2, du projet. Plus la victime se rapproche de l'âge de la majorité, et par conséquent de l'âge nubile, plus une telle exemption se justifie.

Prescription Le délai de prescription est ramené à deux ans tout comme c'est le cas à l'article 187, chiffre 4, du projet, au commentaire duquel nous vous renvoyons (cf. ch. 232.11). Ce qui importe surtout, c'est que les poursuites pénales soient rapidement engagées; c'est aussi la seule manière d'empêcher l'auteur de commettre d'autres actes punissables. Nous ne pouvons par conséquent adhérer à la proposition faite dans quelques réponses à la consultation de ne faire courir la prescription que du jour où le rapport de dépendance a cessé, pour donner aux adolescents notamment la possibilité de déposer encore plainte pénale après la fin de leur apprentissage. Cette proposition si elle était retenue nécessiterait d'ailleurs une modification de l'article 71 CP sur le point de départ de la prescription de l'action pénale; nous excéderions ainsi considérablement le cadre de cette revision.

232.2 Atteinte à la liberté et à l'honneur sexuels 232.21 Viol (Art. 189) Le viol-le terme un peu archaïque de «Notzucht» est remplacé par «Vergewaltigung» dans la version allemande - occupe, tout comme aujourd'hui l'article 187 CP, une place de premier rang sous le sous-titre «atteintes à la liberté et à l'honneur sexuels».

En ce qui concerne les modifications matérielles, la nouvelle disposition renonce tout d'abord à distinguer le viol simple et le viol qualifié. Cette distinction a suscité des difficultés d'application de la disposition actuelle. Le 1 er alinéa de l'article 187 CP punit celui qui, en usant de violence ou de menace grave, a contraint une femme à subir l'acte sexuel hors mariage. II n'est pas nécessaire que la femme résiste jusqu'à épuisement. Il en va autre -

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ment aux termes du 2 e alinéa, dont la formulation «après l'avoir... rendue inconsciente ou mise hors d'état de résister», implique selon la doctrine et la jurisprudence une impuissance absolue de la femme à se défendre. Seul ce cas justifie la sévère peine minimale de trois ans de réclusion14) (cf. ATF 707 IV 180). Ainsi que cela ressort de la jurisprudence relative à l'article 187 CP (cf. notamment ATF 98 IV 100 ss), il est toutefois pratiquement impossible d'opérer une distinction judicieuse entre viol simple et viol qualifié.

Pour ces raisons et conformément à l'avant-projet de la commission d'experts, qui a été approuvé lors de la procédure de consultation, nous avons réuni les éléments constitutifs du viol simple et du viol qualifié. La nouvelle disposition maintient les modes de perpétration prévus par le droit actuel, à savoir l'usage de la violence ou de menace grave. A cet égard, point n'est besoin qu'il y ait menace d'un danger imminent pour la vie ou l'intégrité corporelle comme l'exige l'article 139 CP dans le cas du brigandage.

L'infraction peut être réalisée lorsque, par exemple, un employeur menace une femme de la licencier.

Encore faut-il que la violence ou la menace grave aient influé jusqu'à un certain point sur la capacité de résistance de la victime, sinon il faudrait admettre qu'il y a eu consentement. Afin de couvrir les cas où la victime a été rendue inconsciente par des somnifères, des drogues ou de toute autre manière empêchée complètement de résister, il est nécessaire d'ajouter la locution «mise hors d'état de résistent C'est à dessein que l'on n'a pas employé l'expression «de toute autre manière mise hors d'état de résister», car, comme on l'a fait pour le brigandage, elle pourrait être interprétée dans le sens que seules une violence ou une menace grave qui mettent la victime complètement hors d'état de résister suffisent à la consommation du délit (cf. ATF 81 IV 226).

Le droit actuel soulève une autre difficulté. Aux termes de l'article 187 CP, seule une femme (c'est-à-dire, selon l'art. 110, ch. 1 CP, une personne de sexe féminin âgée de 16 ans au moins) peut être la victime d'un viol. Celui qui viole une jeune fille de moins de 16 ans n'est donc punissable aujourd'hui que sur la base de l'article 191, chiffre 1 CP (attentat à la pudeur des enfants) en liaison
avec l'article 181 CP (contrainte). Si par ailleurs l'auteur se méprend sur l'âge de la victime qui a moins de 16 ans, il est uniquement punissable pour délit impossible de viol - ce qui permet au juge d'atténuer librement la peine (art. 23 en liaison avec l'art. 66 CP) - ou sur la base de l'article 191, chiffre 3, CP (attentat à la pudeur d'un enfant en se méprenant sur son âge). Pour ces raisons, la nouvelle disposition ne mentionne plus aucune limite d'âge pour la victime.

La nouvelle disposition ne mentionne comme victime potentielle que la «personne de sexe féminin», de sorte que c'est l'acte sexuel entre homme et femme qui est réprimé. Aux termes de l'article 190 du projet, le viol homosexuel est punissable en tant que contrainte à un autre acte d'ordre sexuel et, partant, passible d'une peine maximale identique de dix ans de réclusion. La commission d'experts a elle aussi exclu toute égalité entre les viols homo-et hétérosexuels, en premier lieu pour des motifs physiologiques.

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Viol entre époux Le viol entre époux ne tombe pas sous le coup de l'article 187 CP. Il ne sera pas compris non plus dans la définition de l'article 189 du projet, puisque cette disposition continue de ne rendre punissable la contrainte à l'acte sexuel que si elle a eu lieu hors mariage. Nous nous écartons ainsi de l'avant-projet de la commission d'experts, en vertu duquel le viol de l'épouse aurait dû désormais être poursuivi et réprimé sur plainte. Cette proposition a certes fait l'objet d'une large approbation lors de la procédure de consultation et nous comprenons les motifs de ces prises de position. Néanmoins, nous considérons comme prépondérants les arguments qui s'opposent à cette innovation: dans la pratique, d'importants problèmes de preuve surgiraient régulièrement dans de tels cas. Il serait souvent impossible d'établir à suffisance de preuve qu'un viol a véritablement été commis par l'époux. Or une telle preuve est absolument indispensable eu égard à la sanction qui réprime cette infraction. Les autorités de poursuite pénale seraient contraintes de procéder à des investigations pénibles et de s'immiscer au plus profond de la vie intime des intéressés, ce qui ne saurait en aucun cas contribuer à permettre aux unions concernées de subsister. Lorsque cette disposition serait appliquée, on ne pourrait pas écarter le risque que l'épouse en abuse pour fonder son action en séparation de corps ou en divorce. Dans ce contexte, il faut également tenir compte du préjudice qui pourrait ainsi être causé aux enfants du couple concerné si ceux-ci étaient interrogés au sujet d'un prétendu viol de leur mère. Enfin, il faut relever que la limitation des éléments constitutifs du viol à l'acte sexuel hors mariage, telle que la connaît le droit actuel, n'a nullement donné lieu à de mauvaises expériences. D'autre part, aucune intervention parlementaire tendant à ce que l'on introduise la répression du viol de l'épouse n'a, à notre connaissance, été déposée ces dernières années.

Presque tous ces arguments s'opposent également à la proposition - qui a été faite à plusieurs reprises lors de la procédure de consultation - de réprimer le viol de l'épouse pour le moins dans les cas où les conjoints vivaient déjà séparés au moment des faits.

Enfin, cette réglementation n'exclut pas que l'épouse puisse faire valoir
contre son conjoint les dispositions concernant la protection générale de la liberté personnelle (art. 180 ss CP) et de l'intégrité corporelle (art. 122 ss CP).

Sanction pénale Aujourd'hui, la peine réprimant le viol simple est, selon l'article 187, 1 er alinéa, CP, la réclusion pour 1 à 20 ans; celle sanctionnant le viol qualifié est, aux termes du 2e alinéa dudit article, la réclusion pour trois ans au moins. Nous proposons d'abaisser ces sanctions draconiennes en prévoyant, à l'article 189, 1 er alinéa, du projet, une peine de un à dix ans de réclusion pour le viol sans circonstances atténuantes.

Conformément à l'article 68, chiffre 1, CP, cette peine peut être aggravée à 20 ans de réclusion s'il y a concours avec le meurtre même par dol

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éventuel (art. 111 CP) ou à 15 ans de réclusion en cas de concours avec les lésions corporelles graves (art. 122 CP).

- Circonstances atténuantes L'auteur d'un viol peut également bénéficier de circonstances atténuantes.

La disposition actuelle ne permet pas d'en tenir compte convenablement.

Selon l'article 64 CP, le juge peut il est vrai atténuer la peine lorsque l'auteur a été «induit en tentation grave par la conduite de la victime». Abstraction faite de la jurisprudence très restrictive à cet égard (cf. ATF 97 IV 76, 98 IV 67), cette circonstance ne concerne pas une situation spécifique au viol. On se trouve devant une telle situation lorsque l'auteur et la victime ont entretenu des rapports étroits avant l'acte, par exemple lorsqu'ils ont eu pendant quelque temps des relations sexuelles librement consenties et que, subitement, la partenaire refuse l'acte sexuel.

Dans pareil cas, il paraît équitable de punir l'auteur d'une peine plus douce que s'il avait commis l'acte sur une parfaite inconnue. C'est pourquoi nous avons repris dans son principe la proposition de la commission d'experts, qui a d'ailleurs recueilli l'approbation de la majorité des participants à la procédure de consultation. Selon l'article 189, 2 5 alinéa, du projet, l'auteur n'est donc passible que d'une peine de trois jours à trois ans d'emprisonnement - au lieu de la réclusion jusqu'à dix ans - s'il existait entre lui et sa victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave.

La notion de rapports personnels implique que le futur couple auteurvictime ait été intimement lié pendant une période qui n'a d'ailleurs pas besoin d'être longue, cette liaison devant toutefois dépasser le cadre de la simple rencontre superficielle. Si le fait que la femme est une prostituée ne saurait de prime abord constituer une cause d'atténuation, le fait que l'auteur vit en concubinage avec sa victime peut en principe être considéré comme une circonstance rendant l'acte moins grave. Mais, même en pareil cas, la protection de la femme ne peut être affaiblie que si, dans le cadre de cette relation, elle est allée très loin dans sa disponibilité à entretenir des rapports sexuels avec l'auteur et que brusquement elle s'y refuse. Même s'il est plus difficile de distinguer les éléments afférents à la faute et à la faute concurrente dans
le cadre de rapports personnels donnés que dans le cas du viol d'une femme inconnue, il est permis de penser que la jurisprudence n'admettra pas à la légère l'existence de circonstances atténuantes.

Dans les cas où, en revanche, la victime a véritablement provoqué l'auteur, la circonstance atténuante prévue par l'article 64 CP doit suffire. Certes, selon cette disposition, il faut, pour que l'auteur soit induit en tentation grave, que la victime ait un comportement actif ou exerce une pression morale, toutes attitudes qui, dans le cas du viol, peuvent toutefois prendre des formes plus subtiles. C'est pourquoi la commission d'experts avait prévu, à l'article 190 de son avant-projet, une cause d'atténuation spécifique dans le cas où la victime a, par son comportement initial, laissé croire à l'auteur qu'elle serait consentante. Ainsi par exemple lorsqu'elle se déclare d'emblée d'accord avec des actes sexuels de moindre importance ou même y encourage l'auteur. Cette proposition s'est heurtée lors de la procé-

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dure de consultation à d'importantes objections qui peuvent se résumer comme il suit: - Même la personne qui a initialement fait des avances à l'auteur pour se refuser ensuite mérite la pleine protection du droit pénal; ce n'est pas la manière dont une femme s'est comportée avant l'acte qui est déterminante, mais bien le fait qu'elle a été contrainte à l'acte sexuel contre sa volonté; chaque partenaire doit pouvoir dire en tout temps quand il entend s'arrêter; - Dans une procédure pénale, l'auteur pourra toujours alléguer que sa victime lui a laissé croire qu'elle était consentante, ce qui favorise les attitudes misogynes; - Cela signifie en fin de compte que la femme a cherché et voulu le viol, ou du moins l'a accepté; la victime se retrouve en position d'accusée dans le procès introduit contre l'auteur et doit prouver qu'elle n'est pour rien dans le comportement de celui-ci; - La femme, qui a déjà tout lieu de craindre que la procédure pénale pour viol ne porte atteinte à sa réputation et qui redoute la publicité qui l'entoure, ne devrait pas être intimidée encore davantage par la perspective de déposer une dénonciation pénale; les causes générales d'atténuation permettent de mieux tenir compte du cas concret et épargnent à la femme toute condamnation morale.

Ces objections, nous les avons faites nôtres et nous avons renoncé à introduire à l'article 189 du projet une cause particulière d'atténuation pour provocation. Si donc la victime a provoqué l'auteur, la peine pourra être ramenée à l'emprisonnement de six mois à cinq ans, conformément aux articles 64 et 65 CP.

- Aggravation de la peine du fait de la cruauté de l'acte Contrairement à la commission d'experts, nous proposons, dans un 3e alinéa, de faire du viol une infraction qualifiée lorsque l'auteur a agi avec cruauté. Cette circonstance aggravante, reprise de l'article 195, 3 e alinéa, CP, appelle une peine minimale de trois ans de réclusion. La cruauté, définie comme brutalité, absence de sentiments, torture, est une intensification de la violence au point de vue physique ou moral. Il y a cruauté lorsque l'auteur, sciemment et volontairement, inflige à sa victime des souffrances particulières, excédant ce qui eût suffi à la réunion des éléments constitutifs du délit de base (cf. ATF 706 IV 367 s. ad art. 182, ch. 2, 3e al., CP, ancienne
teneur).

La cruauté doit dans tous les cas être admise si l'auteur a menacé sa victime d'une arme à feu ou d'une autre arme dangereuse. A cet égard, nous nous sommes inspirés de la réglementation expresse concernant l'emploi d'armes dans le cas de vol et de brigandage (art. 137, ch. 2, 3e al., et 139, ch. l bis , CP).

Suivant les circonstances, l'élément constitutif de la cruauté peut aussi être présent dans le cas du viol commis en commun. Nous avons par ailleurs prévu de faire des délits d'ordre sexuel commis en commun une infraction qualifiée (cf. commentaires ad art. 200 du projet, ch. 232.6).

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La cruauté est une circonstance aggravante qui qualifie l'infraction indépendamment des circonstances atténuantes qui peuvent la privilégier (cf.

art. 189, 2e al., du projet). Elle n'empêche toutefois pas l'auteur de bénéficier d'une des causes d'atténuation de la peine, prévues par les articles 64 et 65 CP, qui s'appliquent à l'ensemble des dispositions spéciales du code pénal.

232.22 Contrainte à un autre acte d'ordre sexuel (Art. 190) L'article 188 du droit actuel devient l'article 190. Il n'a été que peu modifié du point de vue matériel. Tout comme la disposition sur le viol, sa formulation a été précisée en ce sens que la mise hors d'état de résister y est affirmée comme un moyen de contrainte propre, indépendant des modes de perpétration que sont la violence et la menace grave. C'est pourquoi l'expression «de toute autre manière» (art. 188 CP) a été biffée. Point n'est besoin que l'auteur ait usé de violence ou de menace grave pour mettre sa victime dans l'incapacité de résister (cf. ATF 75 IV 116); il suffit qu'il l'ait rendue inconsciente en lui faisant absorber par exemple des narcotiques.

Nous avons par ailleurs estimé inutile de mentionner expressément les deux variantes de la contrainte - subir ou faire subir un acte d'ordre sexuel-dans le texte légal; l'infraction est réalisée même si la victime ne fait que subir l'acte, sans qu'il soit besoin de le préciser particulièrement.

Le moyen de contrainte se trouve ainsi défini de la même manière que pour le viol.

Le comportement visé ici s'entend de tout acte d'ordre sexuel autre que l'acte défini à l'article 187 du projet (viol). La question s'est posée de savoir s'il y avait lieu de distinguer les actes analogues à l'acte sexuel et les autres actes d'ordre sexuel. Nous y avons renoncé, ces notions n'étant en raison de leur indétermination d'aucune utilité pour la gradation de la punissabilité.

Quant au caractère hautement répréhensible des actes hétéro- ou homosexuels qui, obtenus par la contrainte, équivalent au viol, nous en avons tenu compte en prévoyant une peine qui, comme pour le viol, peut aller jusqu'à dix ans de réclusion. Nous avons ainsi augmenté de cinq ans la peine maximale prévue par l'article 188 CP. Quant aux actes d'ordre sexuel plus anodins mais qui présentent quand même une certaine gravité, ils sont passibles de l'emprisonnement. L'application des articles 177 CP (atteinte à l'honneur par voies de fait) ou 198 du projet (désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel) est réservée aux cas ne remplissant pas les conditions prévues à l'article 190 du projet.

Ces modifications, reprises de l'avant-projet de la commission d'experts, ont rencontré une très large approbation
lors de la procédure de consultation.

S'agissant de la personne de la victime, il convient de relever que l'article 190 du projet-tout comme d'ailleurs l'article 188 CP-protège tous les individus en général. La victime de la contrainte peut donc être un homme et 1091

il est possible qu'elle appartienne au même sexe que l'auteur. La disposition protège par ailleurs aussi les personnes de sexe féminin âgées de moins de 16 ans, ce qui dans les cas sérieux permet d'aggraver la peine prononcée en vertu de l'article 187 du projet (les deux dispositions entrent en concours idéal).

Bien que le texte de l'actuel article 188 ne l'exclue pas, cette disposition n'est, à notre connaissance, pratiquement pas appliquée lors de contrainte à de tels actes entre époux. En ne limitant pas expressément l'article 190 du projet dans ce sens, nous laissons ouverte la possibilité qu'il s'applique dans les cas où l'un des conjoints est contraint à d'autres actes d'ordre sexuel. Contrairement à ce que prévoyait l'avant-projet de la commission d'experts, nous renonçons en revanche aussi à stipuler de manière explicite que l'acte dirigé contre le conjoint est punissable (sur plainte).

Circonstances atténuantes II va sans dire que l'auteur peut également bénéficier de circonstances atténuantes dans le cadre des relations visées à l'article 190 du projet (il peut s'agir aussi de relations homosexuelles durables). Nous renvoyons à cet égard aux commentaires à l'article 189 du projet (cf. ch. 232.21).

Aggravation de la peine du fait de la cruauté de l'acte Comme à l'article 189, 3 e alinéa, du projet (viol), nous avons prévu ici aussi d'aggraver la peine lorsque l'auteur a agi avec cruauté. Cette qualification appelle une peine minimale de 3 ans de réclusion (cf. ch. 232,21).

232.23 Actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (Art. 191) Cette disposition remplace les articles 189 CP (attentat à la pudeur d'une personne inconsciente ou incapable de résistance) et 190 CP (attentat à la pudeur d'une personne faible d'esprit). La distinction faite entre la «Schändung minderen Grades», terme employé en allemand pour désigner l'infraction visée à l'article 190 CP, et la «Schändung» proprement dite, que réprime l'article 189 CP, a suscité des critiques qui persistent encore aujourd'hui: les états prêtés à la victime dans ces deux dispositions, et qui font que celle-ci mérite protection, présentent des différences qui ne sont pas faciles à saisir. La notion de faiblesse d'esprit, qui remplace celle d'idiotie de l'article 189 CP, n'occasionne pas de
difficulté particulière. Il est en revanche extrêment malaisé de déterminer le degré de faiblesse d'esprit qui, sans faire bénéficier la victime de la protection de l'article 189 CP-lequel prévoit une peine allant jusqu'à dix ans de réclusion - est cependant suffi sa ni m en t élevé pour justifier la peine de cinq ans de réclusion ou d'un mois d'emprisonnement au moins prévue par l'article 190, 1 er alinéa, CP. L'application de l'article 190 CP suscite encore des difficultés d'une autre nature. Par manque d'intelligence, les auteurs ne sont souvent eux-mêmes pas en mesure de constater que leur partenaire est faible 1092

d'esprit. Il est par conséquent très difficile de prouver qu'ils étaient capables d'apprécier le caractère illicite de leur acte. Même un individu d'intelligence moyenne peut ne pas se rendre compte de l'état de débilité légère au sens de l'article 190 CP que présente la victime, surtout s'ils se connaissaient à peine15' (cf. ATF 82 IV 153).

C'est pourquoi la commission d'experts a fusionné les deux infractions des articles 189 et 190 CP (attentat à la pudeur d'une personne inconsciente ou incapable de résistance; attentat à la pudeur d'une personne faible d'esprit) en un seul article, qui protège les personnes psychiquement ou physiquement inaptes à se défendre contre des sollicitations d'ordre sexuel. Nous avons repris cette proposition dans son principe.

La victime est donc, indépendamment de l'âge, toute personne, de sexe féminin ou masculin, incapable de discernement ou de résistance, sur laquelle l'auteur, profitant de cet état, a commis un acte d'ordre sexuel, Contrairement au droit actuel mais conformément à l'avant-projet, la nouvelle disposition s'applique également à la contrainte à l'acte sexuel exercée par l'auteur à ['encontre de son conjoint. Profiter de ce que son conjoint est incapable de discernement ou de résistance pour commettre sur lui un acte d'ordre sexuel est tellement en contradiction avec le devoir de fidélité et d'assistance que se doivent les époux que les motifs pour lesquels on ne réprime pas le viol dans le mariage ne justifient pas qu'on laisse impuni l'auteur d'un tel acte. Nous renonçons cependant ici aussi à instaurer expressément un droit de plainte du conjoint.

L'incapacité de résistance peut être aussi bien mentale que physique, ainsi qu'il ressort des articles 189 et 190 CP qui parlent de maladie mentale, de faiblesse d'esprit, d'inconscience ou de troubles mentaux. Ces états ont pour point commun d'exclure tout consentement valable à l'acte d'ordre sexuel et toute responsabilité à cet égard. On comprend donc pourquoi on a employé la notion d'incapacité de discernement du droit civil pour définir les conséquences de ces altérations. Est dès lors incapable de discernement, celui qui durablement ou passagèrement - par exemple en raison de l'absorption de stupéfiants ou d'alcool ou à la suite d'un accident-n'a pas la faculté d'agir raisonnablement.16) La
nouvelle disposition donne une définition plus claire des éléments constitutifs: l'accomplissement de l'acte sexuel ou d'un autre acte contraire à la pudeur est remplacé par la mise à profit de l'état de la victime pour commettre un acte d'ordre sexuel. Elle explicite mieux ainsi que c'est en connaissance de cause, c'est-à-dire en se rendant compte de l'état de la victime, que l'auteur a profité de l'impuissance de cette dernière à se défendre.

L'infraction n'est pas réalisée si, bien que mentalement handicapée, la victime n'est pas inapte à se défendre dans le domaine sexuel. On ne saurait donc par le biais de cette incrimination empêcher toute activité sexuelle chez les personnes souffrant de certaines déficiences mentales.

Sanction pénale et distinction d'avec l'article 187 du projet La peine est la réclusion pour cinq ans au plus ou l'emprisonnement. Com-

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parée à la peine prévue pour le viol (art. 189 du projet), elle est plus modérée puisqu'en l'espèce l'auteur profite de l'incapacité préexistante de sa victime à consentir ou à résister à l'acte, alors que dans le cas du viol, c'est l'auteur lui-même qui provoque cette incapacité contre la volonté de la victime. L'acte commis sur une victime, dont la capacité de discernement est restreinte pour diverses raisons mais qui se défend, démontrant ainsi qu'elle comprend la portée de cet acte, est un viol. 17) Si la victime est un enfant présentant un handicap mental d'une quelconque nature, il n'est pas toujours facile de décider si l'acte remplit les conditions d'illicéité de l'infraction visée à l'article 191 du projet. En effet, plus l'enfant est jeune, plus il est difficile de distinguer entre l'incapacité à se déterminer en raison de l'âge et l'incapacité de discernement due à une déficience mentale. Pour ces motifs, la commission d'experts avait prévu que tous ces cas d'incapacité de discernement tombaient, jusqu'à l'âge de 14 ans (âge de protection selon sa proposition), sous le coup de l'article 187 de l'avant-projet concernant les actes d'ordre sexuel avec des enfants. Nous renonçons à cette solution parce qu'elle ne tient pas compte des intentions de l'auteur. En effet, l'article 187 de notre projet s'applique lorsque l'incapacité de discernement de la victime découle avant tout du fait que celle-ci n'a pas encore atteint l'âge de 16 ans. En revanche, c'est l'article 191 de notre projet qui trouve application, lorsque l'auteur profite surtout de l'incapacité de discernement ou de résistance de la victime. Nous pensons notamment au cas où l'auteur a profité de l'état d'inconscience d'une personne, par exemple d'un adolescent, sous l'effet de la drogue.

232.24 Actes d'ordre sexuel avec des personnes hospitalisées, détenues ou prévenues (Art. 192) Cette disposition, qui remplace l'article 193 CP, s'en distingue en ce que le devoir de surveillance de l'auteur sur la victime n'est plus à lui seul déteminant pour la punissabilité de l'acte; encore faut-il que l'auteur ait profité du rapport de dépendance dans lequel la victime se trouve pour obtenir son consentement à un acte d'ordre sexuel.

L'article 192 du projet punit également celui qui, profitant de ce rapport de dépendance, a incité la victime à commettre un acte d'ordre sexuel avec un tiers.

En citant la «personne hospitalisée» et «internée» on évite l'énumération actuelle des différents types d'établissements. Une personne est, par exemple, internée lorsqu'elle compromet gravement la sécurité publique et que le juge ordonne son internement dans un établissement approprié (art. 43, ch. 1 , 2 e al., CP). Puisqu'on exige qu'il y ait mise à profit de la dépendance, peu importe que la victime ait été placée dans une institution par décision de l'autorité, c'est-à-dire de force, ou qu'elle séjourne de son plein gré, dans une maison de retraite par exemple.

1094

On a également employé la notion unitaire d'actes d'ordre sexuel dans cette disposition (cf. ch. 232.11) qui reprend par ailleurs la peine d'emprisonnement prévue par l'article 193, 2e alinéa, CP.

Pour ce qui est du motif facultatif d'exemption de poursuite ou de peine prévu au 2 e alinéa, nous renvoyons aux commentaires relatifs aux articles 187 et 188 du projet (actes d'ordre sexuel avec des enfants et avec des personnes dépendantes).

232.25 Abus de la détresse (Art. 193) Cette disposition remplace l'article 197 CP (abus de la détresse ou de la dépendance où se trouve une femme) qui lui-même s'inspire d'une idée analogue à celle qui est à la base de l'article 194, 2e alinéa, CP (débauche contre nature). Ces deux dispositions ne diffèrent que sur un point: alors que dans le cas visé par l'article 194, 2 e alinéa, CP, la victime est du même sexe que l'auteur, elle ne peut être qu'une femme dans celui réprimé par l'article 197 CP. Afin de mettre les comportements hétéro- et homosexuels sur pied d'égalité, nous avons supprimé l'infraction de débauche contre nature (cf.

ch. 232.33) et élargi en conséquence la protection offerte par l'article 193 du projet: ce n'est plus seulement la femme mais toute personne qui peut être la victime d'un acte défini à présent comme étant d'ordre sexuel.

Nous avons supprimé la condition prévue à l'article 197 CP, selon laquelle la victime doit se trouver dans un rapport de dépendance avec l'auteur, rapport fondé soit sur la fonction ou la qualité d'employeur de celui-ci, soit sur une relation analogue. Il existe d'autres dispositions qui suffisent amplement à assurer la protection des personnes dites dépendantes: ainsi l'article 188 du projet, pour les mineurs, 192 du projet également, pour les personnes hospitalisées, prévenues ou détenues, sans compter l'article 312 CP qui réprime l'abus d'autorité. Ici aussi les articles 189 et 191 du projet (viol et actes d'ordre sexuel avec des personnes incapables de discernement ou de résistance) sont seuls applicables si les éléments constitutifs de ces infractions sont réunis.

La nouvelle disposition limite sa protection aux personnes qui se trouvent dans une détresse profonde et qui ont été déterminées à commettre ou à subir un acte d'ordre sexuel. U est hors de question de considérer comme des victimes les personnes qui, pour se sortir d'un mauvais pas, accordent leurs faveurs à la légère ou prennent même l'initiative d'actes d'ordre sexuel.

Il en va autrement pour la femme divorcée qui doit faire face à de lourdes obligations familiales et qui, pour obtenir l'emploi dont elle a un besoin urgent, doit consentir aux sollicitations d'ordre sexuel que lui fait son futur employeur. L'article 181 CP (contrainte) ne serait pas applicable en l'espèce;
l'intéressée ne peut en effet prétendre à aucun droit d'être engagée, si bien qu'il ne saurait y avoir menace de non-embauche. La nouvelle disposition protège également l'adolescent qui s'est enfui de chez lui et qui, en

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quête d'un gîte et d'un emploi, est recueilli par un homosexuel qui l'entretient pendant un certain temps à condition qu'il se prête à des actes de pédérastie.

La peine d'emprisonnement prévue à l'article 197 CP est maintenue, ainsi que l'exemption facultative de poursuite ou de peine en cas de mariage de l'auteur avec la victime, qui est formulée de la même manière qu'aux articles 187, 188 et 192 du projet.

232.26 Exhibitionnisme (Art. 194) Cette disposition remplace.partiellement l'article 203 CP (outrage public à la pudeur), dont elle limite le champ d'application. Les limites de la punissabilité sont actuellement difficiles à tracer dans ce domaine et les tribunaux ont donné à l'outrage public à la pudeur une interprétation large.

Ainsi un acte, auquel l'auteur lui-même n'attribuait aucune portée d'ordre sexuel, a-t-il été considéré comme contraire à la pudeur pour le motif qu'il heurtait le sentiment général de la décence et des bonnes moeurs (cf. ATF 89 IV 131). La doctrine a en revanche soutenu que les actes dépourvus de tout caractère sexuel ne pouvaient en aucun cas être contraires à la pudeur. 18) Elle considère en outre comme erroné le critère tiré du sentiment général de la décence et des bonnes moeurs.19) Afin d'épargner au juge pénal l'obligation de se muer en censeur dans de tels cas (cf. ATF 103 IV 171, 104 IV 258), la commission d'experts n'a retenu qu'un seul acte parmi tous ceux envisageables dans le cadre de l'article 203 CP, à savoir l'exhibitionnisme, qu'elle a érigé en infraction autonome. Cette proposition, que nous avons reprise, a été approuvée par la majorité des participants à la procédure de consultation. Ce qui suit devrait par ailleurs écarter les doutes émis au sujet de son application pratique, L'acte exhibitionniste au sens de l'article 194 du projet s'entend de l'étalage conscient des organes génitaux pour des motifs d'ordre sexuel. Pris au sens littéral, l'exhibitionnisme va jusqu'au point où seul importe à l'auteur le fait d'être observé dans son exhibition. Si celle-ci n'est que l'acte préparatoire à une agression sexuelle subséquente, par exemple un viol, elle n'est plus couverte par la définition précitée. Par ailleurs, celui qui s'exhibe pour provoquer, faire ses besoins ne commet pas un acte exhibitionniste faute de référence sexuelle.20' De tels actes
peuvent par contre tomber sous le coup de l'article 198 du projet (désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel; cf. ch. 232.51).

L'élément de publicité n'a aucune importance en l'espèce; peu importe que l'exhibition ait lieu dans un vestibule, un ascenseur, un compartiment de chemins de fer ou dans une rue très fréquentée.

L'exhibitionniste est un délinquant plutôt inoffensif. Dans la doctrine, l'exhibitionnisme est considéré comme un succédané destiné à compenser une déficience sexuelle. Le sujet agit surtout sous le coup de pulsions inconscientes; il souffre souvent de ces penchants qu'il vit lui-même com1096

me un échec de sa sexualité. Rares sont les cas où l'exhibitionniste passe à des actes de véritable violence. D'après les recherches les plus récentes, tout aussi rares sont les cas où l'exhibitionnisme n'a été que le stade transitoire d'une criminalité sexuelle violente. 21 ' Plainte, sanction et procédure pénales Aux termes du droit actuel, l'outrage public à la pudeur est poursuivi d'office. Limité selon le projet aux actes exhibitionnistes, on peut en faire un délit poursuivi sur plainte. En effet, le bien juridique protégé n'est plus la moralité publique mais la liberté sexuelle de la victime importunée par les actes exhibitionnistes et qui doit décider elle-même si elle se sent lésée. On a voulu ainsi éviter que la victime qui n'a pas accordé une importance particulière à l'acte et qui a surmonté le choc subi, se retrouve, dans la procédure pénale, confrontée de nouveau à ce fâcheux incident.

Les médecins et les juristes s'accordent à reconnaître que la courte peine privative de liberté à laquelle l'exhibitionniste est le plus souvent condamné, est contre-indiquée pour ce type de délinquant. On a également mis en doute l'effet préventif général et spécial d'une telle peine. On lui préfère un traitement psychothérapeutique qui, selon des avis tout aussi concordants ou presque, a bien plus de chances de succès, principalement parce qu'il s'avère que l'exhibitionniste est favorable à un traitement. Le risque de récidive devrait être moindre à la suite d'un tel traitement médical. Encore faut-il qu'il soit entrepris avec l'accord de l'intéressé et que, par conséquent, celui-ci n'y soit en aucun cas contraint.22' En conséquence, si le 1 TM alinéa menace l'exhibitionniste d'une peine, le 2 e alinéa prévoit la possibilité de suspendre la procédure s'il subit un traitement médical ou s'y soumet. Toutefois, cela suppose que les autorités d'instruction surveillent le cas en collaboration avec le médecin traitant l'exhibitionniste.

Puisque, le plus souvent, l'acte illicite est de peu de gravité et le dommage qui en résulte pour la victime moindre, la sanction se doit d'être modérée.

En conséquence, le juge qui estime qu'un traitement est inapproprié doit pouvoir condamner l'auteur à une peine d'emprisonnement pour six mois au plus ou à une amende. Cette sanction est encore suffisamment sévère pour
conforter l'exhibitionniste dans sa volonté de se soumettre à un traitement. Lorsque l'exhibitionniste alarme ou effraye la victime, le juge peut, sur la base de l'article 180 CP (menaces), prononcer une peine allant jusqu'à trois ans d'emprisonnement.

La réglementation prévue au 2e alinéa est empruntée à celle de l'article 19a, chiffre 3, de la loi sur les stupéfiants (LStup, RS 812.12l)21». Les méthodes de réinsertion sociale qui, sous contrôle médical, sont appliquées aux toxicomanes sont également indiquées pour les exhibitionnistes. C'est pourquoi il convieni de donner aux autorités la possibilité de suspendre provisoirement la procédure à certaines conditions, mais aussi de la reprendre si le délinquant ne satisfait pas à celles-ci. Par autorité, nous pensons en premier lieu à l'autorité d'instruction, laquelle doit toutefois soigneusement rechercher si l'intéressé subit effectivement un traitement ou

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s'il a la volonté de s'y soumettre. Si donc le juge d'instruction a la conviction que l'exhibitionniste n'a pas pris la résolution de se soigner ou qu'il prend son traitement peu au sérieux, il doit poursuivre la procédure. Cela signifie aussi que la police ne peut elle-même décider du sort de celui qui affirme se trouver en traitement. Mais il n'est cependant pas nécessaire que la décision de suspendre la procédure soit prise au niveau du tribunal.

Si le délinquant se soustrait au traitement, la procédure peut être reprise.

Pour prendre une telle décision, il faut que l'autorité d'instruction ait pu observer le cas, comme dans le traitement à la méthadone que suit un drogué et pendant lequel la procédure peut également, aux termes de l'article 19a, chiffre 3, LStup, être suspendue. En pareille occurrence, le juge d'instruction devrait convenir de l'exécution du traitement avec le médecin, notamment faire obligation à ce dernier de suivre le patient pendant la durée de son traitement et d'informer l'autorité de la cessation prématurée de celui-ci.

Là encore l'action pénale se prescrit par deux ans. Il ne se justifierait pas en effet de la soumettre a un régime différent de celui prévu pour d'autres infractions, telles que les actes d'ordre sexuel avec des enfants ou des personnes dépendantes (art. 87, ch. 4, et 188, ch. 3, du projet).

232.3 Exploitation de l'activité sexuelle 232.31 Encouragement à la prostitution (Art. 195) A l'instar de la commission d'experts, nous sommes d'avis que les dispositions actuelles visant le proxénétisme et les souteneurs ne définissent pas à proprement parler des délits sexuels, mais répriment diverses formes d'infractions consistant presque sans exception à tirer profit du comportement sexuel d'autrui. De l'avis de la doctrine, les éléments constitutifs du proxénétisme (favoriser la débauche, c'est-à-dire l'acte sexuel hors mariage et ses succédanés; art. 198 et 199 CP) ne font pas ressortir clairement quel est le bien juridique qu'ils entendent protéger. La loi réprime la participation à un comportement qui est peut-être immoral, mais qui n'est la plupart du temps pas punissable. Ce n'est pas l'interprétation restrictive donnée à la notion de débauche qui a permis d'y parer (cf. ATF 77 IV 95, 98 IV 256).

L'aversion qu'inspiré le commerce du proxénète qui monnaie les appétits sexuels d'autrui ne saurait fournir le motif de sa répression. Les dispositions relatives aux souteneurs (art. 201 CP) - notamment passifs-ne sont pas non plus satisfaisantes. En pratique, l'élément déterminant qu'est l'exploitation des prostitués (homme ou femme) par la mise à profit de leur dépendance et les restrictions apportées à leur liberté d'action s'efface derrière des considérations purement pécuniaires et patrimoniales.24) Une réglementation pénale n'a de raison d'être dans ce domaine que si elle est comprise comme une protection de la liberté personnelle. En conséquence, nous proposons de remplacer les articles 198, 199, 200 et 201 CP par une seule et unique disposition portant le titre marginal d'«encourage-

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ment à la prostitution». Elle déclare punissable quiconque aura poussé une personne mineure à la prostitution ou l'aura maintenue dans cet état, ou qui à cette fin aura profité de la dépendance d'autrui. Elle punit aussi celui qui, pour en tirer profit, aura poussé autrui à se prostituer ou l'aura maintenu dans cet état. Elle réprime en outre la surveillance des prostitués dans leurs activités. Cette nouvelle dispositon vise donc à protéger, d'une part, la liberté de décision de la personne qui s'adonne à la prostitution et, d'autre part, les autres personnes qui contre leur gré sont poussées à s'y adonner.

Les législations étrangères connaissent des réglementations analogues.25) Que faut-il entendre par prostitution! Elle peut être tant hétéro- qu'homosexuelle et consiste à livrer son corps, occasionnellement ou par métier, aux plaisirs sexuels d'autrui pour de l'argent ou d'autres avantages matériels. Point n'est besoin qu'il y ait véritablement acte sexuel.

Pousse à la prostitution, celui qui initie une personne à ce métier et la détermine à l'exercer. Eu égard aux différentes manières d'influer sur autrui elles peuvent aller du simple conseil à la pression massive-il faut ici que l'influence ait été exercée avec une certaine intensité pour que l'on puisse admettre qu'il y a eu encouragement au sens précité. Pousser à la prostitution va plus loin qu'inciter à celle-ci. Ainsi une personne déjà adonnée à la prostitution peut très bien être incitée à se livrer à un acte concret de prostitution, par exemple pour procurer le montant nécessaire à l'achat d'une voiture. Mais seule une personne qui ne s'adonne pas à la prostitution peut être poussée à l'exercer.

Maintenir en état de prostitution englobe tous les moyens, quels qu'ils soient, employés dans ce but, comme la violence, la menace, la dépendance, notamment financière.

Le 1 " alinéa de la nouvelle disposition protège en premier lieu les mineurs.

Leur capacité à se déterminer n'étant pas encore complètement développée, il convient d'instituer une protection générale à leur égard. Cette disposition n'a toutefois de portée autonome que si la victime est âgée d'au moins 16 ans. Encourager des personnes plus jeunes à se prostituer entre en effet en concours idéal avec l'article 187, chiffre 1,3 e alinéa du projet, qui punit l'incitation à un
acte d'ordre sexuel.

Si l'auteur profite de la dépendance d'une personne de plus de 16 ans mais encore mineure, il n'y a pas concours idéal avec l'article 188, chiffre 1 , 2 e alinéa, du projet. Dans ce cas l'article 195 du projet, qui prévoit une peine sensiblement plus sévère, est seul applicable; l'encouragement à la prostitution, plus répréhensible, consomme en effet l'incitation à un acte d'ordre sexuel.

L'article 200 CP (favoriser la débauche) devient par ailleurs superflu. Il punit «celui qui, sans dessein de lucre, aura favorisé la débauche de personnes âgées de moins de 18 ans ou aura excité de telles personnes à la débauche». De tels comportements peuvent constituer une participation punissable aux infractions réprimées par les articles 188 (actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes) et 193 (abus de la détresse) du projet. On considère du reste que l'article 200 CP est trop large, puisqu'il permet

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d'incriminer les parents ou les enseignants qui n'empêchent pas les actes «contraires à la pudeur», auxquels ils doivent s'attendre, entre adolescents ou écoliers du même âge. Quant à la protection par rapport à la prostitution, l'article 195 du projet y suffit.

Aux termes du 1 er alinéa de l'article 195 du projet, il y a également encouragement à la prostitution lorsqu'une personne entravée dans sa liberté de décision du fait de sa dépendance a été poussée à se livrer à la prostitution ou empêchée de cesser de s'y adonner. Tout comme dans la variante concernant la protection de la jeunesse, peu importent les mobiles qui ont poussé l'auteur à agir.

La notion de dépendance doit être prise au sens large. Le texte légal ne la définit pas de manière plus précise, laissant au contraire au juge le soin d'apprécier la situation. On peut déjà en admettre l'existence lorsque la victime est l'esclave de sa passion pour l'auteur. Mais l'exemple le plus typique de mise à profit de la dépendance est certainement le fait de tenir une maison de prostitution. Tout comme sous l'empire du droit actuel (art.

199, 1TM al., CP), l'exploitation de telles maisons reste donc punissable, à ceci près toutefois que la nouvelle disposition définit de manière plus évidente qu'aujourd'hui le bien qu'elle entend protéger, notamment les personnes qui sont poussées à la prostitution ou qui veulent cesser de s'y adonner. Plusieurs établissements peuvent être considérés comme des maisons de prostitution, y compris, selon les circonstances, un salon de massage (cf. ATF 98 IV 255 qui ne se réfère pas à l'art. 199, 1 e r al., CP). Par maison de prostitution, on n'entend pas nécessairement un établissement fermé; on peut aussi tirer profit de la dépendance d'autrui en tant qu'entremetteur dans un réseau de «call-girls». Les centres erotiques ou «ErosCenters» sont en revanche des établissements relativement libres. Ils ont à l'évidence fait leurs preuves par rapport à la prostitution de rue et les prostitués n'y sont en principe pas soumis à la surveillance et au dirigisme propres aux maisons de prostitution. On ne peut toutefois pas exclure que certaines formes de dépendance se développent dans de tels établissements.

Puisque la nouvelle disposition fait de la dépendance une condition de la répression, la police sera fondée à
effectuer des contrôles réguliers dans lèsdits centres pour vérifier si précisément cette condition est remplie. Dans la négative, le tenancier d'un Eros-Center ne sera pas punissable.

L'article 195, 2 e alinéa, du projet définit une seconde forme d'encouragement punissable à la prostitution, qu'elle subordonne à la condition que l'auteur veuille en tirer profit. Cet élément constitutif de l'infraction se confond avec le mobile de l'auteur.

Cette disposition est avant tout destinée à remplacer la réglementation actuelle du délit de souteneurs. Mais c'est sur l'exploitation de la prostitution d'autrui qu'elle met dorénavant l'accent et c'est pour elle qu'elle entend rendre le souteneur punissable. Il y aura par conséquent impunité pour ce lui qui accepte les prestations qu'une (ou qu'un) prostituée prélève sur ses gains, s'il peut être établi qu'il ne l'a ni poussé(e) à la prostitution ni maintenu(e) dans cet état pour en tirer profit, autrement dit tant que l'intéressé(e) peut disposer librement de ses revenus.

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La disposition déclare en outre punissable celui qui, pour son profit personnel, aura porté atteinte à la liberté d'action d'une personne s'adonnant à la prostitution en l'obligeant à exercer cette activité d'une manière contraire à sa volonté. Cette clause générale définit une forme particulière du maintien en l'état de prostitution. C'est le cas lorsque la personne prostituée est tenue de continuer son activité, bien qu'elle souhaite provisoirement l'interrompre ou la limiter et. ne plus rechercher ou servir de nouveaux clients, ou encore lorsqu'on exige qu'elle se livre à des actes d'ordre sexuel qu'elle réprouve. Il n'est pas nécessaire qu'elle veuille quitter le milieu de la prostitution, mais elle ne peut être tenue d'endurer les conséquences concrètes du maintien dans cette activité. L'atteinte portée à sa liberté d'action peut dans cette mesure être moins importante que dans les autres cas envisagés par les 1er et 2e alinéas de l'article 195 du projet.

Dans tous ces cas, la personne adonnée à la prostitution subit une certaine pression et est plus ou moins dépendante de l'auteur. II n'est cependant pas nécessaire de prouver la dépendance proprement dite; il suffit de prouver que l'auteur obtient de ladite personne un certain comportement pour en tirer un profit économique. II est vrai que cette preuve n'est pas facile à rapporter; dans la plupart des cas, de surcroît, elle ne peut être établie qu'une fois que la prostituée a cessé son activité ou s'est séparée de son souteneur. Mais ce sont ces mêmes difficultés qui aujourd'hui déjà, empêchent une répression efficace du délit de souteneurs.

Sanction pénale Les infractions des 1 er et 2 e alinéas sont réunies dans une seule disposition et passibles de la même peine, puisqu'elles visent uniquement deux comportements punissables: pousser une personne à la prostitution ou l'y maintenir. Cela permet au juge de tenir compte des circonstances du cas d'espèce. La peine est la réclusion pour cinq ans au plus ou l'emprisonnement. Elle correspond dans son maximum à celles qui frappent les infractions qualifiées conformément aux articles 198, 2e alinéa, et 199, 1 er alinéa, CP. La jurisprudence avait déjà suggéré de réexaminer l'article 199, 2 e alinéa, qui prévoit une peine pouvant aller jusqu'à dix ans de réclusion pour le délinquant qui a livré
une personne mineure à la prostitution (cf. ATF 106 IV 121). Nous avons renoncé aux peines minimales spéciales (art. 198, 2 e al., 201 CP), suivant en cela la tendance générale en la matière. Si par ailleurs le délinquant a agi par cupidité, le juge peut, selon l'article 50, 1 " alinéa, CP, le condamner à une amende, accessoirement à une peine privative de liberté; il peut en outre appliquer l'article 58, 1 er alinéa, lettre a, CP et confisquer l'avantage illicite ainsi réalisé.

L'expulsion qui, selon l'article 199, 3e alinéa, CP, est obligatoire si le proxénète est étranger, peut déjà être prononcée par le juge en vertu de l'article 55, I e r alinéa, CP. La nationalité comme telle a peu d'importance dans ce contexte; si l'auteur est acclimaté en Suisse, sa resocialisation doit avoir lieu en Suisse (cf. ATF 104 Ib 154). Une disposition prévoyant l'expulsion obligatoire ne se justifie du reste que dans les cas où l'auteur a agi contre la Suisse, 74 Feuille fédérale. 137e année. Vol. II

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Enfin, nous ne cacherons pas que l'article 195 du projet est contraire au concept qui est à la base de la Convention de l'ONU du 21 mars 1950 sur la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, dans la mesure où il ne prend comme critère que la liberté d'action des prostitués et ne condamne les maisons de prostitution que si l'on y exploite un rapport de dépendance. La ratification de cette Convention par la Suisse a du reste échoué jusqu'ici pour des raisons tenant au respect de la souveraineté des cantons (l'art. 6 de la Convention prohibe le recensement administratif et policier des prostitués, ainsi que leur surveillance et leur contrôle). Elle n'a d'ailleurs pas non plus été ratifiée par la République fédérale d'Allemagne, l'Autriche et l'Italie.

232.32 Traite d'êtres humains (Art. 196) Nous proposons de remplacer l'actuel article 202 (traite des femmes et des mineurs) par une disposition plus concise. Celle-ci correspond à l'avantprojet de la commission d'experts qui, eu égard aux conventions ratifiées par la Suisse dans ce domaine26', n'y'a apporté que peu de modifications.

L'expression «pour satisfaire les passions (Unzucht) d'autrui» est toujours employée dans les conventions pour définir l'intention de l'auteur.

La nouvelle disposition élargit le cercle des victimes potentielles de l'infraction. La protection que l'article 202 CP accorde aujourd'hui aux femmes et aux mineurs, s'étend dorénavant à tous les êtres humains, c'est-à-dire à tout individu quels que soient son âge ou son sexe. Mais tout comme aujourd'hui, l'auteur doit s'être livré à la traite dans le dessein de satisfaire les passions d'autrui et point dans un autre but. Comme certains participants à la procédure de consultation l'ont relevé à juste titre, il existe d'autres formes punissables de traite des êtres humains utilisés comme de véritables marchandises; pensons à l'exploitation de certains travailleurs étrangers, sur le marché de l'emploi; ce problème avait d'ailleurs déjà été discuté au sein de la commission d'experts. Toutefois, il ne saurait être réglé dans le cadre des infractions contre les moeurs, mais plutôt dans celui des infractions contre la liberté; en effet, les articles 180 ss CP permettent en partie déjà de réprimer de tels actes.

Conformément aux textes conventionnels applicables en la matière, le chiffre 1 de l'actuel article 202 CP mentionne les parties de l'activité qui, dans son ensemble, constitue la traite (cf. ATF 96 IV 118 ss), à savoir embaucher, entraîner ou détourner. Cette énumération est supprimée. En ce qui concerne l'embauche, il ne ressort pas du texte légal actuel que la victime d'un tel acte doit être une personne qui ne se doute pas du destin qui l'attend. Il réprime par conséquent aussi le fait d'embaucher des prostitués qui sont parfaitement d'accord de changer d'établissement par exemple. Mentionner l'embauche s'avère superflu puisque l'article 195, 2e alinéa, du projet punit désormais celui qui, pour en tirer profit, aura poussé autrui à se prostituer.

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«Entraîner» et «détourner» sont des actes que l'article 183 CP (séquestration et enlèvement) réprime déjà d'une peine de réclusion pour cinq ans au plus ou d'emprisonnement. Cette disposition suffit donc aussi pour les cas de traite des êtres humains.

Dans la mesure où les trois actes susmentionnés constituent des préparatifs en vue de la traite, ils tombent sous le coup du 2e alinéa de la nouvelle disposition qui, exception faite de son champ d'application étendu à présent à tous les êtres humains et de la peine plus modérée qui y est prévue, correspond au chiffre 3 de l'article 202 CP.

La nouvelle disposition englobe également des actes qui requièrent une peine plus modérée que celle prévue par le droit actuel: le 1 " alinéa du projet prévoit désormais une peine de réclusion ou d'emprisonnement pour six mois au moins en lieu et place de la seule réclusion. Quant au 2e alinéa, il statue pour les actes préparatoires, une peine de réclusion de cinq ans au plus ou l'emprisonnement.

Comme sous l'empire du droit actuel, le juge doit, dans tous les cas, infliger également une peine d'amende (art. 202, ch. 3, CP / art. 197, 3e al., du projet). Tout comme dans le cas du proxénète professionnel (cf. ch.

232.31), nous avons en revanche renoncé à introduire l'obligation d'expulser le délinquant s'il est étranger.

L'article 202, chiffre 2, CP énumère une longue série de circonstances qui qualifient le délit. Cette casuistique est superflue au regard du large pouvoir d'appréciation que la nouvelle disposition confère au juge pour la fixation de la peine; ce pouvoir lui permet donc aussi de tenir compte de la gravité particulière de la culpabilité de l'auteur. La Suisse n'est d'ailleurs pas tenue de prévoir de telles circonstances au regard du droit international public.

Quant au chiffre 5 de l'actuel article 202 CP, qui fait de la traite des femmes et des mineurs un délit mondial, il est devenu superflu suite à l'adoption de l'article 6 bls CP, qui régit précisément de tels cas.

232.33 Débauche contre nature (Art. 194 du droit actuel: abrogation) Le droit actuel ne réprime pas les actes homosexuels entre personnes majeures. L'article 194 CP s'abstient donc d'ériger en délit cette activité sexuelle comme telle et ne sanctionne les actes de ce genre qu'en tant que trois conditions, indépendantes les unes des autres, sont remplies: lorsqu'une personne mineure de plus de 16 ans a été induite à commettre ou à subir un tel acte (1 " al.); lorsque ces actes ont été commis en abusant de la détresse ou de l'état de dépendance de la victime (2 e al.) ou encore lorsque l'auteur de ces actes en a fait métier (3e al.).

La commission d'experts a proposé de supprimer cette disposition, estimant que les comportements hétéro- et homosexuels devaient être traités de la même manière sur le plan pénal et que les nouvelles dispositions en matière sexuelle apportaient une protection suffisante à cet égard. Cette propo1103

sition a recueilli une large approbation lors de la procédure de consultation; certains participants ont ^toutefois émis le voeu que la protection pénale des jeunes gens leur soit assurée jusqu'à 18 ou 20 ans. Nous avons repris les propositions des experts et estimons qu'une limite d'âge particulière serait incompatible avec le principe de l'égalité de traitement.

Le fait d'entraîner un mineur âgé de 16 à 20 ans à commettre un acte homosexuel tombe désormais sous le coup de l'article 188, chiffre 1,2 e alinéa, du projet (actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes) si les conditions en sont remplies; combinée avec l'article 193 du projet (abus de la détresse), cette disposition remplace avantageusement l'article 194, 2e alinéa, CP.

Nous avons renoncé à reprendre l'élément constitutif qui consiste à induire le mineur à commettre un tel acte. Les recherches les plus récentes-sur lesquelles la commission d'experts s'est d'ailleurs appuyée - montrent que les contacts homosexuels qu'entretiennent les adolescents de plus de 16 ans (l'art. 187 du projet s'applique aux enfants plus jeunes) ne risquent plus d'influencer leur comportement sexuel. En tout cas, leur développement sexuel quant à l'hétéro-, l'homo- ou la bissexualité semble être achevé à cet âge. Les relations homosexuelles qu'entretiennent des adolescents du même âge ou presque peuvent être aussi une manifestation de leur puberté ou de leur développement qui n'engendre aucune conséquence durable. Les mesures prévues par le droit pénal des mineurs ne sauraient pas non plus être prises en considération en pareils cas.

Enfin, la prostitution masculine est assimilée à la prostitution féminine.

Elle est cependant soumise aux conditions fixées à l'article 195 du projet (encouragement à la prostitution), si bien que le 3 e alinéa de l'article 194 CP devient lui aussi sans objet.

232.34 Circonstances aggravantes (Art. 195 du droit actuel: abrogation) Parmi les circonstances aggravantes prévues par l'article 195 CP, nous n'avons retenu que celle du 3e alinéa, qui fait à présent du viol et de la contrainte à un autre acte d'ordre sexuel (art. 189 et 190 du projet) des infractions qualifiées lorsque l'auteur a agi avec cruauté. Toutes les autres circonstances peuvent être supprimées. En effet, si l'infraction d'ordre sexuel a causé la mort de la victime et si le délinquant avait pu le prévoir (art. 195, 2 e al., CP), il peut y avoir concours idéal avec l'homicide par négligence (art. 117 CP) et la peine peut être ainsi aggravée (cf. les commentaires ad art. 122 CP; ch. 213.1). Elle le sera également si les actes commis ont causé une grave atteinte à la santé de la victime - lésions corporelles graves-et si, de nouveau, le délinquant avait pu le prévoir (art.

195, 3 e al., CP), puisqu'il peut y avoir ici concours idéal avec les lésions corporelles par négligence (art. 125 CP) à condition qu'une plainte pénale ait été déposée.

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232.35 Séduction (Art. 196 du droit actuel: abrogation) Le droit actuel punit celui qui, abusant de l'inexpérience ou de la confiance d'une mineure âgée de plus de 16 ans mais de moins de 18 ans, l'aura entraînée à l'acte sexuel. Ici aussi, nous avons suivi la proposition de la commission d'experts d'abroger cette disposition. La majorité des participants à la procédure de consultation ont approuvé cette suppression. Certains comportements visés par l'article 196 CP devraient tomber sous le coup de l'article 188 du projet. Maintenir une incrimination plus large serait d'ailleurs en contradiction avec la capacité accrue de se déterminer que l'on reconnaît aujourd'hui aux adolescents à partir de 16 ans. Il ne faut pas oublier, en outre, que l'article 196 CP, censé protéger les adolescents, a pour conséquence l'ouverture d'un procès où l'intégrité et l'honorabilité de la victime sont mises en cause.

232.4 Pornographie 232.41 Pornographie (Art. 197) L'article 197 du projet, qui porte le titre marginal de «pornographie», remplace l'actuel article 204 CP (publications obscènes).

D'après la jurisprudence, un objet est obscène au sens de l'article 204 CP lorsqu'il blesse le sentiment de la décence sexuelle d'une manière non insignifiante. C'est donc la pornographie proprement dite qui est visée en premier lieu. Dans les cas qui ne ressortissent pas à la pornographie proprement dite, le juge pénal doit appliquer l'article 204 CP avec réserve et seulement si l'évocation de processus sexuels va manifestement à rencontre des conceptions morales de la très grande majorité du peuple et doit dès lors être considérée comme troublant ou gênant véritablement l'ordre social (cf. ATF 96 IV 68 consid. 3, 700 Ib 395).

La notion de pornographie a, par rapport à celle d'obscénité, l'avantage d'exprimer clairement l'idée de publications ou de représentations à teneur sexuelle. En règle générale, il s'agira de représentations qui sortent un comportement sexuel du contexte des relations humaines qu'il implique normalement, le rendant ainsi vulgaire et importun. L'exemple typique de représentation pornographique est celle évoquant des pratiques sexuelles s'intensifiant progressivement pour se réduire à l'expression de la sexualité ellemême.27' Force est toutefois de reconnaître que, dans les cas limites, même la notion de pornographie n'épargnera pas au juge l'obligation de déterminer l'étendue de la punissabilité. Mais même si, comme aujourd'hui, il ne sera pas toujours facile d'établir le caractère pornographique d'une représentation, la marge d'interprétation sera toutefois plus étroite dans ce domaine.28' Si l'article 197 du projet correspond dans une large mesure à la proposition de la commission d'experts, nous avons aussi tenu compte des objections

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émises lors de la procédure de consultation. Le droit pénal a trois missions à remplir dans ce domaine: épargner aux jeunes gens le spectacle de telles représentations; faire en sorte que nul ne soit contraint de prendre connaissance de représentations à teneur sexuelle et enfin interdire - alors que la commission n'entendait que la restreindre - toute pornographie par trop dégradante, c'est-à-dire la pornographie dure.

En ce qui concerne les réglementations étangères en matière de pornographie, nous vous renvoyons à la note 29.

L'interdiction statuée au chiffre 1 concerne la pornographie douce et dure.

Cette dernière, décrite de manière exhaustive au chiffre 3, s'entend des actes d'ordre sexuel avec des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence. Les autres représentations ou objets sont par conséquent considérés comme de la pornographie douce. Ce que le chiffre 1 entend protéger, c'est le bien juridique que représente le développement sexuel paisible des adolescents; c'est pourquoi il interdit toute pornographie même douce destinée aux jeunes de moins de 16 ans, la pornographie dure étant soumise à une interdiction absolue. Pour que cette protection soit pleinement efficace, il est indispensable d'interdire aussi la diffusion de toute porngraphie douce ou dure à la radio et à la télévision.

Il n'est en effet pas possible de limiter le cercle des destinataires de ces médias, ni par conséquent d'éviter que des enfants écoutent ou regardent des émissions radiodiffusées ou télévisées. C'est pourquoi le chiffre 1 , 3 e alinéa, prévoit une interdiction absolue à cet égard. Le fait d'offrir, de montrer, de rendre accessible ou de mettre à disposition des représentations'ou objets de pornographie douce à des personnes de plus de 16 ans n'est par contre pas punissable.

11 s'agit ici d'un délit de mise en danger abstraite; il n'est par conséquent pas nécessaire que le développement de l'adolescent ait été effectivement compromis. L'âge limite de protection de 16 ans correspond à celui qui est prévu à l'article 187 du projet (actes d'ordre sexuel avec des enfants). En effet, si l'on admet que les jeunes de plus de 16 ans sont capables de prendre leurs responsabilités en matière sexuelle, on ne saurait leur dénier toute maturité en ce qui concerne la pornographie douce.
La fabrication et l'importation d'objets ou de représentations de pornographie douce n'est pas punissable. En fait, il s'agit d'actes qui, en eux-mêmes, sont peu répréhensibles à moins que l'auteur ne sache ou ne doive supposer qu'ils servent à préparer des actes punissables au sens du chiffre 1, par exemple rendre accessibles à des personnes de moins de 16 ans des images pornographiques. Il serait toutefois difficile dans la pratique d'apporter cette preuve; on a dès lors renoncé à une telle disposition (voir en revanche ch. 3 concernant la pornographie dure).

Le chiffre 2 menace d'une peine d'amende celui qui aura exposé ou montré en public des objets ou des représentations visés au chiffre 1, 1 " alinéa, ou les aura offerts à une personne qui n'en voulait pas. Le bien juridique protégé est ici l'intérêt de tout individu à ne pas être confronté contre son gré à la pornographie et, par conséquent, à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à sa

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sphère intime. On ne saurait contraindre une personne à prendre connaissance de ces choses lorsqu'elle ne le souhaite pas.

Est par exemple considéré comme offert contre le gré de son destinataire le matériel pornographique envoyé par la poste à une personne qui ne l'a pas demandé. «Exposer ou montrer en public» englobe toute publicité, comme les photos à l'affiche d'un cinéma, qui, si elle est située dans un lieu souvent fréquenté par des adolescents, réalise aussi et déjà l'infraction du chiffre 1. Le fait de présenter des objets ou des images pornographiques bien en évidence dans la vitrine d'un magasin tombe aussi sous le coup de l'une ou l'autre forme de l'infraction.

L'interdiction, prévue à l'article 204, chiffre 1,3 e alinéa, CP, de projeter ou de montrer des scènes pornographiques en public est maintenue. Selon la jurisprudence, la projection d'un Jilm dans un cinéma constitue un cas d'exposition en public. La projection est publique lorsque le film peut être vu par un cercle indéterminé de personnes. Le Tribunal fédéral avait en quelque sorte anticipé l'infraction visée au chiffre 2 de l'article 197 du projet dans l'ATF 96 IV 70, où il émettait les considérations suivantes: En matière de projection de films, et contrairement à ce qui se passe pour des écrits ou des images généralement accessibles, il y a également peu de risque que le public se trouve involontairement confronté à l'évocation de thèmes sexuels; il en va ainsi notamment lorsque des annonces appropriées attirent d'emblée l'attention des spectateurs sur l'objet et le caractère du film. Des adultes qui, dans de telles conditions, assistent délibérément à la projection d'un film contenant des scènes osées s'en accommodent généralement ou n'en sont du moins pas choqués et ils ont, en conséquence, moins besoin d'être protégés; en pareils cas, les limites de la tolérance peuvent donc être tracées plus largement que s'il s'agit de publications pour lesquelles il n'est pas possible de prendre des mesures de sûreté ou de contrôle.

Dans la mesure où les représentations pornographiques sont annoncées en tant que telles et où le spectateur est par conséquent averti et préparé à ce genre de spectacle, elles ne réunissent pas les éléments constitutifs de l'infraction. Elles doivent en revanche, dans tous les cas, être interdites si l'on peut admettre qu'un cercle indéterminé - même restreint - de personnes ne s'attend pas au spectacle qui lui est offert. Ce pourrait être le cas par exemple d'un cinéma non spécialisé dans les films à tendance pornographique qui, contrairement à son annonce, passe un tel film. Il appartient aux cantons d'édicter des prescriptions à cet effet. Les dispositions cantonales relatives aux représentations cinématographiques sont expressément réservées au chiffre 2, 2e alinéa, de l'article 197 du projet. Il s'agit avant tout de la réglementation de l'âge à partir duquel les adolescents peuvent être admis à de telles projections, âge qui doit toutefois excéder 16 ans. Les cantons n'ont, dans cette mesure, qu'une compétence restrictive.

Il va de soi qu'ils ont le pouvoir d'édicter une disposition qui trouvera place dans le droit cantonal des contraventions et non pas seulement d'arrêter de simples mesures administratives (art. 335, ch. 1, CP).

Le chiffre 3 prévoit une interdiction absolue de la pornographie dure. Celle-ci englobe - l'énumération est exhaustive - les actes d'ordre sexuel avec

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des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence (la représentation de la violence fait l'objet de l'art. 135 du projet, cf. ch. 214.9). Par supports de la pornographie dure, on entend tous les genres d'écrits, photos, images, objets ou représentations qui montrent ou qui ont pour contenu les actes d'ordre sexuel susmentionnés. Si la disposition a pour premier objectif la protection préventive de la jeunesse, cette protection doit également et de la même manière s'étendre aux adultes.

Le chiffre 3 va plus loin que la disposition proposée par la commission d'experts, qui entendait en limiter l'application aux personnes de moins de 18 ans. Elle ne contient par ailleurs aucune réglementation d'exception, contrairement à l'avant-projet de la commission d'experts, qui ne réprimait pas la pornographie dure transmise entre des personnes de plus de 18 ans faisant partie de la famille ou d'un cercle d'amis. Nous estimons en effet que la transmission d'objets ou de représentations pornographiques en petit comité n'est pas moins dommageable que celle qui touche un plus grand cercle de personnes. Cette interdiction de principe facilite du reste une protection conséquente de la jeunesse en excluant toute revendication abusive de personnes prétendant être au bénéfice d'une exception.

L'énumération figurant au chiffre 3 est exhaustive, en 'd'autres termes, tout ce qui ne tombe pas sous le coup du chiffre 3 doit être considéré comme pornographie douce. Cette casuistique présente certains désavantages: elle n'est probablement pas complète et pourrait, de plus, s'y voir ajouter des cas moins graves. Nous l'avons cependant préférée à une clause générale qui n'aurait pas permis de distinguer clairement entre pornographie dure et pornographie douce.

A la différence du chiffre 1, le chiffre 3 sanctionne les actes préparatoires.

En mentionnant la fabrication, l'importation, la mise en circulation et la prise en dépôt, il exclut les possibilités de tourner la loi. La mise en circulation englobe la commercialisation et, par conséquent, les fournisseurs et les distributeurs.

Les objets pornographiques doivent être séquestrés. Il y a lieu en effet de garantir que ces supports de la pornographie dure puissent dans tous les cas être confisqués. Ainsi, il ne sera pas nécessaire de prouver
que les conditions prévues à l'article 58, 1 " alinéa, CP sont remplies, en particulier celle de la lettre b, selon laquelle les objets doivent compromettre la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public.

Sanction pénale La peine d'emprisonnement ou d'amende prévue aux chiffres 1 et 3 de l'article 197 du projet reste dans le cadre de la peine statuée par l'article 204 CP. Le fait d'offrir des objets ou des représentations pornographiques à une personne qui n'en veut pas (ch. 2) constitue la plupart du temps une atteinte minime qui se rapproche plus du désagrément et partant d'une contravention. Aussi ne justifie-t-elle qu'une peine d'amende. Selon le chiffre 4, l'auteur qui a agi dans un dessein de lucre se voit impérativement frappé d'emprisonnement et d'amende. Par ailleurs et indépendamment de la punissabilité, les valeurs qui sont le produit ou le résultat de l'infraction peu-

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vent être confisquées, s'il y a lieu de supprimer un avantage ou une situation illicite (art. 58, 1 " al., let. a, et 4e al., CP).

La nouvelle disposition permet de renoncer à la prescription spéciale de protection de la jeunesse telle qu'elle figure à l'article 212 CP (mise en danger de mineurs par des images ou écrits immoraux). La portée de cette disposition est difficile à estimer, dans la mesure où la notion d'immoralité qu'elle contient va plus loin encore que celle d'obscénité au sens de l'article 204 CP (cf. à ce sujet ATF 103 IV 175).

232.5

Contraventions dans le domaine sexuel

232.51 Désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel (Art. 198) L'article 198 du projet, qui réprime deux contraventions, protège l'intégrité et la faculté de se déterminer en matière sexuelle. Combiné avec l'article 194 du projet sur l'exhibitionnisme, il remplace l'article 203 CP (outrage public à la pudeur). Il se subsitue en outre à l'article 205 CP (sollicitations déshonnêtes).

Tombe sous le coup de l'article 198, 1 er alinéa, du projet-pour autant qu'il n'est pas punissable pour exhibitionnisme (art. 194 du projet) - celui qui aura causé du scandale en se livrant à un acte d'ordre sexuel en présence d'une personne qui y aura été inopinément confrontée. Pour que l'acte soit punissable, il faut donc que la victime ait été confrontée contre sa volonté à un acte d'ordre sexuel, c'est-à-dire qu'elle ait dû en être le témoin et que cet acte l'ait scandalisée. Il faut aussi que l'auteur ait voulu causer du scandale; le dol éventuel est suffisant. N'est donc pas punissable l'acte commis dans des circonstances telles qu'on pouvait compter que personne n'en serait le témoin obligé, l'auteur étant lui-même surpris par des tiers (p. ex. des amoureux surpris dans une voiture parquée dans un endroit retiré). Peu importe par ailleurs que l'acte ait été commis en public et que, par conséquent, un nombre indéterminé de personnes présentes ou survenant par hasard aient pu observer les faits (sur la notion de publicité au sens de l'art. 203 CP, cf. ATF 89 IV 131) ou qu'il se soit déroulé dans un lieu où il ne pouvait pas être perçu par d'autres personnes que la victime.

Dans cette mesure, la nouvelle disposition va plus loin que l'article 203 du droit actuel.

A la différence des actes exhibitionnistes au sens de l'article 194 du projet (cf. ch. 232.26), point n'est besoin d'exhiber des organes sexuels pour causer un tel désagrément. En outre, il importe peu que l'auteur ait commis l'acte pour des motifs d'ordre sexuel ou pour d'autres motifs - par exemple dans le but de choquer - car il suffit qu'il ait causé du scandale.

En ce qui concerne les réglementations étrangères analogues, nous vous renvoyons à la note 30.

Le 2e alinéa punit celui qui aura importuné, par des attouchements d'ordre 1109

sexuel, une personne qui n'y avait pas donné prétexte. 11 remplace l'article 205 CP (sollicitations déshonnêtes).

L'infraction y est définie de manière plus précise: à la différence de l'article 205 CP, où une simple sollicitation verbale suffit (cf. ATF 90 IV 205), le désagrément ne peut être constitué ici que par un acte proprement dit et cet acte doit être d'ordre sexuel. Le 2e alinéa met donc l'accent sur la forme en laquelle la victime a été importunée et non plus seulement sur l'intention de l'auteur.

Sont visés notamment les cas où un individu met à l'improviste «la main» sur les organes génitaux d'une personne. Un tel acte est répréhensible qu'il soit ou non commis en public. Ce que la disposition entend en définitive protéger, c'est moins la pudeur ou la décence publique que la pudeur personnelle et l'honneur de la victime. La jurisprudence l'a d'ailleurs souligné à propos de l'actuel article 205 CP (cf. ATF 70 IV 85).

Il ne s'agit pas de voies de fait au sens de l'article 126 CP, c'est-à-dire d'actes qui portent atteinte à l'intégrité corporelle de la victime, ni d'une contrainte à un autre acte d'ordre sexuel au sens de l'article 190 du projet, 232.52 Exercice illicite de la prostitution (Art. 199) Le droit actuel ne punit pas la prostitution (hétérosexuelle) en soi. Il réprime en revanche comme contraventions diverses manifestations concomittantes qui peuvent être gênantes: le racolage (art. 206 CP), le trouble causé de ce fait au voisinage (art. 207 CP), la publicité donnée aux occasions de débauche (art. 210 CP).

Il est extrêmement difficile de limiter efficacement l'exercice, en soi licite, de la prostitution; les conditions divergent en effet non seulement d'un canton à l'autre, mais sont souvent très différentes à l'intérieur d'un même canton, d'une localité à l'autre. Les dispositions susmentionnées se sont révélées insuffisantes par rapport au but visé. L'article 206 CP ne punit que les prostitués qui scandalisent par l'effronterie de leur attitude (cf. ATF 95 IV 132 ss). La contravention de l'article 207 CP ne peut être réalisée que par des prostitués, à l'exclusion des clients et des souteneurs, dont le comportement cause parfois un trouble bien plus gênant (cf. ATF 89 IV 201).

Pour lutter contre ces derniers, on utilise des moyens indirects qui ne sont que des pis-aller,
comme les condamner pour va-et-vient inutile 31 ' ou pour tapage nocturne en application du droit pénal cantonal en matière de contraventions- Dans les grandes villes, ces expériences ont conduit la police à déplacer les prostitués dans des territoires déterminés, à l'écart des quartiers résidentiels, des églises, des écoles ou des hôpitaux (prescriptions des villes de Zurich et de Berne sur la prostitution de rue). Ces prescriptions sont conformes à l'article 31 de la Constitution fédérale (restrictions de police en matière de commerce et d'industrie). L'exercice de la prostitution est considéré comme une activité économique; il est donc protégé par l'article 31, 1 er alinéa, Cst, pour autant qu'il ne tombe pas sous le coup de l'article 206 CP (cf. ATF 99 la 504 ss, 101 la 473 ss).

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Même s'ils sont peu efficaces, on ne pouvait renoncer aux articles 206 et 207 CP sans simultanément autoriser expressément les cantons à édicter des dispositions en la matière; on aurait pu y voir un silence qualifié du législateur en ce sens qu'il entendait laisser de tels actes impunis. Il fallait donc mettre sur pied une norme-cadre fédérale qui donne aux cantons la compétence d'intervenir au-delà des simples besoins de police et d'édicter des réglementations qui ne se heurtent pas au principe de la proportionnalité.

La commission d'experts a donc proposé une disposition donnant aux cantons la compétence d'édicter des prescriptions sur les lieux, heures et modes de l'exercice de la prostitution, ainsi que sur la lutte contre ses manifestation secondaires fâcheuses; elle a par ailleurs muni cette disposition d'une sanction-cadre de droit fédéral en forme de blanc-seing.

Nonobstant les remarques qu'a suscitées le 1 " alinéa - que certains considèrent comme une réserve improprement dite du législateur en faveur des cantons - cette disposition a été bien accueillie lors de la procédure de consultation. Nous l'avons donc reprise, mais en y ajoutant l'obligation pour les cantons de se référer à la peine qu'elle prévoit.

La compétence ainsi conférée aux cantons doit demeurer dans les limites tracées par le droit fédéral, qui interdit que les dispositions cantonales fassent de la prostitution elle-même un délit.

Alors que les dispositions qui réglementent les lieux, heures et modes d'exercice de la prostitution permettent d'intervenir contre les prostitués, celles concernant ses manifestations secondaires fâcheuses permettent d'agir contre les clients, mais aussi et surtout contre toute personne qui, dans ce contexte, trouble la collectivité publique (p. ex. va-et-vient inutile ou fait d'ouvrir et de claquer des portières de voiture).

Les cantons sont libres de déléguer leur compétence aux communes. Nous pensons ici surtout aux grandes villes et aux communes de leur banlieue.

Les réglementations relatives à l'environnement gênant de la prostitution doivent tenir compte le plus possible des conditions locales. Mais il faut aussi que les sanctions qui les accompagnent soient uniformes sur le plan fédéral. C'est pourquoi la disposition de l'article 199 du projet a été conçue sous forme de norme-cadre
en ce sens qu'elle prescrit impérativement aux cantons de prévoir des peines d'arrêts ou d'amende. La sanction de droit fédéral doit donc être reprise dans les dispositions de droit cantonal. C'est ce que veut exprimer le passage «sous la menace prévue au présent article».

Nous retrouvons ici la même réglementation que celle prévue pour les décisions selon l'article 292 CP (insoumission à une décision de l'autorité; cf. ATF 68 IV 47).

La nouvelle disposition permet d'abroger les articles 206 et 207 CP, de même que l'article 208 CP (disposition spéciale concernant les mineurs), devenu superflu par suite des prescriptions des articles 100 et 100bis CP consacrés aux jeunes adultes.

Quant à l'article 210 CP (publicité donnée à des occasions de débauche) -

1111

qui englobe les actes préparatoires en matière de prostitution, y compris les signes par lesquels une personne manifeste qu'elle est disposée à se livrer à la débauche, en soi non punissable (cf. ATF 108 IV 173)-il peut également être supprimé.

232.6 Commission en commun 232.61 Commission en commun (Art. 200) L'expérience crirninologique la plus récente nous enseigne que les délits contre le patrimoine ne sont pas les seuls à être commis collectivement mais que c'est de plus en plus le cas pour les infractions en matière sexuelle aussi. Il fallait tenir compte de ce phénomène dans la présente revison.

L'article 200 du projet donne donc au juge la possibilité d'aggraver la peine lorsque des infractions en matière sexuelle auront été commises collectivement. Il ne peut cependant aller au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour ces infractions. Il est en outre lié par le maximum légal du genre de peine (20 ans en cas de réclusion, trois ans en cas d'emprisonnement et trois mois en cas d'arrêts). La commission en commun constitue donc une nouvelle circonstance aggravante qui qualifie l'infraction d'ordre sexuel et qui est formulée de manière analogue à l'article 68, chiffre 1, CP (concours d'infractions ou de lois pénales). Elle n'était pas prévue par l'article 195 CP (circonstances aggravantes).

Plutôt que de prévoir une cause d'aggravation de la peine pour le motif que l'auteur a agi en qualité d'affilié à une bande (art. 137 et 139-vol et brigandage-, tous deux ch. 2, 2 e al., CP), nous avons préféré ériger en circonstance aggravante le fait que l'infraction a été commise en commun. Selon la jurisprudence, on entend par bande la «réunion de deux ou plusieurs individus qui, expressément ou tacitement, s'associent pour commettre des infractions dont la nature n'est pas absolument déterminée d'avance» (cf.

ATF 700 IV 220). Or le caractère collectif des délits contre les moeurs résulte souvent d'une rencontre spontanée des auteurs. La formulation choisie permet par conséquent de cerner également les cas où l'aspect collectif se matérialise en un instant.

L'action commune embrasse toutes les formes de coopération consciente et voulue: elle trouve son expression dans la notion de coauteur. Est coauteur, celui qui s'associe soit à la décision dont l'infraction est issue, soit à l'exécution de cette infraction, avec une intensité telle que sa participation revêt un caractère principal et non pas subordonné comme celle du complice (ATF 77 IV 91,704 IV 170).

Cette nouvelle circonstance aggravante sera particulièrement
importante en matière de viol. La jurisprudence n'a en effet pas considéré tous les cas de viol commis en commun comme étant qualifiées au sens de l'article 187, 2e alinéa, CP (cf. ch. 232.21), se basant uniquement, pour appliquer cette 1112

disposition, sur la capacité de résistance dont disposait encore la victime (cf. ATF 89 IV .85, 98 IV 97).

Le viol, tout comme la contrainte à un autre acte d'ordre sexuel, peut, s'il est commis en commun, être puni d'une peine allant jusqu'à 15 ans de réclusion (la peine ne sera pas inférieure à trois ans de réclusion si les auteurs ont agi avec cruauté). Quant aux actes d'ordre sexuel commis en commun sur une personne incapable de discernement ou de résistance, ils peuvent être punis d'une peine allant jusqu'à 7 '/·> ans de réclusion.

Pour certains délits, d'ailleurs peu nombreux, qui ne sont passibles que d'une peine d'emprisonnement - comme les actes d'ordre sexuel commis sur des personnes dépendantes (art. 188 du projet) - l'aggravation de la peine que nous proposons ne peut produire son plein effet. Le juge est en effet lié par le maximum légal du genre de peine, en l'occurrence trois ans d'emprisonnement. Mais le fait que de tels actes ont été commis en commun devrait sans aucun doute l'inciter à prononcer une peine qui se situera régulièrement dans le tiers supérieur du cadre prévu.

232.7

Réclame offensant les moeurs (Art. 211 du droit actuel : abrogation)

L'abrogation de cette disposition était déjà prévue par l'article 16, 1 er alinéa, de la loi du 24 juin 1977 sur la protection de la grossesse et le caractère punissable de son interruption (FF 7977 III 92), loi rejetée par le peuple le 28 mai 1978.

232.8

Avis relatif à la pornographie (Art. 358)

Cette disposition, dont seule la terminologie a été modifiée, se rapporte aux obligations imposées à la Suisse du fait de la ratification de la Convention internationale du 12 septembre 1923 sur la répression du trafic et de la commercialisation des publications obscènes (RS 0.311.42).

232.9

Définitions légales (Art. 110, ch. 1, du droit actuel: abrogation)

Dans le code pénal, le terme femme désigne toute personne du sexe féminin âgée de 16 ans au moins. Lors de la revision consacrée aux «actes de violence criminels», la protection prévue par les dispositions relatives à la séquestration et à l'enlèvement (cf. art. 183 CP) a été étendue à chaque individu et le terme «femme» supprimé dans ce domaine. Si vous acceptez notre proposition concernant les modifications du titre consacré aux «infractions contre les moeurs», dont la protection jusqu'ici réservée à la femme a été étendue à tout individu en tant que tel (art. 189, 191, 193 et 196 du projet, à savoir le viol, les actes d'ordre sexuel commis sur des personnes incapables de discernement ou de résistance, la traite des êtres

1113

humains), le terme «femme» disparaîtra de l'ensemble du code pénal.

Certes, seule une personne de sexe féminin peut être la victime d'un viol (art. 189 du projet), mais sans limite d'âge. Le chiffre 1 de l'article 110 CP peut donc être supprimé.

24

Commentaire du projet B relatif au code pénal militaire (Moeurs)

Le code pénal militaire doit également être adapté aux modifications apportées au code pénal dans ce domaine.

Intitulé et articulation du chapitre douzième: Chapitre douzième (infractions d'ordre sexuel) Article 153 (viol) Article 154 (contrainte à un autre acte d'ordre sexuel) Article 155 (actes d'ordre sexuel commis sur des personnes incapables de discernement ou de résistance) Article 156 (actes d'ordre sexuel avec des enfants) Article 157 (actes d'ordre sexuel avec des personnes du même sexe) Nous avons repris l'avant-projet de la commission d'experts, auquel les résultats de la procédure de consultation ne font pas obstacle. Une proposition de supprimer l'article 157, chiffre 1, CPM avait d'ailleurs été rejetée par le Conseil national, par 62 voix contre 37, lors des débats parlementaires de 1979 relatifs à la modification du code pénal militaire (BÖ N 1978 125). L'armée étant composée principalement d'hommes, les relations homosexuelles seraient incompatibles avec la discipline et Tordre militaires.

Selon le chiffre 1 de cette disposition, les actes homosexuels des personnes assujetties au code pénal militaire restent donc punissables. Quant au chiffre 2, nouvellement formulé, il fait de tels actes une infraction qualifiée lorsque celui qui les a perpétrés a profité de sa situation militaire.

Article 158 (circonstances aggravantes: abrogation) Article 159 (exhibitionnisme) Le droit pénal militaire ne connaissant pas de disposition réglementant la plainte à l'exception des infractions contre l'honneur, l'exhibitionnisme est un délit poursuivi d'office en droit pénal militaire. Cela se justifie d'autant plus qu'une telle infraction est de nature à perturber l'ordre et la discipline militaires au sein de la troupe.

Article 159a (commission en commun) 25

Modification de la loi sur les douanes

Article 36. 4e alinéa, de la loi sur les douanes (séquestre à la frontière) Selon cette disposition, les publications et objets immoraux découverts à 1114

l'occasion de la vérification sont séquestrés et il en est donné avis au Ministère public de la Confédération. La teneur de cette norme doit être adaptée aux articles 135 et 197 du projet, ce qui implique la saisie de tous les objets ou représentations illustrant avec insistance des actes de cruauté (cf. art, 135 du projet), ainsi que ceux ou celles relatives à la pornographie dure (cf.

art. 197, ch. 3, du projet). Pour des raisons d'ordre pratique, il convient aussi de décharger le Ministère public de la Confédération du soin de décider du caractère illicite ou non des biens confisqués à la frontière. C'est pourquoi l'article 36, 4e alinéa, prévoit, dans sa nouvelle version, qu'ils seront transmis par le bureau de douane concerné au Ministère public du canton compétent, la décision devant être prise par une autorité judiciaire au lieu de l'être par une autorité administrative.

Les films pour lesquels il existe une autorisation d'importation ne font pas l'objet d'un séquestre provisoire. Cette réserve a pour but de garantir la sécurité juridique.

26

Commentaire du projet C relatif à la modification du code pénal militaire (Sanction disciplinaire en cas de consommation de quantités minimes de stupéfiants)

Article 218 (juridiction militaire) et article 219 (tribunaux ordinaires) II nous a paru judicieux de profiter de l'occasion qu'offrait la revision du code pénal militaire pour y insérer une nouvelle disposition conférant au commandant de troupes la compétence disciplinaire d'agir directement contre les consommateurs de quantités minimes de stupéfiants. Cette compétence correspond à une réelle nécessité. Ce problème est par ailleurs étroitement lié au domaine relatif à la «vie» et à l'«intégrité corporelle».

Aux termes des articles 7 et 219 du code pénal militaire, c'est aux autorités judiciaires civiles qu'il appartient de sanctionner les infractions à la loi du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants (LStup, RS 812.121) commises pendant le service militaire. L'article 19a LStup déclare passible des arrêts ou de l'amende «celui qui, sans droit, aura consommé intentionnellement des stupéfiants ou celui qui aura commis une infraction à l'article 19 de la loi pour assurer sa propre consommation», par exemple, en ayant fabriqué, entreposé, transporté, acheté, vendu, distribué, procuré, acquis des stupéfiants, etc.... «Dans les cas bénins, l'autorité compétente pourra suspendre la procédure ou renoncer à infliger une peine». Quant à l'article \9b, il déclare non punissable «celui qui se borne à préparer pour lui-même la consommation de stupéfiants ou à permettre à des tiers d'en consommer simultanément en commun après leur eh avoir fourni gratuitement», pour autant qu'il s'agisse de quantités minimes.

Au vu de ce qui précède, la consommation de drogues en quantités minimes pendant le service militaire n'est donc pas punissable.

1115

Dans la mesure où le code pénal militaire comporte des dispositions qui permettent de punir les consommateurs de drogue, celles-ci se limitent aux cas suivants: - Crime ou délit commis en état d'irresponsabilité causée par ivresse ou intoxication imputables à faute (art. 80, ch. 2, CPM); - Personnes qui, par une mutilation ou par tout autre procédé, se seront rendues de façon permanente ou temporaire inaptes au service militaire pour autant que la drogue ait été consommée dans ce but (art. 95 CPM); - Conducteur se trouvant sous l'effet de la drogue (art. 31 de la loi sur la circulation routière et art. 2 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière); - Personnes qui, se trouvant sous l'effet de la drogue, se seront mises hors d'état d'accomplir les devoirs que leur impose le service de garde (art. 76, ch. 1, l s r al., CPM).

Si donc les éléments constitutifs relatifs à la consommation de stupéfiants ne sont pas réunis-ce qui est déjà le cas s'il n'y a consommation que de quantités minimes de drogue-l'acte ne peut être poursuivi selon le droit pénal militaire.

La consommation de quantités minimes de stupéfiants est relativement fréquente pendant l'école de recrues, plus rare en revanche lors des cours de répétition. Rares sont également les infractions au sens de l'article 19 LStup qui nécessitent le renvoi devant les tribunaux ordinaires. La consommation de quantités minimes de drogue ne provoque aucune inaptitude au service; de tels consommateurs sont en général bien intégrés du point de vue social. Cela n'exclut cependant pas tout danger, ni pour le soldat qui s'y adonne, même en petites quantités, ni pour les personnes de son entourage, surtout pendant les exercices de tir. Tout soldat sous l'influence de la drogue présente un risque pour la discipline et pour la sécurité de la troupe et, par conséquent, également pour la capacité de défense de l'armée.

Nous avons étudié ce problème soulevé par les commandants de troupes et sommes parvenus à la conclusion qu'il convenait de combler cette lacune de la loi. Nous avons en conséquence prévu d'étendre la juridiction militaire également aux cas de consommation sans droit de quantités minimes de stupéfiants pendant la période de service (cf. art. 218, 4e al., et 219, 1er al., du projet relatif à la revision du code pénal militaire).

3

Effets sur l'état du personnel et conséquences financières pour la Confédération et les cantons

La présente revision n'occasionne aucun frais supplémentaire et n'a aucune répercussion sur l'état du personnel de la Confédération et des cantons.

4

Grandes lignes de la politique gouvernementale

La revision du code pénal et du code pénal militaire concernant les infrac1116

lions contre la vie, l'intégrité corporelle, les moeurs et la famille est prévue dans les Grandes lignes de la politique gouvernementale 1983 -1987 (FF 19841 153, ch. 36).

5

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur les articles 20 et 64bis de la constitution qui donnent à la Confédération la compétence de légiférer sur l'organisation de l'armée et en matière de droit pénal.

30071

75 Feuille fédérale. 137e année. Vol. II

1117

Notes » Ont fait partie de la commission d'experts pour la revision du code pénal lors de cette étape: M. Arthur Bachniann t, chef du département de la justice du canton de Zurich (Winterthour); Mmc Monique Barrelet, docteur en médecine (Neuchâtel); M. Max Berger, professeur de médecine (Berne), jusqu'en 1973; M. Jean-Claude Chappuis, secrétaire général du Département de la justice, de la police et des affaires militaires du canton de Vaud (Morges); M. François Clerc, professeur de droit pénal (Saint-Biaise); Mmc Ita Maria Eisenring, juge cantonal (Rorschach); M. Peter Fink, juge cantonal (Zurich); M. Jean Gauthier, professeur de droit pénal (Lausanne); M. Philippe Graven, professeur de droit pénal (Genève); M. Rudolf Gerber, procureur général de la Confédération (Berne), depuis novembre 1973; Mc Alois Grendelmeier t, (Zurich); M. Georges-André Hauser, professeur de médecine (Lucerne); MTM Valentine Lenoir-Degoumois, professeur de droit (Genève); Mme Ruth Levi-Anliker (Pully); M. Ernst Lohner, brigadier, à l'époque auditeur en chef de l'armée (Berne); M. Peter Noli t, professeur de droit pénal (Gossau ZH); M. Willy Padrutt, procureur général (Coire); Mc Dominique Poncet (Genève); M. Marco Ramelli, juge cantonal (Locamo); M. Louis Rumpf, professeur de théologie (Lausanne); M. Vital Schwander, juge fédéral (Lausanne); M. Heinrich Stamm, professeur de médecine (Baden); Mmc Judith Stamm (Lucerne); M. HansMartin Steinbrück t, juge cantonal (Aarau), jusqu'en novembre 1976; M. Günter Stratenwerth, professeur de droit pénal (Reinach BL); Mc Antoinette StuckiLanzrein (Mûri près Berne); M. Alois Sustar, professeur de théologie (Coire); M.

Hans Walder, ancien procureur général de la Confédération (Seftigen), jusqu'en août 1973; M. Hans Wieland, ancien procureur général (Bàie), M. Rudolf Wyss, professeur de médecine (Münsingen).

2

> Fédération suisse des avocats; Société suisse de Droit pénal (Comité); Juristes démocrates de Suisse; Fédération des Eglises protestantes de la Suisse; Conférence des évêques suisses; Eglise catholique-chrétienne de la Suisse; Fédération suisse des communautés israélites; Alliance de sociétés féminines suisses; Fédération suisse des femmes protestantes; Lique suisse des femmes catholiques; Société d'utilité publique des femmes suisses; Commission fédérale pour les questions féminines; Commission fédérale pour la jeunesse; Pro Juventute; Association suisse des assistants sociaux et éducateurs diplômés; Organisation suisse des homophiles; Coordination Homosexuelle Suisse; Tribunal militaire de cassation.

3

> Cf. p. ex. Rehbefg, Strafrecht III, Zurich 1983, p. 3.

4

> Binder, Der juristische und psychiatrische Massstab bei der Beurteilung der Tötungsdelikte, Revue pénale suisse, 67 (1952), p. 313 ss et 324 ss.

v BÖ N 1979 34 s; E 1979 250 s; FF 1983 II 26, eh. 722.

6

> Revue suisse de jurisprudence 51, 1955, p. 141 n° 96; Ammon, Betschart, Corboz not., Kindsmisshandlung, Diessenhofen 1983.

7

> Cf. p. ex. § 227 code pénal allemand; § 91 code pénal autrichien.

B

) Revue suisse de jurisprudence 78, 1982, p. 252, note 41.

9) Cf. FF 1984 III 21.

10

> Reinhardt Heinz, Die Bestrafung der Unzucht mit Kindern unter besonderer Berücksichtigung des Verhaltens und der Persönlichkeit des Opfers, thèse Berne 1967, p. 46 ss.

1

') Parmi les législations étrangères concernant la limite d'âge voir notamment: § 176 du code pénal allemand: 14 ans; article 331 du code pénal français: 15 ans; articles 245/247 du code pénal néerlandais: 16 ans; §§ 206-208 du code pénal autrichien: 14 ans; 6e chapitre, §§ 3, 6, 1er al., du code pénal suédois: 15 ans.

1118

12

> Jenny Guido, Angriffe auf die sexuelle Freiheit: Art. 187 und 188 StGB, thèse Bàie 1975, p. 172 ss.

I3)

I4

Girardin Michel, Les dispositions de l'article 191 CP et la jurisprudence qui s'y rapporte sont-elles encore en harmonie avec la notion actuelle de la morale et des bonnes moeurs? Revue pénale suisse, 86 (1970), p. 207.

> Stratenwerth, Schweiz. Strafrecht BT II § 24 note marginale 14.

5

i ) Gartmann H,, Zur Praxis der psychiatrischen Begutachtung Schwachsinniger gemäss Art. 190 StGB, Revue pénale suisse 67 (1952), p. 101.

16

> Cf. à ce sujet également Bûcher, Commentaire bernois, droit des personnes, 1976, n° 3, 6, 67 ss, 87 ad art. 16 CC.

I7)

Jenny, op. cit., p. 177, note 1.

18

> Peter Strasser, Die öffentlichen unzüchtigen Handlungen nach Schweiz. Strafrecht, Art. 203 StGB, thèse Berne 1951, p. 46; Stratenwerth, Schweiz. Strafrecht, op. cit.

§ 27 note marginale 6.

I9

> Schultz, ad ATF 89 IV 129, Revue de la société des juristes bernois 101 (1965), p. 29.

2

°) Lenckner ad § 183 code pénal allemand, note marginale 3 dans le commentaire Schönke-Schröder, 21« éd. (1982).

21)

Jürg Schaufelberger, Die öffentlichen unzüchtigen Handlungen, Eine kriminologische Darstellung unter besonderer Berücksichtigung der in den Jahren 1967/68 im Kanton Zürich strafrechtlich beurteilten Fälle, thèse Zurich 1973, p. 100 ss.

22)

Schaufelberger, op. cit., p. 154/55; s'agissant entre autres de la castration chimique, cf. également Revue suisse de jurisprudence 65 (1969), p. 71.

23

> LStup art. 19a ch. 3: «II est possible de renoncer à la poursuite pénale lorsque l'auteur de l'infraction est déjà soumis, pour avoir consommé des stupéfiants, à des mesures de protection contrôlées par un médecin, ou s'il accepte de s'y soumettre. La poursuite pénale sera engagée, s'il se soustrait à ces mesures.»

24

' Hafter, Lehrbuch des Schweiz. Strafrechts, Bes. Teil, p. 147/148; Stratenwerth, op.

cit., § 26 notes marginales 53/54; Schultz, ad ATF 105 IV 197, Revue de la société des juristes bernois, 117 (1981), p. 33; Schultz, Die Revision des Schweiz.

Sexualstrafrechts, Revue suisse de jurisprudence 78 (1982), p. 252.

«i Code pénal de la RFA, §§ 180a, Förderung der Prostitution, et \Sla, Zuhälterei, tous deux insérés dans le titre concernant les «Straftaten gegen die sexuelle Selbstbestimmung», et d'Autriche, §§ 213-215.

26)

Cf. les protocoles de l'ONU du 12 nov. 1947 concernant les conventions internationales ratifiées par la Suisse sur - une protection efficace contre la traite des blanches (18 mai 1904; sans obligation d'édicter des dispositions pénales; RS 0.311.31) - la répression de la traite des blanches (4 mai 1910; RS 0.311.32) - la suppression de la traite des femmes et des enfants (30 sept, 1921 ; convention additionnelle de la Société des Nations qui élargit la répression de la traite des enfants de l'un et l'autre sexe et qui fixe l'âge limite à 21 ans; RS 0.311.33) - la répression de la traite des femmes majeures (11 oct. 1933; RS 0.311.34) La Convention des Nations Unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui qui doit remplacer lesdites conventions n'a pas été ratifiée (21 mars 1950).

La loi fédérale du 30 sept. 1925 concernant la répression de la traite des femmes

1119

et des enfants a été édictée dans le but de ratifier les conventions de 1910 et 1921 (cf. art. 398, 2= al., let. m, CP).

-7> Hanack, Gutachten zum 47. Deutschen Juristentag 1968, p. 240.

2S 29

> Lenckner, ad § 184 du code pénal allemand, note marginale 4, op. cit.

> République fédérale d'Allemagne La diffusion de publications pornographiques (pornographie «douce») y est réprimée dans certains cas cnumérés au § 184, 1er alinéa, du code pénal. La fabrication eet la diffusion de la pornographie «dure» est punissable dans tous les cas (§ 184, 3 al., du code pénal). La pornographie «dure» s'entend des publications pornographiques ayant pour contenu des actes de violence, des actes sexuels avec des enfants ou des animaux.

La loi du 29 avril 1961 sur la diffusion de publications dangereuses pour la jeunesse prescrit l'établissement d'une liste de toutes les publications qui, du point de vue moral, présentent un danger pour les entants et les adolescents. Il s'agit surtout de publications immorales, poussant à la brutalité et excitant à la violence. Les enregistrements sonores ou visuels, ainsi que les illustrations ou autres représentations sont assimilés aux publications et il est interdit, s'ils figurent sur la liste, de les diffuser ou d'en faire publicité.

L'établissement de ladite liste est confié à une commission fédérale, chargée précisément de la surveillance et du contrôle des publications destinées à la jeunesse.

France La commercialisation par voie de presse d'oeuvres à caractère pornographique est en règle générale réprimée par une peine d'emprisonnement de un mois à deux ans et par une amende de 360 à 30 000 FF (art. 283 du code pénal).

Avant d'ouvrir une poursuite pénale cependant, le parquet tient compte de l'évolution des moeurs, si bien que cette disposition n'est plus appliquée que dans le cas d'oeuvres à caractère pornographique mettant en scène des enfants ou des actes de bestialité.

Le Ministère de l'Intérieur peut toutefois limiter la diffusion d'oeuvres à caractère pornographique notamment en interdisant toute publication et toute vente aux mineurs de moins de 18 ans.

Toute insertion pornographique est par ailleurs interdite dans les publications qui, de par leur contenu, sont avant tout destinées aux adolescents et aux enfants.

La loi du .30 décembre 1975 prévoit une réglementation spéciale pour les films pornographiques: la taxe à la valeur ajoutée est augmentée, l'importation frappée d'un impôt spécial et toute subvention de l'Etat est exclue pour le producteur du film et le propriétaire de la salle de cinéma. Une commission de
surveillance classe les films d'après un critère objectif, selon lequel tout film montrant un acte d'ordre sexuel non simulé, notamment des scènes de coït, est qualifié de pornographique.

Le droit français ne connaît pas la notion de pornographie douce.

Pays-Bas Les articles 240 et 240his du code pénal néerlandais répriment la diffusion de la pornographie. Ces dispositions ne distinguent pas entre la pornographie dure ou douce. Une nouvelle réglementation est en préparation depuis 1979. Le projet de loi, qui n'a pas encore été accepté par le Parlement, prévoit de limiter la punissabilité de la pornographie à la confrontation inopinée avec des illustrations et des objets à caractère pornographique, ainsi qu'à la distribution de ceux-ci aux jeunes de moins de 16 ans.

Autriche La pornographie n'y est en principe pas libre, mais soumise aux dispositions pénales de la loi sur la pornographie qui date de 1950. Alors que ces dispositions parlent simplement de «publications, d'illustrations, d'enregistrements visuels ou

1120

d'autres objets contraires à la pudeur», la Cour suprême a interprété la notion d'impudicité de manière de plus en plus restrictive. C'est ainsi que, depuis près de dix ans, la «pornographie simple» n'est plus considérée comme punissable et poursuivie en tant que telle, mais n'est réprimée qu'à certaines conditions déterminées afférentes notamment à son importunile et à la protection de la jeunesse (p. ex. en cas de commercialisation dans les supermarchés - mais pas dans les sexshops - et de représentations sexuelles obscènes montrées pour elles-mêmes, c'est-à-dire sorties du contexte des relations humaines). La jurisprudence considère par ailleurs comme contraire à la pudeur, au sens du § 1 de la loi sur la pornographie, les illustrations et autres supports qui montrent des actes d'ordre sexuel avec des enfants ou qui sont combinés à des actes de violence ou d'homosexualité, sans qu'elle les qualifie formellement de «pornographie dure».

Suède La pornographie n'y est pas totalement libre. Les représentations pornographiques impliquant des enfants sont interdites. Le § 10a du chapitre seizième du code pénal suédois dispose: «Celui qui représente un enfant dans une scène pornographique dans le dessein de diffuser cette représentation, ou celui qui diffuse une telle représentation, se rend coupable du délit de pornographie impliquant des enfants et sera, sous réserve de faits justificatifs, puni d'une peine d'amende ou d'emprisonnement pour six mois au plus».

Le § 11 du chapitre seizième contient également une disposition selon laquelle: «Celui qui expose des représentations pornographiques dans un lieu public, une vitrine ou par un procédé analogue, d'une manière propre a provoquer le scandale, se rend coupable d'exposition illicite de représentations pornographiques et sera puni d'une peine d'amende ou d'emprisonnement pour six mois au plus. Celui qui envoie par la poste ou de toute autre manière des représentations pornographiques à une personne qui ne les a pas demandées sera puni de la même peine».

30

> République fédérale d'Allemagne: § 183a du code pénal, «Erregung öffentlichen Ärgernisses»; Autriche: § 218 du code pénal, «Öffentliche unzüchtige Handlungen»; Italie: art. 527 du code pénal «atti osceni» et art. 726 (contraventions de police) «atti contrari alla pubblica decenza. Turpiloquio»; France: art. 330 du code pénal, section «attentats aux moeurs».

-1" Art. 33, let. d, de l'ordonnance du 13 nov. 1962 sur les règles de la circulation routière (RS 741.11); ATF 91 IV 151 consid. le.

1121

Code pénal suisse Code pénal militaire

Projet A

(Infractions contre la vie et l'intégrité corporelle et contre la famille) Modification du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 26 juin 19851', arrête:

Le code pénal suisse2' est modifié comme il suit:

Exemption de poursuite ou de peine

Assassinat

Meurtre passionnel

Art 66b's (nouveau) 1 Si l'auteur a été atteint directement par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée, l'autorité compétente renoncera à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

2 Dans les mêmes circonstances, le sursis ou la libération conditionnelle ne seront pas révoqués.

Art. 112 Si le délinquant a tué avec une absence particulière de scrupules, notamment si son mobile, son but ou sa façon d'agir est hautement répréhensible, il sera puni de la réclusion à vie ou de la réclusion pour dix ans au moins.

Art. 113 Si le délinquant a tué alors qu'il était en proie à une émotion violente que les circonstances rendaient excusable, ou qu'il ait été au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement pour un à cinq ans.

"FF 1985 II1021 >RS3U.O

2

1122

CP/CPM

Meurtre sur tovTMmedede

Art. 114 Celui qui, cédant à un mobile honorable, notamment à la P^ié, aura donné la mort à une personne sur la demande sérieuse et instante de celle-ci sera puni de l'emprisonnement.

infanticide

Art 116 La mère qui aura tué son enfant pendant l'accouchement ou alors qu'elle se trouvait encore sous l'influence de l'état puerpéral sera punie de l'emprisonnement.

Art 122, ch. 2 Abrogé

Lésions corporelles simples

Art. 123 1, Celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement.

Dans les cas de peu de gravité, le juge pourra atténuer librement la peine (art. 66).

2. La peine sera l'emprisonnement et la poursuite aura lieu d'office, si le délinquant a fait usage du poison, d'une arme ou d'un objet dangereux, s'il s'en est pris à une personne hors d'état de se défendre ou à une personne, notamment à un enfant, dont il avait la garde ou sur laquelle il avait le devoir de veiller.

Art. 124 et 125, 2e ai Abrogés Art 126, 2e al. (nouveau) 2 La poursuite aura lieu d'office si le délinquant a agi à réitérées reprises contre une personne, notamment contre un enfant, dont il avait la garde ou sur laquelle il avait le devoir de veiller.

1123

CP/CPM

4, Mise en danger de la vie ou de la santé cf autrui.

Exposition

Omission de prêter secours

Art. 127 Celui qui, ayant la garde d'une personne hors d'état de se protéger elle-même ou le devoir de veiller sur elle, l'aura exposée à un danger de mort ou à un danger grave et imminent pour la santé, ou l'aura abandonnée en un tel danger, sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

Art. 128 Celui qui n'aura pas prêté secours à une personne qu'il a blessée ou n'aura pas secouru une personne en danger de mort imminent, alors que d'après les circonstances cela pouvait être raisonnablement exigé de lui, celui qui aura empêché un tiers de prêter secours ou l'aura entravé dans l'accomplissement de ce devoir, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 129 Mise en danger Celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort d-aumif imminent sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

Art. 130 à 132 Abrogés

Rixe

Agression

Représentations de la violence

1124

Art. 133 ' Celui qui aura pris part à une rixe ayant entraîné la mort d'une personne ou une lésion corporelle sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 N'est pas punissable celui qui se sera borné à repousser une attaque, à défendre autrui ou à séparer les combattants.

Art. 134 Celui qui aura participé à l'agression d'une ou plusieurs personnes au cours de laquelle l'une d'entre elles aura trouvé la mort ou subi une lésion corporelle sera puni de l'emprisonnement pour cinq ans au plus.

An. 135 1 Celui qui aura fabriqué, importé ou pris en dépôt, mis en circulation, promu, exposé, offert, montré, rendu accessibles ou

CP/CPM mis à disposition des écrits, des enregistrements sonores ou visuels, des images, d'autres objets ou des représentations illustrant avec insistance des actes de cruauté envers des hommes ou des animaux, sans aucune valeur d'ordre culturel ou scientifique digne de protection, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2 Les objets seront confisqués.

3 Si l'auteur a agi dans un dessein de lucre, la peine sera l'emprisonnement et l'amende.

Procurer à des enfants des substances dangereuses pour la santé

inceste

Art. 136 Celui qui aura procuré à un enfant de moins de seize ans, ou aura laissé à sa disposition une quantité de boissons alcooliques ou d'autres substances propre à mettre en danger la santé, ou des stupéfiants au sens de la loi fédérale du 3 octobre 1951'> sur les stupéfiants, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Art. 213 ' L'acte sexuel entre ascendants et descendants, ou entre frère et soeur germains, consanguins ou utérins, sera puni de l'emprisonnement.

2 Les mineurs n'encourront aucune peine s'ils ont été séduits.

3 L'action pénale se prescrit par deux ans.

Art. 214 Abrogé

Bigamie

An. 215 Celui qui, étant marié, aura contracté un nouveau mariage, celui qui aura contracté mariage avec une personne mariée, sera puni de l'emprisonnement.

Art. 216 Abrogé

»RS 812.121

1125

CP/CPM Art. 217 Violation d'une obligation d'entretien

1 Celui qui n'aura pas fourni les aliments ou les subsides qu'il doit en vertu du droit de la famille, quoiqu'il en eût les moyens ou pût les avoir, sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement.

2 Le droit de porter plainte appartient aussi aux autorités et aux services désignés par les cantons.

Art. 218 Abrogé

Violation du devoir d'assistance ou d'éducation

Art. 219 1 Celui qui aura violé son devoir d'assister ou d'élever une personne mineure dont il aura ainsi mis en danger le développement physique ou psychique, ou qui aura manqué à ce devoir, sera puni de l'emprisonnement.

2 Si le délinquant a agi par négligence, la peine pourra être l'amende au lieu de l'emprisonnement.

Art. 220

Enlèvement démineur

Celui qui aura soustrait ou refusé de remettre un mineur à la personne qui exerce l'autorité parentale ou la tutelle sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Titre quatrième1"5: Avis concernant des infractions commises à l'encontre de mineurs (nouveau) Art. 358bis Obligation d'aviser

.

Lorsque, au cours d'une poursuite relative à des infractions commises à l'encontre de mineurs, il est constaté que d'autres mesures s'imposent, l'autorité tutélaire sera immédiatement avisée.

Art. 358ler

Droit d'aviser

1126

Les personnes astreintes au secret professionnel ou de fonction (art. 320 et 321) peuvent, dans l'intérêt des mineurs, signaler à l'autorité tutélaire les infractions commises à l'encontre de ces derniers.

CP/CPM II

Le code pénal militaire" est modifié comme il suit:

Exemption de poursuite ou de peine

Assassinat

Art. 47a 1 Si l'auteur a été atteint directement par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée, il y a lieu de renoncer à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

2 Dans les mêmes circonstances, le sursis ou la libération conditionnelle ne seront pas révoqués.

Art. 116 Si le délinquant a tué avec une absence particulière de scrupules, notamment si son mobile, son but ou sa façon d'agir est hautement répréhensible, il sera puni de la réclusion à vie ou de la réclusion pour dix ans au moins.

Art. 117

Meurtre passionnel

Meurtre sur La demande de la victime

Si le délinquant a tué alors qu'il était en proie à une émotion violente que les circonstances rendaient excusable, ou qu'il ait été au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement pour un à cinq ans.

Art, 118 Celui qui, cédant à un mobile honorable, notamment à la pitié, aura donné la mort à une personne sur la demande sérieuse et instante de celle-ci sera puni de l'emprisonnement.

Art. 12] (Ne concerne que le texte allemand) Art. 122, ch. 2 et 3, 123, 125 à 127 Abrogés

Rixe

An. 128 1 Celui qui aura pris part à une rixe ayant entraîné la mort

» RS 321.0

1127

CP/CPM d'une personne ou une lésion corporelle sera puni de l'emprisonnement QU de l'amende.

2 N'est pas punissable celui qui se sera borné à repousser une attaque, à défendre autrui ou à séparer les combattants.

3 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

Agression lll clte '

Art. 128a (nouveau) ' Celui qui aura participé, sans droit, à l'agression d'une ou plusieurs personnes au cours de laquelle l'une d'entre elles aura trouvé la mort ou subi une lésion corporelle sera puni de l'emprisonnement pour cinq ans au plus.

2 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

III La loi fédérale sur les douanes1' est modifiée comme il suit: Art. 36, 4L' al.

4

Si, lors de la vérification, des objets sont découverts, qui comportent des représentations punissables pornographiques ou d'actes de violence (art.

135 et 197, en. 3, CP2)) et qui, pour cette raison, sont selon toute vraisemblance sujets au séquestre, ils seront saisis provisoirement et transmis au ministère public du canton dans lequel le destinataire de l'envoi a son domicile ou son siège ou au ministère public du for. Les films pour lesquels il existe une autorisation d'importation ne sont pas soumis à cette mesure provisoire. Le séquestre ne pourra être confirmé que par les autorités de poursuite pénale compétentes en vertu du droit cantonal de procédure. Le recours contre des mesures prises par l'administration des douanes est exclu.

IV

Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est sujette au référendum facultatif.

2 Le Conseil fédéral fixe la date de son entrée en vigueur.

" RS 631.0 2

> RS 311.0; RO . . .

1128

30071

Code pénal suisse Code pénal militaire

Projet B

(Infractions d'ordre sexuel) Modification du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 26 juin 1985", arrête: I

Le code pénal suisse2* est modifié comme il suit: Art. 110, ch.l Abrogé

Titre cinquième: Infractions d'ordre sexuel

1. Mise en danger du développement de mineurs.

Actes d'ordre sexuel avec des enfants

Art, 7S7(191) 3) 1. Celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins de 16 ans, celui qui aura entraîné un enfant de cet âge à commettre un acte d'ordre sexuel, celui qui aura mêlé un enfant de cet âge à un acte d'ordre sexuel, sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

2. Si, au moment de l'acte, l'auteur avait moins de 18 ans, ou s'il a contracté mariage avec la victime, l'autorité compétente pourra renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

3. La peine sera l'emprisonnement si le délinquant a agi en admettant par erreur que sa victime était âgée de 16 ans au moins alors qu'en usant des précautions voulues il aurait pu éviter l'erreur.

4. L'action pénale se prescrit par deux ans.

"FF 1985 II 1021 > RS 311.0 3 > Les articles entre parenthèses renvoient aux articles actuels du CP.

J

1129

CP/CPM

Actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes

2. Atteinte à la liberté et à l'honneur sexuels.

Viol

Contrainte à un autre acte d'ordre sexuel

Actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance

1130

Art. 188 (192) 1. Celui qui, profitant de rapports d'éducation ou de confiance, ou de liens de dépendance d'autre nature, aura commis un acte d'ordre sexuel sur un mineur âgé de plus de 16 ans, celui qui, profitant de liens de dépendance, aura entraîné une telle personne à commettre un acte d'ordre sexuel, sera puni de l'emprisonnement.

2. Si l'auteur a contracté mariage avec la victime, l'autorité compétente pourra renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

3. L'action pénale se prescrit par deux ans.

Art. 759(187, 195) 1 Celui qui, usant de violence ou de menace grave, ou ayant mis une personne du sexe féminin hors d'état de résister, l'aura contrainte à l'acte sexuel hors mariage, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus.

2 S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

3 Si l'auteur a agi avec cruauté, notamment s'il a fait usage d'une arme à feu ou d'une autre arme dangereuse, la peine sera la réclusion pour trois ans au moins.

Art. 790(188, 195) 1 Celui qui, usant de violence ou de menace grave, ou ayant mis autrui hors d'état de résister, l'aura contraint à un autre acte d'ordre sexuel, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement.

2 S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

3 Si l'auteur a agi avec cruauté, notamment s'il a fait usage d'une arme à feu ou d'une autre arme dangereuse, la peine sera la réclusion pour trois ans au moins.

Art. 797 (189, 190) 1 Celui qui, sachant qu'une personne est incapable de discernement ou de résistance, en aura profité pour commettre sur elle un acte d'ordre sexuel sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

CP/CPM 2

S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

Actes d'prdre sexuel avec des personnes hospitalisées, détenues ou prévenues

Abus de la détresse

Exhibitionnisme

3. Exploitation de l'activité sexuelle.

Encouragement à la prostitution

Art. 192 (193) 1 Celui qui, profitant du rapport de dépendance, aura commis un acte d'ordre sexuel sur une personne hospitalisée, internée, détenue, arrêtée ou prévenue, ou l'aura incitée à commettre un tel acte, sera puni de l'emprisonnement.

2 Si l'auteur a contracté mariage avec la victime, l'autorité compétente pourra renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

Art. 193(194, 197) ' Celui qui, profitant de la détresse profonde où se trouve la victime, aura déterminé celle-ci à commettre ou à subir un acte d'ordre sexuel, sera puni de l'emprisonnement.

2 Si l'auteur a contracté mariage avec la victime, l'autorité compétente pourra renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

Art. 194 (203) 1 Celui qui se sera exhibé sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou de l'amende.

2 Si le délinquant se .soumet à un traitement médical, la procédure pourra être suspendue. Elle sera reprise si le délinquant se soustrait au traitement.

3 L'action pénale se prescrit par deux ans.

An. 195 (198 à 201) 1 Celui qui aura poussé à se prostituer ou maintenu dans cet état une personne mineure, ou qui à cette fin aura profité de la dépendance d'autrui, sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

2 Est passible des mêmes peines celui qui, pour en tirer profit, aura poussé autrui à se prostituer ou l'aura maintenu dans cet état, ou aura porté atteinte à la liberté d'action d'une personne s'adonnant à la prostitution en la surveillant dans ses activités ou en lui imposant l'endroit, l'heure, la fréquence ou autres circonstances de celles-ci.

1131

CP/CPM

Traile d'êires humains

4. Pornographie

5. Contraventions dans le domaine sexuel.

Désitgiêiu tilts causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel

1132

An. 196 (202) 1 Celui qui, pour satisfaire les passions d'autrui, se sera livré à la traite d'êtres humains, sera puni de la réclusion ou de l'emprisonnement pour six mois au moins.

2 Celui qui aura pris des dispositions en vue de la traite d'êtres humains, sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement, 3 Dans tous les cas, le délinquant sera puni en outre de l'amende.

An. 197(204, 212) 1. Celui qui aura offert, montré, rendu accessibles à une personne de moins de 16 ans, ou mis à sa disposition des écrits, enregistrements sonores ou visuels, images ou d'autres objets de ce genre ou des représentations pornographiques, ou les aura diffusés à la radio ou à la télévision, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

2. Celui qui aura exposé ou montré en public des objets ou des représentations visés au chiffre 1, ou les aura offerts à une personne qui n'en voulait pas, sera puni de l'amende.

Concernant les représentations cinématographiques, les cantons peuvent édicter des dispositions plus restrictives.

3. Celui qui aura fabriqué, importé, pris en dépôt, mis en circulation, promu, exposé, offert, montré, rendu accessibles ou mis à disposition des objets ou représentations au sens du chiffre 1, ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Les objets seront confisqués.

4. Si l'auteur a agi dans un dessein de lucre, la peine sera l'emprisonnement et l'amende.

Art. 198 (203, 205) Celui qui aura causé du scandale en se livrant à un acte d'ordre sexuel, en présence d'une personne qui y aura été inopinément confrontée, celui qui aura importuné, par des attouchements d'ordre sexuel, une personne qui n'y avait pas donné prétexte, sera, sur plainte, puni des arrêts ou de l'amende.

CP/CPM

Exercice illicite de la prostitution

6, Commission en commun

An. 199 (206 à 210) 1 Les cantons peuvent édicter des dispositions qui, sous la menace de la peine prévue au présent article, réglementent les lieux, heures et modes de l'exercice de la prostitution et qui sont destinées à lutter contre ses manifestations secondaires fâcheuses. Ils peuvent déléguer cette compétence aux communes.

2 Celui qui aura enfreint ces .dispositions sera puni des arrêts ou de l'amende.

Art. 200 Lorsque l'auteur d'une infraction prévue dans le présent titre aura agi en commun avec une ou plusieurs personnes, le juge pourra augmenter la durée de la peine, mais pas au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il sera, en outre, lié par le maximum légal du genre de peine.

Art. 20] à 212 Abrogés^

Art. 358 Avis concernant Lorsqu'une autorité d'instruction constate que des objets poria pornographie nographiques (art. 197, en. 3) ont été fabriqués sur le territoire d'un Etat étranger ou qu'ils ont été importés, elle en informera immédiatement le service central institué par le Ministère public fédéral en vue de la répression de la pornographie.

II Le code pénal militaire2' est modifié comme il suit: Chapitre douzième: Infractions d'ordre sexuel

Art. 153 ' Celui qui, usant de violence ou de menace grave, ou ayant mis une personne du sexe féminin hors d'état de résister, l'aura contrainte à l'acte sexuel hors mariage, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus.

vioi

') Ces dispositions abrogées (à l'exception de l'art. 211) sont remplacées par les articles 195, 196, 197, 198, 199 (cf. commentaire au ch. 23 du message). L'article 211 est biffé sans être remplacé.

« RS 321.0 > 76

Feuille fédérale. 137^ année. Vol. Il

1133

CP/CPM 2

S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

3 Si l'auteur a agi avec cruauté, notamment s'il a fait usage d'une arme à feu ou d'une autre arme dangereuse, la peine sera la réclusion pour trois ans au moins.

Contrainte à un autre acte d'ordre sexuel

Art. 154 1 Celui qui, usant de violence ou de menace grave, ou ayant mis autrui hors d'état de résister, l'aura contraint à un autre acte d'ordre sexuel, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement.

2 S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

3 Si l'auteur a agi avec cruauté, notamment s'il a fait usage d'une arme à feu ou d'une autre arme dangereuse, la peine sera la réclusion pour trois ans au moins.

Art. 155 Actes d'ordre ' Celui qui, sachant qu'une personne est incapable de discernesurUuneCTMTMn- ment ou de résistance, en aura profité pour commettre sur elle ne incapable de un acte d'ordre sexuel sera puni de la réclusion pour cinq ans discernement ou j i, de résistance au plus ou de 1 emprisonnement.

2 S'il existe entre l'auteur et la victime des rapports personnels qui rendent l'acte moins grave, la peine sera l'emprisonnement.

Actes d'ordre sexuel avec des enfants

1134

Art. 156 1. Celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins de 16 ans, celui qui aura entraîné un enfant de cet âge à commettre un acte d'ordre sexuel, celui qui aura mêlé un enfant de cet âge à un acte d'ordre sexuel, sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.

2. Si, au moment de l'acte, l'auteur avait moins de 18 ans, ou s'il a contracté mariage avec la victime, l'autorité compétente pourra renoncer à le poursuivre, à le renvoyer devant le tribunal ou à lui infliger une peine.

CP/CPM 3. La peine sera l'emprisonnement si le délinquant a agi en admettant par erreur que sa victime était âgée de 16 ans au moins alors qu'en usant des précautions voulues il aurait pu éviter l'erreur.

4. L'action pénale se prescrit par deux ans.

Actes d'ordre sexuel avec des personnes du même sexe

Art. 157 1. Celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel avec une personne du même sexe sera puni de l'emprisonnement.

L'infraction sera punie disciplinai rement si elle est de peu de gravité.

2. Celui qui, profitant de sa situation militaire, aura fait subir ou commettre à une personne du même sexe un acte d'ordre sexuel, sera puni de l'emprisonnement pour un mois au moins.

Art. 158 Abrogé

Art. 159 Exhibitionnisme ' Celui qui se sera exhibé sera puni de l'emprisonnement pour six mois au plus ou de l'amende.

2 Si le délinquant se soumet à un traitement médical, la procédure pourra être suspendue. Elle sera reprise si le délinquant se soustrait au traitement.

3 L'action pénale se prescrit par deux ans.

4 L'infraction sera punie disciplinairement si elle est de peu de gravité.

Commission en commun

Art. 159a (nouveau) Lorsque l'auteur d'une infraction prévue dans le présent titre aura agi en commun avec une ou plusieurs personnes, le juge pourra augmenter la durée de la peine, mais pas au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il sera, en outre, lié par le maximum légal du genre de peine.

1135

CP/CPM III

La loi fédérale sur les douanes0 est modifiée comme il suit: Art. 36, 4e al.

4

Si, lors de la vérification, des objets sont découverts, qui comportent des représentations punissables pornographiques ou d'actes de violence (art.

135 et 197, ch. 3 CP2)) et qui, pour cette raison, sont selon toute vraisemblance sujets au séquestre, ils seront saisis provisoirement et transmis au ministère public du canton dans lequel le destinataire de l'envoi a son domicile ou son siège ou au ministère public du for. Les films pour lesquels il existe une autorisation d'importation ne sont pas soumis à cette mesure provisoire. Le séquestre ne pourra être confirmé que par les autorités de poursuite pénale compétentes en vertu du droit cantonal de procédure. Le recours contre des mesures prises par l'administration des douanes est exclu.

IV

Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est sujette au référendum facultatif.

2 Le Conseil fédéral fixe la date de son entrée en vigueur.

30071

"RS 631.0 > RS 311.0; RO .

2

1136

Code pénal militaire

Projet c

(Répression disciplinaire de la petite consommation de stupéfiants) Modification du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 26 juin 1985", arrête: I

Le code pénal militaire2' est modifié comme il suit:

1

Art. 218, 4e al.

"Est aussi soumis à la juridiction militaire celui qui, sans droit, pendant le service, aura consommé intentionnellement ou possédé des quantités minimes de stupéfiants au sens de l'article premier de la loi fédérale du 3 octobre 19513) sur les stupéfiants (LStup) ou qui, pour assurer sa propre consommation, aura contrevenu à l'article 19 LStup, L'auteur sera puni disciplinairement.

Art. 219, 1" al 1 Sous réserve de l'article 218, 3e et 4e alinéas, les personnes soumises au droit pénal militaire restent justiciables des tribunaux ordinaires pour les infractions non prévues par le présent code.

II

Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est sujette au référendum facultatif.

2 Le Conseil fédéral fixe la date de son entrée en vigueur.

.10071

"FF 1985 II 1021 v3 RS 321.0

> RS 812.121

1137

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire (Infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, les moeurs et la famille) du 26 juin 1985

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1985

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35

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85.047

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

10.09.1985

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1021-1137

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